pluridisciplinaire du raisonnement

27
Une ApprOche pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT Goulven aLLEE, Eric CavaGNa, Guillaume D’HooP, Corinne FraSSEtti-PECquES, Michèle GaNDit 1 irem de Grenoble REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021 Ce travail de recherche s’inscrit également dans la continuité d’une première expérimen- tation portant sur la mise en œuvre en classe de démarches d’investigation des élèves dans des disciplines à dominante scientifique (mathé- matiques, sciences physiques et chimiques, Le contexte de l’étude Notre équipe, un chercheur, un professeur des écoles, trois enseignants en collège (fran- çais, histoire-géographie, EPS), s’est donné comme tâche d’élaborer et d’expérimenter dans les classes un dispositif (explicité plus loin) permettant de mesurer le raisonnement des élèves. Cet objet d’étude venait d’un constat issu des pratiques de classes : les élèves, d’une manière générale, ne se posent pas assez de ques- tions, ne sont pas assez actifs et subissent une démarche et des savoirs qu’ils cloisonnent par discipline, sans créer de lien. 61 résumé : Cette recherche-action sur la mesure du raisonnement des élèves s’inscrit dans le cadre d’une recherche plus large (Léa acorEEx). Dans toute discipline, la démarche de raisonnement s’appuie sur un questionnement, parfois implicite et intériorisé. L’enjeu est de faire prendre conscien- ce aux élèves qu’il y a une part importante consacrée au raisonnement et de déconstruire leurs représentations erronées. La recherche s’attache également aux gestes professionnels permettant de s’approprier cette démarche. Ce texte est également consultable en ligne sur le portail des irem, onglet : repères irEM http://www.univ-irem.fr/ 1 Ce travail est le fruit du groupe irem intitulé « approche pluridisciplinaire du raisonnement » : Goulven allée est professeur d’EPS en collège, Eric Cavagna est professeur des écoles, Guillaume D’Hoop est professeur d’histoire- géographie en lycée (en collège au moment de cette recherche), Corinne Frassetti-Pecques est professeure de lettres en collège, Michèle Gandit est PraG, chercheure dans le projet de recherche initial.

Upload: others

Post on 16-Jun-2022

16 views

Category:

Documents


1 download

TRANSCRIPT

Page 1: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

Une ApprOche

pLUriDiScipLinAire

DU rAiSOnnemenT

Goulven aLLEE, Eric CavaGNa, Guillaume D’HooP,

Corinne FraSSEtti-PECquES, Michèle GaNDit 1

irem de Grenoble

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

Ce travail de recherche s’inscrit égalementdans la continuité d’une première expérimen-tation portant sur la mise en œuvre en classe dedémarches d’investigation des élèves dans desdisciplines à dominante scientifique (mathé-matiques, sciences physiques et chimiques,

Le contexte de l’étude

Notre équipe, un chercheur, un professeurdes écoles, trois enseignants en collège (fran-çais, histoire-géographie, EPS), s’est donnécomme tâche d’élaborer et d’expérimenterdans les classes un dispositif (explicité plusloin) permettant de mesurer le raisonnementdes élèves.

Cet objet d’étude venait d’un constat issudes pratiques de classes : les élèves, d’unemanière générale, ne se posent pas assez de ques-tions, ne sont pas assez actifs et subissent unedémarche et des savoirs qu’ils cloisonnent pardiscipline, sans créer de lien.

61

résumé : Cette recherche-action sur la mesure du raisonnement des élèves s’inscrit dans le cadred’une recherche plus large (Léa acorEEx). Dans toute discipline, la démarche de raisonnements’appuie sur un questionnement, parfois implicite et intériorisé. L’enjeu est de faire prendre conscien-ce aux élèves qu’il y a une part importante consacrée au raisonnement et de déconstruire leursreprésentations erronées. La recherche s’attache également aux gestes professionnels permettantde s’approprier cette démarche.

Ce texte est également consultableen ligne sur le portail des irem, onglet : repères irEM http://www.univ-irem.fr/

1 Ce travail est le fruit du groupe irem intitulé « approchepluridisciplinaire du raisonnement » : Goulven allée estprofesseur d’EPS en collège, Eric Cavagna est professeurdes écoles, Guillaume D’Hoop est professeur d’histoire-géographie en lycée (en collège au moment de cetterecherche), Corinne Frassetti-Pecques est professeure delettres en collège, Michèle Gandit est PraG, chercheuredans le projet de recherche initial.

Page 2: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

et dans la représentation des démarches misesen œuvre : le raisonnement serait au cœur desmathématiques, là où l’EPS serait plutôt cen-trée sur l’action, l’histoire et le français sur latransmission de connaissances. Nous avonsainsi cherché dans nos différentes disciplinesle sens de la notion de raisonnement. Noussommes arrivés à une définition minimale com-mune de la démarche de raisonnement, à savoirle recours à une attitude de questionnementface à une tâche à accomplir. Dans le discoursthéorique on retrouve bien cette idée de che-minement. En référence à Duval (1991), onpeut considérer le raisonnement comme une suited’enchaînements de « pas », dans chacun des-quels on peut identifier un (ou des) élément(s)de départ, un élément d’arrivée, le passage dudépart à l’arrivée pouvant être justifié par un oud’autres éléments (explicités ou non).

on retrouve également l’idée de questions.En effet, selon Meyer :

Penser le questionnement est originaire surle plan philosophique : une réponse ne vautcomme telle qu’en référence à une questionplus première qui est sa raison d’être. Pourpouvoir répondre, il faut d’abord question-ner. (2011, p. 120)

Les nouveaux programmes font une placeconséquente et explicite au raisonnement, et sur-tout qui s’étend désormais à davantage de dis-ciplines, ce qui est une nouveauté par rapportaux programmes précédents.

En mathématiques, le raisonnement appa-raît dans les programmes depuis longtempscomme une capacité fondamentale. Parexemple, dans le document ressources 3 deniveau collège 2009, on peut lire :

science de la vie et de la terre, éducation phy-sique et sportive et technologie). Cette recherchese situait dans le cadre d’un projet européen(aSSiSt-ME) et d’un Lieu d’Education asso-cié (Léa EvaCoDiCE), qui a permis le travailcollaboratif d’une équipe mixte de chercheursde l’université Grenoble alpes et d’ensei-gnants en cycle 3, issus de deux collèges et dequatre écoles du même secteur (Gandit, 2014).L’objectif était de construire des outils d’éva-luation formative destinés aux élèves pour leurpermettre d’évaluer leurs compétences dansdes situations de démarche d’investigation.Cette recherche a duré trois ans.

une partie du groupe 2 impliqué dans cettepremière recherche a souhaité poursuivre laréflexion en s’appuyant sur le bilan de cettepremière recherche, à savoir la nécessitéd’expliciter les critères d’évaluation. Nousavons repris l’un des outils élaborés et mis enœuvre par l’équipe du premier Léa EvaCo-DiCE (Gandit, 2015) : un tableau d’autoé-valuation de compétences en quatre niveaux(Gandit, Lepareur, 2016). une seconde moti-vation était d’ouvrir la recherche à d’autresdisciplines tout en conservant quelques lignesfortes du premier Léa : la liaison école-col-lège coordonnée autour d’un travail concretavec des élèves, le fonctionnement du grou-pe en recherche-action.

Qu’est-ce que raisonner ? Et dans les programmes ?

au sein du groupe s’est posée la questionde la notion de raisonnement appliquée à cha-cune de nos disciplines. Nous avons confron-té nos points de vue et perçu la différence dela place accordée à la notion dans les disciplines

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

62

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

2 Le professeur de mathématiques du groupe de rechercheinitial a juste procédé aux tests dans sa classe de collègeet n’a pas poursuivi le travail d’écriture des résultats de cetterecherche.

3 Mathématiques, Collège, ressources pour les classesde 6e, 5e, 4e, et 3e du collège, juin 2009,http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Mathema-tiques/50/0/doc_acc_clg_raisonnementetdemonstra-tion_223500.pdf

Page 3: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

63

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

raisonner logiquement, pratiquer la déduc-tion, démontrer sont des capacités qui relè-vent du socle commun de connaissances etde compétences et qui sont à acquérir pro-gressivement, tout au long de la scolaritéau collège. (p.23)

actuellement, dans les programmes demathématiques, dès l’école primaire, apparaîtla compétence « raisonner ». Le raisonnementse retrouve également dans les compétences« chercher » et « communiquer ».

