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MICROMECANIQUE DES COMPOSITES Cours Auteur de la Ressource Pédagogique D. ROUBY 5 SGM Année de création : 2005

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Page 1: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

MICROMECANIQUE DES COMPOSITES

Cours

Auteur de la Ressource PédagogiqueD. ROUBY

5 SGM

Année de création : 2005

Page 2: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel.

Contraintes, déformations, modules élastiques D. Rouby

"The essence of composite materials technology is the ability to put strong stiff fibres in the right place, in the right orientation with the right volume fraction". Derek HULL 1981.

1. Rappels d'élasticité anisotrope

x

y

Ex : module d’Young longitudinal Ey : module d’Young transversal Es : module de cisaillement dans le plan

νyx : Coefficient de Poisson longitudinal

La loi de Hooke s'écrit alors comme suit, dans l'hypothèse des contraintes planes :

(A1)

=

s

y

x

s

yy

xy

x

yx

x

s

y

x

E

EE

EE

σ

σ

σν

ν

ε

ε

ε

100

01

01

2. Volume élémentaire représentatif (VER)

x

y

z

Vi : volume (i = f : fibres, i = m : matrice) Ai : aire de la section normale à x vi : fraction volumique

(A2) A

A

V

V fff ==v ;

A

A

V

V mmm ==v

Par la suite, on négligera la porosité, on a alors:

(A3) 1vv =+ mf

3. Contrainte et déformation moyennes

La contrainte moyenne dans le VER s'écrit :

(A4)

+== ∫∫∫

mf VVV

dvdvV

dvV

σσσσ11

et dans les fibres et la matrice respectivement :

(A5) ∫=fVf

f dvV

σσ1

et ∫=mVm

m dvV

σσ1

Notes

Micromécanique des composites août 2005 µA

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 3: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel. Contraintes, déformations, modules élastiques A2

Il vient donc: (A6) mmff σσσ vv +=

Il est à noter que cette relation est valable pour toutes les directions (indices : x, y, s et 1, 2, 6). Et dans la direction x qui nous intéressera par la suite, elle s'écrit :

(A7) mxmfxfx σσσ vv +=

Pour simplifier l'écriture, on omettra des indices et l'Équ. A4 s'écrit finalement :

(A8) mmffx σσσ vv +=

Cette expression est aussi valable dans le cas où fibres ou matrice sont rompue et que le VER présente une discontinuité, faisant intervenir des rechargements aux interfaces.

En ce qui concerne les déformations, le même raisonnement conduit à :

(A9) mxmfxfx εεε vv +=

ou bien : (A10) mymfyfy εεε vv +=

Dans le cas de l'unidirectionnel, la déformation longitudinale est uniforme :

(A11) mxfxx εεε ==

qui s'écrit aussi, pour simplifier : mfx εεε ==

4. Modules d'élasticité

Constituants

Les constituants, fibre et matrice sont supposés isotropes. Ceci n'est pas vrai pour les fibres de carbone et de Kevlar.

Modules d'Young Fibre : Ef ; matrice : Em

Coeff. de Poisson Fibre : νf ; matrice : νm

Modules de cisaillement ou de Coulomb

(A12) )1(2 f

ff

EG

ν+= pour les fibres, et

(A13) )1(2 m

mm

EG

ν+= pour la matrice.

Modules de compressibilité hydrostatique

(A14) )21(3 i

ii

Ek

ν−=

i = f ou m

Modules de compression latérale (sans déformation longitudinale)

(A15) )1()21(2 ii

ii

EK

νν +−= i = f ou m

Notes

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 4: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel. Contraintes, déformations, modules élastiques A3

Composite unidirectionnel

Module d'Young longitudinal

On applique σx (σy et σz = 0), il vient alors :

(A16) x

mxm

x

fxf

x

xxE

ε

σ

ε

σ

ε

σvv +==

et comme:

(A17) f

ffE

ε

σ= et

m

mmE

ε

σ=

on obtient finalement la loi des mélanges des modules d'Young :

(A18) mmffx EEE vv +=

Cette expression est une approximation car il a été supposé que les contraintes transversales σfy et σfz sont nulles, ce qui n'est pas le cas car les coefficients de Poisson respectifs des fibres et de la matrice ne sont pas égaux a priori. La solution exacte s'écrit :

(A19) 1vv ξ++= mmffx EEE

avec le terme correctif donné par :

(A19a)

f

m

mm

f

mfmf

KGK

v1v

)(vv4 2

1

++

−=

ννξ

Coefficient de Poisson longitudinal

Un raisonnement analogue au précédent conduit à l'expression suivante :

(A20) 2vv ξννν ++= mmffx avec :

(A20a)

f

m

mm

f

fmmfmf

KGK

KK

v1v

11)(vv

2

++

−−

=

νν

ξ

Numériquement, les termes ξ1 et ξ2 sont tout à fait négligeables dans la plupart des cas.

En ce qui concerne les coefficients de Poisson, rappelons que (à partir de l'Équ. A.1) :

(A21) y

xy

x

yx

EE

νν=

Attention, dans certains ouvrages, les indices x, y ou L, T sont inversés dans les coefficients de Poisson. Se référer à leur définition.

Module de cisaillement dans le plan

Il est donné par l'expression suivante :

(A22) mffm

mmffmxys

GG

GGGGE

v)v(1

v)v(1

++

++==

Notes

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Page 5: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel. Contraintes, déformations, modules élastiques A4

Module de compression latérale (εx = 0)

(A23)

mm

m

mfmf

fmx

GkGGkk

KK

4

3v

)(3

11

v

+

+

−+−

+=

Module de cisaillement transversal

Il s'agit du cisaillement dans un plan normal à l'axe x : Gyz.

(A24)

+

++

+=

mm

mm

mmf

fmyz

Gk

Gk

GG

GG

3

82

3

7

vG

v1

m

Module d'Young transversal

A partir de l'Équ. A10 et en supposant que la contrainte est uniforme dans la direction transversale (σy

= σfy = σmy), on obtient l'expression simplifiée suivante:

(A25) m

m

f

f

y EEE

vv1+=

Cette expression conduit à des résultats numériques qui sont un peu différents des valeurs exactes. Celles-ci peuvent être obtenues avec l'expression suivante :

(A26)

x

yx

yzx

y

EGK

E2

22

11

2

ν++

=

5. Composite unidirectionnel en traction

On a : mmffx σσσ vv += , et εf = εm, on constate

donc que les contraintes dans fibres et matrice sont dans le rapport des modules :

(A27) m

f

m

f

E

E=

σ

σ

Par ailleurs, il est aisé de montrer que les contraintes dans les deux constituants sont proportionnelles à la contrainte appliquée :

(A28) x

fxfE

Eσσ = et

x

mxmE

Eσσ =

Ces contraintes sont, bien entendu, constantes le long de l'axe longitudinal si aucune discontinuité n'est présente dans le composite.

Pour en savoir plus

J.M. BERTHELOT, Matériaux composites. Comportement mécanique et analyse des structures. Masson. 1996.

Notes

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Page 6: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel. Contraintes, déformations, modules élastiques A5

6. Exemples numériques

Nous donnons ici quelques exemples typiques de caractéristiques élastiques des fibres et matrices les plus courantes et de quelques composites unidirectionnels.

Fibres Verre E

Verre R

Kevlar 49*

Carbone HT*

Carbone HM*

Carbone UHM*

Alumine Nextel

SiC Nicalon

SiC 140 µm

Ef (GPa) expérience 73 85 130 230 392 700 380 200 400

νf estimé 0,22 0,20 0,35 0,30 0,35 0,35 0,20 0,20 0,20

Gf (GPa) (Équ. A12) 29,92 35,42 48,15 88,46 145,19 259,26 158,33 83,33 166,67

kf (GPa) (Équ. A14) 43,45 47,22 144,44 191,67 435,56 777,78 211,11 111,11 222,22

Kf (GPa) (Équ. A15) 53,43 59,03 160,49 221,15 483,95 864,20 263,89 138,89 277,78 *Fibres anisotropes, mais supposées isotropes pour les calculs suivants.

Tableau A1 : Modules d'élasticité de fibres courantes.

Matrices Polyester

Epoxy

Titane TA6V

Aluminium 6061

SiC CVD

Vitro- céramique

Em (GPa) expérience 3,45 4,50 105 73 450 80

νm estimé 0,30 0,40 0,30 0,25 0,20 0,25

Gm (GPa) (Équ. A13) 1,33 1,61 40,38 28,00 187,50 32

km (GPa) (Équ. A14) 2,88 7,50 87,50 46,67 250,00 53,33

Km (GPa) (Équ. A15) 3,32 8,04 100,96 56,00 312,50 64,00

Tableau A2 : Modules d'élasticité de matrices typiques.

Composites unidirectionnels typiques

Verre E

Polyester

Kevlar 49

Epoxy

C HT

Epoxy

C UHM

Epoxy

SiC SCS6 140 µm Titane

Alumine Nextel Alu

SiC Nicalon SIC CVD

SiC Nicalon

vitrocéram

vf typique

0,60 0,60 0,60 0,60 0,50 0,50 0,40 0,40

Ex (GPa) (Equ. A18)

45,18 79,80 139,80 421,80 252,50 225,00 350,00 128,00

νyx (Equ. A20)

0,252 0,370 0,340 0,370 0,250 0,225 0,200 0,230

νxy (Équ. A21)

0,060 0,075 0,041 0,016 0,186 0,136 0,184 0,200

Kx (GPa) (Équ. A23)

8,97 20,53 21,03 22,10 155,35 102,46 224,78 84,40

Es (GPa) (Équ. A22)

4,56 5,72 6,02 6,28 75,82 58,12 137,50 45,86

Ey (GPa) (Équ. A25)

8,05 10,69 10,93 11,14 166,34 118,22 300,00 105,26

Ey (GPa) (Équ. A26)

10,80 16,15 17,03 17,85 187,44 136,34 322,59 111,21

ξ1/Ex (%) (Équ. A19a)

0,014 0,004 0,01 0,0008 0,125 0,02 0 0,045

Tableau A3 : Modules d'élasticité de composites unidirectionnels typiques.

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 7: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composites particulaires.

Polymères chargés D. Rouby

E.H. Kerner, The elastic and thermo-elastic properties of composite media, Proc. Phy. Soc., 69B (1956) 808-813. R.M. Christensen and K.H. Lo, Solutions for effective shear properties in three phase sphere and cylinder models, J. Mech. Solids, 27 (1979) 315-330. E. Herve and A. Zaoui, n-layered inclusion-based micromechanical modelling, Int. J. Engng Sci., 31 (1993) 1-10.

Ce document n’est pas un support de cours,

mais simplement un formulaire.

Pour plus de détail, consultez les références

données ci-dessus.

Le classeur EXCEL « Micromécanique »

est disponible si vous avez besoin de calculer

les modules d’élasticité donnés dans les

fascicules A, A1 et A2.

1. Modèle de Kerner

Il est constitué de trois phases : l'inclusion

ou la particule sphérique de rayon R (indice p),

la matrice entourant l'inclusion, de rayon R'

(indice m). L'ensemble étant noyé dans le

milieu homogène équivalent dont on cherche à

déterminer les caractéristiques élastiques.

La fraction volumique des inclusions est

alors :

vp = (R / R')3

milieu homogène équivalent

matrice rayon : R'

inclusion rayon : R

Modules d'Young

(A1.1) Ei = 9 ki Gi

(3 ki + Gi)

Modules de cisaillement

(A1.2) Gi = Ei

2 (1 + νi)

Modules de compressibilité hydrostatique

(A1.3) ki = Ei

3 (1 - 2νi)

Coefficients de Poisson

(A1.4) νi = 3 ki - 2 Gi

2 (3 ki + Gi)

1. Module de cisaillement

Expression générale de Kerner :

(A1.5) G = Gm

vp Gp

A +

1 - vp

Bvp Gm

A +

1 - vp

B

avec : A = (7 - 5 νm) Gm + (8 - 10 νm) Gp

et : B = 15 (1 - νm)

Expressions simplifiées

• Si vp << 1 :

(A1.6) G = Gm 1 - Gm BA

1 - Gp

Gm vp

• Si Gp >> Gm :

(A1.7) G = Gm 1 + 15 1 - νm

8 - 10 νm

vp

1 - vp

• Si Gp << Gm :

(A1.8) 1G

= 1Gm

1 + 15 1 - νm

7 - 5 νm

vp

1 - vp

Micromécanique des composites août 2005 µA1

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 8: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composites particulaires. polymères chargés A1.2

2. Module de compressibilité hydrostatique

Expression générale de Kerner :

(A1.9)

k = km + vp

1kp - km

+ 1 - vp 1 + νm

3 km 1 - νm

Expressions simplifiées

• Si vp << 1 : (A1.10)

k = km 1 + kp - km 1 - νm

2 1 - 2 νm km + 1 + νm kp vp

• Si kp >> km :

(A1.11) k = km 1 + 3 1 - νm

1 + νm

vp

1 - vp

• Si kp << km : (A1.12)

k = km 1 - 3 1 - νm vp

3 km 1 - νm + 1 + νm 1 - vp

La figure ci-dessous montre un exemple d'évolution du module d'Young donné par les expressions

de Kerner et comparés aux bornes de Voigt et Reuss (trait fin), ainsi qu'à la solution exacte (trait

épais).

(graphe obtenu avec l’outil EXCEL « Micromécanique »)

0

10

20

30

40

50

60

70

80

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1

Fraction volumique de particules

Mo

du

le d

'Yo

un

g (

GP

a)

-

Voigt (parallèle)

Reuss (série)

Solution exacte Kerner

Particules : verre (Ep = 72 GPa, NUp = 0,2) Matrice : polymère (Em = 2 GPa, NUm = 0,3)

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Page 9: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Mats 2D aléatoires Modules d’élasticité

D. Rouby

Dans ce Module A2, on donne les formules usuelles concernant les composites 2D aléatoires, pour calculer les modules d'élasticité. Dans un souci d'utilisabilité directe, ces formules ne sont pas démontrées, mais leur validité sera brièvement commentée.

1. Modules d'élasticité

Si les orientations des fibres sont parfaitement aléatoires dans le plan, ces matériaux sont isotropes dans le plan. Il s'agit donc de déterminer les grandeurs suivantes : E* Module d'Young G* Module de cisaillement ν* coefficient de Poisson L'approche est basée sur l'analogie entre un composite aléatoire et un stratifié quasi-isotrope du type [0/90/±45] ou [0/±60]. On part des données suivantes, relatives au composite unidirectionnel :

Ex Module d'Young longitudinal Ey Module d'Young transversal

νyx Coefficient de Poisson principal

νxy Coeff. de Poisson trans. = νyx Ey / Ex Es Module de cisaillement dans le plan

(pour plus de détails, se reporter aux fascicules de la partie Macro). On obtient :

( )

1

5154*U

UUUE

−= (A2.1)

ν* = 1−2U5

U1

(A2.2)

G* =E *

2(1 +ν*)= U5 (A2.3)

U1 est le premier invariant (cf. Macro M3), il est

aussi donné par : (42.4)

U1 =Ex (3 + 2νxy) + 3Ey + 4Es(1 −ν yxνxy )

8(1− νyxν xy)

U5 est aussi un invariant, donné par :

U5 =U1 − U4

2 (A2.5)

ou par : (A2.6)

U5 =Ex (1 − 2ν xy) + Ey + 4Es(1 −ν yxνxy )

8(1 −ν yxνxy )

Les expressions ci-dessus peuvent être simplifiées si on considère que certains termes sont négligeables. On obtient alors [1]:

E* =3

8Ex +

5

8Ey (A2.7)

G* =1

8Ex +

2

8Ey (A2.8)

ν* =E *

2G *−1 (A2.9)

Dans la pratique, les orientations et distributions de fibres ne sont pas parfaitement uniformes et il y a une certaine porosité. L'approche par stratifiés quasi-isotropes surestime souvent les modules. Il n'est pas rare que l'écart atteigne 20%. Pour tenir compte de cette réalité, de nombreuses expressions empiriques ont été proposées. Celle qui est donnée ci-dessous est relative aux mats 2D verre/polyester, pour des fractions volumiques de fibres comprises entre 8 et 26% [2] : E* = δ v f (E f − Em ) + Em (A2.10) avec : δ = 0,325 − 0, 709 v f + 5,21 v f

2

vf représente ici la fraction volumique de fibres.

Les élaborateurs de mats aléatoires ou de SMC utilisent plutôt la fraction massique de fibres mf. Ces deux grandeurs sont reliées par :

v f =ρm m f

ρ f mm + ρm mf

(A2.11)

où ρf et ρm sont les masses volumiques respectivement des fibres et de la matrice.

Micromécanique des composites août 2005

µA2

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 10: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Mats 2D aléatoires A2.2

Module de Young (GPa)

0

5

10

15

20

25

30

35

40

0 0,2 0,4 0,6 0,8

Fraction volumique de fibres

E*a, Equ.A2.1

E*b, Equ.A2.7

E*c, Equ.A2.10

Figure A2.1 Évolution du module d'Young E* en fonction de la fraction volumique des fibres vf. Mat 2D de verre/polyester. Ef = 72 GPa ; νf = 0,24 ; Gf = 29 GPa

Em = 3 GPa ; νm = 0,35 ; Gm = 1,15 GPa

Module de cisaillement (GPa)

0

2

4

6

8

10

12

14

0 0,2 0,4 0,6 0,8

Fraction volumique de fibres

G*a, Equ.A2.3

G*b, Equ.A2.8

Figure A2.2 Évolution du module de cisaillement G* en fonction de la fraction volumique des fibres vf. Mat 2D de verre/polyester (cf. légende Fig. A2.1).

Les figures sur cette page donnent un exemple de propriétés données par les expressions de la page précédente. Le taux de renfort étant inférieur à 30% dans ces matériaux, on constate que les modules de traction et de cisaillement sont peu modifiés en prenant l'expression simplifiée. Ce n'est pas le cas du coefficient de Poisson où l'approche issue directement des stratifiés quasi isotropes est plus appropriée (Équ. A2.2). Remarquons, pour finir, que la présente analyse est faite avec des fibres aléatoirement distribuées et orientée dans un plan. Une orientation non parfaitement aléatoire conduit à un matériau anisotrope. Si les fibres sont très courtes, les constantes élastiques sont réduites par les effets d’extrémités (cf. Fiche G).

Coefficient de Poisson

0

0,05

0,1

0,15

0,2

0,25

0,3

0,35

0,4

0,45

0 0,2 0,4 0,6 0,8

Fraction volumique de fibres

NU*a, Equ.A2.2

NU*b, Equ.A2.9

Figure A2.3

Évolution du coefficient de Poisson ν* en fonction de la fraction volumique des fibres vf. Mat 2D de verre/polyester (cf. légende Fig. A2.1). 2. Coefficient de dilatation d'un SMC

(en cours de construction) 3. Résistance ultime d'un SMC

(en cours de construction)

[1] D. Hull, An Introduction to Composite Materials, Cambridge University Press, 1981. [2] G. Menges, H.-J. Roskhoten, H. Adamczak, 1972, Zum Kriech- und Alterungsverhalten glasfaser-verstärkter Kunststoffe. Kunststoffe, 62 (12) p. 851.

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 11: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel.

Approche simple de la contrainte ultime. D. Rouby

A. Kelly & R.B. Nicholson (éditeurs). Strengthening Methods in Crystals,Elsevier, London, 1971.

J. Aveston, G. Cooper & A. Kelly. "Single and multiple fracture" in The Properties of Fibre Composites, Conference Proceedings, National physical Laboratory, IPC Science and Technology Press Ltd., 1971.

1. Limites des constituants Les fibres sont supposées élastiques linéaires jusqu'à rupture. Les contrainte et déformation ultime sont notées respectivement : σf

R et εfR. La matrice peut présenter un comportement linéaire élastique, avec les limites suivantes : σm

R et εmR, ou un

comportement élasto-plastique avec σmélast et εmélast

(cf. Fig. B1). Des valeurs numériques typiques sont données en fin du document.

σf

εf

σfR

εfR

σmσm

R

εm

εmR

σmélast

εmélast

Figure B1

Dans ce qui suit, il est supposé que les contraintes ultimes des fibres et de la matrice ne sont pas distribuées (leur module de Weibull est très grand). L'influence d'une distribution des contraintes ultimes sera étudiée plus loin (voir les Fiches C et D).

2. Contrainte ultime axiale (cas où εεεεfR < εεεεmR) C'est le cas typique des composites à matrice organique et métalliques. Dans ce cas, sous traction longitudinale, les fibres se rompent avant la matrice. Et si une fibre se rompt, toutes les fibres de la section droite se rompent dans le même plan.

σσf

R σ

σ*m σ'm

avant rupture après rupture Figure B2 : rupture des fibres

Dans tous les cas, l'équation suivante est valable (Équ. A8) :

(B1) mmffx vv σσσ +=

Notes

Micromécanique des composites août 2005

µB

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 12: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel. Approche simple de la contrainte ultime B2 Juste avant la rupture des fibres, lorsque celles-ci subissent la contrainte σf

R, la matrice est soumise à la contrainte σ'm.

Comme εx = εm = εf a déformation du composite étant

alors εfR (cf. Fig. B2, à gauche). Si la matrice est toujours élastique, on a alors :

(B2) f

mRfm

Rfm

E

EE σεσ =='

Si la matrice a dépassé la limite d'élasticité, on a alors (cf. Fig. B1 à droite) :

(B2a) constante' == élastfm σσ

Après rupture de toutes les fibres dans une section droite, la matrice subit une surcharge dans ce plan (cf. Fig. B2, à droite). La contrainte maximale que subit alors la matrice est donnée par l'Équ. B1 en mettant σf = 0 :

(B3) m

xm v*

σσ =

Selon la valeur de vm et donc de vf, σm* peut excéder ou

non la limite σmélast ou σm

R. Taux de fibres élevé

Dans ce cas, la limite de la matrice est aussi atteinte et le composite est réputé rompu. La contrainte à rupture du composite est alors donnée à partir de l'Équ. B1 (cf. Fig. B3), par :

(B4) mmfR

fR

x v'v σσσ +=

Taux de fibres faible

Ici, lorsque les fibres sont rompues, le composite résiste encore à l'effort car la matrice n'est pas rompue (σm* < σm

R). Le composite se rompra quand la contrainte dans la matrice va atteindre la limite. L'Équ. B3, avec σm* = σm

R conduit finalement à (cf. Fig. B3) :

(B5) mR

mR

x vσσ =

Il est à remarquer, comme on peut le voir sur la Fig. B2, que la contrainte dans les fibres est nulle au droit des ruptures et qu'elle croît de part et d'autre sous l'effet d'un rechargement dû aux interfaces. Il en résulte que, sur une certaine longueur, les fibres subissent encore la contrainte qui a conduit à leur première rupture. Par conséquent, les fibres peuvent encore se rompre et on assiste alors à une fragmentation (rupture multiple) des fibres. La Fig. B3 montre la résistance ultime du composite en fonction de la fraction volumique des fibres. En dessous de vfcrit., il y a rupture multiples de fibres (elle a lieu au point A, pour un vf donné). Nous verrons plus loin que la distance entre ruptures de fibres permet d'accéder à des caractéristiques interfaciales.

Notes

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Page 13: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite unidirectionnel. Approche simple de la contrainte ultime B3

σ'm vf

0 1vfmin.vf

crit.

σmR

σfR

Equ. B4

Equ. B5A

B

σxR

Figure B3 : cas où εfR < εmR

Si le taux de fibres est supérieur à vfcrit., la rupture des fibres est suivie immédiatement de la rupture du composite (là interviennent les effets d'interfaces et de distribution des résistances des fibres, qui seront étudiés plus loin). La fraction vfmin. est la fraction de fibres minimale pour avoir renforcement de la matrice (résistance du composite supérieure à celle de la matrice). Les composites utilisés dans la pratique possèdent une fraction de fibres élevée (de 0,4 à 0,6), ils présentent donc une résistance ultime donnée par l'Équ. B4 et leur allongement à rupture est voisin de εfR. Dans la réalité, la résistance des fibres est largement distribuée et est décrite par la statistique de Weibull (voir Fiche C), ce qui est contraire aux hypothèses faites ici. La résistance ultime axiale des composites dans la pratique est cependant bien décrite par la Fig. B3 en prenant à la place de σf

R la valeur moyenne de la

résistance des fibres <σfR>. Cela provient d'un effet

d'écheveau de fibres dont le longueur est inférieure à celle du composite sollicite (voir Fiche D et suivantes).

