principes et démarche

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1 Guide d’orientation à l’approche bi-plurilingue ELAN de l’enseignement du français Un guide de référence pour proposer aux structures éducatives, aux formateurs de formateurs, aux enseignants des éléments afin de réussir l’apprentissage du français au cours des trois premières années en prenant en compte les acquis et les apprentissages en langue première. Juin 2014 Principes et démarche

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Page 1: Principes et démarche

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Guide d’orientation à

l’approche bi-plurilingue

ELAN de l’enseignement

du français

Un guide de référence pour proposer aux structures

éducatives, aux formateurs de formateurs, aux

enseignants des éléments afin de réussir

l’apprentissage du français au cours des trois

premières années en prenant en compte les acquis

et les apprentissages en langue première.

Juin 2014

Principes et démarche

Page 2: Principes et démarche

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Table des matières Introduction ......................................................................................................................................................................................................................... 3

Principes généraux de l'enseignement-apprentissage du français dans une perspective bi-plurilingue ............................................................................... 5

Principes du bilinguisme scolaire ..................................................................................................................................................................................... 5

Comment aborder la comparaison L1-L2 ? .................................................................................................................................................................. 7

Comment favoriser le transfert ? .................................................................................................................................................................................. 9

Quel usage faire des deux langues en classe ? ......................................................................................................................................................... 10

Créer des situations d’apprentissage mettant en relation les deux langues ............................................................................................................... 10

Quelles compétences en français l'élève doit-il acquérir pendant les trois premières années? ......................................................................................... 15

Tableau 1 : répartition indicative sur trois années .......................................................................................................................................................... 16

1. Communiquer dans des situations simples de la vie quotidienne ........................................................................................................................... 16

2. Interagir en classe .................................................................................................................................................................................................. 18

3. Développer des discours oraux .............................................................................................................................................................................. 19

4. Comprendre le fonctionnement de la langue .......................................................................................................................................................... 19

Comment enseigner? ........................................................................................................................................................................................................ 21

Suggestions de démarches d’enseignement ................................................................................................................................................................. 21

L'enseignement de la langue 1 .................................................................................................................................................................................. 21

L'enseignement de la langue 2 .................................................................................................................................................................................. 21

types d'activité .................................................................................................................................................................................................................. 24

Tableau 2 : DES COMPÉTENCES ET RESSOURCES ... À DES SUPPORTS POUR ENSEIGNER, PRÉSENTS DANS LA MALETTE ...................... 25

Exemple de la démarche de réflexion sur la langue : ................................................................................................................................................. 29

6. Glossaire ....................................................................................................................................................................................................................... 32

Page 3: Principes et démarche

3

INTRODUCTION

Le présent guide vient compléter la boîte à outils du formateur, qui comporte déjà un guide en lecture-écriture couvrant aussi bien les aspects relatifs

à la L1 qu'au français.

Il constitue un document de travail pour tout enseignant appelé à mettre en œuvre des choix pédagogiques (une approche) destinés à améliorer la

maîtrise du français oral dans un apprentissage bilingue d’une langue nationale (L1) et du français (L2). Cette approche, conçue dans le cadre du

programme ELAN, telle qu’elle est ici concrètement illustrée, vise à installer des compétences de communication orales et écrites en français chez les

élèves, à installer des compétences d'analyse du français :

en relation avec ce qu'ils savent dire et faire dans l'autre langue;

afin d'accompagner le passage à l'écrit en français (cf guide lecture-écriture).

Au plan didactique, ce guide présente des principes visant à créer des comportements pédagogiques adéquats chez le maître :

amener les élèves, par une démarche active :

o à entrer dans la langue française ;

o dans un deuxième temps à commencer à lire et écrire dans cette langue des énoncés qui auront un sens pour lui;

o puis à développer des compétences orales et écrites suffisantes pour pouvoir communiquer en français et suivre plus tard des cours

dans cette langue.

Explorer les possibilités de transfert entre la langue 1 et la langue 2, dans l'optique d'une didactique de la convergence et ce, même dans les

cas où la langue africaine peut sembler très éloignée de la langue française. Dans une perspective bilingue, le maître, à travers ses activités,

s’appuie sur les liens entre les deux langues (en se référant à la bigrammaire adéquate quand elle existe) pour améliorer l’acquisition de l’une

en tenant compte de l’autre et surtout en facilitant le passage ou le transfert de L1 vers le français.

Observer, en L1 et en français, les différences des acquis des élèves, l’évolution de leurs compétences au cours de l’année et leur rythme ou

vitesse d’apprentissage. Pour diminuer ces différences, il exploite les évaluations qu’il fait pour proposer des activités communes ou spécifiques

à un groupe d’élèves en difficulté.

Page 4: Principes et démarche

4

Le présent document servira pour l’enseignement du français en rapport avec une langue 1, tout en tenant compte du fait que cette langue est différente

du français. Il concerne en particulier les trois premières années de l’enseignement de base; mais certains de ses contenus peuvent être exploités pour

d’autres niveaux plus avancés ou selon d'autres rythmes.

Le guide comporte deux parties :

La première présente :

les principes de base de l’approche adoptée en matière d'enseignement du français oral dans une perspective bi-plurilingue ;

l’explicitation d’une démarche d’enseignement-apprentissage des compétences orales en français ;

un lexique simplifié des principales notions utilisées.

La seconde partie propose :

un tableau indiquant les domaines des compétences visées et les ressources correspondantes (c'est-à-dire les savoirs ou connaissances et les

savoir-faire) que l’élève doit mobiliser pour développer les domaines des compétences ;

des types de supports à exploiter;

des exemples d’activités.

Ainsi, ce guide fournit à l’enseignant un cadre méthodologique et des outils pratiques pour l’aider à préparer et réaliser pour sa classe des situations

d’apprentissage en tenant compte du programme officiel et des spécificités de l’enseignement bilingue dans son pays. Il explicite des principes qui

peuvent orienter ses comportements pédagogiques et lui propose des exemples d’activités et de supports pour développer chez l’élève des savoirs et

savoir-faire variés. Loin de recevoir des recettes, et tout en faisant preuve d’autonomie et de créativité, l'enseignant peut imaginer d’autres activités

ou supports, selon le contexte de sa classe et les orientations indiquées.

Page 5: Principes et démarche

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PRINCIPES GÉNÉRAUX DE L'ENSEIGNEMENT-

APPRENTISSAGE DU FRANÇAIS DANS UNE

PERSPECTIVE BI-PLURILINGUE

Pour enseigner le français en contexte plurilingue, il faut disposer de quelques principes généraux, à ne jamais perdre de vue. Ces principes sont

valables pour toute langue, mais sont particuliers, car ils prennent en compte le contexte d'une didactique du bi-plurilinguisme.

Selon les systèmes scolaires ayant adopté une approche bilingue au primaire, le moment d’introduction de la L2, le rythme et l’intensité de son

introduction, les contenus de l’apprentissage de la L2 (oral seul, oral et écrit avec décalage ou sans, utilisation de la L2 pour des apprentissages autres

que le langage …), diffèrent. Mais dans tous les cas, l’enfant doit se bâtir des compétences à l’oral pour pouvoir entrer dans l’écrit de la L2. Ce guide

présente donc une organisation des apprentissages de la L2 après la L1 qui doit être adaptée aux décalages spécifiques à chaque curriculum bilingue.

Principes du bilinguisme scolaire

L’écolier déjà scolarisé en L1 n’a pas tout à apprendre de zéro en entrant dans la L2 (ici le français).

il dispose de compétences en L1 sur lesquelles s’appuyer, son apprentissage du français sera donc étayé et ‘coloré’ par la L1 dont il dispose

déjà ;

il doit devenir un individu bi-plurilingue, pouvant passer d’une langue à l’autre et utiliser selon les situations tout son répertoire linguistique

bi-plurilingue.

