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Monsieur François Moriconi- Ebrard Les 100 plus grandes villes du monde In: Economie et statistique, N°245, Juillet-Août 1991. pp. 7-18. Citer ce document / Cite this document : Moriconi-Ebrard François. Les 100 plus grandes villes du monde. In: Economie et statistique, N°245, Juillet-Août 1991. pp. 7-18. doi : 10.3406/estat.1991.5591 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1991_num_245_1_5591

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Monsieur François Moriconi-Ebrard

Les 100 plus grandes villes du mondeIn: Economie et statistique, N°245, Juillet-Août 1991. pp. 7-18.

Citer ce document / Cite this document :

Moriconi-Ebrard François. Les 100 plus grandes villes du monde. In: Economie et statistique, N°245, Juillet-Août 1991. pp. 7-18.

doi : 10.3406/estat.1991.5591

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1991_num_245_1_5591

ResumenLas cien más grandes dudades del mundo - La definiciones oficiales del término ciudad sonextremadamente diversas de un país a otro. Para hacer trente a esta diversidad, se puede aplicar demanera sistemâtica un criterio ûnico, a saber, et de la continuidad de las construcciones. Teniendo encuenta dicho criterio, Mexico no sería la ciudad más poblada del mundo, llega a ocupar el cuarto puestodetrás de Tokyo, la conurbanización de Nueva York-Filadelfia, la ciudad más extensa del planeta, ySan Pablo.Redefinidas de este modo, las cien ciudades más pobladas del mundo reúnen diez veces la poblaciónde Francia en una superficie que representa la mitad de su territorio. En otros términos, el 11% de lapoblación mundial se concentra en dos milésimos de las tierras que emer- gen en el globo. De estas100 ciudades, 44 se encuentran en Asia, 30 en America, 15 en Europa, 9 en Africa y 2 en Oceanía.Desde 1950, estas "grandes ciudades" registraron un crecimiento excepcional : su población se triplicó,en el mismo período, la población mundial se duplicó. Dicho crecimiento fue más fuerte en la zonatropical. En particular, la población de Abidjan se multiplicó por 35 y la de Lagos por 30. En el otroextreme, Londres es la única de las cien más grandes ciudades del mundo que registró unadisminución de su población en el transcurso de los últimos 40 años.

RésuméLes définitions officielles des villes sont extrêmement diverses d'un pays à l'autre. Pour surmonter cettediversité, on peut appliquer de manière systématique un critère unique : celui de la continuité desconstructions. Alors, Mexico n'est pas la ville la plus peuplée du monde. Elle n'arrive qu'au quatrièmerang derrière Tokyo, la conurbation de New-York-Philadelphie, qui est la ville la plus étendue de laplanète, et Sao-Paulo.Ainsi redéfinies, les 100 villes les plus peuplées rassemblent dix fois la population de la France sur unesurface représentant la moitié de son territoire. En d'autres termes, 1 1 % de la population mondiale seconcentre sur 2 millièmes des terres émergées du globe. Parmi ces 100 villes, 44 se trouvent en Asie,30 en Amérique, 15 en Europe, 9 en Afrique et 2 en Océanie.Depuis 1950, ces très grandes villes ont connu une croissance exceptionnelle : leur population a tripléalors que la population mondiale doublait. Cette croissance fut la plus forte dans la zone tropicale. Enparticulier, la population d'Abidjan a été multipliée par 35 et celle de Lagos par 30. A l'autre extrême,Londres est la seule des 100 plus grandes villes du monde qui ait vu sa population baisser au cours des40 dernières années.

AbstractThe Hundred Biggest Cities in the World - The official definitions of cities vary considerably from onecountry to another. To overcome this diversity, one can systematically apply a single criterion: that of thecontinuity of built-up areas. Then, Mexico is no longer the most peopled city in the world. It only comesfourth after Tokyo, the New-York/Philadelphia conurbation, which is the most spread-out city on theplanet, and Sao-Paulo.Thus redefined, the one hundred most peopled cities have ten times the population of France in an areawhich is half its territory. In other words, 1 1 % of the world's population, is concentrated on 2thousandth of the exposed land on the globe. Among these 100 cities, 44 are located in Asia, 30 inAmerica, 15 in Europe, 9 in Africa and 2 in Oceania.Since 1950, these very large cities have grown exceptionally fast: their population tripled while theworld's population doubled. This growth was highest in the tropical zone. In particular, the Abidjanpopulation multiplied 35fold and that of Lagos, 30fold. At the other extreme, London is the only cityamong the one hundred biggest cities in the world for which the population has dropped over the lastforty years.

VILLES

Les 100 plus grandes villes du monde

François Les définitions officielles des villes sont extrêmement diverses d'un pays à l'autre. Moriconi- Pour surmonter cette diversité, on peut appliquer de manière systématique un Ebrard* critère unique : celui de la continuité des constructions. Alors, Mexico n'est pas la ville la plus peuplée du monde. Elle n'arrive qu'au quatrième rang derrière Tokyo, la conurbation de'New-York~Philadelphie, qui est la ville la plus étendue de la planète, et Sao-Paulo.

Ainsi redéfinies, les 100 villes les plus peuplées rassemblent dix fois la population de la France sur une surface représentant la moitié de son territoire. En d'autres termes, 11 % de la population mondiale se concentre sur 2 millièmes des terres émergées du globe. Parmi ces 100 villes, 44 se trouvent en Asie, 30 en Amérique, 15 en Europe, 9 en Afrique et 2 en Océanie.

Depuis 1950, ces très grandes villes ont connu une croissance exceptionnelle : leur population a triplé alors que la population mondiale doublait. Cette croissance fut la plus forte dans la zone tropicale. En particulier, la population d'Abidjan a été multipliée par 35 et celle de Lagos par 30. A l'autre extrême, Londres est la seule des 100 plus grandes villes du monde qui ait vu sa population baisser au cours des 40 dernières années.

* François Moriconi- Ebrard est allocataire de recherche au CNRS, équipe P.A.R.LS. Cette étude exploite la base de données GEO- POLIS qui fait l'objet d'une thèse de doctorat sous la direction de Denise Pumain, professeur à l'université de Paris I. Les nombres entre crochets renvoient à la bibliographie en fin d'article.

