les afriques n141

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Rédaction : Abidjan, Casablanca, Dakar l No 141 : 2 au 8 décembre 2010 Afrique CFA 1500 FCFA - Algérie : 80 DA - Belgique 1,9 a - Canada 3,50 $ CAD - France 1,9 a - France OM 2,20 a - Italie 1,90 a - Luxembourg 1,9 a - Maroc 12 DH - Suisse CHF 3,80 - Tunisie 2,3 DT BOURSES L’emprunt Port autonome de Dakar flotte à Abidjan L’admission à la cote de l’emprunt obligataire PAD 7% 2010-2017 était pré- vue pour le 30 novembre prochain. Un contrat de li- quidité a été signé, une in- novation majeure. Page 9 Le secteur de la brasserie fait mousser la Bourse Alors que les minières et les bancaires marquent le pas, le secteur de la brasserie marque des points. Les va- leurs moyennes font l’actua- lité de l’AI40. Page 9 BANQUES ET ASSURANCES Ecobank plante son drapeau en Afrique du Sud Ecobank a marqué l’ouver- ture officielle de son bureau d’Afrique du Sud à Johan- nesburg par un dîner de gala organisé le 8 novem- bre 2010 à Summer Place dans le quartier de Sand- ton. Page 6 La banque commerciale à la recherche d’un nouveau modèle économique Face à la crise de confiance sans précédent qui frappe les rapports entre banques et clients dans le monde oc- cidental, de nouveaux mo- dèles sont indispensables. Analyse. Page 5 ENTREPRISES ET MARCHéS Finances : les spéculateurs ont lâché le coton Les récentes déclarations des dirigeants chinois ont eu des conséquences direc- tes sur les cours des matiè- res agricoles. Le coton en est l’exemple parfait. Page 5 Maroc : quid de la consommation intérieure du tourisme ? Le tourisme progresse au Maroc, mais beaucoup moins vite que le PIB. La fau- te à un tourisme récepteur trop lié aux soubresauts de l’économie mondiale. Page 22 POLITIQUE Bataille annoncée pour les eaux du Nil Suite aux déclarations de Meles Zenawi, Premier mi- nistre éthiopien, mardi 23 novembre, accusant l’Egypte de mener un plan de désta- bilisation contre le régime éthiopien pour gagner « la bataille » des eaux du Nil. Page 22 L’Europe rencontre l’Afrique à Tripoli Desertec, projet néocolonial ou nouvelle arche de Noé ? Côte d’Ivoire : en aendant le troisième tour Dossier agriculture : le Cameroun ambionne de nourrir la CEMAC Casablanca : marche pour l’unité naonale Alors que les négociations sur les APE trai- nent en longueur, l’Europe a rencontré l’Afri- que à Tripoli. Les dossiers politiques ont tenu le haut du pavé. Sur le fond, la question d’un partenariat économique équilibré entre l’Eu- rope et l’Afrique, traitée loin des caméras, reste le principal point d’achoppement entre les deux parties. En prélude de cette rencon- tre, Mohamed Ibn Chambas, nouveau secré- taire général des ACP, nous déclare, dans une interview exclusive, que « l’échec des négocia- tions sur les APE ne peut pas être totalement écarté ». Pourquoi un tel blocage ? Qu’est-ce qui change fondamentalement par rapport à la convention précédente ? Lire l’interview en page 2 Pour ses détracteurs, le projet Desertec est une nouvelle entreprise coloniale. Des analys- tes lui prédisent le même sort que le Titanic, alors que d’autres, optimistes, parlent d’une nouvelle arche de Noé. Voilà ce qu’en pense Michael Straud, à la tête du pôle commu- nication de la fondation Desertec. « C’est Sa Haute Majesté Royale le Prince Hassan bin Talal de Jordanie qui a encouragé les Européens au Forum sur l’énergie mondiale (World Energy Dialogue) de 2006 à concrétiser le projet. L’objectif principal est de développer un master plan pour une introduction rapide et à grande échelle de l’énergie solaire comme source d’énergie propre, avec des coûts en baisse permanente, des réserves illimitées et un béné- fice certain pour les pays de la MENA. » Lire en page 4 La proclamation des résultats du second tour ne clôt pas le proces- sus électoral. Les législatives vont constituer un troisième tour, si les extrémistes des deux camps veulent bien accepter le verdict de la Commission électorale in- dépendante. Le couvre-feu décidé unilatéralement par le président Gbagbo, à la demande de son chef d’Etat-major, a provoqué un vif re- gain de tension. Il a été désaprouvé par son rival Ouattara, mais aussi par le Premier ministre Soro, le médiateur Compaoré et la Commission électorale in- dépendante. Avant même la fin du scrutin, les accusations ont fusé dans les deux camps. Les deux candidats semblent prêts à contester l’issue du scrutin, si elle leur était défavorable. Lire en page 3 Canne à sucre, huile de palme, coton, cacao, etc. L’agriculture camerounaise ne manque pas d’atouts pour s’imposer dans la zone CEMAC et sur le marché inter- national. Comme partout en Afrique, les difficultés ont trait à l’accès au financement, à la mécanisation et, en- tre autres, à l’accès aux engrais. Lire notre dossier central consacré aux potentialités du secteur, filière par filière. Lire en pages 12 à 21 Ils étaient plus de 3 millions de personnes pour les organisa- teurs, un peu plus de 2 millions selon la police, à avoir bravé la grisaille casablancaise de ce dimanche 28 novembre pour exprimer leur solidarité aux onze agents des forces de l’or- dre tombés en martyrs lors des événements dramatiques de Laâyoune. Le sens d’une marche. Lire en page 22 Mohamed Ibn Chambas : « L’Observatoire ACP, comme son nom l’indique, va se focaliser principalement sur la mobilité des populations du Sud vers des pays du Sud. » Michael Straud : « Les grands médias essaient de présenter le projet Desertec et son alter ego Transgreen comme deux projets rivaux. C’est tout le contraire. » Les résultats n’étaient pas connus à l’heure de mettre sous presse. Le programme vise un hectare de bananiers plantains par paysan

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Les Afriques

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Page 1: Les Afriques n141

R é d a c t i o n : A b i d j a n , C a s a b l a n c a , D a k a r l N o 1 4 1 : 2 a u 8 d é c e m b r e 2 0 1 0

Afrique CFA 1500 FCFA - Algérie : 80 DA - Belgique 1,9 a - Canada 3,50 $ CAD - France 1,9 a - France OM 2,20 a - Italie 1,90 a - Luxembourg 1,9 a - Maroc 12 DH - Suisse CHF 3,80 - Tunisie 2,3 DT

BoursesL’emprunt Port autonome de Dakar flotte à AbidjanL’admission à la cote de l’emprunt obligataire PAD 7% 2010-2017 était pré-vue pour le 30 novembre prochain. Un contrat de li-quidité a été signé, une in-novation majeure.

Page 9

Le secteur de la brasserie fait mousser la BourseAlors que les minières et les bancaires marquent le pas, le secteur de la brasserie marque des points. Les va-leurs moyennes font l’actua-lité de l’AI40.

Page 9

BAnques et AssurAnces

ecobank plante son drapeau en Afrique du sudEcobank a marqué l’ouver-ture officielle de son bureau d’Afrique du Sud à Johan-nesburg par un dîner de gala organisé le 8 novem-bre 2010 à Summer Place dans le quartier de Sand-ton.

Page 6

La banque commerciale à la recherche d’un nouveau modèle économiqueFace à la crise de confiance sans précédent qui frappe les rapports entre banques et clients dans le monde oc-cidental, de nouveaux mo-dèles sont indispensables. Analyse.

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entrePrises et mArchés

Finances : les spéculateurs ont lâché le cotonLes récentes déclarations des dirigeants chinois ont eu des conséquences direc-tes sur les cours des matiè-res agricoles. Le coton en est l’exemple parfait.

Page 5

maroc : quid de la consommation intérieure du tourisme ?Le tourisme progresse au Maroc, mais beaucoup moins vite que le PIB. La fau-te à un tourisme récepteur trop lié aux soubresauts de l’économie mondiale.

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PoLitique Bataille annoncée pour les eaux du nilSuite aux déclarations de Meles Zenawi, Premier mi-nistre éthiopien, mardi 23 novembre, accusant l’Egypte de mener un plan de désta-bilisation contre le régime éthiopien pour gagner « la bataille » des eaux du Nil.

Page 22

L’Europe rencontre l’Afrique à Tripoli

Desertec, projet néocolonial ou nouvelle arche de Noé ?

Côte d’Ivoire : en attendant le troisième tour

Dossier agriculture : le Cameroun ambitionne de nourrir la CEMAC

Casablanca : marche pour l’unité nationale

Alors que les négociations sur les APE trai-nent en longueur, l’Europe a rencontré l’Afri-que à Tripoli. Les dossiers politiques ont tenu le haut du pavé. Sur le fond, la question d’un partenariat économique équilibré entre l’Eu-rope et l’Afrique, traitée loin des caméras, reste le principal point d’achoppement entre les deux parties. En prélude de cette rencon-

tre, Mohamed Ibn Chambas, nouveau secré-taire général des ACP, nous déclare, dans une interview exclusive, que « l’échec des négocia-tions sur les APE ne peut pas être totalement écarté ». Pourquoi un tel blocage ? Qu’est-ce qui change fondamentalement par rapport à la convention précédente ?

Lire l’interview en page 2

Pour ses détracteurs, le projet Desertec est une nouvelle entreprise coloniale. Des analys-tes lui prédisent le même sort que le Titanic, alors que d’autres, optimistes, parlent d’une nouvelle arche de Noé. Voilà ce qu’en pense Michael Straud, à la tête du pôle commu-nication de la fondation Desertec. « C’est Sa Haute Majesté Royale le Prince Hassan bin Talal de Jordanie qui a encouragé les

Européens au Forum sur l’énergie mondiale (World Energy Dialogue) de 2006 à concrétiser le projet. L’objectif principal est de développer un master plan pour une introduction rapide et à grande échelle de l’énergie solaire comme source d’énergie propre, avec des coûts en baisse permanente, des réserves illimitées et un béné-fice certain pour les pays de la MENA. »

Lire en page 4

La proclamation des résultats du second tour ne clôt pas le proces-sus électoral. Les législatives vont constituer un troisième tour, si les extrémistes des deux camps veulent bien accepter le verdict de la Commission électorale in-dépendante. Le couvre-feu décidé unilatéralement par le président Gbagbo, à la demande de son chef d’Etat-major, a provoqué un vif re-gain de tension. Il a été désaprouvé

par son rival Ouattara, mais aussi par le Premier ministre Soro, le médiateur Compaoré et la Commission électorale in-dépendante. Avant même la fin du scrutin, les accusations ont fusé dans les deux camps. Les deux candidats semblent prêts à contester l’issue du scrutin, si elle leur était défavorable.

Lire en page 3

Canne à sucre, huile de palme, coton, cacao, etc. L’agriculture camerounaise ne manque pas d’atouts pour s’imposer dans la zone CEMAC et sur le marché inter-national. Comme partout en Afrique, les difficultés ont trait à l’accès au financement, à la mécanisation et, en-tre autres, à l’accès aux engrais. Lire notre dossier central consacré aux potentialités du secteur, filière par filière.

Lire en pages 12 à 21

Ils étaient plus de 3 millions de personnes pour les organisa-teurs, un peu plus de 2 millions selon la police, à avoir bravé la grisaille casablancaise de ce dimanche 28 novembre pour exprimer leur solidarité aux onze agents des forces de l’or-dre tombés en martyrs lors des événements dramatiques de Laâyoune. Le sens d’une marche.

Lire en page 22

Mohamed Ibn Chambas : « L’Observatoire ACP, comme son nom l’indique, va se focaliser principalement sur la mobilité des populations du

Sud vers des pays du Sud. »

Michael Straud : « Les grands médias essaient de présenter le projet Desertec et son alter ego Transgreen comme deux projets rivaux. C’est tout le contraire. »

Les résultats n’étaient pas connus à l’heure de mettre

sous presse.

Le programme vise un hectare de bananiers plantains par paysan

Page 2: Les Afriques n141

2 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 ActuAlité

Groupe Les AfriquesEdition et Communications SA

Société anonyme au capital de 2 200 000 CHF.11, rue de la Rôtisserie, 1204 Genève (Suisse)

www.lesafriques.com

Président administrateur déléguéAbderrazzak Sitaïl

Chargée de missionSabrina Simi

EditeurEdition Financière du Sud (Paris), filiale

à 100% de Les Afriques Edition et Communication SA.

Directeur de la PublicationAbderrazzak Sitaïl

Directeur de la RédactionAdama Wade

Rédacteur en chef, Chérif El Walid Seye, Dakar. Grand Reporter, Ismaïla Aidara, Paris, Dakar. Conseiller de la rédaction, intelligence

économique, Guy Gweth, Paris. Conseiller de la rédaction, environnement, Thierry Téné, Lille. Banques et Assurances: Walid Kefi, Tunis (chef de rubrique), Hance Gueye, Dakar. Bourses et marchés: François Bambou, Yaoundé. Matières

premières et négoce: Bénédicte Chatel, Paris, Anne Guillaume-Gentil, Paris, Veronique Narame,

Ouagadougou. Industrie & Services: Louis Amédée, Abidjan (chef de rubrique), Olivier

Tovor, Lomé, Willy Kamdem, Yaoundé, Achille Pibasso, Douala.

Edition MarocDaouda Mbaye, Casablanca. Mohamed Baba Fall,

Casablanca. Khalid Berrada, CasablancaEdition Internet – en français

Adama Wade, Casablanca. Ismaïla Aidara, Dakar. Mohamedou Ndiaye, Dakar

Edition Internet - en anglaisFrançois Conradie, Cape Town. Dave Barraud,

Londres. François Bambou, YaoundéChroniqueurs

Economie: François Konan, New York. Matières premières & coton : Philippe Bourgeois, Paris. Courrier de l’Asie : Mahacine Mokdad, Ceylan

OpérateurSéquence Media SA

Tél : +41 22 301 96 15 – www.sequencemedia.com

Abonnement et distributionSarah Modnak, Casablanca : [email protected]

ImpressionRotimpres, Aiguaviva (Spain).Ecoprint, Casablanca (Maroc).

DiffusionPresstalis, Sapress,

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Direction marketing et commercialeIbrahima Thiam, Casablanca

([email protected])Responsable e-marketing : Khalid Essajidi,

Casablanca

Dépôt légal : novembre 2010

© Reproduction interdite sans l’accord écrit de l’éditeur

Edition internationale : Commission paritaire : 1012 C 89135

Edition Maroc : Bulletin Officiel : Décret n° 2-08-121 du 9 rabii 1429 (7 mars 2008) portant autorisation de l’édition du journal, « Les Afriques » au Maroc, paru

dans le B.O.N° 5618-26 rabii 1429 (3-4-2008)

Mohamed Ibn Chambas: « L’échec des négociations des APE ne peut pas être totalement écarté »

Les Afriques : Monsieur le secrétaire géné-ral, la convention UE/ACP a été révisée en juin dernier à Ouagadougou. Qu’est-ce qui change fondamentalement par rapport à la convention précédente ? Quels en sont les progrès ainsi que les limites ?Mohamed Ibn Chambas : D’entrée de jeu, il convient de préciser que la deuxième révision de l’Accord de partenariat ACP-CE de Cotonou n’avait pas pour but une refonte totale des dis-positions régissant le partenariat, mais l’intro-duction, là où il convenait, de quelques retou-ches ou de quelques ajouts destinés à adapter le cadre de coopération aux évolutions du contexte international, de manière à rendre le

partenariat encore plus efficace, notamment au regard des Objectifs du millénaire pour le développement. Ceci dit, l’Accord révisé comporte un certain nombre de modifications qui ont une inciden-ce, par exemple, sur les institutions participant à l’animation du partenariat. Ainsi, le rôle de l’Union africaine et des organisations régiona-les a été renforcé pour ce qui concerne certains aspects de l’Accord. Ce recadrage permettra de donner plus de profondeur à l’intégration régionale, sur la base d’une approche différen-ciée tenant compte des spécificités régionales.Il en va de même de l’assemblée parlementaire paritaire ACP-UE et des parlements nationaux des Etats ACP, qui ont désormais la possibilité d’influer sur la définition et la mise en œuvre de certains instruments importants de la coo-

pération, tels que les documents de stratégie par pays et par région, les Accords de partena-riat économique (APE) et le Fonds européen de développement (FED).Le renforcement de l’efficacité de l’aide, la co-hérence des politiques de l’Union européenne par rapport aux priorités de développement des Etats ACP et la prise en compte des effets des chocs exogènes sur les programmes de dé-veloppement sont autant d’avancées enregis-trées dans le cadre de la deuxième révision. Un autre innovation est l’acceptation par les deux parties du principe de rencontres ponc-tuelles au niveau des chefs d’Etat et de gou-vernement pour donner les impulsions et les

orientations politiques nécessaires sur des questions d’importance stratégique. La révision a également permis de s’ac-corder sur la nécessité d’établir un lien étroit entre la paix et la sécurité, d’une part, et la réduction de la pauvreté, d’autre part, ainsi que sur l’octroi d’une assistance spécialement ciblée sur les Etats fragiles. Les dispositions relatives à l’assistance humanitaire ont, aussi, été amendées, pour permettre d’apporter des réponses adéquates et plus rapides aux situations d’urgence.Enfin, s’agissant du dialogue politique sur les éléments essentiels (droits de l’Homme, principes démocratiques et Etat de droit) et l’élément fondamental (bonne gouvernance) de l’Accord de

Cotonou, les deux parties ont réaffirmé leur égalité dans le respect de leurs obligations par rapport à ces éléments.Comme toute œuvre humaine, le partenariat ACP-UE reste, bien évidemment, perfectible. Les points sur lesquels les deux parties n’ont pas pu aboutir à une approche commune et les limites qui seront décelées en cours de mise en œuvre ne seront pas éludés au cours de la troi-sième révision, qui interviendra en 2015.

LA : Les Accords de partenariat économi-que tardent à être signés. Que faut-il pour qu’un Accord puisse être conclu ? Quels sont aujourd’hui les principaux points d’achop-pement ? Comment voyez-vous l’avenir de ces négociations ? Un échec définitif est-il en-visageable ? Que se passerait-il alors ?

MIC : Depuis huit ans, les Etats ACP négocient des Accords de partenariat économique (APE) avec l’Union européenne, dans le cadre de dif-férentes configurations régionales. A ce jour, 36 pays, sur les 77 que compte le groupe ACP, ont soit paraphé, soit signé un accord intéri-maire ou complet avec l’UE.Les négociations en vue de la conclusion d’un accord global, applicable même aux pays qui n’ont pas encore conclu un APE intérimaire, se poursuivent, sauf pour la région CARIFORUM, qui a déjà signé un accord complet. Il est im-portant de noter que certains des pays ACP ayant signé un APE intérimaire ont annoncé leur intention de conclure un APE régional avant toute notification à l’OMC.Bien que beaucoup de progrès aient été réa-lisés dans certains domaines, certaines des questions qui préoccupent le plus les pays et régions ACP n’ont pas encore été réglées.Ces questions litigieuses sont notamment :la définition de l’essentiel des échanges et le délai de libéralisation les taxes à l’exportation

et les restrictions quantitatives ;l’introduction d’une clause de la nation la plus favorisée (NPF), la clause de non-exécution, la clause de statu quo, les rè-gles d’originelles mesures de sauvegarde, notamment dans le domaine agricole, et le traitement des industries naissantes, la suppression progressive des prélèvements communautaires, la suppression des sub-ventions à l’exportation, la prise en compte de la dimension développement, à travers le financement de la mise en œuvre des APE.Si des solutions pratiques sont trouvées dans les négociations autour de ces questions liti-gieuses, alors, ces négociations pourraient être conclues. Pour les pays ACP, les APE et leur contenu doivent leur assurer un accès au mar-ché, accru et prévisible, être des catalyseurs de développement et servir de vecteur à l’intégra-tion régionale.La récente réunion du Comité ministé-riel commercial conjoint ACP-UE, tenue à Bruxelles le 22 octobre 2010, a permis aux pays ACP et à l’Union européenne de poursui-vre le dialogue et d’échanger sur les différents problèmes, ayant trait aussi bien à la conduite des négociations qu’à la mise en œuvre. Je pense qu’il y a des échéances à venir où les né-gociateurs européens et des pays ACP, munis d’instructions politiques nouvelles, pourront cheminer ensemble pour le déblocage de ces négociations, en vue de leur conclusion.L’hypothèse d’un échec ne doit cependant pas être totalement écartée, si les deux par-ties ne font pas preuve de plus de flexibilité dans leurs positions de négociation. Dans l’hypothèse d’un échec définitif des négo-ciations, les pays qui ont conclu un APE bénéficieraient d’un accès en franchise de droits et hors contingent de leurs expor-tations sur le marché communautaire ; les pays ACP non PMA (Pays moins avancés) et non-signataires d’un APE se verraient re-versés au Système de préférences générali-sées classique ; alors que les pays ACP PMA non-signataires verraient leurs exportations traitées dans le cadre de l’initiative « Tout sauf les armes ».Mais, nous avons bon espoir qu’avec l’impli-cation, côté européen, de certaines instances et l’intérêt renouvelé des ministres en charge du développement et des parlementaires de l’UE, les négociations APE connaitront des progrès dans les prochains mois.

Le nouveau secrétaire général des ACP est préoccupé par le blocage des négociations des APE. Il n’exclut pas l’hypothèse d’un échec définitif.

Mohamed Ibn Chambas : « Nous avons bon espoir qu’avec l’implication, côté européen, de certaines instances et l’intérêt renouvelé des ministres en charge du développement et des parlementaires de l’UE, que les négociations APE

connaitront des progrès dans les prochains mois. »

« Je pense qu’il y a des échéances à venir où les négociateurs européens et des pays ACP, munis

d’instructions politiques nouvelles, pourront cheminer ensemble

pour le déblocage de ces négociations, en vue de leur

conclusion. »

Page 3: Les Afriques n141

Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 3ActuAlité

Côte d’Ivoire : en attendant le troisième tour

Le second tour de la présidentielle ivoirienne n’a pas tenu les pro-messes du premier. La campagne

électorale, plutôt bon enfant jusque-là, s’est durcie. De manière plus ou moins feutrée, les discours ethnicistes ont res-surgi et chauffé les esprits. Selon les sour-ces, le bilan des affrontements est varia-ble, mais il est certain qu’avant même le jour du scrutin, au moins trois personnes avaient été tuées. Ni le face-à-face apaisé entre les deux finalistes, ni les appels au calme des communautés religieuses, ni la visite du médiateur Blaise Compaoré, ni les mises en garde des Nations Unies n’ont apaisé les esprits et, dimanche, pen-dant le scrutin, il a été reconnu, de source officielle, la mort de deux personnes, un militaire et un civil. Trois morts, selon les Nations Unies.

Des intimidationsCe climat explique, au moins partielle-ment, que le remarquable taux de parti-cipation du premier tour (83%) n’ait pas été atteint au second. Ce n’est pas la seule explication. Le couvre-feu décidé unila-téralement par le président Gbagbo à la demande du chef d’Etat-major des for-ces armées loyales, dénoncé par son rival Ouattara, regretté par le Premier minis-tre Soro, le médiateur Blaise Compaoré et la Commission électorale indépendan-te n’y a pas été étranger. Les intimidations pour empêcher les

adversaires de voter auxquelles les deux camps se sont livrés dans leurs fiefs res-pectifs, y ont aussi contribué. Il semble aussi que les citoyens, après avoir expri-mé leur lassitude face à cette crise longue de plus de dix ans, aient estimé avoir dé-livré leur message et pouvoir laisser les politiciens à leurs coûteuses et stériles empoignades.

La mobilisation des Baoulés, partisans du candidat de l’ancien président Bédié, arrivé troisième avec 25% des votes, a également pu faire défaut. Ce serait au détriment des reports en faveur de l’allié au sein du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix, malgré la participation des ténors baoulés à la campagne de Ouattara et la promesse du poste de Premier ministre au PDCI.

Accusations croiséesAvant même la fin du scrutin, les accusa-tions ont fusé dans les deux camps. L’ancien Premier ministre Pascal Affi N’Guessan, di-recteur de campagne de Laurent Gbagbo, a dénoncé un vote « globalement non trans-parent » dans le nord du pays, contrôlé par les Forces nouvelles (FN). Il a également soutenu que cinq membres des forces de sécurité, deux policiers, un gendarme et deux soldats ont été tués. « Depuis le début du scrutin, nous avons observé des blocages systématiques. Des barrages ont été mis en place par de jeunes partisans de Gbagbo qui contrôlaient les cartes d’électeurs en repoussant les person-

nes susceptibles de voter pour l’oppo-sition », a répliqué Marcel Tanon, directeur de campagne d’Alassane Ouattara.Cristian Preda, chef de la mission d’observation de l’Union euro-péenne, a confirmé que « dans les zones de l’ouest et du sud il y a eu à plusieurs endroits des barricades, des barrages » sans que leur ampleur, et donc l’incidence sur le scrutin, n’ait pu être établie. Dans l’attente de la proclamation des résultats, tout se passe comme si les deux candidats s’aménageaient la

possibilité de contester l’issue du scrutin, si elle leur était défavorable. Ils se sont enga-gés pourtant à la respecter et promis de ne recourir qu’aux voies de recours légales. Un troisième tour aura lieu, quelle que soit l’issue de ce deuxième. Il peut se jouer par les bulletins de vote, avec les législatives prévues dans les prochains mois, ou par les kalachnikovs, comme les bruits de guerre le font craindre.

