newspaper enjeux

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LA FACE CACHÉE DES DICTATEURS Tout d’abord, posons nous les bonnes questions, Qu’est ce que la « Frontière »? Il nous est dit dans le dictionnaire : « Limite, point de séparation entre deux choses différentes ou opposées » Qu’est-il vraiment important dans la notion de frontière? Je crois que ce ne sont pas les différentes parties opposées en question mais bien cette limite, cette espace imaginaire ou non, ce « juste milieu ». Je crois aussi que s’il y a frontière, il y a espace commun, et qu’on peut donc effectuer des ponts entre ces deux choses si différentes mais aux limites communes. En apparence, les jeux d’argent et la dic- tature sont en tous points opposés ; l’un puise son origine dans le jeu, rele- vant du domaine du hasard, de la chance, du divertissement. De base le jeu est souvent considéré comme puérile et inutile. La dictature, elle, s’inscrit dans le domaine politique. AVANT PROPOS Ce domaine au registre sérieux, réfléchi et calculé, ne laisse à priori pas de place au hasard. Et bien loin du rire la dicta- ture provoque la terreur. Cependant, les jeux d’argent se situent à la limite de cette définition du jeu, nous ne sommes plus dans le domaine de l’en- fance mais bien dans celui de l’adulte. La notion de gain bien réel et non pas seulement fanstasmagorique entraîne l’apparition du vice. De son côté la dictature se situe à la limite de la politique. La paranoïa crois- sante de ses instigateurs, a tôt fait de se séparer du domaine stratégique réfléchi. Ici on commence à entrevoir les ponts qui se forment entre ces deux domaines si différents à l’origine. Les jeux d’argents et les dictateurs partagent un même vocabulaire : Celui du gain, celui du vice, de l’excès, et du retournement rocambolesque qui vous fait passer de riche à pauvre et de roi à gueux.

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This goes inbetween a newspaper and a magazine. It's all about dictators and players psychological behaviours.

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Page 1: Newspaper Enjeux

LA FACE CACHÉEDES DICTATEURS

Tout d’abord, posons nous les bonnes questions,Qu’est ce que la « Frontière »?Il nous est dit dans le dictionnaire : « Limite, point de séparation entre deux choses différentes ou opposées »Qu’est-il vraiment important dans la notion de frontière?Je crois que ce ne sont pas les différentes parties opposées en question mais bien cette limite, cette espace imaginaire ou non, ce « juste milieu ».Je crois aussi que s’il y a frontière, il y a espace commun, et qu’on peut donc effectuer des ponts entre ces deux choses si différentes mais aux limites communes.

En apparence, les jeux d’argent et la dic-tature sont en tous points opposés ; l’un puise son origine dans le jeu, rele-vant du domaine du hasard, de la chance, du divertissement. De base le jeu est souvent considéré comme puérile et inutile. La dictature, elle, s’inscrit dans le domaine politique.

AVANT PROPOS

Ce domaine au registre sérieux, réfléchi et calculé, ne laisse à priori pas de place au hasard. Et bien loin du rire la dicta-ture provoque la terreur. Cependant, les jeux d’argent se situent à la limite de cette définition du jeu, nous ne sommes plus dans le domaine de l’en-fance mais bien dans celui de l’adulte. La notion de gain bien réel et non pas seulement fanstasmagorique entraîne l’apparition du vice.De son côté la dictature se situe à la limite de la politique. La paranoïa crois-sante de ses instigateurs, a tôt fait de se séparer du domaine stratégique réfléchi. Ici on commence à entrevoir les ponts qui se forment entre ces deux domaines

si différents à l’origine. Les jeux d’argents et les dictateurs partagent un même vocabulaire : Celui du gain, celui du vice, de l’excès, et du retournement rocambolesque

qui vous fait passer de riche à pauvre et de roi à gueux.

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« politicien : cette sorte de gens dont l’unique et véri-table conviction est l’absence de conviction, associée à une insolence importune et à tun art éhonté du mensonge. »

STALINE18 décembre 18785 mars 1953

« Je veux une bombe ato-mique. On a l’air de quoi, de nos jours, sans bombe atomique ? Je suis certaine que nos amis chinois en ont une et qu’elle marche. » (Élena Ceaucescu)

« La mort d’un homme est une tragédie. La mort d’un mil-lion d’hommes est une statis-tique. »

STALINE18 décembre 18785 mars 1953

IDI AMIN DADA17 mai 192816 août 2003

« « CELUI QUI PARLE »DICTATEUR

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HITLER20 avril 188930 avril 1945

« I myself consider myself the most powerful figure in the world. »« I ate them before they ate me. »

“ Comme pour tout le reste, le régime aura le contrôle complet sur la Coupe du Monde ”

KIM JONG IL16 février 1941 ou 194217 décembre 2011

MUSSOLINI29 juillet 188328 avril 1945

« la solution est dans l’emploi de la force. Il n’y a jamais eu d’autres solu-tions dans l’his-toire et il n’y en aura jamais d’autres. »

»JEU« PLAISANTERIE -EN PAROLES- »

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« Tu as toujours montré que tu étais un joueur habile, et tu sais bien que beaucoup de parties qui semblent perdues au départ finissent par se retourner au dernier moment, ou à la dernière main. »

Comment les hommes et les femmes poli-tiques qui briguent nos suffrages s’y prennent-ils pour essayer de nous convaincre ?

En amont, ils ont le choix entre deux rap-ports à leur propre parole. Soit ils choisissent d’utiliser toutes les ressources de l’argumen-tation, cet ensemble de techniques nées au cœur de l’invention démocratique grecque. Cette option n’est hélas pas la plus fréquente aujourd’hui, même si elle ne peut pas être complètement absente de la vie politique sous peine d’effondrement de l’idéal démo-cratique. Soit ils choisissent la ruse. Emprunter cette voie peut relever aussi bien du cynisme que de l’acceptation de l’idée selon laquelle une bonne cause sanctifie les moyens utilisés pour la défendre, quels qu’ils soient. Les motivations de la ruse peuvent donc être immorales ou se croire morales. De nombreux spécialistes en « communica-tion » s’engouffrent dans l’espace ouvert par le choix de la ruse, dont ils se prétendent, entre soi, les meilleurs connaisseurs. La ruse en politique se décline en quatre temps, sur une échelle de gravité croissante. Au bas de l’échelle on trouve la flatterie. Cette forme de séduction est assez courante. Dans son manuel de campagne électorale…

PUBLICITÉ PERSONNELLE Le barreau suivant de l’échelle est la déma-gogie. Le procédé s’appuie sur une bonne connaissance des différents auditoires qui composent l’électorat, ainsi que de leurs attentes, souvent contradictoires entre elles. C’est là que les spécialistes en sondages et en marketing politique entrent en jeu (pour la flatterie, beaucoup de politiques n’ont pas besoin de conseillers), en important le plus souvent des méthodes rôdées dans le domaine de la vente et de la publicité.

Le démagogue… Dire à des groupes d’élec-teurs différents, qui n’ont pas les mêmes intérêts, « votre programme sera le mien » est clairement au coeur du principe démago-gique. L’étape suivante, dans l’échelle du pire, est celle de la propagande. Son mécanisme est simple, il s’agit de construire une image du candidat et de sa politique qui, à l’extérieur, est conforme aux attentes des électorats, tout en préservant, bien à l’abri des regards, la capacité du can-didat à appliquer la politique qu’il a décidé. Le degré de contradiction entre la face exté-rieure de l’image et sa face intérieure est la mesure de l’intensité de la propagande mise en œuvre. Les hommes de la situation, du point de vue de la « communication », sont alors les spécialistes qui savent comment influencer les représentations que les électeurs se font d’un candidat et de sa politique, ceux qui dis-posent des bonnes techniques de fabrication d’une apparence qui n’ait pas trop l’air en contradiction avec la réalité. Là aussi l’expérience acquise dans le domaine de la vente est précieuse, ceux-là ont appris comment, sans modifier la saveur d’un yaourt jugé trop acide par la clientèle, construire une image convaincante du produit qui l’associe – faussement - à la douceur… Construire une image par exemple sur le thème de « la volonté de réduction de la frac-ture sociale » alors même que l’on a décidé de ne prendre aucune des mesures allant dans ce sens, correspond parfaitement à ce cas de figure. Le dernier barreau de l’échelle ne nous concerne pas ici, c’est celui de la propagande coercitive. L’exemple culminant a été celui de la propagande nazie.

