rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 - résumé

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    Rapport surles catastrophesdans le monde

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    La Fdration internationale des Socitsde la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dsire exprimer sa gratitude auxpartenaires suivants pour le soutienquils ont apport cette publication.

    Red Crescent Society of the United Arab Emirates

    Swedish International

    Development Cooperation

    Agency

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 La faim et la malnutrition 3

    Table des matires

    Introduction 4

    Prs dun milliard de personnes souffrant de la faim sont exclues du systmealimentaire mondial. Que peut-on et que doit-on faire pour y remdier ?

    Section IChapitre 1 Un systme alimentaire mondial revoir 6

    Figure 1 O vivent ceux qui souffrent de la faim ? 10

    Chapitre 2 Des vies tronques : le dsastre de la dnutrition 11Encadr : Progression de la faim et de la malnutritiondans les pays occidentaux riches 15

    Chapitre 3 Linstabilit persistante des prix met en questionla dpendance lgard des marchs alimentaires mondiaux 16

    Figure 2 Indice FAO des prix des produits alimentaires 20012011 20

    Chapitre 4 Stabiliser les moyens dexistencegrce lagriculture et la protection sociale 21

    Encadr : le potentiel de productivit des femmes dans lagriculture 26

    Chapitre 5 Les rponses apporter linscuritalimentaire et la malnutrition dans les crises 27

    Encadr : Inondations au Pakistan : la malnutritionest en fait prsente ltat chronique 31

    Chapitre 6 Tous unis contre la faim un manifeste pour le changement 32

    Encadr : Le rle du secteur privdans la prvention de la faim et de la malnutrition 37

    Section IIRelever les dfis humanitaires venir

    menaces et opportunits 38Figure 3 Niveaux de vulnrabilitface aux changements climatiques et consquences 42

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    Prs dun milliard de personnessouffrent de faim et de malnutrition :les enjeux dun systme alimentaire

    mondial la drivePrs dun milliard de personnes sourant de la faim sont exclues du systme alimentairemondial. Que peut-on et doit-on faire pour y remdier ?

    Pendant des dcennies, les images de personnes mourant de faim ont hant les consciences. Ona moins prt attention aux millions dindividus aujourdhui prs dun milliard qui sourentchroniquement de la faim, soit prs dune personne sur sept dans le monde.

    Comment pourrait-on nier quune crise norme se droule sous nos yeux quand un monde quipourtant peut nourrir chacun de ses habitants ne le fait pas en partie parce que les ingalitsne cessent de crotre, que la terre et les produits alimentaires deviennent de simples marchandisesqui sont vendues au plus orant, violant ainsi le droit de tout un chacun des aliments nutritifsen quantit susante.

    Partout dans le monde, ce sont les pauvres, vivant en majorit dans les zones rurales mais de plusen plus dans les zones urbaines, qui sourent de la faim. Ce sont les mmes qui ne peuvent faireentendre leur voix ni ne possdent les moyens de rsister aux eets des changements climatiquesou de la monte du prix des produits alimentaires et de lnergie, aux consquences nfastes despratiques de lindustrie agroalimentaire et des tractations sur le march mondial, sans oublierlingalit des changes, au niveau tant local que national ou international. Les gouvernementsde certains pays o la faim est endmique luttent an dassurer lventail de services ncessairespour prvenir la faim et la malnutrition protection sociale, ressources adquates en eau potableet en assainissement, infrastructures, ducation, appui aux femmes et, ce qui compte le plus,emploi et autonomisation.

    Dans une large mesure, la crise alimentaire actuelle a pris le monde par surprise. Pendantquelques dcennies, le nombre des personnes sourant de la faim avait lgrement rgress. Danslagenda du dveloppement, lagriculture noccupait pas une place prpondrante. En valeurrelle, la part de l aide extrieure au dveloppement consacre lagriculture est passe de 18 %exactement dans les annes 80 moins de 4 % en 2007. Le nombre de personnes sourant dela faim ou sous-alimentes a commenc augmenter au milieu des annes 90 et est mont enche lors de la crise des prix alimentaires de 2008. Ce que disent prsent les prvisionnistesest alarmant : le nombre de victimes de la faim devrait largement dpasser le milliard dindividusalors que le prix de bon nombre de produits alimentaires de base continue daugmenter.

    Lune des cibles du premier objectif du Millnaire pour le dveloppement (OMD) est de rduirede moiti, dici 2015, le nombre de personnes sourant de la faim. Dans de nombreux pays,il y a peu despoir que cet objectif plutt modeste soit atteint sans un investissement denviron75 milliards de dollars des tats-Unis dans lagriculture et la protection sociale.

    La suralimentation est lautre facette de la situation alimentaire dans le monde. Largement plusdun milliard de personnes revenus faibles ou moyens, mais aussi hauts revenus sont obses.

    mesure que les gens modient leurs habitudes alimentaires, passant dune alimentation tra-ditionnelle une alimentation industrielle riche en calories, ils vrient sur leur propre santles eets dune consommation excessive daliments peu adapts, cest--dire en particulier desproblmes cardio-vasculaires, des diabtes et dautres maladies lies au mode de vie. Les maladiescardiaques constituent lune des dix causes principales de dcs dans le monde.

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 La faim et la malnutrition 5

    Cette dition du Rapport sur les catastrophes dans le mondemontre que les problmes de la scuritalimentaire mondiale, de la faim et de la malnutrition sont au centre de pratiquement chaquemcanisme et de chaque lment majeur du systme international, des changes internationauxaux changements climatiques, et de la raret de leau linnovation scientique.

    Nous devons nous attaquer au problme de la faim et de la malnutrition, et vite. Compte tenude laugmentation probable de la population mondiale de 3 milliards dindividus dici 2050,les experts craignent quil ny ait pas de quoi nourrir tout le monde. La faim et la malnutrition(tant la sous-alimentation que la suralimentation) constituent tout autant que nimportequelle maladie une menace pour la sant dans le monde.

    Les gouvernements nationaux doivent reconnatre le droit lalimentation en mettant en uvredes programmes ecaces de prvention de la faim. Ils doivent investir davantage dans lagricul-ture, dune manire juste, quitable et durable.

    Tant les gouvernements que les donateurs doivent promouvoir la participation des paysans locauxet reconnatre leur sagesse et leur exprience. Plus de la moiti des personnes qui se couchentchaque nuit la faim au ventre sont des femmes, et, dans de nombreux pays, la moiti au moinssont de petits paysans, trop souvent laisss pour compte et ne bnciant daucun soutien. Selon

    les estimations de rcents travaux de recherche, la productivit des petites exploitations agricolespourrait augmenter de jusqu 20 % si la discrimination entre les sexes tait radique.

    Amliorer les pratiques agricoles nest quune des solutions qui permettraient de prvenir lafaim. Des mesures de porte mondiale simposent pour remdier aux problmes fondamentaux et leur cortge de problmes annexes que sont la pauvret et lingalit, les changementsclimatiques et la baisse de rendement des rcoltes quils entranent, la dgradation des terres etla dsertication, lpuisement progressif des ressources vitales que sont leau et la terre, et laconcurrence croissante pour ces mmes ressources. De la mme faon, il faut agir durgencepour enrayer la hausse continue des prix des produits alimentaires, exacerbe par la spcula-tion, et dcourager lutilisation des terres pour la production dagrocarburants en lieu et placede produits alimentaires ainsi que lacquisition de terres dans les pays faibles revenus par desspculateurs nanciers.Des voix slveront peut-tre pour dire que tout cela relve de lutopie. Pourtant, le prsentrapport donne des exemples trs concrets de bonnes pratiques dans lagriculture et la recherche,de mouvements sociaux visant donner aux gens les moyens dagir, de lusage de nouvellestechnologies et, lchelle mondiale, de tmoignages dune approche plus rsolue pour pr-venir la faim et amliorer la nutrition. Le risque est dassister une inversion des eets de cesamliorations parce que les gouvernements, riches comme pauvres, nauront pas su lutter contreles intrts catgoriels, nauront pas fait front aux grandes menaces pesant sur le monde dansles prochaines dcennies et nauront pas su protger et rendre autonomes leurs citoyens les plusvulnrables. Une action dcisive et soutenue sera la cl dun monde libr de la faim et de la

    malnutrition. Cest faisable.

    Bekele GeletaSecrtaire gnral

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    CHAP

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    1Un systme alimentairemondial revoirBien que la plante produise susamment de nourriture pour tous ses habitants, prs dun mil-

    liard denfants, dhommes et de femmes se couchent la faim au ventre en 2011. David Nabarro,Reprsentant spcial du Secrtaire gnral des Nations Unies pour la scurit alimentaire et lanutrition, larme : la sous-alimentation dont sourent actuellement des millions dindividusest une catastrophe majeure et pourtant vitable .

    Le prsent Rapport sur les catastrophes dans le mondeanalyse les causes de la faim et de la malnu-trition et plaide pour des solutions. Celles-ci vont dun soutien plus arm aux petits agriculteurs lamlioration des rgles ladresse des spculateurs nanciers, dune agriculture soutenable lautonomisation des communauts, et de la protection sociale au renforcement des institutionsinternationales.

    Amartya Sen, prix Nobel dconomie en 1998, acrit : Une famine est le signe que des gens nont pasassez manger, non quil ny a pasassez manger .

    Aprs les famines graves qui ont svi en Afrique, laConfrence mondiale de lalimentation des NationsUnies de 1974 relevait que la crise alimentaire deces deux dernires annes a singulirement appellattention la fois sur linterdpendance de la pro-duction, du commerce, des stocks et des prix, et surltat dimprparation alarmant du monde dans son

    ensemble face aux alas mtorologiques . Cela nagure chang.

    Davantage dhabitants de la plante ont pu tre nourristandis que la population mondiale continuait daugmen-ter. Pourtant, selon lOrganisation des Nations Uniespour lalimentation et lagriculture (FAO), le nombre depersonnes sous-alimentes dans le monde en 2010 sestencore accru, atteignant 925 millions dindividus.

