solidaires et responsables : investir et agir pour les

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A l’échelle mondiale, une personne sur huit souffre d’une alimentation insuffisante. Cette situation moralement inacceptable est Ă©galement lourde de consĂ©quences : la faim empĂȘche le bon dĂ©veloppement physique et cognitif des enfants, engendre des maladies ou les aggrave, freine l’emploi et le dĂ©veloppement Ă©conomique, et alimente les tensions politiques et sociales. Les causes de la faim sont multiples : Ă©conomiques et financiĂšres, avec par exemple la volatilitĂ© des prix des matiĂšres premiĂšres agricoles et Ă©nergĂ©tiques ; environnementales et climatiques, avec les phĂ©nomĂšnes de sĂ©cheresse, d’épuisement des sols et des ressources hydriques ; politiques et sociales, du fait des problĂ©matiques d’accaparement des sols, et plus largement des liens entre exclusion et sous-alimentation. Cette multiplicitĂ© d’enjeux appelle une rĂ©ponse concertĂ©e. C’est dans ce cadre que Convergences 2015, en ligne avec sa mission de dialogue multi-acteurs pour l’atteinte des Objectifs du MillĂ©naire, publie, avec 17 partenaires privĂ©s, publics et solidaires, le BaromĂštre de la faim 2012. Lors de la 5 Ăšme Ă©dition du Forum mondial Convergences 2015 en septembre 2012, les questions de souverainetĂ© alimentaire et d’insĂ©curitĂ© alimentaire ainsi que les problĂ©matiques de gestion de l’eau, d’énergie et la prĂ©servation des ressources naturelles occupaient une place centrale. Cette publication, spĂ©cifiquement consacrĂ©e aux problĂ©matiques de la sĂ©curitĂ© alimentaire et nutritionnelle, dresse l’état des lieux de la faim dans le monde. Elle prĂ©sente les principaux enseignements de l’Indice de la faim dans le monde 2012, et offre des perspectives d’experts, praticiens et dĂ©cideurs sur deux problĂ©matiques majeures : les liens entre la sĂ©curitĂ© alimentaire et l’appauvrissement des ressources en terres, en eau et en Ă©nergie, et les spĂ©cificitĂ©s de la crise alimentaire et nutritionnelle au Sahel. Cette 2 Ăšme Ă©dition du BaromĂštre de la faim fait Ă©galement Ă©cho aux rendez- vous internationaux majeurs de l’annĂ©e qu’ont Ă©tĂ© le Forum Mondial de l’Eau, la ConfĂ©rence de Rio, et l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations Unies. Elle intervient Ă©galement Ă  un moment crucial pour la communautĂ© internationale que constitue la rĂ©flexion sur les futurs objectifs de dĂ©veloppement durable. Le BaromĂštre de la faim 2012 se veut un outil non seulement d’information, mais Ă©galement de plaidoyer. En remerciant ici les auteurs pour leurs contributions, nous appelons les dĂ©cideurs Ă  entendre les appels que nous transmettons : sĂ©curiser les droits Ă  l’alimentation, Ă  la terre et Ă  l’eau ; intĂ©grer les considĂ©rations environnementales et sociales dans l’élaboration, la mise en Ɠuvre et l’évaluation des politiques publiques ; et protĂ©ger les populations les plus vulnĂ©rables aux chocs climatiques et Ă©conomiques. Alors que 20 pays font face Ă  un niveau de faim « alarmant » ou « extrĂȘmement alarmant », relever le dĂ©fi de la faim nĂ©cessite d’opĂ©rer – dĂšs aujourd’hui – un profond changement de paradigme. BAROMĂšTRE FAIM 2012 DE LA Jean-Michel Severino PrĂ©sident de Convergences 2015 EDITORIAL – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – SOLIDAIRES ET RESPONSABLES : INVESTIR ET AGIR POUR LES OBJECTIFS DU MILLENAIRE www.convergences2015.org © OXFAM France / Pablo Tosco Edition publiĂ©e Ă  l’occasion du Grand DĂ©bat Relever le dĂ©fi de la faim Convergences 2015, le 15 octobre 2012 Ă  Paris Indice de la faim dans le monde 2012 p. 2 Financements innovants pour l’agriculture, la sĂ©curitĂ© alimentaire et la nutrition p. 3 La nutrition, espoir olympique p. 4 GLOSSAIRE du BaromĂštre de la faim p. 4 Le scandale de l’accaparement des terres p. 5 Afrique de l’Ouest : l’agriculture familiale peut nourrir les villes p. 5 L’agriculture dans le monde : des enjeux communs au Nord et au Sud p. 6 Nourrir l’humanitĂ© sans dommage pour l’environnement p. 6 Assurer la sĂ©curitĂ© alimentaire : l’accĂšs Ă  l’eau des agricultures familiales p. 7 Faire face au dĂ©ïŹ de l’eau en crise p. 7 CAHIER Sahel p. 8-9 Le Sahel : crise soudaine ou problĂšme systĂ©mique ? p. 8 L’eau, une cause oubliĂ©e de la crise nutritionnelle au Sahel p. 8 La gestion et la prĂ©vention des crises pastorales sahĂ©liennes p. 9 La rĂ©silience nutritionnelle des enfants : une prioritĂ© pour le Sahel p. 9 InsĂ©curitĂ© alimentaire persistante et action internationale des collectivitĂ©s : comment agir ? p. 9 Nourrir ou conduire : il faut choisir ! p. 10 Un agrocarburant pas comme les autres p. 10 Afrique : la solution passe aussi par l’accĂšs Ă  l’énergie p. 10 Construire la rĂ©silience face aux changements climatiques p. 11 SĂ©curitĂ© alimentaire, variabilitĂ© des pluies et mobilitĂ© humaine p. 11 Entretien avec Pascal CanïŹn et Pierre Schapira p. 12 L a faim demeure un problĂšme grave Ă  l’échelle mondiale. Ce constat rĂ©pĂ©tĂ© est une rĂ©alitĂ© qui persiste, comme le montrent les chiffres des experts, que cela soit ceux du rapport « L’état de l’insĂ©curitĂ© alimentaire dans le monde » publiĂ© par la FAO, le PAM et l’IFAD, ou ceux de l’Indice de la faim dans le monde (voir prĂ©sentation page 2). La publication de rapports sur la faim est utile Ă  bien des Ă©gards. Outre le rappel annuel d’une crise qui perdure, ces indicateurs permettent d’apprĂ©cier prĂ©cisĂ©ment la prĂ©valence de la faim et de l’insĂ©curitĂ© alimentaire et nutritionnelle dans chaque pays et d’en visualiser l’évolution, afin de proposer des solutions adaptĂ©es dans le temps et l’espace Ă  la rĂ©alitĂ© des besoins. Mais ces chiffres sont une rĂ©alitĂ© quotidienne ou rĂ©currente pour des centaines de millions de personnes, aux visages plus ou moins visibles. En 2011, la Corne de l’Afrique ; en 2012, le Sahel (voir cahier pages 8 et 9) ; ces crises mĂ©diatisĂ©es cachent d’autres situations de vulnĂ©rabilitĂ© et des causes de la faim multiples. Dans la course Ă  la croissance Ă©conomique et au dĂ©veloppement de l’agriculture, la question des pĂ©nuries et de la dĂ©gradation des ressources naturelles a souvent Ă©tĂ© relĂ©guĂ©e au second plan. Or, la faim est inextricablement liĂ©e aux pressions croissantes qui s’exercent sur les ressources en terres, en eau et en Ă©nergie. Les changements dĂ©mographiques, l’accroissement des revenus et les schĂ©mas de consommation qui en dĂ©coulent, le changement climatique, et, parallĂšlement, la persistance de la pauvretĂ© ainsi que l’inadĂ©quation des politiques et des institutions, exercent une forte pression sur les ressources naturelles. Les rĂ©centes Ă©volutions dans le secteur foncier, hydrique et Ă©nergĂ©tique sont autant de signaux d’alarme qui doivent nous faire rĂ©agir. Du fait de la rarĂ©faction des ressources naturelles, la durabilitĂ© de la sĂ©curitĂ© alimentaire est inextricablement liĂ©e aux Ă©volutions dans le domaine de l’eau et de l’énergie ainsi qu’aux questions fonciĂšres. Les activitĂ©s non consacrĂ©es Ă  la production alimentaire exercent une pression sur ces ressources (voir articles page 5), notamment Ă  cause de l’affectation de terres pour la production de biocarburants (voir articles page 10), l’urbanisation et le dĂ©veloppement industriel. Garantir la sĂ©curitĂ© alimentaire, alors que nous sommes soumis Ă  un stress Ă©nergĂ©tique et hydrique ainsi qu’à une pĂ©nurie de terres, est un dĂ©fi de taille. Face Ă  la raretĂ© des ressources dont nous dĂ©pendons pour produire suffisamment de denrĂ©es alimentaires et nourrir le monde, il est nĂ©cessaire d’adopter une approche beaucoup plus prudente et intĂ©grĂ©e de l’affectation des terres, de l’énergie et de l’eau. Pour Ă©viter d’appauvrir davantage les ressources en terres, en eau et en Ă©nergie, et pour garantir Ă  tous un accĂšs Ă  une alimentation suffisante et adĂ©quate, il faut que cette production soit durable, qu’elle donne la prioritĂ© aux populations les plus pauvres (voir articles pages 5 et 6), qu’elle soit accompagnĂ©e d’une stratĂ©gie d’accĂšs raisonnĂ© aux ressources en eau productive et potable (voir articles pages 7 et 8) et Ă  l’énergie (voir articles page 10). Ces stratĂ©gies reposent sur une prise en compte des facteurs qui contribuent aux pĂ©nuries de ressources naturelles, notamment le changement climatique (voir articles page 11), une gestion plus responsable des ressources naturelles par les gouvernements, ainsi qu’une plus large diffusion des solutions et financements innovants pour l’utilisation des ressources rares et la production alimentaire (voir articles pages 3 et 12). Ces stratĂ©gies n’apparaĂźtront pas spontanĂ©ment ; il s’agit de les placer au cƓur de l’agenda politique (voir article page 4), de les Ă©laborer, et de les mettre en Ɠuvre en impliquant et en responsabilisant l’ensemble des acteurs et territoires concernĂ©s : les opĂ©rateurs du dĂ©veloppement, les institutions nationales et internationales, comme les collectivitĂ©s locales, le secteur privĂ© ainsi que les opĂ©rateurs locaux et la sociĂ©tĂ© civile (voir articles page 12). L’utilisation judicieuse et coordonnĂ©e des ressources naturelles, ainsi que la mise en Ɠuvre d’approches et de partenariats innovants, inclusifs et holistiques, auront un impact direct sur la sĂ©curitĂ© alimentaire des plus vulnĂ©rables. Assurer une sĂ©curitĂ© alimentaire durable dans un monde sous contraintes en eau, en Ă©nergie et en terres Introduction SOMMAIRE

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Page 1: SOLIDAIRES ET RESPONSABLES : INVESTIR ET AGIR POUR LES

A l’échelle mondiale, une personne sur huit souffre d’une alimentation insuffisante. Cette situation moralement inacceptable est

Ă©galement lourde de consĂ©quences : la faim empĂȘche le bon dĂ©veloppement physique et cognitif des enfants, engendre des maladies ou les aggrave, freine l’emploi et le dĂ©veloppement Ă©conomique, et alimente les tensions politiques et sociales.

Les causes de la faim sont multiples : Ă©conomiques et financiĂšres, avec par exemple la volatilitĂ© des prix des matiĂšres premiĂšres agricoles et Ă©nergĂ©tiques ; environnementales et climatiques, avec les phĂ©nomĂšnes de sĂ©cheresse, d’épuisement des sols et des ressources hydriques ; politiques et sociales, du fait des problĂ©matiques d’accaparement des sols, et plus largement des liens entre exclusion et sous-alimentation.

Cette multiplicitĂ© d’enjeux appelle une rĂ©ponse concertĂ©e. C’est dans ce cadre que Convergences 2015, en ligne avec sa mission de dialogue multi-acteurs pour l’atteinte des Objectifs du MillĂ©naire, publie, avec 17 partenaires privĂ©s, publics et solidaires, le BaromĂštre de la faim 2012.

Lors de la 5Ăšme Ă©dition du Forum mondial Convergences 2015 en septembre 2012, les questions de souverainetĂ© alimentaire et d’insĂ©curitĂ© alimentaire ainsi que les problĂ©matiques de gestion de l’eau, d’énergie et la prĂ©servation des ressources naturelles occupaient une place centrale.

Cette publication, spĂ©cifiquement consacrĂ©e aux problĂ©matiques de la sĂ©curitĂ© alimentaire et nutritionnelle, dresse l’état des lieux de la faim dans le monde. Elle prĂ©sente les principaux enseignements de l’Indice de la faim dans le monde 2012, et offre des perspectives d’experts, praticiens et dĂ©cideurs sur deux problĂ©matiques majeures : les liens entre la sĂ©curitĂ© alimentaire et l’appauvrissement des ressources en terres, en eau et en Ă©nergie, et les spĂ©cificitĂ©s de la crise alimentaire et nutritionnelle au Sahel.

Cette 2Ăšme Ă©dition du BaromĂštre de la faim fait Ă©galement Ă©cho aux rendez-vous internationaux majeurs de l’annĂ©e qu’ont Ă©tĂ© le Forum Mondial de l’Eau, la ConfĂ©rence de Rio, et l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations Unies. Elle intervient Ă©galement Ă  un moment crucial pour la communautĂ© internationale que constitue la rĂ©flexion sur les futurs objectifs de dĂ©veloppement durable.

Le BaromĂštre de la faim 2012 se veut un outil non seulement d’information, mais Ă©galement de plaidoyer. En remerciant ici les auteurs pour leurs contributions, nous appelons les dĂ©cideurs Ă  entendre les appels que nous transmettons : sĂ©curiser les droits Ă  l’alimentation, Ă  la terre et Ă  l’eau ; intĂ©grer les considĂ©rations environnementales et sociales dans l’élaboration, la mise en Ɠuvre et l’évaluation des politiques publiques ; et protĂ©ger les populations les plus vulnĂ©rables aux chocs climatiques et Ă©conomiques.

