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DROIT JUDICIAIRE PRIVE QUESTIONS SPECIALES DE DROIT JUDICIAIRE PRIVE TOME II Hakim BOULARBAH 1 ère MA Droit 2008-2009

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DROIT JUDICIAIRE PRIVEQUESTIONS SPECIALES DE DROIT JUDICIAIRE PRIVE

TOME II

Hakim BOULARBAH

1ère MA Droit

2008-2009

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DROIT JUDICIAIRE PRIVE

TOME II - PROCEDURE CIVILE

Hakim BOULARBAH

(Édition à jour au 1er janvier 2009)1

1ère MA Droit

1 Avertissement : L’attention des étudiants est spécialement attirée sur le fait que tant le maniement du Code judiciaire que les précisions données lors du cours oral et des exercices pratiques constituent des compléments indispensables à la compréhension et à l’étude de la matière. Les références faites à des articles de lois, sans autre spécification, renvoient aux dispositions du Code judiciaire.

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OUVRAGES ET ETUDES CITES SOUS LE SEUL NOM DE LEUR(S) AUTEUR(S)

K. BROECKX, Het recht op hoger beroep en het beginsel van de dubbele

aanleg in het civiele geding, Anvers, Maklu, 1995, citée comme K. BROECKX, Hoger

beroep.

A. FETTWEIS, Manuel de procédure civile, 2ème édition, Fac. Dr. Liège,

1987, cité comme A. FETTWEIS, Manuel.

E. GUTT et A.-M. STRANART-THILLY, “Examen de jurisprudence (1965 à

1970) - Droit judiciaire privé”, R.C.J.B., 1973, pp. 91-229 et R.C.J.B., 1974, pp. 91-186,

cités comme E. GUTT et A.-M. STRANART-THILLY, “Examen”.

E. GUTT et J. LINSMEAU, “Examen de jurisprudence (1971 à 1978) - Droit

judiciaire privé”, R.C.J.B., 1980, pp. 417 et s.; R.C.J.B., 1982, pp. 219 et s. et R.C.J.B.,

1983, pp. 63 et s., cités comme E. GUTT et J. LINSMEAU, “Examen”.

A. LE PAIGE, Précis de droit judiciaire, Tome IV - Les voies de recours,

Bruxelles, Larcier, 1973, cité comme A. LE PAIGE, Les voies de recours.

J. VAN COMPERNOLLE, “Examen de jurisprudence (1971 à 1985) - Droit

judiciaire privé - Les voies de recours”, R.C.J.B., 1987, pp. 115-212, cité comme J. VAN

COMPERNOLLE, “Examen 1987 (I)”.

J. VAN COMPERNOLLE et G. CLOSSET-MARCHAL, “Examen de jurisprudence

(1985 à 1996) - Droit judiciaire privé”, R.C.J.B., 1997, pp. 495-625 et R.C.J.B., 1999,

pp. 59-186, cités comme J. VAN COMPERNOLLE et G. CLOSSET-MARCHAL, “Examen”.

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QUATRIÈME PARTIE - LA PROCÉDURE CIVILE

TITRE I - L’INSTANCE

1. Le Code judiciaire, sous réserve de quelques exceptions, prévoit une même

manière de procéder devant le juge de paix, les quatre tribunaux, la cour d'appel et la

cour du travail.

Ce sont ces règles que nous examinerons maintenant.

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CHAPITRE I - L'INTRODUCTION DE L'INSTANCE

(la phase préliminaire à l'instance

et l'audience d'introduction)

SECTION I - PRINCIPE : INTRODUCTION PAR CITATION

2. A peine de nullité, la juridiction compétente pour connaître d'un litige est saisie

par la signification d'un exploit d'huissier donnant citation à comparaître (article 700 du

Code judiciaire).

Sous-section I - Nature et sanction

3. Depuis la loi du 26 avril 2007, il s’agit d’une exception de nullité et le non respect

de cette disposition est, partant, susceptible de couverture ou de réparation en

application des articles 860 à 867 du Code judiciaire (infra, n°167 et s.).

Sous-section II - Citation et signification

4. La signification consiste en une remise de la copie de l'exploit de citation,

l'original restant entre les mains de l'huissier qui, dans le cas de la citation, ira le

déposer au greffe de la juridiction saisie, où il constituera la première pièce du dossier

de la procédure.

5. La citation en justice qui constitue un exploit d’huissier doit, à peine de nullité,

être rédigée en respectant les exigences combinées des articles 43 et 702 du Code

judiciaire.

Elle doit notamment contenir l’indication :

1° de la date et du lieu de la signification, la mention en est essentielle pour calculer

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les délais. L'indication du lieu de la signification permet de vérifier la compétence territoriale de

l'huissier.

2° des nom, prénom, profession, domicile et le cas échéant, qualité et inscription au

registre de commerce ou de l'artisanat du demandeur (aujourd’hui la Banque

Carrefour des Entreprises ou B.C.E.).Lorsqu’il y a plusieurs demandeurs, il faut indiquer nommément chacun d’eux.

3° du nom, prénom, domicile ou, à défaut de domicile, résidence du cité et, le cas

échéant, de la qualité du destinataire de l'exploit. Le Code judiciaire n'impose pas

d'indiquer la profession du défendeur.

4° du libellé de la demande, c’est-à-dire les faits invoqués par le demandeur, ses

prétentions et l’exposé sommaire des moyens sur lesquels il fonde son action. Il

suffit que la citation contienne de manière claire l’objet de l’action et les faits

invoqués, mais non la qualification juridique de la demande2.

2 Cass., 24 novembre 1978, Pas., 1979, I, 352.

Si le défendeur ne peut préparer utilement sa défense en lisant l’exploit de

citation, il pourra invoquer l’exception de nullité « obscuri libelli », à la condition

de démontrer le grief que le manque de clarté de l’acte lui cause.

5° des nom, prénom et, le cas échéant, qualité de la personne à qui la copie de l’exploit a été remise

ou du dépôt de la copie dans le cas prévu à l’article 38, §1er, ou du dépôt de l’exploit à la poste,

dans les cas prévus à l’article 40.

6° de l’identité du juge saisi de la demande, du lieu et de l’heure de l’audience.

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Ces renseignements s’obtiennent soit en s’adressant au greffe de la juridiction qu’on veut saisir, soit

par la consultation de “l’annuaire administratif”.

7° des nom, prénom et adresse de l'étude de l'huissier de justice.

8° du coût détaillé de l’acte.

Cette mention permet de vérifier le respect du tarif des actes accomplis par les huissiers et de

procéder à la liquidation des dépens du procès. Son omission n'entraîne pas la nullité de l'acte s'il

n'est pas établi que l'irrégularité a nui aux intérêts de la partie citée.

9° de la signature de l'huissier de justice, tant sur l'original que sur la copie.En effet, l'exploit est un acte authentique qui fait foi jusqu'à inscription de faux de tout ce que son

rédacteur atteste avoir vérifié ou fait (domicile des parties, démarches accomplies, etc...).

10° du visa de l'original par la personne à laquelle la copie est remise. Cette formalité n'est pas

prescrite à peine de nullité : il s'agit de la relation faite que la personne qui a reçu la copie de

l'exploit a ou n'a pas signé l'original pour accusé de réception.

Sous-section III - Le délai de citation ou de comparution

6. A peine de nullité, il doit s'écouler un délai de huit jours entre la signification de la

citation et l'audience d'introduction.

Ce délai, prévu par l'article 707 du Code judiciaire, constitue un délai d'attente.

La Cour de cassation a décidé que le délai de huit jours était de huit jours entiers ou

francs, de sorte que la comparution ne peut avoir lieu que le neuvième jour qui suit celui

de la signification3.

Lorsque la citation est signifiée à l'étranger, le délai de huitaine est augmenté ainsi qu'il est dit à l'article 55

du Code judiciaire, au texte duquel il est renvoyé (article 709 du Code judiciaire).

3 Cass., 3 décembre 1979, Pas., 1980, I, 408.

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7. En matière de référé, ou devant le juge des saisies, le délai de citation est de

deux jours (articles 1035, alinéa 2, et 1395, alinéa 2, du Code judiciaire).

8. Lorsque le jugement de la cause requiert une urgence particulière qui est démontrée, le demandeur

peut adresser une requête unilatérale en abréviation du délai de citer au juge de paix ou au président du

tribunal devant lequel l'affaire doit être portée, pour solliciter l'abréviation des délais prévus par les articles

55, 707 et 1035 du Code judiciaire.

En cas d'extrême urgence, la citation peut être autorisée "dans le jour et à l'heure indiquée" (articles 708 et

1036 du Code judiciaire).

L'ordonnance abrégeant le délai de citation est prononcée sur requête unilatérale (articles 1025 et suivants

du Code judiciaire), adressée au magistrat avant la signification de l'exploit introductif d'instance. Elle

comportera les termes de la requête et de l'ordonnance. Elle doit être signifiée au défendeur en même

temps que la citation.

SECTION II - AUTRES MODES D’INTRODUCTION DE L’INSTANCE

9. Il s'agit ici des modes d'introductions d'instance autres que la citation :

- la comparution volontaire;

- la requête introductive d'instance bilatérale (ou contradictoire);

- la requête introductive d'instance unilatérale (voy. infra, Chapitre IV);

Ces modes ne peuvent être utilisés que lorsque la loi le prévoit expressément.

Sous-section I - La comparution volontaire

10. De commun accord, les parties peuvent se présenter volontairement devant le

juge compétent au premier degré de juridiction pour lui demander de statuer sur les

différends qui les opposent (article 706 du Code judiciaire).

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Ce mode de saisine est admis en toutes matières contentieuses.

Cette manière de procéder permet de réduire les frais, car seul le droit au rôle est dû, et

de gagner du temps.

11. Concrètement, le magistrat dresse procès-verbal de la déclaration des parties et

acte les termes précis de la demande introduite. Eventuellement, il actera de même les

prétentions reconventionnelles du défendeur.

Ce document est signé par les parties. Pour le reste, les règles de la procédure de droit

commun sont poursuivies.

Il faut insister sur ce que la comparution volontaire n'est qu'un mode simplifié

d'introduction de la procédure : son utilisation n'implique aucune reconnaissance ou

renonciation.

12. En vue d'inciter les parties à recourir à la comparution volontaire, la loi permet auxparties, si elles le

désirent, de déposer immédiatement, lors de leur comparution, leurs pièces et conclusions. Dansce cas, la

cause sera immédiatement prise en délibéré conformément aux règles régissant la procédure écrite (article

755 du Code judiciaire) ou après de brèves plaidoiries selon la procédure des débats succincts (article 735

du Code judiciaire).

Cette faculté offerte aux parties implique qu'elles aient mis la cause en état avant même leur comparution

volontaire.

Sous-section II- La requête introductive d’une instance contradictoire

13. Il faut attirer d’emblée l'attention sur l'impropriété du terme "requête

contradictoire" couramment utilisé en pratique: la requête est, en elle-même, un acte

unilatéral. En réalité, elle est rédigée par l'une des parties, qui la dépose au greffe par

les soins duquel elle est ensuite notifiée à l'adversaire.

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Il s'agit donc d'une requête introduisant une procédure contradictoire. Il serait inexact

d'en déduire qu'elle est rédigée par les deux parties ensemble à l’instar du procès-ver-

bal de comparution volontaire, où les parties exposent leur thèse, l'une à la suite de

l'autre (notons toutefois que dans le cadre de procédures particulières, dérogatoires au

droit commun - divorce par consentement mutuel -, la requête doit être co-signée par les

deux parties).

14. La "requête contradictoire" - dite encore "bilatérale" - rend la procédure moins

onéreuse puisqu'elle épargne le coût de l'exploit d'huissier : seul le droit de rôle est dû.

Pour le surplus, la procédure est suivie de manière classique. De nombreuses

dispositions prévoient que la procédure sera introduite par une telle requête, notamment

devant les juridictions du travail, en matière familiale ou encore dans le contentieux

locatif.

15. Il n'est pas interdit dans ces cas de procéder par citation4, mais le coût

supplémentaire de l'acte par rapport à celui de la requête peut être mis à la charge de la

partie qui en a pris l'initiative5. Il n'est par contre pas permis d'introduire une procédure

par requête lorsque la loi ne l'autorise pas, sous peine de violer l’article 700 du Code

judiciaire. Toutefois le non respect de cette règle n’entraîne qu’une nullité de la requête,

régie par les articles 860 et s. du Code judiciaire.

16. De manière générale, la "requête contradictoire" produit les mêmes effets qu'une

citation : elle saisit le juge et interrompt la prescription.

La date de l'introduction de la procédure est celle de la réception de l'acte au greffe,

4 Cass., 1er octobre 1990, Pas., 1991, I, 102.

5 P. MOREAU, “Le choix de la voie la plus onéreuse sanctionné par la condamnation aux dépens”, note sous J.P. Wervik, 9 juin 1998, J.J.P., 1999, pp. 345-348.

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constatée par une mention apposée sur le document par le greffier. A défaut de cette

mention, c'est la date de l'inscription au rôle qui est retenue.

17. Le Code judiciaire prévoit aux articles 1034bis et s. le " droit commun" de la

requête introductive d'une instance contradictoire.

18. Comme le précise expressément l'article 1034bis du Code judiciaire, ces dispositions ne dérogent

pas aux formalités et mentions régies par des dispositions légales particulières non expressément abrogées.

Ceci signifie que les formalités de droit commun de la requête s'appliquent conjointement aux formalités

prévues par les législations particulières qui autorisent ou prescrivent le recours à ce mode d'introduction de

l'instance. En cas d'incompatibilité entre les règles de droit commun et celles prescrites par les lois

particulières, ce seront ces dernières qui primeront.

L'exemple de l'article 100 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce illustre parfaitement les

règles précitées. Ainsi, cet article prévoyant la possibilité d'introduire une action en cessation par requête

"contradictoire" n'impose pas qu'un certificat de domicile soit joint à la requête. Cette formalité est prévue de

façon générale à l'article 1034quinquies du Code judiciaire. L'application cumulative des deuxlégislations la

rendra dès lors applicable aux requêtes déposées en vertu de l'article 100 de la loi sur les pratiques du

commerce. Par contre, cet article prévoit, à peine de nullité, que la requête doit être signée par un avocat.

Cette exigence particulière prime sur le droit commun qui permet (article 1034ter, 6°, du Code judiciaire) la

signature de la requête "contradictoire" par le requérant ou son conseil. Il en va de même, en matière de

protection de la jeunesse, où la requête doit également être signée par l’avocat du requérant6.

Il faut dès lors être particulièrement attentif aux formalités à accomplir en cas de recours à la requête

"contradictoire", en comparant les exigences du droit commun à celles éventuellement précisées par les

dispositions particulières propres à l'action que l'on se propose d'intenter, afin d'en faire une application

cumulative.

SECTION III - LA CONCILIATION

19. Précédant parfois l’introduction de l’instance, la conciliation est toujours

6 Voy. V. D’HUART, obs. sous Civ. Verviers, 6 janvier 1999, J.L.M.B., 1999, p. 1448.

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autorisée. Elle est quelques fois obligatoire.

Sous-section I - La tentative de conciliation facultative

20. Les articles 731 et suivants du Code judiciaire autorisent, dès avant l'introduction

de la procédure au premier degré de juridiction, une tentative de conciliation pour autant

que les parties soient capables de transiger et que les objets en litige soient

susceptibles d'être réglés par transaction.

A l'initiative de l'une d'elles, les parties sont alors convoquées par simple lettre du

greffier à comparaître devant le juge qui serait compétent pour connaître du litige au

premier degré de juridiction. Si un accord intervient, il en est dressé procès-verbal dont

l'expédition est revêtue de la formule exécutoire (article 733 du Code judiciaire). Le juge

ne condamne pas : il acte simplement l'accord des parties, de sorte qu’il ne s'agit pas

d'un acte juridictionnel7.

En cas d'échec, la procédure peut être poursuivie selon les règles de droit commun, le

juge étant saisi soit par comparution volontaire, soit par citation.

On constate donc que la conciliation n'est pas un acte introductif d'instance puisque pour qu'une procédure

contentieuse soit introduite il est nécessaire de recourir à un autre acte introductif (comparution volontaire,

citation, etc). C’est la raison pour laquelle on propose régulièrement d’instaurer une « passerelle » vers la

procédure judiciaire en cas d’échec de la conciliation sans qu’il soit nécessaire d’introduire une nouvelle

procédure. Un tel mécanisme supposerait toutefois de renforcer le formalisme de la conciliation afin de

réduire ultérieurement les formalités de convocation du défendeur.

7 La question de savoir si l’article 1043, alinéa 2, du Code judiciaire qui concerne le jugement d’accord est

applicable au procès-verbal de conciliation dressé par le juge en application de l’article 733 du même Code est controversée. P. ROUARD (“Le préliminaire de conciliation dans le Code judiciaire”, J.T., 1970, pp. 725-726) et, de façon plus nuancée, A. LE PAIGE (Les voies de recours, p. 10, n°15bis) soutiennent que tel est le cas. En revanche, pour A. FETTWEIS, il est certain que le procès-verbal de conciliation ne peut être assimilé à un jugement d’accord en ce qui concerne l’exercice des voies de recours : le procès-verbal de conciliation est comme un acte notarié susceptible d’être attaqué par la voie d’une action en nullité (Manuel, p. 472, n°696).

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Sous-section II - La tentative de conciliation obligatoire

21. Dans certains cas, la tentative de conciliation est obligatoire.

C'est le cas notamment :

a) en matière de contentieux du travail salarié, devant le tribunal du travail où,

paradoxalement, elle doit avoir lieu après citation ou comparution volontaire;

b) devant le juge de paix, en matière de bail à ferme (article 1345 du Code

judiciaire);

c) devant le juge des saisies, en cas d’exécution ou de saisie basée sur un

jugement ou un acte authentique concernant un crédit hypothécaire (art. 59 de la

loi du 4 août 1992 relative au crédit hypothécaire).

22. Remarques

- Les conciliations obligatoires sont parfois prévues à peine de nullité : de manière

générale il s'agit d'une nullité étrangère à l'ordre public;

- Les conciliations obligatoires réussissent très rarement.

SECTION IV - LA MISE AU ROLE ET LE DOSSIER DE LA PROCEDURE

Sous-section I - Le rôle général

A.- Notions

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23. Il est tenu au greffe de chaque juridiction un registre où toutes les causes sont

répertoriées sous un numéro d'ordre. L'inscription de la cause à ce rôle général doit avoir lieu au

plus tard la veille du jour de l'audience pour laquelle la citation a été donnée (article 716 du Code judiciaire).

Lorsque la cause est introduite par requête, la mise au rôle se fait au moment où le greffe reçoit la requête,

moyennant le paiement préalable des droits de rôle.

Lorsque la cause est introduite par comparution volontaire, la mise au rôle se fait dès que le juge a acté la

comparution des parties.

24. Le rôle général est un document authentique, qui est coté et paraphé par un magistrat.

L'inscription au rôle général, qui suppose le paiement d'un droit, parfait la saisine du tribunal : la citation non

inscrite dans le délai légal est de nul effet (article 717 du Code judiciaire). La Cour de cassation a confirmé

dans un arrêt du 1er octobre 1990 que "le juge est saisi de la cause à partir de la signification de la citation

pour autant qu'elle ait été inscrite au rôle général pour l'audience indiquée dans la citation"8.

Selon les cas, l'inscription est requise soit par l'huissier instrumentant, soit par la partie elle-même, soit par

son avocat, soit par un mandataire. La demande peut même émaner de la partie adverse (article 716 du

Code judiciaire).

La cause reçoit un numéro d'ordre, qui lui servira de référence. A côté du rôle général, propre à chaque

juridiction, chaque chambre du tribunal possède son rôle d'audience (rôle particulier), qui est en quelque

sorte l'agenda où sont inscrites en précisant le jour, l'heure et la durée probable du débat, les affaires en état

d'être plaidées et dont la fixation a été demandée.

B.- Radiation du rôle

25. L’article 730, §1er, du Code judiciaire prévoit la radiation du rôle, qui éteint l'instance et ne peut avoir

lieu que de l'accord des parties. Toute cause rayée du rôle général ne peut y être ramenée que par une

citation nouvelle, sauf le droit des parties de comparaître volontairement.

La radiation du rôle a des effets moins étendus que le désistement d'instance. Elle éteint l’instance (article

8 Cass., 1er octobre 1990, Pas., 1991, I, 102.

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730, §3, du Code judiciaire) mais, par exemple, elle n'affecte pas l'interruption de la prescription qui a eu lieu

à la suite de la citation.

C.- Omission du rôle général et du rôle d’audience

26. L’article 730, §2, du Code judiciaire prévoit l'omission d'office du rôle général pour toutes les causes

qui y sont inscrites "depuis plus de trois ans et dont les débats n'ont pas été ouverts ou n'ont pas été

continués depuis plus de trois ans", et dont le maintien au rôle n'est pas sollicité à une audience particulière

où ces causes seront appelées, une fois par an. Dans ce cas, l'instance subsiste et la cause peut être

réinscrite par simple demande de fixation mais moyennant un nouveau paiement des droits de rôle.

27. L'omission du rôle des audiences peut quant à elle être décidée d'office par le juge "si l'instruction

de l'affaire révèle un retard anormal" (article 730, alinéa 4, du Code judiciaire).

L'affaire omise du rôle d'audience peut y être ramenée sans autre formalité qu'une nouvelle demande de

fixation adressée au président de la chambre, sans paiement de nouveaux droits de mise au rôle.

Sous-section II - Le dossier de la procédure

28. Dès l'inscription au rôle d'une nouvelle cause, le greffier ouvre un dossier "de la

procédure" (article 720 du Code judiciaire).

Ce dossier permettra de retracer l'historique de la procédure depuis l'introduction de l'affaire devant le

tribunal jusqu'à la décision qui dessaisit le juge.

Il permet aux magistrats du siège et du Parquet de prendre connaissance avant l'audience des éléments des

causes qui sont fixées.

Le dossier contient notamment l'acte introductif d'instance, les notifications, conclusions, procès-verbaux

d'audience, et tous les actes établis par le juge, ainsi que les rapports d'expertise, l'avis du Ministère public,

la copie certifiée conforme des décisions rendues, etc...

Le dossier de la procédure suit l'affaire devant le juge qui en est saisi et, en cas de recours, est transmis

dans les 5 jours au greffe de la juridiction supérieure. Le délai de 5 jours n'est toutefois pas prévu à peine de

déchéance.

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SECTION V - LA COMPARUTION ET LA REPRESENTATION DES PARTIES

A.- Principes

29. Selon l'article 728 du Code judiciaire, les parties comparaissent en personne ou

par avocat.

Sous réserve des exceptions ci-après examinées (infra sub B), les avocats ont seuls le

droit de plaider, de présenter en justice la défense d'une partie, et celui de la

représenter (article 440 du Code judiciaire).

Sous réserve de quelques cas exceptionnels, les avocats ont le monopole de la

signature des requêtes unilatérales (article 1026, 5° du Code judiciaire).

En justice, les personnes morales comparaissent en personne par leur organe légal et,

sauf controverse, par leur organe statutaire (article 703 du Code judiciaire). Il s'agit

notamment du conseil d'administration de la société anonyme, ou du gérant de la SPRL.

B.- Juridictions d'exception

30. Devant ces juridictions, les parties peuvent être représentées par leur conjoint ou

par un parent ou allié, porteur d'une procuration écrite et agréée spécialement par le

juge (article 728, alinéa 2, du Code judiciaire).

C.- Juridictions du travail

31. Devant les juridictions du travail, le délégué d'une organisation représentative

d'ouvriers ou d'employés, porteur d'une procuration écrite peut représenter l'ouvrier ou

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l'employé, plaider et recevoir toutes communications relatives à l'instruction et au

jugement du litige.

D.- Exception

32. Le juge peut interdire à la partie de présenter elle-même ses conclusions et

défenses si la passion ou l'inexpérience l'empêche de s'exprimer avec la décence

convenable ou la clarté nécessaire (article 758 du Code judiciaire).

SECTION VI - L’AUDIENCE D’INTRODUCTION

33. En principe, en première instance, toutes les affaires sont introduites "à jour fixe".

Ainsi, selon l'article 727 du Code judiciaire, "au jour fixé par la citation, le greffier fait, à

l'ouverture de l'audience, l'appel des causes dans l'ordre de leur inscription au rôle

général".

34. En application de l'article 735 du Code judiciaire, dès l'audience d'introduction,

les procédures sont réparties en deux catégories :

1° les causes qui n'appellent que des débats succincts et qui sont en état d'être

jugées sont retenues à l'audience d'introduction même pour qu'il soit statué après

leur appel ou bien sont immédiatement remises à l'une des prochaines audiences

de cette même chambre d'introduction.

Pour l'examen de ces demandes, la procédure est simplifiée et il peut être statué

sans dépôt de conclusions. Les pièces et les éventuelles conclusions peuvent

être communiquées jusqu'à la clôture des débats.

En vertu de l'article 741, aucune des règles concernant la mise en état de la

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cause dans la procédure dite longue ne sont applicables.

Il est ainsi possible d'obtenir dès la première audience :

- de plaider, si l'affaire est simple et que l'adversaire est présent;

- de prendre jugement par défaut si l'adversaire est absent;

- d'obtenir une remise "à date fixe", qui permettra éventuellement de

prendre défaut ultérieurement (voy. infra, les développements consacrés à

l'article 803 du Code judiciaire).

Pour pouvoir bénéficier de la procédure simplifiée "en débats succincts", il faut en

faire la demande de façon motivée : par le demandeur dans l'acte introductif

d'instance; par le défendeur à l'audience d'introduction (art. 735, §1er).

En cas d'accord des parties, la procédure simplifiée doit, en principe, être admise

(art. 735, §2). Dans ce cas toutefois le juge fixe la durée des débats. S'il s'avère

que, nonobstant l'accord des parties, les débats ne sont pas succincts, il

appartient au juge de renvoyer l'affaire au rôle général.

Depuis le 1er septembre 2007, la procédure simplifiée est également d’application

à 5 cas prévus par l’article 735, §2, alinéa 2, du Code judiciaire :

- le recouvrement des créances incontestées;

- les demandes visées à l'article 19, alinéa 2;

- les changements de langue régis par l'article 4 de la loi du 15 juin 1935;

- le règlement des conflits sur la compétence;

- les demandes de délais de grâce.

2° les affaires plus complexes font l’objet d’une mise en état conformément aux

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articles 747 et s. du Code judiciaire.

Lors de l’audience d’introduction, ces causes font, sauf accord conjoint des

parties en vue d’un renvoi au rôle, l’objet d’une mise en état judiciaire amiable ou

judiciaire (art. 747 C. jud). Plus précisément, soit le juge acte l’accord conclu

entre les parties au sujet du calendrier d’échange de conclusions et fixe une date

pour les plaidoiries (art. 747, §1er, C. jud.), soit, à défaut d’accord, le juge fixe

d’autorité, après avoir recueilli les observations des parties, les dates pour les

conclusions et pour l’audience des plaidoiries (art. 747, §2, C. jud.).

35. Remarque

Dans le but d'éviter aux avocats des déplacements inutiles, l'article 729 du Code

judiciaire dispose que "lorsque la cause n'est pas de nature à être plaidée lors de son

introduction, les avocats des parties peuvent, de commun accord, remplacer la

comparution à l’audience prévue à l’article 728 par une déclaration écrite de postulation,

en explicitant, dans la mesure du possible, leur position en ce qui concerne la mise en

état judiciaire. Cette déclaration est adressée au préalable au greffier. Il en est fait

mention à la feuille d'audience".

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CHAPITRE II - L'INSTRUCTION CONTRADICTOIRE

(la mise en état de la cause

selon la procédure de droit commun dite "procédure longue")

36. Les articles 731 à 801 du Code judiciaire déterminent les règles de l'instance

lorsque la procédure est contradictoire. Sauf dérogation expresse, ces mêmes règles

sont applicables en degré d'appel (article 1042 du Code judiciaire).

SECTION I - LA COMMUNICATION DES PIECES

A.- Principe

37. En application du principe contradictoire, chacun des plaideurs est tenu de

communiquer à l'autre toutes et chacune des pièces qu'il entend utiliser au cours de

l'instance (article 736 du Code judiciaire).

Cette règle s'étend aux pièces qui sont utilisées au cours des opérations d'expertise et aux notes et

mémoires déposés à la suite des plaidoiries.

Les pièces communiquées deviennent communes aux parties, chacune d'elles pouvant les invoquer au

mieux de ses intérêts.

Il ne peut être fait état des pièces non valablement communiquées.

B.- Délais

38. Les délais impartis pour la communication des pièces sont les suivants :

- pour le demandeur : dans les 8 jours de l'introduction de la cause (article 736 du

Code judiciaire).

Ce délai n'est assorti d'aucune sanction. Il est purement formel.

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- pour le défendeur, la communication des pièces a lieu en même temps que celle

de ses conclusions.

- en toute hypothèse, en vertu de l’article 740 du Code judiciaire, les pièces

communiquées après la communication des conclusions sont, sous réserve

d'application de l'article 748 du Code judiciaire (voir infra), d'office écartées des

débats.

C.- Formes et preuve de la communication

39. Les parties peuvent se communiquer les pièces de deux façons :

- par dépôt au greffe, où les pièces doivent être consultées sur place (article 737, alinéa 1er, du Code

judiciaire);

- à l'amiable (article 737, alinéa 2, du Code judiciaire), ce qui est l'usage normal entre avocats.

Le délai de communication des pièces étant sévèrement sanctionné, il est important de se réserver la preuve

de l'envoi des pièces.

En vertu de l'article 743, alinéa 2, du Code judiciaire, l'inventaire des pièces communiquées doit être joint aux

conclusions. La partie qui reçoit cet inventaire se doit d'examiner sa conformité avec les pièces reçues et de

réagir sans délai s'il apparaît que les pièces reçues ne correspondent pas à celles mentionnées dans

l'inventaire.

D.- Sanction de la non communication

40. Les pièces communiquées tardivement sont d'office écartées des débats (article

740 du Code judiciaire). Le juge ne peut y avoir égard, sauf accord des parties.

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SECTION II - LES CONCLUSIONS

Sous-section I - Notions

41. En vertu de l'article 741 du Code judiciaire, dans les causes qui ne sont pas

retenues à l'audience d'introduction, les parties doivent conclure selon les règles

énoncées par les articles 742 à 748 du Code judiciaire.

42. Les conclusions sont des écrits sous seing privé, signés soit par la partie soit par

son conseil, soumis au juge au cours des débats et dans lesquels les parties exposent

leurs prétentions ainsi que les moyens de droit et de fait qu'elles invoquent à l'appui de

celles-ci9.

Les conclusions reprennent en les précisant les faits invoqués et l'objet de la demande.

Les conclusions comprennent en général quatre parties :

1° l'identification précise des parties (article 744 du Code judiciaire) ainsi que la

cause (numéro de rôle général et indication de la chambre saisie - article 743 du

Code judiciaire);

2° l'exposé des faits;

3° les prétentions et les moyens de fait et de droit (article 744 du Code judiciaire);

4° le dispositif, qui est le résumé des prétentions de la partie qui les a rédigées. Le

dispositif reprend précisément ce qui est demandé au juge.

Sous-section II - L’échange des conclusions

43. L'original signé des conclusions est déposé au greffe pour être joint au dossier de

9 Comp. avec Cass., 20 décembre 1983, Pas., 1984, I, 448.

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la procédure (article 742 du Code judiciaire). Le dépôt des conclusions au greffe vaut

signification (article 746 du Code judiciaire).

Seul le dépôt des conclusions au greffe produit les effets de la signification. Si l'on introduit une demande

reconventionnelle, il faut veiller à interrompre une éventuelle prescription en déposant ses conclusions à

temps.

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44. Les conclusions doivent en outre être adressées en copie à la partie adverse ou à

son avocat (article 745 du Code judiciaire).

Entre parties, aucune règle ne régit le mode de communication ou d’envoi des

conclusions. La communication se fait généralement par la poste.

Le Code judiciaire prévoyant dans certains cas, comme nous allons le voir, une sanction en cas de non

respect des délais de conclusions, la preuve de cet envoi dans le délai est très importante. Il appartient dès

lors à l'expéditeur de prouver la date d'envoi ou de produire un accusé de réception.

Sous-section III - Les délais

A.- En cas de mise en état amiable (article 747, §1er)

45. Les délais de conclusion peuvent être fixés d’un commun accord par les parties,

soit à l’audience d’introduction, soit lors d’une audience ultérieure.

Le juge informe les parties qui souhaitent convenir de délais pour conclure de la date la

plus proche à laquelle une audience pourrait être fixée.