Chérif Elvalide Sèye

LA : Malgré la révision de la convention, le 10ème Fonds euro-péen de développement n’est toujours pas financé. Cela ne vous inquiète-t-il pas pour l’avenir de la coopération entre les deux partenaires ?MIC : Le 10ème FED a été adopté en 2006. Il est actuellement en cours de mise en œuvre et les revues à mi-parcours ont été en-treprises au niveau national. Très prochainement, débuteront les revues à mi-parcours au niveau régional.La deuxième révision de l’Accord, signée à Ouagadougou en juin 2010, n’a pas encore son volet financier, qui sera le 11ème FED.Il est de fait qu’à l’instar du 10ème FED, le groupe ACP a signé un Accord sans aucune indication du montant du cadre finan-cier pluriannuel pour la période qui sera couverte par l’Accord révisé.Dans le cas du 10ème FED, une annexe (1 a) a été insérée dans l’Accord, qui donnait en langage chiffré les éléments que l’UE prendrait en compte pour déterminer le montant du 10ème FED, à savoir celui du 9ème FED hors reliquat, auquel il a été convenu d’ajouter l’inflation, la croissance au sein de l’UE et de l’élargis-sement de celle-ci au dix nouveaux membres, en 2004.Pour le cadre financier pluriannuel devant succéder au 10ème FED, il n’a pas été possible pour l’UE de procéder de la même manière, pour la simple raison qu’elle n’avait pas encore en-tamé ses propres discussions sur ses perspectives financières pour la période 2014-2020.Cependant, à Ouagadougou, l’UE a réaffirmé sa volonté po-litique de mettre à la disposition des pays ACP des ressources substantielles, dans le cadre du prochain cadre financier plu-riannuel pour la période 2014-2020. A cette fin, il est prévu, cette année, une évaluation conjointe des performances du 10ème FED, dont les résultats serviront de base pour déterminer le niveau des ressources à mettre à disposition.LA : L’absorption des fonds européens demeure faible. A qui la faute ? Comment améliorer cette situation, d’autant plus paradoxale que les besoins de financement des pays ACP sont aussi importants qu’insatisfaits.MIC : Le problème de la capacité d’absorption ne date pas d’aujourd’hui. Plusieurs facteurs contribuent à brider l’absorp-tion des ressources, parmi lesquels on peut relever la complexi-té des règles et procédures et l’insuffisance des capacités dans certains pays. Cependant, il faut noter que, dans l’ensemble, les performances ont évolué sous le 9ème FED, et que certaines rè-gles ont été réduites et par endroits simplifiées.Avec le 10ème FED, l’appui budgétaire, là où cela est possible, est devenu le principal véhicule pour acheminer l’aide et le re-cours aux règles nationales a été consacré dans le nouvel article 19c, adopté en juin 2008 par le conseil des ministres ACP-UE. Certes, des efforts restent à faire et le Secrétariat, avec l’appui des Ordonnateurs nationaux et régionaux et en coordination avec la Commission européenne, veille à consolider les progrès réalisés et à les élargir à d’autres pays.

LA : Un observatoire ACP sur les migrations vient d’être mis en place, alors même que les pays occidentaux se barricadent de plus en plus. Que faut-il en espérer ?MIC : Effectivement, le lancement officiel de l’Observatoire ACP sur les migrations a eu lieu à la Maison ACP, le 25 oc-tobre 2010, en présence de nombreuses personnalités de la Commission européenne et du Parlement européen, ainsi que de notre Ambassadrice de bonne volonté, la chanteuse Khadia Nin. Immédiatement après, des experts de haut niveau en ma-tière de migration, des représentants des gouvernements et de la société civile des douze pays pilotes ont tenu une réunion afin de définir le plan d’action qui guidera les travaux de l’Observa-toire. Il est à souligner que la mise en place de cet Observatoire est le résultat de la coopération en matière de migration entre le groupe ACP et l’Union européenne. Il concrétise l’engage-ment inscrit dans l’Accord de Cotonou. L’Observatoire ACP, comme son nom l’indique, va se focaliser principalement sur la mobilité des populations du Sud vers des pays du Sud. Très peu de recherches ont été entreprises sur ce sujet dans les pays ACP et les politiques nécessaires n’ont pas été appliquées. L’Observatoire ACP a pour but de rassembler et d’analyser les données sur ces flux migratoires, afin d’aider les gouvernants, les scientifiques, les membres de la société civile et le public en général à mieux comprendre comment se font les migrations. Outre son ambition d’améliorer la qualité et la quantité des informations disponibles, l’Observatoire compte mettre en exergue l’apport économique et financier des mi-grants dans leurs nouveaux lieux d’habitation. Il faut espérer aussi que les gouvernants pourront s’approprier les résultats des travaux de l’Observatoire, afin de réduire les aspects néga-tifs de la migration et d’exploiter les facteurs positifs qui peu-vent favoriser le développement.Donc, l’Observatoire doit sortir de la zone d’ombre où elles se trouvaient, les directions réelles de la mobilité des populations ACP, qui n’émigrent pas autant qu’on puisse le penser vers les pays occidentaux. J’espère que cet Observatoire remplira le mandat qui lui a été assigné et sera un instrument fondamental pour les pays ACP.

Propos recueillis par Chérif Elvalide Sèye

La proclamation des résultats du second tour ne clôt pas le pro-cessus électoral. Les législatives vont constituer un troisième tour, si les extrémistes des deux camps ne choisissent pas les kalach-nikovs plutôt que les bulletins de vote.

Partenariat Europe-Afrique, dites-vous ?

Point de vue africain

En cet automne 2010, le président américain Barack Obama est excentré sur la photo de famille du G20. Une première. Voulue, planifiée, décidée ? Bref, c’est le signe

d’un changement, dont l’Afrique n’a pas encore mesuré l’am-pleur sur le Vieux continent et l’Amérique. Les crises politi-ques, sociales et économiques traduisent l’essoufflement d’un système prospère, déchiré par les inégalités en son sein. Le rea-ganisme et le thatchérisme, symbolisés par la privatisation à outrance et sanctifiés par le retrait de l’Etat des domaines de la santé, de l’éducation et de l’habitat, a abouti à la création de millions de chômeurs et de laissés pour compte. De puissantes oligopoles ont émergé et veillent sur l’information. Le niveau de scolarité des Européens et des Américains a baissé. Les be-soins en couverture sociale (retraite, maladie) ont augmenté, sans doute à cause de l’individualisme extrême d’une société où les parents sont envoyés dans les hospices. L’inquiétude du citoyen face aux aléas de la vie fait le bonheur des compagnies d’assurance et des spéculateurs de tous bords.Et, comme dans tout système en déclin, le protectionnisme, le populisme et la recherche du bouc émissaire sont de rigu-eur. On chasse les Roms. On fiche les Africains. Pendant que se tient le sommet Europe-Afrique à Tripoli et que se pour-suivent les négociations autour des APE, le Vieux continent continue à ériger des murs avec l’Afrique. D’un côté, on nous

demande d’ouvrir nos marchés, de faciliter l’accès à nos ma-tières premières et à nos terres, de faire jouer la libre concur-rence dans les domaines les plus stratégiques, de renoncer aux contrats chinois, etc. Et de l’autre, on ferme aux Africains les portes de l’Europe, à travers des barrières non tarifaires (sani-taires, normatives) et par le moyen du visa, appliqué dans un seul sens. Comment un entrepreneur ivoirien, obligé de faire le pied de grue devant une ambassade pendant une semaine pour ob-tenir son visa, peut-il rivaliser dans l’économie globale sur le même pied d’égalité avec son homologue européen ou améri-cain, accueilli en roi dans tous les postes frontières du monde ? C’est sûr, si on appliquait parfaitement les mêmes règles aux Africains et aux Européens, il y aura plus de chances de favo-riser une répartition des richesses entre le Nord et le Sud et au sein des pays. L’absence d’un tel débat sur la réciprocité est frappante chez les élites africaines. Cela s’explique sans doute par la double nationalité (la plupart de ces élites africaines possèdent un passeport européen, font accoucher leurs femmes en Europe et y disposent de résidences secondaires). A moins que cela ne soit le fait d’un vieux complexe de colo-nisé, pudique dès lors qu’il s’agit de réclamer l’égalité de traite-ment. Pourquoi la Banque mondiale, qui promeut le libre en-treprendre à travers son classement Doing business, n’adjoint-il pas dans les colonnes de ce document un nouveau critère sur les « entraves à la circulation des personnes et des biens » ? Parce que l’Union africaine ne l’a pas encore réclamé ?En attendant, et en dépit des discours convenus, tous les som-mets Europe – Afrique viseront le but ultime de préserver l’Afrique comme un marché et une concession coloniale au service de l’Europe. Ce qu’on appelle APE n’est-il pas une ma-nière détournée de faire barrage à la Chine, plus compétitive et moins chère ?

Adama Wade, Casablanca

« Des barrages ont été mis en place par

de jeunes partisans de Gbagbo qui contrôlaient les cartes d’électeurs en

repoussant les personnes susceptibles de voter pour l’opposition. »

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4 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 ActuAlité

United Bank for Africa du Nigeria ouvre une succursale à Maputo

Avec l’ouverture d’une succur-sale à Maputo, UBA étend sa couverture sur dix-sept pays africains. Clément Isikwe, pré-sident de l’UBA-Mozambique, a mentionné lors du lancement officiel, lundi 22 novembre, que la banque met à la disposition de la clientèle (marché mo-

zambicain) une vaste gamme de solutions de classe mondiale. Il n’a pas occulté son ambition d’améliorer la compétitivité du secteur financier local. UBA emploie déjà environ 50 personnes au Mozambique et a l’intention d’ouvrir des succursales dans d’autres parties du pays, dès l’année prochaine, apprend-t-on. A noter qu’aujourd’hui, UBA compte 7,5 millions de clients dans 750 succursales à travers le continent et dispose de bu-reaux à New York, Londres et Paris. Ses actifs montent à plus de 19 milliards $.

Kaberuka salue le leadership du NigériaDans le cadre de sa visite au Nigéria, du 23 au 24 novembre, le président de la BAD Kaberuka a passé en revue le por-tefeuille du groupe de la Banque dans le pays. A ce jour, 33 projets et programmes de la Banque sont en cours d’exécution au Nigeria. Depuis le début de ses opérations dans ce pays, en 1971, le montant cumulé des opérations du groupe de la BAD est équivalent à 4,5 milliards $. D’importants projets d’appui aux secteurs financier, agricole et de l’éducation sont en cours de réalisation. Vu le leadership du Nigeria au sein de la Banque, ainsi que l’importante contribution du pays au développement de l’Afrique, avec la création du Fonds spécial du Nigeria, en 1976, et du Fonds de coopération technique du Nigeria, en 2004.

Gulf African Bank cible le marché de l’Afrique de l’EstNajmul Hassan, directeur général de Gulf African Bank, a an-noncé son intention de se développer dans la région Afrique de l’Est, notamment au Kenya. Il a alors soutenu : « Nous allons ouvrir deux nouvelles succursales au Kenya en fin d’année, ce qui porte notre réseau d’agences à seize. L’année prochaine, nous pré-voyons de nous étendre en Ouganda et en Tanzanie, cela portera le nombre d’agences à un total de dix-huit dans la région ». La deuxième banque islamique dans ce pays a réalisé un béné-fice net de 42,7 millions de shillings au terme des neuf premiers mois de l’année, contre une perte de 208,8 millions de shillings à la même période de l’année dernière.

Les bénéfices de NIC Bank en hausse A fin septembre, NIC Bank du Kenya a enregistré un bénéfice avant impôts en hausse de 69%. Ce résultat brut s’est établi à 2 milliards de shillings, contre 1,2 milliard enregistré fin septem-bre 2009. Pour James Macharia, directeur général du groupe, qui a présenté ces résultats, jeudi 25 novembre à Nairobi, cette bonne tenue est consécutive à la fois à 27% de croissance du portefeuille de prêts et à une baisse des coûts. Le revenu net s’est accru, passant de 566 millions de shillings à 2,4 milliards de shillings, soit une hausse de 31% en glissement annuel.

Le gouverneur de la Banque centrale angolaise pour l’expansion de l’activité bancaireLes autorités angolaises ambitionnent de relever le taux de bancarisation des populations à plus de 20%. José da Lima Massano, gouverneur de la Banque centrale d’Angola, a assuré, mercredi 24 novembre à la cérémonie de clôture du 3ème Forum sur l’économie et des finances, à Luanda, que le réseau bancaire poursuivra son développement pour couvrir toutes les mu-nicipalités jusqu’en 2012. Il a alors confirmé la garantie de la poursuite d’une expansion permettant l’installation de plus de 1000 agences bancaires dans tous les districts, à l’horizon 2012. Le gouverneur de la B anque centrale a assuré que ce dévelop-pement se poursuivra, malgré les contraintes d’organisation, le fonctionnement et la logistique.

Desertec, un projet néocolonial ou une nouvelle arche de Noé ?

Les Afriques : De nombreux arti-cles de presse ont été écrits sur Desertec. Pouvez-vous nous ex-

pliquer la portée de ce projet ?Michael Straud : L’Homme est confronté aujourd’hui à d’énormes défis : une de-mande globale d’énergie en augmentation rapide à cause de la pression démographi-que et d’une industrialisation progres-sive. Dans le même temps, les émissions globales de CO2 doivent être réduites de manière drastique dans les prochaines années, pour prévenir les désastres dûs au changement climatique. C’est là où le

concept de Desertec offre une solution qui peut être reproduite dans le monde entier. De l’énergie propre peut être produite suffisamment dans les déserts du monde, pour offrir à l’homme assez d’électricité sur les bases d’un développement durable. Desertec est un concept intégré incluant la sécurisation de l’approvisionnement en énergie et la protection du climat dans des domaines aussi variés que la production d’eau potable, le développement socioé-conomique, la politique sécuritaire et la coopération internationale.

LA : Quelle est votre réponse à ceux qui pensent que Desertec est un projet néocolonial ?MS : Le concept du projet Desertec est développé depuis 2003 par un réseau international de scientifiques, appelé Trans-Mediterranean Renewable Energie Cooperation (TREC en abrégé). C’est de ce réseau qu’est sorti le projet. Le physi-cien Dr Gerhard Knies et Sa Haute Majesté Royale Hassan Bin Talal de Jordanie, le président du Club de Rome, ont été les forces motrices derrière la formation et le développement de ce réseau. Le Centre marocain de développement des énergies renouvelables (CDDER), l’organe algérien correspondant (NEAL), libyen (CSES), égyptien (NREA), jordanien (NERC), l’Université yéménite de Sana, ainsi que le centre aérospatial allemand (DLR) ont apporté des contributions significatives au développement du projet. C’est donc Sa Haute Majesté Royale le Prince Hassan bin Talal de Jordanie qui a encouragé les Européens, au Forum sur l’énergie mondiale (World Energy Dialogue) de 2006, à concrétiser le projet. L’objectif principal est de développer un master plan pour une introduction rapide et à grande échelle de l’énergie solaire com-me source d’énergie propre, avec des coûts en baisse permanente, des réserves illimi-tées et un bénéfice certain pour les pays de la MENA. Les Etats concernés liés par l’énergie et la technologie solaire peuvent

former une union puissante et se verront un jour comme une communauté : une communauté d’énergie, de sécurité pour l’eau et le climat, pour un futur commun pour l’Homme et pour l’environnement.

LA : Quelles sont les principales dif-ficultés de Desertec sur le plan politi-que, juridique, technique et financier ? Comment ce projet pharaonique sera-t-il financé ?MS : En 2009, la fondation Desertec, à but non lucratif, a lancé l’initiative in-dustrielle Dii GmbH avec des partenai-

res des secteurs de l’industrie et de la finance. Son but, accélérer l’implémentation du concept Desertec dans la zone Union Européenne et MENA. Sur le long terme, l’objectif est d’être capa-ble de répondre à une demande croissante d’électricité de la part des pays de la zone MENA et, en plus de cela, de répondre, à l’hori-zon 2050, à l’objectif d’au moins 15% de la demande européenne en énergie renouvelable prove-nant du désert. Le projet Dii a fait l’objet de nombreuses études de

faisabilité, traitant des différentes pré-occupations soulevées par le projet en question. Le Dii Gmbh a quatre objectifs clés, d’ici 2012 :Un : développer une plateforme techni-que, économique, politique et réglemen-taire pour permettre des investissements dans le domaine des énergies renouvela-bles et favoriser les interconnexions.Deux : mettre en place les différentes ré-férences du projet (origination) pour les besoins de la faisabilité du projet.Trois : développer un programme à long terme, jusqu’à l’horizon 2050, pour les investissements et le pilotage du projet.Quatre : réaliser des études spécifiques et approfondies.Aussi, Desertec ne doit pas être vu comme un projet singulier de grande envergure, mais plutôt comme un concept modulé. Eu égard à cela, l’on ne doit pas attendre de voir une énorme méthode de finance-ment, mais des approches variées, initiées par différents investisseurs, pour financer des parties spécifiques du projet.

LA : Combien des pay des deux rives de la Méditerranée font partie du projet ? Quelle est la part de chacun d’eux ?MS : Contrairement à l’opinion géné-rale, le concept Desertec ne peut pas être vu comme un seul projet transfrontalier d’énergie solaire. Mais, au contraire, com-me un réseau interconnecté de différents projets solaires situés dans différents pays de la Méditerranée. Aussi, les pays ne sont pas directement impliqués dans le pro-cessus Desertec. Leur apport est crucial dans la création d’une plateforme politi-que nécessaire à l’amorçage. Par exemple, la Tunisie et le Maroc ont manifesté un grand intérêt à abriter le projet Desertec et ont déjà présenté d’intéressants pro-grammes de production d’énergie solaire. L’initiative industrielle Dii est directement impliquée dans la réalisation des étu-des de faisabilité et l’implémentation de Desertec dans la zone UE-MENA. Le pro-jet DII dispose de dix-huit actionnaires (1)

de sociétés de différents pays de la région MENA et de l’UE. Chacun de ces action-naires dispose d’un droit de vote dans les processus de décision.

LA : Pourquoi des pays comme la Mauritanie, le Mali et le Niger, qui dis-posent de larges portions désertiques, n’ont pas été impliqués ?MS : Les études menées par le German Aerospace Center (DLR), où est basé le projet Desertec, ont été concentrés sur les pays de la Méditerranée, de l’Europe et du Moyen-Orient. Nous en sommes encore aux études préliminaires. Cela ne veut pas dire que Desertec exclut d’autres pays.

LA : L’objectif de couvrir 15% de la demande européenne en énergie re-nouvelable par Desertec est-il réaliste ? L’énergie solaire sera-t-elle, d’ici là, compétitive compte tenu de son coût actuellement élevé ?MS : Sur le long terme, l’objectif est d’être capable de fournir une part considérable de la demande en électricité et en dessa-lement d’eau de mer à la Zone MENA. En plus de cela, il faut atteindre l’objec-tif de 15% de la demande européenne en énergie renouvelable, d’ici 2050. Ce sont des objectifs ambitieux. Toutefois, les études du centre aérospatial allemand montrent que de tels objectifs sont tout à fait réalisables. Aussi bien les ambi-tions politiques qu’industrielles joueront un grand rôle dans la réalisation de ces buts. Les études du centre allemand ont aussi montré que les coûts d’électricité de la technologie solaire CSP peuvent être réduits de 6% par kWh. Une telle réduction rendra la technologie compé-titive vis-à-vis des sources convention-nelles d’énergie, d’ici les dix prochaines années. L’investissement dans les projets CSP sera très rentable et cela favorisera le développement de ce projet.

LA : Y a-t-il de la place pour deux lions dans la même forêt ? D’une part le projet Transgreen, soutenu par Paris, d’autre part Desertec, promu par l’Allemagne ?MS : Les grands médias essaient de pré-senter le projet Desertec et son alter ego Transgreen comme deux projets rivaux. C’est tout le contraire. Transgreen et Desertec sont deux programmes qui tra-vaillent main dans la main pour ouvrir la voie à l’énergie renouvelable pour un futur renouvelable. Cette complémenta-rité est mise en évidence par le fait que des compagnies comme Siemens sont actionnaire des deux projets. D’un côté comme de l’autre, il a été décidé de mener des études indépendantes qui mettent en évidence tout l’intérêt d’une coopération entre les deux concepts.

Mohamed B. Fall

(1) Liste des actionnaires : www.dii-eumena.com/home/our-shareholders.html

Pour ses détracteurs, le projet Desertec est une nouvelle entre-prise coloniale. Des analystes lui prédisent le même sort que le Titanic, alors que d’autres, optimistes, parlent d’une nouvelle arche de Noé. Voilà ce qu’en pense Michael Straud, à la tête du pôle Communication de la fondation Desertec. Interview.

« On ne doit pas attendre de voir une énorme

méthode de financement, mais des approches variées, initiées par

différents investisseurs, pour financer des parties spécifiques du projet. »

Michael Straud : « Transgreen et Desertec sont deux programmes qui travaillent main dans la

main pour ouvrir la voie à l’énergie renouvelable pour un futur renouvelable. »

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 5BAnques et AssurAnces

Finances : les spéculateurs ont lâché le coton

L’adage populaire connaissait la douche écossaise, il conviendrait désormais de l’appeler douche

chinoise ; en effet, la fièvre qui s’était emparée des prix du coton semble se cal-mer depuis le 10 novembre, sans que l’on puisse l’expliquer par des changements dans les statistiques de production et de consommation, toujours favorables aux producteurs.

C’est une fois encore le gouvernement chinois qui, essayant de mieux combattres les risques inflationnistes et leurs cortèges de désordre par des propos en faveur d’une

politique monétaire moins conciliante, a fait basculer le marché de son point le plus haut.

Que l’on en juge : entre le 10 et le 17 novem-bre, le marché à terme de New York perdait entre 6,5% et 17%, celui de Zhengzhou entre 14 et 25% sur la même période et le très sta-ble Indice A de Cotlook en perdait 8%.

La seule déclaration des autorités chinoi-ses, souhaitant à la fois mieux contrôler la spéculation sur certains produits, dont elle est par ailleurs importatrice en 2011 (céréales, coton, sucre), et éviter une sur-

chauffe de l’économie, en est la cause.Cette situation complique singulièrement la tâche des négociants dans leur activité d’arbitrage, mais aussi celle des filateurs, qui cherchent désespérément un peu de stabilité dans leurs achats. Quand on songe que la stabilité des cours est le but recherché par les autorités chinoises, on reste confondu par l’extrême sensibilité de ces denrées agrico-les à la syntaxe des déclarations, comme aux seuls objectifs macro-économiques de l’Em-pire du Milieu.

On peut prédire bien des soucis de livraisons pour 2011, soit par défaillance du livreur ou bien de celle du filateur lorsqu’on voit un tel éventail de prix sur les six derniers mois. Quoi qu’il en soit, les prix du coton restent encore largement au-dessus de leur coût de revient pour la zone CFA.

Philippe Bourgeois

Les récentes déclarations des dirigeants chinois ont eu des consé-quences directes sur les cours des matières agricoles. Le coton en est l’exemple parfait.

Une fièvre s’était emparée des prix du coton.

La banque commerciale à la recherche d’un nouveau modèle économique

Le scénario catastrophe pour tout banquier honnête est de voir un jour l’ensemble de ses clients au

guichet pour retirer ses dépôts. Selon les vieux manuels d’économie, il s’agit d’une probabilité presque nulle, les agents éco-nomiques, pris à un instant T, manifes-tant toujours des besoins contradictoi-res. Mais, dans une Europe de marché en déconstruction, où 10% des Irlandais ont du mal à payer leurs factures d’élec-tricité et où l’Espagne, le Portugal et la Grèce sont pris d’assaut par les fonds spéculatifs, ce scénario fait l’objet de pro-jections dans les war rooms de certaines institutions financières parmi les plus respectables. La rupture de confiance entre l’homme de la rue et le système fi-nancier est une réalité. L’Irlande avait été, dès les premières salves de la crise, le pre-mier pays de l’euro-groupe à garantir à 100% les dépôts de ses clients. La France avait, dès 2008, ajouté à la garantie du fonds dédié à cet effet celle, politique, de Nicolas Sarkozy. Dans cette France où les mouvements so-ciaux paralysent l’économie depuis août dernier, des groupuscules, emmenés par un ancien footballeur, entendent ainsi punir les banques, boucs émissaires dé-signés responsables de la crise financière, économique et sociale de l’Occident. Rendez-vous a même été pris à travers la blogosphère. Ce sera le 7 décembre prochain. Les réseaux sociaux comme Facebook résonnent d’appels à la révo-lution pacifique contre les spéculateurs. Là où la barricade érigée sur la voie pu-blique avait conduit à mai 68, une action « pacifique » de retrait de fonds devrait suffire en décembre 2010. Le citoyen qui faisait encore plier, il y a quelques années, les politiques au moyen d’une manifesta-tion a perdu toute influence aujourd’hui. Est-ce l’ère de la prise de conscience de la toute-puissance du consommateur dé-posant qui commence ? Si tous les clients agissaient ainsi, comme un seul homme, en retirant leurs avoirs, les banques, qui ne possèdent que 10% de leurs engagements, seraient prises

de court. Si l’action anti-banque du 7 décembre est poursuivie jusqu’au bout et, comme le voudrait le mouvement, 20 millions de personnes retiraient leur argent, que fera-t-on après ? Y-a-t-il des modèles alternatifs ? Là est toute la dif-ficulté, dans un système économique où la banque constitue le canal obligé entre ceux qui disposent de plus d’épargne que de besoins de financement et ceux qui disposent de plus de besoins de finance-ments que d’épargne.

