resume livre adam smith

Upload: salissou

Post on 07-Jul-2018

229 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    1/19

      1

    ADAM SMITH : LE PERE DE L’ECONOMIE 

    COLLECTION : COMPRENDRE LES GRANDS ECONOMISTES PAR LE TEXTE

    « Qu’elles soient justes ou erronées, les idées des théoriciens de l’économie et de la politique

    exercent une puissance supérieure à celle qu’on leur prête communément. En fait, ce sont

    elles qui mènent le monde ou peu s’en faut. Les pragmatiques déclarés, qui se croient

    totalement libres de toute influence théorique, sont généralement les esclaves de quelque

    économiste défunt. Les maniaques de l’autorité, qui entendent des voix dans le ciel, ne tirent

    en réalité leur inspiration que de quelque docte scribouilleur des années précédentes. Je suis

    certain qu’on s’ exagère le pouvoir des intérêts acquis par rapport à l’emprise progressive  

    des idées.»

    KEYNES, Théorie générale de l’emploi de l’intérêt et de la monnaie, 1936,

    Macmillan Cambridge Press, for Royal Economic Society, chapitre XXIV, V.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    2/19

      2

    REMERCIEMENTS

    L’auteur remercie tout particulièrement Patr ick AUDEBERT, Directeur dedépartement au groupe HEC et Maître de conférences à l’Université du Littoral pour sesremarques méthodologiques, Claude CHANCEL, Professeur de Chaire supérieure en Classes

    Préparatoires HEC au lycée Camille GUERIN à Poitiers, pour ses pertinents conseils ;Laurence COUDERT, agrégée de Lettres Modernes, pour sa minutieuse et impitoyable

    relecture ; Jean-Luc FAIVRE, Président du Comité de lecture des Editions du SIECLE, pour

    ses précieuses remarques ; Hervé QUEMPER pour le soin qu’il a apporté à la mise en pageset Jean-François TRINQUECOSTE, Professeur en Sciences de Gestion à l’UniversitéMontesquieu-Bordeaux IV et conseiller scientifique à Bordeaux Ecole de Management pour

    ses judicieux apports. Il remercie également les étudiants du programme CESEM de Reims

    Management School pour leurs innombrables et stimulantes remarques.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    3/19

      3

    ERIC PICHET

     Adam SMITH, le père de l’Economie. 

    LES EDITIONS DU SIECLE

    DU MEME AUTEUR

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    4/19

      4

     L’Analyse financière sectorielle, 1991, Peyrat-Courtens.

    Spéculer , 1992, Les Éditions de l’Archipel. 

     Le Guide pratique du MATIF , 2ème édition, 1995, SEFI.

     Mémoires d’un spéculateur , traduction de Reminiscences of a stock operator , d’EdwinLefebvre, 1997, PFI.

     Le Guide pratique des obligations, 2000, SEFI.

    Où va l’argent  ? 2000, Mallard Editions.

    Une Marche au hasard à travers la Bourse, traduction de A random walk down

    Wall Street , de G. Burton MALKIEL, 2000, PFI.

     Le Guide pratique des options et du Monep, 5ème édition, 2001, SEFI.

     Le Guide pratique de la Bourse, 2ème

     édition, 2001, SEFI.

     Adam SMITH, je connais ! 2001, Mallard Editions.

     Le Guide pratique de l’ISF , 4ème édition, 2002, Les Editions du Siècle.

    Stock-options, théorie et pratiques, 2002, Les Editions du Siècle.

     Le Guide pratique de l’impôt sur le revenu, 4ème édition, 2003, Les Editions duSiècle.

     Mais où sont les yachts des clients ?, traduction de Where are the customers’

     yachts ?, de Fred SCHWED, 2003, Les Editions du Siècle.

     Le Family office, 2003, Les Editions du Siècle.

     RICARDO, le premier théoricien de l’Economie, 2003, Les Editions du Siècle.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    5/19

      5

    SOMMAIRE

    L’esprit de la collection Comprendre les grands économistes par le texte.

    Avertissement.

    Introduction.

    I.  LA VIE ET L’ŒUVRE D’ADAM SMITH. 

    1.1 Un professeur de morale à la culture encyclopédique.

    1.2 La formation philosophique d’Adam SMITH. 

    1.3 Le livre qui fait connaître Adam SMITH : La Théorie des sentiments moraux.1.4 L’influence des premiers pionniers de l’économie.1.5 La Richesse des nations.

    1.6 Les dernières années.

    II.  LA PENSEE D’ADAM SMITH. 

    2.1 La nature de la richesse des nations.

    2.2 Le travail, principale source de la richesse.

    2.3 Le rôle-clé de l’épargne dans la prospérité.2.4 La propension à échanger et le credo du libre-échange.

    2.5 Le rôle de l’Etat et la fiscalité. 2.6 L’avenir radieux de l’économie de marché. 

    Conclusion : le legs d’Adam SMITH. 

    Lexique.

    Grandes dates de la vie d’Adam SMITH. 

    Bibliographie.

    Index des noms propres.

    Index des notions.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    6/19

      6

    L’ESPRIT DE LA COLLECTION : «COMPRENDRE LES GRANDS ECONOM ISTESPAR LE TEXTE. »

    « A l’inverse des Sciences de la nature dans lesquelles le dernier état de la connaissance se

     suffit à lui-même, il n’est jamais inutile - bien plus, il est toujours pertinent –  en Economie de

     se référer aux fondateurs, de rappeler la genèse des concepts, de repérer le mode de

    développement des théories, de dévoiler leurs configurations, voire même leurs

    contradictions. »

    Hubert BROCHIER, présentation de  La Pensée économique, de Mark

    BLAUG, Economica, 1981.