L'idée la plus commune que Ton se fait de la ville est celle d'une surface occupée par des constructions — habitations, usines, commerces, bâtiments administratifs — reliées par un tissu dense de voies de communication. Cette agglomération est un noyau de peuplement concentré et bien identifiable, qui s'oppose à la campagne où le peuplement est lâche et diffus. L'espace y est plus homogène, contrairement au monde rural qui comprend des cultures, des forêts et des territoires incultes, des habitations et des fermes dispersées, des hameaux, des bourgs ou des usines, etc. L'agglomération se caractérise donc par une utilisation intensive de l'espace. Elle est également associée à l'idée de centre : plus on s'éloigne du centre, moins l'utilisation du sol devient intensive. En périphérie, on trouvera un certain nombre d'équipements qui font

quement partie de la vie urbaine comme les usines et entrepôts, les espaces réservés aux transports (parkings, aéroports, gares de triage, installations portuaires), les terrains de sport, jardins et autres espaces publics. Tous ces équipements et installations doivent être englobés dans le périmètre de l'espace urbain.

Où s'arrête la ville ?

En général, la croissance d'une agglomération s'effectue le long des voies de communication, dont les axes radiaux sont les principales puisque l'agglomération est un centre. On peut donc mesurer l'espacement entre les constructions de manière

ECONOMIE ET STATISTIQUE N° 245, JUILLET-AOÛT 1991

1 . Le critère de la continuité du bâti est celui utilisé par l 'INSEEpour délimiter les unités urbaines aux recensements de la population (voir l'encadré p. 5 et m).

linéaire, à l'image d'une personne ou d'un objet qui se déplace. Selon les recommandations de l'ONU [10], la distance entre deux constructions permet de définir les limites d'une agglomération. Elle ne doit pas excéder 200 mètres en Europe, 500 mètres en Amérique du Sud où le système de peuplement est plus lâche. Au-delà de cette distance, la continuité du bâti est rompue : on sort des limites "morphologiques" de l'agglomération (1).

La densité des constructions ou de la population sert parfois de substitut à cette définition, comme en Inde, en Tchécoslovaquie, aux Etats-Unis, aux Philippines, etc. Souvent, elle est aussi associée à la continuité des constructions, ce qui permet

miner les agglomérations s'étendant démesurément le long d'un seul axe, les "villages-rue". Le seuil éliminatoire est alors différent d'un pays à l'autre, en fonction des structures de peuplement (Japon : 4 000 habitants/km2 ; Philippines : 1 000 ou 500 habitants/km2 selon les cas ; Inde : 1 000 par mile carré, etc).

Mais les limites administratives des villes coïncident rarement avec celles de l'agglomération morphologique. Le front des constructions se déplace sans cesse si bien que les limites administratives ne peuvent les suivre. Tout le problème est donc de traduire ces limites morphologiques en termes de limites administratives, les seules sur lesquelles on

CÉOPOUS GÉOPOUS est le premier véritable inventaire des grandes agglomérations. Il n'existait jusqu'alors aucune source capable de donner les informations de base telles que la localisation, le nombre d'habitants, le taux de croissance des plus grandes villes du monde. Pour rassembler une telle masse de données, toutes les informations officielles ou non officielles dignes de foi ont été systématiquement recherchées et dépouillées. Les chiffres sont actualisés au fur et à mesure de la parution de nouvelles données. Actuellement, CEOPOUS répertorie 22 000 agglomérations, ce chiffre augmentant chaque année, en particulier dans les pays en voie de développement. La mise au point de CEOPOLIS suppose trois types d'opérations distinctes : la recherche documentaire à l'échelle mondiale, la recherche d'une solution pour él

iminer l'hétérogénéité des définitions de la population urbaine adoptées par chaque pays et l'élaboration d'une définition comparable des limites de l'espace urbain.

Les sources Les sources de GEOPOLIS sont, pour l'essentiel, les recensements et estimations officielles. Les recensements sont les sources préférentielles de GEOPOLIS. En principe, ils présentent les données les plus fiables, puisqu'ils sont exhaustifs, obligatoires pour les habitants et soumis à vérification, de sorte que les marges d'erreur sont généralement tout à fait acceptables y compris dans de nombreux pays pauvres. 1,8% de sous-énumération au recensement de 1991 en Inde apparaît par exemple remarquable, en regard de 844 millions d'habitants recensés [8]. Les estimations officielles, quant à elles, se partagent en deux grandes familles. Celles qui sont fondées sur l'exploitation des registres de l'état civil et celles qui reposent sur des projections. GEOPOLIS ne restitue pas ces dernières, en raison de leur caractère incertain. Mais à l'instar de nombreux indicateurs de développement, la couverture statistique du monde révèle de grandes inégalités suivant les continents : l'Amérique et l'Europe disposent d'une couverture statistique pratiquement exhaustive et de séries fréquentes. Par contre, la production statistique est déficiente dans certaines parties de l'Asie et de l'Afrique, où il faut se contenter de séries anciennes ou de données peu fiables. Un des faits les plus remarquables est l'abondance de données publiées sur les pays sud-américains qui, dans ce domaine, ne sont pas loin d'égaler les grands pays développés, et dépassent en tout cas une grande puissance comme l'URSS. Au contraire, certains pays passant pour des "puissances régionales", comme le Nigeria ou le Viet-Nam se rangent ici aux côtés des pays les moins avancés.

- On dispose de données régulières (au moins une série par décennie), fiables et récentes pour 65 % de la population mondiale. Cette proportion est encore plus élevée (environ 75 %) lorsque l'on considère la population urbaine, puisque les pays les plus développés, qui ont la meilleure couverture statistique, sont aussi les plus urbanisés. - Pour 20 % de la population mondiale, on ne dispose encore à l'heure actuelle d'une série complète de chiffres que pour une seule année dans la période contemporaine, ce qui ne permet pas de calculer les taux de croissance ni d'apprécier l'évolution du système urbain. - Pour environ 10 % de la population mondiale, on ne trouve que des séries "anciennes", c'est-à-dire antérieures à 1980 ou ne reflétant plus la situation actuelle. - Le reste est constitué par les Etats qui n'ont produit ou diffusé aucun chiffre dans la période contemporaine (Oman, Corée du Nord, etc.). La recherche documentaire : où trouver les sources Le rassemblement de sources émanant d'environ 170 instituts est un exercice semé d'embûches. De nombreux documents sur la population des localités ne sont publiés que dans la langue, voire l'écriture nationale : le Persan pour l'Iran (1986), le Mandarin pour la Chine (1982), et l'Arabe pour la plupart des pays du Moyen- Orient. D'autre part, les changements de noms de localités ont été nombreux depuis 40 ans, particulièrement dans les anciennes colonies européennes d'Afrique (Mozambique, Zaïre, Zimbabwe, Angola, etc.) et dans les Etats ayant connu des changements de régime importants : URSS, Myanmar (ex-Birmanie), Viet-Nam, etc. Enfin, si la plupart des recensements font l'objet de publications diffusées à l'étranger que l'on peut trouver dans les bibliothèques des centres de recherche spécialisés, d'autres ne sont, en revanche, disponibles que localement : il faut donc se déplacer dans le pays concerné pour obtenir les chiffres. La dispersion des sources statistiques sur la population est encore aggravée par le fait que, pour un même pays, chaque recensement fait l'objet d'une publication particulière ; sa présentation, ses modalités, voire les définitions utilisées peuvent changer. Peu d'instituts publient des données rétrospectives sur la population des villes, de sorte qu'il faut se référer généralement à autant de documents qu'il y a de recensements, ce qui explique le nombre considérable de publications - environ 1 500 - consultées pour l'élaboration de GEOPOLIS. Déplus, les données sur les localités ne font pas toujours l'objet d'un volume unique pour l'ensemble d'un pays, mais sont parfois dispersées dans plusieurs fascicules correspondant à chaque grande division administrative du pays (Etat fédéré, région, province, département, etc.). Dès lors, le fichier GEOPOLIS est quelquefois le seul document montrant une vision synoptique de la population des principales localités d'un pays entier et/ou sur plusieurs recensements l