Alors que 20 pays font face Ă  un niveau de faim « alarmant » ou « extrĂȘmement alarmant », relever le dĂ©fi de la faim nĂ©cessite d’opĂ©rer – dĂšs aujourd’hui – un profond changement de paradigme.

baromĂštre FaIm 2012DE

LA

Jean-michel SeverinoPrésident de Convergences 2015

EDitoriAL

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SOLIDAIRES ET RESPONSABLES :INVESTIR ET AGIR POUR LES OBJECTIFS DU MILLENAIRE

www.convergences2015.org

© oXFam France / Pablo tosco

Edition publiĂ©e Ă  l’occasion du Grand DĂ©bat Relever le dĂ©fide la faim Convergences 2015, le 15 octobre 2012 Ă  Paris

indice de la faim dans le monde 2012 p. 2 Financements innovants pour l’agriculture, la sĂ©curitĂ© alimentaire et la nutrition p. 3 La nutrition, espoir olympique p. 4 GLossAirE du BaromĂštre de la faim p. 4 Le scandale de l’accaparement des terres p. 5 Afrique de l’ouest : l’agriculture familiale peut nourrir les villes p. 5 L’agriculture dans le monde : des enjeux communs au Nord

et au sud p. 6 Nourrir l’humanitĂ© sans dommage pour l’environnement p. 6  Assurer la sĂ©curitĂ© alimentaire : l’accĂšs Ă  l’eau des agricultures familiales p. 7 Faire face au dĂ©fi de l’eau en crise p. 7 CAhiEr sahel p. 8-9 Le sahel : crise soudaine ou problĂšme systĂ©mique ? p. 8 L’eau, une cause oubliĂ©e de

la crise nutritionnelle au sahel p. 8  La gestion et la prĂ©vention des crises pastorales sahĂ©liennes p. 9 La rĂ©silience nutritionnelle des enfants : une prioritĂ© pour le sahel p. 9 insĂ©curitĂ© alimentaire persistante et action internationale des collectivitĂ©s : comment agir ? p. 9 Nourrir ou conduire : il faut choisir ! p. 10  Un agrocarburant pas comme les autres p. 10 Afrique : la solution passe aussi par l’accĂšs Ă  l’énergie p. 10 Construire la rĂ©silience face aux changements climatiques p. 11 sĂ©curitĂ© alimentaire, variabilitĂ© des pluies et mobilitĂ© humaine p. 11 Entretien avec Pascal Canfin et Pierre schapira p. 12

L a faim demeure un problĂšme grave Ă  l’échelle mondiale. Ce constat rĂ©pĂ©tĂ© est une rĂ©alitĂ© qui persiste, comme le montrent les chiffres des

experts, que cela soit ceux du rapport « L’état de l’insĂ©curitĂ© alimentaire dans le monde » publiĂ© par la FAo, le PAM et l’iFAD, ou ceux de l’indice de la faim dans le monde (voir prĂ©sentation page 2). La publication de rapports sur la faim est utile Ă  bien des Ă©gards. outre le rappel annuel d’une crise qui perdure, ces indicateurs permettent d’apprĂ©cier prĂ©cisĂ©ment la prĂ©valence de la faim et de l’insĂ©curitĂ© alimentaire et nutritionnelle dans chaque pays et d’en visualiser l’évolution, afin de proposer des solutions adaptĂ©es dans le temps et l’espace Ă  la rĂ©alitĂ© des besoins.

Mais ces chiffres sont une rĂ©alitĂ© quotidienne ou rĂ©currente pour des centaines de millions de personnes, aux visages plus ou moins visibles. En 2011, la Corne de l’Afrique ; en 2012, le sahel (voir cahier pages 8 et 9) ; ces crises mĂ©diatisĂ©es cachent d’autres situations de vulnĂ©rabilitĂ© et

des causes de la faim multiples.Dans la course Ă  la croissance

Ă©conomique et au dĂ©veloppement de l’agriculture, la question des pĂ©nuries et de la dĂ©gradation des ressources naturelles a souvent Ă©tĂ© relĂ©guĂ©e au second plan.

or, la faim est inextricablement liĂ©e aux pressions croissantes qui s’exercent sur les ressources en terres, en eau et en Ă©nergie. Les changements dĂ©mographiques, l’accroissement des revenus et les schĂ©mas de consommation qui en dĂ©coulent, le changement climatique, et, parallĂšlement, la persistance de la pauvretĂ© ainsi que l’inadĂ©quation des politiques et des institutions, exercent une forte pression sur les ressources naturelles. Les rĂ©centes Ă©volutions dans le secteur foncier, hydrique et Ă©nergĂ©tique sont autant de signaux d’alarme qui doivent nous faire rĂ©agir.

Du fait de la rarĂ©faction des ressources naturelles, la durabilitĂ© de la sĂ©curitĂ© alimentaire est inextricablement liĂ©e aux Ă©volutions dans le domaine de l’eau et de l’énergie ainsi qu’aux questions fonciĂšres. Les activitĂ©s non consacrĂ©es

Ă  la production alimentaire exercent une pression sur ces ressources (voir articles page 5), notamment Ă  cause de l’affectation de terres pour la production de biocarburants (voir articles page 10), l’urbanisation et le dĂ©veloppement industriel.

Garantir la sĂ©curitĂ© alimentaire, alors que nous sommes soumis Ă  un stress Ă©nergĂ©tique et hydrique ainsi qu’à une pĂ©nurie de terres, est un dĂ©fi de taille. Face Ă  la raretĂ© des ressources dont nous dĂ©pendons pour produire suffisamment de denrĂ©es alimentaires et nourrir le monde, il est nĂ©cessaire d’adopter une approche beaucoup plus prudente et intĂ©grĂ©e de l’affectation des terres, de l’énergie et de l’eau. Pour Ă©viter d’appauvrir davantage les ressources en terres, en eau et en Ă©nergie, et pour garantir Ă  tous un accĂšs Ă  une alimentation suffisante et adĂ©quate, il faut que cette production soit durable, qu’elle donne la prioritĂ© aux populations les plus pauvres (voir articles pages 5 et 6), qu’elle soit accompagnĂ©e d’une stratĂ©gie d’accĂšs raisonnĂ© aux ressources en eau productive et potable (voir articles pages 7 et 8) et Ă  l’énergie (voir articles page 10).

Ces stratĂ©gies reposent sur une prise en compte des facteurs qui contribuent aux pĂ©nuries de ressources naturelles, notamment le changement climatique (voir articles page 11), une gestion plus responsable des ressources naturelles par les gouvernements, ainsi qu’une plus large diffusion des solutions et financements innovants pour l’utilisation des ressources rares et la production alimentaire (voir articles pages 3 et 12). Ces stratĂ©gies n’apparaĂźtront pas spontanĂ©ment ; il s’agit de les placer au cƓur de l’agenda politique (voir article page 4), de les Ă©laborer, et de les mettre en Ɠuvre en impliquant et en responsabilisant l’ensemble des acteurs et territoires concernĂ©s : les opĂ©rateurs du dĂ©veloppement, les institutions nationales et internationales, comme les collectivitĂ©s locales, le secteur privĂ© ainsi que les opĂ©rateurs locaux et la sociĂ©tĂ© civile (voir articles page 12).

L’utilisation judicieuse et coordonnĂ©e des ressources naturelles, ainsi que la mise en Ɠuvre d’approches et de partenariats innovants, inclusifs et holistiques, auront un impact direct sur la sĂ©curitĂ© alimentaire des plus vulnĂ©rables.

Assurer une sécurité alimentaire durable dans un monde sous contraintes en eau, en énergie et en terres

introduction

SommaIre

Page 2: SOLIDAIRES ET RESPONSABLES : INVESTIR ET AGIR POUR LES

––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Zimbabwe

Zambie

YĂ©men

Vietnam

Samoa

Venezuela

Vanuatu

Ouzbékistan

Uruguay

Etats-Unisd’AmĂ©rique

RoyaumeUni

E.A.U.

Ukraine

Ouganda

TurkménistanTurquie

Tunisie

Trinité & Tobago

Tonga

Togo

ThaĂŻlande

Tanzanie

Tadjikistan

Syrie

Suisse

Swaziland

Suriname

Soudan

Sri Lanka

Espagne

Afriquedu Sud

Somalie

Iles Salomon

Slov.

Slovaquie

Sierra Leone

Sénégal

Arabie Saoudite

Rw.

Fédération de Russie

Roumanie

Qatar

Portugal

Pologne

Philippines

PĂ©rou

Paraguay

PapouasieNouvelle-Guinée

Panama

Pakistan

Oman

NorvĂšge

Nigeria

Niger

Nicaragua

Nouvelle ZĂ©lande

P.B.

NĂ©pal

NamibieMozambique

Maroc

Mongolie

Moldavie

Mexique

Ile Maurice

MauritanieMali

Malaisie

Malawi

Madagascar

Mace.

Lux.

Lituanie

Libye

Liberia

Lesotho

Liban

Lettonie

Laos

Kirghizistan

KoweĂŻt

Corée du Sud

Corée du Nord

Kenya

Kazakhstan

Japon

JamaĂŻque

Italie

Israël

Irlande

IrakIran

Indonésie

Inde

Islande

Hongrie

HondurasHaĂŻti

Guyane

Guinée-BissauGuinée

Guatemala

Groenland

GrĂšce

Ghana

Allemagne

GĂ©orgie

Gambie

Gabon

Guyane Française

France

Finlande

Fidji

Ethiopie

Estonie

Erythrée

Guinée Equatoriale

Salvador

Egypte

Equateur

Timor-Oriental

RĂ©p. Dominicaine

Djibouti

Danemark

RĂ©p. TchĂšque

Chypre

Cuba

CĂŽted'Ivoire

Costa Rica

RĂ©p.Congo RĂ©p. DĂ©m.

Congo

Colombie

Chine

Chili

Tchad

RepubliqueCentrafricaine

Canada

Cameroun

Cambodge

Bur.

Myanmar

Burkina Faso

Bulgarie

Brunei

Brésil

Botswana

Bolivie

Bhoutan

BĂ©nin

BĂ©lize

Bel.

Biélorussie

Bangladesh

Azerb.

Autriche

Australie

Arménie

Argentine

Angola

Algérie

Albanie

Afghanistan

SerbieMont.

Croatie

Bahrein

Comores

Jordanie

SuĂšde

BosnieHerz.

L a crise alimentaire qui sévit au sahel, la sécheresse, les conflits autour des investissements dans les terres arables du monde entier et la

volatilitĂ© des prix de l’énergie et les chocs affectant l’approvisionnement Ă©nergĂ©tique tĂ©moignent de la raretĂ© des ressources dont nous dĂ©pendons pour produire suffisamment de denrĂ©es alimentaires et nourrir le monde. Afin de nourrir durablement 9 milliards d’ĂȘtres humains, la population mondiale projetĂ©e pour 2050 et qui aura une consommation Ă©quivalente Ă  celle de 12 milliards d’individus, il est tout Ă  fait indispensable que, dĂšs Ă  prĂ©sent, nous nous mettions Ă  produire davantage de denrĂ©es avec moins de ressources et que nous utilisions les rĂ©coltes de maniĂšre plus efficace.

L’indice de la faim dans le monde 2012, Global Hunger Index (Ghi), publiĂ© conjointement par l’institut international de recherche sur les Politiques Alimentaires (iFPri), Concern Worldwide et Welthungerhilfe, en partenariat avec ACtED, est un outil statistique qui permet de mesurer l’évolution de la faim dans le monde, de mettre en Ă©vidence les facteurs de la faim et de promouvoir la mise en place d’actions concrĂštes de lutte contre la faim. Le Ghi 2012 s’intĂ©resse particuliĂšrement Ă  la maniĂšre de garantir la sĂ©curitĂ© alimentaire durablement dans des situations de stress hydrique, de pĂ©nurie Ă©nergĂ©tique et de raretĂ© des terres.

La FaIm danS Le monde a dImInuĂ© maIS reSte « grave »

selon l’indice de la faim dans le monde 2012, le niveau de la faim Ă  l’échelle mondiale demeure « grave » et les progrĂšs relatifs Ă  la rĂ©duction du nombre d’individus souffrant de la faim ont Ă©tĂ© dramatiquement lents. Ainsi, 20 pays affichent des niveaux de faim « alarmants » ou « extrĂȘmement alarmants ».

Le Ghi mondial de 2012 a diminuĂ© de 26% par rapport au Ghi de 1990, passant de 19,8 Ă  14,7. Le principal recul du Ghi dans le monde – 2,6 points – a eu lieu entre 1990 et 1996 ; les progrĂšs ont ensuite ralenti. Entre le Ghi de 1990 et celui de 2012, 15 pays ont rĂ©duit leurs scores d’au moins 50%. 44 pays ont connu des progrĂšs modestes et ont pu diminuer leur score Ghi de 25% Ă  49,9%. En termes de progrĂšs absolus entre les Ghi de 1990 et de 2012, les pays qui ont le plus amĂ©liorĂ© leurs scores sont l’Angola, le Bangladesh, l’Ethiopie, le Malawi, le Nicaragua, le Niger et le Vietnam.

Les trois pays ayant obtenu un score Ghi 2012 extrĂȘmement alarmant sont le Burundi, l’ErythrĂ©e et haĂŻti. Le sĂ©isme dĂ©vastateur qui a eu lieu en janvier 2010 n’est pas reflĂ©tĂ© entiĂšrement dans l’indice de la faim dans le monde 2012 mais il a nĂ©anmoins replongĂ© haĂŻti dans la catĂ©gorie « extrĂȘmement alarmant ». Contrairement aux derniĂšres annĂ©es, la rĂ©publique dĂ©mocratique du Congo n’est pas classĂ©e dans la catĂ©gorie « extrĂȘmement alarmant ». Cela est dĂ» Ă  des donnĂ©es insuffisantes.

