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OZU x 36 = L’intégrale du 10 février au 24 mars 2007

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Catalogue de l'intégrale d'Ozu, projetée en 2007 à la Maison de la culture du Japon à Paris

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OZU x 36= L’intégrale

du 10 février au 24 mars 2007

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Maison de la culture du Japon à ParisGrande salle (niveau -3)101 bis, quai Branly - 75740 Paris cedex 15Métro Bir-Hakeim / RER Champ de MarsTel. 01 44 37 95 01www.mcjp.asso.fr

Organisation MCJP (Fondation du Japon) et Association pour la MCJPContact presse Valérie Touzé (06 15 26 35 78 / 01 44 37 95 22)Pour recevoir nos informations, envoyez votre adresse e-mail à : [email protected]

En partenariat avec FIP, Cahiers du cinéma, Carlotta FilmsAvec le soutien de JTI Un événement FIP

Remerciements Michel Ciment et l'équipe de Positif pour leur aimable autorisation de reproduction des textes du Positif N°203 (février1978) consacré à Ozu. Pascal Hurth et la Bibliothèque Interuniversitaire des Langues Orientales. Max Tessier, Hidenori Okada, Pierre Gras,Hiroko Govaers. Catalogue réalisé avec la collaboration de Miwako Kobayashi

Tarif 4 € / Tarif réduit 3 €Photos © SHOCHIKU CO., LTD., CARLOTTA FILMS, collection particulière Max TessierProvenance des copies JAPAN FOUNDATION FILM LIBRARY (www.jpf.go.jp) - SHOCHIKU CO., LTD (www.shochikufilms.com) -CARLOTTA FILMS (www.carlottafilms.com)

En complément de programme OZU AU TEMPS DU MUET : LA FÊTE DE L'IMAGE ET LA PAROLE Deux représentations exceptionnelles avec un narrateur benshi comme au temps cinéma muet Avec l'orchestre Kumonosu Quartet. Cf page 6 du catalogue.

OZU x 36= L’intégrale

du 10 février au 24 mars 2007

Films présentés en version originale sous-titrée français (VOSTF) et version originale sous-titrée anglais (VOSTA)

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Y a-t-il un "mystère Ozu"? On pourrait le croire au vu des innombrablesouvrages, essais ou articles mondiaux consacrés au cinéaste, dont la quanti-té et la diversité d'approches n'auraient d'égales que les hypothèses à l'infi-ni sur les pharaons et leurs tombeaux... Ne dit-on pas d'ailleurs d'Ozu qu'ilétait le "scribe du cinéma japonais", en référence à sa position accroupie surle tatami, supposée résumer sa vision du monde derrière une caméra basse,tout au moins dans la dernière partie de sa carrière ?

Or, il n'en fut pas toujours ainsi. Comme tous les "continents inconnus" ducinéma,Yasujirô Ozu a fait l'objet de multiples "découvertes" successives, enOccident, et en France. Bien avant que Wim Wenders ou Hou Hsiao Hsien enfassent une icône emblématique qui aurait influencé leur œuvre, Ozu étaitconsidéré comme un cinéaste unique au Japon, à qui l'on opposait bien arti-ficiellement, Mikio Naruse qui a retrouvé depuis sa juste place. Et, s'il est un"découvreur" occidental incontestable du maître d'Ofuna, c'est bien du pion-nier Donald Richie qu'il s'agit, indiquant clairement son importance dès sonpremier livre en 1959, et lui consacrant un ouvrage à part entière en 1974,onze ans après la disparition du cinéaste. En France, malgré la réputation cri-tique d'Ozu, peu de ses films étaient visibles en dehors de la CinémathèqueFrançaise (dans le désordre), et, dans les années 1960/70, il fallait aller, sinonà Tôkyô, du moins au British Film Institute de Londres, pour voir quelquesfilms de sa dernière période. Le premier film sorti commercialement à Paris,le fameux Voyage à Tôkyô (1953), ne le fut qu'en 1978, quinze ans après lamort du cinéaste (1963). Mais ce fut le déclic du véritable succès publicd'Ozu en France, puisque ce film, vu à l'époque par près de cent mille spec-tateurs, fut suivi de plusieurs autres, jusqu'à ce qu'un distributeur cinéphile(Alive) propose plus tard une vingtaine de titres, et de multiples rééditions.Depuis, le "mystère Ozu" a suscité d'infinies variations critiques, jusqu'à l'ap-proche assez provocatrice (et sujette à caution) du professeur S. Hasumi, quidéclarait tout de go qu'Ozu était "le moins japonais des cinéastes", opiniontoute personnelle, qui visait surtout à inverser le courant majoritaire dominant...

On oublie très souvent, en parlant d'un cinéma "ozuein" - c'est-à-dire enplans fixes, à ras du tatami, et traitant de "l'impermanence des choses" à tra-vers des histoires sans cesse remises sur le canevas de familles divisées - quele jeune Yasujirô du cinéma Muet avait fait ses classes avec le cinéma holly-woodien de l'époque (et, accessoirement, européen), en citant à tour decamera Lubistch, Hawks, ou même Buster Keaton. Tout un pan de son œuvreoù il se fait le chantre des pauvres et des opprimés, par une malicieuse cri-tique sociale, à travers des comédies exemplaires, dont la plus célèbre resteGosses de Tôkyô (1932). On oublie aussi que les "fers de lance" de laNouvelle Vague radicale de la Shôchiku, en particulier Oshima et Yoshida, l'a-vaient assez sévèrement attaqué pour sa vision "bourgeoise" du monde (à lafin de sa carrière), avant de reconnaître beaucoup plus tard sa personnalitéet son style uniques..

Le "mystère Ozu" (s'il existe) ne se laisse donc pas percer facilement. C'estque le grand cinéaste bouddhiste d'Ofuna a emporté avec lui, dans sa mortprématurée, les clés de la combinaison, que tout le monde voudrait bienretrouver, et surtout ses "héritiers" auto-proclamés, qui ne sont pas toujoursdignes de l'héritage revendiqué... Cette intégrale (de tous ses films existants,car beaucoup ont, hélas, disparu à jamais) est donc la bienvenue pour refai-re un nouveau point, en toute liberté de pensée, sans influence aucune.

> Le cinéma japonais - une introduction, Nathan Université, 1997

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* Historien du cinéma, critique et spécialiste du cinéma japonais. Auteur notammentde : Le cinéma japonais au présent, Pierre Lherminier Editeur, Paris, 1980 et 1984

Ozu cruel ? Pour ses commentateurs et analystes d’abord. Peu nombreux, il est vrai, lorsqu’on songe à l’importance de ses films, à la maniè-re dont ils vous frappent immédiatement par leur ton et leur beauté. Maisémérites, ces analystes, ô combien. Eux tous : Paul Schrader, David Bordwell,Shiguéhiko Hasumi et Donald Richie, et encore Kijû Yoshida et YoussefIshaghpour. Tout entier dévoués à essayer de nous livrer leur vision d’Ozu, àdétailler ses méthodes, à scruter ses thèmes, à rechercher les clefs de sonœuvre. Il faut les lire tous avec passion, avec plaisir, pour y découvrir toutesles facettes du cinéaste. Et comprendre comment il est tour à tour le plusaméricain des réalisateurs japonais et le plus japonais des cinéastes ; com-ment il incarne à la fois l’esthète absolu, uniquement soucieux de son art, etle parfait cinéaste de studio, acharné à suivre son plan de travail et terminerses tournages dans les délais impartis ; comment il passe des sommets dumélodrame familial à l’humour le plus trivial ; comment il est salué commeun peintre de la cruauté de la société japonaise et est décrié pour son apo-litisme ; comment il peut être décrit comme un maître du plan fixe et mar-quer les trois quarts de ses films de travellings maniaques qui sont de véri-tables tics de mise en scène.

Aussi, plutôt que de se risquer à surenchérir pour proposer une nouvelleinterprétation, ne vaut-il pas mieux se replonger dans quelques momentssinguliers de l’œuvre ? Revoir la scène du repas lors de l’excursion dans Find’automne (1960) durant lequel la mère, Setsuko Hara, déjeune une dernière fois avec sa fille qui va se marier, pour y découvrir comment cetteséquence, qui ne comprend que deux cadres différents et où les deux fem-mes restent assises, est animée subtilement par les gestes de mains des deuxactrices, le mouvement des reflets ténus de la lumière sur le lac tout proche,et l’agitation discrète des lanternes de papier dans l’air. Rire de la partie decache-cache entre le grand-père, Ganjirô Nakamura, et son petit-fils dansDernier Caprice (1961) durant laquelle le vieil homme fait semblant de jouerà chercher et, en un ballet d’entrées et sorties dans le cadre, de sons in et offorganisés magistralement par Ozu, échappe à la surveillance de sa fille pourrejoindre sa maîtresse. Avoir le cœur serré lorsque le père du Chœur de Tokyo(1931), tout juste licencié pour avoir défendu courageusement un collègue,

rentre chez lui et, plutôt que d’expliquer ses déboires dont il sait qu’ils mettront sa famille en difficulté, prend ses enfants turbulents en grippe etles frappe sans ménagement. Etre ému tout simplement par la séquence deRécit d’un propriétaire (1947) où Chôko Ida et le garçonnet qu’elle a recueilliaprès la guerre se rendent chez un photographe pour un portrait qui, appa-raissant brusquement au spectateur sous forme d’une image inversée têteen bas suivie d’un plan noir de quinze secondes, marque définitivement ladissolution annoncée des rapports d’affection qui se nouaient peu à peuentre l’enfant et sa mère d’adoption.

Ozu cruel aussi pour lui-même lorsqu’il s’assume comme un « marchand detôfu ». Ou, pire encore selon ses déclarations à Yoshida, Ozu qui décrit lescinéastes comme « ces prostituées qui racolent les clients sous les pontsvêtues d’un manteau de paille ». Bref, un artisan qui doit accomplir jouraprès jour son travail pour satisfaire ceux qu’il doit rassasier. Un cinéaste quifabrique des films en cherchant les bonnes solutions film par film et expéri-mente pour chacun, à travers de subtiles variations et de franches expérien-ces sur les gestes, les sons, la durée, les mouvements, les lumières et les cou-leurs. Ozu qui ne construit pas une « œuvre » dans laquelle on pourraitl’enfermer. Ozu qui nous laisse seuls avec les derniers plans du Goût du saké(1962) : l’escalier vide, la chambre avec sa psyché où ne se reflétera plusjamais l’image de la fille aimée et enfin le profil du père, Chishû Ryû, triste-ment ivre et seul dans la cuisine. Ozu qui nous laisse émerveillés par l’inventivité, la cruauté et la vitalité de ses films dont chaque nouvelle visionnous nourrit.

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*Secrétaire général de l'Agence pour le Développement Régional du Cinéma(adrc). Auteur de L'économie du cinéma, Cahiers du cinéma / SCÉRÉN, 2005

Faut-il percer le mystère Ozu ? par Max Tessier*

Cruel Ozu par Pierre Gras*

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OZU

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Outre mon activité de benshi, je suis acteur de théâtre et vio-loniste. En fait, le métier de benshi n'était pas ma vocation pre-mière. Je le suis devenu un peu par hasard, il y a une dizained'années, quand Takushi Tsubokawa**, le chef du KumonosuQuartet auquel j'appartiens, était en train de terminer son pre-mier film : Tricycle en Décembre (jûnigatsu no sanrinsha). Je nesais plus les détails de l'histoire, mais Tsubokawa n'avait jamaisété satisfait du son de son film. C'est ainsi que quelques annéesplus tard il décida d'en faire un film muet et me demanda d'as-surer la prestation de benshi ou narrateur, comme cela se fai-sait dans tous les films à l'époque du muet au Japon. L'idée,quoique intattendue, me plut et j'acceptai la proposition deTsubokawa. Voilà comment je suis devenu un benshi.Puisque j'étais déjà acteur et musicien, je devais naturellementêtre capable de faire faire benshi. En tout cas, c'était la convic-tion de Tsubokawa. En ce qui me concerne, du benshi, je n'avaisqu'une vague idée. J'ai donc travaillé en fonction de l'idée queje me faisais de cet art de la parole; en même temps que jecomposai la musique en regardant les images de ce court-

métrage. Et je me suis pris au jeu. C'était une expérience telle-ment neuve pour moi. Et comme je suis également acteur dansTricycle en Décembre, j'ai ressenti une sensation très étrangeen faisant parler la personne à l'écran qui était moi-même !J'étais face à un moi plus jeune que moi, celui du moment dutournage, c'est-à-dire plusieurs annéees auparavant. Le moi quiétait sur l'écran n'avait pas vieilli, tandis que moi depuis toutesces années…

Ce film a voyagé dans tout le Japon. Il est passé aussi bien dansles salles de cinéma modernes de Tôkyô qu'à la campagne dansles locaux d'anciennes écoles fermées par manque d'élèves.L'année dernière, en 2006, nous avons même fait une tournéeen Europe. Notre public était très varié, les curieux étaient detous les âges.Si l'image projetée ne change pas, le discours d'un benshi enrevanche varie toujours d'une séance à l'autre. Même si lesdialogues sont écrits par le benshi avant la séance, il reste tou-jours une part d'improvisation. C'est ainsi qu'au fur à mesure demes prestations oratoires, je me suis rendu compte que l'ex-

LLaa ffêêttee ddee ll’’iimmaaggeeeett ddee llaa ppaarroollee

Invité de la MCJP en juin 2006 pour la fête de la musique, le Kumonosu Quartet revient dans nos murs avec sonorchestre pour faire revivre l'atmosphère des salles obscures du temps du cinéma muet. Il sera accompagné de ShôjirôKataoka, le narrateur benshi. Dialogues et musiques originaux sur deux films d'Ozu comme à l'époque du cinéma muet :Chœur de Tôkyô et Gosses de Tôkyô.Depuis ses premiers concerts dans un café de Tôkyô en 1998, le Kumonosu Quartet a rapidement trouvé un ton original enmêlant musique et septième art. Ses spectacles de benshi qu'il donne à travars tout le Japon s'inscrivent naturellement danscette recherche artistique placée sous le signe du divertissement. Gageons que le goût immodéré du ce quartet pour lesatmosphères rétro aurait aussi du goût d'Ozu, lui qui fut si réticent à renoncer au cinéma muet, comme beaucoup de sescontemporains.