En géographie, les élèves doivent4 « s’exer-cer au raisonnement géographique  » par des études de cas, qui sont des « études ap-profondies de certains lieux  permett[ant]aux élèves d’observer des réalités géogra-phiques concrètes » (p. 183)

En histoire, les élèves sont initiés au « rai-sonnement historique » en donnant « du sensaux situations historiques explorées » :

Les élèves progressent dans la maîtrise desdémarches intellectuelles qui leur permet-tent de construire et de mobiliser un savoirhistorique. (p.315)

En français, le raisonnement est très souvent associé à l’étude et à la maîtrise de la langue :

Les élèves acquièrent la capacité de raisonnersur la langue, de commencer à en perce-voir le système et d’appliquer ces raison-nements pour l’orthographe. ils devien-nent également conscients des moyens àmettre en œuvre pour apprendre et résoudre

des problèmes. De manière plus généraleau cycle 3, les élèves accèdent à uneréflexion plus abstraite qui favorise le rai-sonnement et sa mise en œuvre dans destâches complexes » 5 (p.322)

Ce qui est plus notable est l’apparition duraisonnement en lien avec l’activité de lecturedes textes littéraires. ainsi le document d’accom-pagnement de l’évaluation des compétencesdu socle commun précise que l’élève doit

met[tre] en œuvre une démarche de com-préhension et d’interprétation d’un texte lit-téraire ou d’un document (simple ou com-posite) en prenant appui sur différents indicessignifiants, en mettant ces indices en rela-tion, en prenant conscience des élémentsimplicites et en raisonnant à partir des infor-mations données par le texte et de ses connais-sances pour expliciter ce que le texte ou ledocument ne dit pas 6.

L’idée de s’appuyer sur le texte, de cher-cher des éléments dans ou hors du texte pourdévelopper et justifier sa lecture n’est pas nou-velle, mais pas l’emploi d’un terme aussiconnoté scientifiquement dans les instructionsofficielles.

En sciences expérimentales,

les élèves découvrent de nouveaux modesde raisonnement en mobilisant leurs savoirset savoir-faire pour répondre à des questions.accompagnés par leurs professeurs, ils émet-tent des hypothèses et comprennent qu’ilspeuvent les mettre à l’épreuve, qualitativementou quantitativement. »

4 Programme d’enseignement du cycle d’approfondisse-ment (cycle 4). B.o. n°11 du 26/11/20155 Bulletin officiel spécial n°11 du 26 novembre 2015,annexe 2 Programme d’enseignement du cycle de conso-lidation (cycle 3)6 Document d’accompagnement pour l’évaluation des

acquis du socle commun de connaissances, de compé-tences et de culture. éléments pour l’appréciation du niveaude maîtrise satisfaisant en fin de cycle 3, p. 3. Documentvisible à l’adresse suivante (le 13/08/2018)  :cache.media.eduscol.education.fr/file/.../raE_Evalua-tion_socle_cycle_3_643744.pdf

Page 4: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

64

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

ainsi, au cycle 4,  « toutes les disciplinesvisent à étayer et élargir les modes de raison-nement et les démonstrations. »

alors que ces termes ont une forte présencedans toutes les disciplines, on note que lestermes de « raisonner » et « raisonnement »n’ont pas toujours le même sens et ne sont pasvraiment définis dans les instructions offi-cielles disciplinaires. Sont explicités plutôtdes modes de raisonnement propres à chaquediscipline, qui laissent toujours une part impor-tante au questionnement dans la finalité dedonner du sens à l’activité ou au document. Defait, dans le programme d’histoire-géogra-phie, la description de la compétence raison-ner commence par « se questionner » 7. Celaa conforté notre volonté de démarrer notretravail par une expérimentation où les élèvesaient à se questionner. Nous avons choisi uneapproche commune du raisonnement dont lafinalité est une analyse valide du document oude la situation. Cette analyse induit unedémarche réflexive s’appuyant sur un ques-tionnement progressif.

Nous nous sommes interrogés sur lamanière d’amener les élèves à construirecette démarche de questionnement, notammenten explicitant les attentes. Ceci nous a conduitsà étudier les modalités d’étayage à mettreen œuvre, dans le but d’amener progressivementà l’autonomie.

La question de l’étayage

La mesure de la progression des élèvesdevait nous permettre d’affiner les straté-gies d’étayage à mettre en œuvre. L’étaya-ge, concept forgé par Bruner («  scaffol-ding ») à partir des recherches de vygotsky,est la verbalisation de l’apprentissage qui

permettra aux élèves de comprendre et demémoriser. au cours de son travail sur lesmodèles d’acquisition des connaissances«  en spirale  », Bruner a montré que lesnotions doivent être correctement verbaliséeset adaptées à la structure cognitive de l’enfant.Bruner (1983) définit l’étayage comme

l’ensemble des interactions d’assistance del’adulte permettant à l’enfant d’apprendre àorganiser ses conduites afin de pouvoirrésoudre seul un problème qu’il ne savaitpas résoudre au départ. [Dans cette approche][…] l’adulte restreint la complexité de latâche permettant à l’enfant de résoudre desproblèmes qu’il ne peut accomplir seul.

Ceci met en avant le rôle capital 8 de l’ensei-gnant comme médiateur des apprentissages.

il est nécessaire cependant que l’appre-nant ait le temps de réaliser la tâche, l’enseignantne doit pas bloquer la pensée de l’élève par un« sur-étayage » (comme en donnant trop vitela réponse sans laisser le temps aux apprenantsd’y réfléchir).

De même, l’étayage n’est pas seulement l’aideapportée mais aussi le second moment cogni-tif, celui où l’apprenant reconstruit le savoir pourson propre compte (où il intègre la démarche).L’étayage n’est ainsi que provisoire puisque lebut final est le développement de l’autonomiede l’élève. Cette autonomie nécessite la plupartdu temps un « désétayage », une phase dans laquel-le l’apprenant perd peu à peu cette aide pour êtrecapable de réaliser seul la tâche.

Nous avons veillé à bien mettre en œuvreces deux temps au cours de notre expéri-mentation.

7 Fiche « raisonner, justifier une démarche et les choix effec-tués », ressource d’accompagnement sur le site Eduscol.8 La posture d’étayage est bien identifiée comme un gesteprofessionnel essentiel de l’enseignant par Bucheton (2009).

Page 5: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

65

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Parmi les six fonctions 9 d’étayage de Bru-ner (1983), nous nous sommes appuyés plus par-ticulièrement sur quatre d’entre elles pournotre expérimentation. Par la façon dont leproblème (ou la situation ou le document, enfonction des disciplines) est présenté aux élèves(« tu joues le rôle du professeur »), l’élève estenrôlé dans la démarche de questionnement. Laréduction des degrés de liberté réside dans lacentration sur le questionnement, qui est deman-dée aux élèves et l’enseignant reste vigilant àla maintenir tout en encourageant les élèves(contrôle de la frustration). La signalisation descaractéristiques dominantes et la démonstrationviennent en aval de la réalisation de la tâche.aussi n’explorons-nous pas ces deux dernièresfonctions dans cet article.

Problématique et hypothèse de recherche

quelle que soit la discipline, la démarchede raisonnement et d’analyse d’une situation,d’un problème, d’un document doit s’appuyersur un questionnement, parfois implicite etintériorisé. Ce questionnement est à l’origineet au cœur de la démarche du raisonnement.

il s’agit ici d’aider les élèves à mettre enlumière les mécanismes d’analyse, de « ques-tionner le questionnement  » (Meyer, 2011,p.123) dans une démarche de déconstruction etd’appropriation de la démarche analytique.L’enseignant doit pour cela élaborer les gestesprofessionnels permettant de lancer cettedémarche de raisonnement dans l’objectif finald’amener les élèves à s’approprier cette démarche.L’enjeu est ainsi de faire prendre conscience auxélèves (et au delà aux parents) qu’il y a une partimportante consacrée au raisonnement dans

toutes les disciplines et de déconstruire leurreprésentation fondée parfois sur la simplemémorisation de notions.

Notre hypothèse de recherche est quel’appropriation par les élèves de différentsniveaux de questionnement les amènerait à êtreplus efficaces dans leur démarche de ques-tionnement. Pour ce faire, le travail mené en clas-se devait montrer plus clairement les attentesau niveau du questionnement, accentuer etrendre explicite la pratique de raisonnementdans les activités.