Le juge prend acte des délais pour conclure, les confirme et fixe la date de l'audience.

La question de savoir si les délais convenus entre parties sont ou non contraignants est controversée puisque

l’article 747, §1er, ne renvoie pas expressément à l’article 747, §2, alinéa 6.

B.- La mise en état “judiciaire” dès l’audience d’introduction (article 747, § 2)

46. En l’absence d’accord entre les parties, le juge fixe, dans les six semaines de

l’audience d’introduction, le calendrier de conclusions ainsi que la date des plaidoiries

(qui doit intervenir au plus tard dans les trois mois de la date prévue pour les dernières

conclusions). A cette fin, les parties peuvent lui adresser leurs observations dans le mois

de l’audience d’introduction.

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Les délais fixés par le juge pour l'échange des conclusions sont contraignants. Les

conclusions déposées et envoyées après l'échéance fixée sont d'office écartées des

débats, sous réserve de l'application de l'article 748 du Code judiciaire (article 747, §2,

alinéa 6, du Code judiciaire).

C.- La mise en état consensuelle et la mise en état “judiciaire” en cours de procédure

(articles 747, §2 et 750)

47. D’un commun accord, les parties peuvent déroger à la mise en état automatique

de la cause et solliciter conjointement lors de l’audience d’introduction le « renvoi au rôle

» de l’affaire (c’est-à-dire sa remise à une date indéterminée). Après que la cause ait été

renvoyée au rôle, l’échange des conclusions et des pièces se fait de manière

consensuelle, entre les avocats ou les parties. Lorsque les parties estiment que le

dossier est en état d’être jugé, elles adressent ensemble à la juridiction saisie une

demande pour obtenir la fixation d’une date d’audience lors de laquelle l’affaire pourra

être plaidée (art. 750 C. jud.).

A tout moment, la partie, confrontée à la mauvaise volonté ou au silence de son

adversaire, peut demander au juge de fixer des délais pour les conclusions et une date

d’audience (art. 747, §2, alinéa 5). On bascule alors dans une mise en état judiciaire

contraignante.

D.- L'article 748 du Code judiciaire

48. Les trois modes de mise en état d'une cause présentent une caractéristique

commune. Quelle que soit la procédure choisie, il se présentera une période plus ou

moins longue pendant laquelle les parties ne pourront plus conclure alors qu'elles

n'auront pas encore plaidé.

L'article 748 du Code judiciaire tempère l'interdiction de conclure pendant cette période.

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1° L'article 748, § 1er, du Code judiciaire

49. L’article 748, § 1er, du Code judiciaire prévoit deux exceptions à l’interdiction de

conclure après l’expiration des délais ou la fixation de la cause.

1° Des conclusions se limitant à introduire une demande additionnelle10 sur la base

de l'article 808 du Code judiciaire sont toujours possibles.

2° De commun accord les parties peuvent toujours déroger à l'interdiction de

conclure11.

2° L'article 748, § 2, du Code judiciaire ou la réouverture du droit de conclure en

cas de découverte d'une pièce ou d'un fait "nouveau et pertinent"

50. Lorsqu'une partie découvre, au cours de la période séparant la fin du droit de

conclure et l'audience de plaidoiries, un fait "nouveau et pertinent", elle peut, au plus tard

trente jours avant l’audience fixée pour les plaidoiries, demander au juge auquel la cause

a été distribuée qu'il accorde un nouveau délai aux parties pour conclure sur cette pièce

ou ce fait nouveau.

La demande se fait par requête notifiée aux parties qui ont quinze jours pour faire leurs observations. Le juge

statue toujours sur pièces. Il ne peut pas convoquer les parties.

S'il estime que le fait ou la pièce est réellement nouveau et pertinent, le juge fixe les délais pour conclure et

fixe le cas échéant une nouvelle date de plaidoiries.

10 Sur la notion de “demande additionnelle”, voy. le Tome I.

11 Voy. not. sur ce point, J. LINSMEAU, “L’article 747 et le consensualisme”, J.T., 1995, p. 528. Par un arrêt du 6 avril 2001, la Cour de cassation a rappelé que les conclusions déposées avec l’accord des parties, après la fixation de la cause sur pied de l’article 750 du Code judiciaire, ne pouvaient être écartées des débats (Cass., 6 avril 2001, C.98.0358.N).

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Les travaux parlementaires précisent que par "pertinent", il faut entendre "qui se rapporte à la cause". Peut

constituer un fait nouveau et pertinent, l’ouverture d’une information pénale, un rapport d’expertise, ... mais

pas la découverte d’une pièce déjà en possession de l’une des parties ou encore le changement de conseil

par l’une des parties.

E.- Conclusions contestant l’application des articles 747, 748, et 750 du Code judiciaire

51. En vertu du principe général du respect des droits de la défense, les conclusions,

même envoyées ou déposées tardivement, ne peuvent être écartées des débats dans la

mesure où elles contestent l’application des articles 74712, 748 et 750 du Code judiciaire.

Sous-section IV - Le juge et les conclusions

52. Le juge est tenu de motiver ses décisions et, pour cela, il doit répondre aux

moyens de fait et de droit (et non à chacun des arguments) qui sont développés par les

parties dans les conclusions : il doit dire pourquoi il se prononce dans tel sens et justifier

la décision qu'il prend en regard de chacun des moyens qui sont évoqués devant lui.

Le défaut de réponse aux conclusions est un moyen de cassation classique (violation de

l’article 149 de la Constitution).

En matière civile, le juge ne peut élever une contestation dont les conclusions des parties excluent l'existence.

Les conclusions doivent être considérées comme un commencement de preuve par écrit contre le concluant,

puisqu'elles sont signées soit par la partie soit par son avocat qui, comme mandataire, aura normalement dû

les faire ratifier par son client, le mandant.

Si l'avocat dépasse les limites du mandat "ad litem", ses dires et conclusions ne lient pas son client, qui pourra

le désavouer.

12 Cass., 27 janvier 2000, J.T., 2000, p. 826 avec la note.

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SECTION III - LA PROCEDURE ECRITE

53. Il est possible de s'en tenir à une procédure écrite, sans plaidoirie, lorsque les parties ou leursavocats

le décident conjointement, conformément à l'article 755 du Code judiciaire.

La procédure écrite est très bien accueillie par certaines juridictions du royaume, et franchement découragée

dans d'autres.

SECTION IV - L’AUDIENCE DE PLAIDOIRIES

54. Lors l’audience fixée pour les plaidoiries, les parties exposent verbalement leurs

moyens de fait et de droit développés en termes de conclusions et présentent leurs

dossiers de pièces. Il est évidemment interdit aux parties de développer oralement de

nouveaux arguments sous peine de violer le principe du contradictoire.

La partie qui n’a pas conclu dans les délais prévus par les articles 747 et s. du Code judiciaire peut plaider

mais ses plaidoiries ne valent pas conclusions et l’autre partie peut, à la suite de cette plaidoirie, déposer des

conclusions en réponse (art. 756bis C. jud.)

De l’accord des parties, le juge peut décider de remplacer les plaidoiries par un débat interactif lors duquel il

pose des questions aux parties ou à leurs conseils (art. 756ter C. jud.). En toute hypothèse, le juge peut

également décider de tenir un tel débat après les plaidoiries.

La police de l'audience appartient au magistrat qui préside le siège (articles 759 et s. du

Code judiciaire).

55. Lorsque les parties ont été entendues, le juge prononce la clôture des débats et

prend la cause en délibéré (article 769 du Code judiciaire). La cause est en état d'être

jugée.

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Dès que le délibéré a commencé, il est interdit de déposer de nouvelles conclusions13 ou de procéder à des

devoirs d'instruction (article 771 du Code judiciaire).

13 Sous réserve des conclusions portant sur le contenu de l’avis du ministère public, voy. infra.

En principe, le jugement doit être rendu dans le mois de la mise en délibéré. Ce délai n’est pas prescrit à

peine de nullité. Si la cause est communiquée au ministère public, le délai de prononciation prend cours à la

date où celui-ci a donné son avis ou, le cas échéant, à l’expiration du délai dont disposent les parties pour

déposer leurs conclusions concernant ledit avis (article 770 du Code judiciaire).

SECTION V - REOUVERTURE DES DEBATS

56. Le juge peut, s'il l'estime nécessaire, ordonner la réouverture des débats, soit

d'office soit à la demande des parties ou de l'une d'elles.

Dans certains cas, le juge doit ordonner d'office la réouverture des débats.

A.- La réouverture des débats facultative

1° A la demande d'une partie

57. Pour que la réouverture des débats ait lieu à la demande d'une partie, il faut que

celle-ci ait comparu - donc qu'elle n'ait pas été défaillante - et que soit découvert une

pièce ou un fait nouveau et capital susceptible d'influencer la décision (articles 772 à 776

du Code judiciaire).

Ni la découverte tardive d'un document, ni la consultation d'un nouveau conseil ne constituent des motifs

suffisants pour solliciter la réouverture des débats.

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La demande de réouverture des débats est formée par requête déposée au greffe et contenant sans autre

développement l'indication précise de la pièce ou du fait nouveau qui la justifie.

Si le juge rejette la requête, il peut motiver cette décision en constatant simplement que la circonstance

invoquée ne constitue pas un fait nouveau et capital14. Cette décision n’est pas susceptible d’appel15.

2° Ordonnée d'office par le juge

58. Le juge peut, en cours de délibéré, estimer n'être pas assez informé sur la cause

et dans ce cas rouvrir les débats en sollicitant des parties qu'elles s'expliquent plus avant

sur tel ou tel autre point qu'il précise dans le jugement de réouverture des débats.

Ce type de réouverture des débats peut être évité lorsque l'affaire a été correctement et complètement

instruite et que l'audience de plaidoiries a été bien menée.

Cette décision d’ordonner la réouverture des débats est susceptible d’appel16.

B.- La réouverture des débats obligatoire

59. La réouverture des débats est obligatoire lorsque le juge, en cours de délibéré,

envisage le rejet total ou même partiel de la demande sur une exception qui n'avait pas

été proposée par une des parties.

L'article 774 du Code judiciaire vise les exceptions de nullité, d'incompétence, de forclusion ou d'irrecevabilité

14 Cass., 22 mars 1993, Pas., I, 308 et les conclusions de l’avocat général LECLERCQ.

15 Cass., 29 octobre 1984, Pas., 1985, I, 289.

16 Cass., 29 octobre 1984, Pas., 1985, I, 289.

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mais non les moyens relatifs aux circonstances de fait.

Il s'agit en général d'exceptions ou de fins de non recevoir touchant à l'ordre public car sinon, en l'absence de

contestation élevée par les parties, le juge ne serait pas autorisé à s'en saisir.

La réouverture des débats ordonnée dans ces circonstances est obligatoire même lorsqu'une partie

défaillante, dûment avertie, ne comparaît pas.

Elle ne l'est pas lorsque le juge a invité les parties à s'expliquer sur l'exception au cours des débats.

Cette réouverture obligatoire se justifie par le respect du principe contradictoire.

C.- Remarques

60. Après la réouverture des débats, le cas échéant, le ministère public donnera à

nouveau son avis. L'affaire sera ensuite à nouveau mise en délibéré.

Les nouveaux débats sont toutefois strictement limités à la question faisant l’objet de la réouverture des

débats17.

Lors de la réouverture, le siège doit être composé par les juges qui ont assisté auxaudiences antérieures. A

défaut, les plaidoiries doivent être complètement reprises18.

SECTION VI - COMMUNICATION AU MINISTERE PUBLIC

A.- Notions

61. En matière civile, le ministère public a toujours la faculté d'examiner le dossier

17 Cass., 29 juin 1995, Pas., I, 713.

18 Cass., 22 février 1979, Pas., I, 756.

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d'une affaire et d'émettre son avis à l'audience.

Dans certains cas, la communication de la cause doit obligatoirement lui être faite. La loi

a toutefois restreint les cas de communication obligatoire.

Le ministère public n'est pas partie au procès : il intervient pour assister le juge, lui faire

connaître son avis, qui toutefois ne lie pas ce dernier.

B.- Les causes communicables

62. De nombreuses dispositions légales imposent la communication de certaines

causes au parquet.

On se réfère spécialement à l'article 764 du Code judiciaire, au texte duquel il est

renvoyé.

L'article 765, amendé par la loi du 4 mai 1984, impose l'avis du parquet lorsque le

tribunal de la jeunesse et la chambre de la jeunesse de la cour d'appel statuent en

matière civile.

63. Aux termes du dernier alinéa de l'article 764, le ministère public a en outre le droit de demander la

communication de tout dossier qui, à son estime, est susceptible d'intéresser son office et de justifier un avis.

Il permet au magistrat du parquet d'être entendu "lorsqu'il le juge convenable".

Réciproquement, les quatre tribunaux et les juridictions d'appel sont autorisés à ordonner d'office la

communication d'une cause au ministère public. Il s'agit-là d'un pouvoir discrétionnaire, dont l'usage ne doit

pas être motivé et qui n'est pas susceptible d'appel. Cette décision est obligatoire pour le parquet qui doit

examiner le dossier puis se présenter à l'audience pour donner un avis de la portée duquel il reste maître. Il

peut se borner à se référer à la sagesse du tribunal.

C.- Procédure

64. Au moment où il prononce la clôture des débats, le juge communique la cause au ministère public. Il

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en est fait mention à la feuille d’audience et le juge fixe le délai dans lequel l’avis du ministère public sera

donné et dont les parties disposeront pour déposer au greffe des conclusions portant sur le contenu de cet

avis (article 766, alinéa 1er, du Code judiciaire).

L’avis du ministère public est donné par écrit, à moins qu’en raison des circonstances de la cause il ne soit

émis oralement sur le champ à l’audience ou, à la demande du ministère public, à une audience ultérieure

fixée à cette fin (article 766, alinéa 2, du Code judiciaire).

65. Lorsque l'avis est obligatoire et qu'il n'est pas donné, la décision est nulle et comme toute nullité,

celle-ci ne peut être obtenue que par l'exercice de la voie de recours appropriée.

D.- Possibilité de réplique des parties à l’avis du ministère public

66. L'avis du ministère public est donné après la clôture des débats mais ne pouvait, en principe, justifier

la réouverture de ceux-ci19.

Si le ministère public soulève une exception d'ordre public qui n'a été soulevée ni par un plaideur ni par le

siège, il y avait bien entendu lieu à réouverture de débats d'office par le juge pour permettre aux parties de

faire valoir leur point de vue.

Dans les autres cas, les parties ne pouvaient légalement y répliquer ni même présenter les observations que

l'avis pourrait susciter chez elles.

67. Dans son arrêt “Vermeulen” du 20 février 199620, la Cour européenne des droits de l’homme a

cependant consacré, sur la base du droit à un procès équitable garanti par l’article 6, §1er, de la Convention,

la possibilité pour les parties à une procédure civile de répondre aux conclusions prises par le magistrat du

ministère public, avant la clôture de l’audience, au cours de l’instance en cassation.

On en a dès lors déduit que, devant le juge du fond, toute partie devait désormais avoir la faculté de prendre

connaissance de l’avis du ministère public et d’en débattre préalablement au jugement21. Cette dernière

solution a été, dans une certaine mesure, consacrée par la Cour de cassation22.

19 Cass., 22 mars 1993, Pas., I, 308 et les conclusions de l’avocat général LECLERCQ.

20 C.E.D.H., 20 février 1996, J.L.M.B., 1996, 904.

21 Voy. dans ce sens, Liège, 25 septembre 1996, J.L.M.B., 1996, 1653, obs. G. DE LEVAL; T.T. Bruxelles, 5 juin 1997, A.J.T., 1997-98, 129, note E. D’ERBRÉE.

22 Cass., 13 septembre 1999, R.C.J.B., 2000, pp. 748 et s. avec la note de S. VAN DROOGHENBROECK, “La réplique à l’avis du Ministère public: quousque tandem?”.

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68. La loi du 14 novembre 2000 modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne l’intervention du ministère

public, en matière civile, devant les juges du fond23 a adapté le Code judiciaire à ces récents développements.

Le nouvel article 767 du Code judiciaire prévoit désormais la possibilité pour les parties de répliquer oralement

ou par écrit aux conclusions orales ou écrites du ministère public.

L’article 767, §3, dernier alinéa, du Code judiciaire prévoit que les conclusions écrites en réplique à l’avis du

ministère public « sont uniquement prises en considération pour autant qu’elles répondent à l’avis du ministère

public ». En d’autres termes, ces conclusions ne peuvent avoir pour seul objet que de répondre à l’avis du

ministère public. Il est exclu à l’occasion de cette réplique de recommencer un nouveau débat entre parties ou

d’introduire de nouvelles demandes, moyens, exceptions, …

69. Remarque

A peine de nullité du jugement, l'article 768 du Code judiciaire interdit au ministère public d'assister au

délibéré : il s'agit-là d'assurer l'indépendance des juges.

23 M.B., 19 décembre 2000, p. 42.218. Voy. H. BOULARBAH, “Chronique de législation - Droit privé

belge (30 juin 2000 - 31 décembre 2000) - IX. Droit judiciaire privé”, J.T., 2001, pp. 329 et s.

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CHAPITRE III - L'INSTRUCTION ET LE JUGEMENT PAR DÉFAUT

SECTION I - INTRODUCTION GENERALE

Sous-section I - Notion de défaut

70. Le jugement contradictoire est celui qui est rendu après que les parties aient fait

valoir leurs moyens en déposant leurs conclusions, en comparaissant et en plaidant.

Le jugement par défaut est donc celui qui est rendu alors qu'une partie n'a pas comparu,

pas conclu, ou pas plaidé, sauf, dans ce dernier cas, si elle a comparu et déposé des

conclusions (article 804, alinéa 2, du Code judiciaire).

71. Les lois des 3 août 1992 et 26 avril 2007 ont réduit les cas de procédure par

défaut.

La procédure est à présent considérée comme étant contradictoire à l'égard d'une partie

dès qu'elle a comparu au moins à une audience et a conclu (article 804, alinéa 2, du

Code judiciaire). Le défaut de comparaître à l'audience de plaidoiries n'empêchera donc

plus l'autre partie d'obtenir un jugement contradictoire.

Par ailleurs, dans tous les cas où il aura été recouru à une mise en état amiable (article

747, §1er) ou judiciaire (article 747, §2 ou 748, §2), ce qui est aujourd’hui en principe la

règle, la procédure sera contradictoire, même si une des parties ne conclut pas et ne

comparaît pas.

72. Le défaut peut se produire dans le chef du demandeur et dans celui du défendeur.

La nature du jugement se détermine par la nature de la procédure ainsi que par les caractères fixés par la loi

et non par la qualification qu’il lui est donné par le juge ou par les parties. Il en résulte que le juge qui qualifie

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sa décision de jugement ou arrêt contradictoire, réputé contradictoire ou par défaut n’en modifie pas la

véritable nature24.

Sous-section II - Rôle et importance du défaut

73. En droit belge, le défaut n'est pas considéré comme une attitude pouvant être

sanctionnée, bien que l'on estime que bon nombre de défauts traduisent en réalité une

manoeuvre dilatoire.

Dans la conception actuellement majoritaire, le défaut reste l'exercice normal d'un droit, ce qui explique

d'ailleurs que l'opposition est une voie de recours ordinaire.

En aucun cas, il ne peut se déduire du défaut d'une des parties qu'elle acquiesce à la prétention de l'autre :

c'est la raison pour laquelle la partie défaillante qui fait opposition ne doit nullement expliquer les raisons de

son absence à l'audience, mais bien faire valoir dans son acte les motifs de fond qu'elle invoque25.

Traditionnellement, le défaut est considéré comme une contestation de la recevabilité et du fondement de la

demande. C'est ce qui explique, comme nous le verrons, que le juge doit d'office suppléer tous les moyens

que la partie défaillante aurait pu proposer. Selon certains, cette vérification doit même s'étendre auxmoyens

étrangers à l'ordre public, le juge statuant par défaut devant se montrer plus circonspect qu'en cas de débat

contradictoire.

SECTION II - LA PROCEDURE PAR DEFAUT

Sous-section I - Le défaut à l’audience d’introduction

74. En vertu de l’article 802 du Code judiciaire, “si une partie ne comparaît pas à

l’audience d’introduction, il peut être pris défaut contre elle”.

La possibilité existe sans formalité particulière tant pour les affaires qui n’appellent que

24 Cass., 19 janvier 1999, Van Vaerenbergh, P. 96.1516.N, inédit; Cass., 5 novembre 1993, Pas., I,

932 ; Cass., 17 février 1978, Pas., I, 702.

25 Cass., 19 septembre 1985, Pas., 1986, I, 61.

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des débats succincts au sens de l’article 735 du Code judiciaire et peuvent être retenues

à l’audience d’introduction que pour les autres affaires.

Le défaut doit être demandé par une des parties, il ne peut être prononcé d’office ou

lorsqu’aucune des parties n’a comparu et requis le défaut sous peine de violer le principe

dispositif.

Une déclaration écrite de postulation unilatérale (article 729 du Code judiciaire) ne peut faire entrave à une

demande de défaut à l’audience d’introduction.

Sous-section II - Le défaut aux audiences ultérieures

A.- En cas de remise contradictoire (article 804, alinéa 1er, du Code judiciaire)

75. Les parties et le juge peuvent convenir de remettre l’affaire à une date ultérieure (article 735, §1er et

747, §2). Si toutes les parties sont présentes ou représentées lors de l’audience à laquelle cette remise est

accordée, cette dernière est contradictoire. Si, à l'audience à laquelle la cause a été contradictoirement fixée

ou remise, l'une des parties ne comparaît pas, jugement par défaut peut être pris contre elle.

B.- Alors que la partie était déjà défaillante à l’audience d’introduction (article 803 du

Code judiciaire).

76. En vertu de l’article 803 du Code judiciaire, “la partie défaillante contre laquelle le

défaut n’a pas été pris à l’audience d’introduction, est convoquée, sur pli judiciaire, par le

greffier, à la demande écrite de la partie adverse, pour l’audience à laquelle la cause a

été remise ou ultérieurement fixée”.

La fixation de la cause sur la base de l'article 803 du Code judiciaire est obligatoire à l'égard d'une partie qui

n'a pas comparu à l'audience d'introduction mais contre laquelle défaut n'a pas été requis à cette audience,

par exemple parce que certaines formalités n'avaient pas été accomplies ou que le dossier de la partie

présente n'était pas en ordre. Dans ce cas, la partie défaillante doit être convoquée sous pli judiciaire, par le

greffier, à la demande écrite de la partie adverse, pour l'audience à laquelle la cause est fixée ou a été

remise.

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77. Si à l'audience à laquelle l'affaire a été fixée ou remise, cette partie ne comparaît toujours pas, défaut

pourra être requis contre elle. Si le greffe a omis d'envoyer le pli judiciaire, le juge devra refuser de statuer

par défaut à cette nouvelle audience. L'affaire sera soit remise soit renvoyée au rôle. On rappelle toutefois

qu’en vertu du principe de la permanence du domicile judiciaire, le changement de domicile demeure sans

incidence sur le procès en cours aussi longtemps que la partie qui a modifié son domicile néglige d’en avertir

le greffe et son adversaire26.

C.- A la suite d’une omission du rôle (article 730).

78. A la suite d’une omission du rôle d’audience, un défaut ne peut être sollicité que moyennant une

convocation donnée par pli judiciaire, quinze jours au moins avant l’audience, à la partie qui n’a pas demandé

que la cause y soit ramenée (article 730, § 2 b), alinéa 3, du Code judiciaire). En outre, s’il est justifié que par

suite d’une circonstance non imputable à cette partie, l’avertissement ne lui est pas parvenu, le juge peut

ordonner qu’elle sera citée par huissier de justice.

Sous-section III- Le défaut de plaider

79. En vertu de l’article 804, alinéa 2, du Code judiciaire la procédure est

contradictoire dès lors que la partie a comparu conformément aux articles 728 et 729 du

Code judiciaire (c’est-à-dire, le cas échéant, par écrit) à l’audience d’introduction ou à

une audience ultérieure et a déposé au greffe ou à l’audience des conclusions, même si

les conclusions n’abordent pas le fond du litige et sont des conclusions de pure forme et

si elles n’ont pas été soutenues à l’audience.

En vertu d’un arrêt de la Cour de cassation du 15 décembre 199527, les juges d’appel doivent répondre aux

26 Cass., 1er février 1982, Pas., I, 688.

27 Cass., 15 décembre 1995, Pas., I, 1173.

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conclusions non soutenues à l’audience de la partie à l’égard de laquelle la procédure est contradictoire.

Sous-section IV - Défaut en fin d’audience et rabat du défaut

80. Aux termes de l’article 805 du Code judiciaire, “la prononciation du jugement par défaut ne peut avoir

lieu avant la fin de l’audience où le défaut a été constaté, et pour autant que celui-ci n’ait point été auparavant

rabattu. Le défaut serait rabattu et l’instance poursuivie contradictoirement si les parties le sollicitent

conjointement au cours de l’audience où le défaut a été requis”.

Le prononcé d’un défaut ne peut dès lors avoir lieu avant la fin de l’audience où il a été requis. Le défaut qui a

été demandé au début de l’audience peut également être rabattu au cours de celle-ci, pour autant que les

parties se présentent ensemble devant le juge. En ce cas, l’instance est poursuivie contradictoirement, à la

demande conjointe des parties. La partie qui avait requis le défaut n’est évidemment pas obligée d’accepter

que celui-ci soit rabattu.

Sous-section V - Péremption du jugement par défaut

A.- Notion, conditions d’application et effets.

81. Le jugement par défaut doit être signifié dans l’année sinon il est réputé non avenu en vertu de l’article

806 du Code judiciaire. La simple connaissance du jugement par défaut ne suffit pas à rendre inapplicable

l’article 806 du Code judiciaire.

82. Lorsqu’un jugement par défaut est réputé non avenu faute d’avoir été signifié dans l’année comme le

prescrit l’article 806 du Code judiciaire, l’instance demeure ouverte et la cause peut être ramenée à l’audience

par une simple demande de fixation et sans citation nouvelle28.

En revanche, le défendeur défaillant ne peut, lorsque le jugement par défaut ne lui a pas été signifié dans

l’année, demander que la cause soit, en application de l’article 750 du Code judiciaire, jugée à nouveau par le

juge ayant rendu le jugement par défaut. La seule possibilité qui lui est offerte est d’exercer le recours

ordinaire de l’opposition conformément aux dispositions de l’article 1047, alinéa 2, du Code judiciaire29.

83. Dans la mesure où la péremption laisse subsister la procédure par défaut, il en résulte que la citation

originaire subsiste avec les effets qui s’y attachent notamment quant à l’interruption de la prescription,

laquelle, en matière civile, sauf dispositions légales dérogatoires, se prolonge pendant tout le cours de

28 Cass., 13 septembre 1993, Pas., I, 688.

29 Cass., 22 février 1991, Pas., I, 609 et note A.T.

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l’instance30.

B.- Nature

84. Le délai d’un an prévu par l’article 806 du Code judiciaire pour la signification d’un jugement par

défaut est prévu à peine de déchéance. Cette déchéance n’est pas couverte même lorsqu’elle n’est pas

soulevée avant tout autre moyen31.

La péremption de l’article 806 du Code judiciaire n’est pas d’ordre public mais impérative de sorte qu’il est

admis que la partie défaillante peut renoncer à s’en prévaloir.

Comme toute renonciation, celle-ci doit être certaine et ne peut se présumer. Ainsi, en cas qu’acquiescement,

le jugement par défaut n’est pas frappé de péremption et peut produire tous ses effets. Il en va de même

lorsque le défaillant a formé opposition sur le fond dans l’année suivant la décision rendue par défaut sans se

prévaloir de la péremption ou exécuté la décision volontairement et sans réserve.

SECTION II - L’INSTRUCTION PAR DEFAUT - LES POUVOIRS DU JUGE STATUANT PAR DEFAUT

Sous-section I - La thèse traditionaliste

85. Suivant la thèse traditionaliste, qui a les faveurs de la Cour de cassation32 et qui s’inspire directement

des articles 150 et 434 de l’ancien Code de procédure civile aujourd’hui abrogés, le défaut du défendeur doit

être considéré comme une contestation de la compétence, de la recevabilité et du fondement de la demande.

Il ne peut être tenu pour un acquiescement mais, au contraire, pour un mode de contradiction de la demande.

Les pouvoirs du juge statuant par défaut sont ainsi plus étendus que ceux du juge statuant dans le cadre

d’une instance contradictoire. Cette thèse repose sur l’idée quelque peu “sentimentaliste” que le défendeur

30 Cass., 31 octobre 1994, Pas., I, 882.

31 Cass., 10 janvier 1986, Pas., I, 577.

32 Cass., 30 avril 1936, Pas., I, 228, note P.L.; Cass., 24 septembre 1953, Pas., 1954, I, 38, concl. P.MAHAUX; Cass., 7 décembre 1972, Pas., 1973, I, 328; Cass., 21 mai 1981, Pas., I, 1098; Cass., 13 juin 1985, Pas., I, 1315.

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qui ne comparaît pas est forcément malheureux et ignorant, qu’il n’est pas en mesure de faire valoir ses

moyens de défense et que dès lors ses droits doivent être protégés par le juge.

86. Le juge statuant par défaut doit par conséquent non seulement vérifier les moyens de procédure33

mais encore s’assurer que les conclusions du demandeur sont justes et bien vérifiées mais uniquement sur

les pièces et au regard du dossier dont il dispose. D’office, le juge doit suppléer tous les moyens que la partie

défaillante aurait pu proposer, y compris les contestations d’ordre privé que le juge ne peut en règle soulever

d’office lorsque toutes les parties comparaissent. Le juge peut, le cas échéant, ordonner les mesures

d’instruction qui lui paraissent opportunes afin de vérifier le bien-fondé en fait de la demande.

En outre, le défendeur défaillant dispose dans tous les cas de l’opposition qui demeure une voie de recours

ordinaire.

Sous-section II - La thèse réformatrice

87. Suivant la thèse réformatrice, sous réserve de la mise en oeuvre de dispositions légales particulières

(tel les articles 730, 862, 1058 du Code judiciaire), le juge doit, tant au stade du contrôle de la régularité de la

procédure qu’à l’occasion de l’examen ultérieur du fondement même de la demande, en vertu du principe

dispositif, s’abstenir d’élever en lieu et place du défendeur défaillant, des contestations que seul ce dernier

aurait pu opposer à l’action introduite contre lui.

88. Le juge devra cependant veiller à utiliser toutes les ressources de la procédure afin de vérifier si le

défendeur a été effectivement atteint en temps utile par la convocation en justice de telle sorte que celui-ci a

“véritablement choisi d’être absent alors que le débat était potentiellement concevable”.

En particulier, le juge pourra soulever tous les moyens de procédure déduits de règles d’ordre public et

impératives : contrôle des nullités absolues, de la régularité du mode de convocation, de son pouvoir de

juridiction, de sa compétence matérielle, des compétences territoriale impératives et d’ordre public, fins de

non-recevoir, exceptions déduites du non-respect de règles d’organisation judiciaire.

33 Comme nous l’avons déjà indiqué, le juge doit notamment soulever des déclinatoires de

compétence territoriale même lorsque celle-ci est d’ordre privé et n’est par conséquent pas visée par la présomption de contestation de l’article 630, alinéa 3, du Code judiciaire (Cass., 13 juin 1985, Pas., I, 1315).

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89. Sur le fond du droit, le juge pourra appliquer à la contestation dont il est saisi l’ensemble des règles

de droit qu’il juge adéquates quelle que soit leur nature sans toutefois pouvoir élever d’office une contestation

tirée d’une règle de droit purement supplétive.

Sur le plan de la preuve, le juge devra également tenir pour avérés les faits non contestés par le défaillant.

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CHAPITRE IV - LA PROCÉDURE SUR REQUÊTE UNILATÉRALE

SECTION I - NOTION

90. La procédure sur requête unilatérale ne peut être utilisée que dans les cas

expressément prévus par la loi (par exemple : les articles 575, 584, alinéa 3, 587 et 606

du Code judiciaire) ou aussi lorsque la demande ne comportant pas d'adversaire, la

procédure contradictoire ne saurait être mise en oeuvre34.

L'introduction et l'instruction de la demande sur requête unilatérale sont réglées par les

articles 1025 à 1034 du Code judiciaire.

SECTION II - FORME ET DEPOT DE LA REQUETE

91. Les articles 1026 et 1027 du Code judiciaire déterminent la forme et les conditions

du dépôt de la requête unilatérale. Celle-ci doit contenir à peine de nullité :

- l'indication des jour, mois, année;

- les nom, prénom, profession et domicile du requérant ou de ses représentants légaux. S'il s'agit

d'une personne morale, l'article 703 du Code judiciaire est applicable;

- l'objet et l'indication sommaire des motifs de la demande;

- la désignation du juge qui doit en connaître;

- sauf lorsque la loi en dispose autrement, la signature de l'avocat de la partie.