FAIRE BONNE FIGURE Celle-ci a associé la construction d’une image positive, modeste et pacifique d’Hitler, en contradiction avec la politique réelle qu’il

menait, avec la contrainte répressive et poli-cière d’y adhérer. L’une des variantes de la propagande, peu subtile mais efficace, consiste à afficher son image comme celle de quelqu’un qui, lui, ne ruse pas, qui dit ce que les autres « pensent tout bas », qui, au delà des médiations et de la communication, incarne le « vrai » peuple, alors même que la politique réelle que l’on entend mener présente de très dangereuses caractéristiques autoritaires et xénophobes. Trois facteurs amplifient cette tentation de recourir à la ruse. Le premier est propre à la France. Il tient à l’extrême personnalisation du régime présidentiel issu de la constitu-

L’ÉCHELLE DE LA RUSE EN POLI-TIQUE : FLATTERIE, DÉMAGOGIE, PROPAGANDE

POKER FACE

DÉMAGOGIE

Expression impassible prise par un joueur de poker pour ne pas trahir la nature de sa main (ses cartes) [Jeux].

JEUVENU DU LATIN JOCUS,OÙ IL AVAIT SURTOUT LE SENS DE « PLAISANTERIE (EN PAROLES) », LE MOT JEU A PRIS TOUS LES EMPLOIS PLUS GÉNÉRAUX

DU LATIN LUDUS« AMU-SEMENT, DIVERTIS-SEMENT » :ON PARLE D’ACTI-

VITÉS SOUMISES À DES RÈGLES (JEU DE CARTES, JEU DE BOULES), À CELLES DU THÉÂTRE (JEU DES ACTEURS, JEUX DE SCÈNE), À CELLE DES JEUX D’ARGENT(JOUER GROS JEU) .

Margherita Sarfatti (1880-1961), à Benito Mussolini, elle était le soutien majeur

du fascisme

FINS STRATÈGES

nom fémininSens Politique dans laquelle on flatte un groupe, une assemblée de personnes afin de gagner leur adhésion ou augmen-ter sa popularité.

audace, bagou, baratin, chiqué, culot, épate, esbroufe, mystification.

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COUPSDE BLUFFLe dictateur est généralement un manipulateur facilement repérable. Ses critiques, ses attaques et ses comportements sont souvent violents. Quand il a besoin de nos services il utilise la flatterie. En règle géné-rale, il ne fait pas de compliments. Il est souvent désagréable, agressif et autoritaire.

• Il est craint de son entourage. Malgré tout, il réussit à obtenir tout ce quil exige. La peur quil génère y est pour beaucoup. Souvent les gens le qualifient de caractériel ou de personne difficile à vivre et ne pensent pas à la manipulation.

• Le manipulateur dictateur peut être pervers et donc conscient de son exigence et de son autorité souve-raine. Cela ne le dérange pas outre mesure sur le plan moral.

• Il est persuadé que la faiblesse affective est un défaut inconcevable dans le cadre professionnel ou personnel. Aucun sentiment ne doit faire dombre sur lefficacité et sur la volonté datteindre tous les objec-tifs prévus.

Ce que vivent, ressentent et pensent les autres ne lin-téresse absolument pas. Pour lui, lhumain ne doit pas être la proie de ses sentiments ou de ses émotions. Le contrôle doit être parfait. Sil y a dérapage ou faiblesse on tombe dans le domaine de la honte. Cette forme de terrorisme relationnel est assez recon-naissable, contrairement au masque sympathique, timide ou altruiste. Il nen est pas moins extrêmement difficile à vivre au quotidien pour ses collègues, ses subordonnés ( ce type de manipulateur choisit une profession ou un poste de commandement), et sa famille.

BLUFF

tion de la Vème République. Le second est la place prise par les médias privés ou financés par le privé, dans tous les pays occidentaux.

La tendance à la personnalisation, à la sim-plification, à la recherche de l’écoute maxi-male, y dessine une pente savonneuse où la ruse est plus utile que toute autre qualité. Le troisième facteur est l’ « incompétence démocratique », le manque de formation à la parole citoyenne, dans laquelle sont main-tenus la plupart des habitants des pays dits démocratiques.

QUINTE FLUSHDes comportements manipulateurs:Connaître les sortes de manipulations et surtout reconnaître celles auxquelles nous sommes le plus sensible est une autre bonne façon d’avancer vers des relations moins des-tructrices, sinon plus satisfaisantes, avec les personnes qui usent de ces stratégies avec nous. Nous vous présenterons donc ici le modèle du psychologue américain Everett L. Shostrom que nous trouvons particulière-ment intéressant.Shostrom fait la distinction entre les manipu-lateurs actifs et passifs et nous présente huit sortes de manipulateurs, quatre dans chaque catégorie. Le manipulateur actif se caracté-rise par une recherche active du contrôle qu’il veut garder à tout prix. Il « victimise » les autres, capitalise sur leur faiblesse et trouve sa gratification par l’exercice d’un contrôle gratuit sur les autres. Ce sont le dictateur, le juge, la brute et le calculateur.Le manipulateur passif quant à lui cherche le contrôle par des méthodes passives, utilisant des moyens subversifs. Il s’organise pour ne jamais offenser et gagne le plus souvent. Ce sont la victime, le dépendant, l’aimable et le protecteur.

Ci-contre :Les tricheurs, peinture de Le Caravage

LE MANIPULATEUR DICTATEUR

bluff, nom masculinSens Parole, attitude qui cherche à impressionner en faisant illusion.

LA DIVERSIONElément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informa-tions insignifiantes.

LA NOUVELLE CENSURELe principe de base de la censure moderne consiste à noyer les informations essentielles dans un déluge d’informations insignifiantes diffusées par une multitude de médias au contenu semblable. Cela permet à la nouvelle censure d’avoir toutes les apparences de la pluralité et de la démocratie.Cette stratégie de la diversion s’applique en premier lieu au journal télévisé, principale source d’information du public.

DE L’INFO SANS INFOS...Depuis le début des années 90, les journaux télévisés ne contiennent quasiment plus d’informa-tion. On continue d’appe-ler « journal télévisé » ce qui devrait en réalité être appelé un « magazine ».Un J.T. moyen contient au maximum 2 à 3 minutes d’information. Le reste est constitué de reportages anecdotiques, de faits divers, de micro-trottoirs et de reality-shows sur la vie quotidienne.

ET UNE CEN-SURE SANS CENSEURSToute la subtilité de la censure moderne réside dans l’absence de censeurs. Ceux-ci ont été efficacement remplacés par la « loi du marché » et la « loi de l’audience ». Par le simple jeu de conditions économiques habilement crées, les chaînes n’ont plus les moyens de financer le travail d’enquête du vrai journalisme, alors que dans le même temps, le reality-show et les micro-trottoirs font plus d’audience avec un coût de production réduit.Même les évènements importants sont traités sous un angle « maga-zine », par le petit bout de la lorgnette. Ainsi, un sommet interna-tional donnera lieu à une interview du chef-cuistot chargé du repas, à des images de limousines officielles et de salutations devant un bâtiment, mais aucune information ni analyse à propos des sujets débattus par les chefs d’états. De même, un attentat sera traité par

des micro-trottoirs sur les lieux du drame, avec les impressions et témoi-gnages des passants, ou une interview d’un secou-riste ou d’un policier.A ces insignifiances s’ajouteront le sport, les faits-divers, les reportages pittoresques sur les villages de la France profonde, sans oublier les pubs déguisées pour les produits culturels faisant l’objet d’une campagne

de promotion (spectacles, films, livres, disques...).Information déstructu-rée pour mémorisation minimaleTous les psycholo-gues et spécialistes des neurosciences savent que la mémorisation des infor-mations par le cerveau se fait d’autant mieux que ces informations sont présentées de façon struc-turée et hiérarchisée.

