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Mon GRP 2013
Blog : jourduntrail.over-blog.com
Je profite que les événements soient encore tous frais et l’euphorie pas encore retombée pour
vous faire partager ce Grand Raid des Pyrénées, 3ème
édition pour moi après le 80 km de 2011
fini dans de bonnes conditions, et le 160 km de 2012 fini après beaucoup de douleurs et de
doutes. Je me relance donc cette année dans le défi des 160 km, alors que j’avais juré dans ce
même compte-rendu l’année dernière que l’on ne m’y reprendrait plus ! J’ai en effet mis pas
mal de temps à me rétablir non pas physiquement, mais surtout mentalement de ma course de
l’année dernière, et je souhaitais donc pour cette année m’inscrire pour le 80 km.
Malheureusement, étant également pré-inscrit pour l’UTMB, pour courir toujours en
compagnie de mon frère, qui lui était sûr d’être pris car déjà recalé au tirage au sort l’année
dernière, je ne me suis pas inscrit sur la 1ère
session d’inscription sur le 80, car le tirage au sort
de l’UTMB avait lieu 5 jours plus tard. Les inscriptions sont toutes parties en moins de 2h,
laissant sur le carreau mon pauvre Simon, mon fidèle compagnon de trail (80 km de 2011 et
les 30 derniers km de 2012). Malheureusement, je suis recalé au tirage au sort de l’UTMB (je
n’avais que 30% de chance d’être tiré). Je me rabats alors comme convenu sur le 80 km ; mais
la 2ème
session d’inscription, qui a lieu 15 jours plus tard, se fait après celle du 160 km. Or, vu
le nombre de gens qui n’ont pu s’inscrire sur la 1ère
session, je me dis que le serveur risque de
saturer, et avec ma faible connexion internet, je risque fortement de passer à la trappe, et ne
faire ni le 80, ni le 160. Et bien m’en a pris, puisque les 150 places de la 2ème
session sont
parties en moins de 5 minutes, laissant là encore sur le carreau Simon, qui était pourtant
devant son ordi à 21h00 pile. Je préfère donc assurer le coup en m’inscrivant sur le 160 km
(même si là encore, les places sont parties en quelques minutes).
Mon objectif est triple : d’abord le finir (comme l’année dernière), ensuite prendre plus de
plaisir (pas comme l’année dernière !), et enfin améliorer mon temps de l’année dernière
(43h15) ; les 2 derniers objectifs étant à mon avis complémentaires. En terme de temps, mon
objectif est de ne pas remettre la frontale, et je me fixe donc une arrivée à 20h le samedi soir,
soit 39h de course. Ça fait quand même 4h de course à gagner par rapport à l’année dernière,
ce qui me parait un poil ambitieux.
Cette année, avec Guillaume sur l’UTMB et Sandrine sur le 80, on a décidé d’associer notre
défi à une cause spécifique : La Ligue Contre le Cancer. Ce n’est pas pour simplement faire
plaisir à notre papounet, et qu’en échange il nous assiste durant la course ! Cette idée a
simplement émergé suite au passage de Guy Amalfitano, amputé de la jambe droite suite à un
cancer à 18 ans, et qui réalise un Tour de France en béquilles sur 5 mois (30 à 35 km par jour)
pour récolter des fonds pour la Ligue Contre le Cancer. (Voir son blog :
http://guy.amalfitano.over-blog.com/). On se dit alors que c’est l’occasion pour nous aussi,
certes à une bien moindre échelle, de profiter de la course y apporter une petite contribution.
Cela fait en effet plusieurs années que nous courrons dans les trails et les courses du coin sous
les couleurs de la Ligue, mais sans jamais réellement apporter autre chose qu’une contribution
publicitaire. Le principe est de parrainer autant de km souhaités, à raison d’1€ le km, et bien
que lancé seulement 2 mois avant le début des courses, nous en étions avant le départ du GRP
à 1 700 €, soit bien au-delà de nos espérances. Soyez-en bien tous remerciés ! De plus, ces
promesses de dons sont pour nous un moteur pour nous faire avancer dans les moments un
peu plus difficiles de la course.
La prépa pour cette année a été sensiblement la même que l’année dernière. Le Trail des
Citadelles le week-end de Pâques, qui a été l’occasion d’un sympathique week-end en famille
et entre amis, et l’occasion également pour Cécile de s’initier à son premier trail disons…
boueux ! Et quelques trails locaux en mai-juin (Marath’Yonnaise, Trail du Jaunay), mais en
gros on attend la fin de la saison de basket pour entrer véritablement dans le cœur de la prépa.
Le frangin avait concocté un programme sur 12 semaines, avec en moyenne 4 séances
hebdomadaires, composées de séances de fractionné (VMA courte et longue), de fartleck, de
renforcement musculaire et d’endurance fondamentale, n’excédent jamais les 2h30. Le
traditionnel Raid Mélusine fin juin (cf. son CR sur le blog) a été l’occasion de faire un week-
end choc, et enfin j’ai profité des vacances en famille à Esquiéze Sère, pour faire un 2ème
week-end choc en reconnaissant les sentiers du GRP, notamment ceux réalisés habituellement
de nuit.
C’est donc en très bonne forme que j’arrive dans les Pyrénées le mercredi 21 août, en
compagnie de mes chers parents. Malheureusement pour cette année, ma petite femme et mes
enfants sont restés à la maison, Cécile n’ayant pu se libérer du boulot en dehors de ses congés.
Guillaume nous rejoint le mercredi soir avec Sandrine, qui fera le 80 km samedi, comme
l’année dernière, et les 2 grands, Louis et Paul. Juju, qui prend sa revanche de l’année
dernière sur le 80 km après que son genou l’ait lâché à 13 km de l’arrivée, arrive le jeudi dans
l’après-midi avec femme et fille, après une petite semaine de vacances non loin, et en
compagnie de ses parents Marcel et Marie-Claire qui cette année vont le suivre. Ça fait du
monde sur la parcelle de camping, et nous met dans l’ambiance de ce week-end particulier.
Le jeudi matin, je me rends avec papa, Guillaume & Sandrine sous la tente de l’organisation
récupérer mon dossard et contrôler mon sac avec le matériel obligatoire, puis à 17h30, nous
filons pour le briefing, où nous retrouvons notamment quelques têtes bien connus du Raid
Aventure Pays de Vie (club du Poiré), qui s’attaquent pour certains au 160 km et pour
d’autres au 80 km. Le briefing est sans surprise, si ce n’est que la météo n’est pas si bonne
qu’annoncée en début de semaine : le vendredi sera beau et assez chaud, avec une dégradation
en fin de journée. Ça se redécouvre en 1ère
partie de nuit, pour se recharger en 2ème
partie, puis
le samedi est bouché. En gros, c’est un peu comme l’année dernière. Je sens ma pauvre
Sandrine à côté de moi qui enrage, ayant déjà fait le 80 l’année dernière sous un temps
maussade, et qui se relançait cette année pour profiter des paysages !!
Revenu au camping, je prépare mon sac et mes 2 sacs de base-vie (sacs laissés à
l’organisation avant le départ qui seront acheminés aux 2 bases-vies km 73 et 120, avec des
vêtements de rechange, de l’alimentation, etc.) en fonction de la météo qui nous a été
annoncée. On décide finalement de prendre le camel bag de Guillaume, étant un peu plus
grand, et laissant donc davantage de possibilité de remplir la poche à eau, en prévision de la
chaleur à venir du 1er
jour. L’après-midi a également été l’occasion de faire un « briefing »
des assistants, avec papa et maman ; cette année, ils ont décidé de me suivre sur quasi
l’intégralité du parcours, et pour s’éviter des km en voiture, ils décident de dormir dans la
vallée de Luz, soit en tente soit à l’hôtel. Cette implication importante, comme ma p’tite
femme l’année dernière, sera l’un des facteurs clés de ma réussite cette année, en termes de
soutien moral et logistique. Traditionnel apéro collectif offert par le camping du Lustou, et
retour à la tente avec au menu… des pâtes, tiens tiens ! Coucher vers 22h après les dernières
vérifications de matériel, la nuit est, comme toute nuit précédent un trail, fortement
entrecoupée de réveils.