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QU'EST-CE QU'UNE VILLE ?

Afin de rendre les villes comparables entre elles, l'espace urbain a été délimité de manière identique suivant l'application d'un concept recommandé par les experts de l'ONU [10] et utilisé dans un grand nombre de pays : celui de l'agglomération morphologique. Ce critère est fondé sur la continuité des constructions, à l'instar de celui qui est adopté par l'INSEEpour les agglomérations françaises.

De nombreux instituts de statistiques ont suivi les recommandations de l'ONU, de sorte que le critère d'agglomération morphologique présente l'avantage d'être associé à un grand nombre de définitions dans le monde. D'autre part, sa mise en application est très simple puisqu'il s'agit d'un fait qui peut directement être lu sur l'espace à l'aide de documents divers (cartes récentes, photographies aériennes), voire, au besoin, en voyageant sur le terrain.

Mais dans les faits, peu de concepts sont aussi disparates dans le monde que celui de "population urbaine". Cette diversité traduit différents points de vue sur la ville, lesquels ne se recoupent que partiellement. Ces approches du fait urbain se répartissent en 5 grandes catégories :

a) Les critères administratifs. La population est celle qui habite des localités définies comme telles par des fonctions administratives leur donnant autorité sur les autres localités - préfecture, chef-lieu - ou par un statut politique particulier attribuant une certaine autonomie. Cependant, ce type d'organisation n'empêche pas le développement "spontané" de localités dont les habitants, en dépit de leur importance numérique ou des activités qu'ils pratiquent, se trouvent classés en population rurale : certains "villages" de Chine ou d'Egypte ont plus de 100 000 habitants !

b) Les critères quantitatifs du nombre d'habitants. Dans de nombreux Etats, la population urbaine est celle qui vit dans des localités dépassant un certain nombre d'habitants. La ville est ici considérée comme une concentration de population. Cependant, les seuils retenus sont très différents selon les pays : entre 200 et 50 000 habitants, ils varient delà 250 selon les pays I En outre, les chiffres sont biaises par l'extension territoriale des localités et par la structure du système de peuplement : certaines unités administratives peuvent englober de vastes espaces d'habitat dispersé ou, au contraire, cerner au plus près les limites des constructions, soit encore ne comprendre qu'une partie d'une agglomération plus vaste.

c) Les critères socio-économiques insistent sur la spécificité des activités des citadins par opposition aux ruraux. Généralement, ce critère est élaboré de manière à éliminer les actifs travaillant dans le secteur agricole. Les seuils et les procédés de sélection ou d'élimination sont à nouveau très différents d'un pays à l'autre (10, 15, 25, 30, 50 %). En outre, ce type de définition peut conduire à écarter des localités très peuplées et qui possèdent, par ailleurs, d'autres activités ou fonctions typiquement urbaines et quantitativement non négligeables.

d) Les critères fonctionnels sont le produit d'une approche économique de la ville, indépendamment de son

nombre d'habitants. On considère ici que la zone urbaine se différencie de la zone rurale par la quantité et la qualité des emplois, des services, des fonctions ou des équipements qu'elle possède. La somme de ces fonctions définit ainsi le caractère d'une localité, dont la population est alors considérée comme urbaine ou non.

e) Les critères démographiques sont peu employés. Ils utilisent certains indicateurs sur la population, comme la densité, la répartition par classes d'âge ou le taux de masculinité. Ce derniers, par exemple, est généralement plus élevé dans les villes qu'à la campagne du fait de l'appel de main-d'œuvre. Cependant, cette observation s'inverse dans les pays développés et en Amérique latine.

Une définition croisant plusieurs critères saisit au mieux la complexité de la notion de population, mais elle est difficile à appliquer. Seuls les Etats riches ont les moyens de mettre en œuvre un grand nombre de critères diversifiés, et seuls les Etats de petite taille peuvent appliquer des définitions complexes sur de petits échantillons de localités, car leur territoire est théoriquement plus homogène du fait de sa faible taille.

Dans GEOPOLIS, c'est le critère du nombre d'habitants qui a été choisi comme base de définition. Il est le plus répandu dans le monde (seul ou en association avec d'autres critères) et aussi le plus simple à appliquer. Le chiffre de 10 000 habitants est un compromis entre la moyenne des seuils utilisés dans les définitions nationales, et un certain nombre d'aspects pratiques : les données, disponibles jusqu'à cette taille, le sont plus rarement en-dessous, et l'échantillon mondial reste de taille limitée (abaisser ce seuil à 5 000 habitants eût entraîné le doublement du nombre de localités de la base de données).

Les agglomérations multi-communales

Les limites de l'espace urbain sont également susceptibles de biaiser les comparaisons internationales. Dans la plupart des définitions officielles, ces limites coïncident avec le découpage administratif des unités locales de base, car il correspond au niveau le plus bas pour lequel on peut disposer de données chiffrées. Le problème est que certaines définitions ne saisissent pas l'unité d'une agglomération urbaine lorsque le tissu de construction s'étend sans interruption sur plusieurs communes. Les travaux de Burgess et Park [3], de Hoyt[6] et de Davie [4], ont montré que le fait de reconnaître et de définir des zones urbaines "pluri-unités administratives" était le seul moyen de rendre compte du poids des villes [9J. En se détachant des artifices du découpage administratif, les villes deviennent des entités organisées compréhensibles et comparables. Dans un certain nombre de pays, les services statistiques ont pris conscience de ce problème et ont transformé leur définition de manière à intégrer la population des petites unités administratives situées près d'une grande ville. Cependant, si ce principe s 'inscrit de plus en plus dans les définitions, les méthodes pour délimiter les aires urbaines varient beaucoup d'un pays à l'autre.