    Cest dans la rgion Asie-Pacique et plus particulirement dans le sous-continent indien, ainsi

    quen Afrique subsaharienne que se trouvent la majorit des victimes de la faim. La plupartvivent dans des zones rurales. Comme le dit un rapport rdig lintention du gouvernementdu Royaume-Uni, La moiti des personnes sous-alimentes dans le monde, les trois-quarts desenfants africains sourant de malnutrition et la majorit des personnes vivant dans un tat depauvret absolue se trouvent dans de petites fermes .

    Un nombre non ngligeable et en augmentation dhabitants de la plante qui sourent de lafaim vivent dans les zones urbaines et priurbaines.

    Narsammasanagari au milieudes poids cajan etdu sorgho dans laferme familiale duillage de Pastapur,dans ltat indien

    dAndhra Pradesh.e est membre de laeccan Developmentiety, qui rassemble

    des femmes aueau local. Celles-cimploient renforcer

    la souverainetimentaire et, grceaux vidos quelles

    ralisent, faireonnatre leur travail

    au monde.

    Geoff Tansey

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Un systme alimentaire mondial revoir

    Dans les pays hauts revenus, tout le monde nchappe pas la faim. Le dpartement des tats-Unis pour lAgriculture (USDA) a fait savoir quen 2010, quelque 68 milliards de dollars destats-Unis ont t dpenss dans le cadre du Programme daide la supplmentation alimentaire(coupons dalimentation) en faveur dun peu plus de 40 millions de personnes.

    Cette situation peut-elle samliorer ? Malheureusement, la tendance actuelle naugure rien debon. Le premier des objectifs du Millnaire pour le dveloppement (OMD), savoir celui derduire de moiti laproportion de la population qui vit dans une extrme pauvret et soure dela faim, a trs peu de chances dtre atteint.

    La malnutrition est de loin plus rpandue que la faim. Comme nous lexpliquons au chapitre 2,un milliard de personnes au moins sont sous-alimentes, tandis que chire stupant unmilliard et demi de personnes sont en surpoids.

    uvrer lavnement dun monde o tout un chacun mangera sa faim promet dtre une tcheardue si lon tient compte des changements climatiques, de la concurrence croissante pour les

    ressources, notamment en termes de surfaces cultivables et deau, de la situation dingalit gran-dissante entre les pays et du haut niveau persistant des dpenses publiques en matire darmement.

    Il est dicile de dire quel horizon lagriculture subira les eets des changements climatiques.Nombre de pays et de rgions semblent confronts des conditions mtorologiques nettement plusvariables et des conditions plus extrmes dont les eets se rpercutent sur la production alimentaire.

    Bon nombre de mthodes actuelles de production alimentaire font appel des sources deaudouce non durables, comme les nappes deau fossile dans la Pninsule arabique, ou des sourcesmenaces par les changements climatiques. Dautres utilisent des cours deau qui traversent desfrontires internationales et qui peuvent donc tre lorigine de litiges.

    Des solutions existent cependant, et leur nature exacte variera selon les circonstances et lesconditions rgnant dans les dirents pays.

    Lun des problmes qui se posent en Inde est le manque dintrt tmoign aux petits paysans spcialement les femmes qui sont les principaux producteurs des aliments locaux et des cralestraditionnelles telles que le millet et le sorgho. La Socit de dveloppement Deccan intervientauprs des femmes dalit(intouchables) pour les aider remettre en tat les terres pratiquementinfertiles quelles ont reues du gouvernement.

    Les problmes de la faim chronique et de la malnutrition font partie intgrante du systme ali-

    mentaire mondial daujourdhui et on ne peut y remdier quen agissant aux niveaux politique,conomique, juridique et social, par des innovations et des adaptations systmiques.

    Les aliments exotiques et les pices ont toujours t recherchs par les plus riches et les puissancesoccidentales ont refaonn une bonne partie du monde pour ladapter leurs besoins. Cest cethritage qui a prsid la mise en place des mcanismes rgissant aujourdhui la production etla commercialisation des denres alimentaires, sous la domination dun petit nombre de grandesmultinationales.

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    1La nutrition humaine dpend en dnitive de quelques cultures. Trois le riz, le bl et le mas comptent elles seules pour plus de la moiti de l apport nergtique que fournissent les plantes.Six autres le sorgho, le millet, la pomme de terre, la patate douce, le soja et le sucre portentle total plus de 75 %.

    Il est particulirement important de veiller ce que la diversit des cultures essentielles soitecacement maintenue, quelles restent praticables et soient gres avec intelligence , notait laFAO en 1998. Cest en grande partie aux petits agriculteurs que nous devons leur dveloppementet leur maintien.

    Nous devons nous soucier des structures et des systmes, et de ce que nous mangeons. Un chan-gement peru comme souhaitable sest opr sous limpulsion de groupes dintrts. On estainsi pass dun rgime base de crales un rgime riche en produits carns et laitiers et engraisses. Dautres pressions sont luvre : celles quexercent les gouvernements et lindustrieagroalimentaire pour faire produire par la terre des agrocarburants, comme indiqu au chapitre 4.

    Cest une triste ironie que les excdents de production des pays hauts revenus aient suscit tantdinnovations dans les systmes de production alimentaire au cours des 50 dernires annes,alors que 15 % des habitants de la plante se couchent chaque nuit la faim au ventre.

    Dans ces pays hauts revenus, mesure que croissait labondance, les marchs ont rapidementt saturs. Si lon peut acheter volont des vtements ou des chaussures ou des biens deconsommation aussi longtemps que le budget le permet, augmenter sa propre consommationalimentaire au-del des besoins nutritionnels fondamentaux peut entraner des maladies lies lobsit, laquelle tient au mode de vie.

    Do la volont des pays hauts revenus de mettre au point des innovations technologiques

    destines rduire les cots et avantager les innovateurs. Lindustrie a ainsi trouv le moyende transformer les produits de lagriculture en des produits plus coteux destins aux animaux.

    Cela a aussi contribu ce que les dcideurs du monde entier en viennent ngliger l agricultureet minimiser son importance. mesure que les populations accdaient une vie plus aise etque la concurrence saccentuait entre les entreprises, les distributeurs de produits alimentairesont trouv de nouveaux thmes lachat de nouveaux produits a t associ lamusement, auxloisirs, voire laection des enfants ou du partenaire.

    Lurbanisation et la prosprit croissantes des pays revenus faibles ou moyens ont encourag lesinvestissements visant pourvoir aux besoins de leurs populations. Les aspirations de ces pays

    suivaient les tendances donnes par les pays plus dvelopps.

    Les chanes dapprovisionnement alimentaire se sont mondialises, orant ainsi tout momentdes produits hors saison ceux qui pouvaient se les permettre. Les producteurs plus pauvres ouplus modestes lextrmit de ces chanes dapprovisionnement en fruits et lgumes frais surlesquelles quelques grandes socits exercent souvent la mainmise ont t pousss baisserleurs prix et les petits agriculteurs ont t marginaliss.

    De leur ct, les pays hauts revenus tirent le maximum de la technologie et de la mcani-sation sappuyant sur les nergies fossiles faible cot et rduisent au minimum lusage de la

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    main-duvre. Cette approche industrielle a dbouch sur l adoption croissante de systmes deproduction en monoculture. Cela a conduit vincer les petits agriculteurs.

    Lapproche industrielle est aussi devenue un symbole du dveloppement, une image laquelleaspirent les responsables politiques et les dcideurs du monde entier, et une faon de voir que

    partagent les organismes daide. Une bonne part de la politique de dveloppement a t ciblesur lindustrialisation, et le dveloppement rural et agricole en a fait les frais.

    Le nancement de la recherche-dveloppement (R-D) est lui aussi pass du secteur public ausecteur priv dans la plupart des pays de lOCDE. Aujourdhui, une bonne partie de la R-Dnance par les fonds publics privilgie la recherche fondamentale laquelle seules les entreprisesont accs, pas les agriculteurs.

    Cependant, des facteurs ont contribu recentrer l attention sur lalimentation. Ce sont notam-ment les ambes des prix de 2007-2008, le cot croissant de lobsit pour les services de sant,les inquitudes lies aux consquences du changement climatique et le fait que, selon toute

    vraisemblance, les OMD ne seront pas atteints en 2015.Rcemment, les rapports sur lalimentation et lagriculture se sont multiplis. Beaucoup sontaxs sur les moyens de nourrir une population de 9 milliards dhabitants en 2050. Mais tropvouloir se projeter dans lavenir, on en oublie parfois les problmes du prsent.

    Si certains rapports reconnaissent la grande complexit des dicults qui nous attendent, ilsprsupposent que les solutions viendront de la technologie. Dautres attribuent nanmoins unrle central aux petits agriculteurs.

    Cette approche agro-cologique renvoie la rexion sur la scurit alimentaire qui a dbut

    dans les annes 70. lpoque, laccent tait mis sur la constitution de stocks grs lchellenationale, la lutte contre la spculation et la volatilit des prix. Vers le milieu des annes 90, troismots-cls dnissaient la scurit alimentaire : accs, disponibilit et cot.

    Mais mme cette approche a t mise en question par les organisations de paysans et dagri-culteurs qui se sont ligues pour former ce que lon appelle aujourdhui le Mouvement pour lasouverainet alimentaire. Ce mouvement fait valoir quil est crucial que le pouvoir de conduirele changement soit aux mains des collectivits et des agriculteurs.

    La deuxime moiti du XXe sicle a t tmoin dune concentration toujours plus grande dupouvoir dans les mains des fabricants de produits agrochimiques et de machines, ainsi que des

    producteurs de semences et autres apports ncessaires aux agriculteurs, de lindustrie alimentaireet de la distribution. De plus en plus, ce sont les supermarchs qui xent les rgles.

    Les questions centrales qui se posent dans loptique dun changement du systme alimentairetournent autour du type daliments ncessaires, des mcanismes de production et de distribution,et de la rpartition des bnces. lheure actuelle, les petits agriculteurs ne gurent pas parmiles bnciaires. Et les aliments ne sont pas produits selon des mthodes de nature favoriser lesinfrastructures rurales, crer des emplois et accrotre la prosprit des campagnes.