JE SUIS UN BENSHI, par Shôjirô Kataoka*

Deux représentations exceptionnelles avec un narrateur benshi comme au temps du cinéma muet avec l'orchestre Kumonosu Quartet

spectacle exceptionnel

AU TEMPS DU MUET

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pression du benshi était affaire de théâtre. Moi qui croyais fairedu cinéma, j'étais en fait en de jouer exactement comme quandje suis les planches; c'est excatement la même atmosphèrequ'au théâtre. De ce jour, j'ai commencé à changer les scéna-rios des films en fonctions des lieux et des saisons; et j'ai laisséde plus en plus de place à l'improvisation pour donner uneatmosphère de spectacle en "live".

Aujourd'hui il reste encore quelques benshi, sortes de derniersMohicans d'un âge révolu. Mais il est extrêmement rare de voirdes films muets. De plus en plus de gens ignorent même cequ'est un film muet. On ne peut en voir qu'à de très rares occa-sions, dans des cinémas art et essais, à la cinémathèque ou bienlors d'évènements très spécifiques. Ce qui avait été jadis un desplus importants divertissement populaire du Japon est réduitaujourd'hui à l'état de relique, c'est-à-dire d'art traditionnelfigé.

A l'âge d'or du film muet, les benshi étaient engagés souscontrat d'exclusivité par les salles de cinéma.La concurrence était féroce entre les exploitants. C'est à quitrouverait le conteur le plus talentueux et le plus charisma-tique. Un jour, une vieille femme d'une ville de l'île du Hokkaidom'a raconté qu'autrefois sa commune comptait plusieurs bens-hi, et que les filles venaient plus les voir que les écouter. Lesbenshi avaient toujours des tenues élégantes, certains n'étaientpas sans charme et ce charme était décuplé quand ils com-mençaient à parler sur un film racontant une histoire d'amour,par exemple.Un beau benshi racontant une histoire d'amour… Il n'en fallait pas plus pour que toutes les filles des environs seprécipitent dans la salle de cinéma. Ainsi, le physique comptaitautant sinon plus que les talents oratoires, selon les circons-tances et le public.En général le benshi écrivait lui-même le scénario. I l donnaitainsi sa propre interprétation au film muet. Mais bien sûr il nechamboulait pas complètement l'histoire, il ne pouvait pas s'é-loigner outre mesure du fil narratif indiqué par les intertitres.Mais si l'histoire du film ne changeait pas, son interprétationchangeait en fonction des benshi et du moment. Comme si cen'était jamais le même film que l'on voyait à chaque fois. Uneséance avec un benshi est une expérience de cinéma très par-ticulière, à cause de cet élément "vivant" qui vient se greffer àl'image et qui agit instantanément sur l'émotion des specta-

teurs. Et cet élément vivant n'étant jamais le même (puisqueles benshi changent), les émotions changent aussi. C'est un peula même chose avec le cinéma actuel, selon qu'on voit un filmdans son salon en vidéo ou sur un écran de cinéma. Selon enco-re qu'on le voit seul ou entre amis; à chaque fois, l'expérienceémotionnelle sera différence pour un même film. Cela dépendtoujours de la présence d'un élément vivant qui agira sur notreémotion. Le cinéma est l'émotion de l'instant, car il est une ren-contre entre les êtres.L'idéal bien sûr est que cette rencontre ait lieu dans une seulelangue. Malheureusement, je ne m'exprime qu'en japonais. Lesspectateurs français devront à la fois m'écouter en japonais etme lire en sur-titrage français. Pour l'écriture des dialogues, j'aiadopté une métrique particulière le shichi go (sept et cinq syl-labes) pour que même une personne ne comprenant pas lejaponais puisse au moins être sensible au rhytme des phrases.

Les films présentés dans le cadre de ce spectacle exceptionnelont été tournés il y a soixante-dix ans. Les spectateurs ne meverront pas dans ces films, ni moi, ni mes amis ! Mais j'ai trèsbien ressenti les joies et les soucis des personnages. A traversma voie, ils vont leur raconter des histoires poignantes et jesouhaite que cette rencontre avec le public soit l'occasion departager des émotions.Pour ce spectacle, une musique originale a été spécialementcomposée par Takushi Tsubokawa à l'accordéon. Celui-ci tenait,en tant que jeune réalisateur, à rendre hommage en musiqueau grand maître du cinéma Ozu.

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*Acteur, violoniste et benshi. Membre du Kumonosu Quartet.** Le film Nuages d'hier (utsukushii tennen) réalisé par TakushiTsubokawa obtenu le le Grand prix et le Prix du public au festival inter-national de Turin en 2005.

MARDI 27 FÉVRIER À 20H00

Chœur de Tôkyô

MERCREDI 28 FÉVRIER À 20H30

Gosses de Tôkyô

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1929 - 1h43 - 35mm - N&B - Studios Shôchiku KamataScénario Akira FushimiAvec Ichirô Yûki, Tatsuo Saitô, Junko Matsui, Chôko Iida

JJoouurrss ddee jjeeuunneessssee

"Une comédie sur des étudiants mêlée à des scènes de ski. Le personnage principal estun étudiant qui suspend un écriteau "chambre à louer" devant sa pension de famille.Lorsque les gens demandent un renseignement et qu'ils ne lui plaisent pas, il leur dit quela chambre vient d'être louée. Lorsqu'une jolie fille se présente, il lui donne sa chambreet s'en va. Mais il laisse quelque chose dans la pièce - ce qui lui permet de revenir et deparler à la fille. Fushimi [le scénariste] et moi avions l'habitude d'écrire des histoires dece genre. Le soir nous allions à Ginza, mangions, buvions et parlions puis retournions cheznous à Fukagawa. Chez moi, nous parlions, écoutions des disques et buvions du thé àminuit. Et le matin nous avions toujours notre histoire. Je me demande encore commentnous y arrivions." Ozu

Watanabe, étudiant à Tôkyô, met une annonce " chambre à louer " dans sa pension de famillepour trouver une fille jeune et belle parmi les visiteurs. C'est ainsi qu'il fait la rencontre de Chieko.Mais Yamamoto, camarade de Watanabe, va lui aussi en tomber amoureux. Cette comédie d'Ozuest aussi le plus ancien film du réalisateur conservé.

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Seventh Heaven / L'heure suprême - Frank Borzage (1927)

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"C'est mon premier film avec Minoru Takeda et Kinuyo Tanaka. J'ai fait beaucoup de filmssur les étudiants. Si vous utilisez de jeunes acteurs, votre scénario doit concerner ou desétudiants ou des employés de bureau. Les étudiants, d'autre part, étaient insouciants, nese battaient pas avec la police comme ceux d'aujourd'hui et pouvaient donc être aisémentle sujet d'une comédie loufoque. Ce film devait être mis en scène par Hiroshi Shimizu [le scénariste] lui-même, mais me fut offert. Je sentais que je devais être capable de trai-ter n'importe quelle sorte de sujet. Il est bon, bien sûr, pour un metteur en scène, d'avoirdes idées artistiques, et en plus il a besoin de dominer son métier ; mais il ne doit pas avoirtrop de "métier". J'étais assez heureux d'avoir l'occasion d'exercer mon métier sur ce typede film. Je pouvais faire ce que je voulais sans beaucoup de limites. Les metteurs en scèneaujourd'hui n'ont guère de liberté, vous savez..." Ozu

1929 -1h10 - N&B Studios Shôchiku Kamata Idée originale Hiroshi Shimizu / Adaptation Yoshirô AramakiAvec Minoru Takada, Kinuyo Tanaka, Utako Suzuki, Kenji Oyama

Tetsuo, un jeune diplômé fait croire à sa mère et à sa fiancée qu'il a trouvé du travail. Mais quandil apprend le secret de Machiko, il est poussé par le désir de se repentir. Avec pour toile de fond lacrise économique, cette comédie témoigne des conditions de vie difficiles des classes moyennesdu Japon à la fin des années vingt. Sa sortie précède de peu le krach boursier d'octobre 1929.Le titre du film est devenu une expression populaire tant il reflétait bien les angoisses dumoment. C'est également à partir de ce film qu'Ozu commence à se faire connaître.NB : film disparu dont il ne reste que dix minutes.

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JJ''aaii ééttéé ddiipplloomméé,, mmaaiiss……

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1929 - 25min - 35mm - N&B - Shôchiku KamataIdée originale Chûji Nozu / Adaptation Tadao IkedaAvec Tatsuo Saitô, Tomio Aoki, Takeshi Sakamoto

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"Il y avait un enfant acteur, Tomio Aoki, qui avait joué dans La Vie d'un employé de bureau(Kaishain seikatsu, film perdu de 1929). C'était un drôle de garçon : il dormait même surle plateau. Nous avons décidé d'en faire la vedette d'un film. Mais pour vous dire la véri-té, une marque de bière avait récemment été importée d'Allemagne et nous voulions tousl'essayer ; aussi afin de pouvoir en acheter nous décidâmes d'écrire un scénario.Vous com-prenez comment est composé le nom du scénariste Nozu Chûji ? A partir de nos noms,Noda, Ozu, […] J'ai mis en scène le film en trois jours environ." Ozu

Un petit garçon kidnappé va causer les pires ennuis à ses deux ravisseurs.Tournée en à peine trois jours, cette comédie loufoque est tirée d'une nouvelle d'O.Henry.Howard Hawks en fera un remake dans un film à sketches O.Henry's Full House (La sarabande despantins, 1952).

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"Est-ce l'histoire de la réhabilitation d'un délinquant juvénile ? Le " script " original étaitd'Hiroshi Shimizu qui nous le donna oralement." Ozu

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VVaa dd''uunn ppaass llééggeerr1930 - 1h30 - N&B - Studios Shôchiku Kamata Projet Hiroshi Shimizu / Adaptation Tadao IkedaAvec Minoru Takada, Hiroko Kawasaki, Nobuko Matsuzono, Utako Suzuki

Un truand tombe amoureux d'une jeune dactylo et tente vaille que vaille de se ranger. L'influenceaméricaine* est particulièrement forte dans ce film d'Ozu qui était à l'époque le réalisateur japo-nais le plus sensible au cinéma occidental.

*Our Dancing Daughters (Les nouvelles vierges) de Harry Beaumon, 1928

Our Dancing Daughters / Les Nouvelles vierges - Harry Beaumon (1928)

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1930 - 1h34 - N&B - Studios Shôchiku Kamata Scénario Akira Fushimi d'après une histoire de Yasujirô OzuAvec Tatsuo Saitô, Kahoru Futaba, Tomio Aoki, Hirô Wakabayashi

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JJ''aaii ééttéé rreeccaalléé,, mmaaiiss……

"C'est un peu le contraire de J'ai été diplômé, mais... Un étudiant qui va passer un exa-men à écrit des antisèches sur ses poignets de chemise. Mais parce que la fille atten-tionnée de sa logeuse lave sa chemise il échoue à son examen. Les étudiants qui ontréussi l'examen et obtenu leur diplôme ne peuvent trouver de travail tandis que le reca-lé, grâce à l'argent de ses parents, continue à bien profiter de la vie. C'était un film court.Pour la première fois j'ai donné un rôle important à Chishû Ryû bien qu'il ait figuré dansmes films précédemment." Ozu

Un étudiant n'arrive pas à obtenir son diplôme dans un contexte de crise économique et de chô-mage endémique. Il décide qu'il vivra aux crochets de ses parents.Une des meilleures comédies d'Ozu entre humour et critique sociale.