ECONOMIE ET STATISTIQUE N° 245, JUILLET-AOÛT 1991

Schéma 1 Les étapes d'une définition harmonisée de l 'agglomération

données statistiques de base autres sources (a)

agglomérations de base officiellement définies (b) pas d'agglomérations officielles reconnues identification des

noyaux morphologiques

ajustement sur les unités locales

agglomérations "multi-unités locales" non reconnues officiellement

agglomérations "multi-unites locales" officiellement définies

1

50% au moins de la population des unités locales appartient à

l'agglomération

agglomérations 'multi-unités locales"

non officielles

agglomérations 'multi-unités locales"

GEOPOUS

définition harmonisée de l'agglomération

(a) : cartes, photos aériennes, observations sur le terrain, etc. (b) : Une "agglomération de base" est un noyau de peuplement défini à l'intérieur d'une unité

locale.Une "unité locale" est la plus petite division administrative d'un pays (en France : la commune).

dispose de données statistiques. Suivant une méthode d'ajustement couramment utilisée, si 50 % au moins de la population d'une unité locale vit dans une agglomération, alors la totalité de la population de cette unité est considérée comme appartenant à cette agglomération ; si, au contraire, l'agglomération ne représente qu'une partie minoritaire de la population d'une unité locale, le reste de la population vivant par exemple dans une ou plusieurs autres agglomérations ou dans des habitations dispersées, l'unité locale ne fait pas partie de cette agglomération et reste isolée ou rurale (voir l'encadré p.5 et [7]). On évalue cette proportion en fonction du nombre de constructions, de l'importance de la surface bâtie, ou encore de la densité des voies de communication.

une vaste reconstitution des limites morphologiques des villes (encadré p.9).

Dans la mesure du possible, GEOPOLIS intègre les définitions officielles ou non officielles des villes, pourvu que les méthodes employées soient comparables (encadré p. 8). Par exemple, certaines définitions n'ont pas pu être utilisées, car leurs limites, tantôt trop larges ou tantôt trop restrictives, ne coïncident pas avec celles de l'agglomération morphologique : il s'agit, en particulier, des définitions fondées sur des critères fonctionnels. Un certain nombre d'agglomérations multi-communales ont donc été délimitées (schéma 1), ce qui porte le nombre réel de localités retenues à environ 60 000 en 1991.

2. GÉOPOLIS : de "GÉO", la terre et "POUS", la ville.

Une base de données des villes du monde

GEOPOLIS (2) est la première base de données au monde qui répertorie de manière systématique chaque ville de la planète comptant ou ayant compté 10 000 habitants au moins entre 1950 et 1990. C'est

Mexico n'est pas la plus grande ville du monde

Alors qu'il est généralement acquis que Mexico est la ville la plus peuplée du monde, son aggloméra-

10 ECONOMIE ET STATISTIQUE N° 245, JUILLET 1991

Carte 1 Localisation de 100 villes les plus peuplées du monde

Nombre d'habitants (en millions) plus de 20

O de 10 à 19,9 de S à 9,9 de 2,5 à 4.9

tion de 15,9 millions d'habitants n'arrive qu'au quatrième rang d'après la définition morphologique, et ce, très loin derrière les deux premières : Tokyo et la conurbation New- York-Philadelphie (tableau 1 et carte 1).

Tokyo concentre en effet une population 1,5 fois plus importante que Mexico sur une superficie près de deux fois plus petite (24 millions d'habitants sur 2 423 km2). D'ailleurs, l'ajustement utilisé pour les agglomérations japonaises est des plus stricts : l'unité de base est le "district densément habité" (DID), qui correspond à "une surface composée d'un groupe de districts d'énumération contigus dont la densité de population est d'au moins 4 000 habitants/km2 et dont la population totale atteint au moins 5 000 habitants" [12] (encadré p.9). L'agglomération de Tokyo est donc un ensemble extrêmement compact de DID contigus s'étendant sur quatre ken (provinces). Le tissu du bâti y forme une trame régulière et dense, à l'inverse de certaines conurbations qui apparaissent parfois comme des noyaux faiblement reliés les uns aux autres par de simples fils de constructions, telle une ligne de maisons le long d'un axe routier. La densité moyenne s'y élève à 9 900 habitants/km2 (elle est de moins de 4 000 habitants/km2 dans l'agglomération parisienne).

Megalopolis : la ville la plus étendue

La deuxième ville du monde est la conurbation de la Megalopolis centrale aux Etats-Unis (23,9

lions d'habitants). C'est aussi la plus vaste du monde en termes de superficie. Nulle part ailleurs, l'emprise territoriale d'une agglomération n'est aussi spectaculaire, puisque sa surface couvre 14 150 km2 urbanisés d'un seul tenant. Elle s'étend sans interruption depuis la ville de Springfield (Massachusetts) jusqu'aux confins nord-est du Maryland sur plus de 400 km (carte 2). La définition utilisée ici est celle des "urbanized areas" officielles (UA) dont la définition complexe intègre la continuité et la densité des constructions [2]. En fait, le "Bureau of the Census" distingue officiellement plusieurs centres, dont les principaux sont New- York et Philadelphie. Cependant, si on applique strictement le critère de la continuité du bâti, ces deux grands centres sont reliés par de multiples tentacules de constructions au niveau de Trenton (New Jersey). Toutes les UA contiguës ont donc été regroupées et considérées comme une agglomération entière dans GEOPOLIS.

En 1990, Sao Paulo (17 millions d'habitants) était également plus peuplée que Mexico. D'autre part, Séoul, avec 15,3 millions d'habitants, atteint presque la population de Mexico (15,8 millions d'habitants) sur une surface 3 fois plus réduite (1 596 km2 au lieu de 4 445). En termes de croissance, Séoul a été encore plus dynamique que Mexico puisqu'elle comptait deux fois moins d'habitants que cette dernière en 1950 (1,8 million contre 3,5 dans les limites actuelles des agglomérations).

A l'instar de la puissance industrielle et financière, les deux plus grandes concentrations urbaines du

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Carte 2 La ville la plus étendue du monde : Megalopolis

North Megalopolis

South- Megalopolis

NY Binghampton

PA

Scranton

ETATS CT: Connecticut DE: Delaware MA: Massachusetts MD: Maryland NJ: New Jersey NY: New York PA: Pennsylvania Rl: Rhode Island

Echelle: 0 30 60 km

Ijijijjjijijij:! Agglomération centrale de la megalopolis (1: New York- 2: Philadelphie) Autre agglomération de plus de 100 000 habitants en 1980 Limites des Etats

nota: les surfaces grisées représentent les aires ou le tissu des constructions est continu

monde se trouvent donc encore dans les deux plus grandes puissances économiques du monde. Ce fait semble logique car un tel gigantisme suppose une densité d'équipements coûteux qui vont de pair avec la richesse et la maîtrise des technologies les plus sophistiquées. Reste que Mexico demeure, le symbole de ces nouvelles cités de la démesure, même si de nombreuses agglomérations du tiers monde ont d'ores et déjà connu une croissance aussi spectaculaire qu'elle.