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    1Les changements climatiques, l quit mondiale et la prservation de lenvironnement nousimposent de revoir les rgles et les incitations dune manire qui favorise lavnement dun mondeo chacun mangera sa faim. Il nous appartient de veiller ce que le systme prvoie des mesuresde sauvegarde telles que le stockage de grains pour le cas o des vnements imprvus viendraientperturber les approvisionnements.

    Lauteur du chapitre 1 est Geof Tansey, crivain et consultant pour les questions touchant au systme alimentaire.

    Asie-Pacifique578 millions

    Pays revenu lev19 millions

    Proche-Orient et Afrique du Nord37 millions

    Amrique latine et Carabes53 millions

    Afrique subsaharienne239 millionsTotal = 925 millions de personnes (valeurs 2010)

    Source: FAO, 2011b

    Figure 1 O vivent ceux les victimes de la faim ?

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Des vies tronques : le dsastre de la dnutrition

    Des vies tronques :le dsastre de la dnutritionChaque anne, environ 9 millions denfants dans le monde meurent avant davoir atteint lge

    de cinq ans, et environ un tiers de ces morts prmatures sont dues la dnutrition. Cependant,contrairement ce que lon croit gnralement, la grande majorit des dcs lis la malnutritionne se produisent pas pendant des pisodes de crise alimentaire brutale ou de famine, mais sontle rsultat de la faim chronique.

    Pour chaque enfant qui dcde de dnutrition, il y en a des millions dautres dont la sant resteradnitivement altre. Environ 178 millions denfants de moins de cinq ans sourent dun retardde croissance par suite de dnutrition. Parmi eux, environ 55 millions sont gravement dnutris.

    Pour la croissance et le dveloppement, la priode cri-tique couvre les mille jours qui sparent la conception

    du deuxime anniversaire de lenfant. Le retard decroissance prend sa source dans le dcit nutritionneldont soure lenfant pendant cette priode : la dnutri-tion du ftus explique pour moiti environ le retard decroissance de lenfant lge de deux ans.

    Les neuf mois de gestation faisant partie de ces millejours critiques, ltat nutritionnel de la mre revt unegrande importance pour le ftus. Si la mre est ch-tive ou anmique ou na pas une alimentation appro-prie durant sa grossesse, elle donnera probablement

    naissance un bb dnutri et de petite taille. Chaqueanne, environ 13 millions denfants naissent avec undcit pondral et prsentent donc un risque accru dedcs la naissance ou rapidement aprs celle-ci.

    Paralllement, des raisons nombreuses et complexes expliquent la formidable progression delobsitdans un monde qui se bat toujours contre la faim. Le rythme rapide de la croissanceconomique et de lurbanisation dans de nombreux pays a eu une inuence considrable sur leshabitudes alimentaires. De plus en plus, les gens achtent leurs aliments au lieu de les produireeux-mmes et se laissent inuencer par les engouements, les modes et les pressions commercialesdu monde moderne.

    Des chercheurs ont examin les donnes concernant la nourriture disponible et les habitudesalimentaires des annes 70 au dbut du XXIe sicle. Ils ont constat que lapport calorique parhabitant avait trs fortement augment dans tous les pays, la progression la plus marque ayantt observe en Chine, avec 49 %. Ils ont aussi dcouvert que la densit nergtique cest--dire la proportion de calories fournies par les matires grasses tait partout en hausse.

    La modication des habitudes alimentaires sinscrit dordinaire dans un changement plus gnraldu mode de vie o lactivit physique est en recul.

    David Pataule(11 ans), le ls deNikuze Aziza, preun repas au campde Kiziba, dans ledistrict de Kibuye(Rwanda), le 25 m2011. Par le biaislinitiative Achats

    service du progrsde la Fondation Biet Melinda Gates,les petits cultivateurwandais assurentune partie de laidalimentaire au camde rfugis.

    Fondation Bill etMelinda Gates

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    2La mondialisation a pes dun poids norme sur la production agricole et le commerce des pro-duits agricoles partout dans le monde, mue par une vision de systmes intgrs dans lesquels lespays dpendent toujours plus du march. Entre 1974 et 2004, le volume de vivres imports par lespays revenus faibles ou moyens a doubl la proportion des produits alimentaires transformsaugmentant nettement plus vite que celle des produits primaires.

    La mondialisation a aussi ouvert de nouveaux marchs et de nouvelles opportunits pour lesmultinationales de lagroalimentaire et fortement contribu renforcer les dbouchs de leursproduits et leurs activits de publicit et de marketing.

    Dans les pays revenus faibles ou moyens, quelques forces biologiques extrmement subtilessont luvre derrire le problme croissant de lobsit. Pendant le temps quil passe in utero, leftus reoit de sa mre des signaux concernant lenvironnement dans lequel il viendra au jour,notamment quant la probabilit dune nourriture rare ou abondante, et ces signaux inuencentla manire dont son mtabolisme se constitue, via des mcanismes pigntiques .

    Cependant, lpignome est galement sensible aux indices environnementaux, qui permettentaux organismes de sadapter leur environnement. Cest par ce mcanisme que le bb en dve-loppement dune mre dnutrie rglera son apptit de faon privilgier les aliments hauteteneur en matires grasses , assurent les pdiatres Peter Gluckman et Mark Hanson.

    ct des millions de personnes qui ne sont jamais rassasies, peut-tre 2 milliards dindividus dansle monde ont un rgime alimentaire qui ne leur apporte pas les vitamines et minraux essentiels.

    Lanmie chez lenfant, par exemple, na t reconnue quassez rcemment en tant que problmerpandu, et il nexistait pratiquement pas de donnes ce sujet avant 1995. Aujourdhui, le tauxdhmoglobine fait partie des lments que lon mesure dans les enqutes dmographiques et

    sanitaires, dont il ressort que 60 % environ des enfants sont anmiques en Afrique subsaharienne.

    La carence en vitamine A, qui est la cause la plus courante de ccit dans les pays revenusfaibles ou moyens, touche environ 30 % des enfants, soit 163 millions dentre eux. Deux tiersdes enfants touchs sont en Asie centrale et du Sud, une rgion qui, avec lAfrique de lOuest,accuse la prvalence la plus leve en la matire.

    Plus de 1,7 milliard dindividus dans le monde sourent de carence iode, qui peut occasionnerun retard de croissance et dautres anomalies au niveau du dveloppement, et constitue lune descauses les plus courantes de handicap et de retard mental chez lenfant, partout dans le monde.

    En 2005, la Banque mondiale a estim 80 milliards de dollars -U par an le cot de la malnu-trition pour lconomie mondiale. Pour la seule conomie indienne, ce cot a atteint au moins10 milliards de dollars par an, soit 2 3 % du PIB.

    Au niveau de la famille, qui est lchelon de base, le spectre de la faim peut aussi accentuer etperptuer la pauvret. Les familles se voient ainsi forces de vendre leurs biens, notamment leursterres et leur btail, et doivent souvent retirer leurs enfants de lcole.

    Les causes de la faim et de la sous-alimentation sont complexes et englobent des facteurs struc-turels tels que le manque dinvestissement dans lagriculture, les changements climatiques, la

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    2Traditionnellement, les millions denfants nayant pas bnci de lalimentation dont ils avaientbesoin et qui sont tombs gravement malades ont t accueillis lhpital, o on leur a faitabsorber un mlange de lait en poudre, dhuile et de sucre. Avec la mise au point dune formuleenrichie base de lait dshydrat appele F100, le traitement de la malnutrition aigu svre at grandement facilit.

    Aujourdhui, le gros avantage de la pte alimentaire Plumpynut rside dans le fait quelle permetde traiter la malnutrition aigu svre des enfants la maison.

    Cependant, le dbat autour des aliments prts lemploi continue de soulever les passions, surtoutdepuis que la Gestion communautaire de la malnutrition aigu, initialement mise au point pourassurer une alimentation durgence, fait de plus en plus partie des activits ordinaires dployesdans la lutte contre la malnutrition et a t intgre aux services de sant de pays toujours plusnombreux. Cest une chose dont se flicitent certains nutritionnistes pour qui la malnutritionaigu est souvent un problme endmique qui ne commence pas et ne prend pas n avec lescrises. Dautres, en revanche, craignent de voir les aliments prts lemploi porter prjudice non

    seulement lallaitement au sein, mais aussi aux habitudes alimentaires traditionnelles.Le gros de laide trangre destine alimenter les victimes de la faim et les personnes sous-alimentes continue de provenir des budgets humanitaires des donateurs, qui sont entirementdissocis de leur budget de dveloppement. Les fonds destins laction humanitaire sont gn-ralement mobiliss pour le court terme, car ils sont utiliss pour faire face une crise immdiateet dans un but bien prcis. Rien, ou presque, nest fait pour tablir ou renforcer les capacitsdes ministres nationaux de la sant de grer ce qui constitue souvent un problme endmiquesusceptible, le cas chant, dengendrer une situation de crise.

    De tels fonds norent habituellement quune possibilit daction limite, puisquils ne visent

    que la partie la plus visible du problme, tandis que les activits courantes dun pays dans la luttecontre la faim et la malnutrition ne bncient que dun soutien limit ou nont aucun soutien.

    Sue Armstrong, auteur douvrages sur la sant et la science et animatrice dmissions de radio et detlvision sur ces thmes a rdig le chapitre 2. Le texte de lencadr a t rdig par Susan Nickalls,

    journaliste spcialise dans les questions de dveloppement.

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    15Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Des vies tronques : le dsastre de la dnutrition

    La faim et la malnutrition ne se cantonnent certai-nement pas aux pays faibles revenus. En 2010,aux tats-Unis, ce sont 5,7 millions de personnessur une population de 311 millions qui ont reuchaque semaine une aide alimentaire durgencegrce Feeding America, le principal organismede bienfaisance du pays dans le domaine de lalutte contre la faim.

    Dans lUnion europenne, un citoyen sur sixdans les 27 tats membres ce qui reprsenteenviron 80 millions de personnes vit sous le

    seuil de pauvret, que lon situe 60 % du re-venu mdian. Invitablement, cela signie que lespersonnes qui ont de maigres revenus ne peuventpas toujours se procurer des aliments nutritifs. Etce nest pas toujours le manque de nourriture quiest lorigine de la malnutrition, puisque consom-mer en trop grande quantit des aliments nonrecommands est tout aussi nocif.