92. La requête est déposée au greffe et visée à sa date ou adressée, sous pli postal, en double

exemplaire. Elle est inscrite dans le registre des requêtes et versée au dossier de la procédure. Souvent, des

pièces doivent être annexées à la requête et il est alors judicieux d'insérer dans celle-ci un inventaire. Cette

formalité n'est toutefois pas prescrite à peine de nullité.

34 Cass., 25 février 1999, R.D.J.P. 1999, 94, note H. BOULARBAH.

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SECTION III - INSTRUCTION DE LA DEMANDE

93. Le juge vérifie la demande dont le libellé résulte de la requête. Il instruit l'affaire

notamment sur la base des pièces jointes et peut convoquer la partie requérante et les

parties intervenantes pour leur demander des explications.

Il n'y a généralement pas de délai prévu entre le dépôt de la requête et la convocation.

Les tiers peuvent intervenir volontairement selon le droit commun des articles 812 et 813

du Code judiciaire. Selon le droit commun également (article 811 du Code judiciaire),

leur mise en cause ne peut être ordonnée d'office par le magistrat. En pratique,

l'intervention d'un tiers est rare, puisque seul le requérant connaît l'existence de la

demande.

En raison du caractère unilatéral de la procédure, on enseigne traditionnellement que l'article 807 du Code

judiciaire est inapplicable. Cette solution paraît critiquable car l’exigence du caractère contradictoire des

conclusions, prévue par l’article 807, ne peut bien évidemment appliquée dans une procédure qui ne revêt

pas cette nature.

SECTION IV - DECISION RENDUE SUR REQUETE

94. La décision, motivée, est rendue en chambre du conseil. Elle est notifiée par le

greffier à la partie requérante et, le cas échéant, aux parties intervenantes sous pli

judiciaire, dans les trois jours du prononcé. Cette notification fait courir le délai d'appel

d'un mois prévu à l'article 1031 du Code judiciaire, sans possibilité de prorogation.

L'ordonnance rendue sur requête unilatérale a une autorité de chose jugée restreinte

analogue à celle des décisions provisoires du juge des référés.

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SECTION V - RECOURS

95. La décision rendue sur requête unilatérale est susceptible de voies de recours :

1° les parties requérantes ou intervenantes peuvent en interjeter appel lorsqu'elle

leur inflige un grief (article 1031 du Code judiciaire).Ce recours est formé par une requête unilatérale libellée conformément à l'article 1026 du Code

judiciaire et déposée au greffe de la juridiction d'appel. Le délai est d'un mois à dater de la

notification de l'ordonnance attaquée. Ce recours n'est pas accordé au tiers auquel l'ordonnance

causerait un préjudice. La décision rendue sur requête unilatérale n'est pas susceptible d'opposition

car il ne s'agit pas d'une décision prononcée par défaut.

2° Toute personne qui n'est pas intervenue dans la procédure unilatérale en la même

qualité - et donc essentiellement la personne à charge de qui l'ordonnance

prononce une mesure - peut former tierce opposition à la décision (articles 1033,

1034 et 1125 du Code judiciaire). Le délai est d'un mois à compter de la signification de

l'ordonnance au tiers opposant par la partie qui en a pris l'initiative.

La tierce opposition doit être formée par citation, afin de rendre le débat contradictoire. Cette citation

doit être signifiée à toutes les parties. Le juge acquiert une vue contradictoire du litige et il peut alors

être saisi par les parties, désormais présentes à la cause, de toutes les demandes incidentes que le

droit commun autorise.

3° Le requérant et les parties qui étaient intervenues lors de la procédure initiale

peuvent, lorsque les circonstances ont changé, et sous réserve des droits acquis

par un tiers, demander la modification ou la rétractation de l'ordonnance (article

1032 du Code judiciaire).

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CHAPITRE V - LE JUGEMENT

96. La décision judiciaire est l'aboutissement du procès.

Rappelons qu'elle doit être prononcée en audience publique (article 149 de la

Constitution).

La décision consiste en un écrit portant les mentions prévues par l'article 780 du Code

judiciaire : le texte original du jugement est porté à la feuille d'audience. C'est la minute,

signée par le juge et le greffier, et conservée au greffe.

SECTION I - CONTENU

97. Outre diverses mentions, le jugement doit contenir une motivation et un dispositif.

A.- La motivation

98. Les articles 149 de la Constitution et 780 du Code judiciaire disposent que tout

jugement doit être motivé. La Cour de cassation a rappelé à diverses reprises que cette

obligation est inséparable de la mission de juger.

Pour les parties, la motivation permet de vérifier si le dispositif de la décision est

dépourvu d'arbitraire et conforme au droit.

Pour les tiers, l'examen de la motivation permet de connaître la jurisprudence : c'est en

effet à partir des motifs d'une décision qu'il est possible de déterminer la portée exacte de

celle-ci notamment si elle tranche une question juridique controversée.

La motivation doit être complète, claire, précise et adéquate. La contradiction dans les

motifs, équivalant à une absence de motifs, peut entraîner la cassation de la décision

entreprise.

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Il faut toutefois rappeler que l'obligation de motiver est une règle de forme, ce qui revient

à dire qu'elle est respectée dès que le jugement contient une motivation, même si celle-ci

est erronée en droit ou en fait.

99. Il existe quelques exceptions à l'obligation de motiver, qui concernent des questions accessoires,

comme les frais et dépens (à l’exception de la modification du montant de base de l’indemnité de procédure

qui doit être spécialement motivée), l'exécution provisoire ou la condamnation aux intérêts légaux. Les

décisions d'ordre intérieur, actes d'administration judiciaire sans caractère juridictionnel, ne doivent pas non

plus être motivées.

B.- Mentions du jugement

100. L'article 780 du Code judiciaire détermine les mentions qu'à peine de nullité, le jugement doit

contenir. Rappelons encore une fois que la "nullité" d'un jugement n'apparaîtra que si la voie de recours

appropriée est exercée.

Ces mentions sont :

- l'indication du juge ou du tribunal dont il émane, les noms des membres du siège, du magistrat du

ministère public qui a donné son avis et du greffier qui a assisté au prononcé;

- les noms, prénoms et domiciles indiqués par les parties lors de leur comparution ou de leurs

conclusions;

- l'objet de la demande et la réponse aux conclusions ou moyens des parties;

- la mention de l'avis du ministère public;

- la mention et la date du prononcé de la décision en audience publique.

C.- Le dispositif

101. Le dispositif est la partie du jugement qui contient la décision prise par le tribunal.

Toute décision relative à la contestation, même si elle figure dans les motifs (les "attendus") est un dispositif35.

35 Cass., 28 avril 1994, Pas., I, 418; Cass., 20 mars 1991, Pas., I, 686.

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On rappelle enfin que l'autorité de chose jugée ne s'attache qu'au seul dispositif mais s'étend auxmotifs qui

en sont le soutien nécessaire36.

D.- Divers

102. La transcription de l'original du jugement sur la feuille d'audience constitue la minute de la décision :

c'est un acte authentique qui est déposé au greffe.

Elle doit être signée par le juge et le greffier.

103. L'expédition - ou grosse du jugement - est une copie intégrale de la décision, revêtue de la formule

exécutoire qui est délivré par les greffiers aux parties en cause qui en font la demande. Signée par le greffier,

l'expédition est l'acte authentique qui permet à l'huissier de procéder à l'exécution forcée.

104. Enfin, chaque partie ou son avocat reçoit, dans les huit jours du prononcé du jugement, sous simple

lettre, une copie non signée de la décision (article 792 du Code judiciaire).

36 Cass., 22 mars 1984, Pas., I, 857.

105. Le prononcé du jugement doit avoir lieu dans le mois soit de la clôture des débats, soit de l'avis du

ministère public ou du délai fixé pour le dépôt au greffe des conclusions des parties concernant ledit avis

(article 770 du Code judiciaire).

Si la décision n'a pas été prononcée dans les six mois, le procureur général près de la cour d'appel peut

adresser à la Cour de cassation une requête en dessaisissement de la juridiction négligente (articles 648, 4°,

652 et 654 à 658 du Code judiciaire).

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Par ailleurs, le juge négligent s’expose également à des sanctions disciplinaires37.

E.- Signification de la décision

106. La signification est le fait de porter l'expédition de la décision à la connaissance de

la partie adverse. Elle se fait par exploit d'huissier et a deux effets fondamentaux :

- elle fait courir les délais prévus pour l'exercice des voies de recours (à défaut de

signification, celles-ci restent ouvertes pendant les délais ordinaires de

prescription prévus par le Code civil);

- la signification précède obligatoirement l'exécution.

Rappelons que dans certains cas, c'est par une notification que la décision est "officiellement" portée à la

connaissance des parties. Par exemple, l’ordonnance rendue sur requête unilatérale est notifiée à la partie

requérante et aux parties intervenantes.

SECTION II - INTERPRETATION ET RECTIFICATION DU JUGEMENT

107. Lorsqu'un juge rend un jugement définitif - au sens où nous avons défini ce terme - il épuise son

pouvoir de juridiction et il ne peut revenir sur sa décision (article 19, alinéa 1er, du Code judiciaire).

Il ne peut non plus être saisi des difficultés suscitées par l'exécution forcée de celle-ci: cette compétence

appartient au juge des saisies.

Il lui est toutefois permis d'interpréter et de rectifier le jugement.

A.- Interprétation

108. Le juge peut interpréter sa décision lorsqu'il existe dans celle-ci une disposition obscure ou ambiguë :

il peut mieux dire ce qui a été décidé, sans toutefois étendre, restreindre ou modifier les droits qu'il a

consacrés (article 793 du Code judiciaire)38. Sinon, il porterait atteinte à l'autorité de la chose jugée.

Il doit donc maintenir sa décision initiale tout en lui donnant une forme meilleure. Dès lors, à l'occasion d'une

demande d'interprétation, il ne peut avoir égard à des éléments qui ne lui avaient pas été soumis à l'occasion

37 Cass., 12 janvier 2006, D.050013.F. En vertu du nouvel article 770 du Code judiciaire tel que modifié

par la loi du 26 avril 2007, la sanction disciplinaire est au minimum une retenue sur traitement.

38 Cass., 27 février 1992, Pas., I, 582.

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du débat initial.

B.- Rectification

109. La rectification ne peut porter que sur des erreurs de plume. De même qu'à propos de l'interprétation,

les droits consacrés par la décision rendue ne peuvent être étendus, restreints ou modifiésà cette occasion39.

39 Cass., 27 février 1992, Pas., I, 582.

Le magistrat ne peut que corriger les erreurs matérielles par exemple une erreur de prénom qu'il aurait

commise, ou une erreur d'addition (mais non pas, par exemple ajouter un élément de calcul qui lui était

inconnu lorsqu'il a statué).

C.- Compétence et procédure

110. C'est le juge qui a rendu la décision qui peut l'interpréter ou la rectifier (article 795 du Code judiciaire).

Ce juge est saisi par citation ou par comparution volontaire.

D.- Délais

111. En ce qui concerne l'interprétation, selon l'article 798 du Code judiciaire, la demande ne peut être

formée :

- si la décision est frappée d'appel ou de pourvoi;

- sauf si toutes les parties sont d'accord, avant l'expiration des délais d'appel ou de pourvoi en

cassation. Cette disposition a pour but d'éviter la saisine simultanée de deuxjuridictions et le risque de

voir l'interprétation empiéter sur le domaine du juge d'appel ou de cassation.

112. En ce qui concerne la rectification, le juge qui a rendu la décision peut la rectifier pour autant que le

dispositif qui comporte l'erreur matérielle ne fasse l'objet d'aucun recours au moment où il est saisi de la

demande (article 799 du Code judiciaire).

113. Remarque

Lorsqu'une demande en interprétation ou en rectification d'erreur matérielle est accueillie, les dépens de cette

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procédure sont mis à charge de l'Etat (article 801 du Code judiciaire).

SECTION III - EFFETS DES JUGEMENTS

A.- Extinction de l'instance

114. Dans la limite de la question réglée, l'instance est éteinte et le juge est dessaisi.

Il ne peut plus revenir sur sa décision ni la modifier.Il appartient seulement aux parties d'exercer les voies de recours appropriées, en général, l'appel.

La règle du dessaisissement est d'ordre public et les parties ne peuvent y déroger. Par exemple :

- le premier juge ne peut après son jugement par un jugement distinct accorder l'exécution provisoire :

seul le juge d'appel a le pouvoir de le faire (article 1401 du Code judiciaire);

- il en est de même en ce qui concerne les délais de grâce (article 1333, alinéa 2, du Code judiciaire).

B.- Force probante

115. Le jugement est un acte authentique faisant preuve jusqu'à inscription de faux

(articles 1317 et suivants du Code civil).

C.- Autorité de la chose jugée

116. Il est renvoyé à cet égard aux développements exposés dans la première partie.

D.- Effets déclaratif et obligatoire

117. Le jugement ne crée pas de droit nouveau : il reconnaît et confirme ce qui existe.

L'acte juridictionnel est donc déclaratif des droits des plaideurs et, qu'il aboutisse à une condamnation ou à un

débouté, il s'impose aux plaideurs et a pour eux un effet obligatoire.

Comme nous l’avons exposé, cet effet s'étend aux tiers en ce sens que ces derniers ne peuvent méconnaître

l'existence du jugement et son contenu. Cependant, n'ayant pas été parties à l'instance, les tiers ont la

possibilité si le jugement porte atteinte à leurs propres droits d'attaquer la décision par la voie de la tierce

opposition.

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Acte déclaratif, le jugement est en principe rétroactif en ce sens que le magistrat statue en se plaçant au jour

de la citation lorsqu'il prononce.

Il est toutefois bien évident qu'en fait, le juge prendra aussi en considération les événements qui se sont

produits depuis l'acte introductif d'instance pour former son opinion.

118. Exceptionnellement, la décision de justice crée une situation juridique nouvelle: dans ce cas le

jugement est constitutif et, en principe, il n'a d'effet qu'au jour du prononcé. C'est le cas des jugements qui

prononcent le divorce, la séparation de corps, la séparation de biens, la faillite, l'interdiction.

Toutefois, même le jugement constitutif peut, en vertu de dispositions particulières, voir tout ou partie de ses

effets rétroagir.

E.- Force exécutoire

119. En principe, un jugement est exécutoire dès qu'il est rendu.

Cela signifie qu'il sera mis en œuvre, si nécessaire avec le concours de la force publique.

120. Sauf si la décision est exécutoire nonobstant tout recours, l'introduction d'un

recours ordinaire (opposition ou appel) suspend le caractère exécutoire du jugement.

Dans certains cas particuliers, déterminés en fonction de la nature de la condamnation, le

délai d'appel est à lui seul suspensif du caractère exécutoire :

- lorsque le jugement ordonne ou impose à un tiers une mainlevée, une radiation

hypothécaire, un paiement ou une prestation quelconque (article 1388, alinéa 1er,

du Code judiciaire);

- lorsque le jugement porte une condamnation à une somme d'argent (article 1495,

alinéa 2, du Code judiciaire), sous réserve du droit de pratiquer une saisie

conservatoire (article 1414 du Code judiciaire).

Dans ces deux cas, le jugement ne pourra être exécuté qu'après l'expiration du délai pour

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introduire un recours (un mois à dater de la signification du jugement) et sous réserve

que ce recours n’ait pas été introduit.

121. Dans certains cas, le jugement ne peut jamais être revêtu de l'exécution provisoire.

Il en est ainsi en matière de divorce, de séparation de corps, d'opposition à mariage, de

nullité de mariage (article 1399 du Code judiciaire), d'adoption, d'interdiction judiciaire

(article 1251 du Code judiciaire).

122. Le jugement passé en force de chose jugée (c’est-à-dire, pour rappel, qui n’est

plus susceptible de voies de recours ordinaires) est toujours doté de la force exécutoire.

Ce sont les procédures d'exécution forcée qui permettent concrètement de mettre en oeuvre les droits

résultant du jugement.

La formule exécutoire est délivrée au nom du Roi, conformément à l'article 40 de la Constitution.

Les documents d'où résultent la force exécutoire consistent en une copie authentique du jugement, délivrée

par le greffier qui la signe, et qui lui adjoint la formule prévue par l'article 1386 du Code judiciaire. L'ensemble

de ce document se nomme "expédition" et autorise les actes d'exécution sur les biens conformément à ce

que nous examinerons dans la cinquième partie de ce cours.

F.- Divers

123. Le jugement transforme les courtes prescriptions en prescriptions ordinaires : le créancier dispose

des délais de prescription de droit commun pour exécuter le jugement, même si la dette originaire a été

soumise à une prescription plus courte.

124. A défaut d'exercice des voies de recours, ou si celles-ci échouent, le jugement

définitif acquiert irrévocablement force de chose jugée, même si la décision est erronée

ou irrégulière.

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TITRE II - LES INCIDENTS

CHAPITRE I - LES DEMANDES INCIDENTES

125. Il est renvoyé à la première partie (principes généraux) et à la troisième partie (la

compétence).

CHAPITRE II - LA REPRISE D'INSTANCE

126. La reprise d'instance est la procédure qui permet "de remettre sur ses rails" une

procédure interrompue.

SECTION I - L’INTERRUPTION DE L’INSTANCE

127. Les causes d'interruption de l'instance ont un caractère exceptionnel. Selon

l'article 815 du Code judiciaire, elles sont au nombre de trois :

A.- Le décès d'une partie

128. Le Code impose la notification du décès d'une partie en cours d'instance soit par son conseil soit par

l'un de ses héritiers, notification qui consiste en l'envoi au greffe ou le dépôt au dossier de la procédure d'un

écrit faisant connaître l'événement. Si le décès n'est point dénoncé, la procédure poursuivie après celui-ci est

régulièrement accomplie et la validité du jugement prononcé n'en est pas affectée.

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En revanche, si la dénonciation a bien lieu, il y a interruption de la procédure qui ne reprend son cours que par

un acte de reprise d'instance émanant d'un ayant droit de la partie décédée. Si les héritiers demeurent

inactifs, que ce soit délibérément ou non, la partie adverse peut les contraindre à reprendre l'instance.

B.- Le changement d'état

129. Il s'agit de la perte de la capacité requise pour agir en justice. Le texte est d'application rare, parce

que de manière générale, le changement d'état n'est pas de nature à faire obstacle à la continuation de la

procédure.

C.- La modification de la qualité

130. Il s'agit ici de la modification de la qualité en laquelle la partie a agi.

Il s'agit d'un cas encore plus rare que le précédent.

D.- Remarque

131. Conformément au texte de l'article 815 du Code judiciaire, ni le décès d'une partie, ni son

changement d'état ou de qualité n'interrompent l'instance lorsque ces événements surviennent après la

clôture des débats.

SECTION II - EFFETS DE L’INTERRUPTION DE L’INSTANCE

132. Les actes accomplis après l'interruption de l'instance sont nuls, mais le Code

judiciaire prévoit que l'instance peut être reprise de gré ou de force.

A.- La reprise d'instance volontaire

133. La reprise d'instance est volontaire lorsqu'elle est formée spontanément par la

partie ou les ayants cause de la partie dans le chef de laquelle l'interruption s'est

produite.

Elle se réalise par le dépôt au greffe, selon les règles énoncées aux articles 742 et 743 du Code judiciaire,

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d'un acte relatant, à peine de nullité, les causes de la reprise d'instance, avec l'indication des noms, prénoms,

profession et domicile ou, à défaut de celui-ci de la résidence des ayants-droit.

La notification de l'acte est faite par le greffier, sous pli judiciaire aux autres parties. Ces formalités peuvent

être remplacées par un acte équivalent, tel le dépôt de conclusions, pour autant que le but voulu par le

législateur soit atteint.

B.- La reprise d'instance forcée

134. Si la partie dans le chef de laquelle l'interruption s'est produite, ou ses ayants

cause, refusent ou négligent de reprendre l'instance, l'adversaire peut les forcer à le faire

en les citant en reprise d'instance.

Cette citation à comparaître est donnée devant la juridiction saisie de la procédure originaire. Elle est dirigée

contre toute personne ayant qualité pour procéder à une reprise d'instance volontaire.

Si, à l'expiration des délais de comparution, la partie citée fait défaut, la reprise d'instance a lieu de plein droit.

C.- Remarques

135. Qu'elle soit volontaire ou forcée, la reprise d'instance n'est possible que s'il subsiste quelque point à

juger et si l'instance n'est pas éteinte pour l'une ou l'autre cause (désistement, acquiescement, interruption).

136. A la suite de la reprise d'instance, la procédure est poursuivie comme si l'interruption n'avait pas eu

lieu.

CHAPITRE III - LE DÉSISTEMENT

SECTION I - GENERALITES

137. Le désistement, comme l'acquiescement, que nous évoquerons à propos des voies

de recours, éteint l'instance.

Le désistement est la renonciation à un acte de procédure, à une instance ou à une

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action.

Le désistement à un acte de procédure consiste en la renonciation aux effets attachés à

cet acte.

Le désistement d'instance est l'abandon d'une procédure commencée : il est sans effet

sur le fond du droit et n'est pas un obstacle à l'intentement ultérieur de la même action

(article 820 du Code judiciaire).

Le désistement d'action est l'abandon du pouvoir d'agir et comporte la renonciation non

seulement à la procédure entamée mais également au droit d’agir en justice relativement

à la prétention (article 821 du Code judiciaire)40.

40 Lorsque le demandeur, qui a exercé une action sur la base de la violation d’obligations

contractuelles, à la fois contre son cocontractant et contre les tiers complices de celui-ci, se désiste de son action uniquement contre son cocontractant, ce désistement, qui implique renonciation par le demandeur à ses droits contre le cocontractant, n’entraîne toutefois pas l’extinction de ses droits à l’égard des tiers complices (Cass., 22 mai 1998, C.97.109.F, inédit).

SECTION II - LE DESISTEMENT D'UN ACTE DE PROCEDURE ET LE DESISTEMENT D'INSTANCE

138. Le désistement à un acte de procédure consiste en la renonciation aux effets attachés à cet acte

(article 822 du Code judiciaire).

Le désistement d'instance consiste en l'abandon d'une procédure principale ou incidente, que l'on estime a

posteriori irrégulière ou inopportune.

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Il permet de mettre fin à la litispendance ou d'abandonner un procès devenu sans objet à la suite d'une

transaction.

Lorsque le demandeur renonce à la poursuite de l'instance, il se réserve le droit d'en intenter une nouvelle.

139. Selon l'état d'avancement de la procédure, le désistement d'instance est un acte unilatéral ou

bilatéral. Aussi longtemps que le défendeur n'a pas pris de conclusions sur le fond ou introduit une demande

reconventionnelle, le demandeur peut se désister de l’instance en dehors de toute acceptation de la partie

défenderesse. En déposant des conclusions sur le fond, le défendeur acquiert un droit à ce que l'instance se

termine par un jugement définitif qui le mette à l'abri d'une nouvelle procédure. Dès ce moment, le

désistement d'instance sollicité par le demandeur doit être accepté par le défendeur.

Toutefois, si la partie défenderesse n'a aucune raison sérieuse de refuser le désistement, le tribunal a le droit

de passer outre. En effet, en vertu de l'article 825 du Code judiciaire, « en cas de contestation, le désistement

est admis ou, le cas échéant, refusé par une décision du juge ». En application de cette disposition, le juge

peut imposer le désistement judiciaire au plaideur qui ne justifie pas d'un intérêt suffisant pour poursuivre une

défense en justice.

140. Le désistement d'instance est admis en toutes matières (article 823, alinéa 2, du

Code judiciaire), même si les droits litigieux intéressent l'ordre public, parce qu'il n'y a

pas de renonciation à ceux-ci. Néanmoins, le désistement d'un recours est prohibé

chaque fois qu'il produirait le même effet qu'un acquiescement interdit ou qu'un

désistement d'action qui ne satisferait pas aux conditions légales41.

141. Le désistement peut être exprès ou tacite mais conformément aux règles générales, il ne peut être

présumé car il constitue une renonciation. C'est pourquoi à défaut de manifestation expresse, la volonté de se

désister ne peut être déduite que de circonstances impliquant nécessairement l'intention de renoncer à la

procédure engagée.

Le désistement exprès est fait par un simple acte signé par la partie ou son mandataire et signifié à la partie

adverse s'il n'a pas été préalablement accepté par elle (article 824 du Code judiciaire).

41 C’est ainsi que l’époux aux torts duquel un jugement a autorisé le divorce ne peut valablement se

désister de l’appel qu’il a interjeté de ce jugement (Cass., 26 septembre 1980, Pas., 1981, I, 94, note).

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Le mandataire doit être muni d'un pouvoir spécial, le désistement sortant du mandat ad litem42. Une exception

existe toutefois dans le chef des avocats à la Cour de cassation qui, conformément à l'article 479 du Code

judiciaire, représentent valablement les parties en toute matière soumise à la Cour, sans avoir à justifier d'un

pouvoir spécial43.

L'acceptation par la partie défenderesse peut être faite dans les mêmes formes que le désistement lui-même.

En pratique, les parties prennent des conclusions conjointes quant au désistement.

142. Le désistement d'instance remet les choses dans l'état où elles étaient avant le procès (article 826,

alinéa 1er, du Code judiciaire)44, les dépens restant en principe, sauf convention contraire, à charge de celui

qui se désiste (article 827, alinéa 1er, du Code judiciaire).

Néanmoins, le désistement d’instance ne rend pas l’interruption de la prescription non avenue lorsqu’il est

motivé par l’incompétence du juge saisi et est suivi, d’un même contexte de la citation devant le juge

compétent (article 826, alinéa 2, du Code judiciaire).

Après avoir décrété le désistement d’instance, le juge ne peut plus statuer sur le fond du litige45. Toutefois, le

seul désistement du demandeur au principal ne met pas fin à la demande reconventionnelle déjà introduite46.

SECTION III - LE DESISTEMENT D'ACTION

143. Le désistement d'action est un acte unilatéral, efficace en dehors de toute

acceptation du défendeur.

42 Le juge ne doit toutefois vérifier si le mandataire ad litem est nanti d’un pouvoir spécial que s’il exis-

te une contestation à ce sujet (Cass., 25 mars 1994, Pas., I, 309).

43 Cass., 5 février 1976, Pas., I, 631, note.

44 Le désistement d’instance n’est par conséquent plus possible lorsque l’instance a pris fin par un jugement définitif (Cass., 22 décembre 1986, Pas., 1987, I, 502)

45 Cass., 25 mars 1994, Pas., I, 309.

46 En revanche, l’appel incident formé par la partie intimée après le désistement d’instance de la partie appelante est irrecevable si la partie intimée a acceptée le désistement quant auxdécisions qui, selon elle, lui ont porté atteinte et contre lesquelles elle a ensuite incidemment formé appel (Cass., 16 octobre 1992, Pas., I, 1160).

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Il équivaut à la renonciation au droit d’agir en justice et est dès lors impossible dans les

cas où pareille renonciation est interdite (par exemple, en ce qui concerne les actions

d'état, et plus généralement toutes les matières d'ordre public).

Il ne peut avoir lieu que s’il porte sur un droit auquel il est permis de renoncer et dont la

partie peut disposer (article 823, alinéa 1er, du Code judiciaire).

CHAPITRE IV - LA RÉCUSATION ET LE DESSAISISSEMENT

SECTION I - NOTIONS - DISTINCTIONS

144. La récusation est le droit accordé à un plaideur de faire écarter du siège, pour le

jugement de son procès, un juge dont l’impartialité à son égard peut légalement être

suspectée.

Il s’agit d’un incident grave, dont le législateur n’a admis la possibilité que pour des motifs sérieux.

La récusation est une mesure individuelle, dirigée nommément contre un ou plusieurs des juges appelés à

connaître du procès et considérés individuellement47.

145. Lorsque la « récusation » vise la totalité des magistrats d'un tribunal, on se trouve

en présence d'une demande de dessaisissement. Il y a lieu à dessaisissement lorsqu’il

existe des raisons suffisantes de mettre en doute l’impartialité d’une juridiction dans son

intégralité48. Il en va de même si un plaideur récusait un tel nombre de juges que la

47 Cass., 3 septembre 1962, Pas., 1963, I, 3; Cass., 3 novembre 1982, Pas., 1983, I, 288.

48 Sont partant irrecevables les requêtes en dessaisissement qui ne sont pas dirigées contre l’ensemble des magistrats et magistrats suppléants d’une juridiction (Cass., 20 mai 1999,

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juridiction saisie ne puisse plus se constituer.

C.99.197.F., inédit; Cass., 5 janvier 1996, Pas., I, 18; Cass., 13 décembre 1995, Pas., I, 1153; Cass., 3 juin 1993, Pas., I, 540; Cass., 12 février 1987, Pas., I, 712; Cass., 18 décembre 1972, Pas., 1973, I, 387; Cass., 12 février 1962, Pas., I, 672; Cass., 24 mai 1967, Pas., I, 1131).

Dans ce dernier cas, c'est, comme cela a déjà été exposé, la Cour de cassation qui est compétente pour

statuer sur la recevabilité et le bien fondé de la demande en dessaisissement d'un tribunal. A l'inverse de la

récusation où le juge récusé est remplacé par un autre magistrat de la même juridiction, en cas de

dessaisissement, la cause est retirée à l'ensemble de la juridiction visée et est confiée à une autre juridiction

du pays, de même degré.

SECTION II - LE DESSAISISSEMENT EN MATIERE CIVILE

Sous-section I - Causes de dessaisissement

146. Une juridiction valablement saisie peut être dessaisie dans les cas prévus par les articles 648 à 652

du Code judiciaire. Il s’agit des hypothèses suivantes :

- dessaisissement du chef de parenté ou d’alliance;

- dessaisissement pour cause de suspicion légitime;

- dessaisissement pour cause de sûreté publique à la seule initiative du procureur général près la Cour de

cassation;

- dessaisissement lorsque le juge néglige de juger pendant plus de sixmois la cause qu’il a prise en délibéré.

Sous-section II- Procédure de dessaisissement

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147. La requête en dessaisissement est déposée au greffe de la Cour de cassation et ne doit pas, en

matière civile, être signée par un avocat à la Cour de cassation (article 653 du Code judiciaire).

La demande de dessaisissement a un effet suspensif. Le greffier de la Cour de cassation avise le greffier du

juge dont le dessaisissement est demandé, dans les 24 heures du dépôt de la requête. Le dossier de la

procédure est transmis au greffe de la Cour de cassation dans le plus bref délai (article 654 du Code

judiciaire). La procédure suivie devant la Cour de cassation est, en règle, contradictoire.

148. Si, sur le vu de la requête et des pièces justificatives, la Cour de cassation juge que la requête est

manifestement irrecevable, elle statue immédiatement et définitivement (article 656, alinéa 1er, du Code

judiciaire). Dans ce cas, la procédure n’est pas contradictoire.

149. Lorsque la requête n’est pas manifestement irrecevable, la Cour ordonne dans le plus bref délai et au

plus tard dans les huit jours la communication de l’arrêt, de la requête et des pièces y annexées :

1° au président de la juridiction, au juge de paix ou au juge au tribunal de police dont le dessaisissement

est demandé pour faire, dans un délai fixé par la Cour49 et, le cas échéant, en concertation avec les membres

de la juridiction, une déclaration au bas de l’expédition de l’arrêt;

2° aux parties non requérantes ainsi que la communication du délai dont celles-ci disposent pour le

dépôt de leurs conclusions au greffe et du jour de comparution devant la Cour; cette comparution a lieu dans

les deux mois du dépôt de la requête;

3° au ministère public près la juridiction dont le dessaisissement est demandé ainsi que la

communication du délai dans lequel doit être déposé son avis, si la Cour le juge nécessaire.

La Cour ordonne également le rapport, à jour indiqué, par l’un des conseillers nommé par l’arrêt.

49 Si la déclaration est tardive ou n’est pas remise, la Cour de cassation statue sans plus attendre

(Cass., 29 octobre 1998 cité in Rapport annuel de la Cour de cassation 1999, Moniteur belge, 1999, p. 70, note (14)).

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Les conclusions des parties et, le cas échéant, l’avis du ministère public sont communiqués aux parties au

plus tard le jour de leur dépôt au greffe (article 656, alinéa 4, du Code judiciaire).

Par dérogation à l’article 478 du Code judiciaire, les conclusions peuvent, devant la Cour, être signées par un

avocat (article 656, alinéa 4, du Code judiciaire).