L’enseignant doit pratiquer une didactique de la mise en relation entre L1 et L2 – c’est-à-dire

a) mener des comparaisons :

pour favoriser les transferts de ce qui est commun

pour établir des contrastes nécessaires entre L1 et L2 chez les élèves ;

b) pratiquer et encourager les reformulations entre une langue et l’autre.

À tout moment, les deux langues sont à traiter dans leur coexistence bilingue : l’éducation bilingue est à

concevoir comme un tout.

Page 6: Principes et démarche

6

L’approche didactique du bi-plurilinguisme proposée dans ce guide met

l’accent d’abord sur des comportements pédagogiques bilingues : penser

aux liens entre les deux langues, mieux comprendre les processus de

transfert, préparer des fiches d’activité en tenant compte des articulations

entre L1 et L2, évaluer les compétences à partir des difficultés de transfert

constatées, et prévoir des activités qui éveillent l’élève à des

rapprochements ou comparaisons simples et ponctuelles à différents

niveaux entre les langues en présence.

Attention, cela ne veut pas dire un mélange désordonné de ces langues

dans la réalité de la classe. Cela veut dire qu’au niveau de la préparation et de la mise en œuvre des cours, il faut prendre en compte plusieurs

éléments :

1. Les convergences ou points communs entre les deux langues : même type d’écriture, même catégorie grammaticale, comme le nombre

(singulier/pluriel);

2. Les différences : chaque langue a ses particularités linguistiques et aussi culturelles. On dira donc que la L1 facilite l’apprentissage d’un

côté (par les convergences) et constitue un obstacle d’un autre côté (par les différences);1

3. Les acquis de l’élève en L1 : ceux-ci peuvent être exploités pour une meilleure acquisition du français.

4. Les difficultés sont constatées dans les deux langues, ou sont spécifiques :

- difficultés communes : elles peuvent être traitées dans les séances de L1 ou de L2 (l’élève ne voit pas l’utilité d’un signe de ponctuation : à

quoi servent les « : »), et on pourra s’appuyer sur le transfert d’une langue vers l’autre;

- difficultés spécifiques : l’enseignant mettra l’accent sur une différence de formulation par une activité de comparaison, par exemple.

1 Nous indiquons au maître la possibilité d’approfondir cette question des convergences et des différences linguistiques en consultant la bi-grammaire

du français et de la langue nationale qu’il enseigne (publications de l’OIF, 2010).

Dans la logique d’un enseignement bilingue rénové, le

maître qui enseigne L1 et L2 ne raisonne plus en termes

d’apprentissages cloisonnés et sans liens, mais vise à

développer les compétences bilingues des élèves.

Page 7: Principes et démarche

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Comment aborder la comparaison L1-L2 ?

On ira de la perception à la réflexion : sur ces différents aspects, l’enseignant aidera d’abord les élèves à percevoir les faits à comparer

(premier palier d’introduction du français), pour qu’il puisse mieux se contrôler dans leur utilisation. Ensuite il proposera, dans les paliers

suivants, des comparaisons explicites : une réflexion comparative sur des faits de langue. Pour cela, on peut s’appuyer sur les bigrammaires

disponibles.

On partira d’un petit corpus d’exemples contrastés portés au tableau pour matérialiser les différences à observer.

La réflexion sera inductive : les élèves vont formuler la différence (dans leur langue d’abord) pour en prendre conscience, avec l’aide de

l’enseignant s’ils ont du mal à le faire seuls. Il ne s’agit pas de faire mémoriser des règles de grammaire comparée.

Que peut-on comparer ?

Plusieurs niveaux sont à considérer pour traiter les convergences (aspects communs) et les divergences (aspects différents) entre la langue de l’enfant

et la L2 :

La phonie (cf.Guide ELAN Lecture-écriture)

Les habitudes d'écoute de la L1 peuvent faire obstacle à l’écoute de la L2 : le maître fera construire rapidement le bon filtre d’écoute de la L2 par

entraînement à la discrimination auditive.

Dans la progression d’apprentissage, on s’appuiera d’abord sur des sons similaires en L1 et L2, mais on travaillera davantage les sons qui n’existent

pas en L1 (voir les comptines et récitations dans le cahier d’activités).

La graphie (cf. Guide ELAN Lecture-écriture)

Si l’élève, habitué à utiliser une graphie latine dans L1, retrouve cette même graphie en français, il convient de lui montrer cette ressemblance et de

renforcer cet usage.

Ex. 1 : la lettre U est présente dans les deux langues, mais se prononce [y] comme dans ‘mur’ en français, et non pas [u] comme dans ‘doux’ comme

dans la plupart des langues africaines.

Ex. 2 : le code graphique du français comporte des relations complexes entre un son et plusieurs lettres : quand 1 son = 1 suite de lettres ON, OU, ou

parfois plusieurs suites de lettres IN, AIN, EIN, EN, qui seront à enseigner pas à pas ;

Ex. 3 : le français distingue des mots de sens différent se prononçant pareil par leur seule orthographe : saut / seau / sot … : chacun de ces mots écrits

doit être mémorisé pour lui-même ;

Page 8: Principes et démarche

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Ex. 4 : le français utilise des lettres tantôt prononcées tantôt muettes pour marquer des informations grammaticales obligatoires : pour le genre, on

aura : un / une / l’ enfant aimable / souriant-e.

Le lexique

Chaque langue découpe la réalité à sa manière par les mots, et ce découpage fait que les mots

d’une langue ne sont pas les équivalents exacts des mots de l’autre.

Ex. En français, le même mot ‘oncle’ désigne le frère du père ou le frère de la mère, et le mot

‘cousin-e’ désigne tous les enfants d’oncles ou de tantes, ou de cousins, en somme toutes les

relations de famille un peu moins proches.

La morphologie grammaticale

Ex. Le pluriel est marqué de façons très diverses en français, et différemment à l’oral et à l’écrit :

les oiseaux chantent, nos parents partent, ils sont rentrés, … alors qu’il est marqué de façon

régulière et prononcé dans la plupart des langues africaines.

La syntaxe de la phrase

Ex. L’ordre des mots dans la phrase en français est : Sujet – Verbe – Objet, alors qu’il est : Sujet

– Objet – Verbe en bambara. Pour travailler sur cette comparaison, il faut d’abord faire prendre

conscience des catégories Nom (+ Sujet, Objet), Verbe, par des observations et des

manipulations en L1 d’abord, puis quand le besoin de comparaison surgit, en français par les

mêmes démarches.

Les formules

Chaque langue a fixé des formules plus ou moins figées correspondant à un sens global,

parfois à une fonction grammaticale :

Ex. Éwé : dans ma main (il y a) <quelque chose> / Fr. j’ai <quelque chose> pour exprimer la

possession.

Il faut les apprendre comme telles individuellement. C’est aussi un objet de découverte qui peut

être amusant, de chercher l’équivalent d’une expression imagée de L1 en L2 ou l’inverse; et de

découvrir la variété de ces expressions imagées.

Ex. Éwé: la faim me tue / Fr : j’ai faim

Ressemblances et différences

Les points communs entre les deux langues :

Même type d’écriture,

même catégorie

grammaticale, comme le

genre,

même sens de la lecture

Les différences :

Un son peut s’écrire avec

2 ou 3 lettres (on, ou, in

ain, ein, en, ill)

Certaines lettres sont

muettes

Un mot se distingue d’un

autre qui se prononce

pareil par une lettre qui ne

se prononce pas (prêt,

près)

Une lettre peut avoir un

rôle grammatical : un/une ;

souriant/ souriant-e

Page 9: Principes et démarche

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Les usages culturels

Ex. 1 : salutations

Les formules et les comportements de salutation sont très codés dans chaque culture. Il faut apprendre à saluer selon différents critères : le moment de

la journée, le statut de la personne qu’on salue, parfois son métier. Lorsqu’on passe au français, il faudra trouver les formules appropriées équivalentes

et les situations où on les utilise.