3. Contrainte ultime axiale (cas où εεεεfR > εεεεmR)

C'est le cas typique des composites à matrice fragile, céramique, ou organique à basse température. Maintenant, le premier endommagement a lieu dans la matrice. Il s'agit d'une fissure qui traverse toute la section droite du composite en contournant les fibres (Fig. B4) En fait, la fissure est déviée le long des interfaces fibre/matrice. Comme nous le verrons plus loin, si l'interface est trop tenace, la fissure n'est pas déviée et les fibres sont alors aussi rompues à cause des concentrations de contrainte en fond de fissure : il n'y a alors pas de renforcement. Le composite se rompt à cause du défaut le plus critique dans la matrice, ce qui est sans intérêt.

Notes

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Composite unidirectionnel. Approche simple de la contrainte ultime B4

σ σ

avant rupture après rupture

σ*f

σmR

σ' f

Figure B4 : rupture de la matrice

La contrainte maximale des fibres surchargées est aussi donnée par l'Équ. 1, mais avec σm = 0. On peut donc décrire les deux scénarios avec un raisonnement tout à fait symétrique au précédent. Taux de fibres élevé

Malgré la surcharge induite, les fibres n'atteignent pas leur limite de rupture. Le composite se rompra plus tard si σf* = σf

R, et on obtient, à partir de l'Équ. B1 (avec σm

= 0) :

(B6) ffR

x vRσσ =

On voit sur la Fig. B4 que loin de la première fissure, la matrice supporte encore la contrainte σm

R et qu'elle peut donc encore se fissurer. Il y a donc fragmentation de la matrice avant la rupture du composite.

Cela est observé dans les composites à matrice céramique et nous verrons plus loin que ce mécanisme leur confère une "pseudo-ductilité" qui explique leur intérêt pratique. C'est aussi observé dans les bétons renforcés par une armature métallique ou dans les plaques de cloisons où le plâtre est renforcé par deux peaux en carton.

Enfin, les composites à matrice organique peuvent présenter une fragmentation de matrice lorsqu'ils sont portés à très basse température ; dans ce cas l'endommagement de la matrice se produit sous l'effet des contraintes thermiques résiduelles (voir Fiche E). Taux de fibres faible

Ici, les fibres peu nombreuses ne peuvent supporter la surcharge. Il y a donc rupture du composite immédiatement après fissuration de la matrice, à partir de l'Équ. B1, on a simplement :

(B7) mmffR

x vv' Rσσσ += avec :

(B8) m

fRmf

Rmf

E

EE σεσ =='

Ce cas de figure n'a pas d'intérêt dans la pratique. Le comportement du composite, avec εfR > εmR, est schématisé sur la Fig. B5. On voit qu'il y a renforcement même si le module d'Young des fibres est inférieur à celui de la matrice.

Notes

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Composite unidirectionnel. Approche simple de la contrainte ultime B5 La Fig. B5 est donnée implicitement avec le module des fibres supérieur à celui de la matrice (Ef > Em). Dans

le cas contraire, il y a toujours renforcement de la matrice, pourvu que le taux de fibres excède vf

min.

Attention, si les fibres se rompent en premier, Fig. B3, un module des fibres plus faible que celui de la matrice conduit toujours à une résistance du composite inférieure à celle de la matrice, même si vf > vf

min. Ce

cas n'a donc aucun intérêt pratique.

vf

0 1vfmin.vf

crit.

σmR

σfR

Equ. B6

Equ. B7

A

B

σxR

Εf > Εmσ' f

Εf < Εmσ' f

Figure B5 : cas où εfR > εmR

4. valeurs typiques de contraintes ultimes (voir aussi "Technologie des composites I" Renforts

Nature des fibres σfR

(GPa) εfR

(%)

Verre R 4,6−4,8 5,4

Verre E 3,5−3,8 4,5

Kevlar 49 (Du Pont) 3,6−4,1 2,8

Kevlar 149 (Du Pont) 3,4 2

Carbone S/HT 1,4−4,9 0,8−1,9

Carbone IM 2,3−7,1 0,8−2,2

Carbone HM 1,9−5,5 0,5−1,4

Carbone UHM 1,8−3,5 0,4−0,5

Bore (ø : 100 µm) 3,4 0,8

Al2O3 (3M Nextel 610) 3,2 <1

SiC (Nippon Carbon) 2 1

SiC (SCS 6, ø : 140 µm) 3,8 <1

Matrices thermoplastiques

Nature Matrices TP

σfR

(MPa) εfR

(%)

Polypropylène PP 31−42 100−600

Polyamide PA 6,6 70−84 150−300

Polyphénilène sulfuré 84 4

PPS

Polyéther cétone cétone PEEK

93 50

Matrices thermodurcissables

Nature Matrices TD

σfR

(MPa) εfR

(%)

Polyesters 50−75 1−1,6

Epoxy EP 60−85 1,5−8

Vinylester 70−81 3−8

Phénolique 60−80 1,8

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Micromécanique Composite unidirectionnel. des composites Contrainte ultime sous autres sollicitations µB1août 2005 D. Rouby

 

  La  contrainte  ultime  en  traction  longitudinale,  où  le  comportement  est  essentiellement  contrôlé  par  les  fibres,  est traité dans le module B.   Le présent module B1 traite des contraintes ultimes sous autres sollicitations, comme la compression longitudinale et transversale, la traction transversale et le cisaillement dans le plan. Elles sont surtout contrôlées par la matrice.    Un certain nombre de critères sont présentés, mais non pas établis. Pour plus de détail, voir la bibliographie en fin.  

  

  Dans l'approche macro, les contraintes ultimes ont été notées comme suit (cf. Fiche Macro M5) :  

­ Traction longitudinale :   σx ultime  = X 

­ Compression longitudinale :   ­σx ultime  = X' 

­ Traction transversale :  σy ultime  = Y 

­ Compression transversale :  ­σy ultime  = Y' 

­ Cisaillement dans le plan :  σs ultime  = S  

On utilisera les mêmes notations ici.  1. Compression longitudinale    Lorsque  l'effort  de  compression  est  parallèle  à  la direction des fibres, plusieurs modes de rupture peuvent être observés (Fig. B1.1, ci­contre).  

  Dans  le  cas  de  la  compression  axiale,  le  phénomène qui  prime  est  le  flambement  des  fibres (microflambement).  Celui­ci  ne  doit  pas  être  confondu avec le flambement à l'échelle macroscopique d'une pièce comprimée.    Pour  caractériser  le  comportement  en  compression d'un  matériau,  on  doit  prendre  des  précautions  pour éliminer  les  risques  de  flambement  macroscopique  de l'éprouvette  (les  essais  de  compression  sur  composites sont décrits dans le module Macro M6).   Le  problème  de  la  compression  d'un  composite unidirectionnel  est  donc  la  tenue  latérale  des  fibres  qui est, en principe, le rôle de la matrice. En ce qui concerne les  fibres,  on  conçoit  aisément  que  des  défauts  de rectitude ou d'alignement vont jouer un rôle important.   Qualitativement,  les  facteurs  qui  conduisent  à  une diminution  de  la  résistance  en  compression  axiale  sont les suivants :  • Fibres : 

­ faible  diamètre,  (les  fibres  constituées  de  fibrilles  ou anisotropes, comme les fibres de Kevlar et de carbone, sont elles­mêmes moins résistantes au flambement) ; 

­  mauvais alignement, ou ondulations ; 

­ distribution inhomogène  :  la  rupture  s'amorce  où  les fibres  sont  resserrées  car  le  voisinage  est  alors  plus riche en matrice ; 

­ ondulations  préalables  des  fibres  (elles  peuvent  être induites  par  des  contraintes  thermiques  résiduelles  de compression), 

­ faible  résistance  en compression  (cas  des  fibres  de Kevlar qui subissent elles­mêmes une fibrillation) et en cisaillement. 

a b

x y

c d

 Figure B1.1 Principaux  modes  de  rupture  en compression. a : flambement coopératif des fibres b : flambement localisé des fibres c : fissure parallèle à la direction de l'effort d : cisaillement des fibres et de la matrice  

Notes 

              

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  Composite 1D. résistance sous autres sollicitations  B1.2

Notes • Matrice : 

­ faible module d'élasticité ;   ­ faible  accrochage  avec  les  fibres  (pas  d'adhésion  à   l'interface  fibre/matrice  ou  décohésion  induite  pas  le retrait lors de la polymérisation) ;   

­ Forte  teneur  en  humidité  (la  matrice  polymère  a   tendance  à  présenter  dans  ce  cas  une  plasticité  plus prononcée) ;   

­ faible limite élastique (métaux).    

• Interface fibre/matrice faible.   • Porosité élevée : certaines fibres perdent leur efficacité   

vis  à  vis  de  la  compression  du  fait  de  présence  de pores  dans  leur  voisinage,  ce  qui  facilite  leur   flambement.   

 

 Les figures B1.2 et B1.3 illustrent certains de ces effets.    

   1.1. Critère de Agarval et Broutman [2]      Le premier critère qui peut être envisagé se base sur la déformation transversale εy induite par l'effet de Poisson 

(coefficient  de  Poisson  axial  :  νyx).  Il  y  a  rupture  en   compression si elle atteint une valeur ultime  εyR :   

Rε      X '1=Ex y

  (B1.1) ν yx  

 

Il  faut  noter  qu'il  n'y  a  ici  aucune  contrainte  appliquée   transversalement !   Ce  critère  donne  des  résultats  en  accord  avec   l'expérience  dans  certains  cas,  mais  ne  peut  être recommandé  pour  une  utilisation  générale.  Il  pourrait être représentatif du comportement décrit par la Fig. B1.1   en  (c).  On  peut  observer  ce  comportement  avec  les composites  à matrice  fragile,  comme  les  stratifiés  tissés   carbone/ carbone ou céramique/céramique, par exemple. La rupture se produisant alors entre les strates.     1.2. Critère en cisaillement    

  Dans  le  cas  d'une  rupture  par  cisaillement  des   constituants  (cf.  Fig.  B1.1,  cas  d),  une  approche  très simplifiée peut être faite en considérant que la  contrainte de  cisaillement,  induite  par  l'effort  de  compression,  est   maximale à 45° et qu'elle atteint une limite à cause de la rupture en cisaillement des fibres : 

    X ' ≈ 2 τ R v   (B1.2) 1 f f  

où τfR est la contrainte de cisaillement ultime des fibres.   La contrainte transmise par la matrice est négligée (taux de fibres vf élevé).   Ce  critère  pourrait  s'appliquer  à  des  fibres  ductiles   (métalliques)  si  la  limite  de  compression  en microflambement n'est pas atteinte avant.   

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Composite 1D. résistance sous autres sollicitations B1.3

1600

Des fibres fragiles se comporteraient plutôt comme 1400

décrit sur la Fig. B1.1 en (b) avec une double rupture des 1200

X' (MPa)

Carbone/époxy

fibres HT ou HS

"haute résistance"

fibres HM

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7

fibres où le rayon de courbure est le plus petit, mais le 1000

paramètre τfR est alors difficilement accessible. 800

La Fig. B1.2 illustre l'influence de la résistance en 600

cisaillement des fibres, dans le cas de fibres de carbone. Les fibres à haut module longitudinal (HM), où la microstructure est mieux orientée, sont moins résistantes en cisaillement et l'interface fibre/matrice est aussi plus faible.

1.3. Critères basés sur le microflambement [3]

Dans les composites à matrice organique, du fait des différences entre les coefficients de dilatation thermique, les fibres sont souvent en compression. Et, comme la matrice est très flexible, les fibres prennent alors une

400 "haut module"

200

0

Fraction volumique de fibres

Figure B1.2 Carbone/époxy unidirectionnel. Contrainte ultime en compression axiale en fonction de vf pour deux types de fibres de carbone (repris de [1]).

Carbone/époxy

mode en cisaillement

mode en extension

1400 X' (MPa) certaine ondulation qui s'ajoute aux désorientations préexistantes, inhérentes au procédé d'élaboration. Cette 1200

ondulation est l'amorce du microflambement. 1000

La recherche d'un critère est basée sur la stabilité d'un 800

système composite constitué d'un empilement de plaques 600

rigides (représentant les fibres) et de plaques flexibles (la matrice). 400

Les ondulations en opposition de phase, ou mode en 200 extension (Fig. B1.4 a), sont un cas d'école qui peut être

0envisagé si le taux de renfort, vf, est faible. Dans ces -100 -50 0 50 100 150 200

conditions, la contrainte ultime associée à l'instabilité en Température microflambement s'écrit :

Figure B1.3 21

⎤ ⎥⎦

⎡ ⎢⎣

E E vm f f Carbone/époxy unidirectionnel. Contrainte ultime en compression axiale en faible : ' 2 v (B1.3) Xvf = 1 f 3 vm fonction de la température (repris de [1]).

Dans le cas d'un taux de renfort élevé, les ondulations sont en phase et les déplacements latéraux sont principalement contrôlés par le module de cisaillement de la matrice, Gm (Fig.. B1.3 b). La contrainte ultime s'écrit alors :

Gmélevé : X ' = (B1.4) vf 2 1 − vf

Le résultat de Ladougas et al. (cité par [4]), également issu d'une analyse de la stabilité élastique d'un solide inhomogène et anisotrope, est donné par l'expression suivante :

a

où E : module de cisaillement du composite, et : s

E − Ef mK = , s = sin(π vf ) , c = cos(π vf ) Figure B1.4 2π Ex Modes de microflambement du renfort. Ce critère a l'intérêt de donner des résultats plausibles a : mode en extension, taux de fibres faible.

à la fois pour un taux de fibres faible et élevé (cf. Fig. b : mode en cisaillement, taux de fibres B1.5). élevé.

D'autres résultats sont présentés dans la référence [4].

b

]csK[c1 8−+ +' (B1.5) X = E3 s 1 + sK[2c − 8sK ]

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  Composite 1D. résistance sous autres sollicitations  B1.4   Le mode en extension est aussi favorisé si la matrice  Résistance en compression longitudinale (MPa)

est très flexible. C'est le cas, par exemple, au­dessus de la  5000

température  de  transition  vitreuse  ou  de  ramollissement (cf. Fig. B1.3).  4000  

  D'une manière  générale,  on  prend  pour  la  résistance en compression axiale, la valeur la plus faible donnée par les expressions précédentes.  Il faut cependant remarquer  3000

X'1 X'2 que ces critères ne donnent donc qu'un ordre de grandeur.  2000

Le choix d'un critère doit donc être validé par des essais mécaniques. 

que l'accord entre ces critères et l'expérience est faible et 

1000  X'32. Traction transversale 

  0   Sous  sollicitation  en  traction  transversale,  l'état  de  0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7

contrainte dans le composite est inhomogène.  Fraction volumique de fibres  Figure B1.5   Évolution de  la  résistance en 

 

a  b compression  axiale  selon  les  différents modèles. Cas du verre/polyester.  Ef = 72 GPa ; νf = 0,24 ; Em = 3 GPa ; νm = 

0,35.  

Figure  B1.6    Zones  de  surcontraintes  dans  la  matrice  Notes 

entre  les  fibres  en  l'absence  d'adhésion  entre  fibre  et   matrice (a) et dans le cas d'une forte adhésion (b).      Si  l'adhésion entre fibre et matrice est faible (cf. Fig. B1.6(a)), la résistance ultime du composite est contrôlée par  la  résistance  de  la  matrice  dont  la  section  est  tout   simplement réduite du fait de la présence des fibres. On a alors, pour un arrangement carré des fibres : 

⎛ ⎞   (B1.6) 

  

vf⎜⎜⎝

⎟⎟⎠

R m 1 2Y σ1 −    =

π

Pour vf = 0,785, les fibres sont en contact et la résistance chute à zéro. Elle est est réduite à un tiers pour vf = 0,4.   Si  l'adhésion  est  forte,  il  y  a  des  concentrations  de   contrainte  dans  la  matrice  près  des  interfaces  et  qui proviennent  de  la  différence  de  rigidité  entre  fibres  et   matrice. Pour un arrangement carré des fibres, le rapport kσ  entre  la  contrainte  maximale  dans  la  matrice  et  la contrainte de traction transverse appliquée est :  

1 − v [1 − (E E )]f m f    k =   (B1.7) σ  1­ 2 v π [1 − (Em Ef )]f

   kσ est de  l'ordre de 3 pour le bore/époxy, de 2,5 pour le verre époxy et de 2 pour le carbone époxy (vf = 0,6). La   concentration  de  contrainte  est  d'autant  plus  grande  et donc  la  résistance  transverse  d'autant  plus  petite  que  la fraction volumique de fibres est élevée.     La résistance transverse est enfin donnée par : 

1 résiduel )    Y = (Y*−σ r   (B1.8) 2kσ  σ max

  avec :  k =σ σ y appliqué  

R R R   et :  Y* = min[σ m;σ f, radial ;σ ]  interface  

Page 20: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Composite 1D. résistance sous autres sollicitations B1.5

La contrainte ultime est donnée par la plus petite des résistances de la matrice (σRm), des fibres (radialement : σRf,radial) ou des interfaces (σRinterface).

Le plus souvent, l'amorce de la rupture en traction transversale est la décohésion aux interfaces qui, comme l'illustre la Fig. B1.7, apparaît d'abord aléatoirement et finit par coalescer pour donner la rupture finale. Dans un composite réel, la répartition des fibres est toujours irrégulière et les décohésions apparaissent dans les zones où les fibres ont tendance à se toucher.

Dans l'expression précédente, le terme σrrésiduel est la contrainte radiale résiduelle agissant sur l'interface (cf. Fiche E), elle peut être due à l'incompatibilité thermique ou au retrait de la matrice du fait de la réticulation. Si l'interface est initialement en compression, il est plus difficile de la rompre en traction.

Il est bien évident que la porosité joue aussi un rôle important dans le comportement en traction transverse. Les pores interviennent par leur simple présence, mais aussi par le fait que certaines fibres n'adhèrent plus à la matrice (changement de mécanisme). Typiquement, une porosité de 5 % peut faire chuter la résistance transversale de moitié.

Notons enfin que la rupture d'une matrice fragile est contrôlée par les défauts préexistants et de ce fait les analyses précédentes, basées sur de simples contraintes ultimes, sont inadéquates.

La même conclusion qu'au §1 est à faire ici : la résistance en traction transversale dépend fortement d'un trop grand nombre de paramètres microstructuraux qui sont généralement mal connus. Il est donc nécessaire de recourir à des formules empiriques et de les valiser par des essais mécaniques.

3. Compression transversale

Sous compression transversale, un grand nombre de mécanismes peuvent conduire à la rupture d'un composite unidirectionnel. La contrainte maximale de cisaillement opère sur toutes les surfaces à 45° de la direction de compression. Mais comme on le voit sur la Fig. B1.8, ci­dessous, le détail du champ de contrainte local dépend de l'orientation des fibres. Le mode de rupture (a) est le plus souvent observé.

4. Cisaillement dans le plan

C'est typiquement le seul mode de chargement qui conduit à un comportement non­linéaire des composites à matrice organique, à cause de la plasticité de la matrice.

Comme pour la traction transverse, ce sont les concentrations de contrainte au voisinage des fibres qui contrôlent la rupture en cisaillement.

La Fig. B1.9 illustre schématiquement ce qui se passe, soit dans la matrice, soit aux interfaces.

a b

c d

Fig. B1.7 Les schémas a, b, c, d montrent une séquence typique de décohésions aux interfaces. Elles ont tendance à s'étendre aux voisines et à coalescer.

ba

Fig. B1.8 : compression transverse

Figure B1.9 : cisaillement dans le plan

Pour en savoir plus : [1] D. Hull, An introduction to composite materials, Cambridge University Press (1981).

[2] B.D. Agarval et L.J. Broutman, Analysis and performance of Fiber Composites, John Wiley & Sons (1980).

[3] B.W. Rosen, Mechanics of Composite Strengthening, Chap. 3 in Fiber Composite materials, ASM, Metals Park, OH (1965).

[4] K.K.U. Stellbrink, Micromechanics of Composites. Composite Properties of Fibre and Matrix Constituents. Carl Hanser Verlag, Munich (1996).

(voir aussi le classeur EXCEL "Micomécanique")

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.

Page 21: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Résistance mécanique des solides fragiles.

Statistique de Weibull. D. Rouby

Wallodi WEIBULL, A statistical Theory of the Strength of Materials, Royal Swed. Inst. for Eng. Res., (1939) 151. Wallodi WEIBULL, A statistical distribution function of wide applicability, J. Appl. Mech., 18 (1951) 293-296.

1. Résistance des solides fragiles

Lorsqu'un lot de matériaux fragiles est soumis à des essais mécaniques, on observe les constatations suivantes : - la contrainte ultime est fortement dispersée, - la contrainte ultime moyenne dépend du volume de matière sollicité. Cela provient du fait que la rupture du matériau est due à la propagation d'un défaut préexistant et que les défauts préexistants présentent des tailles (ou des sévérités) qui sont distribuées. La statistique de Weibull permet de décrire ce comportement.

L'analyse sera faite sur des filaments où n'intervient qu'une dimension. A la fin, on donnera des indications sur l'effet de volume en général. 2. Probabilité de rupture

La rupture des solides fragiles est contrôlée par le défaut le plus critique : le maillon le plus faible. Nous sommes donc en présence d'un système mécanique en série : - il est rompu si un des maillons est rompu, - il est survivant si tous les maillons le sont.

• La fibre est constituée de ω maillons en série. Chaque maillon subit une contrainte qui dépend de la façon dont est chargée la fibre.

1 i ω

σ

L

dx • Les propriétés des maillons reflètent la distribution des défauts. La probabilité de trouver un défaut de sévérité donnée dans un maillon est constante pour le matériau considéré.

σ

F11

0

résistance théorique

domaine de résistance usuelle

Figure C2

La densité de probabilité que le maillon se rompe si la

contrainte est comprise entre σ et σ + dσ est : f1(σ).

Notes

Micromécanique des composites août 2005

µC

Figure C1

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Page 22: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Statistique de Weibull C2

La probabilité cumulée pour que le maillon soit rompu à la contrainte est donnée par :

(C1) ∫=σ

σσσ0

11 )()( dfF

et schématisée dans la Fig. C2. F1(σ) rend compte d'une distribution de défauts le

long de la fibre ; chaque défaut, relatif à un maillon détermine une "résistance locale". • Weibull a proposé l'expression suivante :

(C2) m

uLF

−=

01 )(

σ

σσσω , avec :

m : module de Weibull, rend compte de la largeur de la distribution. Si m est grand, la distribution est étroite.

σσσσ0 : facteur d'échelle, situe la résistance moyenne (cf. Équ. C13).

σσσσu : contrainte seuil. Il n'y a jamais de rupture pour σ <

σu. En général, pour les matériaux fragiles, on prend

σu = 0 ; c'est une option conservatrice et qui, de plus, simplifie la manipulations des expressions.

L : longueur testée. Selon la nature des défauts, on peut aussi prendre le volume V (ici ce serait L π R2) ou la surface latérale (2 π R L).

La probabilité de rupture du maillon s'écrit donc aisément (L/ω = dx, très grand nombre de défauts):

(C3) dxF

m

=

01 )(

σ

σσ

sa probabilité de survie s'écrivant alors :

(C4) )(1)( 11 σσ FS −=

• En ce qui concerne la fibre, elle est survivante si tous les maillons le sont. La probabilité de survie de la fibre s'écrit donc :

(C5) [ ]∏=

−=ω

σ1

1 )(1i

iS FP ou [ ]∑=

−=ω

σ1

1 )(1lnlni

iS FP

Comme F1(σi) << 1 (cf. Fig. C2) et que ω est très grand, il vient finalement :

(C6)

−= ∫

L m

S dxx

P

0 0

)(exp

σ

σ

La probabilité de rupture s'écrivant alors :

(C7)

−−=−= ∫

L m

SR dxx

PP

0 0

)(exp11

σ

σ

Notes

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Page 23: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Statistique de Weibull C3

L'influence du module de Weibull sur la probabilité cumulée et la densité de probabilité est illustrée sur la Fig. C3 ci-dessous.