Je me réveille vers 3h au lieu de 4 pour ne plus me rendormir, l’excitation jouant déjà son
rôle ; finalement, je me lève, prends le temps de m’habiller, faire ma toilette, manger le
gatosport (« l’étouffe chrétien » comme l’appelle la nounou des enfants), qui passe plus
facilement en avalant du thé à chaque bouchée !! Papa m’emmène sur la ligne de départ, je
bipe mon dossard vers 4h40 et j’attends patiemment les 5h que retentisse l’hymne de départ
« Viva la Vida » de Coldplay. L’excitation et les clameurs montent alors, bien chauffées par
les 2 speakers, je regarde au ciel, savourant ce moment tant attendu depuis des mois, et ça y
est les premiers pas sont lancés, je suis parti dans ce nouveau défi qui me tient tant à cœur et
tous les ingrédients sont réunis pour vivre une aventure extraordinaire. Je me déporte à gauche
pour saluer une dernière fois papa posté 200 m après la ligne qui me lance un inattendu et
énigmatique : « Beh alors ??!! ». Ça alors, qu’a-t-il voulu me signifier par ces 2 mots ?? Parce
que je suis déjà dans le dernier tiers de la course ? C’est qu’il me met déjà la pression le
papounet !!! Après course, en rigolant ensemble sur cette phrase, il me disait avoir eu peur de
m’avoir raté dans cette foule ; il faut dire que sur 974 inscrits, on est quand même 849 sur la
ligne de départ, c’est donc une sacrée masse qui quitte la petite place de Vielle Aure pour
rejoindre Vignec en passant par St Lary, 1,8 km de bitume et de plat pour étirer le peloton
avant la grande côte menant au col de Portet, 1ère
difficulté, (on passe de 791m d’altitude à
Vielle Aure à 2215m au Portet, 12.6 km plus loin).
Sur une carte, ça parait toujours plus simple...
Vielle-Aure 0 km 5h05 0h00 849 coureurs
Les 1ers lacets se passent tranquillement, je m’occupe de suivre le rythme de la masse ; de
toute façon, il est illusoire de chercher à accélérer dans cette partie, il y a trop de monde, et on
y perdrait trop en énergie. Je n’allume ma frontale qu’un peu plus tard, profitant de la frontale
des voisins qui donne pour l’instant un éclairage amplement suffisant. On arrive à Soulan, km
5,5, où se sont massés déjà pas mal de spectateurs. Une petite anecdote sympa : alors qu’un
spectateur nous lance un « bravo », une fille derrière moi lui répond « c’est encore un peu tôt
pour un bravo, on n’a encore rien fait ! ». Et c’est vrai qu’elle avait raison, pour l’instant on
n’a fait que s’inscrire sur internet, et fait quelques km pépères en lacets. La suite, avec ses
10 000 m de dénivelés cumulés, nous fera davantage accepter les bravos !! Comme l’année
dernière, dans la montée du Cap de Pède, juste après Soulan, un peu d’embouteillage avec
quelques arrêts forcés, en raison de la file indienne créée et le passage d’une barrière à bétail.
C’est pas grave, il reste 155 km , on n’est pas à quelques minutes près. On atteint le Cap de
Pède puis l’altisurface et peu à peu, le jour commence à se lever, laissant apparaître des
nuances de couleurs magnifiques derrière nous. A l’approche du Col de Portet, un groupe
d’une bonne cinquantaine de moutons a eu la malheureuse idée de se réunir pile sur le chemin
du GRP, et ont donc droit à un réveil quelque peu bruyant dans la douceur habituelle du coin !
On arrive au col du Portet, où toujours beaucoup de monde dans les dernières mètres,
notamment les bérets verts du camping du Lustou, bien sympathiques comme toujours, et que
je salue chaleureusement. 1,5 km de descente, et nous arrivons au 1er
ravito, du restaurant des
Merlans, km 14,1. J’y pointe à 7h39, 2’ de plus que l’année dernière, quelle régularité ! et 10
minutes d’avance sur mon prévisionnel de 39h.
Restaurant Merlans 14,1 km 7h39 2h34 488ème
849 coureurs
Ravito ultra rapide, je remplis la poche à eau, car le soleil va chauffer jusqu’à Artigues, bois
la traditionnelle soupe, et mange quelques bouts de banane. Je repars au bout de 6 minutes,
direction la magnifique réserve du Neouvielle avec son point culminant, le Col de Bastanet,
2507 m au km 19,8.
Le lac de l’Oule fait son apparition en contrebas, je lui dis à demain, et nous entrons de plus
en plus dans la caillasse de Bastan, avec ses lacs, qui reflètent le sommet des montagnes
environnantes. Tout simplement magnifique ! La montée se passe bien ; bien que le peloton
soit un peu moins dense que dans la montée du Portet, on est encore assez groupés, et je suis
un bon groupe, qui progresse à bonne allure, silencieusement. Je suis d’ailleurs marqué de la
différence par rapport à l’année dernière : ça cause beaucoup moins dans le peloton. Peut-être
sommes-nous partis un peu vite, je ne sais pas.
Dans la montée du Bastanet, je rejoins Christophe Guillet, d’Aizenay, et patient de Guillaume,
que je ne reconnais pas tout de suite (mon côté non physionomiste me joue toujours des
tours !), et qui me suivra jusqu’à Artigues. Le basculement après le Bastanet ne nous permet
pas de courir, car c’est alors une succession de caillasses, de rochers, de blocs, comme les
Pyrénées savent si bien nous proposer. Je perds alors un peu de temps sur mes prévisions sur
mes 39h, mais sans m’alarmer, car je sais que même si j’avance plutôt bien dans cette partie,
je n’y suis jamais très à l’aise. Puis après le réservoir des Laquets, au 25ème
km, c’est la fin de
la pierre, et nous pouvons alors dérouler sur un sentier plus propice à la course. Du coup, j’en
profite pour envoyer un peu en descente, car c’est une portion où il est facile de courir, et où
le corps répond encore très bien, et je peux donc bien me faire plaisir.
Au camping, les amis et famille rigolaient car connaissant par cœur mes temps de passage
théoriques sur ma prévision de 39h, je leur annonçais des temps à la minute près à chaque
ravito. Et j’arrive à Artigues à 10h41, pour une prévision à 10h36, mais en leur précisant bien
que nous sommes partis à 5h05 au lieu de 5h00, ce qui fait que je suis ponctuel à la minute
près !! Guillaume et Louis sont venus à ma rencontre à 500m du ravito, puis je retrouve les
parents, Sandrine mais également Elo, Romane Juju et ses parents, bref, l’entière population
de l’emplacement 1 du Lustou !! Nous sommes au km 29,4. Je donne mon camel à Guillaume
qui me le remplit, prends une soupe, coca, et un peu d’abricots secs.
Artigues 29,4 km 10h41 5h36 425ème
838 coureurs
Papa et Guillaume sont en tenue (aux couleurs de la Ligue Contre le Cancer, bien entendu !),
puisqu’ils vont comme convenu m’accompagner dans cette longue montée jusqu’au Pic du
Midi, 11,9 km de montée pour 1700m de dénivelé positif. Je dis au-revoir à Juju que je ne
verrai pas avant son arrivée du 80 km, et lui souhaite bon courage. Papa donne un sacré bon
rythme dans les 2-3 premiers km, nous passons la magnifique cascade d’Arizes, dans cette
rude montée casse-pattes en forêt, qui a le mérite de nous mettre toute de suite dedans. La
montée n’est que du bonheur, je suis bien, et nous pouvons discuter avec papa et Guillaume ;
je savoure particulièrement cette portion en famille, avant les longs kilomètres solitaires qui
m’attendent. A plusieurs reprises, papa nous demande de partir un peu plus vite devant, le
laissant aller à son rythme, mais nous profitons avec Guillaume de ce moment à 3, d’autant
plus que l’année dernière, il n’avait pas pu monter au Pic du Midi avec nous, étant arrivé trop
tard au Col de Sencours. De plus, même si je sens que j’en ai pas mal sous la semelle, et que
mes jambes demandent à partir, je suis pile dans mes prévisions de 39h, donc tout va bien.