Pas d’alternative à la banque ?Certes, une telle action collective a peu de chances de se matérialiser ; il n’en res-te pas moins que le modèle économique actuel des banques, qui a permis de bâtir des empires et une prospérité dans l’hé-misphère Nord, a peu de chances de sur-vivre. Après tout, et sur un autre registre, Lehmann Brother est tombée toute seule. Et si Goldman Sachs, reine des banques, symbole de l’économie folle, (romancée dans un livre, La Banque, de Marc Roche, correspondant du Monde à Londres et prix du livre de l’économie 2010) tient toujours, c’est au prix d’une doulou-reuse réorientation encore inachevée. Goldman Sachs a sans doute échappé à la crise, mais son image, comme du reste celle de toutes les banques, est plombée. Cette fixation sur les établissements fi-nanciers n’est en fait que l’expression de désarroi de citoyens déçus par les excès d’un ultralibéralisme capable de mobiliser 700 milliards de dollars (Plan Paulson) pour éviter la faillite d’un sys-tème financier, d’injecter 600 milliards d’argent fictif pour fausser la loi de l’of-fre et de la demande, mais avare quand il s’agit de sauver des emplois, de pérenni-ser le système de retraites ou d’instaurer une assurance universelle.

La culture du court termePresque toutes les grandes banques européennes et occidentales ont délaissé le financement de l’économie réelle, très compliquée et très risquée, au profit de la spéculation. L’écart, au sein d’une

même banque, entre les bonus des tra-ders à la Kerviel et les modestes hono-raires des autres employés affectés aux vieilles activités en dit long sur les anta-gonismes du système. Cette culture des rendements à court terme a transformé les banques, autre-fois alliées des industriels, en casino fonctionnant en circuit fermé, où l’ar-gent crée l’argent sur la base des pro-messes d’achat ou de vente et des paris de hausse ou de baisse des matières pre-mières. L’audace est poussée jusqu’au short selling, consistant à vendre et à réaliser des bénéfices sur ce qu’on ne possède pas encore. Des milliards se sont constitués ainsi, depuis des années, expliquant aujourd’hui la résistance des banquiers à abandonner un système d’abord périlleux pour eux-mêmes.Les dirigeants de la Société Générale, ré-cipiendaire de l’aide de l’Etat français, qui prévoyaient de se distribuer des stocks options à bas prix, ne semblent pas pres-sés d’en finir avec le système qui a failli coûter la vie à leur institution. Comment ces banques, qui fonctionnent sur des critères exponentiels de compétition, peuvent-elles se reconvertir aujourd’hui dans le paradigme de l’économie dura-ble ? En imitant la finance islamique ou alternative qui rejette le taux d’intérêt ? En revenant à l’esprit de la banque an-glaise du 17ème siècle ?

Le capitalisme peut-il rebondir ?C’est clair, dans ce sentiment d’abandon, des idées « révolutionnaires » germent. Certains préconisent le retour à l’éta-lon-or, seul capable d’empêcher la bulle spéculative de poursuivre une expansion aux conséquences désastreuses. Bref, on revient à la moralisation du capitalisme, longtemps défendue par les porteurs d’alternatives à ce système. Les colonnes de chômeurs, de New York à Paris, récla-ment de nouveaux modèles où les em-ployés ne seront pas de simples variables d’ajustement dans le calcul des profits et des rendements. Mais, comment des Etats en faillite, lourdement endettés, gouvernés par des mandats présidentiels et parlementaires soumis à la loi du court terme (quatre à cinq ans), peuvent-ils faire du long terme ?

Adama Wade

Face à la crise de confiance sans précédent qui frappe les rapports entre banques et clients dans le monde occidental, de nouveaux modèles sont indispensables. Analyse.

VerbatimGueule« Tu sais que j’ai envie de te casser la gueule ! »Gérard Longuet, président du groupe UMP, s’adressant à Nicolas Sarkozy.

Irrecevable« La candidature du président est irrecevable. »Idrissa Seck, membre du Parti dé-mocratique sénégalais (PDS) au pouvoir, l’un des trois hommes à avoir refusé la candidature du président Wade pour un troisième mandat.

Islam« J’ai prié pour que mon petit-fils Barack se convertisse à l’islam. »Sarah Obama, 88 ans, la grand-mè-re kenyane du président américain Barack Obama, qui vient d’achever le pèlerinage à La Mecque, dans une interview au quotidien saou-dien Al-Watan.

Référendum« Un référendum n’arrive qu’une seule fois. La population doit sor-tir massivement, sinon cela vou-drait dire que les gens se sont bat-tus et sont morts pour rien. »Le chef sudiste Salva Kiir, qui ap-pelle à voter pour l’indépendance du Sud Soudan.

Nécessaire« Nous reconnaissons tous que (le Black Economic Empowerment) c’est un instrument nécessai-re, mais qui n’a pas atteint ses objectifs. »Pravin Gordhan, ministre sud-afri-cain des Finances.

Révolution« S’il y a 20 millions de gens qui retirent leur argent, le système s’écroule. (...) La révolution se fait par les banques. (…). Pour par-ler de la révolution, on ne va pas prendre les armes, on ne va pas al-ler tuer des gens. Il y a une chose très simple à faire (...). Le système est bâti sur le pouvoir des ban-ques. Donc, il peut être détruit par les banques. (…). Au lieu d’aller dans les rues faire des kilomètres (pour manifester), tu vas à la ban-que de ton village et tu retires ton argent. »Eric Cantona.

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6 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 BAnques et AssurAnces

Implication de la microfinance dans la promotion de la maîtrise de l’énergie au Maroc

PlaNet Finance et l’Agen-ce de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) ont organisé, mer-credi 24 novembre à Rabat, un atelier consultatif sur le rôle du microcrédit dans le financement de l’efficacité énergétique et des énergies

renouvelables au Maroc. La rencontre, qui a bénéficié du sou-tien de l’Union européenne et de l’Agence marocaine pour le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (ADEREE), rentre dans le cadre du projet FreemE (1,35 million d’euros sur trois ans). Au cours de la journée, les résultats du projet FreemE (après six mois) ont été restitués aux participants. Ce fut aussi une opportunité de plancher sur les politiques énergétiques et financières mises en place au Maroc, ainsi que les retours d’expériences françaises dans le domaine de l’efficacité énergétique. Lancé en avril 2010 au Maroc par un consortium de partenaires européens et locaux, il est mené par PlaNet Finance, en partenariat avec l’ADEME, le Groupe énergies renouvelables environnement et solidarités (GERES), l’ADEREE, la Fondation Ardi, une association de microcrédit, et le Groupe d’études et de recherche sur les énergies renouve-lables et l’environnement (GERERE).

La réforme de l’assurance au Nigéria encore peu porteuse de performancesThomas Olorundare, directeur général de l’Association nigé-riane des assureurs (NIA), a donné, dimanche 21 novembre à Lagos, son point de vue sur les réformes du secteur de l’assu-rance visant à optimiser ses performances. De son avis, bien que la Commission de l’assurance nationale (NAICOM) ait intensifié sa campagne sur la pertinence des assurances obli-gatoires, réintroduite en décembre 2009, le secteur tarde à performer. Du côté de l’association ARIAN (Association of Registered Insurance Agents of Nigeria), qui organisait la 2ème édition de sa conférence annuelle, mardi 23 novembre à Lagos, c’est le même constat.

Le RCAR se rapproche de l’Université Internationale de Rabat Afin de renforcer les synergies entre l’université et l’entreprise, mais aussi mettre en place des cycles spécialisés et des formations continues au profit des cadres et employés du RCAR, l’Université Internationale de Rabat (UIR) et le Régime collectif d’allocation de retraite (RCAR) ont conclu une convention de partenariat. Selon nos sources, l’accord englobe la formation des agents et cadres du RCAR par l’UIR en management des entreprises, en commerce électronique et technologies du web, en management des ressources humaines, en prévoyance sociale et gestion de projets, ou encore en communication et marketing.

Bataille pour le contrôle de la Commercial Bank Cameroon et Centrafrique

Ecobank plante son drapeau en Afrique du Sud

La bataille pour le contrôle de la Commercial Bank of Cameroon (CBC) et ses différentes filiales bat

son plein. La situation n’a pas beaucoup évolué, un an après la mise sous admi-nistration provisoire, par la Commission bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC), de cette banque, considérée encore il y a quelques années comme l’un des fleu-rons du secteur bancaire et financier de la sous-région, car implantée dans quatre pays de la zone CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale). Le mandat de l’administration provisoire, qui était au départ d’une du-rée de six mois, ce qui, dans la pratique, laisse croire que la restructuration aurait pu s’achever en mars 2010, a été conti-nuellement renouvelé. C’est dire, qu’en dehors de la CBC Cameroon, la situation de la Commercial Bank Centrafrique (CBCA) et même de la Commercial Bank Tchad (CBT) est quasi identique. Chemin faisant, des conflits se sont renforcés, avec, d’un côté, le tandem constitué par la COBAC et le gouvernement camerou-nais, à travers le Ministère des finances, et de l’autre, les promoteurs de la CBC, avec à leur tête le président du conseil d’admi-nistration Yves Michel Fotso.

La révolte des promoteurs.Aussi, profitant « d’un vide juridique », du fait de « la non-prorogation » du mandat de l’administrateur provisoire, le président du conseil d’administration en était venu à conclure que la gestion de la banque lui revenait, comme en té-moigne sa lettre datée du 18 novembre 2010, adressée à l’administrateur provi-soire. « Par décision COBAC D-2009/204 du 2 novembre 2009, portant mise sous administration provisoire de la CBC, vous avez été nommé administrateur provisoire jusqu’au 5 mai 2010. Au cours de la session ordinaire de la COBAC réu-nie à N’djamena le 17 avril 2010, votre mandat a été prorogé pour la première fois pour une durée de trois mois jusqu’au 5 août 2010. Par la suite, une seconde

prorogation de votre mandat est interve-nue par lettre COBAC C126 du 02 août 2010 pour une nouvelle période de trois mois, soit jusqu’au 5 novembre 2010 à minuit. Depuis lors, et eu égard qu’à notre connaissance et à celle du public, aucune autre décision n’a été prise par la Commission bancaire pour proroger votre mandat, je vous prie de noter que la période d’administration provisoire de la CBC a de fait pris fin le 5 novembre dernier et que les organes sociaux sont de ce fait rétablis ». Et le principal action-naire de faire observer sous forme de mise en garde, qu’en conséquence, « je voudrais par la présente vous faire relever que tous les actes que vous avez posés en tant qu’administrateur provisoire depuis le 6 novembre 2010 sont nuls et de nul ef-fet. Bien plus, au cas où ceux-ci seraient contraires aux intérêts de l’établissement, vous en serez tenu personnellement res-ponsable devant la loi ».

Un collectif d’épargnantsDans l’optique d’une recapitalisation de la CBC, le promoteur indiquera avoir pris langue avec des partenaires étrangers, en l’occurrence une banque au Qatar, et surtout, le groupe d’as-sureurs ivoirien NSIA, qui serait dis-posé à racheter des actions de CFH Luxembourg. Cette sortie de l’action-naire majoritaire a d’ailleurs amené un collectif d’épargnants à demander que la lumière soit faite sur la gestion de l’administrateur provisoire pendant les deux dernières semaines, c’est-à-dire, du 31 octobre au 18 novembre, condamnant au passage la « démarche floue de la COBAC », qui participe à causer des incertitudes à la clientèle. Le 19 novembre 2010, l’administrateur provisoire est sorti de sa réserve pour indiquer la décision de la COBAC, datant du 26 octobre 2010, qui « pro-roge de quarante-cinq jours à partir du 6 novembre 2010 le mandat de Martin Luther Njanga Njoh en qualité d’admi-nistrateur provisoire de la CBC ».

Des poursuites judiciaires envisagéesPar la suite, le ministre camerounais des Finances, Essimi Menyé, est venu repré-ciser la position de la COBAC, réitérant le maintien de la CBC sous administra-tion provisoire. Le communiqué du gou-vernement est sans équivoque lorsqu’il est précisé que « le ministre des Finances porte à la connaissance du public, que par décision D-2009/2004 du 2 novem-bre 2009, la COBAC a placé la CBC sous administration provisoire et nommé mon-sieur Martin Luther Njanga Njoh, admi-nistrateur provisoire de ladite banque pour une période de six mois allant jusqu’au 5 mai 2010. Depuis cette date, le mandat de l’administrateur provisoire a été régulière-ment prorogé, pour permettre la poursuite du redressement de la banque ». Le gouvernement camerounais a précisé que « la dernière prorogation du mandat de l’administrateur provisoire est interve-nue au cours de la session extraordinaire de la COBAC, tenue à Douala le 25 octobre 2010 et matérialisée par la décision COBAC D-2010/149. De ce fait, la CBC est et de-meure sous administration provisoire », rappelant au passage que « la désignation d’un administrateur provisoire à la CBC a suspendu les attributions du conseil d’ad-ministration et de la direction générale ».

Actionnaires débiteursUne situation qui fait en sorte que l’ad-ministrateur provisoire soit doté de « tous les pouvoirs d’administration, de direction et de représentation de la banque et exerce dans la limite de l’objet social et sous ré-serve de ceux expressément attribués aux assemblées générales ». Bien plus, le mi-nistre des Finances a brandi la menace de poursuivre en justice, sous trentaine, les débiteurs de cette institution bancaire, d’autant que la CBC a connu un gros dé-ficit de 60 milliards de francs CFA. Une lourde dette, favorisée notamment par le comportement des actionnaires qui seraient également débiteurs vis-à-vis de la Banque. Selon lui, le plan de restruc-turation proposé par l’actionnaire majo-ritaire a été « rejeté » par la COBAC, ce qui devrait laisser place à une « restructu-ration profonde » de la banque avec, très probablement, une prise de participation des actions par l’Etat.

Achille Mbog Pibasso, Douala

Partenaire de Nedbank, Ecobank n’était pas inconnue des hommes d’affaires sud-africains. Plus de 200 invités du

monde des affaires, dont les dirigeants des principales multinationales sud-africaines, les représentants de banques locales et étrangè-res, les officiels du gouvernement sud-africain, ainsi que des représentants du corps diploma-tique accrédité en Afrique du Sud ont partici-pé au dîner de gala organisé le 8 novembre au Summer Palace pour saluer cette installation.

Passion pour l’AfriqueLe gouverneur adjoint de la South African Reserve Bank, Daniel Mminele, a prononcé

un discours de bienvenue repris par les chaî-nes SABC et CNBC dans leurs programmes télévisés. S’adressant aux invités, le directeur général du groupe Ecobank, Arnold Ekpe, s’est exprimé sur la passion d’Ecobank pour l’Afri-que, et a affirmé que le bureau d’Afrique du Sud offrait au groupe l’occasion unique d’ap-porter aux grandes entreprises sud-africaines le support dont elles ont besoin pour étendre leurs activités à travers le reste du continent. « Un grand nombre d’entreprises sud-africaines élargissent leur présence dans d’autres régions de l’Afrique, tandis que les importateurs et les exportateurs des autres pays africains ont le re-gard tourné vers l’Afrique du Sud », a déclaré M. Ekpe. « Une part importante de notre stratégie pour l’Afrique du Sud se concrétise par l’alliance avec Nedbank, qui représente la plus grande pla-teforme bancaire dont puissent disposer les en-treprises opérant en Afrique subsaharienne ».

Nombre impressionnant d’invitésL’administrateur exécutif d’Ecobank Corporate Bank, Albert Essien, basé à Johannesburg, a souligné que le nombre impressionnant d’in-vités à cette cérémonie de lancement démon-tre l’accueil favorable réservé à Ecobank par la communauté sud-africaine. « Ecobank s’assu-rera que ses activités en Afrique du Sud soient conduites avec la même excellence profession-nelle et le même sens élevé de l’éthique à travers lesquels la banque s’est distinguée dans tous les pays où elle est implantée », a assuré Essien.Pour rappel, le groupe Ecobank est présent dans 30 pays africains. Coté sur les places boursières de Lagos, Accra et de l’UEMOA, le groupe appartient à 180 000 actionnaires, per-sonnes physiques et institutionnels. La banque panafricaine emploie 11 000 personnes, res-sortissants de 35 pays, à travers 750 agences.

MBF

Le plan de restructuration présenté par les promoteurs n’a pas reçu l’aval de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC), l’organe de régulation a décidé de proroger le mandat de l’administration provisoire, ce qui ne va pas sans éclats de voix.

Ecobank a marqué l’ouverture officielle de son bureau d’Afrique du Sud à Johannesburg par un dîner de gala, organisé le 8 novembre 2010 à Summer Place dans le quartier de Sandton.

« Un grand nombre d’entreprises sud-africaines élargissent leur présence dans d’autres régions de

l’Afrique, tandis que les importateurs et les exportateurs des autres pays africains ont le regard tourné vers

l’Afrique du Sud », a déclaré M. Ekpe.

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 9Bourses

Le secteur de la brasserie fait mousser la Bourse

L’emprunt Port autonome de Dakar flotte à Abidjan

L’indice Africa Investor 40 a perdu 0,49% sur la semaine boursière du 19 novembre, ramenant ses pertes

totales à 133, 34 points. Par rapport au début de l’année, l’indice des 40 entrepri-ses africaines les plus cotées est en retard de 9,95 points. Cette tendance baissière intervient alors que les bourses améri-caines ont clôturé la semaine en hausse. L’indice du Dow Jones a bien résisté, ga-gnant 0,2% à 11 203,55. Le S&P 500 s’ap-précie de 3,04 points (0,25%) à 1199,73. De son côté, le Tech-Rich Nasdaq est en hausse de 3,72 points (0,15%) à 2518,12

points, emporté par les résultats trimes-triels de Dell, meilleurs que prévus. En Afrique, les plus fortes hausses sont dans le secteur industriel. A l’exem-ple du Kenyan East African Breweries, en hausse de 6,6% à 2,94 dollars. Et de Guinness Nigeria PLC, en hausse de 4,1% à 1,26 dollar. L’égyptien Financial Group Hermes Holding s’est apprécie de 3,9% à 6,16 dollars, alors que Mobinil (également égyptien) sauve les meubles du secteur télécom avec une envolée de 3,7% à 29,78 dollars. L’Afrique du Sud est représentée dans ce top cinq des plus

fortes hausses de l’AI40 par SabMiller, en progression de 3% à 33,78 dollars.A l’inverse, les plus fortes baisses de l’indice ont aussi concerné le secteur de la brasserie à l’instar de la Nigerian Breweries, en baisse de 2,6% à 0,51 dollar. Le secteur minier sud-africain subit les contrecoups d’un marché mondial des matières premières versatile. Ainsi Anglo Platinum abandonne 3,8% à 99,85 dol-lars. De son côté, Anglo American s’est déprécié de 4,9% à 46,52 dollars. Idem pour Anglo Ashanti, en baisse de 5,3% à 47,48 dollars. L’opérateur Safaricom, qui s’était illustré la semaine dernière avec la plus forte hausse, perd 4,8% à 0,06 dollar.

(A.W, avec Africa Investor)

La première cotation de l’em-prunt obligataire par appel pu-blic à l’épargne du Port auto-

nome de Dakar (PAD), dénommé PAD 7% 2010-2017, admis au compartiment des obligations de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) de l’UEMOA, devait avoir lieu le mardi 30 novembre 2010. Ainsi, explique CGF Bourse, « pour la première fois dans l’his-toire du marché obligataire de la BRVM, un contrat de liquidité est signé entre la CBAO Attijariwafa Bank, la CGF Bourse et le Port autonome de Dakar. » Très usité dans les places financières, ce type de contrat permet de réduire le risque de contrepartie pour les porteurs de ti-tres. C’est un mécanisme d’animation

de marché qui favorisera la négociation des ordres de Bourse et la liquidité du titre obligataire en question. Pour rap-pel, la diffusion des 1 000 000 obliga-tions PAD 7% 2010-2017 a eu lieu du 20 mai 2010 au 9 juin 2010, au prix unitaire de 10 000 FCFA. Le premier cours de négociation sera fixé par la confrontation entre l’offre et la de-mande, avec un cours de référence fixé à 10 000 FCFA. L’opération garantie à 100% par la Banque ouest-africaine de développement, en capital et en intérêts, a été souscrite à hauteur de 113,25%. Un véritable succès, sanctionné par une clôture anticipée et la levée de 11,325 milliards FCFA en lieu et place des 10 milliards FCFA initialement prévus.

Prime aux projets de développement du Port autonome de DakarA elle seule, la SGI CGF Bourse, ar-rangeur et chef de file de l’opération, a placé 78,53% du montant retenu. Les investisseurs boursiers ont, à travers cet engouement, exprimé leur total soutien aux projets de réforme et de développe-ment engagés par le Port autonome de Dakar. Cette levée de fonds est destinée au financement du dragage du chenal d’accès du PAD et à la réhabilitation

du wharf pétrolier, deux composantes essentielles du second programme d’in-vestissement du PAD couvrant la pério-de 2009-2012.

MC (avec CGF Bourse)

Alors que les minières et les bancaires marquent le pas, le secteur de la brasserie marque des points. Les valeurs moyennes font l’actualité de l’AI40.

L’admission à la cote de l’emprunt obligataire PAD 7% 2010-2017 était prévue pour le 30 novembre prochain. Un contrat de liqui-dité a été signé, une innovation majeure.

Le port de Dakar a remporté un vif succès en bourse.

L’emprunt du Port autonome de Dakar a dû avoir recours à une garantie de 100%, là où, dans les autres marchés (Casablanca, Tunis, Johannesburg), une notation est suf-fisante pour qualifier le risque et le profil de l’émetteur. Pourtant, le Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers (CREPMF) travaille depuis deux ans sur l’introduction de la notation sur le marché régional. Cette réforme a abouti, le 23 novembre 2009, à l’adoption de l’instruction 37/2009 du CREPMF, un nouveau cadre règle-mentaire qui s’appuie sur les recommandations de l’Organi-sation internationale des commissions de valeurs, ainsi que sur la règlementation européenne en matière de notation (voir www.lesafriques.com)Si la garantie permet de combler le déficit de confiance, elle ne récompense pas les bons efforts des gestionnaires,

frappant d’une même règle bons et mauvais émetteurs. « Bien qu’ayant contribué à instaurer la confiance dans le marché, cette règlementation s’est révélée comme pouvant constituer un frein à la levée des ressources par le marché et à l’appréciation du risque par les investisseurs », écrivent les analystes de CGF. En plus de son caractère aveugle, la garantie coûte cher, se situant, en moyenne, à 1,5% de l’encours de l’emprunt. Autre point soulevé par les analystes et qui milite pour la réforme, la concentration des risques du marché. Au 30 juin 2010, les engagements de garantie des quatre principaux garants s’élevaient à 66 milliards FCFA, pour un total de 190 milliards d’emprunts garantis en cours de vie. Le comité de stabilité financière, mis en place le 20 mai 2010, suit de près ces aspects.

Le compartiment obligataire de la BrVm freiné par les coûts de la garantie

Ainsi, explique CGF Bourse, « pour la

première fois dans l’histoire du marché

obligataire de la BRVM, un contrat

de liquidité est signé entre la CBAO Attijariwafa Bank, la CGF Bourse et le Port autonome de

Dakar. »

AI40

L’Afrique prépare un plan anti-embargo des diamants zimbabwéensAfin de contrer l’interdiction qui pèse sur les ventes de diamants du Chiadzwa au Zimbabwe, un certain nombre de pays africains opteraient pour mettre en place un plan de commercialisation assurant l’avenir du commerce du pays. En effet, l’Afrique du Sud, l’Angola et la Namibie ont avoué se préparer à commer-cialiser les diamants du Zimbabwe, dans le but de contrecarrer l’interdiction maintenue par le Processus de Kimberley (PK). Ces pays, soutenus par les Emirats arabes unis (EAU), l’Inde et la Chine, se disent frustrés par l’impasse du protocole de Kyoto sur l’opportunité d’autoriser les exportations de diamants de Chiadzwa. Aujourd’hui, des pays du marché de l’Est sont prêts à acheter des diamants du Zimbabwe, sans certification PK.