Le poids des banlieues

Certaines villes qui passent pour être parmi les plus peuplées s'étendent en réalité sur un très vaste périmètre englobant de vastes zones rurales. C'est pourquoi le nombre d'habitants de Shanghai, Beijing (Pékin), Tianjin et de la plupart des autres villes

12

de Chine donné par l'ONU est sensiblement supérieur aux chiffres de GEOPOLIS. La "municipalité autonome" de Beijing (10,8 millions d'habitants), par exemple, s'étend sur 17 000 km2 et comprend au nord de vastes zones rurales où la densité tombe au-dessous de 100 habitants/km2. Dans ce cas, la population des districts centraux serre au plus près les limites morphologiques de l'agglomération ce qui ne donne que 6,2 millions d'habitants sur 2 700 km2.

Cependant, à l'échelle mondiale, ces villes font figures d'exception. En effet, il est beaucoup plus fréquent de trouver autour des grands centres une couronne de municipalités périphériques formant ce que l'on nomme en France la banlieue.

Ainsi, certaines villes possèdent des banlieues importantes qui ne sont pas prises en compte dans

ECONOMIE ET STATISTIQUE N° 245, JUILLET-AOÛT 1991

Tableau 1 Un palmarès des 100 agglomérations les plus peuplées du monde en 1990

Lecture : il s 'agit de projections élaborées à partir des données de GEO- POLIS d'après les derniers recensements dis

ponibles datant pour la plupart des années quatre-vingt, exceptés les chiffres suivis d'un "r" qui sont des données officielles de 1990. La population de 1950 est rappelée, ainsi que la superficie "ajustée", lorsque ce chiffre était disponible. Ce tableau présente en outre les données de l'ONU publiées en 1990 dans [13].

ECONOMIE ET STATISTIQUE N° 245, JUILLET-AOÛT 1991

Tokyo Central Megalopolis [1] Sao Paulo Mexico Séoul Los Angeles Moscou Calcutta Buenos Aires Bombay Le Caire Rio de Janeiro Jakarta Manille Osaka Pans Shanghai Chicago Bangkok Delhi Karachi Lagos Londres Taipei Istanbul Téhéran Lima Dhaka Beijing North Megalopolis [2] Tianjin Hong-Kong Madras San Francisco Leningrad South Megalopolis [3] Santiago Lahore Bangalore Bogota Kinshasa/Brazzaville * Ibadan Madrid Rhem/Ruhr Stâdte [4] Shenyang Toronto/H ami Iton Detroit/Windsor * Bagdad Witwatersrand [5] Pyongyang Pusan Guangzhou Barcelone Caracas Miami/Fort Lauderdale Milan Wuhan Berlin Dallas Ahmadabad Colombo Belo Honzonte Hyderabad Alexandrie Athènes Medan Ho-Chi-Minh Casablanca Taichung Singapour * Houston San Diego/Tijuana * Sydney Wyzyna Slaska [6] Rome Montréal Yangon (ex-Rangoon) Chengdu Porto Alegre Kiev Recife Guadalajara Naples Abidjan Surabaya Haerbin Chongqing Kaohsiung Melbourne Tampa/St Petersbourg Nagoya Monterrey Santo Domingo Rnein/Wjpper/Niers Stâdte [7] Taegu Salvador Ankara Cleveland Khartoum Xian

GEOPOLIS Rang mondial

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 55 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100

Superficie en km»

2 423 14 150 7 951 4 445 1 596 6 091 852 6 210 644

8 070 1 803 993 2 570 2 049 8 727 7 758 541 3 527 2 500 1 931 2 100 2 794 580 2 700 11 156 4 277 1 067 572 3 103 4 163 1 917 1 772 366 2 088 2 841 1 779 2 499 3 646 7 866 6 168 ■ 734 6 557 1 800 497 978 1 391 2 708 2 156 1 402 1 259 5 053 184 2 094 3 670 299

428 1 615 1 857 3 105 2 974 2 252 1 661 3 509 500 1 403 5 806 2 201 1 513 846 135 1 675 1 521 1 064 1 681 378 1 927 1763 455 2440 3 422

879

ONU. (a) Nombre d'habitants en millions 1990

24.0 23.9 17.0 15.9 r 15.3 13.5 11.9 r 11.6 11.6 11.6 11.3 10.9 10.9 10.9 10.0 9.3 r 9.2 9.1 8.6 8.6 8.2 7.9 7.7 7.3 7.2 r 6.8 6.6 6.2 6.2 6.1 6.0 5.7 5.6 5.4 5.4 5.3 5.0 4.9 4.9 4.8 4.8 4,7 4.6 4.6 r 4.6 4.5 4.4 4.3 4.0 4.0 4.0 3.9 3.9 3.8 3.8 3.7 r 3.6 3.6 3.5 3.5 3.5 3.5 3.4 3.4 3.4 3.3 3.2 3.2 3.2 3.2 3.1 3.0 3.0 3.0 r 3.0 r 3.0 3.0 3.0 2.9 2.9 r 2.9 2.9 r 2.9 r 2.9 2.8 2.8 2.8 2.8 2.8 2,7 2.6 2.6 r 2,6 2.6 r 2.6 2.6 2.6 r 2.6 2,5 2.5

1950

8.7 18,7 2.7 3.5 1.8 4.1 6.2 4.5 4.9 2.7 4.0 3.3 1.9 2.0 4.3 6.0 6.0 6.4 2.0 1.3 1.1 0.3 9.0 1.5 1.0 1.2 1.0 0.5 2.4 4.5 2.6 2.4 1.4 2.2 3.0 2.2 1.4 1.1 0.7 0.6 0.2 0.4 1.7 4.1 2.2 1,4 3,1 0.4 1.8 0.4 0.5 1.5 1.8 0.8 0.5 2.2 1,1 3.5 1.0 0.8 1.6 0.5 1.1 1.3 1,3 0,4 1.7 0.6 1.3 1.1 0.8 0.5 1.6 1.4 1.7 1.3 0.7 0.7 0.6 0.9 0.8 0.5 1.8 0.1 0.7 0.9 1.6 0.8 1.3 0.3 1.3 0.4 0.2 1.7 0.3 0,5 0.3 2.1 0.2 0.6