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1930 - 1h05 - N&B - Studios Shôchiku Kamata Oeuvre originale Oscar Schisgall "From nine to nine" / Adaption et scénario Kôgo NodaAvec Tokihiko Okada, Emi Yagumo, Mitsuko Ichimura, Tôgo Yamamura

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FFeemmmmee dd''uunnee nnuuiitt

"D'après un roman traduit et publié dans Shinseinen ou quelque autre magazine. L'acteurTokihiko Okada y a joué pour moi pour la première fois. En dehors de la première bobine,les six autres furent tournées entièrement sur ce même plateau. La continuité de ce filmm'a vraiment posé des problèmes. Ce fut difficile, mais j'ai beaucoup appris. M.Kido, leprésident de la compagnie, m'a félicité et m'a dit de prendre des vacances dans une sta-tion thermale." Ozu

Un homme se résout à voler de l'argent pour payer les frais d'hospitalisation de son enfant…Unfilm à suspens aux accents hollywoodiens* sur fond de misère économique. La description desmœurs japonaises est abandonnée au profit d'un style occidental. Un des chef-d'œuvresmodernistes d'Ozu.

* A Broadway Scandal, Lon Chaney, 1918. Broadway Daddies, Fred Windemere, 1928.

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1931 - 1h37 - N&B - Studios Shôchiku KamataScénario Komatsu Kitamura, " Gagman " Maki James Avec Tokihiko Okada, Hiroko Kawasaki, Chôko Iida, Satoko Date

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Kiichi, le capitaine du club de kendô d'une université néglige sa tenue. Il se laisse notammentpoussé la barbe. Il s'entiche d'une jeune employée de bureau qui lui demande de se raser afind'être plus à la mode. Il est si méconnaissable et si beau sans sa barbe qu'il attire toutes les fillesdu campus.Dans cette comédie de mœurs, dans le plus pur style "studio Kamata", Ozu décrit un Japon enpleine modernisation.

"Okada jouait très bien et il était vraiment très drôle. J'ai mis huit jours à le tourner et saréputation fut plus grande que celle de Jeune demoiselle (o-jôsan,1930) sur lequel j'avaistant travaillé. Je ne comprenais pas vraiment ce qu'était un film." Ozu

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1931 - 1h30 - N&B - Studios Shôchiku KamataIdée originale Komatsu Kitamura Avec Tokihiko Okada, Emi Yagumo, Hideo Sugawara, Tatsuo Saito

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LLee cchhœœuurr ddee TTôôkkyyôô

"Ayant reçu ma leçon je fis mon travail avec décontraction. Je n'allais même pas en extérieursbien que le temps fût beau. C'était l'été et il faisait très chaud. Je ne savais plus du tout ceque l'on devait faire avec un film. J'avais le sentiment que personne ne pouvait apprécier unmetteur en scène et que les films ne rimaient à rien. Maintenant je crois que ce qui m'attiredans un film c'est son aspect transitoire, sa qualité d'évanescence, comme la brume." Ozu

Un employé d'une compagnie d'assurances est licencié. Confronté à de gros problèmesfinanciers, il est contraint de faire l'homme-sandwich en secret pour payer les médicamentsde sa fille malade.Avec en toile de fond la crise économique et social, un film humoristique où sont présents le sensde la justice et les sentiments humains familiaux. Depuis la comédie La Citrouille (1928) Ozuréalise chaque année au moins un film dans la sous-genre des histoires d'employé. La tonalitésociale y est de plus en plus forte.

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1932 -1h31 - N&B - Studios Shôchiku Kamata Scénario Akira Fushimi d'après une histoire de James MakiAvec Tatsuo Saitô, Mitsuko Yoshikawa, Hideo Sugawara, Kozô Tokkan

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"Je voulais faire un film sur un enfant. Un film qui commence avec un enfant et se ter-mine avec un homme. A l'origine le film devait être gai mais il changea pendant le tour-nage. A la fin il était très sombre et triste. Comme la compagnie ne s'attendait pas à unfilm de ce genre elle a maissé passer deux mois avant de le sortir. Pendant le tournage dece film je décidai de ne jamais utiliser de fondu et de terminer chaque scène " cut ". Jen'ai jamais utilisé de fondu depuis n'est-ce pas ? Le fondu n'est pas un élément de la "grammaire cinématographique " mais simplement une propriété de la caméra." Ozu

Les enfants d'un employé de bureau entament une grève de la faim le jour où ils découvrent queleur père se conduit en véritable laquais devant son patron afin d'être bien vu.De nombreux films américains importés à cette époque au Japon avaient l'enfance pour sujet :Tom Sawyer (de John Cromwell), Skippy, Sooky et Forbidden Aventure (de Norman Taurog),Aventures of Huckleberry finn (de Richard Thorpe). Les producteurs de la Shôchiku tenaient doncà réaliser un film dans la même veine. Mais le scénario de Akira Fushimi proposa quelque chosede plus qu'une simple variante locale. Pour Ozu, c'est le film de la maturité. Il adopte le point devue des enfants sur le monde. Le film muet le plus célèbre et le plus personnel d'Ozu.

GGoosssseess ddee TTôôkkyyôô

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Horino, riche étudiant hérite de l'entreprise familiale à la mort de son père. Il embauche ses troisamis d'université mais leurs rapports vont se dégrader à cause d'une histoire d'amour.Ce film a été tourné dans la précipitation et ne doit son existence que pour justifier un budgetqui devait servir à terminer le précédent - Jusqu'au jour de notre rencontre -sur lequel Ozu,embarrassé, avait dépassé le budget. En conséquence Ozu et Noda travaillèrent à l'économie,allant jusqu'à récupérer des scènes des films précédents : supporters, tricherie, posters de filmsétrangers, etc.Noda base son scénario sur la célèbre pièce de théâtre Alt Heidelberg de Wilhelm Meyer-Foerster(1901), qu'Ernest Lubitsch avait porté à l'écran cinq ans plus tôt sous le titre Le Prince Etudiant .La pièce avait été un triomphe à Tôkyô. Le personnage du prince étudiant est remplacé par celuid'un jeune président de société (Ureo Egawa).

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OOùù ssoonntt mmeess rrêêvveess ddee jjeeuunneessssee ??1932 - 1h30- N&B - Studios Shôchiku Kamata Scénario Kôgo NodaAvec Ureo Egawa, Kinuyo Tanaka, Tatsuo Saitô, Haruko Takeda

"Le tournage de Gosses de Tôkyô fut interrompu temporairement parce que l'enfant avaiten un accident. Aussi nous tournâmes rapidement celui-là dans l'intervalle. Une histoiremélodramatique […]. A cette époque je tournais quatre ou cinq films par an et n'avais pasle sentiment d'être occupé. Mais aujourd'hui un film me donne l'impression que je ne suispas très libre." Ozu

Million Dollar Legs / Folies olympiques - Edward F.Cline (1932)

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Une jeune dactylo fait tout pour que son frère étudiant, qui loge chez elle, ne sache jamais qu'enplus de son travail, elle se prostitue le soir pour lui payer ses études.Ce film ne serait pas inspiré, en fait, de " 26Hours " d'Ernst Schwarz. Dans un interview, Ozu adéclaré que son réalisateur préféré était Ernst Lubittsch, et son film préféré The Man I Killed. Dansson film , il utilise un extrait de If I Had a Million (Si j'avais un million, 1932).

UUnnee ffeemmmmee ddee TTôôkkyyôô

1933 - 47min - N&B Studios Shôchiku KamataScénario Kôgo Noda et Tadao Ikeda d'après " 26 Hours " d'Ernst Schwarz (c'est un nom qu'Ozu et Noda ont inventé à partir des noms de Ernst Lubitsch et Hans Schwarz.)Avec Yoshiko Okada, Ureo Egawa, Kinuyo Tanaka, Shinyo Nara

"Ce fut rapide, huit jours. Nous commençâmes à tourner avant d'avoir fini le scénario.C'est l'histoire d'une fille qui travaille dans une compagnie pendant la journée et dans unbar mal famé la nuit. Nous avons inventé l'histoire en regardant danser les filles de bar. Lenom étranger de l'auteur de l'œuvre originale est une pure invention. Le film fut finale-ment très concis et dense. La composition des scènes commençait à porter ma marque."Ozu

If I Had a Million / Si j’avais un million - Ernst Lubitsch (1932)

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Secrétaire le jour, Tokiko retrouve le soir le gang de voyous dirigé par son amant Jôji. Elle va ten-ter de le remettre dans le droit chemin. Histoire sentimentale dans la veine hollywoodienne* etfilm très sophistiqué.En 1933, l'actualité est riche en faits divers. Le livre de Yoichi Nakagawa, Une fleur élégante(Rotaki hana), qui décrit des gangsters au grand coeur, est le best-seller de l'année. Entre 1930 et1933 Little Caesar, Public enemy et Scarface sont sortis au Japon et ont rencontré un grand suc-cès populaire. Par ailleurs, Ozu a vu plusieurs fois Underworld (1927) et (1932) de Josephe VonSternberg. Les producteurs de la Shôchiku attendent donc d'Ozu qu'il réalise un film à la modeoccidentale sur un sujet en vogue.

* Underworld / Les nuits de Chicago (Josef von Sternberg, 1927), Little Caesar (Mervyn LeRoy, 1931), ThePublic Enemy (William A.Welman, 1931), Scarface (Howard Hawks, 1932), The Champ (King Vidor, 1931),All Quiet on the Western Front / A l'Ouest rien de nouveau (Lewis Milestone, 1930)

FFeemmmmeess eett vvooyyoouuss1933 - 1h40 - N&B - Studios Shôchiku Kamata Scénario Tadao Ikeda d'après une histoire de James MakiAvec Kinuyo Tanaka, Jôji Okada, Sumiko Mizukubo, Hideo Mitsui

"Je n'avais pas dirigé une histoire de délinquance juvénile depuis Va d'un pas léger , unmélodrame." Ozu

Scarface / Scarface - Howard Haw (1932)

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Un homme doit élever seul son fils. Sa rencontre avec une femme plus jeune que lui provoque lajalousie du fils. Un de premiers films d'Ozu sur l'évolution de la famille.Dans L'Art d'Ozu,Tadao Satô affirme que le modèle de ce film est The Kid (Charlie Chaplin, 1921).Ce qui est contredit dans Les oeuvres d'Ozu et le cinéma étranger de Kikuo Yamamoto. Ce filmserait inspiré de The Champ de King Vidor (1931) sorti au Japon en 1932. Ozu décrit l'effondre-ment de la famille dans un contexte de crise. Depuis toujours, il était fortement influencé par lecinéma américain américain des années 20.

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1933 - 1h40 - N&B - Studios Shôchiku KamataScénario Tadao Ikeda d'après une histoire de James MakiAvec Takeshi Sakamoto, Nobuko Fushimi, Den Ohinata, Kyôko Iida, Kozô Tokkan

"J'ai été élevé à Fukugawa. Parmi les gens qui nous rendaient visite il y avait un type insou-ciant et décontracté. Il est le modèle de Kihachi, le personnage principal. Ikeda, scénaris-te, qui habitait Okachimachi le connaissait également. Aussi avons-nous créé ensemble lepersonnage. Il y a une scène où le fils revient chez lui de l'école après avoir été taquinépar ses camarades parce que son père a une maîtresse. Dans un accès de colère il arracheles feuilles des précieux bonsaï de son père. Le père revient tout joyeux de chez sa maî-tresse et découvre ses arbres abîmés. Il frappe son fils mais celui-ci le frappe en retour. Lepère se rend soudain compte de la situation et reste immobile et silencieux. Le fils cessede le frapper, le regarde fixement et commence à pleurer. Si une copie existe encore, j'ai-merais revoir cette scène." Ozu

The Champ / Le Champion - King Vidor (1931)

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Après la mort subite de son mari, une femme doit s'occuper seule de ses deux fils. Huit annéesplus tard, les deux frères découvrent qu'ils sont en fait juste demi-frères.

LL''aammoouurr dd''uunnee mmèèrree1934 - 1h12 - N&B - Studios Shôchiku Kamata Scénario Tadao Ikeda d'après une histoire de Shûtarô Komiya (Ozu) adaptée par Kôgo NodaAvec Iwata Yûkichi, Mitsuko Yoshikawa, Den Ohinata, Seiichi Katô

"Le scénario aurait dû être davantage travaillé. L'intrigue principale tourne autour de lachute d'un grand immeuble. Ce pourrait être un bon thème aujourd'hui mais à cetteépoque, ce n'était pas suffisant. Aussi ai-je ajouté l'histoire de deux frères qui ont desmères différentes - leurs rapports deviennent désastreux. Mais parce que j'avais ajoutécette histoire le film devint ennuyeux. Je m'en souviens bien parce que mon père mourutpendant le tournage." Ozu

Poil de Carotte / Poil de Carotte - Julien Duvivier (1932)

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Une troupe d'acteurs ambulants arrive dans une petite ville de province. Son chef, Kihachi y retro-uve une ancienne maîtresse, Otaka qui a eu un fils de lui. Ignorant tout de son père et le suppo-sant mort, le fils accepte la venue de cet homme qu'il considère comme son oncle.

