mécanique des fluides

25
I Mécanique des fluides

Upload: hassenl

Post on 18-Jun-2015

756 views

Category:

Documents


1 download

TRANSCRIPT

Page 1: Mécanique Des Fluides

I

Mécanique des fluides

Page 2: Mécanique Des Fluides

II

© Les Presses de l’École des mines 2008

60, boulevard Saint-Michel - 75272 Paris Cedex 06 - France

email : [email protected]

http://www.ensmp.fr/Presses

ISBN : 978-2-911762-83-3

Dépôt légal : 2008

Achevé d’imprimer en 2008 (Paris)

Tous droits de reproduction, de traduction, d’adaptation et d’exécution réservés pour tous les pays

Page 3: Mécanique Des Fluides

III

François Cauneau

Mécanique des fluides

Page 4: Mécanique Des Fluides

IV

COLLECTION

Les cours de l’École des mines de ParisDans la même collection

Introduction aux transferts thermiquesDominique Marchio, Paul Reboux

Aide-mémoire de géostatistique linéaire,Pierre Chauvet

Introduction au génie atomique,Jacques Bouchard, Jean-Paul Deffain, Alain Gouchet

Matériaux pour l’ingénieur,Anne-Françoise Gourgues-Lorenzon, Jean-Marc Haudin,,

Jacques Besson, Noëlle Billon, Sabine Cantournet, Yvan Chastel,Bernard Monasse, Loeiz Nazé

Abrégé de thermodynamique,Daniel Fargue

Introduction au traitement de l’énergie électrique,Georges Pierron

Systèmes énergétiques,Renaud Gicquel

Introduction à la physique quantique,Bernard Degrange

Cours d’automatique,Brigitte d’Andréa-Novel, Michel Cohen de Lara

Les imperfections des marchés,Daniel Fixari

Introduction à la métallurgie générale,Jacques Lévy

Comment maîtriser sa productivité industrielle,Hugues Molet

Géostatistique linéaire – applications, Margaret Armstrong, Jacques Carignan

Page 5: Mécanique Des Fluides

V

Remerciements

Ce cours se situe dans le prolongement des enseignements effectués parmes prédécesseurs au poste de Professeur de Mécanique des Fluides à l'Ecole

Nationale Supérieure des Mines de Paris. Les emprunts et citations de leurstravaux dans le présent ouvrage sont naturellement si nombreux qu'il m'estimpossible de les détailler: j'exprime toute ma gratitude, donc, envers les

Professeurs Paul Reboux, René Dehausse et Alain Neveu. Qu'ils soient remerciéspour les conseils et encouragements qu'ils n'ont jamais manqué de me donnerdurant ma carrière

François Cauneau

Page 6: Mécanique Des Fluides
Page 7: Mécanique Des Fluides

VII

Avertissement au lecteur

AVERTISSEMENT AU LECTEUR

Ce support de cours est destiné aux lecteurs possédant un niveau équivalent

au niveau « L » (Licence) du cycle LMD du cycle universitaire et des écolesd'ingénieurs, désirant une référence pour les applications de la mécanique desfluides dans les métiers de l'ingénieur.

Ce programme de Mécanique des Fluides comporte sept chapitres, assortisde séries de problèmes, permettant d'aborder les bases de la discipline. Les

deux premiers chapitres présentent des aspects généraux, et les équationsfondamentales permettant la description globale d'un fluide. Grâce à la notionfondamentale de volume de contrôle, les lois de conservation (énergie, quantité

de mouvement) peuvent ainsi être mises en oeuvre dans un très grand nombrede situations utiles à l'ingénieur, en particulier à l'aide du théorème de Bernoulliet du théorème d'Euler. Ces applications sont illustrées au travers d'exemples

dans le troisième chapitre. Le quatrième chapitre aborde la description localedes écoulements, avec les équations de Navier-Stokes, pour introduire la théoriedes similitudes. Cette théorie, grâce à la notion de nombres adimensionnels et

au théorème de Vaschy-Buckingham, fournit à l'ingénieur l'un des plus puissantsoutils de la discipline pour appréhender les ordres de grandeur des phénomènesen présence dans un écoulement, et pour déterminer quels en sont les

