monuments choregiques d'athenes

Pierre Amandry

Monuments chorgiques d'AthnesIn: Bulletin de correspondance hellnique. Volume 121, livraison 2, 1997. pp. 445-487.

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Amandry Pierre. Monuments chorgiques d'Athnes. In: Bulletin de correspondance hellnique. Volume 121, livraison 2, 1997.pp. 445-487.

doi : 10.3406/bch.1997.4574

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1997_num_121_2_4574

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RsumObservations sur deux bases de trpieds rcemment publies. Amnagements de la pente del'Acropole au-dessus du thtre de Dionysos : paliers taills dans le roc, colonnes chorgiques datantdu IVe ou du IIIe s. av. J.-C. (et non de l'poque romaine), monument de Thrasyllos et chapelle de laVierge. Monument de Lysicrate : le trpied reposait sur le toit du monument (et non sur le fleuron quile surmonte). En appendice : le monument de Lysicrate et la France, le rle des Capucins dansl'accueil des voyageurs et dans la protection du monument, les changes de correspondance entre lesgouvernements franais et grec et les autorits religieuses d'aprs les documents d'archives.

AbstractComments on two recently published tripod bases. Modifications to the slope of the Acropolis abovethe Theatre of Dionysos: stair-heads cut into the rock, choregic columns dating from the 4th or 3rd c. BC(and not the Roman period), Thrasyllos Monument and Chapel of the Virgin. Lysicrates Monument:the tripod rested on the roof of the monument (and not on the finial which crowned it). As anappendix: The Lysicrates Monument and France, the role of the Capuchin fri- ars in the welcome totravellers and the protection of the monument, the interchange of correspon- dence between the Frenchand Greek governments and the religious authorities according to the archive documents.

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Monuments chorgiques d'Athnes

par Pierre Amandry

On trouvera ici des complments aux observations que j'ai prsentes, dans les tomes 100 (1976) et 101 (1977) du BCH, sur les bases des trpieds qui taient remis en prix aux concours des Dionysies et des Tharglies.

Base de trpied des Tharglies

Une base de trpied avait t rutilise comme seuil dans un btiment public de la ville d'Athnes, coupe en deux par le milieu des faces latrales1. La moiti conserve est la moiti antrieure, qui portait la ddicace. La face inscrite est longue de 1,44 m ; la pierre tait peu prs carre, les faces latrales tant conserves sur une longueur de 0,68 m. Le chorge s'appelait Phormion ; il avait remport la victoire, avec les tribus Aiantis et Hippothontis, au concours des adultes aux Tharglies de l'anne 380/79 (archonte Pythas). L'diteur de l'inscription a montr l'intrt que prsente cette date pour l'histoire de l'organisation de la fte des Tharglies. Par tradition, deux tribus y taient associes ; mais le mode d'association a chang une certaine date au cours de la premire moiti du IVe s. av. J.-C. Jusqu' cette date, les noms de deux tribus taient tirs au sort chaque anne ; partir de cette date, les tribus ont t rparties de faon permanente en cinq groupes de deux qui fournissaient leur tour le chorge dans un ordre dtermin sur une priode de cinq ans. L'application de la premire formule tait atteste jusqu' l'anne 384/3, et celle de la deuxime formule partir de l'anne 366/5. Aprs la rforme, la tribu Aiantis tait associe la tribu Oinis, et la tribu Hippothontis la tribu Ccropis. La chorgie de Phormion remonte donc l'poque du tirage au sort annuel. Cette formule tait encore en usage en 380/79. Le laps de temps au cours duquel la rforme a eu lieu est donc raccourci de quatre annes : entre 380/79 et 366/5.

1 A. P. MATHAIOU, Horos 8-9 (1990-91), p. 53-58.

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Base de trpied des Dionysies

Un trpied avait t ddi par un certain Kimon, chorge victorieux aux Dionysies, au concours de dithyrambe des adultes, vers le milieu du IVe s. av. J.-CA Dans l'tat o la base a t retrouve, elle est longue en faade de 0,80 m ; on n'y lit que le dbut des lignes de la ddicace. D'avant en arrire, la pierre mesure 2,04 m, ce qui est nettement suprieur la moyenne : habituellement, les bases des trpieds des Dionysies, peu prs carres, mesurent environ 1,50 m de ct3. A la face suprieure, deux pieds ont laiss leur empreinte. Une de ces empreintes mesure peu prs 0,40 m de long (d'aprs le dessin), ce qui est galement suprieur la moyenne, les plus longues de celles qui ont t releves ne dpassant pas 0,35 m. L'autre empreinte n'est conserve que dans sa partie antrieure, o la patte de lion s'tale ; le talon, c'est--dire le logement du pied lui-mme, se serait trouv sur la pierre voisine gauche4. Les deux empreintes sont proches l'une de l'autre (moins de 0,20 m de distance) et orientes en sens inverse, ce qui implique l'existence de deux trpieds scells, au moins en partie, une mme base. La reconstitution graphique qui est propose laisse perplexe : elle oblige supposer l'existence de trois trpieds qui se seraient dresss sur une base commune, constitue par la juxtaposition de 8 blocs longs chacun de 0,80 m.

Des alignements de trpieds, dont les bases taient accoles les unes aux autres, bordaient de chaque ct la voie d'accs au sanctuaire du hros Ptoos : on en a retrouv en place 9 du ct Nord et 19 du ct Sud5. En gnral, chaque base ne portait qu'un seul trpied. Cependant, une de ces bases fait exception : elle tait constitue de trois dalles, o deux trpieds taient scells, la dalle mdiane tant commune aux deux6.

La base d'Athnes a-t-elle conserv en faade sa longueur primitive ? Certains dtails, en particulier la face latrale gauche, pourraient s'expliquer par un retaillage ( en juger par le dessin). Mme si ses faces de joint sont intactes, il n'est pas vident que les blocs qui la bordaient de part et d'autre aient t de mme longueur.

Colonnes chorgiques et monument de ThrasyUos

Au-dessus du thtre de Dionysos et de la katatom se dressent deux colonnes corinthiennes chapiteau triangulaire qui ont, dans leur tat premier, port chacune un trpied (fig. 1). L'accs de cette rgion, naturellement malais cause de l'escarpement, tait rendu plus

2 A. P. Mathaiou, in R. Osborne, S. Hornblower (ds), deux au Ptoon (P. Guillon, Les trpieds du Ptoion [1943], I, Ritual, Finance, Politics. Athenian Dmocratie Accounts pre- p. 30-31 et 33-34, bases 2 et 7). senied David Lewis (1994), p. 183-188. 5 P. Guillon, op. cit., I, p. 28-43. 3 Cependant, une base trs mutile, trouve l'Agora, 6 Les trois blocs constituant cette base mesuraient en devait aussi mesurer plus de 2 m de ct, mais sur les faade 0,57 m, 0,75 m et 0,60 m (soit au total 1,92 m) et, quatre faces : BCH 100 (1976), p. 51, fig. 28. d'avant en arrire, 1,02 m pour deux d'entre eux et 0,91 m 4 Les exemples de pose d'une patte de trpied sur un joint pour le troisime, sur cette base, cf. P. Guillon, op. cit., I, sont rares : un Delphes {BCH 111 [1987], p. 114, fig. 20), p. 30-31, pi. 5 (bases 2 et 3) ; II, p. 60.

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Fig. 1. Thtre de Dionysos, katatom et chapelle de la Vierge, colonnes chorgiques.

difficile encore, jusqu' une date rcente, par la prsence de figuiers de Barbarie. De 1979 1989, des travaux de consolidation du rocher de l'Acropole ont t effectus: le rocher a t dcap, et les fissures colmates. En 1986, le rocher avait t mis nu dans la rgion des colonnes (fig. 3). Ce nettoyage a fait rapparatre nombre de dtails que la couche de terre et la vgtation dissimulaient : entre autres, taills dans le roc, un encastrement de monument (dont il sera question plus loin) et un escalier, l'Ouest de la katatom (fig. 2), de date videmment impossible dterminer, par lequel on accdait la rgion des colonnes7.

Les lettres A et dsigneront respectivement la colonne orientale et la colonne occidentale. Les deux monuments se ressemblent : mme mode de construction et mmes matriaux, qu'il s'agisse du socle (plinthe en marbre de l'Hymette, autres assises en calcaire), de la base, du

7 Les traces d'entailles faites de main d'homme ont t releves par MM. K. Tzakos et K. Kazamiakis, qui prparent une tude sur le pripatos et ses abords et publieront un

plan dtaill de cette rgion, ainsi que les inscriptions et grafitti qu'ils y ont dcouverts (lettre de M. Tzakos du 26 avril 1988).

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Fig. 2. Escalier taill dans le roc ( droite, vers le haut, pierraille et ciment modernes).

fut. Les bases prsentent quelques diffrences dans leur structure, mais non dans le profil des lments8. Les chapiteaux portent le mme dcor. Les diffrences les plus importantes rsident dans la hauteur et le diamtre9. Au socle de la colonne A (fig. 4), seules les trois premires assises ( partir du haut, l'assise I tant la plinthe) sont entirement bties. Les faces Sud et Nord sont un peu plus longues que les faces Est et Ouest : elles mesurent respectivement 1,78 m et 1,70 m (I), 2,15 m et 1,985 m (II), 2,725 m et 2,52 m (III). L'assise III repose au bord postrieur sur le rocher, qui a t entaill cet effet. partir de l, le rocher a t taill en gradins, qui constituent la partie Nord de cha

cune des assises IV, V et VI, dont la partie Sud est seule btie, sur une longueur qui n'est pas la mme aux cts Est et Ouest, et qui diminue progressivement d'assise en assise, alors que la longueur de la faade (ct Sud) augmente, comme il est normal. La longueur de la partie btie des assises IV, V et VI est respectivement, au Sud, de 3,40 m, 4,02 m, 5,18 m, l'Est, de 2,84 m, 1,68 m, 0,62 m, l'Ouest, de 1,84 m, 1,64 m, 0,64 m. Quant l'assise VII, elles est constitue presque entirement par un arasement du rocher, qu'on a complt, dans la partie orientale, par un bloc long de 1,365 m.

Au pourtour du socle, le rocher a t entaill au plus prs des assises : la distance entre l'entaille et le bord de l'assise correspondante est gnralement de 5 10 cm ; elle atteint 20 cm la face Ouest de l'assise VI.

L'assise I est haute de 0,41 m, les assises II, III, IV et VI de 0,34 m, l'assise V de 0,36 m, l'assise VII de 0,295 m. La longueur de la contremarche, la face Sud, est de 0,135 m l'assise II, de 0,305 m l'assise III, de 0,36 m, 0,34 m et 0,33 m respectivement aux assises IV, V et VI.

L'arasement qui constitue l'assise VII est suivi de cinq autres (fig. 5 et 6)10. Les trois premiers sont en relation directe et exclusive avec le socle de la colonne : ils dpassent peine, vers l'Est et l'Ouest, l'aplomb de l'assise VIL Ces paliers sont larges de 0,70 m, 0,65 m et 1,20 m. La dnivellation est d'environ 0,30 m au premier palier et 0,40 m aux deux autres. Les deux premiers sont assez bien conservs, la surface du troisime est compltement dgrade par l'clatement du rocher.