Ozu avait vu plusieurs fois The stranger returns (1933), de King Vidor qui eut un impact importantsur sa maturation artistique. Ce film plutôt mélodramatique est inspiré de The Barker de GeorgeFitzmaurice (1928). La scène de dispute entre Kihachi et son fils Shinkichi est empruntée auroman Le retour du père (Chichi kaeru) de Kan Kikuchi.Ozu décide de tourner ce film pour deux raisons. Premièrement, il s'agit de faire un film dont l'ac-tion se déroule hors de Tôkyô (" lieu d'exil" pour Ozu). Deuxièmement, il s'agit d'utiliser des kimo-nos, une première dans l'univers filmique d'Ozu.A l'évidence, Ozu veut recentrer sa thématique surdes éléments plus personnels : les liens familiaux et la tradition japonaise, le théâtre populaire etle vêtement traditionnel. C'est un des films qu'Ozu préférait, d'où son remake en couleurs en 1959.

HHiissttooiirree dd''hheerrbbeess fflloottttaanntteess

1934 - 1h26 - 35mm - N&B- Studios Shôchiku KamataScénario Tadao Ikeda d'après une histoire de James MakiAvec Takeshi Sakamoto, Chôko Iida, Hideo Mitsui, Rieko Yagumo, Kozô Tokkan

"Le résultat fut plutôt bon. Ce que les gens appellent les " films Kihachi " (le premier futCœur capricieux) n'est pas vraiment une série mais concerne des personnages qui res-semblent tous à Kihachi. Autour de moi tout le monde faisait des films parlants mais jeréalisais toujours des films muets. En 1932, 1933 et 1934 mes films avaient gagné le prixdu meilleur film attribué par "Kinema Junpô", mais l'année suivante en 1935, je n'étaismême pas dans les dix premiers." Ozu

The Barker / The Barker - George Fitzmaurice (1928)

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Accompagné de ses deux fils, un homme erre dans la banlieue industrielle de Tôkyô àla recherche d'un emploi. Il commettra un vol pour secourir une femme dans le besoin.

UUnnee aauubbeerrggee àà TTôôkkyyôô1935 - 1h20 - N&B- Studios Shôchiku KamataOeuvre originale Uinzato Mone (pseudonyme créé par Ozu qui doit se prononcer presque comme"without money") / Adaptation Tadao Ikeda/Masao ArataAvec Takeshi Sakamoto, Kozô Tokkan, Takayuki Suematsu, Yoshiko Okada

"Pendant cette année-là, j'ai fait un documentaire sur le Kagamijishi dont la vedette étaitKikugorô VI. Etant donné la tendance de l'époque je ne pouvais pas éviter d'adopter lestechniques du parlant pour ce film muet. Par exemple, j'ai osé insérer les sous-titres dudialogue de A dans le gros-plan de B pendant qu'il écoute A. Ozu“ ”

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Projet culturel à but diplomatique dont la production est confiée aux studios de laShôchiku. Comme Ozu connaissait déjà Kikugorô, c'est naturellement vers lui que setournèrent ses producteurs pour lui confier ce film de commande. En 1936, ce docu-mentaire a été projeté en avant-première dans la salle du théâtre de l'Hôtel impérial.Ozu dut suspendre le tournage d'Une auberge à Tôkyô pour réaliser ce film dans dedifficiles conditions : il tourna en 1935 la partie scénique et il lui fallut attendre l'an-née suivante pour filmer la partie loge. Ce documentaire ne fut jamais projeté en sallecar on avait reproché à Ozu sa manière trop artificielle de présenter le Oyama (l'ac-teur de kabuki qui interprète des rôles féminins). En tout cas, Ozu en tira des leçonssur les questions d'interprétation dans la mise en scène.

LLaa ddaannssee dduu LLiioonn

1935 - 19min - N&B - Studios Shôchiku KamataAvec Kikugorô Onoe VI - Chanté et raconté par Wafu Matsunaga - Shamisen parIzaburo Kashima, Tambour japonais par Tazaemon Mochizuki - Avec le soutien deInternational Culture Promotion Association (Kokusai Bunka Shinkô-kai fondée en 1934)

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En janvier 1988, le critique Sadao Yamane reçoit unappel d'un ami. C'est un collectionneur de films quilui annonce qu'il vient de faire l'acquisition d'unecopie du Galopin. Sans perdre une seconde, Yamaneprend sa voiture et se rend en pleine nuit chez sonami. Il s'agit bien d'une copie du Galopin. Elle n'estpas en 35 mm mais en format Pathé Baby 9,5mm,une version miniature (la pellicule est deux foismoins longue que l'original) qui était en vente dansles années 20 et à usage familial. Cette copie sembles'être retrouvée par hasard au milieu d'une transac-tion entre collectionneurs.

Le galopin est un court-métrage dans le genre comédie. C'est l'histoired'un garçon rusé et de ses deux ravisseurs à qui il va rendre la vie impos-sible. Ce film était déjà une œuvre mythique d'Ozu à l'époque du muet.Sa redécouverte sera l'événement de l'année 1988 dans le monde ciné-matograhique japonais. Depuis lors, d'autres films japonais considéréscomme définitivement perdus ont été retrouvés dans le même formatPathé Baby. Combats amicaux à la japonaise (Wasei kenka tomodachi), unautre film d'Ozu été retrouvé dans ce même format chez un habitant deNiigata en 1997. Ces deux films figurent bien dans le catalogue de Pathéde l'époque. Après la découverte du Galopin, c'est comme si les prièresdes fans d'Ozu avait été entendues quand fut découvert Combats ami-caux à la japonaise. Par la suite, le Musée National d'Art Moderne deTôkyô s'est chargé de "gonfler" ces deux films miniatures en format 35mm.

Mais qui est Tokkan Kozô ?Au début, ce n'était qu'un petit garçon qui venait s'amuser dans les mursdes studios Shôchiku à Kamata, au milieu de l'agitation des équipes detournage. Et un jour, Ozu l'a remarqué qui l'a fait jouer dans La vie d'unemployé de bureau. C'est alors que l'enfant acteur malgré lui attire l'at-tention du public, à telle enseigne qu'Ozu décide de le faire jouer dansson film suivant, Le galopin. Le titre du film (Tokkan Kozô / le galopin)finit même par devenir son nom d'acteur. Ceux qui ont vu Gosses deTôkyô n'ont jamais oublié son rôle comique de petit frère à l'humeurmauvaise. Dans son roman à caractère autobiographique qu'il écrira à lafin de sa vie, l'acteur confesse qu'il était encore plus bagarreur dans laréalité que dans les films. Aoki a été l'acteur enfant vedette de laShôchiku, jouant avec les grands réalisateurs Yasujirô Ozu, HeinosukeGosho, Hiroshi Shimizu et Mikio Naruse, jusqu'à son envoi au front en1942.

Tokkan Kozô, de son vrai nom Tomio Aoki a été mobilisé aux Palaos dansle Pacifique. Il a bien failli ne jamais rentrer du front. Il y réussit presquepar miracle. Il réapparaîtra sur les écrans en 1955 avec la renaissance desstudios Nikkatsu qui ne fonctionnaient plus depuis la guerre ayant étéfusionné avec d'autres studios. Jusqu'en 1971, date de ses difficultésfinancières qui l'obligeront à produire en masse des films érotiques, laNikkatsu va produire des films d'actions dont le succès sera garanti parses deux immenses acteurs : Yûjirô Ishihara et Akira Kobayashi. C'estdans cet univers jeune et trépidant qu'Aoki fera une seconde carrière entant qu'excellent second rôle de petit voyou.

La logique aurait voulu que l'acteur Aoki termine ainsi sa carrière sansfanfare avec des apparitions de plus en plus furtives à l'écran. Il n'en futpourtant rien. Aoki est un homme de cinéma heureux. Après une longuecarrière dédiée aux films d'action, il est revenu au cinéma grâce àMakoto Shinozaki qui lui a donné un rôle dans Okaeri (1996) puis dansCeux que l'on ne peut oublier / Wasurerarenu hitobito (2000). Dans cesecond film, Aoki joue le rôle d'un vieillard qui se venge avec deux de sescamarades d'une entreprise véreuse qui tente d'abuser de la crédulité devieilles personnes. Les trois vieillards du film se posent en pourfendeurde la société de l'après-guerre devenue riche en apparence. Shinozaki n'apas oublié non plus de faire passer dans son film le terrible sentiment dedésespoir d'Aoki marqué par l'expérience de la guerre. Ce film a été l'uniquepremier rôle d'Aoki dans sa longue carrière. Le festival des TroisContinents à Nantes lui a décerné le prix du meilleur acteur. Le 24 jan-vier 2004, Aoki est mort avant la sortie de son dernier film : Inu to aru-keba - Chirori to Tamura (Walking with the dog, 2004), toujours réalisé parMakoto Shinozaki.Le jour de sa mort, nous étions à la veille de la clôture de la rétrospecti-ve d'Ozu du National Film Center " Art de Yasujiro Ozu " qui avait étéorganisée à l'occasion du centenaire du grand maître.Nous avons alors décidé de rendre hommage à Aoki en projetant Le galo-pin à la suite de Voyage à Tôkyô qui était programmé en clôture de larétrospective, le 25 janvier. En effet, il nous a semblé important detémoigner notre respect à cet homme qui a consacré 70 ans de sa vie aucinéma, comme s'il avait voulu préserver la mémoire d'Ozu à travers letemps.Si la pellicule du Galopin n'avait jamais été retrouvée, Tomio Aoki neserait sans doute jamais revenu au premier plan à la fin de sa vie. C'estgrâce à lui et à son jeu que nous parvenons aujourd'hui à remonter letemps à la rencontre d'Ozu.

l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l l

* Conservateur au National Film Center [Musée d'Art Moderne de Tôkyô]

Qui êtes-vous, Tokkan Kozô ? par Hidenori Okada*

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Otsuné, ouvrière, donne tout pour que son fils unique puisse profiter d'une bonne éducation àTôkyô. Dix ans plus tard, elle rend visite à son fils à Tôkyô, croyant qu'il a réussi dans la vie.

UUnn ffiillss uunniiqquuee

1936 - 1h43 - N&B - Studios Shôchiku Ôfuna Idée originale de Maki James / Scénario Tadao Ikeda/Masao ArataAvec Chôko Iida, Shinichi Himori, Tadao Hayama, Yoshiko Tsubouchi

"C'est mon premier film parlant. J'ai réécrit un scénario antérieur Tôkyô est un endroitagréable (Tôkyô Yoitoko/1936) - en fait j'avais commencé à le tourner mais je ne me sou-viens plus - et je l'ai transformé en film parlant. En général on considère qu'il a été réali-sé au studio Ôfuna mais vous devez vous rappeler que ce film parlant fut tourné avec laméthode "Shigehara"* [Chef opérateur d'Ozu] si bien que je pouvais utiliser le studioÔfuna. Je travaillais dans un studio vide mais les trains étaient si bruyants que je ne pou-vais pas travailler dans la journée. Chaque nuit, je tournais cinq plans entre minuit et cinqheures du matin. Ça me plaisait vraiment. Mais parce que je ne pouvais pas me débarras-ser de l'atmosphère et du style des films muets, j'étais un peu perdu. Bien que je com-prenne parfaitement que tout est différent dans un film parlant, le film avait le style dumuet. A un moment j'ai même eu le sentiment d'avoir été distancé par les autres met-teurs en scène. Mais maintenant je me rends compte que m'être concentré sur le cinémamuet m'aide aujourd'hui dans mon travail." Ozu

* "Mon chef-opérateur Shigehara travaillait sur son propre système parlant, et je lui pro-mis de l'utiliser quand il serait au point. C'est pourquoi je ne me suis pas servi du systè-me Tsuchihashi qui était adopté par le studio Kamata.)"

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Un docteur dominé par une femme à poigne décide de se révolter contre elle en fré-quentant une fille moderne. Ozu renoue avec la comédie légère dans ce film à laLubitsch. Ozu avait toujours planté ses décors dans les quartiers populaires. Cettefois-ci, il choisit un quartier de la banlieue résidentielle où les habitants ont un modede vie occidentalisé. Dans le générique, les acteurs sont indiqués par rapport à l'en-droit où ils habitent, et non avec leur nom de rôle. (Docteur à Kôjimachi, directeur àUshigome, veuve à Denenchôfu, etc.) De cette manière, Ozu définit le niveau social etl'atmosphère de son film.

QQuu''eesstt--ccee qquuee llaa ddaammee aa oouubblliiéé ?? 1937 - 1h13 - N&B - Studios Shôchiku ÔfunaScénario Akira Fushimi/Maki JamesAvec Sumiko Kurishima, Tatsuo Saitô, Michiko Kuwano, Shûji Sano

"L'une des caractéristiques de ce film, c'est que j'ai déplacé le cadre de l'action de la villevers un quartier chic. A cette époque j'avais déménagé de Fukagawa (en ville) à Takanawa(en banlieue) mais cela n'avait rien à voir avec le film. Je me suis rendu compte que trèspeu de réalisateurs avaient travaillé sur la vie des gens de ces quartiers résidentiels, bienque beaucoup d'entre eux aient mis en scène des films sur la ville et la banlieue - et conti-nuent à le faire." Ozu

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Après la mort de son époux, une femme et sa fille sont accueillies avec froideur dans le foyer dufils marié. Le thème de ce film annonce Le voyage à Tôkyô. Ce fut aussi fut le premier grand suc-cès d'Ozu au box office. Sans doute inspiré d'Over The Hill d'Henry King (1931).