    Lobsit dans les pays dvelopps a atteintles proportions dune pidmie. Cest aux tats-Unis que la prvalence de lobsit est la plus

    forte, avec 26,7 % de la population adulte.Au Royaume-Uni, les prvisions situent 60 %

    la proportion dobses dans la population adultedici 2050. La surcharge pondrale est devenuela norme pour certains adultes, un quart dentreeux et 10 % des enfants tant dsormais obses.

    En dpit de vastes campagnes parrainespar le gouvernement en faveur dune alimentationsaine, nombre de personnes faibles revenusnont pas les moyens dacheter le type dalimentsque recommandent les experts de la sant, ou ne

    savent pas prparer des repas nutritifs.Les mnages dfavoriss consacrent une

    forte proportion de leurs revenus lalimenta-tion. Les personnes qui ont peu de moyens onttendance acheter et consommer des aliments

    antidittiques, forte teneur nergtique etpauvres en nutriments. Les calories quapportentles aliments forte teneur en matires grasses,sel et sucre sont jusqu dix fois moins chres quecelles que procurent les fruits et lgumes.

    Ces 30 dernires annes, lactivit des banquesalimentaires des tats-Unis et de lEurope a connuune norme progression. Dans la seule ville deNew York, City Harvest, qui est lun des principauxorganismes de rcupration daliments au mondeet dont la cration remonte 1982, offre chaque

    semaine de quoi se nourrir plus de 300 000 per-sonnes. Beaucoup sont des familles qui se trouventdans une situation oscillant entre pauvret et auto-sufsance et ne parviennent pas sen extraire.

    Chaque anne, City Harvest rcupre plusde 12 000 tonnes dexcdents de lindustrie ali-mentaire et de la distribution en vue de les re-distribuer. Cette utilisation de la nourriture qui,sans cela, serait perdue, a t adopte par denombreux pays du monde. La Fdration euro-penne des banques alimentaires (FEBA) un

    mouvement n en France en 1984 et aujourdhuiactif dans 18 pays europens rassemble 241organisations.

    Nanmoins, malgr la bonne volont de leurpersonnel, les banques alimentaires ne peuventpas agir sur les causes fondamentales de la faim pauvret et ingalit. Des gouvernements pour-raient dailleurs prendre prtexte de lexistencede ces banques pour se soustraire leurs res-ponsabilits. Au vu du peu dentente et de r-exion concerte sur les politiques mener, les

    banques alimentaires pourraient prendre plus deplace encore et voir grossir les rangs de leursbnciaires mesure que la rcession continuede svir et que davantage de services sociauxsont amputs.

    Progression de la faim et de la malnutritiondans les pays occidentaux riches

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    3Linstabilit persistante des prix meten question la dpendance lgarddes marchs alimentaires mondiaux

    Aprs des dcennies de stabilit, les cours internationaux des principales crales ont commenc augmenter en 2007 pour ensuite doubler au dbut de 2008. En lespace dun an, les coursmondiaux du bl ont augment de 150 %, ce qui a plus que doubl le prix du pain, tandis que leprix lev du ptrole grevait les cots du transport et des produits manufacturs.

    La hausse des prix a entran une aggravation massive de linscurit alimentaire dans le monde.Selon les estimations de lOrganisation des Nations Unies pour lalimentation et lagriculture(FAO), celle des produits alimentaires avait ce point accentu la faim dans le monde la n de2008 que le nombre des victimes de la faim devait atteindre le milliard dindividus en 2009 un

    niveau sans prcdent. Les pauvres des zones rurales

    et des villes dpensant jusqu 80 % de leurs revenuspour se nourrir taient les plus durement touchs. Lahausse des prix des produits alimentaires a entran destroubles civils dans une trentaine de pays. En Hati,les dsordres sociaux ont conduit au renversement dugouvernement, tandis que des manifestants ont t tusau Cameroun, au Mozambique et au Sngal.

    Au niveau international, les cours des denres alimen-taires ont chi durant le second semestre de 2008 eten 2009, conduisant certains observateurs croire que

    la crise tait un accident. Mais la reprise de lina-tion en 2010-2011 est venue conrmer que le mondetait confront un problme majeur dinstabilit desmarchs agricoles et de volatilit des prix des denresalimentaires. Treize personnes ont t tues dans denouvelles meutes de la faim au Mozambique, et leprix des aliments a t lun des lments dclencheursdes vagues de protestation qui se sont rpandues dans

    le monde arabe au dbut de 2011.

    Lorsquune catastrophe frappe une rgion o les enfants sourent dj de malnutrition, cest un

    cercle vicieux qui sinstalle. Les enfants sont moins bien arms pour faire face aux consquencessociales et physiques des catastrophes. Leur dveloppement long terme, dj compromis parla malnutrition, le sera aussi de faon indirecte si, par exemple, leur famille na pas les moyensde les laisser lcole.

    La hausse des prix des denres alimentaires a t attribue la baisse de la production et aufaible niveau des stocks mondiaux, la demande croissante des pays mergents, la monte enpuissance des agrocarburants, aux mesures commerciales (interdiction dexporter) prises parcertains pays, sans oublier la spculation nancire.

    istribution de vivresdans le village de

    uge, dans la rgionde Wolayita en

    thiopie, un paysqui fait face une

    scurit alimentairechronique et o desllions de personnes

    supplmentairespourraient souffrir

    e la faim en raisonde laugmentation

    du prix des produitsalimentaires. Or,

    thiopie est lun desnombreux pays ola terre est de plus

    en plus utilise poura culture de rcoltes

    estines produiredes agrocarburantsplutt que des

    aliments ; do laessit de recourir aide alimentaire etporter des produitsmentaires onreux.

    Jos Cendon/ration internationale

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Linstabilit persistante des prix met en question la

    Quant la production alimentaire, on a observ une croissance en recul sous leet de lappau-vrissement des ressources dgradation des terres et puisement des ressources en eau maisaussi des changements climatiques. Chaque anne, 5 10 millions dhectares de terres agricolessont perdus du fait de la dgradation des sols quentranent les pnuries deau.

    Le commerce du mas, du riz et du bl en grains est entre les mains dun petit nombre de paysexportateurs. Le riz est une denre particulirement sensible car seule une faible proportion de larcolte mondiale est destine au commerce international. Toute baisse de production des cralesexportables lie aux changements climatiques et tout changement dans les politiques des princi-paux pays exportateurs de crales se rpercutent de manire sensible sur les marchs mondiaux.

    Les stocks mondiaux de denres alimentaires ont lgrement augment en 2009-2010, mais laFAO estime quils ont depuis lors diminu de 479 millions de tonnes en 2011. Aprs presquedeux dcennies de prix stables et bas, le maintien de stocks rgulateurs par les gouvernementsa perdu de son attrait. Le secteur priv et les institutions nancires internationales considrentque le maintien de stocks publics est coteux et inecace. Dans le mme temps, la pratique

    croissante du ux tendu et la certitude de pouvoir compter sur les rserves mondiales pendantde nombreuses annes ont encore accentu la rduction des stocks.

    Le prix des produits agricoles alimentaires et celui de lnergie sont de plus en plus lis en raisonde la dpendance de la production agricole et des transports lgard des combustibles fossiles.Selon le dpartement amricain de lAgriculture, un doublement des prix des composantes de laproduction agricole forte intensit nergtique, dont les engrais et les combustibles, a entranune augmentation des cots de production du mas et du soja aux tats-Unis.

    Cependant, les liens entre lnergie et les produits alimentaires se sont resserrs de faon specta-culaire en raison de la hausse de la demande de crales secondaires pour la production dagrocar-

    burants aux tats-Unis et dans lUnion europenne. Aux tats-Unis, la loi de 2007 sur lnergie apratiquement quintupl lobjectif de production dagrocarburants, port 35 milliards de gallons(plus de 132 milliards de litres) dici 2022.

    Le dveloppement de lindustrie des agrocarburants dans les pays riches a encourag celui descultures nergtiques dans les pays revenus faibles ou moyens, parmi lesquels de nombreuxpays sourant dinscurit alimentaire tels que lthiopie ou le Mali, qui ont vu exploser lesinvestissements dans la production dagrocarburants.

    La ambe des prix des denres alimentaires a t attribue la croissance de la Chine, delInde et dautres conomies mergentes. Cependant, la demande de nourriture ne uctue pas

    de manire signicative avec le niveau de revenus, mme si des revenus plus levs entranentun accroissement de la demande daliments de meilleure qualit, et en particulier de viande.LInde et la Chine sont toujours des pays exportateurs nets de crales. LUnion europenne, enrevanche, est reste le plus gros importateur dolagineux et le cinquime plus gros importateurde crales en 2007-2008.

    Il se peut que la mise en vidence de la demande grandissante de crales ait aliment la sp-culation sur les marchs de produits alimentaires. La drglementation des marchs nanciersa eu pour eet dliminer les restrictions concernant la spculation sur les marchs terme deproduits agricoles, permettant la cration dun certain nombre de produits nanciers nouveaux.

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    3De plus, suite lclatement de la bulle immobilire aux tats-Unis et constatant le faible niveaudes stocks mondiaux de grains, les investisseurs ont vu dans lindustrie alimentaire une oppor-tunit de diversier leurs portefeuilles.

    Parmi les mesures de nature rduire la pression sur les marchs alimentaires mondiaux gurent

    la limitation des menes spculatives par la rglementation des marchs nanciers et limposi-tion de restrictions sur les produits nanciers, ainsi que labandon des objectifs de productiondagrocarburants et des subventions en la matire.

    Dans lconomie mondialise daujourdhui, des forces considrables favorisent un climat devolatilit : la scurit nergtique des pays riches, linstabilit politique des pays exportateurs deptrole, les pratiques des organismes nanciers guides par la recherche du prot, et les chan-gements climatiques.

    Il parat improbable, mme si la volont politique existait, que lon puisse agir simultanmentsur tous les facteurs favorisant cette volatilit. lchelle mondiale, les prix des denres alimen-

    taires resteront volatils mme si lon peut escompter des priodes de stabilit ce qui contrastefortement avec lide entretenue depuis 30 ans selon laquelle les prix des produits alimentairesresteront stables et modrs.