2,01,51,00,50,0

Probabilité cumulée

m = 2 410

200,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

2,01,51,00,50,0

Densité de probabilité

m = 24

10

20

σfR <σf

R>

0,0

0,1

0,2

0,3

0,4

3. Essai de traction sur filament

Aspects expérimentaux

L

(a) (b) (c)

σfR σf

Figure C4

On procède à une série d'essais mécaniques selon la procédure décrite Fig. C4.

Le filament est collé à ses extrémités sur un cadre en papier (a). Les mors de la machine d'essai sont serrés sur les points de colle, on coupe le cadre et on applique ensuite une force croissante, donnant la contrainte appliquée σf (b). A rupture de la fibre, sa résistance est notée σf

R (c). Pour les fibres de renforcement, on utilise

généralement des séries de plus de 30 essais (N ≥30).

Notes

Figure C3

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Page 24: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Statistique de Weibull C4

Les résultats sont classés par ordre Les résultats sont classés par ordre croissant des σf

R. Pour une valeur donnée de σf

R on a alors n fibres rompues et l'estimateur de probabilité est :

(C8) N

nPR = si n est très grand,

et N

nPR

21−= , si n est limité (norme EN 843).

La résistance moyenne est donnée par :

(C9) ∑>=<N

Rf

Rf

Nσσ

1

Probabilité de rupture du filament Pour l'essai de traction : σ(x) = σf, uniforme. La

probabilité de rupture s'écrit donc simplement :

(C10)

−−=

mf

R LP0

exp1σ

σ

Résistance moyenne. Elle est donnée par :

(C11) ∫>=<1

0Rf

Rf dPσσ

ou par (cf. Fig. C5)

(C12) ( )∫∞

−>=<0

1 fRRf dP σσ

σf

1

0

PR

En posant u = L (σf /σ0)m, les Équ. C10 et C12 conduisent à :

( )∫∞

+−−>=<0

1110 exp duuu

Lm

m

m

Rf

σσ

où l'intégrale est la fonction gamma (cf. Annexe) et on obtient finalement :

(C13)

+Γ>=<

mL m

Rf

11

10σ

σ

Pour les valeurs usuelles du module de Weibull (3 < m < 20), la fonction gamma est voisine de 1 (cf. Annexe).

Remarque 1 : σ0 situe bien la valeur moyenne, mais n'est pas homogène à une contrainte. Certains auteurs écrivent la probabilité de rupture comme suit :

(C14)

−−=

mf

RL

LP

00

exp1σ

σ

L0 représente la longueur de jauge pour laquelle la résistance moyenne est σ0.

Notes

Figure C5

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Page 25: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Statistique de Weibull C5

Remarque 2 : la résistance moyenne dépend de la longueur testée. Un exemple est donné ci-dessous.

Longueur de jauge (mm)

Résistance moyenne (MPa)

100

1000

10000

100101

Verre E désensimé

Données de C. Ahlstrom, thèse INSA, L.M.M., 1990.

Remarque 3 : détermination pratique de m. L'Équ. C10 s'écrit aussi comme suit :

( ) ( ) ( )0lnlnln1

1lnln σσ mmL

P

Rf

R

−+=

Le terme de gauche de l'équation précédente, calculé à l'aide d'une des expressions C8, est tracé en fonction du logarithme des contraintes à rupture.

8,28,07,87,67,47,2

-4

-3

-2

-1

0

1

2

ln σfR (σf

R en MPa)

ln ln 11 - PR

Verre E 31 essais m = 7,1

<σfR> = 2325 MPa [359,6]

La pente de la droite donne le module de Weibull m. Un exemple est donné Fig. C7. Cette procédure permet de vérifier si le comportement est bien décrit par la statistique de Weibull et de détecter des éventuelles distributions bimodales.

Une méthode rapide d'estimation de m est basée sur le coefficient de variation (écart type / moyenne) qui est donné par :

(C15) ( )( ) mm

m

moyenne

typeécart 2,11

11

2121

2≈

+Γ=

Notes

Figure C7

Figure C6

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Page 26: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Statistique de Weibull C6

4. Effet de volume et mode de chargement La probabilité de rupture est le résultat d’une intégration sur un volume contraint (Équ. C7). Jusque là, nous avons considéré que la contrainte est uniforme dans ce volume et l’intégration est donc simple. Dans de nombreux cas, comme la flexion par exemple, la contrainte n’est pas uniforme dans le volume et l’intégration de l’ Équ. C7 conduit à un facteur multiplicatif C(m). L'Équ. C13 peut alors s'écrire sous la forme générale suivante :

(C16) ( )

+Γ>=<

mVmC

m

Rf

11

10σ

σ

Le coefficient C(m) dépend du mode de chargement. Par exemple, avec un barreau prismatique (V = B w L) :

- Traction uniaxiale :

(C17) C(m) = 1

- Flexion 3 points (L : distance entre appuis) :

(C18) ( ) ( )[ ] mmmC

1212 +=

- Flexion 4 points avec L = 2 d : (d : distance entre appuis internes)

(C19) ( ) ( )m

m

mmC

12

2

14

+

+=

- Flexion 4 points avec L = 3 d :

(C20) ( ) ( )m

m

mmC

12

3

16

+

+=

Annexe : Fonction gamma ou intégrale d'Euler Elle s'écrit :

(C21) ( ) ( )∫∞

−−=Γ0

1exp duuuy y

et possède les propriétés suivantes :

(C21) Γ(1 + y) = y Γ(y) (y > 0)

(C22) Γ(1) = 1

Notes

La Table C1 donne ci-dessous les valeurs de Γ(1 + 1/m).

m 1 2 3 4 5 6 7 8 10 15 20 50

Γ(1 + 1/m) 1 0,886 0,893 0,906 0,918 0,927 0,935 0,943 0,951 0,966 0,973 0,989

Table C1

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Page 27: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Comportement de l'écheveau sec de fibres.

Un composite sans transfert de charge. D. Rouby

H.E. Daniels, The statistical Theory of the Strength of Bundles of Threads, Proc.Roy. Soc. A 183, (1945) 405-435. A. Kelly and L.N. McCartney, Failure by stress corrosion of bundles of fibres, Proc.Roy.Soc. A 374 (1981) 475-489.

On considère ici le comportement d'un ensemble de fibres parallèles. Il s'agit donc d'un composite très simplifié : il ne possède pas de matrice, mais les fibres ont des résistances distribuées qui suivent la statistique de Weibull.

1. L’écheveau sec de fibres

Le système considéré est constitué de N fibres équitendues, toutes de longueur L.

FE

N filaments parallèles

L

La charge appliquée sur l'ensemble FE est répartie uniformément sur toutes les fibres survivantes ; cela correspond au schéma de report de contrainte "démocratique" (cf. Fiche µH). Dans les fibres rompues, la contrainte est nulle sur toute la longueur : il n'y a donc pas de transfert de charge via les interfaces. La contrainte nominale dans l'écheveau est :

(D1) 2RN

FEE

πσ =

si on suppose que les fibres ont toutes le même diamètre. La déformation de l'écheveau εE est équivalente à celle des fibres survivantes εf. Comme les résistances des fibres sont distribuées, les ruptures ont lieu en séquence et cela est décrit sur la Fig. D2 ci-contre. L'écheveau est constitué ici de 6 fibres, de même module d'Young Ef et dont les résistances sont spécifiées en (a). La pente à l'origine, en (b) et en (c), est liée au module des fibres Ef. La première fibre se rompt lorsqu'elle atteint sa déformation à rupture. Il en résulte un allongement supplémentaire des fibres survivantes et une rigidité plus petite. Sur la Fig. D2, les comportements (b) et (c) sont respectivement relatifs au cas de déplacement imposé (machine dure) et de charge imposée (machine molle).

A la décharge, le système revient à l'origine : il s'agit donc d'un exemple de comportement élastique endommageable. Pour un certain nombre de fibres rompues, le système est instable. Les fibres survivantes subissent un effort qui excède leur résistance. La résistance de l'écheveau est donc définie par la contrainte nominale maximale atteinte.

σf

εf

FE

εE

6/64/6

2/61/6

(a)

(b)

FE

εE

6/64/6

2/61/6

(c)

Figure D2

Notes

Si le nombre de filaments est très grand, la loi de comportement est lisse, non linéaire (Fig. D3).

σE

εE

σEmax

Micromécanique des composites août 2005

µD

Figure D1

Figure D3

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Page 28: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

L'écheveau sec de fibres D2

2. Résistance de l'écheveau

Si on applique FE (ou σE), il y a n fibres rompues pour un total de N éléments. La contrainte effective dans les fibres survivantes, notée σef, est donnée par :

(D2)

−=N

nefE 1σσ

Le rapport n/N est en fait la probabilité de rupture des fibres (cf. Fiche µC) :

(D3)

−−==

mef

efR LPN

n

0

exp1)(σ

σσ

et il vient finalement :

(D4)

−=

mef

efE L0

expσ

σσσ

Condition d'instabilité

On cherche la contrainte maximale σEmax telle que

dσE/dεE = 0 (cf. Fig. D3) (critère de Considère). Or, pour

les fibres survivantes nous avons : εE = εef. Les fibres

étant élastiques, nous avons aussi : σef = Ef εef. Le critère de limite s'écrit donc finalement :

(D5) 0== fef

E

E

E Ed

d

d

d

σ

σ

ε

σ

Si on dérive l'Équ. D4, on obtient :

(D6)

−=

mef

mef

ef

E LmLd

d

00

1expσ

σ

σ

σ

σ

σ

et le critère (Équ. D5) donne la condition d'instabilité :

(D7) Lm

mef 1*

0

=

σ

σ

Au début de l'instabilité, les fibres survivantes subissent la contrainte σef*. 3. Taux critique de fibres rompues

La condition D7 introduite dans l'expression de la probabilité de rupture (Équ D3) donne :

(D8)

−−==m

PN

nR

1exp1*

*

où n*/N est la proportion de fibres rompues à l'instabilité (Fig. D4). Pour m = 0, l'instabilité n'apparaît qu'à la rupture de la dernière fibre. Si m est très grand (pas de dispersion des résistances), l'écheveau se rompt dès la rupture de la première fibre. Des valeurs de n*/N sont données en fonction du module de Weibull dans le Tableau donné en fin.

nN

n*N

1

σef

σef∗

instabilité

Remarque : l'instabilité peut apparaître plus tôt si un phénomène de propagation sous critique affecte les défauts initiaux (cf. Kelly-McCartney). Propagation sous-critique : propagation de la fissure, plus ou moins lente, sous K < KIc.

Notes

Figure D4

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Page 29: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

L'écheveau sec de fibres D3

4. Contrainte nominale critique

A partir des Équ. D2, D7 et D8 on obtient facilement l'expression de la contrainte maximale (résultat de Daniels) :

(D9) mmmE

eLm 1110max σ

σ =

On voit que la contrainte ultime de l'écheveau diminue quand la longueur utile de l'écheveau augmente. Cet effet de taille provient simplement de la probabilité de rupture des fibres individuelles (cf. Équ. C10 et Fig. C6, Fiche µC).

5. Comparaison avec <σσσσfR>

La résistance moyenne d'un grand nombre de fibres testées individuellement est donnée par (cf. Équ. C13) :

(D10)

+Γ=><mL m

Rf

11

10σ

σ

et on obtient finalement, avec l' Équ. D9, l'expression suivante :

(D11) ( )mem mmR

f

E

11

111

max

+Γ=

>< σ

σ

La contrainte ultime d'un écheveau, où joue le report de charge d'une fibre rompue aux survivantes, est donc toujours inférieure à la résistance moyenne des fibres prises individuellement. La Fig. D5 ci-dessous montre l'évolution de σE

max/<σfR> en fonction du module de Weibull, dans le

cas du verre. Pour une valeur typique de m = 10, l'écheveau présente une résistance plus faible d'environ 30% par rapport à la résistance moyenne des fibres.

100101Module de Weibull

σEmax < σf

R>

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

Tableau : effet du module de Weibull sur n*/N

Notes

m 1 2 3 4 5 6 7 8 10 15 20 50 n*/N 0,632 0,393 0,283 0,221 0,181 0,154 0,133 0,118 0,095 0,064 0,049 0,020

Figure D5

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Page 30: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Contraintes thermiques résiduelles

D. Rouby

Gabriel LAMÉ, Sur la théorie mathématique de l'élasticité des corps solides, Imprimerie de Bachelier, Paris, 1852.

H.J. OEL et V.D. FRECHETTE, Stress distribution in multiphase systems : II, composite disks with cylindrical interfaces, Journal of American Ceramic Society 69 (1986) 342-346.

J.W. HUTCHINSON et H.M. JENSEN, Models of fiber debonding and pullout in brittle composites with friction, Mechanics of Materials, 9 (1990) 139-163.

Cette fiche traite des contraintes résiduelles (présentes sans sollicitation mécanique appliquée) induites par les incompatibilités de déformation dues aux différences entre les coefficients de dilatation thermique des différents constituants (misfit thermique).

Elle est complétée par la Fiche µE1 qui donne des lois des mélanges des coeff. de dilatation et qui étend le problème au cas Macro des composites stratifiés.

Ces Fiches donnent le détail des calculs et contiennent de ce fait de nombreuses équations.

L'analyse qui suit est simplifiée car on néglige les interactions entre les effets radiaux et longitudinaux. Une analyse complète est donnée dans l'article de Hutchinson et Jensen.

Il est judicieux d'aborder les cas plus complexes, comme l'interaction longi-trans ou la présence de plusieurs interphases, à l'aide de logiciels d'éléments finis. "RDM Le Mans" en est un, simple à utiliser.

1. Contraintes longitudinales

Les effets thermiques et mécaniques dans la direction radiale aux fibres, ainsi que les effets de Poisson entre fibre et matrice ne sont pas pris en compte ici. Le VER est de longueur infinie, on est loin d'une discontinuité.

T0

T < T0non liés

T < T0liés

fibrematrice

εfα

εmα

εmΤ

εfΤ

Figure 1

Les déformations, longitudinales, induites par la variation de température sont données par les expressions suivantes (cf. Fig. 1) :

(E1) )( 0TTff−= αε α

)( 0TTmm −= αε α

où αf et αm sont les coefficients de dilatation thermique des fibres et de la matrice, T0 est la température à laquelle le matériau est exempt de contrainte (température de consolidation de la matrice). On pose :

(E2) fm ααα −=∆

Notes

Micromécanique des composites août 2005

µE

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Page 31: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Contraintes thermiques résiduelles E2

(E3) 0TTT −=∆

εfT et εmT sont les déformations induites par le fait que les fibres et la matrice sont liées (cf. Fig. 1), elles développent des contraintes. Loin d'une discontinuité, les déformations totales sont uniformes et on a alors :

(E4) Tmm

Tff

εεεε αα +=+

En l'absence de chargement extérieur, la contrainte longitudinale moyenne est nulle (on néglige ici les effets dans la direction radiale) :

(E5) mTmf

Tfx vv0 σσσ +==

ce qui donne : f

mTm

Tf v

vσσ −=

et, sachant que Tff

Tf

E εσ = et Tmm

Tm E εσ = , il vient :

η

εεσ

Tm

ff

mmTm

ff

mTm

Tf E

E

Ee −=−=−=

v

v

v

v

avec :

(E6) mmff EE vv=η

A partir de E4 et du résultat précédent, on obtient finalement :

(E7) TTm ∆∆

+

−= α

η

ηε

1 et TT

f∆∆

+= α

ηε

1

1

avec, bien entendu :

(E8) Tff

Tf

E εσ = et Tmm

Tm E εσ =

Pour la plupart des composites : αm > αf, et s'il y a refroidissement après élaboration (T < T0), la matrice est en tension et les fibres en compression longitudinales.

Les tableaux ci-dessous donnent des ordres de grandeur numériques typiques.

Notes

FIBRES Ef (GPa) αf (MK-1) Carbone 250 longi. : 0

trans. : 7-12 Verre 72 15,5 Kevlar 125 longi. : -2

trans. : 59 SiC (Nicalon) 200 3

MATRICES Em (GPa) αm (MK-1) Epoxy 3-6 60 Polyester 2-5 100-200 Aluminium 70 23 SiC (CVD) 350 4,6 LAS 80-85 1

COMPOSITES (vf = 0,5) η T0 (°C) Carbone - Epoxy 41,7 < 150 Verre - Epoxy 12 < 100 SiC - Aluminium 2,86 600 SiC - SiC(CVD) 0,57 1000 SiC - Vitrocéramique LAS 2,5 1000

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Page 32: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Contraintes thermiques résiduelles E3

2. Contraintes radiales

On considère ici des disques concentriques (cf. Fig. 2), ce qui revient à ne pas prendre en compte les contraintes dans la direction longitudinale. On trouvera en Annexe les expressions où les couplages entre les directions x et r sont pris en compte. Le calcul qui suit est basé sur l'analyse de Lamé qui a été reprise par Oel et Frechette (voir page 1).

r

x

R

R'

Figure 2 Équilibre des contraintes

rdr

σϕ

rσ σr + dσr

Figure 3

Par unité d'épaisseur du disque, nous avons, dans fibre et matrice (cf. Fig. 3) :

0)()( =−−++ ϕσϕσϕσσ ϕ ddrdrddrrd rrr

ce qui conduit à : 0=−+ drdrdr rr ϕσσσ

et on obtient finalement :

(E9) 0=++rdr

d

r

rr ϕσσσ

Condition de continuité

u u+dudϕ

rdr

S S'

P P' Q Q' Figure 4

Les déformations sont données par les expressions suivantes, à partir de la Fig. 4 :

dr

du

dr

drdudr

PQ

PQQPr =

−+=

−=

''ε

r

u

ddr

drdur

PS

PSSP=

−+=

−=

ϕ

ϕϕεϕ

)(''

Soit :

(E10) dr

dur =ε et

r

u=ϕε

En différenciant εϕ, avec εr, on obtient :

0=−+ drdrdr rεεε ϕϕ

et finalement :

(E11) 0=−+rdr

d

r

rεεε ϕϕ

Lois d'élasticité

Elles sont exprimées ci-dessous dans le cas général, on les appliquera ultérieurement à la fibre et à la matrice.

xrrEEE

σν

σν

σε ϕ−

+−

+=1

xrEEE

σν

σσν

ε ϕϕ−

++−

=1

xrxEEE

σσν

σν

ε ϕ1

+−

+−

=

Dans l'hypothèse des contraintes planes (disque fin), σx = 0 et dσx /dr = 0, on a finalement :

(E12) ϕσν

σεEE

rr−

+=1

ϕϕ σσν

εEE

r1

+−

=

Évolution radiale des contraintes

Si on exprime l'équation de continuité (Équ. E11) avec les lois d'élasticité (Équ. E12), on obtient :

0)1()1( =+−+++−dr

d

dr

d

rr

rr ϕϕ σσνν

σν

σ

Comme l'Équ E9 donne aussi : dr

d

rr

rr σσσϕ+= ,

l'expression précédente devient simplement :

0=+dr

d

dr

d r ϕσσ

La différenciation de l'Équ. E9 donnant :

2

22

dr

dr

dr

d

dr

drr σσσϕ

+= ,

on obtient finalement l'équation différentielle suivante :

(E13) 032

2=+

dr

dr

dr

d rr σσ

La solution générale de cette équation est du type :

(E14) BrAr += −2σ

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Page 33: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Contraintes thermiques résiduelles E4

On a aussi, en utilisant l'Équ. E9 :

(E15) BrA +−= −2ϕσ

Conditions limites

• Dans la fibre (0 ≤ r ≤ R)

Les contraintes sont finies pour r → 0, la constante A est donc nulle et il vient : (E16) Cfrf == ϕσσ (0 ≤ r ≤ R)

La constante C est à déterminer. • Sur la frontière extérieure du VER (r = R')

La contrainte radiale est nulle sur le cylindre extérieur (matrice) : (E17) 0)'( =Rmrσ

• Sur l'interface (r = R)

Il faut l'équilibre des contraintes dans fibre et matrice : (E18) )()( RR mrrf σσ =

Il existe aussi une incompatibilité thermique due aux variations du rayon des deux constituants.

ruαRm,f

Figure 5 (cas où T > T0) La variation de rayon (pour fibre ou matrice) s'écrit :

(E20) )( 0TTr

u−== αε

ααϕ

et on a donc (cf. Équ. 2 et 3) :

(E21) Tfm ∆∆=− αεε α

ϕαϕ

Comme R(T0) est très peu différent de R(T), on peut écrire une expression analogue à (E4) :

(E22) Tmm

Tff ϕ

αϕϕ

αϕ εεεε +=+

fibre

matrice

R(T

)

R(T

0)

ufα

umα

umT

ufT

r

Figure 6 (cas où T > T0) Combinant (E21) et (E22), il vient finalement :

(E23) TRR Tm

Tf ∆∆=− αεε ϕϕ )()(

et : ...)(1

)( ++−

=∆∆ RE

RE

T Tf

f

Trf

f

fϕσσ

να

(E24) )(1

)(... RE

RE

Tm

m

Tmr

m

mϕσσ

ν−

−−

Si on récapitule les résultats précédants : CRrf =)(σ CRf =)(ϕσ

CBRARmr =+= −2)(σ , d'après (E18)

BRARm +−= −2)(ϕσ

0')'( 2 =+= − BRARmrσ , d'après (E17)

donc : 2'−−= RAB et )'( 22 −− −= RRAC L'Équ. E24 s'écrit alors :

(E25) ...112 +

++

−=

∆∆ −

m

m

f

f

EER

A

T ννα

−+

−+ −

m

m

f

f

EER

νν 11'... 2

Cas où le taux de fibres est très faible

C'est le cas d'une éprouvette monofilamentaire. Si R' >> R, vf → 0, R'-2 << R-2 et alors la constante

0' 2 =−= −RAB . On a alors : 2)()()()( −=−=== RARRRR T

mTmr

Tf

Trf ϕϕ σσσσ

(E26) TradRA σ=−2

La contrainte σTrad est la contrainte thermique résiduelle à l'interface fibre/matrice et l'Équ 25 devient dans ce cas :

(E27)

m

m

f

f

Trad

EE

T

ννα

σ+

+−

∆∆=

11

Remarque : Après refroidissement à partir de la température d'élaboration (T < T0) et si αm > αf , il

vient σTrad < 0 : la fibre est frettée thermiquement par la matrice. Cas où le taux de fibres est fini Pour le VER simple utilisé, cylindrique, on a :

(E28) 2222 ''v −−== RRRRf

et l'Équ E25 conduit à l'expression suivante :

(E29)

)v1(

)1(v11

fm

mfm

f

f

Trad

EE

T

−+++

∆∆=

ννν

ασ

Si l'épaisseur de la gaine de matrice diminue (vf augmente), la valeur absolue de la contrainte thermique résiduelle radiale diminue. Cela est illustré par les figures ci-dessous.

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Page 34: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Contraintes thermiques résiduelles E5

100101

0

5

10

15

20

100101

0

100

200

300

σradT (MPa)

σradT (MPa)

Verre / Epoxy

R'R

= 1vf

R'R

= 1vf

SiC / SiC

Figure 7 Effet de l'arrangement des fibres

Les calculs précédents ont été faits avec un VER cylindrique. Or, dans un composite réel, le voisinage d'une fibre donnée est constitué de fibres discrètes, qui de ce fait ne présente pas la symétrie cylindrique du VER utilisé. On doit donc s'attendre à ce que les contraintes thermiques résiduelles ne sont pas uniformes dans la direction circonférentielle.

L'exemple suivant, obtenu par une analyse aux éléments finis, est donné à titre d'illustration. Il est relatif à un composite carbone/époxy (vf = 50 % ;

∆T = -150 °C) où l'empilement des fibres est supposé carré (cf. Fig. 8).

r

ϕ

Figure 8

Notes

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Contraintes thermiques résiduelles E6

On constate (Fig. 9, en haut) que la contrainte σTrad dépend de l'angle ϕ, sa valeur moyenne étant

négative. Les évolutions de σTrad sont conditionnées par les variations de l'épaisseur de matrice entre les fibres voisines. A partir du VER cylindrique, on obtient σTrad = -11 MPa. Il apparaît aussi une contrainte de cisaillement circonférentiel τTrϕ, inexistante dans le cas du VER cylindrique, dont la valeur moyenne est nulle.