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1941 - 1h45 - N&B - Studios Shôchiku ÔfunaScénario Tadao Ikeda, Yasujirô OzuAvec Hideo Fujino, Fumiko Katsuragi, Mitsuko Yoshikawa

"L'atmosphère de la famille dans ce film est très semblable à celle du film que je tourneen ce moment. J'ai donc soigneusement accentué le thème de l'affection maternelle. Lacompagnie m'a pressé sur ce film. Ils me disaient " Il ne sera pas prêt pour la première sivous ne terminez pas aujourd'hui ". Il me restait deux heures aussi n'ai-je pu éviter detourner des plans longs. Cela me gêne toujours de devoir expédier mon travail maisbeaucoup de gens ne voient pas la différence. Tout film que je prends plaisir à tourner,que le produit fini soit réussi ou non, est l'un de mes favoris. En ce sens j'aime beaucoupLes Frères et Soeurs Toda. Shin Saburi et Mieko Takamine étaient de nouveaux comédienspour moi. C'était un choix parfait à l'époque et c'est la raison pour laquelle les cinémasétaient pleins, malgré l'avis général que les films d'Ozu ne sont jamais de grands succèscommerciaux. Ensuite, les spectateurs ont commencé à venir voir mes films. Mais pen-dant longtemps je ferai des films qu'ils ne viendront pas voir." Ozu

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Lors d'un voyage scolaire, un professeur voit l'un de ses élèves se noyer accidentellement.Se sentant responsable, il démissionne et envoie son fils en pension en espérant qu'il réussira savie mieux que lui. Les années passent, l'enfant grandit loin de son père…

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1942 - 1h27 - N&B - Studios Shôchiku Ôfuna Scénario Tadao Ikeda, Takao Yanai, Yasujirô OzuAvec Chishû Ryû, Shûji Sano, Haruhiko Tsuda, Saburi Shin

"J'ai écrit et réécrit ce scénario. Et il aurait dû être encore amélioré. Avec le temps beau-coup de films deviennent artificiels. Ryû était excellent - comme il l'a toujours étédepuis son rôle comique du père dans Le fils unique. J'aimerais revoir Tsuda - le garçonqui jouait le fils." Ozu“ ”

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Dans les faubourgs de Tôkyô dévastés par la guerre, une veuve irascible est contrainte de s'occu-per d'un enfant abandonné. Elle le déteste et fait tout pour le perdre. Pourtant, peu à peu, elles'attache à l'enfant.Pour son premier film d'après-guerre, Ozu traite avec distance une histoire réaliste, et perturbeles spectateurs de l'époque éprouvés par la destruction du pays. Ce film lorgne plus vers ses filmsd'avant-guerre que le suivant, Printemps tardif. Les scènes entre la femme et le garçon évoquentplus les grands moments des films d'Harry Langdon ou de Chaplin - tradition américaine - que lepropre style qu'Ozu avait élaboré au cours de ses 39 films précédents.

RRéécciitt dd''uunn pprroopprriiééttaaiirree

1947 - 1h12 - 35mm - NB - Studios Shôchiku ÔfunaScénario Tadao Ikeda,Yasujirô OzuAvec Chôko Iida, Aoki Hôhi, Eitarô Ozawa, Mitsuko Yoshikawa

"A mon retour de Singapour [reporter puis prisonnier de guerre], j'étais épuisé mais lacompagnie voulait faire un film immédiatement. J'ai terminé le scénario en dix jours.Personne ne pensait que je pouvais travailler si vite ; je leur ai dit que c'était la premièreet la dernière fois et que je n'écrirais plus jamais avec une telle hâte. J'avais vu beaucoupde films étrangers à Singapour et certains pensaient que leur influence m'aurait changé.Mais regardez Récit d'un propriétaire : rien n'a changé, c'est la même chose qu'auparavant.Certains disent qu'Ozu est vraiment un busard obstiné." Ozu

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Dans l'immédiat après-guerre, une femme est contrainte de se prostituer pour payer les fraisd'hospitalisation de son enfant. Elle ne peut cacher son secret à son mari lorsqu'il rentre du front.

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1948 - 1h30 - N&B - Studios Shôchiku ÔfunaScénario Ryôsuke Saitô, Yasujirô Ozu Avec Shûji Sano, Kinuyo Tanaka, Chieko Murata, Chishû Ryû, Takeshi Sakamoto

"Parmi mes films il y a certainement plus d'un échec. Pourtant ces films me plaisent d'unecertaine façon. Mais ce film n'était pas un bon échec." Ozu“ ”

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Noriko a vingt ans et vit heureuse aux côtés de son père à Kamakura. Elle à le quitter pour semarier. Afin de l'inciter à accepter un prétendant, son père lui fait croire qu'il va se remarier.Alors qu'elle finit toutefois par accepter le mariage, père et fille décident de faire un derniervoyage ensemble.Ce film est le premier film avec le style d'Ozu si reconnaissable dans sa dernière période. ChishûRyû et Setsuko Hara deviennent les acteurs fétiches des derniers films d'Ozu dont le style nechangera plus désormais.Ozu y souligne l'environnement japonais en faisant usage des kimonos, la cérémonie du thé et lethéâtre Nô. En même temps les accessoires comme les signalétiques en anglais ou les publicitésde Coca-cola, signe de l'occupation américaine du pays, contraste avec ces éléments et servent àles rendre plus beaux, comme dans un écrin.

PPrriinntteemmppss ttaarrddiiff1949 - 1h48 - N&B - Studios Shôchiku ÔfunaOeuvre originale " Père et Fille " de Kazuo Hirotsu / Scénario Kôgo Noda,Yasujirô Ozu Avec Chishû Ryû, Setsuko Hara, Yumeji Tsukioka, Haruko Sugimura, Hôhi Aoki

"J'ai écrit le scénario avec Kôgo Noda après une longue période de séparation depuisUne jeune fille pure (1935). Lorsqu'un réalisateur travaille avec un scénariste, ils doiventavoir des caractéristiques et des habitudes communes : sinon ils ne peuvent pas s'en-tendre. Ma vie quotidienne - l'heure où je me lève, combien de saké je bois, etc. - estpresque en total accord avec celles de Noda et Saitô. Lorsque je travaille avec Noda,nous collaborons jusqu'aux plus infimes détails des costumes et des décors, les imagesqu'il se fait d'eux sont toujours en accord avec les miennes : nos idées ne se contredi-sent jamais. Nous sommes même d'accord si un dialogue doit se terminer par wa ouyo*. Bien sûr, nous avons parfois une différence d'opinion. Et nous n'arrivons pas facile-ment à un compromis car nous sommes têtus tous les deux." Ozu

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Setsuko est malheureuse avec son mari alcoolique. Hiroshi, l'homme qu 'elle aimait autrefois, estde retour au Japon après un séjour en France. Mariko, la sœur de Setsuko, tente de les rapprocher…

LLeess ssœœuurrss MMuunneekkaattaa1950 - 1h42 - N&B- Shintôhô Production Hideo Koi,Hiroshi Higo / Oeuvre originale Jirô Osaragi / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Kinuyo Tanaka, Hideko Takamine, Ken Uehara, Chishû Ryû

"Jirô Osagari, l'auteur du roman original, m'a dit : " c'est votre version des SœursMunekata ". Mais en fait ce fut facile d'adapter ce roman au cinéma. Et avec l'aide demes vieux amis, j'ai pris du plaisir à travailler pour la première fois aux studios Shintôhô.Pour être sincère j'ai du mal à faire un film à partir d'un roman de valeur. Cela veut direque vous êtes obligé de transposer l'imaginaire de son auteur et de choisir ensuite unacteur connu qui s'accorde avec cette transposition. Deux choses très difficiles. Lorsquej'écris un scénario, j'ai toujours en tête le talent et les caractéristiques des acteurs. C'estmieux pour eux. Dans le passé je me suis servi de nouveaux visages et d'acteurs inexpé-rimentés bien que je fusse conscient des difficultés que cela représentait. Mais je n'aiplus ce courage. Fondamentalement le meilleur acteur est celui qui a une forte person-nalité et le pire est l'homme de peu de talent qui pense en avoir beaucoup. Lorsque jerencontre un acteur de grande valeur, j'écris un scénario et crée un rôle pour lui." Ozu

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S'opposant ouvertement aux souhaits de sa famille, une jeune femme décide de choisirelle-même son mari.

EEttéé pprrééccooccee1951 - 2h04 - N&B - Shôchiku ÔfunaProduction Takeshi Yamamoto / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Setsuko Hara, Chishû Ryû, Chikage Awashima, Kuniko Miyake, Ichirô Sugai

"Dans ce film je désirais peindre le cycle de la vie ou l'inconstance plutôt que l'action elle-même. Je n'ai jamais autant travaillé de ma vie. Certains disent que les enfants dans cefilm sont grossiers et violents, mais j'ai le sentiment que cela changera quand ils vieilli-ront. Je n'ai pas trop développé l'intrigue, ce qui donne au public à la fin un arrière-goûtpoignant. Setsuko Hara est vraiment une bonne actrice. J'aimerais en avoir quatre ou cinqcomme elle." Ozu

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Un homme et sa femme plus jeune forment un couple qui paraît mal assorti. Ils réalisent pour-tant que leur union est stable et qu'ils ont fini par s'apprécier mutuellement. Un film empreintd'optimisme sur le thème du mariage arrangé.

LLee ggooûûtt dduu rriizz aauu tthhéé vveerrtt

1952 - 1h45 - N&B - Shôchiku ÔfunaProduction Takeshi Yamamoto / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Saburi shin, Michiyo Kogure, Kôji Tsuruta, Chishû Ryû, Chikage Awashima

"J'ai pris ce scénario dans le tiroir où il était depuis que l'Armée l'avait censuré car il n'yavait aucune raison pour qu'il y reste. Dans la version originale, le personnage principalpart pour la guerre. Mais parce que les temps avaient changé je l'ai réécrit pour qu'il partevers l'Amérique du Sud. Mais cela a affaibli le développement dramatique. Je voulais sim-plement révéler certains traits d'un homme vus par les yeux d'une femme, comme saprestance ou son bon goût. Mais ce film n'était pas bien réalisé." Ozu

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Un vieux couple se fait une joie de rendre visite à ses enfants à Tôkyô. Surmenés et préoccupéspar leurs seuls problèmes, ces derniers les reçoivent avec froideur et indifférence. Le plus connudes chefs-d'œuvre d'Ozu.

VVooyyaaggee àà TTôôkkyyôô 1953 - 2h16 - N&B - Studios Shôchiku OfunaProduction Takeshi Yamamoto / Scénario Kôgo Noda, Yashujiro OzuAvec Chishû Ryû, Chieko Higashiyama, Setsuko Hara, Haruko Sugimura

"A travers l'évolution des parents et des enfants j'ai décrit comment le système familialjaponais a commencé à se désintégrer. C'est l'un de mes films les plus mélodramatique.""L'homme que je veux exprimer est un homme qui se dirige toujours vers le soleil et quis'approche pas à pas de la clarté."En réaction au réalisme qui a envahi le cinéma japonais de cette époque, Ozu alors enpleine rédaction du scénario de Voyage à Tôkyô fera cette élèbre déclaration à un journa-liste : " Tout le monde sait que la merde pue. Il n'est donc pas nécessaire d'expliquer augens quelque chose qu'ils savent déjà - que la merde, ça pue - en leur faisant payer enplus ! Je pense que le temps est venu de mettre un couvercle sur les choses qui puent. "De cette époque date aussi une autre déclaration mémorable, la "déclaration du mar-chand de tôfu" qui connaîtra de nombreuses variations dans les entretiens ultérieurs :"Mettons que je sois un fabricant de tôfu. Vous me demandez ce que je vais faire la pro-chaine fois. Que voulez-vous que je vous réponde sinon que je ne pourrai pas fairequelque chose qui ne soit pas en rapport avec ce que je fabrique, c'est-à-dire le tôfu : jeferai peut-être du tôfu frit dans l'huile ou bien une salade au tôfu. En tout cas, ne vousattendez pas à ce que je vous fasse du porc pâné !" Ozu

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En raison d'une aventure avec une secrétaire, un jeune employé de bureau se querelle avec safemme et accepte d'être muté loin de chez lui.