    La crise alimentaire mondiale de 2008 a t moins mondiale quon ne le pense gnralement.Quelques pays, comme lIndonsie, ont russi empcher la transmission des eets de cette criseau march interne par des interdictions dexportation, des stocks publics, un contrle sur les prixet des restrictions la spculation.

    Le succs des mesures prises pour limiter lination intrieure a t conditionn avant tout parla capacit des gouvernements matriser la disponibilit des denres sur le march interne et

    rglementer les marchs. Dautres facteurs ont galement contribu limiter la transmission deseets de la crise sur les prix, notamment le faible niveau de dpendance lgard des importationset lexistence de vastes stocks publics, rduisant la spculation et la thsaurisation.

    Dans nombre de pays pauvres, spcialement en Afrique subsaharienne, la volatilit saisonnireconstitue une menace pour les moyens de subsistance de millions de personnes, quel que soit leniveau des prix. En fait, pour de nombreux pays africains qui sont dans lurgence, la volatilit desprix sur les marchs internes pse davantage que linstabilit des prix lchelle internationale.

    De nombreux gouvernements ont tent de protger leurs citoyens pauvres en mettant en placede vastes lets de scurit. Ainsi, lInde et lIndonsie ont trouv le moyen dtablir de solides

    synergies entre la protection sociale et laide la production vivrire, gnralement lies lagestion des stocks publics.

    Les transferts despces peuvent se rvler trs ecaces dans la lutte contre la faim, notammentgrce leurs eets multiplicateurs sur lconomie et la stimulation de la production alimentairelocale et du commerce des produits. La hausse des prix des denres alimentaires, par contre,nuit leur ecacit.

    La combinaison de lapport despces et de stocks alimentaires dans les programmes axs sur lamise en place de lets de scurit et lindexation des transferts despces sur lination peuvent

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Linstabilit persistante des prix met en question la

    garantir lecacit de ces lets. Mais cela parat insusant pour faire face la volatilit des prix.Il faut par consquent envisager de combiner ces options avec une politique de stabilisation desprix et des mcanismes de constitution de stocks.

    Les prix levs des denres alimentaires et du ptrole ont considrablement augment les cots

    oprationnels du Programme alimentaire mondial (PAM). Laccroissement historique du bud-get du PAM en 2008 a permis de venir en aide 20 millions de bnciaires en plus, portantainsi le total 100 millions. Mais cest un succs en demi-teinte quand on sait que, sous leetde laugmentation des prix des denres alimentaires, 109 millions dtres humains sont venusgrossir les rangs des victimes de la faim.

    Lorsque les prix des produits alimentaires se sont envols, les dcideurs ont compris quil taitimportant daccrotre la production alimentaire pour tirer parti des bonnes perspectives dumarch. Les eorts dploys cet eet ont notamment t :

    n des exonrations scales, des ristournes, des subventions et des intrants agricolesn

    des exonrations scales ou des subventions pour la consommation nergtique des sys-tmes dirrigationn des mesures de soutien des prix aux producteursn la passation de marchs publics pour la distribution de vivres, les ventes subventionnes etles stocks nationauxn un soutien loctroi de crdits et dassurances, l annulation des dettes des agriculteursn une aide la gestion de la chane de valeur et aux informations sur le marchn un soutien aux infrastructures dirrigation et de stockage.

    Dans le cadre de son Initiative sur la ambe des prix des aliments , la FAO a distribu desintrants agricoles quelque 370 000 petits exploitants dans plus de 80 pays, tandis que la Banque

    mondiale en a aid 20 autres de la mme manire. Dans des pays dots de systmes de passationde marchs publics, comme le Bangladesh et lInde, les gouvernements ont achet du riz unprix suprieur et vers des subventions aux agriculteurs pauvres.

    Mme si lon prenait demain des mesures appropries pour limiter la volatilit des prix des pro-duits alimentaires, de srieuses incertitudes subsisteraient, comme le prix du ptrole et les alasclimatiques. Do limportance de ne plus sen remettre aux marchs alimentaires mondiauxpour lapprovisionnement en aliments bon march.

    Faire face aux prix alimentaires levs sur les marchs mondiaux est toujours plus ais pour lespays disposant des ressources, des institutions et des mcanismes leur permettant de soutenir

    la production, de grer la disponibilit vivrire nationale et dviter que les prix sur le marchmondial ne se rpercutent sur le march interne.

    Le cot lev des systmes publics intgrs a souvent t invoqu lappui de la libralisationdes secteurs de lalimentation et de lagriculture, mais des moyens existent qui permettent derduire le cot des stocks physiques. Les avantages dune intervention du secteur public dansces secteurs, tant pour la population que pour lconomie et le secteur agricole, mritent dtrepris en considration.

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    Lauteur du chapitre 3 est Frdric Mousseau, Directeur des politiques lInstitut Oakland.

    2001

    Anne

    In

    dice

    2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010

    250.0

    200.0

    150.0

    100.0

    50.0

    0.0

    Source : FAO, 2010. Lindice FAO des prix (au comptant) des produits alimentaires mesure la variation mensuelle des cours internationaux dun panier de denres alimentaires compos de produits laitiers, de viande, de sucre, de crales et de graines olagineuses.

    Figure 2Indice FAO des prix des produits alimentaires 20012011

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Stabiliser les moyens dexistence grce

    Stabiliser les moyens dexistencegrce lagriculture et la protection socialeSelon les prvisionnistes, nourrir une population mondiale qui passera de 7 milliards plus de9 milliards dindividus dici au milieu du sicle, tout en prenant en compte lvolution de lademande alimentaire exigera un doublement de la production alimentaire mondiale.

    Le rchauement de la plante et la modication des rgimes pluviomtriques devraient compro-mettre la production alimentaire dans les rgions du monde vulnrables au plan nutritionnel, etnotamment dans une bonne partie de lAfrique. Les eorts dploys pour rduire les missionsde gaz eet de serre conduisent convertir les terres arables africaines en terres de culture debiomasse, comme la canne sucre, le jatropha et le manioc.

    Aprs avoir t ignores pendant des annes, la production agricole et la scurit alimentaire sont nouveau des thmes majeurs du dbat international et apparaissent comme des opportunitsdinvestissement. Au sommet du G8 en Italie en 2009,les dirigeants mondiaux se sont engags employerdurgence tous les moyens ncessaires pour parvenir la scurit alimentaire dans le monde.

    La nalit de lagriculture nest pas de produire desaliments, et encore moins de faire de largent, mais deraliser le droit lalimentation. Et si en faire une acti-vit protable et productive peut certainement aider,

    le rsultat nest pas acquis pour autant.

    Il faut craindre que les investissements destins assu-rer la scurit alimentaire dans certains pays ne portentatteinte cette mme scurit dans dautres, surtoutpour les pauvres. Sachant combien les spculateurs sin-tressent au prot que peut leur apporter un secteuragroalimentaire renaissant, il est urgent de prendre cescraintes en considration.

    Les investisseurs alimentent lexpansion du soja en Amrique latine, qui servira en grande partie

    nourrir le btail dont la viande nourrira son tour les nouveaux riches chinois, et placent leursavoirs dans la production dagrocarburants en Afrique. Mais cela apportera-t-il la prosprit lAfrique subsaharienne ? Le problme de la faim ne sera-t-il pas plutt aggrav ?

    Un argument plaide pourtant en faveur des investissements de toute nature dans lagriculture :les plus pauvres en protent souvent. Selon une estimation, 60 % des terres non cultives maispotentiellement arables dans le monde sont en Afrique.

    Cependant, prs de la moiti des rcoltes annuelles de crales est convertie en agrocarbu-rants ou destine au btail pour la production de viande ou de produits laitiers une mthode

    Une femme arrosedes lgumes dansun champ Kipusdans la province dKatanga (Rpubliq

    dmocratique duCongo). Les membde la communauttravaillent les champour gagner delargent et pouramliorer ltatnutritionnel de leurfamille.

    Giacomo Pirozzi/UN

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    4extrmement inecace de nourrir la population humaine puisquil faut huit calories vgtalespour obtenir une calorie de buf. Llevage de btail occupe aujourdhui 80 % des terres agri-coles de la plante.

    Par ailleurs, on estime que 30 % de lensemble des rcoltes sont perdues, soit parce quelles sont

    victimes des nuisibles, soit parce quelles pourrissent dans des entrepts. Dans les grands pays,il nest pas rare que des produits alimentaires transforms soient jets. Il est crucial de se donnerles moyens dy remdier. Si on russit rduire de moiti la nourriture gaspille dici 2050, ondiminuera dun quart le volume de nourriture ncessaire.

    Quelles que soient les dfaillances du systme alimentaire mondial actuel, il est essentiel dinves-tir davantage dans lagriculture. La grande question qui se pose, principalement en Afrique, estcelle de savoir si les investissements agricoles doivent cibler les petits exploitants et les pasteursou encourager lagriculture grande chelle et forte intensit de capital.

    Les tenants de lagriculture grande chelle font valoir que les eorts de promotion de lagri-

    culture ont chou en Afrique subsaharienne, o la production alimentaire par habitant na quetout rcemment retrouv son niveau du dbut des annes 60 ; pendant ce temps, la productionpar habitant a augment de 100 % en Asie et de 60 % en Amrique latine.

    Ils attribuent ce rsultat au fait que lagriculture africaine est reste dans les mains des petitspaysans. Selon eux, lAfrique a besoin dune rvolution comparable celle qui a transform lAsieet lAmrique latine il y a plus dune gnration.

    Pour beaucoup, le modle suivre est celui du Brsil, qui est parvenu transformer des prairiesautrefois laisses labandon en des terres consacres lindustrie agroalimentaire, totalisant70 % de la production agricole du pays lun des succs les plus marquants de la pratique agri-

    cole dans le monde.