8 Diffrence notable dans le rapport entre la hauteur de la plinthe et celle de la base, respectivement 0,41 m et 0,55 m la colonne A, 0,435 m et 0,41 m la colonne B. 9 D'aprs les mesures prises par Stuart et Revett, Les antiquits d'Athnes II (1812), p. 49. [L'dition franaise du tome II a paru 22 ans aprs l'dition anglaise. Stuart et Revett ont sjourn Athnes de 1751 1753].

10 Les photographies des fig. 1 5, 7 et 8, ont t prises en 1987. La coupe de la fig. 6 a t dessine par Didier Laroche d'aprs des relevs faits la mme anne, avec pour seuls instruments le mtre, l'querre et le fil plomb. Les mesures sont donc approximatives ; au demeurant, il ne saurait en tre autrement, dans l'tat o se trouve le rocher. Notre travail a t grandement facilit par la bienveillance de Mme Evi Touloupa, alors directrice de l'Acropole.

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Flg. 3. Les deux colonnes chorgiques (1987).

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Hg. 4. Socle de la colonne A : a, face Ouest ; b, faces Est et Nord ; c, faces Ouest et Sud ; d, face Sud, vue partielle.

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Flg. 5. Paliers en avant du socle de la colonne A.

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Illustration non autorise la diffusion

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Flg. . Plan du socle de la colonne A et coupe l'Ouest de cette colonne (ca 1 : 100) (dessin de Didier Laroche).

Tout autre est le cas des deux entailles qui suivent, jusqu'au bord de la katatom. Le soin avec lequel elles ont t tailles et aplanies contraste avec le caractre plutt sommaire du travail aux paliers prcdents et, contrairement ceux-ci, elles sont compltement indpendantes de la colonne A. En effet, elles s'tendent sur toute la longueur de la katatom, qui devait donc tre couronne d'au moins une assise, et probablement de deux, faites de blocs bien taills et joints. La largeur de ces arasements est de 0,55 m et 0,80 m, et la dnivellation entre eux de 0,65 m.

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La colonne repose aussi sur un socle degrs partiellement encastr dans la pente rocheuse (fig. 7). Mais le rocher n'a pas t taill en gradins : la paroi est verticale sur presque toute la hauteur du socle, et l'arasement s'tend sur presque toute sa surface. Sur les cinq assises dont se compose le socle, quatre sont entirement bties. L'assise IV, qui repose directement sur le roc, est pratiquement carre : la longueur des faces est de 2,275 m 2,29 m, ce qui laisse l'Est et l'Ouest un intervalle de 25 30 cm entre la face des blocs et la paroi de l'entaille. Au Nord, l'espace n'est que de 10 15 cm (fig. 8 a). Seule, l'assise V n'existe qu'en faade, au Sud, pour compenser la dclivit. Comme au socle A, elle fait un fort empattement sur l'assise IV : sa longueur atteint 2,845 m, soit exactement la longueur de l'entaille du rocher au Nord. Elle ne fait retour que sur 0,65 m l'Est et 0,67 m l'Ouest.

L'assise I est haute de 0,435 m, les assises II et V de 0,34 m, les assises III et IV de 0,30 m. La longueur de la contremarche est de 0,105 m 0,125 m aux assises suprieures, et de 0,23 m 0,25 m aux assises infrieures. L'arasement du rocher dpasse d'environ 50 cm la face Sud de l'assise V ; mais, au del, on n'aperoit aucune trace de paliers. Le rocher est brut, et semble l'avoir toujours t, entre cet arasement et les deux entailles qui bordent le haut de la katatomn.

Un accident s'est produit en cours de construction la face Nord de l'assise I. Au joint entre les deux blocs de marbre dont cette assise est constitue, un morceau en forme de coin avait t insr, aprs retaillage de la partie endommage. Le morceau (qui a disparu) avait t fix la paroi retaille au moyen de deux goujons de 2 cm qui sont demeurs partiellement en place (fig. 8 b).

Un autre arasement du rocher (C) (fig. 8 c, d) a t remis au jour12. Le ct Nord est long de 1,50 m, les cts Est et Ouest de 2,15 m. La pente a t entaille au Nord sur une hauteur de 0,70 m, comme la base ; mais le monument qui avait t dress l occupait au sol une surface nettement moindre que les socles des deux colonnes. La distance entre les monuments A et B, et et C, tait identique : 4 m entre les assises IV des socles A et B, 3,95 m entre l'assise IV du socle B et le bord Est de l'entaille de C.

Les deux colonnes ont t considres comme romaines, unanimement, depuis le dix-huitime sicle jusqu' nos jours, cause d'une inscription grave, probablement pas avant le IIIe s. de notre re, la face Ouest de l'assise I du socle A. J'ai mis des doutes sur le bien-fond de cette datation, mais n'ai apparemment convaincu personne13. Je reprends donc les arguments.

D'abord, un argument de vraisemblance : cet endroit, par excellence, serait-il rest inoccup du temps de Lycurgue jusqu'au temps des Svres ?

Ensuite, des arguments d'ordre architectural : la forme des crampons, le profil des bases, le dcor des chapiteaux.

11 Contrairement ce que j'ai crit dans le BCH 100 13 Par exemple, R. E. Wycherley, The Stones of Athens (1976), p. 83 : le rocher n'avait pas t nettoy cette (1978), p. 184, n. 27, cite mon article du BCH 100 (1976) date. et ajoute aussitt aprs : The two Corinthian columns of 12 Son existence avait t signale par W. Judeich, Topogra- Roman date... , sans discuter aucun des arguments que phie von Athen2 (1931), p. 315. j'ai avancs.

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flg. 7. Socle de la colonne : a et b, face Est ; c, face Ouest ; d, face Sud.

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Flg. 8. a et b, socle de la colonne ; c et d, arasement du rocher (C).

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Les crampons taient en double la colonne A : la cavit o ils taient logs est visible en trois endroits dans les cassures faites par les pillards qui ont enlev le mtal. L'argument n'est pas dcisif. Ce type de crampon a t d'un emploi courant jusque vers 320 av. J.-C. ; mais on en connat quelques survivances au IIIe s. av. J.-C. et quelques rsurgences l'poque romaine14. Mais ces exemples se comptent sur les doigts d'une main.

Plus significative me parat tre la comparaison du profil de la base des colonnes avec celui de bases de diverses poques. Les deux bases sont un peu diffrentes l'une de l'autre : celle de la colonne ne comporte pas de tore infrieur, elle se termine en bas comme les tambours infrieurs des deux colonnes. Mais le profil du tore suprieur et de la scotie ne diffre pas sensiblement de celui des parties correspondantes de la base A. Ce profil se situe entre celui des bases des colonnes des Propyles et de l'rechtheion et celui des bases hellnistiques de l'Olympieion. La structure de ces bases diffre fondamentalement de celle des bases de l'poque d'Auguste ou d'Hadrien, de hauteur relativement plus faible, o la scotie est crase entre le tore suprieur, mince, et le tore infrieur, largement panoui (fig. 9)15.

Quant aux chapiteaux, pratiquement identiques l'un l'autre, ils ne ressemblent exactement aucun autre, d'aucune poque. Les photographies dispensent d'en donner une description dtaille (fig. 10) 16. Ils ne comportent pas la base de couronne de feuilles d'acanthe. Chacune des trois faces est dcore d'une palmette en forte saillie, surmonte d'une fleur. Une autre palmette fait saillie sous les volutes angulaires. Ces chapiteaux sont cent lieues des chapiteaux corinthiens d'poque romaine ; ils ne seraient pas dplacs l'poque des ttonnements o, avant la fixation d'un type canonique, il y a autant de variantes que de chapiteaux17.

Le socle de la colonne n'a jamais port aucune inscription. Celui de la colonne A en porte une, qui n'est probablement pas antrieure au IIIe s. de notre re, comme il a t dit plus haut (IG II2, 3168). Cette inscription se compose de deux lignes; la 2e ligne sont numrs quatre ou cinq noms de personnes, srement ceux des ddicants ; de la lre ligne, qui tait plus courte, ne sont conserves que les trois premires lettres. Dans les IG, on a propos hardiment de restituer [ ][ ]18. Cette restitution se fonde uniquement sur la prsence, non

14 Exemples Athnes au dernier quart du IVe s. av. J.-C. : au publis par E. Stikas, AE 1961, p. 162-163. temple d'Apollon Patros et aux monuments de Nicias et de 17 Les chapiteaux des colonnes A et ne sont mentionns, Thrasyllos. Exemples l'poque romaine: Athnes, l'Agora sauf erreur, dans aucune des tudes consacres aux chapi- romaine et au Pompion, Nicopolis, au monument comme- teaux corinthiens, d'une poque ou d'une autre, par moratif de la bataille d'Actium, Argos, dans un monument exemple : M. GCiTSCHOW, Jdl 36 (1921), p. 44-83 ; G. ROUX, dat hypothtiquement de l'poque d'Hadrien, Corinthe, L'Architecture de l'Argolide (1961), p. 362-382; W.-D. HEIL- au temple de Commode. Cf. R. Martin, Manuel d'architecture meyer, Korinthische Normalkapitelle, RM Ergnzungsheft 16 grecque I (1965), p. 263 ; BCH 116 (1992), p. 675-676. (1970) ; H. Bauer, Korinthische Kapitelle des 4. und 3. Jahr- 15 II va de soi que n'entrent pas en ligne de compte les hunderts v. Chr., MDAI(A) Beiheft 3 (1973). Stuart et Revett monuments d'poque romaine o l'on a imit des monu- ont port sur les chapiteaux des deux colonnes l'apprcia- ments du Ve s. av. J.-C, par exemple au temple de Rome et tion suivante : Ces chapiteaux sont d'une forme peu com- d'Auguste sur l'Acropole et aux grands Propyles d'Eleusis. mune ; mais, quoique orns de feuillages et de volutes, ils 16 Les photographies des chapiteaux que j'ai publies en ne prsentent rien de remarquable quant l'lgance de la 1976 avaient t prises de l'Acropole. Celles de la fig. 10 composition ni la dlicatesse de l'excution . ont t prises par Philippe Collet du pied des colonnes. Des 18 Sur l'tat actuel de cette inscription, cf. BCH 100 photographies et des dessins de ces chapiteaux ont t (1976), p. 85.

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Flg. 9. Bases de colonnes : a, colonne A ; b, colonne ; c, d, Olympiion ; e, Agora romaine ; f, arc d'Hadrien ; g, bibliothque d'Hadrien ; h, petits Propyles d'Eleusis.

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Flg. 10. Chapiteaux : a, b, colonne A ; c, d, colonne B.

douteuse, de traces d'implantation d'un trpied sur l'abaque du chapiteau. Mais, sur l'abaque du chapiteau de la colonne B, on aperoit des traces identiques sous une base de statue, qui a remplac le trpied. Il est probable que la colonne A a connu le mme sort et que l'inscription se rapporte une statue qui avait t substitue au trpied. Plutt qu'un trpied ddi au Soleil, la colonne n'aurait-elle pas port la statue d'un personnage dont le nom commenait par Hlio-, pourquoi pas Hliogabal ? Hypothse purement gratuite, cela va de soi.