PPrriinntteemmppss pprrééccooccee 1956 - 2h24 - N&B- Studios Shôchiku ÔfunaProduction Shizuo Yamanouchi / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Chikage Awashima, Ryô Ikebe, Keiko Kishi, Chishû Ryû

"Bien que je n'aie pas traité de l'histoire d'un employé de bureau depuis longtemps, jevoulais faire le portrait d'un employé - son bonheur de réussir un examen et de devenirun membre de la société. L'espoir qu'il avait dans l'avenir en obtenant son poste s'est pro-gressivement dissous et il se rend compte que, tout en ayant travaillé des années il n'arien accompli dont il vaille la peine de parler. En retraçant sa vie sur une certaine périodede temps je voulais peindre ce que l'on pourrait appeler le pathétique d'une vie d'em-ployé. C'est le plus long de mes films d'après-guerre. J'ai essayé d'éviter tout ce qui seraitdramatique et de n'accumuler que des scènes ordinaires de la vie quotidienne dansl'espoir que le public ressentirait la tristesse de ce genre de vie.""Les gens disent que je fais toujours les mêmes films. Mais moi, je me considère commeun fabricant de tôfu. Je sais faire du tôfu grillé, du tôfu en friture ou de la salade au tôfuet rien d'autre. Quelle idée de demander à un fabricant de tôfu de de faire du ragoût oudu porc pâné !" Ozu

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Takako vient de quitter son mari pour aller vivre avec son père et sa jeune soeur Akiko. Les soeursdécouvrent que leur mère, qu'elles croyaient morte, vit en fait avec un homme à quelques enca-blures de là et tient un salon de Mah-jong.Après avoir réalisé Printemps précoce, Ozu décide de tourner un scénario écrit plus de vingt ansauparavant. Celui-ci avait fait l'objet d'un film réalisé par Tomu Uchida en 1937 intitulé L'avancéeéternelle (Kagirinaki zenshin). Ce film d'Uchida eut un grand succès critique, mais il était en réali-té très éloigné des intentions d'Ozu ce qui incitera ce dernier à le refilmer.Ce film est sûrement le plus sombre d'Ozu. La famille dont il nous fait la description est caracté-risée par l'absence d'un de ses membres et annonce les films ultérieurs.

CCrrééppuussccuullee àà TTôôkkyyôô1957 - 2h21 - N&B - Studios Shôchiku ÔfunaProjet Shizuo Yamanouchi Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Setsuko Hara, Inako Arima, Chishû Ryû, Isuzu Yamada, Teiji Yamada

"Beaucoup de gens disent que ce film est centré sur la conduite libre de la jeune fille. Maisje pense que j'ai davantage mis l'accent sur l'ancienne génération, c'est-à-dire la vie deRyû : comment un homme qui a été abandonné par sa femme continue de vivre. Je vou-lais que la nouvelle génération mette en relief l'ancienne. Mais, curieusement, la plupartdes gens ont concentré leur attention sur ce que j'avais ajouté." Ozu

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Les formats Pathé Baby étaient destinés à l'usage familial; ils sont l'ancêtre de la vidéo. Mais vu leurpetit format, les distributeurs étaient obligés de faire des versions raccourcies des films originaux. Ici,Ozu s'inspire des comédies américaines et montrent des amis se battant pour avoir les faveurs d'unefille. Les films japonais abordant ce thème étaient toujours sombres ou mélancoliques. Ozu décide dereprendre ce thème à l'américaine, sur le ton de la comédie et avec gags à la clé..

1929 - 15mn (longueur originale 1h15mn) - N&B Studios Shôchiku KamataFilm retrouvé en 1997 en format 9.5mm (format Pathé Baby) dans une version remontée et réduite à 15mn.

CCoommbbaattss aammiiccaauuxx àà llaa jjaappoonnaaiissee

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Un père s'oppose fermement au mariage de sa fille avec un jeune homme qu'il n'a pas choisi pourelle. Toutes les femmes de son entourage vont tenter de le faire changer d'avis.Les producteurs qui ont réuni pour ce film trois des plus belles actrices du moment (InekoArima,Yoshiko Kuga, Fujiko Yamamoto) exigent d'Ozu qu'il passe pour l'occasion à la couleur . Ozun'avait renoncé au muet que cinq ans après le premier parlant japonais (Madame et épouse, deHeinosuke Gosho, 1931). De même, il n'a renoncé au noir et blanc que sept ans après le premierfilm en couleurs japonais (Carmen retourne au pays, de Keisuke Kinoshita, 1951). A l'issue de plu-sieurs tests minitieux, Ozu par choisir le système Agfacolor pour son meilleur rendu du rouge, lacouleur qu'il préfère. La Daiei prête à la Shôchiku son actrice vedette Fujiko Yamamoto. En échan-ge, Ozu devra tourner un film pour cette société : ce sera Herbes flottantes.

FFlleeuurr dd''ééqquuiinnooxxee1958 - 1h58 - Shôchiku OfunaOeuvre originale par Ton Satomi dans le magasine Bungei ShunjûScénario Kôgo Noda, Yasujirô Ozu / Production Shizuo YamanouchiAvec Shin Saburi, Kinuyo Tanaka, Ineko Arima,Yoshiko Kuga, Keiji Sada

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Deux jeunes garçons réclament une télévision à leurs parents qui refusent et leur demandent de" la boucler ". Les deux frères entament une grève de la parole. S'ensuit une gigantesque querel-le de voisinage.Célèbre remake de Gosses de Tôkyô.Ozu, en bon artisan du cinéma, a toujours été soucieux de sonpublic et a toujours donné une touche populaire à ses films. A l'époque de Bonjour, le Japon esten plein boom économique. Ce sont les années dites de "haute croissance" au cours desquellesl'amélioration du niveau de vie est manifeste. Le rêve de toute famille est alors de devenir pro-priétaire. Les banlieues se développent en autant de petits quartiers résidentiels où s'alignent lesmaisons neuves et modernes restées dans l'histoire sous le nom de "logements culturels" (bunkajûtaku), "culturel" ayant ici le sens de "offrant tout le confort moderne tel qu'il a été importé del'Occident à partir des années vingt". C'est un de ces quartiers qui sert de toile de fond à cettecomédie de mœurs où la vie va, entre mensonge et vanité.

BBoonnjjoouurr1959 - 1h34 - Studios Shôchiku OfunaProduction Shizuo Yamanouchi / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Keiji Sada, Yoshiko Kuga, Ryû Chishû, Kuniko Miyake, Haruko Sugimura

"J'ai pensé à cette histoire pendant longtemps. On peut bavarder à l'infini sur des chosesinsignifiantes, mais quand on arrive à l'essentiel il est très difficile de dire quoi que ce soit.Je voulais faire un film sur cela bien que sachant qu'il serait très difficile d'exprimer ce genrede situation. J'ai mentionné cette histoire à une réunion de l'union des cinéastes et tout lemonde y a trouvé de l'intérêt ; je leur ai alors dit qu'ils étaient libres de l'utiliser pour enfaire un film. Mais personne n'osa. Alors je me suis décidé. Au début, je pensais que cettehistoire pourrait être plus calme et plus sobre. Mais professionnellement, comme je pen-sais à faire de l'argent j'ai rendu l'histoire plus humoristique. En fait il serait plus juste dedire que je désirais que les gens viennent voir ce film plutôt que de faire de l'argent." Ozu

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Ce remake aux couleurs flamboyantes du muet Histoire d'herbes flottantes est interprété par lesplus grandes vedettes, anciennes et nouvelles, du cinéma japonais des années 50-60.

HHeerrbbeess fflloottttaanntteess1959 - 1h49 - 35mm - Daiei Production Masaichi Nagata / Projet Hideo Matsuyama / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Ganjirô Nakamura, Machiko Kyô, Ayako Wakao, Hiroshi Kawaguchi

"Même à l'époque où Kenji Mizoguchi était vivant on m'avait demandé de réaliser un film pour la Daiei.Nagata, le président de la compagnie, m'avait demandé de diriger un film pour lui, mais j'avais un contratavec la Shôchiku pour un film par un. Et d'ordinaire un film me prend un an. Mais cette année-là j'ai finiBonjour tôt dans l'année et j'avais assez de temps pour en tourner un autre. C'est pourquoi j'ai pu tenir mapromesse ancienne. Il y a des années j'avais fait un film muet (Histoire d'herbes flottantes, 1934) à partir decette histoire. Mais je voulais la tourner une nouvelle fois dans les régions enneigées du Hokuriku, aussi écri-vis-je un scénario intitulé l'Acteur de bois (Daikon yakusha) et j'envisageai de le diriger pour la Shôchiku.Mais cette année-là nous eûmes très peu de neige si bien que je ne pouvais pas filmer des plans pittoresquesde Takada ou de Sado. Aussi je m'arrêtai de travailler sur ce film pour un certain temps, puis je changeai lasaison et le décor et le tournai pour la Daiei. Ce film est ce qu'on appelle "Mono no aware" [profond senti-ment des choses] ou une histoire traditionnelle. Bien que le décor soit contemporain, l'atmosphère est cellede l'époque Meiji. Cela aurait pu être un film dans le "style Meiji" mais il n'y avait aucune nécessité de lefaire ainsi. De plus il aurait fallu faire des recherches difficiles sur les costumes et les mœurs. Aussi ai-je sim-plement transformé une histoire traditionnelle en une histoire moderne.Miwagawa, le chef opérateur [Rashômon, Contes de la lune vague, etc.], s'est donné beaucoup de mal et aexpérimenté différentes choses pour ce film, si bien que j'ai commencé à comprendre ce qu'est un film encouleurs. Par exemple, il est nécessaire d'avoir un certain éclairage pour chaque couleur pour l'empêcher d'ê-tre différente à l'écran de ce qu'elle est pour notre regard. Aussi lorsque vous essayez de filmer deux cou-leurs différentes, avec la même quantité de lumière l'une est détruite. Vous devez donc choisir quelle cou-leur vous voulez voir estompée. C'est ce que j'ai appris pour la première fois.Le cinémascope est devenu populaire à cette époque. Je n'avais pas eu l'intention de réaliser un film pourécran large et pourtant je changeai peu à peu en devenant conscient de ce format. Par changement je neparle pas de quelque chose de soudain mais de changements progressifs et inconscients. Par exemple lenombre gros-plans et de plans brefs commença à augmenter. En fait ce film doit avoir plus de plans brefsqu'aucun autre film japonais récent." Ozu

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Ayako vit avec sa mère et refuse de se marier. La mère pense que sa fille se sacrifie pour ne pasla laisser seule. La fille croit qu'elle la pousse à quitter le foyer pour pouvoir se remarier.Contre l'avis sa hiérachie, Ozu exige (son statut de grand maître le lui permet) que l'on débauche YôkoTsukasa de la Tôhô. Tsukasa est l'autre actrice vedette, avec Setsuko Hara, de cette compagnie. En échan-ge, Ozu tournera un film pour la Tôhô : Dernier caprice. Ses producteurs ayant cédé à ses exigences, Ozun'a pas droit à l'erreur. Le tournage est tendu, Ozu avoue perdre confiance en lui par moments. Le 22 octo-bre 1960, il note dans son carnet : "même au singe, il arrive de tomber de l'arbre. Mais le singe n'en perdpas pour autant sa dignité. Il est respectable tant qu'il reste lui-même."

FFiinn dd''aauuttoommnnee1960 - 2h08 - Studios Shôchiku OfunaOeuvre originale de Ton Satomi dans le magasine Bungei ShunjûProduction Shizuo Yamanouchi / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Setsuko Hara, Yôko Tsukasa, Mariko Okada, Keiji Sada, Miyuki Kuwano

"Parfois les gens rendent les choses simples très compliquées. L'essence de la vie qui sem-ble complexe peut être simple de façon totalement inattendue. C'était mon but dans cefilm. Et, en plus, il y a quelque chose à quoi j'ai pensé longtemps et que je faisais de plusen plus. Il est très facile de montrer l'émotion dans un drame : les acteurs pleurent ou rientet cela crée dans le public des sentiments de tristesse ou de bonheur. Mais cela n'est qu'u-ne simple explication. Pouvons-nous vraiment peindre la personnalité et la dignité d'unhomme en faisant appel aux émotions ? Je veux donner aux gens le sentiment de la viesans retracer les hauts et les bas dramatiques. C'est ce que j'ai essayé de faire dans ce film.J'y ai pensé depuis les Frères et les Soeurs Toda mais c'est très difficile. Cette fois j'ai assezbien réussi mais c'était loin de la perfection." Ozu

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La famille Kohayagawa se prépare à marier la cadette Noriko et à remarier Akiko. Le chef defamille, Manbei, se comporte pourtant bizarrement. En réalité, il rend visite à son anciennemaîtresse, Tsune.Lors du tournage de Fin d'automne, Ozu avait pu emprunter Setsuko Hara et Yôko Tsukasa à laTôhô à condition de réaliser ensuite un film pour la Takarazuka Eiga, compagnie affiliée à la Tôhô.De juin à septembre 1961 se déroule donc le trounage de ce nouveau film dont l'action se dérou-le à Kyôto. Il est à remarquer que les trois films qu'Ozu réalise ailleurs qu'à la Shôchiku ne sedéroulent pas à Tôkyô ou Kamakura.Dans Dernier caprice, l'aspect visuel est typique de la région du Kansai (Kyôto, Osaka, Kôbe), trèsdifférent de la géographie de la "ville-haute" et des faubourgs de Tôkyô qui sont la plupart dutemps les lieux où se déroulent les films précédents. De plus, les acteurs de la Tôhô font pressionpour avoir le privilège de pouvoir figurer dans ce film du "Maître". Les rôles, même très secon-daires, se multiplie à cette seule fin.Comme dans Les sœurs Munekata et dans une moindre mesure dans Herbes flottantes, le filmprésente un aspect visuel légèrement différent de celui de son univers habituel, le contrôle totaléchappant à Ozu. Il réalise cependant une comédie dramatique réussie, rigoureuse et élégante,où le personne de Manbei, campé par le formidable acteur Ganjirô Nakamura, emporte le mor-ceau et vole toutes les scènes. Ozu laisse tout de même une empreinte personnelle très profon-de lors de la scène finale montrant les deux paysans au bord de la rivière, où Chishû Ryû, sonacteur fétiche, est symboliquement présent.