Ex. 2 : la compréhension dépend des représentations culturelles sur les choses et les faits :

L’élève transfère des habitudes ou des connaissances culturelles liées à L1 : il comprend un texte français sur la fête, par exemple, en fonction de

l’image qu’il a de la fête dans la culture de la L1. C’est une bonne occasion pour comparer et expliquer les différences culturelles.

Toutes ces comparaisons éveillent l’esprit de l’enfant et lui permettent de développer en même temps des aptitudes cognitives générales de

comparaison et de réflexion, qui lui serviront dans tous ses apprentissages.

Comment favoriser le transfert ?

L’élève utilise ses savoirs et savoir-faire déjà disponibles pour agir ou produire dans une nouvelle situation ; en percevant une ressemblance, il étend

à la nouvelle langue ce qu’il sait faire dans la langue qu’il connaît déjà : c’est ce qu’on appelle communément le transfert.

À chaque niveau d’organisation de la langue (cf. § Comparer les langues ci-dessus), les savoir-faire transférables n’ont pas à être introduits comme

éléments nouveaux, mais simplement à être présentés et entraînés, pour renforcer leur usage en L2.

Exploiter les acquis en L1 : les élèves ont déjà acquis des notions de lecture et d’écriture en langue nationale. On n’apprend pas à lire et à

écrire une 2e fois parce qu’on apprend une nouvelle langue. On va exploiter ce qui a été acquis en L1 pendant les activités de français. Il est

bon de reprendre les techniques et les stratégies utilisées en L1.

Faire référence aux stratégies de L1 pour favoriser le transfert au français : au cours des leçons de français (sur les outils de la langue et

à l’oral), faire ressortir (activer) les savoirs et les savoir-faire essentiels (phonétiques, grammaticaux, culturels) acquis en L1 selon l’objectif

ciblé : demander à l’élève : « en L1 comment fais-tu? », comparer, faire référence à L1 pour favoriser le rapprochement entre deux formes

semblables ou différentes. Faire observer un mot, faire remarquer les différences dans les deux langues.

Reformuler ce que l’enfant ou le maître dit : il existe plusieurs types de reformulation:

o M - M : le maître reprend, dans la même langue ou dans l'autre, pour mieux expliquer ;

Page 10: Principes et démarche

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o M - E : l’élève reprend les paroles du maître en les modifiant, pour s'approprier les manières de dire du maître ;

o E - M : le maître reprend les paroles de l’élève en les modifiant, pour lui fournir de nouvelles manières de dire ;

o Ea - Ea : l'élève reprend ses paroles en les modifiant pour se corriger (‘dire mieux’) et montrer qu'il comprend ;

o Ea - Eb : un élève reprend les paroles d’un autre élève en les modifiant pour améliorer ce que dit le premier : à encourager dans le travail

de groupe.

Mais la traduction est à éviter : si l’enseignant traduit systématiquement, les élèves savent qu’ils n’ont pas à fournir l’effort de comprendre, car la phrase

va être redite dans une langue qu’ils comprennent bien. La traduction devrait être le dernier recours. Avant de traduire, il faut essayer les reformulations

en L2, les explications, les images, le mime, les objets réels, les expressions du visage ou du corps ou des exemples concrets.

Quel usage faire des deux langues en classe ?

Le degré d’utilisation de L1 dans un cours de français n’est qu’un aspect du bilinguisme.

Certains enseignants ont tendance à mélanger les deux langues en séance de français ou à transformer le cours de français en séance de traduction.

Leur argument est que les élèves ne comprennent pas et donc ne participent pas lorsqu’ils doivent s’exprimer en français. On finit alors par utiliser en

classe un mélange peu productif des deux langues. Il faut reconnaître aussi que certains enseignants, qui ne se sentent pas en sécurité lorsqu’ils font

usage du français, se réfugient parfois dans l’usage de L1.

Il ne s’agit pas de dire que l’utilisation de L1 en classe de L2 doit être totalement écartée. Le maître peut, à des moments précis, avoir recours à L1

pour faciliter l’apprentissage :

aider à résoudre un blocage de compréhension constaté chez l’élève;

favoriser une comparaison ponctuelle sur un fait linguistique qui se présente différemment en L1 et en L2;

expliquer une forme ou une notion à l’aide de mots en L1 et en français (la négation, un signe de ponctuation, ...);

créer dans la classe un environnement écrit bilingue (étiquettes, dessins avec des mots accrochés au mur en L1 et en français) : les mots

interpellent l’élève.

Créer des situations d’apprentissage mettant en relation les deux langues

Lorsqu’une deuxième langue est introduite chez les jeunes enfants, l’enseignant intervient à l’oral à trois niveaux :

1. le contenu : ex. : l’utilisation d’un vocabulaire précis pour comprendre ou exprimer un message (aussi appelé le niveau sémantique)

Page 11: Principes et démarche

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2. la forme : ex. : l’utilisation des conventions linguistiques pour comprendre ou exprimer un message (aussi appelé le niveau grammatical)

3. la fonction : ex., le but et l’intention de la communication (aussi appelé le niveau pragmatique)

Par exemple, quand un élève répond à la question « Quel âge as-tu? » et qu’il répond « J’ai 8 ans et demi », le contenu c’est son âge, la forme c’est

l’emploi du verbe avoir pour exprimer son âge et la fonction c’est de donner un renseignement précis à un adulte qui lui pose la question.

Pour faciliter l’accès à ces trois niveaux, il faut créer des situations d’apprentissage où les élèves pourront se servir des trois.

1. Faire progresser l’élève en français oral

Dans une approche bi-plurilingue, voici une progression typique de l’usage de la L2, pour un démarrage permettant un développement progressif de

l’usage de la L2 chez l’élève :

1. L’enseignant parle français aux élèves SANS MÉLANGER LES LANGUES, en faisant tous ses efforts pour ne pas traduire (en utilisant

le mime, les gestes, les objets concrets, les images, etc.)

2. Les élèves répondent dans leur langue, au début, car ils n’ont pas encore assez de vocabulaire pour répondre en L2. Le travail de

l’enseignant est de réagir en reformulant en français, pour les amener à acquérir du vocabulaire et des tournures de phrase.

3. Après quelque temps, les élèves commencent à insérer les mots qu’ils savent dans leurs réponses. L’enseignant encourage les élèves

à lui parler en français dès qu’ils savent quelques mots. Pour commencer, on observe un mélange de langues, faute de vocabulaire

français, mais après quelques semaines/mois, les phrases deviennent plus structurées et le mélange de langues cesse.

4. L’enseignant continue à reformuler, à donner aux élèves ce dont ils ont besoin pour s’exprimer et les encourage pour chaque effort. Ce

n’est qu’en parlant qu’ils apprendront à mieux parler, même si les débuts ne sont pas parfaits. L’enseignant accepte les erreurs et les

voit comme des pas vers le progrès.

5. Bientôt, les élèves parlent toujours en français à l’enseignant pendant les cours de français.

6. Plus tard, les élèves se parlent français entre eux au moins pendant les cours de français.

À éviter :

Les exercices qui ont tendance à l’acquisition mécanique et

artificielle du français, centrés sur les formes et dénués de

sens.

Page 12: Principes et démarche

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2. Favoriser la convergence didactique

Il est important de recourir à des principes pédagogiques et des démarches didactiques déjà expérimentés en L1 pour que l’élève garde ses repères

sur la façon de travailler et se sente ainsi sécurisé lorsqu’on passe à la L2. On peut détailler ce souci de convergence en ce qui concerne :

a. les façons de favoriser la communication;

b. les situations de communication à créer ;

c. les liens à établir entre oral, lecture et écriture,

d. les supports d’activités :

e. l’utilisation des langues pour apprendre.