On a donc deux trpieds, poss sur de hautes colonnes, l'endroit le plus en vue, dont aucune inscription ne rvle ni le nom du ddicant ni les circonstances de la conscration. Or, le

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chorge qui faisait les frais de la construction d'un monument pour y exposer le trpied qu'il avait gagn ne gardait pas l'anonymat. C'tait un acte o la pit, le civisme et la gloriole avaient leur part. On en faisait tat devant les tribunaux19. Philochore (cit par Harpocration) a dit que Aischraios, ayant ddi un trpied , avait fait graver la ddicace - . Sur le rocher lui-mme ? Peu vraisemblable. Plutt sur l'assise qui couronnait la katatom, pour qu elle fut lisible des gradins suprieurs du thtre. Un de ces monuments (A, ou C) tait-il celui d'Aischraios ? Quand Pausanias, ayant mentionn la grotte, ajoute ( 21,3), fait-il allusion la colonne A? Existe-t-il un lien entre cette colonne et l'offrande de Thrasyllos, et entre les trois monuments, quidistants, et les offrandes de Thrasyllos et de son fils ? Autant de questions qui resteront jamais sans rponse, mais qu'on est fond poser.

On considre en gnral que le monument de Thrasyllos se composait d'une faade 3 piliers construite devant l'entre de la grotte, de la grotte elle-mme et d'un socle degrs bti au-dessus de la grotte, qui portait une statue dans l'tat o le monument a t vu, dcrit, dessin par Cyriaque d'Ancne en 143620 et par Stuart et Revett au milieu du dix-huitime sicle, et que ce monument datait, pour l'essentiel, du temps de Thrasyllos (chorge vainqueur en 320/19), avec quelques amnagements dus son fils Thrasycls (agonothte deux fois vainqueur en 271/0). C'est Stuart et Revett qu'on doit de connatre l'aspect que prsentait le monument : il a t presque entirement dtruit par les boulets turcs lors du sige de l'Acropole en 182721. La ddicace de Thrasyllos tait grave sur l'pistyle du porche, les deux ddicaces de Thrasycls lui taient perpendiculaires, de part et d'autre du socle de la statue.

L'opinion courante est que le socle tait destin l'origine porter le trpied gagn par Thrasyllos, le trpied qu'a vu Pausanias22. Quant l'offrande de Thrasycls, les avis diffrent : certains pensent qu'il a fait remanier le monument paternel de faon prsenter un trpied chacun des angles de la faade23, d'autres qu'il s'est born insrer dans le monument ses deux ddicaces sans ddier de trpied24.

La question complique des rapports entre pripatos, katatom et cavea peut tre laisse de ct25 ; elle est sans incidence sur l'identification du monument de Thrasyllos. Mais que penser

19 Lysias, XXI 2 ; Ise, V 41, VII 40. 24 On s'est demand si, partir du moment o le Dmos 20 E. W. Bodnar, Coll. Latomus 4 (1960), p. 38. s'tait substitu aux particuliers dans l'exercice des fonctions 21 Reproduction du dessin de Stuart et Revett, photogra- de chorge, l'usage s'tait maintenu de remettre un trpied phie de l'tat actuel, rsum de Vopinio communis: J. Trav- l'agonothte vainqueur, ou pour celui-ci de le consacrer. Deux LOS, Pictorial Dictionary of ancient Athens (1971), p. 562- agonothtes au moins avaient ddi des trpieds : Thopha- 565. Les dbris demeurs pars depuis 1827 ont t ns, contemporain de Thrasycls, et comme lui double vain- diligemment tudis par G. Welter, AA 1938, col. 33-68. queur, et Drakontids, plus rcent d'un sicle : IG II2, 3058 et 22 Judeich, op. cit. {supra, n. 12), p. 315, n. 4, n'est pas 3081 ; BCH 100 (1976), p. 28-32 et 5&63. Des autres ddi- de cet avis : il estime invraisemblable que le trpied men- caces d'agonothtes attestes par des inscriptions plus ou tionn par Pausanias soit celui de Thrasyllos ; peut-tre moins mutiles (IG II2, 3073 3080, 3082 3089), on ne celui d'Aischraios. peut pas affirmer qu'elles concernent des trpieds ; mais plu- 23 Solution propose par Stuart et Revett, adopte par sieurs taient graves sur des pistyles, ce qui implique Judeich. Travlos a reproduit les deux restitutions de la l'existence d'une faade colonnes (cf. infra, n. 26). faade, dans son tat originel et aprs les remaniements de 25 Sur cette question, cf. L. Beschi, ASAA 45-46 (1967-68), Thrasycls, proposes respectivement par Welter et par p. 381-436, 511-517 ; L. Polacco, // Teatro di Dioniso Eleu- Stuart et Revett. tereo ad Atene (1990), p. 149-155.

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des rapports entre un monument chorgique et une grotte ? Pas plus qu'ils ne gardaient l'anonymat, les chorges ne cachaient les trpieds qu'ils ddiaient dans les profondeurs obscures d'une grotte. On ne voit pas non plus de rapport entre le monument de Thrasyllos et le massacre des Niobides que Pausanias a vu dans la grotte, peint ou sculpt. Les monuments chorgiques colonnes n'taient que des faades postiches, en avant d'un espace qui ne dpassait pas 3 ou 4 m26. Entre le porche et le bord du rocher, la distance est de 1,50 m 2 m ; en mordant un peu sur le rocher, on disposait de la place ncessaire pour riger un trpied au-dessus de la colonnade ; ni la grotte ni le socle n'avaient de place dans cet amnagement.

Les deux blocs partiellement conservs de la ddicace de Thrasyllos prsentent le mme aspect l'arrire (fig. 1 1) : ils sont vids sur une partie de leur longueur, sur plus de la moiti de leur largeur et sur prs de la moiti de leur hauteur27. Ces videments avaient-ils pour objet d'allger les blocs, comme a pens Welter ? taient-ils destins au logement des abouts de poutres du plafond ? Datent-ils du temps de Thrasyllos, ou tmoignent-ils d'un remaniement ?

La seule des deux ddicaces de Thrasycls qui ait chapp la destruction (fig. 13) est grave sur un bloc tout fait impropre, par ses dimensions et par sa forme, avoir port un trpied28.

La statue de Dionysos, emporte en Angleterre par Elgin en 1 80229, est contemporaine de Thrasyllos ou de Thrasycls, et plutt du premier30, ce qui n'implique pas ncessairement qu'elle ait t place ds cette poque au-dessus de la grotte. Dj acphale lors du passage de Cyriaque, elle a t longtemps considre comme fminine cause de son vtement31 ; elle a pu de ce fait passer pour une image de la Vierge. C'est probablement cette mprise qu'elle a d sa longvit.

26 Comme le montrent les fondations au nombre d'une tion when I first visited Athens [en 1801], but it has since quinzaine, qui ont t mises au jour en bordure de l'Odon : then been barbarously removed to London . Dans une lettre M. Korrs, AD 35 (1980) [1988], B' 1, p. 16-18. Mme date du 9 aot 1802 (infra, p. 474), Elgin exprimait sa quand, par exception, les dimensions du monument attei- satisfaction de l'enlvement de la statue. gnaient celles d'un trsor, comme dans le cas du monument 30 La statue mesure, dans son tat actuel, plus de 2 de Nicias, le monument n'tait que le support du trpied : mtres de haut. La tte et le bras gauche, qui manquent, Plutarque, Nicias 3,3. Sur le monument de Nicias, cf. taient des pices rapportes, fixes au corps par des J. TRAVLOS, op. cit. (supra, n. 21), p. 357-360. tenons, comme Stuart et Revett l'avaient remarqu. Le dos 27 La taille des blocs n'est pas rgulire : la diffrence de a t recreus, assez grossirement. C'est une uvre origi- longueur entre l'avant et l'arrire atteint 10 cm. Longueur nale des dbuts de l'poque hellnistique. Jean Marcad a moyenne : 1,70 et 1,35 m. Longueur de la partie non bien voulu m'indiquer que, si la statue a t souvent date vide : 0,38 0,41 m. Hauteur des blocs : 0,44 m ; hau- du 1er tiers du me s. et cite comme exemple de survivance teur de la partie vide : 0,16 0,21 m selon les endroits. de la tradition classique, cette apprciation a t plus ou Largeur des blocs : 0,63 m ; largeur de la partie vide : moins consciemment influence par la date de Thrasycls, 0,35 m. et que, pour sa part, il inclinerait plutt pour le dernier tiers 28 Ce bloc est long de 2,21 m et haut de 0,82 m. Son du IVe s. Quand on attribue Thrasycls l'installation de paisseur varie de 0,20 0,30 m selon les endroits: le la statue au-dessus de la grotte, on se heurte l'hypothse revers est trs irrgulier, et l'on peut se demander s'il a subi gnralement admise de la prsence, cette mme place, des dommages ou s'il est rest brut. Les faces latrales, du trpied de Thrasyllos. J. G. Frazer, Pausanias's Descrip- chaque bout, sont piquetes, sans anathyrose. Au milieu de tion of Greece II (1913), p. 230-231, conciliait les deux la face suprieure, la prsence d'un trou de pince indique hypothses : la statue se trouvait entre les pieds du trpied, qu'un autre bloc y reposait. La photographie de l'inscrip- Certes, une statue servait parfois de support la cuve; tion (fig. 13) a t obtenue par l'assemblage de six photo- mais elle tait debout, et son ampleur n'excdait pas l'car- graphies de dtail : on ne dispose pas du recul ncessaire tement des pieds du trpied. Plus fantaisiste tait la solu- pour photographier la pierre tout entire. tion de Stuart et Revett : le trpied tait pos sur les genoux 29 Brit. Mus. 432; A. H. Smith, Catalogue of Sculp. in the de la statue, entre ses bras! Br. Mus. I [1892], p. 257-259. E. DODWELL, A classical and 31 R. Chandler, Travels in Greece (1776), p. 62-63, men- topographical Tour through Greece (1819), p. 299: The tionne a female figure which had lost its head, sedent beautiful colossal statue... still occupied its ancient situa- qu'il identifie comme Niob, en relation avec le massacre

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Rg. 11. Ddicace de Thrasyllos.

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Rg. 12. Katatom et colonnes chorgiques.

des Niobides vu par Pausanias dans la grotte. Identification conteste par Stuart et Revett, op. cit. (supra, n. 9), p. 52- 54, qui proposent de reconnatre dans la statue une personnification du Dmos ou de la tribu victorieuse. Dodwell, op.

cit. (supra, n. 29), laisse Visconti la responsabilit de l'identification avec Dionysos : The beautiful colossal statue, clothed in female attire... which the learned Visconti supposes to represent Bacchus .

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Flg. 13. Ddicace de Thrasycls.


Du porche ne subsiste en place que la partie infrieure des piliers (fig. 12). Mais nombreux sont les blocs pars l'entour. On y distingue deux espces de marbre : marbre blanc du Pentlique (utilis pour la ddicace de Thrasyllos), marbre gris-bleu de l'Hymette (utilis pour la ddicace de Thrasycls). Les deux degrs prcdant le seuil du porche sont en marbre de l'Hymette et le seuil en marbre blanc. Cette dualit n'aurait en soi rien d'insolite, si la juxtaposition des deux marbres ne se retrouvait pas dans un mme pilier. G. Welter a relev des traces de mortier et a dcel d'autres indices qui tmoigneraient d'un remaniement, ou d'une rnovation , l'poque impriale32. Mais ces indices ne fournissent qu'un terminus post quem. En avant du porche, le rocher a t taill grossirement, en ignorant dlibrment les contours des gradins33.