ϕ

ϕ

0-10 10 MPa

0-5 5 MPa

fibr

e

σradT (R)

r

τrϕT (R)

r

Figure 9

Annexe

La prise en compte des effets longitudinaux sur

la contrainte thermique résiduelle radiale et d'une éventuelle anisotropie des coefficients de dilatation, avec aussi ν = νf = νm, conduit à l'expression suivante (Hutchinson et Jensen) :

(E30) ( ) [ ]

)()v1(

)21(1

νλ

ννα

σ

+−

−++

∆∆=

fmf

xf

Trad

EE

EE

T

avec : λ = ∆α radial / ∆α longitudinal et mmffx EEE vv +=

La condition limite à la surface extérieure du VER, r = R', étant toujours σrm(R') = 0.

Notes

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Coefficients de dilatation thermique et d’expansion hygrométrique

D. Rouby

SCHAPERY R.A., Thermal expansion coefficients of composite materials based on energy principles. Journal of Composite Materials, vol. 2, pp. 380-404, 1968.

HALPIN J.C., Stiffness and expansion estimates for oriented short fiber composites. Journal of Composite Materials, vol. 3, pp. 732-734, 1969.

Ce Module vient en complément de la fiche E sur les contraintes thermiques résiduelles dans un composite unidirectionnel. On s’intéresse ici plus particulièrement à la détermination des coefficients de dilatation thermiques d’un composite unidirectionnel à partir de ceux de ses constituants. Les problèmes de gonflement dû à l’absorption d’humidité et de retrait dû à la polymérisation peuvent être abordés de façon tout à fait similaire.

La prise en compte de ces effets dans l’analyse des matériaux stratifiés (cf. les Modules Macro) est évoquée à la fin de cette fiche. Il s’agit d’outils pour évaluer les contraintes thermiques résiduelles dans un stratifié et ses coefficients de dilatation.

On utilise les indices "bas" habituels : • fibres et matrice : indices respectifs f et m. • directions : x (longitudinal), y (transversal) et s (cisaillement de type xy). Les indices "hauts" sont définis comme suit : • εi

α, εiβ, εiγ : déformations non mécaniques induites respectivement par la dilatation thermique, l'expansion due à l'humidité et le retrait de polymérisation. À l'échelle considérée (fibre/matrice, pli 1D, stratifié) elles ne génèrent pas directement de contraintes. • εi

T, σiT, kiT sont relatifs à ce qui est induit par

les incompatibilités de déformation, à chaque échelle considérée. • εi

S, kiS sont les déformations finales du stratifié

(S). Elles correspondent donc à εiα et kiα , à

l'échelle de la réponse thermique du stratifié pris dans son ensemble. 1. Les déformations non mécaniques Il s’agit de déformations induites par des effets thermiques ou physico-chimiques. Elles ne génèrent pas de contraintes directement. D’une manière générale, on les note :

efx , efy et efs (efs = 0)

emx , emy et ems (ems = 0)

Les déformations en cisaillement sont nulles car on considère que les constituants sont isotropes, et on peut aussi écrire :

efx = efy = ef ; emx = emy = ef

En ce qui concerne le composite, suivant les directions d’orthotropie, on a alors les déformations non-mécaniques suivantes :

ex (longi.) et ey (trans.) ; es = 0 (cis.) 1.1. Dilatation thermique Dans ce cas, on a (cf. Équ.E1, fiche E) :

(E1.1) ef = εfα = αf (T – T0)

em = εmα = αm (T – T0)

et (E1.2) ex = εxα = αx (T – T0)

ey = εyα = αy (T – T0)

où αi est un coefficient de dilatation thermique (supposé linéaire), et T0 est la température de référence (le plus souvent celle à laquelle le composite est exempt de contraintes (usuellement la température d’élaboration) et T est la température actuelle. La Fig. 1 ci-dessous montre ces déformations non mécaniques dans le cas d’un refroidissement après élaboration.

T0

T < T0non liés

T < T0

fibrematrice

εfα

εmα

εmΤεf

Τ

liés

εyα

εxα

Figure 1 Schéma des différentes déformations induites par une excursion thermique. 1.2. Expansion hygroscopique On définit les coefficients suivants :

(E1.3) ef = εfβ = βf cf

em = εmβ = βm cm

et (E1.4) ex = εxβ = βx c

ey = εyβ = βy c

Micromécanique des composites août2005 µE1

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Dilatation thermique E1.2

où βi est un coefficient de gonflement dû à l'absorption d'eau. Les termes cf et cm sont les concentrations d’humidité (massiques) dans les fibres et la matrice ; dans le composite elle est notée c. Dans un composite exempt de porosité, on peut alors écrire :

(E1.5) c = cf mf + cm mm

avec mf , mm , les fraction massiques des constituants (cf. Fiche A). En introduisant les masses spécifiques, on a finalement la relation suivante entre les différents taux de porosité :

(E1.6)

cm = c ρ

vm ρm + vf ρf cfcm

Les fibres de verre et de carbone n’absorbent pas d’humidité (cf = 0), ce n’est pas le cas de la fibre de kevlar. Les matrices polymériques peuvent retenir jusqu’à 8-10% d’humidité. 1.3. Retrait de polymérisation Il concerne uniquement la matrice polymérique. Ce retrait est typiquement de 3 à 6 % : em = εmδ = - 0,03 à -0,06. 2. Estimation des coefficients

de dilatation thermique Le problème a déjà été abordé en partie dans la Fiche E. On considère les expressions de base et les conditions limites suivantes :

• Dans la direction x, les déformations sont uniformes : εx = εfx = εmx (1)

• Dans la direction y, les contraintes sont uniformes et, en fait, nulles car aucune contrainte n’est appliquée :

σy = σfy = σfx = 0 (2)

• Lois des mélanges selon les deux directions (aucun cisaillement n’intervient car on se situe suivant les axes de symétrie) :

σx = vf σfx + vm σmx (3)

σy = vf σfy + vm σmy (4)

εx = vf εfx + vm εmx (5)

εy = vf εfy + vm εmy (6)

• Lois de Hooke dans fibre et matrice :

εfx = 1Ef

σfx - νfEf σfy + ef

(7)

εfy = -

νfEf σfx + 1Ef

σfy + ef (8)

εmx = 1Em

σmx - νmEm

σmy + em (9)

εmy = -

νmEm

σmx + 1Em σmy + em

(10)

Les expressions de base étant écrites, l’hypothèse (2) conduit à :

εfx = 1Ef

σfx + ef (7’)

εfy = -

νfEf σfx + ef

(8’)

εmx = 1Em

σmx + em (9’)

εmx =

-νmEm

σmx + em (10’)

Comme il n’y a pas de contrainte extérieure appliquée, on a, à partir de (3) :

σfx = - σmx

vmvf (11)

et, compte tenu de (1) :

εmx = εfx = ex (12)

2.1. Direction longitudinale ααααx

À partir de (7’) et (9’), avec (11), on obtient :

- vm Em εmx + vm Em em = vf Ef εfx - vf Ef ef

et (12) permet finalement d’écrire :

(E1.7) ex =

vf Ef ef + vm Em emvf Ef + vm Em

et le coefficient de dilatation longitudinal :

(E1.8) αx =

vf Ef αf + vm Em αmvf Ef + vm Em

L’Équ. E1.7 permet aussi d’obtenir le coefficient longitudinal s’il on a affaire à une expansion non thermique.

2.2. Direction transversale ααααy

L’expression (6), en utilisant (8’) (10’) et (7’) (9’) conduit à :

εy = - vf νf (εfx - ef) + vf ef - vm νm (εmx - em) + vm em

Comme aucune contrainte n’est appliquée, on peut

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Dilatation thermique E1.3

écrire que εfx = εmx = ex et on a alors :

(E1.9)

ey = vf ef (1 + νf) + vm em (1 + νm)vf Ef - ex (νm vm + νm vm)

et le coefficient de dilatation transversal :

αy = vf αf (1 + νf) + vm αm (1 + νm) - αx (νm vm + νm vm)

(E1.10) La figure 2 ci-dessous montre un exemple d’évolution en fonction du taux de fibres, des coefficients de dilatation longitudinal et transversal dans le cas du verre/époxy.

0

10

20

30

40

50

60

70

Fraction volumique de fibres

Verre/époxy 1D

Coefficient de dilatation (MK-1)

Transversal

αy

Longitudinal

αx

Fibres

αf

Matrice

αm

1,00,80,60,40,20,0vf

Figure 2 Variation de αx et αy en fonction de vf .

Verre/époxy 1D. αf = 5 MK-1, αy = 54 MK-1,

Ef = 72 GPa, Em = 2,76 GPa, νf = 0,2 , νm = 0,35

• Cas du carbone/époxy (αf = 0, Ef >> Em)

(E1.11) αx = 0 ; αy = vm (1 + νm) αm • Cas des fibres courtes orientées au hasard 2D

α = 12 (αx + αy) + 12

(αx - αy) (Ex - Ey)

Ex + (1 + 2 νyx) Ey (E1.12)

Pour en savoir plus : Une discussion détaillée, surtout du cas des fibres courtes est faite dans : T-W CHOU, Microstructural design of fiber composites. Cambridge University Press. 1992.

3. Effets thermiques dans les stratifiés Cette partie vient en complément de l’analyse macromécanique des matériaux stratifiés (Modules 7, 8 et 9) On considère ici les effets des déformations dites hygrothermiques ou non mécaniques qui apparaissent dans chaque pli :

ex = εxα + εxβ +εx

δ et ey = εy

α + εyβ +εy

δ

Dans ce qui suit on raisonne avec les déformations thermiques (α), mais il est très facile de prendre en compte les autres causes de déformation non mécanique (effet de prise d’humidité, retrait de polymérisation, etc.). 3.1. Rotation des coefficients de dilatation

Dans un matériau unidirectionnel, la dilatation thermique conduit aux déformations suivantes :

(E1.2) ex = εxα = αx (T – T0)

ey = εyα = αy (T – T0)

es = εsα = 0 (par symétrie) Les coefficients de dilatation thermique obéissent donc aux règles de transformation angulaire des déformations (cf. Équ. 3.14, Module 3) Dans un nouveau repère 1,2 désorienté d’un angle θ par rapport au repère initial x,y (FIg.3), on a donc simplement :

(E1.13) α1 = αx cos2θ + αy sin2θ

α2 = αx sin2θ + αy cos2θ

α6 = (αx - αy) sin (2θ)

Le coefficient de dilatation, α6 rendant compte d’un cisaillement apparaît du fait de l’anisotropie ( αx ≠ αy). La figure 4 ci-après montre un exemple de variation des coefficients de dilatation en fonction de l’angle de désorientation dans le cas du verre/époxy de la Fig.2.

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Dilatation thermique E1.4

Figure 3

x

y21

θ

La déformation finale du pli 1D est la somme de la déformation non mécanique et de cette induite par les contraintes qu’il subit :

(E1.14) εi = εjα + Sij σj)

Verre/époxy 1D

Angle de désorientation (degrés)

Coefficient de dilatation (MK-1)

9075604530150

-30

-20

-10

0

10

20

30

40

alpha1

alpha2

alpha6

Figure 4 Verre/époxy 1D. Évolution de α1 , α2 , α6 en fonction de l’angle θ. 3.2. Contraintes thermiques

résiduelles dans un stratifié

La figure 5 ci-dessous illustre ce qui se passe dans un stratifié [0/90] lors du refroidissement après élaboration.

εyαεxαT < T0

non liés

T0

T < T0 liés

axe 1 stratifié

σxT

σyT

εyT εxT

ε 10 S (ε 1

0 α)k1

α

Figure 5 Refroidissement d’un stratifié [0/90] • Si les plis étaient libres, le pli à 0° se contracte,

dans la direction 1, de : ε1α = εxα et le pli à 90°, de

ε1α = εy

α. • Comme les plis sont liés, l’incompatibilité précédente conduit à des déformations résiduelles, différentes dans chaque pli :

ε1T = εx

T.(pli à 0°) et ε1T = εyT.(pli à 90°)

• Ces dernières induisent des contraintes résiduelles :

σ1T = σx

T (pli à 0°) et σ1T = σy

T (pli à 90°)

• En l’absence d’efforts appliqués on a :

σxT (pli à 0°) + σy

T (pli à 90°) = 0

• Remarquons que si le stratifié est symétrique (cas du [0/90]S par ex.) la déformée du stratifié reste plane. La déformation de l’ensemble correspond alors au coefficient de dilatation du stratifié dans cette direction : ε01α. Si ce n’est pas le cas ([0/90]T par ex.), les contraintes résiduelles induisent un moment et donc une courbure résiduelle de la plaque k1α. On utilise souvent des stratifiés non symétriques pour estimer les contraintes résiduelles à partir de la mesure de la courbure.

La procédure qui vient d’être décrite dans un cas particulier simple peut se généraliser. On se base pour cela sur ce qui a été fait dans le Module 7 (comportement en membrane des stratifiés symétriques), Module 8 (comportement en flexion des stratifiés symétriques) et le Module 9 (cas général). Écrivons d’abord la loi de comportement (E1.14) sous la forme inversée :

(E1.15) σi = Qij (εj - εjα)

Elle s’applique dans chaque pli et s’exprime suivant les axes du stratifié (i, j = 1, 2, 6). La sommation sur l’épaisseur du stratifié (cf. Modules 7, 8 et 9) conduit alors à :

(E1.16) Ni = Aij εj0 + Bij kj - Ni

α

Mi = Bij εj0 + Dij kj - Mi

α

où les efforts Ni et les moments Mi, ainsi que les termes Aij, Bij, Dij ont déjà été définis dans les Modules 7, 8 et 9. Les nouvelles quantités sont définies comme suit :

Niα = Qij εi

α

-h2

h2

dz, et

Miα = Qij εi

α

-h2

h2

z dz

(E1.17) Les déformations ε0i

S et les courbures kiS

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Dilatation thermique E1.5

thermiques du stratifié résultent des termes Niα et

Miα lorsque les efforts Ni et les moments Mi

appliqués sont nuls. Elles sont données par les expressions suivantes pour le cas général (cf. Équ. 9.9, Module 9) :

(E1.18) ε i0 S = αij Nj

α + βij Mjα

kiS = βij Nj

α + δij Mjα

L’Équ. E1.16 peut donc être réécrite de la façon suivante :

(E1.19) Ni = Aij (εj0 - ε j

0 S) + Bij (kj - kjS)

Mi = Bij (εj0 - ε j

0 S) + Dij (kj - kjS)

Dans l’épaisseur du stratifié (pli par pli), les déformations thermiques résiduelles sont données par (elles peuvent dépendre de z, via la courbure éventuelle) :

(E1.20) εiS = e i

0 S + z kiS

et donc les contraintes thermiques résiduelles sont obtenues en tout point du stratifié par :

(E1.21) σiT = Qij (εj

S - εjα) = Qij εj

T

La déformation résiduelle correspondante est :

(E1.22) εiT = εi

S - εiα

εiS est la déformation du stratifié en l’absence

d’efforts extérieurs (Ni = Mi = 0). Dans le cas d’un

stratifié symétrique (kiS = 0), εiS est lié (via ∆T) au

coefficient de dilatation du stratifié (ε0iS = ε0iα). La Fig. 6 est relative au même verre/époxy que précédemment, mais cette fois stratifié symétrique [0/90]S. On constate que α1 et α2 sont égaux

(10,37 MK-1) et ne dépendent pas de l’angle de désorientation, α6 est nul.

La déformation εiM, dite mécanique, due aux Ni , Mi appliqués, est donnée par :

(E1.23) εiM = εi - εi

S

L’Équ. E1.15 peut alors s’écrire :

(E1.24) σi = Qij (εjM + εj

T) ou bien :

(E1.25) σi = Qij εjM + σj

T

La contrainte que subit chaque pli est la somme de la contrainte issue des efforts appliqués et de la contrainte thermique résiduelle σi

T.

L’utilisation des critères de limite (cf. Module 5) doit donc tenir compte de ces contraintes résiduelles.

Coefficient de dilatation (MK-1)

Angle de désorientation (degrés)

Verre/époxy [0/90]

9075604530150

-5

0

5

10

15

alpha1

alpha2

alpha6

S

Figure 6 Verre/époxy [0/90]S Évolution de α1, α2 et α6 en fonction de l’angle θ. Annexe : Utilisation du classeur de calcul EXCEL "STRATIFIES". Il utilise αi et ∆T. Pour rendre compte des autres causes non mécaniques, on prend des valeurs de αi et ∆T qui les simulent correctement.

• Les valeurs numériques des αi et ∆T doivent être données sur la 1ère feuille "F1-Matériau 1D" en même temps que les données mécaniques. • Dans les feuilles suivantes F2, F3 et F4, les contraintes locales dans chaque pli sont exprimées par l'Équ. E1.25 : c'est la somme des contraintes thermiques et celles induites par les efforts appliqués. L'analyse des critères de limite (Tsaï-Hill, Tsaï-Wu, etc.) se font donc avec les contraintes thermiques résiduelles inclues. Si on ne s'intéresse qu'aux phénomènes mécaniques sans prendre en compte des contraintes résiduelles, il faut veiller à ce que ∆T soit nul. • Les contraintes thermiques résiduelles seules (en l'absence de chargement externe) sont données, pour chaque pli, dans la feuille F2-Stratifié symétrique plan" dans une zone accessible via l'onglet "contraintes thermiques" : sxth, syth, ssth et s1th, s2th, s6th. Dans le cas général, si on peur savoir l'effet des contraintes thermiques, le plus simple est de mettre tous les efforts appliqués à 0.

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Transfert de charge à l’interface fibre-matrice

(aspects mécaniques) D. Rouby

"The fact that two brittle materials can be brought together to give a tough product is the proof that interfaces arecritical to composite properties." Kevin KENDALL. Keele University, UK, May 1997.

Les interfaces entre fibre et matrice sontétudiées ici sous leur aspect mécanique, commesiège du transfert de charge entre les deuxconstituants.

On se bornera ici à des considérations trèssimples et basiques. Une synthèse récente desmodèles de transfert de charge proposés dans labibliographie peut être trouvée dans l’ouvrage deKim et Mai (voir à la fin de ce module).

La Figure 1 ci-dessous montre des cas detransfert de charge sous chargement longitudinal.Dans le cas de fibres continues (Fig. 1a) il n’y apas de discontinuité, fibres et matrice subissentalors la même déformation et le transfert decharge n’opère pas. En présence de fibres courtes(Fig. 1b), le transfert de charge fait intervenir uncisaillement au voisinage de l’interface et prèsdes extrémités, qui est visualisé par l’inclinaisondes lignes de référence. Il en est de même dans lecas de l’extraction d’une fibre (Fig. 1c).

Le transfert de charge opère donc chaquefois qu’il y a une discontinuité, soit dans lesfibres, soit dans la matrice.

Sans discontinuitéa

Fibre courteb

Extraction de fibrec

Figure 1 Visualisation du cisaillement interfacial.

Pour que le transfert de charge puisse opérer,il faut une certaine liaison entre les constituants.Les aspects physico-chimiques de cette liaison etles stratégies d’optimisation sont présentés dansle module F1.

Selon la nature de la sollicitation, les critèresd’optimisation de l’interface sont différents etparfois contradictoires.

Comme on peut le voir sur la Figure 2, cidessous, la compression longitudinale et latraction transversale demandent une interface laplus forte possible (Fig. 2 a et b).

Par contre, sous traction longitudinale, uneinterface trop forte conduit à un comportement àla rupture fragile (Fig. 2c).

Une interface optimisée donne uncomportement tenace (Fig. 2d) car les rupturesdes fibres sont indépendantes les unes des autres.Une interface trop faible est éviter aussi car lesfibres ne seront alors pas chargées.

Compression longitudinale

Traction transversale

Traction longitudinale, interface trop forte :comportement fragile

Traction longitudinale, interface optimale :comportement tenace

a

b

c

d

Figure 2 Effet de l’interface sous diverses sollicitations.

Micromécanique des composites août 2005 µF

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Transfert de charge (aspects mécaniques) F2

1. Transfert de charge

Il intervient au voisinage d’une discontinuité.En effet, celle-ci entraîne des gradients pour lescontraintes longitudinales.

La Figure 3 en est une illustration pour lescas les plus classiques.

x

σf

zone de TC

Matrice fissurée σx, εx = σxEx

σf = Ef εx

T = σxvf

x

σf

zone de TC

Fibre rompue σx, εx = σxEx

σf = Ef εxσf = 0

x

σf

TC TC

Fibre courte

σf = Ef εx

appliqué :

σx, εx

Figure 3 Exemples de gradients de la contraintedans la fibre

Expression fondamentale

Si on considère un élément dx de fibre dansla zone de transfert de charge (Fig. 4), ledésiquilibre longitudinal est balancé par uncisaillement à l’interface, noté ici τi.

On a donc : F = F + dF + 2 π R dx τiet comme F = σf π R2, il vient finalement :

Rdx

dif τσ 2

−= (F.1)

Le gradient de contrainte dans la fibre estproportionnel à la contrainte de cisaillement surl’interface.

dx

R F F + dF

x

2π R dx τi

Figure 4

Nous décrivons dans ce qui suit deuxsituations simples. D’abord le cas d’une liaisonparfaite à l’interface entre deux solides élastiques(modèle de Cox) et, ensuite, le cas d’unecontrainte de cisaillement interfaciale constante(modèle de Kelly-Davies).

2. Interface parfaitement liée

H.L. Cox (1952). The elasticity and strength of paperand other fibrous materials. British Journal of Applied Physics, vol. 3, p.72-79.

Dans ce cas, il n’y a pas de déplacementrelatif entre fibre et matrice et l’interface resteliée quel que soit l’effort appliqué. Tous lesdéplacements sont donc élastiques et parconséquent parfaitement réversibles.

Nous présentons ici l’analyse simplifiée (etfausse !) de Cox (shear-lag analysis). Elle estbasée sur les hypothèses suivantes, en considérantun élément de VER de longueur dx (Fig. 5) :• La contrainte axiale dans la matrice estconcentrée dans la zone R’-Rm et le cisaillement

induit par le gradient est concentré entre R et R’.Il y a découplage artificiel de ces deuxcontraintes.Si Rm est le rayon de la matrice, le taux de fibres

s’écrit alors :22v mf RR= (F.2)

• La force transmise par le cisaillement estproportionnelle à la différence entre lesdéplacements u (à l’interface) et v (en R’), via lemodule de cisaillement de la matrice Gm.Compte tenu des conditions d’équilibre entre R etR’ ( τ dr + r dτ = 0), on obtient :

)/'ln(

)(

RRR

uvGmi

−=τ (F.3)

• Le déplacement u est lié à la déformation de lafibre (du/dx = εf) ; le déplacement v en R’ est égal

au déplacement en Rm qui est supposé être lié à la

déformation axiale de la matière entourant leVER et donc à celle du composite (dv/dx = εx).

Figure 5

x

r

R

R'

Rm

u

v

dxF + dFF

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Transfert de charge (aspects mécaniques) F3

En combinant les Équ. F1 et F3, on obtientfinalement l’équation différentielle suivante :

( )xff

fE

Rdx

dεσ

βσ−=

2

2

2

2

avec : (F.4)

)/'ln(

22

RRE

G

f

m=β

Cas du transfert de charge

à l’extrémité d’une fibre rompue

À titre d’illustration, nous donnons ci-dessous une solution correspondant au cas del’extrémité d’une fibre rompue dans un compositeunidirectionnel.Les conditions limites sont les suivantes :

σf(x=0) = 0 et σf(x=∞) = σf∞ = Ef εxOn obtient alors (cf. Fig. 6) :

−−=

R

xEx xff

βεσ exp1)( (F.5)

et, en utilisant l’Équ. F1, le cisaillementinterfacial est donné par :

−−=

R

xEx xfi

βε

βτ exp

2)( (F.6)

σfσf = Ef εx

x0R/β

90% de σf

longueur ineffective

δ

x0

τi

τimax

Figure 6 Modèle de Cox (fibre rompue)

À partir du bout, la contrainte axiale dans lafibre et le cisaillement interfacial évoluentexponentiellement. Le cisaillement interfacial estmaximal à l’extrémité de la fibre :

xfii Ex εβ

ττ2

)0( max −=== (F.7)

Comme aucun effort n’est appliqué sur lebout de la fibre, le cisaillement τi doit être nul àcet endroit. Cela constitue la difficulté majeure dumodèle de Cox (nous donnerons plus loin unexemple de résultat d’une solution plus exacte).