    Chaque livre de cette collection poursuit un but simple : permettre au lecteur en un

    laps de temps raisonnablement court de connaître à la fois la vie et l'œuvre d'un grandéconomiste. Pour ce faire, chaque volume est volontairement limité à 150 pages et condense

    tout ce qu’il faut savoir sur un auteur … et peut-être même un peu plus.La collection « Comprendre les grands économistes par le texte » a pour objet

     principal de cerner les grandes idées léguées par l'économiste étudié. On rappellera bien sûr la

    vie de l'auteur, mais ce sont toujours ses idées qui occuperont le premier plan. C'est pourquoi

    les ouvrages de cette collection offrent de véritables monographies, développées, complètes,

    et laissant une large part aux citations. VOLTAIRE nous a appris qu'"un dictionnaire sans

    citations est un squelette", il en serait de même d’un livre de vulgarisation de la penséeéconomique.

    Pourquoi s’intéresser aux grands économistes ?

    « Etud ier l’économie, ce n’est pas chercher à acquérir un ensemble de réponses toutes prêtes

    à des questions économiques, c’est apprendre à ne pas se laisser induire en erreur par les

    économistes. » Joan ROBINSON, The Economics of imperfect competition, 1933

    La connaissance de la pensée économique est un préalable indispensable à la

    compréhension du monde dans lequel nous vivons au début du XXIème. Les grands

    économistes qui se sont succédé au cours des trois cents dernières années nous laissent un

    double héritage.

    D'abord, leurs pensées ont constamment influencé le pouvoir politique et marqué les

     politiques économiques, à leur époque (les Mercantilistes étaient des conseillers du Prince) ou

     plus tard (l'influence de l'analyse marxiste sur le XXème). Les hommes politiques ont cherché

    et cherchent plus que jamais la solution aux problèmes économiques qu'ils rencontrent chezles Economistes. L'apostrophe du Dauphin à QUESNAY, le chef de file des Physiocrates, « la

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    7/19

      7

    secte des Economistes », en 1750 est toujours d'actualité : "Et vous M. QUESNAY, que

    feriez-vous si vous étiez le Roi?"

    Ensuite ce sont les économistes du passé qui éclairent le fonctionnement actuel de

    l’économie grâce aux notions qu’ils ont définies et aux théories Ŕ  qu'elles se soient confirmées

    ou non d’ailleurs - qu’ils ont échafaudées. Ils ont mis de l’ordre dans le paysage économique,dans ce monde plein « de bruit et de fureur » qu’ils ont inlassablement cherché à comprendre. 

    Comment s’intéresser aux grands économistes ?

    « Il est impos sible de comprendre l’Economie, si l’on ne connaît pas son histoire. »

    J.K. GALBRAITH, L’Economie en perspective, Le Seuil, 1989, page 11.

    La pensée des grands économistes n’est pas toujours d’un accès facile. Chaque livre decette collection se propose de jouer en quelque sorte un rôle de guide dans le maquis de la

     pensée économique par la mise en perspective de la vie et de l’œuvre de chaque auteur. Il a pour vocation de débroussailler les difficultés, de mettre en valeur les grandes idées, d’écarter  ou de réduire à leur juste proportion les points secondaires de l’œuvre, mais sans la dénaturer.Trop de professeurs, souvent éminents spécialistes de tel ou tel personnage, font une exégèse

     personnelle très poussée d'un auteur qu'ils connaissent parfaitement pour l'avoir fréquenté

     pendant des dizaines d’années et refusent toute autre vision, quand ils ne jettent pas , excathedra, l’anathème sur les présomptueux qui osent s'écarter de leur vérité. C'est en restantau plus près de l’auteur, en puisant abondamment dans sa pensée par le biais de largescitations, qu'on peut assurer un haut niveau d’honnêteté intellectuelle dans la compréhensionde ces idées. Le lecteur trouvera donc dans chaque ouvrage de cette collection de nombreuses

    citations de l'auteur ou sur l'auteur destinées à faciliter la mise en perspective de sa pensée.

    Les spécificités de la collection « Comprendre les grands économistes par

    le texte ».

    « Il n’existe pas de proposition économique valable qui ne puisse être exposée correctement  ,

    dans une langue claire, sans fioritures, et dans l’ensemble agréable. »

    J.K. GALBRAITH, L’Economie en perspective, Le Seuil, 1989, page 14.

    Les grands économistes ont une approche intellectuelle très différente  par exemple de celledes grands philosophes. En effet, ces derniers se posent des questions souvent abstraites et

    intemporelles qui débordent largement l'époque qui les a portées : Dieu, la Liberté, l'Art, les

    Sciences, etc. En revanche, en tout Economiste sommeille un alchimiste, toujours en quête de

    la Pierre philosophale, celle qui apportera la prospérité aux hommes. Aussi prétendent-ils

    souvent conseiller les Princes (les hommes politiques de nos jours) pour « améliorer la

    situation des hommes ». La prospérité des hommes et des nations, c’est un peu leur Graal.Pour cela, ils ne cessent d'observer hic et nunc le monde qui les entoure, de chercher à

    démonter les rouages mystérieux qui assurent l'existence même de leur société, de s’interrogersur des sujets d’actualité. Ce n'est qu'à par tir de ces observations particulières et partiellesqu'ils échafaudent des théories visant à l’universalité. Comme le rappelait Max WEBER  :

    « nous savons tous que la science qui est la nôtre (l’économie), de même que toutes lessciences qui ont pour objet des institutions et des événements culturels humains, sont issues

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    8/19

      8

    historiquement de considérations pratiques. Elaborer des jugements de valeur sur certaines

    mesures de politique économique, tel fut le but immédiat, et au départ unique de notre

    discipline »

    C'est pourquoi on ne peut comprendre pleinement la pensée d'un économiste qu'en la

    replaçant dans le contexte économique, social et intellectuel de son temps.

    Le plan des ouvrages de la collection.

    "Connaître, c'est comprendre toute chose au mieux de nos intérêts."

     NIETZSCHE, La Volonté de puissance, II, 122.