PROFIL

STRATÉGIES :

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UN AMOUR-PROPRE« Le joueur est toujours tenté de s’attribuer une valeur supérieure à sa valeur réelle. Tel est le théorème que pose, en une curieuse étude, moitié psychologique, moitié algé-brique, un ingénieur algérien, M. V. Cornetz. Son désir de gagner, le souvenir de ses succès passés, sa confiance en lui-même font que le joueur, à un moment donné, se croit nécessai-rement plus fort qu’il ne l’est véritablement. Donc, s’il gagne, il n’est pas surpris ; mais s’il perd, il se dira : « J’aurais pu faire mieux, je n’ai pas donné toute ma valeur, toute mon attention. » Pour que cette opinion fût juste, il faudrait que le joueur se fît de sa force une idée basée non seulement sur la moyenne de ses victoires antérieures, mais aussi sur ses défaites. Or, l’amour-propre empêche que les mauvaises parties se représentent assez fidè-lement à l’esprit pour contrebalancer le sou-venir des parties heureuses. Il arrive donc que le joueur se surestime constamment, et avec une parfaite bonne foi. Il n’est jamais tenté, quel que soit son caractère, de s’attribuer une valeur moindre que sa valeur réelle. La modestie de certains joueurs est toute de surface et leur défiance d’eux-mêmes, qu’ils proclament, se transforme bientôt, la partie commencée, en une confiance excessive. Un joueur est un homme qui se compare à tout moment à d’autres hommes. Il se juge, non pas avec l’indépendance d’un solitaire, mais sous la pression d’une vanité toujours surexcitée par la présence de vanités rivales.

« Livrer une bataille, c’est jouer une partie. Cette psychologie du joueur est aussi celle du général. Que de batailles ont été perdues, parce que le général s’attribuait une valeur supérieure à sa valeur réelle ! »

Tandis que le processus du jeu peut demander quelque approfondisse-ment, le désir du jeu est pour sa part simple et primaire.Tout ce que nous appre-nons à faire dans la vie, nous le faisons à travers le jeu.Enfant, nous jouons à aller voir ce que ça fait de mettre ses mains sur les plaques de la cuisinière. Et une fois joué (et brûlé) et avoir perdu, on apprend à ne plus le refaire.Adolescent, on joue à tenter sa chance avec un membre du sexe opposé, à rejoindre une équipe de sport, ou à prendre un rôle dans les jeux de l’école.Si l’une de ces choses fonctionne à notre avantage, nous allons naturellement vouloir continuer à le faire, encore et encore.

LA FOLIE DES GRANDEURS

Dès que deux de ces vanités sont aux prises, chacune court après la victoire, nécessaire-ment, et elle commence par s’attribuer, sans aucun souci de la réalité, la force capable de vaincre. Accepter le combat, n’est-ce point, par cela même, se croire le plus fort?Livrer une bataille, c’est jouer une partie. Cette psychologie du joueur est aussi celle du général. Que de batailles ont été perdues, parce que le général s’attribuait une valeur supérieure à sa valeur réelle ! Que de gouver-nements même sont tombés pour s’être aban-donnés aux illusions de leur amour-propre ! Napoléon III partant allègrement pour la frontière, n’est-ce point par excellence le type

du joueur qui se surestime ? Il n’est point de bataille désintéressée ; la partie de cartes la plus anodine excite chez les adversaires un désir certain de victoire. Ceux-là même qui se vantent d’un détachement parfait sont souvent les plus âpres au gain, la partie une fois engagée ; ils s’entêtent et, battus, espèrent toujours un moment favorable. Les joueurs qui croient pratiquer le jeu pour le seul inté-rêt de ses combinaisons, de ses émotions, sont donc, leur bonne foi admise, victimes d’une illusion : ils se jugent autres qu’ils ne sont. C’est une attitude assez commune dans la vie. Nous nous croyons tous plus ou moins autres que nous ne sommes, si bien qu’un philosophe ingénieux, M. Jules de Gaultier, a créé, pour qualifier ce penchant universel, une expression particulière. Il appelle cela le bovarysme, en allusion à l’héroïne du roman de Flaubert, qui se croyait une grande amou-reuse et qui n’était qu’une pauvre petite femme malade. Le joueur qui prétend ne pas jouer pour gagner est donc atteint de bova-rysme. Mais il songe aussi, peut-être, à mettre son amour-propre à l’abri en cas d’insuccès. Battu, il jurera s’être amusé tout autant que s’il avait gagné. C’est une manière de se consoler qui n’est pas sans élégance. Le renard qui trouve les raisins trop verts nous a donné un exemple charmant de cette attitude dédaigneuse. M. Cornetz a vu à Alger, sur un vieil échiquier arabe, cette devise : « Le perdant a toujours une excuse. » La base de ses excuses est celle-ci : « J’aurais dû jouer autrement. Si j’avais avancé tel pion, telle dame, ou telle carte, sans aucun doute, j’aurais gagné. » Qui n’a assisté à ces dis-cussions de coups, où les joueurs n’oublient que ceci, c’est qu’ils savent, au moment où ils discutent, des choses qu’ils ignoraient, au moment où se déroulait la partie ? La vérité, c’est qu’à un moment donné, quand on joue sérieusement, on joue tou-jours selon sa force, ni plus ni moins. Le vaincu a une excuse, soit ; mais c’est préci-sément parce qu’il est vaincu. Le vainqueur n’en a pas besoin. Etre vainqueur est un fait ; être vaincu en est un autre.

RETOURNEMENTIl y a dans les faits une logique, et la raison du plus fort est toujours la meilleure. Croire, si on est battu, qu’on aurait pu ne pas l’être, c’est par cela même supposer qu’on aurait pu, à ce moment, être une autre personne, ce qui est absurde. Mais cette illusion tient peut-être à des causes invincibles. La principale est que, comme je l’ai déjà dit, au moment où nous sommes battus, nous

nous souvenons, non pas de nos anciennes défaites, mais bien de nos anciennes vic-toires, et de cela seul. Nous nous reconnais-sons une capacité générale, une capacité de principe qu’une infériorité accidentelle ne saurait atteindre. Il ne nous vient pas à l’idée, la vanité le défend, que notre valeur réelle n’est probablement qu’un composé assez équitable de supériorités et d’infériorités éga-lement accidentelles. La balance penchera toujours du côté de l’amour-propre.Il faut reconnaître que, si cette illusion d’amour-propre a de grands inconvénients, si elle fausse notre jugement critique, non seu-lement sur nous-mêmes, mais sur les autres,

si elle nous entraîne à des estima-tions fausses, elle a, en contre-par-tie, de grands avantages. « L’illusion qui accompagne l’homme au cours de la vie, dit M. Cornetz, est une condition néces-saire d’existence, un produit pré-cieux de l’instinct vital. » L’homme qui se surestime est aussi celui qui est capable de se surmon-ter. Il est nécessaire, au grand jeu de la vie, d’avoir confiance en soi-même. Si l’on ne s’estimait qu’à sa juste valeur, on ne s’estimerait pas assez. Si l’on ne s’accordait pas une force supérieure à sa force

réelle, on n’oserait jamais entreprendre l’im-possible : or il n’y a peut-être que l’impos-sible qui soit digne d’être entrepris. Au pur point de vue pratique, si le but à atteindre n’était pas embelli par l’illusion, se mettrait-on jamais en marche? Il est bon qu’après un échec l’homme puisse se dire, en toute naï-veté : « J’aurais pu agir autrement. » Ce n’est pas vrai, sans doute ; mais cela peut créer dans l’avenir une grande vérité. L’erreur est une grande génératrice de vérités. La vérité d’aujourd’hui a sa racine dans l’erreur d’hier. Les illusions ont souvent créé des forces réelles. « Vous pouviez faire mieux, » dit l’éducateur à son élève. Il met ainsi dans l’esprit de l’en-fant une croyance, une idée qui engendrera immédiatement un espoir et, dans le futur, une force. Ne raillons donc pas trop le joueur qui a une belle confiance en lui-même.

GAGNER ET PERDRESans doute cette confiance le poussera à accepter des combats inégaux où il sera vaincu ; mais il arrivera aussi qu’il sortira vainqueur des luttes dans lesquelles il n’aurait pas osé s’engager, si la bienfaisante illusion n’avait considérablement grossi à ses yeux sa valeur réelle. Finalement, il arrive, dans bien des cas, que la valeur réelle était conforme à l’estimation faite par l’amour-propre. Il ne faut pas s’y fier, il s’agit de jeu, mais c’est le cas de ne pas craindre de répéter un proverbe et de dire : « Qui ne risque rien n’a rien. » Toutes les langues du monde ont des pro-verbes analogues. C’est donc que tous les peuples ont reconnu qu’une certaine acti-vité est impossible sans une certaine illu-sion, et que, de tous les principes d’action, le plus puissant et le plus fécond est encore la confiance en soi-même. »

Le narcissisme est un trouble psychiatrique caractérisé par une sures-timation de soi et de ses capacités, un sentiment d’être unique, un besoin d’être reconnu comme exceptionnel et une critique mal vécue.

