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L’évaluation des activités de la vie quotidienne : vers des questionnaires plus sensibles Françoise Lekeu, neuropsychologue Catherine Olivier, ergothérapeute

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L’évaluation des activités de la vie quotidienne : vers des questionnaires

plus sensibles

Françoise Lekeu, neuropsychologueCatherine Olivier, ergothérapeute

Déficits cognitifs et troubles cérébraux

• Dégradation sévère de la qualité de vie et de l’autonomie du patient

• Programmes de revalidation cognitive : prise en compte des déficits cognitifs sous-jacents mais aussi et surtout leur impact sur le fonctionnement quotidien !

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Large éventail d’échelles évaluant les IADL

• Buts :– évaluer des niveaux généraux de dépendance

fonctionnelle– Évaluer la sévérité des symptômes pour un petit

nombre d’activités

Pas de profil complet des difficultés du patient

(Ex. Athlin et al., 1989; Beck, 1988; Galasko et al., 1997; Lawton &Brody, 1969; Loewenstein et al., 1989; Teunisse & Derix, 1997)

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Large éventail d’échelles évaluant les IADL

• Certaines de ces échelles cotent chaque activité en fonction d’un score d’autonomie globale, sans considérer en détail les sous-activités d’une activité entière (ex. Lawton & Brody, 1969)

Vision partielle ! Manque de précision difficile d’identifier les déficits d’un patient dans une activité complexe (ex. préparer un repas)

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Large éventail d’échelles évaluant les IADL

• Plusieurs de ces échelles ne pointent pas spécifiquement les difficultés dans les IADL imputables aux troubles cognitifs, mais mixent l’influence des troubles cognitifs et physiques (ex. Lawton & Brody, 1969).

Manque d’infos sur l’origine des troubles

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Echelle IADL• Pour être utile en revalidation :

– Doit permettre d’identifier les difficultés rencontrées par le patient dans ses activités actuelles et sous-activités et préciser les circonstances précises dans lesquelles ces difficultés surviennent

• Ex : un patient peut être entrainé à utiliser un toaster (ou autre appareil) dans un centre de revalidation mais ne pas être capable de l’utiliser dans son environnement quotidien

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ProfintegOutil d’évaluation des activités de la

vie quotidienne chez les patients présentant des déficits cognitifs

Centre de revalidation cognitive pour personnes cérébro-lésées (Come-Back, à Eupen)Centre de la mémoire (CHU, Université de Liège)

Centre médical universitaire de Maastricht (Université de Maastricht)

Objectif de Profinteg

• Proposer un outil permettant de mettre en évidence les répercussions que les troubles cognitifs peuvent avoir dans la VQ

• Accroître la dimension écologique et donc l’efficacité de la rééducation

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Et concrètement:

L’outil proposé permet

la mise en relation des déficits cognitifs et des difficultés rencontrées dans la vie quotidienne chez les patients avec troubles cognitifs acquis au niveau de la mémoire, de l’attention (sensibilité à l’interférence, double tâche) et des fonctions gnosiques (troubles visuo-spatiaux) et exécutives (initiative, organisation, planification,…)

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Apports de l’outil Profinteg

Il devient possible d’évaluer un grand nombre d’activités de la vie quotidienne

La procédure permet de mettre en relation les difficultés rencontrées dans la vie quotidienne avec des déficits cognitifs spécifiques

Cet outil inédit fournit suffisamment d’informations pour donner lieu à une rééducation cognitive ciblée, ce qui n’était pas le cas des échelles existantes

L’outil est évolutif : il peut être développé pour des activités non envisagées jusqu’à présent

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Questionnaire général ProfintegIdentifie les activités de la vie quotidienne (98 au total)

posant des problèmes au patient

Evalue la gravité des problèmes pour chaque activité

Détermine la charge (en temps et en pénibilité) pour l’entourage

Détermine l’importance des activités pour le patient

Indique dans quelle mesure le patient est conscient de ses difficultés

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1. Activités liées à l’alimentation (16) 2. Activités relatives à la médication (3) 3. Activités ménagères au sens large (10) 4. Activités de shopping (2)5. Soins des animaux domestiques, des plantes d’intérieur et du jardin (5)6. Activité de tricot/ couture (3)7. Utilisation du téléphone (12)8. Déplacements (6)9. Activités de gestion diverses (15)10. Activités de loisirs (25)11. Organisation (1)

Le questionnaire général porte sur 98 activités courantes réparties en 11 catégories :

Composition du questionnaire général

• Le questionnaire comporte une version pour le patient et une version pour l’accompagnant administréesséparément

• Pour chaque activité, le questionnaire permet de recueillir les informations suivantes : − Existence de difficultés depuis la maladie−Gravité des difficultés (cotée de 1 à 5)−Charges objective et subjective pour

l’accompagnant (respectivement de 0 à 3)− Importance pour le patient de continuer à pratiquer

cette activité (de 0 à 3)