On arrive au Sencours 2-3 minutes avant papa, qui s’assoit sur une chaise et me demande un,
puis un deuxième verre de coca. C’est la première fois que je vois papa boire du coca !! Une
petite hypoglycémie le paternel ??? D’ailleurs, il n’a même pas remarqué juste derrière lui un
concurrent en train de renvoyer l’intégralité de son estomac !! Sur l’insistance de papa, nous
le laissons aller à son rythme pour gravir les 3,5 km qui nous séparent du Pic du Midi, et il
redescendra avec Guillaume.
Du coup, Guillaume me donne le rythme pour l’ascension finale, mais les derniers lacets sont
particulièrement éprouvants. Peut-être l’altitude, je ne sais pas, mais j’ai légèrement moins de
jus que dans la montée du Sencours. Néanmoins, rien à voir avec l’année dernière, où j’avais
carrément peiné dans cette portion. Je pointe au Pic du Midi à 13h45, 4 minutes en avance sur
mes prévisions (une ponctualité digne de la SNCF, me répètera souvent maman), et nous
retrouvons maman, Sandrine, Louis et Paul qui ont pris le téléphérique et pris le temps de
visiter l’Observatoire. C’est aussi également pour Sandrine l’occasion d’admirer la vue, car
comme l’année dernière sur le 80, il est prévu qu’elle ne voit pas grand-chose d’autre que du
brouillard, au cours de sa course ! Je m’arrête 5 minutes pour discuter, faire la danse du Pic
(clin d’œil à l’année dernière) avec mon frère, puis je redescends seul, Guillaume faisant la
descente avec papa et Louis, qui je l’ai appris après coup, a envoyé un sacré rythme sur les 5.5
km de descente jusqu’au Tourmalet, à 8 ans ! Le virus du trail l’a déjà touché !
Pic du Midi 40,3 km 13h45 8h40 363ème
769 coureurs
Je descends pas trop mal, croisant d’abord papa, ainsi que tous les concurrents qui montent, à
qui je transmets systématiquement un « allez bon courage ». Vers la fin de la descente, je
croise Fabien et Cyril du RAPV, qui entament leur Pic, on s’échange 2-3 mots, ils sont bien,
et on se souhaite bonne chance. Si Fabien ira au bout, malheureusement Cyril stoppera à
Villelongue, km 73.
J’arrive au Sencours en avance de 15 minutes sur mes prévisions, ayant finalement bien gazé
en descente. Je prends le temps de me restaurer 15 minutes, et surtout de bien remplir ma
poche à eau, car maintenant, c’est la plus longue portion de sentier sans ravitos, avec 19,4 km
qui nous verront emprunter le col de la Bonida, le col d’Aoube, le magnifique Lac Bleu, le col
de Bareilles, la Hourquette d’Ouscouaou pour enfin rejoindre la station d’Hautacam, où
m’attendront les parents, merci à eux. C’est également à partir de là que le chemin se sépare
avec le parcours du 80 km qui foulera ces pierres 24h plus tard.
Le col de la Bonida passe tout seul, je redescends dans le vallon d’Aoubé, et je fais la
connaissance d’un sympathique trailer, « Le Normand », que je reverrai plusieurs fois jusqu’à
Villelongue. J’arrive à courir quelque peu sur les portions un peu plus planes entre les cols.
Les 3 cols qui suivent ne sont pas forcément très longs, mais je les trouve très difficiles, car ils
sont tous tape-culs, c’est-à-dire que leur dernière portion est à chaque fois d’un très fort
dénivelé. C’est à mon avis ce qui a cassé pas mal de coureurs, et peut expliquer, en plus de la
chaleur, le fort taux d’abandon à Hautacam et Villelongue (152 concurrents sur 849, soit 18%
du peloton, et 36% de l’ensemble des abandons ou hors délais). J’ai particulièrement apprécié
le passage au Lac Bleu, que nous n’avions pu voir l’année dernière car caché sous une épaisse
couche de nuage.
C’est ici que quelques heures après moi, un des concurrents aura un accident : apparemment
sonné par une pierre, il a perdu connaissance et tombé dans l’eau. Heureusement, il n’était pas
seul et un concurrent est venu le sortir de l’eau et le secourir. Hélitreuillé, et sorti de l’hôpital
le mercredi suivant, il ne souffrirait que de côtes cassées, et s’en sort donc plutôt bien.
D’autres l’ont fait heureusement volontairement : l’un des coureurs qui me précédait s’est
déshabillé entièrement, et s’est baigné dans l’eau du lac. Il nous disait qu’elle n’était pas si
glacée que çà ! Bonne ou mauvaise chose, je n’en ai aucune idée, ça aura au moins eu le
mérite de refroidir sa température corporelle. Car c’est vrai qu’il fait particulièrement chaud
en cette fin d’après-midi, et dès la montée du Col de Bareilles, km 54,1, je me trouve à cours
d’eau, alors qu’il reste encore 9 km à parcourir, et un autre col en plus de Bareilles, la
Hourquette d’Ouscouaou. Apparemment, nous sommes pas mal dans ce cas ; je vois un
concurrent remplir sa poche à eau de neige, d’autres utilisent un torrent. Je n’ai pas de pastille
d’iode pour purifier l’eau, donc je décide pour l’instant de ne pas remplir à un torrent, mais de
me garder cette option si je ne suis vraiment pas bien. La dernière difficulté se passe pas trop
mal, et il me reste alors 4,7 km de faible pente jusqu’à Hautacam. Je peux à nouveau bien
courir, et je me fais plaisir, en me disant que je vais retrouver les parents à Hautacam, et aussi
de l’eau !! L’arrivée à Hautacam se fait dans un brouillard épais, où je me fie davantage aux
voix et applaudissements des spectateurs plutôt qu’au balisage, qui n’est pas facile à trouver.
Hautacam 63,2 km 18h10 13h05 253ème
741 coureurs
J’arrive à Hautacam à 18h10, 5 minutes d’avance sur mes prévisions (un métronome je vous
dis !!!). Un bénévole s’occupe directement de ma poche à eau, et je retrouve les parents sur
les chaises. Papa me donne plusieurs verres de coca et d’eau gazeuse, et je me réhydrate donc
convenablement. A part cette légère déshydratation, cette longue portion s’est relativement
bien passée, j’ai régulièrement doublé en montée, sans me faire doubler dans les descentes (ce
qui est déjà une nette amélioration par rapport à l’année dernière, où je perdais
systématiquement en descente les places que je gagnais en montée !). J’avais programmé ¼
d’heure de ravito, mais comme j’avais 5 minutes d’avance, et que mes parents sont à mes
petits soins, je profite allégrement, et m’arrête donc 20 minutes pour repartir comme convenu
à 18h30. Les parents ont finalement réservé une chambre d’hôtel à Esquièze Sère, le
« Terminus ». C’est marrant, car c’est un hôtel devant lequel nous passions tous les jours lors
de nos vacances en famille à Esquièze Sère en juillet, situé à 50m de la 2ème
base vie, km 120.
Nous y avions même bu une bière et mangé une glace avec les enfants.