150. Le greffier de la Cour adresse, par pli judiciaire, au président de la juridiction dont le dessaisissement

est demandé, à chacune des parties ou, le cas échéant, à leurs avocats une copie non signée de la décision

définitive sur la demande en dessaisissement (article 656, alinéa 5, du Code judiciaire).

L’éventuel arrêt de dessaisissement ordonne le renvoi au juge qu’il désigne. La Cour peut en outre annuler

les actes faits avant la prononciation de la décision, par les juges dessaisis (article 658, dernier alinéa, du

Code judiciaire).

SECTION III - LA RECUSATION

Sous-section I - Causes de récusation

151. Les causes de récusation sont limitativement énumérées par l’article 828 du Code

judiciaire, au texte duquel il est renvoyé.

En résumé, les causes de récusation tiennent à la trop grande inimité ou au contraire la

trop grande affection qui pourrait exister entre magistrat et parties, ainsi qu’à l’intérêt

personnel que le magistrat pourrait avoir dans la cause qu’il est appelé à juger. Il s’agit

plus généralement de toute circonstance qui est de nature à mettre en cause l’impartialité

du magistrat.

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Sous-section II - Procédure de récusation

152. Celui qui veut récuser doit le faire avant le commencement de la plaidoirie, à moins que les causes

de récusation ne soient survenues postérieurement et, si la cause est introduite par requête, avant que la

requête ait été appointée (article 833 du Code judiciaire).

153. La récusation est introduite par une requête déposée au greffe de la juridiction saisie qui contient les

moyens justifiant la récusation (article 835 du Code judiciaire) et qui est signée par un avocat inscrit depuis

plus de dix ans au barreau50.

L’acte de récusation est remis dans les vingt-quatre heures par le greffier au juge récusé. Celui-ci est tenu de

donner au bas de cet acte, dans les deux jours, sa déclaration écrite portant, ou son acquiescement à la

récusation, ou son refus de s’abstenir, avec ses réponses aux moyens de récusation (article 836 du Code

judiciaire). A compter du jour de la communication au juge, tous jugements et opérations sont suspendus,

sous réserve des opérations urgentes (article 837 du Code judiciaire).

154. L’article 838 du Code judiciaire prévoit que la récusation est jugée dans les 8 jours en dernier ressort

par la juridiction du degré supérieur à celle à laquelle appartient le magistrat récusé (excepté lorsque celui-ci

est membre de la Cour de cassation auquel cas cette juridiction reste compétente)51.

155. Dans les trois jours de la réponse du juge qui refuse de s’abstenir, ou à défaut de réponse dans ce

délai, l’acte de récusation et la déclaration du juge, s’il y en a, sont envoyés par le greffier au magistrat du

ministère public près la juridiction supérieure qui doit connaître de la récusation.

Le ministère public près la juridiction supérieure transmet le dossier au greffe de cette juridiction après avoir

désigné lequel de ses membres se chargera du dossier52. Le président de la juridiction fixe l’affaire à

l’audience de manière à ce qu’il puisse être statué dans les huit jours de l’envoi de la demande de

récusation53.

50 Cass., 3 novembre 1982, Pas., I, 1983, 288.

51 La Cour de cassation est ainsi compétente pour connaître de la demande tendant à la récusation d’un membre du conseil d’appel de l’Ordre des architectes (Cass., 21 mai 1999, C.99.163.N, inédit).

52 En vertu de l’article 764, 7°, du Code judiciaire, les demandes de récusation doivent, à peine de nullité, être communiquées au ministère public.

53 Et devant la Cour de cassation, désigne un conseiller rapporteur.

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La procédure est contradictoire. La décision sur la récusation est rendue, sur les conclusions du ministère

public, les parties ayant été dûment convoquées pour être entendues en leurs observations54.

156. Conformément à l’alinéa 4 de l’article 838 du Code judiciaire, dans les 24 heures de la décision, le

greffier la fait signifier aux parties55, par l’huissier commis à cet effet par le tribunal ou la cour.

La décision qui rejette une demande de récusation condamne le récusant aux dépens de l’incident, y compris

ceux de la signification de ladite décision56.

157. Lorsque la récusation est rejetée, le juge peut réclamer des dommages et intérêts à la partie

récusante s’il justifie d’un préjudice. Si tel est le cas, le magistrat perd l’impartialité nécessaire pour connaître

de la cause et doit, partant, se déporter.

Lorsque la récusation est admise, la loi prévoit que c’est le juge qui a refusé de s’abstenir qui est condamné

aux dépens (article 841, alinéa 2, du Code judiciaire). Cette disposition a toutefois été déclarée contraire aux

articles 10 et 11 de la Constitution par la Cour constitutionnelle dans un arrêt n°30/2005 du 9 février 2005.

158. La décision sur la récusation est susceptible d’opposition lorsqu’elle a été rendue par défaut. Elle

n’est pas susceptible d’appel. La décision rendue sur la récusation demeure susceptible de pourvoi en

cassation sauf, évidemment, lorsqu’elle a été rendue par la Cour de cassation.

54 La loi ne précise pas le mode de convocation des parties qui ne sont d’ailleurs pas tenues de se

présenter mais doivent simplement être avisées de la date de l’audience pour éventuellement faire valoir leurs observations (Cass., 6 octobre 1998, P.98.1228.F, inédit). La convocation des parties par lettre recommandée à la poste est, partant, régulière (Cass., 6 octobre 1998, P.98.1228.F, inédit). En outre, les délais ordinaires de citation du Code judiciaire (articles 700 et 710 du Code judiciaire) ne s’appliquent pas à la procédure de récusation dès lors qu’il ne s’agit pas de l’introduction d’une demande principale et que la récusation doit être jugée dans les huit jours de l’envoi de la demande de récusation conformément à l’article 838, alinéa 2, du Code judiciaire (Cass., 6 octobre 1998, P.98.1228.F, inédit).

55 Il s’agit des parties à l’incident (Cass., 7 novembre 1969, Pas., 1970, I, 221; Cass., 27 avril 1979, Pas., I, 1019), c’est-à-dire, les parties et, le cas échéant, le magistrat récusé si celui-ci est intervenu ou a réclamé des dommages et intérêts.

56 Cass., 7 novembre 1969, Pas., 1970, I, 221; Cass., 27 avril 1979, Pas., I, 1019.

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66

CHAPITRE V - LE DÉSAVEU

159. La procédure en désaveu organisée par les articles 848 à 850 du Code judiciaire

tend à faire décider qu'un mandataire "ad litem" (avocat ou autre) n'avait pas reçu mandat

de la partie au nom de laquelle il a agi ou a excédé les limites du mandat qu'il avait reçu.Le désaveu est principal ou incident selon qu'il est formé en dehors de l'instance à laquelle appartient l'acte

qui en est l'objet, ou au cours de cette instance.

160. L'article 849 du Code judiciaire auquel il est renvoyé fixe la procédure à suivre. Notamment, si la

cause est déjà jugée mais qu'une voie de recours demeure ouverte, la demande en désaveu est formée en

exerçant ce recours.

Lorsque le juge d'appel est déjà saisi, le désaveu est introduit par requête en intervention: il s'agit d'un cas

exceptionnel d'intervention agressive autorisée en appel.

Cette procédure permet aussi de solliciter contre le mandataire désavoué une condamnation à des

dommages et intérêts.

Lorsque le procès est terminé, la demande en désaveu est formée en même temps que la requête civile à

laquelle donne ouverture l'article 1133, 6°, du Code judiciaire (cette disposition permet de solliciter la

rétractation de la décision fondée "sur un acte de procédure accompli au nomd'une personne, sans qu'elle ait

donné mandat exprès ou tacite à cette fin, ou ratifié ou confirmé ce qui a été fait").

L'action en dommages et intérêts contre le mandataire désavoué doit satisfaire aux exigences traditionnelles

de l'action en responsabilité, la relation causale étant généralement en l'espèce très délicate à établir.

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CHAPITRE VI - LES EXCEPTIONS

161. Le Code distingue les exceptions dilatoires et péremptoires.

SECTION I - LES EXCEPTIONS DILATOIRES

162. Celles-ci tendent seulement à une suspension de la procédure.

Il est renvoyé au texte des articles 851 et suivants du Code judiciaire.

Il s'agit notamment de :

- l'exception de la caution de l'étranger demandeur;

- l'exception tendant au respect des délais légaux accordés à l'héritier pour faire

inventaire et délibérer;

- l'exception dilatoire d'appel en garantie;

- l'exception de défaut de communication de pièces (article 736),

auxquelles il faut ajouter les déclinatoires de compétence (exceptions dilatoires qui

reportent la discussion sur le fond de la demande et tendent à obtenir le renvoi de la

cause au magistrat compétent, le cas échéant à l'intervention du tribunal

d'arrondissement) ainsi que les exceptions de connexité, d'indivisibilité, et de

litispendance.

163. On peut également y ajouter la fin de non procéder prévue par l’article 1725, §2,

du Code judiciaire en matière de médiation ainsi que diverses exceptions dilatoires ou

fins de non procéder prévues par des législations particulières, notamment la loi sur la

Banque Carrefour des Entreprises (article 14) ou encore la loi hypothécaire (article 3).

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SECTION II - LES EXCEPTIONS PEREMPTOIRES

Sous-section I - Généralités

164. Les déclinatoires de juridiction fondés sur l'existence d'une convention d'arbitrage,

ou d'une compétence internationale, ou encore une immunité de juridiction, constituent

une exception péremptoire qui met fin à l'instance engagée devant un pouvoir dont aucun

organe ne peut connaître. On peut également y ajouter le non respect de certains

préliminaires de conciliation, notamment en matière de bail à ferme (art. 1345 C. jud.)

165. Les exceptions de nullité sont également péremptoires et visent à l'anéantissement

de l'instance en raison d'une irrégularité de forme affectant un acte de procédure (articles

860 à 867 du Code judiciaire).

La nullité prive l'acte irrégulier de tout effet. Aussi, le Code judiciaire l'a-t-il envisagée

avec parcimonie.

Sous-section II - La théorie des nullités

A.- Les cas de nullité

166. Les cas de nullité reposent sur deux règles fondamentales, qui sont déduites des

articles 860 et 861 :

- pas de nullité sans texte;

- pas de nullité sans grief.

1° Pas de nullité sans texte (article 860, alinéa 1er)

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167. Il n'appartient pas au juge de créer des cas de nullité non prévus par la loi: il faut

que les termes « à peine de nullité » (ou d'autres termes équivalents) se retrouvent dans

la disposition légale invoquée pour que l'annulation puisse être envisagée.

A titre d'exemple :

- il n'est pas prévu dans l'article 704, §2, du Code judiciaire que la requête déformalisée nécessaire

pour saisir le tribunal du travail doit être signée. Une telle requête, non signée, ne pourra être dé-

clarée nulle57;

- les formes et délai de la notification effectuée par le greffier lors du dépôt d’une requête d’appel

(article 1056, 2° du Code judiciaire) ne sont pas prescrits à peine de nullité58;

- selon l'article 1027, alinéa 3, du Code judiciaire, l'inventaire des pièces joint à la requête unilatérale

est annexé à celle-ci, mais cette formalité n'est pas prévue à peine de nullité.

Le principe « pas de nullité sans texte » ne souffre aucune exception59.

2° Pas de nullité sans grief (article 861)

168. Le juge ne peut déclarer nul un acte de procédure que si l'omission ou l'irrégularité

dénoncée nuit aux intérêts de la partie qui invoque l'exception.

Il est donc interdit de prononcer la nullité d'un acte de procédure si le préjudice encouru

par la partie qui s'en prévaut n'est pas réel et démontré par celle-ci : il faut que

l'irrégularité ait porté atteinte à l'exercice de son droit de défense.

Le juge apprécie souverainement l'existence d'un lien de causalité entre une irrégularité

et le préjudice allégué par la partie qui demande la nullité. Toutefois, la Cour de

cassation a récemment précisé que le grief doit être directement subi par la partie

57 C.T. Mons, 5 avril 1996, J.T.T., 1997,p. 66.

58 Cass., 27 novembre 1997, Pas., I, n° 512.

59 Pour d'autres exemples, voy. A. FETTWEIS, Manuel, n° 123.

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concernée dans le cadre de la procédure entachée de nullité60.

Ce principe connaît certaines exceptions.

3° Exceptions au principe "pas de nullité sans grief" (article 862)

a) Généralités

169. L'importance particulière de quelques formalités et le fait que la nature même de

certaines exigences de la procédure exclut la justification du préjudice ont conduit le

législateur à énumérer à l'article 862 du Code judiciaire six catégories d'irrégularités qui

sont présumées, de manière irréfragable, avoir causé un grief.

Dans ces cas, le juge ne jouit d'aucun pouvoir d'appréciation: il doit annuler l'acte litigieux

dès que le vice de forme est démontré.

L'article 862 déroge seulement à l'article 861 du Code judiciaire, et non à l'article 860 : il

faut toujours que la nullité soit inscrite dans un texte pour être valablement invoquée61.

C'est de la démonstration du grief seulement dont le demandeur en nullité est dispensé.

Les nullités en question doivent être soulevées et prononcées d'office par le juge.

b) Examen des irrégularités de l'article 862

60 Cass., 8 septembre 2008, R.A.B.G., 2009, p. 360, note R. Verbeke.

61 Cass., 26 mai 1976, Pas., I, 1035.

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1° Méconnaissance des délais prévus à peine de déchéance62 ou de nullité;

2° Omission de la signature de l'acte pour autant qu'il s'agisse d'un acte dont la

signature est prévue à peine de nullité (par exemple, une citation - articles 43 et

702 du Code judiciaire);

62 Cette formulation est malheureuse dès lors qu’il existe une différence fondamentale entre les

nullités qui frappent les actes et les déchéances qui portent atteinte au droit lui-même.

3° Omission de l'indication de la date de l'acte lorsque celle-ci est nécessaire à

l'appréciation de ses effets (par exemple l'omission de la date d'un exploit

introduisant un appel ou une opposition);

4° Indication du juge qui doit connaître de la cause : elle suppose que la juridiction saisie ne

soit pas mentionnée dans l'acte introductif d'instance.

5° Le serment imposé aux témoins (articles 934 et 961, 2°, du Code judiciaire) et aux

experts (article 979 du Code judiciaire);

6° La mention de la signification des exploits et des actes d'exécution à personne ou

selon un autre mode fixé par la loi : cette disposition complète l'article 43, 4°, du Code

judiciaire, dans la mesure où ce texte impose, à peine de nullité, de préciser le mode de signification

d'un exploit.

B.- Conséquences de la nullité

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170. La nullité fait rétroactivement disparaître l'acte irrégulier: il est privé de tout effet,

ainsi que ceux qui en sont la suite. Seuls subsistent les actes indépendants; par

exemple, une expertise correctement ordonnée à l'occasion d'une procédure dont la

nullité sera prononcée n’est pas nulle63.

En principe, la disparition d'un acte de procédure irrégulier n'affecte pas le fond du droit: l'intéressé peut

réitérer cet acte dans les formes requises mais il court le risque qu'entre-temps la prescription de son droit, au

fond, soit intervenue.

De même, si l'acte envisagé devait être accompli dans un délai précis et que ce dernier est écoulé, la

déchéance sera acquise. Par exemple, si un acte d'appel est déclaré nul, que le délai d'un mois prévu par

l'article 1050 du Code judiciaire est écoulé, il y a forclusion du droit d'interjeter appel.

C.- Les couvertures des nullités

171. La plupart des nullités peuvent être couvertes à un certain stade de la procédure.

Cela signifie que, quoiqu'étant prévue par un texte et ayant, le cas échéant, causé un

grief, le juge ne pourra pas prononcer la nullité de l'acte irrégulier.

1° les nullités « relatives » (celles pour lesquelles un grief doit être démontré) sont

couvertes si elles ne sont pas invoquées dans les conditions imposées par l'article

864, alinéa 1er, du Code judiciaire : elles doivent être proposées simultanément et

soulevées avant tout autre moyen “in limine litis”. Elles ne peuvent être prononcées

d'office par le juge.

A juste titre, le Code interdit au défendeur d'observer la tournure prise par le procès avant de

soulever l'incident et de tenter d'obtenir l'anéantissement de l'instance parce qu'il n'y aurait pour lui

aucune autre échappatoire.

63 Cass., 4 juin 1981, Pas., I, 1147, note.

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2° les nullités « absolues », celles concernant une irrégularité visée à l'article 862,

sont couvertes "lorsqu'un jugement ou arrêt contradictoire, autre que celui

prescrivant une mesure d'ordre intérieur, a été rendu sans qu'elles aient été

proposées par la partie ou prononcé d'office par le juge" (article 864, alinéa 2).

La loi déduit dans ce cas, de l'inertie des parties et de celle du juge, que la nullité, bien que grave, n'a

pas eu d'incidence réelle sur le débat.

D.- La couverture de l'article 867

172. L'article 867 du Code dispose que « l'omission ou l'irrégularité de la forme d'un

acte, en ce compris le non respect des délais visés par la présente section, ou de la

mention d'une formalité ne peut entraîner la nullité, s'il est établi par les pièces de la

procédure que l'acte a réalisé le but que la loi lui assigne ou que la formalité non

mentionnée a, en réalité, été remplie ».

173. Ce texte distingue tout d’abord au niveau de l'acte judiciaire entre "le negotium" et "l'instrumentum" :

l'irrégularité de l'instrument n'affecte pas nécessairement la validité de l'acte.

Par voie de conséquence, les omissions ou les irrégularités affectant l'écrit rédigé pour attester de la

réalisation d'un acte judiciaire ne peuvent être sanctionnées de nullité si la production d'une autre pièce de la

même procédure établit que l'acte incriminé a, en réalité, été régulièrement accompli ou si son irrégularité

peut être réparée par d’autres mentions de l’acte incriminé ou d’une autre pièce de la procédure, ou encore, si

le but que la loi assigne au respect de la formalité a en réalité été atteint.

Le cas classique est celui de la divergence entre la date portée sur l'original d'un exploit et sa copie ou encore

l'omission sur la copie de la signature ou de l’identité de l'huissier instrumentant alors que l'original la

contient64.

E.- La couverture spéciale de l’article 863 du Code judiciaire

64 Voy. par exemple, Cass., 22 novembre 1995, J.L.M.B., 1996, p. 294.

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174. La loi du 20 octobre 2000 introduisant l’utilisation de moyens de télécommunication et de la signature

électronique dans la procédure judiciaire a rétabli l’article 863 du Code judiciaire - abrogé par la loi du 3 août

1992 - dans la rédaction suivante :

« Dans tous les cas où la signature est nécessaire pour qu’un acte de procédure soit valable, l’absence de

signature peut être régularisée à l’audience ou dans un délai fixé par le juge ».

Cette disposition légale entrera en vigueur à la date fixée par le Roi et, au plus tard, le 1er janvier 2011.

F.- Remarque

175. En vertu de l'article 866 du Code judiciaire, les procédures et les actes nuls ou frustratoires par le fait

d'un officier ministériel sont à charge de cet officier. Celui-ci peut en outre être condamné à des dommages et

intérêts.

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TITRE III - LES PREUVES

CHAPITRE I - DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES

A.- Introduction

176. La preuve est la démonstration, dans les formes admises par la loi, de la vérité

d'un fait ou d'un acte juridique, qui est affirmé par l'une des parties et nié par l'autre.

L'étude des modes de preuves admis et de la force de chacun d'eux relève du droit des obligations (articles

1317 et s. du Code judiciaire), du droit commercial (article 25 du Code de commerce), du droit fiscal, ...

L’article 876 du Code judiciaire prévoit ainsi que le tribunal juge le différend dont il est saisi selon les règles de

preuve applicables à la nature du litige.

En revanche, les questions relatives à la charge de la preuve et à l'administration de la preuve ou à la

réception des modes de preuve en justice relèvent du droit judiciaire privé.

B.- Règles gouvernant la charge de la preuve et la réception des preuves en justice

177. Diverses règles de droit judiciaire privé président à la charge et à l'administration

de la preuve.

178. Le droit judiciaire de la preuve ne déroge pas au droit civil en ce qui concerne la

charge de la preuve. Chacune des parties a la charge de prouver les faits qu'elle allègue

(article 870 du Code judiciaire et article 1315 du Code civil). Toutefois, le Code judiciaire prévoit

que les parties doivent collaborer loyalement au déroulement du procès et par conséquent à l'administration

de la preuve, en apportant aux débats les éléments de preuve qui seraient en leur possession, le tout sous le

contrôle du juge. Ce dernier peut notamment ordonner à toute partie de produire des éléments de preuve

dont elle dispose (article 871 du Code judiciaire).

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179. Le juge ne peut statuer qu'en se fondant sur ce qui est légalement prouvé. Il ne

peut former sa conviction d'après la connaissance personnelle qu'il pourrait avoir des

faits65, ni en tenant compte des éléments qui n'ont pas été régulièrement établis en cours

d'audience66, ce qui n’empêche pas le magistrat de faire état, à l’appui de sa décision,

d’un fait ou d’une règle d’expérience notoire67.

180. Dans le domaine de l'instruction de la cause, il est largement dérogé au principe

dispositif. Le magistrat y dispose de pouvoirs étendus. Il peut ainsi ordonner d'office à

toute partie litigante ou à un tiers de produire les éléments de preuve dont elle dispose

(articles 871 et 877 et s. du Code judiciaire). Il peut ordonner d’office ou à la demande

des parties, la comparution personnelle des parties, une descente sur les lieux, l’enquête

ou une expertise, mais c'est toujours, du moins en règle, aux parties qu'il appartient de

faire le nécessaire pour que ces mesures ordonnées d'office par le juge soient mises en

œuvre (voy. toutefois en matière d’expertise, infra). A cet égard, l’article 875 du Code judiciaire

prévoit que lorsqu’une mesure d’instruction ordonnée par le juge n’a pas été exécutée dans les délais fixés, la

partie la plus diligente peut, en toutes matières, ramener la cause à l’audience pour y faire statuer comme de

droit.

65 Cass., 6 janvier 1982, Pas., I, 566.

66 Cass., 13 novembre 1989, Pas., 1990, I, 313.

67 Cass., 25 octobre 1984, Pas., 1985, I, 277.

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181. Dans certaines matières déterminées, le juge peut enfin ordonner au ministère

public de recueillir des renseignements sur les objets que limitativement il précise. Les

actes de cette information sont déposés au greffe, dans le dossier de la procédure. Les

parties en sont averties par le greffier (article 872 du Code judiciaire).

C.- Modes de preuve prévus par le Code judiciaire

182. Les modes de preuves - ou mesures d’instruction - prévus par le Code judiciaire

afin d’assurer l’instruction de l’affaire sont les suivants.

- La production des documents (articles 877 à 882 du Code judiciaire).

- La vérification d'écriture (articles 883 à 894 du Code judiciaire).

- Le faux civil (articles 895 à 914 du Code judiciaire).

- L'enquête (articles 915 à 961 du Code judiciaire).

- L'expertise (articles 962 à 991 du Code judiciaire).

- L'interrogatoire des parties (articles 992 à 1004 du Code judiciaire).

- Le serment (articles 1005 à 1006 du Code judiciaire).

- La descente sur les lieux (articles 1007 à 1016 du Code judiciaire).

- Le constat d’adultère par huissier de justice (article 1016bis du Code judiciaire).

183. L’article 875bis du Code judiciaire prévoit que le juge doit limiter le choix de la

mesure d’instruction à ce qui est suffisant pour la solution du litige, en privilégiant la

mesure la plus simple, la plus rapide et la mois onéreuse.

D.- Caractéristiques communes aux procédures de réception des preuves

184. Le jugement qui ordonne une mesure préalable destinée à instruire la demande

est un jugement avant dire droit au sens de l’article 19, alinéa 2, du Code judiciaire, non

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revêtu de l’autorité de chose jugée et qui peut être modifié si des circonstances nouvelles

le justifient.

Une telle mesure peut donc être demandée à l’audience d’introduction (art. 735, §2, C.

jud.) ou encore à tout stade de la procédure (art. 19, alinéa 2, C. jud.).

185. La décision ordonnant une mesure d’instruction est, de plein droit, exécutoire par

provision (article 1496 du Code judiciaire).

186. Le régime des recours n’est pas uniforme même si le plus souvent des dérogations

sont apportées au droit commun en restreignant le droit d’interjeter appel et/ou de former

opposition contre une décision ordonnant ou autorisant une mesure d’instruction.

187. La procédure d’appel comporte des règles propres aux jugements avant dire droit

ordonnant ou autorisant une mesure d’instruction (articles 1055, 1066, alinéa 2, 2°, 1068,

alinéa 2, et 1072 du Code judiciaire).

188. Tout jugement d’instruction réserve les dépens (article 1017, alinéa 4, du Code

judiciaire).

CHAPITRE II - LES MESURES D’INSTRUCTION

SECTION I - LA PRODUCTION DE DOCUMENTS

189. Lorsqu'il existe des présomptions graves, précises et concordantes de la détention

par une partie ou un tiers d'un document contenant la preuve d'un fait pertinent, le juge

peut ordonner, soit à la demande d'une partie ou même d'office, que ce document ou une

copie de celui-ci, certifiée conforme, soit déposé au dossier de la procédure, même par la

partie à laquelle ce document pourrait nuire (article 877 du Code judiciaire)68.

68 Il s’agit d’une faculté et non d’une obligation pour le juge (Cass., 2 juin 1977, Pas., I, 1012; Cass.,

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Si un document est détenu par un tiers, celui-ci est invité préalablement par le juge à le verser en original ou

en copie au dossier de la procédure selon les modalités et les délais qu’il indique. Le tiers peut faire valoir ses

observations par écrit ou en chambre du conseil (le tiers peut notamment se retrancher derrière le secret

professionnel pour refuser de produire la pièce). Les parties son autorisées à prendre connaissance des

observations du tiers et à y répondre (article 878 du Code judiciaire)

190. Le jugement ordonnant la production d'un document est notifié aux parties ou au tiers sous pli

judiciaire (article 880, alinéa 1er, du Code judiciaire). Il n'est susceptible ni d'opposition ni d'appel (article 880,

alinéa 2, du Code judiciaire)69.

Si l'une des parties le demande, l'injonction du magistrat peut être assortie d'une astreinte70.

Le fait de ne pas produire, sans motif légitime, le document requis ou sa copie malgré la décision du juge est

sanctionnée par des dommages et intérêts, octroyés à la partie intéressée (article 882 du Code judiciaire). La

relation causale est établie par le seul fait de la non production71. Le montant du préjudice sera fonction de

l'importance du document.

SECTION II - LA VERIFICATION D’ECRITURE

191. La vérification d'écriture est l'examen fait en justice d'un acte sous seing privé, à

l'effet de constater s'il a été réellement écrit et signé par la personne à laquelle il est

attribué (article 1324 du Code civil).

La demande peut être principale ou incidente (article 883, alinéa 1er, du Code judiciaire). Dans ce dernier

cas, elle est toujours de la compétence du juge saisi de la demande principale (article 883, alinéa 2, du Code

14 décembre 1995, Pas., I, 1165).

69 En revanche, le tiers auquel l’ordre est donné de produire un document peut se pourvoir en cassation contre cette décision (Cass., 30 octobre 1978, Pas., 1979, I, 248). Il peut également former tierce opposition (Civ. Bruxelles (sais.), 26 octobre 2000, J.T., 2001, p. 52; Liège, 6 mars 2000, J.L.M.B., 2000, p. 1728).

70 Dans ce cas, la décision est susceptible d’appel car elle cause un grief immédiat à la partie condamnée sous peine d’astreinte (Cass., 12 novembre 1999, inédit; Liège, 8 janvier 1993, J.L.M.B., 1993, p. 1002; Mons, 14 octobre 1997, J.L.M.B., 1998, p. 711).

71 T.T. Bruxelles, 2 février 1990, J.T.T., 1990, p. 276.

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judiciaire).

Les articles 884 à 894 du Code judiciaire au texte desquels il est renvoyé organisent cette procédure qui

comporte le recours à des pièces de comparaison et, le cas échéant, la désignation d'un expert.

C'est en vue d'une vérification d'écriture que le droit des obligations ou des contrats requièrent dans certains

cas la mention du "bon pour". La vérification s'en trouvera facilitée.

SECTION III - LE FAUX CIVIL

192. Le premier objet de la procédure de faux civil est de démontrer la fausseté alléguée d'un acte

authentique. En dehors d'une instruction pénale, elle est la seule voie pour obtenir en justice la constatation

d'un faux, matériel ou intellectuel72, affectant un écrit authentique.

Cette procédure peut également être mise en œuvre pour contester la sincérité d'un acte sous seing privé.

Lorsque l'"auteur" de l'acte prend une attitude défensive et dénie sa signature, il y aura vérification d'écriture.

Ce même "auteur" doit cependant s'inscrire en faux si, sans attendre que le document lui soit opposé, il prend

l'initiative d'en faire établir la fausseté.

72 Cass., 15 octobre 1981, Pas., 1982, I, 238.

Les deux procédures, la vérification d'écriture d'une part le faux civil d'autre part, jouent donc en ce qui

concerne les actes sous seing privé, des rôles différents mais complémentaires.

193. L'article 895, alinéa 1er, du Code judiciaire dispose que le faux civil peut être introduit soit comme

demande principale et préventive, soit à titre incident. Dans ce dernier cas, il est formé par conclusions con-

formément à l'article 809 du Code judiciaire et il est soumis au juge saisi de la demande principale (article

895, alinéa 2, du Code judiciaire).

La procédure d'inscription en faux est réglée par les articles 896 à 906 du Code judiciaire au texte desquels il

est renvoyé. Les articles 907 à 914 du Code judiciaire règlent par ailleurs de manière spécifique la procédure

de demande en faux incident civil devant la Cour de cassation.

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81

194. En vertu de l’article 764, 5°, du Code judiciaire, les demandes d’inscription en faux civil doivent, à

peine de nullité, être communiquées au ministère public.

SECTION IV - L’ENQUETE

Sous-section I - Généralités

195. L'enquête est la procédure qui permet de recueillir les témoignages à l'aide

desquels sera établie la vérité des faits allégués par une partie et contestés par l'autre.

Elle ne peut être utilisée que lorsque la preuve par témoins est admise au regard des

règles de preuve en droit civil (article 915 du Code judiciaire).

Elle peut être ordonnée d'office par le juge afin d’apporter la preuve des faits qui lui

apparaissent concluants. Dans ce cas, le juge peut indiquer les noms des témoins qui

seront entendus aux lieu, jour et heure fixés par lui (article 916 du Code judiciaire).

Elle peut également être sollicitée par une partie. Dans ce dernier cas, celle-ci doit offrir

de rapporter par l'audition de un ou plusieurs témoins la preuve de un ou plusieurs faits

précis et pertinents et susceptibles de preuve contraire73, le juge autorisant ou non

l'enquête (article 915 du Code judiciaire)74.

Le juge des référés dispose également de la possibilité d'ordonner une enquête « ad

futurum » (articles 18, alinéa 2, et 584, alinéa 4, 4°, du Code judiciaire).

73 Cass., 3 décembre 1976, Pas., 1977, I, 8.

74 Lorsque la loi n’interdit pas la preuve par témoins, le juge décide souverainement en fait si la preuve par témoins peut être apportée utilement, pour autant qu’il ne méconnaisse pas le droit de principe d’apporter cette preuve (Cass., 18 mars 1991, Pas., I, 663; Cass., 17 février 1995, Pas., I, 190; Cass.,4 mars 1999, Pas., I, 232). Par ailleurs, lorsqu’une partie a été autorisée par une décision précédente à apporter une preuve par témoins, ne viole pas les droits de la défense de cette partie le jugement qui, en raison d’une inaction fautive de celle-ci, la déclare déchue du droit de tenir les enquêtes (Cass., 24 janvier 1980, Pas., I, 581; Cass., 1er mars 1999, Pas., I, 196).

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196. Chaque fois qu'une enquête est autorisée ou ordonnée - qualifiée d'enquête directe - l'enquête

contraire, tenue par la partie adverse, est admise de plein droit (article 921 du Code judiciaire). Cette dernière

a pour objet de réfuter les allégations de son adversaire en faisant entendre des témoins dont les déclarations

sont susceptibles d’énerver ou de nuancer la force probante des dépositions recueillies lors de l’enquête

directe.

Sous-section II - Procédure

A.- Le jugement autorisant ou ordonnant l’enquête

197. Le jugement autorisant ou ordonnant l'enquête indique les faits dont la preuve est admise et « les lieu,

jour et heure de l'audience en chambre du conseil ou l'enquête sera tenue » (article 917 du Code judiciaire).