3. Favoriser la communication en L2

Pour favoriser le développement de l’usage de la L2, il est recommandé de suivre les principes favorisant la communication qui ont déjà été mis en

œuvre en L1 :

installer un aménagement physique qui favorise l’écoute et l’attention (cercle, regroupement de tables-bancs, …);

établir des routines de classe. Par exemple, commencer la journée par le calendrier, la météo et le nombre de jours passés à l’école. Cette

répétition journalière des nombres, des jours de la semaine et d’expressions reliées au temps va vite amener les élèves à maîtriser ce

vocabulaire;

planifier du matériel pédagogique qui stimule la communication orale : les jeux où il faut se parler, les dialogues, les mimes, les charades sont

de bons supports de communication;

prévoir des regroupements variés d’élèves : il est bon de changer la configuration de la classe de temps en temps (si l’espace le permet) pour

que les élèves aient la chance de travailler avec d’autres élèves ou de voir le tableau sous un angle différent;

rédiger quelques règles de vie simples et claires avec les élèves en prenant soin de préciser les raisons et les conséquences;

créer un environnement d’apprentissage coopératif.

4. Créer des situations de communication en L2

Voici quelques situations de communication en L2 qui vont stimuler l’expression, et qui permettent à l’enseignant d’évaluer les progrès, auxquelles

l’élève a été familiarisé en L1. L’élève :

explique quelque chose à ses camarades

pose des questions

Page 13: Principes et démarche

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fait des liens avec ses expériences personnelles ou avec d’autres textes déjà lus

lève la main pour indiquer qu’il ou elle n’a pas compris

demande des clarifications

raisonne à haute voix

émet des hypothèses

s’autocorrige en s’exprimant

développe un argument (pensée critique)

participe aux jeux

5. Communication orale, lecture et écriture

Rappel : La communication orale, la lecture et l’écriture sont les trois domaines interdépendants de la littératie, dont la communication orale constitue

le fondement. Le lien étroit qui existe entre le développement du langage oral et du langage écrit facilite l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.

Les enseignants doivent exploiter la communication orale dans toutes les situations d’enseignement en littératie.

Ces échanges verbaux comme outils d’apprentissage permettent aux élèves :

d’approfondir leur réflexion,

de s’exprimer

de réagir en lecture et en écriture.

6. Les supports d’activités

Si le français est enseigné comme matière, l’enseignant s’appuie sur ce que l’élève a appris en L1 en utilisant des supports pédagogiques semblables

(mais pas exactement les mêmes) pour faciliter la compréhension et l’acquisition du nouveau vocabulaire. (Ex. : si le thème de la nourriture a été

exploré en L1, l’enseignant peut choisir un texte sur le même thème en français).

Mais il vaut mieux éviter d’utiliser des textes de la culture environnante pour enseigner le français. La langue est aussi le véhicule d’une culture. En

utilisant des textes en français évoquant la culture locale, l’enseignant prive les élèves d’apprendre et d’apprécier la culture de la nouvelle langue et

d’autres cultures du monde. Car le français peut aussi être le véhicule d’autres cultures africaines : par exemple, des contes d’Afrique centrale en

Afrique de l’Ouest et vice versa.

De même, l’utilisation de chants traduits d’une autre culture est à éviter. Chaque culture a ses propres chansons, avec des mélodies typiques et

appropriées à la prosodie de la langue. L’enseignant doit s’efforcer de choisir des chansons typiquement françaises pour enseigner le français et

typiquement africaines pour enseigner la L1.

Page 14: Principes et démarche

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7. Utiliser la L2 pour apprendre

Lorsqu’on passera – selon le curriculum national — à utiliser le français pour d’autres apprentissages (mathématiques, histoire, etc.), on aura affaire à

un autre type de convergence : l’élève qui a effectué des apprentissages en L1 pourra s’appuyer sur ce qu’il sait dans un domaine donné pour passer

au français et prolonger, étendre, approfondir ses apprentissages de ce domaine dans la L2. Cela demande d’avoir enseigné les ressources de langage

nécessaires (orales et écrites) en L2 auparavant. Mais en retour, l’utilisation de la L2 pour ces apprentissages d’autres domaines va ‘muscler’ la L2, en

amenant l’élève à l’utiliser pour le sens, pour traiter des contenus précis. Et les divers domaines du curriculum traités en français enrichiront le

vocabulaire, la syntaxe et l'aptitude à lire et à écrire en L2 de l’élève.

Page 15: Principes et démarche

15

QUELLES COMPÉTENCES EN FRANÇAIS L'ÉLÈVE

DOIT-IL ACQUÉRIR PENDANT LES TROIS PREMIÈRES

ANNÉES?

Il faut fixer un certain nombre de points à enseigner/apprendre pendant les trois premières années de français, quel que soit le moment auquel débute

cet apprentissage dans le curriculum.

Il est bien entendu que ces propositions ne se substituent pas à des curriculums nationaux existants, mais s'adressent avant tout à des pays qui n'ont

pas encore rédigé de proposition curriculaire bilingue.

Ici est donné un aperçu général de quatre domaines de compétences

1. Communiquer dans des situations simples de la vie quotidienne,

2. Interagir en classe,

3. Développer des discours oraux,

4. Comprendre le fonctionnement de la langue), déclinés en objectifs puis en ressources nécessaires à l'atteinte de ces objectifs.

Dans les tableaux, en face des éléments à enseigner, est proposée une répartition indicative sur trois années.

Le chiffre correspond à l'année où la notion

fait l'objet d'une étude (même si la

ressource a pu être utilisée avant, pour

communiquer).

Page 16: Principes et démarche

16

Tableau 1 : répartition indicative sur trois années

1. Communiquer dans des situations simples de la vie quotidienne

Objectifs Ressources

Vocabulaire Grammaire

1.1. Présenter (soi,

autrui, objet, animal,

lieu)

nom, prénom (1)

garçon/fille (1)

la famille (1)

animaux (domestiques, autres)

métiers

chiffres et nombres (âge) (1)

Je m'appelle (1)

je suis + (sexe, famille) (1)

Voici... (1)

C'est... (1)

J'ai sept ans... (1)

interroger sur nom (comment tu t'appelles?), âge

(quel âge tu as?), identité (qu'est-ce que c'est?) (1)

le possessif (mon, ma, etc.) (2)

le démonstratif (ce, ces, cette) (2)

le présent de quelques verbes courants (être) (2)

le présent de quelques verbes d'action (1 – 2 - 3)

Nom propre et nom commun (2)

1.2. Utiliser les

formules de politesse

bonjour, au revoir, comment ça va ?, s'il vous plaît,

merci

Monsieur, madame, Tanti, Tonton (1)

Est-ce que je pourrais + infinitif ? (2)

1.3. Parler de son état les sensations (faim, soif, chaud, fatigué, mal, etc.)

(1)

les sentiments (content, triste, peur, surpris) (2)

J'ai +... (1)

le présent du verbe avoir (2)

Je suis + … (1)

1.4. Exprimer ses

besoins

nourriture (1 et 2)

vêtements (2 - 3)

jeux (2- 3)

Il faut... (1)

J'ai besoin de... (2)

Page 17: Principes et démarche

17

1.5. Situer dans

l'espace

l'habitat (maison) (2)

villes, villages, lieux publics (2)

directions : gauche, droite (3)

Je suis à... J'habite à... (1)

il y a... (1)

sur, sous, dans, devant, derrière, à côté de, loin de,

près de, à (2-3)

Le présent du verbe aller (2)

noms propres et noms communs (2)