Ces divers indices, s'ajoutant certaines bizarreries, comme la disposition des deux ddicaces de Thrasycls aux faces latrales du socle, incitent envisager l'hypothse d'un amnagement li la conscration de la grotte au culte de la Vierge Spiliotissa. La faade de la chapelle et le socle de la statue auraient t construits avec des matriaux provenant du voisinage, assembls de faon cohrente, avec soin et avec got, comme on a fait des lments du monument de Nicias dans la porte Beul. Quoi qu'il en soit de cette hypothse, les auteurs des diverses restitutions du monument de Thrasyllos, remani ou non par Thrasycls, ont eu tort de mconnatre que Stuart et Revett, sur le tmoignage desquels tout repose, ont dessin une chapelle.

Monument de Lysicrate

Quinze ans avant Thrasyllos, un autre chorge, Lysicrate, avait commmor la victoire qu'il avait remporte au concours des jeunes gens, avec le chur de la tribu Acamantis, par l'rection d'un monument original, petite rotonde colonnade corinthienne orne d'une frise sculpte et couverte d'un toit de marbre au milieu duquel s'levait ce qu'on appelle, faute de mieux, un fleuron ou un acrotre ou un chapiteau w34. On considre gnralement que les pieds du trpied prenaient appui sur ce fleuron . Dans le BCH de 1976, j'ai expos sommairement les raisons pour lesquelles, mon avis, le trpied reposait sur le toit, et non sur le fleuron qui, incomplet dans son tat actuel, faisait partie d'un support plac sous la cuve ; un dessin montrait l'aspect du monument ainsi conu.

32 Un des arguments de Welter n'est pas fond : un bloc faits, de la hauteur de deux pieds (Pre Jacques-Paul Babin, portant une large empreinte de pied de trpied appartien- 1672) ; l'ornement qui est au-dessus est comme une lampe drait une base rnove de Thrasycls. Or, la corniche de trois becs, ce qui lui a peut-tre fait donner le nom de lance bloc ressemble celle de la base du trpied de Thopha- terne, quoi qu'apparemment cela n'eut t mis que pour ns, contemporain de Thrasycls {supra, n. 24). J'ai attribu l'embellissement (Spon, 1678) ; la couverture est d'une le bloc en question la base du trpied de Thrasyllos (BCH seule pice de marbre... sur laquelle il y a comme un bou- 100 [1976], p. 53-56), parce qu'il est en marbre blanc quet de plumes travaill dans la mme pice (Anonyme de comme les blocs portant la ddicace, ce qui n'est peut-tre Paris, dernier tiers du XVIIe s.). Spon fait allusion l'appella- pas une raison suffisante. tion populaire de lanterne de Dmosthne qui avait cours 33 L. Polacco, op. cit. {supra, n. 25), p. 149, fig. 111-112. au XVIIe s. Le monument de Lysicrate a t parfois appel 34 La dsignation de cette partie du monument n'a pas lanterne de Diogne ; mais les rcits et les plans de ce cess d'embarrasser: Ce cercle est couvert d'une seule temps-l montrent qu'il s'agissait d'un autre monument cho- pierre en coquille, qui a un chapiteau de feuillages, fort bien rgique, moins bien conserv, qui a entirement disparu.

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Cette restitution a suscit trois ractions : une approbation sans rserve d'un membre de l'Institut allemand d'Athnes (par lettre), une critique nuance de Hans Riemann (par lettre crite de Rome le 18 novembre 1976), un rejet sans appel de Heinrich Bauer (dans un appendice un article sur le monument de Lysicrate)35.

Je reprends l'argumentation, en la dveloppant et en la prcisant sur quelques points. Sur le toit du monument (fig. 14), on voit36 :

1) trois rinceaux massifs, orients vers l'Ouest, le Nord-Est et le Sud-Est ; 2) la base de chacun de ces rinceaux, ou leur racine , prs de l'mergence du fleuron,

une cavit d'encastrement, de forme irrgulire et de dimensions imprcises (0,07 0,04 m selon Riemann) cause du bris de la pierre l'entour ;

3) trois entailles dans la pente du toit, grossirement rectangulaires (0,20 0,25 m de ct), mi-distance entre les rinceaux, au fond desquelles se voit une cavit d'encastrement rectangulaire, quasiment carre, d'environ 0,10 m de ct ;

4) au centre, le fleuron , haut d'environ 1,30 m37. La face suprieure du fleuron se prsente sous la forme d'un hexagone cts courbes,

avec trois longs bras et trois courtes excroissances. L'orientation des longs bras concide exactement avec celle des rinceaux du toit. Les trois longs bras taient conservs au dix-huitime sicle, s'il faut en croire le dessin de Smart. Deux le sont l'heure actuelle. Ils prsentent, 0,065 m de leur extrmit, une cavit d'encastrement, longue de 0,085 m, large de 0,035 m, profonde de 0,07 m. Les dimensions de ces cavits troites, deux fois et demi plus longues que larges, et leur disposition dans le sens de leur plus grande longueur paralllement aux bords du bras , les rendent absolument impropres au scellement de pieds de trpieds. Il s'agit de cavits de goujon du type ordinaire. Certains l'ont compris et ont restitu une plinthe, scelle au moyen de ces goujons, entre le fleuron et le trpied.

Au milieu du lit suprieur s'ouvre une cavit de 0,20 m de diamtre, profonde de 0,16 m38. Cylindrique sur un peu plus de la moiti de sa hauteur, sa paroi s'incurve ensuite vers l'intrieur et le diamtre diminue progressivement jusqu'au fond, qui est arrondi. Quand on propose de poser les pieds du trpied sur le fleuron, on considre que cette cavit tait destine l'encastrement d'un support de la cuve. Mais H. Riemann a justement fait observer que la prsence d'un support profondment encastr dans le fleuron tait incompatible avec celle d'une plinthe ( moins de supposer que le support traversait la plinthe sur toute sa hauteur avant de

35 MDAI(A) 92 (1977), p. 197-227. H. Bauer a profit, 36 Comparer les plans de Stuart, de Bauer et de Colocotsas comme moi-mme, de la prsence d'un chafaudage autour (BCH 100 [1976], p. 75). du monument de Lysicrate pour l'examiner loisir et dans le 37 La hauteur indique dans les publications varie de menu dtail. Son tude complte, deux sicles de dis- 1,22 m (Riemann) 1,34 m (Stuart), avec des mesures tance, celle de Stuart et Revett (supra, n. 9). On trouve intermdiaires. Ces diffrences tiennent probablement la aussi des observations prcises sur l'architecture du monu- manire d'apprcier l'endroit o se situe le bas du fleuron, ment dans l'article de H. Riemann, RE Suppl. VIII (1956), 38 Pour la profondeur, la mesure de 0,16 m est indique s.v. Lysikratesmonument, col. 266-347; cet article est par Stuart et par Riemann (peut-tre d'aprs Stuart). une somme d'rudition, non seulement sur le monument de H. Bauer donne pour cette mme mesure 0,10 m. Est-ce Lysicrate, de l'Antiquit nos jours, mais aussi sur tous les une faute d'impression ? Il faut aussi tenir compte du fait trpieds votifs du monde grec. que, au cours des travaux de restauration, du ciment a t

coul dans les cavits.

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Flg. 14. Toit du monument de Lysicrate.

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s'enfoncer dans le fleuron !). Comme le trpied n'a pas pu reposer directement sur le fleuron, la cavit n'a pas servi l'ancrage d'un support. Au demeurant, la cavit ne ressemble en rien, ni dans sa forme ni dans ses dimensions, celles qu'on voit sur les bases de trpieds. Leur paroi est taille verticalement de haut en bas, et leur fond horizontalement, pour recevoir un rut de colonnette. Le rapport de la profondeur au diamtre est habituellement de 1/3 1/4, exceptionnellement de 1/2 ; jamais il n'atteint 3/439. La cavit du fleuron est une norme mortaise, destine recevoir un tenon de dimensions non moins exceptionnelles.

Pour tre complet, il faut rappeler l'observation faite par l'architecte Robert Amy, qui avait une longue exprience des monuments antiques du Proche-Orient : Le dessin du bouquet terminal publi par Smart et Revett montre un caulicule coup peu aprs sa naissance par le lit d'attente, d'o il faut conclure un panouissement dans un bloc suprieur . On peut juger, grce des rpliques du monument, de l'effet qu'aurait produit, vu d'en bas, un trpied juch sur le fleuron40.

Le fleuron cart comme socle du trpied, le toit demeure seul candidat. Cette solution a t propose, plusieurs reprises41. Dans ces restitutions, les pieds du trpied ont t logs dans les cavits creuses la base des rinceaux (fig. 16 b)42. Non seulement les cavits sont trop petites pour cette fonction, mais encore, et surtout, comme elles se trouvent exactement l'aplomb des bras du fleuron, et plus prs du centre du toit, le trpied n'aurait pas pu s'lever plus haut que le fleuron, et on ne voit pas o la cuve aurait trouv place43.

39 Voici quelques exemples ; les mesures sont donnes en centimtres ; d'abord la profondeur, ensuite le diamtre. Athnes : 10 et 41,6,5 et 28. Dlos : 5,5 et 26. Oropos : 4 et 11,5. Orchomne : 6,7 et 15,6 et 19,6 et 18,5 et 17,6,5 et 16,5 et 14,7 et 16,7 et 18,3,5 et 10,5,3 et 13,5,2 et 18,2,5 et 16,3 et 12,3 et 16,4,5 et 15,5,5 et 13,8,5 et 17,4,5 et 10,7 et 24,8 et 24,5. Ptoon : 10 et 38,5. Coro- ne : 8 et 23,5,6,5 et 25,3. Delphes : 5,5 et 22, 5,5 et 22,5. Messne : 6 et 26,3. Ces exemples sont tirs des articles suivants : BCH Suppl. I (1973), p. 17-64 ; BCH 98 (1974), p. 171-246 ; 100 (1976), p. 15-93 ; 102 (1978), p. 565-569 ; 111 (1987), p. 79-131. 40 Au cimetire grec d'Alexandrie, une rplique du monument de Lysicrate est surmonte d'un trpied sans commune mesure avec les trpieds votifs de l'Antiquit. (Je dois la photographie de la fig. 15 l'amiti de Jean-Yves Empereur.) Une autre rplique du monument existe au 1er cimetire d'Athnes ; on a substitu au fleuron une urne d'o s'chappent des flammes. Les rpliques, imitations, adaptations, plus ou moins libres, ont t nombreuses, dans les temps modernes, en Europe et en Amrique. Un certain nombre de ces monuments modernes a t illustr par St. Lydakis, AD 21 (1966), A', p. 163-183. Une des plus originales parmi ces adaptations n'a eu qu'une brve existence, de 1803 1870. Pour satisfaire un caprice de Josphine, Bonaparte avait fait construire, sur les hauteurs de Saint-Cloud, un phare surmont d'une rplique de la lanterne de Dmosthne . Cette rplique en terre cuite, excute par l'architecte Legrand et par la manufacture Trabuchi d'aprs les moulages pris par Fauvel pour Choiseul-Gouffier,

avait t expose dans la cour du Louvre en 1802. Pendant le sige de Paris, en 1870, le phare, utilis comme observatoire par les assigeants, fut dtruit par l'artillerie des assigs. L'association Les amis de Saint-Cloud a publi deux fascicules (nos 96 et 97, juin 1988 et avril 1989), bien illustrs, o sont runis les principaux textes relatifs au monument de Lysicrate du quinzime sicle la fin du dix- neuvime. 41 H. Riemann, qui cite les noms de Schinkel, Semper, Dell a repouss cette solution ; mais sa critique porte plus sur les dtails des restaurations proposes que sur l'emplacement du trpied. E. REISCH, RE s.v. Dreifuss (1905), col. 1695-1696, a cart l'hypothse d'un ancrage du trpied dans le toit comme non conforme l'intention du donateur, qui tait d'lever le trpied le plus haut possible ! 42 Sur la destination de ces cavits, H. Riemann ne s'est pas prononc dans l'article Lysikratesmonument. D'autres ont t moins prudents : entre les rinceaux du toit et les bras du fleuron, on a plac des ornements d'autant plus divers que l'absence de tout indice permet l'imagination de se donner libre cours. Dans les cavits la racine des ri

nceaux, on a implant des statues reposant sur un pied, tandis que le rinceau fournissait un appui l'autre pied (Loviot) ou au genou (Hansen, Bauer). Ces pices rapportes (lments dcoratifs ou supports complmentaires, ou les deux la fois) taient probablement de bronze. H. Riemann (par lettre) repoussait cette hypothse, cause de l'absence de toute trace d'oxydation dans les cavits. Mais il en va de mme pour beaucoup de mortaises pour lesquelles on a la certitude que des tenons de bronze y taient insrs : une