Les scores Ghi reflĂštent les donnĂ©es les plus rĂ©centes disponibles auprĂšs des gouvernements et des agences internationales. Le rapport ne prend pas en compte l’impact des Ă©vĂ©nements rĂ©cents : ces statistiques ne reflĂštent donc pas la situation actuelle.

deS dISParItéS régIonaLeS

La moyenne mondiale masque des Ă©carts importants entre les rĂ©gions et les pays. A l’échelle rĂ©gionale, ce sont l’Asie du sud et l’Afrique subsaharienne qui ont les niveaux de faim les plus Ă©levĂ©s. Cependant, le score Ghi 2012 a diminuĂ© de 16% en Afrique subsaharienne par rapport au score Ghi de 1990, de 26% en Asie du sud et de 35% au Proche-orient et en Afrique du Nord. L’Asie du sud a considĂ©rablement diminuĂ© son score

Ghi entre 1990 et 1996, notamment en rĂ©duisant le nombre d’enfants souffrant d’insuffisance pondĂ©rale, mais n’a pas pu maintenir un tel rythme de progrĂšs. Bien que l’Afrique subsaharienne ait accompli moins de progrĂšs que l’Asie du sud dans les annĂ©es 1990, elle a rattrapĂ© son retard depuis le dĂ©but du millĂ©naire, dĂ©sormais son score Ghi est infĂ©rieur Ă  celui de l’Asie du sud.

La contractIon deS reSSourceS natureLLeS : un déFI Pour La SécurIté aLImentaIre mondIaLe

DĂ©sormais, la sĂ©curitĂ© alimentaire est indissociable des dĂ©veloppements dans les secteurs de l’eau, de l’énergie et de la terre. Mais ces derniĂšres annĂ©es, les changements dĂ©mographiques, l’accroissement des revenus et les schĂ©mas de consommation qui en dĂ©coulent, le changement climatique, et, parallĂšlement, la persistance de

la pauvretĂ© ainsi que l’inadĂ©quation des politiques et des institutions, ont exercĂ© une forte pression sur les ressources naturelles.

La pĂ©nurie des ressources naturelles menace la production de denrĂ©es alimentaires ainsi que l’environnement dont elles dĂ©pendent. La hausse des prix de l’énergie a des retombĂ©es nĂ©gatives sur les coĂ»ts du carburant et des engrais pour les agriculteurs, augmente la demande de cultures destinĂ©es aux biocarburants par rapport aux cultures destinĂ©es Ă  l’alimentation et accroĂźt le prix d’utilisation de l’eau. L’agriculture s’inscrit dĂ©jĂ  dans un contexte de pĂ©nurie des terres en terme tant de qualitĂ© que de quantitĂ© : les meilleures terres arables de la planĂšte sont dĂ©jĂ  mises en culture et des pratiques agricoles non durables ont entraĂźnĂ© une dĂ©tĂ©rioration importante des sols. La raretĂ© de terres arables conjuguĂ©e Ă  des politiques peu prĂ©voyantes en matiĂšre de bioĂ©nergies a entraĂźnĂ© de considĂ©rables investissements Ă©trangers dans les terres d’un certain nombre

de pays en dĂ©veloppement, ce qui reprĂ©sente une menace pour les droits fonciers des peuples autochtones. En outre, il existe une pĂ©nurie d’eau qui risque de s’aggraver du fait du changement climatique.

LeS SoLutIonS Pour aSSurer une SécurIté aLImentaIre durabLe

La volatilitĂ© croissante des prix alimentaires et la flambĂ©e des prix des denrĂ©es alimentaires en partie due Ă  la pĂ©nurie en terres, en eau et en Ă©nergie ont poussĂ© de nombreux pays Ă  repenser l’agriculture et revoir leurs stratĂ©gies en matiĂšre de sĂ©curitĂ© alimentaire. En s’appuyant sur les rĂ©sultats des recherches et sur leur expĂ©rience de terrain, les auteurs du Ghi proposent des stratĂ©gies holistiques pour s’attaquer aux difficultĂ©s concernant les quatre dimensions : la terre, l’eau, l’énergie et l’alimentation. Ces recommendations reposent sur une gestion plus responsable des ressources naturelles

> 30,0 ExtrĂȘmement alarmant20,0–29,9 Alarmant10,0–19,9 Grave5,0–9,9 ModĂ©rĂ©< 4.9 BasPas de donnĂ©esPays industrialisĂ©s

ScoreS gHI 2012

Par catégorIe de SévérIté

Indice de la faim dans le monde 2012L’indice de la faim dans le monde propose, pour la septiĂšme annĂ©e consĂ©cutive, un calcul de l’évolution de la faim dans le monde ainsi qu’une analyse pluridimensionnelle de cet indicateur.

Résumé

Préférence donnée aux

profits immédiats

Absence de coordination des politiques sectorielles décidées au cas par cas à

l’échelle locale, nationale et internationale

L’Energie > terres consacrĂ©es Ă  la production de

combustibles et non de denrĂ©es alimentaires> DĂ©forestation> DĂ©veloppement de l’énergie

hydroélectrique sans prise en compte des

impacts sociaux et Ă©cologiques nĂ©gatifs > DĂ©pendance accrue de l’agriculture Ă 

l’énergie

La Terre> Désertification> Dégradation> Accaparement des terres> Production exploitante> Expropriation des propriétaires

historiques

Equilibre Ă  trouver entre les ressources naturelles et

le bien-ĂȘtre humain

Menaces à une sécurité alimentaire

durable

source : Les auteurs.

L’eau, L’énergIe et LeS PoLItIqueS FoncIĂšreS menacent La PĂ©rennItĂ© de La SĂ©curItĂ© aLImentaIre

L’Eau

> Consommation inefficace de l’eau> investissement au cas par cas sans coordination> Expropriation des petits exploitants historiques qui

disposaient d’un droit d’accùs à l’eau

2. BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

Page 3: SOLIDAIRES ET RESPONSABLES : INVESTIR ET AGIR POUR LES

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par les gouvernements, une plus large diffusion des solutions innovantes pour l’utilisation des ressources rares et une prise en compte des facteurs qui contribuent aux pĂ©nuries de ressources naturelles, notamment le changement climatique.

Afin de gĂ©rer de maniĂšre durable les ressources naturelles, il faut garantir les droits fonciers et le droit Ă  l’eau, de mettre un terme aux subventions inefficaces dans les domaines de l’eau, de l’énergie et des engrais et de crĂ©er un environnement macroĂ©conomique qui promeuve une gestion efficace des ressources naturelles. il est indispendable d’augmenter le nombre de solutions techniques, notamment celles qui permettent la prĂ©servation des ressources naturelles et prĂŽnent une gestion efficace des terres, de l’énergie et des engrais. il est Ă©galement urgent de maĂźtriser les facteurs de la raretĂ© des ressources naturelles, tel que le changement dĂ©mographique, en prenant en compte l’accĂšs des femmes Ă  l’éducation et Ă  la santĂ© reproductive, en

augmentant les salaires et en rĂ©duisant les inĂ©galitĂ©s. MĂȘme si garantir une sĂ©curitĂ© alimentaire mondiale et durable est un dĂ©fi de taille, cet objectif peut ĂȘtre atteignable et abordable mais il est impĂ©ratif d’agir rapidement. Le Ghi propose les recommandations suivantes :

1. gouvernance responsable des ressources naturelles (se doter d’un cadre rĂ©glementaire adaptĂ©) :

a. Garantir les droits fonciers et les droits liĂ©s Ă  l’eau,b. supprimer graduellement les subventions,c. CrĂ©er un environnement macroĂ©conomique propice.

2. renforcer les approches techniques :

a. investir dans les technologies de production agricole qui permettent une plus grande efficacitĂ© hydrique, Ă©nergĂ©tique et fonciĂšre,b. Promouvoir les approches qui entraĂźnent une utilisation plus efficace de la terre, de l’eau et de l’énergie

tout au long de la chaĂźne de valeur,c. Eviter l’épuisement des ressources grĂące aux suivis et Ă©valuations des stratĂ©gies appliquĂ©es en matiĂšre d’eau, de terre, d’énergie et de systĂšmes agricoles.

3. S’attaquer aux facteurs responsables de la pĂ©nurie des ressources naturelles (gĂ©rer les risques) :

a. Prendre en compte le changement dĂ©mographique, promouvoir l’accĂšs des femmes Ă  l’éducation et Ă  la santĂ© reproductive,b. AccroĂźtre les revenus, rĂ©duire les inĂ©galitĂ©s et promouvoir des modes de vie durables,c. AttĂ©nuer les effets du changement climatique et s’y adapter grĂące Ă  l’agriculture.

IndIce de lA fAIm dAns le monde 2012

Le Global hunger index (Ghi), ou indice de la faim dans le monde, est un outil statistique dĂ©veloppĂ© par l’institut international de recherche sur les Politiques Alimentaires (iFPri) qui permet de mesurer et de suivre l’évolution de la faim dans le monde.

Le Ghi est calculĂ© Ă  partir de trois indicateurs : la proportion de la population sous-alimentĂ©e, la prĂ©valence de l’insuffisance pondĂ©rale infantile, et le taux de mortalitĂ© infantile.

L’objectif du Ghi est de susciter une prise de conscience sur les diffĂ©rences qui existent entre les pays et les rĂ©gions par rapport Ă  la faim et promouvoir la mise en place de programmes de lutte contre ce flĂ©au.

PubliĂ©s chaque annĂ©e, ces rapports s’adressent Ă  un large public – dĂ©cideurs politiques, bailleurs de fonds, organisations non gouvernementales, enseignants, mĂ©dias, grand public – et visent Ă  favoriser une meilleure connaissance du problĂšme de la faim et des possibles solutions, en identifiant les facteurs de succĂšs et d’échec des programmes de rĂ©duction de la faim.

métHodoLogIe

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indice de la faim dans le mondeRELEVER LE DEFI DE LA FAIM : AssuRER unE sécuRIté ALIMEntAIRE DuRAbLE DAns un MonDE sous contRAIntEs En EAu, En énERgIE Et En tERREs

2012

notes : Pour le gHI 1990, les donnĂ©es sur la proportion de la population sous-alimentĂ©e sont celles de 1990-1992, les donnĂ©es sur la prĂ©valence de l’insuffisance pondĂ©rale infantile sont celles de l’annĂ©e la plus proche de 1990 dans la pĂ©riode 1988-1992 pour laquelle les donnĂ©es sont disponibles, et les donnĂ©es sur la mortalitĂ© infantile sont celles de 1990. Pour le gHI 1996, les donnĂ©es sur la proportion de la population sous-alimentĂ©e sont celles de 1995-1997, les donnĂ©es sur la prĂ©valence de l’insuffisance pondĂ©rale infantile sont celles de l’annĂ©e la plus proche de 1996 dans la pĂ©riode 1994-1998 pour laquelle les donnĂ©es sont disponibles, et les donnĂ©es sur la mortalitĂ© infantile sont celles de 1996. Pour le gHI 2001, les donnĂ©es sur la proportion de la population sous-alimentĂ©e sont celles de 2000-2002, les donnĂ©es sur la prĂ©valence de l’insuffisance pondĂ©rale infantile sont celles de l’annĂ©e la plus proche de 2001 dans la pĂ©riode 1999-2003 pour laquelle les donnĂ©es sont disponibles, et les donnĂ©es sur la mortalitĂ© infantile sont celles de 2001. Pour le gHI 2012, les donnĂ©es sur la proportion de la population sous-alimentĂ©e sont celles de 2006-2008, les donnĂ©es sur la prĂ©valence de l’insuffisance pondĂ©rale infantile sont celles de la derniĂšre annĂ©e de la pĂ©riode 2005-2010 pour laquelles les donnĂ©es son disponibles, et les donnĂ©es sur la mortalitĂ© infantile sont celles de 2010.

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Monde

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Asie du sud

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Afriquesubsaharienne

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Asie du sud-Est

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Amérique latine& Caraïbes

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Ghi Ghi Ghi Ghi

'90 '96 '01 '12

Proche-orient &Afrique du Nord

gHI 1990, 1996, 2001 et 2012 Par régIon, et contrIbutIon deS IndIcateurS auX gHI

taux de mortalité infantile Prévalence de la sous-alimentation infantileProportion de la sous-alimentation

5

10

15

20

25

30

35

19.8

30,3

24.0 24.322.5

24.6 24.823.7

20.7

14.5

12.0

9.67.9 8.2 7.9

6.85.3

8.8

5,24,4

2,8

7.46.1

4.9

17.2 16.314.7

Europe de l'Est et Communauté des

Etats indépendants

sco

re G

hi

Turquie -74KoweĂŻt -71

Mexique -62Iran -60

Nicaragua -59Ghana -58

Arabie Saoudite -57Chine -57

Vietnam -56Fidji -56 Corée du Nord +21

Burundi +17Swaziland +17Comores +16

CĂŽte d'Ivoire +10Botswana +2

0 20 40 60-20-40-60-70

Note : Les pays dont les scores Ghi de 1990 et de 2012 sont inférieurs à 5 n'ont pas été inclus.