paramètres physiques et technologiques déterminants. Le cinquième chapitreporte sur le fonctionnement des réseaux, l'attention du lecteur est attirée sur lefait que le terme de réseau est ici pris au sens large, c’est-à-dire que les notions

abordées ici sont utiles pour toute installation de contrôle de transferts defluides, depuis les moteurs jusqu'aux raffineries par exemple. Le sixièmechapitre aborde le comportement général des fluides parfaits en régime

permanent, avec les applications des écoulements à potentiel. Le septièmechapitre permet un récapitulatif des notions acquises au travers de l'analyse dufonctionnement des machines hydrauliques et des réseaux.

La lecteur désireux de compléter ses connaissances dans un domainespécifique de la Mécanique des fluides trouvera en annexe une bibliographie

complète: cours sur la turbulence, les fluides non newtoniens, ou encoredémonstrations mathématiques détaillées des théorèmes utilisés dans le cours.

Page 8: Mécanique Des Fluides

I

GÉNÉRALITÉS

SUR LE COMPORTEMENT DES FLUIDES

A. LE FLUIDE AU REPOS

1. VARIABLES ET UNITÉS

2. MODÈLES DE COMPORTEMENT

3. FORCES S'EXERÇANT SUR UN MILIEU FLUIDE

B. LE FLUIDE EN MOUVEMENT

1. LE FLUIDE PARFAIT

2. PARTICULARITES DES ECOULEMENTS REELS

1) Viscosité

2) Turbulence

3) Cavitation

4) Décollements de veine

C. RANDEURS CINÉMATIQUES

1. VITESSE

1) Trajectoires

2) Lignes de courant

3) Écoulement permanent

4) débit à travers une surface

Page 9: Mécanique Des Fluides

2. ACCÉLÉRATION

1) Définition

2) Exemple

3) Généralisation

Page 10: Mécanique Des Fluides

A. LE FLUIDE AU REPOS

1. VARIABLES ET UNITÉS

Du point de vue thermodynamique, un fluide est un milieu matériel homogène dont l'état est défini par deux variables indépendantes qui peuvent être choisies, par exemple, parmi trois grandeurs physiques intuitives : la température, le volume massique et la pression.

La température s'exprime en degrés et sa valeur dépend des échelles utilisées. Celles préconisées par les normes internationales sont l'échelle Celsius (°C) et l'échelle Kelvin (K), reliées par

T (K) = t (°C) + 273,15

Les différences de température s'expriment en Kelvins (K).

Le volume massique s'exprime en mètres cubes par kilogramme. A cette notion chère aux thermodynamiciens, les mécaniciens des fluides préfèrent celle de masse volumique ρ qui s'exprime en kilogrammes par mètre cube (kg/m3).

La pression (p) s'exprime en pascals (Pa), mais c'est une unité très petite, qui ne s'utilise que dans les calculs en raison de son appartenance au système international (SI). Dans la pratique courante, on utilise des multiples tels que :

- l'hectopascal (hPa) pour les faibles différences de pression,

- le bar (bar), qui vaut 105 Pa, pour les pressions industrielles courantes.

Puisqu'il n'y a que deux variables, les trois grandeurs ci-dessus sont reliées par ce que l'on appelle improprement l'équation d'état qui s'écrit symboliquement :

f (p, ρ, T) = 0

Bien entendu, un système à deux variables n'est pas forcément un fluide. Ce qui caractérise un fluide, c'est la propriété décrite ci-après.

Une petite surface dS au sein d'un milieu matériel sépare localement le milieu en deux zones 1 et 2 ; les particules de la zone 2 exercent sur celles de la zone 1 des actions qui induisent, sur la surface dS, une force T.dn. De même, les particules 1 exercent sur les particules 2 une force égale et opposée, en vertu du principe de l'égalité de l'action et de la réaction.