DDeerrnniieerr ccaapprriiccee1961 - 1h43 - 35mm - Takarazuka Eiga et Tôhô Production Sanezumi Fujimoto, Masaaki Kaneko, Tadahiro Teramoto / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô OzuAvec Ganjirô Nakamura, Setsuko Hara, Yôko Tsukasa, Mariko Okada, Keiji Sada

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Le vieux Hirayama est poussé par ses amis à trouver un mari pour sa fille, Michiko. Aprèsdiverses tentatives, il finit par célébrer le mariage de Michiko mais réalise qu'il est maintenantplus seul que jamais.Ce film est une nouvelle variation (et un quasi remake ) sur Printemps tardif, centré à nouveau surla relation père-fille et le mariage. Incontestablement, le ton devient plus sombre, l'esthétiqueplus austère.Ozu introduit le personnage du vieux professeur alcoolique et solitaire, et fait de Chishû Ryû unvieillard à la limite de l'ivrogne. Le film est une méditation désabusée sur des vies qui ont demoins en moins de sens au sein d'un monde déshumanisé. En ce sens, il est le film le plus per-sonnel d'Ozu depuis longtemps.

LLee ggooûûtt dduu ssaakkéé 1962 - 1h58 - Studios Shôchiku Ofuna Production Shizuo Yamanouchi / Scénario Kôgo Noda, Yasujirô Ozu Avec Shima Iwashita, Chishû Ryû, Keiji Sada, Mariko Okada, Teruo Yoshida

Dernier film d'Ozu qui fut très long à mettre en chantier. Ozu a été profondément affec-té par la mort de sa mère survenue au début de l'année. Il fait face également à un cruelmanque d'inspiration comme il s'en explique, indirectement, auprès d'un journaliste :

"Trouver une histoire qui ait un intérêt cinématographique, c'est vraiment très difficile. […]La télévision, on peut la regarder sans rien payer installé à l'aise dans son salon. C'est untravail d'amateur. Mais au cinéma, on tourne des films et on fait payer les gens pour qu'ilsviennent les voir. C'est un travail de professionnel. Il ne faut pas n'en faire qu'à sa tête, ilfaut que le public prenne du plaisir aussi. On travaille toujours sur la corde raide." Ozu

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Cherchez l’erreur !

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2 ans après

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1903 Né le 12 décembre 1903 à Tôkyô. Yasujirô est le deuxièmefils d'une fratrie de cinq enfants. Son père (Toranosuke Ozu) est gérantd'une société de gros en engrais dont le siège est en province, dans ledépartement de Mie (au sud de Nagoya). Il s'occupe de deux magasinsà Tôkyô: l'un est à Fukagawa, l'autre est dans le quartier d'affaires deNihonbashi. Fukagawa est un quartier populaire industrieux; s'ycôtoient marchands, artisans, activité fluviale et maritime. Ozu gran-dit à l'aise dans cette urbanité bouillonnnante. Il a tous les traits du"titi d'Edo" (ancien nom de Tôkyô), mais Toranosuke décide un jourd'envoyer sa progéniture (et sa femme) dans la maison familiale deMatsuzaka, convaincu que l'air de la campagne sera bénéfique à leuréducation. Dès lors, les enfants Ozu ne verront que très rarement leurpère resté à Tôkyô pour ses affaires. Ozu restera dans la région de Miejusqu'à ses dix-neuf ans. Il sera élevé par sa mère et entrera au pen-sionnat pendant ses années de collège, période dont il gardera tou-jours une très grande nostalgie. Il a un tempérament volontaire etbagarreur et fait les 400 coups. Son jeu favori est de se déguiser enadulte (chapeau, moustache dessinée et cigarette) pour pouvoir ent-rer dans les salles obscures qui lui sont encore interdites seul. C'estainsi qu'il découvre le cinéma. Ce n'est alors pour lui qu'un moyen devivre le grand frisson en rompant les interdits.Son enfance est donc marquée par l'absence du père qui travaille àTôkyô et qui ne revient à Matsuzaka (dans le département de Mie)qu'à l'occasion de déplacements professionnels. Yasujirô et ses deuxfrères sont des enfants gâtés, toujours près à faire les 400 coupscomme ceux qu'il mettra en scène dans Gosses de Tôkyô ou Bonjour.Pensionnat au collège. Il s'absente souvent de l'école pour aller s'é-merveiller devant les péplums italiens, mais sa rencontre décisive avecla cinéma se fait avec la superproduction de Thomas Harper Ince,Civilization (1916). C'est après avoir vu ce film qu'il rêve de faire ducinéma. Il se passionne aussi pour les romans de Junichirô Tanizaki ouRyûnosuke Akutagawa. Il s'exerce déjà au maniement des caméras.

1920 Renvoi du pensionnat à 17 ans suite à une obscure sombreaffaire dite "l'affaire du page". Ozu est accusé à tort d'avoir adresséune lettre amoureuse à l'un de ses camarades du pensionnat. En fait,son esprit libre et son tempérament bagarreur, ses absences répétées(pour aller au cinéma) avaient fait qu'il était devenu la bête noire deses maîtres dans un pensionnat aux méthodes assez sévères d'ensei-gnement. Suite à l'intervention de son père, il est réintégré au collègemais n'est plus admis en pension. Devenu libre chaque soir, Ozu semet à fréquenter assidûment une salle de cinéma de Matsuzaka, leKaguraza . Sa préférence va plutôt aux films américains qu'au cinémajaponais alors encore en gestation et dominé par la figure charisma-tique de Onoe Matsunosuke, l'acteur vedette des adultes et desenfants, héros de films de sabre aux mimiques inoubliables. Les idolesd'Ozu sont Lilian Gish, Pearl White, William S.Hart, Rex Ingram.Après l'obtention de son diplôme de collège, il échoue volontairement- il était au cinéma ce jour-là - au concours d'entrée du lycée supé-rieur de commerce de Kôbe, conscient que les études supérieures nesont pas compatibles avec son rêve de cinéma. Il passe une année oisi-ve, toujours dans les salles obscures. Pourtant sa passion est passive :pas la moindre initiative pour se faire embaucher dans un studio decinéma.

1922 Au bout d'une année passée à voir des films et à dévorer lalittérature il est conscient que son oisiveté inquiète ses parents. Ilpasse alors le concours de l'école normale du département de Miemais échoue encore. Comprenant qu'il ne pourra pas profiter éternel-lement du soutien de ses parents, il accepte le poste d'instituteur (unevacation) que lui a trouvé un ami dans l'arrière-pays de Matsuzaka, àune heure de train. Ozu a dix-neuf ans. Il montre une manière aty-pique d'enseigner : dès qu'il est lassé de parler d'un sujet, il se met àraconter des histoires aux enfants en pleine classe, et son talent ora-toire attire les enfants des classes voisines. Il emmène souvent sesélèves en excursions ou voir des films à Matsuzaka. Il sait se montrersévère mais sans exagération.

1903

1916

OZUbiographie

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1923 Il quitte son travail une année plus tard et profite de la fin dela scolarité de sa sœur pour monter à Tokyo avec elle et vivre à nou-veau chez son père à Fukagawa. A l'époque un jeune qui aspirait à tra-vailler dans un studio de cinéma était considéré comme "un raté" parles gens. Mais le père d'Ozu, devant la passion si sincère de son reje-ton, doit se rendre à l'évidence. Il finit par aider son fils à réaliser sonrêve. Le hasard fait bien les choses puisque l'oncle de Yasujirô est pro-priétaire d'un terrain qu'il loue aux studios Kamata de la Shôchiku. Ilintervient aupèrs d'un responsable de la firme pour fair embaucher sonneveu. Ozu est en train d'accomplir son rêve sans s'être donné le moin-dre effort au bout du compte. Au cours de l'entretien d'embauche, ilétonne son bienfaiteur quand il lui explique qu'il n'a vu que trois filmsjaponais dans sa vie. Il demande à être assistant réalisateur mais c'estun poste d'assistant caméraman qui lui est attribué. Son travail est sur-tout physique : en tant que 'third' (troisième assistant) son travail tientprincipalement à transporter les lourdes caméras sur son dos.Passionné par le cinéma américain, Ozu assaille de questions le réali-sateur Kiyohiko Ushihara qui vient de rentrer d'Hollywood où il a faitun voyage d'étude. Ozu fait la connaissance de Kôgo Noda, son futurscénariste attitré, qui vient d'intégrer la Shôchiku.Le 1er septembre 1923, soit un peu plus d'un mois après qu'Ozu a étéembauché, un séisme détruit la ville de Tôkyô. La production de laShôchiku est transférée à Kyôto, mais Ozu fait partie de ceux qui res-tent, avec Ushihara et Yasujirô Shimazu, pour remettre le studio en étatde fonctionner le plus vite possible.

1924 A la fin de son service militaire au cours duquel il n'a jamaisparticipé à la moindre manœuvre - il s'arrangeait pour se faire toujoursporter pâle - il termine au simple grade de caporal, alors que ses cama-rades obtiennent des postes de sous-officiers juste sous le rang demajor, leur ouvrant une carrière militaire. Mais Ozu ne veut faire quedu cinéma.

1925 A son retour de l'armée, Ozu est intégré à l'équipe deTadamoto Okubo comme troisième assistant réalisateur. Il peut enfinenvisager le métier de réalisateur. Prisonnier de la section "tournage",il avait confié à Torajirô Saito son rêve de faire de la réalisation.Charitable, Saitô l'avait recommandé auprès de Okubo.

1927 Ozu est promu réalisateur de jidaigeki (film à costume ouhistorique) : Zange no katana (Le sabre de la pénitence). Ce sera sonseul et unique jidaigeki. Il s'est inspiré de Kick In (1922) de GeorgesFitzmaurice, cinéaste américain d'origine française. Sur les 19 films qu'iltourne entre 1927 à 1930, il n'en reste aujourd'huique quatre. C'est au cours de cette période qu'il commence à entrete-nir des relations privilégiées avec le scénariste Kôgo Noda et le chefopérateur Hideo Mohara.

1929 Février - avril : tournage de Rêve de jeunesse. Il troune sixautres films dans la même année. Ozu s'occupe de trois sous-genres dugendaigeki (drame moderne) : films d'étudiants, d'employés, et de cou-ples qui contribueront à sa célébrité. Il s'attache à traiter de la vie fami-liale japonaise, et se pose en témoin des bouleversements sociaux del'époque, mais sans simposer une quelconque idéologie. Il accorde plu-tôt de l'importance plutôt aux détails de la vie quotidienne et aux sen-timents. Ozu maintient une ligne personnelle et original entre les filmssociaux militants et le parlant qui fait alors son apparition et qui bou-leverse les formes cinématographiques du muet auxquelles Ozu resteattaché. Ozu s'intéresse aux destins ordinaires, aux drames de la viequotidienne. Soucieux de s'améliorer, il est entouré d'une équipe descénaristes : Kôgo Noda, Akira Fusimi, Tadao Ikeda, Komatu Ikeda. C'està cette époque qu'ils multiplient les pseudonymes comme " MakiJames ". C'est un pseudonyme qu'utilisent en commun les cinq hom-mes.

1931 En 1931, Jeune demoiselle (Ojosan) fait partie des 10meilleurs films de l'année, selon le classement de la revue "Kinemajunpô". Les films d'Ozu auront dès lors un accueil critique toujoursfavorable, voire dithyrambique, de la part de cette revue très influenteet tournée vers la modernité.Pourtant l'accueil est plus réservé de la part du public. Nombre de filmsd'Ozu de l'époque sont des échecs commerciaux.

1936 La Shôchiku déplace ses studios de Kamata à Ofuna, au sudde Tôkyô, près de Kamakura, pour échapper aux nuisances sonores duchemin de fer qui connaît un développement foudroyant avec l'exten-sion de la banlieue souvent représentée dans les films d'Ozu, Naruse etShimizu. Ozu se lie d'amitié avec Kenji Mizoguchi, Tomu Uchida etTasaka Tomotaka.

1937 Ozu est mobilisé pendant vingt mois en Chine.

1940 Censure des scénarios, limitation de la production… Avec laguerre et ses contraintes, Ozu recentre ses scénarios sur des histoiresde famille, plus intimistes. Il était un père, etc.