NARCISSIME

INNÉ

DE LA DÉMESURE

« Ah l’argent! L’appât du gain! Le désir immodéré et croissant de biens et des richesses ! Posséder toujours et toujours plus. »

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L’idée de se rendre à la table de leur jeu virtuel ou réel favori met généralement toujours l’eau à la bouche de celles et ceux qui aiment jouer. Le fantasme de l’énorme pile de jetons ou des tonnes de crédits affichés sur leur compte est un véritable shoot d’endorphines (les hormones du bien-être) pour le cerveau.Mais par quoi cela commence t-il ? Qu’est-ce que la psy-chologie du joueur et du jeu ?

« Que de gouvernements même sont tombés pour s’être abandonnés aux illusions de leur amour-propre ! Napoléon III partant allègrement pour la frontière, n’est-ce point par excellence le type du joueur qui

se surestime ? »

AMOUR PROPRE

NE PAS AVOIR LES JETONSD’abord, quand 60 millions de personnes vous écoutent simultanément à la radio, il est diffi-cile de plaire à la fois aux banquiers, aux chasseurs, aux femmes au foyer, aux chômeurs, aux pacifistes, aux prolos et aux lapins. Ensuite, il est difficile de continuer à entretenir les masses dans l’illusion si celles-ci, au contact du réel, peuvent découvrir qu’elles font l’objet d’une manipulation. Heureusement pour nos amis dictateurs, les nouvelles technologies de l’information permettent de résoudre ces pro-blèmes. La possibilité de s’adresser à chaque internaute en adaptant automatiquement le dis-cours produit permet d’atteindre le vieux rêve populiste : plaire à tout le monde. La déma-térialisation des activités humaines, quant à elle, brouille nos repères et nous transforment en schizophrènes incapables de dissocier la réalité de l’univers virtuel. Les techniques post-modernes de manipulation des esprits pourraient accoucher de cette psychocratie redoutée par Volkoff.D’un point de vue historique, nous pourrions nous croire vaccinés contre les entreprises de désinformation. Malheureusement, notre organisation sociale et technique nous empêche de bénéficier d’un hypothétique « effet d’expérience » collectif. En lisant Volkoff, on s’étonne par exemple de ne plus se souvenir de la polémique, vite étouffée il est vrai, qui, au cours de la campagne présidentielle de 1988, avait désigné François Mitterrand et ses sbires comme les responsables d’un montage télévisuel destiné à favoriser le vote socialiste par l’incrustation, dans les génériques des journaux télévisés de France 2, d’images subliminales du Président candidat.La profusion d’information, le nivellement des enjeux (le sort de Virenque vaut celui des Kosovars) et le contrôle caché (quoique non centralisé) de ce gigantesque spectacle média-tique rendent illusoire la poursuite d’une quelconque « vérité ». Contraints de nous fier à notre intelligence, nous devons mettre en place les filtres techniques, sociaux et cognitifs qui pourront nous protéger des manipulations les plus évidentes. La recomposition de nos appar-tenances et de nos références devient urgente. Comme le rappelle Mucchielli, cité par Volkoff, l’atomisation sociale favorise les manipulations de toutes sortes : « l’appartenance à des groupes cohésifs sert de rempart contre la propagande (par résistance du système des opinions individuelles lorsqu’il est soutenu par la sécurité de l’appartenance,

PLAIRE À TOUT LE MONDE

Détail et Retouche d’aprèsLa folie des grandeurs

de René Magritte

et soumis, grâce aux échanges socio-affectifs, à un renforcement permanent) ». Mais ces groupes cohé-sifs, nous les avons éliminé les uns après les autres en

détruisant systématiquement les castes, les tribus, les corps de métier, les patries, les familles, tous les ordres préexistants au choix individuel, et nous nous efforçons même de donner mau-vaise conscience aux rares individus qui s’en réclameraient encore. « (Centre international de sciences criminelles et pénales CISCP)

Les pièges qui menacent un dicta-teur sont nombreux mais ils sont tous porteurs du même gène, l’excès. Les scientifiques qui décortiquent notre ADN ne se sont pas encore penchés sur ce dernier et c’est bien dommage. Excès d’autorité, d’argent, de vio-lence, d’injustice, la liste est longue. Toute prise de

L’EXCÈS

pouvoir, qu’elle soit obtenue par la force ou par les urnes, ne porte pas nécessairement en elle les germes d’une dictature. Les constitutions exis-tantes au moment de l’accession pro-tègent des dérapages autocratiques. Les révolutions même violentes devraient donner naissance à une amélioration de vie d’un plus grand nombre de per-sonnes. Le suffrage universel dans les démocraties permet une alternance qui oblige le pouvoir en place à veiller à sa mission s’il ne veut pas être sanctionné aux élections suivantes.

Les coups d’État visent à détrôner un dirigeant qui s’acquittait mal de sa mission en pri-vilégiant la réussite d’un petit groupe au détriment de la masse.

LA PSYCHOLOGIE DU JEU ET DU JOUEUR

MAIN MISELes campagnes les plus axées sur le jeu sont celles où règne la plus grande incertitude sur l’issue du 1er tour : la présidentielle de 1995 avec la bataille Chirac, Balladur, Jospin, et celle de 1988 avec Mit-terrand, Chirac et Barre. Lorsqu’on pense savoir quels seront les finalistes du second tour, les journaux télévisés laissent un peu plus de place aux enjeux : en 1981 avec Giscard et Mitterrand, en 2002 avec Chirac et Jospin (pronostic qui s’est révélé faux), en 2007 avec Sarkozy et Royal. Pourquoi les rédactions insistent-elles tant sur le jeu ? « Elles pensent, explique Christophe Piar, qu’elles attirent une audience plus large qu’en parlant d’enjeux, souvent compliqués. Le jeu est plus facile à couvrir que les enjeux par des journalistes tra-vaillant dans l’urgence. Il est plus facile aussi de respecter la neutra-

lité en insistant sur les jeux ; en parlant des enjeux, le journaliste peut être amené à dire que le candidat a tort ou qu’il ment... Les directeurs de chaîne par ailleurs sont persuadés que le téléspectateur décroche lorsqu’on parle d’enjeux, alors que dans le cas où une émission place des citoyens face à un candidat, les questions portent toujours sur les enjeux, jamais sur le jeu. »

PSYCHO

Ah l’argent! L’appât du gain! Le désir immo-déré et croissant de biens et des richesses ! Posséder toujours et toujours plus. Les dic-tateurs anciens multipliaient les palais, les esclaves, les femmes. Ils voulaient des mau-solées de marbre, des autels. Ils préparaient les voyages dans l’au-delà pour y être aussi riches que dans leur séjour terrestre. Les dictateurs modernes ont gardé le goût des palais et des résidences ; les voi-tures, les jets et les yachts ont remplacé les chevaux et les animaux exotiques. C’est maintenant qu’ils veulent jouir de la vie. Rien n’est alors trop beau ni trop luxueux. Ces symboles du luxe deviennent les signes extérieurs de leur pouvoir. Peu de choses ont changé sur le fond entre le despote d’hier et celui d’aujourd’hui. L’esclave a pris une autre forme. Un geste de la tête, un pouce incliné et le sort de milliers d’hommes basculait dans les arènes. Bien sûr les jeux sanglants

n’existent plus, les gladiateurs ne périront plus sous le glaive d’un compagnon d’infor-tune mais des milliers d’hommes vivent sous le joug d’un petit nombre.

TOUR DE PASSEUn autre aspect de la psychologie du poker concerne vos relations avec les autres joueurs de la table. Vous pouvez croire que vous n’avez pas à vous intéresser à la partie adverse, mais en fait elle constitue bien un élément majeur du jeu. Par exemple, vous voulez bluffer pour laisser croire aux autres joueurs que vous avez un meilleur jeu que celui que vous avez réellement. Pour ce faire, vous devez pouvoir devancer la partie adverse en pensée et avoir tout l’air de ce que vous voulez laisser croire. En même temps , vous devez être suffisamment ingé-nieux pour sonder la partie adverse et savoir si elle tente de vous faire du bluff.

JEU D’ACTEUR

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POKER FACEExpression impassible prise par un joueur de poker pour ne pas trahir la nature de sa main (ses cartes) [Jeux].

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POKER FACEExpression impassible prise par un joueur de poker pour ne pas trahir la nature de sa main (ses cartes) [Jeux].