Le parlement mozambicain adopte le projet de loi sur les exonérations fiscales pour les mineursL’Assemblée nationale mozambicaine a adopté, mardi 23 novembre en première lecture, le projet de loi renforçant les exonérations fiscales accordées aux mineurs mozambicains travaillant en Afrique du Sud. Manuel Chang, ministre des Finances, a déclaré, au cours de la présentation du projet de loi, que les précédents régimes se sont avérés inefficaces, parce qu’aliénés par des non-mineurs, mais aussi parce que leurs mé-canismes se sont avérés difficiles pour les services de contrôle aux frontières. Le projet de loi actuel précise expressément que la loi ne s’applique qu’aux mineurs travaillant en Afrique du Sud, en vertu des accords entre les gouvernements du Mozambique et de l’Afrique du Sud, et aux contrats approuvés par le Ministère mozambicain du travail.

Total compte investir 10 millions $ au NigériaTotal Premier Services Nigeria Ltd (TPSNL) envisage d’investir 10 millions $ (environ 1,5 milliard de nairas) dans la construc-tion d’une usine de soudage à l’huile et au gaz à Onne Free Trade Zone, zone franche dans l’Etat de Rivers. James Simmons, président de TPSNL, a annoncé à Lagos que le nouvel inves-tissement contribuera à consolider l’investissement soutenu de l’entreprise dans le pétrole nigérian et du gaz, au cours des neuf dernières années. Il a ajouté que l’installation de souda-ge emploiera principalement des Nigérians qui possèdent les compétences requises. Enfin, les responsables ont indiqué que le projet proposé vise à consolider les 2,6 millions $ investis dans des plates-formes de 15 000 m².

Un barrage hydro-électrique dans 35 mois au GabonLa province du Haut-Ogooué, dans le sud-est du Gabon, étren-nera dans un peu moins de trois ans son barrage hydroélectri-que. Erigé sur le fleuve Ogooué (1600 km), le barrage de Grand Poubara ou Poubara III (du nom des chutes où se construit l’ouvrage) produira jusqu’à 280 MW dans sa phase terminale et permettra à la Compagnie minière de l’Ogooué (COMILOG), qui exploite le manganèse à Moanda depuis plusieurs décen-nies, de construire un complexe métallurgique dans cette ville, située à 60 de km de Franceville. A noter que le financement des travaux s’élève à de près de 200 milliards de FCFA et que la société Sino Hydro Corporation Ltd est le maître d’œuvre. A terme, l’ouvrage, haut de 37 mètres, sera pourvu d’un réservoir d’eau de 46 km².

NDIC révise à la hausse la couverture d’assurance pour les déposants des banquesAlhaji Umaru Ibrahim, directeur général par intérim du Conseil du Nigeria Deposit Insurance Corporation (NDIC), a révélé, mercredi 24 novembre à Abuja, que « le Conseil a approuvé une révision à la hausse de la couverture d’assurance pour les déposants des banques dans le pays ». Actuellement, la NDIC paie respec-tivement 200 000 nairas et 100 000 nairas aux déposants de la Banque universelle et de la microfinance. S’il n’a pas explicité comment sera appliquée cette réforme, il a au moins averti qu’elle sera annoncée lorsqu’elle sera prête, sachant qu’un projet-cadre pour la mise en œuvre d’une assurance (islamique) sans intérêt et un régime d’assurance-dépôts (NIDIS) est dans le pipe.

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10 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 entreprises et mArches

Plus de 900 000 t de récoltes dans la province de Kwanza-Norte en Angola

La campagne agricole 2009/2010 dans la pro-vince de Kwanza-Norte en Angola a été satis-faisante, d’après Paulo Bungo, responsable de l’Institut de dévelop-pement agraire (IDA). Chiffres à l’appui, il a révélé que la présente

campagne a permis de récolter dans diverses spéculations plus de 950 000 tonnes (manioc, banane, patate douce, haricots, arachides et maïs). Comparativement aux moissons de l’année dernière, il a été constaté une augmentation de 161 340 t. Cette bonne tenue est due en partie à la disponibilité des intrants agricoles fournis aux paysans locaux.

Le Nigeria en passe de devenir le plus gros client du blé américainPour US Wheat Associates Inc, groupe d’échanges et plus grand exportateur mondial de blé, le Nigeria est sur le point de supplanter le Japon et devenir le plus gros acheteur de blé des États-Unis. Steven Wirsching, directeur du bureau de la côte ouest du groupe à Portland (Etats-Unis), a effectivement confirmé, mardi 23 novembre, que ce pays devrait enregistrer une croissance forte, devenant ainsi l’acheteur numéro un. A l’heure actuelle, le Japon reste le principal marché d’exporta-tion du blé des États-Unis, suivi du Nigeria, du Mexique, de l’Égypte, des Philippines et de la Corée du Sud. Il a ajouté que les exportations de blé des États-Unis pourraient croître en 2010-2011, après que la Russie ait stoppé ses exportations.

Plan d’exportation kenyan de produits halieutiques dans de beaux drapsLes normes exigées sur les marchés internationaux vont-elles saper la campagne menée par les autorités kenyanes afin d’ac-croître les exportations de poisson ? Dans tous les cas, il se heurte à des difficultés logistiques, vu que les petits exploitants-pêcheurs (plus de deux millions) sont confrontés à de réelles difficultés pour assurer l’exigence de traçabilité. Or, l’Union européenne veut que la qualité de tout produit alimentaire im-porté sur son territoire soit suivie tout au long de sa chaîne de valeur, de la production au point de consommation. A cela, Beth Wagude, chef de la direction de la transformation du poisson au Kenya et l’Association des exportateurs (AFIPEK), a répondu : « Les transporteurs et les opérateurs locaux ont la capa-cité de maintenir des normes de sécurité requises pour les produits alimentaires, mais pour répondre à la demande de traçabilité, il doit y avoir un cadre politique pour aider les pêcheurs artisanaux à fonctionner selon les normes requises ».

Plus de 3500 jeunes seront formés à la production agricole au NigeriaUn programme de formation de deux semaines pour des jeu-nes dans les métiers de la production agricole est envisagé par le Ministère nigérian de la jeunesse, afin de lutter contre le fléau du chômage. Contenu dans un document intitulé : « Renforcement des capacités nationales dans la production agricole diversifiée, transformation et commercialisation de la jeunesse des 36 Etats de la Fédération et FCT », le programme doit se dérouler dans chacune des six zones géopolitiques du Nigeria.

Semaine scientifique agricole de JohannesburgLe Centre technique de coopération agricole et rurale ACP-UE (CTA), en collaboration avec le NEPAD, a organisé à Johannesburg, du 22 au 26 novembre, la semaine scientifique agricole. Les initiateurs indiquent que la rencontre va contri-buer à l’amélioration des systèmes d’information et de soutien des connaissances en matière de gestion de l’eau agricole pour la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté dans les communautés rurales des diverses zones agroécologiques des pays ACP.

Cloud Computing : l’Afrique courtisée, mais gare aux turbulences juridiques

Par Raphaël Nkolwoudou,Associate Counsel Azaniaway Consulting.

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Depuis le bon vieux temps, les organisations de toutes tailles ont souvent confié la gestion

de certaines de leurs tâches à des pres-tataires indépendants, sous forme de sous-traitance. Du nettoyage à la sécurité en passant par l’électricité, le téléphone et diverses autres activités. A la fin des années 80, l’informatique, qui traite des informations parfois stratégiques, a également fait l’objet de sous-traitance, jusqu’à aboutir au concept d’infogéran-ce. Il s’agit là d’une délégation de gestion par laquelle une organisation confie à un prestataire spécialisé, une partie ou la to-talité de son système d’information, pour une durée plus ou moins longue. Elle se traduit également par un transfert ou non des ressources, lui permettant de se recentrer sur son cœur de métier. Depuis

lors, d’innovations en innovations, le secteur des technologies de traitement de l’information a connu des mutations extraordinaires. De ces mutations avec valeur ajoutée s’est développée une for-me de services très tendance : le Cloud Computing (CC). Il s’agit d’une prestation informatique évoluée, offerte au travers des réseaux de communications électroniques. Aussi appelé l’informatique dans les nuages, ce buzz word des professionnels de l’infor-matique change la manière de produire et de consommer les ressources informa-tiques. Elle leur permet, en effet, d’exploi-ter des ressources entièrement virtuali-sées, couvrant aussi bien les ressources internes qu’externes. Historiquement, Amazon a lancé le concept du CC en 2002. Son objectif était l’acquisition d’un parc de serveurs pour absorber le pic des

commandes réalisées sur leur site au mo-ment de Noël. Ce parc étant inutilisé le reste de l’année, Amazon avait alors dé-cidé d’ouvrir ces ressources inutilisées aux entreprises, pour qu’elles les louent à la demande. Depuis, Amazon a investi massivement dans ce domaine et a conti-nué d’agrandir son parc de serveurs et les services associés. On assiste alors, avec le CC, à un changement de paradigme de l’informatique d’entreprise : on passe de la gestion d’une infrastructure à la gestion d’un service, de la maîtrise d’un outil à la maîtrise d’un risque. Dès lors, un seul outil permettra de gérer cette relation risquée de l’entreprise avec le tiers qui héberge et pilote les fonction-nalités du système d’information : c’est le contrat. Aussi, faut-il attacher à la négociation, à la conception, à la rédac-tion, au suivi et à la réversibilité possi-ble de ce type de contrat, une vigilance accrue, afin de naviguer assez conforta-blement sans subir trop de turbulences. Quelques chiffres : selon l’International Data Corporation (IDC), un des leaders dans les études liées aux technologies de l’information et de la communication

(TIC), les dépenses mondiales des servi-ces CC pourront s’élever à 42,3 milliards en 2012. L’évolution du stockage infor-matique sera de 5 à 13% à périmètre constant, en % des autres services liés aux TIC. Sur le chiffre d’affaires des fournis-seurs, Merrill Lynch, autre cabinet spé-cialisé, estime que, d’ici 2011, le volume du marché du CC sera de 160 milliards de dollars, dont 95 milliards pour les ap-plications de business et de productivité et 65 milliards pour la publicité en ligne.

Une solution adaptée à une Afrique sous informatisée L’essor de l’Internet personnel a permis au plus grand nombre d’utilisateurs à travers le monde de maîtriser les prin-cipes de navigation sur les réseaux de communications électroniques, facilitant par exemple les délais de prise en main

des applications hébergées à distance. Exemple type : l’Iphone et ses clones. De même, l’utilisation des applications hébergées quelque part dans « les nua-ges » illustre, à un niveau plus important, comment une grande organisation pour-rait en bénéficier au travers des serveurs « cloudés » et disséminés autour de la planète. Selon son modèle économique, les risques de l’organisation, concernant par exemple les logiciels et autres applica-tions, sont transférés à un fournisseur du CC ; elle n’est plus obligée de gérer la mise à jour des programmes sur différents pos-tes de travail ou terminaux mobiles, les redevances deviennent plus faibles que des licences d’utilisateurs individuels – de plus, les frais d’entretien pour les logiciels et matériels diminuent. L’organisation peut alors réduire des coûts en passant de l’achat de l’informatique à des forfaits d’utilisation. Voilà posés schématique-ment les contours d’un concept en voie d’être vendu aux organisations sur le continent par les différents professionnels des TIC. Et, au moment où la large bande passante s’installe progressivement, il sera bientôt possible d’implémenter ce type de solutions à plusieurs niveaux. Toutefois, il convient d’indiquer que le retard pris dans le développement des infrastructu-res de réseaux de communications élec-troniques dans certains pays pourrait relativiser le buzz et l’enthousiasme des acteurs convaincus des avantages poten-tiels de ce modèle de services.

Une variété de services offerts à plusieurs niveaux d’interactions… Le CC représente un environnement constitué de systèmes de stockage numé-rique (par des serveurs virtuels indépen-dants hébergés sur un seul serveur physi-que et les datacenters implantés à travers le monde et souvent sous-employés) et d’exécution de ressources informatiques impliquant plusieurs acteurs connectés par Internet. Il convient de préciser qu’en accédant en ligne, l’organisation cliente n’a pas nécessairement besoin d’instal-ler son infrastructure réseau et serveur, ce qui demande souvent un know how certain (en termes de maintenance, de sécurité…) et des investissements finan-ciers que beaucoup d’organisations en Afrique n’ont peut-être pas. Les fournis-seurs de CC peuvent alors leur proposer

L’émergence du Cloud Computing (CC) est imminente sur tout le continent africain. Le groupe allemand SAP, en partenariat avec Alink, société ivoirienne de télécoms, s’apprête à proposer, d’ici quelques semaines, des offres de CC aux organisations en Afrique de l’Ouest.

1éRE PARTIE

Les dépenses mondiales des services de Cloud Computing pourront s’élever à 42,3 milliards de dollars en 2012.

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 11entreprises et mArches

des services et des capacités clé en main, en leur permettant une exploitation géra-ble depuis une interface web et accessible depuis n’importe quel terminal connecté à Internet (PC, Smartphone, tablette, TV...). Le CC a également son intérêt en tant que service grand public. Il permet en effet à l’utilisateur grand public d’or-ganiser et d’archiver ses données (sons, images et écrits) et de les transférer chez un partenaire des services cloud pour y accéder par la suite sur son ordinateur ou son Smartphone et inversement, sans réaliser de fastidieuses manipulations. Voici une opportunité d’affaires pour les jeunes porteurs de projets liés aux TIC.

En pratique, on distingue trois types de cloud :

- Un cloud public : l’organisation loue auprès du fournisseur le service, hors du pare-feu de sécurité moins transactionnelles, qui est plutôt réservé à des parties non cœur de métier du système d’information. C’est par exemple ce que contient l’offre de Google Apps, Amazon, Salesforce…

- Un cloud privé : ce service réalisé en interne peut se configurer en une sorte d’architecture dédiée ;

- Un cloud hybride : c’est une combi-naison de clouds privés et publics. Le schéma illustratif pourrait être une architecture de cloud privé permettant de recevoir des clouds publics, mais également des clouds privés dédiés à une organisation chez l’hébergeur.

Quant à la typologie de services de cloud offerts, il convient d’indiquer la classifi-cation consacrée par les professionnels, qui distinguent trois principaux niveaux d’interactions mis à la disposition par les fournisseurs du CC :

IaaS : Infrastructure as a Services, qui per-met aux utilisateurs d’accéder à des res-sources informatiques, disques durs, ser-veurs directement situés sur Internet et facturés à la durée d’utilisation. Certains services permettent, dès lors, d’élaborer une infrastructure complète en quelques clics, via un navigateur web. Un exemple, l’EC2 (Elastic Compute Cloud) d’Ama-zon – Amazon propose son service EC2 directement depuis le continent euro-péen, via un de ses datacenters irlandais. Les utilisateurs d’EC2 sur le vieux conti-nent peuvent exécuter leurs instances applicatives avec des temps de latence moins importants. Ils disposent ainsi, par exemple, de plusieurs zones de dis-ponibilité pour la redondance d’adresses IP et d’espaces de stockage.PaaS : Plateform as a Services, qui permet aux utilisateurs de programmer de nou-velles applications directement accessi-bles via Internet, sans avoir à investir dans de coûteuses infrastructures de dévelop-pement. Un exemple, Azure de Microsoft et son application Windows Azure relè-vent du système d’exploitation serveurs. Celui-ci évolue dans l’univers du Cloud (entendez du tout Internet) en proposant ainsi une industrialisation des héberge-

ments applicatifs web, avec un système d’exploitation dédié et une ingénierie correspondante, au travers d’une toute nouvelle plateforme dite Cloud Services. SaaS : Software as a Services, qui permet aux utilisateurs d’accéder à une appli-cation métier directement par le biais d’Internet. Un exemple, l’application de gestion de la relation client (CRM) de SalesForces (Service Cloud 2), qui a été déployé à l’office du tourisme de l’Afrique du Sud, pays hôte de la plus prestigieuse compétition sportive au monde en 2010. Il s’agissait pour l’Office du tourisme sud-africain, en tant que fournisseur officiel de services client pour le pays organisa-teur de la Coupe du monde de football, de mettre le service client collaboratif à la disposition de plus de 300 000 visiteurs qui se sont rendus sur le continent, en provenance de tous les coins du monde.

… mais un préalable : accélérer le développement des infrastructures de communications électroniques Le processus d’informatisation des orga-nisations qui a lieu en Afrique actuelle-ment peut bénéficier du CC. En effet, de par son principe, son coût maîtrisable et ses méthodologies de fonctionnement, le CC convient au continent en raison de la concentration des infrastructures, de

la mise à disposition des compétences informatiques et de la facilité d’implé-mentation. Sur les avantages spécifiques du CC en Afrique, on peut notamment en citer deux, susceptibles de contribuer considérablement à la réduction de la fracture numérique :

- La possibilité d’accéder immédia-tement aux innovations les plus récentes ;

- La possibilité pour une organisa-tion de se passer d’investissements dans les infrastructures et, en parti-culier, dans des centres de calcul, eu égard à la qualité incertaine de l’ali-mentation électrique en Afrique.

En revanche, nous observons que, large-ment, l’Afrique subsaharienne demeure une zone géographique à connectivité réduite. Par exemple, il est souvent dif-ficile, voire impossible, d’utiliser son Smartphone dans la plupart des pays pour accéder à ses courriels, même si des progrès dans ce domaine sont pro-chainement attendus, notamment avec l’octroi des licences 3G. En conséquence, le développement des infrastructures de

communications électroniques constitue un préalable nécessaire pour que l’Afri-que puisse répondre à l’invitation des ac-teurs du CC. A cet effet, il conviendra de trouver quelques solutions :

- Développer le plus tôt possible les réseaux à large bande passante – les organisations accèdent aux datacenters distants par le réseau Internet. Or, des études récentes (Rapport d’une étude du cabinet Hedera Technology) indiquent qu’Internet en Afrique a historique-ment été construit dans un objectif d’interconnexion plutôt que de qualité de service. Cette option, cumulée à un sous-investissement dans les réseaux de communica-tions électroniques, implique qu’il sera difficile de respecter les clauses de garanties des délais d’accès à des services de CC via Internet. Bien entendu, il est possible d’accéder à certaines applications de CC ne nécessitant pas une importante bande passante (le webmail et cer-taines applications collaboratives). Cependant, l’accès aux applications les plus professionnelles (IaaS et PaaS) reste aléatoire, en raison des débits plafonnés et le temps de latence parfois long, restreignant alors considérablement la connecti-vité internationale du continent.

- Pourquoi ne pas régionaliser les plateformes de partage des data-centers ? Il ressort de la même étude du cabinet Hedera Technology que la quasi-totalité des hébergeurs web (possiblement « cloudable ») en Afrique utilisent les facilités offertes par les datacenters européens et/ou américains. En raison des coûts de transfert des données encore élevés vers les datacenters situés hors du continent, il serait possible de la part des acteurs du Cloud (opérateurs de télécoms, construc-teurs d’infrastructures, éditeurs de logiciels…), de mettre en place des solutions d’hébergement centrali-sées en Afrique. Ceci limiterait la problématique de connexion au seul maillage national ou régional. On pourrait, dès lors, imaginer le partage d’un datacenter com-mun à plusieurs Etats de la région (CEDEAO/UEMOA, CEMAC/CEEAC...). Ceci permettrait de fédérer les économies entre elles et favoriserait en même temps une intégration poussée. Les opérateurs des communications électroni-ques, les sociétés de services et d’ingénierie informatique (SSII), les constructeurs d’infrastructures de stockage et les Etats peuvent apporter leurs ressources dans un cadre partenarial. Cet apport sous forme de Partenariat Public Privé (PPP) permettrait d’améliorer les temps d’accès, en plaçant les res-sources au plus près des utilisateurs, de concentrer les investissements matériels et humains dans quelques centres identifiés et de faciliter l’adoption du CC. Le CC constitue certainement un moyen pour les organisations (publiques et privées) d’accélérer leur propre moderni-sation, d’offrir un service optimisé aux citoyens et clients et, par la mu-tualisation des moyens, de réduire les coûts de l’informatisation.

Source : http://ambuj.files.wordpress.com/2009/06/cloudcomputing-2.jpg

Le CC convient au continent en raison de la concentration des infrastructures, de la mise à disposition des compétences informatiques et de la facilité d’implémentation.

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numéro 142

La CPI ouvre le procès de BembaLongtemps attendu, le procès de Jean-Pierre Bemba a com-mencé, lundi 22 novembre, à La Haye. Chef de l’ancienne rébellion congolaise du Mouvement de libération du Congo (MLC, mué en parti politique depuis 2003), Jean-Pierre Bemba serait pénalement responsable, pour avoir agi en qualité de chef militaire au sens de l’article 28-a du Statut de Rome, de deux crimes contre l’humanité (meurtre et viol) et de trois crimes de guerre (meurtre, viol et pillage), commis sur le territoire de la République centrafricaine au cours de la période comprise approximativement entre le 26 octobre 2002 et le 15 mars 2003. Dans son acte d’accusation, Luis Moreno Ocampo, procureur général, a rappelé ces crimes, qualifiant les troupes du MLC de milices créées et gérées par lui. Il a insisté sur le fait que J.P. Bemba était accusé comme chef des troupes qui ont commis des crimes. A noter que le procès se tient devant la Chambre de première instance III, composée des juges Sylvia Steiner (Brésil), juge présidente, Joyce Aluoch (Kenya) et Kuniko Ozaki (Japon).

Jacob Zuma attendu à HarareLes hostilités entre les principaux dirigeants politiques du Zimbabwe ne laissent pas indifférente la Communauté de dé-veloppement de l’Afrique Australe (SADC). Le président sud-africain s’est rendu, la semaine dernière, à Harare pour tenter de conclure un accord. Tomaz Augusto Salomao, secrétaire exécutif de la SADC, a déclaré que Jacob Zuma, médiateur officiel de la SADC dans la crise politique au Zimbabwe, a rencontré tour à tour Robert Mugabe, président zimbabwéen, Morgan Tsvangirai, Premier ministre du gouvernement et Arthur Mutambara, vice-Premier ministre, pour tenter de résoudre les problèmes encore en suspens dans l’accord de partage du pouvoir de 2008. Cette visite prévue fait suite à l’incapacité de la SADC de tenir, ven-dredi 19 novembre, un sommet extraordinaire au Botswana.

La présidentielle sénégalaise maintenue au 26 février 2012C’est un décret (n° 2010-15/21) du président de la République, Abdoulaye Wade, qui vient mettre fin aux rumeurs les plus folles sur la date de la prochaine élection présidentielle au Sénégal. En effet, depuis lundi 22 novembre 2010, cette décision a été rendue publique par un communiqué du ministre de l’Intérieur. Le texte précise que l’élection présidentielle est prévue le 26 février 2012. Parallèlement, le Ministère de l’intérieur a publié un autre com-muniqué, annonçant que la période de la révision exception-nelle des listes électorales court du 1er décembre 2010 au 30 juin 2011. A noter que le président sénégalais, chef de file du Parti démocratique Sénégalais, annonçait sa candidature depuis les Etats Unis d’Amérique (USA) il y a près de deux ans. Seulement, les leaders de la principale Coalition de l’opposition, Bennoo Siggil Senegaal, attendent le moment de dépôt des candidatures pour attaquer celle du chef de file des libéraux devant la Conseil constitutionnel. Ils jugent que, constitutionnellement, il n’a pas le droit à un troisième mandat.

Le vice-président du Libéria pour un développement intégré des minesJoseph N. Boakai, vice-président du Libéria, a lancé un appel aux populations du comté de Gbarpolu, afin d’élaborer des stratégies leur permettant de bénéficier de concessions miniè-res domiciliées dans la zone. De son avis, il est important que les concessions minières fournissent les services sociaux néces-saires pour les personnes dans leurs zones opérationnelles. Le vice-président a fait cette déclaration lorsque Stephen Daniels, directeur général de Treco Mining Company, société de pros-pection diamantifère dans le comté de Gbarpolu, lui a rendu visite dans ses bureaux de Capitol Building.

L’actualité avec

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12 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010

Comment contourner le manque de financements adaptés ?

Les germes de la modernisationAgriculture Cameroun

Annoncé depuis deux ans, le projet d’une banque agricole est très attendu par les milieux paysans du Cameroun.

Une forte attente est liée au fait que, justement, le Cameroun, qui est un grand pays agricole de la région, n’a pas encore trouvé un nouveau système de financement pérenne et adapté au secteur agricole, depuis les faillites des institu-tions dédiées, avec la récession des années 80.