Je vais à, je viens de (3)

1.6. Situer dans le

temps

les chiffres et les nombres (1)

jours de la semaine, mois, date (1)

hier, aujourd'hui, demain (2)

matin, midi, soir, nuit

… passé (dernier), … prochain (3)

un, deux, trois, dix, cent, etc. (1)

connecteurs : d'abord, après, ensuite, enfin (3)

prépositions : avant, après, pendant (2-3)

il y a X temps (3)

1.7. Exprimer

l'appartenance

moi, toi, lui, elle, nous, vous (1)

mon, ton, son (1)

le mien, la mienne (3)

c'est mon... (1)

c'est à moi... (2)

c'est le mien... (3)

1.8. Parler d'un projet

verbes d'action (1 – 2 - 3)

verbe faire (2)

je vais + infinitif (2)

futur simple (3)

Page 18: Principes et démarche

18

2. Interagir en classe

Ressources

Objectifs Vocabulaire Grammaire

2.1. Parler des

éléments essentiels

de la communication

scolaire

Les objets de la classe (1)

Les lieux de l'école (1)

Les moments de l'école (2)

Les matières scolaires (2)

Le personnel de l'école (2)

C'est... voici... (1)

Il/elle s'appelle... (1)

2.2. Parler des

activités de classe

(notamment dire qu'on

n'a pas compris et

demander de répéter)

Les consignes (1 – 2 - 3)

Faire des signes pour dire qu'on n'a pas compris. (1)

Je (n')ai pas compris (1)

Je (n')ai pas entendu (1)

2.3. Exprimer ses

besoins liés à la

classe

être d'accord/pas d'accord (1) aimer/ne pas

aimer (2)

dire que, croire que, penser que(3)

Je (ne) sais pas (1)

Comment on dit/dit-on...? (1)

Je peux +...? (1)

s'il te/vous plaît (1)

la négation : pas (1)

Vous pouvez répéter ? (2)

Tu peux répéter ? (2)

ne... pas (2)

Est-ce que je peux...? (2)

2.4. Donner son avis

et réagir (à un texte lu

ou entendu, à une

situation)

Il faut... (2)

J'ai besoin de … (2)

je n'ai pas de... (2)

Page 19: Principes et démarche

19

3. Développer des discours oraux

Ressources

Objectifs Vocabulaire Grammaire

3.1. Raconter Verbes d'action (1-2-3) Le présent des verbes (1)

Le passé composé (2)

connecteurs du récit : d'abord, ensuite, après, alors...

(3)

L'imparfait (3)

3.2. Décrire Noms de parties d'objets, de personnes, de

lieu

adjectifs : couleur, forme, taille (1-2-3)

adverbes de quantité : beaucoup, un peu (2)

adverbes de manière : vite, doucement (2)

accord de l'adjectif (2)

genre et nombre du nom (2)

4. Comprendre le fonctionnement de la langue

Objectifs

L1

(tendances générales, mais à voir selon les

langues – adapter dans les bi-grammaires

Français

4.1. L'ordre des mots

dans la phrase

S-O-V (1) déterminant-nom (1)

S-V-O (2)

4.2. Être et avoir

être n'existe pas toujours (1)

être comme verbe d'état, mais aussi de lieu (1)

avoir comme verbe d'état (j'ai chaud) (1)

Page 20: Principes et démarche

20

4.3. Le nombre et ses

marques

des marques souvent sur le nom (1) des marques sur le nom et sur tous les mots en rapport

(2) (déterminant, adjectif) – accord avec le verbe. (2)

4.4. Le genre et ses

marques

pas de marques ou seulement pour les

animés (personnes, animaux) (1)

Tous les noms ont un genre et donnent leurs marques

aux mots en rapport (déterminants, adjectif) (2)

4.5. Les pronoms le pronom personnel (2) le pronom personnel (2, après traitement en L1))

4.6. Les époques et

les temps verbaux du

français

époques (passé, présent, futur) en général

marquées

temps souvent représenté en termes d'action

accomplie ou non (1)

époques distinguées (2)

plusieurs temps du passé (2-3)

4.7. L'accord dans le

GN

souvent pas d'accord (2), mais possibilité de

repérer les marques de classe (1)

accord entre le nom et les mots en rapport (2 -3)

4.8. L'accord sujet-

verbe

souvent pas de variation du verbe selon le

sujet (1)

accord du nom-sujet au verbe (3)

4.9. Les sons utilisés

par le français

beaucoup de sons identiques ou voisins entre

les deux langues

utilisation de tons (2-3)

voyelles longues ou brèves (2-3)

quelques sons apparaissant seulement en français et

qu'il faut faire repérer (1)

pas de ton (2)

longueur non pertinente (2)

Page 21: Principes et démarche

21

COMMENT ENSEIGNER?

Suggestions de démarches d’enseignement

L'enseignement de la langue 1

L'enfant qui suit des cours dans sa langue 1 doit bien sûr apprendre à communiquer dans cette langue. Mais ceci est essentiellement vrai à l'écrit : il

apprend à comprendre un texte écrit dans sa langue (lecture en L1) et à en rédiger (production d'écrits).

À l'oral, en revanche, il n'est pas utile de lui enseigner les bases de sa langue comme on le ferait pour une langue étrangère : l'enfant n'a pas besoin

dans sa langue d'apprendre à saluer, dire comment il s'appelle, demander le prix, dire une quantité : il sait déjà le faire avant d'entrer à l'école. À l'école,

il pourra développer sa langue comme outil pour apprendre : enrichir son vocabulaire, comprendre et bâtir des phrases plus complexes, se familiariser

avec divers genres textuels.

Mais surtout, ce que l'école doit lui apprendre sur sa langue 1, c'est comment elle fonctionne : déjà, il la découvre à l'écrit alors qu'il n'a fait que

l'entendre; il voit les « visages » des mots. En même temps qu'il communique en L1 (par écrit ou par oral), il doit commencer à découvrir quelques

règles : l'ordre des mots dans la phrase, la nature des mots, la manière dont le temps, la personne, le genre, le nombre fonctionnent. Cet

apprentissage, il ne le réalise qu'à l'école.

En le réalisant, il se prépare à découvrir le fonctionnement du français qui va être parfois voisin de sa langue, souvent différent.

L'enseignement de la langue 2

a. L'enseignement du français est essentiellement communicatif : il faut apprendre aux élèves à agir en français dans des situations de la vie

scolaire et de la vie quotidienne. Chaque situation est l'occasion de découvrir du vocabulaire et des structures du français utiles pour parler.

Cet enseignement repose sur :

l'analyse d'images qui représentent des situations de communication (surtout au début)

la lecture de texte qui présente des dialogues (quand l'élève commence à lire en français);

la pratique d'activités de communication entre élèves : jeux de rôles.

Page 22: Principes et démarche

22

b. L'enseignement communicatif du français s'accompagne d'une découverte des fonctionnements de la langue. Cette découverte se fait à partir

de ce que l'élève a découvert de sa langue 1, à travers différences et similitudes.

Comment faire la découverte des fonctionnements linguistiques de la L1 et du français?

L'enseignant ne fait pas de cours de grammaire de la L1 ni du français pendant les trois premières années, c'est-à-dire qu'il ne propose pas de leçon

toute construite avec règle à apprendre, puis à appliquer et vocabulaire grammatical complexe.

À la faveur d'une activité (orale ou écrite), il pose des questions aux élèves sur quelques phrases ou parties de phrase ou de texte qui présentent le

phénomène qu'il veut faire découvrir. Il fait manipuler des phrases, transformer, terminer, compléter, etc. pour faire remarquer aux élèves comment

cela fonctionne. En d'autres termes, il les place dans une attitude d'observation, de recherche.