LA FACE CACHÉEDES DICTATEURS

Tout d’abord, posons nous les bonnes questions,Qu’est ce que la « Frontière »?Il nous est dit dans le dictionnaire : « Limite, point de séparation entre deux choses différentes ou opposées »Qu’est-il vraiment important dans la notion de frontière?Je crois que ce ne sont pas les différentes parties opposées en question mais bien cette limite, cette espace imaginaire ou non, ce « juste milieu ».Je crois aussi que s’il y a frontière, il y a espace commun, et qu’on peut donc effectuer des ponts entre ces deux choses si différentes mais aux limites communes.

En apparence, les jeux d’argent et la dic-tature sont en tous points opposés ; l’un puise son origine dans le jeu, rele-vant du domaine du hasard, de la chance, du divertissement. De base le jeu est souvent considéré comme puérile et inutile. La dictature, elle, s’inscrit dans le domaine politique.

AVANT PROPOS

Ce domaine au registre sérieux, réfléchi et calculé, ne laisse à priori pas de place au hasard. Et bien loin du rire la dicta-ture provoque la terreur. Cependant, les jeux d’argent se situent à la limite de cette définition du jeu, nous ne sommes plus dans le domaine de l’en-fance mais bien dans celui de l’adulte. La notion de gain bien réel et non pas seulement fanstasmagorique entraîne l’apparition du vice.De son côté la dictature se situe à la limite de la politique. La paranoïa crois-sante de ses instigateurs, a tôt fait de se séparer du domaine stratégique réfléchi. Ici on commence à entrevoir les ponts qui se forment entre ces deux domaines

si différents à l’origine. Les jeux d’argents et les dictateurs partagent un même vocabulaire : Celui du gain, celui du vice, de l’excès, et du retournement rocambolesque

qui vous fait passer de riche à pauvre et de roi à gueux.

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LA FACE CACHÉEDES DICTATEURS

Tout d’abord, posons nous les bonnes questions,Qu’est ce que la « Frontière »?Il nous est dit dans le dictionnaire : « Limite, point de séparation entre deux choses différentes ou opposées »Qu’est-il vraiment important dans la notion de frontière?Je crois que ce ne sont pas les différentes parties opposées en question mais bien cette limite, cette espace imaginaire ou non, ce « juste milieu ».Je crois aussi que s’il y a frontière, il y a espace commun, et qu’on peut donc effectuer des ponts entre ces deux choses si différentes mais aux limites communes.

En apparence, les jeux d’argent et la dic-tature sont en tous points opposés ; l’un puise son origine dans le jeu, rele-vant du domaine du hasard, de la chance, du divertissement. De base le jeu est souvent considéré comme puérile et inutile. La dictature, elle, s’inscrit dans le domaine politique.

AVANT PROPOS

Ce domaine au registre sérieux, réfléchi et calculé, ne laisse à priori pas de place au hasard. Et bien loin du rire la dicta-ture provoque la terreur. Cependant, les jeux d’argent se situent à la limite de cette définition du jeu, nous ne sommes plus dans le domaine de l’en-fance mais bien dans celui de l’adulte. La notion de gain bien réel et non pas seulement fanstasmagorique entraîne l’apparition du vice.De son côté la dictature se situe à la limite de la politique. La paranoïa crois-sante de ses instigateurs, a tôt fait de se séparer du domaine stratégique réfléchi. Ici on commence à entrevoir les ponts qui se forment entre ces deux domaines

si différents à l’origine. Les jeux d’argents et les dictateurs partagent un même vocabulaire : Celui du gain, celui du vice, de l’excès, et du retournement rocambolesque

qui vous fait passer de riche à pauvre et de roi à gueux.

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L’idée de se rendre à la table de leur jeu virtuel ou réel favori met généralement toujours l’eau à la bouche de celles et ceux qui aiment jouer. Le fantasme de l’énorme pile de jetons ou des tonnes de crédits affichés sur leur compte est un véritable shoot d’endorphines (les hormones du bien-être) pour le cerveau.Mais par quoi cela commence t-il ? Qu’est-ce que la psy-chologie du joueur et du jeu ?

« Que de gouvernements même sont tombés pour s’être abandonnés aux illusions de leur amour-propre ! Napoléon III partant allègrement pour la frontière, n’est-ce point par excellence le type du joueur qui

se surestime ? »

AMOUR PROPRE

NE PAS AVOIR LES JETONSD’abord, quand 60 millions de personnes vous écoutent simultanément à la radio, il est diffi-cile de plaire à la fois aux banquiers, aux chasseurs, aux femmes au foyer, aux chômeurs, aux pacifistes, aux prolos et aux lapins. Ensuite, il est difficile de continuer à entretenir les masses dans l’illusion si celles-ci, au contact du réel, peuvent découvrir qu’elles font l’objet d’une manipulation. Heureusement pour nos amis dictateurs, les nouvelles technologies de l’information permettent de résoudre ces pro-blèmes. La possibilité de s’adresser à chaque internaute en adaptant automatiquement le dis-cours produit permet d’atteindre le vieux rêve populiste : plaire à tout le monde. La déma-térialisation des activités humaines, quant à elle, brouille nos repères et nous transforment en schizophrènes incapables de dissocier la réalité de l’univers virtuel. Les techniques post-modernes de manipulation des esprits pourraient accoucher de cette psychocratie redoutée par Volkoff.D’un point de vue historique, nous pourrions nous croire vaccinés contre les entreprises de désinformation. Malheureusement, notre organisation sociale et technique nous empêche de bénéficier d’un hypothétique « effet d’expérience » collectif. En lisant Volkoff, on s’étonne par exemple de ne plus se souvenir de la polémique, vite étouffée il est vrai, qui, au cours de la campagne présidentielle de 1988, avait désigné François Mitterrand et ses sbires comme les responsables d’un montage télévisuel destiné à favoriser le vote socialiste par l’incrustation, dans les génériques des journaux télévisés de France 2, d’images subliminales du Président candidat.La profusion d’information, le nivellement des enjeux (le sort de Virenque vaut celui des Kosovars) et le contrôle caché (quoique non centralisé) de ce gigantesque spectacle média-tique rendent illusoire la poursuite d’une quelconque « vérité ». Contraints de nous fier à notre intelligence, nous devons mettre en place les filtres techniques, sociaux et cognitifs qui pourront nous protéger des manipulations les plus évidentes. La recomposition de nos appar-tenances et de nos références devient urgente. Comme le rappelle Mucchielli, cité par Volkoff, l’atomisation sociale favorise les manipulations de toutes sortes : « l’appartenance à des groupes cohésifs sert de rempart contre la propagande (par résistance du système des opinions individuelles lorsqu’il est soutenu par la sécurité de l’appartenance,

PLAIRE À TOUT LE MONDE

Détail et Retouche d’aprèsLa folie des grandeurs

de René Magritte

et soumis, grâce aux échanges socio-affectifs, à un renforcement permanent) ». Mais ces groupes cohé-sifs, nous les avons éliminé les uns après les autres en

détruisant systématiquement les castes, les tribus, les corps de métier, les patries, les familles, tous les ordres préexistants au choix individuel, et nous nous efforçons même de donner mau-vaise conscience aux rares individus qui s’en réclameraient encore. « (Centre international de sciences criminelles et pénales CISCP)

Les pièges qui menacent un dicta-teur sont nombreux mais ils sont tous porteurs du même gène, l’excès. Les scientifiques qui décortiquent notre ADN ne se sont pas encore penchés sur ce dernier et c’est bien dommage. Excès d’autorité, d’argent, de vio-lence, d’injustice, la liste est longue. Toute prise de

L’EXCÈS

pouvoir, qu’elle soit obtenue par la force ou par les urnes, ne porte pas nécessairement en elle les germes d’une dictature. Les constitutions exis-tantes au moment de l’accession pro-tègent des dérapages autocratiques. Les révolutions même violentes devraient donner naissance à une amélioration de vie d’un plus grand nombre de per-sonnes. Le suffrage universel dans les démocraties permet une alternance qui oblige le pouvoir en place à veiller à sa mission s’il ne veut pas être sanctionné aux élections suivantes.

Les coups d’État visent à détrôner un dirigeant qui s’acquittait mal de sa mission en pri-vilégiant la réussite d’un petit groupe au détriment de la masse.