T s'appelle la contrainte au point M, centre de dS. Elle s'exprime en pascals (Pa). La valeur de cette contrainte, ainsi que son orientation, dépendent de la nature du milieu et des conditions locales. Dans un fluide au repos, la contrainte présente trois particularités :

Page 11: Mécanique Des Fluides

1/ Elle est normale à la surface dS. Il n'y a pas de force de cisaillement et ceci explique que le milieu se déforme facilement, ce qui correspond à la notion intuitive de fluidité.

2/ C'est une compression ; les fluides ne peuvent pas « travailler » en traction. Avec les conventions de signe habituelles de la géométrie des surfaces, les normales sont orientées vers l'extérieur ; un milieu est soumis sur une surface extérieure dS à une force – p.n.dS, p étant la pression.

3/ La valeur de p est indépendante de l'orientation de la normale n. On dit que le tenseur des contraintes est sphérique ou isotrope.

2. MODÈLES DE COMPORTEMENT

Lorsqu'on modifie la pression d'un fluide, sa masse volumique en est affectée, dans une mesure plus ou moins grande suivant la nature du fluide. Cette variation est traduite par la loi de comportement, c'est-à-dire en définitive par l'équation d'état.

Les liquides sont très peu sensibles aux variations de pression, et leur comportement est en général bien décrit par le modèle incompressible ρ = cte.

Les gaz sont au contraire très sensibles aux variations de pression. En outre, leur comportement dépend de l'environnement thermique. Deux modèles extrêmes sont envisagés :

1/ Le modèle isotherme, dans lequel le contact du fluide avec son environnement est supposé parfait ; alors le gaz reste à une température constante.

2/ Le modèle adiabatique, qui suppose au contraire que le gaz n'échange aucune chaleur avec l'extérieur.

Par exemple, pour le « gaz parfait » de la thermodynamique, les lois de comportement s'écrivent respectivement

p/ρ = cte p/ργ = cte

La distinction compressible / incompressible ne coïncide pas exactement avec la distinction liquide / gaz. Certains phénomènes en milieu liquide ne s'expliquent pas avec le modèle incompressible ; c'est le cas de la propagation des ondes (ce que l'on appelle vulgairement « les coups de bélier »). En fait, aucun fluide n'est rigoureusement incompressible, mais si la variation relative de masse volumique est faible, on peut la considérer proportionnelle à la surpression ; c'est le modèle faiblement compressible :

M

dS1

2

-p n dS

Page 12: Mécanique Des Fluides

∆ρ / ρ = ∆p / C

C est le module de compressibilité ; il est homogène à une pression. Pour l'eau à la température ambiante, il vaut 20 000 bar. Ainsi, pour une surpression de 100 bar, l'augmentation relative de masse volumique (ou la diminution relative de volume) n'est que de 0,5 %.

En sens inverse, il n'est pas nécessaire d'avoir recours au modèle compressible si l'on sait par avance (par la nature du problème traité) que les variations de pression seront faibles. Alors, le modèle incompressible est suffisant : c'est le cas des problèmes de traitement de l'air tel que la ventilation, la climatisation, etc.

3. FORCES S'EXERÇANT SUR UN MILIEU FLUIDE

On est amené à distinguer deux types de forces :

1/ Les forces massiques dues au fait que la masse fluide est située dans un champ caractérisé en chaque point par un vecteur F, généralement variable d'un point à l'autre, tel que chaque élément de masse dm est soumis à une force F.dm ou, ce qui revient au même, que chaque élément de volume dV est soumis à la force F.ρ.dV. L'exemple le plus courant est le champ de pesanteur qui, dans un repère habituel, est caractérisé par un vecteur F(0,0,-g) que l'on peut considérer comme uniforme pour les applications courantes. Mais on peut également considérer d'autres champs, électriques, magnétiques, d'inertie, etc.

2/ Les forces de surface, qui s'exercent aux frontières du domaine. On sait que dans un fluide au repos, ce sont uniquement des forces de pression, perpendiculaires aux surfaces.

Répartition des pressions dans un milieu fluide au repos.— La résultante de toutes les forces s'exerçant sur chaque élément fluide est nulle. Cette résultante a donc ses trois composantes nulles. Il suffit d'écrire cette nullité sur l'un des axes ; la relation obtenue se généralisera facilement.