Ce jugement est notifié d'office aux parties sous pli judiciaire (article 919, alinéa 2, du Code judiciaire). Il est

susceptible d’appel mais pas d’opposition (article 919, alinéa 1er, du Code judiciaire). La notification du

jugement qui a autorisé ou a ordonné l’enquête, faite conformément à l’article 919, alinéa 2, du Code

judiciaire ne fait pas courir le délai d'appel contre ce jugement75.

Comme toutes les décisions comportant une mesure d'instruction, le jugement autorisant l'enquête ou

l'ordonnant est exécutoire par provision nonobstant tout recours (article 1496 du Code judiciaire).

198. L'enquête est tenue par les juges qui l'ont autorisée ou ordonnée ou par le juge qui est désigné dans

le jugement (article 918 du Code judiciaire)76.

La partie qui fait procéder à l'enquête doit adresser la liste de ses témoins au greffe, quinze jours au moins

avant l'audience au cours de laquelle ils seront entendus. Cette liste est déposée au greffe en autant

d’exemplaires qu’il y a de parties en cause et notifiée sous pli judiciaire par le greffier auxautres parties que le

requérant (article 922 du Code judiciaire). Lorsque l'enquête est ordonnée d'office, le jugement peut indiquer

le nom des témoins qui seront entendus (article 916 du Code judiciaire).

Le délai de 15 jours n'est pas prescrit à peine de déchéance77. Toutefois, selon l'article 875 du Code

75 Cass., 17 mars 1997, Pas., I, 364.

76 Il appartient au seul juge désigné pour tenir les enquêtes de statuer sur tous les incidents qui peuvent survenir au cours de celles-ci; ce pouvoir ne s’éteint qu’à la clôture de l’enquête, prononcée par lui (Cass., 6 octobre 1986, Pas., 1987, I, 139).

77 Voy. dans ce sens, Anvers, 1er mars 1994, Pas., 1994, II, 66. Contra, J. ENGLEBERT, obs. sous T.T.

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judiciaire, le fait de ne pas tenir l'enquête dans le délai imposé ou dans un délai raisonnable autorise la partie

adverse à faire revenir l'affaire à l'audience et à requérir jugement sur le fond. On rappelle que cette règle

s'applique à toute mesure d'instruction qui n'est pas diligentée dans un délai raisonnable.

B.- La comparution des témoins

199. Les témoins sont convoqués par le greffier, huit jours au moins avant leur audition. Il est joint à la

convocation une copie certifiée conforme du dispositif du jugement, limitée à l'énoncé des faits admis et à

l'indication des lieu, jour et heure de l'audition (article 923 du Code judiciaire).

200. Si un témoin ne comparaît pas, le juge peut, à la demande d’une des parties, ordonner qu’il soit cité

par exploit d’huissier (article 925 du Code judiciaire). Le cas échéant, le témoin cité qui persiste à faire défaut,

est condamné à une amende civile, sans préjudice des dommages et intérêts au profit de la partie78. La

question de savoir s’il est possible d’imposer une audition de témoins sous astreinte est controversée79.

Toutefois, le témoin condamné qui comparait ultérieurement peut, après sa déposition, être déchargé en tout

ou en partie, par le juge de la condamnation prononcée. Il est déchargé de celle-ci s’il justifie qu’il n’a pu se

présenter au jour indiqué (article 927 du Code judiciaire). L’amende prévue à l’article 926 du Code judiciaire

est applicable au témoin qui sans motif légitime refuse de prêter serment ou de déposer (article 928 du Code

Nivelles, 10 janvier 1992, J.L.M.B., 1994, p. 1335.

78 Lorsque, en matière civile, un témoin cité à nouveau persiste à faire défaut, le juge est tenu de prononcer à sa charge une nouvelle amende (Cass., 26 avril 1974, Pas., I, 882).

79 En faveur de cette possibilité, voy. J. VAN COMPERNOLLE, L’astreinte, Bruxelles, Larcier, 1992, p. 42, n° 44 et les références citées.

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84

judiciaire).

Enfin, les frais résultant de la défaillance du témoin, de son refus sans motif légitime de prêter serment ou de

déposer demeurent à sa charge et sont taxés par le juge (article 930 du Code judiciaire).

201. Le mineur âgé de moins de 15 ans ne peut être entendu sous serment mais ses déclarations

peuvent être recueillies à titre de simple renseignement (article 931, alinéa 1er, du Code judiciaire)80. L'article

931, alinéa 2, du Code judiciaire dispose que les descendants ne peuvent être entendus dans les causes où

leurs ascendants ont des intérêts opposés.

Néanmoins, depuis le 1er octobre 1994, dans toute procédure le concernant, le mineur capable de

discernement peut, à sa demande ou sur décision du juge, sans préjudice des dispositions légales prévoyant

son intervention volontaire et son consentement, être entendu, hors la présence des parties, par le juge ou

par la personne désignée par ce dernier à cet effet, aux frais partagés des parties s’il y a lieu. La décision du

juge n’est pas susceptible d’appel. Lorsque le mineur en fait la demande, l’audition ne peut être écartée que

par une décision spécialement motivée fondée sur le manque de discernement du mineur. Cette décision

n’est pas susceptible d’appel. Lorsque l’audition est décidée par le juge, le mineur peut refuser d’être

entendu. L’audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure. L’audition a lieu en tout

endroit jugé approprié par le juge. Il en est établi un procès-verbal qui est joint au dossier de la procédure,

sans que copie en soit délivrée aux parties (article 931, alinéas 3 à 7, du Code judiciaire)81.

C.- L'audition des témoins

202. L'audition a lieu en chambre du conseil, à huis clos. Les témoins sont entendus séparément, tant en

présence qu'en l'absence des parties (articles 933 et 1264 du Code judiciaire).

A peine de nullité absolue, le témoin, avant son audition, doit prêter serment (articles 934 et 862, §1er, 5°, du

Code judiciaire).

80 Il en va de même des personnes condamnées à des peines de réclusion ou de détention à

perpétuité ou de réclusion pour un terme de dix à quinze ans ou un terme supérieur qui ne peuvent déposer en justice que pour y donner de simples renseignements (article 31, 4°, du Code pénal).

81 Sur cette disposition, voy. not. J.P. MASSON, La loi du 30 juin 1994 modifiant l’article 931 du Code judiciaire et les dispositions relatives aux procédures du divorce, Bruxelles, Bruylant, 1994, pp. 49-71.

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85

Le témoin est entendu aussi bien sur les faits qu'il connaît directement que sur ceux qu'il connaît par relation.

La portée d'un témoignage indirect est abandonnée à l'appréciation du juge du fond82.

Les témoins déposent sans qu'il leur soit permis de lire aucun projet écrit mais ils peuvent, le cas échéant,

être autorisés par le juge, après que ce dernier ait entendu les parties en leurs observations, à consulter les

pièces utiles à leur déposition (article 935 du Code judiciaire).

La partie doit s'adresser au juge pour interpeller un témoin (article 936 du Code judiciaire), ce qui retire

beaucoup d'impact à l'interpellation.

Soit d'office, soit à la demande de l'une des parties, le juge interroge le témoin sur son degré de parenté ou

d'alliance avec les parties ainsi que sur les faits qui lui sont personnels et qui sont de nature à influencer sa

déposition (article 937 du Code judiciaire).

Le juge peut, même d'office, poser au témoin toute question de nature à préciser ou compléter la déposition

(article 938 du Code judiciaire). Il peut aussi prendre l'initiative de confronter les témoins ou de les réentendre

(article 942 du Code judiciaire).

203. Seuls les témoins cités par la partie sont normalement entendus, mais une enquête complémentaire

peut, à la demande d’une partie lors de l’enquête, être autorisée par le juge, s'il résulte des dépositions déjà

entendues que l'audition de nouveaux témoins est utile à la manifestation de la vérité (article 941, alinéa 1er,

du Code judiciaire)83. Dans ce cas, l’ordonnance est notifiée aux parties par le greffier sous pli judiciaire et les

parties sont convoquées conformément à l’article 923 du Code judiciaire.

204. Les témoignages, ainsi que les formalités qui les accompagnent, et la prestation de serment, sont

consignés par écrit (article 939, alinéa 1er, du Code judiciaire)84. La déposition, suivie des rectifications ou

additions éventuelles, est signée par le témoin, le juge et le greffier (article 939, alinéa 3, du Code judiciaire).

205. En vertu de l’article 944 du Code judiciaire, les ordonnances rendues en cours d’enquête ne sont pas

susceptibles d’opposition; elles ne sont susceptibles d’appel avant le jugement définitif que si elles prononcent

82 Cass., 25 février 1980, Pas., I, 768.

83 Le pourvoi en cassation formé avant la décision définitive contre une décision, fût-elle irrégulière, par laquelle le juge fait droit, au cours de l’enquête, à la demande d’une partie de produire un témoin, est irrecevable (Cass., 13 janvier 1997, Pas., I, 61).

84 Cette disposition n’est ni d’ordre public, ni impérative (Cass., 27 avril 1973, Pas., I, 802, note).

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des condamnations.

D.- La clôture des enquêtes et le jugement

206. Le juge prononce la clôture de l'enquête lorsque les témoins ont été entendus et que les formalités

légales ont été accomplies (article 945, alinéa 1er, du Code judiciaire).

Le juge entend les conclusions des parties séance tenante ou fixe les lieu, jour et heure de l'audience à

laquelle elles seront entendues. Dans ce cas, les parties qui n'ont pas comparu sont convoquées par le greffe

sous pli judiciaire (article 945, alinéas 2 et 3, du Code judiciaire).

Le juge qui a tenu l'enquête siège lorsqu’il est statué sur le résultat des dépositions, à moins qu’il n’en soit

empêché85. Si plusieurs juges ont tenu l’enquête, la règle n’est applicable qu’au dernier d’entre eux (article

946 du Code judiciaire).

Lorsqu'une enquête est nulle en tout ou en partie, le juge peut jusqu'à la clôture des débats ordonner, même

d’office, qu'elle soit rouverte à fin de régularisation. Ce jugement n’est pas susceptible d’opposition et est

notifié aux parties par le greffier, sous pli judiciaire (article 947 du Code judiciaire)

E.- Le procès-verbal de l’enquête et le délai pour demander l’enquête contraire

207. Un procès-verbal est établi pour chaque enquête, conformément aux dispositions des articles 949 et

950 du Code judiciaire (article 948 du Code judiciaire).

Une copie certifiée conforme du procès-verbal de l'enquête est notifiée aux parties par pli judiciaire (article

951, alinéa 1er, du Code judiciaire). Une copie non signée est notifiée, sous simple lettre, aux avocats des

parties (article 951, alinéa 2, du Code judiciaire).

208. En vertu de l’article 921 du Code judiciaire, la requête sollicitant la tenue d’une enquête contraire doit

être déposée au greffe 30 jours au plus tard à partir de l’envoi du procès-verbal de l’enquête directe. Ce délai

n'est pas prescrit à peine de déchéance (absolue)86. Par un arrêt du 8 février 1979, la Cour de cassation a

toutefois précisé que, sauf accord de la partie qui a fait procéder à l’enquête directe, ne peut plus être

accueillie la demande d'enquête contraire introduite après le délai prescrit par l’article 921, alinéa 3, du Code

85 La constatation de l’empêchement ne doit cependant pas figurer dans le jugement (Cass., 13

septembre 1974, Pas., 1975, I, 45).

86 Cass., 5 mai 1988, Pas., I, 1080.

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judiciaire par un plaideur qui n’a pas obtenu une prorogation de ce délai conformément à l’article 51 du Code

judiciaire87.

87 Cass., 8 février 1979, Pas., I, 674.

Sous-section III - Les frais de l’enquête

209. En vertu de l’article 953, alinéa 1er, du Code judiciaire, la partie qui demande l’audition d’un témoin

est tenue de consigner entre les mains du greffier avant cette audition une provision représentant le montant

de la taxe et le remboursement des frais. Une provision complémentaire peut être exigée en cours d’enquête

s’il y a lieu.

Toutefois, la consignation de la provision est à charge de la partie qui, suivant les lois particulières ou l’article

1017, alinéa 2, du Code judiciaire est toujours condamnée au dépens (article 953, alinéa 3, du Code

judiciaire).

Sous-section IV - La validité de l'enquête et la force probante des dépositions

A.- Validité de l’enquête

210. Les seules nullités prévues en matière d'enquête sont énumérées en termes limitatifs par l'article 961

du Code judiciaire. Cette disposition est à combiner, le cas échéant, avec l'article 862 du Code judiciaire.

La nullité d’un acte de procédure ne s’étend pas à l’enquête, à moins que celle-ci soit elle-même frappée de

nullité. La nullité de l'enquête n'entraîne pas la nullité des dépositions, si celles-ci ne sont pas atteintes d’un

vice qui leur est propre (article 956 du Code judiciaire).

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La nullité de la procédure, même pour incompétence du juge n'entraîne pas la nullité de l'enquête tenue

contradictoirement au cours de cette procédure88. La nullité des dépositions n’entraîne pas pour le surplus la

nullité de l’enquête (article 957 du Code judiciaire).

Le juge peut, en cours d'enquête, remédier, même d'office à toute nullité de forme ou de fond dont serait

entaché un acte de la procédure d'enquête, notamment recommencer ou compléter toute audition irrégulière

(article 958 du Code judiciaire).

B.- Force probante de l’enquête

211. L'article 959 du Code judiciaire dispose que la déposition peut être admise en tant que preuve

testimoniale non seulement dans l'instance en vue de laquelle elle a été valablement recueillie, mais aussi

dans toute autre instance entre les mêmes parties et mettant en cause les mêmes faits.

Pour autant qu’elles ne soient pas contraires à l’article 961 du Code judiciaire, il est aussi permis d'invoquer

comme preuve testimoniale les dépositions recueillies contradictoirement, entre les mêmes parties, devant

une juridiction belge (même en dehors d’un procès civil, par exemple devant une juridiction répressive),

lorsque cette déposition offre une valeur probante équivalente en ce qui concerne la détermination des faits

contestés (article 960 du Code judiciaire).

SECTION V - L'EXPERTISE

Sous-section I - Généralités

212. Il est fréquent que les magistrats doivent recourir à des spécialistes dans le cours

d'un procès : architecte, ingénieur, réviseur d'entreprise, comptable, médecin, ...

L'expertise ne peut porter que sur des constatations ou des questions d’ordre technique.

Le juge ne peut déléguer à un tiers de sa mission de dire le droit ou le fait contesté89.

88 Cass., 4 juin 1981, Pas., I, 1147, note.

89 Cass., 14 septembre 1992, Pas., I, 1021.

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89

Sous-section II - Désignation de l’expert

A.- Principe

212. L'expertise est ordonnée, soit d'office, soit à la demande d'une des parties, par le juge en vue de la

solution d’un litige porté devant lui90. L'expertise peut également être demandée à titre principal, alors

qu'aucune instance n'est pendante, dès lors qu'il y a menace objective et actuelle d'un litige (article 962 du

Code judiciaire). Il s'agit de l'expertise « ad futurum » (article 18, alinéa 2, du Code judiciaire).

L’article 875bis du Code judiciaire consacre le caractère subsidiaire de l’expertise, c’est-

à-dire de l’utilité et de l’efficacité de celle-ci et ce, en tenant spécialement compte du

pouvoir qu’a le juge d’ordonner, le cas échéant, une mesure d’instruction plus rapide et

moins coûteuse91.

Les articles 985 à 986 prévoient que le juge peut ordonner une expertise simplifiée ou limitée ou encore

simplement l’entendre à l’audience.

213. Le titre d'expert près les tribunaux n'existe pas légalement. Le juge dispose dès lors de toute liberté en

ce qui concerne le choix de l'expert. Mais il ne doit en désigner en principe qu’un seul à moins qu’il soit

nécessaire d’en désigner plusieurs (article 982 du Code judiciaire).

B.- Compétence

214. L'expertise peut être demandée au juge du fond (article 19, alinéa 2, du Code

judiciaire), par voie de référé en cas d’urgence, et même, en cas d’absolue nécessité, par

requête unilatérale.

90 Sauf disposition légale contraire, l’expertise est une mesure facultative et ne constitue en règle

jamais une obligation pour le juge (Cass., 29 mars 1974, Pas., I, 782).

91 Voy. D. MOUGENOT, op. cit., pp. 224 et s.; G. DE LEVAL, “Questions en matière de preuve”, in Formation permanente des huissiers de justice, Bruxelles, Story-Scientia, 1997, pp. 267 et s.; J.LAENENS, “L’expertise”, in Droit de la preuve, CUP, Volume XIX, octobre 1997, pp. 205 et s.

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90

Le juge de paix dispose également d’une compétence limitée pour désigner, sur requête, un expert (article

594, 1°, du Code judiciaire).

C.- Décision qui ordonne l’expertise

215. La décision qui ordonne l'expertise comporte au moins :

- l'indication des circonstances qui rendent nécessaires l'expertise et la désignation éventuelle de plusieurs

experts;

- l'indication de l'identité de l'expert ou des experts désignés;

- une description précise de la mission de l'expert;

- l'indication de la date de la réunion d'installation, à moins que le juge n'y renonce, avec l'accord des parties.

D.- Recours

216. La décision qui ordonne une expertise est une mesure avant dire droit. La loi ne

formule aucune restriction en ce qui concerne l’exercice des voies de recours contre cette

décision.

Sous-section III- Procédure

A.- Acceptation de sa mission par l’expert

217. Une copie certifiée conforme de la décision qui nomme l'expert lui est notifiée par le greffe, sous pli

judiciaire. Après cette notification, l'expert dispose de huit jours pour :

- refuser la mission, s'il le souhaite, en motivant dûment sa décision;

- si aucune réunion d'installation n'a été prévue : communiquer les lieu, jour et heure du début de ses

travaux.

L'expert en avise les parties par lettre recommandée à la poste et le juge et les conseils par lettre missive.

B.- Réunion d’installation

218. A moins que le juge ait renoncé à tenir une réunion d’installation, avec l’accord des parties, tout

jugement qui ordonne une expertise prévoit la tenue d’une réunion d'installation.

Celle-ci a lieu en chambre du conseil, devant le juge qui a ordonné l'expertise ou qui est chargé du contrôle

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de celle-ci. Les parties se présentent devant le juge. L'expert peut être joint téléphoniquement ou par tout

autre moyen de télécommunication, à moins qu'une des parties ou le juge ne demande sa comparution

personnelle devant ce dernier.

219. La décision prise à l'issue de la réunion d'installation précise :

- l'adaptation éventuelle de la mission;

- les lieu, jour et heure des travaux ultérieurs de l'expert;

- la nécessité pour l'expert de faire appel ou non à des conseillers techniques;

- l'estimation du coût global de l'expertise ou, à tout le moins, le mode de calcul des frais et honoraires de

l'expert et des éventuels conseillers techniques;

- le montant de la provision;

- la partie raisonnable de la provision pouvant être libérée au profit de l'expert;

- le délai dans lequel les parties pourront faire valoir leurs observations à l'égard de l'avis provisoire de

l'expert;

- le délai pour le dépôt du rapport final.

C.- Récusation et remplacement de l’expert

220. Les experts peuvent être récusés pour les mêmes motifs que les juges (article 966 du Code

judiciaire). La procédure de récusation est réglée par les articles 970 et 971 du Code judiciaire auxquels il est

renvoyé.

De même, l’expert peut être remplacé en cours de procédure, à la requête de toute partie ou d’office par le

juge (article 979 du Code judiciaire). Il doit l’être si les parties en font conjointement la demande.

D.- Déroulement de l’expertise

221. Lors de la réunion d’installation ou, à défaut, lors du débat des travaux, les parties remettent aux

experts un dossier inventorié rassemblant tous les documents pertinents (article 972bis du Code judiciaire).

L’expert fixe ensuite l’agenda des travaux ultérieurs auxquels il doit convoquer les parties.

Les parties sont tenues de collaborer à l’expertise (article 972bis du Code judiciaire).

Les experts tentent de concilier les parties (article 977 du Code judiciaire).

L'expert doit accomplir lui-même sa mission et ne peut déléguer les pouvoirs qu'il tient du jugement, bien qu'il

puisse se faire assister de spécialistes.

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92

L'expert ne peut entendre des témoins de son propre chef. S'il le souhaite, il devra le faire savoir aux parties,

qui solliciteront du juge qu'il tienne une enquête à laquelle l'expert sera éventuellement invité à assister.

E.- Caractère contradictoire de l’expertise

222. Le caractère contradictoire de l'expertise est fondamental. Si ce caractère n'est

pas respecté, l'expertise ne pourra pas être annulée aucune disposition ne le pré-

voyant92, mais elle sera écartée pour violation des droits de la défense93.

Les articles 972 et s. du Code judiciaire auxquels il est renvoyé énoncent diverses règles qui assurent le

caractère contradictoire de l'expertise. C’est ainsi notamment qu’en vertu de l’article 972bis, §2, du Code

judiciaire, les parties sont convoquées à toutes les opérations de l’expert à moins qu’elles ne l’aient dispensé

de les en informer.

F.- Contrôle de la mission de l’expert

223. Le juge contrôle les opérations d'expertise, le respect du contradictoire et des

délais. Toutes les contestations relatives à l’expertise sont réglées par le juge au terme

d’une procédure simplifiée et rapide prévue par l’article 973, §2, du Code judiciaire

(mécanisme de saisine permanente).

92 Cass., 8 mai 1978, Pas., I, 1023.

93 Cass., 5 octobre 1987, Pas., 1988, I, 139.

G.- Respect des délais

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93

224. Le juge est notamment chargé de surveiller le respect des délais de l’expertise. Il

est le seul habilité à accorder une prolongation du délai fixé pour le rapport. En cas de

dépassement du délai, il ordonne d’office la convocation des parties et de l’expert (article

974 du Code judiciaire).

Sous-section IV - Le rapport d'expertise

A.- Les constatations et l’avis provisoire

225. A la fin des travaux, l’expert envoie aux parties ses constatations lesquelles contiennent déjà un

premier avis provisoire. Les parties et leurs conseillers techniques peuvent faire valoir leurs observations sur

cet avis provisoire dans le délai fixé par le juge et, à défaut, par l’expert (article 976 du Code judiciaire).

B.- Le rapport final

226. Après avoir reçu les observations des parties ou de leurs conseillers techniques, l’expert rédige le

rapport final.

En outre, le rapport reproduit, à peine de nullité (article 862, 5°, du Code judiciaire), la formule du serment et

est signé par tous les experts (article 978, alinéa 3, du Code judiciaire).

La minute du rapport, les notes des parties et l'état des honoraires et frais sont déposés au greffe (article 978,

§2, du Code judiciaire).

Sous-section V - Les frais de l’expertise

227. La détermination des honoraires et les frais de l'expertise soit par le juge soit à l'amiable est

minutieusement décrite aux articles 987 et suivants du Code judiciaire, au texte desquels il et renvoyé.

Dès le début de l’expertise et tout au long de celle-ci, le juge peut prévoir que des provisions sur les frais et

honoraires de l’expert pourront être consignées sur un compte bloqué et, le cas échéant, libérées au profit de

l’expert avec l’autorisation du juge. C’est le juge qui détermine la partie qui devra procéder à la consignation.

A la fin de l’expertise, l’état de frais et honoraires est taxé soit avec l’accord des parties, soit, à défaut d’accord,

dans le cadre de la procédure prévue à l’article 973, §2, pour le règlement des contestations en cours

d’expertise.

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94

En aucun cas, et sous peine de sanctions pénales, l’expert ne peut recevoir de paiement direct de la part des

parties.

Sous-section VI - Portée de l'avis de l'expert

228. Les juges ne sont point astreints à suivre l’avis des experts si leur conviction s’y

oppose (article 962 du Code judiciaire)94. Ils doivent cependant indiquer les raisons pour

lesquelles ils décident de s’écarter des conclusions de l’expert. Le juge ne peut

également violer la foi due au rapport d’expertise en donnant de celui-ci une

interprétation inconciliable avec ses termes95.

Les parties peuvent critiquer celui-ci pendant l'expertise, au niveau de l’avis provisoire, lors de la réception du

rapport, et même encore dans leurs conclusions ou lors des plaidoiries. Toutefois, les observations qui

concernent l’avis provisoire et qui n’ont pas été formulées dans le délai fixé par le juge ou, à défaut, par

l’expert sont écartées d’office par le juge (article 976 du Code judiciaire).

En vertu des articles 984 et 985 du Code judiciaire, le juge peut ordonner des compléments d’expertise ou

entendre l’expert lorsque le rapport n’est pas satisfaisant. Il peut même ordonner une nouvelle expertise par

d’autres experts.

SECTION VI - L'INTERROGATOIRE DES PARTIES

94 Cass., 4 janvier 1974, Pas., I, 460.

95 Cass., 11 mars 1987, Pas., I, 827.

A.- Décision ordonnant ou autorisant la comparution personnelle des parties

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95

229. Le juge peut, même d'office, ordonner la comparution personnelle des parties ou

de l'une d'elles (article 992 du Code judiciaire). Cette mesure d'instruction, qui permet le

dialogue entre le juge et les parties tend aussi à provoquer des aveux judiciaires.

Suivant la Cour de cassation, cette mesure n’est toutefois assortie d’aucune sanction physique ou pécuniaire,

toute personne pouvant organiser sa défense comme elle l’entend, et, partant, elle ne peut être assortie

d’astreinte96.

La décision ordonnant la comparution personnelle n'est susceptible ni d'opposition ni

d'appel. Elle est notifiée, sous pli judiciaire, aux parties par le greffier (article 996 du

Code judiciaire).

B.- Procédure

230. La comparution personnelle a lieu en chambre du conseil, devant les juges qui l'ont ordonnée ou

devant le juge désigné dans la décision (articles 993 et 995 du Code judiciaire). L'article 994 du Code

judiciaire permet de désigner une personne physique - agent, organe ou représentant légal - qui comparaîtra

pour une personne morale de droit privé ou de droit public.

La partie est entendue, tant en présence qu’en l’absence des autres parties (article 998 du Code judiciaire).

Les avocats des parties peuvent y assister sans intervenir (article 999 du Code judiciaire).

96 Cass., 18 février 1988, Pas., I, 722, concl. de l’avocat général PIRET. Pour une critique justifiée de

cet arrêt, voy. J. VAN COMPERNOLLE, L’astreinte, Bruxelles, Larcier, 1992, p. 41, n° 42.

Les parties ne prêtent pas serment et, pour le reste, sont entendues conformément à la procédure prévue

pour l'audition des témoins (article 1000 du Code judiciaire).

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96

Le juge qui tient une enquête peut, au cours de celle-ci, confronter avec les témoins la partie présente ou dont

il ordonne la comparution personnelle (article 1001 du Code judiciaire).

Les ordonnances rendues à l’occasion de la comparution personnelle des parties ne sont susceptibles ni

d’opposition, ni d’appel (article 1003 du Code judiciaire).

Les articles 945, alinéas 2 et 3, 946, 948 à 952, 953, alinéas 2 à 4, et 955 sont applicables à la comparution

personnelle des parties (article 1004 du Code judiciaire)97.

La rédaction d’un procès-verbal relatant les déclarations des parties n’est pas requise lorsque la comparution

personnelle a lieu devant la juridiction entière saisie de la cause98.

En principe, le juge qui a entendu les parties en personne siège lorsqu’il est statué sur le résultat de la mesure

d’instruction, à moins qu’il n’en soit empêché. Le juge qui ne siège pas est présumé avoir été empêché et le

motif de son empêchement ne doit pas être mentionné dans la décision99.

97 L’article 948 du Code judiciaire n’est pas applicable lorsque la comparution personnelle des

parties a lieu devant la juridiction saisie de la cause (Cass., 10 mai 1974, Pas., I, 935).

98 Cass., 10 mai 1974, Pas., I, 935.

99 Cass., 29 avril 1988, Pas., I, 1035; Cass., 21 juin 1991, Pas., I, 926.

C.- Frais de l’interrogatoire des parties

231. En vertu de l’article 1004 du Code judiciaire, l’article 953, alinéas 2 à 4, est applicable à la

comparution des parties; la partie demanderesse doit dès lors consigner une provision destinée à couvrir les

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97

frais découlant de celle-ci.

SECTION VII - LE SERMENT

232. Le serment judiciaire est l'affirmation solennelle d'un fait, effectuée devant le juge. Sous réserve de

l'article 2275, alinéa 2, du Code civil, le serment décisoire ne peut être déféré que sur un fait personnel à la

partie à laquelle on le défère.

Le serment est prêté dans les termes proposés, par la partie en personne et à l'audience. Dans tous les cas,

le serment est fait en présence de l'autre partie, ou celle-ci dûment appelée par pli judiciaire (article 1006 du

Code judiciaire).

L'article 1006 du Code judiciaire est applicable qu'il s'agisse de la réception d'un serment litisdécisoire ou d'un

serment supplétoire.

Selon l'article 1363 du Code civil, « lorsque le serment déféré ou référé a été fait, l’adversaire n'est point

recevable à en prouver la fausseté ». Ce texte n'a pas été abrogé par l’article 2 de la loi du 10 octobre 1967.

Cependant, la rédaction large de l'article 1133, 4°, du Code judiciaire, relatif aux cas d’ouverture à requête

civile, conduit la doctrine à soutenir que la victime d'un serment litisdécisoire reconnu ou déclaré faux à

l'initiative du ministère public, peut agir en requête civile en vue de voir rétractée la décision rendue sur la base

d’un serment reconnu ou déclaré faux depuis la décision100.

100 A. LE PAIGE, Les voies de recours, pp. 188 et s., n°205-209.

SECTION VIII - LA DESCENTE SUR LES LIEUX

A.- Le jugement ordonnant la descente sur les lieux

233. Il est parfois utile que l'ensemble du tribunal ou l'un des juges se transporte sur les

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98

lieux litigieux pour les examiner (par exemple, en matière de troubles du voisinage ou de

troubles de jouissance en matière de bail).

L’article 1007 du Code judiciaire dispose dès lors que le juge peut, même d’office,

ordonner une descente sur les lieux.

Le jugement indique les lieu, jour et heure de la descente sur les lieux. Il n'est susceptible

ni d'opposition ni d'appel. La décision est notifiée aux parties sous pli judiciaire (article

1008 du Code judiciaire).

Le juge qui tient une enquête peut, s’il échet, entendre les témoins ou certains d’entre eux au cours d’une

descente sur les lieux (article 1011 du Code judiciaire). La comparution personnelle des parties lors d’une

descente sur les lieux peut également être ordonnée par le juge (article 1012 du Code judiciaire)101.

101 La descente sur les lieux avec comparution personnelle des parties au cours de laquelle aucun

moyen n’est invoqué, ni la cause débattue, ne doit pas avoir lieu en audience publique (Cass., 8 février 1991, Pas., I, 552).

B.- Procédure

234. La visite des lieux est opérée par le juge qui l’ont ordonnée ou par le juge qui est désigné dans la

décision (article 1009 du Code judiciaire). Elle s’effectue tant en présence qu’en l’absence des parties (article

1010 du Code judiciaire).

Le juge peut également se faire accompagner d’un expert durant la vue des lieux (article 985 du Code

judiciaire).

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99

Lors de la descente sur les lieux, le juge est accompagné d'un greffier, qui dressera procès-verbal des

opérations accomplies et des constatations faites au cours de la visite102. La minute de ce procès-verbal est

versée au dossier de la procédure et une copie conforme est notifiée aux parties par le greffier sous pli

judiciaire et une copie non signée à leurs avocats par simple lettre (article 1015 du Code judiciaire).

Les ordonnances rendues à l’occasion de la descente sur les lieux ne sont susceptibles ni d’opposition, ni

d’appel (article 1013 du Code judiciaire).

Les articles 945, alinéas 2 et 3, et 946 sont applicables à la descente sur les lieux (article 1014 du Code

judiciaire).

Le juge qui a opéré la descente sur les lieux doit siéger pour la suite de la procédure mais s’il ne le fait pas,

son empêchement est alors présumé et ne doit pas être constaté dans la décision103.

102 L’article 1015 du Code judiciaire n’interdit pas au juge de faire état dans son jugement d’éléments

constatés par lui qui n’ont pas été expressément mentionnés dans le procès-verbal de descente sur les lieux effectuée en présence des parties (Cass., 22 avril 1993, Pas.,I, 386).

103 Cass., 17 mai 1985, Pas., I, 1163; Cass., 29 avril 1988, Pas., I, 1035.

C.- Frais de la descente sur les lieux

235. Comme pour l'enquête, l'expertise et l'interrogatoire des parties, la partie demanderesse doit

consigner au greffe une provision suffisante pour les frais, en l'occurrence, les frais de transport (article 1016

du Code judiciaire).