La formalisation en une règle n'est pas obligatoire dans ces premiers niveaux et ne doit de toute manière intervenir qu'à la fin de plusieurs

questionnements, comme un bilan.

L’attitude générale de l’enseignant

Pour faciliter l’apprentissage dans les deux langues, l’enseignant doit :

favoriser les échanges entre élèves;

réduire et éviter les répétitions mécaniques;

adopter des démarches actives ;

choisir des supports et des activités ayant du sens pour les élèves ;

faire découvrir aux élèves des points de rapprochement ou de divergence des langues ;

accueillir avec bienveillance les erreurs des élèves et s'en servir comme d'une occasion de réflexion sur la langue.

Les supports et leurs usages

L’enseignant peut utiliser le matériel existant et disponible dans l’établissement ou dans la classe en vérifiant qu’il soit adapté aux compétences décrites

dans le référentiel.

L’usage de supports visuels est essentiel pour l’enseignement d’une langue, surtout d’une langue seconde. En voici quelques exemples :

Des posters avec dessins de situations de communication : des images mettant en scène des personnages dans des situations claires de

communication permettent aux élèves de comprendre ce que les gens ont à se dire, puis de découvrir, avec l'aide de l'enseignant et/ou par eux-

mêmes ce qu'ils se disent;

Page 23: Principes et démarche

23

Des objets : si vous voulez enseigner le nom des fruits et des légumes locaux en français, apportez ces mêmes fruits et légumes en classe

et jouez un jeu avec vos élèves. Rapidement, ils auront maîtrisé le vocabulaire tout en s’amusant. Avoir recours à des objets concrets ou en

images vous évitera d’avoir à traduire le mot.

Des mimes : traduire un mot est plus facile, mais les élèves ne le retiendront pas aussi longtemps que s’ils se souviennent de l’enseignant

en train de le mimer. L’image leur restera dans la tête associée au mot correspondant. Pour renforcer ce vocabulaire, engagez-les dans un

jeu de charade. Des élèves viendront mimer un mot et les camarades devront deviner le mot en français.

Des étiquettes : utilisez des étiquettes pour indiquer le mot français : le mur, la porte, la fenêtre, le tableau, le bureau, le table-banc, la

chaise, la craie, l’éponge, etc. Les élèves apprendront à les lire et à s’en servir dans leurs écrits.

Des fichiers alphabétiques : préparez une petite boîte dans laquelle les élèves pourront trouver d’un côté le nom de l’objet ou de

l’animal et de l'autre son dessin ou image. Par exemple : découpez un ballon dans le journal, collez-le sur un côté d’un petit carton et de l’autre

écrivez « un ballon ». Dès le courant de la première année, les élèves peuvent apprendre à les retrouver en ordre alphabétique.

Des fichiers thématiques : des boîtes avec des fiches par thème : la famille, les animaux domestiques, les animaux sauvages, la

nourriture, les vêtements, les transports, les métiers, etc. Les élèves devraient avoir accès à ces fichiers en tout temps.

Comme vous le voyez, laissez libre cours à votre imagination et à votre créativité pour créer d’autres supports selon les besoins de votre enseignement

et de vos élèves ; vos élèves n’en apprendront que mieux.

Page 24: Principes et démarche

24

TYPES D'ACTIVITÉ

Nous proposons un ensemble d’activités que l’enseignant peut adapter au contexte de sa classe, selon une démarche active et motivante.

Les jeux : c’est ce que les enfants font le mieux. Ils apprennent très tôt quels sont leur place et leur rôle dans la société à travers le jeu. Les

élèves sont motivés et apprennent vite. Le jeu est pour la plupart du temps une répétition, mais une répétition que les enfants apprécient

fortement.

Les jeux de rôles : une petite mise en scène d’une situation de la vie courante ou d’un événement qui donne aux élèves la chance de parler

à haute voix devant un public et parfois même d’improviser tout en laissant libre cours à leur imagination.

Le dialogue : les élèves ont l’occasion de s’exercer aux échanges, aux tournures de phrases, aux nouvelles expressions, à l’intonation et à

la prononciation. De plus, ils y gagnent souvent en confiance.

La dramatisation : après la lecture d’une histoire, d’un conte, les élèves peuvent jouer le récit dans leurs propres mots, avec leurs propres

gestes et même leurs propres accessoires pour rendre la scène plus vivante. C’est une excellente façon de développer le langage oral et de

vérifier la compréhension.

Les nouvelles de la classe : l’enseignant demande aux enfants de rapporter des nouvelles qu’ils présentent oralement. L’enseignant

choisit deux ou trois phrases parmi ce qui est donné. Le nom de l’enfant figure dans la phrase et c’est l’enfant qui va épeler son propre nom.

L’enseignant peut prendre appui sur les expressions et les mots utilisés pour en faire des minileçons d’orthographe et de grammaire.

Page 25: Principes et démarche

25

Tableau 2 : DES COMPÉTENCES ET RESSOURCES ... À DES SUPPORTS POUR ENSEIGNER, PRÉSENTS DANS LA MALETTE

1. Communiquer dans des situations simples de la vie quotidienne

Mallette

Objectifs Activités Supports de la mallette

1.1. Présenter (soi,

autrui, objet,

animal, lieu)

Dialogues pour se présenter

Le « montre-moi » : un enfant apporte un objet de la maison

et en parle

Le jeu de charade

Le mime

La découverte : faire une liste de noms propres et une liste

de noms communs : trouver les différences

Récitation « Mon chaton » (cahier d’activités)

Le jeu des 8 familles

Les charades du document d’activités orales

Le jeu des chiffres de 1-9

Livret 1 – 8 enfants dans un lit

Livret 3 – La voiture

Livret 9 – La tortue

1.2. Utiliser les

formules de

politesse

Dialogues de situation courante

Chansons et comptines (voir cahier d’activités)

Récitation « bonne fête, petite maman » (cahier d’activités)

Livret 3 – La voiture

Livret 5 – Pas le temps

Livret 6 – La vieille voisine

Jeu des 8 familles

1.3. Parler de son

état

Images décrivant des sensations ou des sentiments

Mimer des sentiments et les faire deviner par les camarades

Livret 7 – Sylvie

Livret 8 – L’avare

1.4. Exprimer ses

besoins

Faire un remue-méninges des mots reliés à la nourriture ou

aux vêtements ou aux jeux et les catégoriser

Utiliser des images pour relier mot à image

Jeu de la valise : « Dans ma valise, je mets… » chaque

enfant doit ajouter un vêtement.

Livret 5 – Pas le temps

Livret 6 – La vieille voisine

Le jeu des 8 familles

Les jeux de consonnes initiales

Les jeux de rimes

Page 26: Principes et démarche

26

Jeu du panier : même chose que la valise, mais les élèves

ajoutent des noms de nourriture à la phrase : « Dans mon

panier, je mets… »

1.5. Situer dans

l’espace

Jouer à décrire des endroits publics et les élèves doivent

deviner l’endroit

Cacher un objet dans la classe. Un élève doit suivre des

directions pour le retrouver.

Récitation « Une terre » (voir cahier d’activités)

Livret 3 – La voiture

Livret 2 – Le chien voyageur

Livret 8 – l’avare

Jeu du labyrinthe

1.6. Situer dans le

temps

Activités du calendrier et de la météo (voir cahier d’activités)

Chansons et comptines (cahier d’activités)

Récitation « Petite pluie » (cahier d’activités)

Livret 1 – 8 enfants dans un lit

Livret 4 – Au pays du lundi

Livre 7 - Sylvie

L’affiche des jours de la semaine

L’affiche des mois de l’année

L’affiche des nombres

Le tableau de 100

Étiquettes des jours de la semaine

1.7. Exprimer

l’appartenance

Chanson : « J’ai rencontré le petit chien » (voir cahier

d’activités)

Faire la chaîne de rangée en rangée : on fait passer un

objet. Celui qui donne dit « Est-ce que le (crayon, livre) est

à toi ? » Celui qui reçoit dit « oui, c’est le mien. ».