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Flg. 15. Rplique du monument de Lysicrate au cimetire grec d'Alexandrie.

gaine de plomb les isolait de la pierre. Cette constatation s'applique toutes les bases de trpied ; peut-tre la patte de lion qui s'talait autour du pied la surface de la base contribuait-elle dtourner les infiltrations d'eau. Dans le cas du monument de Lysicrate, H. Bauer a t frapp par des di

ffrences de forme entre les trois cavits et par l'aspect du marbre tout autour (... rund, quadratisch oder rechteckig... Die Umgebung dieser Lcher enthalt keine Dachschuppen, ist grob geglttet ). On verra plus loin, propos des autres cavits du toit, pourquoi ces dtails jouent en faveur de l'hypothse de l'implantation d'objets de mtal. 43 La difficult a t tourne diffremment par Dell et par Semper. Dell a imagin un trpied deux tages, ne comportant de pieds qu'au registre infrieur, avec des statuettes assurant la liaison entre le premier plateau et la cuve de

part et d'autre des bras du fleuron ! Semper a restitu un vrai trpied, mais de type trusque, o les bras trouvent passage sous les arceaux (alors que le type des trpieds chorgiques d'Athnes est attest par de nombreuses reprsentations). Dans l'une et l'autre de ces restitutions, la cuve repose sur le fleuron, suppos complet dans son tat actuel. Dans les deux cas, l'existence des cavits entre les rinceaux est ignore. La restitution de Semper a t publie dans Der Stil II (1863), p. 242. Elle est reproduite, cte cte avec celles de Hansen et de Dell, et des dessins de Stuart, dans une planche de Allgemeine Bauzeitung 67 (1902), pi. 19 (je dois l'amiti de Jacqueline Lvy et de Grard Siebert d'avoir une photocopie de cette planche faite sur l'exemplaire de la Bibliothque nationale et universitaire de Strasbourg).

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Les trois autres cavits, mi-distance des rinceaux (fig. 16 a), n'ont gure retenu l'attention : ou bien elles ont t purement et simplement omises dans les plans et les descriptions (par exemple, par Stuart), ou bien on s'est born mentionner l'existence de cavits pour l'insertion d'un objet (Riemann), ou bien on y a plac des lments dcoratifs purement fantaisistes (par exemple, des dauphins dans les restitutions de Hansen et de Loviot).

Pourtant, sachant que le monument tait conu comme un prsentoir pour un trpied, en prsence de cavits de forme et de dimensions compatibles avec celles des pieds d'un trpied, disposes aux angles d'un triangle dont la mesure du ct correspond l'cartement habituel des pieds des trpieds gagns aux concours des jeunes gens aux Dionysia, comment ne pas envisager que le trpied de Lysicrate ait t scell dans ces cavits ?

Heinrich Bauer s'est rsign l'admettre, mais sans renoncer pour autant l'autre solution : dans l'tat originel, le trpied se serait dress sur le fleuron ; plus tard, sa stabilit tant compromise par une longue exposition aux intempries, il aurait t dplac. C'est alors seulement qu'auraient t tailles dans le toit les cavits intermdiaires entre les rinceaux. Cette opration se serait faite dans la hte et l'improvisation, basse poque : la grossiret du travail le prouverait44.

On peut se demander si, dans l'Antiquit tardive (vers la fin de l'poque impriale ?), on se serait souci de la stabilit d'un trpied datant du IVe s. av. J.-C, supposer qu'il fut demeur en place jusqu' cette poque. Bauer insiste sur le fait que la distance entre les cavits est peu prs identique celle qui spare les bras du fleuron : ce n'est pas un argument en faveur d'un dplacement, c'est tout au plus un non obstat.

Pour assurer la stabilit du trpied, on ne l'aurait pas seulement ancr solidement dans le toit ; les points d'ancrage auraient t dtermins de faon ce que la cuve repost sur le fleuron, amput de la plinthe (ou de l'abaque, comme l'appelle Bauer) et de la colonnette (car, l'inverse de Riemann, Bauer ne voyait pas d'objection la coexistence de ces deux lments), ce qui ramne aux solutions imagines par Semper et Dell, et pose la question de la hauteur du trpied.

Certes, comme aucun trpied chorgique n'est parvenu jusqu' nous, la justesse des estimations ne peut pas tre prouve. Les reliefs et les peintures de vases ne fournissent que des indications trs approximatives : on constate que, par rapport la taille humaine, les dimensions des trpieds varient du simple au double, selon l'tendue de l'espace dcorer. Un accord s'est fait sur les estimations suivantes : la cuve (avec les anses) occupait 1/3 de la hauteur totale, qui quivalait 3 1/2 4 fois la mesure du ct du triangle de sustentation du trpied45. Sur ces bases, j'avais estim la hauteur du trpied entre 2,80 m et 3,20 m, soit peu prs 3 m, et par consquent la hauteur sous la cuve 2 m. Hans Riemann aboutissait au mme rsultat (2,95 m)46. La distance entre les

44 Zwischen den Voluten liegen rohe Abarbeitungen der (p. 222). Die rohen Abarbeitungen der Dachschuppen die Dachschuppen... Es handelt sich wohl um eine Einarbeitung eine nachttgliche Vernderung darstellen, werden hier der Sptzeit... Es liegt daher die Vermutung nahe, dass der [dans le BCH 1976] ohne weiteres als ursprngliche Stand- Dreifuss in der Sptzeit nicht mehr auf dem Dachkapitell spuren des Dreifusses erklrt, der also vllig unvorbereitet sondern unmittelbar auf dem Dache stand ; das Kapitell aus dem Dach aufgestiegen wre. (p. 226). untersttzte nur das Becken, hielt den Dreifuss nahe seinem 45 BCH 100 (1976), p. 65-71. Schwerpunkt fest, der so einen sichereren Stand bekam. 46 RE Suppl. VIII, col. 333.

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Hg. 16. Traces d'arrachement d'un pied de trpied (a) et d'une tige mtallique (b) au monument de Lysicrate et de crampons (c) au temple d'Apollon Delphes.

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cavits du toit et la face suprieure du fleuron est d'environ 1,40 m. Pour un transfert ralis dans les conditions envisages par Bauer, cette mesure devait tre celle du trpied sous la cuve, et la hauteur totale n'aurait pas dpass 2,10 m environ ; encore Bauer l'abaisse-t-il 1,88 m47.

Mais ces spculations sont vaines. L'hypothse d'un dplacement du trpied est sans fondement, c'est une vue de l'esprit rsultant d'un attachement une certaine thorie qui a entran une interprtation errone des donnes matrielles. L'tat du toit, autour des cavits, date certes d'une poque tardive. Mais le marbre n'a pas t entaill pour y implanter le trpied, cette poque-l ; il a t cass pour enlever le trpied, ce qui explique la grossiret du travail. Cette ide m'tait venue l'esprit, et s'y tait aussitt impose, trop tard pour que j'en fisse tat dans mon article du BCH de 1976. Elle a t formule par Hans Riemann dans sa lettre, crite aprs une confrence faite par Bauer Rome et avant la parution des Athenische Mitteilungen de 1977. Riemann, qui restait fidle la restitution du trpied sur le fleuron, suivait Bauer dans son hypothse d'un dplacement du trpied, mais il se sparait de lui sur un point capital : l'tat du toit tait d l'intervention de pillards48. Le marbre garde la marque de l'outil pointu avec lequel on l'a attaqu, autour de chaque pied du trpied, horizontalement de face et verticalement l'arrire49, jusqu' une profondeur suffisante pour retirer la tige de bronze de son logement (fig. 16 a). Il tait plus facile, et plus profitable, de desceller les pieds d'un trpied que d'extraire des crampons (fig. 16 c) et des goujons des murs d'un btiment en les dmontant assise par assise. La mme explication rend compte aussi de l'tat des cavits la base des rinceaux (fig. 16 b), ce qui est un argument en faveur de l'hypothse de l'implantation d'objets mtalliques dans ces cavits. Enfin, si l'lment suprieur du fleuron a disparu, c'est probablement parce qu'il a t bris lors de l'enlvement du trpied : il tait fix la cuve.

En conclusion, le trpied avait t scell ds l'origine dans le toit du monument. Ses pieds taient orients, approximativement, vers l'Est, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. mi-distance entre les pieds, de gros rinceaux plastiques se droulaient du centre vers la circonfrence. leur base taient scells des objets de nature inconnue, probablement mtalliques. Les bras courts du fleuron correspondaient aux pieds du trpied. Les bras longs, en saillie au-dessus des rinceaux et orients comme eux, taient inscrits dans un cercle de mme diamtre que les pieds du trpied. Peut-tre taient-ils ceinturs par un cercle qui aurait uni les pieds mi-hauteur et qui aurait t lui-mme assujetti au toit par des baguettes de bronze : les cavits la base des rinceaux conviendraient, par leurs dimensions et leur place, cette fonction ; mais l'existence de cette armature de renfort est hypothtique. L'lment suprieur du fleuron , qui s'interposait entre la partie qui subsiste et la cuve, tait haut de 0,40 m 0,75 m, selon la hauteur qu'on assigne au trpied.

47 Op. cit., p. 224, n. 63 : Antike Preisdreifsse hatten 49 Les traces laisses par l'outil l'arrire du pied sont par- etwa Mannshhe . ticulirement nettes sur une photographie publie par 48 Die Beschdigungen an den Einsatzlchers auf dem H. Mbius, Die Ornamente der griech. Grabstelen (1968), Dach wren entstanden beim Herausreissen in der Spt- pi. 26 c. antike.

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Appendice

Le monument de Lysicrate et la France

En 1658, les Jsuites qui s'taient installs Athnes vers 1645 se transportrent Ngre- pont (Chalcis). L'anne suivante, une mission de Capucins, tablie Nauplie, dtacha un ou deux de ses membres pour prendre la relve des Jsuites dans leurs fonctions d'aumniers du consulat de France et de desservants du culte pour la communaut catholique d'Athnes. En 1669, le Pre Simon acquit un terrain pour y btir un couvent. Les conditions de cette acquisition ne sont pas parfaitement claires. Dans les rcits contemporains, il n'est question que d'un achat ; plus tard, on parlera d'une donation, comme on verra plus loin. Sur la somme dbourse par les Capucins, il y a aussi deux versions. Ces indications, apparemment contradictoires, peuvent tre complmentaires : pour constituer son domaine, le P. Simon a pu runir deux, ou plusieurs, parcelles. Aucun acte, ni de vente ni de donation, n'est conserv.