Hautacam: tout sourire, bien qu'encore un peu marqué par la déshydratation
J’ai maintenant 10 km de descente et 1000 m de dénivelé jusqu’à la première base vie de
Villelongue. Je suis bien, donc je cours sur toute cette portion ; nous sommes un groupe de 3,
et bientôt 4 sur cette première partie dans le brouillard, où nous empruntons un peu de route,
et un large sentier carrossable. Ça fait du bien car ça permet de courir en déroulant sans trop
regarder où l’on met les pieds, et donc de se relâcher. La 2ème
partie rentre un peu plus en
forêt, et je lâche le petit groupe dans lequel j’étais, car je me sens super bien, et je prends un
max de plaisir sur cette portion. La différence de forme est tellement énorme avec l’année
dernière, à ce moment de la course, que je ne peux que profiter de l’instant présent.
Du coup, j’arrive à Villelongue… avant les parents !! Ils se sont en effet garés assez loin, et je
les préviens par téléphone que je suis rentré dans la salle. Il est 19h41, j’ai 16 minutes
d’avance sur mes prévisions.
Villelongue entrée 72,1 km 19h41 14h36 246ème
659 coureurs
J’avais prévu m’arrêter 40 minutes, mais comme je suis un peu en avance, j’y resterai 46
minutes, profitant là encore du soutien des parents. Ils sont littéralement à mes petits soins,
car pendant ces 45 minutes, je n’ai pas une seule fois bougé de ma chaise ! Papa m’apporte le
bol de pâtes, le bol de soupe, la compote, des verres à boire, maman s’occupe de me préparer
mes vêtements propres et reprend mes sales : A-D-O-R-A-B-L-E-S !!! J’en profite également
pour changer comme convenu de chaussures. Les Saucony, minimalistes (125g) achetées 15
jours auparavant sur internet, auront été extraordinaires de légèreté et de dynamisme. Je
prends alors les Mizuno, toujours minimalistes, mais avec un peu plus de semelle, pour
supporter une démarche moins fluide dans la nuit et la 2ème
journée. Comme l’année dernière,
il fait extrêmement chaud dans la salle, on aurait pu se poser dehors. J’en profite pour appeler
ma p’tite femme, qui est à manger chez ses parents avec sœur et beauf’ ; c’est cool de l’avoir
au téléphone, d’entendre Léonie derrière, et ma voix la rassure, rien à voir avec l’année
dernière selon elle ! Pour l’instant, j’ai juste un semblant de crevasses qui semble se dessiner
sous les pieds, tiens tiens ! vous revoilà, vous !
Tenue de jour... puis tenue de nuit pour le départ pour une longue, très longue nuit...
Mais toutes les bonnes choses ont une fin, il est temps de repartir, je me suis habillé en tenue
de nuit, avec manches longues en haut et collant long haut en bas. Le buff a remplacé la
casquette, et la frontale est installée sur la tête. Il est 20h27, et je pars en compagnie des
parents sur les 500 premiers mètres jusqu’à leur voiture, puis de mon « Normand » que j’ai
retrouvé à Villelongue.
Villelongue sortie 72,1 km 20h27 15h22 231ème
589 coureurs
Nous traversons Villelongue, puis Soulom, avant de rejoindre l’entrée du sentier du Cabaliros
à Pierrefitte Nestallas. La température est très douce et j’ai vite chaud en tenue de nuit ! Très
vite, je me rends compte qu’on a oublié de remplir la poche à eau au cours du long ravito de
Villelongue. Aïe aïe aïe ! Que je suis bête ! Heureusement, la nuit va tomber, la fraicheur
avec, et ce qu’il me restait comme réserve d’eau va me suffire jusqu’au prochain
ravitaillement, 13 km plus loin. Les premières pentes sont douces et régulières, puis très vite,
nous entrons en forêt où la pente s’élève. Maintenant, je connais bien cette montée pour
l’avoir faite 2 fois de suite au cours de mes vacances de juillet. Dès que ça s’est élevé en forêt,
j’ai rejoint le groupe de devant, et lorsque je me retourne peu après, je ne vois plus mon
copain « Normand » ni le groupe de 4 dans lequel j’étais. Mais je suis bien, je sais que je suis
plus à l’aise en montée qu’en descente, et le nouveau groupe de 4 dans lequel je suis monte à
un bon rythme. Vers 21h, j’allume ma frontale, en prenant conscience que je l’allume pour au
moins 10h ; l’étendue de la tâche me parait énorme, mais pour être serein et tenir le coup, je
me refuse de penser trop loin, et anticipe l’avenir étape par étape, ravitaillement par
ravitaillement. Puis les gars du groupe dans lequel je suis me proposent de passer devant, et
peu à peu je les quitte. Je vais ainsi tout le long de la montée du Cabaliros (14 km de montée
et 1800m de dénivelé) rattraper les coureurs seuls ou en groupe, faire un petit bout de chemin
puis passer devant petit à petit. J’ai peur d’être en sur-régime et de le payer à un moment ou à
un autre, mais pour l’instant tous les clignotants sont au vert, et je n’ai pas l’impression de me
mettre dans le rouge pour autant. Du coup, je suis le plus souvent tout seul, et comme prévu,
je m’accompagne de mon fidèle compagnon pour cette longue montée dans la nuit, en me
berçant de Damien Saez dans les oreilles. Sa poésie écorchée, associée au milieu sauvage
dans lequel je me trouve, me font un bien fou, et j’atteins le ravito encore en bonne forme et le
moral à bloc. Un peu avant le ravito, une image me restera gravée très longtemps, qui n’aurait
strictement rien donné en photo. A partir de la cabane du Turon de Béné, nous sommes passés
au-dessus de la mer de nuage, à 1500m. Tous les sommets environnants sont alors apparus
sous la presque pleine lune (déjà magnifiques de jour, et différents mais tout autant
magnifique de nuit). Et là, en me retournant, je vois la lune juste au-dessus les montagnes,
éclairer la partie supérieure des nuages, comme un matelas bien douillé. Le rendu des
couleurs est absolument incroyable, et je me retourne plusieurs fois, au cours de la montée,
pour admirer ce magnifique paysage.
J’arrive à Pouy Droumide, à un peu plus qu’à mi-chemin de la montée du Cabaliros, à 23h13,
soit 27 minutes d’avance sur mon prévisionnel.
Pouy Droumide 85 km 23h13 18h08 186ème
559 coureurs
Et là, une ambiance incroyable, complètement en décalage avec le lieu : un ravito tenu en
grosse majorité par de jeunes bénévoles, avec boule à facettes, maquillages, et musique disco
aux enceintes ! L’ambiance y est extraordinaire, les bénévoles aux petits soins : même sans
les parents, je n’ai là encore pas bougé de ma chaise. Je me remplis de cette ambiance, de
cette convivialité, mais il faut partir avant de se refroidir ; je me suis arrêté 10 minutes, et je
suis regonflé à bloc, boosté par ce moment assez extraordinaire et tout-à-fait inattendu.
Je continue la montée, toujours sur un bon rythme, en allant de groupe en groupe, mais
régulier dans la progression. Puis vers la fin, nous bifurquons à gauche pour la montée finale,
que j’avais repérée en juillet de jour. Et j’ai l’impression que c’est encore plus impressionnant
de nuit, après 90 km dans les pattes : c’est « dré dans l’pentu ! ». Le dernier kilomètre doit
être à un bon 20%, sans lacet, direct vers l’objectif ! Je garde le rythme, régulièrement mais
sans m’arrêter et j’arrive enfin au sommet, avec ses antennes et sa table d’orientation. Je
stoppe 5 minutes, le temps de manger quelques barres, boire un bon coup, et discuter avec le
bénévole super sympa, qui a dressé sa tente au sommet. Il nous montre en les nommant les
sommets environnants, et nous dit que de là, on voit de temps en temps les frontales monter le
col de Riou en face. Magnifique !
C’est le moment de redescendre vers Cauterets, 11 km et 1400 m plus bas. J’ai fait 2 fois cette
descente pendant mes vacances, en allumant comme je pouvais, ce qui m’avait occasionné des
courbatures aux cuisses pendant plusieurs jours (mais m’a également bien préparé je pense).