Si l’effort appliqué au composite (σx ou εx)

augmente ou diminue, les profils de σf et τivarient homothétiquement. Cela signifie que lalargeur de la zone affectée par le transfert decharge ne dépend pas de l’effort à transmettre (àcondition, bien entendu, que l’ensemble resteparfaitement élastique). Ces profils sont aussiréversibles à la charge-décharge.

On a coutume de définir une longueurinefficace δ qui correspond à la région où σf∞ achuté de plus de 10%. Elle est donnée par :

δ = 2,30 R /β (F.8)

Pour la plupart des composites à matriceorganique (Gm petit), le rapport δ/R est comprisentre 4 (verre, kevlar) et 10 (carbone).SiC/aluminium : δ/R = 2,3SiC/SiC : δ/R = 0,5 (Gm grand)

Remarque finale

L’approche de Cox n’est pas exacte car ellene prend pas en compte l’ensemble du problèmeen 3D.

La Figure ci-dessous (Fig. 7) donne unexemple de solution exacte, obtenue par uneméthode variationnelle, des profils de contrainte àpartir de l’extrémité d’une fibre rompue dans lecas du carbone/époxy.

-100

-50

0

50

100

150

200Contrainte (MPa)

Distance normalisée de l'extrémité (x/R)0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Mecanique variationnelleShear-Lag analysis

σf

τiσrad

fibre

interface

Figure 7 Solution exacte (carbone/époxy)d’après : J.A. Nairn (1992) Variational mechanicsanalysis of the stresses around breaks in embeddedfibers. Mech. Mater., vol. 13, p. 131.

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Transfert de charge (aspects mécaniques) F4

3. Cisaillement interfacial constant

A. Kelly & G.J. Davies (1965). The principles of thefibre reinforcement of metals. Met. Rev., vol. 10, p. 1.

A. Kelly & W.R. Tyson (1965). Fibre-strengthenedmaterials, in High Strength Materials V, F. Zackay, ed.,J. Wiley and Sons, P. 578.

Cette approche s’appuie sur l’hypothèsed’une contrainte de cisaillement interfacialconstante dans la zone de transfert de charge :

- dans cette zone : τi = τ*

- ailleurs : τi = 0

Ces conditions ont été à l’origine associées à laplastification de la matrice au voisinage del’interface, dans l’hypothèse d’une matricemétallique parfaitement plastique (cf. Fig. 8).Dans ce cas, τ* est la limite élastique de lamatrice en cisaillement.

fibre

matrice

τ

γ

τ*

Figure 8 Plastification à l’interface

Le cisaillement τ* peut aussi être associé àdu frottement entre fibre et matrice (cf. Fig. 9).

fibre

matrice

τ* = P µP

coefficientde frottement

pressioninterfaciale

Figure 9 Frottement à l’interface

La pression interfaciale peut être induite parles incompatibilités de dilatation thermique (cf.module E) ou par la rugosité des surfaces encontact. La pression radiale est aussi conditionnéepar la différence des coefficients de Poisson et ladifférence des déformations axiales des deuxconstituants. Il en résulte que τ* n’est pasvraiment constant dans la réalité.

Dans ce qui suit, certains aspects ducomportement interfacial sont décrits en prenantun cisaillement interfacial constant.

3.1. Cas de la rupture d’une fibre

On considère un VER chargé jusqu’à rupturede la fibre, qui a lieu au milieu. La Figure ci-contre (Fig. 10) montre les profils des différentescontraintes.

x

σf

x

x

τi

σm

y

avant

A B C

τ*

Em εfR

σxvm

1

η

après0

0

0

B'

Ef εfR

Figure 10 Rupture de fibre (τ constant)

• Contrainte dans la fibre :

Entre B et C : σf, BC = σfR = Ef εfR

En A : σf, A = 0

Entre A et B : xR

f

*2AB,

τσ −=

En B, l’application de l’Équ. 1 donne :

c

Rf

lR

y ==*τ

σ(F.9)

lc est appelée longueur critique. Nous enreparlerons à propos des fibres courtes.

• Contrainte dans la matrice :

On a partout : σx = vf σf + vm σm (F.10)

Entre B et C : σm, BC = Em εfR

En A : Rfm

mm

x

m

Rfx

m

xm E

E

EEε

εσσ

===

vvvA,

)1()1( B,A, ησηεσ +=+= CmRfmm E

avec :mm

ff

E

E

v

v=η (F.11)

Entre A et B, à partir de F.1 et F.10, on a :

xRm

f

mm

*2

v

vA,AB,

τσσ += (F.12)

Si l’effort axial appliqué au VER augmente,la largeur y de la zone de transfert de chargeaugmente en proportion. Par contre, la déchargen’est pas réversible (cf. plus loin).

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Transfert de charge (aspects mécaniques) F5

• Profils des déformations :

La Figure 11 montre clairement que lesdéformations de la fibre et de la matrice sontdifférentes dans la zone de transfert de charge.

Il y a donc déplacement relatif entre fibre etmatrice et ce dernier fait intervenir du frottementou de la plasticité localisée.

x

A B CB'

ε

εx = εfR

εf

εm εm, A = εfR (1 + η)

O

P

Q

R

Figure 11 Fibre rompue, profil des déformations

• Ouverture de la fissure en A :

Entre B et C, les déplacements de la fibre etde la matrice sont identiques ; entre A et B ilssont différents.

L’ouverture ∆ de la fissure correspond audéplacement de la matrice moins celui de lafibre :

∫∫ +=−=∆B

B xf

B

B m ydxdx''

)1( ηεεε (F.13)

Lors de la charge, l’ouverture de la fissurecroît proportionnellement à l’allongement duVER. On montrera plus loin que lors de ladécharge, il reste une ouverture résiduelle égale àla moitié de celle obtenue à la charge maximaleprécédente.

• Fragmentation d’un monofilament

Ce phénomène a lieu si εfR < εmR et si le

taux de fibres est assez petit (cf. module A). Il estsupposé, dans un premier temps, que la résistancede la fibre σfR est uniforme le long de son axe.

On considère (Fig. 12) la succession de 4ruptures lorsque la fibre subit εf = εfR. - La première rupture de fibre est en A. Hormisla zone déchargée B’B, la fibre est toujourssoumise à σf = σfR et elle peut être encore

rompue, par exemple en D (1er profil).- Ce processus se poursuit jusqu’à saturationquand les zones de transfert de charge serecouvrent.

x

σf

lc/2

A BB' CC' DE

DminDmax

1 2

3

4

Figure 12 Processus de fragmentation.

- La position de rupture possible la plus prochede A est B. Cela définit la longueur minimaledes fragments Dmin (= lc /2) (2

nd profil).

- La position de rupture possible la pluséloignée de A, sans que le fragment résultantpuisse encore être rompu, est E (3ème profil).Cela définit la longueur maximale Dmax (= lc)

des fragments.

Dans l’hypothèse d’une distribution uniforme delongueurs, la longueur moyenne des fragments estsimplement :

*4

3

4

3

22

1

τ

σ Rfcc

c

lllD ==

+=>< (F.14)

Ce phénomène peut être exploité pourdéterminer les caractéristiques interfaciales d’unsystème composite donné. On réalise pour celades éprouvettes monofilamentaires que l’onsoumet à traction. La mesure de <D> est faite parmicroscopie optique à travers la matrice ou parémission acoustique.

Dans la réalité, la résistance de la fibre estdistribuée (cf. module C) et dépend de lalongueur testée. Il faut donc considérer larésistance ultime des derniers fragments obtenusdont la longueur est de l’ordre de <D>. Onobtient finalement :

)(4

3* ><

><= D

D

R Rfστ (F.15)

Cette méthode présente l’inconvénient denécessiter des éprouvettes spéciales, fabriquéesdans des conditions différentes de celles duprocédé d’élaboration du composite dont on veutcaractériser l’interface.

En outre, il faut aussi déterminer

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Transfert de charge (aspects mécaniques) F6

expérimentalement l’évolution de la résistancemoyenne des fibres en fonction de la longueurtestée et extrapoler les résultats aux faibleslongueurs (<D> est de l’ordre de 1 mm) pourpouvoir utiliser l’expression ci-dessus.

3.2. Extraction de fibre

Il s’agit aussi d’une éprouvette spéciale où lafibre est enchâssée dans un bloc de matrice.L’effort d’extraction F est directement appliquésur la partie libre de la fibre (Fig. 13).

• Au 1er chargement, le profil de transfert decharge BC suit l’Équ. 1. Il y a glissement, sousτ*, uniquement entre B et C.Le déplacement U de la section affleurante de lafibre est proportionnelle à l’aire du triangle ABC(cf. Équ. 13), ce qui donne :

*4 32

2

τπ fER

FU = (F.16)

Si on mesure F et U, il est possible d’accéder aucisaillement interfacial τ*.

• À la charge maximale, toute la fibre peutglisser. On a alors :

*2max τπ HRF = (F.17)

La force diminue ensuite linéairement à mesureque la fibre est extraite (Fig. 14 à droite).

*)(2 τπ UHRFextraction −= (F.18)

• Si on décharge à partir d’une valeur de F*(ici = Fmax), le profil IE devient IC car leglissement change de sens. À décharge complète,le profil est donné par DIA. On voit qu’il reste undéplacement résiduel qui est la moitié dudéplacement maximal (Fig. 14 à gauche). Ladécharge n’est donc pas réversible, à cause dufrottement.

• À la recharge, KA passe en KC car leglissement s’inverse à nouveau pour rejoindre leprofil initial DJIE.

F

U

H

FmaxF

U

F* < Fmax

U*U*/2

∆U

Figure 14 Courbes F-U lors de l’extraction.Pour F = F*/2, on voit que l’aire de JICK est lequart de celle de DEA. La largeur à mi-hauteur∆U du cycle F-U est donc de U*/4.

F

H

AB

C

x

σf

D

−τ*

τx

Charge

x

σf

τ

x

Décharge

F = 0

0,5

D

I

JC

E

A

E

Fmax

π R2

Fmax

π R2

Fπ R2

force d'extraction

fibre

Udéplacement

x

σf

τ

x

Recharge

F = 0

0,5J

IC

K

D A

Fmax

π R2E

Figure 13 Extraction de fibre. Profils descontraintes sous charge, décharge et recharge.

Pour en savoir plus

J-K. KIM & Y-W. MAI, Engineered Interfaces in Fiber Reinforced Composites. Elsevier. 1998.

T-W CHOU, Microstructural design of fiber composites. CambridgeUniversity Press. 1992.

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Page 47: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Liaison et décohésion aux interfaces (physico-chimie et micromécanique)

D. Rouby

Selon les systèmes composites et les propriétés recherchées, le concepteur doit tendre à augmenter ou à diminuer lescaractéristiques interfaciales. Il y a là une notion importante d'optimisation des propriétés de l'interface et de contrôledes mécanismes qui y opèrent. L'interface est donc, autant que faire se peut, conçue sur mesure : taylored interface.

C'est l'objet de cette Fiche F1, dédiée à la liaison interfaciale, qui complète l'approche générale faite dans la Fiche F.

On s'intéressera ici d'abord à la notiond'adhésion à l'interface et aux moyens physico-chimiques qui y mènent.

On analysera ensuite les différents aspectsmicromécaniques de la rupture de cette adhésion,la décohésion.

L'interface "décollée" est soumise à desdéplacements relatifs, donc à des frottements.Ceux-ci sont décrits dans la Fiche F2 suivante.

1. Mécanismes d'adhésion

Le premier mécanisme qui entre en jeu estl'adsorption qui est associée à la mouillabilité.

Lorsque deux surfaces naturelles (élec-triquement neutres, contaminées et rugueuses) sontpressées l'une contre l'autre (Fig. 1), la liaison estréalisée par des contacts localisés peu nombreux.Si on élimine la contamination, une forte adhésion(liée aux énergies de surface) apparaît aux pointsde contact. L'adhésion moyennée sur la surfacetotale reste néanmoins très faible.

Si on veut profiter au maximum de cetteadhésion, il faut que l'une des surfaces épouseparfaitement l'autre. C'est le cas, par exemple,d'une résine liquide qui doit donc bien mouiller lafibre pendant l'opération d'imprégnation. Nousn'entrerons pas plus dans le détail de la théorie del'adhésion.

Figure 1

La Fig. 2,ci-contre, montre des exemples demécanismes conduisant à de fortes liaisons.

L'interdiffusion (a) entre deux polymères créeun enchevêtrement de molécules. Ce mécanismeest exploité dans les adhésifs. Il intervient aussipour les fibres de carbone car celles-ci sontrevêtues d'une résine époxy sans durcisseur quipourra interdiffuser avec la matrice lors del'imprégnation.

L'attraction électrostatique (b) joue peu de rôleau stade final de l'interface. Mais pour la fibre deverre lors de l'ensimage, les charges de surfacesont susceptibles d'orienter convenablement lesmolécules bifonctionnelles de silane qui créerontultérieurement des liaisons chimiques (c) entre

fibre et matrice. Un exemple est donné au § 2.

Une liaison chimique entre la résine et les boutsdes plans graphitiques apparaît aussi dans le cas desfibres de carbone. Pour ce faire, la surface doit êtrefaiblement oxydée afin d'éliminer les particulescarbonées faiblement accrochées.

attraction électrostatique(b)

enchevêtrement de molécules (a)

molécules bifonctionnelles (c)

A

B

A

B

A

B

A

B

A

B

A

B

A

B

(d)accrochage mécanique

(e)formation de produits de réaction

Figure 2

L'accrochage mécanique (d) est associé à larugosité de la fibre. Ce mécanisme est exploité dansles composites à matrice céramique, la matriceproduite par imprégnation liquide ou gazeuseépousant bien les aspérités du renfort. La résistanceau cisaillement dépend du degré de rugosité.

La formation de produits de réaction (e)apparaît surtout dans les composites à matricemétallique (composés intermétalliques). Ils sontsusceptibles de créer une liaison, mais sontgénéralement très fragiles.

Micromécanique des composites août 2005 µF1

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Physico-chimie et micromécaniques de la liaison interfaciale F1.2

2. Contrôle de la liaison interfaciale

On décrit ici les principaux cas rencontrés dansla pratique.

• Fibres de verre La plupart des oxydes du verre adsorbent l'eau

sous forme de groupes hydroxyles (-M-OH, où Mest un métal comme Si, Fe, Al) (Fig. 3b) quiretiennent ensuite des molécules d'eau avec desliaisons hydrogène.

Il faut donc protéger la surface de la fibrecontre l'humidité et créer des liaisons fortes avec lamatrice thermodurcissable (TD). On utilise pourcela un agent de couplage dont le dépôt en solutionaqueuse est appelé ensimage.

(e) ( f )

H2O +(b) OHM verre M verre

M verreR Si O

O

O

MR Si O

MR Si O

MR Si O

O

O

MR Si O

MR Si O

fibre

de v

err

e

matr

ice T

D

fibre de verre : oxydes métalliques

matrice organique : macromolécules

M M M M M

R R R R R

M : métal

R : radicaux

fonctionnels

(a)

OHR Si OH

OH

OH

(d) M verre

OH(c)R Si + H2OC2H5O R Si OH

OH+ 3 éthanols

C2H5O

C2H5O

Figure 3

L'ensimage est basé sur une molécule silanebifonctionnelle de type R-Si-(OX)3 où R est ungroupe organique compatible avec la formulationde la matrice et où X est un groupe hydrolysable(e.g. -O-C2H5). Ce dernier n'est qu'un intermédiairecar il est hydrolisé pour former un silanol (cf. Fig.3c).

Ce silanol peut remplacer les molécules d'eauaccrochées sur la surface hydrolisée du verre (Fig.3d).

Lors du séchage de la fibre, il y a condensationà la fois avec le métal du verre et les groupesvoisins pour former un revêtement de polysiloxane(Fig. 3e). Enfin, lors de l'imprégnation par larésine, les groupes organo-fonctionnels R se lientavec les macromolécules de la matrice (Fig. 3f).

On obtient donc une interphase (Fig. 3a),théoriquement insensible à l'humidité mais qui en

reste sensible dans la pratique.Ce processus ne fonctionne pas avec des

matrices thermoplastiques car celles-ci sont déjàpolymérisées. Dans ce cas, on utilise le même genred'agent de couplage auquel on ajoute une secondecouche de polymère TD filmogène compatible avecla future matrice.

• Fibres de carbone La structure en coupe d'une fibre de carbone est

donnée Fig. 4. La surface est très réactive si lesplans basaux affleurent en bout (en A). Il estpossible de former à ces endroits, par oxydationménagée (oxygène, acide nitrique) des groupesfonctionnels (comme, par exemple, -CO2H, -C-OHou -C=O) qui peuvent réagir avec les résines.

Les zones B où les plans basaux sont parallèles àla surface sont très peut réactives et résistantesmécaniquement du fait des forces de Van der Waalsfaibles entre les plans. Pour une forte liaisoninterfaciale, une structure radiale des graphènes estdonc à préférer à une structure en pelure d'oignon.

AA

B

B

BA

B

plan graphitiqueplan basalgraphène

• Fibres aramides (Kevlar) La fibre est protégée de l'abrasion lors de sa

manipulation (tissage) par un revêtement d'alcoolpolyvinylique . La surface de la fibre présente uneaffinité avec certaines résines époxydes. On préparedonc les fibres avec un revêtement époxyde adaptépour améliorer la liaison avec les diverses matricesorganiques.

• Matrices métalliques Si la matrice est mise en présence de la fibre à

température modérée (phase solide), il y ainterdiffusion et généralement une forte liaison.L'imprégnation en phase liquide du métal conduit àde fortes réactions et formation d'une interphasefragile, ce qui est à éviter.

Les fibres (B, SiC) sont généralement revêtuesde pyrocarbone et SiC pour éviter ces réactions,avoir une liaison plus faible et empêcher que larupture de fibre n'entraîne immédiatement lafissuration de la matrice (par ex. par fatigue).

• Matrices céramiques Les réactions sont toujours très importantes du

fait des hautes températures de densification.Comme avant, on protège les fibres par unrevêtement de pyrocarbone ou de BN qui joue aussile rôle de "fusible mécanique". En effet, lafissuration matricielle sera déviée aux interfaces etne conduira pas à la rupture des fibres.

Figure 4

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Page 49: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Physico-chimie et micromécaniques de la liaison interfaciale F1.3

3. Décohésion interfaciale

On développe ici les conditions pour rompre laliaison interfaciale et passer du cas lié au cas nonlié, qui ont été décrits Fiche F.

Pour poser le problème simplement, onconsidère le cas de l'arrachement (F > 0) ou del'enfoncement (F < 0) d'une fibre. La Fig. 5redonne les profils de σf et τi dans le cas lié.

La distance de transfert de charge δ est trèspetite (1 à 2 diamètres de fibre) et sera négligéepar rapport à la taille de la zone décollée.

F

x

σf

x

Fπ R2

force appliquéesur la fibre

fibre

δ

τi

τimax

H

Figure 5 Cas lié

0

0

La décohésion peut être la propagation d'unefissure à l'interface en mode II à partir del'extrémité chargée de la fibre. Le cisaillementinterfacial τ* est alors associé au frottement entreles deux surfaces libres.

Le déplacement relatif entre fibre et matricepeut aussi être obtenu par écoulement plastique encisaillement près de l'interface. Ici, τD et τ* sontliés à la limite d'élasticité de la matrice.

3.1. Critère en contrainte

La rupture de l'interface a lieu lorsque lacontrainte de cisaillement maximal à l'interfaceatteint une valeur limite τimax = τD.

Ce critère peut être utilisé si on a plastificationde la matrice dans les composites à matriceorganique ou métalliques (Fig. 6a). Il a aussi étéutilisé pour rendre compte de l'arrachement desfers à béton (Fig. 6b).

En première approximation, on peut relier laforce critique d'arrachement à la valeur limite ducisaillement interfacial :

Dultime HRF τπ2= (F1.1)

avec H : profondeur d'enchâssement.

La difficulté avec ce critère est que lecisaillement maximal est mal connu et que lesmodèles qui existent contiennent des paramètresajustables.

(a) avant plastification

fibre

(b) avant craquellement

fer à béton

Figure 6

3.2. Critère en énergie

Référence initiale : J.O. Outwater and M.C. Murphy,Fracture energy of unidirectional laminates, Modern Plastics, sept. 1970, pp. 160-169.

On considère ici la propagation d'une fissureinterfaciale qui s'est amorcée sur un défautpréexistant.

F

x

σf

fibre

σa

0dxcd

S

c'

σa'

σfD

dc

AB

Figure 7

La Fig. 7 représente une fibre partiellementdécollée. Derrière le front de décohésion sur ladistance c (entre A et B), le déplacement relatif estcontrôlé par τ*. Dans cette zone, la contrainte dansla fibre s'écrit :

−=d

xaf 1σσ (F1.2)

sachant que (cf. Fiche F) :Rd

a *2τσ= (F1.3

Au front de décohésion (en B, Fig. 6), lacontrainte passe rapidement de la valeur S à zéro(cf. Fig. 1), avec :

−=d

cS a 1σ (F1.4)

Si la fissure de décohésion se propage de dc, lafibre est globalement plus chargée dans sa partiedécollée et s'allonge. La Fig. 7 correspond à lacondition de force imposée (F = π R2 σa) : cetteforce doit être augmentée pour que la fissure puissese propager de dc.

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Page 50: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

Physico-chimie et micromécaniques de la liaison interfaciale F1.4

Le travail de la force extérieure dWext est laforce motrice de la propagation. Elle sert àaccroître l'énergie élastique dans la fibre dUf, àaugmenter l'aire des surfaces de fissure (énergie desurface dUS) et à vaincre le frottement (énergiedissipée par friction dUF).

La condition de décohésion est donc donnéepar ce bilan énergétique.

• L'énergie élastique de la fibre est :

dxE

RU

cf

ff ∫=

02

2

2

πσ (F1.5)

et, d'après le théorème de Leibnitz-Newton,

)()(0

xfdttfdx

d c=∫ (F1.6)

l'incrément d'énergie peut s'écrire :

22

22

21

2

π

2

π

−==d

c

E

RS

E

R

dc

dUa

ff

fσ (F1.7)

• L'énergie de surface, elle, varie de :

icS GR

dc

dUπ2= (F1.8)

où Gic est l'énergie unitaire de rupture del'interface, paramètre intrinsèque à l'interface.

• L'énergie dissipée par la friction, est donnée parle travail de la force de scission. Si un élément defibre, dx, se déplace de uf(x) par rapport à lamatrice, on a :

dxxuRdW fF )(*π2 τ= (F1.9)

or, uf(x) s'écrit (F1.10) :

+−−== ∫ d

x

d

cxc

Edz

Exu

f

ac

x f

ff 22

)(22σσ

et il vient :

−==

d

cc

Exu

f

af 2

1)0(σ

(F1.11)

Sachant que : ∫=c

FF dWW0

(F1.12)

on obtient finalement, avec (F1.9 et F1.3) :

−=d

c

d

c

E

R

dc

dW

f

aF 12

π 22 σ(F1.13)

• Le travail de la force extérieure est :

)0( == xuFW fext (F1.13)

et son incrément par :

−=d

c

E

R

dc

dW

f

aext 1π 22 σ

(F1.14)

Finalement, le bilan qui s'exprime par :

FSfext dWdUdUdW ++= (F1.15)

conduit à l'expression suivante de la condition dedécohésion :

22

2

2

ππ2 S

E

RGR

fic = (F1.16)

comme dans ce cas S = σiD, le critère s'écrit :

( )R

GE icfDf

42=σ (F1.17)

Ce critère fait intervenir la contrainte dans lafibre et non plus le cisaillement interfacial. Il estindépendant du signe de cette contrainte. Nousverrons que ce n'est plus le cas en présence decontraintes thermiques résiduelles.