Gagnants (diminution en pourcentage du

Ghi)

Perdants (augmentation en pour-

centage du Ghi)

Accent mis sur des bénéfices durables, à long terme

Politiques locales, nationales et internationales coordonnées

Energie > Evaluation rigoureuse des

Ă©nergies renouvelables

> Le changement de l’usage des

terres reflÚte la priorité donnée à

la sécurité alimentaire

> DĂ©veloppement des technologies

et des approches dotĂ©es d’une

plus grande efficacité énergétique

> Agroforesterie

Foncier > Garantir le respect des droits fonciers

> investissements directs Ă©trangers

transparents

> Planification en matiĂšre de paysages

> Préservation de la biodiversité

> Protection des sols

Synergies pleinement exploitées

Sécurité alimentaire

durable

source : Auteurs.

utILISer LeS SynergIeS danS LeS domaIneS de L’eau, La terre et L’énergIe Pour garantIr une SĂ©curItĂ© aLImentaIre durabLe

Eau

> Utilisation efficiente de l’eau

> Garantir les droits liĂ©s Ă  l’eau

> Gestion intégrée des bassins versants

et des zones de pĂąturages

PayS « gagnantS » et « PerdantS » entre Le gHI de 1990 et Le gHI de 2012

agrocarburants : Egalement appelĂ©s biocarburants, ces carburants Ă  base d’alcool, d’huile ou sous forme de gaz sont obtenus Ă  partir de diverses plantes (respectivement canne Ă  sucre, betterave et blĂ© ; colza, palme, tournesol et soja ; et fermentation de matiĂšre organique). Afin de limiter leurs impacts nĂ©gatifs, une nouvelle gĂ©nĂ©ration d’agrocarburants, produite Ă  partir de la cellulose prĂ©sente dans la paille, les arbres ou les algues a vu le jour. il faut distinguer les agrocarburants en filiĂšre longue des agrocarburants paysans en filiĂšre courte (voir articles page 10).

crise des prix : Forte hausse ou baisse des prix sur une pĂ©riode rĂ©duite. La crise des prix alimentaires de 2007-2008, rĂ©sultant d’une forte augmentation des cours du blĂ©, du riz et autres cĂ©rĂ©ales, a donnĂ© lieu Ă  des Ă©meutes dites de la faim dans de nombreux pays, tĂ©moignant de la dĂ©tresse et de la colĂšre de leurs habitants face aux difficultĂ©s Ă  s’alimenter. Les producteurs bĂ©nĂ©ficient normalement d’une telle situation, qui conduit Ă  une augmentation de leurs revenus. En revanche, la hausse du prix des denrĂ©es alimentaires a de lourdes consĂ©quences pour les consommateurs pauvres. Cela est particuliĂšrement le cas au sud, oĂč l’alimentation reprĂ©sente une part importante du revenu (plus de 50 %), et a fortiori dans le cas de pays ne disposant pas d’une production agricole suffisante, devant donc importer.

résilience : Capacité des communautés, et notamment des petits exploitants, à résister aux chocs par exemple grùce à un accÚs à la protection sociale, à de solides infrastructures (approvisionnement en eau, routes, réseaux électriques et de télécommunications, stockage, matériel de transformation des aliments, marchés
) et à un accÚs à une information fiable sur les prix. La possibilité pour les producteurs de diversifier leur activité et leurs sources de revenus est également un important facteur de résilience.

DĂ©FInITIOns

L' i m p o r t a n t s o u s -investissement dont souffre l’agriculture dans les pays en dĂ©veloppement, ainsi que la diminution de l’aide publique

au dĂ©veloppement (APD) dans ce secteur peuvent ĂȘtre des obstacles Ă  la sĂ©curitĂ© alimentaire d’une population mondiale croissante.

Pour pallier ces difficultĂ©s, le Groupe Pilote sur les financements innovants pour le dĂ©veloppement, initiative internationale lancĂ©e en 2006, Ă©tudie la possibilitĂ© de complĂ©ter l’APD – sans la remplacer – par des mĂ©canismes de financement innovants (MFi). L’objectif est de garantir des financements stables et pĂ©rennes pour l’agriculture, la sĂ©curitĂ© alimentaire et la nutrition, permettant notamment de mettre sur pied et d’encourager de nouveaux projets.

À l’occasion de sa 9Ăšme sĂ©ance plĂ©niĂšre, qui a eu lieu Ă  Bamako en juin 2011, le Groupe Pilote sur les financements innovants pour le dĂ©veloppement a conclu que les financements innovants peuvent contribuer Ă  l’augmentation des financements notamment pour l’agriculture, la sĂ©curitĂ© alimentaire et la nutrition. Un groupe de travail

international pour l’agriculture, la sĂ©curitĂ© alimentaire et la nutrition a ainsi Ă©tĂ© mis en place.

Ce groupe de travail a reçu le mandat d’élaborer, avec le soutien d’un ComitĂ© d’experts internationaux, un rapport qui sera prĂ©sentĂ© lors de la 11Ăšme sĂ©ance plĂ©niĂšre du Groupe Pilote sur les financements innovants pour le dĂ©veloppement en fĂ©vrier 2013 Ă  helsinki sous la prĂ©sidence finlandaise.

D’ici lĂ , une rĂ©union du groupe de travail (task Force) se tiendra en marge du ComitĂ© de la sĂ©curitĂ© alimentaire mondiale, Ă  la FAo Ă  rome, le 18 octobre prochain, au cours de laquelle sera prĂ©sentĂ© le travail en cours du ComitĂ© d’experts. Cette rĂ©union a pour objectif de discuter un menu d’options de mĂ©canismes de financements innovants pour la sĂ©curitĂ© alimentaire avec les pays membres, les organisations internationales et les oNG du Groupe Pilote sur les financements innovants pour le dĂ©veloppement.

Voir : www.leadinggroup.org

le secrétArIAt du groupe de trAvAIl « FInAnCEmEnTs InnOVAnTs POuR

LA séCuRITé ALImEnTAIRE »

financements innovants pour l’agriculture, la sĂ©curitĂ© alimentaire et la nutrition

3.BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

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en aoĂ»t dernier, les camĂ©ras du monde entier Ă©taient braquĂ©es sur les Jeux olympiques de Londres et l’exploit des athlĂštes. Des publicitĂ©s pour

des boissons Ă©nergisantes et des barres de cĂ©rĂ©ales survitaminĂ©es ont envahi nos Ă©crans de tĂ©lĂ©vision entre le 100 mĂštres d’Usain Bolt et le combat de judo de Lucie DĂ©cosse.

La nutrition des athlĂštes et leur rĂ©gime alimentaire sont une des clĂ©s de ce succĂšs qui fait l’admiration de milliards de spectateurs. Le Premier ministre britannique David Cameron s’est saisi de maniĂšre fort opportune, et un brin opportuniste, de cet engouement du public pour organiser un sommet contre la faim le jour de la cĂ©rĂ©monie de clĂŽture.

EntourĂ© de la star britannique d’origine somalienne Mo Farah, de la lĂ©gende du football brĂ©silienne PelĂ© et de membres d’oNG comme oNE ou save the Children, le prochain hĂŽte du G8 en 2013 a promis sur le perron du 10 Downing street de mettre la lutte contre la malnutrition Ă  l’agenda.

Des engagements ont Ă©tĂ© pris : l’Europe a promis d’utiliser son aide pour sortir 7 millions d’enfants de la malnutrition d’ici Ă  2025, l’irlande – qui prĂ©sidera l’Union l’annĂ©e prochaine – veut en faire une prioritĂ© et l’inde a annoncĂ© qu’elle doublerait ses investissements dans la nutrition. Des acteurs du secteur privĂ© ont Ă©galement promis qu’ils contribueraient Ă  l’effort global.

Les famines font parfois les Unes des journaux. La malnutrition est un mal plus sournois, qui passe souvent inaperçu. Pourtant 171 millions d’enfants souffrent de malnutrition chronique et chaque annĂ©e 3,5 millions de femmes et d’enfants meurent de sous-nutrition. Ce sont les cinq premiĂšres annĂ©es de la vie d’un enfant qui sont cruciales pour prĂ©venir ces dĂ©ficiences provoquant l’anĂ©mie et des consĂ©quences irrĂ©versibles, voire fatales.

L’Afrique est le continent le plus touchĂ© avec un taux de malnutrition inacceptable de 40%, taux qui n’a pas variĂ© ces 20 derniĂšres annĂ©es

alors que des progrĂšs significatifs ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s dans d’autres domaines comme l’éducation ou la santĂ©. si l’on n’agit pas vite et bien, ce taux pourrait encore croĂźtre ces prochaines annĂ©es selon l’oMs.

La nutrition a trop longtemps Ă©tĂ© absente de l’agenda politique ou Ă©parpillĂ©e dans d’autres programmes en matiĂšre de santĂ©, d’éducation ou de l’aide d’urgence. selon la Banque mondiale, seulement 398 millions de dollars ont Ă©tĂ© directement consacrĂ©s aux problĂšmes de nutrition en 2010, soit 0,3% de l’aide au dĂ©veloppement mondiale.

La malnutrition est pourtant un problĂšme global auquel il faut apporter une rĂ©ponse globale. Les dirigeants politiques, dans le Nord comme dans le sud, peuvent et doivent prendre les initiatives nĂ©cessaires. Cela passe notamment par l’éducation des femmes afin qu’elles varient l’alimentation de leurs enfants, des investissements Ă  long terme dans l’agriculture, ou encore l’utilisation de certains aliments fortifiĂ©s.

selon le rapport AAA publiĂ© par oNE en avril de cette annĂ©e, plus de 50 millions de personnes peuvent sortir de l’extrĂȘme pauvretĂ© et 15 millions d’enfants cesser de souffrir de malnutrition d’ici Ă  2015 si une stratĂ©gie novatrice d’investissements dans l’agriculture Ă©tait mise en application dans trente pays en dĂ©veloppement oĂč il existe dĂ©jĂ  des plans nationaux approuvĂ©s au niveau international. Mais il manque 20 milliards d’euros pour correctement financer ces programmes.

En mai 2012, l’AssemblĂ©e mondiale de la santĂ© a joint sa voix au chƓur de ceux rĂ©clamant plus d’investissements dans la nutrition. Elle a endossĂ© six nouveaux objectifs comprenant

notamment la rĂ©duction de la malnutrition de 40% d’ici Ă  2025, ce qui Ă©quivaut Ă  70 millions d’enfants qui Ă©chapperaient Ă  la malnutrition et ses consĂ©quences dĂ©sastreuses pour la santĂ©.

Lors du sommet de Londres, un objectif intermĂ©diaire a Ă©tĂ© fixĂ© d’ici les prochains Jo au BrĂ©sil en 2016 : si les politiques tiennent leurs promesses, 25 millions d’enfants pourraient Ă©viter de subir les consĂ©quences de la malnutrition dĂšs cette date.

David Cameron, dont le pays a fait l’admiration pour l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques, forcera-t-il autant l’admiration pour les initiatives qu’il fera adopter

par le G8 de 2013 pour combattre efficacement la malnutrition ?

Quant Ă  la France, dans une lettre Ă  oNE pendant la campagne prĂ©sidentielle, François hollande le dĂ©plorait amĂšrement : « beaucoup d’annonces (
) ont Ă©tĂ© faites depuis 40 ans en matiĂšre d’aide au dĂ©veloppement. Peu ont Ă©tĂ© tenues ». reste Ă  savoir maintenant si Monsieur hollande, dĂ©sormais PrĂ©sident, continuera de partager l’indignation du candidat.

guILLaume groSSoDIRECTEuR

OnE FRAnCE

baromĂštre de la faimgLoSSaIre

cadre intĂ©grĂ© de classification de la sĂ©curitĂ© alimentaire : Egalement appelĂ© iPC (integrated Food security Phase Classification), cet instrument dĂ©veloppĂ© par l’UnitĂ© d’analyse de la sĂ©curitĂ© alimentaire pour la somalie (FsAU) de la FAo, et en consultation avec des experts et praticiens des secteurs publics, acadĂ©miques et non-gouvernementaux, a Ă©tĂ© adoptĂ© par de nombreux pays. il vise Ă  amĂ©liorer l’analyse de la sĂ©curitĂ© alimentaire en classant les diffĂ©rentes phases des situations humanitaires ou de sĂ©curitĂ© alimentaire en fonction des effets provoquĂ©s sur les vies et les moyens d’existence. Chacune des cinq phases correspond Ă  une combinaison d’indicateurs, dont font partie le taux brut de mortalitĂ©, le taux de malnutrition aigĂŒe, le retard de croissance, l’accĂšs aux aliments et la diversitĂ© alimentaire, et l’accĂšs Ă  l’eau.

crise alimentaire et des moyens d’existence aiguĂ«  : QuatriĂšme phase de l’iPC, elle se dĂ©finit par une insuffisance aiguĂ« et critique de l’accĂšs Ă  l’alimentation assortie d’une malnutrition grave et inhabituelle et un Ă©puisement accĂ©lĂ©rĂ© des avoirs relatifs aux moyens d’existence qui, si la situation se maintient, va faire tomber la population en situation d’urgence humanitaire (phase 4) ou famine (phase 5), et/ou va probablement se traduire par une pauvretĂ© chronique. ses indicateurs comprennent : un taux de malnutrition aiguĂ« compris entre 10% et 15%, et un taux brut de mortalitĂ© compris entre 0.5 et 1.

dĂ©nutrition : La dĂ©nutrition est un Ă©tat pathologique rĂ©sultant d’apports nutritifs extĂ©rieurs insuffisants en regard des dĂ©penses Ă©nergĂ©tiques de l’organisme.

droit Ă  l’alimentation : Jean Ziegler, rapporteur spĂ©cial pour le droit Ă  l’alimentation auprĂšs des Nations Unies de 2000 Ă  2008, et auteur d’un ouvrage Ă©ponyme, le dĂ©finit comme « le droit d’avoir un accĂšs rĂ©gulier, permanent et libre, soit directement, soit au moyen d’achats monĂ©taires, Ă  une nourriture quantitativement et qualitativement adĂ©quate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple dont est issu le consommateur, et qui assure une vie psychique et physique, individuelle et collective, libre d’angoisse,

satisfaisante et digne ». il Ă©tait dĂ©jĂ  fait mention de ce droit dans la DĂ©claration universelle des droits de l’homme de 1945 et le Pacte international relatif aux droits Ă©conomiques, sociaux et culturels de 1966.

Faim : Consommation infĂ©rieure Ă  1800 calories par jour – le minimum requis par la plupart des personnes pour ĂȘtre en bonne santĂ© et mener une vie active.

Famine/catastrophe humanitaire : CinquiĂšme et derniĂšre phase de l’iPC, elle se dĂ©finit comme une grave perturbation sociale assortie d’un manque total d’accĂšs Ă  l’alimentation et/ou d’autres besoins de base dans laquelle la famine gĂ©nĂ©ralisĂ©e, la mort et le dĂ©placement sont incontestables. ses indicateurs comprennent : un taux de malnutrition aiguĂ« supĂ©rieur Ă  30%, un taux brut de mortalitĂ© supĂ©rieur Ă  2, et une insuffisance extrĂȘme de l’alimentation et de l’eau disponible (trĂšs infĂ©rieure Ă  2100 calories et infĂ©rieure Ă  4 litres par personne et par jour).

malnutrition : Dans un sens large, la malnutrition dĂ©signe aussi bien la sous-alimentation (consommation calorique infĂ©rieure au minimum requis pour ĂȘtre en bonne santĂ© et mener une vie active) que la suralimentation (rĂ©gime alimentaire dĂ©sĂ©quilibrĂ© avec un apport calorique excessif par rapport aux besoins Ă©nergĂ©tiques).

malnutrition aigĂŒe : Cet indicateur correspond Ă  un indice poids-taille infĂ©rieur Ă  -2. selon l’iPC, un niveau de malnutrition aiguĂ« supĂ©rieur Ă  15% de la population constitue un seuil de rĂ©fĂ©rence clĂ© pour l’urgence humanitaire.