Récitation « Mon chaton » ou « Une terre » (cahier

d’activités)

Livret 2 – Le chien voyageur

Livret 3 – La voiture

1.8. Parler d’un

objet

Expliquer comment faire quelque chose (construire ou

fabriquer un objet, ou une action comme tresser, jouer un jeu,

etc.)

Récitation « Petite souris » (cahier d’activités)

Livret 2 – Le chien voyageur

Livret 3 – La voiture

Livret 6 – La vieille voisine

Livret 8 – L’avare

Page 27: Principes et démarche

27

2. Interagir en classe

Mallette

Objectifs Activités Supports de la mallette

2.1. Parler des éléments

essentiels de la

communication

scolaire

Jeu des devinettes (cahier d’activités) Livret 4 – Au pays du lundi

Livret 7 - Sylvie

2.2. Dire qu’on n’a pas

compris et demander de

répéter

Dialogues, en particulier le dialogue du sourd, où un

élève répond à l’autre quelque chose de différent de ce

qui a été demandé.

Mimes

Situation : l’étranger dans un restaurant où le serveur

ne le comprend pas

Livret 5 – pas le temps

Livret 10 – La case des jours de pluie

Le jeu du labyrinthe

2.3. Exprimer ses

besoins liés à la classe

Reprendre un texte à l’affirmatif et le mettre au négatif.

Poser des questions de façons variées

Livret 9 – La tortue

Livret 7 – Sylvie

Jeu des 8 familles

2.4. Donner son avis et

réagir (à un texte lu ou

entendu, à une

situation)

Organiser de petits débats qui demandent aux élèves

de donner leur opinion.

Livret 8 – l’avare

Livret 9 – La tortue

Livret 10 – La case des jours de pluie

Page 28: Principes et démarche

28

3. Développer des discours oraux

Mallette

Objectifs Activités Supports de la mallette

3.1. Raconter Redire les histoires des livrets dans ses propres mots en

utilisant le temps approprié et les connecteurs pour l’ordre

chronologique

Faire retracer une journée typique aux élèves dans le bon

ordre avec le passé composé

Tous les livrets 1-10

3.2. Décrire Les mots amis ou mots d’emprunts (cahier d’activités)

Utiliser les adverbes de manière en éducation physique : vite,

doucement, etc.

Montrer un objet et demander aux élèves de le décrire

(forme, couleur, taille)

L’affiche des formes et des couleurs

Le jeu des couleurs

Le jeu des 8 familles

4. Comprendre le fonctionnement des langues

Pour comprendre le fonctionnement des langues, il faut observer, comparer pour comprendre avant de décrire... et éventuellement de retenir.

À cette fin, il faut commencer par faire observer les phénomènes à étudier (cf. Point 4 du tableau) en L1, avant de les faire étudier en L2. Le décalage

entre l'étude du phénomène en L1 et du phénomène en L2 doit toujours être respecté. L'élève doit avoir compris la notion et le fonctionnement dans

sa L1 avant de l'aborder en L2 (sous l'angle de la ressemblance ou de la différence). Le décalage peut aller de quelques mois à une année.

Il s'agit de se servir d'énoncés oraux ou écrits, produits par les élèves ou lus, pour les observer, les manipuler, les comparer, produire à leur propos

des hypothèses.

Ces énoncés doivent être écrits au tableau par le maître pour leur observation (transcrits d'énoncés oraux ou recopiés de textes écrits).

L'observation est guidée par les questions du maître.

On peut ensuite repartir de ces énoncés pour une activité communicative.

Page 29: Principes et démarche

29

Exemple de la démarche de réflexion sur la langue :

Ordre des mots dans la phrase

Langues concernées : Mali : bamanankan, tamasheq, fulfulde, songhay

Niveau d'étude conseillé : à partir de la 2e

année de français (Année 1 Niveau 2 du curriculum)

Exemples : Le chat les petits regarde.

Explication du fait

En français, l’ordre habituel de la phrase construite avec complément d’objet est : S – V – CO

En songhay de Gao et en bamanankan, l’ordre habituel est : S – CO – V (« Musa ga ham day » ; « Musa be kami san »)

L’élève reproduit l’ordre habituel de la phrase dans la langue nationale.

Démarche de découverte et construction de la notion

1. Faire observer le fait en langue nationale (ANNEE 1)

Pour faire repérer aux élèves la place de l’objet avant le verbe, la notion de verbe n’étant pas connue, on l’approchera par une série

de jeux :

Rassembler des énoncés à partir de textes lus par les élèves ou produits oralement. A partir de ces énoncés portés au

tableau, le maître propose une devinette en donnant un des débuts de phrase : S-O. Il demande aux élèves de compléter et

de finir la phrase. Pour ce faire, ils doivent produire des verbes. Ils retrouvent d'abord les verbes des énoncés au tableau,

puis sont invités à en produire de nouveaux.

Poursuivre avec le repérage de ces places dans la lecture de textes disponibles dans la classe.

Faire jouer les élèves entre eux : certains proposent des débuts de phrases, d'autres les terminent ; certains proposent un

verbe, d'autres complètent avec l'ensemble du début.

Page 30: Principes et démarche

30

2. Faire observer le fait en français (ANNEE 2)

Rappeler les observations faites sur la L1.

Pour faire repérer aux élèves la place de l’objet après le verbe, la notion d’objet n’étant pas forcément connue, on l’approchera par une série

de jeux.

Rassembler des énoncés à partir de textes lus par les élèves ou produits oralement. À partir de ces énoncés portés au tableau, le

maître propose une devinette en donnant un des débuts de phrase : S-V. Il demande aux élèves de compléter et de finir la phrase.

Pour ce faire, ils doivent produire des compléments d’objet.

Poursuivre avec le repérage de ces places dans la lecture de textes disponibles dans la classe.

Faire jouer les élèves entre eux : certains proposent des débuts de phrases, d'autres les terminent ; certains proposent un verbe,

d'autres complètent avec le début et la fin de la phrase.

La comparaison peut alors être faite avec le fonctionnement de la phrase dans la langue de l’élève : deux phrases équivalentes sont écrites

au tableau l’une en dessous de l’autre et des flèches illustrent les différences de position de l’objet et du verbe.

Conclusions à tirer (éventuellement) :

La phrase en français comporte au moins deux groupes de mots :

le groupe sujet indique ce dont on parle

le groupe du verbe apporte des informations sur le sujet

le groupe du verbe est dans l’ordre : verbe + nom complément.

3. Exercices

Exercice A

Recompose les phrases en reliant les groupes sujets aux

groupes verbaux

Le train écoute la maîtresse

Les élèves est intéressant

Mon livre bêle

Le mouton entre en gare

Page 31: Principes et démarche

31

Suggestions de types d'activité pour l'observation des langues

repérer un élément ;

comparer des phrases ;

compléter des phrases inachevées ;

produire des phrases ;

transformer des phrases : déplacer, supprimer, ajouter remplacer un élément et voir ce qui change ;

mettre des mots ou des groupes de mots dans des ensembles.