La finalité de ce travail est donc de deuxordres : il s’agit d’une part de mesurer la pro-gression des élèves afin de vérifier la perti-nence du dispositif, d’autre part d’évaluer lesgestes professionnels à mobiliser pour accom-pagner les élèves.

Si la démarche est volontairement unifiée,à la fois pour permettre une passerelle entreles disciplines et accentuer la force de l’expé-rimentation 10, les objectifs disciplinaires pour-suivis sont évidemment propres aux disci-plines. En mathématiques, on vise à ce que lesélèves identifient le problème mathématiqueposé, au travers d’une figure à main levée oud’une suite de figures proposée. En histoire-géographie, l’objectif est que les élèvess’approprient une grille de lecture et d’ana-lyse d’un document historique ou géogra-phique. En français, l’enjeu est d’amener lesélèves à prendre conscience que lire un textelittéraire fait appel à la fois à des question-nements de compréhension littérale, à ne pasnégliger, à des questionnements plus élabo-rés, ainsi qu’à une dimension interprétative et

9 Ces six fonctions sont : 1) l’enrôlement (pour engagerl’intérêt de l’apprenant) ; 2) la réduction des degrés de liber-té (pour éviter la surcharge cognitive) ; 3) le maintien del’orientation (pour ne pas s’écarter du but assigné) ; 4) lasignalisation des caractéristiques déterminantes (montrerl’écart entre la production de l’apprenant et ce que le tuteur

aurait lui-même réalisé) ; 5) le contrôle de la frustration (évi-ter que les erreurs provoquent un sentiment d’échec) ; 6)la démonstration (explore une piste de solution avec l’appre-nant).10 Certaines classes étaient support de l’expérimentationdans plusieurs disciplines.

Page 6: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

66

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

sensible 11. En EPS, l’objectif est de montreraux élèves que pour réguler sa pratique phy-sique, il est d’abord nécessaire d’interroger « cequ’il y a à faire », la performance étant un indi-cateur de réussite.

La méthodologie

Le groupe de recherche est composé d’unchercheur, de quatre enseignants qui ont testédans leurs propres classes (professeurs de col-lège en français, histoire-géographie, EPS et unprofesseur des écoles). Pour les mathématiques,un enseignant de collège a expérimenté dans saclasse. La population testée se compose d’élèvesde cycle 3  : CM1-CM2 et 6ème d’un mêmeréseau d’éducation prioritaire.

Description détaillée du protocole en mathématiques

Le protocole expérimental utilisé dans lesclasses se compose de trois phases : 1) un testdiagnostique (test n°1) où l’on repère le niveaudes élèves ; 2) des activités ritualisées destinéesà l’appropriation par les élèves du questionne-ment à mettre en œuvre et des niveaux (qui sontexplicités dans la deuxième partie de ce para-graphe) ; 3) un second test (test n°2) pour mesu-rer la progression. En annexe figurent des docu-ments de travail par discipline.

Nous décrivons ci-après le protocole com-plet mis en œuvre en mathématiques. Pour letest n°1, un document est fourni aux élèves. ilcomporte une figure géométrique codée, tracéeà main levée, (figure 1 de la page ci-contre), lapremière consigne et des lignes en pointillés des-tinées aux écrits individuels des élèves.

Cette première consigne est d’observer lafigure et de formuler de 3 à 8 questions qui pour-raient être posées sur celle-ci. Ces questions doi-vent être rédigées sur le document. au bout d’unedizaine de minutes, le professeur donne ensui-te la seconde consigne, accompagnée d’un petittableau indiquant les quatre niveaux suivants :

Les élèves doivent indiquer par une croixles niveaux de questionnement dont, selon eux,relèvent les questions qu’ils ont rédigées. Si leursquestions correspondent à plusieurs niveauxde questionnement, ils doivent préciser, pour cha-cune des questions rédigées, de quel niveauelle relève, selon eux. une question d’élèvequi relève du niveau N1 est, par exemple, « Est-ce que la figure est faite à main levée ? ». Dansle niveau N2, on peut placer la question, « Com-

ment s’appelle ? ». La question, « qu’est-ce que aB pour le cercle ? », relève du niveauN3 et la question, « Comment peux-tu tracer lesparallèles (d4) et (d3) ? » du niveau N4.

Pour le test n°2, le scenario (voir l’ensembleen annexe 3) a été affiné pour enrôler davan-tage les élèves et les niveaux de questionnementont été redéfinis en fonction du nouveau sujetabordé. Le premier document fourni aux élèvespour ce second test (environ 40 min) compor-te une suite de figures (figure 2), sur laquelle

ABCjl

11 il s’agit donc de croiser les apports sur le processus delecture issus de différents domaines (notamment les stra-tégies de compréhension modélisées par Jacqueline Gias-son et l’importance à accorder au « sujet lecteur », notiondéveloppée par de nombreux chercheurs en littératuredepuis le colloque Sujets lecteurs et enseignement de la lit-térature organisé à rennes en janvier 2004).

Niveau N1 : j’ai posé des questions liées seule-ment à la présentation de la figure.

Niveau N2 : j’ai posé des questions sur la des-cription de la figure qui nécessitent l’utilisa-tion des codages et du vocabulaire spécifique.

Niveau N3 : j’ai relié la figure à mes connais-sances en faisant appel à des recherches pourtrouver la réponse.

Niveau N4 : j’ai approfondi en posant une ques-tion sur la réalisation de la figure.

Page 7: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

67

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

les élèves doivent se questionner, individuel-lement et par écrit.

La consigne donnée est la suivante : « quellesquestions poseriez-vous à un élève sur cette suitede figures ? vous écrivez vos questions.  »après cette première partie d’une durée de 10min, où il est demandé aux élèves de jouer lerôle d’un professeur, les quatre niveaux dequestionnement sont présentés aux élèves.

Figure n°1 – test n°1 : la figure fournie aux élèves de 6ème

sur laquelle ils doivent formuler des questions par écrit

Figure n°2 – test n°2 : le document fourni aux élèves de 6ème

sur lequel ils doivent formuler des questions par écrit

Niveau N1 : la question n’a pas de lien directavec le problème.

Niveau N2 : la réponse à la question est explici-tement dans le document.

Niveau N3 : pour répondre à cette question, ilfaut faire le lien entre les figures.

Niveau N4 : pour répondre à cette question, ilfaut avoir compris le procédé de constructiondes figures.

Page 8: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

68

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

au bout de 10 min, les élèves doiventensuite indiquer, comme pour le test n°1, dequel niveau relève chacune des questionsqu’ils ont posées.

adaptation du protocole aux autres disciplines

Dans les autres disciplines, le protocoles’est déroulé de la même façon. Les documentssupports des figures 1 et 2 ont été remplacéspar un plan de la ville de Nîmes à l’époqueromaine et une photographie d’un paysage duPérou en histoire-géographie, par des texteslittéraires en français et par des documents vidéosen EPS (certains de ces documents figurenten annexes). Si la question posée aux élèvesà partir des documents, en français et en his-toire-géographie, était exactement la même 12

qu’en mathématiques, celle-ci était un peuplus orientée en EPS.

Pour les tests en français, les textes devaient,outre avoir un attrait et un niveau de difficultécohérents à la classe d’âge (du CM1 à la 6ème),permettre aux élèves d’utiliser les quatre niveauxde questionnement. ils devaient donc contenir del’implicite afin de voir si et comment les élèvess’emparaient des différentes inférences à faire (texte1 : Comprenaient-ils pourquoi l’enfant est partiet, surtout, qu’il est dans le grenier; texte 2 : Com-prenaient-ils pourquoi les animaux sont effrayéset pourquoi l’enfant cherche son grand-père). Lestextes devaient également permettre l’investis-sement du jeune lecteur (par les émotions res-senties - l’amusement dans le texte 1, la peur dansle texte 2 ; par l’identification possible au per-sonnage ; par un jugement sur ce qu’a fait le per-sonnage, sur la situation qu’il vit...), ainsi que les

amener à un retour possible sur l’écriture, un juge-ment esthétique (l’utilisation de l’ironie ou du sus-pens pour enrôler le lecteur).