    Lautre argument est le fa it que les rendements des petites exploitations forte intensit demain-duvre sont souvent plus levs que ceux des exploitations forte intensit de capital. Lesexpriences faites en Inde et ailleurs en Asie montrent que les petits paysans obtiennent toujoursdes rendements suprieurs ceux des grandes exploitations.

    tonnamment, lide selon laquelle les petites exploitations agricoles sont ce dont lAfrique abesoin recueille, au moins en thorie, une large adhsion. Cependant, des rendements levsnont pas dintrt si lon ne dispose pas des moyens de commercialiser les produits. En 2002,la conjonction de conditions mtorologiques favorables et de lintroduction de nouveaux types

    de semences et dengrais sest traduite par une rcolte record de mas en thiopie. Il en a rsultun excdent qui a fait chuter les prix de 80 %.

    Lune des raisons principales du marasme des petites exploitations agricoles dans de nombreusesrgions africaines est le dmantlement des infrastructures dont elles ont besoin pour fonctionner,souvent ralis au nom de lajustement structurel et de la libert des changes.

    Les dpenses publiques consacres lagriculture par les gouvernements des pays revenus faiblesou moyens, surtout en Afrique, ont recul en termes absolus et aussi en proportion du volumetotal des dpenses publiques, chutant souvent sous les 5 %. Les gouvernements africains ont

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Stabiliser les moyens dexistence grce

    concentr leurs investissements sur les compagnies ariennes, les entreprises industrielles et lesouvrages dinfrastructure urbaine.

    En 2003, les dirigeants africains ont pris lengagement de relever 10 % la proportion de leurbudget alloue lagriculture. Seulement sept nations sur 53 avaient tenu cet engagement en 2008.

    Les promesses daide lagriculture venant la fois de gouvernements donateurs et dinstitutionsmultilatrales ont t rduites de moiti entre le milieu des annes 80 et le tournant du millnaire,pour atteindre un niveau plancher de 3,4 % du volume total de laide. Des signes de redressementne sont apparus que tout rcemment.

    Comment investir dans les petites exploitations ? La rponse tient dans lexpression intensi-cation durable savoir le dveloppement de formules innovantes favorisant la productivitsans dtruire les ressources naturelles dont elle dpend. Le Malawi, par exemple, a radicalementdop ses rendements de mas suite la distribution de coupons dengrais . Dsormais, plusdun million et demi dagriculteurs du Malawi peuvent utiliser de tels coupons pour acheter

    deux sacs dengrais seulement 10 % du prix du march.Ailleurs, une relance de la recherche de base sur les cultures africaines traditionnelles telles quele manioc, le pois cajan et le te, sest rvle trs protable.

    Les agriculteurs ont parfois ignor les experts . Au Sahel, les agriculteurs se trouvant en borduredu dsert ont stabilis les sols et accru leurs rendements en plantant des dizaines de millionsdarbres, allant ainsi lencontre des conseils donns par les agronomes trangers.

    Dautres rgions du monde ont galement des russites exemplaires faire valoir. En lespace dequelques dcennies seulement, lindustrie laitire indienne est devenue la plus grande au monde

    en sappuyant presque exclusivement sur les coopratives rcoltant le lait auprs des leveurs latte de petits troupeaux se nourrissant des crales cultives sur place.

    Les marchs urbains crent de nouvelles opportunits pour les petits exploitants agricoles. Pour-tant, alors que le nombre de supermarchs et de centres commerciaux ne cesse daugmenter, despans entiers de lindustrie alimentaire restent hors de leur porte. Addis-Abeba, par exemple,la majeure partie du lait et du miel vendus en ville ne vient pas des grandes entreprises commer-ciales, mais des petits exploitants coulant leurs produits sur les marchs informels.

    Dans bon nombre dendroits, des technologies telles que les tlphones cellulaires ont rvolu-tionn la manire dont les petits agriculteurs peuvent accder au march, surveiller lvolution

    des prix, et ainsi pntrer les marchs dexportation traditionnellement domins par de grandesentreprises commerciales.

    Lexpression la plus vidente de lapptit dinvestissement des forces commerciales luvre danslagriculture est aujourdhui laccaparement des terres . Cette expression fourre-tout dsignelintroduction de grandes exploitations agricoles forte intensit de capital dans le paysage tra-ditionnel des petits agriculteurs et des bergers de lAfrique.

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    4Des dizaines de gouvernements, notamment en Afrique, ont commenc courtiser les agricul-teurs et les capitaux trangers avec des ores bon march de location bail de vastes tenduesde terres fertiles, dans lespoir de donner un coup de fouet leur conomie agricole.

    Les accaparements de terres ont fait ressortir l un des problmes majeurs auxquels se heurtent

    les petits agriculteurs, savoir les droits fonciers : beaucoup de terres nappartiennent ocielle-ment personne ou sont la proprit du gouvernement central.

    Lide selon laquelle les marchs auraient la capacit de mettre un terme la pauvret et auxvulnrabilits de toutes sortes aura prvalu pendant plus de deux dcennies ; aujourdhui, cetteperception apparat de plus en plus comme errone. Certaines stratgies daccroissement de laproduction agricole fondes sur le march peuvent en fait dsavantager les populations les plusexposes au problme de la faim. Pour le bien-tre individuel, la cohsion sociale et la stabilitpolitique, il est essentiel de pouvoir compter sur un rgime de protection sociale nanc par lespouvoirs publics.

    Pour faire face au problme du prix lev des produits alimentaires, de nombreux gouvernementsont depuis longtemps pris lhabitude de subventionner les aliments de base que sont le pain,le bl et le riz. On peut galement citer les programmes traditionnels vivres contre travail ,centrs sur les travaux publics. Ils sont cependant en perte de vitesse. Aujourdhui, la protectionsociale prend parfois la forme de distributions daliments enrichis des groupes particuliers telsque les mres allaitantes, les nourrissons et les personnes sourant de tuberculose ou vivant avecle VIH. Avec la mise en question des eets et du rapport cot-ecacit dinterventions plusgrande chelle, nombre de programmes ont t remplacs par des transferts directs despces etdes bons dalimentation.

    lheure actuelle, le plus grand systme de transferts despces sous conditions est le systme

    brsilien Bolsa Familia. Cest un systme dans lequel une somme dargent est verse aux bn-ciaires habituellement des femmes qui, en change, doivent scolariser leurs enfants et donnerleur assentiment la vaccination et aux soins prnatals. Plus de 50 millions de personnes enbncient, et pourtant cela ne cote que 0,5 % du PIB du pays.

    Des initiatives comparables sont actuellement menes en Afrique. Cest notamment le cas de lanouvelle initiative ghanenne pour lacquisition de moyens de subsistance dans la lutte contre lapauvret, qui prote 160 000 foyers pauvres par le biais de transferts despces.

    Ce dont de nombreuses communauts ont rellement besoin, cependant, cest dune protectioncontre lenvole des prix et les mauvaises rcoltes. Dans les zones de faible latitude, il est prvoir

    que la hausse des tempratures et la pluviomtrie erratique se rpercuteront directement et enprofondeur sur lagriculture.

    Les systmes de protection sociale prennent frquemment leur source dans des stratgies visantles pauvres des villes, et la question critique est donc celle de savoir quelles synergies mettre enplace avec les petits agriculteurs. Cela peut savrer dicile car les politiques qui sont censesproter aux producteurs, telles que le relvement des prix, portent prjudice dautres.

    Un type dintervention sociale qui est aujourdhui bien accueilli est celui de la micro-assurancedes cultures en fonction des conditions mtorologiques. Les assurances classiques interviennent

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Stabiliser les moyens dexistence grce

    pour ddommager les agriculteurs en cas de mauvaises conditions mtorologiques, que lonmesure au vu de la rcolte. Mais outre leur caractre peu pratique, elles ont en eet pervers carelles favorisent les pratiques agricoles mdiocres. Les nouveaux systmes de micro-assurancesimplient le processus dans la mesure o le franchissement dun certain seuil donne lieu loctroi dun remboursement.

    Lauteur du chapitre 4 et de lencadr est Fred Pearce, consultant spcialis dans les questions den-vironnement et de dveloppement.

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    Si la petite exploitation agricole est une ressource

    dormante quil sagit de ractiver, limpulsionviendra sans doute des femmes. Il se peut quelafrmation largement reprise selon laquelle lesfemmes accomplissent jusqu 80 % du travaildans les exploitations africaines ne repose passur des recherches srieuses. En mme temps, lesstatistiques montrant que les femmes constituent43 % de la main-duvre agricole mondiale sous-estiment peut-tre leur rle dans le maintien desjardins potagers. Quelle que soit la ralit, cepen-dant, il est manifeste que les femmes jouent un rle

    essentiel dans la plupart des petites fermes et dansbon nombre de grandes entreprises agricoles caractre commercial. Ce sont elles qui apportentau foyer la majeure partie des aliments, qui culti-vent les lgumes et les crales, et qui assurentllevage de la volaille.

    Les hommes se limitent souvent aux cultures derapport, comme le caf, ou llevage, qui sontplus visibles dans les transactions et qui apparais-sent dans les statistiques sur le commerce, lemploiet la gnration de revenus. Ce sont eux aussi qui

    ont essentiellement accs aux engrais et au crdit.Laide la recherche et la vulgarisation agri-coles est centre sur les cultures masculines etcible les hommes. Des tudes faites par la FAOdans les annes 80 ont rvl que seulement 5 %des services de vulgarisation publics sadressaient des femmes et que 15 % seulement du person-nel de vulgarisation taient des femmes.

    Le manque daccs au crdit explique peut-tre dans une large mesure pourquoi les femmessont plus rticentes adopter de nouvelles tech-

    niques ou utiliser des apports essentiels telsque les engrais. La culture et les lois, elles aussi,sont parfois un frein. Dans une bonne partie delAfrique, les femmes ne labourent pas la terre, etelles ne peuvent pas la possder. Les fermes ayantune femme leur tte ont aussi un cheptel plusmodeste, gnralement compos de volailles, dechvres et de porcs plutt que de btail cornes.

    Le manque de terres est lune des raisons pour

    lesquelles les femmes sont dans une large mesureexclues de lagriculture contractuelle et externali-se. Au Kenya, par exemple, les femmes dtien-nent moins de 10 % des contrats concernant lescultures externalises pour lexportation, commeles fruits et les lgumes.

    Les femmes sont donc plus pauvres, elles nontpas accs la terre, elles souffrent de discrimina-tion sociale et politique, et sont victimes de vio-lences sexistes et sexuelles.