Sécurité alimentaire et nutritionnelle : situation dans laquelle toutes les personnes ont, à tout moment, un accÚs physique, social et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active. La sécurité alimentaire et nutritionnelle comporte quatre dimensions : la disponibilité des produits alimentaires, grùce à une production agricole

suffisante ; l’accĂšs aux denrĂ©es alimentaires, avec des moyens de subsistance adĂ©quats  ; la qualitĂ© de l’alimentation, notamment nutritionnelle et sanitaire ; et la stabilitĂ© des approvisionnements pour prĂ©venir les crises alimentaires.

Sous-alimentation : Carences Ă©nergĂ©tiques, protĂ©iques, en vitamines et/ou en minĂ©raux. La sous-alimentation est le rĂ©sultat d’une alimentation insuffisante – tant en quantitĂ© qu’en qualitĂ© – ou d’une mauvaise assimilation de la nourriture consommĂ©e due Ă  des infections et/ou Ă  d’autres maladies.

SouverainetĂ© alimentaire : Cette notion, dĂ©fendue pour la premiĂšre fois en 1996 par La Via Campesina (ou LVC, mouvement international coordonnant des organisations de petits paysans) lors du sommet de la FAo sur l’alimentation, Ă  rome, Ă©tait alors dĂ©finie comme « le droit des populations, de leurs pays ou unions, Ă  dĂ©finir leur

politique agricole et alimentaire, sans dumping vis-Ă -vis des autres pays ». Le concept de souverainetĂ© alimentaire a depuis Ă©tĂ© rĂ©guliĂšrement retravaillĂ© et prĂ©cisĂ©, notamment lors des grands sommets altermondialistes. il implique de donner la prioritĂ© Ă  la production agricole locale, d’opĂ©rer des rĂ©formes agraires, de garantir un libre accĂšs aux semences, de permettre aux Etats de se protĂ©ger des importations agricoles et alimentaires Ă  trop bas prix, et de permettre aux populations de participer aux choix de politique agricole. Certaines de ces mesures peuvent aller Ă  l’encontre des accords de libre-Ă©change conclus Ă  l’oMC.

taux brut de mortalité : Cet indicateur correspond au nombre de décÚs sur 10 000 personnes par jour.

convergenceS 2015sOuRCEs : COALITIOn EAu, FAO, GHI, OCDE, OxFAm, PAm

tribune de guillaume grosso, Directeur de oNE France

LE G8 ET LA sECuRITĂ© ALImEnTAIRE

Le dernier G8 de Camp David a donnĂ© naissance Ă  la Nouvelle alliance pour la sĂ©curitĂ© alimentaire et nutritionnelle qui « augmentera les investissements domestiques et Ă©trangers privĂ©s responsables dans l’agriculture africaine, adoptera les innovations qui amĂ©lioreront la productivitĂ© agricole et rĂ©duira le risque portĂ© par les Ă©conomies vulnĂ©rables et les communautĂ©s ». L’Éthiopie, la tanzanie et le Ghana seront les premiers tandis que le Burkina Faso, le Mozambique et la CĂŽte d’ivoire devraient suivre rapidement.

45 entreprises nationales et internationales se sont engagĂ©es Ă  verser 3 milliards de dollars en 3 ans. Les pays donateurs du G8 ont dĂ©clarĂ© qu’ils ajouteront 3 milliards de dollars supplĂ©mentaires pour faciliter les investissements du secteur privĂ©, mais le calendrier, l’échelle et les engagements individuels des pays donateurs du G8 ou des compagnies privĂ©es n’ont pas Ă©tĂ© dĂ©taillĂ©s dans le communiquĂ© final du sommet.

Le G8 s’est aussi engagĂ© Ă  lever 1,2 milliard de dollars sur 3 ans auprĂšs d’autres donateurs – nouveaux et existants – pour soutenir le Programme mondial pour l’agriculture et la sĂ©curitĂ© alimentaire (GAFsP). En revanche, les problĂšmes de sĂ©curitĂ© alimentaire Ă©taient largement absents de l’agenda du sommet du G20 Ă  Los Cabos, au Mexique.

La nutrition, espoir olympique

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4. BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

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L’accaparement des terres des pays du sud par quelques sociĂ©tĂ©s d’Etat ou privĂ©es, appartenant Ă  des Ă©lites nationales ou des multinationales, prend des

proportions inquiĂ©tantes. Ce phĂ©nomĂšne n’est pas nouveau. Les colonisations des pays du sud par les puissances europĂ©ennes ou d’AmĂ©rique du Nord ont largement contribuĂ© Ă  la spoliation de leurs populations paysannes et au dĂ©veloppement de grands domaines Ă©tatiques ou privĂ©s tournĂ©s vers l’agroexportation de denrĂ©es tropicales (hĂ©vĂ©a, banane...). hĂ©ritage de ce passĂ©, l’accĂšs Ă  la terre est restĂ© extrĂȘmement inĂ©galitaire dans de nombreux pays d’AmĂ©rique latine, d’Afrique ou d’Asie. Une minoritĂ© d’exploitants agricoles y possĂšde toujours les meilleures terres agricoles et concentre Ă©galement l’eau d’irrigation.

Les rĂ©formes agraires qu’ont connues de nombreux pays et le dĂ©sintĂ©rĂȘt des investisseurs pour l’agriculture en pĂ©riode de bas prix agricoles ont eu un temps raison de ce phĂ©nomĂšne. Mais l ’accaparement reprend spectaculairement son essor depuis le

milieu des annĂ©es 2000. La croissance dĂ©mographique accompagnĂ©e d’une demande accrue de produits laitiers et carnĂ©s dans les rĂ©gimes alimentaires, des besoins nouveaux de cĂ©rĂ©ales ou graines olĂ©agineuses pour la production d’agrocarburants, l’émergence d’un marchĂ© du carbone, enfin la crise financiĂšre, ont rendu les investissements agricoles et forestiers trĂšs attractifs pour les entreprises de l’agrobusiness, du secteur Ă©nergĂ©tique, les banques et fonds de pension. Qui plus est, les gouvernants de certains Etats ont pris conscience du danger que reprĂ©sentait une trop grande dĂ©pendance aux importations alimentaires ou Ă©nergĂ©tiques. Les Etats du Golfe, la CorĂ©e du sud, la Chine, le Japon, la Lybie, ou encore singapour, l’inde, la Malaisie, l’Afrique du sud, soucieux tant de leur souverainetĂ© que de placer leurs excĂ©dents monĂ©taires et autres pĂ©trodollars, acquiĂšrent, via leurs entreprises Ă©tatiques ou leurs fonds souverains, des terres dans les pays du sud. ils soutiennent Ă©galement parfois leurs entreprises nationales Ă  faire de mĂȘme. Cette dynamique de location, concession,

voire achat de domaines de plusieurs milliers d’hectares au sud, profite souvent du manque de dĂ©mocratie locale et de la nĂ©gation des droits fonciers traditionnels historiques des populations rurales par les gouvernants et pouvoirs publics de ces pays. Elle bĂ©nĂ©ficie parfois de la bienveillance d’élites locales voire de leur complicitĂ© lorsque certaines y voient un moyen d’enrichissement personnel. Elles y voient en effet, tout comme d’ailleurs certaines institutions internationales, une voie de dĂ©veloppement Ă©conomique pour leur pays : les investissements Ă© t r ange r s dans l e s t e r r e s s’accompagneraient d’investissements dans les infrastructures routiĂšres ou d’irrigation nĂ©cessaires Ă  la mise en valeur de ces terres, le transfert de technologie, la crĂ©ation d’emplois. on Ă©voque Ă  l’échelle mondiale des projets d’investissement Ă  venir ou dĂ©jĂ  en cours de mise en valeur de 56 millions d’hectares (Banque mondiale, 2011), 80 millions d’hectares (international Land Coalition, 2011) ou mĂȘme 227 millions d’hectares (Land Matrix, 2012) dans plus de 60 pays. Pour l’Afrique qui concentre la majoritĂ© de ces grands projets, on annonce des superficies de 50 Ă  62 millions d’hectares. En 2010, selon une Ă©tude de la Banque mondiale, 37% de ces projets concernaient la production d’aliments destinĂ©s Ă  ĂȘtre exportĂ©s, et le reste Ă©tait destinĂ© Ă  la production d’agrocarburants, Ă  l’élevage, au bois ou Ă  d’autres industries.

or ce phĂ©nomĂšne d’accaparement des terres et de l’eau Ă  l’ampleur renouvelĂ©e se fait Ă©videmment au dĂ©triment des agricultures paysannes qui reprĂ©sentent 500 millions de

petites exploitations familiales – contre 20 millions d’exploitations moto-mĂ©canisĂ©es – et qui nourrissent toujours en grande partie le monde. Ces grands projets conduisent Ă  la spoliation des paysans de leurs terres, une compĂ©tition accrue et dĂ©loyale pour l’eau, et une moindre production d’aliments et de revenus pour les populations locales. ils dĂ©truisent plus d’emplois ruraux qu’ils n’en crĂ©ent. La mise en place de monocultures mĂ©canisĂ©es intensives en intrants chimiques et orientĂ©es vers l’export (cĂ©rĂ©ales, soja, jatropha, canne Ă  sucre, huile de palme
) crĂ©e des dĂ©gĂąts environnementaux de grande ampleur. L’accaparement des terres porte atteinte Ă  la sĂ©curitĂ© et la souverainetĂ© alimentaires des populations du sud. il compromet nos capacitĂ©s Ă  relever les dĂ©fis mondiaux en termes de production d’aliments sains, de rĂ©duction de la pauvretĂ©, de crĂ©ation d’emplois en milieu rural, de

prĂ©servation de l’environnement et de la biodiversitĂ©, d’économie d’énergie, de rĂ©duction des Ă©missions de gaz Ă  effet de serre ou d’adaptation au changement climatique. Aujourd’hui de nombreuses populations et leurs organisations se mobilisent contre ces grands projets et ceux qui les soutiennent, avec de premiers succĂšs au Guatemala, au Mali, Ă  Madagascar ou en inde.

il est donc plus qu’urgent de rĂ©clamer, comme le font AVsF et Coordination sUD, que partout soient respectĂ©s et sĂ©curisĂ©s les droits fonciers des populations paysannes du sud et que soit instaurĂ©e une rĂ©gulation contraignante, juste et efficace des investissements dans les terres.

cHrIStoPHe cHauveauDIRECTEuR DEs PROGRAmmEs DE

COOPĂ©RATIOnAVsF

Le scandale de l’accaparement des terres Au lieu de rĂ©soudre le problĂšme de la faim, les investissements dans de grands domaines agricoles au sud l’aggravent !

La population ouest-africaine est passĂ©e de 70 Ă  318 millions d’habitants entre 1950 et 2010. Elle devrait ĂȘtre multipliĂ©e par deux d’ici Ă  2050 pour atteindre

650 millions d’habitants. Ces chiffres sont encore plus spectaculaires si l’on s’intĂ©resse aux villes : alors qu’ils n’étaient que 7 millions en 1950, les urbains ouest-africains sont aujourd’hui 140 millions. Et ce chiffre devrait encore tripler d’ici Ă  20301. Ce taux de croissance, qui ne concerne pas que les grandes villes mais aussi les centres urbains de petite et moyenne taille, est le plus important jamais vu.

Une telle croissance est en train de changer radicalement les rapports villes-campagnes. La population urbaine augmentant au dĂ©triment de la population rurale, chaque paysan doit nourrir toujours plus de citadins. La question de la sĂ©curitĂ© alimentaire va donc devenir de plus en plus cruciale, d’autant que l’urbanisation se fait essentiellement au dĂ©triment de terres agricoles qui sont souvent parmi les plus fertiles. Et la crise alimentaire de 2008, provoquĂ©e par la hausse brutale des prix sur les marchĂ©s internationaux et aggravĂ©e par la spĂ©culation, a mis en Ă©vidence les risques d’une trop grande dĂ©pendance alimentaire, en particulier dans la sous-rĂ©gion ouest-africaine.

Nourrir les vi l les est donc, aujourd’hui plus que jamais, un impĂ©ratif pour les agricultures familiales. Les pays d’Afrique de l’ouest doivent augmenter leur autonomie alimentaire pour rĂ©duire les risques de crise en s’appuyant sur leur paysannerie. Les « Ă©meutes de la faim » du printemps 2008 ont en effet montrĂ© que la paix sociale obtenue dans les villes au dĂ©triment des paysans Ă©tait fragile.

Mais les marchĂ©s urbains sont aussi une formidable opportunitĂ©. Les populations urbaines Ă  faible pouvoir d’achat avaient en effet tendance Ă  consommer des produits importĂ©s souvent moins chers que les produits locaux. La flambĂ©e des prix a changĂ© la donne. Les produits locaux sont devenus plus compĂ©titifs, et les consommateurs urbains reviennent vers eux. Des enquĂȘtes mĂ©nages rĂ©alisĂ©es auprĂšs des habitants des capitales des pays de l’UEMoA (Union Économique et MonĂ©taire ouest-Africaine) indiquent que ces derniers estiment Ă  plus des trois quarts la part de leur alimentation qui provient de la rĂ©gion. Ces donnĂ©es sont discutables mais elles donnent une tendance qui semble ĂȘtre confirmĂ©e par le fait que les marchĂ©s urbains sont dĂ©sormais un dĂ©bouchĂ© plus important, en valeur,

que les marchĂ©s Ă  l’exportation pour les produits agricoles.

La demande urbaine peut donc servir de moteur au dĂ©veloppement des agricultures familiales, pour peu que celles-ci soient capables d’y rĂ©pondre, Ă  la fois en quantitĂ© et en qualitĂ©. Les organisations paysannes ne s’y sont d’ailleurs pas trompĂ©es. Dans leur document de plaidoyer « Comment les agricultures familiales peuvent nourrir le sĂ©nĂ©gal ? », la FĂ©dĂ©ration des oNG du sĂ©nĂ©gal (FoNGs) et le ComitĂ© National de Concertation et de CoopĂ©ration des ruraux (CNCr) insistent sur la nĂ©cessitĂ© de ne pas se limiter Ă  un soutien Ă  la production, mais d’intĂ©grer Ă©galement un travail sur les aspects liĂ©s Ă  la consommation.