Important : la condition de décohésion nedépend pas de la profondeur d'enchâssement.

Dans ce qui précède, la redistribution descontraintes dans la matrice a été négligée car ellessont de faible niveau.

Par contre, dans un composite 1D, l'effet de lamatrice ne peut plus être négligé. La variationd'énergie élastique dans la matrice lors de ladécohésion doit être prise en compte dans le bilan,l'Équ. (F1.17) s'écrit alors (non démontré ici) :

( )

=

mm

xicfDf E

E

R

GE

v

42*σ (F1.18)

Il est intéressant de remarquer que l'Équ. (F1.18)s'applique que la discontinuité soit sur les fibres(εfR < εmR) ou dans la matrice (εfR > εmR) (Fig. 8).

x

σf

0

σffront dedécohésion

σfD*

x

σf

0σf

front dedécohésion σf

D*

(a)

(b)

Figure 8

Voyons maintenant le rôle des contraintes

thermiques résiduelles. Celles-ci sont présentes enavant du front de décohésion et elles sont relaxéesdans la zone décollée.

Pour l'analyse de l'effet des contraintes

thermiques axiales, on reprend le cas del'arrachement (F > 0) ou de l'enfoncement (F < 0)d'une fibre comme décrit sur la Fig. 7.

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Physico-chimie et micromécaniques de la liaison interfaciale F1.5

Pour clarifier, on considère ici le frottementnégligeable, ce qui est de peu d'importance car iln'apparaît pas dans le résultat final. La Fig. 9amontre comment varie σf dans ce cas.

F

σf

fibre

x0

dc cσf

T

Sσf

D

x0

dc c

(a)σf

T = 0

σfT > 0

(b)

x0

dc c

σfT

(c)σf

T < 0

Sσf

D

Sσf

D

Figure 9

En présence de contraintes thermiques detraction (Fig. 9b) ou de compression (Fig. 9c) dansla fibre, la variation du chargement est représentéepar la zone hachurée. On a alors :

( )

−=

222

2

π Tf

f

fS

E

R

dc

dUσ (F1.19)

et : ( )Tf

f

ext SSE

R

dc

dWσ−=

2π(F1.20)

Finalement, le bilan énergétique avec l'Équ.(F1.8) conduit à l'expression suivante :

( )R

GE icfTf

Df

42=− σσ (F1.21)

Les différents cas rencontrés selon les signesdes contraintes sont illustrés Fig. 10.

F = 0F < 0 F > 0indentation extraction

σfT > 0

déc. + facile déc. + difficile

σfT < 0

déc. + faciledéc. + difficile

σfT = 0

décohésiondécohésion

Figure 10

En ce qui concerne les contraintes thermiques

radiales, disons simplement que si l'interface estparfaitement lisse et la contrainte radiale encompression, la décohésion se fait en mode II pur,mode en cisaillement (Fig. 11a).

Mais ce n'est pas vrai si la contrainte thermiquerésiduelle radiale est en tension. En effet, dans cecas, la décohésion créé un jeu à l'interface, c'est àdire un déplacement radial en expansion. Ladécohésion a lieu alors en mode mixte I (ouverture)et II (cisaillement) et elle est plus facile (Fig. 11b).

Le mode mixte est aussi favorisé dans le cas desurfaces en regard rugueuses. Le passage desaspérités lors du déplacement relatif en cisaillementnécessite une certaine expansion radiale de lamatrice (Fig. 11c).

σradT Š 0

interface lisse

mode II pur

σradT > 0

interface lisse

mode mixte I + II

interface rugueuse

σradT < 0 après déc.

mode mixte I + II

(a) (b) (c)

Figure 11

Pour en savoir plus

D. Hull, An introduction to composite materials,Cambridge University Press, 1981.Introduction simple aux aspects physico-chimiques desinterfaces dans le Chap. 3.

J-K. KIM & Y-W. MAI, Engineered Interfaces in Fiber Reinforced Composites. Elsevier. 1998.Revue bibliographique complète et récente sur tous lesproblèmes d'interface (physiques, chimiques etmicromécaniques).

T-W CHOU, Microstructural design of fiber composites.CambridgeUniversity Press. 1992.Ouvrage plus axé sur la micromécanique des composites.De nombreuses discussions sur le rôle mécanique jouépar les interfaces.

B.T. Aström, Manufacturing of polymer composites,Chapman & Hall, 1997.Des notions détaillées sur la physico-chimie desinterfaces en relation avec les procédés d'élaboration.

J.W. HUTCHINSON and H.M. JENSEN, Models offiber debonding and pullout in brittle composites withfriction, Mechanics of Materials, 9 (1990) 139-163.Analyse complète et claire de la micromécanique descontraintes thermiques, de la décohésion et du frottementaux interfaces.

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Micromécanique des composites août 2005

Transfert de charge entre fibre et matrice Frottement aux interfaces

D. Rouby

µF2 Le frottement peut être considéré comme un cas particulier de l'accrochage mécanique avec l'avantage de pouvoir

supporter des surcharges accidentelles, rôle assez analogue à la plasticité dans les solides massifs. On exploite le frottement dans les cas où la liaison interfaciale est difficile à contrôler ou si elle serait trop forte. Les

mécanismes associés au frottement interfacial dépendent d'un grand nombre de paramètres, soit physico­chimiques, soit micromécaniques.

C'est l'objet de cette Fiche F2, dédiée donc au frottement interfacial, qui complète les Fiches précédentes F et F1.

Après une brève introduction au frottement de Coulomb, on présente ici le système particulier que constitue une fibre enrobée de matrice.

On discute ensuite de l'influence d'un certain nombre de paramètres qui influent sur la capacité de transfert de charge par frottement. Il s'agit des contraintes résiduelles d'origine thermiques, des déformations radiales faisant intervenir les coefficients de Poisson et la rugosité des deux surfaces en regard à l'interface.

1. Le frottement de Coulomb

Lorsque deux surfaces naturelles sont pressées l'une contre l'autre (Fig. 1), la liaison entre ces deux surfaces est réalisée par des contacts localisés peu nombreux et répartis aléatoirement.

Figure 1   

Le glissement relatif des deux surfaces, l'une contre l'autre, consiste donc à rompre les contacts existants et à en former d'autres plus loin, qui eux­mêmes sont rompus, etc.

T

P P

T

- σél

- τél

Figure 2 

La force tangentielle T nécessaire pour le déplacement relatif est directement liée à la résistance mécanique de ces contacts locaux. Pour un solide ductile, elle est donnée par :

T = a τ él (F2.1)

où a est l'aire de la surface totale réelle des contacts locaux (très petite devant A, l'aire nominale du contact macroscopique entre les deux solides) et τ él, la limite élastique en cisaillement des matériaux au contact.

Sous une pression normale P faible, les aspérités qui entrent en contact se déforment élastiquement, mais pour les charges usuelles elles sont écrasées plastiquement. Ainsi, chaque aspérité écrasée forme une jonction à travers la surface de contact et la charge normale totale P, transmise par l'ensemble des contacts locaux vaut alors (Fig. 2) :

P = a σ él (F2.2)

où σ él est la limite d'élasticité en compression. On voit donc que si P augmente, la surface

réelle de contact a augmente proportionellement. Il faut remarquer que l'aire a augmente alors non seulement par l'écrasement des aspérités déjà en contact, mais aussi par le nombre des aspérités en contact, du fait de la nature plus ou moins fractale de la rugosité.

Compte tenu de la loi de Schmid (glissement plastique plus facile à 45°), la limite élastique en cisaillement est la moitié de celle en compression (τ él = σ él /2) et on peut vérifier facilement que :

T = 0,5 P (F2.3)

Cette expression n'est rien d'autre que la loi de Coulomb pour le cas idéalement ductile et qui s'écrit dans le cas général :

T = µ P (F2.4)

ou, si on rapporte les efforts à l'aire nominale A (τ F = T / A ; σN = P / A) :

Fτ = µ σ (F2.5) N

avec µ, le coefficient de frottement. La valeur de µ = 0,5 est un bon ordre de

grandeur du coefficient de frottement statique en deux surfaces métalliques

Si les matériaux en contact ne sont pas très ductiles, µ est généralement plus petit parce que les limites en compression et cisaillement ne sont pas aussi simplement liées.

Pendant le glissement, le coefficient de frottement dynamique µdyn est plus petit que le coefficient statique µstat, observé lors du démarrage après un arrêt. Si les surfaces sont en mouvement relatif, la durée des contacts entre les aspérités est plus courte et ne permet pas la création de liaisons atomiques. Dès que le glissement est stoppé, le fluage et la diffusion ont le temps d'augmenter a et de créer des liaisons, donc µstat > µdyn.

© [D. ROUBY], [2005], INSA de Lyon, tous droits réservés.2. Frottement entre fibre et matrice

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Transfert de charge entre fibre et matrice ­ Frottement aux interfaces F2.2

Dans le système où une fibre est enchâssée dans une matrice, le cisaillement interfacial associé au frottement est lié au frettage de la fibre par la matrice. Celui­ci s'exprime par :

Fτ = µ σ rad (F2.6)

où σrad est la contrainte radiale de frettage

(compression : σrad < 0) à l'interface induite par

une incompatibilité de déformation radiale Δu/R (R : rayon de la fibre). Elle est donnée par le calcul de Lamé (cf. Fiche E) et s'écrit :

Δu R σ = − (F2.7) rad

D

avec le dénominateur D qui est donné par:

1 −ν 1 +ν + v (1 −ν )f m f m D = + (F2.8)

E f Em (1 − v f ) où interviennent les modules de Young (Ef, E )mles coefficients de Poisson (νf, ν ) et la fraction m

volumique de fibres vf. Dans l'Équ. (F2.6), σrad est toujours négatif et le signe de τ F ou de µ dépend du sens de glissement.

L'incompatibilité Δu entre les déplacements radiaux de la surface de la fibre et celle de la matrice peut avoir plusieurs origines.

• L'incompatibilité thermique provient de la différence des coefficients de dilatation. Elle a été étudiée dans le détail dans la Fiche E. Elle est donnée par l'expression suivante :

Δα ΔTTσ = (F2.9) rad D

avec : Δα = α − α , (F2.10) m f

la différence des coefficients de dilatation, et :

ΔT = T − T0 , (F2.11)

la différence de température (T0 étant la température d'élaboration).

Les effets thermiques sur le transfert de charge, en conjonction avec la rugosité, sont explicités au § 3.

• La  rugosité est aussi une cause importante d'incompatibilité radiale (cf. Fig. 3).

coincidence : δ = 0 dilatance δ

(a) (b)

Figure 3   Lors du processus d'élaboration du composite,

l'introduction dans la préforme de la matrice, en phase liquide ou gazeuse, fait que la surface de la matrice épouse bien les irrégularités de la surface de la fibre (Fig. 3a).

Si maintenant un transfert de charge doit opérer entre les constituants, du fait de l'apparition d'une discontinuité dans la structure, le glissement relatif entraîne un déplacement radial (Fig. 3b). En effet, le mouvement ne peut se faire que si les aspérités d'une surface "passent par dessus" celles de l'autre. Cet écartement, noté δ et pris > 0, appelé aussi dilatance, induit une réaction des massifs qui est donnée par :

δ RRugσ = − (F2.12) rad D

La dilatance δ résulte d'un équilibre entre la résistance à l'écrasement des aspérités et la pression radiale induite par les massifs. La Fig. 4 illustre ce phénomène dans le cas d'une fibre SiC (élaborée par CVD, diamètre : 100 µm) dans une matrice en verre Pyrex

-600

-500

-400

-300

-200

-100

0 Radial stress (MPa)

a b

Aeff Rp-v

0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5

Surface approach (µm)

Figure 4 Système SiC Sigma/Pyrex. (d'après D. Rouby and H. Cherouali, Role of roughness in fibre/matrix behaviour, Key Engineering Materials, Vols. 164­165 (1999) pp. 379­384)

La droite (b) est la loi de comportement des massifs, donnée par l'Équ. (F2.7). La courbe (a) représente la résistance à l'écrasement des aspérités. Si l'écartement est grand, peu d'aspérités sont en contact et la pression générée est faible. À mesure que l'écartement diminue, la pression induite augmente car de plus en plus d'aspérités viennent en contact. L'analyse formelle de ce mécanisme a été faite par Greenwwood et Tripp. La dilatance d'équilibre (δ = Aeff) est obtenue à l'intersection . On voit dans cet exemple que δ est bien plus petit que l'amplitude crête de la rugosité (Rp­v), qui se situe pour cette fibre entre 400 et 500 nm (fibre élaborée par CVD, Ø : 100 µm).

• Les effets de Poisson sont aussi une cause

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Transfert de charge entre fibre et matrice ­ Frottement aux interfaces F2.3

d'incompatibilité radiale. Soit parce que les coefficients de Poisson des fibres et de la matrice sont différents, soit parce que les déformations axiales sont différentes (ce qui est le cas au voisinage d'une discontinuité).

L'Équ. (F2.7) devient dans ce cas :

Δεϕν (R)

Poissσ = (F2.13)rad D

On explicitera ces effets de Poisson sur le transfert de charge au § 4.

3. Effet de la température et de la rugosité

Si l'interface était parfaitement lisse, ce qui n'est jamais le cas, les Équ. (F2.6) et (F2.9) s'appliquent, à condition que la contrainte radiale soit en compression (σrad < 0).

Si l'incompatibilité thermique conduit à une traction radiale (σrad > 0), il apparaît, en fait, un "jeu" à l'interface (Fig. 4) donné par :

δ' = R Δα ΔT (F2.14)

δ' : jeu δ : amplitude effective

(a) (b) Figure 4 

Ce jeu entraîne un frottement nul (τ F = 0) si l'interface est lisse. Dans le cas d'une interface rugueuse, d'amplitude effective δ (c'est la dilatance de la Fig. 3 en considérant des aspérités infiniment rigides), on aura un frottement non nul à condition d'avoir δ > δ'.

Dans ces conditions, on peut écrire :

F T Rug )τ = µ (σ + σ (F2.15)rad rad

ou encore : µ δ µ Δα T µ Δα T

−τ F = + 0 + (F2.16) D R D D

On voit que le cisaillement interfacial varie linéairement avec la température, le sens de variation dépendant du signe de Δα.

• si ααααm > ααααf, la fibre est frettée au départ, car le composite est refroidi après élaboration. Le cisaillement interfacial (en valeur absolue) diminue alors à mesure que la température croît (cf. Fig. 5).

Pour une température supérieure à T0 , le jeu thermique, qui est croissant, diminue l'effet dû à la rugosité. Au delà de T*, on a : δ < δ' et le cisaillement interfacial est alors nul.

Cette situation correspond au cas général des

composites à matrice organique. Il faut cependant noter que les phénomènes visco­élastiques dans la matrice masquent le plus souvent les effets de la température sur les caractéristiques interfaciales.

Les fibres sont aussi le plus souvent frettées par la matrice dans le cas des composites à matrice métallique. Mais si la température augmente, il faut tenir compte du comportement plastique de la matrice.

T rugosité

frettage thermique

jeu thermique

­ τF

0

TA T0 T*

Figure 5 

De nombreux composites à matrice céramique sont aussi dans cette situation (SiC/SiC par exemple). On observe pour ces matériaux des comportents à chaud, sous atmosphère neutre, qui attestent d'une diminution de la capacité de transfert de charge : diminution de la résistance ultime parfois, mais surtout augmentation des longueurs extraites de fibres sur les faciès de rupture.

Il faut garder à l'esprit qu'une trop forte différence de coefficients de dilatation entraînera une fissuration de la matrice lors du refroidissement après élaboration, du fait des fortes contraintes de traction longitudinales (cf. Fiche E). C'est, par exemple, le cas des composites à matrice alumine et fibres SiC.

• si ααααm < ααααf, la fibre est libre au départ, mais la rugosité induit quand même un frottement. La situation est ici inverse de la précédente (cf. Fig. 6). Le cisaillement interfacial augmente si la température croît.

T0TAT*

T

rugosité

frettage thermique

jeu thermique

­ τF

0

Figure 6 Certains composites à matrice céramique ou

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Transfert de charge entre fibre et matrice ­ Frottement aux interfaces F2.4

vitrocéramique sont dans ce cas (SiC/verre, par exemple). Les composites carbone/carbone sont souvent dans cette situation : à haute température ils présentent des faciès de rupture plus "lisses", les longueurs d'extraction des fibres sont plus courtes du fait d'un cisaillement interfacial plus important qu'à température ambiante (TA).

4. Effet des coefficients de Poisson

Les effets de Poisson viennent du fait que les coefficients de Poisson des fibres (νf) et de la

matrice (νm) sont a priori différents, et surtout que les déformations longitudinales des deux constituants diffèrent si le transfert de charge opère.

La Fig. 7 montre schématiquement ce qui se passe dans le cas de l'enfoncement ou de l'extraction d'une fibre. Si la fibre est comprimée( Fig. 7a), son expansion radiale entraîne un "coincement" plus grand à l'extrémité comprimée. C'est l'inverse si la fibre est tirée (Fig. 7b).

frettage frettage frettage nominal augmenté diminué

zone de glissement

(a) : enfoncement (b) : extraction

Figure 7   

On utilise les mêmes notations que celles de la fiche E où ont été explicitées les contraintes d'origine thermique :

­ direction longitudinale : εxf et εxm ;

­ direction radiale : εrf et εrm ;

­ direction circonférencielle : εϕ f et εϕm ;

Les déformations transversales induites par effet de Poisson s'écrivent alors :

σ xf εϕ

ν f (R) = −ν ε = −ν (F2.17) f xf f

E f

xmet εν (R) = −ν ε = −νσ

(F2.18) ϕm m xm m Em

et la contrainte radiale résultante à l'interface :

εν (R) − εν (R)ϕmPoissσ = ϕf

(F2.19) rad D

Elle dépend des contraintes subies par les fibres et la matrice, qui dépendent elles mêmes de la

position x dans la zone de transfert de charge. Dans ce qui suit, pour simplifier l'exposé, nous

considérons le cas de l'enfoncement ou de l'arrachement d'une fibre individuelle. La contrainte longitudinale dans la matrice est alors négligeable et nous avons simplement :

ν fPoissσ = σ (x) (F2.20) xfrad D E f

Nous résumons ci­après les différentes étapes de calcul conduisant à l'expression de la contrainte dans la fibre dans la zone de transfert de charge. Rappelons que celle­ci varie linéairement si le cisaillement interfacial est constant.

On note d'abord Δε les autres causes d'incompatibilité radiale :

T Rug Δε σ + σ = (F2.21) rad rad D

avec : Δε = Δα ΔT − δ

(F2.22) D

Il y a frettage si Δε < 0, Δε indépendant de x. L'étape suivante est de considérer l'expression

de base d'équilibre lors d'un transfert de charge (cf. Équ. (F.1), Fiche F) :

Fdσ xf 2τ 2 µ T Rug Poiss )= − = − (σ + σ + σrad rad raddx R R

qui donne, avec ce qui précède :

dσ ⎛ ν ⎞xf 2 µ ⎜ f ⎟= − Δε + σ (x) (F2.23) ⎜ xf ⎟dx R D E⎝ f ⎠

En ce qui concerne les conventions de signe, on considère que le glissement est de gauche à droite, que l'on pousse ou l'on tire sur la fibre (cf. Fig. 8)

F

H

F

σxf σxf dσxf

H

xdσxf 0

dx > 0

⇒ τF < 0 ⇒ τF < 0 0

dx > 0

(a) : enfoncement (b) : extraction Figure 8   

La condition limite est : σxf = 0 pour x = 0. La résolution de l'Équ. (F2.23) est aisée et on

obtient finalement :

E ⎡ ⎛ ν ⎞⎤f 2 µ f⎜ ⎟σ = − Δε ⎢1 − exp − x ⎥ (F2.24) xf ⎜ ⎟ν ⎢ R D E ⎥f ⎣ ⎝ f ⎠⎦

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x

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__________

Transfert de charge entre fibre et matrice ­ Frottement aux interfaces F2.5

Pour x = 0 et donc σxf = 0, le cisaillement

interfacial, noté τ*, est dû aux autres causes d'incompatibilité :

µ Δε τ* = (F2.25)

D

Pour x → ∞, la contrainte, notée σxf ∞, représente la contrainte maximale que le système peut supporter, elle s'écrit :

τ * D E fσ ∞ = − (F2.26) xf

µ ν f

La Fig. 9, ci­dessous, montre l'évolution de la contrainte fibre dans le cas des configurations d'enfoncement et d'arrachement décrites sur la Fig. 8.

x

σxf

H­H

F π R2

extraction

F π R2

enfoncement

pente contrôlée par τ*

σxf

Figure 9 

On constate qu'il est plus facile d'arracher que d'enfoncer car, dans ce dernier cas, le diamètre de la fibre augmente.

Si on réalise des tests de caractérisation de l'interface par extraction (pull­out) ou par enfoncement (push­in, par exemple par indentation sur l'extrémité affleurante de la fibre) on n'observe d'abord pas le même résultat. Ensuite, si l'analyse du test est faite avec l'hypothèse d'un cisaillement interfacial constant on peut obtenir une valeur très différente de celle de τ*.

Les effets de Poisson ne sont donc pas négligeables, sauf éventuellement dans le cas des matrices organiques.

pente liée à τ*

F

2 F

x

σxf

σxf

F

Figure 10   

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La Fig. 10 montre qu'un composite dont la matrice a été fissurée (cas tout à fait équivalent à l'extraction) présente une contrainte ultime σxf∞ (si les fibres ne se sont pas rompues avant !).

Pour une force appliquée, F, assez faible, le rechargement de la matrice est quasiment triangulaire. Si cette force est doublée, le rechargement est très "arrondi" et la largeur de la zone de glissement a plus que triplé.

À mesure que la contrainte fibre s'approche de l'asymptote, la zone de glissement s'étend de plus en plus rapidement jusqu'à recouvrir toute la longueur de la pièce. Il y a alors extraction des fibres sans rupture de celles­ci. Il est vrai que le plus souvent les fibres atteignent leur contrainte à rupture avant que le glissement soit généralisé. Il est cependant clair que la capacité de transfert de charge diminue d'autant plus que la fibre est chargée en traction.

Dans le cas contraire où les fibres se rompent avant que la matrice ne se fissure, la surcharge de la matrice a plutôt tendance à "coincer" les fibres plus fortement. Là il y a un effet de stabilisation du comportement dû aux effets de Poisson.

Pour en savoir plus

Jean­Marie Georges, Frottement, usure et lubrification. La tribologie ou science des surfaces, Éditions Eyrolles et CNRS Éditions, Paris, 2000.

Enfin une présentation compréhensible de la tribo !

Bo N.J. Persson, Sliding Friction. Physical Principles and Applications, Springer­Verlag NanoScience and Technology, Berlin, 1998.

Tout ce que vous voulez savoir sur les nanomécanismes qui opèrent pendant la friction.

Ian M. Hutchings, Tribology. Friction and Wear of Engineering Materials, Edward Arnold, London, 1992.

Le frottement et l'usure dans la pratique, dans les métaux, les polymères, les céramiques.

J.A. Greenwood & J.H. Tripp, The contact of two nominally flat rough surfaces, Proccedings of the Institude of Mechanical Engineers, 1971, vol. 185, pp. 625­633.

Article sur le formalisme micromécanique du contact.

J.W. Hutchinson & H.M. Jensen, Models of fiber debonding and pullout in brittle composites with friction, Mechanics of Materials, 1990, vol. 9, pp. 139­163.

R.J. Kerans & T.A. Parthasarathy, Theoretical analysis of the fiber pullout and pushout tests, Journal of the American ceramic Society, 1991, vol. 74, pp. 1585­1596.

Ces articles sont une bonne base pour une étude approfondie des problèmes micromécaniques des interfaces.

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Micromécanique des composites août 2005

Composites unidirectionnels à fibres courtes

µG D. Rouby

Les fibres courtes sont couramment utilisées comme renfort de composites, mais elles sont rarement alignées. Les effets d’orientation ont été modélisés par différents auteurs. On pourra en trouver une synthèse dans l’ouvrage suivant :

T­W CHOU, Microstructural design of fiber composites. Cambridge University Press. 1992.