    Les donnes de production rvlent ce rsul-

    tat : au Burkina Faso, une tude a montr que lesparcelles cultives par des femmes prsentaientune productivit infrieure de 30 % celles culti-ves par des hommes, mme au sein dun mmemnage.

    Lagriculture enregistre de mauvais rsultatsen partie parce que les femmes nont pas les res-sources et les opportunits qui leur permettraientdutiliser au mieux le temps dont elles disposent. mesure que lagriculture mondiale emploiedes techniques de plus en plus sophistiques et

    sengage de plus en plus dans la voie commer-ciale, les femmes risquent dtre toujours plusmarginalises.

    Cela doit changer. Rduire les ingalits entreles sexes est un objectif important non seulementpour les femmes, mais aussi pour la productionagricole. Selon les estimations de lIFPRI (Insti-tut international de recherche sur les politiquesalimentaires), une amlioration de laccs desfemmes aux ressources pourrait faire progresserla production agricole dau moins 10 %. Dans les

    fermes tenues par des femmes, la FAO entrevoitdes gains de rendement pouvant atteindre 30 %.Et comme dautres tudes montrent que les

    revenus gnrs par les agricultrices ont plus dechances dtre consacrs lalimentation et auxjeunes enfants, investir dans la promotion desfemmes pourrait faire que les gnrations venirsoient en meilleure sant et mieux duques.

    Le potentiel de productivit des femmes dans lagriculture

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Les rponses apporter linscurit alimentaire et

    Les rponses apporter linscurit alimentaire et lamalnutrition dans les crisesCe chapitre examine la nature changeante de la rponse humanitaire aux crises que traversentla scurit alimentaire et la nutrition. Le prix des denres alimentaires a son importance danslexplication des crises humanitaires parce quil est un ala en soi, qui fait partout courir desrisques accrus aux populations vulnrables dont il peut entraner la perte sous leet dun chocde moindre intensit. Il complique en outre considrablement le redressement conomique aulendemain dune crise.

    Le nombre de crises dclenches principalement par des facteurs climatiques ou environnemen-taux a galement augment, et cette tendance devrait se maintenir dans la mesure o les eets deschangements climatiques favorisent la volatilit des risques lis aux conditions mtorologiques.

    Ensuite, les crises se prolongent de plus en plus. En2010, 19 pays du seul continent africain ont dclaravoir t en crise alimentaire pendant au moins huitdes dix annes prcdentes. En 1990, seuls cinq paysfaisaient tat de ce type de crise prolonge.

    Enn, si les crises lies la scurit alimentaire restentprincipalement un phnomne rural, des signes indi-quent de plus en plus que le foyer des crises se dplaceprogressivement vers les zones urbaines.

    Les rponses donnes ces crises ont surtout consist apporter une aide alimentaire ou un soutien sousforme de graines et doutils aux rgions agricoles.Une bonne partie de laide alimentaire a t fournieen nature par les donateurs et a frquemment souertde retards au niveau des achats et de lacheminement.Les interventions visant remdier la malnutritiondans les situations durgence ont t limites l apportde complments alimentaires faits daliments enrichiset composs.

    Pendant de nombreuses annes, la scurit alimentaire et la nutrition ont t les deux facettesdes rponses humanitaires apportes aux crises. Pourtant, on entend encore souvent dire quecest trop peu, trop tard, voire inadquat dans certains cas.

    Au cours de la dcennie coule, on a beaucoup investi dans lanalyse des situations en matirede nutrition et de scurit alimentaire lors des crises. Cela a donn lieu des changements di-rents niveaux. En gros, des mots tels que famine et faim ont t remplacs par nutrition ou crise/urgence lie la scurit alimentaire , faisant la distinction entre les crises impulses

    Helima Begumcherche des grainsde riz dans la boudevant sa maison,qui a t gravemeendommage parle cyclone Sidr. Ellvit prs de la meravec son ls et sabelle-lle. Il nousfallu des annes porganiser notre viebtir notre maison

    dit-elle. prsent,tout est dtruit . Esait quelle risque tomber malade si emange du riz avar Cest toujours mique de mourir defaim , dclare-t-el

    Shehzad Noorani/UNICEF

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    5par les maladies, lenvole des prix ou la perte de revenus, plutt que par des bouleversementsenvironnementaux ou des conits.

    Lvaluation de la scurit alimentaire sest considrablement amliore. Un projet du Programmealimentaire mondial (PAM) a favoris la mise au point dune mthode dvaluation sensiblement

    meilleure, assortie de techniques de compte rendu plus cohrent et plus transparent. Le Systmeintgr de classication par phases (IPC), mis au point par lOrganisation des Nations Unies pourlalimentation et lagriculture (FAO) et ses partenaires en Somalie a permis la cration doutilsanalytiques et dun langage permettant de comparer direntes crises.

    Pendant prs dun demi-sicle, on sest appuy sur des indices nutritionnels pour mesurer lagravit des crises. Depuis de nombreuses annes, cependant, il est souvent dicile dinterprterquantitativement des termes tels que faim ou malnutrition extrme , do la dicult dednir la rponse la plus approprie. En lespace de la seule dcennie coule, linterprtationerrone des termes et la fausse reprsentation de la situation dcoulant des donnes nutritionnellesont rgress mesure que les valuations se sont progressivement normalises.

    Si la normalisation de lvaluation de la nutrition et de la scurit alimentaire dans les situationsdurgence se traduit par des donnes plus ables, linterprtation des donnes reste un problme.Il y a une dizaine dannes, lOrganisation mondiale de la sant (OMS) a dni le niveau demalnutrition aigu dune population (10 15 %) justiant une urgence. Il est toutefois malaisde dterminer la rponse la plus approprie sans resituer les chires dans leur contexte ; cest ce quoi on sest attel plus rcemment dans certaines enceintes.

    La porte de ces amliorations est en fait limite. Et mme lorsquelles sont mises prot, desquestions subsistent quant la mesure dans laquelle une analyse plus ne peut se concrtiser auniveau de lintervention.

    De nombreuses tentatives ont t faites ces quelque cinq dernires annes pour amliorer lven-tail des options devant permettre de faire face aux crises lies la scurit alimentaire et lanutrition. Aujourdhui, de nombreuses options sont oertes, que l on peut gnralement classerde la manire suivante :

    n Les actions qui sattaquent aux symptmes de linscurit alimentaire aigu. Le change-ment le plus manifeste tient lusage nettement plus frquent des transferts despces enremplacement ou en complment de laide alimentaire. En procdant des versementsen espces aux populations en proie une inscurit alimentaire aigu, non seulement onacclre la fourniture de laide (les transferts dargent ne se font pas par bateau), mais aussi

    on met les populations concernes en mesure de dterminer elles-mmes leurs priorits enfonction de leurs besoins.n Les actions qui visent spcifquement la malnutrition. La prise en charge communautaire dela malnutrition aigu svre met surtout laccent sur lamlioration de la couverture et surla dtection et le traitement rapides de ce stade de la malnutrition dans le but den enrayerla progression. En 2007, la prise en charge communautaire de la malnutrition aigu svrea t ociellement ratie par la communaut internationale comme la stratgie la plusapproprie pour traiter la malnutrition svre dans les situations durgence et au-del.

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    Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Les rponses apporter linscurit alimentaire et

    n Le recours aux nutriments occupe galement une plus grande place sur la scne de laidealimentaire, aprs que les donateurs et les institutions ont pris conscience de limportancede ne pas se borner nourrir les populations, et de leur fournir ce faisant une alimen-tation saccordant avec les besoins nutritionnels. Cela tant, il est important que cessolutions faisant appel la technologie ne constituent quun outil parmi dautres pour

    remdier la malnutrition en situation de crise, dautres pouvant galement avoir leurintrt selon le contexte.n Les actions qui tayent les moyens de subsistance. Cette option sintresse davantage lacomprhension des changements que les moyens de subsistance connaissent avec le tempset ce quil est possible de faire pour favoriser les changements susceptibles de rendre lespopulations menaces plus rsilientes et mieux mme de grer des alas multiples sanscompromettre leurs propres ressources naturelles ou leurs moyens de subsistance.

    Il conviendra de mesurer les rpercussions que lvolution de ces actions a pu avoir sur lallocationde ressources et la rduction de linscurit alimentaire et de la malnutrition. Des cas isols ontt tudis en profondeur, ce qui a conduit la rallocation de ressources et un changement

    de politique (comme dans le cas de la prise en charge communautaire de la malnutrition aigusvre), mais il nest pas vraiment possible de dresser un tableau gnral.

    Lessentiel des eorts sest port sur lvaluation dimpact des interventions axes sur la scuritalimentaire et la nutrition sur le terrain, et de plus en plus de programmes font lobjet dvalua-tions. Selon un article paru rcemment dans la publication Lancet, cependant, peu dinfor-mations ont t publies sur les eets des interventions humanitaires en matire de nutrition,ou, plus prcisment, sur les eets des interventions ciblant le problme de la nutrition dans lessituations durgence .

    Le rsultat global doit se reter dans les chires traduisant les changements dans la prvalence

    de la malnutrition ou dans ceux qui comptabilisent les victimes de linscurit alimentaire ; etces chires donnent souvent un tableau en demi-teinte, mme sur le court terme. La mortalit aclairement recul dans la plupart des crises, mais le nombre de personnes piges dans des crisesqui sternisent est en hausse.

    Un certain nombre de facteurs inuent sur linscurit alimentaire et la malnutrition. Ce sontnotamment les pratiques des donateurs, les mcanismes de coordination et de responsabilisation,les contraintes en matire dinformation et les changements qui interviennent sur les thtresdoprations :

    n Les pratiques des donateurs dans le cadre des actions menes pour assurer la scurit alimen-

    taire. Nombre de pays donateurs ont lev toutes les conditions dont leur aide alimentairetait assortie, autorisant ainsi un recours bien suprieur aux achats locaux et rgionaux,tandis que dautres, dont les tats-Unis le principal donateur ne lont fait quenpartie. Les valuations en temps rel de programmes en cours sont pratiques dans unemesure croissante par les donateurs et les organismes dexcution. Un examen rcentdes programmes mis en uvre par le dpartement du Dveloppement international duRoyaume-Uni souligne quils sappuient sur une meilleure prparation aux situationsde crise, celles-ci tant mieux anticipes, quils retent les eorts faits en termes din-novation et de responsabilisation, et surtout, que les organisations humanitaires sontaujourdhui diriges de manire plus comptente.