Développement de la microfinanceFleuron de ce dispositif d’accompagnement du monde rural et paysan, le Fonds national de dé-veloppement rural a fermé à cause de la crise économique et n’a pas trouvé de successeur. Certes, des structures telles que la société de développement de la coton-culture, ou encore d’autres structures de même type, dédiée à la riziculture et au blé. Ainsi, pour assurer l’effica-cité des programmes agricoles mis en place ces dernières années, la problématique du finan-cement a été traitée de manière frontale par le gouvernement, comme l’indique Jean Nkuete, le vice-Premier ministre, ministre de l’Agri-culture et du Développement rural (Minader). Plusieurs mesures sont en cours de mise en œuvre, indique-il : le renforcement du finance-ment de l’agriculture par le développement de la microfinance en cours, renforcé par le démar-rage du Projet d’appui au développement de la micro-finance (Padmir), et, surtout, la mise en place de la Banque agricole, dont l’étude termi-née au niveau du Minader a été transmise au Ministère des finances pour la coordination de la poursuite du processus ; le soutien de l’Etat

au prix des intrants, l’accélération du proces-sus de libéralisation du marché des engrais, la création d’un fonds de soutien aux engrais et la mise en place des unités locales de fabrication des engrais pour lesquelles les contacts sont en cours avec les promoteurs.

Les petites exploitations familialesLa mise en place de ces schémas nouveaux de financement du secteur agricole tient au fait que, jusqu’ici, la mobilisation de ces res-sources en faveur de l’agriculture ne tient pas suffisamment compte des spécificités du sec-teur. De surcroît, non seulement les banques privées accordent très peu de crédit au secteur agricole, mais, au-delà, les rares crédits alloués à ce secteur sont concentrés sur les grandes ex-ploitations agroindustrielles. Selon le gouver-nement camerounais, les petites exploitations familiales (95% des exploitations agricoles du pays) sont exclues du marché du crédit des banques classiques, à cause de facteurs tels que le manque de garanties classiques ; la non-acceptation des garanties offertes ; le grand risque que constitue le secteur. Pourtant, le besoin de financement à court terme de l’am-bitieux programme agricole est grand et se chiffre, au regard des objectifs de production de 2009 et 2010 arrêtés par le gouvernement, à environ 300 milliards FCFA.

Services financiers de baseLe boom du secteur de la microfinance, au cours de cette dernières décennie, a néan-moins permis aux paysans des disposer des

services financiers de base, mais dont l’effi-cacité dans le soutien à leur activités reste li-mitée. Le Dr Justin Bomda, qui œuvre depuis plus d’une dizaine d’années dans l’encadre-ment des réseaux de microfinance dédiés aux ruraux, analyse dans la revue Défi des pauvres la problématique du microcrédit agricole en zone rurale. Il explique, ainsi, que dans le sec-teur agricole il est difficile d’avoir des formes de garanties appropriées pour sécuriser les financements qui seront accordés et il n’existe pas de forme d’assurances spécifiques pour couvrir les risques nombreux dans le secteur. « Face à cette situation, les EMF pré-sentent aussi des contraintes qui ne leur permettent pas de répondre efficacement aux besoins de financement du secteur agricole, explique M. Bomda. Il s’agit, entre autres, de la nature très court terme et des volumes faibles de leurs ressources, qui ne leur permettent pas de satisfaire les besoins en financements moyen et long terme du secteur ; du coût des res-sources et la faiblesse du volume de leurs opérations, d’où la difficulté de réaliser des économies d’échelle nécessaires pour pratiquer des taux d’intérêt compatibles avec le niveau de rentabilité du secteur agricole ».Face à ces difficultés, les établissements de mi-crofinance développent des techniques de fi-nancement aussi réalistes que faire se peut. Ces dernières années, l’apport de l’Etat aux micro-banques rurales a été décisif, à travers les res-sources additionnelles issues de la remise de la dette. Le Ministère de l’agriculture a ainsi mis des financements à la disposition de certains établissents de microfinance, tels que le Crédit du Sahel et les réseaux MC2, pour aider à l’oc-troi des crédit agricoles.

Caisses villageoises bien implantéesQuelques grandes banques, telles que la BICEC (Banque internationale du Cameroun pour l’épargne et le crédit) et Afriland First Bank, ont souvent transité par des réseaux de microfinance et de caisses villageoises bien implantées (Caisses villageoises d’épargne et de crédit autogérées, Mutuelles communau-

taires de croissance, Muffa). Ainsi, par exem-ple, rapporte le Dr. Justin Bomda, « dans le cadre de la collaboration avec Hevecam, la MC² de Niété facilite le financement des plan-tations villageoises d’hévéa et la reprise des vieilles plantations coloniales. Concernant la Socapalm, la collaboration avec la MC² d’Esé-ka a permis, grâce à l’appui des partenaires financiers à l’instar de la DEG allemande et d’Afriland First Bank, le financement de la ré-trocession de près de 2000 ha de plantation de palmiers à huile à plus de 150 petits produc-teurs locaux. »

FB

« L’agriculture, à laquelle j’associe l’élevage et la pêche, devrait gé-nérer de grands projets agro-in-

dustriels qui dorment dans les cartons depuis des années. (…) Non seulement nous pourrions ainsi être pour des générations à l’abri d’une crise alimentaire, mais nous serions aussi en me-sure de satisfaire la demande des pays voisins ». Cette interpellation de Paul Biya, faite lors d’un conseil des ministres il y a un an, expri-mait aussi une forme de dépit. Car, malgré un potentiel agricole envié par les autres pays du continent (terres disponibles et fertiles, bonne hydrologie, main-d’œuvre travailleuse), le Cameroun continue d’avoir une production en deçà de ses besoins. Un constat effectué par le gouvernement lui-même, dans son rapport économique et financier de l’année dernière, dans lequel il note que « la production vivrière a progressé d’environ 3% entre 2005 et 2006. Ce niveau de croissance reste globalement en deçà du potentiel du sous-secteur, du fait notamment des difficultés de financement, de l’enclavement de certaines zones de production, du faible en-cadrement des producteurs et de la faible uti-lisation des intrants agricoles ». Comme autre cause de l’atonie de la production agricole, il y a eu la désorganisation du secteur, à la suite d’une libéralisation mal préparée, qui fai-sait du secteur agricole un secteur marchand comme un autre, sans tenir compte des enjeux alimentaires et des millions de familles qui ne trouvent de revenus que dans la pratique de

l’agriculture. Conséquence de cette situation, le Cameroun dépense plus de 350 milliards, annuellement, pour importer ses denrées alimentaires.

Conversion en profondeurC’est ce constat qui a amené le gouvernement camerounais, depuis quelques années, à lan-

cer des projets agricoles dans différentes zo-nes agro-écologiques du pays. Le but étant, selon le Premier ministre camerounais, de « transformer la menace actuelle en opportu-nité pour la conversion en profondeur de no-tre agriculture, qui devra satisfaire les besoins nationaux et devenir une exportatrice nette de denrées alimentaires ». Dans le passé, « la ré-volution verte » (nom attribué à la politique

agricole de l’époque promue par l’ancien président Ahidjo) s’appuyait essentiellement sur des opérations d’enrôlement massif de jeunes dans des zones en friche (Sodenkam, Sodecoton, Hevecam, Semry, etc), avec un soutien étroit du gouvernement, qui veillait à la formation des paysans et à la fourniture des intrants agricoles. Selon le Premier minis-tre camerounais, c’est le même schéma qui va probablement s’appliquer. Avec le lancement de 5000 jeunes dans les filières agricoles, après résolution de deux obstacles majeur : l’accès aux terres et aux crédits.

Politique agricoleDans cette logique, le vice-Premier mi-nistre, ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Jean Nkuete, a rendu publics les éléments de politique agricole dont les grands axes seraient : le développement des filières stratégiques, à travers un accent sur l’installation des jeunes agriculteurs ; un appui à l’acqui-sition des engrais, des pesticides et du petit matériel agricole à hauteur de 20 à 50% ; une subvention du matériel vé-gétal entre 75 et 100% ; un soutien à la transformation et au stockage à hauteur de 80%, ainsi qu’à la mécanisation par la création de pools d’engins dans les

cinq régions agro écologiques et une subven-tion de 15% des coûts d’acquisition des trac-teurs. D’ores et déjà, une usine de montage de tracteurs, d’une valeur de 18 milliards, a été installée à Ebolowa, dans le sud équatorial du pays. Cette unité d’assemblage dispose d’une ligne de montage d’une capacité de 8 à 12 trac-teurs par jour, d’une unité de fabrication de petit matériel et outils agricoles, d’un centre

de formation pour tractoristes, techniciens de maintenance et d’artisans, d’une capacité de 50 places. Dans la foulée, il est prévu la mise en place d’au moins 5000 ha de maïs et 5000 ha de riz dans les zones propices à ces deux cultures. Preuve que les temps changent, qu’une nou-velle ère, celle de la modernisation de l’agricul-ture s’offre au Cameroun.

Production des denrées localesAu-delà de cette politique générale, des projets spécifiques, souvent sectoriels, ont été lancés en vue de développer la production des den-rées locales. Il en va ainsi du programme de développement des palmeraies villageoises, du programme de développement de la banane plantain, ou encore du programme de dévelop-pement des racines et tubercules, dans certai-nes zones agro-écologiques (Bas-fonds, hauts plateaux, zones sahéliennes). Pareillement, les produits de rente, tels que le cacao et le café, bénéficient d’un programme particulier.Si cette politique agricole n’a pas encore sus-cité chez les grands opérateurs économiques le lancement de plantations de taille indus-trielle, les agro-industries existantes ont, néan-moins, lancé des programmes d’extension ou de modernisation, à l’instar de Socapalm, qui a entrepris de lever 15 milliards à la Bourse de Douala pour financer l’augmentation de ses capacités. Des programmes de réinsertion des jeunes dans les filières agricoles, moyennant des financements importants et la mise à dis-position des réserves foncières, font également partie de ces mesures qui pourraient changer le visage de l’agriculture camerounaise et don-ner plus de couleurs aux prochaines manifes-tations agricoles.

François Bambou

Le dynamisme des paysans camerounais bute souvent sur les difficultés de financement des activités agricoles. L’Etat et les établissements de microfinance tentent de corriger cette insuffisance.

Au moment où se prépare le comice agro pastoral d’Ebolowa, dans le sud humide du pays, le Cameroun, dont l’agriculture a piétiné pendant plus de dix ans, est au seuil d’une nouvelle ère de modernisation.

De surcroît, non seulement les banques privées

accordent très peu de crédit au secteur agricole, mais, au-delà, les rares crédits alloués à ce secteur sont concentrés sur les grandes exploitations

agroindustrielles.

Malgré un potentiel agricole envié par les autres pays du continent (terres disponibles et fertiles, bonne hydrologie, main-d’œuvre compétente),

le Cameroun continue d’avoir une production en deçà de

ses besoins.

Spécial Agriculture Cameroun

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 13

Vivrier : Objectif nourrir la CEMAC

La crise alimentaire de 2008 ayant ré-vélé le gap important entre la produc-tion vivrière nationale et les besoins de

consommation de la population, les autorités ont rapidement entrepris de revitaliser la production des denrées les plus prisées, en vue d’améliorer l’approvisionnement des marchés intérieurs et de satisfaire la forte demande dans la sous-ré-gion. Ainsi, en 2009, se réjouit le gouvernement, l’agriculture des produits vivriers a crû de 6,8%,

contre 5% en 2008. Dans le détail, indique le rap-port économique et financier du gouvernement, la production de maïs s’est élevée à 1 661 832 tonnes, en hausse de 19,1% par rapport à 2008.

Performance dans le maïs Ce faisant, le gouvernement a déjà dépassé l’ob-jectif qui était d’atteindre 1,5 million de tonnes de maïs en 2010. Une performance qui résulte des effets conjugués des conditions pluviomé-triques favorables dans les principales zones de

production et de la mise en œuvre intensive du Programme national d’appui à la filière maïs. A cet effet, indiquent les autorités, « afin d’ac-croître l’offre de maïs, le gouvernement a concédé à des opérateurs privés nationaux une superficie d’environ 7500 ha sur les anciens terrains de l’ex-Sodeble à Wassandé. Des conventions ont été si-gnées à cet effet avec des groupes d’investisseurs en vue de la culture intensive de ce produit ».

La production de riz en hausseAutre céréale sur laquelle le gouvernement a développé plusieurs mesures structurantes de

renforcement de productivité : le riz. La pro-duction de riz paddy s’est chiffrée à 123 211 tonnes en 2009, soit une hausse de 11% par rapport à 2008. Ces performances devraient encore s’améliorer, dans la mesure où plu-sieurs bassins de production sont en cours de réhabilitation, notamment dans les bassins de Yagoua, de Lagdo (dans le septentrion) et de Ndop pour le riz irrigué. Il est également question de relancer la riziculture dans la

zone de Santchou et de Tonga (à l’ouest du pays) pour le riz pluvial, et de poursuivre des activités du projet chinois à Nanga-Eboko (dans le centre). « S’agissant des périmètres Semry et Lagdo, explique le gouvernement, un fonds de soutien à la relance de la production a été mis en place, qui a permis de mettre à la dis-position des agriculteurs des moyens financiers, des structures d’appui et des techniciens. Ces agriculteurs ont bénéficié également d’un don libyen de dix tracteurs. La Société d’expansion et de modernisation de la riziculture (SEMRY) a reçu de l’Etat une subvention de 3 milliards pour sa réhabilitation et de 37 millions pour la multiplication des semences ».

Des racines et tubercules pour assurer la sécurité alimentaireComme l’indique le tableau ci-dessous, les productions de manioc et de pomme de ter-re ont, respectivement, progressé de 2% et de 1,7% depuis 2008. Celles de macabo/taro

et d’igname étant demeurées constantes. Depuis quelques années, la production de ces denrées est encadrée par le Programme national de développement des racines et tubercules. Selon les initiateurs de ces pro-grammes, l’objectif général du projet est de contribuer, par le développement du secteur des racines et tubercules, à l’amélioration de la sécurité alimentaire et des niveaux de revenus des pauvres des zones rurales. « Le programme a ainsi adopté une stratégie orien-tée sur le marché qui renforce les capacités des petits cultivateurs et transformateurs de R&T – dont 90% sont des femmes – de s’organiser au niveau du village, du bassin, de la région et

du pays et de développer leurs activités de pro-duction et de transformation afin de répondre à la demande des consommateurs ».

Un hectare de bananiers plantains par paysanC’est dans la même veine que le programme de relance de la filière plantain a été mis en place. Outre qu’il permet, grâce à la vulgarisation des fruits de la recherche agricole, de mettre en place un réseau de pépiniéristes professionnels, il vise, selon le schéma du programme de déve-loppement des palmeraies villageoises, à faire développer un hectare de bananiers plantains par chaque paysan, avec pour objectif à court terme la mise en place de quelques 40 000 hectares de bananiers plantains pour une pro-duction de 500 000 tonnes supplémentaires. En 2009, la production de banane plantain a augmenté de 2% par rapport à 2008 et celle de banane douce de 1,8%. Depuis son lancement en 2003, le Programme de relance de la filière

plantain a distribué 7 millions de plants à envi-ron 10 000 producteurs, correspondant à 5774 hectares et à une production additionnelle de 285 000 tonnes de plantains.

Une forte demande régionale Cette dynamique de la production vivrière inté-rieure n’empêche pas les tensions sur les marchés et, conséquemment, d’une hausse régulière des prix. En cause, la forte demande des pays voi-sins, tels que le Nigeria, le Congo, le Gabon et la Guinée équatoriale, vers lesquels le Cameroun exporte quasiment toutes les variétés de produits vivriers, bruts ou transformés. La politique ac-tuelle vise donc à doper la production des toutes ces denrées, pour permettre aux paysans came-rounais des saisir les opportunités commerciales offertes par ces marchés sous régionaux. Pour atteindre cet objectif, estime l’institut de recherche agricole pour le développement, « il est impératif que la recherche trouve des solutions aux nombreuses contraintes qui entravent la production des cultures vivrières ». De fait, cette institution, qui travaille à trouver des espèces à fort rendement et résistantes aux maladies, a établi une coordination des cultures annuelles au Cameroun orientée vers trois objectifs prin-cipaux : la préservation de la sécurité alimen-taire par une meilleure production des cultures vivrières d’intérêt national, qui sont le sorgho et petit-mil, le maïs, le manioc, le riz, la bana-ne-plantain, le niébé, l’arachide et le haricot ; l’accroissement des revenus du paysan par l’in-tensification, d’une part, des cultures vivrières d’intérêt national citées ci-dessus et, d’autre part, des cultures annuelles dites de rente, tel-les que la pomme de terre, l’oignon, le coton, la tomate, le piment, le tabac, la canne à sucre, le chou et le haricot vert ; la valorisation des cultures annuelles, qui présentent de plus en plus un intérêt économique certain, telles que le sésame, le blé, les légumes, le concombre.

FB

Le Cameroun a mis sur pied un grand nombre de programmes spéciaux et de mesures incitatives pour doper la production vivrière. Objectif : couvrir le marché intérieur et satisfaire la forte demande des pays voisins.

En 2009, la production de banane plantain a augmenté de 2% par rapport à 2008.

Cette dynamique de la production vivrière intérieure n’empêche pas les tensions sur

les marchés, dues à la forte demande des pays

voisins, tels que le Nigeria, le Congo, le Gabon et la Guinée équatoriale, en

produits vivriers, bruts ou transformés.

Tableau 1 : Production des principales cultures vivrières (en tonnes)

Cultures Vivrières 2005 2006 2007 2008 2009CéréalesMaïs 1 178 291 1 249 656 1 354 940 1394832 1 661 832Riz paddy 84 197 89 249 98 334 72009 123 211Mil/Sorgho 764 485 781 304 977 250 1006478 1 055 530Racines et tuberculesManioc 2 776 787 2 837 876 2 939 313 2882734 2941367Macabo/Taro 1 240 037 1 267 318 1 398 460 1481750 1490875Igname 372 524 380 720 394 087 399615 399808Pomme de terre 177 817 181 729 220 000 145018 147509Patate douce 242 481 247 816 230 777 237 496Féculents et autresBanane plantain 1 670 686 1 722 477 2 280 000 2500639 2550320Banane douce 815 375 841 467 912 820 916869 933435Oignon 111 838 114 552 104 211 112441 113721Tomate 639 874 655 231 558 003 572219 573610Ananas 100 139 102 843 112 741 127 070 128 535

Source : Minader

1-La zone forestière monomodale (Provinces du Littoral et du Sud Ouest). A ce jour, sa contribution au PIB national est de 67,8 milliards FCFA. A l’horizon 2015, avec le programme de promotion de nou-velles filières, sa part au PIB va passer à 234,6 milliards, tandis que son PIB/ha-bitant passera pour la même période de 21 264 FCFA à 39 155 FCFA.

2-La zone forestière bimodale (Province du Centre, Sud et Est). Sa contribution au PIB national passera de 54 milliards à 156,5 milliards FCFA, cependant que le PIB/habitant passera de 14 585 FCFA à 29 096 FCFA

3-La zone des Hauts plateaux (pro-vinces de l’Ouest et du Nord Ouest). Sa contribution passera de 73,3 milliards à 142,8 milliards. Le PIB/habitant pas-sera, quant à lui, de 20 367 FCFA à 23 547 FCFA.

4-La zone soudano-sahélienne (pro-vince du Nord et de l’Extrême Nord). Sa contribution au PIB national passera de 100,2 milliards à 245 milliards FCFA. Le PIB/habitant passera, quant à lui, de 21 320 FCFA à 74 637 FCFA.

5-La zone des hautes savanes (pro-vince de l’Adamaoua). Sa contribution au PIB passera de 13,5 milliards FCFA à 28,4 milliards FCFA. Le PIB/habitant, quant à lui, connaîtra une légère régres-sion, de 16 937 FCFA à 16 665 FCFA, en raison de l’explosion démographique attendue ici, où la population passera de 800 000 à 1,7 million d’habitants.Source : Minader

Les cinq grandes régions agro écologiques

Spécial Agriculture Cameroun

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Les nouveaux outils de l’agroalimentaire

La vitalité de la production agricole ca-merounaise, particulièrement variée, a ouvert la voie, ces dernières années,

au développement de nombreuses initiatives privées de transformation de produits came-rounais. Les Camerounais ont pu s’en rendre compte à l’occasion des grandes séances de dégustation des produits locaux, organisées en été dernier par Bernard Njonga, un acti-viste de la société civile nationale. On pou-vait y trouver des liqueurs locales à base de produits les plus insoupçonnés, des jus de fruits en bouteille, du riz local transformé,

des pains de gâteaux à base de farines loca-les de patate, des semoules à base de banane igname, plantain et patate, des huiles de pal-mistes et autres produits cosmétiques issus de la transformation des aliments camerou-nais, etc. Tous ces produits ont enregistré au franc suc-cès auprès du public : « J’ai dégusté le cake, ra-conte un visiteur. On m’a dit qu’il est constitué à 40% de farine de patate et j’avoue que le goût est exquis. De par la consistance et le goût, il est très bon. Si le gouvernement pouvait faire de cette initiative un projet gouvernemental, dans cinq ou dix ans au plus tard, le Cameroun aura résolu au moins à 70%, voire à 80%, le problè-me d’alimentation dans ce pays. Et on aura en même temps résolu le problème de lutte contre le chômage et la pauvreté. »

Les citadins aiment les produits de la campagnePour les promoteurs, également, cette occa-sion était inespérée. Ainsi, pour Sadjo Didi, présidente du GIC des producteurs de patates de Maïborno Ngodi, Ngaoundéré est un suc-cès « Nous sommes très contents parce que nous avons vu que les populations ont aimé la pâtis-serie faite à base de farine de patate. Nous avons les capacités, la terre et autres moyens naturels favorables à la production de patate et nous som-mes prêts à en produire autant qu’il faudra. Tout ce que nous demandons c’est que le gouverne-ment mette à notre disposition des moyens pour intensifier notre production. » Ce sentiment est partagé par Shang Patu, pro-

motrice de la coopérative des produits laitiers Tadu Dairy de Kumbo, selon qui « Cette journée a permis de faire connaître davantage nos pro-duits au public camerounais. Nous sommes très contents parce que les Camerounais ont montré qu’ils aiment le yaourt local. Les ventes que nous avons effectuées en sont la preuve palpable. Nous avons engagé des contacts avec quelques po-tentiels partenaires de travail. Maintenant que nous avons fait déguster nos produits et que nous avons la conviction qu’ils sont appréciés, nous nous engageons à les acheminer dans plusieurs espaces commerciaux de la capitale économique

et politique. Nous commencerons par les grandes surfaces et nous irons progressivement. Je peux déjà rassurer les consommateurs de la disponibi-lité des yaourts Tadu Dairy dans les jours à venir sur les marchés de Douala et Yaoundé. »

Favoriser les farines localesPour Bernard Njonga, ce dynamisme des en-trepreneurs ruraux devrait amener le gouver-nement à prendre des mesures d’accompagne-ment pour transformer ces micro entreprises en projets industriels. Et de citer tous les bé-néfices que le Cameroun pourrait tirer du dé-veloppement de la transformation locale de produits agricoles : « En 2009, le Cameroun a importé près de 400 000 tonnes de blé au coût de 58 milliards de francs CFA. Le pain qui est consommé au Cameroun est fabriqué à partir du blé importé à 100%. Si on décide d’incorpo-rer 20% de farine locale dans le pain consommé au Cameroun, ce sont 20% des 400 000 tonnes de blé qu’on importe qui seront remplacés par les farines locales. Soit 79-80 000 tonnes. Par la même occasion, le Cameroun économiserait 20% des 58 milliards investis dans l’importation du blé. Soit 11,5 milliards de francs. Parlant des 79 000 tonnes de farine locale, s’il s’agit de la patate, sachant que le rendement à l’hectare est de 13 tonnes, qu’il faut une main d’œuvre d’environ 6 personnes à l’hectare et que la pa-tate récoltée doit être séchée et écrasée en farine, c’est-à-dire perdre 35% de son poids, vous avez la quantité d’hectares et de mains d’œuvre qu’il faut pour produire les 79 000 tonnes de farines locales ».

Réduire les pertes après récoltesSi à côté de ces centaines de micro entreprises, il existe quelques PME, qui opèrent notam-ment dans le domaine des boissons rafraichis-santes et de la charcuterie, le gouvernement a développé depuis quelques années des mesu-res d’appui pour mieux structurer et accom-pagner financièrement certaines petites entre-prises du secteur et assurer la promotion des PME de transformation agroalimentaire des produits locaux de consommation de masse. Selon l’ONUDI, qui parraine ce programme, les études menées sur la compétitivité de l’éco-nomie camerounaise citent comme contrain-tes majeures à l’essor du secteur agricole les pertes après récoltes, qui avoisinent les 30% de la production, à cause du manque d’équipe-ments de conditionnement, de stockage, de sé-

chage ou de transformation sur l’ensemble des chaînes « produits agricoles bruts » et « pro-duits agricoles intermédiaires », ainsi que sur la chaîne des produits conditionnés ou transfor-més, prêts à la consommation, encore appelée « produits agroalimentaires ».Le gouvernement estime que ce programme est appelé à « faciliter l’introduction de la tech-nologie et de la technique directement en milieu rural, pour la transformation et la conservation

des produits locaux de consommation de masse. Son impact technique est incontestable dans la mesure où il permettra de faire comprendre à nos populations que nos produits de base peu-vent être transformés ou conservés selon des normes bien éprouvées, afin de réduire les pertes après récolte et permettre qu’ils soient disponi-bles toute l’année sur la table du consommateur. L’expérience des exportations de produits vivriers camerounais, ainsi que la demande importante dans la sous-région, et même à l’intérieur du

pays, amènent à établir que le développement d’un secteur de transformation et de conserva-tion des produits agricoles intensifierait énormé-ment la présence du Cameroun sur ces marchés, qui sont actuellement approvisionnés, en partie, par des produits importés d’Asie ».