LA PSYCHOLOGIE DU JEU ET DU JOUEUR

MAIN MISELes campagnes les plus axées sur le jeu sont celles où règne la plus grande incertitude sur l’issue du 1er tour : la présidentielle de 1995 avec la bataille Chirac, Balladur, Jospin, et celle de 1988 avec Mit-terrand, Chirac et Barre. Lorsqu’on pense savoir quels seront les finalistes du second tour, les journaux télévisés laissent un peu plus de place aux enjeux : en 1981 avec Giscard et Mitterrand, en 2002 avec Chirac et Jospin (pronostic qui s’est révélé faux), en 2007 avec Sarkozy et Royal. Pourquoi les rédactions insistent-elles tant sur le jeu ? « Elles pensent, explique Christophe Piar, qu’elles attirent une audience plus large qu’en parlant d’enjeux, souvent compliqués. Le jeu est plus facile à couvrir que les enjeux par des journalistes tra-vaillant dans l’urgence. Il est plus facile aussi de respecter la neutra-

lité en insistant sur les jeux ; en parlant des enjeux, le journaliste peut être amené à dire que le candidat a tort ou qu’il ment... Les directeurs de chaîne par ailleurs sont persuadés que le téléspectateur décroche lorsqu’on parle d’enjeux, alors que dans le cas où une émission place des citoyens face à un candidat, les questions portent toujours sur les enjeux, jamais sur le jeu. »

PSYCHO

Ah l’argent! L’appât du gain! Le désir immo-déré et croissant de biens et des richesses ! Posséder toujours et toujours plus. Les dic-tateurs anciens multipliaient les palais, les esclaves, les femmes. Ils voulaient des mau-solées de marbre, des autels. Ils préparaient les voyages dans l’au-delà pour y être aussi riches que dans leur séjour terrestre. Les dictateurs modernes ont gardé le goût des palais et des résidences ; les voi-tures, les jets et les yachts ont remplacé les chevaux et les animaux exotiques. C’est maintenant qu’ils veulent jouir de la vie. Rien n’est alors trop beau ni trop luxueux. Ces symboles du luxe deviennent les signes extérieurs de leur pouvoir. Peu de choses ont changé sur le fond entre le despote d’hier et celui d’aujourd’hui. L’esclave a pris une autre forme. Un geste de la tête, un pouce incliné et le sort de milliers d’hommes basculait dans les arènes. Bien sûr les jeux sanglants

n’existent plus, les gladiateurs ne périront plus sous le glaive d’un compagnon d’infor-tune mais des milliers d’hommes vivent sous le joug d’un petit nombre.

TOUR DE PASSEUn autre aspect de la psychologie du poker concerne vos relations avec les autres joueurs de la table. Vous pouvez croire que vous n’avez pas à vous intéresser à la partie adverse, mais en fait elle constitue bien un élément majeur du jeu. Par exemple, vous voulez bluffer pour laisser croire aux autres joueurs que vous avez un meilleur jeu que celui que vous avez réellement. Pour ce faire, vous devez pouvoir devancer la partie adverse en pensée et avoir tout l’air de ce que vous voulez laisser croire. En même temps , vous devez être suffisamment ingé-nieux pour sonder la partie adverse et savoir si elle tente de vous faire du bluff.

JEU D’ACTEUR

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UN AMOUR-PROPRE« Le joueur est toujours tenté de s’attribuer une valeur supérieure à sa valeur réelle. Tel est le théorème que pose, en une curieuse étude, moitié psychologique, moitié algé-brique, un ingénieur algérien, M. V. Cornetz. Son désir de gagner, le souvenir de ses succès passés, sa confiance en lui-même font que le joueur, à un moment donné, se croit nécessai-rement plus fort qu’il ne l’est véritablement. Donc, s’il gagne, il n’est pas surpris ; mais s’il perd, il se dira : « J’aurais pu faire mieux, je n’ai pas donné toute ma valeur, toute mon attention. » Pour que cette opinion fût juste, il faudrait que le joueur se fît de sa force une idée basée non seulement sur la moyenne de ses victoires antérieures, mais aussi sur ses défaites. Or, l’amour-propre empêche que les mauvaises parties se représentent assez fidè-lement à l’esprit pour contrebalancer le sou-venir des parties heureuses. Il arrive donc que le joueur se surestime constamment, et avec une parfaite bonne foi. Il n’est jamais tenté, quel que soit son caractère, de s’attribuer une valeur moindre que sa valeur réelle. La modestie de certains joueurs est toute de surface et leur défiance d’eux-mêmes, qu’ils proclament, se transforme bientôt, la partie commencée, en une confiance excessive. Un joueur est un homme qui se compare à tout moment à d’autres hommes. Il se juge, non pas avec l’indépendance d’un solitaire, mais sous la pression d’une vanité toujours surexcitée par la présence de vanités rivales.

« Livrer une bataille, c’est jouer une partie. Cette psychologie du joueur est aussi celle du général. Que de batailles ont été perdues, parce que le général s’attribuait une valeur supérieure à sa valeur réelle ! »

Tandis que le processus du jeu peut demander quelque approfondisse-ment, le désir du jeu est pour sa part simple et primaire.Tout ce que nous appre-nons à faire dans la vie, nous le faisons à travers le jeu.Enfant, nous jouons à aller voir ce que ça fait de mettre ses mains sur les plaques de la cuisinière. Et une fois joué (et brûlé) et avoir perdu, on apprend à ne plus le refaire.Adolescent, on joue à tenter sa chance avec un membre du sexe opposé, à rejoindre une équipe de sport, ou à prendre un rôle dans les jeux de l’école.Si l’une de ces choses fonctionne à notre avantage, nous allons naturellement vouloir continuer à le faire, encore et encore.

LA FOLIE DES GRANDEURS

Dès que deux de ces vanités sont aux prises, chacune court après la victoire, nécessaire-ment, et elle commence par s’attribuer, sans aucun souci de la réalité, la force capable de vaincre. Accepter le combat, n’est-ce point, par cela même, se croire le plus fort?Livrer une bataille, c’est jouer une partie. Cette psychologie du joueur est aussi celle du général. Que de batailles ont été perdues, parce que le général s’attribuait une valeur supérieure à sa valeur réelle ! Que de gouver-nements même sont tombés pour s’être aban-donnés aux illusions de leur amour-propre ! Napoléon III partant allègrement pour la frontière, n’est-ce point par excellence le type

du joueur qui se surestime ? Il n’est point de bataille désintéressée ; la partie de cartes la plus anodine excite chez les adversaires un désir certain de victoire. Ceux-là même qui se vantent d’un détachement parfait sont souvent les plus âpres au gain, la partie une fois engagée ; ils s’entêtent et, battus, espèrent toujours un moment favorable. Les joueurs qui croient pratiquer le jeu pour le seul inté-rêt de ses combinaisons, de ses émotions, sont donc, leur bonne foi admise, victimes d’une illusion : ils se jugent autres qu’ils ne sont. C’est une attitude assez commune dans la vie. Nous nous croyons tous plus ou moins autres que nous ne sommes, si bien qu’un philosophe ingénieux, M. Jules de Gaultier, a créé, pour qualifier ce penchant universel, une expression particulière. Il appelle cela le bovarysme, en allusion à l’héroïne du roman de Flaubert, qui se croyait une grande amou-reuse et qui n’était qu’une pauvre petite femme malade. Le joueur qui prétend ne pas jouer pour gagner est donc atteint de bova-rysme. Mais il songe aussi, peut-être, à mettre son amour-propre à l’abri en cas d’insuccès. Battu, il jurera s’être amusé tout autant que s’il avait gagné. C’est une manière de se consoler qui n’est pas sans élégance. Le renard qui trouve les raisins trop verts nous a donné un exemple charmant de cette attitude dédaigneuse. M. Cornetz a vu à Alger, sur un vieil échiquier arabe, cette devise : « Le perdant a toujours une excuse. » La base de ses excuses est celle-ci : « J’aurais dû jouer autrement. Si j’avais avancé tel pion, telle dame, ou telle carte, sans aucun doute, j’aurais gagné. » Qui n’a assisté à ces dis-cussions de coups, où les joueurs n’oublient que ceci, c’est qu’ils savent, au moment où ils discutent, des choses qu’ils ignoraient, au moment où se déroulait la partie ? La vérité, c’est qu’à un moment donné, quand on joue sérieusement, on joue tou-jours selon sa force, ni plus ni moins. Le vaincu a une excuse, soit ; mais c’est préci-sément parce qu’il est vaincu. Le vainqueur n’en a pas besoin. Etre vainqueur est un fait ; être vaincu en est un autre.