La question de la production ne doit pas pour autant ĂȘtre laissĂ©e de cĂŽtĂ©. Les difficultĂ©s d’accĂšs aux facteurs de production (terres, intrants, crĂ©dits, etc.) restent l’un des problĂšmes majeurs auxquels sont confrontĂ©s les paysans de la sous-rĂ©gion. or, l’accĂšs Ă  ces facteurs est une condition indispensable Ă  la mise en Ɠuvre de systĂšmes de production qui rĂ©pondent Ă  la double exigence d’augmenter les volumes produits tout en prĂ©servant les ressources naturelles.

Nourrir les villes est donc à la fois une nécessité et une opportunité pour les paysans ouest-africains et leurs organisations, qui doivent pour cela relever un triple défi : répondre à la demande urbaine, créer des emplois ruraux et assurer des revenus dignes aux paysans, et répondre aux exigences de gestion durable des ressources naturelles.

Jean-baPtISte cavaLIerREsPOnsABLE AGRICuLTuRE

ET ALImEnTATIOn CFsI

1. Perspectives ouest-africaines, Club du sahel et de l’Afrique de l’Ouest (CsAO), OCDE : http://www.oecd.org/fr/csao/perspectivesouest-africaines/#peuplement.

La Fondation de France et le ComitĂ© Français pour la solidaritĂ© Internationale (CFsI) portent un programme dont l’enjeu principal est de permettre aux paysans ouest-africains de (re)conquĂ©rir les marchĂ©s urbains. Depuis 2009, prĂšs d’une centaine de projets ont ainsi Ă©tĂ© soutenus.

afrique de l’ouest : l’agriculture familiale peut nourrir les villes

© Jean mas / avSF

accaparement des terres : Acquisition ou location de terres agricoles arables par des acteurs Ă©trangers. Alors qu’il s’agit de subvenir aux besoins alimentaires de la population de leur propre pays dans le cas des acteurs publics (notamment

CorĂ©e du sud, Chine et Arabie saoudite), les acteurs privĂ©s (multinationales, fonds de placement) cherchent simplement une source de revenus additionnels. Ce phĂ©nomĂšne, initialement observĂ© en Afrique (principalement rDC, soudan, Madagascar, Ethiopie), s’étend aujourd’hui Ă  tous les continents. Plusieurs dizaines de millions d’hectares seraient dĂ©jĂ  concernĂ©s. L’enjeu pour les populations locales est de taille, car elles ne bĂ©nĂ©ficient souvent pas des cadres juridiques nĂ©cessaires pour protĂ©ger leurs droits Ă  la terre, et donc leurs sources de revenu et d’alimentation. Enfin, les terres Ă©tant le plus souvent utilisĂ©es pour des cultures intensives, cette pratique a Ă©galement des consĂ©quences dommageables pour l’environnement.

DĂ©FInITIOn droit Ă  la terre : il renvoie Ă  la question de l’accĂšs Ă  la terre et aux ressources naturelles, considĂ©rĂ©es comme facteurs de production. L’absence d’accĂšs Ă  la terre plonge certains mĂ©nages ou travailleurs agricoles dans une situation de dĂ©pendance, de pauvretĂ©, et de vulnĂ©rabilitĂ© alimentaire. Le droit Ă  la terre est donc liĂ© Ă  la notion de souverainetĂ© alimentaire et mis Ă  mal par les pratiques d’accaparement des terres. Les femmes sont les premiĂšres Ă  souffrir de l’absence de droits fonciers. oNU-habitat, l’agence des Nations Unies pour les Ă©tablissements humains, a rĂ©cemment adoptĂ© une rĂ©solution visant Ă  rĂ©soudre l’insĂ©curitĂ© rĂ©sultant de l’absence de droits fonciers dans de nombreux pays du sud.

DĂ©FInITIOn

© cFSI

5.BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

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aujourd’hui, 500 millions de petits agriculteurs souffrent rĂ©guliĂšrement de la faim car leur droit Ă  la terre est attaquĂ©. Alors que les

populations rurales augmentent et que la concurrence avec les grandes entitĂ©s industrielles croĂźt, les parcelles cultivĂ©es par les petits exploitants diminuent annĂ©e aprĂšs annĂ©e. Dans les pays du Nord comme dans les pays du sud, la pĂ©rennitĂ© d’un modĂšle sur des surfaces Ă  taille raisonnable, en polyculture, respectueux de l’équilibre environnemental, est trop souvent remise en cause par un modĂšle dominant en monoculture intensive. La disparition de ce modĂšle a des consĂ©quences graves sur nos sociĂ©tĂ©s sur les plans humain (isolement, perte du tissu social
) et environnemental (terres devenant stĂ©riles, disparition progressive de la biodiversité ).

Dans les pays du sud, 1 milliard d’agriculteurs (UNEsCo) n’ont que leurs mains pour travailler, n’ont pas ou peu accĂšs au crĂ©dit et encore moins Ă  la formation. Le nombre des exploitations et des terres agricoles diminue Ă©galement Ă  grande vitesse : 30 millions d’hectares de surfaces cultivĂ©es sont perdus chaque annĂ©e (oNU, aoĂ»t 2010).

Dans les pays du Nord et notamment en France, 4,5 millions d’actifs agricoles ont disparu durant le XXùme

siĂšcle et, sur la seule pĂ©riode 1979-2004, leur nombre a Ă©tĂ© divisĂ© par 3 (MinistĂšre de l’Agriculture, 2009).

Finalement dans les deux cas (au sud comme au Nord), un modĂšle sur des surfaces Ă  taille raisonnable, en polyculture, respectueux de l’équilibre environnemental, disparaĂźt Ă  grande vitesse au profit d’un modĂšle dominant en monoculture intensive.

Dans les deux cas, au Nord comme au sud, on constate des enjeux similaires, notamment :

‱ Une agriculture extensive en compĂ©tition avec l’agriculture intensive.

‱ Une situation de dĂ©pendance, vente en dessous des coĂ»ts de

production et un appauvrissement chronique.

‱ Des producteurs victimes des fluctuations des cours des matiùres premiùres.

‱ Un manque de soutien et de synergies collectives.

‱ Des exploitations non pĂ©rennes disparaissant de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration.

Des forces similaires existent Ă©galement :

‱ Une product ion « agro-Ă©cologique Â» combinant les savoirs ancestraux avec les techniques modernes permettant d’obtenir un modĂšle agricole durable.

‱ Une agro-Ă©cologie permettant Ă©galement d’apprĂ©hender la ferme comme un Ă©cosystĂšme vivant avec un Ă©quilibre Ă  trouver et Ă  tenir.

‱ Un mode d’agriculture respectant l’histoire des hommes et favorisant le tissu social.

‱ Des produits de qualitĂ© supĂ©rieure, sains et nutritifs respectant les matiĂšres premiĂšres.

Et dans les deux cas existe Ă©galement la nĂ©cessitĂ© de dĂ©fendre une petite et moyenne agriculture selon les principes du commerce Ă©quitable et de l’agriculture biologique. Le commerce Ă©quitable avec l’instauration d’un juste prix couvrant les frais de production et des fonctionnements des coopĂ©ratives, les notions clĂ©s de transparence sur le prix payĂ© aux coopĂ©ratives, mais Ă©galement l’agriculture biologique, peuvent permettre de pĂ©renniser, au Nord comme au sud, une petite et moyenne agriculture.

L’agro-Ă©cologie : des solutions et des rendements satisfaisants

L’agroĂ©cologie, notamment mise en avant par Pierre rabhi, permet d’avoir des solutions concrĂštes sur le terrain avec :

‱ La nĂ©cessitĂ© de travailler une exploitation dans le respect du territoire en intĂ©grant l’histoire et les connaissances empiriques avec les savoir-faire modernes.

‱ Une modernitĂ© qui permet de

sortir d’une logique du « tout intensif Â» mais qui n’empĂȘche pas de travailler Ă  augmenter le niveau de productivitĂ© naturel des sols et des Ă©cosystĂšmes.

‱ La nĂ©cessitĂ© de rĂ©inventer un modĂšle Ă©conomique fondĂ© sur la diversification de revenus, avec une ferme conçue comme un Ă©cosystĂšme avec des principes de polyculture et/ou de polyculture-Ă©levage, et une autonomie accrue de l’exploitation.

‱ L’intĂ©gration des systĂšmes agricoles durables avec une agriculture de conservation permettant notamment l’amĂ©lioration des conditions de vie des exploitants Ă  travers trois principes Ă  l’échelle de la parcelle : le travail minimal au sol, les associations et les rotations culturales, et la couverture permanente du sol.

‱ Et enfin une agriculture qui n’omet pas et surtout revisite le principe nourricier et civique du mĂ©tier assurant une continuitĂ© dans sa fonction sociĂ©tale.

Concernant les rendements de l’agroĂ©cologie, le dernier rapport de l’oNU de 2011 prĂ©cise justement que l’agroĂ©cologie pourrait doubler la production alimentaire en 10 ans : « si nous voulons nourrir 9 milliards de personnes en 2050, il est urgent d’adopter les techniques agricoles les plus efficaces 
 Et les preuves scientifiques actuelles dĂ©montrent que les mĂ©thodes agroĂ©cologiques sont plus efficaces que le recours aux engrais chimiques pour stimuler la production alimentaire dans les rĂ©gions difficiles oĂč se concentre la faim » prĂ©cise olivier de schutter, rapporteur spĂ©cial de l’oNU dans ce rapport.

C’est cette mĂȘme agroĂ©cologie qui peut justement permettre Ă  une agriculture de type familiale de subsister dans les diffĂ©rents pays, une agroĂ©cologie compatible avec une agriculture vivriĂšre et par lĂ -mĂȘme avec la souverainetĂ© alimentaire des diffĂ©rents pays.

Laurent muratetDIRECTEuR mARkETInG ET COmmunICATIOn

ALTER ECO

L’agriculture dans le monde : des enjeux communs au nord et au Sud

nous sommes plus de 7 milliards d’humains dans le monde et nous serons probablement plus de 9 milliards d’habitants en 2050.

L’émergence de nouvelles classes moyennes dans quelques pays Ă©mergents d’Asie et d’AmĂ©rique latine (Chine, Inde, BrĂ©sil, etc.) et la hausse de leur pouvoir d’achat se manifestent par de profondes transformations dans les modes de consommation alimentaire, avec une consommation croissante de

produits animaux (Ɠufs, lait et viandes). Il est donc Ă  prĂ©voir une augmentation encore plus rapide de la demande en produits vĂ©gĂ©taux, puisque 3 Ă  10 calories vĂ©gĂ©tales sont nĂ©cessaires pour produire 1 calorie animale. Il nous faut donc envisager un doublement en 40 ans des productions alimentaires vĂ©gĂ©tales pour espĂ©rer satisfaire cette demande croissante en aliments divers, tout en ayant soin de ne pas sacrifier la «  fertilitĂ© » des Ă©cosystĂšmes cultivĂ©s et pĂąturĂ©s, au nom de la satisfaction des besoins immĂ©diats.

C e p e n d a n t , d e n o m b r e u x dĂ©veloppements menacent la sĂ©curitĂ© alimentaire. En premier lieu, l’élargissement inconsidĂ©rĂ© des surfaces cultivĂ©es ou pĂąturĂ©es entraĂźne des processus de dĂ©forestation et de perte de biodiversitĂ©. De plus, les irrigations exagĂ©rĂ©es et mal conduites contribuent Ă  la rarĂ©faction des ressources en eaux de surface et souterraines, et l’emploi abusif d’engrais chimiques et de produits phytosanitaires augmente la pollution des aliments, de l’air, des eaux et des sols.

En outre, le recours inconsidĂ©rĂ© aux Ă©nergies fossiles (produits pĂ©troliers et gaz naturel) pour le fonctionnement des Ă©quipements motorisĂ©s ainsi que pour la fabrication des engrais azotĂ©s de synthĂšse s’avĂšre ĂȘtre un danger pour l’environnement. Par ailleurs, les Ă©missions croissantes de gaz Ă  effet de serre (gaz carbonique produit par la combustion des carburants et mĂ©thane issu de la rumination de nombreux herbivores), ainsi que l’érosion, le compactage et la salinisation de sols dont le travail et l’irrigation ne seraient pas maĂźtrisĂ©s, prĂ©sentent un autre risque pour les Ă©cosystĂšmes. Enfin, la prolifĂ©ration intempestive d’éventuels prĂ©dateurs, agents pathogĂšnes et espĂšces envahissantes, peuvent ĂȘtre nuisibles aux plantes cultivĂ©es et aux troupeaux domestiques.

Fort heureusement, des techniques agricoles inspirĂ©es de l’agro-Ă©cologie permettent d’ores et dĂ©jĂ  d’accroĂźtre

sensiblement les rendements Ă  l’hectare, sans recours excessif aux Ă©nergies fossiles et aux produits phytosanitaires. Elles consistent en premier lieu Ă  associer simultanĂ©ment dans un mĂȘme champ, ou Ă  y faire suivre systĂ©matiquement, des espĂšces et variĂ©tĂ©s aux physiologies diffĂ©rentes (cĂ©rĂ©ales, tubercules, lĂ©gumineuses et cucurbitacĂ©es), de façon Ă  ce que l’énergie solaire puisse ĂȘtre au mieux interceptĂ©e par leur feuillage et transformĂ©e en calories alimentaires au moyen de la photosynthĂšse.

Ces associations et rotations de cultures contribuent Ă  recouvrir trĂšs largement les terrains cultivĂ©s, pendant une durĂ©e la plus longue possible, avec pour effets de protĂ©ger ceux-ci de l’érosion, de limiter la

propagation des agents pathogĂšnes et de minimiser les risques de trĂšs mauvais rĂ©sultats en cas d’accidents climatiques. Enfin, l’intĂ©gration de plantes de l’ordre des lĂ©gumineuses (haricots, fĂšves, soja, trĂšfle, luzerne, etc.) dans ces mĂȘmes associations et rotations culturales permet de fixer l’azote de l’air pour la synthĂšse des protĂ©ines et la fertilisation des sols.