1943 Ozu est envoyé par l'armée à Singapour où il se voit confierla réalisation d'un documentaire sur Subhas Chandra Bose, l'Indien à l'i-nitiative du mouvement d'indépendance. Il ne tournera que quelquesplans, et le projet finira par s'enliser. Il ne lui reste plus qu'à attendresur place la capitulation du Japon. Devenu prisonnier, il mènera une vieplutôt tranquille. Il a l'occasion de voir les films américains. CitizenKane, Gone With the Wind, Les films de John Ford, etc. Il admire en par-ticulier Les raisins de la colère et La route au tabac. `

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1946 Ozu est de retour au Japon. Il a 43 ans. Il retrouve le mondecinématographique japonais après avoir visionné un nombre incalcula-ble de films américains pendant sa période de détention : "il n'est pasbon qu'un réalisateur voie trop de films. Ses yeux finissent pas enfler."Il hâte de reprendre le travail, ayant pris conscience du retard qu'avait,selon lui, le cinéma japonais sur le cinéma américain. Sa déclaration"j'ai vu trop de films américains" est en fait une critique adressée ausystème de production japonais. Ozu reproche à ses producteurs leurmanque de passion, leur vision purement commerciale et administrati-ve du cinéma où l'œuvre est réduite à une simple marchandise à four-nir dans les délais.

1949 Mai-septembre : tournage de Printemps tardif. Classémeilleur film de l'année par la revue "Kinema Junpô".

1950 Mai-août : tournage de Les sœurs Munekata. Premier film quine soit pas tourné à la Shôchiku, mais à la Shin-tôhô. Echec commer-cial.

1951 Juin-septembre : tournage de Eté précoce, premier film d'Ozuà recevoir un prix officiel (Prix des arts du ministère de l'éducation). A48 ans, Ozu tient tête à la jeune génération qui fait sensation : AkiraKurosawa (Rashômon, Vivre) et Keisuke Kinoshita (Un amour deCarmen). Des rumeurs courent sur ses relations avec l'actrice SetsukoHara, et qu'ils pourraient même se marier.

1953 Juillet-octobre : tournage de Voyage à Tôkyô, considéré parbeaucoup comme son chef-d'œuvre. Ozu affine de plus en plus sesréalisations. Octobre : il exprime son soutien à Kinuyo Tanaka qui faitses débuts de réalisatrice avec Lettre d'amour en acceptant un rôle defigurant dans ce film.

1954 Août : résiliation de son contrat avec la Shôchiku. Ozudevient réalisateur indépendant.

1955 Mars : Ozu succède à Mizoguchi à la tête de l'Association descinéastes japonais. Août - décembre : tournage de Printemps précoce.Eloge de Nuage flottants de Mikio Naruse : ""

1956 Février : Ozu signe un nouveau contrat avec la Shôchiku. Il

tournera désormais un film par an pour cette société. Il négocie unenouvelle rémunération relativement confortable: cent mille yens d'ho-noraires fixes mensuels, 2 millions cinq cent mille de rémunération parfilm, huit cent mille par scénario. (A l'époque, le salaire moyen au Japonest de trente mille yens / mois). Décès de Mizoguchi à 58 ans dont Ozuétait proche. Ozu se fait mal aux nouvelles techniques du cinéma. Ilexprime son opposition à l'usage de la couleur, comme il l'avait faitpour le parlant vingt-cinq ans auparavant. Mais il cède sous la pressionde ses producteurs et tourne en Agafacolor. Il y prend finalement unréel plaisir et tournera ses cinq derniers films en couleurs.

1959 Le jour de l'an, Ozu note dans son journal daté samedi 3 jan-vier : "boire modérément ! Ni trop travailler ! Ni trop faire la sieste !Pense qu'il te reste peu de temps à vivre ! " Janvier-avril : tournage deBonjour. Mai : Ozu est le premier cinéaste à obtenir le prix del'Académie des Arts. Septembre - novembre : tournage d'Herbes flot-tantes pour le compte de la société Daiei. Il est satisfait des conditionsde tournage et se familiarise avec l'usage de la couleur.

1960 Lauréat du 3e prix Mizoguchi. Alors que dans les mêmes stu-dios Shôchiku à Ofuna le jeune Nagisa Oshima défraie la chroniqueavec ses premiers films à la mise en scène nerveuse (Ville d'amour etd'espoir, Contes cruels de la jeunesse, et La tombe du soleil ), Ozu à cin-quante-sept ans, très atteint par l'alcool, est diminué physiquement. Ilsent aussi son énergie créatrice lui échapper. Avril - novembre : tourna-ge de Fin d'automne.

1963 Ozu meurt le 12 décembre 1963 des suites d'un cancer, lejour de son 60e anniversaire.

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SOURCES> Kantoku Ozu Yasujirô (Yasujirô Ozu, cinéaste), Hasumi Shigehiko, ChikumaShobô, Tôkyô 1983.> Ozu Yasujirô Nikki (Yasujirô Ozu au jour le jour) , Tsuzuki Masaaki, Kôdansha,Tôkyô 1993.> Ozu Yasujirô to Eigajutsu (Yasujirô Ozu et l'Art du cinéma), Kida Shô,Heibonsha, Tôkyô 2001.> Ozu Yasujirô eiga dokuhon (Lecture des films d'Ozu), Film Art, Tôkyô 1993.> Positif N°203, février 1975.> Yasujirô Ozu, carnets 1933-1963, Editions Alive.

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OZU1927Zange no yaiba* / Le Sabre de pénitence / The Sword of Penitence

1928Wakôdo no yume / Rêve de jeunesse / The dreams of Youth l Nyôbofunshitsu / Epouse perdue / Wife Lost l Kabocha* / La Citrouille /Pumpkin l Hikkoshi fûfu / Un couple déménage / A Couple on the Movel Nikutaibi / Un Corps magnifique / Body beautiful

1929Takara no yama* / La montagne du trésor / Treasure Mountain l

Wakaki hi :gakusei romansu / Jours de jeunesse / Days of Youth l Waseikenka tomodachi / Combats amicaux à la japonaise / Fighting Friends-Japanese Style l Daigaku wa deta keredo / J'ai été diplômé,mais… /I Graduated, But… l Kaishain seikatsu* / La vie d'un employé de bureau/ The Life of an Office Worker l Tokkan kozô / Le Galopin /A Straightforward Boy

1930Kekkongaku nyûmon / Une introduction au mariage / An introductionto marriage l Hogaraka ni ayume / Va d'un pas léger / Walk Cheerfully l

Rakudai wa shitakeredo* / J'ai été recalé,mais… / I Flunked,But… l Sonoyo no tsuma / Femme d'une nuit / That Night's Wife l Erogami no onryo/ Eros, esprit vengeur / The Revengeful Sprit of Eros l Ashi ni sawattakôun / La chance m'a touché aux jambes / The luck Which touched theleg(lost Luck) l Ojosan / Jeune demoiselle / Young Miss

1931Shukujo to hige / La femme et la barbe / The Lady and the Beard l Bijinto aishu* / Les infortunes de la beauté / Beauty's Sorrow l Tôkyô nokôrasu / Le chœur de Tôkyô / Tôkyô Chorus

1932Haru wa gofujin kara* / Le printemps vient des femmes / Spring Comesfrom the Ladies l Umaretewa mitakeredo : otona no miru ehon* /Gosses de Tôkyô / I was Born,But… : A Picture Storybook for Adults l

Seishun no yume ima izuko / Où sont les rêves de jeunesse ? / WhereNow Are the Dreams of Youth ? l Mata au hi made / Jusqu'à notre pro-chaine rencontre / Until the day We Meet Again

1933Tôkyô no onna / Une femme de Tôkyô / Woman of Tôkyô l Hijôsen noonna* / Femmes et voyous / Dragnet Girl l Dekigokoro* / Cœur capri-cieux / Passing Fancy

1934Hara o kowazuya / L'amour d'une mère / A Mother Shoud be Lovedl Ukigusa monogatari* / Histoire d'herbes flottantes / A Story ofFloating Weeds

1935Hakoiri musume / Une jeune fille pure / An Innocent Mind l Tôkyô noyado / Une auberge à Tôkyô / An Inn in Tôkyô l Kagamijishi / La dansedu lion / Kagamijishi (Lion Danse)

1936Daigaku yoitoko* / Vive la fac / College Is a Nice Place l Hitori musu-ko* / Un fils unique / The Only Son

1937Shukujo wa nani o wasuraretaka ? / Qu'est-ce que la dame a oublié ? /What Did the Lady Forget ?

1941Toda-ke no kyodai / Les frères et sœurs Toda / The Brothers and Sistersof the Toda Family

1942Chichi ariki / Il était un père / There Was a Father

1947Nagaya shinshiroku / Récit d'un propriétaire / Record of a TenementGentleman

1948Kaze no naka no mendori / Une poule dans le vent / A Hen in the Wind

1949Banshun / Printemps tardif / Late Spring

1950Munekata kyôdai / Les sœurs Munekata / The Munekata Sisters

1951Bakushû / Eté précoce / Early Summer

1952Ochazuke no aji / Le goût du riz au thé vert / The Flavor of Green Teaover Rice

1953Tôkyô monogatari / Voyage à Tôkyô / Tôkyô Story

1956Soshun / Printemps précoce / Early Spring

1957Tokyô bôshoku / Crépuscule à Tôkyô / Tôkyô Twilight

1958Higanbana / Fleurs d'équinoxe / Equinox Flower

1959Ohayô / Bonjour / Good Morning l Ukikusa / Herbes flottantes /Floating Weeds

1960Akibiyori / Fin d'automne / Late Autumn

1961Kohayagawa-ke no aki / Dernier caprice / The End of Summer

1962Sanma no aji / Le goût du saké / An Autumn Afternoon

(* : scénario original d'Ozu)

filmographie

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PUBCARLOTTA

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AMICALE AU JAPON POUR LA MAISON DE LA CULTURE DU JAPON A PARISCe groupe d'entreprises privées apporte son soutien aux activités de la MCJP.A ce jour, les sociétés membres sont les suivantes (par ordre alphabétique) :

AD-A CO., LTD. - AJINOMOTO CO., INC. - AKEBONO BRAKE INDUSTRY CO., LTD. -ALL NIPPON AIRWAYS CO., LTD. - ASAHI BREWERIES, LTD. - ASATSU-DK INC.BUNGEISHUNJU, LTD. - CANON INC. - CASIO COMPUTER CO., LTD. - CHUBU ELECTRIC POWER CO., INC - DAIKIN INDUSTRIES, LTD. - DAI NIPPON PRINTING CO., LTD.DENTSU INC. - EAST JAPAN RAILWAY COMPANY - FUJI TELEVISION NETWORK, INC. - FUJI XEROX CO., LTD. - HACHETTE FUJINGAHO - HAKUHODO INCORPORATEDHAYASHIBARA FOUNDATION - I&S BBDO INC. - ITOGUMI CONSTRUCTION CO., LTD. - JAPAN AIRLINES INTERNATIONAL CO., LTD. - JAPAN PUBLICATIONS TRADING CO., LTD.JAPAN TOBACCO INC. - JTB CORP. - KAJIMA CORPORATION - KIKKOMAN CORPORATION - KODANSHA, LTD. - MAGAZINE HOUSE, LTD. - MERCIAN CORPORATIONMISUI & CO.,LTD.- NEC CORPORATION - NGK INSULATORS,LTD.-NIHON KEIZAI SHIMBUN,INC.- NIPPON KOHKOKU-SHA CO.,LTD.- NIPPON TELEVISION NETWORK CORPORATIONNISSAN MOTOR CO., LTD. - NOF CORPORATION - ONWARD KASHIYAMA CO., LTD. - ORIX CORPORATION - PARIS MIKI INC. - RICOH COMPANY, LTD. - RYOHIN KEIKAKU CO., LTD.SHIMIZU CORPORATION - SHINCHOSHA PUBLISHING CO. - SHISEIDO CO., LTD. - SHOGAKUKAN INC. - SHOWA DENKO K.K. - SHUEISHA INC. - SHUFUNOTOMO CO., LTD.SONY CORPORATION - SUMITOMO LIFE INSURANCE COMPANY - SUNTORY LIMITED - TAISEI CORPORATION -THE ASAHI SHIMBUN - THE KANSAI ELECTRIC POWER CO., LTD.THE MAINICHI NEWSPAPERS CO., LTD. - THE SANKEI SHIMBUN - THE YOMIURI SHIMBUN - TÔKYÔ BROADCASTING SYSTEM, INC. - TÔKYÔ ELECTRIC POWER COMPANYTÔKYÔ GAS CO., LTD. - TOKYU CORPORATION - TOPPAN PRINTING CO., LTD. - TORAYA CONFECTIONERY CO., LTD. - TORAY INDUSTRIES, INC. - TOSHIBA CORPORATIONTOYOTA MOTOR CORPORATION - TV ASAHI CORPORATION - TV TÔKYÔ CORPORATION - UFJ NICOS CO., LTD. WACOAL HOLDINGS CORP. - YOMIKO ADVERTISING INC.

et deux autres sociétés anonymes. Au 1er janvier 2007.