Sur le terrain acquis par les Capucins se trouvait la lanterne de Dmosthne . La proprit de ce monument devait tre une cause de soucis, pour les moines d'abord, et, aprs 1830, pour le gouvernement franais. Il avait t vendu aux Capucins condition qu'il demeurt visible et accessible tous : le P. Simon l'a dit au P. Robert de Dreux, qui a rapport ces propos. Quant l'intervention dans cette affaire d'un juge turc, il n'en est fait mention que dans le livre de Guillet de St Georges, Athnes ancienne et moderne, dont on sait qu'il a t crit Paris d'aprs des informations recueillies auprs de moines de retour en France50.

La fondation du couvent des Capucins a concid avec les dbuts de la vague des voyages en Grce. Si l'on s'intressait, dans les collges d'Europe occidentale, la langue et la littrature grecques, en revanche les monuments laisss par l'Antiquit sur le sol de la Grce y taient pratiquement inconnus. Cyriaque d'Ancne avait t un prcurseur, son exemple n'avait pas t suivi. Aprs lui, pendant prs de deux sicles, la Grce est demeure terra incognita. Un vnement a attir l'attention de l'Occident : l'anne o le P. Simon achetait la lanterne de Dmosthne , Candie tombait aux mains des Turcs aprs un sige de 20 ans, qui avait suscit l'motion et provoqu des interventions en faveur des assigs. En 1774, le marquis de Nointel fait dessiner les frises et les frontons du Parthnon. L'anne suivante, Jacob Spon et George Wheler passent Athnes au cours de leur voyage d'Italie, de Dalmatie, de Grce et du Levant , dont Spon publie en 1678 une relation de caractre scientifique.

50 La description de Guillet a t reproduite in extenso par le Athnes au XVIIe s. : M. Collignon, Documents du xvne sicle Comte de Laborde, Athnes aux XVe, XVIe et xvue sicles relatifs aux antiquits d'Athnes , CRAI 1897, p. 56-71 ; (1854), ainsi que la relation du Pre Babin et d'autres H. Omont, Athnes au XVIIe sicle, REG 14 (1901), p. 270- textes ; on y trouve aussi un rcit dtaill de la visite 294 ; M. Collignon, Le Consul Jean Giraud et sa relation de Athnes du marquis de Nointel et du sige de l'Acropole par l'Attique au XVIIe sicle , Mmoires de l'Acad. des Inscr. et les Vnitiens. ce travail fondamental, il faut joindre, sur Belles-Lettres 39 (1914), p. 375-425.

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partir de ce moment-l, les voyages se succdent, une cadence qui ira s'acclrant tout au long du dix-huitime sicle. Athnes est alors une bourgade assez misrable ; on y trouvait l'hospitalit chez quelques particuliers (comme le consul Giraud) ou hospice des Capucins. Pendant 1 50 ans, tous les trangers de passage Athnes y ont t accueillis, soit comme locataires soit comme simples visiteurs : le monument de Lysicrate tait visible pour une part de la rue et, pour l'autre part, de la cour du couvent51.

Les moines ne tenaient pas un registre des entres l'hospice ; mais on connat le nom de quelques-uns de leurs htes. Ds 1674, ils hbergeaient un Danois qui a laiss une description d'Athnes en latin. On ne sait pas si Smart et Revett en 1751, Le Roy en 1755, ont log au couvent pendant qu'ils procdaient aux relevs du monument de Lysicrate ; Smart est l'auteur d'une gravure reprsentant les btiments du couvent vus du jardin des moines, qui a t maintes fois reproduite. En 1765, Chandler habite au couvent et admire la vue qu'on a de l sur la ville et les environs.

Pendant la Rvolution franaise, au temps du Directoire, le consul gnral de France Salonique, Flix Beaujour, demande au citoyen ministre d'accder la requte de Fauvel de lui assigner le petit couvent des Capucins d'Athnes pour son logement et pour ses ateliers 52. Fauvel avait devanc l'autorisation officielle : ds 1794, il tait install avec armes et bagages au couvent, dsert par les moines.

partir de 1800, le mouvement touristique reprit de plus belle. Les moines ne pouvaient pas satisfaire toutes les demandes. En 1805, Dodwell avait pris pension, comme son premier sjour Athnes, chez une old widow nomme Mina, archontess fire de l'anciennet de sa famille. La chambre tait basse et mal are, et Dodwell dcida de transporter ses pnates to more airy apartments . Il s'installe au couvent, dont il vante les agrments, le jardin, la vue : No view in Athens is superior to that from the convent in beauty and in interest. . . An open gallery which formed part of our lodging was perpetually impressing our minds with the sublimity of the scenery, and with the numerous classical recollections it inspired.

En 1809, Byron et Hobhouse arrivent Athnes. Hobhouse s'installe au couvent; Byron lit domicile, non loin de l, chez la dame Macri. L'anne suivante, Byron revient seul Athnes ; il va frapper directement la porte des moines. Il avait pour cela de bonnes raisons : l'ane des trois filles de la dame, Thrsa, tait la maid of Athens qui il avait jur un amour ternel. Le 23 aot 1810, il crit Hobhouse : Je suis des mieux installs au couvent, qui est beaucoup plus commode qu'aucun appartement que j'aie encore occup ; j'ai une chambre pour ma suite ; c'est loin d'tre solitaire, vu qu'il ne s'y trouve pas seulement le "Padre Abbate ", mais aussi son cole compose de six "Ragazzi". . . Trois sont catholiques et trois sont grecs ; j'ai dj mis aux prises ces

51 Les btiments du couvent sont le sujet d'une thse de photographies. Cet ouvrage, bien document et largement K. Pagonis, H , Univer- illustr, est prcd d'une introduction historique (p. 15-37). site d'Athnes (1990), 211 pages. Comme rien n'a subsist 52 Citation tire de la biographie de Fauvel publie par de ces btiments, pas mme les fondations, l'auteur en a Ph. E. LEGRAND dans la Revue archologique de 1897. reconstitu le plan et l'lvation d'aprs les gravures et les

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MONUMENTS CHORG1QUES D'ATHNES 473

schismatiques avec les catholiques, au grand amusement du Pre. Le 20 janvier 1811 ; il crit Hodgson : Je demeure au couvent des Capucins, avec l'Hymette en face de moi, l'Acropole derrire, le temple de Jupiter droite, le stadium devant, la ville gauche53. Byron avait adouci l'austrit du sjour au couvent en faisant installer dans sa chambre une chemine : on doit ce renseignement Lebrun auteur d'un pome en 9 chants, Le voyage de Grce qui a occup la mme chambre en 1820, et qui fut un des derniers htes des Capucins. L'anne suivante, le couvent tait partiellement dtruit.

Il convient de faire un retour en arrire pour apprcier quitablement les mrites des Capucins. Outre le rle qu'ils ont jou dans les relations publiques , ils ont probablement sauv le monument de Lysicrate de la dgradation et ils l'ont srement sauv d'un enlvement. Dodwell leur a rendu justice : I was assured by the superior that during the dilapidating mania in 1801, proposais had been made to him, and to the Vbivode, for the purchase of the entire monument, which was to hve been conveyed to a northern country and that it owes its prsent existence to the protection which it derived from its position within the precincts of the monastery. As long then as the convent is preserved, we may hope that this beautiful relie of ancient art will be secured from the selfish rapacity of amateurs, and the destructive ignorance of the Moha- medans54.

Le monument de Lysicrate courait un risque permanent, comme tous les monuments antiques d'Athnes : celui d'tre dmoli, partiellement ou compltement, comme l'ont t le temple de l'Ilissos, la lanterne de Diogne et d'autres monuments qui existaient encore au dix- septime sicle. Les Turcs n'taient pas seuls responsables de ces dprdations. L'inclusion du monument dans le mur d'enclos du monastre l'a sans aucun doute protg.

Le monument de Lysicrate a couru un autre risque : l'allusion qu'y a faite le suprieur du couvent a t parfaitement comprise par Dodwell. En 1800, de Constantinople o il tait ambassadeur auprs de la Porte, Elgin avait donn ordre son agent Athnes, l'Italien Lusieri, de mettre au travail sur le monument de Lysicrate un architecte et un mouleur pour en relever le plan et en mouler les bas-reliefs. Les moines avaient accept. Lusieri rsidait au couvent (il y tait encore, ou de nouveau, lors du passage de Byron en 1810). Mais la prise de moulages et le lev d'un plan n'taient qu'une entre en matire : Elgin faisait tenir au suprieur du couvent une proposition d'achat du monument. Devant le refus du moine, Lusieri rappelait Elgin, dans une lettre du 8 aot 1 802, que la mission d'Athnes dpendait de celle de Constantinople : I would remind you, My Lord, of the Monument of Lysicrates. Possibly with money Your Excellency will find means of getting it from that French Capuchin who rsides at Constantinople, and is head of the monastery. Elgin n'avait pas besoin qu'on lui rafracht la mmoire : le 9 aot 1802, de

53 Extraits de la Correspondance de Lord Byron, publie par 54 A classical and topographical Tour through Greece during John Murray (1922), traduction franaise de F. Laroche the years 1801, 1805 and 1806 (1819), I, p. 291. Le pas- (1924). Le sjour de Byron au couvent a t cont par Andr sage relatif au logement de Dodwell, mentionn plus haut, MAUROIS, Byron (1930), I, p. 181-186. est aux pages 287 et 289.

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Smyrne (donc videmment avant d'avoir reu la lettre crite par Lusieri la veille), il crivait son agent : I see with the greatest satisfaction that you hve the statue from the Monument of Thra- syllus [la statue de Dionysos dont il a t question plus haut]. Continue your acquisitions, and add to my obligations the lantern of Demosthenes !!!

Une dmarche a-t-elle t tente auprs des Capucins de Constantinople ? C'est probable, car, le 11 dcembre 1802, Hunt (chapelain de l'ambassade d'Angleterre Constantinople et agent d'Elgin non moins actif que Lusieri) informait Elgin, d'Athnes, que le suprieur des Capucins d'Athnes avait reu une vole de bois vert du suprieur de la maison mre de Constantinople : The Chief of the Capuchin Monastery, Pre Hubert, has written very threate- ning letters to his Friar hre, for having suffered Your Artists to use the Carriage, etc., and model the Choragic Monument in his Monastery55.

On a adress Elgin, entre autres reproches, celui d'avoir endommag les monuments en enlevant les sculptures. Smith a invoqu, pour le laver de ce reproche, un argument curieux : In the course of the correspondance suggestions are thrown out as to removing the monument of Lysicrates, the entire Caryatid porch, or the West frieze of the Parthenon, but none of thse more extrme measures were taken. Ce n'est pas par respect pour le monument de Lysicrate que Elgin a renonc l'emporter en Angleterre, mais bien cause de la ferme opposition des Capucins, tant Athnes qu' Constantinople. En 1841, anne de la mort de Lord Elgin, parut une Description de la collection des marbres antiques du British Musum o figure la frise du monument de Lysicrate, dessine au trait d'aprs les moulages rapports par Elgin, faute d'avoir obtenu les originaux : On dit que Lord Elgin se proposait d'acheter le monument de Lysicrate et de le transporter en Angleterre. Il est profondment regrettable que son inclusion dans un lieu de culte ait constitu un obstacle insurmontable l'accomplissement de ses dsirs56.