Considérons un petit parallélépipède de volume dV = dx.dy.dz, et donc de masse dm = ρ dV.

dV

Fρ dV

Page 13: Mécanique Des Fluides

1/ La force massique a sur Ox une composante

Fx.dm = Fx.ρ. dx.dy.dz.

Ses composantes sur les axes Oy et Oz ont des expressions analogues.

2/ Les forces de pression exercées par l'extérieur sur les deux faces parallèles ombrées d'aire dxdz ont les valeurs indiquées sur la figure ; elles sont de sens inverse, donc leur résultante vaut

Elle contrebalance la force massique, d'où

Et on a deux relations analogues en x et z, ce qui se résume par

C'est la loi fondamentale de l'hydrostatique.

Cas particulier où les forces massiques se réduisent aux seules actions de la pesanteur.— F a pour composantes (0, 0, –g), en choisissant l'axe Oz vertical. Ses deux premières composantes étant nulles, les dérivées partielles de p par rapport à x et y sont nulles. Donc p est une fonction de z seulement : la pression est uniforme dans un plan horizontal. La troisième composante donne

dp = –ρ g dz

Ces deux résultats constituent la loi barométrique.

Exemples :

- Pour l'eau, ρ vaut 1000 kg/m3 ; la pression augmente de 0,98 bar quand la profondeur augmente de 10 m.

- Dans les basses couches de l'atmosphère, la masse volumique de l'air peut être considérée comme constante, égale à ρ = 1,2 kg/m3. La pression baisse de 11,76 hPa quand on s'élève de 100 m. C'est le principe de fonctionnement des altimètres.

∂p∂ y

dy dxdz

Fy=∂p∂ y

F=1

∇p

Page 14: Mécanique Des Fluides

Application : poussée d'Archimède

On démontre que la résultante R des forces de pression à la surface d'un corps entièrement contenu dans un fluide homogène est une force :

- verticale de bas en haut,

- égale au poids du « fluide déplacé »,

- appliquée au centre de gravité du fluide déplacé.

Le corps peut être un solide, mais aussi une goutte liquide dans un gaz ou un autre liquide non miscible, etc.

Il faut être très prudent dans l'application du principe d'Archimède. Il s'applique à coup sûr si le corps est totalement immergé. Il en est de même pour les corps flottants, à condition de considérer comme volume du fluide déplacé celui situé en dessous du plan de flottaison.

Le principe peut être mis en défaut si le corps a une liaison mécanique avec l'extérieur comme le montre la figure ci-contre : une roue traverse la paroi d'un récipient et peut tourner autour d'un axe C tangent à la paroi. Il semblerait que la moitié immergée de la roue subisse une force R appliquée à son centre de gravité G. Cette force donne un couple sur l'arbre C, capable d'entraîner une machine : c'est le mouvement perpétuel.

C'est évidemment faux : chaque action de pression étant perpendiculaire à la paroi, la force correspondante passe par l'axe de la roue et ne peut donc pas créer de couple.

Autre cas particulier : Liquide pesant soumis à une force centrifuge.— C'est le cas si un récipient et le liquide qu'il contient tournent en bloc autour d'un axe vertical. Par rapport à un système d'axes lié au récipient, le liquide est au repos et la loi hydrostatique s'applique, mais le vecteur F a deux composantes :

sur Oz Fz = – g

sur le rayon r Fr = ω²r

CG

R

Page 15: Mécanique Des Fluides

La loi hydrostatique s'écrit

Les surfaces isobares (p = cte) sont des paraboloïdes d'axe Oz et d'équation

Le principe d'Archimède s'applique encore, mais en ajoutant (vectoriellement) au poids du fluide déplacé la force centrifuge qui s'applique sur lui. Si le corps est plus dense que le fluide, il est rejeté vers la périphérie ; s'il est plus léger, il est rejeté sur l'axe de rotation. C'est le principe mis en œuvre dans les centrifugeuses. C'est également valable pour les mélanges de liquides ou de gaz : c'est une des méthodes de séparation des isotopes de l'uranium. Comme les densités sont très voisines, l'enrichissement des combustibles nucléaires exige plusieurs milliers d'étages de centrifugation, séparés par des opérations de fractionnement.