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    5 Dautres pratiques se sont rvles moins positives. Les questions contractuelles et

    de conformit sont de plus en plus complexes et posent un problme pour la rapiditdintervention.n Les annes 2000 ont t marques par une politisation croissante de laide en cesens que lassistance tait explicitement lie aux objectifs des donateurs quant aux critres

    politiques et scuritaires en plus des critres de faim et de pauvret, si ce nest au lieu deces derniers. Les gouvernements nationaux ont eux aussi davantage tendance manipulerlaide des ns politiques.n Coordination et responsabilit. La n des annes 90 a t tmoin dune professionnalisa-tion de laction humanitaire avec les Normes minimales pour les interventions lors decatastrophes du projet Sphre. Le suivi ax sur les rsultats transparat de plus en plusdans les politiques des donateurs et des institutions ; quant aux eorts dploys pouramliorer la responsabilit, ils ont marqu les programmes humanitaires de quasimentchaque secteur.n LExamen de l intervention humanitaire de 2005 est lorigine de la cration dun groupesectoriel Nutrition charg damliorer la prvisibilit, la rapidit et l ecacit de la

    rponse globale sur le plan de la nutrition dont le chef de le est lUnicef. Linterventioncible sur lalimentation des nourrissons et des jeunes enfants lors du tremblement deterre dHati en 2010 est largement perue comme un succs du groupe sectoriel Nutri-tion. 2010 a vu le lancement dun nouveau groupe sectoriel mondial Scurit alimentaire.n Actions court terme dans les crises qui se prolongent. Ces crises sont causes aussi bienpar des conits que par des facteurs climatiques, environnementaux, conomiques ou enrapport avec la gouvernance. En 2010, la FAO/PAM a dnombr 22 pays connaissant unecrise prolonge, reprsentant une population totale denviron 450 millions. Sur len-semble, 160 millions taient sous-aliments en 2005-2007, soit prs dun sixime du totalmondial des personnes exposes linscurit alimentaire.

    Mme si, dans les crises, on dnombre moins de pertes en vies humaines lies linscurit ali-mentaire et la malnutrition, les actions menes pour rpondre aux urgences humanitaires nese sont pas amliores dans la mesure souhaite. Une valuation complte des progrs ralissdans ce domaine se fait attendre pour lensemble du secteur.

    Le gros obstacle est labsence de progrs dans la voie dun dveloppement plus quitable et demoyens de subsistance plus durables pour les groupes les plus vulnrables. Depuis le sommet duG8 en 2009 LAquila (Italie), on a vu se former un consensus grandissant quant la ncessitde considrablement accrotre lassistance internationale mobilise pour remdier la faim et linscurit alimentaire. Pour lheure en tout cas, il faudra toutefois se contenter de laide huma-nitaire ou dautres formes dassistance court terme.

    Les auteurs du chapitre 5 sont Dan Maxwell, proesseur associ et directeur de recherche pour lascurit alimentaire et les crises complexes au Centre international Feinstein de lUniversit Tuts,et Kate Sadler, proesseur adjoint et chercheur principal sur la nutrition dans le cadre des crises auCentre international Feinstein de lUniversit Tuts. Lencadr a t rdig par Marion Pchayre,consultante indpendante et doctorante lcole dtudes orientales et aricaines, Londres.

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    31Rapport sur les catastrophes dans le monde 2011 Les rponses apporter linscurit alimentaire et

    Les inondations de 2010 ont recouvert deauquelque 70 000 km des terres les plus fertilesdu Pakistan, un pays dont lconomie repose es-sentiellement sur lagriculture. Elles ont entranla perte de plus de 200 000 ttes de btail etdtruit dnormes quantits de marchandises en-treposes dont des millions de personnes auraientpu se nourrir. Trs vite aprs la catastrophe, lamalnutrition est apparue comme un problme cl.

    Pourtant, les enqutes nutritionnelles effec-tues au lendemain des inondations dans le Sindh

    et le Pendjab en octobre-novembre 2010 ont r-vl des taux globaux de malnutrition aigu et demalnutrition aigu svre comparables ceux re-levs en 1991 et 2001, ce qui tendrait indiquerque le problme de la malnutrition na pas fonda-mentalement chang en raison des inondations.

    Il ne fait pas de doute que les dplacementsmassifs sont lorigine de cas de maladies sup-plmentaires. Sous leffet du manque deau po-table et dinstallations sanitaires, on a vu aug-menter de faon notable les cas de rougeole et

    de maladies dorigine hydrique. Ces facteurs etle manque daccs un rgime contenant suf-samment de micronutriments donnent penserque les inondations ont constitu un srieux fac-teur daggravation du taux global de malnutritionaigu svre.

    Malgr cela, environ deux mois aprs la ca-tastrophe, les statistiques extraites des enqutesde nutrition effectue dans les zones inondes nervlent pas une augmentation spectaculaire destaux de malnutrition aigu svre par comparai-

    son avec 2001. Il ny a pas de famine aigu au Pakistan et

    la majeure partie de ce que lon appelle la malnu-trition aigu globale observe la suite des inon-dations rsulte dune sous-alimentation ancienneet dun retard de croissance chez les plus pauvresparmi les pauvres , a indiqu le Dr Zulqar Ah-med Bhutta, professeur de pdiatrie lUniversit

    Aga Khan. Un grand nombre dinstitutions inter-nationales et dorganismes de secours se concen-trent essentiellement sur la distribution dalimentsnutritifs au lieu de sintresser aux activits forteintensit de travail dont dpendent les stratgiesde lutte contre la sous-alimentation maternelle etla mauvaise alimentation des nourrissons et desjeunes enfants. Il est plus ais dattester un tauxlev dpuisement des fonds de secours en im-portant des aliments nutritifs coteux que de sen-gager dans le laborieux processus qui consiste

    agir sur les comportements par la mobilisation etle soutien aux communauts concernes. La plupart des analystes saccordent recon-

    natre que la malnutrition est essentiellement unphnomne chronique au Pakistan. Elle pose unproblme majeur de sant publique depuis des an-nes, sans que ltat ait jamais procd des inves-tissements majeurs pour y remdier ; seulement 2 %environ du PIB du Pakistan sont consacrs la santpublique.

    Il est intressant de noter quentre 2001 et

    2010, le pourcentage de jeunes enfants prsen-tant un retard de croissance est pass de 37,6 50 % au Pendjab et de 48 51,8 % au Sindh.Les retards de croissance sexpliquent principa-lement par le manque daliments nutritifs, deaupotable et de structures de sant. Chacun de cesfacteurs a t dcrit comme problmatique au len-demain de la catastrophe. Par consquent, il esttrs possible quils constitueront sur le long termeun facteur aggravant du retard de croissance.

    Il est certain que les plus pauvres dentre

    les pauvres au Pakistan souffriront longtempsencore de la perte de biens, dinfrastructures etde rserves alimentaires. Cependant, il semblebien que cette catastrophe aura marqu untournant non pas dans le sens dune aggrava-tion de la malnutrition, mais dans la prise deconscience par ltat dun problme majeur desant publique.

    Inondations au Pakistan : la malnutrition esten fait prsente ltat chronique

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    6Tous unis contre la faim unmanifeste pour le changementQuelles politiques et quels partenariats les gouvernements, les donateurs et les institutions mon-

    diales doivent-ils mettre en place pour renforcer le systme alimentaire mondial et radiquer lafaim et la malnutrition ?

    Il est essentiel dassocier les personnes marginalises, en particulier les petits agriculteurs, llaboration des politiques en la matire.

    De nombreux projets daide sont conus de telle sorte que les donateurs sont mieux informsque les bnciaires. Pourtant, cette aide est critique ; elle reprsente entre un tiers et la moitidu budget de lagriculture dun grand nombre de pays parmi les plus pauvres, pour lesquels ellerevt donc une immense importance.

    La plupart des pays doivent dpenser beaucoup plus la fois pour lagriculture et la protection sociale. Alorsque les gouvernements africains staient engags en2003 allouer 10 % de leur budget national lagri-culture, moins de dix dentre eux sy conforment. Enmme temps, seulement 20 % de la population mon-diale a accs une protection sociale formelle.

    Une runion convoque en 2008 par lUnion africainerecommandait que les tats sengagent consacrer aumoins 2 % de leur PIB la protection sociale.

    Tous les gouvernements doivent sengager laborer desplans de lutte contre la faim et la sous-alimentation.Pourtant, beaucoup nont mme pas encore pris l enga-gement de promouvoir la protection sociale, qui est par-ticulirement vitale dans les 20 pays du monde o vivent80 % des enfants accusant un retard de croissance.

    Il importe par ailleurs de reconnatre les limites des programmes de protection sociale. Peu deces programmes ont des solutions miracles proposer dans la lutte contre la faim et doiventtre complts par des changements de politiques. Au Brsil, par exemple, lutter contre la faim

    ncessite de rduire les graves ingalits du pays, ce que les gouvernements successifs se sontrefuss faire.

    Les transferts despces orent de meilleures perspectives que laide alimentaireen termes deetsmultiplicateurs. Largent que reoivent les mnages est utilis pour acheter des biens et des servicesqui, leur tour, crent des emplois et gnrent des revenus pour ceux qui assurent ces services.

    Sagissant de nutrition, les transferts despces devraient bncier aux enfants trs tt, la prioritallant aux enfants de moins de cinq ans et aux femmes enceintes, sous la forme dallocationspour enfants et dallocations maternit. Les gouvernements doivent sassurer que les familles sont

    Des militants deLa Via Campesina

    participent, le6 novembre 2009,

    une manifestation

    marge du Sommetndial sur la scurit

    imentaire organispar lOrganisation

    des Nations Unies

    ur lalimentation etagriculture (FAO),

    Rome. Pour lapremire fois dans

    histoire du monde,

    un milliard desonnes souffrent de

    la faim.Giampiero Sposito/

    Reuters

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