Décision : Prise en charge cognitive orientée ou non vers cette activité

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Méthode de passation du questionnaire général

• Administrer le questionnaire à l’accompagnant avant de l’administrer au patient, et ce, afin d’utiliser les informations mises en évidence par l’accompagnant dans le cas de patients amnésiques ou anosognosiques OU Comparer les 2 versions administrées en parallèle

• Pour chaque activité, poser les questions selon la logique définie dans la dia suivante

• En fin de prise en charge, il peut être réadministré (Ligne de base post thérapeutique) en se basant sur le premier, afin d’utiliser les informations mises en évidence précédemment et éviter toute erreur d’évaluation.

Cotation du questionnaire général

1. Questions de screening

• NA (Non Applicable) : activité jamais réalisée avant les troubles cognitifs, ni après

• NC (problème Non Cognitif) : déficits moteurs, sensoriels, vertiges, migraines, etc.

• N (Nouvelle activité) : activité seulement réalisée après l’apparition des troubles cognitifs

• A (activité Aménagée, par l’accompagnant/le patient, qu’elle pose encore ou non problème)

2. Scores de difficulté

• 0 : pas de problème (avec ou sans aménagement) passer à l’activité suivante

• 1 (a) : problème d’initiationLe patient ne démarre pas spontanément l’activité

(par oubli, manque de motivation, etc).Le but est cependant bien atteint.

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1 (b) : problème de mémoireDans ce cas, l’activité a été démarrée, mais le patient omet ou duplique une sous-activité importante (ex. il oublie de saler les PDT ou sale plusieurs fois)L’activité est toutefois menée à terme.

1 (c) : problème exécutifLe patient réalise l’activité de façon incorrecte ou inappropriée (ex. le patient ne fait pas chauffer les aliments dans l’ordre correct; il est distrait par le téléphone qui sonne et omet une ou des étapes, ne parvient pas à adapter la recette aux quantités d’ingrédients disponibles par manque de flexibilité mentale …)L’activité est toutefois menée à terme.

• 4 : le patient réalise toujours l’activité mais incorrectement ou de façon partielle (ex: il remplit le pilulier mais son épouse vérifie toujours après et retrouve presque chaque fois des erreurs). Un patient est coté 4 lorsque, malgré sa persévérance, il ne parvient pas à atteindre son but.

• 5 : activité qui n’est plus réalisée par le patient (arrêt de l’activité ou dépendance familiale (5F)).

• 5E : dépendance extérieure (ex. : aide-ménagère, livraison de repas chauds)

Remarque :

Cotation 0 ou 1 : pour la perte d’objets (XI-1), lacotation est binaire selon qu’on perd (1) ou non (0)des objets.

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Remarque importante :

Si un problème ne survient pas de façon systématique, la cotation sera uniquement réalisée lorsque le « seuil pathologique » semble atteint d’un point de vue clinique

Par exemple :

• Oublier de prendre un médicament de temps en temps n’est pas pathologique (cela arrive à tout le monde)

• Laisser brûler une casserole, même une seule fois, peut être pathologique (cela n’arrive jamais en temps ordinaire)

3. Charges pour l’accompagnant

Charge objective : temps consacré à aider ou à superviser le patient dans une activité

Charge subjective : sentiment de pénibilité causé par l’investissement à fournir vis-à-vis du patient(tristesse, énervement, anxiété, …)

• 0 : Aucun• 1 : Un peu ou Léger• 2 : Assez bien ou Moyen• 3 : Beaucoup ou Important

4. Importance de l’activité pour le patient

Le paramètre « importance » doit refléter l’envie de s’investir dans la rééducation pour mieux réaliser l’activité

• 0 : Sans importance• 1 : Un peu important• 2 : Moyennement important• 3 : Très important

Logique de passation du questionnaire général

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Questionnaire général : CONCLUSION

• L’inventaire relativement complet des activités de vie quotidienne permet d’établir un profil exhaustif des problèmes rencontrés par le patient

• L’outil fournit une ligne de base à la fois qualitative et quantitative

• L’outil est évolutif et permet de s’adapter aux activités propres d’un patient

• La cotation du patient et de l’accompagnant permet d’estimer le niveau de nosognosie du patient

• L’estimation de l’ampleur du problème, de l’importance accordée à la réalisation de l’activité et de la charge (en temps et en effort) pour l’entourage permet de sélectionner les activités à rééduquer de manière plus objective

• Réadministré après 3 mois de prise en charge, il permet de voir une évolution globale de l’autonomie du patient. En ne reprenant que les items travaillés en rééducation, il permet aussi de voir l’évolution de l’autonomie dans ces activités et donc l’efficacité de la prise en charge.