1990

18,1 16.2 17,4 20.2 11.0 11.9 8.8 11.8 11.5 11,2 9.0 10.7 9.3 8.5 8.5 8.5 13.4 7.0 7.2 8.8 7,7 7,7 7.4 3.0 6,7 6.8 6.2 6.6 10.8 2.8 9.4 5.4 5.7 3.7 5,1 2.9 4,7 4,1 5.0 4.9 3.5 1.3 5,2 4.8 3.5 3.7 4.0 1,7 2.2 3.9 3,7 3,4 4,1 1.9 5.3 3.9 3.2 3.4 3.6 3.6 3.5 3,7 3,4 1.8 3.2 3,2 . 2,7 3.0 2.2 3.4 3.4 3,1 3.0 3.3 3.0 3.1 2.6 2.5 3.2 3.6 2.2 2.4 3.0 3.2 1.5 2,8 . 2,1 3.0 2.2 . 2.5 2.4 2.6 1.7 1.9 2.9

Rang mondial

2 4 3 1 10 6 16 7 8 9 15 12 14 20 18 19 5 25 24 17 22 21 23 73 27 26 29 28 11 77 13 31 30 45 34 74 38 41 35 36 53 191 33 . 37 54 48 42 136 97 44 47 58 40 123 32 43 . 57 49 . 50 52 46 56 126 61 62 . 78 68 104 59 55 66 70 60 69 65 80 85 63 51 103 89 72 64 165 76 . 111 71 99 . 84 88 81 138 118 75

Localisation Continent Etat

Asie (E) Japon Amérique USA Amérique Brésil Amérique Mexique Asie (E) Corée du Sud Amérique USA Europe URSS Asie (S) Inde Amérique Argentine Asie (S) Inde Afrique Egypte Amérique Brésil Asie (SE) Indonésie Asie (SE) Philippines Asie (E) Japon Europe France Asie (E) Chine Amérique USA Asie (SE) Thaïlande Asie (S) Inde Asie (S) Pakistan Afrique Nigeria Europe Royaume-Uni Asie (E) Taiwan Asie (W) Turquie Asie (W) Iran Amérique Pérou Asie (S) Bangladesh Asie (E) Chine Amérique USA Asie (E) Chine Asie (E) Hong-Kong Asie (S) Inde Amérique USA Europe URSS Amérique USA Amérique Chili Asie (S) Pakistan Asie (S) Inde Amérique Colombie Afrique Zaïre/Congo Afrique Nigeria Europe Espagne Europe Allemagne Asie (E) Chine Amérique Canada Amérique USA/Canada Asie (W) Irak Afrique Afrique du Sud Asie (E) Corée du Nord Asie (E) Corée du Sud Asie (E) Chine Europe Espagne Amérique Venezuela Amérique USA Europe Italie Asie (E) Chine Europe Allemagne Amérique USA Asie (S) Inde Asie (S) Sri Lanka Amérique Brésil Asie (S) Inde Afrique Egypte Europe Grèce Asie (SE) Indonésie Asie (SE) Vietnam Afrique Maroc Asie (E) - Taiwan Asie (SE) Singapour/Malaysia Amérique USA Amérique USA/Mexique Océanie Australie Europe Pologne Europe Italie Amérique Canada Asie (SE) Myanmar Asie (E) Chine Amérique - Brésil Europe URSS Amérique Brésil Amérique Mexique Europe Italie Afrique Côte d'Ivoire Asie (SE) Indonésie Asie (E) Chine Asie (E) Chine Asie (E) Taiwan Océanie Australie Amérique USA Asie (E) Japon Amérique Mexique Amérique R. Dominicaine Europe Allemagne Asie (E) Corée du Sud Amérique Brésil Asie (W) Turquie Amérique USA Afrique Soudan Asie (E) Chine Conurbations : [1] New-York-Philadelphie ; [2] Boston-Providence ; [3] Washington-Baltimore ; [4] Essen-Duisburg-Dortmund ; [5] Johannesburg ; [6] wice ; [7] Dûsseldorf-Wûppertal-Mônchen-Gladbach. * Agglomérations internationales. (a) Source : 1990 United Nation Urban Agglomeration chart. N.Y. r : données issues de recensements

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Tableau 2 Quelques exemples du poids des banlieues

Colombo Taichung Taipei Milan Naples Barcelone Kaohsiung Le Caire Caracas Madrid Séoul Moscou Jakarta

Ville centre Population

0,7 0,7 2.7 1.5 1.2 1,7 1.4 6,2 2,2 3,1

10,6 8,8 9,0

%

20 22 37 41 41 44 50 55 58 67 69 73 83

Banlieues Population

2.8 2,5 4,6 2,2 1,7 2,2 1,4 5,1 1,6 1.5 4,7 3.2 1,9

%

80 78 63 59 59 56 50 45 42 33 31 27 17

Ensemble Population

. 3.5 3,2 7,3 3,7 2,9 3,9 2.8

11,3 3.8 4.6

15,3 12,0 10.9

les statistiques officielles : Taipei (2,7 millions d'habitants) est le centre d'une agglomération de 7,3 millions. Moscou atteint près de 12 millions d'habitants contre 8,8 pour la commune seule ; Colombo, 3,5 millions contre 685 000, etc. (tableau 2).

Néanmoins, le concept de banlieue est statistiquement difficile à saisir. En théorie, on pourrait considérer comme * 'ville-centre" l'unité administrative centrale d'une agglomération et comme banlieue toutes les autres unités administratives appartenant à l'agglomération. Dans la réalité, ce schéma n'est cependant pas toujours aussi clair que celui que nous connaissons en France pour l'agglomération parisienne. La trame administrative constitue dans certains pays d'immenses entités qui englobent sur leur territoire à la fois le centre et des zones que l'on doit assimiler à des banlieues. La commune de Moscou, par exemple, est très vaste : si l'on rapportait ses dimensions à l'agglomération de Paris, sa juridiction engloberait également la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de- Marne). De plus, l'agglomération de Moscou s'étend également au-delà des limites de la commune, tout comme l'agglomération parisienne dépasse celles de la petite couronne. Dans ces conditions, il est quelquefois difficile d'évaluer le poids réel des banlieues à partir du découpage statistique brut, sans entrer dans un découpage géographique intra-urbain plus fin que celui qui est retenu officiellement par les autorités d'un pays.

Si la ville de Paris réunit autour d'elle 378 communes de banlieue en 1990, la taille de ces dernières demeure modeste en regard de celle d'autres communes de banlieues des grandes agglomérations du monde. Une seule commune de la banlieue parisienne dépasse 100 000 habitants, Boulogne- Billancourt, la moyenne s'établissant à quelque 19 000 habitants. Il n'en est pas de même dans certains pays où les municipalités "de banlieue" peu-

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vent rassembler un nombre impressionnant d'habitants. La banlieue de l'agglomération de Tokyo regroupe ainsi 49 communes de plus de 100 000 habitants en 1990, dont deux dépassent le million. Dans la banlieue de Mexico, Ecatepec compte 1 219 300 habitants en 1990 (contre 2 200 en 1950) et Netzahualcoyotl 1 259 600 (300 en 1950). Dépassent également le million d'habitant Nova Iguaçu (Rio de Janeiro), La Matanza ( Buenos Aires), Inchon (Seoul) et Kobe (Osaka).