Former de jeunes entrepreneursL’objectif global de ce projet du Ministère des petites et moyennes entreprises est de pro-mouvoir la création et le développement de 150 PME de transformation et de conservation des produit locaux de consommation de masse dans les dix régions, y compris avec un soutien financier. Une des dernières initiatives en faveur de la transformation des produits locaux est le Centre d’incubation d’entreprises pilote de la

Chambre des commerce, de l’industrie, des mines et de l’artisanat, qui a pour objectifs de valoriser certains produits agricoles tels que le manioc, le macabo, le plantain, l’igname. Pour ce faire, la Chambre forme les jeunes en entreprenariat pour la transformation primaire des produits agricoles par vagues (vingt jeunes tous les deux mois), l’idée étant d’aboutir plus tard à la création des PMI/PME de fabrication des produits alimentaires ; de

contribuer à l’autosuffisance alimentaire grâ-ce à l’augmentation de l’offre des produits ali-mentaires pour satisfaire la demande intérieu-re et extérieure ; contribuer à l’amélioration de la balance des paiements par l’exportation des produits alimentaires finis. D’ores et déjà, ce centre a mis sur le marché une semoule de manioc baptisée akwakwa, destiné à l’usagee domestique et à la pâtisserie.

FB

Malgré un contexte difficile et un encadrement encore insuffisant, plu-sieurs micro entreprises et PME de transformation de produits agricoles locaux se fraient un chemin.

« Nous sommes très contents parce que nous avons vu que les populations

ont aimé la pâtisserie faite à base de farine de patate. »

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 15

Foncier rural : le Cameroun, cette terre en friche

Engrais : un secteur à fertiliser

Lorsqu’il élabore sa nouvelle politique agricole, le gouvernement camerou-nais peut se soucier de tout, sauf de la

disponibilité des terres. Car, dans ce pays ni-ché entre le cœur de l’Equateur, qui a la tête à l’amorce du Sahel, et qui est baptisé « Afrique en miniature », les zones agro écologiques sont si variées qu’il y a de la terre pour toutes sortes de cultures.

Des terres fertiles sous-exploitéesEn tout, selon les évaluations du Ministère de l’agriculture et du développement rural, les terres arables sont estimées à environ 7,2 mil-lions d’hectares, mais seulement 1,8 million d’hectares sont effectivement cultivés, tandis que le potentiel irrigable est estimé à 240 000 hectares, quand moins de 33 000 hectares sont actuellement irrigués. C’est dire le potentiel qu’offre la disponibilité de ces immenses ter-res, réputées fertiles. Un potentiel qui traduit également la sous-utilisation des terres, selon un cadre du Ministère de l’agriculture. La mise en valeur du potentiel agricole du Cameroun, indique-t-il, reste très faible : seulement 17% des terres irrigables sont exploitées, alors que 26% seulement des terres arables sont culti-vées. « Cette situation largement déficitaire dans la mise en valeur de notre potentiel agricole sem-ble paradoxale au regard des multiples atouts dont dispose le Cameroun et des besoins alimen-

taires d’une population en pleine croissance », déplore-t-on au Ministère de l’agriculture et du développement rural.

Un capital foncier C’est tout naturellement que ce capital foncier exerce une grande attraction sur les multina-tionales agricoles. Plusieurs grands groupes agroindustriels, tels qu’Hevecam à Niete, dans le sud du pays, ou encore les filiales locales de la Compagnie fruitière française dans la zone du Mungo, et des grandes plantations indus-trielles privées, étatiques ou mixtes, telles que la Socapalm, le Cameroon Development Corporation, la Safacam, bénéficient de terres souvent sous forme de baux emphytéotiques. Mais, depuis la crise alimentaire mondiale, ce capital foncier suscite des convoitises et at-tire progressivement de nouvelles catégories d’investisseurs. Parmi les nouveaux venus, la Chine a déjà bénéficié de quelques 10 000 hectares pour la production de denrées, dont principalement du riz. Même pour les Camerounais, malgré ces ré-serves foncières importantes (seulement 26% des terres arables sont cultivées), il y a, dans certaines zones, une pression foncière impor-tante, ce qui créée par ailleurs le problème du maintien de la fertilité des sols. « Ce problème est aggravé dans les zones à écologie fragile, ce qui provoque fréquemment, avec l’insécurité

foncière, des conflits d’usage du sol », commente un responsable du Ministère de l’agriculture. Pourtant, le régime foncier du Cameroun, tel qu’organisé par l’ordonnance N° 74-1 du 06 juillet 1974, est censé anticiper et régler ces conflits, qui apparaissent régulièrement dans les zones d’agriculture intensive. Ce texte, esti-me le Minader, garantit, sans discrimination, à toute personne physique ou morale possédant des terrains en propriété, le droit d’en jouir et d’en disposer librement. Comme l’expliquait Clobert Tchatat, ancien ministre de l’Agricul-ture et du Développement rural, les terres sont classées selon trois domaines : le domaine na-tional, le domaine public et le domaine privé. Le domaine national, objet des problèmes fon-ciers, est géré en concertation avec les autorités traditionnelles. Les dépendances non occupées ou non exploitées du domaine national sont attribuées par voie de concession provisoire ou définitive. L’attribution de ces dépendances

est proposée par une commission consulta-tive regroupant les autorités administratives, les autorités traditionnelles et les populations riveraines. Cette commission a pour mission, entre autres rôles, de statuer sur la répartition de l’espace rural et pastoral suivant les besoins des populations. Selon M. Tchatat, « le pro-blème foncier reste une contrainte importante au développement des productions. Aussi, il convient, compte tenu de son ampleur, notam-ment pour l’extension des superficies cultivées et l’installation de nouveaux agriculteurs (particu-lièrement les jeunes), de poursuivre le dialogue avec les administrations et tous les acteurs im-pliqués, et d’œuvrer pour la récupération et la valorisation, sur une base contractuelle avec les exploitants, des zones marginales de production. Il conviendra également dans le cadre d’une ges-tion concertée de l’espace, de sécuriser l’usage du foncier. La création et le développement des

moyennes et grandes exploitations sont encoura-gés par la mise à disposition par l’Etat de terres du domaine foncier national et l’aménagement de zones d’installation. Elles bénéficient par ailleurs d’un appui conseil spécifique et d’un ap-pui au développement de leurs plantations ».

Mieux cerner et spécifier les usages fonciers locauxPour le Ministère de l’agriculture et du déve-loppement rural, la problématique du foncier se décline en trois problématiques qu’il faut traiter concomitamment. Il y a d’abord le droit d’accès pour tous les agriculteurs, y compris les jeunes agriculteurs et les femmes. Cette question commence à trouver des solutions durables avec la mise en place des systèmes de fermage. Mais le gouvernement a récemment investi 30 milliards, issus de l’allègement de la dette, pour lancer une opération d’installation des 15 000 jeunes dans l’agriculture.

Les deux autres questions majeures dans ce domaine concernent la sécurité des droits d’usage et la gestion technique durable des sols. Concernant le problème des droits d’usa-ge, le gouvernement considère que l’insécurité foncière étant un handicap à toute politique de maintien de la fertilité des sols, il est impérieux de favoriser le droit d’usage des terres en dé-veloppant les modalités de formalisation des contrats de fermage.Le gouvernement, qui souhaite trouver une so-lution globale à cette question, a entrepris de mener dans les zones posant chacune une pro-blématique foncière particulière, des études participatives pour mieux cerner et spécifier les usages foncier locaux et leurs origine. Ceci devrait permettre de développer une nouvelle politique nationale en la matière.

FB

L’indisponibilité et les coûts élevés des engrais chimiques dans les pratiques culturales au Cameroun sont en partie

responsables de la baisse de production dans plusieurs cultures d’exportation. Selon le vice Premier ministre, ministre de l’Agriculture et du Développement rural, la faible productivité des sols, cause principale de la baisse de pro-duction de diverses denrées agricoles, est une résultante directe d’une trop faible utilisation des engrais. A titre d’illustration, les responsables camerou-nais notent que, l’utilisation d’engrais est de 15 kg par hectare (ha), contre 50 dans d’autres pays africains tels que le Kenya et 200 kg par hectare en France. Plus grave, moins d’un quart des exploitations agricoles rurales utilisent des engrais minéraux granulés, en liquides, ou en poudre). S’il est acquis que la faible information des paysans contribue à ce manque d’engoue-ment pour l’utilisation de fertilisants modernes,

le cout élevé est le facteur principal, notamment pour ce qui est de vastes plantation de café, de cacao ou de coton. Le gouvernement a beau considérer ce produit comme étant stratégi-que et le détaxer à l’importation, rien n’y fait. Le produit reste toujours inabordable : le coût a presque doublé pour atteindre désormais 25 000 le sac. Pour le moment, le gouvernement tente de séduire les investisseurs privés pour en-courager l’implantation au Cameroun d’usines de production d’engrais. S’il n’y a pas encore de véritable ruée dans ce secteur, quelques inves-tisseurs se sont déjà manifestés. Ainsi, récem-ment, une usine d’engrais chimiques a ouvert à Douala, la capitale économique du pays, et de-vrait produire chaque jour environ 400 tonnes d’engrais granulés et en poudre avec des prix de vente plus accessibles. Cette production locale permettrait aussi de limiter les pertes importantes en devises enregistrées chez les grands groupes agroin-

dustriels. Le plus grand espoir vient toute de même d’investisseurs chinois qui ont signé

l’année dernière un accord avec les autorités camerounaises pour le montage d’une usine d’engrais chimiques. « Après environs six mois

de discussion avec le Ministère de l’industrie, des mines et du développement technologique, nous

avons signé un protocole d’accord-cadre relatif au projet de construction d’une usine d’engrais chimique au Cameroun, d’une capacité de 80 000 tonnes d’ammo-niac et 130 000 tonnes d’urée par an », a expliqué M. Xiao Xinsheng, représen-tant de la société chinoise CGC Overseas Construction Group (CGCOC) au Cameroun. Cette société, selon le minis-tre Badel Ndanga Dinga, devra implan-ter au Cameroun une usine d’un coût de plus 130 milliards de francs CFA qui bénéficierait de l’exploitation pétrolière locale comme matières première pour la production d’engrais. La production de cette usine pourrait couvrir la consom-

mation annuelle camerounaise qui est actuel-lement d’environ 200 000 tonnes.

FB

L’immense capital foncier du Cameroun, bien que sous-exploité, génère parfois des conflits entre les populations autant qu’il suscite la convoitise des multinationales agricoles.

Depuis la crise alimentaire mondiale, ce capital foncier suscite des convoitises.

Les responsables camerounais notent que, l’utilisation d’engrais est

de 15 kg par hectare (ha), contre 50 dans d’autres pays

africains tels que le Kenya et 200 kg par hectare en

France.

Ce capital foncier suscite des convoitises et attire progressivement

de nouvelles catégories d’investisseurs. Parmi les nouveaux

venus, la Chine a déjà bénéficié de quelques 10 000 hectares pour

la production de denrées dont principalement du riz.

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Cacao : objectifs de production dépassés

Après une longue période noire, ca-ractérisée par la chute drastiques des volumes produits et par la baisse de la

qualité entraînant une décote sur les marchés internationaux, le cacao camerounais, une des principales mamelles nourricières du pays pendant les années fastes, reprend de la saveur. En témoignent les chiffres définitifs de la cam-pagne écoulée. Selon le gouvernement, la pro-duction de cacao s’est élevée à 230 000 tonnes en 2009, presque autant qu’en 2008. Les expor-tations ont totalisé 193 973 tonnes, en hausse de 8,9% par rapport à 2008. « La SODECAO (organisme public qui encadre les planteurs) a lancé, depuis 2006, un programme de produc-tion et de distribution de plants améliorés, qui vise la distribution annuelle de six millions de plants, soit la création de 5000 hectares de nou-velles exploitations modernes. L’impact de cette action devrait être perceptible dès la campagne 2010/2011, pendant laquelle il est attendu une production de 250 000 tonnes », espèrent les autorités. Le Cameroun a donc atteint et dé-passé l’objectif de 200 000 tonnes qu’il s’était fixé pour 2010. Du même coup, le pays confor-te sa place de cinquième producteur mondial, avec une nouvelle ambition : atteindre une production de 300 000 tonnes en 2015.

Légère amélioration qualitativeAutre indicateur de l’embellie de la filière, l’amélioration progressive de la qualité. Selon le conseil interprofessionnel du cacao et du café, la proportion de cacao estampillé hors standard dans la production camerounaise est passé en

2009 de 71 à 64%, et aurait encore baissé cette année 2010. Un progrès certes, mais qui décrit une réalité préoccupante : les acteurs de la fi-lière cacao ne se sont toujours pas approprié les exigences de qualité dans la collecte, le traite-ment et la commercialisation du cacao. Cette embellie, comme en convient le direc-teur général du Conseil interprofessionnel du cacao et du café, est le fuit de mesures de relance prises depuis quelques années dans la filière, tant par les organes faîtiers que par le gouvernement : l’envoi des conseillers agrico-les sur le terrain pour encadrer les planteurs, la fourniture gratuite des semences appro-priées et sélectionnées, la relance de la société de développement de la cacao culture, les fa-cilités accordées aux fournisseurs d’engrais, la défiscalisation des intrants agricoles pour les rendre plus accessibles aux paysans, le ren-forcement du contrôle des opérateurs du seg-ment commercial, la création d’un fonds de développement financé par les prélèvements à l’exportation, l’incitation des jeunes à la créa-

tion de nouvelles plantations, la fourniture de plants sélectionnés capables d’offrir des rende-ments d’une tonne à l’hectare et la protection du verger.

Problèmes persistants Cette hausse de la production doit aussi beau-coup au fait que les 600 000 producteurs, ré-partis dans sept des dix régions du pays, sem-blent avoir ressenti une nette amélioration dans leurs gains, du fait de la bonne tenue des cours mondiaux. Cependant, cette embellie n’occulte pas les maux qui persistent dans la filière, malgré la multiplication des mesures de restructura-tion. Le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, dans une circulaire adres-sée aux acteurs de la filière cacao, dénonçait récemment ces tares, qui freinent un essor en-core plus vif du cacao camerounais : achat de cacao humide et non fermenté ; prolifération des coxeurs (intermédiaires non agréés) ; sé-chage du cacao sur le bitume ; inexistence des marchés périodiques et des comités locaux de commercialisation ; absence sur le terrain des organes d’encadrement de la filière ; fai-ble implication des autorités administratives dans la supervision des opérations de com-mercialisation. Des difficultés auxquelles il faut ajouter des contraintes structurelles plus graves, telles que le coût élevé des intrants agricoles ; l’insuffisance du matériel végétal performant et de qualité ; la maîtrise parfois approximative des itinéraires techniques et des pratiques culturelles rentables ; le vieillis-

sement des plantations et des chefs d’exploi-tation ; le professionnalisme encore limité de l’interprofession et l’organisation anarchique de la commercialisation ; la fluctuation non maîtrisées et comprise des cours internatio-naux ; l’inadaptation, voire l’absence, de sys-tèmes dédiés de financement ; le faible niveau de transformation locale ; les difficultés des coopératives agricoles ; les difficultés d’accès au foncier. Le Conseil interprofessionnel partage ces in-quiétudes du ministre, notamment sur les be-soins d’extension du verger et le souci de ra-jeunissement de la main d’œuvre. La superficie du verger cacaoyer actuel est estimée à 400 000 ha et environ 50% des plantations ont plus de 40 ans (surtout dans le centre et le sud, où 40% du verger a été planté avant 1950), ce qui peut expliquer la faiblesse des rendements, dont la moyenne est estimée à 300 kg/ha.

Face à ces difficultés, l’Etat veut donner des gages, notamment en direction des paysans,

d’autant qu’il leur demande d’augmenter leur production. Il est donc question de mettre en place, dans les bassins de production, des in-frastructures de marché, de stockage et d’éva-cuation, de développer les pépinières pour des plants sélectionnés en vue du renouvellement des plantations, de renouer avec la pratique du préfinancement des campagnes, abandon-né depuis la libéralisation à l’orée de la crise économique. Pour stimuler la production cacaoyère, le gouvernement a mis en place une panoplie de programmes complémentaires pour appuyer les planteurs de différentes régions du pays. Au nombre de ces programmes, le plus récent est le Fonds de développement des filières cacao et café (FODECC), créé en 2006 par le gouvernement. Selon Jean-Marc Dieudonné Oyono, l’administrateur, le FODECC a un portefeuille de sept projets. « D’abord, le projet de base pour la semence qui nous vient du Ministère en charge de la recherche scien-tifique et de l’innovation. Et puis, le projet re-lais pour la multiplication à grande échelle de cette semence, qui nous vient du Ministère de l’agriculture, avec un volet particulier sur la surveillance de la qualité du produit à l’expor-tation. C’est un projet qui s’intéresse aux pesti-cides dans la production. Puis, il y a deux autres projets, qui sont en cours, qui nous viennent du Ministère du commerce, le troisième ordonna-teur technique du FODECC, à savoir l’infor-mation sur les filières et l’assainissement de la

commercialisation du produit. D’autres projets sont en cours de finalisation avec le Ministère de l’agriculture, comme la lutte antifongique et la distribution des engrais ». Ce programme, qui concentre la synergie gou-vernementale autour de la relance de ces pro-duits agricoles de rente, a ainsi contribué de manière décisive à la hausse de la production, mais les défis à venir sont encore plus rudes. Il faudrait au moins 60 millions de nouveaux plants chaque année pour redonner du tonus au verger.

FB

Après la grande déprime des produits de base, le Cameroun a atteint ses objectifs de production de Cacao, grâce aux mesures de restructuration mises en place et à l’embellie des cours mondiaux. Et vise plus haut.

Il faudrait au moins 60 millions de nouveaux plants chaque année pour redonner du tonus au verger.

La superficie du verger cacaoyer actuel est estimée à 400 000 ha et environ 50% des plantations ont plus de 40 ans (surtout dans le centre et le sud, où 40% du verger a été planté avant 1950), ce qui peut expliquer la faiblesse des rendements, dont la moyenne est estimée à 300 kg/ha.

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 17

Café : à la recherche d’une nouvelle vitalité

En 2009, déclare le gouvernement dans son rapport annuel, la production de café robusta a progressé de 12,7% par

rapport à 2008, pour se situer à 44 935 ton-nes ; celle du café arabica a baissé de 11,7% et s’établit à 9548 tonnes. Les cours du café sur le marché international étant en tendance haus-sière, la production de cette année 2010 devrait connaitre une hausse sensible. La production de 2010 est estimée à 50 000 tonnes pour le café robusta et 12 000 tonnes pour le café arabica. Cette tendance haussière connue ces dernières années tend malheureusement à occulter une triste réalité : les exportations des cafés d’ori-gine camerounaise (robusta et arabica) ont baissé de 76% entre 1986 et 2008, passant de près de 110 000 tonnes à 33 000 tonnes, avant de remonter légèrement aujourd’hui. Il s’agit d’une tendance inexorablement baissière, qui s’accentue de campagne en campagne. « A ce rythme, tout laisse croire que la production de café au Cameroun sera nulle dans dix ans », s’in-quiétait un cadre du Ministère de l’agriculture

et du développement rural, pour souligner la nécessité d’accélérer les plans de relance et de réorganisation de la filière qui sont en cours.

Passage obligatoire« Dans le contexte global d’une croissance de la consommation de café, l’un des grands défis du Cameroun reste la productivité » analyse un rap-port du Ministère de l’agriculture. Selon les sta-tistiques fournies dans cette étude, le planteur camerounais de café produit environ 300 kg de café vert (robusta et arabica) à l’hectare, tan-dis que la moyenne par hectare au Vietnam est d’environ 2500 kg. Au Brésil, on atteint des rendements qui vont jusqu’à 6000 kg à l’hec-tare pour le robusta. En arabica, la moyenne brésilienne est de l’ordre de 1150 kg à l’hectare. « La compétitivité du café du Cameroun passe par une productivité améliorée, s’accompagnant de la réduction des coûts de production. Il s’agit d´un passage obligatoire devant permettre au caféiculteur de vivre de son exploitation, même pendant les périodes où le marché impose des bas

prix », souligne cette étude. Pour ces experts du Minader, l’augmentation de la production caféière, en vue de lutter contre la pauvreté et améliorer les conditions de vie des populations concernées, passe par la levée de plusieurs dys-fonctionnements : l’absence d’une politique spécifique de soutien au secteur ; la défaillance du service national de vulgarisation ; l’absence et la vétusté des équipements techni-ques ; la difficulté d’accès à la propriété foncière ; le mauvais état des infrastruc-tures ; le coût élevé et la faible disponi-bilité des intrants.

Les plantations sont vieillissantesLa déprime de la filière caféière a natu-rellement rejailli sur la transformation et la consommation locales. Elles sont parties de 6000 tonnes en 1999 pour tomber à moins de 300 tonnes l’année dernière. Globalement, les acteurs s’ac-cordent sur les causes de ce manque de vitalité. Au-delà des effets incontrôlés de la li-béralisation intervenue pendant la grande ré-cession connue par le pays à la fin des années 80, on note que les plantations sont vieillissan-tes, que les nouvelles variétés résistantes aux

nouvelles maladies ne sont pas développées, et que les engrais et autres pesticides coûtent très cher. Conséquence, les plantations ne sont pas bien tenues, d’où les problèmes de productivité que le gouvernement veut désormais résoudre. L’objectif que se fixe le gouvernement est d’at-teindre une production des 125 000 tonnes de café en 2015 et de porter le taux de transfor-

mation à près de 40%, pour donner plus de va-leur ajoutée aux exportations camerounaises dans ce secteur. Quelques mesures ont ainsi été envisagées : développer la production qualita-tive et quantitative ; promouvoir la transfor-mation locale ; développer les cafés spéciaux à l’exemple du robusta gourmet de plus en plus prisé ; promouvoir la consommation locale, au regard de la croissance démographique des classes moyennes sur le continent. Dans ce sens, le vice-Premier ministre, minis-tre de l’Agriculture et du Développement rural, Jean Kuété, a amorcé un programme de déve-loppement de la filière café. Ce programme a pour principaux axes d’intervention l’appui à la production, à la distribution des semences et plants améliorés de café, à la protection du ver-ger, à la fertilisation des sols et à l’animation des producteurs, afin de leur faire garder confiance. Dans le but d’améliorer sa qualité, le gouverne-ment a décidé de promouvoir des centres d’ex-cellence visant un meilleur conditionnement du café camerounais, de manière à le positionner dans le haut de gamme. Dans ce sens, un cen-tre pilote d’excellence a été créé, en juillet 2010 à Santchou. « Le procédé est simple, explique Apollinaire Ngwé, le président du Conseil inter-professionnel du cacao et du café (Cicc). Après la cueillette, le producteur transporte directement son café ici. On l’introduit dans la machine dé-pulpeuse et, au final, il obtient un produit de qua-lité – le café lavé qui est une variété très demandée sur la marché international – qu’il peut vendre directement sur place ici… » Autre programme, le Projet d’appui à la pro-tection du verger cacao/café (PPVCC) a formé et recyclé 600 brigades villageoises d’interven-tion phytosanitaire et 540 dirigeants d’orga-nisations paysannes, au cours de la campagne 2009/2010. Selon le gouvernement, le PPVCC a aussi subventionné le traitement de 60 000 hectares de plantations, dont 40 000 pour le cacao et 20 000 pour le café. Il a également dis-tribué 150 kits de protection et 100 pulvérisa-teurs cette année.Conscient de l’importance de la production caféière dans le développement économique du pays, le gouvernement ne ménage pas les moyens financiers pour promouvoir la compé-titivité et la productivité de la filière café. « La volonté des autorités camerounaises à relancer la filière café se traduit par le fait que plus d´une dizaine de programmes et projets de nature à ré-pondre aux diverses attentes sont en cours de réa-lisation au moment même ou la filière adopte une stratégie pour son développement », se réjouit-on au Minader. Le coût de la relance de la caféi-culture camerounaise, à travers les différentes activités identifiées dans le plan de mise en œu-vre de la stratégie, est estimé, pour les cinq pro-chaines années, à 24,5 milliards de francs CFA et les mesures additives qui devraient compléter celles existantes ont été listées sous la forme de profils de projets, qui nécessitent une injection de quelque 17 milliards.

FB

Après une grande déprime, la production caféière camerounaise repart à la hausse, moyennant un effort financier conséquent du gouvernement dans la mise en route des programmes d’appui.