Pour les tests en histoire-géographie, lesattentes recoupaient en partie celles du français.Les niveaux N1 et N2 correspondaient respec-tivement à la présentation et la description dudocument (où se trouve le village sur la pho-tographie ? combien y a-t-il de portes à Nîmes ?).Les réponses aux questions posées devaientexplicitement être dans les documents. Lesquestions de niveau N3 appelaient à une ana-lyse, les réponses permettant d’expliquer cer-tains éléments (les types d’agriculture prati-qués dans les andes, l’identification des bâtimentspropres à la civilisation romaine). Les questionsde niveau N4 devaient relier le document au tra-vail réalisé dans le chapitre voire dans l’année(le croisement d’influences culturelles romaineset gauloises à Nîmes, l’adaptation des hommesaux contraintes naturelles voire leur capacité àles transformer en ressources dans leur moded’habiter l’espace).

Pour les tests en EPS, nous nous sommesappuyés sur un document vidéo (figure 3 de lapage ci-contre) qui montrait deux élèves desixième en action, du départ du premier cou-reur (donneur) jusqu’à la transmission du témoinau second coureur (receveur).

Les élèves testés devaient ainsi identifierà quel(s) problème(s) les élèves coureurs étaientsoumis pour ensuite noter par écrit les questionsqui aideraient ces élèves coureurs à se réorga-niser pour améliorer la qualité de leur transmissionde témoin. Pour cela, nous avons scénarisé letest en demandant aux élèves de « jouer » le rôlede professeur, de se mettre à la place du pro-fesseur. « tu es en charge d’un groupe d’élèvesque tu as filmés dans leur activité de course derelais. quelles questions pourrais-tu leur poserpour leur permettre de progresser ? au regard

12 En histoire-géographie : « quelles questions poseriez-vous à un élève sur cette photographie ? vous écrivez vosquestions. En français : « quelles questions poseriez-vousà un élève sur ce texte ? vous écrivez vos questions. » EnEPS : « tu es en charge d’un groupe d’élèves que tu as filmédans son activité de course de relais. quelles questions pour-rais-tu leur poser pour leur permettre de progresser ? »

Page 9: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

69

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

des représentations des élèves, nous nous atten-dions à ce que ces derniers questionnent majo-ritairement la vitesse propre à chaque coureur(potentiel individuel) au lieu d’interroger les pro-blèmes liés à la coordination des vitesses desdeux coureurs.

ainsi, toutes disciplines confondues, pourle premier test, le test diagnostique, les élèvesn’avaient aucune autre consigne explicative. ilsposaient, dans un premier temps, librementleurs questions. Puis leur était demandé declassifier ces questions suivant des niveaux dequestionnement qui leur étaient donnés. Les élèvesdevaient, dans un second temps, essayer deproposer d’autres questions. L’objectif était devoir si, en donnant des pistes explicites sur cequ’ils pouvaient chercher, ils élargissaient déjàleur champ d’investigation.

Entre les deux tests, des activités ritualiséesont été mises en œuvre. afin de développer laréflexion des élèves sur leurs processus men-taux, nous leur demandions de se questionnersur des documents fournis et, pour les accom-

pagner dans l’appropriation des démarches,nous faisions à chaque fois un lien avec lesniveaux de questionnement, par exemple enhistoire, lors de la projection d’une photogra-phie de la louve capitoline, en français lors dela lecture de textes, en mathématiques avecd’autres suites de figures. il s’agissait d’assu-rer un enseignement plus « explicite », en appuisur les nombreuses études qui ont montré l’inté-rêt d’identifier les éléments implicites trop sou-vent récurrents dans les situations d’apprentissageproposées. il ne s’agissait pas d’un entraînementsystématique, mais de faire référence assezrégulièrement à la méthodologie.

Lors du deuxième test les élèves n’avaienttoujours pas de consigne supplémentaire, cepen-dant l’hypothèse était qu’ils aient entre-tempsassimilé les démarches.

Les élèves étaient à la fin de chaque test invi-tés à se prononcer sur leur ressenti à propos deleur compréhension des niveaux et de l’aide quecela avait pu leur apporter.

En EPS, le protocole a dû être quelque peumodifié pour correspondre à la discipline. ils’est déroulé également en trois temps, lacourse des élèves filmée, puis une analyse decette vidéo, enfin un retour à la pratique phy-sique. L’hypothèse 13 était que l’activité deraisonnement des élèves dans le retour réflexifque permettait l’analyse de la vidéo aideraitles élèves à être plus efficaces, c’est à dire àréaliser une meilleure performance. Dans la pre-mière phase, la situation proposée aux élèvesmettait en œuvre une démarche d’investiga-tion. Sans que les élèves aient des référencestechniques et/ou stratégiques sur la course derelais, il s’agissait de réaliser le meilleur tempspossible en équipe sur un relais de 10 × 25 mètres.Les élèves disposaient de quatre essais. Entre

Figure n°3 – une vue du document vidéomontrant deux élèves en action, du départ

du 1er coureur jusqu’à la transmission du témoin au 2nd coureur

13 au sens de conjecture en mathématiques

Page 10: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

70

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

chaque essai, un temps de régulation leur étaitaccordé. ils pouvaient ainsi à l’aide d’unefiche noter ce qui avait fonctionné et ce qui posaitencore problème et formulaient sous la formed’une idée (hypothèse) ce qu’ils allaient mettreen place pour être plus efficaces. ils pouvaientainsi, dans une démarche d’essais et erreurs,s’interroger sur l’efficacité de leur projet decourse et donc apporter des pistes d’amélio-ration pour les essais suivants. Les compétencesainsi travaillées sont de deux ordres : la capa-cité à résoudre la coordination des vitesses entreles coureurs et la capacité à coopérer et à semettre en projet. Lors de la deuxième phase,les élèves devaient jouer le rôle du profes-seur, avec la consigne suivante : « tu es en char-ge d’un groupe d’élèves que tu as filmé dansson activité de course de relais. quelles ques-tions pourrais-tu leur poser pour leur per-mettre de progresser ? ». Les élèves devaientensuite indiquer leurs niveaux de questionnement.La troisième phase a consisté à mettre lesélèves en pratique physique pour qu’on puis-se savoir si les activités d’analyse et de rai-sonnement pouvaient avoir des effets sur lesperformances des élèves. L’activité du pro-fesseur a consisté alors à accompagner lesélèves les plus en difficulté dans leur ques-tionnement : «  Comment vous êtes-vous orga-nisés  ? Comment faites-vous pour ne pasperdre de temps dans la transmission dutémoin ? quand partez-vous ? Pourquoi ? »

L’évaluation des réponses

Pour déterminer les niveaux de progres-sion, nous avons repris l’un des outils élabo-ré et mis en œuvre par l’équipe du premier LéaEvaCoDiCE (Gandit, 2015)  : un tableaud’autoévaluation de compétences en quatreniveaux14 (Gandit, Lepareur, 2016). un des résul-

tats de cette recherche était que les élèvesavaient le sentiment de progresser grâce à lamise en œuvre et l’appropriation de ce tableau.Les quatre niveaux de questionnement, dési-gnés par N1, N2, N3 et N4 – ordonnés par ordrecroissant de compréhension – ont été choisisde manière interdisciplinaire, afin d’évaluerle niveau de raisonnement. ils correspondentà une progression dans la complexité et l’abs-traction. Nous utilisons le mot de niveaumême si tout cheminement vers la complexitén’emprunte pas nécessairement tous lesniveaux. Les deux niveaux N3 et N4 corres-pondent aux niveaux auxquels nous souhai-tions amener les élèves.

La description des différents niveaux anécessité un aménagement disciplinaire. Leniveau N1 correspond à une première approchedu sujet traité : les références du document enhistoire-géographie, les premiers élémentsde compréhension en Français, l’organisa-tion matérielle de l’activité en EPS. En mathé-matiques, habituellement, dans les énoncés pro-posés aux élèves, la question est présente, leproblème est posé, on demande très rarementaux élèves de trouver une question. Nousavons donc choisi de comptabiliser dans leniveau N1 les questions d’ordre mathéma-tique non pertinentes par rapport à la suite defigures. Le niveau N2 regroupe les questionsqui sont en prise avec le document, mais nerévèlent pas les enjeux ou les notions. Les ques-tions du niveau N3 traduisent une capacité d’abs-traction, une prise en compte de l’implicite dela part des élèves. au niveau N4, les élèvessont capables de prendre de la hauteur etd’avoir également un recul sur les enjeux ounotions des disciplines.

Les résultats de la recherche

voici d’abord quelques exemples dequestions effectivement posées par les14 voir le tableau en annexe 1, concernant les mathéma-

tiques.