RETOURNEMENTIl y a dans les faits une logique, et la raison du plus fort est toujours la meilleure. Croire, si on est battu, qu’on aurait pu ne pas l’être, c’est par cela même supposer qu’on aurait pu, à ce moment, être une autre personne, ce qui est absurde. Mais cette illusion tient peut-être à des causes invincibles. La principale est que, comme je l’ai déjà dit, au moment où nous sommes battus, nous

nous souvenons, non pas de nos anciennes défaites, mais bien de nos anciennes vic-toires, et de cela seul. Nous nous reconnais-sons une capacité générale, une capacité de principe qu’une infériorité accidentelle ne saurait atteindre. Il ne nous vient pas à l’idée, la vanité le défend, que notre valeur réelle n’est probablement qu’un composé assez équitable de supériorités et d’infériorités éga-lement accidentelles. La balance penchera toujours du côté de l’amour-propre.Il faut reconnaître que, si cette illusion d’amour-propre a de grands inconvénients, si elle fausse notre jugement critique, non seu-lement sur nous-mêmes, mais sur les autres,

si elle nous entraîne à des estima-tions fausses, elle a, en contre-par-tie, de grands avantages. « L’illusion qui accompagne l’homme au cours de la vie, dit M. Cornetz, est une condition néces-saire d’existence, un produit pré-cieux de l’instinct vital. » L’homme qui se surestime est aussi celui qui est capable de se surmon-ter. Il est nécessaire, au grand jeu de la vie, d’avoir confiance en soi-même. Si l’on ne s’estimait qu’à sa juste valeur, on ne s’estimerait pas assez. Si l’on ne s’accordait pas une force supérieure à sa force

réelle, on n’oserait jamais entreprendre l’im-possible : or il n’y a peut-être que l’impos-sible qui soit digne d’être entrepris. Au pur point de vue pratique, si le but à atteindre n’était pas embelli par l’illusion, se mettrait-on jamais en marche? Il est bon qu’après un échec l’homme puisse se dire, en toute naï-veté : « J’aurais pu agir autrement. » Ce n’est pas vrai, sans doute ; mais cela peut créer dans l’avenir une grande vérité. L’erreur est une grande génératrice de vérités. La vérité d’aujourd’hui a sa racine dans l’erreur d’hier. Les illusions ont souvent créé des forces réelles. « Vous pouviez faire mieux, » dit l’éducateur à son élève. Il met ainsi dans l’esprit de l’en-fant une croyance, une idée qui engendrera immédiatement un espoir et, dans le futur, une force. Ne raillons donc pas trop le joueur qui a une belle confiance en lui-même.

GAGNER ET PERDRESans doute cette confiance le poussera à accepter des combats inégaux où il sera vaincu ; mais il arrivera aussi qu’il sortira vainqueur des luttes dans lesquelles il n’aurait pas osé s’engager, si la bienfaisante illusion n’avait considérablement grossi à ses yeux sa valeur réelle. Finalement, il arrive, dans bien des cas, que la valeur réelle était conforme à l’estimation faite par l’amour-propre. Il ne faut pas s’y fier, il s’agit de jeu, mais c’est le cas de ne pas craindre de répéter un proverbe et de dire : « Qui ne risque rien n’a rien. » Toutes les langues du monde ont des pro-verbes analogues. C’est donc que tous les peuples ont reconnu qu’une certaine acti-vité est impossible sans une certaine illu-sion, et que, de tous les principes d’action, le plus puissant et le plus fécond est encore la confiance en soi-même. »

Le narcissisme est un trouble psychiatrique caractérisé par une sures-timation de soi et de ses capacités, un sentiment d’être unique, un besoin d’être reconnu comme exceptionnel et une critique mal vécue.

NARCISSIME

INNÉ

DE LA DÉMESURE

« Ah l’argent! L’appât du gain! Le désir immodéré et croissant de biens et des richesses ! Posséder toujours et toujours plus. »

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« politicien : cette sorte de gens dont l’unique et véri-table conviction est l’absence de conviction, associée à une insolence importune et à tun art éhonté du mensonge. »

STALINE18 décembre 18785 mars 1953

« Je veux une bombe ato-mique. On a l’air de quoi, de nos jours, sans bombe atomique ? Je suis certaine que nos amis chinois en ont une et qu’elle marche. » (Élena Ceaucescu)

« La mort d’un homme est une tragédie. La mort d’un mil-lion d’hommes est une statis-tique. »

STALINE18 décembre 18785 mars 1953

IDI AMIN DADA17 mai 192816 août 2003

« « CELUI QUI PARLE »DICTATEUR

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HITLER20 avril 188930 avril 1945

« I myself consider myself the most powerful figure in the world. »« I ate them before they ate me. »

“ Comme pour tout le reste, le régime aura le contrôle complet sur la Coupe du Monde ”

KIM JONG IL16 février 1941 ou 194217 décembre 2011

MUSSOLINI29 juillet 188328 avril 1945

« la solution est dans l’emploi de la force. Il n’y a jamais eu d’autres solu-tions dans l’his-toire et il n’y en aura jamais d’autres. »

»JEU« PLAISANTERIE -EN PAROLES- »

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HITLER20 avril 188930 avril 1945

« I myself consider myself the most powerful figure in the world. »« I ate them before they ate me. »

“ Comme pour tout le reste, le régime aura le contrôle complet sur la Coupe du Monde ”

KIM JONG IL16 février 1941 ou 194217 décembre 2011

MUSSOLINI29 juillet 188328 avril 1945

« la solution est dans l’emploi de la force. Il n’y a jamais eu d’autres solu-tions dans l’his-toire et il n’y en aura jamais d’autres. »

»JEU« PLAISANTERIE -EN PAROLES- »

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« Tu as toujours montré que tu étais un joueur habile, et tu sais bien que beaucoup de parties qui semblent perdues au départ finissent par se retourner au dernier moment, ou à la dernière main. »

Comment les hommes et les femmes poli-tiques qui briguent nos suffrages s’y prennent-ils pour essayer de nous convaincre ?

En amont, ils ont le choix entre deux rap-ports à leur propre parole. Soit ils choisissent d’utiliser toutes les ressources de l’argumen-tation, cet ensemble de techniques nées au cœur de l’invention démocratique grecque. Cette option n’est hélas pas la plus fréquente aujourd’hui, même si elle ne peut pas être complètement absente de la vie politique sous peine d’effondrement de l’idéal démo-cratique. Soit ils choisissent la ruse. Emprunter cette voie peut relever aussi bien du cynisme que de l’acceptation de l’idée selon laquelle une bonne cause sanctifie les moyens utilisés pour la défendre, quels qu’ils soient. Les motivations de la ruse peuvent donc être immorales ou se croire morales. De nombreux spécialistes en « communica-tion » s’engouffrent dans l’espace ouvert par le choix de la ruse, dont ils se prétendent, entre soi, les meilleurs connaisseurs. La ruse en politique se décline en quatre temps, sur une échelle de gravité croissante. Au bas de l’échelle on trouve la flatterie. Cette forme de séduction est assez courante. Dans son manuel de campagne électorale…

PUBLICITÉ PERSONNELLE Le barreau suivant de l’échelle est la déma-gogie. Le procédé s’appuie sur une bonne connaissance des différents auditoires qui composent l’électorat, ainsi que de leurs attentes, souvent contradictoires entre elles. C’est là que les spécialistes en sondages et en marketing politique entrent en jeu (pour la flatterie, beaucoup de politiques n’ont pas besoin de conseillers), en important le plus souvent des méthodes rôdées dans le domaine de la vente et de la publicité.

Le démagogue… Dire à des groupes d’élec-teurs différents, qui n’ont pas les mêmes intérêts, « votre programme sera le mien » est clairement au coeur du principe démago-gique. L’étape suivante, dans l’échelle du pire, est celle de la propagande. Son mécanisme est simple, il s’agit de construire une image du candidat et de sa politique qui, à l’extérieur, est conforme aux attentes des électorats, tout en préservant, bien à l’abri des regards, la capacité du can-didat à appliquer la politique qu’il a décidé. Le degré de contradiction entre la face exté-rieure de l’image et sa face intérieure est la mesure de l’intensité de la propagande mise en œuvre. Les hommes de la situation, du point de vue de la « communication », sont alors les spécialistes qui savent comment influencer les représentations que les électeurs se font d’un candidat et de sa politique, ceux qui dis-posent des bonnes techniques de fabrication d’une apparence qui n’ait pas trop l’air en contradiction avec la réalité. Là aussi l’expérience acquise dans le domaine de la vente est précieuse, ceux-là ont appris comment, sans modifier la saveur d’un yaourt jugé trop acide par la clientèle, construire une image convaincante du produit qui l’associe – faussement - à la douceur… Construire une image par exemple sur le thème de « la volonté de réduction de la frac-ture sociale » alors même que l’on a décidé de ne prendre aucune des mesures allant dans ce sens, correspond parfaitement à ce cas de figure. Le dernier barreau de l’échelle ne nous concerne pas ici, c’est celui de la propagande coercitive. L’exemple culminant a été celui de la propagande nazie.