Exercice B

Écris les mots dans le bon ordre pour former une phrase

au ballon les enfants jouent

a mouillé la pluie la terre

les leçons explique le maître

Page 32: Principes et démarche

32

6. GLOSSAIRE

Bilinguisme, plurilinguisme, multilinguisme, bi-plurilinguisme :

Une personne est bilingue ou plurilingue lorsqu’elle utilise au quotidien deux ou plusieurs langues ; c’est souvent le cas dans une société ou

un contexte multilingue. Un système scolaire est multilingue quand il utilise plus d'une langue d'enseignement, de manière à s'adresser aux

enfants dans leurs différentes langues. Dans le mot bi-plurilinguisme, le préfixe bi- renvoie aux élèves, qui utilisent deux langues pour apprendre

à l'école, et aux classes où on apprend en deux langues. C’est pourquoi on a développé une didactique du bi-plurilinguisme, pour que

l’éducation au langage des enfants constitue un tout et fasse d’eux des personnes bi-plurilingues. Une personne bilingue ou plurilingue peut

utiliser chacune de ses langues séparément, elle peut aussi faire passer un message émis en langue A dans une langue B (voir Reformulation /

Traduction).

Comparaison, contraste :

Pour prendre conscience des ressemblances et différences entre L1 et L2 (cf. article Proximité, distance entre les langues, ressemblances,

différences), il faut apprendre à comparer les langues, aux différents niveaux de leur organisation, pour identifier ce qui est semblable en L1 et en

L2 (qui permet le transfert) et ce qui diffère (qui demande un effort d’acquisition). On découvrira au mieux le fonctionnement de la langue en

mettant en contraste des éléments de la langue et en voyant ce que ça change pour le sens (par ex. Un / Le garçon est venu —> on le connaît,

ou pas), ou entre L1 et L2 (par ex. la L1 utilise les noms nus (pas d’articles) / le français utilise des articles devant les noms).

Compétence, savoir, savoir-faire :

Apprendre, c’est se construire des savoirs (savoir que …, savoir si …, savoir quand …), des savoir-faire (pouvoir écrire son nom, pouvoir lire

l’énoncé d’un problème, …). Une compétence est un ensemble de savoirs et savoir-faire qu’on peut mobiliser pour agir (ex. la compétence à

raconter demande des savoirs et savoir-faire de lexique (nommer des personnes et objets, des événements), de grammaire (placer les

événements dans le temps, les relier entre eux), et au niveau textuel (organiser les phrases successives en un tout).

Convergence didactique :

L’élève doit trouver ses repères pour apprendre à l’école bi-plurilingue à travers les langues et les domaines de connaissance. Pour cela, les

choix didactiques faits pour les apprentissages en L1 et ceux pour les apprentissages en L2 doivent être en convergence, c’est-à-dire ressemblants

et allant dans le même sens. L’élève doit pouvoir trasnférer son savoir-apprendre construit dans les activités de classe en L1 aux activités

d’apprentissage en L2.

Page 33: Principes et démarche

33

Démarche inductive :

Elle organise la découverte du fonctionnement de la langue en partant d’observations d’éléments concrets pour faire des hypothèses sur la

façon dont cela fonctionne, avec l’aide du maître. Quand on a observé, manipulé, comparé, raisonné, formulé une hypothèse, vérifié sur d’autres

matériaux, on arrive à cerner une régularité, qui peut déboucher sur une règle de fonctionnement de la langue fournie par le maître pour stabiliser.

Grammaire, morphologie, syntaxe :

La grammaire est le niveau de la langue qui marque les relations entre les mots dans la phrase, et qui donne de l’information sous une forme

économique et obligatoire. Elle le fait de deux façons : a) en modifiant les formes (par ex. en conjuguant les verbes pour indiquer le temps), c’est

la morphologie, b) par l’ordre des mots dans la phrase, ou par de petits mots de relation, comme les prépositions : c’est la syntaxe.

L1, L2 :

La langue de naissance de l’enfant, c’est sa langue première (sa L1) ou ses langues premières (ses L1) quand le jeune enfant grandit dans

un environnement déjà plurilingue ; les autres langues qu’il acquiert ensuite sont des langues deux, trois, etc ; elles sont dite secondes quand

elles jouent un rôle social, sinon sont appelées étrangères. Après la petite enfance, il faut les apprendre d’une façon plus volontaire que la ou

les L1. Dans un cadre scolaire bi-plurilingue, la L1 se réfère à la première langue d’enseignement (une langue du milieu connue de l’enfant, qui

n’est pas forcément sa L1 de naissance et sert aux apprentissages scolaires), et la L2 est la deuxième langue d’enseignement (ici le français),

qui sert pour les apprentissages de certains domaines de connaissance, et devient après un temps dans certains pays la seule langue

d’enseignement.

Proximité, distance entre les langues, ressemblances, différences :

L’apprentissage de la L2 orale et écrite sera facilité par la prise de conscience des relations entre L1 et L2. L’apprenant peut réutiliser des

aspects semblables (par ex. les lettres existant dans les deux langues et se prononçant pareil : a, o, l, d, permettront dès le début, par transfert,

de lire des mots en L2). Même entre des langues supposées très distantes, comme les langues africaines et le français, on trouve des aspects de

leur fonctionnement qui se ressemblent. Les langues peuvent être très différentes à un certain niveau et se révéler proches à un autre niveau.

Reformulation / traduction :

Lorsqu’on a formulé un énoncé (exprimé un message), on peut vouloir reformuler son énoncé - c’est-à-dire le redire d’une autre façon, avec

d’autres mots, dans la même langue, pour être mieux compris ou pour être plus précis, ou pour nuancer son propos ou mieux s’adapter à son

interlocuteur ; on peut aussi reformuler l’énoncé d’un autre locuteur - c’est ce qu’on fait à tout moment dans la conversation ordinaire. En contexte

bi-plurilingue, on peut aussi reformuler un message déjà exprimé dans une langue dans une autre langue. Enfin, dans la classe bi-plurilingue, la

reformulation joue un rôle important pour aider aux apprentissages : le maître peut reformuler l’énoncé de l’élève dans la même langue pour

l’améliorer, ou reformuler un énoncé émis en L1 dans la L2, par exemple pour fournir à l’élève les moyens de s’exprimer en L2, ou en sens inverse,

de L2 en L1, pour mieux faire comprendre un message de la L2 en cours d’apprentissage. L’élève aussi peut reformuler son message pour

Page 34: Principes et démarche

34

l’améliorer, il peut aussi reformuler en L1 quelque chose qu’il a lu ou entendu en L2, pour s’assurer de la compréhension. La reformulation peut

être plus détaillée ou au contraire plus résumée que la formulation initiale. Tout cela est à distinguer de la traduction, qui est une activité visant à

retransmettre le plus fidèlement possible en langue B un message, un discours, un livre en langue A. C’est quand on dispose de compétences

très poussées dans les deux langues qu’on peut pratiquer la traduction.

Transfert, passage, transition :

Quand on se trouve dans un contexte où s’utilisent plusieurs langues, on les maintient séparées (on sait quand on parle en langue A ou en

langue B), mais on a souvent à faire passer un message d’une langue à l’autre, pour communiquer efficacement et de façon adaptée à ses

interlocuteurs. A l’école bi-plurilingue, la scolarité commence en L1 la première langue d’enseignement, puis on va introduire une L2 deuxième

langue d’enseignement. Il faut alors gérer le passage de L1 à L2 des messages (voir l’article Reformulation / traduction). Mais auparavant, la

didactique doit s’occuper de la transition entre L1 d’enseignement et L2 d’enseignement : prévoir comment un élève qui a commencé ses

apprentissages en L1 va pouvoir poursuivre ses apprentissages en L2, par exemple s’assurer qu’il acquière les moyens de comprendre et

s’exprimer en L2 pour les mathématiques après avoir commencé les mathématiques en L1. Du point de vue des apprentissages, l’élève peut

s’appuyer sur ses compétences en L1 pour entrer dans la L2, en s’aidant d’éléments semblables : on parle alors de transferts linguistiques,

pour concentrer ses efforts sur ce qui est différent. Il peut aussi s’appuyer sur des savoirs et savoir-faire déjà acquis en L1 pour les réutiliser et les

prolonger en L2 : on parle alors de transferts d’apprentissage.