∂p∂z

=−g

∂p∂r

=2r

p=−gz2r2

2Cte

z=2r2

2gcte

Page 16: Mécanique Des Fluides

B. LE FLUIDE EN MOUVEMENT

1. LE FLUIDE PARFAIT

Dans un fluide en mouvement, les forces s'exerçant sur une petite surface dS ne sont généralement plus normales à cette surface ; elles varient en outre suivant son orientation. On désigne par fluide parfait un milieu idéal qui, même dans son mouvement le plus général, possède les propriétés suivantes :

- la force sur une petite surface dS est normale à dS et c'est une compression,

- sa grandeur p est indépendante de l'orientation de dS,

- sa valeur est donnée par les lois de la thermodynamique, c'est à dire que p vérifie ce que l'on appelle l'équation d'état, symbolisée par f (p,ρ,T) = 0.

Bien entendu, la loi hydrostatique ne s'applique plus car il faut tenir compte des effets d'accélération. Ce point sera précisé ultérieurement.

Aucun milieu ne répond strictement à ces critères ; le fluide parfait n'est qu'un modèle, néanmoins précieux :

- d'abord parce que, dans bien des cas, l'approximation du fluide parfait donne des résultats suffisamment proches de la réalité ; ceci est en particulier le cas pour les fluides dits usuels, tel que l'air et l'eau,

- ensuite parce que l'étude du fluide parfait est une première étape qui peut être complétée par des termes correctifs, obtenus généralement par voie empirique par comparaison avec des situations similaires.

- de plus, pour les fluides usuels, le modèle du fluide parfait donne des résultats suffisants dès lors que l'on considère des écoulements en dehors du voisinage des parois matérielles, comme nous allons le voir ci-après.

2. PARTICULARITÉS DES ÉCOULEMENTS RÉELS

1) Viscosité

Considérons un courant fluide à filets parallèles, abordant tangentiellement une plaque plane Ox avec une vitesse uniforme V0. Si le fluide est parfait, les interactions avec la paroi sont perpendiculaires et n'ont donc aucune composante horizontale ; la vitesse du fluide reste donc uniforme et égale à V0. Ce n'est pas ce que l'on constate.

Page 17: Mécanique Des Fluides

Dans une tranche située en aval de O, la vitesse est nulle à la paroi : la viscosité a pour effet d'« accrocher » le fluide à la paroi. La vitesse v est une fonction de x, et de la dimension perpendiculaire y. Pour y = 0, la vitesse est nulle ; pour y tendant vers l'infini, v tend vers V0. Ceci traduit le fait que, plus on s'éloigne de la paroi, moins son action se fait sentir.

Une convention (parmi d'autres) consiste à privilégier les points pour lesquels v = 0,99 V0. Ils délimitent un volume appelé couche limite. Dans le reste du domaine, la vitesse est quasi uniforme (à 1% près) et le fluide s'y comporte comme un fluide parfait ; c'est la zone appelée fluide sain.

Le ralentissement du fluide dans la couche limite est lié aux gradients de vitesse qui s'y développent (un peu comme un jeu de cartes que l'on ferait glisser les unes par rapport aux autres, mais la comparaison s'arrête là, le frottement solide étant de nature différente). Le gradient ∂v/∂y est maximal à la paroi (x = 0).

Un élément dS de cette paroi exerce sur le fluide une force retardatrice dT et on pose

µ est la viscosité dynamique. L'unité SI est le poiseuille (Pl), mais l'habitude a consacré le pascal-seconde (Pa.s).