    Après une introduction qui rappelle l’importance de l’auteur et le situe dans son

    contexte, la première partie du livre est consacrée à sa vie et à son œuvre. A ce stade, il s’agitsurtout de replacer la pensée de l’Economiste dans son époque pour éviter le grave écueil del’anachronisme, et surtout de rappeler que les économistes traitent toujours des problèmes deleur temps. Au XVIIIème, Adam SMITH luttait contre les Mercantilistes avec les

    Physiocrates et contre les Physiocrates avec les Industriels… On abordera successivement lanaissance de la vocation d’Economiste et le mode de réalisation de l’œuvre. On pointera àl'occasion dans cette première partie ce qui apparaît comme une constante amusante chez les

    grands Economistes (mais après tout, n'en est-il pas de même pour chacun d'entre nous ?) : les

    contradictions entre les théories professées et les actes. Ainsi Adam SMITH, le père du

    libéralisme, a-t-il accepté la charge (en fait une sinécure !) de commissaire des douanes pour

    l’Ecosse…et la confortable pension qui y était attachée. Ce qui ne l’empêchait d’ailleurs pasde distribuer, tout au long de sa vie, une part importante de ses revenus à des œuvres decharité. Quant à R ICARDO, le premier théoricien de l’économie, il fut un pourfendeurimpitoyable des corn laws et des rentes injustifiées que percevaient les grands propriétaires

    terriens, auxquels il finit néanmoins par s'intégrer après avoir fait fortune en Bourse. Et que

    dire du - mauvais - boursicoteur que fut MARX !

    La seconde partie du livre présentera les principaux apports de la pensée de l'auteur. Il

    s'agira, sans tomber dans la solution de facilité qui consisterait à suivre la chronologie des

    œuvres, ou le plan de telle ou telle d'entre elles, de restituer la logique profonde de saréflexion, et d'en proposer une synthèse éclairante.

    La conclusion résumera son apport à la science économique et ouvrira sur la fécondité

    et l’actualité de sa pensée : en évoquant ses héritiers et ses contradicteurs, en vue de mettre en perspective son message pour en conserver l’essence.Un lexique, une brève notice biographique rappelant les dates importantes de la vie de

    l’Economiste, une bibliographie sélective et un index des personnes et des notions, achèverontce parcours.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    9/19

      9

    AVERTISSEMENT

    "Tout est dans Adam SMITH."

    Alfred MARSHALL, Principes d'Economie, 1890.

    Un auteur incontournable.

    Adam SMITH ouvre, tout naturellement, pourrait-on dire pour reprendre l’expressionfétiche de l’économiste écossais, la collection « Comprendre les Grands Economistes parle texte. »

    Il peut en effet se targuer d’une double légitimité à inaugurer la série desgrands économistes : non seulement il est le premier véritable économiste de l’histoire decette discipline, mais, de plus, sa pensée redevient d’une étonnante actualité. Il a même

     parfois fait preuve d’une prescience tout à fait surprenante. Deux exemples pour s’enconvaincre : il fut en 1776 un des rares intellectuels opposés à la colonisation (pour des

    raisons essentiellement économiques d'ailleurs) en dénonçant « l’extravagance et l’injustice(…) de l’établissement des colonies »1. De même, il a écrit dans La Richesse des Nations,avant la déclaration d’Indépendance, que « les colonies américaines constituent une nationqui, en fait, deviendra très probablement la plus grande et la plus formidable qui soit jamais

    au monde ».

    Adam SMITH a joué un rôle très particulier dans l’histoire de la pensée économique, puisque Jean-Baptiste SAY le qualifiait de « père de l’Economie politique ». Certes, on peutlui trouver des ancêtres (ceux qui représentent selon BARRE la phase préscientifique de

    l'économie et que l'on classe par commodité intellectuelle en trois grandes catégories, à savoir

    les aristotéliciens, les mercantilistes et les physiocrates). Mais ces « pionniers de la pensée

    économique »2 n’ont jamais proposé de vision globale de l’économie ; ils se sont attachés àdécrire et analyser tel ou tel aspect sans élaborer d’interprétation d’ensemble ni de lois

    générales. Si Adam SMITH est incontournable, c’est aussi parce qu’il est le symbole del'avènement de l’économie politique au statut de discipline à part entière. C'est pourquoi il nous faudra, pour mieux mesurer toute l'originalité de l'apport

    d'Adam SMITH à la théorie économique, préciser ce qu'il doit à ses nombreux prédécesseurs,

    qui font partie de la « préhistoire de l’économie", par exemple le motif de l'intérêt, clé devoûte du système SMITHien, qui lui vient de HUME. Nous tenterons donc, comme l'a fait

    SMITH lui-même dans la magistrale synthèse qu'est La  Richesse des Nations, d'embrasser

    d'un regard panoramique la longue lignée de ses devanciers.

    On établira également les liens, très forts en ce qui concerne Adam SMITH,

    entre sa pensée et celle des grands intellectuels qui l'ont précédé et dont il a assidûment

    fréquenté les livres au cœur de sa splendide bibliothèque, qui rassemblait un fonds de trois

    1  RDN , Tome 2, Livre IV, chapitre VII, page 209.

    2 L’expression est de KEYNES. 

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    10/19

      10

    mille ouvrages très éclectiques, dont un tiers en français et un tiers en latin, grec et italien. Ne

    s'est-il pas un jour écrié, en présentant sa chère bibliothèque à un ami : "Rien d'autre n'est

     beau en moi que mes livres !"3. Ainsi, Adam SMITH doit beaucoup à HUTCHESON qui fut

    son professeur de morale.

    Je souhaiterais également montrer avec force que la pensée d’Adam SMITH n’est

    nullement monolithique et qu’elle ne saurait se réduire à la caricature qu’ont tenté d’imposer -souvent avec succès d’ailleurs - ses contempteurs. En effet, la principale erreur quecommettent les commentateurs d’Adam SMITH est de le réduire à un ultra-libéral qu’il n’est

     pas, ou de faire de lui un thuriféraire sans failles des entrepreneurs. Relisons simplement

    quelques passages de La Richesse des Nations pour comprendre que le Professeur SMITH

    n’avait qu'une très relative estime pour « cet esprit de monopole, cette rapacité basse etenvieuse des marchands et manufacturiers »4. Il dénonce même la conspiration des

    entrepreneurs contre le bien public.