Les solutions existent et sont applicables au sud comme au Nord.

marc duFumIer AuTEuR DE Famines au sud,

malbouFFe au nord PARIs : nIL Ă©DITIOns, 2012

nourrir l’humanitĂ© sans dommage pour l’environnement

visite d’un producteur Ă©thiopien Ă  la coopĂ©rative rĂ©gionale d’agriculture biologique.

© Pam / riccardo gangaleFaim conjoncturelle : situation de faim temporaire liĂ©e Ă  une cause climatique ou politique (conflit) qui empĂȘche le fonctionnement normal de l’agriculture (semence et rĂ©colte), de l’élevage et de l’économie.

Faim structurelle : situation de faim chronique liĂ©e au fonctionnement mĂȘme de l’organisation politique, Ă©conomique et sociale : pauvretĂ©, rĂ©partition inĂ©gale des richesses, systĂšmes de production insuffisamment dĂ©veloppĂ©s, endettement. La faim structurelle ne correspond donc pas nĂ©cessairement Ă  un manque d’alimentation disponible. Au contraire, elle rĂ©sulte la plupart du temps de l’incapacitĂ© pour certaines franges de la population Ă  accĂ©der aux denrĂ©es agricoles. Cela peut ĂȘtre dĂ» Ă  une exclusion politique, Ă©conomique et/ou sociale, qui se traduit entre autres par l’absence des moyens de production ou de la force de travail suffisants, et par un manque d’accĂšs Ă  la terre. La faim est Ă©galement une question structurelle Ă  l’échelle mondiale : environ 2800 calories par personne et par jour sont produites dans le monde.

PrĂ©vention des risques liĂ©s aux catastrophes : Anticipation des catastrophes et mise en place de systĂšmes de protection pour les populations, pour les crises aiguĂ«s (catastrophes naturelles) comme pour les catastrophes Ă  Ă©volution lente comme la crise des prix alimentaires, en constituant par exemple des rĂ©serves d’aide humanitaire d’urgence et de nourriture, et en mettant en place des systĂšmes d’alerte, de prĂ©vention et des processus de suivi adaptĂ©s pour aider les populations vulnĂ©rables.

DĂ©FInITIOns

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o6. BAROmÈTRE FAIm 2012DE

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aujourd’hui encore, 950 mil l ions de personnes souffrent de la faim dans le monde dont 75% en milieu rural, non seulement

par manque d’accĂšs Ă  l’eau potable mais aussi Ă  l’eau agricole, moyen de production essentiel. En effet, alors que l’accĂšs Ă  l’eau pour l’agriculture reprĂ©sente un enjeu crucial pour assurer la sĂ©curitĂ© alimentaire, la concurrence pour la ressource ne cesse de s’aiguiser du fait de la croissance dĂ©mographique, de l’industrialisation, de l’urbanisation et de l’évolution des modes de production et de consommation. Les conflits, parfois violents, entre agriculteurs, entreprises et villes en pleine croissance, se multiplient dans le monde. Et face Ă  certains groupes d’intĂ©rĂȘt mieux reprĂ©sentĂ©s et puissants, les paysans subissent un accĂšs Ă  l’eau toujours plus restreint et une spoliation frĂ©quente de leurs droits historiques d’accĂšs Ă  la ressource.

Pourtant, l’eau est un bien commun qui doit d’abord servir l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Elle doit ĂȘtre physiquement et Ă©conomiquement accessible Ă  tous. Pour les agricultures familiales du sud, l’eau est un moyen de subsistance essentiel. De fait, le droit Ă  une alimentation suffisante, inclus dans le droit international, exige un accĂšs durable Ă  la ressource en eau. il s’agit donc de garantir ce droit Ă  l’accĂšs Ă  l’eau pour rĂ©pondre aux enjeux de sĂ©curitĂ© alimentaire et permettre aux agricultures familiales de produire suffisamment pour tous et dans des conditions environnementales soutenables.

Face à ces enjeux, la Coalition Eau et Coordination sUD appellent les décideurs à agir à différents niveaux.

Investir dans l’eau agricole pour les agricultures familiales

La dif fusion de techniques simples de collecte, de stockage et de distribution d’eau doit ĂȘtre appuyĂ©e. Ces techniques doivent

favoriser l’adaptation au changement climatique et surtout permettre la mise en valeur de terres pluviales. il est aussi nĂ©cessaire d’investir dans la construction et la rĂ©habilitation d’infrastructures d’irrigation qui soient conçues en fonction des capacitĂ©s de gestion locales, des savoir-faire et des pratiques existantes. Les compĂ©tences des institutions de gestion de l’eau (par exemple les associations d’usagers de l’eau) ainsi que des structures d’accompagnement (par exemple les services techniques) doivent ĂȘtre renforcĂ©es.

ProtĂ©ger les droits d’accĂšs et d’usage de l’eau pour produire

il est nĂ©cessaire d’appuyer les politiques de dĂ©veloppement rural

qui favorisent la reconnaissance et la sĂ©curisation des droits Ă  l’eau dans toute leur diversitĂ©. Face Ă  la montĂ©e des appropriations de terres Ă  grande Ă©chelle et donc des accaparements massifs des ressources en eau, il est urgent de reconnaĂźtre les droits des usagers existants et, en premier lieu, ceux des paysans. Les entreprises doivent mettre en place des procĂ©dures de diligence raisonnables afin de s’assurer que leurs activitĂ©s n’aient pas d’impacts nĂ©gatifs sur l’accĂšs Ă  l’eau, Ă  la terre et aux ressources naturelles. Et les gouvernements et les bailleurs doivent veiller Ă  la mise en place de telles mesures en se basant sur le droit international.

Favoriser la gestion concertĂ©e de l’eau

La mise en place d’instances de dialogue sur l’eau vise une rĂ©partition Ă©quitable de la ressource entre les usagers, les secteurs d’activitĂ©, les villes et les campagnes. Cette concertation permet la rĂ©solution des conflits, la recherche de consensus sociaux rĂ©pondant avant tout Ă  l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, et favorise ainsi la gestion durable de la ressource en eau en aval ou sur l’ensemble du territoire.

Alors que les derniers grands Ă©vĂ©nements internationaux, tels que le 6Ăšme Forum Mondial de l’Eau (en mars 2012), la ConfĂ©rence des Nations Unies sur le DĂ©veloppement Durable rio+20 (en juin) ou la semaine Mondiale de l’Eau (en aoĂ»t), ont rĂ©affirmĂ© la place centrale de l’eau dans le dĂ©veloppement et son

lien fondamental avec la sĂ©curitĂ© alimentaire, il est dĂ©sormais temps que les dĂ©cideurs et les acteurs du secteur agissent et mettent en Ɠuvre des actions concrĂštes s’appuyant sur ces recommandations.

« Pour une justice sociale de l’eau : garantir l’accĂšs Ă  l’eau aux agricultures familiales du sud Â», Coordination sud, octobre 2012 : http://www.coordinationsud.org/analyse-et-position/garantir-lacces-a-leau-aux-paysanneries-du-sud/

site web de la Coalition Eau : www.coalition-eau.org

KrISteL maLegueCOORDInATRICE, COORDInATIOn EAu

céLIne aLLaverdIanCHARGéE DE mIssIOn Au GRET

COmmIssIOn AGRICuLTuRE ET ALImEnTATIOn DE COORDInATIOn suD

La coalition eau regroupe 31 OnG françaises engagĂ©es pour promouvoir un accĂšs Ă  l’eau et Ă  l’assainissement pĂ©renne pour tous.

coordination sud (solidaritĂ© - urgence - DĂ©veloppement), coordination nationale des OnG françaises de solidaritĂ© internationale, regroupe plus de 130 OnG qui mĂšnent des actions humanitaires d’urgence et d’aide au dĂ©veloppement.

assurer la sĂ©curitĂ© alimentaire : l’accĂšs Ă  l’eau des agricultures familiales

P lusieurs milliards de personnes consomment une eau dont la qualité ne répond pas aux normes internationales. Au total, 50 % de la population

mondiale n’a pas accĂšs Ă  une eau potable selon les critĂšres de l’oMs. De plus, 2,6 milliards n’ont pas accĂšs Ă  un assainissement de base amĂ©liorĂ© et 3,6 millions de personnes succombent chaque annĂ©e des suites de maladies liĂ©es Ă  l’eau ou Ă  un environnement insalubre (maladies diarrhĂ©iques, paludisme, cholĂ©ra, poliomyĂ©lite, typhoĂŻde, dengue
).

CombinĂ©e Ă  une alimentation insuffisante ou peu variĂ©e, Ă  un manque d’accĂšs aux soins et plus gĂ©nĂ©ralement Ă  des conditions de vie difficiles, l’eau devient la premiĂšre cause mondiale de mortalitĂ© chez les enfants de moins de 5 ans.

Pourtant, le droit Ă  une eau potable salubre et propre a Ă©tĂ© Ă©rigĂ© au rang de « droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit Ă  la vie et de tous les droits de l’homme » par l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations Unies le 28 juillet 2010. Par ailleurs, la rĂ©duction de moitiĂ©, d’ici 2015, de la proportion de personnes qui n’ont pas accĂšs Ă  un approvisionnement en eau potable et Ă  des services d’assainissement de base est inscrite dans les objectifs du MillĂ©naire pour le dĂ©veloppement

(oMD). C’est pourquoi, en 2012, alors qu’il faudrait deux fois plus d’investissements au niveau mondial pour assurer un accĂšs Ă  l’eau potable Ă  ceux qui en sont privĂ©s, lutter contre l’eau insalubre demeure une urgence.

L’action humanitaire, aussi lĂ©gitime, impĂ©rative et vitale soit-elle, s’est donnĂ©e deux limites depuis toujours, qui sont celles de « ne pas nuire  » d’une part, et de « ne pas se substituer » d’autre part. En ce qui concerne l’accĂšs Ă  l’eau, Ă  l’hygiĂšne et Ă  l’assainissement dans les situations de crise, l’aide immĂ©diate est inextricablement liĂ©e Ă  l’existence de solutions structurantes d’accĂšs aux services de base. Cette Ă©vidence du « contiguum1 Â», si elle est partagĂ©e, est encore trop peu mise en pratique par les acteurs et les financeurs de l’aide, alors que l’accĂšs Ă  une eau sĂ»re demeure pourtant un enjeu vital pour des millions de personnes.

Les crises Ă©voluent rarement de façon linĂ©aire comme le prĂ©sente la thĂ©orie du continuum. De plus, le morcellement d’une rĂ©ponse humanitaire selon le continuum Urgence , recons t ruc t i on e t DĂ©veloppement est une vision qui ne tient pas compte des prĂ©occupations des populations. En effet, ces derniĂšres n’envisagent pas leur situation en ces termes. Leur objectif est d’amĂ©liorer

leur mode de subsistance et d’ĂȘtre en mesure de rĂ©sister aux chocs. Ainsi, face Ă  des contextes oĂč les situations d’urgence et de dĂ©veloppement se chevauchent, les acteurs humanitaires devraient mettre en place des rĂ©ponses de court et de long terme de maniĂšre simultanĂ©e. L’urgence, quand la situation le permet, doit emprunter les outils systĂ©miques d’analyse des sciences sociales (Ă©conomiques, sociologiques, anthropologiques, etc.), qui, centrĂ©s sur les besoins rĂ©els des populations, leurs capacitĂ©s et leurs vulnĂ©rabilitĂ©s, doivent permettre la mise en place de services prĂ©sentant de rĂ©elles valeurs ajoutĂ©es aux yeux des populations. La pĂ©rennitĂ© des actions et l’implication des communautĂ©s sont alors privilĂ©giĂ©es dans la plupart des cas, sauf lorsque la situation exige une planification Ă  court terme.

La lutte contre le cholĂ©ra, par exemple, exige des mesures t empo ra i r e s ou ponc tue l l e s d’urgence (distribution d’eau et de kits d’urgence, chloration...) mais aussi des projets plus structurels de dĂ©veloppement (construction d’un rĂ©seau d’eau potable de type AEP1). De mĂȘme, l’intĂ©gration d’une stratĂ©gie de sortie dĂšs la phase d’urgence aura un impact important sur la cohĂ©rence et la qualitĂ© des programmes de dĂ©veloppement. L’implication des

communautĂ©s en amont do i t assurer quant Ă  elle une plus grande pertinence des programmes et Ă©viter au maximum les effets indĂ©sirables liĂ©s Ă  l’intervention extĂ©rieure. Par ailleurs, la rĂ©silience des populations et leur capacitĂ© Ă  faire face Ă  une crise pourront ĂȘtre appuyĂ©es par des programmes de dĂ©veloppement comme le renforcement des moyens de subsistance de communautĂ©s affectĂ©es par des sĂ©cheresses rĂ©currentes Ă  travers la mise en place d’un projet de sĂ©curisation de la disponibilitĂ© de l’eau.

La gĂ©nĂ©ralisation d’une approche de l’aide humanitaire plus pragmatique,

mieux coordonnĂ©e particuliĂšrement en sortie de crise et dĂ©finie avec les populations, est impĂ©rative pour faire face au dĂ©fi de l’eau en crise(s).

1. Par opposition au terme « continuum », qui dĂ©signe les situations oĂč urgence, rĂ©habilitation et dĂ©veloppement sont des temps successifs clairement dĂ©limitĂ©s dans le temps. La plupart des crises humanitaires aujourd’hui sont des crises complexes oĂč ces trois « temps » peuvent s’entrecroiser.

Pour plus d’informations, voir la brochure de solidaritĂ©s International « Eau et assainissement en crises : l’urgence de solutions durables en contexte humanitaire Â» : http://www.solidarites.org/laminute/solidarites_document-technique_bd.pdf.

gregory buLItJean-marc LebLanc

RéFéREnTs EAu, HyGIÈnE ET AssAInIssEmEnTsOLIDARITés InTERnATIOnAL

Faire face au dĂ©fi de l’eau en crise

© coalition eau

© Solidarités International

droit Ă  l’eau : selon le ComitĂ© des droits Ă©conomiques, sociaux et culturels des Nations Unies, « le droit Ă  l’eau consiste en un approvis ionnement suff isant, physiquement accessible et Ă  un coĂ»t abordable, d’une eau salubre et de qualitĂ© acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun. Une quantitĂ© adĂ©quate d’eau salubre est nĂ©cessaire pour prĂ©venir la mortalitĂ© due Ă  la dĂ©shydratation et pour rĂ©duire le risque de transmission de maladies d’origine hydrique ainsi que pour la consommation, la cuisine et l’hygiĂšne personnelle et domestique. Â» L’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations Unies du 28 juillet 2010 a reconnu le droit Ă  l’eau et Ă  l’assainissement comme un droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit Ă  la vie et de tous les droits de l’homme.