Page 11: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

71

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

élèves dans les différentes disciplines, avecl’indication des niveaux auxquels nous lesrapportons.

En histoire, une question considérée deniveau N2, « quel est le bâtiment le plus au sudde la ville ? » ; une question relevant du niveauN3, « a quoi sert la tour Magne ? » ; enfin, pourle niveau N4, « En quoi Nîmes est-elle uneville gallo-romaine ? ».

En français, classe de 6ème, une question attri-buée au niveau N1, « a quel temps la lettre aété écrite ? » ; au niveau N3, « où est Félicien ? ».

Concernant la classe de CM2, une questionde niveau N2, « quelle est sa note en géogra-

phie ? » ; de niveau N4, « Est-ce que les mar-tiens sont des monstres ? ».

En mathématiques, une question relative autest n°1 (voir figure n°1), qui relève du niveauN1, « Combien il y a de droites ? » ; au niveauN2, « quel est le centre du cercle ? » ; une ques-tion de niveau N3, « quelles sont les droites paral-lèles ? » ; enfin une question de niveau N4, mêmesi elle n’est pas sous la forme interrogative, « Ecrisles méthodes de construction. ».

Les tableaux n°2 et n°3 de la page suivan-te présentent, pour chaque test, le nombre de ques-tions posées par les élèves de chaque classe, danschacune des disciplines, ces questions étantclassées suivant les quatre niveaux.

tableau n°1 – Description des niveaux de questionnement dans les différentes disciplines

Page 12: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

72

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

En histoire-géographie, les élèves ontcompris la nécessité de faire appel à desconnaissances pour dépasser la simpleapproche descriptive du document. Le véri-table enjeu est bien d’amener les élèves auniveau 4, sans négliger les niveaux infé-rieurs. Le niveau 2, pour la géographie et l’his-toire, est une étape essentielle, qui est tropsouvent négligée : les élèves ont souventl’impression qu’il faut aller chercher l’inter-prétation dans les connaissances en portantmoins d’attention au document lui-même,l’enfermant dans un statut de document pré-texte. Certaines questions d’élèves ont été dif-ficiles à catégoriser, notamment celles qui fai-saient appel à des connaissances en lien avec

le document, mais sans apporter réellementd’éléments de compréhension et d’analyse.Enfin, les élèves ont été plus à l’aise en géo-graphie, d’où une meilleure réussite au test1, qu’en histoire (test 2) : ils ont mieux cher-ché à décrire le document en géographie, cequi leur a parfois permis d’atteindre desquestions de niveau 3, alors qu’en histoire,ils ont parfois cherché à atteindre tout desuite le niveau 3, en cherchant à faire appelà des connaissances non pertinentes par rap-port au document. Ceci confirme, pour nous,la représentation générale que les élèves ontde ces disciplines, une description du mondepour la géographie et une approche ency-clopédique pour l’histoire.

tableau n°2 – Nombre de questions classées par niveaux, proposées par les élèves lors du test 1

tableau n°3 – Nombre de questions classées par niveaux, proposées par les élèves lors du test 2

Test 1

histoire

géographie

Maths français

2e degré

français

1er degré

EPS

N1 12 25 27 5 20

N2 29 42 49 70 17

N3 44 13 13 23 51

N4 15 20 11 2 12

Test 2

histoire

géographie

Maths français

2e degré

français

1er degré

EPS

N1 16 38 6 8 10

N2 35 26 43 56 18

N3 45 7 26 34 29

N4 4 29 25 2 43

Page 13: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

73

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

En mathématiques, on note un grand nombrede questions de niveau 1, qui montre une incom-préhension du problème ou de l’enjeu du test. Lesélèves cherchent, au travers de ces questions, àinventer des opérations avec des nombres, quin’ont pas vraiment de sens. Le test 2 a globale-ment été moins bien réussi lorsque l’on voit lenombre de questions par niveau : plus de ques-tions de niveau 1, moins de questions de niveaux2 et 3. Le problème était plus complexe et les élèvessont moins entrés dans la démarche du test.usuellement en mathématiques, les élèves sontmoins sollicités sur la formulation de problèmesque sur leur résolution. on note néanmoins uneprogression d’un petit nombre d’élèves sur le niveau4 entre les deux tests.

En français, pour les premier et seconddegrés, l’analyse des questions proposéespar les élèves au premier test a conduit à unemeilleure explicitation des consignes et desattentes pour le 2ème test, par exemple recen-trer les questions sur des éléments qui visentà la compréhension et à l’interprétation dutexte. Les élèves de cours moyen ont cher-ché au départ à formuler des questions dechaque niveau. Globalement, ils se sont plusappliqués à atteindre des questions de niveau3 au test 2. Le niveau 4 est plus difficile àatteindre pour ces élèves, qui ont moins tra-vaillé cette dimension dans l’année. Pourles élèves de sixième, on note un glissementdu nombre de questions vers les niveauxplus élevés entre les tests 1 et 2. une autreexplication possible est le fait d’avoir travailléplus explicitement le questionnement sur lestextes, en faisant référence aux différentesattentes des paliers. on a constaté que cer-tains élèves, « bons » élèves sur le plan sco-laire, ont eu beaucoup de mal à investir ladimension interprétative et affective, alors quecertains élèves, plus en difficulté, sont trèsà l’aise sur ce plan, quitte à négliger lesquestions de compréhension de base.

En EPS, les effets sur la performance ontété immédiats, puisque le gain de temps, com-pris entre 3s et 4s20 sur quatre essais lors de lapremière phase, passe à un gain compris entre5s75 et 7s70 après l’analyse de la vidéo. Maisce qui est le plus remarquable, c’est l’améliora-tion de la qualité et du niveau de questionnementdes élèves. Les élèves débattent plus facilement,les questions portent sur le comment faire ou surle comment refaire (niveaux 3 et 4 de question-nement). Les élèves se sentent tous concernés parle projet de course à construire collectivementet dépassent un questionnement de niveau 1 quiporte exclusivement sur les résultats de l’action(niveau 2) et/ou sur des aspects de comparaisonentre élèves de la même équipe (niveau 1).

Les tableaux par discipline (n°4 à n°8) pré-sentent, pour une classe et une discipline don-née, le nombre d’élèves dans leur niveau maxi-mum de questionnement (l’élève a posé au mini-mum une question de ce niveau-là et ce niveauest son maximum). L’analyse a été faite pour mesu-rer la progression entre les deux tests en séparantla population étudiée en deux sous-populations,« maximum atteint N1-N2 » et « maximumatteint N3-N4 ». Par exemple, dans le tableau n°4,qui concerne l’histoire-géographie, un élève estresté aux niveaux N1-N2, deux élèves qui avaientatteint les niveaux N3-N4 au premier test n’ontatteint que les niveaux N1-N2 au second test.

tableau n°4 – Progression en histoire-géographie

En histoire-géographie, la grande majori-té des élèves a atteint les niveaux N3 et N4, en

T2T1

N1 - N2 N3 - N4

N1 - N2 1 0

N3 - N4 2 17

Page 14: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

74

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

interrogeant le sens des éléments du document.Les résultats en terme de progression sont, enrevanche, un peu décevants parce qu’aucunélève, resté dans les niveaux N1 et N2 du pre-mier test, n’a posé de question de niveaux N3et N4 dans le deuxième test.

tableau n°5 – Progression en français au collège

En français, en sixième, les élèves vontvers des questionnements plus complexes ou despostures de lecteur 15 plus diversifiées.

tableau n°6 – Progression en françaisà l’école élémentaire

En français, en élémentaire, on peut faireune différence entre les élèves de CM1 et de CM2.Ces derniers sont au départ plutôt dans N3 etN4. Les élèves de CM1 ont progressé vers lesniveaux les plus élevés.

tableau n°7 – Progression en mathématiques

En mathématiques, on observe la même ten-dance que dans les autres classes. au deuxiè-me test, la consigne a été mieux comprise, deséléments ayant été donnés lors de la correctiondu premier test.

tableau n°8 – Progression en EPS

En EPS, bien que le protocole soit un peudifférent, la tendance est la même que dans lesautres classes.

toutes disciplines confondues (tableaun°9), on note, pour les élèves qui étaient auniveau N1-N2 au premier test, une pro-gression dans la compréhension du raison-nement pour environ 19% des élèves et,pour 9,5% des élèves, pas de changement.on note que 85% des élèves ont exploré lesniveaux N3-N4 au deuxième test, c’est-à-dire qu’ils sont dans une dynamique dequestionnement.

tableau n°9 – Progression toutes disciplines confondues

T2T1

N1 - N2 N3 - N4

N1 - N2 4 4

N3 - N4 2 10

T2T1

N1 - N2 N3 - N4

N1 - N2 2 6

N3 - N4 1 15

T2T1

N1 - N2 N3 - N4

N1 - N2 10 20

N3 - N4 6 69

89 (85 %)

T2T1

N1 - N2 N3 - N4

N1 - N2 2 3

N3 - N4 1 12

T2T1

N1 - N2 N3 - N4

N1 - N2 1 7

N3 - N4 0 15

15 on fait référence ici aux postures de lecteur théoriséesen didactique du français à la suite des travaux de Domi-nique Bucheton, « Les postures du lecteur », in Patrick Demou-gin et Jean-François Massol, coord, Lecture privée et lec-ture scolaire, CrDP de Grenoble, 1999.