Les conurbations

Avec ses 2 152 000 habitants, Paris intra-muros dispose d'une suprématie incontestable sur les autres communes de l' agglomération. Au contraire, dans certaines agglomérations, on distingue plusieurs centres d'importance comparable, émergeant d'un tissu de constructions où l'utilisation du sol est moins intensive : ce sont les conurbations.

Outre celle de New- York, les principales sont le Witwatersrand (Johannesbourg), Rhin-Wupper- Niers (comprenant Wuppertal et Dûsseldorf), ainsi que de nombreuses grandes villes nord-américaines (Miami, Tampa, San-Francisco, etc.). L'agglomération Rhin-Ruhr rassemble de grandes municipalités - Essen (624 000 habitants), Duisburg (532 000), Dortmund (594 000), Bochum (393 000), etc. - et son unité morphologique est indiscutable depuis au moins trois décennies (5,2 millions d'habitants vers 1966, 4,6 aujourd'hui). On remarquera qu'elle n'apparaît pas du tout dans la charte des Nations Unies [13], bien que, par ailleurs, l'unité d'autres conurbations y soit reconnue : Haute-Silésie (Katowice), Milan, Naples, etc.

La conurbation résulte d'un modèle de croissance différent de ceux que l'on connaît pour l'agglomération parisienne, laquelle s'est développée par auréoles concentriques (suburbanisation). A l'ori-

ECONOMIE ET STATISTIQUE N» 245, JUILLET-AOÛT 1991

Tableau 3 Répartition géographique des 100 villes les plus peuplées du monde

Grande région / continent Nombre

d'agglomérations (unités)

Superficie arrondie

(en milliers de km2) Population

concernée en 1990 (en millions)

Population totale en 1990

(en millions) Superficie

totale (en milliers de km2)

Amérique centrale Amérique du Nord Amérique du Sud Total Amérique

4 15 11 30

9,3 83,3 45,9

138,5

23,9 93,9 71,6 189,3

141 276 297 714

2 710 21 515 17 809 42 034

Afrique subsaharienne Afrique du Nord Total Afrique

6 3 9

13,5 3,7

17,2 26,8 17,9 44,7

527 115 642

24 284 6 019

30 303 Extrême Orient Subcontinent indien Indochine et Insulinde Moyent et proche Orient Total Asie

21 11 8 4

44

34,5 11,4 15,2 6,3

67,4

126,1 72,0 45,9 20,8

264,7

1 350 1 130

444 205

3 129

11 755 4 470 4 494 6 785

27 504 Europe 12 19,8 52,2 499 4 821 URSS 3 7,5 20,3 289 22 275 Océanle 2 6,0 5,8 27 8 530

Total mondial 100 256,4 577,0 5 300 135 466

giné, il s'agit généralement de villes distinctes distantes de quelques kilomètres (Ruhr) à quelques dizaines de kilomètres (Megalopolis, baie de Tokyo) et dont les tissus de construction ont fini par se rejoindre (péri-urbanisation).

La conurbation est le prototype de la grande ville d'Europe du nord, d'Amérique du nord et du Japon, où d'immenses entités urbaines tendent à se constituer à partir de plusieurs pôles. Elle préfigure l'avenir de la plupart des grandes villes du monde. Pour Los Angeles, on parle parfois de "région urbaine" plutôt que d'agglomération, tant la complexité du tissu urbain est grande.

L'attraction des grandes villes

Parmi les 100 plus grandes villes du monde, 9 se trouvent aujourd'hui en Afrique, 30 en Amérique, 44 en Asie, 15 en Europe (dont trois en URSS) et deux en Océanie (tableau 3). L'Amérique est largement sur-représentée puisqu'elle n'abrite que 14 % de la population mondiale et que 26 % de sa population vit dans l'une de ces grandes villes. L'Afrique, avec 12 % de la population mondiale ne compte que neuf villes parmi les plus grandes, mais c'est sur ce continent que la croissance a été la plus spectaculaire.

10,9 % de la population mondiale habitaient une des 100 plus grandes agglomérations du monde en 1990 contre 8,1 % quarante ans plus tôt. En termes de croissance absolue, alors que la population mondiale a un peu plus que doublé depuis 1950, passant de 2,5 à 5,3 milliards, celle des grandes agglomérations a presque triplé (202 à 577 millions)

(graphique I). Ces chiffres traduisent l'importance des migrations vers les grandes villes : ce sont des centaines de millions d'individus qui se concentrent aujourd'hui sur une surface totale représentant moins de 260 000 km2, soit 2 millièmes de la superficie des terres émergées du globe.

L'émergence des villes tropicales

Il y a moins d'un demi-siècle, de telles concentrations étaient encore, à quelques rares exceptions près, l'apanage des pays industrialisés du nord : 6 sur 7 agglomérations dépassant 5 millions d'habitants en 1950 y étaient situées. Seule Shanghai faisait exception. Aujourd'hui, sur les 37 agglomérations atteignant ce chiffre, 25 sont dans le monde tropical. Autrement dit, pendant que les pays industrialisés voyaient se développer sept nouvelles agglomérations de plus de 5 millions d'habitants mais en perdaient déjà une (la Ruhr), 24 émergeaient dans les pays en voie de développement.

La pression démographique est à l'origine de cette croissance urbaine. Au cours des quatre dernières décennies, les équilibres multiséculaires entre les taux de natalité et les taux de mortalité élevés se sont rompus. La baisse rapide du taux de mortalité, plus soudaine que celle du taux de natalité a provoqué le triplement de la population totale de la plupart des pays de la zone chaude en 40 ans (graphique I). D'immenses réservoirs démographiques se sont donc brutalement constitués dans des zones où l'économie traditionnelle ne pouvait fournir suffisamment de travail à la population sur place. On a assisté à de vastes mouvements migratoires vers

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Graphique I Une croissance plus forte au Sud*

Monde Europe

Amérique du nord URSS

Océanie Extrême orient Afrique du nord

Amérique du sud Subcontinent indien Indochine Insulinde Amérique centrale

Moyen et proche orient Afrique subsaharienne

i

' " 1 '■

... J

— — -• —

, 1

^^ population totale

f

i ■ i i Évolution 1990/50 10

* Lecture : entre 1950 et 1990, la population mondiale a été multipliée par un peu plus de 2, celle des 100 plus grandes villes du monde par près de 3. Pour toutes les grandes zones géographiques du monde, la population des 100 plus grandes villes a augmenté plus vite que la population totale entre 1950 et 1990 (sauf pour V Océanie). Par ailleurs, les zones industrialisées du Nord ont connu la plus faible croissance des très grandes villes et la plus proche de celle de la population totale.

les villes où se trouvaient les seules activités susceptibles d'offrir un moyen de subsistance à cette nouvelle population qui vivait traditionnellement du travail de la terre.