A part les 2 premiers km un peu caillouteux, la suite est relativement roulante, descendant au
début en lacets monotraces, et je peux alors courir sur cette portion. La frontale éclaire bien le
sentier et les éventuels cailloux et obstacles qui pourraient me faire tomber dans la nuit. Je
suis en 2ème
position d’un groupe de 4 coureurs, et petit à petit, nous ne sommes plus que 2.
Le gars devant moi ouvre la piste à un bon rythme et ça me convient très bien. Ça nous
permet de discuter un peu sur la fin ; après avoir fait de l’aviron pendant sa jeunesse, il ne
s’est mis au trail que de cette année, et est d’une facilité déconcertante pour un bizut !
D’ailleurs, j’ai retrouvé son nom dans le classement final, et il finira une bonne heure devant
moi, chapeau l’artiste ! C’est marrant car vers 2 km de Cauterets, le sentier se transforme
pendant 1 km en large piste carrossable, et là avec les cailloux, je n’arrive plus à suivre son
rythme. Mais du coup il m’attend, car il me dit qu’il n’a plus de pile depuis quelques minutes
à sa frontale, et qu’il la changera au ravito de Cauterets. Donc en gros il ouvrait la piste en
profitant simplement de ma frontale ! Impressionnant !
Nous arrivons à Cauterets, traversons la cité thermale endormie, et pointons au ravito à 2h47,
soit 27 minutes d’avance sur mon prévisionnel, exactement comme à Pouy Droumide.
Cauterets 100,6 km 2h47 21h42 164ème
546 coureurs
J’ai eu un peu plus de mal sur la fin de la descente, et je préviens mon compagnon de la
descente que je vais prendre le temps de me poser, alors que lui ne va pas trainer. L’ambiance
dans le ravito de Cauterets est à l’exacte inverse de celle de Pouy Droumide : nous y sommes
plus nombreux, mais le climat y est pesant, beaucoup plus silencieux, avec des trailers et des
spectateurs qui dorment sur les banquettes ou assis sur les chaises. Du coup, je ne m’éternise
pas trop, remplis ma poche à eau, et repars au bout de 15-20 minutes. Mes pieds, avec mes
crevasses, commencent à se faire sentir, mais c’est pour l’instant le seul point négatif que je
ressens : au bout de 100 km, c’est pas si mal !
Je repars donc direction le col de Riou, 8 km et 1020 m de montée. L’année dernière, j’avais
eu du mal sur ce col, et également cet été en reconnaissance. Et dès les premiers hectomètres,
je sens que là aussi ça va être dur, car je me sens fatigué, avec l’envie de dormir. D’ailleurs,
dès Cauterets, je me perds 2 fois, en ratant une balise. De plus, la première moitié de la
montée n’est pas très intéressante, avec de longs lacets de route ou de piste carrossable, qui ne
font rien pour me garder éveillé. Je sors mon lecteur MP3, mais cela n’aura qu’un effet limité.
De plus, la bruine et la pluie ont fait leur apparition, je mets ma veste imperméable. Du coup,
la visibilité devient quasi nulle, et je ne vois que quelques frontales devant qui m’indiquent à
peu près vers où va le sentier. Etant dans un état semi-éveillé, je rate à un moment une balise
et une bifurcation, et heureusement, des concurrents situés un peu plus hauts voit ma frontale
et me sifflent, en disant qu’il fallait tourner à droite 100m plus haut. Et merde ! J’ai vraiment
envie de dormir. A un moment, je me surprends même à déborder un peu sur le côté du
sentier qui tombe un peu en dévers. Ce n’est pas le moment de faire une chute ! Qu’est-ce que
je fais ? J’ai toujours la possibilité, comme le font certains, de m’allonger sur le côté. Il ne fait
pas très froid, mais l’herbe est mouillée, et le repos n’est que relatif, puisque la plupart des
trailers qui passent demandent naturellement si tout va bien. Je décide donc de continuer
malgré l’appel de l’oreiller, et j’arrive quand même à maintenir un bon rythme, puisque je ne
me fais pas doubler, et je rattrape quelques groupes et coureurs isolés. Mais même si je
double, je pense que les coureurs que je passe doivent être aussi voire encore plus fatigués que
moi. Certains s’allongent sur le côté, d’autres font des pauses de 5 minutes. Je continue
malgré tout à un rythme régulier. De mon côté, je me dis que demain matin, à Esquièze Sère,
je profiterai de la chambre d’hôtel des parents pour prendre une douche et m’allonger ¼
d’heure. A environ 2 km du sommet, je rejoins un groupe de 3 coureurs, que je ne dépasserai
pas, car je n’en ai plus la force, et du coup je me cale sur leur rythme que je trouve bon. Ça
me permet également de m’évader un peu l’esprit, en attendant le sommet. Bien qu’on ne
distingue toujours pas le sommet dans ce brouillard épais, je me rends compte qu’on ne voit
plus les quelques frontales au-dessus de nous ; c’est bon signe, ça veut dire qu’elles ont
basculé de l’autre côté, et donc que le col n’est plus très loin. Et en effet, après quelques
minutes, on y arrive enfin. Je passe le col de Riou, altitude 1945m, km 108,6, aux alentours de
5h25, soit toujours une bonne vingtaine de minutes d’avance sur mon prévisionnel ; j’ai
finalement monté ce col en 2h20, soit pile le temps prévu, mon gros coup de barre ne m’aura
pas fait perdre de temps.
Je passe devant le groupe de 3 avec qui j’ai fini la montée, car ils font une petite pause
alimentation, mais ils me redoubleront à l’approche du ravitaillement d’Aulian, 2 km plus bas,
au km 110,7, à 1713 m d’altitude. J’y arrive à 5h46, 26 minutes d’avance sur mon
prévisionnel.
Aulian 108,6 km 5h46 24h41 125ème
464 coureurs
Je m’assois, les crevasses commencent à me faire mal, je vais devoir faire avec pour les 50
derniers km. Mais au moins, avec les 2 km de descente, le coup de barre semble être passé.
L’ambiance est feutrée, nous sommes seulement 4-5 concurrents. Un couple de suiveurs, la
cinquantaine, est assis sur 2 chaises, la femme dormant sur l’épaule du mari, et le mari les
yeux ouverts mais complètement éteints. Je ne sais pas si ce sont des suiveurs d’un
concurrent, mais ils font peine à voir, ils sont littéralement exténués ! Je repars au bout de 10-
15 minutes, pour me rendre compte que j’ai encore oublié de remplir ma poche à eau.
Heureusement sans conséquence jusqu’au prochain ravito, 9 km plus loin qui est la 2ème
base
vie.