Le renforcement par des fibres courtes est moins efficace. D’abord parce que le transfert de charge opère dès le début du chargement, ensuite parce qu’il est très difficile d’orienter convenablement les fibres. Celles­ci sont le plus souvent orientées au hasard dans le plan (mats 2D) et plus rarement dans l’espace (3D).

Dans ce qui suit, on s’intéressera surtout au composite unidirectionnel qui permet une approche simple des lois de comportement, de la résistance ultime et de la ténacité.

1. Transfert de charge

On considère donc un composite à fibres courtes unidirectionnel où toutes les fibres sont parallèles et de même longueur L (Fig. 1).

LFigure 1 

Le volume élémentaire représentatif (V.E.R.) est chargé via la matrice car la liaison à l’extrémité de la fibre est très faible. Le transfert de charge aux extrémités d’une fibre

assez longue est décrit Fig. 2 (on suppose un cisaillement interfacial τ∗ constant) : ● La contrainte que subit la fibre croît linéairement à partir des extrémités pour atteindre un plateau. Le niveau du plateau est :

σf∞ = Ef ε (G.1) x

si la fibre est infiniment longue. ● À mesure que le chargement augmente, le niveau du plateau s’élève et les zones de transfert de charge s’élargissent (Fig. 2b). La longueur λ/2 d’une zone est donnée (à partir de l’Équ. F.1) par :

λ R = σ ∞ (G.2) 2 f 2 τ *

● Quand le plateau atteint la contrainte à rupture de la fibre, celle­ci peut être rompue.

RR'

V.E.R.

σf R

σf

� ∞σfa x

x

σf

λ/2 σf

Rσf � ∞

b

σf

lc L > lc

Rσf

c x

Figure 2 Transfert de charge dans le cas d’une fibre plus longue que la longueur critique.

σf R

σf

� =σf Ef εx a L < lc

x

σf Rσf

TEf εx

b L < lc

x

σf Ef εx ­ σf

R

c L < lc

x

Figure 3 Transfert de charge si la fibre est plus courte que la longueur critique.

lc

Notes

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Composites unidirectionnels à fibres courtes) G2

La longueur critique lc correspond donc à la Contrainte (GPa)

longueur minimale pour que la fibre puisse être rompue 1,2

(cf. Équ. F.9). On peut voir sur la Fig. 3 qu’une fibre plus courte ne peut jamais être rompue, le profil de contrainte restant inchangé après que les zones de transfert de 1,0

charge se soient rejointes.

0,8

2. Loi de comportement en traction

Dans chaque section d’un composite unidirectionnel, la force appliquée est répartie sur les fibres et la matrice

0,6

au prorata de leurs fractions volumiques. On peut donc écrire :

σ = <σf> vf + <σ > v (G.3) 0,4

x m m

où σ est la contrainte moyenne globale (appliquée) et x

<σf>, <σ > les contraintes moyennes dans les fibres et la 0,2 m

matrice.

0,0

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8

Déformation (%)

Figure 5 Composite Carbone/polycarbonate vf = 0,55 ; Ef = 330 GPa ; σf

R = 2100 MPa

E = 2,5 GPa ; σ élast = 55 MPa ; τ∗ = 27,5 MPa m m R = 4 µm ; l = 0,3 mm c

Figure 4  (pour la définition de ε T , voir la Fig.3) x

Dans le cas des fibres courtes alignées (L > l ), si c Contrainte (GPa) celles­ci sont uniformément réparties, on voit sur la Fig. 2,5 4 que la sommation des forces transmises par les fibres à travers la section s­s’ correspond en fait à la moyenne de la contrainte que subit une fibre le long de son axe. On a donc : 2,0

1 L ∞ ⎛ λ ⎞ < σ > = σ dx = σ ⎜1 − ⎟ (G.4) ∫ f f ⎜ ⎟f

L 0 2 L⎝ ⎠

On néglige la perturbation aux extrémités de la fibre 1,5

sur la déformation de la matrice (dans ce cas, l’Équ. G.1 s’applique même pour une fibre de longueur finie). Les Équ. G.2 et G.3 conduisent finalement à la loi de

1,0 comportement suivante (matrice élastique) : 2

E v Rf f 2σ = (E v + E v )ε − ε (G.5) x f f m m x x2τ L 0,5

Dans le cas d’une matrice élasto­plastique (limites élast élast)d’élasticité : σ , ε élast), on a : (pour ε > εm m x m

2E v R 0,0

élast f f 2σ = σ + E v ε − ε (G.6) x m f f x x 0 1 2 3 4 5 62 τ L Déformation (%)

εx T

Carbone/polycarbonate 1000

F

100

10

>

s

s'

a

b

c

d

e

Verre/époxy F

10000

1000

100

10

εx T εm

el

>

Si L < l et que le profil de σf est triangulaire (cf. Fig. Figure 6 Composite Verre/époxy c vf = 0,67 ; Ef = 72 GPa ; σf

R = 3400 MPa 3b ou 3c, où ε > ε T), le calcul de la contrainte x x

E = 2,5 GPa ; σ élast = 60 MPa ; τ∗ = 6 MPa m mmoyenne sur la fibre donne : R = 5 µm ; l = 2,83 mm c

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Composites unidirectionnels à fibres courtes) G3

τ L Notes < σ > = (G.7) f 2 R

on voit qu’elle est indépendante de l’allongement imposé au composite et on a finalement :

τ L σ = + σ ' v (G.8) x m m2 R

où σ’ est la contribution de la matrice qui dépend du m comportement (élastique, élasto­plastique ou autre) de celle­ci.

Les figures. 5 et 6 donnent des exemples de comportement selon le facteur de forme des fibres. Le facteur de forme F est défini par :

L F = (G.9) 2 R

et sa valeur critique par :

Rσlc f F = = (G.10) c 2 R 2 τ

La déformation ε T correspond à la situation où les x deux zones de transfert de charge se rejoignent. (cf. Fig. 3b).

• Pour un facteur de forme très grand, le comportement est celui d’un composite à fibres continues avec un module de Young E donné par la loi des mélanges. Le x composite se rompt à la déformation à rupture des fibres

Rεf . • Pour un facteur de forme fini, la courbe de traction est non linéaire (Équ. G.5). De plus, le module d’élasticité initial et la contrainte ultime sont réduits. • Pour F < F , le composite ne se rompt pas à la c

déformation à rupture des fibres. Ces dernières, trop courtes, ne sont plus assez chargées pour pouvoir être rompues. Le comportement du composite est alors contrôlé par celui de la matrice. Dans le cas du carbone/polycarbonate, la valeur assez

élevée du cisaillement interfacial τ∗ est contrôlée par l’écoulement plastique de la matrice (τ∗ = σ élast/2). Des m fibres de 1 mm de long (F ≈ 100) donnent encore un renforcement notable. Ce n’est pas le cas du verre/époxy où τ∗ est supposé

contrôlé par du frottement à l’interface et prend donc une valeur relativement faible. Dans ce cas il faut des fibres plus longues pour exploiter au maximum le transfert de charge. Il faut aussi noter que la matrice devient plastique

avant la rupture des fibres de verre.

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Composites unidirectionnels à fibres courtes) G4

3. Contrainte ultime 

La contrainte ultime est estimée à l’aide du même raisonnement que celui décrit dans le Module B pour le cas des fibres longues. Rappelons qu’il a été considéré, pour simplifier, que les fibres ne présentent pas de dispersion des résistances (module de Weibull infini). On considère les deux cas :

• L > l : Dans ces conditions, la rupture du composite a c lieu si une fibre se rompt. Par exemple, sur la Fig. 4, les fibres pouvant être rompues sont les fibres b, c ou e. Au moment de la rupture d’une fibre, la largeur des zones de transfert de charge est λ  =  l et l’Équ. G.4 donne la c contribution des fibres à cet instant :

Contrainte ultime (MPa) Verre/époxy

600 vf = 0,26

résistance du composite à fibres continues 500

400 lc = 10 mm

300 lc = 20 mm

200

résistance de la matrice 100

0 25 50 75 100 125

Longueur des fibres, L (mm)

RFigure 7  Effet typique de L sur σ .x

⎛ ⎞l Notes R f ⎜⎜⎝

⎟⎟⎠

c1 − (G.11) σ σ< > = f 2 L

La contrainte ultime du composite est finalement donnée par l’expression suivante :

⎛ ⎞lR R ⎜⎜⎝

⎟⎟⎠

c1 − ' (G.12) σ σ σv + v= f fx m m2 L

• La réduction de résistance est contrôlée par la longueur critique lc qui inclut les propriétés interfaciales. • Si les fibres sont très longues, la contrainte ultime est celle donnée par l’Équ. B4, Fiche B. • Si les fibres ont la longueur critique, la résistance ultime est réduite de près de la moitié (cf. Fig. 7).

•  L  <  lc : Dans ce cas, comme nous l’avons vu précédemment ( Fig. 5 et 6), les fibres ne peuvent être rompues et la rupture du composite est contrôlée par celle de la matrice. On a alors simplement :

m R m

R x

R

L v

2 σ

τ σ += (G.13)

La rupture est ici contrôlée par la matrice.

3. Énergie de rupture 

On suppose que la matrice se rompt suivant une section droite, soit par coalescence de cavités, soit par propagation d’une fissure amorcée à une extrémité de fibre (Fig. 8).

La séparation nécessite d’extraire les fibres et cette extraction concerne bien entendu le côté le moins profondément enchâssé. L’énergie nécessaire pour séparer les deux parties du

composite fait intervenir les énergies de rupture de la matrice, éventuellement des fibres (ces deux dernières sont le plus souvent négligeables) et, surtout, le travail d’extraction des fibres.

longueur d'extraction, lp amorçage

dz z

Figure 9 lp Figure 8 

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Composites unidirectionnels à fibres courtes) G5

Considérons une fibre enchâssée sur une profondeur lp, le travail d’extraction de l’élément dz est : dW = 2 π R 

dz τ∗ z, et le travail pour extraire la fibre est alors : 

l W =

p 2 π R τ * z dz = π R τ * l 2 (G.14)(l p ) ∫ p0

 

•  L  <  lc : Dans ce cas, aucune fibre n’est susceptible d’être rompue et lp est compris entre 0 et L/2 avec une distribution uniforme. Le travail moyen pour extraire les fibres est alors

donné par : 21 L / 2 π R τ * L

W = W dl = (G.15) (L<l ) (l ) pc L / 2 ∫0 p 12

L’énergie de rupture, c’est­à­dire l’énergie nécessaire pour créer une fissure de rupture sur la section d’aire A, qui contient N fibres, s’écrit :

N W N fv G = avec : = (G.16)

2A A π R On a finalement :

2τ * L G = v (G.17) (L < l ) fc 12 R

On voit que G est proportionnel au taux de fibres et au cisaillement interfacial. L’énergie de rupture croît avec le carré de la longueur des fibres. Rappelons que lc dépend de τ∗.

•  L  >  l : Maintenant, la profondeur enchâssée peut c excéder l /2. Si c’est le cas, la fibre sera rompue et non­c

extraite. Il en résulte que le travail d’extraction est nul car la rupture de la fibre se produit au droit de la fissure dans la matrice (alors : lp = 0).

En ce qui concerne les fibres extraites et non­rompues, la plus grande profondeur enchâssée est l /2 et c

elles sont en proportion l /L du nombre de fibres c

présentes dans la section considérée. Dans ces conditions, l’énergie de rupture s’écrit :

2τ * L l G = v c (G.18) (L > lc ) f12 R L

Là, l’énergie de rupture varie en raison inverse de la longueur (cf. Fig. 10). Elle est maximale pour une longueur de fibre égale à la longueur critique.

2 v R (σ )2 τ * l fRfmax cG = G = v = (G.19) (L = l ) fc 12 R 12 τ *

Pour les composites des Fig. 5 et 6, les valeurs de Gmax sont les suivantes :

Carbone/polycarbonate: Gmax = 29,4 kJ/m2 ; l = 0,3 mm c

Verre/époxy : Gmax = 5,4 kJ/m2 ; l = 2,8 mm c

La plupart du temps les valeurs de Gf ou G sont m

comprises entre 0,01 et 0,1 kJ/m2.

G Gmax

prop. à L2

prop. à 1 L

Gm vm + Gf vfGm vm

lc L

Figure  10  Évolution de l’énergie de rupture avec la longueur des fibres

La présente analyse donne pour les composites à fibres continues (L infini) un travail d’extraction nul. Dans la réalité, la rupture des fibres (contrôlée par la présence de défauts) n’a pas lieu exactement au droit de la fissure matricielle et l’extraction intervient encore. Ces aspects seront analysés plus loin.

Notes 

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Micromécanique des composites août 2005

Comportement des composites

à fibres longues et matrice flexible et tenace µH D. Rouby

"Predicting the strength of unidirectional fibre composites from the properties of their constituents is a task which has not been solved for all classes of materials" : introduction de M. LIEKAMP and H.E. EXNER, ¨Prediction of the strength distribution for unidirectional fibre reinforced composites, Acta materialia, vol. 44, n° 11, pp. 4433­46 (1996).

Les articles pionniers dans ce domaine sont : B. Walter ROSEN, Tensile Failure of Fibrous Composites, AIAA Journal, vol. 2, n° 11, pp. 1985­1991, nov. 1964. Carl ZWEBEN, Tensile Failure of Fiber Composites, AIAA Journal, vol. 6, n° 12, pp. 2325­2331, dec. 1968.

Par composite à matrice flexible, on entend un composite où, s'il est soumis à une traction dans la direction longitudinale, le premier événement d'endommagement est la rupture de fibres : εf

R <

ε R. C'est le cas général des composites à matrice m organique (E faible) et métallique (matrice plus m rigide, mais ductile). Le cas extrême d'un composite de ce type est

l'écheveau sec de fibres où la matrice est absente ou de module d'élasticité très faible. Dans ce cas, il n'y a pas de transfert de charge par l'interface et le comportement de ce système est simplement gouverné par les ruptures successives des fibres dont les résistances sont décrites par une statistique de Weibull (cf. Fiches C et D). La résistance ultime de ce système est donnée par :

σmax 0σ (L) = (H.1) E 1 m 1 m 1 m m L e

où m et σ0 sont les paramètres de Weibull des fibres et L, la longueur de l'écheveau.

σm R

σf R

σm '

crit

vf

σx R

rupture multiple des fibres

rupture du composite amorcée par la

rupture d'une fibre

0 vf 1 Figure 1 Résistance ultime d'un composite 1D en fonction du taux de fibres (cf. Fiche B)

Le cas d'une matrice qui possède des caractéristiques mécaniques non négligeables a été analysé de façon très simplifiée dans la Fiche B. La contrainte ultime a été estimée en considérant que toutes les fibres présentent la même contrainte à rupture σf

R, et qu'elles se rompent donc toutes dans la même section. Dans ces conditions, la contrainte ultime du

composite, si vf > vfcrit, s'écrit : R Rσ = σ v + σ ' v (H.2) x f f m m

où vf et v sont les fractions volumiques des fibres m

et de la matrice et σ' , la contrainte supportée par m

la matrice à l'instant de la rupture finale (cf. Fig. 1). Les observations expérimentales, comme

l'émission acoustique, attestent que les fibres commencent à se rompre bien avant la rupture du composite. Les faciès présentent une morphologie "en brosse" qui vient de ce que les fibres ne se rompent pas dans le même plan. Pour décrire le comportement réel d'un

composite de ce type, il s'avère donc nécessaire de prendre en compte la séquence des phénomènes qui mènent à la rupture finale. Dans ces conditions, on peut estimer l'influence de différents paramètres sur la résistance ultime du composite, en particulier la distribution des résistances caractéristiques de la matrice. C'est l'objet de la présente F

des

iche.

fibres et les

1. Report de charge radial

Lors de la sollicitation en traction d'un composite unidirectionnel, on observe une première rupture de fibre, à l'endroit où la fibre la plus faible de l'ensemble du renforcement présente le défaut le plus sérieux de la population présente. L'effort qui était transmis par cette fibre est

alors reporté sur les voisines : il y a un phénomène de report de charge radial vers les voisines (cf. Fig. 2). Celui­ci opère dans le proche voisinage par l'intermédiaire du cisaillement de la matrice et de ce qui se passe à l'interface. Les fibres voisines subissent une surcharge par

rapport à la contrainte nominale en plateau, σf∞,

qui est donnée par : E f∞σ f = σ x (H.3) Ex

Cette surcharge est quantifiée par le facteur de multiplication de contrainte k . (où n est le nombre n

de fibres rompues dans la même zone, cf. Fig. 3). Ce facteur sera analysé plus loin. Pour envisager la succession des phénomènes

d'endommagement lorsque de chargement croît, il faut donc considérer la probabilité de rupture de la fibre b dans la zone de surcharge, comparativement aux probabilités de rupture des autres fibres (fibre a, par exemple) ou de la fibre b en dehors de la zone de surcharge. Le résultat dépend de l'intensité du report de charge, en amplitude et en extension longitudinale.

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H.2 Composites à matrice flexible et tenace

σfb

x kn σfσf

fibre b

σfa

x σf

fibre a

y

σx

b

a

L

h

Figure 2 Report de charge radial à la suite de la

∞∞

rupture d'une fibre.

Le report de charge radial concerne essentiellement les premières voisines et son amplitude ne dépend pas des paramètres des matériaux, mais simplement du nombre de fibres rompues dans la même zone et du nombre de premières voisines, comme on peut le voir sur la Fig. 3.

k1 = 1 + 1 k2 = 1 + 2 k3 = 1 + 3 6 8 9

­ Si l'interface est suffisamment résistante, la rupture de fibre peut conduire à une fissure lenticulaire dans la matrice (Fig. 4a) induite par les déplacements axiaux, ou à deux fissures coniques à 45° induite par les efforts de cisaillement dans la matrice. Dans le cas d'une interface liée où l'on ne tient

pas compte des fissures précitées (la matrice ne joue alors que le rôle de milieu de transmission de l'effort par cisaillement), la distance y peut s'écrire (Chou, 1992) comme suit :

3 R E f h y = (H.5)

Gm

où G est le module de cisaillement de la matrice m et h, l'espacement des fibres. Les fibres voisines sont donc surchargées sur une longueur d'autant plus grande que la raideur de la matrice est faible et que les fibres sont plus éloignées. Il faut remarquer que dans la pratique, le

paramètre h est très dispersé et que cela conduit à une surcharge effective plus forte. La présence de fissures accroît le facteur k du n

fait des concentrations de contrainte en fond de fissure qui sont induites. L'analyse de ces effets est délicate et dépasse le cadre de cette Fiche.

(a)

Figure 3 Valeurs du facteur de multiplication de contrainte pour un singlet, un doublet et un triplet.

L'extension longitudinale, , de la zone de surcharge dépend des mécanismes de report de charge et du comportement de l'interface. Cette distance est souvent appelée longueur ineffective : c'est sur cette longueur que la fibre rompue ne supporte plus l'effort appliqué.

­ Comme décrit sur la Fig. 4c, la rupture de fibre peut entraîner une décohésion à l'interface. Dans le cas d'une interface non liée contrôlée par un cisaillement interfacial τ* constant (cf. Fiche F), on peut considérer que la distance y correspond à la longueur critique l , car c'est la largeur de la zone c

de transfert de charge de part et d'autre de la rupture de la fibre :

Rσ f y = l = R (H.4) c

τ * Remarque : comme les résistances des fibres sont distribuées, σf

R et par conséquent l ne sont pas c uniques. Un bon ordre de grandeur pour l est de c considérer dans l'Équ. H.4 la résistance moyenne des fibres.

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(b)

(c)

Figure 4 Mécanismes associés à la rupture d'une fibre. (a) : fissure lenticulaire, (b) fissures coniques, (c) : décohésion interfaciale.

2. Séquences d'endommagement

Sur la Fig. 3, on voit que si des ruptures de fibres s'accumulent dans la même zone, le facteur de multiplication de contrainte augmente et, par conséquent, la probabilité de rupture des fibres voisines va en croissant. Il y a là le germe d'un processus en avalanche qui conduit, à un moment donné, à la rupture finale de façon catastrophique. La Fig. 5 montre une séquence typique de

Page 64: MICROMECANIQUE DES COMPOSITES - INSA de Lyon

H.3 Composites à matrice flexible et tenace

ruptures de fibres dans un composite à matrice organique ou métallique.

Figure 5 Séquence d'accumulation des ruptures sous traction longitudinale.

En début de traction (à gauche), on observe des ruptures éparses, très éloignées les unes des autres. À mesure que la charge appliquée augmente le facteur k1 induit l'apparition de rupture de fibres voisines et la création de doublets. Comme la rupture d'une fibre n'affecte qu'une

petite longueur de celle­ci, la longueur ineffective, cette fibre peut être rompue à nouveau, ce qui est très différent du cas de l'écheveau sec. Le nombre de doublets augmente ensuite, avec apparition de plus en plus fréquente de triplets (car k2 > k1), puis de quadruplets, etc. On voit donc qu'en début de chargement il y a

accumulation de l'endommagement dans des sites aléatoires avec une diminution progressive de la longueur des fragments. Comme la longueur ineffective est courte par rapport à la longueur de la pièce, la loi de comportement est peu affectée par ce phénomène et reste sensiblement linéaire avec une pente égale au module longitudinal E .xCe processus d'accumulation pourrait se

poursuivre théoriquement jusqu'à ce que tous les fragments aient une longueur comprise entre y/2 et y. Dans la réalité, il est limité par l'apparition de plus en plus rapide de doublets, triplets, etc., qui conduisent à un processus de localisation de l'endommagement. Pour un n­tuplet (un cluster de taille n) donnée, le facteur k est suffisamment n grand pour que les ruptures des fibres voisines puisse être tenues pour certaines. Ce mécanisme en avalanche conduit alors à la rupture finale (Fig. 5, à droite). La démarche d'optimisation d'un composite

consiste donc à retarder au maximum ce processus de localisation. Cela est fait dans l'écheveau sec de fibres où kn

est minimisé, mais la longueur ineffective est trop grande. Dans un composite réel, il faut donc

réduire la longueur ineffective en augmentant les caractéristiques interfaciales et la rigidité de la matrice, tout en limitant le facteur de multiplication de contrainte aux valeurs données sur la Fig. 3. Ces exigences sont globalement contradictoires et cela explique la phrase citée en exergue. Dans ce qui suit, on considère de façon très

succincte les deux modèles de comportement qui résultent des cas extrêmes précédents : le modèle d'accumulation de l'endommagement (modèle de Rosen) qui rend compte de façon assez satisfaisante du comportement des composites à matrice organique, et le modèle de localisation de l'endommagement (modèle de Zweben) qui doit plutôt être considéré dans le cas des composites à matrice métallique. Les composites à matrice céramique présentent

des séquences d'endommagement différentes, cela est traité dans la Fiche i.

3. Accumulation de l'endommagement

Si on prend l'exemple d'un arrangement hexagonal de fibres de verre dans une résine organique (Fig. 2), le facteur de surcharge maximal des voisines d'une fibre rompue est k1 = 1,166 et il s'exerce sur une distance y de l'ordre de 0,2 l , soit c

environ 0,4 mm. Comme la résistance ultime d'une fibre de 0,4 mm est près du double de celle d'une fibre de 25­50 mm de long, on conçoit aisément que les fibres voisines ont peu de chance de se rompre spontanément sous l'effet de la seule surcharge. En fait, il est peu probable qu'une fibre adjacente contienne un défaut très sérieux justement dans cette zone de surcharge. Cela est surtout vrai en début de chargement.

y

y

rupture y L

y

y

Figure 6 Modèle d'accumulation de l'endommagement

Ces considérations ont conduit Rosen à proposer un mécanisme (décrit sur la Fig. 6) d'accumulation aléatoire des ruptures de fibres en négligeant les effets des surcharges des voisines.

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H.4 Composites à matrice flexible et tenace

Les ruptures apparaissent sur les différentes fibres et, tant que le composite n'est pas rompu, une fibre donnée peut être rompue plusieurs fois. Ce processus se poursuit jusqu'à ce qu'une

section ne puisse plus supporter une nouvelle rupture et devienne instable. Le composite peut donc être décrit par un

système en série d'écheveaux de longueur y, la longueur ineffective (cf. Fig. 6). Il est réputé rompu si l'un des écheveaux atteint l'instabilité.