Mais ce mécanisme ne suffit pas à expliquer l'apparition de très grandes villes dans les systèmes urbains du tiers monde. Lorsqu'il n'y avait pas de secteurs économiques suffisamment puissants localement pour attirer la population dans de petites villes, la présence d'investisseurs étrangers fut souvent le seul catalyseur du développement économique. La croissance s'est alors polarisée autour des centres ouverts aux capitaux internationaux. Or, les nouvelles activités créées par les multinationales ont été implantées de manière extrêmement ponctuelles sur les territoires. L'investissement s'est généralement concentré dans la capitale ou, tout au plus, dans une poignée de sites : ports ou anciennes villes commerçantes traditionnelles. Ces villes, déjà bien accessibles, ont été équipées de quelques infrastructures modernes et sont devenues en quelques années de véritables métropoles. La croissance urbaine s'est alors effectuée dans un premier temps au profit de quelques pôles qui ont rapidement atteint des proportions gigantesques (Séoul, Manille, Lima).

Les types de régime économique ont également joué un certain rôle dans la polarisation urbaine : plus la politique a été libérale, plus le processus de concentration du système urbain a été rapide. Au contraire, dans un certain nombre de pays socialistes,

le gouvernement a pu enrayer de manière autoritaire la croissance des grandes villes pendant quelques décennies. C'est ce qui explique la croissance relativement faible des villes de Chine, du Viet- Nam, du Sri Lanka ou du Myanmar (Birmanie), par rapport à celles des autres pays en voie de développement. Mais le régime politique n'agit qu'un temps seulement. Le gouvernement relâche-t-il sa pression ? Aussitôt la croissance reprend avec une telle vigueur, qu'il est probable qu'à long terme les effets de la concentration se fassent sentir avec autant d'acuité que dans les pays à régime libéral. Ainsi, le taux d'urbanisation (3) de la Chine qui avait stagné pendant 25 ans autour de 20 % a littéralement bondi jusqu'à 26,2 % au recensement de 1990, en l'espace de huit ans seulement. Une telle progression représente près de 90 millions de nouveaux citadins, un record dans la rapidité de la croissance urbaine ! En corollaire à l'ouverture économique du pays, ce sont d'abord les grandes villes qui ont le plus profité de cette croissance, renforçant ainsi leur prépondérance dans la hiérarchie des villes [5]. Tout se passe donc comme si les grandes villes chinoises rattrapaient rapidement leur "retard" théorique et il y a fort à penser que la période de stagnation des grandes villes sera effacée en une vingtaine d'années.

16

3. Le taux d'urbanisation est la part de la population urbaine dans la population totale.

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4. Une nouvelle capitale, Abuja, est en construction au centre du pays.

Enfin, la taille des plus grandes agglomérations semble également déterminée par le nombre d'habitants du pays. En 1950, quelques agglomérations qui sont aujourd'hui parmi les plus grandes villes du monde ne dépassaient guère la taille d'une modeste ville de province. Ainsi, tandis que la capitale de l'Empire britannique avait déjà près de 9 millions d'habitants, Lagos (Nigeria) n'était qu'une simple ville coloniale de 300 000 habitants. Les deux villes sont 40 ans plus tard de taille équivalente. En effet, alors que Londres était en 1950 à la tête d'un immense Empire de près d'un milliard d'habitants (le Commonwealth), elle est aujourd'hui capitale d'un pays de 56 millions d'habitants. Dans le même temps, Lagos, de relais de la métropole dans une colonie de 33 millions d'habitants s'est retrouvée capitale (4) du "Géant de l'Afrique" (le Nigeria compte aujourd'hui plus de 100 millions d'habitants). Il est probable que Dhaka figurera dans une vingtaine d'années parmi les 10 ou 15 plus grandes villes du monde, tant le réservoir démographique du Bangladesh est important. Il en va de même pour Djakarta, Karachi, Bombay ou Delhi.

La croissance des plus grandes villes s'essouffle

Parmi les 100 plus grandes agglomérations du monde, 8 ont vu leur population plus que décupler en l'espace de 40 ans. Parmi elles, 5 se trouvent en Afrique. Abidjan a vu sa population multipliée par 35, Lagos par 30, Kinshasa par 20. Au nord, seule Londres a diminué (dans les limites de l'agglomération actuelle). Globalement, et même en Europe, la croissance des grandes villes a été partout plus élevée que celle de la population totale

(graphique I). Cela signifie que le processus de concentration n'est pas encore achevé.

Pourtant, le développement des villes n'est pas illimité. Dans les villes du tiers monde, si les taux de croissance peuvent être extrêmement élevés sur la période de 40 ans que nous considérons (4,5 à 9 % par an), la croissance la plus rapide se situe pendant les deux premières décennies (1950-1970), et un certain fléchissement peut être observé durant les deux dernières (1970-1990). Ce sont les plus grandes agglomérations qui ont vu leur taux de croissance le plus sensiblement diminuer, tout particulièrement dans la dernière décennie, pour atteindre 1 à 2 % par an (Séoul, Mexico). Le développement des grandes agglomérations ne semble se maintenir à un rythme effréné qu'en Afrique et dans certaines parties de l'Asie (subcontinent indien, Insulinde). Partout ailleurs, cette croissance marque le pas, même si, en comparaison des villes des pays industrialisés, elle demeure plus rapide dans les pays en voie de développement.

En fait, à un certain stade, les problèmes de désé- conomies d'échelle dus au gigantisme finissent par l'emporter sur les avantages de la sur-concentration : nuisances écologiques, banlieues démesurées, engorgement des voies de communication, insécurité, pèsent lourdement sur la vie de la cité. La croissance spectaculaire des grandes villes d'Afrique et de certaines villes d'Asie du Sud et d'Amérique latine s'explique donc avant tout par le fait qu'elles sont parties en 1950 avec un nombre d'habitants faible. En revanche, il est probable que la concentration de l'humanité dans de gigantesques agglomérations va se poursuivre, mais plutôt par la multiplication du nombre des très grandes villes (de 5 à 15 millions d'habitants). EU

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BIBLIOGRAPHIE

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