Le planteur camerounais de café produit environ 300 kg de café vert à l’hectare tandis que la moyenne par hectare au Vietnam est d’environ 2500 kg.

Le gouvernement a décidé de promouvoir des centres

d’excellence visant un meilleur conditionnement du café camerounais, de

manière à le positionner dans le haut de gamme.

Spécial Agriculture Cameroun

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18 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010

Le coton reprend du poids

Les producteurs camerounais de coton vont-ils enfin retrouver le sourire ? On peut l’espérer, à la suite de la hausse

historique des cours du coton qui, en attei-gnant 1,369 dollar la livre début novembre à New York, s’est situé au plus haut niveau ja-mais constaté depuis 140 ans. Cette nouvelle conjoncture ne pouvait mieux tomber, car, depuis quelques années déjà, la crise interna-tionale du coton a irradié sur la cotonculture camerounaise, réduisant autant les perfor-

mances de la Sodecoton (Société de dévelop-pement de la coton culture), basée au cœur des zones de production au nord du pays, que les revenus des milliers de paysans qui vivent de cette culture.En 2009, révèlent les statistiques officielles, la production de coton fibre, qui avait chuté de plus de 37% en 2008, s’est redressée de 17,2% pour se chiffrer à 53 514 tonnes. « Cette évolu-tion, expliquent les conjoncturistes du Ministère des finances, est attribuable notamment à la baisse de la production mondiale, au déclin des

stocks dans les autres pays en dehors de la Chine, à l’augmentation de la demande et du cours mondial. En dépit de ce contexte international, la production de l’année 2010 est projetée en baisse de -4%. Cette prévision tient compte de plusieurs facteurs, dont (I) les prix jugés élevés des intrants malgré l’appui de l’Etat pour leur acquisition, (II) la désaffection des cotonculteurs au profit des cultures vivrières, (III) l’accentua-tion de la fuite de coton graine aux frontières du fait de la remontée des cours internationaux et,

(IV) l’anticipation de la baisse des cours ». Face aux difficultés rencontrées depuis quelques années, reconnaît d’ailleurs le gouvernement, la Sodecoton a entrepris de diversifier sa pro-duction en se portant également vers la culture du soja, pour se prémunir des risques liés à la volatilité des cours mondiaux du coton. Dans ce contexte, conscient de l’importance de cette filière pour l’économie nationale et pour la stabilité socio-économique des zones de culture dans le nord du pays, le minis-tre de l’Économie, de la Planification et de

l’Aménagement du territoire a mis en place un plan d’appui au profit des cotoncultueurs. L’objectif de ces interventions du gouverne-ment au profit de cotonculteurs est de main-tenir et d’encourager une activité exercée par la majorité des populations actives du septen-trion camerounais. En clair, il s’agit de sauver la filière coton de la tourmente, puisque les indicateurs montrent une dégradation constante de la production depuis quelques années, ce qui a d’ailleurs poussé des dizaines de milliers de cotoncul-teurs à quitter les champs. Comme l’expliquait l’année dernière Hamadou Nouhou, le direc-teur technique de la Confédération nationale des producteurs de coton (CNPC-Cameroun), les producteurs de coton sont confrontés à la baisse des cours mondiaux, à l’envolée des prix des intrants agricoles, et à la chute des revenus liée à cette double conjoncture défavorable. « La filière coton n’a pas encore retrouvé ses perfor-mances d’antan », expliquait-il il y a peu. « Nous restons encore dans la zone de turbulence. La pro-duction attendue au titre de cette campagne se chiffre à 125 000 tonnes. Comparée aux 306 000 tonnes obtenues au cours de la campagne 2004-2005, vous comprenez bien que la situation de la filière n’est pas encore bonne. Les raisons de cette situation morose sont multiples. On constate que les charges que le producteur doit supporter sont de plus en plus énormes. Le prix d’achat du coton graine par rapport au marché mondial ne nous permet pas de proposer en ce moment des prix intéressants aux producteurs de coton. C’est la raison pour laquelle, dès l’année dernière, la pré-sidence de la République et le gouvernement ont apporté un appui significatif aux producteurs de coton, en subventionnant l’achat de l’engrais. Au vu des prix d’achat arrêtés au terme des appels d’offres, le prix du sac d’engrais devait revenir à 26 000 FCFA. Or, il y a deux ans, le sac se vendait à 17 000 FCFA. Au regard de cette augmentation brusque du prix de l’engrais, le chef de l’Etat a instruit le gouvernement d’examiner ce problè-me. Ce qui a abouti à une subvention de 6800 FCFA par sac d’engrais. C’est un acte très impor-tant pour les planteurs, qu’il importe de signaler. D’ici un à deux ans, nous verrons certainement les retombées de cet appui fort significatif de la part du chef de l’Etat. Notre souhait est que ce genre d’appui se poursuive jusqu’à ce que la fi-lière coton retrouve le bon chemin. »

Un vœu qui va certainement être exaucé, puisque la stratégie du gouvernement pour la filière coton consiste justement à accroitre la production et la productivité, en encourageant les producteurs, mais aussi en augmentant la demande interne de la fibre de coton, en en-courageant les industries et les services aval dans les segments textiles confection.

« Que la filière redevienne performante »Dans le détail, ce programme, dont la mise en œuvre a déjà commencé, consiste à améliorer la semence industrielle et la recherche ; diver-sifier les activités des cotonculteurs, créer un fonds de péréquation des cours du coton, ren-forcer la capacité de gestion de la fédération des cotonculteurs et augmenter les capacités de financement des cotonculteurs, en parti-culier sur l’achat des intrants. C’est dans ce but que, dès l’année écoulée, des missions de

mobilisation des capitaux ont été effectuées par le gouvernement en direction des prin-cipaux bailleurs de fonds et des institutions financières. La BADEA, l’OCI ou la Banque mondiale sont disposés à appuyer les efforts déjà fournis par le gouvernement. Notons qu’en la matière, la mise en place d’une nou-velle convention Etat – cotonculteurs sur la gestion du fonds revolving engrais a abouti au démarrage par l’Etat du financement, à hau-

teur de 6 milliards, du fonds revolving engrais en attendant le financement de la BADEA. Cet appui du gouvernement est même allé jusqu’au financement des cultures vivrières dans les zones de produc-tion, comme le soulignait Hamadou Nouhou il y a quelques mois : « Grâce à cette intervention, nous avons reçu, en 2008, un peu plus de 400 millions FCFA. En 2009, nous avons obtenu plus de 700 millions. Ces appuis nous ont permis de satisfaire les besoins des producteurs en ce qui concerne les cultures vivrières. Ce qui a fait qu’on évite l’usage des engrais destinés au coton pour les cultures vi-vrières. Nous nous félicitons d’ailleurs de

ce partenariat, qui est en train de se consolider, entre la haute hiérarchie, le gouvernement de la République et les producteurs de coton, afin que la filière redevienne performante. L’assemblée constitutive vient de consacrer un nouveau sta-tut et une nouvelle dénomination à l’OPCC (Organisation des producteurs de coton du Cameroun) ». Le programme pourrait atteindre son étape de croisière cette année, car les 8,5 milliards à libérer par l’Etat pour renforcer les capacités de financement sont une avance de trésorerie à conserver dans le système, dont le taux de sub-vention annuelle pendant quatre ans sera né-gocié d’accord parties. En outre, les huit mil-liards attendus cette année de la BADEA seront affectés graduellement pour soutenir le fonds revolving, y compris en matière de diversifica-tion des cultures de la zone cotonnière.

FB

La hausse des cours qui se dessine sur les marchés internationaux du coton aidera à renforcer l’efficacité des mesures de soutien déjà mises en place par le gouvernement en faveur des producteurs.

La hausse historique des cours du coton fait retrouver le sourire à Sodecoton.

« La production attendue au titre de cette campagne se chiffre à 125 000 tonnes.

Comparée aux 306 000 tonnes obtenues au cours

de la campagne 2004-2005, vous comprenez bien que la situation de la filière n’est

pas encore bonne. »

Chiffres sur la production du coton au Cameroun

Producteurs de coton dans les trois régions les cinq dernières années

2004 313 000 producteurs

2005 300 000 producteurs

2006 271 000 producteurs

2007 257 000 producteurs

2008 218 000 producteurs

2009 et 2010 moins de 100 000 producteurs

Surface cultivée de 2005 à 2010

Campagne 2005/06 231 993 ha

Campagne 2006/07 203 023 ha

Campagne 2007/08 137 869 ha

Campagne 2008/09 133 000 ha

Campagne 2009/10 N.C.

Production coton de 2005 à 2010

Campagne 2005/06 220 844 tonnes

Campagne 2006/07 187 448 tonnes

Campagne 2007/08 116 409 tonnes

Campagne 2008/09 146 000 tonnes

Campagne 2009/10 125 000 tonnes

Rendement (kg/ha) de 2005 à 2010-01

Campagne 2005/06 952 kg/ha

Campagne 2006/07 991 kg/ha

Campagne 2007/08 844 kg/ha

Campagne 2008/09 817 kg/ha

Campagne 2009/ 10 - de 1000 kg/ha

Source: Sodecoton et cnpc-Cameroun

Spécial Agriculture Cameroun

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 19

Caoutchouc : comment étirer la production ?

Huile de palme : comment réchauffer les plans de relance

La crise économique qui a secoué les grands pays industriels a eu une réper-cussion sévère sur le secteur du caout-

chouc au Cameroun. « Au terme de l’année 2009 », indique le gouvernement camerounais, « la production de caoutchouc naturel s’est éta-blie à 52 497 tonnes, soit une baisse de 1,8% par rapport à 2008. Sur le marché mondial, l’indus-trie automobile sinistrée a provoqué la baisse de la demande en pneumatiques. En 2010, la pro-duction pourrait se redresser de 2,1% pour at-teindre 53 433 tonnes. Cette évolution serait le fruit de la reprise de la demande mondiale et de l’entrée en production de nouvelles plantations ». Même si cette légère reprise de 2010 se confir-mait jusqu’à la fin de l’année, on serait encore loin des 60 000 tonnes produites en moyenne jusqu’en 2006. En dépit de ce déclin de pro-duction, qui a ainsi reculé de plus de 10 000 tonnes en quelques années, le caoutchouc reste une des composantes essentielles de l’écono-mie camerounaise, avec près de 30 000 em-plois et des recettes d’exportation d’environ 20 milliards FCFA par an.

Les questions foncièresDepuis le milieu des années 90, le secteur a connu une réforme progressive au Cameroun, dont une des étapes marquantes a été, en 1996, la privatisation de Hévécam au béné-fice de GMG International (géant singapou-rien). Cette opération a permis de relever la production de près de 20%, pour atteindre, aujourd’hui, un peu moins de 30 000 tonnes dix ans plus tard, avec un léger repli dû à la baisse de la demande dans les pays industriali-

sés. Le développement des plantations devrait permettre à ce groupe, qui détient 11% du marché africain du caoutchouc, d’accroître sa production, car, pour l’instant, GMG Hévécam n’exploite que 17 000 hectares sur des réserves foncières de 40 000 hectares mises à sa dispo-sition par l’Etat (encore actionnaire à 10%), selon un bail emphytéotique.Si la gestion des questions foncières n’a guère été compliquée lors de la privatisation de Hévécam, la privatisation de l’autre grand producteur camerounais de caoutchouc, la Cameroon Development Corporation, a buté, il y a quel-ques années, sur l’opposition des populations riveraines. Pour mener la privatisation de ce géant disposant de 100 000 hectares hautement fertiles, il faut avant tout régler la querelle fon-cière avec les populations Bakweries, qui esti-ment avoir hérité des terres de leurs ancêtres et

interdisent toute vente à quelque firme étran-gère que ce soit. De fait, la CDC, qui dispose d’un grand potentiel de développement, stagne à 22 000 tonnes de caoutchouc et le gouverne-ment a bon espoir, dans la perspective d’une future privatisation, que l’éventuel repreneur de la CDC, qui devrait être connu en 2006, aura rapidement à cœur de développer les terres en friches, de rajeunir le verger et de multiplier la production. C’est même un des engagements demandés à tout postulant au rachat de cette entreprise, qui est le deuxième employeur camerounais après l’Etat. Le troisième opérateur, Safacam, a une production d’environ 5000 tonnes, ce qui le mêle assez peu aux querelles de lea-dership des deux leaders.

Plantations villageoisesA côté de ces grands producteurs natio-naux, le gouvernement camerounais a lancé, l’année dernière, un programme de développement des plantations villa-geoises dans les zones proche des grandes plantations industrielles. Actuellement, les plantations villageoises donnent 10% de la production nationale (pour une super-ficie de 4000 ha) et les autorités voudraient porter cette part à au moins 50% dans dix ans. Une étude, réalisée il y deux ans sur la filière, a montré que la création d’une plantation d’un hectare revient à environ 1 million FCFA. Autant dire que c’est hors de portée pour les petits paysans et que l’implication financière du gouvernement sera indispensable.Globalement, la stratégie camerounaise en ma-tière de caoutchouc consiste en la relance de la production quantitative, le rajeunissement des plantations (certains vergers datent de 40 ans), la recherche de la compétitivité, l’amélioration de la qualité et le développement des indus-tries de transformation. Sur ce dernier volet, le Cameroun accuse un grand retard, car à peine

10% de la production est transformée loca-lement, le reste étant essentiellement exporté vers l’Union européenne et, dans un moindre part, vers l’Asie. Seule GMG Hévécam parvient à placer une partie de sa production auprès des grands de l’industrie pneumatique comme Michelin, Goodyear, Brigestone, particulière-ment exigeants sur la qualité. L’espoir d’une reprise se confirme déjà, avec le projet de dou-blement de la production annoncé par les res-ponsables de la maison mère GMG. Il y a deux

ans, ils sont venus à la rencontre des autori-tés camerounaises pour leurs annoncer leur intention de créer de plus vastes plantations modernes d’hévéa. « L’entreprise a récemment acquis 46 000 hectares de terres supplémentai-res à côté de Kribi pour étendre les plantations d’Hevecam et espère doubler la production dans les cinq ans » a affirmé le directeur d’exploita-tion de GMG, Jeffrey Gondobintoro.

Le Cameroun reste néanmoins un des rares membres africains du Groupe international de recherche sur le caoutchouc (équivalent à l’OPEP pour le pétrole), ce qui lui confère une certaine aura dans le secteur en Afrique.

FB

La pénurie d’huile de palme, qui avait déclenché une panoplie de program-mes d’appuis au secteur du palmier

à huile, semble vouloir s’aggraver, au vu des indicateurs fournis par le gouvernement au Parlement, en novembre dernier. De 2008 à

2009, peut-on lire dans ce document officiel, la production industrielle de l’huile de palme a baissé de 12,2%, pour s’établir à 109 041 ton-nes. « Cette évolution », justifient les analystes

du gouvernement, « s’explique par le cycle vé-gétatif du palmier à huile, et par des conditions climatiques moins favorables. En 2010, il est attendu une production de 124 691 tonnes, soit une hausse de 13% par rapport à 2009. Cette progression se justifierait par l’entrée en pro-

duction progressive des nouvelles plantations agroindustrielles et villageoises et l’amélioration de l’outil de production », rassurent-ils. Ces assurances ne lèvent pas toutes les craintes,

puisque la filière est déjà en déficit structurel, avec un gap moyen annuel de 50 000 tonnes en années fastes. Les années fastes, c’est lors-que les 100 000 hectares de palmiers à huile parviennent à donner 200 000 tonnes d’huile de palme brute. Pourtant, le secteur est vital, car, outre les ménages et les industries (no-tamment dans les savonneries et les cosméti-ques), il s’agit de préserver les 65 000 emplois directs et indirects et un chiffre d’affaires an-nuel de 190 milliards FCFA environ.

L’expérience de la MalaisieAfin de combler ce déficit de l’huile de palme estimé à 50 000 tonnes par an, le Cameroun a bénéficié du Common Fund for Commodity d’un financement de 2,3 milliards, à travers le Project for improving the income generating potentials of the palm oil sector in the West and Central Africa qui ambitionne d’augmenter l’offre de ce produit en s’inspirant de l’expé-rience de la Malaisie. Exécuté avec l’assistance technique de l’ONUDI, ce projet, d’une du-rée de quatre ans, vise selon le Ministère de l’agriculture à : « Appuyer les planteurs pour améliorer la productivité des outils de produc-tion actuels par le transfert de technologie et à les aider à accroître le rendement des plantations par leur formation sur de bonnes pratiques agro-nomiques et l’octroi des engrais. Le projet devrait contribuer à l’amélioration de la production de l’huile de palme en quantité et en qualité dans le but de favoriser à terme les exportations ».

Programme d’investissementsUne des action les plus emblématiques dans la relance de la production d’huile de palme au Cameroun est assurément la levée de fonds

réalisée à la Bourse de Douala par la Société ca-merounaise des palmeraies (Socapalm), filiale du groupe Bolloré, principale agro-industrie opérant dans la filière huile de palme avec 42% des parts du marché. L’objectif de Socapalm, à travers cet emprunt de 15 milliards FCFA, est de soutenir un programme d’investissements qui court de 2009 à 2013. Ce programme d’inves-tissements consiste à investir 7 milliards FCFA dans le rajeunissement des 9000 hectares de plantations, qui datent parfois de 25 ans, étalées dans trois régions du Cameroun. Une partie des sommes ainsi rassemblées par augmentation de capital servira à moderniser les huileries et à accroitre leur capacité de traitement, tant de la production de Socapalm que des fruits venus des autres planteurs de palmiers à huile. A côté de ces programmes des grandes entre-prises, l’Etat apporte un soutien aux paysans à travers un programme de développement des palmeraient villageoises. L’expérience de ces dernières années, lorsque le Cameroun a dû importer de l’huile de palme pour faire face à la consommation des industries et des ménages, renseigne suffisamment sur le fait que les autorités camerounaises ont laissé

Les effets de la crise internationale étant en train de s’estomper, l’espoir d’une relance vigoureuse de la production du caoutchouc renait, avec les programmes en cours de modernisation et d’extension des planta-tions d’hévéa.

En raison d’une forte croissance de la demande, les plantations camerou-naises de palmier à huile n’ont pas atteint le rendement nécessaire pour satisfaire le marché des industries et des ménages. D’où les programmes de plantations tous azimuts.

La production de caoutchouc camerounais est en baisse.

Les palmeraies villageoises bénéficient d’un programme de développement.

Actuellement, les plantations villageoises

donnent 10% de la production nationale (pour une superficie de 4000 ha) et les autorités voudraient

porter cette part à au moins 50% dans dix ans.

Les rendements actuels sont actuellement estimés entre 5 et 10 tonnes à l’hectare, contre 25 à 30 tonnes dans des pays comme la Malaisie, qui ont pourtant une pratique moins ancienne des palmeraies.

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Canne à sucre : urgence à accroître la production

En octobre dernier, la brutale flam-bée des prix du sucre sur le marché Camerounais a amené le gouverne-

ment à faire importer 25 000 tonnes de sucre du Brésil pour calmer un marché fortement spéculatif. En cause, explique l’agence spéciali-sée Commodafrica, « la conjonction de l’explo-sion des cours du sucre et de l’interdiction faite à la Société sucrière du Cameroun (Socusam), appartenant au groupe Somdiaa, au début de l’année 2010, d’importer du sucre des autres unités du groupe (CST au Tchad et Saris au Congo), qui a eu pour effet de provoquer une pé-nurie de sucre sur le marché camerounais ». Une situation prévisible pour la Somdiaa, qui avait été annoncée au gouvernement dès le premier trimestre 2010. S’il est vrai que le cours du su-cre a gagné 46% au troisième trimestre 2010, culminant même à la mi-octobre à 712 dollars la tonne sur le marché de Londres, cette envo-

lée des prix au Cameroun a permis de remet-tre en lumière les difficultés de la production du sucre de canne, malgré les investissements lourds consentis par les opérateurs avec l’ac-compagnement des autorités. La donne actuel-le est simple : avec une production d’environ 130 000 tonnes et malgré l’appoint des 20 000 tonnes apportées par des industries de trans-formation, la Sosucam, principal cultivateur industriel de canne à sucre, disposant d’usines de broyage et de traitement, ne parvient pas encore à couvrir un marché Camerounais en forte croissance, tant du fait de la demande des ménages que des industries des boissons, des confiseries et de la pâtisserie.

Accroissement des plantations de cannes à sucrePour corriger cette situation, un plan d’accrois-sement des plantations de canne à sucre est mis

en œuvre. En avril 2006, la Sosucam s’est vue attribuer, par une convention de bail emphy-téotique, 11 980 hectares supplémentaires ap-partenant au domaine national, à l’effet d’éten-dre ses champs de canne à sucre des localités de Mbandjock, Nkoteng et Lembe-Yezoum, dans le département de la Haute Sanaga, dans le cen-tre du pays. Cette opération devrait permettre à Sosucam de porter, d’ici à 2012, la superficie de ses champs de canne à sucre à 30 000 hec-tares, moyennant des investissements d’en-viron 30 milliards FCFA et le recrutement de quelques 700 travailleurs supplémentaires. En concédant ces terres, le gouvernement veut aider la Sosucam à doubler sa production, à terme, pour couvrir totalement le marché lo-cal et générer des devises à l’exportation. Pour l’heure, dans ses plantations de Nkoteng et de Mbandjock, qui couvrent 20 000 hectares et qui occupent quelque 7000 ouvriers et environ

500 engins roulants, cette entreprise camerou-naise récolte 1,2 million de tonnes de canne à sucre, pour une production annuelle de sucre raffiné estimée à 130 000 tonnes. Au Cameroun, la sucrerie de la Sosucam à M’Bandjock a été créée en 1965. Sa capacité de production est de 50 000 tonnes de sucre par an, tandis que la seconde sucrerie, située à N’Koteng dans la même région (créée en 1977), a été acquise par le groupe Villegrin lors de sa privatisation en décembre 1998. Sa capa-cité de production de 80 000 tonnes de sucre par an devrait être portée à 110 000 tonnes en 2012, avec l’achèvement du programme d’in-vestissement et d’extension en cours.

Au-delà de l’extension des surfaces cultivables, Sosucam a également modernisé ses systèmes de production pour être à la hauteur d’un mar-ché en forte croissance. C’est ainsi que le parc des tracteurs et des chargeuses de cannes est ré-gulièrement renouvelé, de même que les équi-pements de broyage et de traitement. « L’usine de M’Bandjock est probablement celle dont le processus de production est le mieux maîtrisé », se réjouissent les responsables de la maison. « Les pertes à l’extraction du sucre sont minimes – entre 2,35 et 2,50% – et l’extension réalisée en 1996 permettra d’accroître la production jusqu’à 50 000 tonnes, en exploitant l’outil 30 jours sup-plémentaire à capacité énergétique constante. Le prix de revient de production du sucre de Sosucam est actuellement le meilleur de toute l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique centrale, selon les organis-mes financiers internationaux ». Ce commen-taire très rassurant sur la structure du prix de revient du sucre au Cameroun a été formulé avant la déstabilisation du marché, intervenue il y a quelques mois, du fait de l’incapacité des industries locales à couvrir le déficit du marché, estimé à environ 33 000 tonnes par an. Il faut dire que la contrebande n’y est pas pour peu, car en créant des distorsions sur le marché pour obérer les marges des produc-teurs, les contrebandiers limitent les investis-sements qui pourraient accroître les surfaces cultivées et les industries de traitement. D’où la lutte acharnée qui est menée par la Douane camerounaise pour opérer un maillage des frontières, réputées poreuses, du Cameroun avec ses voisins.

FB

La production sucrière nationale ne couvrant pas encore la très forte demande intérieure, l’Etat a mis à disposi-tion de nouvelles parcelles pour la culture industrielle de canne à sucre.

Avec une production d’environ 130 000 tonnes et malgré

l’appoint des 20 000 tonnes apportées

par des industries de transformation, la

Sosucam ne parvient pas encore à couvrir un marché Camerounais en

forte croissance.

La sucrerie de la Sosucam à M’Bandjock a été créée en 1965.

cette filière stagner, alors que sous l’ancien régime des dispositions avaient été prises pour que la production, industrielle ou domesti-que, d’huile de palme soit à la hauteur de la demande. Ainsi, des actions d’appui à la filière huile de palme ont été engagées, notamment en vue de promouvoir les unités paysannes de production, à travers le programme de déve-loppement des palmeraies villageoises. Ce programme est adossé sur l’Union des ex-ploitants de palmiers à huile du Cameroun (Unexpalm), regroupant essentiellement des paysans démunis disposant d’une petite réser-ve foncière. Le programme mis en place par le gouvernement offre des plants sélectionnés et un appui technologique aux paysans, pour les

aider à développer chacun un hectare de plan-tation. En avril dernier, un nouveau program-me entre l’Etat et Unexpalm a été signé, pour un coût global de 27 milliards FCFA, visant à structurer et à organiser la palmeraie villageoi-se dans des bassins de production ; étendre et améliorer la gestion de la palmeraie villageoi-se ; mettre en place des unités industrielles de transformation des régimes ; optimiser l’ap-provisionnement de ces unités par l’entretien des pistes de collecte et mettre en place un mé-canisme facilitant l’accès au crédit.