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100

SECTION IX - LE CONSTAT D’ADULTERE PAR HUISSIER DE JUSTICE

236. La preuve de l’adultère peut être faite par constat d’huissier de justice.

L’époux demandeur adresse à cette fin une requête unilatérale au président du tribunal

de première instance mentionnant le ou les lieux où pourront être faites les constatations

qui révèlent l’adultère, à laquelle est joint un extrait d’acte de mariage du requérant et,

éventuellement, toutes pièces justifiant la demande (article 1016bis, alinéas 2 et 3, du

Code judiciaire).

Le président du tribunal peut désigner un huissier de justice et lui permettre de pénétrer, accompagné d’un

officier ou d’un agent de police judiciaire, dans un ou plusieurs lieux déterminés pour y procéder aux

constatations nécessaires révélant l’adultère (article 1016bis, alinéa 4, du Code judiciaire)104.

Dans son ordonnance, le président fixe le ou les lieux, ainsi que la période durant laquelle les constatations

peuvent être faites. Aucun constat ne peut avoir lieu entre 21 heures et 5 heures (article 1016, alinéas 7 et 8,

du Code judiciaire).

104 Aucune disposition légale ne prescrit que l’ordonnance du président du tribunal doit, au préalable,

être signifiée à l’huissier du lieu ou des lieux où l’huissier doit procéder au constat d’adultère (Cass., 18 décembre 1992, Pas., I, 1394).

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101

TITRE IV - LES FRAIS ET LES DÉPENS

SECTION I - GENERALITES

237. Aux termes de l'article 1017 du Code judiciaire, tout jugement définitif prononce,

même d'office, la condamnation aux dépens contre la partie qui a succombé, à moins que

des lois particulières n'en disposent autrement et sans préjudice de l'accord des parties

que, le cas échéant, le jugement décrète.

238. Les conditions d'application de cette disposition sont les suivantes :

1° Il faut que l'une des parties ait succombé, donc que la décision lui ait donné tort.Il n'y a d'exception que lorsque les dépens sont frustratoires, c'est-à-dire qu'ils ont été exposés en

vain ou à la suite d'une négligence, auquel cas c'est la partie responsable qui les supportera, même

si l'autre a succombé. Si aucune des parties ne perd ou ne gagne totalement son procès, les dépens

peuvent être partagés dans une proportion que fixe le juge.

Lorsque plusieurs parties succombent, la condamnation aux dépens se divise de

plein droit par tête, à moins que le jugement n'en ait disposé autrement. Cette

condamnation est solidaire si la condamnation principale emporte elle-même

solidarité.

2° La condamnation aux dépens n'est afférente qu'au jugement définitif. Dès lors, les

décisions de référé et les décisions qui prononcent les mesures d'instruction réservent en général les

dépens, pour qu'ils soient mis à charge de la partie qui succombera au principal.

On observe toutefois de plus en plus fréquemment des condamnations aux dépens dans des

décisions de référé.

3° Dans certains cas, la loi prévoit elle-même une répartition d'office des dépens, par exemple en

matière de divorce pour cause de désunion irrémédiable (article 1258 du Code judiciaire) ou dans les

matières de sécurité sociale ou d'aide sociale (article 1017, alinéa 2, Code judiciaire).

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102

239. Rappels

En cas de demande en interprétation ou en rectification de jugement, les frais et dépens sont à

charge de l'Etat si la demande est accueillie (article 801 du Code judiciaire).

SECTION II - ENUMERATION DES DEPENS

240. Les dépens comprennent selon l'article 1018 du Code judiciaire :

- les droits de timbre, de greffe et d'enregistrement;

- les émoluments et salaires des auteurs des actes judiciaires (essentiellement les

huissiers);- le coût de l'expédition du jugement;

- les frais de toutes les mesures d'instruction, notamment la taxe des témoins et des

experts ou la copie d'un dossier répressif;- les frais de déplacement ou de séjour des magistrats, des greffiers et des parties lorsque le

déplacement a été ordonné par le juge;

- les frais d'actes lorsqu'ils ont été faits dans la seule vue du procès, par exemple le coût de la

procédure sur requête pour obtenir l'abréviation du délai de citation;

- les sommes prévues dans l'article 1022 du Code judiciaire ou indemnités de

procédure;- les frais et honoraires du médiateur;

- les frais d'exécution prévus par l'article 1024 du Code judiciaire.

241. Ne font pas partie des dépens :

- ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, les frais frustratoires;

- les honoraires du conseil technique (qui assiste la partie dans une expertise);

- les frais afférents aux mémoires et consultations.

Corollaire de l'article 1022 du Code judiciaire, l'article 1023 du Code judiciaire prohibe

toute clause conventionnelle portant augmentation de la créance en raison de sa

réclamation en justice. Il est d'ordre public. Il faut toutefois signaler que l’article 6 de la

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103

loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions

commerciales autorise le créancier à réclamer au débiteur un dédommagement

raisonnable pour tous les frais de recouvrement pertinents encourus par suite du retard

de paiement.

SECTION III – L’INDEMNITE DE PROCEDURE

A.- Principes

243. La partie qui obtient gain de cause a droit à une intervention forfaitaire dans les

honoraires et frais de son avocat (art. 1022, alinéa 1er, C. jud.). Cette intervention est

constituée par l’indemnité de procédure dont les montants sont fixés par le Roi (art. 1022,

alinéa 2, C. jud.).

La partie non assistée d’un avocat (parce qu’elle se défend seule ou avec l’aide d’un délégué syndical ou

qu’elle comparaît par l’intermédiaire d’un fonctionnaire ou encore d’un mandataire de justice non représenté

lui-même par un avocat) ne peut donc prétendre à cette indemnité.

La partie qui obtient gain de cause ne peut obtenir qu’une indemnité de procédure même si elle est défendue

par plusieurs avocats.

244. L’indemnité de procédure est la seule indemnité à laquelle la partie qui obtient gain de cause peut

prétendre au titre de l’intervention d’un avocat (art. 1022, alinéa 6, C. jud.). Elle a donc un caractère à la fois

exclusif et limitatif.

La partie qui obtient gain de cause peut toujours réclamer, conformément aux principes dégagés par la

jurisprudence de la Cour de cassation, une indemnité destinée à couvrir ses autres frais de défense et

notamment l’intervention éventuelle d’un conseil technique ou médical.

B.- Le montant de l’indemnité de procédure

245. Les montants de base, minima et maxima de l’indemnité de procédure sont fixés

par l’arrêté royal du 26 octobre 2007 auquel il est renvoyé. Trois hypothèses principales

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doivent être distinguées.

246. Les montants de l’indemnité de procédure pour les actions portant sur des

demandes évaluables en argent dépendent de la valeur de la demande.

Celle-ci est calculée, comme pour la détermination de la compétence matérielle,

conformément aux articles 557 à 562 et 618 du Code judiciaire. Toutefois, par dérogation à

l’article 561 du Code judiciaire, lorsque le litige porte sur le titre d’une pension alimentaire, le montant est

calculé en fonction du montant de l’annuité ou de douze échéances mensuelles.

On prend donc en considération la somme demandée dans l’acte introductif d’instance en principal et les

intérêts déjà échus au jour de la citation (art. 557 C. jud.) et, le cas échéant si elle a été modifiée en cours

d’instance, celle réclamée dans les dernières conclusions (art. 618 C. jud.) et non la somme finalement

allouée par le juge.

S’il y a plusieurs chefs de demande, on les cumule (art. 558 C. jud.).

Lorsqu’un chef de demande est évaluable en argent et un autre ne l’est pas (infra, n°247), il y a lieu d’allouer

l’indemnité la plus élevée.

Le montant de l’indemnité de procédure est fixé en fonction du montant de la demande principale et non de

l’éventuelle demande reconventionnelle qui ne donne pas droit à une indemnité distincte. Cette question est

toutefois controversée.

En appel, l’indemnité est calculée sur la base du montant réclamé dans l’acte d’appel ou, le cas échéant,

dans les dernières conclusions si le montant a été modifié en cours d’instance.

Pour les procédures mentionnées aux articles 579 et 1017, alinéa 2, du Code judiciaire (soit en matière

d’accidents du travail et de contentieux de la sécurité sociale dans lesquels les dépens sont toujours mis à

charge de l’organisme concerné), l’indemnité de procédure est fixée à des montants spécifiques.

247. Lorsque l’action porte sur une demande non évaluable en argent, le montant de

base de l’indemnité est de 1.200 €, le montant minimum de 75 € et le montant maximum

de 10.000 €.

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248. A la demande d'une des parties, éventuellement formulée sur son interpellation, le

juge peut par une décision spécialement motivée réduire ou augmenter le montant de

l'indemnité de base sans toutefois pouvoir dépasser les minima et maxima fixés par le

Roi (art. 1022, alinéa 3, C. jud.). Le juge choisit librement toute somme entre ces

montants.

Il tient compte dans son appréciation de quatre critères énoncés par l’article 1022 du Code judiciaire :

- le juge peut réduire l’indemnité en raison soit de la capacité financière de la partie succombante, soit des

indemnités contractuelles convenues pour la partie qui obtient gain de cause.

- le juge peut réduire ou augmenter l’indemnité en raison de la complexité de l’affaire ou du caractère

manifestement déraisonnable de la situation.

C.- Cas particuliers

249. L’arrêté royal du 26 octobre 2007 prévoit un certain nombre de cas particuliers où l’indemnité fait l’objet

d’une réduction, souvent à son montant minimum. Tel est notamment le cas dans l’hypothèse d’une

procédure par défaut ou lorsque la partie qui succombe bénéficie de l’aide juridique.

D.- Pluralité de parties succombantes ou gagnantes

250. Lorsque plusieurs parties obtiennent gain de cause contre une seule, ci ces parties

ont chacune un avocat distinct, l’indemnité de procédure est au maximum le double de

l'indemnité de procédure maximale à laquelle peut prétendre le bénéficiaire fondé à

réclamer l'indemnité la plus élevée. Elle est répartie entre les parties par le juge (art.

1022, alinéa 5, C. jud.).

Si ces parties sont assistées par le même avocat, ni la loi ni l’arrêté royal ne prévoient de règle spécifique

contrairement à l’arrêté royal du 30 novembre 1970. Bien que la question puisse être discutée, il est défendu

que ces parties n’ont droit qu’à une seule indemnité lorsque, comme cela était prévu sous l’empire du droit

ancien, elles forment une demande commune ou concluent « aux mêmes fins ». Par contre, lorsque les

intérêts des parties sont distincts, chacune d’entre elles doit pouvoir bénéficier de l’indemnité de procédure. A

la demande de la partie qui succombe, le juge peut réduire ces indemnités si le cumul de celles-ci aboutit à

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une situation manifestement déraisonnable.

Dans l’hypothèse où plusieurs parties succombent à l’égard d’une seule, sauf décision contraire, la

condamnation à l’indemnité de procédure se divise de plein droit par tête. La condamnation au paiement de

l’indemnité de procédure est solidaire lorsque la condamnation principale elle-même emporte solidarité (art.

1020 C. jud.).

251. Lorsque chacune des parties succombe partiellement, conformément à l’article

1017, alinéa 4, du Code judiciaire, le juge peut compenser les dépens.

SECTION III - LIQUIDATION DES DEPENS

252. L'article 1021 du Code judiciaire dispose que les parties peuvent déposer un relevé détaillé de leurs

dépens respectifs y compris les indemnités de débours et de procédure prévues à l'article 1022 du Code

judiciaire. Le jugement contient la liquidation de ces dépens.

Lorsque les dépens n'ont pas été liquidés dans le jugement ou ne l'ont été que partiellement - en général à la

suite de la négligence de la partie qui n'a pas déposé son relevé - ceux sur lesquels il n'a pas été statué sont

réputés réservés. En ce cas, la liquidation a lieu, à la demande de la partie la plus diligente, par le juge qui a

statué, pour autant que sa décision n'ait pas été entreprise; la procédure est reprise et poursuivie

conformément aux articles 750 et suivants du Code judiciaire, c'est-à-dire de manière contradictoire.

253. L'article 1024 du Code judiciaire spécifie que les frais d'exécution incombent à la partie contre

laquelle l'exécution est poursuivie.

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TITRE V - DES VOIES DE RECOURS

CHAPITRE I - DISPOSITIONS GÉNÉRALES

SECTION I - DEFINITIONS

254. Les voies de recours sont les procédures que la loi ouvre aux parties ou aux tiers

en vue d'obtenir une nouvelle décision dans un litige déjà jugé.

Rappelons qu'il existe deux grandes catégories de voies de recours (article 21 du Code

judiciaire) :

- les voies de recours ordinaires qui, en principe, sont toujours ouvertes aux parties

et qui ont un effet suspensif de l'exécution (article 1397 du Code judiciaire) : il

s'agit de l'appel et de l'opposition;

- les voies de recours extraordinaires qui ne peuvent être mises en œuvre que pour

les causes déterminées par la loi et qui n'ont des effets suspensifs que dans les

cas prévus par elle; il s'agit du pourvoi en cassation, de la tierce opposition, de la

requête civile, de la prise à partie et de la rétractation d’une décision passée en

force de chose jugée rendue par une juridiction civile fondée sur une disposition

annulée par la Cour constitutionnelle.

SECTION II - DELAIS

255. L'exercice des voies de recours est toujours soumis à un délai, calculé en

application des articles 52 à 54 du Code judiciaire, et prescrit à peine de déchéance.

La prorogation de ce délai par le juge en vertu de l'article 51 du Code judiciaire n'est pas

possible, et les articles 864 et 865 du Code judiciaire prévoient que cette déchéance ne

peut être couverte.

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256. La seule possibilité de prorogation, admise par la jurisprudence, est le cas de force

majeure, c'est-à-dire l'événement imprévisible et insurmontable, extérieur à la personne

qui s'en prévaut. En ce cas, le délai de recours ne prend cours qu'à dater du jour où la

force majeure a cessé d'exister.

Il faut que l'impossibilité d'agir ait été absolue c'est-à-dire qu'elle résulte d'un événement indépendant de la

volonté de la partie et que celle-ci n'a pu ni prévoir ni surmonter.

La faute ou la négligence du mandataire "ad litem" ou de l'huissier de justice ne constitue pas un cas de force

majeure105. Cette faute ou négligence est évidemment susceptible d'engager la responsabilité

professionnelle de l'avocat ou de l'huissier.

257. Pour rappel, une autre exception résulte de la loi : l'article 50, alinéa 2, du Code judiciaire prévoit que

le délai d'appel ou d'opposition prévu aux articles 1048 (opposition), 1051 (appel) et 1253quater (opposition et

appel) est prorogé jusqu'au 15ème jour de l'année judiciaire nouvelle lorsque ce délai prend cours et expire

pendant les vacances judiciaires (juillet et août). Cette disposition est d'interprétation restrictive.

SECTION III - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE RECOURS

258. En règle générale, toutes les décisions sont susceptibles de recours ordinaires.

La loi prévoit toutefois expressément diverses exceptions.

A.- L'accord des parties

259. Selon l'article 1043 du Code judiciaire, les parties peuvent demander au juge

d'acter l'accord qu'elles ont conclu sur la solution d'un litige dont il est régulièrement

saisi.

105 Cass., 24 janvier 1974, Pas., I, 553, obs. W.G.

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Ce jugement n'est susceptible d'aucun recours de la part des parties, à moins que

l'accord n'ait point été légalement formé (par exemple, vice du consentement, ou

contrariété à l’ordre public).

Dans ce dernier cas, l'appel est ouvert aux parties en tant que voie de nullité.

B.- L'acquiescement

260. L'acquiescement à une décision est la renonciation par une partie à l'exercice des

voies de recours dont elle pourrait user ou qu'elle a déjà formé contre toutes ou certaines

des dispositions de cette décision (article 1044, alinéa 1er, du Code judiciaire).

L'acquiescement peut être exprès ou tacite, mais en toute hypothèse, conformément au

droit commun, l'adhésion à la décision rendue doit être certaine et non équivoque.

Il y a acquiescement exprès lorsque la partie déclare accepter le jugement; il y a

acquiescement tacite lorsqu'elle accomplit des actes ou des faits précis et concordants

dont se déduit l'intention certaine qu'elle a d'adhérer à la décision. La volonté

d'acquiescer doit être strictement appréciée car les renonciations ne se présument pas.

261. L'acquiescement emporte renonciation au droit lui-même.

C'est un acte unilatéral qui ne doit pas être accepté par la partie adverse.

L'acquiescement peut être pur et simple ou conditionnel, auquel cas il ne sortira d'effet que si la condition est

acceptée par la partie adverse.

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L'acquiescement n'est, en principe, valable que dans les matières qui ne touchent pas à l'ordre public et c'est

pourquoi l'on ne peut acquiescer au jugement qui prononce un divorce, qui statue sur une question relative à

l'état des personnes, qui déclare une faillite ou qui statue sur une question de compétence matérielle d'ordre

public.

262. L'acquiescement exprès résulte d'un acte signé par la partie ou son mandataire nanti d'un pouvoir

spécial.

L'acquiescement tacite n'est quant à lui soumis à aucune forme particulière, ce qui importe, c'est le caractère

certain de la renonciation.

Ainsi, par exemple, en matière civile, l'exécution même spontanée par la partie condamnée d'une décision

judiciaire n'implique pas acquiescement à celle-ci s'il n'apparaît pas qu'elle a adhéré d'une manière certaine à

cette décision. Si la décision est exécutoire de plein droit, le fait de l'exécuter, même sans réserve, ne vaut

pas acquiescement106.

SECTION IV - DIVERS

263. Ne sont susceptibles ni d'opposition ni d'appel :

- les décisions ou mesures d'ordre, qui ne constituent pas des actes juridictionnels

(fixation, remise, omission du rôle, radiation, etc...) sauf si elles infligent un grief

immédiat à l’une des parties107;

- les jugements ordonnant la comparution personnelle des parties, ceux ordonnant

une production de document (article 880 du Code judiciaire) et ceux ordonnant

une descente sur les lieux (article 1008 du Code judiciaire).

En ce qui concerne ces jugements, en effet, le principe est qu'ils ne peuvent

causer aucun préjudice.

- la décision par laquelle le juge décide si l'affaire sera ou non traitée en débats

succincts (article 735 du Code judiciaire);

- les décisions prises en application des articles 747, §2 et 748, §2, du Code

judiciaire par lesquelles le juge fixe des délais pour conclure.

106 Pour d'autres exemples, voyez A. FETTWEIS, Manuel, n° 704.

107 Cass., 25 juin 1973, Pas., I, 997.

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264. Seule l'opposition est exclue contre le jugement qui a ordonné ou autorisé une

enquête (article 919 du Code judiciaire).

CHAPITRE II - L'OPPOSITION

SECTION I - NOTION

265. L'opposition est la voie de recours ordinaire mise à la disposition de la partie

défaillante (défaut simple).

Le tribunal qui a statué par défaut est seul compétent pour connaître de l'opposition.

Le Code ne fait pas de distinction entre le défaut du demandeur et le défaut du

défendeur.

266. L'exercice de l'opposition requiert intérêt et qualité. L'opposant doit avoir été

partie, c'est-à-dire ici avoir été appelé à comparaître à l'instance et avoir été défaillant; la

décision qu'il attaque doit en outre lui avoir causé un grief.

SECTION II - FORMES

267. L'opposition est signifiée par exploit d'huissier de justice, contenant citation à

comparaître devant le juge qui a rendu le jugement par défaut.La loi prévoit parfois qu’elle peut être formée par requête. Il en va ainsi devant les juridictions du travail (article

704 du Code judiciaire) ou dans certains contentieux familiaux (voy. par exemple, article 1253, 4°, du Code

judiciaire).

De l'accord des parties, comme en toute matière, l'opposition peut être introduite par comparution volontaire.

En cas d'indivisibilité du litige, l'article 1053 du Code judiciaire est applicable à l'instance ouverte sur opposition

(article 31 du Code judiciaire).

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SECTION III - MOTIVATION

268. Pour limiter les manoeuvres dilatoires, l'acte d'opposition doit à peine de nullité,

énoncer les moyens de l'opposant.

Néanmoins, il s'agit d'une nullité relative qui, pour être valablement invoquée, doit avoir causé un grief dans le

chef de la partie adverse.

Il est inutile pour l'opposant de tenter de légitimer le défaut à l'audience : ce qui est fondamental, c'est qu'il

fasse valoir dans son acte les moyens de fond qu'il aurait normalement développés s'il avait été présent à la

cause.

269. L'opposant devient demandeur sur opposition et c'est à ces moyens que son

adversaire doit répondre dans le mois de la communication des pièces. La procédure

sera ensuite poursuivie normalement, selon les règles régissant l'instance (voir supra).

SECTION IV - DELAI

270. Le délai d'opposition est fixé à un mois et prend cours, en règle, à partir de la

signification du jugement rendu par défaut.

C'est un délai qui peut être augmenté dans les limites et dans les cas prévus par les articles 50 et 55 du Code

judiciaire.

SECTION V - "OPPOSITION SUR OPPOSITION NE VAUT"

271. La partie opposante qui se laisse juger une seconde fois par défaut n'est plus

admise à former une nouvelle opposition (article 1049 du Code judiciaire).

Cette disposition a pour but de décourager les recours dilatoires.

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SECTION VI - EFFETS

A.- Effet dévolutif

272. L'acte d'opposition provoque une nouvelle saisine du tribunal qui avait statué pour

qu'il procède à un examen contradictoire de la demande originaire.

Le second débat n'est que la continuation du premier.

B.- Effet relatif

273. Le recours ne profite qu'au plaideur qui en a pris l'initiative.La seule opposition d'une partie ne permet pas d'aggraver les condamnations qui ont été prononcées contre

elle, mais le demandeur originaire peut conclure et dès lors introduire les demandes incidentes telles que

celles autorisées par les articles 807 et 808 du Code judiciaire.

C.- Effet suspensif

274. L'opposition suspend l'exécution du jugement antérieurement rendu (article 1390)

sous réserve des règles relatives à l'exécution provisoire nonobstant tout recours, que

nous examinerons (articles 1398 à 1042 du Code judiciaire) ainsi que des articles 1039 et

1496 du Code judiciaire.

Un jugement par défaut tient lieu d'autorisation de saisie conservatoire pour les

condamnations prononcées, à moins qu'il n'en ait été décidé autrement (article 1414 du

Code judiciaire).

275. Remarque

Le jugement par défaut suivi d'une opposition et l'un des épisodes irritant de la vie judiciaire. Il est

fréquemment question de supprimer cette voie de recours, ou d'en faire une voie de recours extraordinaire,

qui n'aurait lieu qu'en cas de circonstance grave, dûment justifiée. Pour l'instant, en tout cas, le fait de faire

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défaut est reconnu comme un droit par conséquent également celui de faire opposition.

Rappelons toutefois que les lois du 3 août 1992 et du 26 avril 2007 ont très fortement réduit les situations qui

conduiront encore au prononcé d'un jugement par défaut (voir supra).

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CHAPITRE III - L'APPEL

SECTION I - NOTIONS

A.- Définition et fonctions

276. L'appel est la voie de recours ordinaire par laquelle la partie qui s'estime lésée par

un jugement en sollicite la réformation - ou l'annulation - par une juridiction supérieure.

Il faut relever que le droit au double degré de juridiction n'est garanti ni par la Constitution

belge, ni par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

Plusieurs restrictions lui ont d'ailleurs été apportées par le Code judiciaire, notamment

lorsque joue l'effet dévolutif total de l'article 1068 du Code judiciaire.

277. Sous cette réserve, ce recours joue un rôle important :

1° il permet de faire rectifier les erreurs que le premier juge aurait pu commettre, en

faisant réexaminer la cause par des magistrats généralement plus nombreux et

plus expérimentés (on précise toutefois dans divers cas, que la chambre de la

cour appelée à connaître de l'appel ne sera composée que d'un seul conseiller).

2° l'appel sert de voie de nullité contre les décisions prononcées en première

instance (article 20 du Code judiciaire).

3° l'appel permet aux plaideurs de "rectifier le tir", de réparer les erreurs qu'ils ont

commises en première instance dans la défense de leurs intérêts. Ils peuvent

changer d'argumentation ou proposer une nouvelle qualification juridique des faits.

L'appel permet aussi de faire état de faits nouveaux survenus en cours d'instance

et qui ont un impact sur la situation litigieuse.

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278. L'acte d'appel ouvre une nouvelle instance, distincte de celle qui s'est éteinte par la décision de la

juridiction inférieure: le procès continue, mais il y a autonomie de la procédure d'appel.

B.- Conditions de recevabilité de l’appel

279. Les conditions de recevabilité de l'appel sont la qualité et l’intérêt, mais ces

conditions reçoivent une interprétation et une application différentes de celles qu’elles

revêtent au premier degré de juridiction :

- il faut avoir qualité pour agir, c'est-à-dire avoir été partie en première instance :

celui qui est resté étranger à cette instance pouvant éventuellement user de la

tierce opposition ou se porter intervenant volontaire devant la juridiction d'appel.

L'appel ne peut en outre être dirigé que contre une partie dont on a été

l'adversaire en première instance, c’est-à-dire une partie avec laquelle un lien

d’instance s’est créé par suite de l’échange de conclusions réclamant une

condamnation ou attestant, à tout le moins, de prétentions opposées et de

l’existence d’une contestation opposant les parties.

- il faut justifier d'un intérêt, c'est-à-dire un grief résultant de la décision attaquée:

celui qui a obtenu satisfaction en première instance ne peut interjeter appel même

s'il est extrêmement mécontent des motifs de la décision qui lui donne gain de

cause.

C.- Appel principal et appel incident

280. L'appel principal émane de l'appelant et introduit la procédure en degré d'appel.

L'appel incident est celui qui est formé, après l'appel principal, par une partie intimée

contre une partie à la cause quelle qu'elle soit.

Il tend à la mise à néant, même partielle, de la décision du premier juge et se produira

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uniquement lorsque ni l'une ni l'autre des parties n'avait obtenu entièrement gain de

cause en première instance : l'appelant incident essayera ainsi d'améliorer sa situation.

L’appel incident est donc totalement différent de la demande reconventionnelle tant au

point de vue de son sujet que son objet. Alors que le premier émane de l’intimé et tend à

obtenir la réformation de la décision entreprise, la seconde est introduite par le défendeur

et vise l’obtention d’une condamnation à charge du demandeur.

SECTION II - DECISIONS SUSCEPTIBLES D’APPEL

281. En principe, en toute matière, l'appel peut être formé dès le prononcé du jugement,

même si celui-ci est une décision avant dire droit ou s'il a été rendu par défaut. Par

exception, contre un jugement statuant sur la compétence, l'appel ne peut être formé

qu'avec l'appel du jugement définitif (article 1050, alinéa 2, du Code judiciaire).

Il n'en sera autrement que s'il y a accord des parties, acquiescement, décision ou mesure d'ordre.

282. Le taux du ressort limite la compétence du juge d'appel aux affaires dont l'enjeu

excède 1.240 € si la décision a été rendue par un juge de paix ou par le tribunal de police

et 1.860 € si elle a été rendue par le tribunal de première instance ou le tribunal de

commerce. Les décisions rendues par le tribunal du travail sont toujours appelables ainsi

que les jugements rendus par le tribunal de première instance dans les contestations

relatives à l’application d’une loi d’impôt.

SECTION III - DELAI ET FORMES DE L’APPEL

A.- Le délai d'appel

283. Le délai d'appel est de un mois à compter, en règle, de la signification du jugement

(article 1051, alinéa 1er, du Code judiciaire). Ce délai est établi en mois et se compte de

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quantième à veille de quantième (article 54 du Code judiciaire).

Lorsque la partie signifiée réside à l'étranger, il peut être prorogé conformément aux règles générales (article

55 du Code judiciaire), sauf en cas d'appel d'une ordonnance rendue sur requête (article 1031 du Code

judiciaire), en référé (article 1039 du Code judiciaire) ou par le juge des saisies (article 1395, 2°, du Code

judiciaire).

Il est également prorogé lorsque le délai prend cours et expire pendant les vacances judiciaires, ou si le

dernier jour du délai expire un samedi, un dimanche ou un autre jour férié. Conformément au droit commun,

la force majeure suspend le délai d'appel.

Remarque : il existe quelques exceptions à ces principes en droit des personnes, raison pour laquelle il faut

toujours être attentif en cette matière de vérifier qu'aucun délai particulier n'a été prévu par le législateur.

284. L'appel dirigé contre un jugement définitif fait revivre le droit d'appel à l'égard d'un

jugement avant dire droit ou d'un jugement sur la compétence, même si le délai d'appel

contre celui-ci est expiré (article 1055 du Code judiciaire). Mais l'appel contre les deux

décisions doit être formé en même temps.

285. Le délai d'appel court du jour de la signification aussi bien à l'égard de l'adversaire

qu'à l'égard de la partie qui a fait signifier le jugement (article 1051, alinéa 2, du Code

judiciaire).

En revanche, lorsque la décision n'a pas été signifiée, l'appel restera recevable jusqu'à acquiescement et à

défaut de renonciation pendant les délais de prescription de droit commun.

286. Lorsque le litige est indivisible au sens de l'article 31 du Code judiciaire, l'auteur

du recours doit, dans le délai d'appel, mettre en cause toutes les parties qui ont défendu

un intérêt opposé au sien (article 1053, alinéa 1er, du Code judiciaire). Il doit en outre,

dans les délais ordinaires de l'appel, et au plus tard avant la clôture des débats, appeler

en déclaration d'arrêt commun les co-intéressés qui n'ont pas exercé de recours (article

1053, alinéa 2, du Code judiciaire).

287. L'appel tardif est irrecevable et le juge d'appel doit le constater d'office quitte à

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ordonner la réouverture des débats.

288. En cas d'appel par exploit d'huissier, la date de l'appel est celle à laquelle la signification a eu lieu. En

cas d'appel par requête, c'est la date du dépôt de la requête au greffe. En cas d’appel par lettre

recommandée à la poste, il s’agit de la date de remise de la lettre aux services postaux.

B.- Formes de l'appel

289. Selon l'article 1056 du Code judiciaire, l'appel principal est formé :

1° par acte d'huissier de justice signifié à la partie adverse. En cas de défaut de l’intimé, le

juge d'appel peut surseoir à statuer et ordonner la signification de l'acte d'appel par huissier, s’il n’a

pas eu lieu en cette forme (article 1058 du Code judiciaire).

2° par requête - et c'est la forme ordinaire - déposée au greffe de la juridiction

d'appel, notifiée à l'intimé, et le cas échéant à son avocat par le greffier, au plus

tard le premier jour ouvrable qui suit le dépôt.Elle est signée soit par la partie, soit par son avocat, soit devant la cour du travail par un fondé de

pouvoir, conformément à l'article 728 du Code judiciaire.

Il est important de souligner que la requête d'appel doit être déposée au greffe avant l'expiration du

délai de recours.

Les formes et délais de la notification de la requête d'appel ne sont pas prescrits à peine de nullité.

Dès lors, en application de l'article 860 du Code judiciaire, une irrégularité affectant cette opération ne

saurait justifier le prononcé de la déchéance. On constatera que la requête d'appel appartient à

cette catégorie de requêtes qui introduisent une procédure bilatérale.

3° lorsque la loi permet formellement ce procédé, l'appel peut être interjeté par lettre

recommandée à la poste; ce sera notamment le cas dans diverses matières disciplinaires ou

de la sécurité sociale.

Lorsqu'il est interjeté appel de la sorte, l'acte ne doit pas mentionner les lieu, jour et heure de la

comparution : les parties seront convoquées par le greffier à comparaître à l'audience fixée par le

juge.

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Il s'agit du seul mode d'introduction d'un appel à date indéterminée.

4° par conclusions, à l'égard de toute partie présente ou représentée à la cause. La

loi vise ici aussi bien l'appel incident (article 1054 du Code judiciaire) qu'un appel complémentaire de

l'appelant principal ou un appel principal d'une partie non intimée mais présente à la cause, par

exemple par le mécanisme de l'indivisibilité.

C.- Mentions de l'appel principal

290. L'article 1057 du Code judiciaire dispose que hormis le cas où il est formé par conclusions, l'acte

d'appel contient à peine de nullité :

1° l'indication des jours, mois et an;

2° les nom, prénom, profession et domicile de l'appelant;

3° les nom, prénom, domicile ou à défaut de domicile, la résidence de l'intimé (sauf élection de

domicile);

4° l'indication de la décision dont appel;

5° l'indication du juge d'appel. Cette mention n'est pas prescrite à peine de nullité absolue;

6° l'indication du lieu où l'intimé devra faire acter sa déclaration de comparution. Cette mention est à

libeller conformément à ce que dispose l'article 1061 du Code judiciaire au texte duquel il est

renvoyé. Son omission emporte nullité relative;

7° l'énonciation des griefs;

8° l'indication des lieu, jour et heure de la comparution (sauf si l'appel est introduit, dans les cas prévus

par la loi, par lettre recommandée.