    Bref, Adam SMITH est avant tout un observateur et tout le contraire d’un idéologue, ils’est sans doute attaché, mieux que quiconque à son époque à la véritable mission de

    l’économie politique qui, selon Alfred MARSHALL, consiste « à étudier l’humanité dans laconduite de sa vie quotidienne. »5 

    L'analyse de la pensée de SMITH.

    « Adam SMITH eut la bonne fortune d’être complètement en accord avec l’état d’esprit de

     son temps. »

    SCHUMPETER, Histoire de l’analyse économique, NRF, 1983, page 264.

    La première partie de ce livre expose la vie et l’œuvre de l’économiste. L'analyse de la pensée de SMITH occupe toute la seconde partie. Pour lui, la richesse vient du travail. On

    étudiera donc ses définitions de la richesse, qu'elle soit individuelle ou collective, les trois

    facteurs de production, le rôle-clé du travail et la détermination du salaire, la rente et les

     profits. On exposera comment la division du travail engendre le surplus. La division du travail

    est le processus décisif des gains de productivité, et s'applique aussi bien au niveau d'une

    entreprise que d'un pays. Le surplus permet à son tour l'épargne, à laquelle l'Ecossais Adam

    SMITH voue un véritable culte. On analysera comment le surplus engendre l'échange en

    traitant de la loi de l'offre et de la demande, de la valeur des différents types de biens et de la

    théorie de la valeur-travail. La théorie des avantages absolus sera présentée, ainsi que lesidées de SMITH en matière monétaire et bancaire. On s'intéressera à la manière dont les

    nations s'enrichissent avec l'énoncé des grandes lois de la croissance. On présentera également

    les solutions du professeur SMITH pour assurer la prospérité aux nations. Après la

    conclusion, on trouvera un lexique, un récapitulatif des grandes dates de la vie de SMITH,

    une bibliographie et un double index des personnes et des notions.

    On l’a vu, une des caractéristiques de cette collection est de revenir aux textes desgrands auteurs et d’expurger leurs pensées, que les universitaires s’ingénient - parfois - à

    3

     Cité par HEILBRONER, Les Grands économistes, Le Seuil, 1971, page 43.4  RDN , Tome II, Livre IV, chapitre III, page 88.

    5 Alfred MARSHALL, Principes d’Economie politique, tome I, page 1.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    11/19

      11

    masquer sous une glose oiseuse. Afin de permettre aux étudiants (ainsi qu’à tous lecteurs)d’approfondir la pensée d’Adam SMITH, de nombreuses notes de bas de page renvoient à latraduction de Germain GARNIER (la seconde, celle de 1822 - la première datant de 1802),

    intitulée Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, (qui sera désignée

    dans notre texte par l’abréviation RDN ) traduction qui comprend notamment une notice

     biographique de BLANQUI, des commentaires de BUCHANAN, GARNIER, MACCULLOCH, MALTHUS, James MILL, RICARDO et SISMONDI ainsi que des notes de J-B

    SAY et qui a en outre l’avantage d’être disponible en ligne sur le site de la Bibliothèquenationale de France, dont il faut saluer, au passage, l’apport à la diffusion de la pensée. Seconnecter sur  www.bnf.fr  , puis aller sur GALLICA et taper « Adam SMITH » pour ensuite

    télécharger l’ œuvre maîtresse d’Adam SMITH (le temps de chargement est assez long, uneheure environ, pour les 520 pages du premier tome et les 714 pages du second).

    INTRODUCTION.

    "La vaste connaissance d'Adam SMITH des moindres détails et la profondeur de sa recherche

     philosophique fournissent la meilleure solution à toutes les questions qui ont un rapport avec

    l'histoire du commerce et avec le système de l'économie politique".

    William PITT, Discours de présentation du budget aux Communes, 17 février 1792,

    cité par John Rae dans Life of Adam SMITH , LONDRES, Macmillan, 1895, pages 290-291.

    On n'en finirait pas de recenser les apports d'Adam SMITH, tant à l'analyse des

     processus économiques concrets de son temps, qu'à l'élaboration d'une science économique

    universelle. L'auteur, en 1776, de La  Richesse des Nations, son œuvre-maîtresse, s'est en effetvoulu un homme complet, émule en cela des Encyclopédistes. Constamment à l'écoute des

    mutations économiques qui marquent le XVIIème, il parvient, grâce à un sens aigu de

    l'observation et de la synthèse, à fédérer les études et réflexions économiques préexistantes, et

    à les constituer en une discipline nouvelle et autonome : l'économie politique. Il est ainsi le

     premier à théoriser les principes de notre système actuel (capitaliste et libéral, fondé sur la

    valeur du travail mis au service de l'acquisition des richesses) inaugurant en cela la lignée des

    économistes modernes.

    L’auteur de La Ri chesse des Nations. 

    « La Richesse des nations est le meilleur livre disponible de politique économique. » 

    Thomas JEFFERSON, président des Etats-Unis (1801-1809).

    En 1776, l’éminent universitaire de GLASGOW, déjà mondialement connu pour unlivre de morale, Théorie des sentiments moraux, publié en 1759, sort un - gros - pavé de plus

    de mille pages intitulé An Inquiry into the nature and causes of the Wealth of nations qui

    éblouit immédiatement les Britanniques et qui sera Ŕ  mal - traduit en français sous le titre Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, ou plus communément De

    la richesse des nations. Il eût sans doute été préférable de parler de la "prospérité des

    http://www.bnf.fr/http://www.bnf.fr/http://www.bnf.fr/http://www.bnf.fr/

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    12/19

      12

     Nations". Cette somme constitue l'un des aboutissements, appliqué à l'économie, de la pensée

    du siècle des Lumières.

    Un fils des Lumières et de la raison triomphante.

    "Nous semblons avoir été admis à voir ce qui se passe derrière la scène".

    Adam SMITH, Essais philosophiques, Paris, 1793. 