La partie juste après Aulian va être la plus difficile sur ces 160 km. Il doit y avoir à peu près 2
km de descente à très forte pente, dans une herbe humide, donc propice aux chutes, très haute
et sans sentier véritablement dessiné, de nuit, et avec un épais brouillard. Tous les ingrédients
réunis pour une portion galère ! Je vais donc de balise en balise : à chaque balise, je m’arrête,
inspecte avec ma frontale les environs pour repérer la balise suivante ; sauf que je ne vois pas
toujours la balise suivante ! Alors je vais un peu au petit bonheur la chance, là où l’herbe
semble avoir été piétinée, jusqu’à ce que je repère ces satanées balises. Avec la pente et
l’humidité de l’herbe, j’ai bien dû tomber une bonne demi-douzaine de fois sur les fesses,
rageant et râlant à chaque fois sur qui a eu l’idée de nous faire passer par-là ! Derrière moi, il
y a un groupe de 3 frontales, je me dis qu’à la vitesse où je vais, ils vont me rattraper
tranquille, et nous chercherons ensemble les balises, mais finalement ils ont dû se perdre, car
je ne les ai revus qu’à l’entrée de Grust. Enfin, au bout d’un moment j’arrive sur la route
descendant de Luz Ardiden, et je l’emprunte sur environ 500m. Ça fait du bien d’être sorti de
cette satanée portion. Le sentier coupe les lacets de route, dans des coins assez sympas, avec
un sol pouvant permettre de courir. Malheureusement, je cours de moins en moins vite, les
crevasses commençant à faire leur effet. Le groupe de 3 me passe devant, mais je n’arrive pas
à les suivre. Le jour se lève peu à peu, bien que très bouché, et je peux enfin éteindre la
frontale dans les parties dégagées. Une deuxième journée commence. J’atteins Grust (km
114,6), charmant petit village, suivi 1 km plus loin de Sazos (km 115,6), tout aussi
pittoresque. Ce qui est marrant, c’est qu’hormis les 3 traileurs, je n’ai vu personne depuis
Aulian (les autres n’ont pas dû être plus rapides sur la difficile portion après le ravito), et les
villages traversés en cette heure matinale (7h00 sonne à l’église) sont littéralement déserts. Il
n’y a finalement que les balises accrochés qui me rappellent que je suis dans une course,
partis à plus de 800 trailers à l’assaut de la montagne !!! Avec le lever du jour, le moral est
revenu, le gros coup de pompe du col de Riou, et la difficile portion après Aulian sont derrière
moi, et j’avoue que je suis soulagé de revoir la lumière diurne, car seul, la nuit parait quand
même très très longue…
De Sazos, nous rejoignons Luz Saint Sauveur par la route, 3 km de descente à faible pente, ce
qui fait du bien à l’organisme, car permet de courir en déroulant, sans réfléchir aux appuis. Je
rattrape 2 trailers qui marchent dans cette portion, et j’atteins le pont du Gave, km 118,5, et je
remonte la rue principale montant vers Luz. Je passe devant la piscine où nous nous sommes
baignés avec Cécile et les enfants en juillet. En haut de la côte, papa me rejoint. Que ça fait du
bien de revoir une tête connue après toute une nuit à crapahuter dans la montagne, et une 2ème
partie de nuit plus difficile ! Devant l’hôtel, maman est là, contente comme tout ! Je pointe à
la 2ème
base vie d’Esquièze Sère (km 119,8) à 7h47, 31 minutes d’avance sur mon
prévisionnel. Du coup, je vais prendre plus que les 40 minutes prévues initialement, pour
recharger les accus et repartir à bloc. Le bénévole au pointage me dit que je suis 115ème
,
incroyable ! Je demande des nouvelles de la course, apparemment, beaucoup d’abandons à
Villelongue (km 73 et 1ère
base vie) et Cauterets (km 100).
Esquièze Sère entrée 119,8 km 7h47 26h42 115ème
459 coureurs
Papa et maman reprennent leur rituel de la veille, en allant me chercher tout ce dont j’ai
besoin. Je mange les pâtes, la compote, une soupe, et de l’eau gazeuse. Je me change, pour
repasser en tenue de jour, mais moins découvert que la veille, car le temps est plus bouché, et
les températures ont chuté. Je montre mes pieds à maman, qui va alors chercher du rouge (de
l’éosine quoi ! mais pour moi depuis tout petit c’est du « rouge » !!) et asperger mes
crevasses. Je me rends compte qu’en plus des crevasses à la base du gros orteil, j’ai une belle
ampoule qui s’est creusée à la base des 2ème
et 3ème
orteils du pied gauche.
Une fois rassasié et changé, je décide de dormir, et demande à papa de me réveiller dans 15
minutes. Je pense mettre 5 petites minutes à m’endormir, et profite donc d’une sieste tout
confort, sur un lit de camp, de 10 minutes. Papa me réveille, et bizarrement, aucun problème à
me lever et à repartir. Au moment de partir, le sac sur les épaules, je me rends compte qu’il
est temps de faire ma commission journalière (eh oui, même en déréglant le corps, certains
événements sont réglés comme du papier à musique). J’en profite également pour m’étaler du
mitosyl, à un endroit bien gênant. Depuis le Cabaliros en effet, je sens une légère irritation à
un endroit mal placé ; en réalité, je me rendrai compte après course, selon le diagnostic d’Elo,
l’infirmière en chef, que c’était dû à mon caleçon, qui avait une couture pile à cet endroit ! Oh
la grosse erreur de préparation !!! Bon à savoir pour les prochains longs trails : mettre un
caleçon sans couture aux endroits à forts frottements…
Je repars donc d’Esquièze Sère à 8h50, soit 1h03 après mon arrivée, et 8 minutes d’avance sur
mon prévisionnel de 39h.
Esquièze Sère sortie 119,8 km 8h50 27h45 127ème
447 coureurs
Je ne regrette pas du tout ce temps passé un peu plus long que prévu, car j’ai dormi, je me suis
changé, rassasié, vidé, et je repars donc à bloc pour ce dernier des 4 marathons de la course.
La montée jusqu’à Tournaboup est tranquillement ascensionnelle, sur 12 km et 739m de
dénivelé positif. Malheureusement, comme expliqué le jeudi au briefing, le tracé initial n’a
pas pu être gardé, car les crues de juin ont notamment créé un gros trou à la sortie du pont du
Palu, que j’avais en effet remarqué lors de ma reco en juillet. Du coup, à la place, on rejoint
les granges d’Artiguette en empruntant la piste carrossable. Et mon Dieu que ce fut long et
ennuyeux !! Car alors que le tracé initial était hyper sympa, ce fut à la place une succession de
longs lacets totalement inintéressants, et qui plus est à faible pente. Après coup, je me dis que
j’aurais mieux fait de courir dans cette portion pour abréger. De plus, comme on arrive à
Artiguette par un sentier à faible pente, je pense que l’on s’est rallongé d’au moins 2 km par
rapport au tracé initial. Du coup, j’ai remis mon casque pour aider le temps à passer plus vite.
Enfin, cette partie interminable prend fin, et on retrouve le bon sentier. Mais les 3 derniers
avant le ravito empruntent eux aussi de larges pistes ou routes, ce qui rend finalement cette
partie Esquièze Sère – Tournaboup particulièrement ennuyeuse. Je cours sur les 2 derniers km
de descente avant de remonter légèrement pour rejoindre Tournaboup (km 131,8) et arrive au
ravito à 11h24, soit 24 minutes d’avance. Malgré le rallongement et l’ennui, j’ai quand même
réussi à reprendre un peu de temps sur mon prévisionnel.
Tournaboup entrée 131,8 km 11h24 30h19 114ème
442 coureurs
L’ambiance à Tournaboup est sympa, beaucoup de monde est présent, ce qui n’était plus le
cas depuis Villelongue, au km 73 ! Je retrouve les parents : je suis particulièrement fatigué,
cette portion m’a davantage atteint au moral qu’au physique, et je dois absolument me
ressourcer avant d’aborder la partie technique et sauvage du Néouvielle. Je ne mange pas
beaucoup, bois un peu, et devant ma baisse de forme, maman me lance un « trouve-toi un
petit copain !! ». Eh oui, elle a raison en plus ! J’ai fait une bonne partie du tracé tout seul ;
lorsque le coup de pompe est là, il est toujours préférable d’être à 2 et discuter pour passer le
temps. J’ai Cécile au téléphone, ce qui me remonte le moral. Je prends des nouvelles de Juju
et Sandrine, qui apparemment ne sont toujours pas arrivés à Artigues, mince, j’espère qu’ils
vont bien. Papa a régulièrement Guillaume au téléphone, qui tout en suivant Sandrine, prend
des nouvelles et alimente le blog en impressions et en photos. Je l’ai d’ailleurs à presque
chaque ravito au téléphone, et il m’encourage, me poussant à continuer à ce rythme. Malgré
tout, je ne m’enflamme pas, car je sais que la portion qui arrive est particulièrement redoutée :
de Pountou à Aygues Cluses, c’est énormément de rochers, avec parfois des sentiers
recouverts par d’énormes blocs de pierre, puis la partie après le col de Bastanet, qui rejoint
puis traverse la sapinière, est également très technique, et l’état de mes pieds m’incite à la
plus grande prudence avant de les traverser. Je repars donc 20 minutes plus tard, comme
convenu, à 11h45, soit 23 minutes d’avance. Voir les parents m’a fait du bien car je suis
arrivé à Tournaboup pas vraiment bien, et j’en repars davantage motivé et prêt à me farcir ces
derniers 30 km !