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Echelle spécifique Profinteg

Utilisée lors d’ une « mise en situation » d’une activité problématique que l’on veut travailler.

Spécifie les étapes ou sous-étapes posant problème dans une activité

Détermine le niveau d’aide nécessaire à chaque étape ou sous-étape

Permet de formuler des hypothèses sur l’origine cognitive du problème observé en vue d’une rééducation ciblée

Précise l’existence d’éventuels facteurs aggravants du problème cognitif de départ

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Exemple de « mise en situation »

• Mise en situation (sans intervention) de la situation problématique– ex.: préparation d ’un repas

• observation des difficultés – ex. : se trompe dans les quantités, utilise incorrectement

un appareil, oublie des ingrédients etc.

• analyse cognitive des problèmes– ex. : problème de mémoire, planification de l ’action,

recherche visuelle etc. ?

• Intervention ...

Exemple de décomposition d’une activité « arroser les plantes »

Etapes• (1) Préparer le matériel requisa) Prendre l’arrosoirb) Prendre le fertilisant (une fois /mois)

(2) Mettre de l’eau dans la plantea) Mettre de l’eau dans l’arrosoirb) Ajouter la quantité adéquate de fertilisant (au

besoin)c) Choisir la plante à arroser et y verser doucement

de l’eaud) Arrêter avant que cela ne débordee) Procéder de la même manière pour les autres

plantesf) Éviter d’arroser plusieurs fois la même planteg) Remplir l’arrosoir quand il est videh) Ajouter la quantité adéquate de fertilisant à

chaque fois que l’arrosoir est remplii) Vider l’arrosoir avant de la rangerj) Ranger le matériel (arrosoir et fertilisant)

Score de dépendance et observations(erreurs, aides fournies, commentaires)

a) 0 1 2 3 4b) 0 1 2 3 4

a) 0 1 2 3 4b) 0 1 2 3 4

c) 0 1 2 3 4

d) 0 1 2 3 4e) 0 1 2 3 4

f) 0 1 2 3 4g) 0 1 2 3 4h) 0 1 2 3 4

i) 0 1 2 3 4j) 0 1 2 3 4 32

Scores de dépendance de l’échelle spécifique

• 1 = indice général (« non », « stop », « ce n’est pas correct »)

• 2 = indice spécifique (« vous ne devriez pas consulter quelque chose ? (recette) », « vous n’avez pas oublié quelque chose ? (sel) »)

• 3 = indication totale (« vous devriez consulter votre recette »)

• 4 = intervention physique (l’examinateur réalise la sous-activité afin de pouvoir poursuivre l’activité)

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Élaboration d’une stratégie d’intervention visant à

remédier à une difficulté qui se présente dans la vie

quotidienne du patient (utilisation de techniques

neuropsychologiques, aménagement de

l’environnement,…) .

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Références• Anselme, P., Poncelet, M., Bouwens, S., Knips, S., Lekeu, F., Olivier, O., Quittre, A., Van

Heugten, C., Warginaire, S., Wojtasik, V., Verhey, F., Salmon, E., & Majerus, S. (2013). Profinteg:a tool for real-life assessment of activities of daily living in patients with cognitive impairment. Psychologica Belgica, 53/1, 3-22.

• Athlin, E., Norberg, A., Axelsson, K., Moller, A., & Nordstrom, G. (1989). Aberrant eatingbehaviour in elderly parkinsonian patients with and without dementia:Analysis of video-recorded meals. Research in Nursing and Health, 12, 41-51.

• Beck, C. (1988). Measurement of dressing performance in persons with dementia. American Journal of Alzheimer’s Care and Related Disorders and Research. 21-25.

• Galasko, D., Bennett, D., Sano, M., Ernesto, C., Thomas, R., Grundman, M., & Ferris, S. (1997). An inventory to assess activities of daily living clinical trials in Alzheimer’s disease:theAlzheimer’s disease cooperative study. Alzheimer’s Disease and Associated Disorders, 11, S33-S39.

• Lawton, M.P., & Brody, E.M. (1969). Instrumental activities of daily living (IADL). The Gerontologist, 9, 179-186.

• Loewenstein, D.A., Amigo, E., Duara, R., Guterman, A., Hurwitz, N., Wilkie, F., Weinberg, G., Black, B., Gittelman, B., & Eisdorfer, C. (1989). A new scale for the assessment of functionalstatus in Alzheimer’s disease and related disorders. Journal of Gerontology, 44, 114-121.

• Teunisse, S;, & Derix, M.M. (1997). The interview for deterioration in daily living activities in dementia:agreement between primary and secondary caregivers. International Psychogeriatrics, 9, S155-S162.

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Fin ...