Page 15: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

75

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Pour compléter notre analyse, nous noussommes interrogés sur la compréhension par lesélèves des niveaux de questionnement et nousavons introduit la variable «  compréhensionniveaux », désignée par CN, de la manière sui-vante : pour chaque classe et chaque test, nousavons comptabilisé le nombre d’élèves identi-fiant correctement le niveau auquel correspon-dait sa question (tableaux n°10 et n°11). L’objec-tif est double : du côté des élèves, il s’agit derévéler clairement les niveaux qu’ils ont abor-dés afin qu’ils se tournent vers les niveaux man-quants. Du côté de l’enseignant, cela permet devérifier que l’élève a bien compris et distinguéles différents niveaux.

on remarque un décalage entre le fort pour-centage constaté (tableau n°9) des élèves attei-gnant les niveaux N3-N4 et les pourcentages plus

faibles d’élèves identifiant correctement lesdifférents niveaux de questionnement. uneexplication possible serait que les élèves n’avaientpas encore le recul nécessaire pour intellec-tualiser les niveaux de progression. De plus, cer-taines questions plus complexes étaient plus dif-ficiles à classer pour les élèves. Les résultats pluspositifs de l’EPS viennent du fait que l’objec-tif de la démarche et de la tâche est plus faci-lement identifiable pour les élèves (améliorerle temps cumulé). Peut-être cette démarchecorrespond-elle mieux aussi aux représenta-tions qu’ont les élèves de la discipline ?

Nous avions souhaité comparer ces résul-tats avec le ressenti demandé aux élèves à la finde chaque test. Nous n’avons malheureuse-ment pas été en mesure de développer plusavant cette analyse.

tableau n°10 – Compréhension des niveaux par les élèves lors du test 1

tableau n°11 – Compréhension des niveaux par les élèves lors du test 2

Test 1

histoire

géographie

Maths français

2e degré

français

1er degré

EPS

cN (nombred’élèves identifiantcorrectement /effectif de la classe)

8/20

(40%)

8/21

(38%)

18/26

(69%)

14/19

(74%)

20/23

(87%)

Test 2

histoire

géographie

Maths français

2e degré

français

1er degré

EPS

cN (nombred’élèves identifiantcorrectement /effectif de la classe)

10/20

(50%)

8/20

(40%)

15/25

(60%)

14/20

(70%)

18/24

(75%)

Page 16: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

76

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Un bilan du côté des enseignants

Le bilan concernant les gestes profes-sionnels des enseignants expérimentateursappelle les constats suivants. tout d’abord,concernant l’enrôlement, la mise en situationa été stimulante pour le premier test. Le deuxiè-me test a montré qu’il était moins nécessaired’insister sur la mise en situation car de nom-breux élèves avaient intégré la démarche, grâceaux activités intermédiaires mises en place.De même, les élèves avaient moins besoind’explicitation des niveaux, ils semblaientainsi en mesure de se passer du sur-étayage.

L’appropriation des niveaux N3-N4 par unebonne partie des élèves a permis aux enseignantsd’identifier plus facilement les élèves quiavaient besoin encore d’étayage et de mettreen œuvre des dispositifs d’enseignement dif-férencié. il est à noter que les élèves en réus-site aux tests ne correspondaient pas toujoursau groupe de « bons élèves » de la classe. Cer-tains ont été déstabilisés par la tâche, ce qui apu générer chez eux une certaine frustration.Par exemple, en français, le type de questionsnon investies par les « bons élèves » a entraî-né une remise en question de la représentationchez l’enseignante des compétences à faireacquérir suivant le «  profil  » d’élèves : unlacher-prise et une attention plus forte à lasensibilité chez les « bons élèves scolaires » quise tournent plus vite vers les questions techniques.En outre, la démarche d’inciter l’élève à uneméthodologie de questionnement a pris une placeplus importante dans les pratiques enseignantes.

Les limites

Les limites qu’a rencontrées cette expéri-mentation ont été de différents ordres. La pre-mière difficulté a résidé en la formulation et ladistinction de quatre niveaux de progression. Eneffet, en français, si, pour les besoins de la

recherche et un souci de clarté, compréhen-sion littérale et compréhension plus fine / infé-rentielle ont été distinguées, les recherches surla lecture littéraire ont bien démontré que laconception étapiste, hiérarchisée de la lecturecompréhension comme « on comprend d’abord,on analyse ensuite » est erronée 16. il s’agissaitdonc d’établir des niveaux pas tant sur la pro-gression chronologique, linéaire, du raisonne-ment (contrairement aux autres disciplines)que sur la difficulté de la tâche ou une dimen-sion moins travaillée dans l’habitus de lecturedes élèves (l’évaluation axiologique ou esthé-tique). Le deuxième obstacle rencontré est l’éta-blissement d’une description de chaque niveau,qui soit cohérente entre les différentes disciplines.

Beaucoup de discussions ont eu lieu entreles enseignants avant qu’un certain consensuspuisse s’établir. il reste que certaines questionsd’élèves ont été difficiles à classer, ainsi enfrançais, celles qui appelaient une interprétationsubjective, un investissement affectif (parexemple, « qu’est-ce qui est drôle ? » ou «  aurais-tu fait comme le garçon ? »). Ces questions nerelèvent pas vraiment d’un des niveaux telsqu’ils ont été définis. Elles ont été classées enniveau N4 car elles amenaient à une prise de dis-tance avec le texte. En mathématiques, la défi-nition du niveau N1, qui correspond aux ques-tions hors-sujet, a amené un décalage dans lesinterprétations des résultats par rapport auxautres disciplines qui n’ont pas pris en comp-te ces questions. L’objectif essentiel a égalementéchappé à un certain nombre d’élèves : il ne s’agis-sait pas simplement de poser des questions,mais de déterminer l’enjeu mathématique du docu-ment. Le choix du document disciplinaire sup-port des tests a constitué une troisième difficulté :

16 « […] nous retiendrons en définitive une conception inter-active de ces deux modes d’appréhension du texte littéraire »,Falardeau, « Compréhension et interprétation : deux com-posantes complémentaires de la lecture littéraire. », revuedes sciences de l’éducation, vol. 29, n°3, 2003, p.674.

Page 17: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

77

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

choisir un document, qui ne privilégie pas tropun niveau de questionnement par rapport à unautre. ainsi, par exemple en histoire-géographie,le fait que le document soit une photographieinduisait davantage des questions de niveauN2. Les élèves avaient ainsi plus de difficultéà envisager des questions pertinentes qui révè-lent l’enjeu du document. outre la nature du docu-ment disciplinaire choisi, sa place et son exploi-tation au cours de la séance ont été différentesen EPS par rapport aux autres disciples. une autrelimite de la démarche mise en œuvre est l’uti-lisation systématisée d’une grille préétablie quirisque d’enfermer l’élève dans un automatismeréducteur, notamment en français face à untexte littéraire. Enfin une quatrième limite tientà la disparité dans les pratiques des enseignantsimpliqués, avant le premier test, mais aussientre les deux tests. La mise en place du pro-tocole expérimental lors du premier test a néces-sairement eu un impact inégal, que nous n’avonspas mesuré, sur les pratiques des enseignants,durant la période entre les deux tests.