Ordres de grandeur : eau à 20°C................0,001

huile de moteur.........0,05

air à 20°C.........1,8 x 10-5

La viscosité est très sensible à la température : elle baisse quand la température des liquides augmente, c'est l'inverse pour les gaz.

dT=−∂v∂y

y=0

V0

0,99V0

COUCHELIMITE

FLUIDE« SAIN »

δ

y

O x

v

Page 18: Mécanique Des Fluides

Pour simplifier l'écriture, on introduit souvent le « glissement » (terme impropre) pour désigner le gradient transversal à la paroi :

Comme le comportement d'un fluide dépend de diverses forces, dont les forces d'inertie, le calcul fait souvent apparaître un autre coefficient, appelé viscosité cinématique :

L'unité SI n'a pas de nom particulier. Au point de vue dimensionnel, elle est homogène à des mètres carrés par seconde.

2) Turbulence

Ce phénomène est mis en évidence par l'expérience de Reynolds. Sur l'axe d'un tube parcouru par un fluide, on injecte un colorant. Aux faibles vitesses du fluide, les gouttes de colorant s'alignent sur l'axe du tube comme on pouvait s'y attendre : les vecteurs vitesse du fluide sont parallèles aux génératrices du tube. On dit que l'écoulement est laminaire.

Aux vitesses plus importantes, les gouttes de colorant s'éparpillent puis emplissent progressivement toute la section droite du tube. C'est donc que la vitesse du fluide a des composantes transversales qui entraînent le colorant dans le sens radial.

En analysant la vitesse réelle Vr du fluide avec des moyens disposant d'un grand pouvoir séparateur (anémomètre à fil chaud, laser), on s'aperçoit que cette vitesse est la somme vectorielle de deux termes :

1/ Une vitesse V, qui est celle que l'on mesure habituellement par les procédés basés sur les notions de débit ou de quantité de mouvement.

V

v’V

r

=

= ∂v∂y

y=0

Page 19: Mécanique Des Fluides

2/ Une vitesse v' dite vitesse d'agitation dont les composantes v ' x , v ' y , v ' z fluctuent très rapidement dans le temps et l'espace, chacune ayant une moyenne nulle ; elles ne participent donc pas au débit fluide. L'énergie cinétique massique réelle est

12 V v ' 2=

12V 2 1

2 v ' 2V v '

Le dernier terme est nul en moyenne et il reste finalement :

- l'énergie cinétique telle qu'on la mesure habituellement,

- l'énergie de turbulence égale à 0,5 v ' x2v ' y

2v 'z2 , la barre supérieure

signifiant que l'on prend la moyenne, laquelle n'est évidemment pas nulle. Elle n'est pas observable par les moyens usuels et pourtant elle existe ; le fluide a dû la puiser dans ses autres formes d'énergie. La turbulence est donc une cause de dissipation d'énergie.

Commet savoir si l'écoulement est laminaire ou turbulent ? On a fait allusion à la vitesse, mais les caractéristiques du fluide (ρ,µ) interviennent également : on conçoit intuitivement que si le fluide est très visqueux, la turbulence apparaîtra moins facilement. Il en sera de même si le diamètre du tube est faible car les mouvements transversaux seront gênés. Pour cette morphologie très particulière du tube, le critère est le nombre de Reynolds :

C'est un nombre sans dimension : il est indépendant du système d'unités.

- Si Re < 2000, le régime est laminaire.

- Si Re > 10 000, le régime est turbulent.

- Entre les deux, c'est l'incertitude.

La plupart des écoulements usuels sont turbulents (pour l'eau par exemple, ν vaut 10-6, donc Re vaut 106 VD).

Seuls sont laminaires les écoulements de fluides très visqueux (graissage, commandes hydrauliques), les écoulements dans des tubes très fins, les écoulements en milieu poreux ou encore les écoulements des fluides biologiques à l'échelle cellulaire.

3) Cavitation

Ce phénomène ne concerne que les liquides. Au cours du mouvement, la pression en chaque point varie avec la vitesse. Il se peut qu'elle tombe au-dessous de la

Re=VD

=VD

Page 20: Mécanique Des Fluides

pression de vapeur saturante (par exemple 0,02 bar pour l'eau à 20°C). Alors, des bulles de vapeur apparaissent au sein du liquide. Cette ébullition entraîne deux conséquences :

1/ Quand une petite quantité se vaporise, son volume augmente considérablement (par exemple, il est multiplié par 600 pour l'eau). Dans les installations hydrauliques, les performances dépendent des conditions d'écoulement dans certaines parties cruciales (par exemple l'ouïe d'entrée d'une pompe). Si, pour un même débit volumique, le débit massique est divisé par 600, ceci équivaut à un arrêt de l'écoulement.