    A une époque où l’Economie n’existe pas encore en tant que discipline autonome, leProfesseur SMITH enseigne la morale : un domaine particulièrement vaste au XVIIIème

     puisque ses cours traitent de théologie, d’éthique, de fiscalité, de politique. Cette vision trèsglobale du savoir convient parfaitement à un homme qui a, toute sa vie, fait preuve d'une

    véritable fringale de connaissance.

    Les grands empiristes, LOCKE et HUME en tête, dominent alors la philosophie

    anglaise. A la suite de Roger et Francis BACON, ils secouent avec succès le carcan de la

    scolastique aristotélicienne. D’Outre-Manche, souffle également un vent nouveau et AdamSMITH subit l’influence des Encyclopédistes. Il transpose dans le domaine marchand lesidées libérales des philosophes français à savoir « le principe simple et évident de la liberté

    naturelle ».

    Lorsqu’il rédige La Richesse des Nations de 1767 à 1776, la « révolution rationnelle »du XVIIème a déjà produit ses effets sur les idées politiques dans les écrits de

    MONTESQUIEU, VOLTAIRE, DIDEROT ou ROUSSEAU. En matière économique,

    QUESNAY, après l’Anglais PETTY, cherche à ordonnancer les faits en dehors de touteintervention divine. Adam SMITH marque, de ce point de vue, un moment fort du long

     processus d’émancipation de la science économique vis-à-vis de la pensée théologique.A la recherche des lois naturelles, il écrit dans sa Théorie des sentiments moraux que "

    la société humaine est semblable à une immense machine dont les mouvements harmonieux et

    réguliers produisent une foule d'effets agréables". L'optimisme est un trait de son caractère,

    allié à un sens aigu de l'observation des mutations économiques de son temps, dont il est le

     premier à tirer les conséquences théoriques.

    Le premier penseur de la Révolution industrielle.

    "Le personnage-clé au cours de cette évolution ne fut pas le marchand, qui achetait et vendait

    les marchandises, mais l'industriel, qui les produisait."

    J.K. Galbraith, L'Economie en perspective, Le Seuil, 1989, page 79.

    Que le premier penseur de l’économie ait été un Britannique, rien de plus normal :l’Angleterre est alors la première puissance mondiale. 

    Si l’économie française est encore très nettement agricole, les Anglais ont commencé,au tournant du XVIIème, leur révolution agricole (entre 1560 et 1640) et dès la fin du

    XVIIème, les diverses lois sur les « enclosures », qui jettent la main d’œuvre sur les routes àla recherche d’un travail, ont assuré la restructuration de l’agriculture et permis aux grands

     propriétaires de concentrer entre leurs mains 80% des terres. Même si, pour certains auteurs,

    les "enclosures" étaient une rationalisation qui remédiait à ce que HARDIN a appelé "the

    tragedy of commons" - car les biens communs étaient dégradés par tous - cette évolution a

    constitué un véritable fléau social. Thomas MORE affirme dès le début du XVIème, un rien

    grandiloquent, dans l’Utopie publiée en 1516 : « Les moutons mangent les hommes ».

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    13/19

      13

    Résultat : en 1688, on compte environ 4,5 millions d’agriculteurs sur 5,5 millionsd’habitants en Angleterre et en 1768, on en dénombre plus que 3 millions sur 8,5 millionsd’habitants - et le pays importe du blé.

    Si les lois sur les « enclosures » sont la cause principale de la révolution agricole,

    c’est l’évolution des techniques dans le textile et la sidérurgie qui va faire naître la première

    révolution industrielle. Dès 1709 DARBY découvre un procédé qui permet de passer de lafonte au bois à la fonte au coke. Pour les historiens, cette révolution s’étend de 1760 à 1830.La publication de la Richesse des Nations se situe donc entre l’invention de la machine àvapeur par James WATT en 1769 et la généralisation de son emploi en 1790. Cette dernière a

     permis de faire fonctionner les métiers à tisser et à filer et a poussé la filature à la

    mécanisation avec la « waterframe » de ARKWRIGHT en 1768. Il s'agit, selon

    HEILBRONER, d'un processus de croissance endogène. Attention toutefois à ne pas faire de

    contresens : à l'époque de SMITH, la révolution industrielle est en marche, mais l'industrie

    reste constituée essentiellement de petites entreprises, artisanales pour la plupart, et dirigées

     par des entrepreneurs qui y investissent leurs propres capitaux. Nous sommes encore très loin,

    en 1776, du capitalisme des grandes sociétés.

    Adam SMITH est donc le penseur qui conceptualise l'économie moderne,l’accélération des techniques et le développement des machines-outils ; on peut d’ailleurs liredans La Richesse des nations : « Chez les peuples opulents de l’Europe, on emploie à présentde grands capitaux dans le commerce et les manufactures (et non plus dans l’agriculture). »6 S'il peut apparaître comme le visionnaire capable d'anticiper l'évolution économique en cours

    à son époque (le noyau dur de la révolution industrielle serait selon les historiens situé entre

    1785 et 1799, avec l'augmentation sensible de la productivité), il va synthétiser les réflexions

    antérieures en matière économique et faire prendre à l'histoire de la pensée un tournant

    décisif.

    L’homme de la grande synthèse économique.

    « En économie comme en anatomie, le tout est beaucoup plus que la somme des parties. »

    J.K. GALBRAITH,  La Science économique et l’intérêt général , 1973.

    Il n'a quasiment rien inventé, mais il a résumé ce qui était dans l’air du temps, mieux,il a fécondé les idées de son temps. Avant lui des précurseurs, tels Pierre de

    BOISGUILBERT, William PETTY, François QUESNAY, MANDEVILLE avaient publié

    des études pertinentes sur tel ou tel domaine économique. Adam SMITH a assemblé le puzzle

     pendant dix ans (la durée de gestation de La Richesse des Nations). Il a intégré et critiqué des

    conceptions fragmentaires, partielles et confuses que d'autres avaient laissé avant lui : c’est unsynthétiseur.Même le passage le plus célèbre de La Richesse des Nations n’est pas de lui. Adam

    SMITH se garde bien de l'avouer, mais l’on sait aujourd’hui qu’il a traduit quasiment mot pour mot l’article "Epingles" de l’ Encyclopédie paru en 1755 (Tome 5, pages 803-807) signé par DELAIRE, un pseudonyme de DELEYRE (1726-1797).