Tournaboup sortie 131,8 km 11h45 30h40 121ème
436 coureurs
Le début est relativement peu pentu jusqu’à Pountou, puis nous bifurquons à gauche toute,
pour rentrer dans le remarquable vallon d’Aygues Cluses. Avant que je n’arrive à
Tournaboup, les 4 premiers du 80 km étaient déjà passés. Je me fais donc doubler par les
suivants du 80 km, mais les écarts entre les 10 premiers sont relativement conséquents.
Néanmoins, quelle différence de rythme entre eux et moi ! Etant dans les 10 premiers, ils
courent dans toutes les portions qu’ils peuvent, y compris sur celles plus techniques. Je n’ai
plus trop de souvenirs de cette portion, et j’atteins enfin la cabane d’Aygues Cluses, km
138,4, avec un ravito uniquement en eau. Je discute 5 minutes avec les bénévoles,
extrêmement sympathiques, puis attaque la montée du col de Barèges. Comme l’année
dernière, je décide d’envoyer sur cette montée à 22%, pour retrouver de bonnes sensations en
côte, et me faire plaisir. J’arrive à maintenir un gros rythme (enfin plutôt ce que je pense être
un gros rythme après 30h d’effort !), et je le monte en 27 minutes, ce qui permet de reprendre
13 minutes sur mon prévisionnel juste sur cette partie. Pour moi, c’est du précieux temps de
gagné, car je sais que les prévisions pour la descente qui suit sont trop optimistes, et que je
vais donc perdre du temps ; j’ai par conséquent tout intérêt à prendre un max d’avance dans
les portions en montée pour rester dans le clou des 39h.
Je pointe au col de Barèges, km 139,8, à 13h59, soit 53 minutes d’avance.
Col de Barèges 139,8 km 13h59 32h54 116ème
436 coureurs
Je prends 5 minutes pour me ravitailler en barres et eau, puis j’attaque la descente qui
m’emmène vers les laquets. Cette partie est là encore très technique, et j’ai un peu de mal à
avancer. Dès que j’entends des pas arriver derrière moi, je me range sur le côté : ce sont des
coureurs du 80 km, qui pour la plupart sont hyper à l’aise dans ce type de descente. J’atteins
la fameuse sapinière tant redoutée, avec ses racines, ses rochers et cailloux glissants, ses
ruisseaux à n’en plus finir jusqu’au lac de l’Oule. Comme prévu, je me trouve extrêmement
lent. Un gars du 80 km qui me double me provoque comme un déclic : à voir son allure en
descente, je me dis que ce gars-là prend son pied, et aborde la sapinière comme un jeu, où il
faut sauter de rochers en rochers, d’obstacles en obstacles. Mais il a raison le type ! C’est
comme çà qu’il faut l’aborder la sapinière ! Je me rends compte que je suis rentré en me
répétant à l’envie que je ne l’aimais pas, que ça allait être dur et interminable, etc. Mais si
j’essayais de l’aborder autrement ? Du coup, je m’arrête, accroche mes bâtons au sac, jugeant
qu’ils me rendent trop lents dans cette partie, et repars en me disant que tout cela est un jeu,
qu’il faut prendre les éléments non comme des obstacles, mais au contraire comme des jeux
sur lesquels s’appuyer pour avancer, un peu comme un entraînement de fartleck. Et ça
marche ! Je me surprends à prendre plaisir, à accélérer sensiblement l’allure… Bon en réalité,
je crois bien que ça a marché… 10 minutes tout au plus ! Les crevasses et l’ampoule me
lancent des messages d’alerte dès que je veux accélérer l’allure ! Mais malgré tout, en
changeant d’état d’esprit dans cette descente, je prends davantage de plaisir et commence
maintenant à m’imaginer l’arrivée. C’est marrant, mais jusque-là, cette descente du Bastanet
m’a fait comme un blocage psychologique, qui m’empêchait de me projeter au-delà.
Maintenant que j’y suis et que je la gère finalement tant bien que mal, le moral est bon !
La fin de cette sapinière (cabane de Lude, km 144,6) est quand même assez longue, et je n’ai
finalement perdu que 25 minutes sur mon prévisionnel dans cette descente. Une fois que j’en
sors, je tombe sur un couple de supporters fort sympathiques ! Bordelais et amoureux de la
montagne, ils descendent à chaque GRP pour encourager les traileurs, et si besoin faire un
bout de chemin avec eux. Ils cherchaient quelqu’un à accompagner pour remonter jusqu’au
Portet, et comme j’étais seul, et visiblement un peu marqué par cette sapinière, ils m’ont
proposé de m’accompagner jusqu’à Merlans. Nous faisons donc les 3 km de côte qui nous
séparent du ravito ensemble, et en leur compagnie, je ne vois pas le temps passer, discutant
d’autres courses, et de mille anecdotes sur leurs courses antérieures, en tant que coureurs ou
simples spectateurs.
Nous arrivons à Merlans (km 147,4 et dernier ravitaillement) à 16h10, soit 35 minutes en
avance sur mes prévisions.
Restaurant Merlans 147,4 km 16h10 35h05 123ème
436 coureurs
Je ne m’attarde pas trop, j’appelle papa qui doit me rejoindre à partir du Portet pour faire les
12 derniers km de descente ensemble. Malheureusement, comme je suis un peu en avance, il
est toujours au camping, et avec le brouillard qui nous attend au col, il ne sera pas arrivé à
temps. C’est pas grave, je lui propose d’aller jusqu’à Espiaube (km 153,7), puis de suivre le
balisage en sens inverse jusqu’à ma rencontre. Je repars donc en compagnie de mes nouveaux
supporters bordelais, et nous attaquons la dernière montée de ce Grand Raid des Pyrénées
2013, le col de Portet, courte montée d’1,5 km pour 177 m de dénivelé. On atteint le col à
16h40, j’ai maintenant 50 minutes d’avance. Non seulement je vais réussir à rentrer avant
20h, mais je suis également bien parti pour rentrer avant 19h, si je ne traine pas trop dans la
descente. Mes 2 supporters se tâtent à continuer à me suivre, mais leur voiture étant garée au
Portet, ils me souhaitent bon courage et j’entame donc la descente qui me mène à Vielle-Aure.
Le début de descente emprunte le même chemin que la veille, et est relativement doux, ce qui
me permet de courir. Tant que la pente n’est pas trop forte, je suis capable de courir. Mais dès
qu’elle s’accentue, mes douleurs aux pieds se rappellent à moi, et j’adopte donc une « mi-
course », un compromis entre une marche rapide, et une course vraiment pas rapide !!! A
présent, nous suivons une piste de ski, je me fais doubler par pas mal de concurrents du 80, et
quelques concurrents également du 160. Mais de toute façon, j’ai l’impression d’être à fond,
et dorénavant, je n’ai rien d’autre en tête que de prendre du plaisir dans ces derniers km avant
de franchir la ligne d’arrivée. Et le plaisir va être décuplé, puisqu’à l’approche d’Espiaube, je
retrouve comme convenu papa, mais également Sylvain, le frangin de Toulouse qui se fait une
spécialité de venir nous voir aux arrivées, ainsi que mes 2 fidèles néo-supporters bordelais,
qui ont abordé papa, se doutant qui il était, et sont donc venus avec lui et Sylvain à ma
rencontre ! Ça me touche particulièrement, car ce sont des gens que je ne connais absolument
pas, mais qui me poussent et m’accompagnent simplement pour le plaisir ! Ils nous
accompagnent donc jusqu’à Espiaube, où ils retrouvent leur voiture, puis nous retrouvons peu
après Espiaube, maman, Carmen la femme de Sylvain, et leurs enfants, Anya et Maélys, ainsi
que les enfants de Guillaume et Sandrine, Louis et Paul.