FAIRE BONNE FIGURE Celle-ci a associé la construction d’une image positive, modeste et pacifique d’Hitler, en contradiction avec la politique réelle qu’il

menait, avec la contrainte répressive et poli-cière d’y adhérer. L’une des variantes de la propagande, peu subtile mais efficace, consiste à afficher son image comme celle de quelqu’un qui, lui, ne ruse pas, qui dit ce que les autres « pensent tout bas », qui, au delà des médiations et de la communication, incarne le « vrai » peuple, alors même que la politique réelle que l’on entend mener présente de très dangereuses caractéristiques autoritaires et xénophobes. Trois facteurs amplifient cette tentation de recourir à la ruse. Le premier est propre à la France. Il tient à l’extrême personnalisation du régime présidentiel issu de la constitu-

L’ÉCHELLE DE LA RUSE EN POLI-TIQUE : FLATTERIE, DÉMAGOGIE, PROPAGANDE

POKER FACE

DÉMAGOGIE

Expression impassible prise par un joueur de poker pour ne pas trahir la nature de sa main (ses cartes) [Jeux].

JEUVENU DU LATIN JOCUS,OÙ IL AVAIT SURTOUT LE SENS DE « PLAISANTERIE (EN PAROLES) », LE MOT JEU A PRIS TOUS LES EMPLOIS PLUS GÉNÉRAUX

DU LATIN LUDUS« AMU-SEMENT, DIVERTIS-SEMENT » :ON PARLE D’ACTI-

VITÉS SOUMISES À DES RÈGLES (JEU DE CARTES, JEU DE BOULES), À CELLES DU THÉÂTRE (JEU DES ACTEURS, JEUX DE SCÈNE), À CELLE DES JEUX D’ARGENT(JOUER GROS JEU) .

Margherita Sarfatti (1880-1961), à Benito Mussolini, elle était le soutien majeur

du fascisme

FINS STRATÈGES

nom fémininSens Politique dans laquelle on flatte un groupe, une assemblée de personnes afin de gagner leur adhésion ou augmen-ter sa popularité.

audace, bagou, baratin, chiqué, culot, épate, esbroufe, mystification.

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COUPSDE BLUFFLe dictateur est généralement un manipulateur facilement repérable. Ses critiques, ses attaques et ses comportements sont souvent violents. Quand il a besoin de nos services il utilise la flatterie. En règle géné-rale, il ne fait pas de compliments. Il est souvent désagréable, agressif et autoritaire.

• Il est craint de son entourage. Malgré tout, il réussit à obtenir tout ce quil exige. La peur quil génère y est pour beaucoup. Souvent les gens le qualifient de caractériel ou de personne difficile à vivre et ne pensent pas à la manipulation.

• Le manipulateur dictateur peut être pervers et donc conscient de son exigence et de son autorité souve-raine. Cela ne le dérange pas outre mesure sur le plan moral.

• Il est persuadé que la faiblesse affective est un défaut inconcevable dans le cadre professionnel ou personnel. Aucun sentiment ne doit faire dombre sur lefficacité et sur la volonté datteindre tous les objec-tifs prévus.

Ce que vivent, ressentent et pensent les autres ne lin-téresse absolument pas. Pour lui, lhumain ne doit pas être la proie de ses sentiments ou de ses émotions. Le contrôle doit être parfait. Sil y a dérapage ou faiblesse on tombe dans le domaine de la honte. Cette forme de terrorisme relationnel est assez recon-naissable, contrairement au masque sympathique, timide ou altruiste. Il nen est pas moins extrêmement difficile à vivre au quotidien pour ses collègues, ses subordonnés ( ce type de manipulateur choisit une profession ou un poste de commandement), et sa famille.

BLUFF

tion de la Vème République. Le second est la place prise par les médias privés ou financés par le privé, dans tous les pays occidentaux.

La tendance à la personnalisation, à la sim-plification, à la recherche de l’écoute maxi-male, y dessine une pente savonneuse où la ruse est plus utile que toute autre qualité. Le troisième facteur est l’ « incompétence démocratique », le manque de formation à la parole citoyenne, dans laquelle sont main-tenus la plupart des habitants des pays dits démocratiques.

QUINTE FLUSHDes comportements manipulateurs:Connaître les sortes de manipulations et surtout reconnaître celles auxquelles nous sommes le plus sensible est une autre bonne façon d’avancer vers des relations moins des-tructrices, sinon plus satisfaisantes, avec les personnes qui usent de ces stratégies avec nous. Nous vous présenterons donc ici le modèle du psychologue américain Everett L. Shostrom que nous trouvons particulière-ment intéressant.Shostrom fait la distinction entre les manipu-lateurs actifs et passifs et nous présente huit sortes de manipulateurs, quatre dans chaque catégorie. Le manipulateur actif se caracté-rise par une recherche active du contrôle qu’il veut garder à tout prix. Il « victimise » les autres, capitalise sur leur faiblesse et trouve sa gratification par l’exercice d’un contrôle gratuit sur les autres. Ce sont le dictateur, le juge, la brute et le calculateur.Le manipulateur passif quant à lui cherche le contrôle par des méthodes passives, utilisant des moyens subversifs. Il s’organise pour ne jamais offenser et gagne le plus souvent. Ce sont la victime, le dépendant, l’aimable et le protecteur.

Ci-contre :Les tricheurs, peinture de Le Caravage

LE MANIPULATEUR DICTATEUR

bluff, nom masculinSens Parole, attitude qui cherche à impressionner en faisant illusion.

LA DIVERSIONElément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informa-tions insignifiantes.

LA NOUVELLE CENSURELe principe de base de la censure moderne consiste à noyer les informations essentielles dans un déluge d’informations insignifiantes diffusées par une multitude de médias au contenu semblable. Cela permet à la nouvelle censure d’avoir toutes les apparences de la pluralité et de la démocratie.Cette stratégie de la diversion s’applique en premier lieu au journal télévisé, principale source d’information du public.

DE L’INFO SANS INFOS...Depuis le début des années 90, les journaux télévisés ne contiennent quasiment plus d’informa-tion. On continue d’appe-ler « journal télévisé » ce qui devrait en réalité être appelé un « magazine ».Un J.T. moyen contient au maximum 2 à 3 minutes d’information. Le reste est constitué de reportages anecdotiques, de faits divers, de micro-trottoirs et de reality-shows sur la vie quotidienne.

ET UNE CEN-SURE SANS CENSEURSToute la subtilité de la censure moderne réside dans l’absence de censeurs. Ceux-ci ont été efficacement remplacés par la « loi du marché » et la « loi de l’audience ». Par le simple jeu de conditions économiques habilement crées, les chaînes n’ont plus les moyens de financer le travail d’enquête du vrai journalisme, alors que dans le même temps, le reality-show et les micro-trottoirs font plus d’audience avec un coût de production réduit.Même les évènements importants sont traités sous un angle « maga-zine », par le petit bout de la lorgnette. Ainsi, un sommet interna-tional donnera lieu à une interview du chef-cuistot chargé du repas, à des images de limousines officielles et de salutations devant un bâtiment, mais aucune information ni analyse à propos des sujets débattus par les chefs d’états. De même, un attentat sera traité par

des micro-trottoirs sur les lieux du drame, avec les impressions et témoi-gnages des passants, ou une interview d’un secou-riste ou d’un policier.A ces insignifiances s’ajouteront le sport, les faits-divers, les reportages pittoresques sur les villages de la France profonde, sans oublier les pubs déguisées pour les produits culturels faisant l’objet d’une campagne

de promotion (spectacles, films, livres, disques...).Information déstructu-rée pour mémorisation minimaleTous les psycholo-gues et spécialistes des neurosciences savent que la mémorisation des infor-mations par le cerveau se fait d’autant mieux que ces informations sont présentées de façon struc-turée et hiérarchisée.

PROFIL

STRATÉGIES :

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