Modernisation des équipementsCes nouveaux objectifs viennent en relais de la première phase du plan, qui consistait à je-

ter les bases de la compétitivité de la filière huile de palme : « Nous avons fait une pre-mière phase, qui s’est étendue de 2004 à 2008, jusqu’en 2009 même. Elle consistait à aider les gens à planter le palmier. C’est une sorte de vulgarisation. On nous a demandé de planter 8000 hectares dans l’ensemble du pays. On a réussi à planter environ 7600 hectares, à raison d’un hectare par planteur. Cette première phase a coûté 4 milliards 300 millions FCFA, sur cinq ans », explique Léonard Claude Mpouma, le président de l’Unexpalm, qui se réjouit du choix d’axer la seconde phase des finance-ments de l’Etat à la modernisation des équi-pements de transformation. A raison. Car, si les multinationales opèrent 80 à 90% des ré-

coltes des noix, la transformation artisanale, tout aussi rentable, aide considérablement à amortir les effets des déficits. Ces objectifs ambitieux nécessitent une mo-dernisation de l’appareil de production, de même qu’un rajeunissement et une forte ex-tension des surfaces plantées, de préférence avec des espèces sélectionnées, connues pour leur fort rendement. Car, les rendements ac-tuels sont actuellement estimés entre 5 et 10 tonnes à l’hectare, contre 25 à 30 tonnes dans des pays comme la Malaisie, qui ont pourtant une pratique moins ancienne des palmeraies.

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Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 - 21

Gastronomie : au pays des mille saveurs

Au Cameroun, l’abondante produc-tion vivrière soutient une gastro-nomie créative. En général, on peut

manger à sa faim, même si, avec la hausse des prix, les brochettes de bœuf, toujours aussi sa-voureuses, ont perdu en épaisseur. Les recet-tes reflètent autant la fertilité de l’imagination des populations que la diversité culturelle du Cameroun, composé de près de 200 groupes ethniques. Dans l’immense sauce nationale qu’est la gastronomie camerounaise, les recet-tes culinaires de toutes les régions se conju-guent souvent pour créer des assortiments aux saveurs inattendues. Par exemple, le Ndolè, une des marques déposées du pays à l’internatio-nal, connaît désormais autant de versions que de régions du pays, et s’accompagne désormais

non plus du Miondo originel de Douala (pâte de manioc roulée dans une feuille en forme de bâton, avant cuisson), mais aussi bien du cou-cou de maïs façon Bamileké, du plantain, ou même du riz dans les régions du centre.

Restaurants « tourne dos »La gastronomie populaire, destinée aux peti-tes bourses, n’est pas populaire que de nom. Elle est vraiment répandue, et dans des villes comme Yaoundé et Douala, elle prospère sou-vent sur des sentiers imprévus. Par exemple, au-delà des restaurants rapides installés en bordure de route (baptisés « tourne dos », parce que les clients tournent le dos à la rue),

une formule de livraison rapide se développe dans les grandes administrations. Favorisé par la pratique de la journée continue, ce nouveau segment permet à des centaines de femmes de venir livrer une sorte de cuisine rapide de mets locaux sur place. Les prix varient en fonction du plat : l’omniprésent riz sauce to-mate à la viande, le poisson braisé avec des fri-tes de plantain mûr ; du poulet en ragout au plantain mûr, et même des spécialités tels que le Sanga (bouillon de maïs frais aux légumes) ou encore du couscous de maïs ou de manioc, mangé à toutes les sauces. Succès garanti, lors-que quelque braconnier a pu rallier Yaoundé avec du gibier interdit de chasse. Pour les opé-ratrices de ce segment, les gains sont impor-tants : recettes garanties du fait de la clientèle

captive, pas d’invendus, pas d’impôts, pas de loyer et pas de charges de personnel.

L’émergence de références localesLes mets locaux sont d’ailleurs la principale of-fre des restaurants moyens qui accueillent à la mi-journée les cadres venus manger quelques spécialités prisées. Du Ndolè au poisson fumé ou du Taro sauce épices de l’ouest, avec chèvres ou tripes de bœuf. De plus en plus, plusieurs établissements de restauration offrent des buffets en mi-journée, et ne désemplissent pas. Ici encore, la plupart des recettes sont du terroir. Les cuisiniers lo-caux ayant acquis de l’expertise au fil des ans

et, surtout, grâce à la mise en place de plusieurs établissements d’enseignement supérieur en hôtellerie et restauration, des mains locales ont pris les relais des expatriés dans la gastronomie haut de gamme. Celle qui est dédiée au milieu d’affaires, aux expatriés et aux touristes. Avec l’émergence de références locales dans

la gastronomie, les touristes et hommes d’af-faires, sans déserter les grands restaurants réputés pour leurs cartes présentant des spé-cialités européennes hors de prix, privilégient les bonnes tables camerounaises, tenues par des professionnels de mieux en mieux formés, souvent situées dans les quartiers résidentiels ou d’affaires à Yaoundé et Douala.

L’égérie des restaurateursMarie Thérèse Atedzoé, restauratrice et pré-sidente du Crespac (Chaîne des restaurateurs pour le patrimoine de la cuisine camerounai-se), est l’égérie des restaurateurs camerounais depuis quelques années. Depuis qu’elle a en

charge l’exploitation du restaurant municipal du bois Sainte Anastasie à Yaoundé, la place ne désemplit pas. Preuve que « la cuisine camerou-naise se porte bien, confiait-elle à un confrère local. Nous ne gagnons pas beaucoup d’argent comme les restaurants européens, mais nous ne devons pas nous plaindre. J’ai fait de grands pas

dans la cuisine camerounaise et j’ai atteint l’apo-gée dans ce domaine. Je connais un petit restau-rant quelque part qui ne fait que la cuisine came-rounaise. Tous les midis, les gens font la queue. Je pense que l’heure est arrivée pour que les popula-tions comprennent que c’est cette cuisine qui les a élevés. Elle est bonne, elle est bio, et nous n’avons pas honte de faire la promotion de cette cuisine ».C’est dans cette logique que le Ministère du tourisme a souvent lancé des campagnes d’as-sainissement du secteur de la restauration avec, comme élément majeur, la reclassification des restaurants.

FB

A l’image de la société, la gastronomie camerounaise est une mosaïque de saveurs, dont la mise en valeur est assurée par une catégorie montante de restaurateurs locaux, bien formés et expérimentés.

Le Ndolè connaît désormais autant de version que de régions du pays.

Le Ndolè, une marque camerounaise déposée à l’international.

Spécial Agriculture Cameroun

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22 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 economie - politique

Bataille annoncée pour les eaux du Nil

3 millions de personnes un dimanche à Casablanca : le sens d’une marche

Maroc : quid de la consommation intérieure du tourisme ?

Face à l’Ethiopie, qui a accusé l’Egypte de manipuler des grou-pes de rébellion contre le régime

en place, la réaction égyptienne ne s’est pas fait attendre. Par la voix de Hussam Zeki, porte-parole du Ministère égyptien des affaires étrangères, le gouvernement a exprimé son étonnement. En effet, Meles Zenawi, Premier ministre éthio-pien, avait déclaré, mardi 23 novembre, que : « L’Egypte ne pourrait remporter une guerre contre l’Ethiopie sur les eaux du Nil » et a accusé Le Caire de soutenir des groupes de rébellion pour déstabiliser son pays. Si le porte-parole égyptien a ré-torqué que « Le Caire ne considère pas que son choix est la guerre pour obtenir l’eau, mais plutôt, à travers le dialogue, les négo-ciations, la coopération, les concertations et le recours au droit international et aux droits acquis des pays », il n’en demeure pas moins des différends entre ces deux pays, ne datent pas d’aujourd’hui.

C’est selon Ces récentes escarmouches viennent s’ajouter à celles du début de l’été, amenant l’Egypte à calmer le jeu, lorsque l’Ethiopie et six autres pays, à savoir l’Ouganda, la Tanzanie, le Rwanda, le Kenya, le Burundi et la République dé-mocratique du Congo, ont en-tamé des pourparlers difficiles sur le partage des eaux du Nil. La source des litiges réside dans le Traité de partage des eaux du fleuve de 1929, reconduit en 1959.

En 1959, l’Egypte et le Soudan ont signé un accord de partage, qui octroie des quotas annuels à ces deux seuls pays, à raison de 55,5 mil-liards de m3 au Caire et 18,5 milliards de m3 à Khartoum, soit 87% du débit total du fleuve. L’Ethiopie n’a jamais accepté cet Accord, dont il a été exclu, ni non plus

la construction du barrage d’Assouan, considéré alors comme une humiliation. Certes, en 1990, il y a eu un modus vivendi permettant à l’Ethiopie de construire des barrages, et, en échange, ce pays ne devait pas remettre en cause le Traité de 1959. Puis, en 1999, a été lancée l’Initiative du bassin du Nil, qui regroupe les différents pays sous la houlette de la Banque mondiale, l’ONU et le Canada et qui crée un nouveau cadre de coopération pour dévelop-per des programmes transnationaux d’économie d’eau, de promotion d’une agriculture moins « aquavore », d’in-terconnexions électriques, etc. Aujourd’hui, l’Ethiopie, qui contrôle les sources du Nil Bleu, soit 85% du débit total du fleuve, reste le principal rival géopolitique de l’Egypte dans la vallée du Nil. Ce pays, régulièrement victime de sècheresses meurtrières, en-

visage de construire une dizaine de mi-cro-barrages, ce qui n’est pas du goût de l’Egypte.

Daouda Mbaye

Ils étaient plus de 3 millions de personnes pour les organi-sateurs, un peu plus de 2 millions selon la police, à avoir bravé la grisaille casablancaise de ce dimanche 28 novem-

bre, pour exprimer leur solidarité aux onze agents des forces de l’ordre tombés en martyrs lors des événements dramatiques de Laâyoune. Le sens politique de la marche est évident. « Le peuple marocain a tenu à réaffirmer de nouveau sa mobilisation constante pour la défense de la marocanité du Sahara, dont la récupération est irrévocable », déclare Abbas El Fassi, secrétaire général du parti Istiqlal. Le secrétaire général de l’Istiqlal, égale-ment Premier ministre, s’en prend aussi au Parti populaire es-pagnol, « un parti radical toujours nostalgique de l’ère coloniale, au point de prétendre que le Sahara est espagnol ».

L’attitude hostile du Parti Populaire espagnol, qui fonde son « droitisme » sur le rejet du Moro, est dénoncée avec force. De nombreux marocains voient la décision préci-pitée du Parlement euro-péen comme le signe évi-

dent des jeux d’ombres de ce parti, dont l’un des dirigeants, un certain José Maria Aznar, alors Premier ministre, avait, sous sa mandature, mené les deux pays au bord de l’escalade mili-taire. Aujourd’hui, le gouvernement socialiste de Zapatero est accusé par les médias espagnols de droite de faire preuve de « mollesse » en prônant l’apaisement et en encourageant le plan d’autonomie présenté par le gouvernement marocain. C’est sûr, les prochaines échéances électorales espagnoles n’auront pas comme objet la crise du bâtiment, qui menace l’économie de ce pays, ni la dette colossale accumulée du temps de l’insou-ciance des marchés, encore moins la place de l’Espagne dans le monde.

De l’attitude des médiasLe prochain affrontement électoral aura pour théâtre le Sahara, sujet ultrasensible auprès de l’électorat conservateur espagnol, marqué par les vicissitudes indélébiles de l’histoire (une occu-pation de sept siècles, vue aujourd’hui comme un affront) et par ce qu’ils considèrent comme une erreur fatale de Franco, accusé d’avoir abandonné le Sahara lors de la marche verte. Nourri dans cette peur des Arabes, une grande partie de l’esta-blishment du PP fait du Sahara un contre-feu parfait pour faire oublier le dossier, chaud, des provinces occupées de Sebta et Melilla. C’est fort de ces raisons que cette droite, qui bénéficie de l’entregent et du répondant au Parlement européen, a fait passer une résolution unilatérale. Quelle soit hostile au Maroc, c’est d’une évidence rare.

Une nouvelle orientationD’ores et déjà, Fassi Fihri, ministre marocain des Affaires étrangères, qui s’est exprimé mercredi dernier à Strasbourg devant les eurodéputés, exclut tout élargissement du mandat de la Minurso. « Il existe six missions des Nations Unies qui n’ont aucune compétence en matière de droits humains. Nous ne voyons pas pourquoi nous allons accepter que la Minurso étende ses compétences. Le Maroc n’a rien à cacher, preuve en est, des ONG de défense des droits de l’hHomme comme Human Right Watch ou Amnesty International sont présentes sur place », a dé-claré le ministre dans un entretien à El Pais.C’est pour répondre à cette campagne de désinformation que le Maroc des régions a organisé cette marche massive à Casablanca.

K.B.

Selon les résultats, encore provisoi-res, du compte satellite du Haut Commissariat marocain au Plan,

la consommation intérieure du tourisme a atteint 86,3 milliards de dirhams (1 euro = 11 dirhams) en 2009, contre 69 milliards en 2005. Une forte progression, qui a toutefois évolué moins vite que l’économie marocaine. En 2009, cette consommation intérieure ne représentait plus que 11,7% du PIB, contre 13,1% en 2005. En fait, la consommation intérieu-re du tourisme, qui traite des dépenses des touristes et des Marocains résidents à l’étranger, a évolué en deux phases avec, entre 2001 et 2005, une progres-sion à deux chiffres et, depuis 2005, une moyenne de 5,8%.

Si on ne tient pas compte du tourisme récepteur (celui généré par les tours opérateurs), qui représente plus de 74% de la consommation intérieure de ce secteur, la tendance s’inverse. Ce type de tourisme a baissé de 2,7% (en termes de consommation) en 2008 et de 4,6% en 2009, alors qu’il affichait un rythme de croissance de 12,4% entre 2001 et 2007. Cette décélération confirme le lien étroit du tourisme récepteur avec l’évolution

de l’économie mondiale. Quant à la valeur ajoutée du tourisme, elle a progressé de 8,7% entre 2001 et 2005 et de 7% entre 2005 et 2009. Avec 40,6 milliards de dirhams, elle devrait représenter 6,2% de la valeur ajoutée

globale en 2009, contre 6,5% en 2005. La part du tourisme, qui représentait 7,1% du PIB en 2005, n’était plus que de 6,8% en 2009. Sans doute les résultats de la stratégie nationale de diversification (plans de développements sectoriels), entreprise notamment dans les secteurs du commerce et de l’industrie, de l’agri-culture, de l’équipement et du transport.

DM

Suite aux déclarations de Meles Zenawi, Premier ministre éthio-pien, mardi 23 novembre, accusant l’Egypte de mener un plan de déstabilisation contre le régime éthiopien pour gagner « la ba-taille » des eaux du Nil, l’Egypte réagit énergiquement.

La capitale marocaine a vibré à l’unisson, diman-che 28 novembre. Une marche qui a réuni entre 2 et 3 millions de personnes. Quel sens donner à ce rassemblement, qui a battu tous les records d’affluence ? Analyse.

Le tourisme progresse au Maroc, mais beaucoup moins vite que le PIB. La faute à un tourisme récepteur trop lié aux soubresauts de l’économie mondiale.

Les eaux du Nil sont un enjeu majeur.

Aujourd’hui, l’Ethiopie, régulièrement victime de sècheresses meurtrières,

envisage de construire une dizaine de micro-barrages, ce qui n’est pas du goût de

l’Egypte.

Consommation intérieure du tourisme (Année de base 1998)

En millions de Dh

Types de consommation touristique 1998 1998 2003 2005 2009

Consommation intérieure du tourisme 29 504 44 942 49 102 68 950 86 261

- Tourisme récepteur 18 838 34 143 36 899 49 089 64 005

- Tourisme interne et émetteur 10 666 10 799 12 203 19 861 22 256

Valeur ajoutée du tourisme et PIB touristique(Année de base 1998)

En million de Dh

1998 1998 2003 2005 2009

Valeur ajoutée du tourisme (VAT) 14 520 22 163 25 377 30 983 40 621

Impots net des subventions sur les produits 4258 4083 4355 6361 9427

PIB touristique (PIBT) 18 778 26 246 29 732 37 344 50 048

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24 - Les Afriques - N° 141 - 2 au 8 décembre 2010 economie - politique

Afrique-Union européenne : relations au sommet

Le sommet Afrique-UE, les 29 et 30 novembre, a adopté une Déclaration dite de Tripoli et

un nouveau Plan d’action 2011-2113.De relation simple donateur-bénéfi-ciaire, l’Europe affirme vouloir établir désormais un véritable partenariat avec l’Afrique, où les problèmes seront af-frontés ensemble, en tenant compte des intérêts des deux parties. La nouvelle position européenne ne procède pas d’une quelconque géné-rosité. Elle tire simplement les leçons d’une coopération qui engloutit beau-coup d’argent, sans rapporter autant que l’Europe le souhaiterait, en parti-culier pour son secteur privé (voir en-cadré), mais aussi dans les domaines cruciaux pour elle de la lutte contre les « menaces transnationales : la piraterie, le déversement de déchets toxiques, le crime organisé et le trafic illicite ».« La paix et la sécurité demeurent la pierre angulaire de notre coopération (...) Nous nous engageons à continuer à travailler ensemble pour trouver une solution à la crise régionale en Afrique, notamment au Soudan et en Somalie », indique à cet effet la Déclaration de Tripoli, adoptée le 30 novembre dernier.

La volonté des citoyens européensLes États membres de l’Union euro-péenne réitèrent leur promesse de contribuer pour 0,7% de leurs PIB à l’aide au développement. Même s’il est vrai que les promesses des pays déve-loppés en matière d’aide au développe-ment n’engagent en rien, tant elles sont peu suivies d’effet, il n’empêche que, dans le contexte de récession en Europe, dont plusieurs pays doivent s’appliquer d’extrêmes mesures de rigueur, il est remarquable, ne serait-ce que vis-à-vis de leur opinion publique, de prendre un tel engagement. Ils y sont confor-tés par les résultats de l’eurobaromètre, rendu public peu avant le Sommet. Les citoyens de l’UE approuvent les grands axes de la coopération entre les deux partenaires : la pauvreté (38%), la paix et la sécurité (34%) et les droits de l’homme (33%). Ces priorités sont l’objectif premier de la politique de développement de l’UE au profit de l’Afrique.L’enquête rétablit également quelques autres vérités. Les citoyens de l’UE ne sont que 6% à considérer important le problème de l’immigration. Les migra-tions sont considérées comme moins importantes que la pauvreté et les

droits de l’Homme.Dans le débat sur le changement cli-matique, l’Europe veut également faire

de l’Afrique son alliée. « Notre partena-riat devrait servir d’orientation pour les

transformations dont le monde a besoin pour lutter contre les effets du change-ment climatique, parvenir à un marché de l’énergie durable, garantir la sécurité alimentaire, atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement, trou-ver une solution aux problèmes réels de la migration et intégrer les questions liées au genre ».

Soutien diplomatiqueRetour d’ascenseur ? L’Europe pro-met de ne ménager aucun effort quant à la réforme de l’ONU, en par-ticulier celle de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité. Elle ne dit toutefois pas expressément qu’elle soutient la revendication africaine d’un siège de membre permanent au Conseil de sécurité. Mais, la présen-ce d’une quinzaine de chefs d’Etat et de gouvernement européens est un réel soutient diplomatique.La seule ombre au tableau demeure les Accords de partenariat écono-mique. Malgré l’échec patent des négociations, la Déclaration de Tripoli n’y apporte pas la solution. Il faudra pourtant la trouver avant le prochain Sommet, qui se tiendra à Bruxelles en 2013.

Chérif Elvalide Sèye

Les chefs d’État et de gouvernement d’Afrique et de l’UE veulent, par des relations au sommet, traduire dans les faits l’importance stratégique, au niveau mondial, de leur partenariat, « le seul conclu entre deux continents ».

L’agenda

Retrouvez la suite de notre agenda des événements économiques africains sur : www.lesafriques.com

Kan-Sy(Sénégal, 1963) Vit et travaille au Sénégal.Kan-Sy fait des études de droit avant de s’adonner définitivement à l’expression artistique. Diplômé de l’école des Beaux-Arts de Dakar en 1991, Kan-Sy est une figure emblématique de l’art contemporain au Sénégal. Son oeuvre interpelle et questionne, toute en sensibilité. Ses thèmes sont puisés dans l’actualité de nos sociétés et la spiritua-lité y occupe une place primordiale.

Galerie Les Afriques

Derrière le masqueAcrylique sur papier. 2006. 76 x 106 cm. 1 500 / 2 000 euros

WAPIC 2010 Convention de l’Industrie Electrique en Afrique de l’Ouest. 6 au 9 décembre 2010 à Dakar, Sénégal. L’Hôtel Le Méridien Président. Contact : [email protected]

EuroAfrica-ICT3ème Forum Euro-Africa Cooperation sur les TIC et la recherche.7 au 10 décembre 2010 à Helsinki, Finlande. http://euroafrica-ict.org/

1ère Conférence euro-afri-caine sur l’e-infrastructure

7 au 10 décembre 2010 à Helsinki, Finlande. http://ei-africa.eu/

Natural Resources for Sustainable Development for a Gabon that is moving forward

8 au 10 décembre 2010 à Libreville, Gabon.www.cubicglobe.com

Harubuntu 2010Concours des porteurs d’espoir et créateurs de

richesse africains. Jusqu’au 9 décembre 2010. www.harubuntu.com

Regional capacity mee-ting on Enhancing the Functioning of Cereals Markets in West Africa

9 au 11 décembre à Accra, Ghana. Contact : [email protected]

Festival mondial des arts nègres10 au 31 décembre à Dakar. www.fesman2010.com

« La Mauritanie à Paris » 2ème édition

Séminaire, entretiens individuels et exposition. 15 au 19 décembre à la CCIP, 2 rue de Viarmes, Paris.Contact : [email protected]

Les TIC et la monétique au service du développement bancaire et financier de la zone UEMOA

17 et 18 décembre 2010 à Dakar, Hôtel Méridien.

www.gim-uemoa.org

Journées annuelles du Club des dirigeants des banques et établissements de créditsL’actualité bancaire en afrique : régle-mentation, financement de l’économie, droit appliqué, politique des bailleurs de fonds, mutation dans la composi-tion du capital, etc. Le 10 et 11 février à Libreville. Information : Ousseynou Sow, [email protected]

AITEC Banking & Mobile Money COMESA 2011Meeting the Challenges of Africa’s New Banking Era. 2 et 3 mars 2011 à Nairobi, Kenya.www.aitecafrica.com/event/view/67

eLearning Africa 201125 au 27 mai 2011 à Dar Es Salaam, Tanzanie.www.elearning-africa.com

Le Forum des affaires UE-Afrique s’est tenu le 28 novembre dernier, en mar-ge du 3ème Sommet dédié au secteur privé par son thème : « agir ensem-ble pour renforcer l’investissement, la croissance économique et la création d’emplois ».L’inflexion des relations entre l’Europe et l’Afrique en faveur du secteur privé s’explique par la volonté européenne de tirer meilleur profit de son engage-

ment avec le continent noir. L’UE est le premier contributeur d’aides publiques au développement, avec 49 milliards de dollars en 2009, soit environ 56% de l’APD mondiale. Elle veut un retour sur cet « investissement », en particu-lier en Afrique, où d’autres continents lui dament désormais le pion sans consentir les mêmes « sacrifices ».L’accord de Cotonou, qui régit les re-

lations entre les deux entités, a ainsi fait place au secteur privé, en lui re-connaissant « un rôle primordial en matière de développement par la contribution unique qu’il peut apporter à la croissance économique et, par ce biais, à la réduction de la pauvreté ». En conséquence, l’UE a créé plusieurs instruments : BIZclim, PROINVEST, la Facilité d’investissement gérée par la BEI, le CDE, l’appui aux microentrepri-

ses et à la microfinance, etc.Mais le secteur privé, qui se veut pragmatique, revendique davan-tage d’efficacité. Une des plus grandes entreprises membre du Forum, la multinationale Unilever (produits alimentaires, soins mé-nagers et corporels), présente dans 170 pays du monde, qui a réalisé, en 2009, un chiffre d’af-faires de 2, 5 milliards d’euros en Afrique et qui y emploie environ

40 000 personnes sur 27 sites de fabrication, a probablement exprimé un point de vue largement partagé. Giulia Di Tommaso, directrice des affaires extérieures pour l´Afrique, le Moyen-Orient et la Turquie a dé-claré : « Nos attentes sont élevées, car nous estimons que le forum de discus-sions devrait se transformer en forum d’actions ».

Le secteur privé veut moins de mots et plus d’action

« Nos attentes sont élevées, car nous

estimons que le forum de discussions devrait

se transformer en forum d’actions. »

L’enquête rétablit également quelques

autres vérités. Les citoyens de l’UE ne sont

que 6% à considérer important le problème

de l’immigration. Les migrations sont considérées comme

moins importantes que la pauvreté et les droits

de l’Homme.