Le couvent subit de graves dommages, au moins en partie, en 1821, lors de l'incursion de la bande d'Orner Vryonis qui, sous prtexte de secourir les Turcs assigs dans l'Acropole, mit la ville feu et sang57. Inform de la catastrophe, Fauvel, qui s'tait retir Smyrne, ouvrit un crdit Dejean, grant du consulat de France, pour procder aux travaux les plus urgents au monument de Lysicrate. Dans une lettre du 19 janvier 1824, Dejean a rendu compte des mesures qu'il avait prises pour consolider et protger le monument : Je vous disais dans ma lettre du 9 courant que j'allais m'occuper de faire des rparations au monument de Lysicrate dont la chute ne

55 Ce passage et ceux qui prcdent sont extraits du the French. I do not know if on my return I should be able to mmoire de A. H. Smith, Lord Elgin and his Collection , go on using it. Besides it is not on the best condition, in JHS 36 (1916), p. 163-372. Le carriage appartenait spite of continued repairs. Fauvel. Lusieri l'utilisait pour le transport des antiquits. Le 56 Je ne garantis pas l'exactitude de la traduction, n'ayant 16 septembre 1802, il crivait Elgin : When the Commis- pas vu le texte anglais. sary and Fauvel arrive, they will daim the big cart which has 57 Laborde dit que, en 1827, rien de tout cela n'tait been of such assistance (le 26 messidor de l'an X, Fauvel encore chang , par rapport au dessin de Le Roy reprsen- avait t nomm sous-commissaire Athnes, le corn- tant le porche du couvent et le monument de Lysicrate. Pour- missaire tant, titre purement honorifique, l'ancien consul tant, la date de 1821 est assure par des tmoignages Gaspari). Il ne semble pas que Fauvel ait rclam son bien, crits, par un dessin de Catherwood dat de 1823 (K. Pago- car Lusieri crit le 14 avril 1807 : I hve made use of a nis, op. cit. [supra, n. 51], p. 31-32 et 118-121) et par la strong cart to transport the big boxes. This cart belongs to lettre de Dejean Fauvel cite ci-aprs.

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pouvait qu'tre prochaine si l'on n'y remdiait au plus tt. . . J'ai fait placer une bonne colonne de marbre sur celle qui avait t coupe moiti ; ct de laquelle j'ai fait enchsser la place d'un des trpieds qui manque une forte pice de marbre qui porte exactement sous l'architrave. . . J'ai fait abattre les pans de muraille qui portaient sur le fate de la lanterne et l'crasaient de leur poids, ainsi que les autres murs environnants. . . Ci-joint le compte de mes dpenses. . .

Aprs la proclamation de l'indpendance de la Grce, les Capucins envisagrent de revenir Athnes et d'y rebtir le couvent ; ce projet n'eut pas de suite. Ds lors, la question de la proprit du terrain (et du monument de Lysicrate) se posait : revendique par les Capucins de Constantinople, par l'vch catholique d'Athnes58, elle fut reconnue la Lgation de France en sa qualit de reprsentant des intrts franais en Grce.

En 1824, Dejean avait par au plus press. Le monument de Lysicrate se dressait au milieu d'un champ de ruines, comme on le voit sur des gravures, des aquarelles et des photographies59. Le terrain, laiss l'abandon, objet des convoitises et des empitements des riverains, tait transform en dpotoir. En 1845, la Commission des monuments historiques de la France prit en charge la restauration du monument de Lysicrate qui appartenait encore la France, qu'elle avait conserv intact aux arts pendant prs de deux sicles et qu'elle voulait rendre en bon tat la Grce rgnre (Laborde).

En 1854, le ministre grec des Affaires trangres, Mavrocordatos, reconnaissant apparemment des droits au Saint-Sige plutt qu' la Lgation de France Athnes, s'adressait l'ambassade de France Constantinople pour lui demander de transmettre au nonce apostolique une prire et une proposition, prire d'entourer le monument de Lysicrate d'une grille de fer, proposition de cder aux Capucins un autre terrain pour y btir un couvent. La grille ne fut pas pose, et l'offre ne fut pas retenue.

En 1867, Gobineau, alors ministre de France Athnes, fit effectuer de nouveaux travaux d'entretien et de restauration au monument de Lysicrate et en fit dgager le socle60. Dans une traduction franaise de l'ouvrage de Leake, Topographie d'Athnes, parue en 1869, le traducteur, Pho- cion Roque, conseiller la Lgation de Grce Paris, ajoute en note la description du monu-

58 K. Pagonis, op. cit. (supra, n. 51), Documents indits, quante ans [une autre tradition attribuait un consul de n 4, entre les p. 171 et 172, a reproduit en photocopie une Hollande le don du terrain au xvnes. : voir ci-aprs une lettre lettre conserve l'archevch catholique d'Athnes, adres- du ministre de France du 27 janvier 1888]. Ils n'avaient se le 18 septembre 1837 par le Conseil administratif de donc pas envie de mettre la dite proprit la disposition l'glise catholique d'Athnes l'archevque de Syros, dont exclusive de tel ordre de desservants ni telle nation ou les signataires contestent aussi bien l'Ordre des Capucins fraction des catholiques, mais bien tout missionnaire ou qu' la Lgation de France tout droit de proprit sur le ter- desservant que le Saint-Sige par l'intermdiaire de son rain de l'ancien couvent, et dclarent que l'usufruit en Dlgu apostolique enverrait en cette ville... revient la Communaut des catholiques d'Athnes sous la 59 La plus ancienne des gravures postrieures la fin des surintendance de la Congrgation De Propagande fide, hostilits Athnes doit tre celle de l'expdition de More, reprsente par la Mission du Saint-Sige en cette ville et excute en 1829 (reproduite par G. RADET, L'histoire et son Dlgu apostolique. Le principal argument expos l'uvre de l'cole franaise d'Athnes [1901], p. 286). La dans les considrants est que ladite proprit a t fonde plus ancienne des photographies doit tre celle qui a t par la pit des catholiques d'Athnes et trangers, nomm- prise par Normand en 1851 (G. Daux, BCH 80 [1956], ment par le secours considrable en argent comptant d'un pi. XXIV), suivie de prs par quelques autres (R. A. Tomlin- voyageur hollandais, fourni par ce dernier il y a plus de cin- son, BSA 87 [1992], pi. 37).

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ment de Lysicrate : Ce monument, lgant et curieux, est situ sur un terrain qui tait avant la rvolution de 1821, le couvent des Franciscains [lire: Capucins]. Le gouvernement franais a donn ordre de le faire restaurer, et l'emplacement de l'ancien couvent sera converti en une place publique. On ne peut qu'applaudir une ide si heureuse. Elle aura le double avantage d'embellir ce quartier de la ville et de prserver un monument auquel, selon l'expression potique de M. Ed. Quinet, "tout contribue donner le caractre et l'lgance nave d'une ode d'Anacron". On trouve l un cho de tractations entre les autorits grecques et la Lgation de France en vue d'un achat ou d'un change du terrain, qui se sont poursuivies au cours des annes suivantes61.

En 1877, le problme du terrain de l'ancien couvent, indissolublement li celui du monument de Lysicrate, entre dans une phase active de contacts diplomatiques62. Cette anne-l, fidle l'esprit, et mme aux termes, de la lettre que le Conseil d'administration de l'glise catholique d'Athnes avait adresse quarante ans plus tt l'archevque de Syros {supra, n. 58), l'archevque catholique d'Athnes s'adresse au Saint-Sige pour demander que le terrain du couvent lui soit cd pour y btir un hpital. Sur instructions du Cardinal Prfet de la Congrgation De Propaganda fide, le nonce apostolique Paris remet une note le 23 aot 1877 au ministre des Affaires trangres :

II existait Athnes avant la rvolution de 1821 une petite maison et une chapelle confies aux Pres Capucins qui desservaient la Mission... Quoique la Mission ait t fonde avec les secours de la Congrgation De Propaganda fide et des fidles, au retour de la tranquillit, ce terrain, ainsi que les ruines, furent reconnus par le gouvernement grec comme appartenant la Lgation de France Athnes. Mgr Marango, archevque catholique d'Athnes... dsirerait obtenir de la gnrosit du gouvernement franais ce terrain, abandonn depuis tant d'annes, pour y btir un hpital, lequel pourra tre utile, non seulement aux Grecs catholiques, mais aussi aux Franais malheureux qui pourraient se trouver dans le cas d'en profiter. . .

Le 31 aot, le duc Decazes, ministre des Affaires trangres, fait part Tissot, ministre de France Athnes, de la requte du nonce et lui demande son avis sur l'importance du sacrifice que la ralisation du projet nous imposerait ainsi que sur l'utilit de la fondation qui en serait la consquence .

60 Henry d'Ideville, secrtaire de la Lgation de France, a tout droit sur le monument de Lysicrate (tout en conservant not dans son journal, la date du 6 fvrier 1867 : Nous l'exclusivit de l'entretien du monument et des fouilles nous acheminons vers l'Agora, du ct du monument de l'entour) en change de la cession par le deuxime du ter- Lysicrate. Le terrain sur lequel est construit ce charmant di- rairT o ont t btis l'Institut franais d'Athnes et l'cole fice appartient la France. La restauration en est confie franaise d'archologie. Il semble que des ngociations un Franais, tabli depuis de longues annes Athnes, aient eu lieu cette anne-l en vue d'un change ; mais, si M. Boulanger, architecte de talent. Ce monument, construit elles ont eu lieu, elles n'ont pas abouti. Le terrain sur lequel sur un emplacement envahi par des masures, doit tre isol a t btie l'cole d'archologie a t offert par l'tat grec autant que possible , Journal d'un diplomate en Allemagne en 1872 sans contrepartie. Quant l'Institut franais, qui a et en Grce [1875], p. 234). t fond en 1903, le terrain sur lequel il a t bti tait 61 Un journal d'Athnes a publi, vers 1980, une lettre d'un partag cette date en trois parcelles, appartenant des de ses lecteurs relative aux sjours de Byron Athnes, et particuliers, qui l'cole franaise les a achetes. la disparition de la maison de la dame Macri et du couvent 62 Les documents qui suivent sont conservs aux archives des Capucins. L'auteur de cette lettre prtendait qu'un du ministre franais des Affaires trangres, dans les accord tait intervenu en 1868 entre les gouvernements volumes Correspondance politique. Grce correspondant franais et grec, aux termes duquel le premier renonait leur date.