SECTION IV - PROCEDURE EN DEGRE D’APPEL

A.- Inscription au rôle

291. La cause doit être inscrite au rôle général à défaut de quoi l'acte d'appel est de nul

effet (article 1060 du Code judiciaire).

Lorsque l'appel est formé par requête, le greffier procède d'office à l'inscription au rôle.

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B.- Introduction de la cause

292. La loi du 3 août 1992 a généralisé l'appel à date fixe. La procédure en degré

d'appel commencera donc toujours par une audience d'introduction, comme en première

instance, appelée, en appel, audience de comparution.

Corrélativement, la loi du 3 août 1992 a également généralisé l'obligation, prescrite à

peine de nullité, d'énoncer ses griefs dans son acte d'appel, c'est-à-dire d'indiquer les

moyens sur lesquels le recours est fondé.

Néanmoins, des griefs nouveaux pourront encore être invoqués en termes de

conclusions lors des débats.

C.- Procédure de mise en état

1° Principe

293. En vertu de l'article 1042 du Code judiciaire, les règles de l'instance sont

applicables en appel sauf dérogations expresses. Ainsi, sont notamment applicables en

appel, les dispositions relatives aux fixations, à l'intervention du greffier des rôles, , à la

mise en état, au jugement par défaut et à l'opposition. L'article 774 du Code judiciaire est

également applicable en degré d’appel.

2° Exception : la procédure accélérée

294. L'article 1066 du Code judiciaire met en place une procédure accélérée applicable,

d'une part aux causes qui n'appellent que des débats succincts (article 1066, alinéa 1er,

du Code judiciaire) et, d'autre part à six cas particuliers qui présentent tous un certain

degré d'urgence (article 1066, alinéa 2, du Code judiciaire, au texte duquel il est

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renvoyé).

Dans tous les cas visés à l'article 1066 du Code judiciaire, la cause sera retenue et plaidée à l'audience

d'introduction ou au plus tard dans les trois mois de celle-ci.

Ce délai n'étant prescrit d'aucune sanction, en pratique, vu l'encombrement des rôles en degré d'appel, il

n’est que rarement respecté.

SECTION V - L’APPEL INCIDENT

295. L'appel incident autorise l'intimé à élargir la saisine du juge d'appel au-delà des

limites qui résultent de l'effet relatif de l'appel principal.

Ainsi, il permet en seconde instance la reconstitution intégrale du litige originaire. C'est,

pour l'intimé, un palliatif à l'effet relatif de l'appel.

L'appel interjeté par une partie non intimée - généralement le premier dans le temps - est l'appel principal;

celui qui est formé par une partie intimée est l'appel incident; ce n'est donc pas l'importance respective de

ces appels qui permet de les qualifier, mais l'ordre de priorité dans lequel ils sont intervenus ainsi que les

personnes qui les ont interjetés.

A. - Généralités

296. Les règles applicables à l’appel incident peuvent être résumées comme il suit.

1° l'appel incident est autorisé pendant toute l'instance d'appel, jusqu'à la clôture des

débats, même si le jugement a été signifié et que le délai d’appel (principal) est

expiré.

2° la partie qui a fait signifier le jugement sans réserve ou qui y a acquiescé avant la

signification conserve le droit, si son adversaire l'intime d'interjeter appel incident

dans la mesure où il peut justifier d'un grief que lui inflige le jugement entrepris.

3° l'appel incident peut être dirigé contre toutes les dispositions du jugement

entrepris sans avoir égard au fait que l'appel principal aurait été limité à une ou

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plusieurs des dispositions de la première décision. Il ne peut par contre être dirigé

contre un autre jugement. Dans cette dernière hypothèse, seul un appel principal

peut être introduit.

4° l'appel incident est formé, en principe, par le dépôt de conclusions : il pourrait

l'être par acte d'huissier mais les frais frustratoires restent, comme on le sait, à la

charge de la partie qui les a exposés.

5° l'appel incident ne peut être admis si l'appel principal est déclaré nul ou tardif.

B.- Appel incident et reconstitution du litige en degré d'appel

1° Appel incident dans le procès opposant deux parties

297. Lorsque le procès met en présence deux parties devant le premier juge, l'appel

oppose nécessairement et exclusivement les deux mêmes parties, une intervention

dirigée contre un tiers ou par un tiers ne pouvant revêtir à ce degré qu'un caractère

conservatoire (article 812, alinéa 2, du Code judiciaire).

A l'appel principal d'une partie peut succéder l'appel incident de l'autre partie, chacune poursuivant la

réformation des dispositions du jugement qui lui infligent un grief. Cela suppose évidemment que la décision

de première instance n'ait totalement donné gain de cause ni à l'une, ni à l'autre. Ainsi, l'appel incident

permet de neutraliser l'effet relatif et limité de l'appel principal en reconstituant en degré d'appel l'objet du

litige tel qu'il se présentait devant le premier juge.

Outre la critique de certains chefs du jugement attaqué, sans quoi l'appel serait irrecevable pour défaut

d'intérêt, la voie de recours peut aller au-delà de la reconstitution du litige en servant de support à

l'introduction par le demandeur originaire d'une demande nouvelle et par le défendeur originaire d'une

demande reconventionnelle.

298. L'appel incident supposant un appel principal préalable, il ne peut être formé que

contre le jugement frappé d'appel principal.

Pour le surplus, sous réserve des facilités procédurales offertes par les articles 1054 et 1056, 4°, du Code

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judiciaire, l'appel incident ne diffère pas de l'appel principal; il obéit aux mêmes règles de recevabilité en ce

qui concerne les conditions générales (intérêt et qualité).

Il n'y a donc pas à tenir compte de la nature des dispositions attaquées. Parfois, il en résulte un retournement

complet de situation pour l'appelant au principal dont l'appel limité à un chef accessoire est déclaré non fondé

alors que l'appel incident aboutit à la réformation de la décision entreprise sur ce qui faisait l'objet essentiel du

litige.

299. L’appelant principal, intimé sur incident, peut à son tour interjeter appel incident

des chefs du jugement non attaqués par son appel principal.

2° Appel incident dans un procès à sujets multiples

300. Lorsque plus de deux parties étaient impliquées en première instance, le maintien

à la cause de toutes les parties en degré d’appel soulève certaines difficultés dans le

cadre de la détermination des sujets actif (celui qui interjette appel incident) et passif

(celui contre lequel l’appel incident est dirigé) de l’appel incident.

a) le sujet actif de l’appel incident

301. Aux termes de l’article 1054 du Code judiciaire, l’appel incident doit émaner d’une

partie « intimée », c’est-à-dire, suivant la Cour de cassation, « celle contre laquelle a été

dirigé un appel principal ou celle contre laquelle une prétention, autre qu’un appel en

déclaration d’arrêt commun, est formulée en degré d’appel »; ainsi n’est pas une partie

intimée, celle qui a été appelée à la cause en déclaration d’arrêt commun ou qui est

intervenue volontairement en degré d’appel.

302. Cette partie doit en outre avoir été régulièrement intimée.

On rappelle à cet égard que l'appel principal ne peut être dirigé que contre une partie qui

était opposée en première instance à l'appelant. Même si la règle du double degré de juridiction

n'est pas un principe général du droit, le Code judiciaire ne permet pas auxpersonnes présentes en première

instance sans lien d'instance entre elles de s'opposer pour la première fois en degré d'appel.

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Ainsi, le demandeur n'a aucun lien d'instance avec l'assureur appelé en garantie par le défendeur. Suffirait-il

qu'il dirige indistinctement son appel contre le défendeur originaire et l'assureur pour que celui-ci soit

considéré comme un intimé alors que de toute évidence l'appel principal dirigé contre luine peut être admis ?

En d'autres termes, suffit-il d'être formellement intimé au gré de l'inspiration même fantaisiste de l'appelant

ou faut-il être réellement intimé en ce sens que cette qualité ne peut être reconnue qu'à une partie qui était

opposée en première instance à l'appelant ?

La réponse est négative : la qualité en laquelle une partie figure à l'instance n'est pas déterminée par la seule

qualification qui lui est attribuée dans l'acte d'appel; il appartient au juge de décider si une partie est

effectivement intimée.

303. Pour qu'une partie puisse être sujet actif d'un appel incident, il faut donc, mais il

suffit que l'appel principal dirigé contre elle soit recevable en ce sens qu'un lien d'ins-

tance a dû exister entre ces parties au premier degré : elles doivent avoir conclu l'une

contre l'autre.

Donc si par surcroît de précautions, l'appelant dirige son appel contre toutes les partiesde première instance -

y compris celles qui n'étaient pas ses adversaires, c'est-à-dire contre lesquelles il n'a pas conclu - ces parties

sont irrégulièrement intimées. Elles sont simplement « en cause » et ne peuvent, partant, pas interjeter appel

incident.

304. Exemple :

En première instance

A maître de l'ouvrage cite

B entrepreneur qui cite

C sous-traitant

A ne conclut que contre B

B conclut contre A et C

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B perd à 90 %

C est condamné à le garantir

A perd à 10 %

En appel

C interjette appel et vise dans sa requête A et B

A est irrégulièrement intimé : il ne peut pas former appel incident, mais

seulement appel principal, et ce éventuellement par conclusions (contre les

autres parties déjà appelées à la cause) mais dans le délai d'un mois si le

jugement lui a été signifié.

b) le sujet passif de l’appel incident

305. L'appel incident peut être formé « contre toutes parties en cause devant le juge

d'appel », peu importe la nature ou la régularité de cette mise à la cause; bref, il n'est pas

exigé que le sujet passif de l'appel incident soit effectivement intimé, il suffit qu'il soit mis à la cause même si

aucun appel principal n'est dirigé contre lui.

Tel est le cas d'une partie appelée en déclaration d'arrêt commun, d'une partie contre laquelle est dirigé un

appel principal irrecevable ou d'une partie mise à la cause en raison du caractère indivisible du litige (en vertu

de l’article 1053, alinéa 2, du Code judiciaire).

306. Exemple : cfr. ci-dessus : A peut être le sujet passif d'un appel incident formé par B

qui peut être, lui, sujet actif d'un appel incident, puisqu'il est correctement intimé par C, et

qu'il était l'adversaire de A en première instance.

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c) recevabilité de l’appel incident d’une partie intimée sur incident

307. Lorsqu'une partie qui jusqu'alors était seulement mise à la cause devient le sujet passif d'un appel

incident, elle peut à son tour introduire un appel incident contre un adversaire de première instance présent à

la cause en degré d'appel.

C.- Autonomie et dépendance de l’appel incident

308. L'appel incident est recevable à tout moment (même après l'écoulement des délais

légaux de l'appel principal et ce jusqu'à la clôture des débats) même si son auteur a

signifié le jugement sans réserve ou s'il y a acquiescé avant sa signification (article 1054,

alinéa 1er, du Code judiciaire); toutefois, il ne pourra être admis si l'appel principal est

déclaré nul ou tardif (article 1054, alinéa 2, du Code judiciaire).Cette restriction est de stricte interprétation; elle ne concerne que la nullité ou la tardiveté de l'appel mais non

l'irrecevabilité de celui-ci; il en résulte cette conséquence que si l'appel principal est irrecevable parce

qu'interjeté contre une partie qui n'avait pas qualité pour être intimée, sa mise à la cause suffit pour qu'elle soit

intimée sur incident par une partie à laquelle elle était opposée en première instance.

309. La reconstitution en appel, par voie d'appel incident, du litige de première instance est techniquement

impossible lorsque le sujet passif n'est pas présent à la cause devant le juge d'appel ou lorsque la partie

présente à la cause en degré d’appel n'ayant pas la qualité d'intimé (sur appel principal ou incident), elle ne

peut formaliser un appel incident.

Compte tenu de l'article 1054 du Code judiciaire, il existe donc des hypothèses où l'appel principal (formé

suivant les cas par exploit, par requête ou par conclusions) demeure indispensable.

SECTION VI - EFFETS DE L’APPEL

A.- Effet suspensif

310. Sous réserve de certaines exceptions, la signification ou la notification d'un acte

d'appel a pour premier effet de suspendre l'exécution du jugement attaqué (article 1397

du Code judiciaire).

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Cet effet suspensif connaît des exceptions :

1° Restrictions

311. Certains jugements peuvent être exécutés, nonobstant le fait qu'ils soient frappés

d'appel c'est-à-dire les cas où il y a lieu à exécution provisoire, soit que le jugement soit

exécutoire par provision nonobstant appel ou opposition, soit que la loi précise que

l'appel n'est pas suspensif (article 1400 du Code judiciaire).

Sont exécutoires de plein droit, nonobstant appel, les décisions du juge des saisies, les

ordonnances de référé (article 1039 du Code judiciaire), les ordonnances rendues sur

requête unilatérale (article 1028 du Code judiciaire), les jugements d'instruction (article

1496 du Code judiciaire), les décisions du président du tribunal de commerce en cas

d'action en cessation (article 100 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du

commerce).

2° Extensions

312. Dans certains cas, le délai d'appel est à lui seul suspensif : jugement qui ordonne

ou impose à un tiers une mainlevée, une radiation hypothécaire un paiement ou une

prestation (article 1388, alinéa 1er, du Code judiciaire).

313. Il en va de même en ce qui concerne les jugements portant condamnation à une

somme d'argent, à moins que le jugement n'en ait disposé autrement et ce, sous réserve

du droit de saisir conservatoirement (articles 1414 et 1495, alinéa 2, du Code judiciaire).

314. Dans certains cas, non seulement le délai d'appel est suspensif, mais le juge ne

peut jamais ordonner l'exécution provisoire. Il en est ainsi en matière de divorce, de

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séparation de corps, d'opposition à mariage, de nullité de mariage (article 1399 du Code

judiciaire), d'adoption, d'interdiction judiciaire (article 1251 du Code judiciaire).

B.- Effet relatif

315. L'appel ne profite qu'à celui qui a exercé la voie de recours.

Ainsi :

- lorsqu'il y a plusieurs parties dans l'instance, défendant les mêmes intérêts ou

intérêts connexes, l'appel formé par l'une des parties ne profite qu'à elle seule. De

même, l'acquiescement d'une partie n'interdit pas à une autre d'interjeter appel.

Il n'est dérogé à ce principe que lorsque le litige est indivisible : l'appel doit être

dirigé, à peine d'irrecevabilité, contre toutes les parties dont l'intérêt est opposé à

celui de l'appelant (article 1053, alinéa 1er, du Code judiciaire). En outre,

l'appelant doit mettre en cause les autres parties non appelantes mais déjà

intimées ou appelées, dans les délais ordinaires de l'appel et au plus tard avant la

clôture des débats (article 1053, alinéa 2, du Code judiciaire). Il s'agit de

l'indivisibilité au sens de l'article 31 du Code judiciaire.

- Dans les cas où l'appelant avait plusieurs adversaires en première instance,

l'appel n'a d'effet qu'à l'encontre de la partie à laquelle il a été formé. Par exemple,

l'appel interjeté contre un débiteur solidaire n'a pas d'effet contre les autres codébiteurs : il faut

former le recours contre chacun d'eux dans le délai légal.

C.- Effet dévolutif

1° Notion

316. L'acte d'appel opère la saisine du juge supérieur. Lorsqu'il est libellé en termes

généraux, il remet en question devant celui-ci, dans les limites de l’acte d’appel, tout le

litige qui avait été soumis au magistrat du premier degré, et ce, même si certaines

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questions n’avaient pas encore été tranchées par le premier juge : c'est ce mécanisme

que désigne l'expression « effet dévolutif ».

Cet effet dévolutif est la suite logique du dessaisissement du premier juge, qui résulte du prononcé de son

jugement.

Rappelons que dès l'introduction du recours, ce premier juge ne peut plus interpréter sa décision, procéder à

la rectification d'une erreur matérielle ou modifier une disposition provisoire pour l'adapter à de nouvelles

circonstances.

2° L'article 1068 du Code judiciaire : l'effet dévolutif total

317. En vertu de l'article 1068, alinéa 1er, du Code judiciaire, « tout appel d'un

jugement définitif ou d'avant dire droit saisit du fond du litige le juge d'appel ».

L'effet dévolutif joue même lorsque l'appel est dirigé contre un jugement définitif sur

incident ou contre un jugement avant dire droit : pareil appel oblige les magistrats d'appel

à statuer au fond, le cas échéant donc au-delà de ce qui a été jugé en première instance. La juridiction supérieure est saisie de plein droit de toutes les questions en litige, de la totalité de la

contestation, même si le premier ne s’était pas encore prononcé sur ces contestations parce qu’il avait

ordonné une mesure avant dire droit ou parce qu’il avait préalablement réglé un incident par la voie d’un

jugement interlocutoire.

L'application du principe est donc susceptible d'engendrer des exceptions au double

degré de juridiction.

318. L'article 1068 conduit à l'application de différentes règles qui lui sont corrélatives:

1° Lorsque le juge d'appel doit statuer au fond alors que les parties n'avaient pas encore conclu en

première instance, l'affaire est renvoyée à une audience ultérieure pour être instruite normalement

(article 1071 du Code judiciaire).

Si par contre les conclusions avaient été prises en première instance, le juge d'appel statue

immédiatement, sans remise ni nouvelles conclusions108. Cette règle est toutefois d’application peu

108 Cass., 24 juin 1982, Pas., I, 1248.

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fréquente.

2° En cas d'appel d'un jugement « mixte » (qui, par exemple, statue sur le principe d’un partage de

responsabilité et ordonne une expertise pour déterminer le montant du dommage), si le bien fondé de

la mesure d'instruction n'est contesté par aucune des parties, le juge d'appel peut réserver sa

décision jusqu'à ce que les mesures d'instruction ordonnées avant-dire droit par le premier juge aient

été exécutées (article 1072, alinéa 1er, du Code judiciaire), tout comme lorsque le juge d'appel

ordonne lui-même la mesure d'instruction.

Le juge d’appel peut, dans ces cas, décider que l’exécution des mesures d’instruction appartient au

premier juge109 ou au juge d’appel (article 1072, alinéa 2, du Code judiciaire).

Cette disposition permettra, dans l’exemple précité, au juge d'appel de ne statuer que par un seul

arrêt à la fois sur le partage de responsabilités et sur le montant des dommages et intérêts.

109 Voy. par exemple, Cass., 29 juin 1978, Pas., I, 1240 à propos de la tenue d’enquêtes par le

premier juge.

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3° Exception

319. L'effet dévolutif tel qu'il est conçu par le Code judiciaire peut faire craindre qu'une

partie interjette appel d'un jugement avant dire droit ou sur incident en vue de soumettre

directement le fond du litige à la juridiction supérieure.

C'est pourquoi le Code judiciaire prévoit une exception à la règle de l'effet dévolutif

complet : lorsque le premier juge a ordonné une mesure d'instruction, et que cette

mesure est confirmée, même partiellement, le juge d'appel est tenu de renvoyer l'affaire

devant le magistrat de première instance.

Réciproquement, il n'y aura pas renvoi au premier juge chaque fois que la juridiction

d'appel infirme le jugement entrepris qui avait estimé qu'une mesure d'instruction était

nécessaire ou lorsqu’elle ordonne une mesure différente.

320. Une controverse a longtemps opposé la doctrine et la Cour de cassation sur le

point de savoir si l'effet dévolutif s'appliquait ou non en cas de confirmation d'un jugement

« mixte », c'est-à-dire d'un jugement contenant à la fois une disposition définitive et une

mesure d'instruction.

Par un arrêt du 24 décembre 1987110, la Cour de cassation qui jusqu'alors estimait que

l'effet dévolutif ne jouait pas et qu'il y avait lieu à renvoi devant le premier juge a décidé

que « par l'effet dévolutif de l'appel, le juge d'appel est, dans les limites de l'appel formé

par les parties, saisi du jugement de l'ensemble de la cause; cet effet n'est limité que par

la décision du juge d'appel qui confirme, même partiellement, une mesure d'instruction

ordonnée par le premier juge; dès lors, pour autant que le jugement de la demande ne

se fonde pas sur l'appréciation des résultats de la mesure d'instruction dont le premier

juge est appelé à connaître, le juge d'appel a le pouvoir de prendre une décision

définitive ».

110 Cass., 24 novembre 1987, R.C.J.B., 1989, p. 517, note J. VAN COMPERNOLLE.

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Dans les faits ayant donné lieu au prononcé de cet arrêt, le demandeur originaire avait effectué pour la

société défenderesse, de 1971 à 1975, des travaux de comptabilité pour lesquels lui restaient dus des

honoraires. L'obligation de les payer n'était pas contestée dans son principe. Le montant seul était en

discussion, la défenderesse ayant estimé la somme réclamée excessive.

Le premier juge, avant de statuer définitivement, avait désigné un expert chargé de donner un avis sur le

montant des honoraires. Après avoir relevé que la demanderesse ne contestait pas devoir les honoraires

afférents aux années 1971 et 1972, la cour d'appel de Liège avait accordé de ce chef au demandeur

originaire un montant à titre provisionnel, en confirmant pour le surplus la mesure d'expertise ordonnée par le

premier juge (la cause lui étant renvoyée à cette fin). Rejetant le pourvoi pris notamment de la violation de

l'article 1068 du Code judiciaire, la Cour de cassation décide que, tout en confirmant une mesure d'instruction

ordonnée par le premier juge, le juge d'appel avait en l'espèce le pouvoir de rendre une décision définitive au

sujet des chefs de demande qui, ne donnant pas lieu à contestation, n'étaient point tributaires desrésultats de

l'expertise.

321. La Cour de cassation confirme dans cet arrêt l'enseignement de principe fixé par son arrêt du 13

janvier 1972111 par lequel elle avait décidé que l'appel d'un jugement avant dire droit ne saisit pas le juge

d'appel du fond du litige lorsque ce dernier confirme la mesure d'instruction ordonnée par le premier

jugement même si le jugement entrepris comprend en outre d'autres dispositions et notamment des

dispositions définitives.

Elle nuance cependant cet enseignement en considérant que si une demande comporte plusieurs chefs, le

renvoi au premier juge, en cas de confirmation d'une mesure d'instruction, ne s'impose que pour les seuls

chefs de demande directement liés au résultat de cette mesure. En revanche, le juge d'appel est

valablement saisi du fond en ce qui concerne les chefs de demande dont la solution n'est point tributaire des

résultats de la mesure d'instruction confirmée.

SECTION VII - APPEL D’UNE PROCEDURE SUR REQUETE UNILATERALE

322. Lorsque le requérant s'est vu refuser la mesure unilatérale qu'il sollicitait, le seul

recours qui lui est ouvert est l'appel. Celui-ci est formé par requête unilatérale, conforme

aux dispositions de l'article 1026 du Code judiciaire et déposée au greffe de la juridiction

d'appel dans le mois de la notification de la requête (article 1031 du Code judiciaire).

111 Cass., 13 janvier 1972, Pas., I, 463.

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SECTION VIII - APPEL DANS LA PROCEDURE DE REFERE

323. On rappelle que le délai d'appel est de un mois et qu'il prend cours à dater de la

signification de l'ordonnance, conformément au droit commun.

Le délai de comparution devant la cour est le délai applicable en matière de référé c'est-

à-dire deux jours.

CHAPITRE IV - LE POURVOI EN CASSATION

SECTION I - GENERALITES

324. La Cour de cassation est chargée d'une mission de contrôle de la légalité des

décisions des juges et de coordination de la jurisprudence.

Elle est saisie par un pourvoi et ne se prononce pas sur les faits de la cause, qui sont

souverainement appréciés par les juges du fond.

Après cassation, elle doit ordonner le renvoi à la cour ou au tribunal compétent pour en

connaître, c'est-à-dire à une juridiction du même degré que celle qui avait rendu la

décision cassée (article 1110 du Code judiciaire).

Bien que ne connaissant pas des faits, la Cour peut vérifier si le juge du fond a tiré de

ceux-ci les conséquences juridiques qu'ils impliquent (par exemple, elle pourra vérifier si

la qualification juridique que leur a donnée le juge du fond est correcte).

En matière civile, la Cour de cassation doit limiter son examen aux questions de droit

dont elle est régulièrement saisie par le demandeur en cassation et elle ne peut soulever

d'office même des moyens d'ordre public qui pourraient justifier la mise à néant de la

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décision attaquée; par contre, un moyen d'ordre public peut toujours être invoqué par les

parties, même pour la première fois devant la Cour de cassation.

Le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire, qui ouvre une instance

nouvelle et distincte, qui ne constitue donc pas la suite naturelle du procès intenté au

fond.

SECTION II - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE POURVOI EN CASSATION

325. Selon l'article 608 du Code judiciaire, seuls les jugements et arrêts rendus en

dernier ressort peuvent faire l'objet d'un pourvoi en cassation. Les décisions

susceptibles d'appel ne peuvent faire l'objet d'un pourvoi, alors même que le délai d'appel

serait expiré.

Tous les jugements et arrêts, définitifs ou non, sont susceptibles de pourvoi, sous cette réserve que le recours

en cassation contre un jugement d'avant dire droit n'est ouvert qu'après le prononcé du jugement définitif. On

peut se pourvoir contre un jugement ou arrêt par défaut contre lequel on a négligé de faire opposition, pourvu

qu'il soit en dernier ressort et définitif, sur le fond ou sur incident (article 1076 du Code judiciaire).

Les sentences arbitrales ne sont pas susceptibles de pourvoi (article 1704 du Code judiciaire).

SECTION III - PARTIES A L’INSTANCE

326. Peuvent se pourvoir en cassation les personnes qui ont qualité et intérêt.

Dans la conception traditionnelle, peut se pourvoir en cassation toute partie qui est demeurée à la cause, à

quelque titre que ce soit et a contesté jusqu'au bout (c'est-à-dire, le cas échéant, jusqu'en degré d'appel) les

prétentions d'une partie adverse.

En ce qui concerne l'intérêt, nous renvoyons auxprincipes généraux. Par exemple, une partie est irrecevable

à se pourvoir en cassation si elle a obtenu gain de cause, ou si la décision entreprise reste légalement justifiée

par des motifs non attaqués par le pourvoi.

Le pourvoi ne peut être dirigé que contre une partie qui, devant le juge du fond a été l'adversaire du

demandeur en cassation et au bénéfice de laquelle la décision attaquée a été rendue.

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Sur l'indivisibilité au niveau de l'instance en cassation, on consultera l'article 1084 du Code judiciaire qui

reproduit le mécanisme prévu par l’article 1053 du Code judiciaire, déjà étudié à propos de l’appel.

SECTION IV - DELAI

327. Hormis les cas où la loi établit un délai plus court, par exemple en matière de

divorce pour désunion irrémédiable (article 1274 du Code judiciaire : mois à dater de la

prononciation de l’arrêt), le délai pour se pourvoir en cassation est de trois mois à partir

de la signification de la décision (article 1073, alinéa 1er, du Code judiciaire).

Ce délai est susceptible de majoration conformément à l'article 55 du Code judiciaire.

Le délai ne court pas contre la partie qui a fait procéder à la signification.

S'il n'y a pas signification, le délai est ouvert pendant les délais de prescription ordinaires.

En ce qui concerne les arrêts et les jugements en dernier ressort rendus par défaut, le délaine court à l'égard

du défaillant qu'à l'échéance du délai accordé pour former opposition (article 1076 du Code judiciaire). Un

pourvoi tardif est déclaré irrecevable, même d'office (articles 1078 et 1160 et suivants du Code judiciaire).

Seule la force majeure, strictement définie, pourrait suspendre le délai.

SECTION V - EFFETS DU POURVOI EN CASSATION

A.- Absence d'effet suspensif

328. Sauf dans les cas exceptionnels prévus par la loi (exemple : articles 1274 et 1302

du Code judiciaire en matière de divorce), ni le pourvoi en cassation, ni le délai de

pourvoi, n'ont un effet suspensif de la force exécutoire de la décision attaquée (article

1118 du Code judiciaire).La partie qui a obtenu cette dernière peut donc continuer ou commencer l'exécution pendant le délai et même

après le dépôt du pourvoi, sans que la Cour de cassation ait le droit d'ordonner la surséance.

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Le cantonnement n'est pas autorisé.

B.- Effet dévolutif limité

329. Le pourvoi en cassation ne saisit pas la Cour de l'intégralité du procès tel qu'il

s'est déroulé devant les premiers juges : elle ne peut que vérifier l'exacte application de

la loi. On l'a déjà souligné, le contrôle ne s'exerce guère donc que sur les moyens qui lui

sont soumis.

Les demandes nouvelles ne sont pas recevables devant la Cour de cassation. Les moyens nouveaux non

plus, sauf lorsqu'ils n'auraient pu être invoqués auparavant (par exemple une contradiction dans les motifs),

ou s'ils sont tirés du jugement ou de l'arrêt lui-même.

SECTION VI - LA PROCEDURE

330. Par rapport à la procédure du droit commun, la procédure de cassation comporte trois

caractéristiques : tous les délais imposés aux parties sont prévus à peine de déchéance, la fixation a lieu

d'office et tous les arrêts sont réputés contradictoires.

L'instance en cassation est introduite par un pourvoi, qui est en fait une requête qui, en matière civile et

commerciale, doit, à peine d'irrecevabilité, être signée par un avocat à la Cour de cassation.

Le pourvoi est signifié à la partie contre laquelle il est dirigé et est ensuite déposé au greffe de la Cour.

331. Le pourvoi contient l'exposé des moyens de la partie demanderesse, ses conclusions et l'indication

des dispositions légales dont la violation est invoquée, le tout à peine de nullité (articles 1079 et 1080 du Code

judiciaire).

Le pourvoi doit à peine de nullité être déposé au greffe dans les 15 jours de sa signification.

L'affaire est alors inscrite au rôle général.

Lorsque deux parties forment un pourvoi contre la même décision, chacune d'elle est tenue d'observer les

formalités et les délais prescrits. La jonction des procédures a lieu d'office.

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332. La réponse au pourvoi se fait selon le mode prescrit par l'article 1079 du Code judiciaire. Le

"mémoire en réponse" du défendeur doit être signé par un avocat à la Cour de cassation et signifié à l'avocat

de la partie adverse.

Le délai entre la signification de la requête introductive et le dépôt au greffe de la réponse est de trois mois, à

peine de forclusion. Le Code ne prévoit pas la possibilité d'introduire un pourvoi incident : s'il avait des griefs à

faire valoir contre la décision attaquée, le défendeur en cassation aurait dû prendre l'initiative du pourvoi.

333. Si le défendeur oppose au pourvoi une fin de non recevoir, le demandeur pourra déposer au greffe,

dans le mois de la signification du mémoire du défendeur, un "mémoire en réplique" quicontient sa réponse à

ladite fin de non recevoir.

Le ministère public peut aussi opposer au pourvoi une fin de non recevoir déduite de la méconnaissance d'un

règle d'ordre public, auquel cas les avocats des parties en seront avisés par lettre missive et pourront plaider

sur l'admission du pourvoi après l'audition du ministère public (article 1097 du Code judiciaire).

L'affaire est en état dès l'expiration des délais fixés par les articles 1093 et 1094 du Code judiciaire et la

procédure se poursuit d'office. Le premier président de la Cour désigne un conseiller rapporteur qui, comme

son nom l'indique, fera rapport sur l'affaire, après quoi le dossier sera transmis via le greffe au parquet

général.

334. Le ministère public joue en effet un rôle important dans la procédure en cassation: son avis, rédigé

sous forme de conclusions, y est obligatoire.

La fixation a lieu d'office.

A l'audience, on entend successivement le rapport du conseiller, "les plaidoiries" des avocats, puis les

conclusions du ministère public. En pratique, les avocats ne plaident pas et se réfèrent aux actes qu'ils ont

rédigés. La procédure est donc essentiellement écrite.

335. Depuis l’arrêt “Vermeulen” du 20 février 1996112 de la Cour européenne des droits de l’homme, les

parties avaient la possibilité de répondre à l’audience aux conclusions prises par le magistrat du ministère

public, avant la clôture de l’audience.

L’article 1107 du Code judiciaire prévoit, depuis la loi du 14 novembre 2000, la possibilité pour les parties de

112 C.E.D.H., 20 février 1996, J.L.M.B., 1996, 904.

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déposer une note écrite en réplique aux conclusions du ministère public ou d’y répliquer verbalement.

336. L'arrêt est généralement déjà prononcé le jour même de l’audience.

Tous les arrêts de la Cour de cassation sont réputés contradictoires. La Cour juge tant en l'absence qu'en

présence des avocats et des parties (articles 1108 et 1113 du Code judiciaire).