2/ Les bulles cheminent avec le courant fluide et, lorsqu'elles arrivent dans une zone à plus forte pression, elles se détruisent par implosion (ou collapse). Une sphère résiste en effet très mal à une surpression extérieure et la destruction s'effectue par un phénomène d'instabilité analogue au flambage en mécanique. Si cette implosion se produit au voisinage de parois solides, celles-ci sont détruites très rapidement (parfois en quelques heures).

Pour ces raisons parmi d'autres (bruit, vibrations), la cavitation est un facteur limitant. Le dimensionnement des installations doit impérativement assurer l'absence de cavitation.

4) Décollements de veine

Quand un courant fluide rencontre un obstacle, plusieurs éventualités peuvent se produire. Pour simplifier, prenons l'exemple d'un corps symétrique, l'axe de symétrie étant parallèle au courant. Les filets se répartissent autour de l'obstacle, sauf le filet central qui frappe l'obstacle au « point d'arrêt » A. Une parcelle située en M au voisinage de la paroi est soumise à deux types d'action : .

A B

v.M

Page 21: Mécanique Des Fluides

1/ La viscosité, qui tend à lui faire longer à la paroi.

2/ Son inertie qui tend à la faire continuer sur sa lancée.

Si la vitesse est faible, les forces de viscosité l'emportent ; les filets contournent l'obstacle au plus près et se rassemblent au « point de confluence » B.

Dans le cas contraire, les filets se décollent de la paroi ; il se forme derrière l'obstacle une zone appelée sillage où les mouvements sont très désordonnés. C'est une cause importante de dissipation d'énergie.

Page 22: Mécanique Des Fluides

C. GRANDEURS CINÉMATIQUES

1. VITESSE

1) Trajectoires

Une trajectoire est l'ensemble des points occupés successivement par une même « parcelle » fluide. On sait que la matière est constituée de particules élémentaires (molécules, atomes) dont l'étude individuelle serait impossible. Une parcelle contient un nombre suffisant de particules pour que l'on puisse raisonner sur des valeurs moyennes. Elle est suffisamment petite pour que les méthodes du calcul infinitésimal soient justifiées.

Pour fixer les idées, un micron cube de l'air qui nous entoure renferme 25 millions de molécules.

La parcelle qui passe à l'instant t au point M de coordonnées (x,y,z) a une vitesse V dont les coordonnées sont

v x=∂ x∂ tv y=

∂ y∂ tv z=

∂ z∂ t

2) Lignes de courant

Une ligne de courant à l'instant t est une courbe tangente à l'instant t au vecteur vitesse en chacun de ses points. Dans le cas général, les lignes de courant sont différentes des trajectoires.

Exemple emprunté à la mécanique : Quand une automobile roule sur une route, un point M situé à la périphérie du pneu décrit au cours du temps une courbe appelée cycloïde (à la déformation près du pneu) : c'est une trajectoire (T).

A t donné, le point de contact I entre le pneu et la route a une vitesse nulle ; c'est un centre instantané de rotation. Les lignes de courant (L) sont des cercles centrés sur I. Mais ceci ne sera plus valable à t + dt.

Page 23: Mécanique Des Fluides

3) Écoulement permanent

C'est un écoulement dans lequel la vitesse en chaque point est indépendante du temps. C'est la limite vers laquelle tend tout écoulement si les conditions aux frontières sont constantes. Les phénomènes mécaniques étant relativement rapides par rapport à d'autres (thermiques notamment), cette limite est atteinte assez rapidement, ce qui donne tout son intérêt à l'étude des régimes permanents.

Dans un écoulement permanent, les lignes de courant sont fixes et confondues avec les trajectoires.