Conclusion

Malgré tout, les conclusions de cette expé-rimentation ont permis de montrer une pro-gression forte, commune aux disciplines, dans

l’activité de raisonnement des élèves. En effet,le protocole mis en place révèle que, lorsque lesélèves accèdent à la connaissance des niveauxde questionnement, ils progressent dans leur acti-vité de raisonnement dans plusieurs disciplines,cela malgré leurs spécificités propres. L’appli-cation de cette démarche, ou du moins le recoursrécurrent à des activités de questionnement,aux différentes disciplines aideraient les élèvesà faire du lien dans leurs apprentissages.

Cette expérimentation a permis d’identifierdes leviers pour apprendre aux élèves à raisonner.Elle a pris appui sur la phase de questionnement,comme une étape incontournable dans l’activitéde raisonnement. Cette étude montre qu’apprendreaux élèves à se poser des questions constitue unepiste de travail pour les enseignants, afin queleurs élèves accèdent à différents niveaux de ques-tionnement, qui restent souvent implicites dansles classes.

Pour aller plus loin, il aurait été intéressantde mesurer l’impact de l’activité de raisonne-ment des élèves sur leurs performances scolaires.autrement dit, la mise en place d’un protoco-le de ce type permet-elle d’améliorer les résul-tats scolaires, lorsque les élèves progressentdans les niveaux de questionnement ?

remerciementsNous remercions Fédérique Letué17, membre del’irem de Grenoble, pour l’aide apportée concer-nant l’analyse des données.

17 Maître de Conférences, département StiD de l’iut2de l’université Grenoble alpes et laboratoire JeanKuntzmann.

Page 18: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

78

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Bibliographie

Bruner, J. (1983) Le rôle de l’interaction de tutelle dans la résolution de problèmes,Le développement de l’enfant, Savoir faire, savoir dire, PuF, Paris, traduction deM. Deleau.

Bucheton, D. (2009) L’agir enseignant : des gestes professionnels ajustés, otarès édi-tions, toulouse.

Duval, r. (1991) Structure du raisonnement déductif et apprentissage de la démons-tration, Educational Studies in Mathematics 22.

Gandit, M. & Lepareur, C. (2016) Effets de différentes modalités d’évaluation for-mative sur l’évolution du milieu de l’élève. in S. Coppé (Dir) Symposium « Desdispositifs d’évaluation formative en mathématiques aux apprentissages desélèves ». actes du colloque Evaluation et Didactiques, janvier 2016. Lisbonne.

Gandit, M. (2015) L’évaluation au cours de séances d’investigation en mathématiques.recherches en éducation, 25, 67-80

http://www.recherches-en-education.net/iMG/pdf/rEE-no21.pdf (cons. 20/06/2020)

Gandit, M. (2014) Evaluation formative et démarches d’investigation en mathéma-tiques, dans le cadre du Léa EvaCoDiCE, publication en ligne sur le site de l’ifé,

http://ife.ens-lyon.fr/lea/le-reseau/manifestations/rencontre-nationale-des-lea-2014/depot-actes-lea/evaluation-formative-et-demarches-d2019investigation-en-mathema-tiques-dans-le-cadre-du-lea-evacodice (cons. 20/06/2020).

Meyer, M. (2011) réponses à propos de questionnement et historicité, in Meyer, Michel(dir.) a propos de : questionnement et historicité, revue internationale de phi-losophie, 2011/3 (n° 257), p. 120.

Page 19: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

79

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

ANNExE 1tableau de progression utilisé en mathématiques dans le précédent

Léa (EvaCoDiCE) qui a servi de base pour le présent protocole

Page 20: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

80

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Le professeur explique aux élèves qu’ils vont faire un travail destiné à la recherche sur lafaçon dont ils apprennent, la façon dont ils raisonnent.

Première partie

il demande aux élèves de prendre une feuille, d’écrire leur nom. il distribue une photogra-phie d’un paysage des andes (voir figure n°4) et la projette, puis donne la consigne n°1 suivante :

« vous collez cette photo sur votre feuille. vous jouez le rôle de professeur(e). quelles ques-tions poseriez-vous à un(e) élève sur cette photographie ? vous écrivez vos questions.».

Le professeur laisse les élèves rédiger leurs questions pendant 10 min.

au bout de 10 min, il projette au tableau et distribue par écrit la description des niveaux dequestionnement (ci-dessous, fiche-élève 1). Le professeur les explique aux élèves. il demandede coller cette description des niveaux sur la feuille de questions, en dessous des questions déjàposées.

Fiche-élève

Le professeur donne ensuite la consigne n°2 suivante, qu’il écrit au tableau :

« vous prenez un stylo de couleur différente, avec lequel vous numérotez (1, 2,3 ou 4), suivant les niveaux 1, 2, 3, 4, les questions que vous venez d’écrire. »

au bout de 10 min, le professeur donne la consigne n°3 suivante, qu’il écrit au tableau :

« vous complétez, avec le même stylo que pour la consigne n°2, par d’autresquestions. »

Deuxième partie sur le ressenti des élèves : cette deuxième partie est la même pour toutes les disciplines

Le professeur projette au tableau les questions et la modalité de réponse ci-dessous (en bleu).il explique aux élèves qu’ils vont devoir répondre aux deux questions suivantes en coloriant unebarre qui se trouve sur une feuille à distribuer (fiche-élève 2). La fiche-élève 2 est à coller surla feuille, en dessous des questions ou au verso.

Le professeur relève les feuilles avec les fiches-élève 1 et 2 collées dessus, ainsi que le docu-ment donné au départ.

ANNExE 2 Protocole d’expérimentation en histoire-géographie, pour le test 1

Niveau 1 : la réponse permet de présenter le document.

Niveau 2 : la réponse permet de décrire le document.

Niveau 3 : la réponse permet d’expliquer les éléments du document.

Niveau 4 : la réponse relie le document à la progression en géographie cette année.

Page 21: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

81

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

question 1 – as-tu compris les niveaux ? « Pour dire à quel point tu as compris, tu vas colorierla barre qui se trouve sur ta feuille. Plus elle est coloriée, mieux tu as compris. »

J’ai compris les niveaux :

question 2 – Les niveaux t’ont-ils aidé(e) à formuler des questions ? « Pour dire à quel pointles niveaux t’ont aidé(e) à formuler des questions, tu vas colorier la barre qui se trouve sur tafeuille. Plus elle est coloriée, plus les niveaux t’ont aidé(e). »

Les niveaux m’ont aidé(e) à formuler des questions :

Fiche-élève

question 1 – as-tu compris les niveaux ?

Ma réponse : je colorie la barre pour dire à quel point j’ai compris les niveaux.

question 2 – Les niveaux t’ont-ils aidé(e) à formuler des questions ?

Ma réponse : je colorie la barre pour dire à quel point les niveaux m’ont aidé(e).

Page 22: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

82

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Figure n°4 – La photo donnée aux élèves, en géographie, ainsi que les deux fiches-élèves

Page 23: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

83

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Le professeur explique aux élèves qu’ils vont faire un travail destiné à la recherche sur lafaçon dont ils apprennent, la façon dont ils raisonnent.

Première partie (la deuxième partie du test est identique à celle du protocole en histoire-géographie)

il demande aux élèves de prendre une feuille, d’écrire leur nom. il distribue un documentcomportant des figures sur quadrillage qui constituent une suite (figure n°5), puis donne la consignen°1 suivante :

« vous jouez le rôle de professeur(e). quelles questions poseriez-vous à un(e) élève sur cette suite de figures ? vous écrivez vos questions.».

Figure n°5 – La suite de figures proposées aux élèves

Le professeur laisse les élèves rédiger leurs questions pendant 10 min. au bout de 10 min,il projette au tableau et distribue par écrit la description des niveaux de questionnement (ci-des-sous, fiche-élève 1). Le professeur les explique aux élèves. il demande de coller cette descrip-tion des niveaux sur la feuille de questions, en dessous des questions déjà posées.

Fiche-élève 1

Le professeur donne ensuite la consigne n°2 suivante, qu’il écrit au tableau :« vous prenez un stylo de couleur différente, avec lequel vous numérotez (1, 2,3 ou 4), suivant les niveaux 1, 2, 3, 4, les questions que vous venez d’écrire. »

au bout de 10 min, le professeur donne la consigne n°3 suivante, qu’il écrit au tableau : « vous complétez, avec le même stylo que pour la consigne n°2, par d’autres questions. »

ANNExE 3 Protocole d’expérimentation en mathématiques, pour le test 2

Niveau 1 : la question n’a pas de lien direct avec le problème.

Niveau 2 : la réponse à la question est explicitement dans le document.