    Le père de l’Economie politique.

    6 Adam SMITH, RDN , traduction Garnier, Tome I, Livre II, chapitre III, page 418.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    14/19

      14

    « Lisez Adam SMITH comme il le mérite et vous vous apercevrez qu’avant lui l’économie

     politique n’existait pas. »

    J-B. SAY.

    22 Le travail, principale source de la richesse.

    Relisons les premières phrases de La Richesse des Nations : "Le travail annuel d’unenation est le fonds primitif qui fournit à sa consommation annuelle toutes les choses

    nécessaires et commodes à la vie ; et ces choses sont toujours ou le produit immédiat de ce

    travail, ou achetées des autres nations avec ce produit. Ainsi, selon que ce produit, ou ce qui

    est acheté avec ce produit, se trouvera être dans une proportion plus ou moins grande avec le

    nombre des consommateurs, la nation sera plus ou moins bien pourvue de toutes les chosesnécessaires ou commodes dont elle éprouvera le besoin. Or dans toute nation, deux

    circonstances différentes déterminent cette proportion. Premièrement l'habileté, la dextérité et

    l'intelligence qu'on y apporte généralement dans l'application du travail et deuxièmement, la

     proportion qui s'y trouve entre le nombre de ceux qui sont occupés à un travail utile et le

    nombre de ceux qui ne le sont pas".7 

    Le travail est donc le fondement de la prospérité collective : « le fonds primitif d’unenation »8. Si la croissance est la base de la richesse, le travail est la base de la croissance.

    Encore faut-il trier le bon grain de l'ivraie, ce que fait Adam SMITH en nous proposant sa

    distinction essentielle entre travail productif (utile à la société) et travail improductif (au

    mieux neutre, au pire nuisible).

    221 La distinction travail productif/ travail improductif.

    "Il y a une sorte de travail qui ajoute à la valeur de l'objet sur lequel il s'exerce, il y en

    a une autre qui n'a pas le même effet. Le premier, produisant une valeur, peut être appelé

    travail productif  , le dernier travail non productif ".

    Adam SMITH, RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, page 410.

    Est productif tout travail qui ajoute une valeur nette au produit : « ainsi, le travail d'un

    ouvrier de manufacture ajoute en général à la valeur de matière sur laquelle travaille cet

    ouvrier, la valeur de sa substance et le profit de son maître. »9 

    En revanche, tous les autres types de travail sont improductifs. Adam SMITH définit

    le travail improductif comme " le travail qui ne se fixe ni ne se réalise sur aucun objet ou

    chose qui puisse se vendre". « Le travail de l’ouvrier se fixe et se réalise sur un sujetquelconque, ou sur une chose vénale qui dure au moins quelque temps après que le travail a

    cessé…. Le travail du domestique, au contraire, se fixe ou ne se réalise sur aucun objet, sur

    7

      RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 1.8  RDN , Tome I, Livre I, introduction, page 1.

    9  RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, pages 410-411.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    15/19

      15

    aucune chose qu’on puisse vendre ensuite. En général, ses services périssent à l’instant mêmeoù il les rend »10. En conséquence, "un particulier s’enrichit à employer une multituded’ouvriers fabricants; il s’appauvrit à entretenir une multitude de domestiques" .11 

    SMITH a un préjugé moral à l’encontre du travail improductif  : « Le travail d’undomestique, au contraire (de celui d’un ouvrier de manufacture) n’ajoute à la valeur de rien.

    Quoique le premier (l’ouvrier) reçoive des salaires que son maître lui avance, il ne lui coûte,dans ce fait, aucune dépense, la valeur de ces salaires se retrouvant en général avec un profitde plus dans l’augmentation de valeur du sujet auquel ce travail a été appliqué. Mais lasubsistance consommée par le domestique ne se trouve nulle part. »12 Il ne faut toutefois pas

    en conclure que le travail improductif est nécessairement méprisable : « Le travail de

    quelques-unes des classes les plus respectables de la société, de même que celui des

    domestiques, ne produit aucune valeur ; il ne se fixe ni ne se réalise sur aucun objet ou chose

    qui puisse se vendre, qui subsiste après la cession du travail et qui puisse servir à procurer par

    la suite une pareille quantité de travail. Le souverain, par exemple, ainsi que tous les

    magistrats civils et militaires qui servent sous lui, toute l'armée, toute la flotte, sont autant de

    travailleurs non productifs. Ils sont les serviteurs de l'Etat, et ils sont entretenus avec une

     partie du produit annuel de l'industrie d'autrui. Leur service, tout honorable, tout utile, toutnécessaire qu'il est, ne produit rien avec quoi on puisse ensuite se procurer une pareille

    quantité de service. La protection, la tranquillité, la défense de la chose publique, qui sont le

    résultat du travail d'une année, ne peuvent servir à acheter la protection, la tranquillité, la

    défense qu'il faut pour l'année suivante. Quelques-unes des professions les plus graves et les

     plus importantes, quelques-unes des plus frivoles, doivent être rangées dans cette classe : les

    ecclésiastiques, les gens de loi, les médecins et les gens de lettres de toute espèce, ainsi que

    les comédiens, les farceurs, les musiciens, les chanteurs, les danseurs d’Opéra, etc. Le travailde la plus vile de ces professions a sa valeur qui se règle sur les mêmes principes que toute

    autre sorte de travail ; et la plus noble et la plus utile ne produit par son travail rien avec quoi

    on puisse ensuite acheter ou faire faire pareille quantité de travail. Leur ouvrage à tous, tel que

    la déclamation de l’acteur, le débit de l’orateur ou les accords du musicien, s’évanouit aumoment même qu’il est produit. » 13 

    La répartition du revenu national entre productifs et improductifs.