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Tlssot rpond le 1er octobre 1877, en joignant sa lettre un plan du quartier de la rue des Trpieds :

. . . Compris entre les deux ruelles de Dionysos et des Trpieds l'Est et au Sud, et deux groupes d'habitations particulires au Nord et l'Ouest, le terrain mesure environ trente cinq mtres sur vingt, et offre par consquent une superficie de 700 mtres carrs valant de huit neuf mille francs. Ce chiffre toutefois, est loin de reprsenter sa valeur relle. Dans l'angle Nord-Est de l'ancien enclos des Capucins, en effet, s'lve un des monuments les plus remarquables de l'art hellnique, le monument chorgique de Lysicrate, qui appartient galement la France... Nous ne pouvons videmment pas cder le monument de Lysicrate Mgr Marango, et il en rsulte que, dans l'hypothse o nous dfrerions sa demande, nous devrions rserver l'emplacement qu'occupe ce monument, c'est--dire un quart du terrain. J'ai d faire observer, par suite, Mgr l'Archevque d'Athnes dans l'entretien que j'ai eu rcemment avec lui, que le terrain devenait tout fait insuffisant pour la fondation qu'il projette. J'ai ajout que le gouvernement grec ne permettrait pas, selon toute apparence, et avec raison, l'tablissement d'un hpital dans un quartier populeux, perc de rues troites, et o l'air et l'espace manquent galement. La cration d'un tablissement de ce genre me semblait d'ailleurs d'autant moins utile que la ville d'Athnes est dj richement dote sous ce rapport et que les malades sont reus sans distinction de culte ou de nationalit.

La suite de l'entretien rvle l'embarras o la complexit de la situation place l'archevque, et ses arrire-penses :

Mgr Marango m'a avou ce que je souponnais dj qu'il ne tenait pas absolument ce projet d'hpital. Ayant su que le gouvernement grec dsirait rentrer en possession de l'emplacement de l'ancienne glise des Capucins pour en faire une place publique ncessaire la salubrit du quartier, ayant appris d'autre part que la Socit archologique grecque se proposait de faire faire des fouilles sur cet emplacement dans le cas o nous le cderions, il avait conu la pense, m'a-t-il dit, de solliciter du gouvernement franais la cession d'un terrain dont le gouvernement grec pouvait nous demander et peut-tre obtenir le don titre gratuit. Une fois en possession de ce terrain, Mgr Marango se proposait de le vendre au gouvernement grec et d'en appliquer le prix l'achat d'un autre terrain destin, soit la fondation d'un hpital, soit la cration, beaucoup plus utile, d'une cole pour les enfants catholiques.

Mgr Marango m'a affirm que les Pres Capucins de Constantinople, de qui dpendait l'ancienne mission catholique d'Athnes, avaient dj essay par deux fois de vendre le terrain dont ils contestent la proprit la France. Mgr l'Archevque d'Athnes n'tait point suffisamment difi, a- t-il ajout, sur cette question de droit, mais il s'tait mis en rgle vis--vis des deux propritaires possibles, d'une part en s'adressant nous, de l'autre en obtenant de la Cour de Rome, lors de son dernier voyage, que l'glise catholique d'Athnes fut considre comme substitue aux droits de la mission qui existait avant 1821 de prfrence aux Capucins de Constantinople.

J'ai vainement cherch dans les archives de la Lgation un titre qui prouvt le droit de proprit de la France. Je n'ai trouv que des pices attestant que les rparations du couvent et de l'glise se faisaient par les soins et aux frais de la Lgation. Le droit n'en est pas moins incontestable mes yeux. . . Quant l'intention qu'aurait le gouvernement grec de redevenir propritaire du terrain que nous avons acquis sous la domination turque, j'ai su par Monsieur Tricoupis qu'elle tait relle : le gouvernement hellnique est prt ngocier avec nous les conditions auxquelles pourrait s'oprer cette

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transaction. La question qu'a souleve la demande de Mgr Marango peut donc, dans l'hypothse o nous ne prfrerions pas nous en tenir au statu quo, recevoir plusieurs solutions diffrentes. . . Le 5 novembre 1877, le ministre des Affaires trangres informa le nonce apostolique

Paris que la prsence du monument de Lysicrate rduisait tel point la superficie disponible que il ne resterait qu'un espace insuffisant pour l'excution du projet form par Mgr Marango .

En 1878, en relation avec la restauration graphique du monument de Lysicrate que prparait Loviot, des tranches ont t ouvertes autour du monument par l'cole franaise, sous la direction d'Edmond Pottier63. cette occasion, des travaux de restauration furent excuts au monument lui-mme.

Il ne fut plus question pendant une dizaine d'annes ni du terrain des Capucins ni du monument de Lysicrate. C'est le ministre de France, le comte de Montholon, qui reprit l'initiative, en suggrant une solution dj envisage par Mgr Marango dans son entretien avec Tissot.

Le 27 janvier 1888, Montholon crivit Flourens, ministre des Affaires trangres : Le terrain sur lequel repose le monument de Lysicrate et que nous considrons comme proprit

franaise risque de nous tre ravi si nous ne prenons pas cet gard des dispositions prventives. Je l'ai visit dernirement et me suis rendu compte de l'intrt qu'il y a pour nous, nous occuper de la question. Voici nos titres de proprit sur ce sanctuaire et mon sentiment sur ce qu'il conviendrait de faire pour affirmer nos droits et retirer en mme temps un effet utile d'un terrain que nous sommes sur le point de perdre si nous n'y prenons pas garde.

Titres de proprit. L'emplacement appartenait primitivement un Consul de Hollande qui en a fait don la mission des Capucins desservant la chapelle du reprsentant de la France. Cet acte de donation se trouve dans les archives de l'Archevch latin d'Athnes qui a group les archives de la dlgation apostolique autrefois installe Syra et dans lesquelles l'acte avait t dpos au dbut. Vu le rgime des capitulations en vigueur cette poque, les Capucins ne pouvaient rien possder en leur nom. L'acte d'enregistrement a donc d tre fait au nom d'un tiers ; ce tiers devait tre la France, les Capucins tant les aumniers du Consulat de France ; de l, notre premier titre de proprit sur le monument de Lysicrate enclav dans le couvent bti par les Capucins sur le terrain en question. L'acte d'enregistrement de cette cession serait introuvable.

Nos autres titres de proprit, ayant plus de valeur mes yeux que le prcdent, rsident dans le fait que nous avons rpar nos frais et moyennant 1 1 mille francs environ le monument de Lysicrate en 1 867, que le gouvernement grec ne s'y est pas oppos et que ce dernier ne nous a jamais contest nos prtentions la proprit dudit monument.

Le ministre de France expose ensuite les ennuis de toute sorte que causent les riverains : ouverture de portes et de fentres sur le terrain, affaissement du mur de clture dont un riverain allgue qu'il l'a fait rparer pour revendiquer la proprit du terrain, etc. Le ministre continue :

63 Cf. BCH 2 (1878), p. 412-418. La restitution de Loviot, H. d'ESPOUY (s. d.), pi. 21 et 22. Loviot tait aussi l'auteur dont il a t question plus haut (p. 466, n. 42), a t d'une restauration du Parthnon. Cf. le catalogue de l'ex- publie : Fragments d'architecture antique d'aprs les rele- position Paris-Rome-Athnes (1982), p. 42 et 346. P. PlRON vs et restaurations des anciens pensionnaires de l'Acad- et F.-X. Amprimoz, Les envois de Rome (1988), p. 359, mie de France Rome, publis sous la direction de n. 126 et p. 416.

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L'endroit est devenu une sorte de place publique o jouent les enfants du quartier et qui sert de prolongement la clbre rue des Trpieds. Il est, de plus, parfaitement avr que la municipalit a le projet de transformer ledit emplacement en une vritable place publique. Si elle ne l'a pas fait jusqu' prsent, c'est que les fonds lui ont fait dfaut et qu'elle se fait peut-tre quelque scrupule de mconnatre brutalement la tradition qui nous concerne.

En 1877, le nonce du Pape Paris s'est adress votre Dpartement pour obtenir la cession dudit terrain l'Archevch latin d'Athnes charge pour le prlat d'y lever un hpital... Aujourd'hui le monument, rpar en 1867, commence rclamer de nouveaux soins; le mur d'enceinte exige des rparations urgentes ; nous devons demander la fermeture des portes et des fentres ouvertes sur ledit terrain. Au lieu de nous livrer des dmarches et des dpenses de ce genre, ne serait-il pas prfrable de reprendre la question de l'change du terrain en menant cette fois la ngociation au profit d'une maison d'ducation dont les frais de construction et la direction ultrieure incomberaient aux Surs franaises d'Athnes ? L'Archevque latin est tout dispos abandonner son projet d'tablissement hospitalier. Les nombreux locaux nosocomiaux de la capitale suffisent aux besoins de la population, et les Surs franaises auraient, selon lui, des titres srieux tre dotes d'un terrain de construction l'instar de celles du Pire. Actuellement, elles habitent une maison exigu, de misrable apparence, qui leur cote 5 000 francs par an. Elles refusent des enfants faute de place...

Dans l'esprit du ministre de France, la solution envisage devait donner satisfaction chacune des parties concernes : une place publique ds longtemps souhaite du ct grec, un emplacement convenable pour une cole religieuse franaise, et, pour la Lgation, la fin des dmls avec les riverains du terrain de l'ancien couvent ! La prsence sur ce terrain du monument de Lysicrate fit chouer le projet: on n'avait pas prvu l'attachement des savants et des artistes franais ce monument !

Le ministre des Affaires trangres crut devoir consulter son collgue de l'Instruction publique sur la suite donner la proposition du ministre de France Athnes, tout en marquant son accord avec cette proposition :

La France possde le terrain sur lequel s'lve le monument chorgique de Lysicrate... La municipalit d'Athnes aurait le dsir de faire de ce terrain une place publique qui dgagerait les abords de ce reste prcieux de l'art antique. En change de nos droits de proprit, nous obtiendrions dans un autre quartier de la ville la concession d'un emplacement dont nous pourrions disposer en faveur d'une cole de filles dirige par des institutrices franaises. Avant d'autoriser la Lgation de France entamer, comme je serais dispos le faire, une ngociation cet effet, j'ai tenu vous informer du projet d'change qu'elle comporte et m'assurer que vous n'avez pas d'objection fondamentale ce que remise soit faite la municipalit de la Lanterne de Diogne dont l'entretien est pour nous une cause de dpenses... Nos titres sont peu connus du public qui nous saurait plutt gr de nous prter de bonne grce une combinaison destine en somme mettre en valeur le monument la conservation duquel les diles athniens ont aujourd'hui autant d'intrt que nous-mmes veiller.

La rponse du ministre de l'Instruction publique son collgue fut un non catgorique : Je vous prie instamment de donner pour instructions la Lgation de France Athnes de n'ac

cueillir aucune ouverture ce sujet. Le monument dont il s'agit a une valeur artistique et historique

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considrable ; il prsente le premier exemple de l'emploi de l'ordre corinthien en Attique, et c'est la seule construction de ce genre qui soit parvenue jusqu' nous. On apprendrait avec quelque surprise, et non sans une motion pnible, dans le monde savant et artistique que la France s'en est dessaisie contre un terrain banal, n'ayant qu'une valeur matrielle... J'estime qu'il y a pour nous un intrt moral trs srieux ne pas nous prter la ngociation que voudrait provoquer la municipalit d'Athnes.

Le ministre des Affaires trangres qui, dans l'intervalle, avait chang rpondit Montholon, le 1 1 aot 1888 :

. . . L'intrt artistique qui s'attache la conservation de nos titres la proprit du monument qu'il s'agirait d'aliner tait trop considrable pour que mon prdcesseur ne crt pas ncessaire de s'assurer avant tout de l'assentiment du Dpartement de l'Instruction publique et des Beaux-Arts la combinaison, dont il apprciait, d'autres points de vue, tous les avantages, mais laquelle la rponse de M. Lockroy ne nous permet pas de songer d