Niveau 3 : pour répondre à cette question, il faut faire le lien entre les figures.

Niveau 4 : pour répondre à cette question, il faut avoir compris le procédé de construction des figures.

Page 24: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

84

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Pour le test 1

Le professeur explique aux élèves qu’ils vont faire un travail destiné à la recherche sur lafaçon dont ils apprennent, la façon dont ils raisonnent.

Première partie(la deuxième partie du test est identique à celle du protocole en histoire-géographie)

Le professeur demande aux élèves de prendre une feuille, d’écrire leur nom. il distribue untexte documentaire (voir texte 1 page ci-contre), puis donne la consigne n°1 suivante :

« vous jouez le rôle de professeur-e. quelles questions poseriez-vous à un-e élèvesur ce texte ? vous écrivez vos questions.».

Le professeur laisse les élèves rédiger leurs questions pendant 10 min.

au bout de 10 min, il projette au tableau et distribue par écrit la description des niveaux dequestionnement (ci-dessous, fiche-élève 1). Le professeur les explique aux élèves. il demandede coller cette description des niveaux sur la feuille de questions, en dessous des questions déjàposées.

Fiche-élève 1

Le professeur donne ensuite la consigne n°2 suivante, qu’il écrit au tableau :

« vous prenez un stylo de couleur différente, avec lequel vous numérotez (1, 2,3 ou 4), suivant les niveaux 1, 2, 3, 4, les questions que vous venez d’écrire. »

au bout de 10 min, le professeur donne la consigne n°3 suivante, qu’il écrit au tableau :

« vous complétez, avec le même stylo que pour la consigne n°2, par d’autres questions. »

ANNExE 4 Protocole d’expérimentation en français au collège (classe de Sixième) et en CM2

Niveau 1 : la question porte sur la présentation du document.

Niveau 2 : la réponse à la question est explicitement dans le texte.

Niveau 3 : la réponse n’est pas explicitement dans le texte.

Niveau 4 : la réponse permet de relier ce texte au travail (textes, thèmes) de l’année.

Page 25: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

85

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Planète Mars. neuf heures du soirCher papa, chère maman

Eh oui. Me voici sur la planète Mars. J’espère que vous vous êtes bien inquiétésdepuis ce ma7n et que vous m’avez cherché partout. D’ailleurs, je vous ai observésgrâce à mes satellites espions et j’ai bien vu que vous faisiez une drôle de tête cetaprès-midi. Même que papa a dit : «Ce n’est pas possible, il a dû lui arriver quelquechose!» (Comme vous le voyez, mes micros longue distance sont ultra puissants).Eh bien. J’ai un peu honte de le dire. Mais je le dis quand même, parce que c’est lavérité : je suis rudement content que vous vous fassiez du souci. C’est de votre faute,après tout. Si vous ne m’aviez pas interdit d’aller au cinéma avec François, je neserais pas parti. J’en ai marre d’être traité comme un gamin. D’accord, je n’auraispas dû vous traiter de vieux sadiques. Mais maman m’a bien traité de gros mollas-son, alors on est quitte.

Ne me demandez pas comment je suis arrivé ici. C’est un secret et j’ai juré de nepas le dire. En tout cas. Je me plais bien sur Mars. Les gens ne sont peut-être pas trèsagréables à regarder, mais ils sont super sympas. Personne ne fait de réflexion quandvous avez le malheur d’avoir un 9 en géographie. Vous voyez à qui je fais allusion...

Il y a quand même des choses un peu bizarres. Je ne parle pas des scarabéesque les Martiens grignotent à l’apéritif. Sur Terre aussi, il y a des trucs impossibles àmanger. Les choux de Bruxelles, par exemple ou le gras de jambon. Non, le plustordu, c’est la façon dont on fait les bébés. Il suffit qu’un garçon ou une fille se regar-dent dans les yeux, et hop ils deviennent papa-maman. J’ai déjà une demi-douzained’enfants. Je crois que je vais mettre des lunettes de soleil. C’est plus prudent. J’aiencore des tas de choses à vous raconter, mais je préfère m’arrêter là. Portez-vousbien et à bientôt, j’espère.

Félicien

PS : Vous seriez gentils de m’envoyer deux sandwiches au saucisson, un yaourt à lafraise et une bouteille de jus de raisin. Et dites-moi si vous êtes encore fâchés.

PS : Vous n’avez qu’à laisser le colis et la lettre devant la porte du grenier. Ne vousinquiétez pas, ça arrivera.

texte 1 distribué aux élèves pour le test 1 – B. Friot, Nouvelles histoires pressées, édition Milan

Page 26: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

86

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Pour le test 2

Le protocole est identique au précédent, mais à partir du texte suivant :

texte 2 distribué aux élèves pour le test 2 –Louis Espinassous, Jean de l’ours, Cairn éditions 2013

[…]

« Maupas ! Le « Mauvais Passage »… La forêt de hêtres et de sapins se fait iciplus sombre, le sentier s’engage peu à peu entre deux parois rocheuses.

— Allez Mireille, avance !

Jean tire sur la longe de l’ânesse. Il y a encore une bonne heure de marche avantde rejoindre la route au Chêne de l’Ours, et la pente est raide sur l’étroite sente quidévale à travers la forêt. Mireille, chargée d’une bonne douzaine de lourds fro-mages, reste insensible à l’injonction 1 du jeune garçon. Elle pose précautionneuse-ment un sabot après l’autre sur les cailloux du chemin. Regardant Jean d’un airgoguenard 2, elle agite ses grandes oreilles comme pour lui dire : « C’est pas ungamin de douze ans qui va me commander, non ! » Fine et Farou, les deux chienslabrits 3, trottinent devant. Quelques dizaines de mètres en arrière, Pépé suit, aurythme lent mais régulier de ses vieilles jambes de berger.

Soudain, Mireille s’immobilise, bloquée sur ses quatre jambes toutes raides, oreillesdressées. Jean, surpris, se retourne et voit les gros yeux de l’ânesse tout ronds defrayeur. Fine et Farou se précipitent contre lui en poussant de petits gémissementsplaintifs. Quelque chose de chaud coule le long de ses bottes… Farou est en trainde faire pipi sur ses jambes. Les bêtes sont terrorisées. Jean sent comme un frissoncourir sur sa nuque. Les animaux lui ont communiqué leur sourde frayeur, d’autantplus insidieuse qu’elle est incompréhensible. Immobile, il cherche des yeux songrandpère…

Seul, il est seul. »

1 - injonction = ordre

2 - goguenard = moqueur

3 - labrits = race de chien (berger des Pyrennées)

Page 27: pLUriDiScipLinAire DU rAiSOnnemenT

REPERES - IREM. N° 122 - janvier 2021

87

UNE APPROchE PLURIDIScIPLINAIRE

DU RAISONNEMENT

Le professeur explique aux élèves qu’ils vont faire un travail destiné à la recherche sur lafaçon dont ils apprennent, la façon dont ils raisonnent.

Première partie (la deuxième partie du test est identique à celle du protocole en histoire-géographie)

il demande aux élèves de prendre une feuille, d’écrire leur nom. il montre une vidéo de cour-se de relais, puis donne la consigne n°1 suivante :

« tu es en charge d’un groupe d’élèves que tu as filmés dans leur activité decourse de relais. quelles questions pourrais-tu leur poser pour leur permettrede progresser ? »

Le professeur laisse les élèves rédiger leurs questions pendant 10 min.

au bout de 10 min, il projette au tableau et distribue par écrit la description des niveauxde questionnement (ci-dessous, fiche-élève 1). Le professeur les explique aux élèves. ildemande de coller cette description des niveaux sur la feuille de questions, en dessous desquestions déjà posées.

Fiche-élève 1

Le professeur donne ensuite la consigne n°2 suivante, qu’il écrit au tableau :

« vous prenez un stylo de couleur différente, avec lequel vous numérotez (1, 2,3 ou 4), suivant les niveaux 1, 2, 3, 4, les questions que vous venez d’écrire. »

au bout de 10 min, le professeur donne la consigne n°3 suivante, qu’il écrit au tableau :

« vous complétez, avec le même stylo que pour la consigne n°2, par d’autres questions. »

ANNExE 5 Protocole d’expérimentation en EPS

Niveau 1 : la question porte sur l’organisationnel.

Niveau 2 : la question porte sur le résultat.

Niveau 3 : la question porte sur comment faire.

Niveau 4 : la question porte sur comment refaire.