Le temps de prendre quelques photos, d’échanger brièvement et nous voilà repartis avec papa
et Sylvain, pour les 7,3 km restants. Les filles ont un temps voulu nous accompagner, mais en
calculant bien, il s’est avéré que le temps serait juste, avec la descente en voiture dans le
brouillard, et qu’elles risquaient donc de louper l’arrivée. Le fait de retrouver ma famille et
finir avec eux a rendu les derniers km très plaisants. Avec papa, nous nous amusons de la
tenue de Sylvain, complètement… blanche ! et attendons avec impatience les parties un peu
glissantes pour le voir donner un peu de couleur sombre à ses vêtements ! Malheureusement
(ou heureusement c’est selon !), aucune chute à déplorer, il maniait bien mes bâtons que je lui
prêtais quand je préférais m’accrocher aux arbres dans la descente très plaisante en forêt.
Dans cette portion, j’y ai pris beaucoup de plaisir, car c’est un passage comme je les aime, en
forêt, sur un sol peu caillouteux, donc propice à envoyer à quelques km de la délivrance.
Sylvain prend pas mal de vidéos et photos, et nous rigolons pas mal ensemble. Puis nous
sortons de la forêt, et retrouvons la piste en lacets, que nous coupons parfois, ce qui nous
accélère la perte de dénivelé.
L'effet flou, ça donne une impression de vitesse, j'aime bien!
Lorsque ça descend trop, où que le chemin est trop caillouteux, je me rends compte qu’alors
que j’ai l’impression de courir, Sylvain reste à mes côtés tout en… marchant ! Vignec est
bientôt en vue, la voix du speaker se fait faiblement entendre, et après un ultime virage, où
l’année dernière papa déjà était monté jusque-là à notre rencontre, c’est le retour à la
civilisation.
Nous entrons dans Vignec, et retrouvons… mes fidèles supporters bordelais ! qui ont décidé
de pousser jusqu’au bout, et m’accompagnent donc sur ce dernier km. Ils ont de plus rameuté
une dizaine de personnes qui applaudissent bruyamment et m’accompagnent sur quelques
dizaines de mètres !
Nous quittons Vignec, et avant Vielle Aure, ce sont maman, Carmen et les enfants qui nous
attendent. Les enfants ont chacun un drapeau de la Ligue et les agitent en courant devant
moi ! C’est un moment tout à fait magique qu’aucun mot ne peut retranscrire. Il y a tout à la
fois la satisfaction du défi réussi, et ce moment partagé avec les proches et moins proches, où
tous les visages s’illuminent et m’accompagnent dans la dernière ligne droite.
C’est marrant au passage la différence de ressenti de mon arrivée entre l’année dernière et
cette année. En 2012, je suis passé par tellement d’états lamentables, me voyant abandonner
avec certitude à plusieurs reprises, qu’arriver à Vielle-Aure au bout de 160 km était avant tout
inespéré et que le sentiment qui prédominait se résumait en 5 mots : « P****** je l’ai fait !! ».
Cette année, les moments creux ont été plus rares, et surtout moins profonds, et l’arrivée n’a
donc pas été ressentie comme un soulagement ou quelque chose de surréaliste, mais plutôt
comme un instant très fort de communion avec mes proches, qui m’ont suivi, encouragé,
assisté ; arriver en courant avec eux, avec les petits drapeaux de la Ligue, sous les
applaudissements d’un public encore nombreux à cette heure de la journée, est quelque chose
d’indescriptible en terme d’émotion et de fierté ressenties.
Puis le tapis rouge, et je passe la ligne, fier et heureux ! Le speaker précise que je cours au
profit de la Ligue Contre le Cancer, ce qui me rappelle que ça y est j’ai remporté mon défi et
j’ai donc validé les 530 € de parrainage sur ma course, en attendant celles de Guillaume et
Sandrine. Il est 18h50, j’ai donc mis 37h45 pour faire 161 km, 1h15 de mieux que mon
prévisionnel, et 5h30 de mieux que l’année dernière ! A part les pieds, qui ne sont pas beaux à
voir, le reste du corps est parfait, pas trop de fatigue aux jambes, aux cuisses, et le moral a
dans l’ensemble été bon.
Vielle-Aure 161 km 18h50 37h45 141ème
436 coureurs
Je récupère mon sac à dos de finisher, qui cette année remplace le tee-shirt, et papa nous offre
la pression tant attendue… Je demande quand même à Sylvain de me donner un tabouret à
côté, car la posture fixe debout est devenue impossible.
Puis Guillaume et Elo arrivent de Tournaboup, après y avoir laissé Juju et Sandrine. Je
partage ce moment avec Guillaume, avec qui nous avons couru ensemble ce GRP il y a 1 an,
avec le sentiment du devoir accompli. Bon courage à toi pour l’UTMB la semaine prochaine,
je suivrai et alimenterai le blog aussi assidument que tu l’as fait pour ce GRP.
Mon équipe d’assistance de choc ! Merci 1000 fois à vous… Des pieds de hobbit après 161 km...
Petit coup de fil à ma chérie au boulot, où ses collègues suivaient également ma course, puis
retour au camping, douche, apéro, et repas avant de m’affaler dans ma tente vers 22h. Réveil
vers 2h15 par papa pour aller accueillir Juju et Sandrine qui en terminent avec leurs 80 km.
Guillaume et Elo ont fait les 7 derniers km depuis Espiaube avec eux. Sandrine n’a pas été
bien sur les 50 premiers km, mais a peu à peu repris du poil de la bête, et finit plus rapidement
que l’année dernière. Juju quant à lui a réussi là où il avait été échoué à seulement 13 km de
l’arrivée l’année dernière : il est maintenant finisher, et a pris une magnifique revanche sur
lui-même. Encore bravo à tous les 2.
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Quel bilan tirer de cette course ? Si l’année dernière, j’écrivais sans hésitation que bien que
finisher le 160 km n’était pas fait pour moi, eu égard aux états physiques et psychiques dans
lesquels je m’étais trouvé au cours de la course, je suis cette année bien plus mesuré dans mes
propos. Hormis le gros coup de barre du col de Riou, les chutes à répétition après Aulian, et le
ras-le-bol après Esquièze Sère, j’ai apprécié chaque kilomètre de cette course, passant tantôt
par des états d’euphorie, tantôt par des états de bien-être général. Cette distance ne me parait
maintenant plus aussi insurmontable qu’elle ne me le paraissait il y a un an. Il me reste, avant
de me lancer dans un nouveau défi de ce type, de régler mon problème de crevasses, devenu
récurrent sur ces distances, et fortement handicapant.
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Je remercie particulièrement papa et maman, qui m’ont sans relâche assisté, soutenu, supporté
mes humeurs différentes d’un ravito sur l’autre, avec toujours les bons mots au moment de
repartir. Je remercie également ma p’tite femme, qui bien que physiquement pas présente, m’a
suivi tout du long, et encouragé lorsque je l’ai eue au téléphone, et qui avec Léonie m’a dressé
une magnifique banderole à mon retour à la maison. Ainsi que Guillaume, qui m’a
accompagné au Sencours et au Pic du Midi, qui m’a encouragé par téléphone, et assuré une
excellente com’ en alimentant en direct le blog. Sylvain, Carmen, et les enfants, pour la fin de
parcours enjouée d’abord puis riche en émotions ensuite. Le couple bordelais, dont je connais
le prénom du monsieur, Christian, pour leur aide et soutien totalement improvisés et fort
bienvenus. L’ensemble des suiveurs du net ou d’ailleurs. Et enfin l’ensemble des parrains qui
ont participé, chacun à leur niveau, au profit de la Ligue Contre le Cancer, au travers de la
course.
L'équipe d'heureux finishers sous le soleil du dimanche