SECTION VII - EFFETS DES ARRETS DE LA COUR DE CASSATION

337. La Cour de cassation peut soit rejeter le pourvoi, soit casser. Dans ce dernier cas,

en matière civile, le renvoi est ordonné.

338. Les arrêts de rejet peuvent déclarer un pourvoi nul ou irrecevable, prononcer la

déchéance du demandeur, ou rejeter tous les moyens du pourvoi.

Ces arrêts ne sont susceptibles d'aucun recours.

La décision qui avait été attaquée devient alors irrévocable.

339. Les arrêts de cassation remettent les parties dans l'état où elles étaient avant la

décision attaquée.La cassation entraîne la mise à néant des suites de la décision, en ce compris son exécution éventuelle : celui

qui avait entamé celle-ci doit restituer, même si l'arrêt de la Cour de cassation ne le dit pas expressément. Il

suffit que l'arrêt soit signifié, conformément à l'article 1115 du Code judiciaire113.

340. Comme il a déjà été dit, le renvoi a lieu devant une juridiction du même rang que

celle qui a rendu la décision cassée.

Le juge de renvoi n'est pas lié par l'arrêt de cassation : une nouvelle instance

recommence, au cours de laquelle les parties pourront développer tous moyens,

introduire des demandes nouvelles, additionnelles et reconventionnelles.

113 Cass., 15 février 1973, Pas., I, 570.

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Pour introduire l'instance après cassation, l'arrêt de cassation doit être signifié à la partie adverse, par exploit

d'huissier comportant citation à comparaître devant la juridiction de renvoi où la procédure sera suivie selon

les règles ordinaires.

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341. En principe, on peut se pourvoir en cassation sans limite, pour autant que les moyens invoqués soient

différents.

Si le moyen invoqué est identique à celui qui avait déjà donné lieu à cassation, l'article 1119 du Code judiciaire

prévoit que l'examen de ce moyen relève des chambres réunies de la Cour, lorsque l'arrêt rendu est

inconciliable avec l'arrêt de cassation.

Lorsqu'une juridiction de renvoi est saisie par un arrêt prononcé par la Cour de cassation statuant chambres

réunies, elle doit se conformer à la décision de la Cour sur le point de droit jugé sur second pourvoi (article

1120 du Code judiciaire).

CHAPITRE V - LA TIERCE OPPOSITION

SECTION I - NOTION

342. La tierce opposition est la voie de recours extraordinaire réservée aux tiers pour

attaquer une décision qui préjudicie à leurs droits.

Est tiers celui qui n'a pas été appelé ou qui n'est pas intervenu à la cause, en la même

qualité que celle dont il entend se prévaloir pour justifier l'intentement du recours (article

1122 du Code judiciaire).

Rappelons que l'existence de cette voie de recours est liée au fait que l'autorité de chose jugée n'a d'effet

qu'entre les parties : un tiers, auquel le contenu d'une décision porte préjudice - par exemple en ce qu'elle va

le déforcer dans un procès qu'il doit lui-même soutenir contre l'une des parties au litige originaire - peut donc

solliciter la rétractation de cette décision en ce qu'elle lui fait grief.

Le domaine de prédilection de la tierce opposition est la procédure sur requête unilatérale: le tiers préjudicié

par la décision prise sur requête - par exemple une autorisation de saisir conservatoirement - bénéficie de

cette voie de recours.

SECTION II - CONDITIONS DE RECEVABILITE

343. Le tiers opposant doit n'avoir été ni partie, ni représenté, ni être intervenu en la

même qualité, devant le juge qui a prononcé la décision dont il demande la rétractation.

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La simple connaissance de l'existence du litige ne constitue évidemment pas une cause

d'irrecevabilité du recours.

344. Le tiers doit être préjudicié par la décision, il doit avoir intérêt à ce qu'elle soit

anéantie : il faut, mais il suffit, qu'un préjudice puisse résulter pour lui de la décision en

question.

345. L'article 1122 du Code judiciaire, au texte duquel il est renvoyé, énumère de manière limitative ceux

qui, sauf fraude ou parfois existence d'un droit propre, sont liés par ce que les parties ont fait et ne peuvent,

partant, exercer la tierce opposition.

SECTION III - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE TIERCE OPPOSITION

346. La tierce opposition est ouverte contre toutes les décisions, même provisoires ou

conservatoires.

Seuls les arrêts de la Cour de cassation y échappent (article 1123 du Code judiciaire).

SECTION IV - CARACTERE FACULTATIF

347. La tierce opposition est facultative en ce sens que la personne intéressée à former

le recours conserve tous ses autres droits, actions et exceptions, si elle ne l'exerce pas.

Cela signifie que le tiers n'est pas obligé de l'intenter à l'égard d'une décision dont il s'aperçoit qu'elle

préjudicie à ses droits. Si celle-ci lui est opposée, il pourra néanmoins la combattre par des moyens

indépendants114.

114 Cass., 16 octobre 1981, Pas., 1982, I, 245.

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SECTION V - PROCEDURE

348. La tierce opposition est principale ou incidente.

La tierce opposition principale est introduite par "une citation donnée à toutes les parties devant le juge qui a

rendu la décision attaquée" (article 1125, alinéa 1er, du Code judiciaire).

La tierce opposition incidente est formée par conclusions prises devant le juge saisi d'une contestation, s’il est

de rang égal ou supérieur à celui qui a rendu la décision attaquée, "pour autant que toutes les parties en

présence lors de celle-ci soient en cause" (article 1125, alinéa 2, du Code judiciaire).

Ce dernier cas suppose donc un litige auquel le tiers à la première décision fait partie, litige au cours duquel

celle-ci lui est opposée. La juridiction saisie de la deuxième contestation doit être d'un rang égal ou supérieur

à celle qui avait été saisie de la première, pour éviter qu'un juge de première instance ne puisse rétracter une

décision rendue en appel.

349. Si le tiers décide d'introduire son recours par voie d'action principale - c'est-à-dire d'en faire une

instance distincte de celle au cours de laquelle la décision qui préjudicie à ses droits est produite - , le juge

saisi de cette dernière contestation peut surseoir à statuer (article 1126 du Code judiciaire).

Il peut aussi passer outre et statuer sans attendre que la tierce opposition soit vidée. En cas de recours

incident, le tribunal apprécie s'il convient de statuer par un seul jugement sur l'ensemble des litiges, ou si

l'intérêt d'une bonne justice requiert de juger la demande initiale sans attendre que la tierce opposition ne soit

en état d'être jugée115.

115 Voy. pour un exemple, Bruxelles, 27 octobre 1998, A.J.T., 1998-99, p. 1073.

SECTION VI - DELAI

350. La tierce opposition se prescrit par 30 ans. Elle peut être formée aussi longtemps

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que le droit d'exécuter le jugement litigieux n'est pas prescrit (article 1128 du Code

judiciaire).

351. Lorsque le jugement a été signifié au tiers, il ne dispose plus que de trois mois à

dater de cette formalité pour introduire son recours.

352. Le délai n'est que d'un mois lorsque le recours est dirigé contre une ordonnance

sur requête unilatérale (article 1034 du Code judiciaire).

SECTION VII - EFFETS DE LA TIERCE OPPOSITION

353. La juridiction qui accueille la tierce opposition rétracte en tout ou en partie la

décision attaquée à l'égard du tiers seulement. L'effet du recours est donc relatif. Le

jugement attaqué subsiste entre les parties à l'instance initiale. Il n'en est autrement

qu'en cas d'indivisibilité (article 1130, alinéa 2, du Code judiciaire).La question de savoir si la tierce opposition a un effet dévolutif est controversée.

354. La tierce opposition comme on l'a vu a un effet suspensif facultatif : le juge devant lequel la décision

attaquée par la tierce opposition est produite peut surseoir, mais il peut passer outre.

Toutefois, lorsque le titulaire du droit consacré par le jugement litigieuxen poursuit exécution, le juge des sai-

sies, sur citation du tiers opposant, peut suspendre à titre provisoire, en tout ou en partie, l'exécution de la

décision attaquée (article 1127).

SECTION VIII - VOIES DE RECOURS

355. Les voies de recours peuvent être exercées contre la décision rendue sur la tierce

opposition, l'appel excepté si la décision attaquée a été rendue elle-même en degré

d'appel (article 1131 du Code judiciaire).

Lorsque la décision a été rendue en dernier ressort, seul le pourvoi en cassation sera

recevable.

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CHAPITRE VI - LA REQUÊTE CIVILE

SECTION I - NOTION

356. La requête civile est une voie de recours extraordinaire, octroyée aux parties et à

leurs ayants cause pour solliciter la rétractation d'une décision passée en force de chose

jugée, que la partie demanderesse prétend avoir été rendue par erreur (article 1132 du

Code judiciaire)116.

Elle est ouverte pour un certain nombre de causes, limitativement déterminées par l'article 1133 du Code

judiciaire, dont la philosophie générale est qu'elles reposent sur une erreur de fait, non imputable au juge et

découverte postérieurement au prononcé de la décision117.

La requête civile est portée devant la juridiction qui a prononcé la décision attaquée : il s'agit d'un cas de

compétence exclusive118.

116 Cass., 26 mai 1995, Pas., I, 541; Cass., 12 novembre 1980, Pas., 1981, I, 311; Cass., 16 mai

1974, Pas., I, 961.

117 Cass., 17 février 1981, Pas., I, 668.

118 Cass., 28 juin 1978, Pas., I, 1233.

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SECTION II - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE REQUETE CIVILE

357. Toutes les décisions qui sont rendues par les juridictions civiles, et par les

juridictions répressives pour autant qu'elles ont statué sur les intérêts civils sont

susceptibles d'être attaquées par la voie de la requête civile, à la condition qu'elles soient

coulées en force de chose jugée.

Peu importe par contre que la décision soit encore susceptible de pourvoi.

SECTION III - CAUSES DE REQUETE CIVILE

358. Ce sont :

1° le dol personnel de la partie (adverse).

Il s'agit des manoeuvres frauduleuses pratiquées en vue d'obtenir une décision favorable en trompant

le juge.

Elle doivent être le fait de la partie, de son mandataire, de personnes dont elle répond, ou d'un tiers

complice et avoir déterminé le juge à statuer comme il l’a fait.

Le dol personnel de la partie peut, par exemple, résulter de conclusions mensongères prises par son

avocat, si celui-ci n'a pas été désavoué. On rappelle en effet que l'avocat, étant le mandataire de son

client, est censé ne reproduire dans ses conclusions que les propres arguments de celui-ci.

2° La rétention, par une partie, de pièces décisives recouvrées après la décision.Il faut que la rétention soit le fait de la partie qui gagne le procès et, selon la doctrine récente, il suffit

que la rétention ait été involontaire, pour autant que la pièce ait eu une influence décisive sur la

décision du juge.

3° L'incompatibilité des décisions rendues sur le même objet et sur la même cause,

entre les mêmes parties, agissant en même qualité.

4° Lorsqu'il a été jugé sur pièces, témoignages, rapport d'expert ou serment reconnus

ou déclarés faux depuis la décision.Il faut donc que trois conditions soient réunies :

- que les éléments de preuve faux aient motivé le jugement;

- que ces éléments de preuves aient été reconnus ou déclarés faux;

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- que l'établissement du caractère faux ait eu lieu après le jugement.

L'extension aux faux serment, faux témoignage ou fausse déclaration d'expert résulte des travaux

préparatoires.

5° Le cas où la décision est fondée sur un jugement ou arrêt rendu en matière

répressive qui a ensuite été annulé.

6° Le cas où la décision est fondée sur un acte de procédure accompli au nom d'une

personne sans qu'elle ait, soit donné mandat exprès ou tacite à cette fin, soit

ratifié ou confirmé ce qui a été fait.La possibilité d'introduire une requête civile dans cette hypothèse ajoute donc à la possibilité de

désavouer le mandataire.

La procédure de désaveu ne permet d'obtenir que l'annulation des actes de procédure accomplis

sans mandat (article 848 du Code judiciaire), tandis que la requête civile permet d'obtenir l'annulation

du jugement rendu dans le même cas.

Lorsque la requête civile est fondée sur cette base, le mandataire désavoué doit être mis en cause.

359. Remarque

L'article 1138 du Code judiciaire précise qu'une série d'hypothèses ne donnent pas lieu à une requête civile

mais seulement à pourvoi en cassation pour contravention à la loi.

Cette disposition provient de ce qu'auparavant la confusion entre les causes de requête civile et celles de

pourvoi était très fréquente.

SECTION IV - FORME ET DELAI

360. Comme elle remet en cause la chose jugée, la requête civile est organisée avec circonspection par le

Code judiciaire.

A peine de nullité, la requête doit être signée par trois avocats dont deux au moins sont inscrits depuis plus de

20 ans au barreau et doit contenir tous les moyens du requérant.

Elle est signifiée avec citation à comparaître dans les formes et délais ordinaires devant la juridiction qui a

rendu la décision attaquée.

A peine de déchéance, la requête civile doit être formée dans les six mois, à partir de la découverte de la

cause invoquée (article 1136 du Code judiciaire) mais non de la connaissance du fait dont la preuve, obtenue

plus tard, a permis cette découverte119.

119 Cass., 24 juin 1999, J.T., 1999, p. 660.

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SECTION V - EFFETS DE LA REQUETE CIVILE

361. La requête civile n'a pas d'effet suspensif puisqu'il s'agit d'une voie de recours extraordinaire (article

1137 du Code judiciaire).

La requête civile, comme la tierce opposition, est une voie de rétractation : la décision est annulée à l'égard de

la partie préjudiciée, dans la mesure où la requête civile est accueillie.

La requête civile a un effet dévolutif en ce sens que si elle est recevable et fondée, le juge sera à nouveau

saisi du fond du litige.

SECTION VI- CARACTERES DES DECISIONS RENDUES SUR LA REQUETE CIVILE

362. La décision rendue sur la requête civile est susceptible d’appel sauf lorsque la requête civile est

formée contre une décision qui n’est pas susceptible d’appel120.

Les décisions rendues en matière de requête civile sont opposables à toutes les parties en cause.

120 Cass., 14 décembre 1992, Pas., I, 1377; Cass., 24 mai 1991, Pas., I, 837.

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CHAPITRE VII - LA PRISE A PARTIE

363. La prise à partie est une action en responsabilité civile contre les magistrats,

ouverte dans les cas limitativement énoncés par l'article 1140 du Code judiciaire, qui sont

les suivants :

1° S'ils se sont rendus coupables de dol ou de fraude121, soit dans le cours de

l'instruction soit lors des jugements;

2° Si la prise à partie est expressément prononcée par la loi;

3° Si la loi déclare les juges responsables à peine de dommages et intérêts;

4° S'il y a déni de justice122.

Cette procédure, qui implique l'intervention d'un avocat à la Cour de cassation, est régie

par les articles 1142 à 1147 du Code judiciaire, au texte desquels il est renvoyé.

121 Sur ces notions, voy. Cass., 27 mars 1998, Pas., I, 410.

122 Voy. Cass., 18 janvier 1985, Pas., I, 575.

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TITRE VI - DE L’ASTREINTE

SECTION I - NOTION

364. Les articles 1385bis à 1385nonies du Code judiciaire, introduits dans celui-ci par la

loi du 31 janvier 1980, ont légalisé l'astreinte.

Il ne s'agit pas d'une modalité de l'exécution forcée, mais d'un moyen de pression destiné

à contraindre le débiteur - à l'exception, précisément, du débiteur d'une somme d'argent -

à exécuter promptement une décision judiciaire. L'astreinte est la condamnation

accessoire d'une partie à payer à la demande d'une autre partie une somme d'argent

fixée par le juge, dans la mesure où la condamnation principale ne serait pas exécutée

avant le moment où l'astreinte est encourue.

L'astreinte n'est pas une forme de dommages et intérêts destinés à réparer un préjudice.

Elle peut au contraire se cumuler avec ces derniers (article 1385bis du Code judiciaire),

car c'est une peine civile qui tend à assurer l'exécution de la condamnation principale.

SECTION II - CONDITIONS D’OCTROI DE L’ASTREINTE

365. L'astreinte ne peut être prononcée que si elle a été demandée (article 1385bis du

Code judiciaire), mais il appartient au juge d'en fixer librement le montant et les

modalités, ces dernières consistant généralement soit en la condamnation au paiement d'une somme

unique, soit à celui d'une somme déterminée par unité de temps ou par contravention à l'injonction du

magistrat, selon les cas (article 1385ter du Code judiciaire).

Ainsi, une énorme astreinte pourra-t-elle être dissuasive de la commission d'un acte déterminé, tandis qu'une

astreinte plus modique mais répétitive sera-t-elle dans d'autres cas plus appropriée.

Le juge peut aussi déterminer un montant au-delà duquel la condamnation aux astreintes cessera ses effets.

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SECTION III - CHAMP D’APPLICATION DE L’ASTREINTE

366. En vertu de l’article 1385bis du Code judiciaire, l'astreinte est exclue dans deux

domaines importants : le paiement de sommes d'argent (seules les saisies sont

applicables) et les actions en exécution de contrat de travail.

Pour le reste, l'astreinte peut assortir n'importe quel type de condamnation, notamment en matière de droit de

la famille (par exemple, un droit de visite) ou encore toute obligation de faire (à cet égard il faut, par exemple,

distinguer l'obligation de payer une somme d'argent et celle de constituer un dépôt de somme d'argent, telle

une garantie locative) et de ne pas faire.

SECTION IV - RECOUVREMENT DE L’ASTREINTE

367. L'astreinte, une fois encoure, est intégralement acquise à la partie qui a obtenu la condamnation. Elle

est directement recouvrée par l'huissier instrumentant, par les voies d'exécution ordinaires, en vertu du titre qui

la prévoit (article 1385quater du Code judiciaire) sans qu’une nouvelle décision judiciaire ne soit nécessaire123.

123 Cass., 26 juin 1987, Pas., I, 1328.

Pour qu'elle soit due, il faut et il suffit que le jugement qui l'a prononcée ait été signifié et que la condamnation

principale n'ait pas été exécutée volontairement (article 1385bis, alinéa 3, du Code judiciaire). L’astreinte ne

peut être encourue avant la signification du jugement qui l’a prononcée. En outre, le juge peut accorder au

condamné un délai pendant lequel l’astreinte ne peut être encourue.

SECTION V - REVISION DE L’ASTREINTE

368. L’astreinte a un caractère définitif en ce sens que toute procédure de liquidation

est exclue. Certaines circonstances peuvent néanmoins survenir qui sont de nature à se

répercuter directement sur le cours futur de l’astreinte.

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Il s’agit :

- de la faillite du débiteur condamné sous peine d’astreinte (article 1385sexies du Code

judiciaire);

- du décès du débiteur condamné sous astreinte (article 1385septies du Code judiciaire);

- de l’impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle, de satisfaire à la

condamnation principale (article 1385quinquies du Code judiciaire).

SECTION VI - PRESCRIPTION DE L’ASTREINTE

369. Pour éviter qu'un créancier laisse s'accumuler des astreintes, l'article 1385octies

du Code judiciaire limite la prescription de la créance d'astreinte à six mois. Le délai

court à partir du jour où l'astreinte est encourue.

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TABLE DES MATIÈRES

QUATRIÈME PARTIE - LA PROCÉDURE CIVILE .................................................................... 6TITRE I - L’INSTANCE 4

CHAPITRE I - L'INTRODUCTION DE L'INSTANCE (la phase préliminaire à l'instance et l'audience d'introduction) 5SECTION I - PRINCIPE : INTRODUCTION PAR CITATION 5

Sous-section I - Nature et sanction 5Sous-section II - Citation et signification 5Sous-section III - Le délai de citation ou de comparution 7

SECTION II - AUTRES MODES D’INTRODUCTION DE L’INSTANCE 8Sous-section I - La comparution volontaire 8Sous-section II- La requête introductive d’une instance

contradictoire 9SECTION III - LA CONCILIATION 11

Sous-section I - La tentative de conciliation facultative 12Sous-section II - La tentative de conciliation obligatoire 13

SECTION V - LA MISE AU ROLE ET LE DOSSIER DE LA PROCEDURE 13Sous-section I - Le rôle général 13

A.- Notions 13B.- Radiation du rôle 14C.- Omission du rôle général et du rôle d’audience 15

Sous-section II - Le dossier de la procédure 15SECTION VI - LA COMPARUTION ET LA REPRESENTATION DES PARTIES 16

A.- Principes 16B.- Juridictions d'exception 16C.- Juridictions du travail 16D.- Exception 17

SECTION VII - L’AUDIENCE D’INTRODUCTION 17CHAPITRE II - L'INSTRUCTION CONTRADICTOIRE (la mise en état de la

cause selon la procédure de droit commun dite 20SECTION I - LA COMMUNICATION DES PIECES 20

A.- Principe 20B.- Délais 20C.- Formes et preuve de la communication 21D.- Sanction de la non communication 21

SECTION II - LES CONCLUSIONS 22Sous-section I - Notions 22Sous-section II - L’échange des conclusions 22Sous-section III - Les délais 24

B.- La mise en état 24C.- La mise en état 25

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E.- L'article 748 du Code judiciaire 25F.- Conclusions contestant l’application des articles 747,

§2, 750, §2, et 751 du Code judiciaire 27Sous-section IV - Le juge et les conclusions 27

SECTION III - LA PROCEDURE ECRITE 28SECTION IV - L’AUDIENCE DE PLAIDOIRIES 28SECTION V - REOUVERTURE DES DEBATS 29

A.- La réouverture des débats facultative 291 A la demande d'une partie 292 Ordonnée d'office par le juge 30

B.- La réouverture des débats obligatoire 30C.- Remarques 31

SECTION VI - COMMUNICATION AU MINISTERE PUBLIC 31A.- Notions 31B.- Les causes communicables 32C.- Procédure 32D.- Possibilité de réplique des parties à l’avis du ministère

public 33CHAPITRE III - L'INSTRUCTION ET LE JUGEMENT PAR DÉFAUT 35

SECTION I - INTRODUCTION GENERALE 35Sous-section I - Notion de défaut 35Sous-section II - Rôle et importance du défaut 36

SECTION II - LA PROCEDURE PAR DEFAUT 36Sous-section I - Le défaut à l’audience d’introduction 36Sous-section II - Le défaut aux audiences ultérieures 37

A.- En cas de remise contradictoire (article 804, alinéa 1er, du Code judiciaire) 37

B.- Alors que la partie était déjà défaillante à l’audience d’introduction (article 803 du Code judiciaire) 37

C.- A la suite d’une omission du rôle (article 730) 38Sous-section III- Le défaut de plaider 38Sous-section IV - Défaut en fin d’audience et rabat du défaut 39Sous-section V - Péremption du jugement par défaut 39

A.- Notion, conditions d’application et effets 39B.- Nature 40

SECTION II - L’INSTRUCTION PAR DEFAUT - LES POUVOIRS DU JUGE STATUANT PAR DEFAUT 40Sous-section I - La thèse traditionaliste 40Sous-section II - La thèse réformatrice 41

CHAPITRE IV - LA PROCÉDURE SUR REQUÊTE UNILATÉRALE 43SECTION I - NOTION 43SECTION II - FORME ET DEPOT DE LA REQUETE 43SECTION III - INSTRUCTION DE LA DEMANDE 44SECTION IV - DECISION RENDUE SUR REQUETE 44SECTION V - RECOURS 45

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CHAPITRE V - LE JUGEMENT 46SECTION I - CONTENU 46

A.- La motivation 46B.- Mentions du jugement 47C.- Le dispositif 47D.- Divers 48E.- Signification de la décision 49

SECTION II - INTERPRETATION ET RECTIFICATION DU JUGEMENT 49A.- Interprétation 49B.- Rectification 50C.- Compétence et procédure 50D.- Délais 50

SECTION III - EFFETS DES JUGEMENTS 51A.- Extinction de l'instance 51B.- Force probante 51C.- Autorité de la chose jugée 51D.- Effets déclaratif et obligatoire 51E.- Force exécutoire 52F.- Divers 53

TITRE II - LES INCIDENTS 54CHAPITRE I - LES DEMANDES INCIDENTES 54CHAPITRE II - LA REPRISE D'INSTANCE 54

SECTION I - L’INTERRUPTION DE L’INSTANCE 54A.- Le décès d'une partie 54B.- Le changement d'état 55C.- La modification de la qualité 55D.- Remarque 55

SECTION II - EFFETS DE L’INTERRUPTION DE L’INSTANCE 55A.- La reprise d'instance volontaire 55B.- La reprise d'instance forcée 56C.- Remarques 56

CHAPITRE III - LE DÉSISTEMENT 56SECTION I - GENERALITES 56SECTION II - LE DESISTEMENT D'UN ACTE DE PROCEDURE ET LE DESISTEMENT

D'INSTANCE 57SECTION III - LE DESISTEMENT D'ACTION 59

CHAPITRE IV - LA RÉCUSATION ET LE DESSAISISSEMENT 60SECTION I - NOTIONS - DISTINCTIONS 60SECTION II - LE DESSAISISSEMENT EN MATIERE CIVILE 61

Sous-section I - Causes de dessaisissement 61Sous-section II- Procédure de dessaisissement 61

SECTION III - LA RECUSATION 63Sous-section I - Causes de récusation 63Sous-section II - Procédure de récusation 64

CHAPITRE V - LE DÉSAVEU 66

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CHAPITRE VI - LES EXCEPTIONS 67SECTION I - LES EXCEPTIONS DILATOIRES 67SECTION II - LES EXCEPTIONS PEREMPTOIRES 68

Sous-section I - Généralités 68Sous-section II - La théorie des nullités 68

A.- Les cas de nullité 68B.- Conséquences de la nullité 71C.- Les couvertures des nullités 72D.- La couverture de l'article 867 73E.- La couverture spéciale de l’article 863 du Code

judiciaire 73F.- Remarque 74

TITRE III - LES PREUVES 75CHAPITRE I - DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES 75

A.- Introduction 75B.- Règles gouvernant la charge de la preuve et la réception des

preuves en justice 75C.- Modes de preuve prévus par le Code judiciaire 77D.- Caractéristiques communes aux procédures de réception des

preuves 77CHAPITRE II - LES MESURES D’INSTRUCTION 78

SECTION I - LA PRODUCTION DE DOCUMENTS 78SECTION II - LA VERIFICATION D’ECRITURE 79SECTION III - LE FAUX CIVIL 80SECTION IV - L’ENQUETE 81

Sous-section I - Généralités 81Sous-section II - Procédure 82

A.- Le jugement autorisant ou ordonnant l’enquête 82B.- La comparution des témoins 83C.- L'audition des témoins 84D.- La clôture des enquêtes et le jugement 86E.- Le procès-verbal de l’enquête et le délai pour

demander l’enquête contraire 86Sous-section III - Les frais de l’enquête 87Sous-section IV - La validité de l'enquête et la force probante des

dépositions 87A.- Validité de l’enquête 87B.- Force probante de l’enquête 88

SECTION V - L'EXPERTISE 88Sous-section I - Généralités 88Sous-section II - Désignation de l’expert 89

A.- Principe 89B.- Compétence 89C.- Recours 90C.- Recours 90

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Sous-section III- Procédure 90A.- Acceptation de sa mission par l’expert 90B.- Récusation et remplacement de l’expert 90B.- Récusation et remplacement de l’expert 91C.- Déroulement de l’expertise 91D.- Caractère contradictoire de l’expertise 92E.- Modification et contrôle de la mission de l’expert 92F.- Respect des délais 92Sous-section IV - Le rapport d'expertise 93

A.- Les préliminaires 93B.- L'avis motivé et les conclusions 93

Sous-section V - Les frais de l’expertise 93Sous-section VI - Portée de l'avis de l'expert 94

SECTION VI - L'INTERROGATOIRE DES PARTIES 94A.- Décision ordonnant ou autorisant la comparution

personnelle des parties 94B.- Procédure 95C.- Frais de l’interrogatoire des parties 96

SECTION VII - LE SERMENT 97SECTION VIII - LA DESCENTE SUR LES LIEUX 97

A.- Le jugement ordonnant la descente sur les lieux 97B.- Procédure 98C.- Frais de la descente sur les lieux 99

SECTION IX - LE CONSTAT D’ADULTERE PAR HUISSIER DE JUSTICE 100TITRE IV - LES FRAIS ET LES DÉPENS 101

SECTION I - GENERALITES 101SECTION II - ENUMERATION DES DEPENS 102SECTION II - ENUMERATION DES DEPENS 103

A.- Le jugement ordonnant la descente sur les lieux 103A.- Le jugement ordonnant la descente sur les lieux 103A.- Le jugement ordonnant la descente sur les lieux 105A.- Le jugement ordonnant la descente sur les lieux 105

SECTION III - LIQUIDATION DES DEPENS 106TITRE V - DES VOIES DE RECOURS 107

CHAPITRE I - DISPOSITIONS GÉNÉRALES 107SECTION I - DEFINITIONS 107SECTION II - DELAIS 107SECTION III - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE RECOURS 108

A.- L'accord des parties 108B.- L'acquiescement 109

SECTION IV - DIVERS 110CHAPITRE II - L'OPPOSITION 111

SECTION I - NOTION 111SECTION II - FORMES 111SECTION III - MOTIVATION 112

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SECTION IV - DELAI 112SECTION V - 112SECTION VI - EFFETS 113

A.- Effet dévolutif 113B.- Effet relatif 113C.- Effet suspensif 113

CHAPITRE III - L'APPEL 115SECTION I - NOTIONS 115

A.- Définition et fonctions 115B.- Conditions de recevabilité de l’appel 116C.- Appel principal et appel incident 116

SECTION II - DECISIONS SUSCEPTIBLES D’APPEL 117SECTION III - DELAI ET FORMES DE L’APPEL 117

A.- Le délai d'appel 117B.- Formes de l'appel 119C.- Mentions de l'appel principal 120

SECTION IV - PROCEDURE EN DEGRE D’APPEL 120A.- Inscription au rôle 120B.- Introduction de la cause 121C.- Procédure de mise en état 121

1 Principe 1212 Exception : la procédure accélérée 121

SECTION V - L’APPEL INCIDENT 122A. - Généralités 122B.- Appel incident et reconstitution du litige en degré d'appel 123

1 Appel incident dans le procès opposant deux parties 123

2 Appel incident dans un procès à sujets multiples124

C.- Autonomie et dépendance de l’appel incident 127SECTION VI - EFFETS DE L’APPEL 127

A.- Effet suspensif 1271 Restrictions 1282 Extensions 128

B.- Effet relatif 129C.- Effet dévolutif 129

1 Notion 1292 L'article 1068 du Code judiciaire : l'effet dévolutif

total 1303 Exception 132

SECTION VII - APPEL D’UNE PROCEDURE SUR REQUETE UNILATERALE 133SECTION VIII - APPEL DANS LA PROCEDURE DE REFERE 134

CHAPITRE IV - LE POURVOI EN CASSATION 134SECTION I - GENERALITES 134SECTION II - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE POURVOI EN CASSATION 135

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SECTION III - PARTIES A L’INSTANCE 135SECTION IV - DELAI 136SECTION V - EFFETS DU POURVOI EN CASSATION 136

A.- Absence d'effet suspensif 136B.- Effet dévolutif limité 137

SECTION VI - LA PROCEDURE 137SECTION VII - EFFETS DES ARRETS DE LA COUR DE CASSATION 139

CHAPITRE V - LA TIERCE OPPOSITION 141SECTION I - NOTION 141SECTION II - CONDITIONS DE RECEVABILITE 141SECTION III - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE TIERCE OPPOSITION 142SECTION IV - CARACTERE FACULTATIF 142SECTION V - PROCEDURE 143SECTION VI - DELAI 143SECTION VII - EFFETS DE LA TIERCE OPPOSITION 144SECTION VIII - VOIES DE RECOURS 144

CHAPITRE VI - LA REQUÊTE CIVILE 146SECTION I - NOTION 146SECTION II - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE REQUETE CIVILE 147SECTION III - CAUSES DE REQUETE CIVILE 147SECTION IV - FORME ET DELAI 148SECTION V - EFFETS DE LA REQUETE CIVILE 149SECTION VI- CARACTERES DES DECISIONS RENDUES SUR LA REQUETE CIVILE149

CHAPITRE VII - LA PRISE A PARTIE 150TITRE VI - DE L’ASTREINTE 151

SECTION I - NOTION 151SECTION II - CONDITIONS D’OCTROI DE L’ASTREINTE 151SECTION III - CHAMP D’APPLICATION DE L’ASTREINTE 152SECTION IV - RECOUVREMENT DE L’ASTREINTE 152SECTION V - REVISION DE L’ASTREINTE 152SECTION VI - PRESCRIPTION DE L’ASTREINTE 153