À partir de l'Équ. H.1, la résistance de cet écheveau, de longueur y, s'écrit :

mmm eym y

111 0max )(

σ σ (H.6)

où σ0 et m sont les paramètres de Weibull des fibres, déterminés respectivement à partir de leur résistance moyenne, mesurée sur une longueur de jauge L (cf. Fiche C) :

= E

Il faut chercher la relation entre la résistance du composite et la statistique de rupture des fibres les plus faibles, en faisant intervenir les probabilités croissantes de création de clusters. Cette approche a été initiée par Zweben. La Fig. 7, ci­dessous, montre un résultat typique

de simulation par la méthode de Monte­Carlo dans le cas de composites à matrice métallique. Il s'agit d'un composite à matrice aluminium pur, renforcée par des fibres d'alumine­silice (fibre Altex de Sumitomo) : 2R = 15 µm ; Ef = 210 GPa ; vf =

0,55 ; <σfR> = 2000 MPa ; m = 3,5 ; l = 250 µm. c

0

2

4

6

8

10

0 500 1000 1500 2000

taille des clusters

n = 1 2 3 4 5

Nombre

de

clusters

Résistance du composite 

Loi des mélanges Rosen 

1⎞⎟⎠

⎛⎜⎝

R σ 0 1 (H.7) σ Γ< > = +f 1 mL

et le coefficient de variation (CV = 1,2 / m). Dans ces conditions, la résistance du composite

est donnée par l'expression suivante:

m

R max ( ) vσ = σ y + σ ' v (H.8) Contrainte (MPa) x E f m m Figure 7   

Si on compare la résistance de l'écheveau y à la Composite Altex/aluminium en traction. résistance moyenne des fibres : Simulation des ruptures de fibres en fonction de la

m1 σ

<

( y)

>

σL = =

contrainte appliquée (d'après Liekamp et Exner, max ⎛ 0

m y e E

σ

⎞⎟⎟⎠

⎜⎜⎝ 1 m 1 m 1 m

on constate que le rapport B est voisin de l'unité, pour les valeurs courantes des paramètres L, y et m. Par exemple :

pour m = 5 et L / y = 10 : B = 1,024 m = 10 et L /y = 10 : B = 0,951 m = 10 et L /y = 100 : B = 1,198

On voit donc que, en première approximation, la résistance du composite peut­être décrite par la Fig. 1 et l'Équ. H.2, à condition de prendre la résistance moyenne des fibres. Ce modèle décrit bien le comportement des

composites verre/résine, mais il a tendance à surestimer la résistance des composites à fibres de carbone et Kevlar.

4. Localisation de l'endommagement

Dans le cas des composites à matrice métalliques, en particulier si les fibres dont de grand diamètre (filaments CVD de Bore ou de SiC), on constate que la rupture du composite se produit avec très peu de ruptures de fibres préalables. Le modèle précédent n'est donc plus opérant.

R yf

B (H.9) 1996).

On constate que la rupture du composite a lieu lorsque les doublets et triplets commencent à apparaître. Le modèle de Rosen (Équ. H.8) surestime fortement la contrainte ultime. La loi des mélanges (Équ. H.2) entre dans la fourchette expérimentale, mais elle ne rend pas compte de la dispersion qui provient du comportement statistique des fibres. La relation entre l'existence de doublets ou

triplets et leur nombre, sur l'instabilité du composite n'est actuellement encore pas bien comprise.

Pour en savoir plus.   Les articles pionniers de Rosen et Zweben cités en page 1 décrivent bien la problématique.

T­W CHOU, Microstructural design of fiber composites. CambridgeUniversity Press. 1992. L'analyse du report de charge y est faite de façon détaillée.

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Micromécanique des composites août 2005

Comportement des composites à matrice fragile µ i

D. Rouby

Les composites à matrice fragile, et à fibres fragiles, sont en fait très tenaces car les fibres pontent les fissures et le comportement de l'interface en est la clé. Le papier ci­dessous fait figure de pionnier dans ce domaine. • J. AVESTON, G.A. COOPER & A. KELLY, "Single and multiple fracture" dans The Properties of Fibre Composites, Conference Proceedings, National physical Laboratory, IPC Science and Technology Press Ltd., 1971.

Les composites à matrice fragile se caractérisent par un allongement à rupture de la

Rmatrice inférieur à celui des fibres: ε R < εf .m Il s'agit des composites à matrice céramique ou

carbone, mais aussi des matrices organiques à très basse température.

Le premier endommagement, sous sollicitation en traction, est donc une fissure dans la matrice. Celle­ci traverse toute la section du composite à condition que la liaison interfaciale ne soit pas trop forte.

Contrairement au cas de la rupture d' une fibre (cf. Fiche H), le problème du report de charge dans la direction transversale ne se pose pas ici car la fissure matricielle traverse toute la section du composite.

Si le renfort survit à cette première fissuration, on observe une fissuration multiple de la matrice qui confère au matériau des propriétés intéres­santes de "pseudo­ductilité". Le même type d'analyse peut s'appliquer, par exemple, à la fissuration des plis à 90° dans un stratifié [0/90] ou à celle du plâtre dans une "plaque de plâtre" faite d'un cœur en plâtre et de joues en carton.

1. Cas d'école où la résistance de la  matrice est Runique et où εεεε R << εεεεfm

Modèle de Aveston, Cooper et Kelly (ACK)

Dans ce cas, la courbe de traction présente plusieurs stades (Fig. 1 ci­dessous) qui seront explicités dans ce qui suit.

Nous verrons plus loin (§ 2.) que ce type de courbe est observé dans la pratique pour certaine combinaisons de paramètres mais que les propriétés du composite ne sont alors pas optimales.

σx

εx

εm R

εf R

O

εsat

εrés de B

A B

C

C'

Figure 1 

• De O à A : le chargement est élastique avec : E = E v + E v (I.1)x f f m m

• Entre A et B, il y a fissuration de la matrice. La première fissure apparaît à la déformation du composite : ε = ε R.x m

La Fig. 2 montre les profils de contrainte induit par une fissure matricielle unique. Il s'agit du schéma dual de celui dû à la rupture d'une fibre (cf. Fiche F, § 2.1.).

x

σf

x

σm y

avant

A B C

1

après

0

0

B'

σx vf1

η Ef εm

R P

Q

R

σm R = Em εm

R

Figure 2 

Ici, la distance y de transfert de charge ne correspond pas à la longueur critique :

R R vm y = σ (I.2)mτ * v f

La création de la fissure produit un allongement ΔU1 du composite qui est proportionnel à l'aire hachurée PQR :

ε R ymΔU = (I.3)1 2 η

E f v f avec : η = (I.4)

E vm m

et l'incrément de déformation du composite est alors ΔU1/L (L : longueur de la pièce).

La fissuration multiple de la matrice est un mécanisme analogue (mais dual) à la fragmentation d'une fibre. Cette fissuration a lieu jusqu'à saturation et il en résulte un allongement de la pièce, de A à B. Le segment AB est horizontal car la résistance de la matrice est ici supposée unique (module de Weibull infini).

Le processus de fragmentation est schématisé sur la Fig. 3.

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Comportement des composites à matrice fragile i 2

une inversion partielle des profils de contrainte comme cela est montré sur la Fig. 5. Cette inversion conduit à une courbe de décharge parabolique (cf. Fig.1).

x

A BB' CC' DE

DminDmax

1 2

3

4

σm

y/2

σm R

x x

εf εf

D = Dmax = y Dmin = y/2

Figure 5   

On constate qu'à charge nulle, les fibres subissent encore une contrainte résiduelle de Figure 3   traction, la matrice étant alors globalement en

On peut montrer facilement que Dmax = 2 Dmin et compression (il ne s'agit pas de contraintes d'origine thermique !). on voit ci­dessous que la longueur moyenne des

Cela provient des frottements entre fibres et blocs varie en raison inverse du taux de fibres et matrice qui empêchent le retour complet. À partir du cisaillement interfacial : des aires hachurées de la Fig. 5, on obtient

3 y 3 R R vm aisément la déformation résiduelle après décharge < D > = = σ (I.5) m4 4 τ * v en fin de fissuration (à partir de B, Fig. 1), qui est f la même pour les deux cas extrêmes :

Rε mε = (I.6) rés (de B) 4 η

• Entre B et C : seules les fibres s'allongent. En effet, à la saturation de la fissuration, le profil de contrainte dans les fibres est en dents de scie (profils du haut de la fig. 5, pour les deux cas). Si le chargement se poursuit, ce profil glisse simplement vers le haut en restant égal à lui­même: les fibres subissent un allongement élastique supplémentaire.

Par contre, l'état de contrainte dans la matrice reste inchangé : l'effort introduit dans les blocs de matrice par transfert de charge ne peut pas excéder celui qui existe au point B.

La pente de chargement de l'éprouvette est simplement :

pente BC' = E f v f (I.7)

x x

εf εfεm R

εm R/η

D = Dmax = y Dmin = y/2

Figure 4   

L'allongement de la pièce à la saturation de la fissuration est donné par les aires hachurées (Fig. 4) selon que l'on considère que toutes les fissures sont distantes, soit de (à gauche) soit de Dmax Dmin (à droite) :

⎛ ⎞1 Si on décharge à partir de C', le profil de σfR( )max 1ε εD += ⎜⎜⎝

⎟⎟⎠

sat m 2 η s'inverse d'abord, d'où l'allure parabolique du début de décharge. Le profil inversé glisse ensuite vers le bas, ce qui donne une décharge linéaire ⎛ ⎞3R( )min 1 (I.6) ε εD += ⎜⎜

⎝⎟⎟⎠

sat m 4 η parallèle à la droite BC' (la droite médiane entre la charge BC et la fin de décharge passe par

⎛ ⎞5 l'origine). On peut montrer facilement que la déformation

R( ) 1 +ε ε< D > = ⎜⎜⎝

⎟⎟⎠

sat m 8η résiduelle est alors le double de εrés (de B).

• Décharge­recharge à partir de A (Fig. 1) : lors • En C (Fig. 1) : il y a rupture des fibres. de la décharge, les glissements s'inversent RSi R >> ε , les fibres subissent une εf mprogressivement (cf. Fiche F, Fig. 13). Il en résulte

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Comportement des composites à matrice fragile i 3

contrainte globalement uniforme car les déjà rompues et de la position s'écrit : fluctuations en dents de scie dues aux blocs de T 2 τ *⎛

⎜⎝

⎞⎟⎠

x(T , ) 1 − (I.9) σ avec : = T =matrice sont d'amplitude faible (cf. Fig. 6). xf

a Ra La contrainte maximale en pointe (en A, Fig. 7)

est donnée par : σ xT = (I.10)

v f (1 − PR )

où PR est la probabilité de rupture des fibres sous ce profil de chargement. Elle s'écrit :

x

σf

lc

σf R

Figure 6   

⎡ ⎤m f⎛ ⎞σ (T , )a x⎢ ⎢⎢⎣

⎥ ⎥⎥⎦

f

∫0

La matrice multifissurée se comporte en fait où σ0f et mf sont les paramètres de Weibull pour comme une matrice flexible et on est ramené au les fibres. On obtient finalement :

1 2− −PR dxexp=σ 0 f

⎜⎜⎝

⎟⎟⎠

cas des composites à matrice organique flexible ⎡ ⎤m +1 R T f

(Fiche H). La contrainte ultime du composite est PR = 1 ⎢ ⎢⎣

⎥ ⎥⎦

(I.11) − exp − (m 1)donc celle d'un écheveau de longueur l (la c

mτ *σ 0 f+f f

contribution de la matrice est ici le plus souvent La résistance de l'écheveau est calculée comme négligeable) : dans la Fiche D, le critère étant ici :

1 m f 1 xdσ dσ⎛L xR R = 0 car ε = <εf>. (I.12) x ⎞⎟⎟⎠

σ σ = = < > v ⎜⎜⎝ 1 m 1 dε dTf x(m e) Γ(1 + m f )f

f fx lc

La déformation moyenne des fibres, <εf>, est elle R Rσ ≈ < σ > v (I.8) x f f max = T / Ef.même proportionnelle à εf où L est la longueur utile et mf le module de Ce critère conduit à la condition suivante : Weibull des fibres. m f +1

Si la rupture des fibres commence avant que R T = 1 (I.13)

mla fissuration matricielle ne soit saturée (εfR ≥ τ *σ 0 f

f

ε R), l'analyse précédente n'est plus valable. et donc à l'instabilité, nous avons : m

⎡ ⎤Si on suppose que les fissures matricielles 1* 1 (I.14) ⎢

⎢⎣⎥ ⎥⎦

− exp −PR = sont toutes suffisamment éloignées les unes des m f + 1 autres pour qu'elles n'interagissent pas, la charge

(m 1)1ultime du composite est contrôlée par la rupture de +f⎛⎜ ⎜

mτ *σ fl'écheveau de fibres qui ponte l'une de ces fissures ⎞

⎟ ⎟

0 f* = (I.14a) −et T

(cf. Fig. 7). La probabilité de rupture des fibres étant

R⎝ ⎠

∞ La contrainte ultime est donnée finalement par faible à la contrainte σf , on suppose que les l'expression suivante :

fibres subissent un chargement triangulaire P'QR', Rσ = v T * (1 − P *) (I.15) de base 2a et de sommet au niveau T. x f R

(m 1)1 ⎛⎜⎜

⎞⎟⎟

+fτ *⎛⎜⎝

(m 1)1R +

x

σf

a

A B C

1 0

B'

1 ηP

Q

R

P' R'

T

σf �

Figure 7   

⎞⎟⎠

σ 0 fσ f exp −= v fx R m +f⎝ ⎠

La matrice n'intervient pas. On voit que la contrainte ultime croît si la résistance des fibres est plus grande et si le cisaillement interfacial augmente.

Ce dernier ne doit pas excéder une valeur limite, sinon la fissure matricielle n'est plus déviée aux interfaces et le comportement global du composite est alors fragile.

Un module de Weibull des fibres plus grand tend aussi à augmenter la résistance du composite.

La contrainte dans les fibres, fonction du chargement extérieur, de la proportion de fibres

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1

1

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Comportement des composites à matrice fragile i 4

2. Cas réel d'une matrice fragile

La matrice contient des défauts initiaux dont les effets sur la résistance sont décrits par une statistique de Weibull. L'analyse déterministe du paragraphe précédent doit donc être amendée.

• Le début de la  fissuration apparaît, dans la pratique, à une déformation supérieure à <ε R>, m bien qu'elle soit amorcée par le défaut le plus critique présent dans la matrice.

Une première raison qui peut être invoquée est que la création d'une fissure dans la matrice est accompagnée d'une redistribution des contraintes qui fait intervenir des frottements aux interfaces fibre/matrice.

L'énergie nécessaire pour propager la fissure est donc l'énergie absorbée par la création des surfaces, augmentée de celle dissipée par les frottements. Il en résulte une ténacité apparente de la matrice plus grande. Suivant l'analyse de Aveston, Cooper et Kelly, la déformation de première fissuration est donnée par :

3. Exemples de comportement

Afin d'illustrer les effets de différents paramètres dans un cas réel, on présente ci­après des résultats de simulations correspondant à un composite unidirectionnel SiC (Nicalon)/SiC en traction . (Extrait de Nathalie Lissard­Godin, Probabilité de rupture et fiabilité des composites à matrice céramique, Thèse de Doctorat, Univ. de Bordeaux, 1991)

La simulation consiste à calculer en tous points du composite les probabilités de rupture (fibres et matrice). Si celle­ci vaut 1/2, on considère que la rupture a lieu. Il en résulte un nouvel état de contrainte et l'on recommence en incrémentant la force appliquée s'il y a lieu.

Sauf mention contraire, les paramètres utilisés sont les suivants (ils rendent bien compte du comportement expérimental) :

Fibres : Matrice : Ef = 200 GPa E = 400 GPa m vf = 31,5 % v = 61 % m

<σfR> = 1400 MPa <σ R> = 240 MPa m1/ 3

⎞⎟ ⎟

2⎛⎜ ⎜

(base : L = 75 mm) (I.16) mf = 5,45 mm = 5,14

12 τ * G E vm f fε x =0 2

E E R v⎝ ⎠ Composite : τ* = 80 MPa L = 75 mm x m m

où G est l'énergie de rupture de la matrice. m Il faut noter qu'un effet de taille peut aussi

jouer. En effet, les espaces interfibres sont très petits par rapport au volume total de matrice.

• La  fissuration multiple conduit à un plateau dans le modèle déterministe de ACK.

Dans le cas d'une matrice weibullienne, chaque nouvelle fissure demande un incrément de contrainte. Cela peut être expliqué par un effet de taille : la résistance des blocs de matrice croît si leur taille diminue (Fig. 8).

• Les propriétés de la  matrice jouent un rôle fondamental sur le comportement du composite.

Si on augmente ou diminue la résistance de la matrice par rapport au comportement réel (Fig. 9), le seuil de fissuration varie en proportion. À noter aussi qu'une résistance faible (­50%) fait apparaître les trois stades du modèle de ACK car les domaines de rupture de la matrice et des fibres sont alors plus séparés (cf. cas –50%, ci­dessous).

0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0

40

80

120

160

Déformation (%)

Force (N)

- 50 %

0 % - 10 %

+ 10 %

+ 50 %

Effet de la résistance de la matrice

variation de σm R

L

1ère fissure : rupture de L

2ème fissure : rupture de L/2

3ème fissure : rupture de L/3

etc. λ

Figure 8   

Grossièrement, on peut écrire (cf. Fiche C) : L σ σx m 1/ mmλ = et = = n (I.17) n σ σx0 m0

avec n : nombre de fissures, m : module de m Weibull de la matrice.

À partir de la première fissuration (à σx0 et

), la contrainte appliquée σ augmente àσm0 x mesure que la multifissuration se poursuit.

Figure 9   

L'effet du module de Weibull est aussi très important (Fig. 10). Si m diminue, la pente de la m zone de multifissuration augmente fortement, comme suggéré par l'Équ. I.17. Pour m très m grand, on retrouve le comportement de ACK, illustré par la Fig. 1.

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Comportement des composites à matrice fragile i 5

0

40

80

120

160 3

6 10

30

Force (N) mm

Déformation (%)

Effet du module de Weibull matrice

0

40

80

120

160

Force (N)

Déformation (%)

L = 10 mm

L = 75 mm

L = 300 mm

Effet de la longueur de jauge

0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8

Figure 10   

• Les propriétés des fibres interviennent surtout vers la fin de la courbe de traction. La résistance moyenne des fibres contrôle de façon très nette la résistance et la déformation ultime du composite (Fig. 11).

Un module de Weibull petit conduit à une résistance ultime plus faible et à une courbe plus arrondie vers la fin illustrant par là une rupture plus progressive des fibres (Fig. 12).

0

50

100

150

200

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2

Force (N)

Déformation (%)

+ 30 %

+ 50 %

- 10 %

- 30 %

variation de σf R

Effet de la résistance des fibres

0 %

Figure 11   

40

80

120

160

Déformation (%)

Force (N)

50

10

3

5

mf

Effet du module de Weibull fibres

0,0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7

Figure 12   

La longueur utile joue directement et fortement sur les résistances de la matrice et des fibres, du fait de l'effet de taille de Weibull (Fig. 13).

0,0

Figure 13   

0,2 0,4 0,6 0,8 1,0

•Le cisaille

indirectement ment via le

interfacial nombre de

intervient fissures à

saturation. On constate (Fig. 14) que si τ* augmente, la contrainte ultime croît, par effet de taille car les fibres sont surchargées sur une plus petite longueur. On voit aussi que l'allongement ultime diminue, car l'incrément d'allongement pour chaque fissure varie en raison inverse de τ* (Équ. I.2 et I.3).

0

20

40

60

80

100

120

140 Force (N)

Déformation (%)

τ* (MPa)

200

80

5

Effet du cisaillement interfacial

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7

Figure 14   

4. Autres situations

• Le comportement en compression se caractérise par un comportement linéaire lorsque les fissures se sont refermées.

σx

εx

F

0

Figure 15   

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0

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Comportement des composites à matrice fragile i 6

La position du point de fermeture, en F, dépend du signe des contraintes thermiques résiduelles (cf. Fiche E). En effet, si la matrice est en traction résiduelle, l'ouverture de la fissure est plus grande que celle donnée par les profils des contraintes donnés sur la Fig. 2.

Pour refermer la fissure il faut alors appliquer une compression plus importante. C'est bien entendu l'inverse qui est observé si la matrice est en compression résiduelle.

• Le comportement à la rupture de ces matériaux est généralement bon, car les fissures sont pontées par les fibres (Fig. 16).

La ténacité des composites est directement liée au propriétés des fibres et de l'interface. (cf. Fiche C).

zone pontée

fissure

Figure 16   

L'énergie de rupture qui s'ajoute aux énergies de création de surface dans les fibres et la matrice (ces dernières sont souvent négligeables) correspond au travail des forces de pontage lorsque l'ouverture de la fissure augmente de 0 à l'infini.

À mesure que la fissure se propage et donc s'ouvre, les fibres sont d'abord progressivement rompues (pas nécessairement dans le plan de la fissure) puis extraites.

La contrainte de pontage en fonction de l'ouverture de la fissure, courbe P(u), peut être calculée à partir du schéma décrit sur la Fig. 7 avec T donné par l'Équ. I.10. Cette courbe représente les propriétés intrinsèques de ténacité du composite.

• La fatigue cyclique est un phénomène qui opère aussi dans les composites à matrice fragile.

Les composites à matrice céramique présentent une remarquable résistance vis­à­vis de la fatigue. La limite de fatigue est souvent située au­dessus de 70 % de la contrainte ultime. De plus, il faut remarquer qu'à ces niveaux de chargement, le matériau a dépassé sa limite de linéarité.

Contrairement au métaux où les problèmes de fatigue cyclique se posent largement dans le domaine élastique, les composites à matrice fragile présentent des évolutions dues à la fatigue alors qu'ils sont déjà nettement endommagés.

Les effets de fatigue sont dus à des phénomènes d'usure aux interfaces. En effet, lors du chargement cyclique les interfaces subissent

des glissements alternatifs et ces derniers induisent de l'usure dans les zones de transfert de charge. Le cisaillement interfacial diminue donc progres­sivement (Fig. 17). Il en résulte que les fibres sont surchargées sur une zone plus large, ce qui accroît leur probabilité de rupture (cf. Équ. I.11 et I.15).

x

σf

A B

0

B'

vierge

fatigué

T = σx

vf 1 ­ PR

dσf

dx = 2 τ*

R

Figure  17 

• Le comportement à  chaud est de première importance car la plupart de ces composites sont dédiés aux hautes températures.

Se posent donc des problèmes de résistance à l'environnement, en particulier des interfaces (oxydation, etc.). Les fissures dans la matrice sont des chemins privilégiés pour l'oxygène.

Si les fibres sont revêtues de pyrocarbone pour contrôler les caractéristiques de l'interface fibre­matrice, la disparition de cette "interphase" par oxydation entraîne une très forte diminution du cisaillement interfacial et donc de la résistance ultime.

Par ailleurs, si l'oxydation conduit à la formation de composés, ceux­ci peuvent créer de fortes liaisons entre fibre et matrice et conférer au composite un comportement fragile.

La parade actuelle contre l'oxydation est de concevoir une matrice "auto­cicatrisante". On ajoute à la matrice des éléments (bore) qui sous oxydation forment des oxydes vitreux. Ces oxydes deviennent visqueux à chaud et peuvent colmater les fissures matricielles.

Le fluage est aussi un phénomène qui opère à chaud.

Dans un composite unidirectionnel, c'est le constituant qui flue le moins vite qui contrôle le comportement, sauf s'il y a des fissures matricielles ou des ruptures de fibres, donc de l'endommagement.

Par exemple, si on suppose que les fibres sont sensibles au fluage, on conçoit aisément que la surcharge des fibres due à la fissuration matricielle va fortement accélérer le fluage. Il y a donc une interaction forte entre fluage et endommagement.

Notons enfin que la durée de vie peut être réduite par la diminution progressive de la résistance du renfort du fait d'un mécanisme de propagation sous­critique des défauts initiaux.