Remarque 1 : On peut s'interroger sur l'intérêt de l'étude des écoulements permanents, puisque la plupart des écoulements sont turbulents : la fluctuation de la vitesse en un point semble en contradiction avec la notion même de l'écoulement permanent. En fait, c'est par rapport à la vitesse moyenne que s'apprécie le critère de permanence. Par abus de langage, on qualifie de permanent un écoulement turbulent qui est permanent en moyenne (certains auteurs puristes préfèrent le qualificatif de « stationnaire »).

Remarque 2 : La permanence d'un écoulement n'est pas une propriété intrinsèque : elle dépend du référentiel. Considérons par exemple un corps (C) se déplaçant à une vitesse V par rapport à la terre. Les conditions aux limites sont

v = 0 à l'infini

v = V sur (C)

Comme (C) se déplace, les conditions aux limites dépendent du temps et le régime ne peut pas être permanent. Mais si l'observateur est lié à (C), les conditions aux limites deviennent

v = -V à l'infini

v = 0 sur (C)

et le régime peut devenir permanent puisque la frontière de (C) est fixe.

4) Débit à travers une surface

Soit une petite surface dS, de centre M et de normale n , traversée par un courant fluide animé d'une vitesse v au point M. On appelle débit de matière, ou plus simplement débit, la quantité q de matière

Cv = 0

à l’infiniV

CV

dS

h

vn

Page 24: Mécanique Des Fluides

traversant dS pendant l'unité de temps. Il s'exprime par

q= V.ndS=VndS

En effet, les parcelles de matière traversant dS pendant l'intervalle (0< t <1) se trouvaient à l'instant 0 dans un cylindre de base dS, dont les génératrices ont une

longueur = v. Sa hauteur est donc h = vn et son volume h.dS = vndS, d'où la masse

en multipliant par ρ.

On définit aussi le débit volumique Q, utile surtout dans l'étude des fluides incompressibles (ρ = cte). On a Q = q / ρ.

2. ACCÉLÉRATION

1) Définition

L'accélération d'une parcelle individualisée est la dérivée par rapport au temps de sa vitesse v , dérivée qui sera notée dv /dt . Cette notation peut surprendre, sachant que v est fonction de (x,y,z,t). C'est pour bien insister sur le fait que la dérivée partielle ∂v/∂ t , appelée dérivée locale, ne représente pas une accélération. C'est la dérivée que mesurerait un observateur fixe, mais alors sa mesure concernerait des parcelles différentes. Pour pouvoir parler d'accélération, il faut suivre une parcelle dans son déplacement.

A noter que dans un écoulement permanent, la dérivée locale est nulle en tout point alors que, bien entendu, il existe des accélérations.

2) Exemple

Pour simplifier, considérons un écoulement permanent et rectiligne. La vitesse ne dépend plus que d'une seule variable x. Une parcelle individualisée occupe les points M et M' à deux instants voisins t et t + dt. Par définition de la vitesse v, on a MM' = dx = v dt.

La vitesse v' en M' vaut

vxdx=vdvdx

dx=vdvdx

vdt

L'accélération de la parcelle est par définition

L'accélération d'une parcelle est égale au gradient de son énergie cinétique massique.

=vM'−vM

dt

=vdvdx

=d v2/2dx

xM M’dxv v’

Page 25: Mécanique Des Fluides

Dans le cas d'un régime non permanent, un raisonnement analogue conduit à

3) Généralisation

Si la parcelle décrit une courbe, l'abscisse x est remplacée par une abscisse curviligne s. L'accélération a deux composantes :

1/ Une composante γt tangente à la courbe.

2/ Une composante γn portée par la normale principale.

Par un raisonnement analogue au précédent, on trouve

Quant à l'accélération centripète, elle est conforme à celle de la mécanique du point :

R désignant le rayon de courbure.

Dans le cas d'un écoulement permanent, on retiendra les deux résultats fondamentaux ci-après :

Pour être complet, en trois dimensions, il faudrait mentionner la composante de l'accélération sur la binormale ; il se trouve qu'elle est nulle.

M

n s

C

R

γt

γn

=∂v∂ t

v ∂v∂x

t=∂v∂ t

v ∂v∂s

n=−v2

R

t=v∂v∂s

n=−v2

R