    Le problème de la répartition des richesses préoccupe peu Adam SMITH. Il rappelle

    simplement que cette répartition se fait inégalement entre productifs et improductifs.

    "Les travailleurs productifs et les non productifs, et ceux qui ne travaillent pas du tout,sont tous également entretenus par le produit annuel de la terre et du travail du pays. Ce

     produit, quelque grand qu'il puisse être, ne saurait être infini, et a nécessairement ses bornes.

    Suivant donc que, dans une année, une portion plus ou moins grande de ce produit est

    employée à entretenir des gens non productifs, plus ou moins grande sera la portion qui

    restera pour les gens productifs, et plus ou moins grand sera par conséquent le produit de

    10  RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, page 413.

    11

      RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, page 411-412.12  RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, page 411.

    13  RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, page 414.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    16/19

      16

    l'année suivante : la totalité du produit annuel, à l'exception des productions spontanées de la

    terre, étant le fruit du travail productif."14 

    Outre la question, secondaire aux yeux de SMITH, de la répartition des fruits du

    travail, l’économiste s’intéresse en priorité aux moyens d’accroître ceux-ci, en augmentant la

     productivité : c’est tout l’intérêt de la division du travail. 

    222 La loi de la division du travail.

    "La division du travail engendre le surplus qui engendre l'échange."

     RDN, Livre I, 1.

    C’est la division du travail qui est la cause principale de la richesse des nations, autrementdit : « L’opulence naît de la division du travail ». Encore faut-il distinguer la division dutravail au sein d’une entreprise industrielle de la division sociale du travail au sein dechaque nation comme entre les différentes nations.

    2221 La division du travail dans l'entreprise.

    La division du travail est le principal moteur du progrès, même si elle n'est pas le seul,

    car elle entraîne la spécialisation, laquelle permet plus d’efficacité et des progrès techniques.

    « Dans chaque art, la division du travail , aussi loin qu’elle peut y être portée, donne lieu à unaccroissement proportionnel dans la puissance productive du travail. C’est cet avantage qui

     paraît avoir donné naissance à la séparation des divers emplois et métiers. » 15 

    Les causes de la division du travail.

    « Cette division du travail de laquelle découlent tant d’avantages, ne doit pas êtreregardée dans son origine comme l’effet d’une sagesse humaine, qui ait prévu et qui ait pour

     but cette opulence générale qui en est le résultat ; elle est la conséquence nécessaire, quoique

    lente et graduelle, d’un certain penchant naturel à tous les hommes, qui ne proposent pas des

    vues d’utilité aussi étendues : c’est le penchant qui les porte à trafiquer, à faire des trocs etdes échanges d’une chose pour une autre. »16 Elle peut apparaître dès lors que des besoinscomplémentaires naissent et que des excédents sont accumulés : « Ainsi, la certitude de

     pouvoir troquer tout le produit de son travail qui excède sa propre consommation, contre un

     pareil surplus du produit du travail des autres qui peut lui être nécessaire, encourage l’hommeà s’adonner à une occupation particulière, et à cultiver et perfectionner tout ce qu’il peut avoirde talent et d’intelligence pour cette espèce de travail. »17 

    14  RDN , Tome I, Livre II, chapitre III, page 415.

    15

      RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 8.16  RDN , Tome I, Livre I, chapitre II, page 18.

    17  RDN , Tome I, Livre I, chapitre II, page 20.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    17/19

      17

    La fameuse manufacture d’épingles. 

    Pour illustrer ce processus, SMITH emprunte à l' Encyclopédie l'exemple fameux de la

    manufacture d'épingles.

    « Un ouvrier tire le fil à la bobille (sic pour bobine ), un autre le dresse, un troisième

    coupe la dressée, un quatrième empointe, un cinquième est employé à émoudre le bout quidoit recevoir la tête. Cette tête est elle-même l’objet de deux ou trois opérations distinctes ; lafrapper est une besogne particulière ; blanchir les épingles en est une autre, c’est même unmétier distinct et séparé que de piquer les papiers et d’y bouter les épingles ; enfinl’important travail de faire une épingle est divisé en près de dix-huit opérations distinctes ouenviron, lesquelles, dans certaines fabriques, sont remplies par autant de mains différentes,

    quoique dans d’autres le même ouvrier en remplisse deux ou trois. J’ai vu une petite fabriquede ce genre qui n’employait que dix ouvriers, et où, par conséquent, quelques-uns d’euxétaient chargés de deux ou trois opérations. Mais, quoique la fabrique fût fort pauvre, et, par

    cette raison, mal outillée, cependant quand ils se mettaient en train, ils venaient à bout de

    faire entre eux environ douze livres d’épingles par jour : or, chaque livre contient au-delà de

    quatre mille épingles de taille moyenne. Ainsi, ces dix ouvriers pouvaient faire entre eux plusde quarante-huit milliers d’épingles dans une journée. Donc chaque ouvrier, faisant unedixième partie de ce produit, peut être considéré comme faisant dans sa journée quatre mille

    huit cents épingles. Mais s’ils avaient tous travaillé à part et indépendamment les uns desautres, et s’ils n’avaient pas été façonnés à cette besogne particulière, chacun d’euxassurément n’eût pas fait vingt épingles, peut-être pas une seule, dans sa journée, c’est-à-dire,à coup sûr, pas la deux cent quarantième partie, et pas peut-être la quatre mille huit centième

     partie de ce qu’ils sont maintenant en état de faire, en conséquence d’une division et d’unecombinaison convenables de leurs différentes opérations ».18 

    Subdiviser les tâches et spécialiser les ouvriers permet d’augmenter la productivité.« Cette grande augmentation dans la quantité d’ouvrage qu’un même nombre de bras est en état de fournir, en conséquence de la division du travail , est due à trois circonstances

    différentes : premièrement, à un accroissement d’habileté chez chaque ouvrierindividuellement, deuxièmement à l’épargne du temps qui se perd ordinairement quand on

     passe d’une espèce d’ouvrage à une autre et troisièmement enfin, à l’invention d’un grandnombre de machines qui facilitent et abrègent le travail, et qui permettent à un homme de

    remplir la tâche de plusieurs ».19 

    Les bienfaits de la division du travail. 

    « Les plus grandes améliorations dans la puissance productive du travail, et la plusgrande partie de l'habileté, de l’adresse et de l'intelligence avec laquelle il est dirigé ouappliqué, sont dues, à ce qu’il semble, à la division du travail »20.

    Ce progrès est le fruit de trois facteurs. Les simples ouvriers qui « naturellement,

    appliquaient toutes leurs pensées à trouver les moyens les plus courts et les plus aisés de

    remplir leur tâche particulière qui faisait leur seule occupation »21, mais surtout les fabricants

    de machines ont apporté leur contribution, car « un grand nombre (des découvertes tendant à

     perfectionner les machines et les outils) est dû à l’industrie des constructeurs de machines,

    18  RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, pages 7-8.

    19

      RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 11.20  RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 6.

    21  RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 13.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    18/19

      18

    depuis que cette industrie est devenue l’objet d’une pr ofession particulière, et quelques-unes àl’habileté de ceux qu’on nomme savants ou théoriciens ». 22 

    Ainsi, la division du travail est à l’origine de l’innovation dans le processus de production : « Il semble que c’est à la division du travail  qu’est originairement duel’invention de toutes ces machines propres à abréger et à faciliter le travail. Quand l’attention

    d’un homme est toute dirigée vers un objet, il est bien plus propre à découvrir les méthodesles plus promptes et les plus aisées pour l’atteindre, que lorsque cette attention embrasse unegrande variété de choses. Or, en conséquence de la division du travail , l’attention de chaquehomme est naturellement fixée tout entière sur un objet très simple. On doit donc

    naturellement attendre que quelqu’un de ceux qui sont employés à une branche séparée d’unouvrage, trouvera bientôt la méthode la plus courte et la plus facile de remplir sa tâche

     particulière, si la nature de cette tâche permet de l’espérer. »23 Enfin, cette même division du travail accroît le bien-être général : « Cette grande

    multiplication dans les produits de tous les différents arts et métiers, résultant de la division

    du travail , est ce qui, dans une société bien gouvernée, donne lieu à cette opulence générale

    qui se répand jusque dans les dernières classes du peuple. Chaque ouvrier se trouve avoir une

    grande quantité de son travail dont il peut disposer, outre ce qu’il en applique à ses propres besoins ; et comme les autres ouvriers sont aussi dans le même cas, il est à même d’échangerune grande quantité des marchandises fabriquées par lui, contre une grande quantité des leurs

    ou, ce qui est la même chose, contre le prix de ces marchandises. Il peut fournir abondamment

    ces autres ouvriers de ce dont ils ont besoin, et il trouve également à s’accommoder auprèsd’eux, en sorte qu’il se répand, parmi les différentes classes sociales, une abondanceuniverselle. » 24Du coup, « entre le mobilier d’un prince d’Europe et celui d’un paysanlaborieux et rangé, il n’y a peut-être pas autant de différence qu’entre les meubles de cedernier et ceux de tel roi d’Afrique qui règne sur dix mille sauvages nus, et qui dispose enmaître absolu de leur liberté et de leur vie ». 25 

    L’avantage principal de la division du travail est donc "d'accroître cette opulenceuniverselle qui s’étend jusque dans les classes les plus basses du peuple".

    Limites et inconvénients de la division du travail.

    CONCLUSION : le legs d'ADAM SMITH

    « Quoi de neuf ? Adam SMITH. »

    Milton FRIEDMAN

    Cette boutade, bien connue des économistes, n’en est pas moins révélatrice de la pérennité de la pensée d’Adam SMITH et même de son grand retour en force actuellementaprès l’échec final du communisme.

    ADAM SMITH : OBSOLETE ET VISIONNAIRE.

    22  RDN , Tome I, Livre I, chapitre II, page 14.

    23

      RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 13.24  RDN, Tome I, Livre I, chapitre I, pages 14-15.

    25  RDN , Tome I, Livre I, chapitre I, page 18.

  • 8/18/2019 Resume Livre Adam Smith

    19/19

      19

    « Depuis la fin du XIXème, la société anonyme géante envahissait de plus en plus la scène

    économique. Son importance était pour tout le monde une réalité, sauf pour les traités

    d’économie".

    GALBRAITH,  La Science économique et l’intérêt général, 1973.

    Le penseur du capitalisme préindustriel.

    Bien sûr, le capitalisme actuel est très différent du capitalisme préindustriel de 1776.

    Adam SMITH ne croyait pas au développement de la société par actions et ne pensait pas

    qu'une telle structure, dans laquelle les dirigeants sont les gestionnaires de l'argent des autres,

     pût fonctionner de manière rentable. L'avènement de la société par actions lui a donné tort sur

    ce point.

    Le triomphe de la société par actions a abouti à une situation très différente du monde

    de la petite entreprise du XVIIIème. SMITH décrit un monde atomistique dans lequel les

    différents acteurs (notamment les entreprises) sont trop modestes pour influencer le marché.

    Au XXème, l’Etat est un acteur économique ( quoique de moins en moins) et le « big business »26 peut biaiser le jeu de la concurrence, d’où la création dans tous les grands paysde diverses autorités de régulation qui traquent les abus de position dominante et les ententes

    illicites pour fixer les prix. Au début du XXIème, on revient sans doute, grâce au contrôle de

    ces instances, à un monde proche de la concurrence pure et parfaite, sous le contrôle des

     juges.

    Une étonnante prescience.

    Si la société par actions a conquis le monde, si les grandes entreprises exercent des

    monopoles ou des oligopoles dans certains secteurs, bien loin du monde atomisé d'Adam

    SMITH, certains phénomènes économiques contemporains s'interprètent parfaitement grâce

    sa grille d'analyse.

    26 On se référera avec profit au livre de GALBRAITH :  Le nouvel Etat industriel , 1967.