DĂ©FInITIOn

7.BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

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cette annĂ©e, une nouvelle crise alimentaire et nutritionnelle frappe le sahel. 18 millions de personnes sont en situation d’insĂ©curitĂ© alimentaire

sĂ©vĂšre, et la rĂ©ponse internationale est la plus importante jamais mise en Ɠuvre pour la rĂ©gion. Le manque de pluie et les mauvaises rĂ©coltes consĂ©cutives constituent les causes les plus souvent mises en avant.

Pourtant, chaque annĂ©e, environ 1,5 million d’enfants de moins de 5 ans souffrent de sous-nutrition aiguĂ« sous des formes sĂ©vĂšres ou modĂ©rĂ©es et plus de 600 000 enfants meurent de sous-nutrition. Cette permanence de taux de sous-nutrition extrĂȘmement Ă©levĂ©s indique que les causes ne sont donc pas seulement spĂ©cifiques aux mauvaises annĂ©es agricoles, mais aussi structurelles.

La faible diversitĂ© alimentaire, les prat iques nutr i t ionnel les inadaptĂ©es aux jeunes enfants, mais aussi l’absence de soins

de santĂ© disponibles Ă  un coĂ»t accessible, les pratiques de soins inadĂ©quats Ă  l’égard des enfants au sein des familles, le manque d’éducation nutritionnelle et de connaissances des pratiques familiales essentielles, telles que l’allaitement maternel exclusif : tous ces facteurs contribuent fortement Ă  accroĂźtre la sous-nutrition. Parmi les causes structurelles de la sous-nutrition ainsi oubliĂ©es, le manque d’accĂšs Ă  l’eau potable et Ă  l’assainissement, qui a un lien direct avec le statut nutr i t ionnel de l ’enfant, est fondamental : la mauvaise qualitĂ© de l’eau, un assainissement insuffisant et une mauvaise hygiĂšne contribuent en effet fortement Ă  la sous-nutrition et au retard de croissance des enfants.

L’eau potable, l’assainissement et l’hygiĂšne comme facteurs de santĂ© et de nutrition

Dans le monde, 783 millions de personnes n’ont pas accĂšs Ă  une source d’eau amĂ©liorĂ©e (Nations

Unies, mars 201) et 2,5 milliards de personnes n’ont pas accĂšs Ă  l’assainissement. Dans la plupart des zones du sahel, le pourcentage des mĂ©nages n’ayant pas accĂšs Ă  l’eau potable et Ă  l’assainissement est bien supĂ©rieur Ă  la moyenne mondiale.

L’accĂšs pour tous Ă  l’eau potable, Ă  un assainissement de base et Ă  un environnement hygiĂ©nique est un facteur primordial pour l’état de santĂ© et la nutrition. L’insalubritĂ© de l’eau et le manque d’assainissement sont notamment Ă  l’origine de maladies infectieuses hydriques comme le cholĂ©ra et d’autres maladies diarrhĂ©iques, ainsi que de maladies dites aquatiques comme le paludisme ou la dengue. PrĂšs de la moitiĂ© de la population des pays en dĂ©veloppement souffre au moins une fois dans sa vie d’un problĂšme de santĂ© dĂ» Ă  une mauvaise qualitĂ© de l’eau ou Ă  un environnement sanitaire inadĂ©quat. Le paludisme et la diarrhĂ©e, notamment, continuent Ă  tuer dans le contexte d’insuffisance d’accĂšs aux soins de santĂ© de base Ă  un coĂ»t abordable.

La diarrhĂ©e est particuliĂšrement dangereuse chez les jeunes enfants, en particulier les enfants de moins de 2 ans, qui sont les plus vulnĂ©rables Ă  la sous-nutrition. Les infections qui provoquent des diarrhĂ©es sont principalement dues Ă  des agents pathogĂšnes transmis par l’eau ou les aliments, et par un manque d’hygiĂšne. Les diarrhĂ©es, Ă  Ă©galitĂ© avec la pneumonie, reprĂ©sentent 14% du taux de mortalitĂ© annuel chez les enfants de moins de 5 ans. La diarrhĂ©e peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une cause et une consĂ©quence de la sous-nutrition. En effet, la diarrhĂ©e empĂȘche l’enfant de retenir et assimiler les nutriments nĂ©cessaires Ă  un bon dĂ©veloppement, et freine sa prise de poids et sa croissance ; inversement, la sous-nutrition augmente la frĂ©quence et la durĂ©e des Ă©pisodes diarrhĂ©iques, entretenant ainsi un cercle vicieux. Des modĂšles scientifiques estiment ainsi que 1/4 Ă  1/3 des retards de croissance seraient dus aux infections intestinales ! or l’impact important de l’amĂ©lioration de l’approvisionnement en eau et de celle de l’assainissement sur la mortalitĂ© et la morbiditĂ© de diffĂ©rentes affections a Ă©tĂ© montrĂ© : en ce qui concerne la diarrhĂ©e, la diminution de la morbiditĂ© (incidence et prĂ©valence) est de 25% si on amĂ©liore l’accĂšs Ă  l’eau, de 22% si on amĂ©liore l’évacuation des excrĂ©ments, et de 16% si on amĂ©liore la qualitĂ© de l’eau. C’est pour ces raisons qu’Action contre la Faim prend en compte la nature de ces interactions en incluant dans la plupart de ses programmes nutritionnels une composante eau-hygiĂšne-assainissement.

L’eau de surface est un vecteur de maladies (paludisme, encĂ©phalite japonaise
) affectant la santĂ© et a donc un impact important sur la productivitĂ© du travail, et notamment du travail agricole. Les amĂ©nagements hydro-agricoles, s’ils permettent d’accroĂźtre les productions agricoles, animale et halieutique et favorisent les disponibilitĂ©s alimentaires, ont Ă©galement un impact sur le cadre de vie des personnes et peuvent faire apparaĂźtre certains problĂšmes tels qu’une expansion de certaines maladies, un dĂ©sĂ©quilibre socio-sanitaire ou des modifications de l’environnement. tout projet d’amĂ©nagement hydro-agricole doit donc prendre en compte ces risques pour les minimiser (maĂźtrise des parasites, information des populations, traitements prĂ©ventifs et curatifs
).

Enfin, le puisage, lorsqu’il faut remonter prùs de 15 litres sur une hauteur de 20 mùtres ; puis le portage, souvent sur plusieurs dizaines de kilomùtres, font parfois

de l’accĂšs Ă  l’eau de consommation une charge quotidienne harassante, souvent assumĂ©e par les femmes. En plus des consĂ©quences sur la santĂ© des mĂšres, la « corvĂ©e de l’eau  » reprĂ©sente un manque Ă  gagner qui pĂšse sur les revenus des familles, sur le temps disponible des femmes, et par consĂ©quent sur leur capacitĂ© Ă  assurer la sĂ©curitĂ© nutritionnelle de leurs foyers.

Le manque d’eau, facteur de pauvretĂ©

Les Ă©tudes d’« analyse de l’économie des mĂ©nages » menĂ©es au Niger ont montrĂ© qu’un des facteurs de pauvretĂ© les plus discriminants au sein des communautĂ©s pauvres Ă©tait l’accĂšs Ă  l’eau potable. C’est en effet ce critĂšre qui, trĂšs souvent, constitue la principale diffĂ©rence entre la catĂ©gorie des mĂ©nages les plus pauvres, qui n’ont pas accĂšs Ă  l’eau potable et Ă  un assainissement adĂ©quat, et la catĂ©gorie qui se situe juste au-dessus.

Pour lutter contre cette crise structurelle de l’eau et de l’assainissement, augmenter les investissements est essentiel. L’installation de forages, l’adduction d’eau potable et l’accĂšs Ă  l’assainissement constituent des mesures importantes et nĂ©cessaires. La gĂ©nĂ©ralisation de pratiques trĂšs simples ayant prouvĂ© leur efficacitĂ©, telles que le lavage des mains au savon avant et aprĂšs les repas, permettrait Ă©galement d’amĂ©liorer le statut nutritionnel de trĂšs nombreux enfants rapidement et sans coĂ»t excessif.

Cette annĂ©e comme les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, les Ă©quipes d’ACF dans la rĂ©gion du sahel sont mobilisĂ©es pour lutter contre la sous-nutrition infantile, en ciblant par une approche intĂ©grĂ©e multisectorielle l’ensemble des causes de la sous-nutrition.

etIenne du vacHatCHARGé DE PLAIDOyER séCuRITé ALImEnTAIRE

ACTIOn COnTRE LA FAIm

Dans la province de la Tapoa au Burkina Faso par exemple (oĂč seulement 43% des mĂ©nages avaient accĂšs Ă  l’eau potable en 2010, selon une enquĂȘte ACF), ACF mĂšne un projet « AmĂ©lioration de l’accĂšs Ă  l’eau potable, l’assainissement, et des pratiques d’hygiĂšne dans les Ă©coles de la Province de la Tapoa». Ce programme est menĂ© dans le cadre d’une stratĂ©gie gĂ©nĂ©rale de prĂ©vention et traitement de la malnutrition comprenant Ă©galement un programme d’appui au secteur de la santĂ© pour la prise en charge de la malnutrition et, dans le domaine de la sĂ©curitĂ© alimentaire, des activitĂ©s d’amĂ©nagement des bas-fonds, la rĂ©habilitation de pĂ©rimĂštres, et l’amĂ©lioration de sites maraĂźchers.

L’eau, une cause oubliĂ©e de la crise nutritionnelle au Sahel

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trop souvent au sahel, le dĂ©ficit agricole est considĂ©rĂ© comme la cause principale de la crise, mettant ainsi de cĂŽtĂ© certaines des causes structurelles de la sous-nutrition, au premier rang desquelles le manque d’accĂšs Ă  l’eau potable et Ă  l’assainissement.

au cours du printemps 2011, les médias ont commencé à relayer des rapports sur une famine imminente dans la région

du sahel. Le nombre de personnes qui risquaient de mourir de faim a Ă©tĂ© estimĂ© Ă  18 millions, principalement en raison des mauvaises rĂ©coltes dans plusieurs pays. Un cri d’alarme a Ă©tĂ© lancĂ© suite aux mauvais rendements agricoles de 2011, en recul de 26% par rapport Ă  2010 dans les pays sahĂ©liens. toutefois, cette statistique Ă  elle seule est quelque peu trompeuse.

L’annĂ©e 2010 a Ă©tĂ© une annĂ©e de production record, et si on compare la production de 2011 avec la production moyenne des cinq annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, on s’aperçoit que celle-ci n’est pas radicalement en dessous des tendances rĂ©centes, sauf dans quelques pays. Dans l’ensemble, les huit pays sahĂ©liens avaient un dĂ©ficit total de 3% par rapport Ă  la moyenne des cinq annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. En

revanche, les huit pays cĂŽtiers frontaliers affichaient une production totale supĂ©rieure Ă  la moyenne des cinq annĂ©es prĂ©cĂ©dentes de 9%. Au total, l’ensemble de la rĂ©gion de l’Afrique de l’ouest plus le tchad ont produit 5% de plus qu’en moyenne.

E n o u t r e , l a p r o d u c t i o n nationale n’est qu’une source d’approvisionnement pour rĂ©pondre Ă  la demande alimentaire locale. Les autres sources sont les importations commerciales et l’aide alimentaire. Lorsque l’on prend en compte les importations commerciales, l’offre dĂ©passe largement la demande dans tous les pays ainsi que dans la rĂ©gion de l’Afrique de l’ouest prise dans son ensemble. Dans les pays sahĂ©liens, les importations commerciales entraĂźnent une offre nette excĂ©dentaire d’environ 600 000 tonnes, sans compter l’aide alimentaire. L’excĂ©dent net pour la CommunautĂ© Ă©conomique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAo), sans le Nigeria et la GuinĂ©e, dĂ©passe les 2 millions de tonnes.

Le Niger possĂšde le deuxiĂšme score Ghi le plus Ă©levĂ© de l’Afrique de l’ouest et est de loin le pays le plus vulnĂ©rable de la rĂ©gion. Pourtant, mĂȘme dans ce pays, le dĂ©ficit de la production en 2011 n’a pas atteint des niveaux historiquement importants et les rĂ©coltes des cinq annĂ©es prĂ©cĂ©dentes n’ont pas Ă©tĂ© particuliĂšrement mauvaises. En fait, la production a augmentĂ© de maniĂšre constante au cours des derniĂšres annĂ©es, bien que les tendances varient fortement. Au Niger aussi la production nationale et les importations commerciales ont Ă©galĂ© ou dĂ©passĂ© la demande globale tous les ans, sans mĂȘme prendre en compte l’aide alimentaire et le commerce transfrontalier informel (Eilerts 2012).

L’évolution des prix des denrĂ©es alimentaires dans l’Afrique de l’ouest montre que la balance commerciale alimentaire y est plus stable que dans d’autres rĂ©gions d’Afrique. Les prix y ont moins augmentĂ© qu’ailleurs sur le continent.

Alors, pourquoi cette crise ?

Le vrai problĂšme n’est pas tant la famine soudaine que la vulnĂ©rabilitĂ© chronique et persistante au sein de certains groupes de la population qui n’est pas traitĂ©e de maniĂšre systĂ©mique.

Agir en « mode de crise », comme cela se fait Ă  l’heure actuelle, entraĂźne plus de coĂ»ts et se traduit souvent par la mise en Ɠuvre de programmes trop gĂ©nĂ©raux et qui ne s’attaquent pas aux vĂ©ritables causes des problĂšmes. Ce mode opĂ©ratoire peut se rĂ©vĂ©ler efficace pour lever des fonds mais il peut Ă©galement nuire aux politiques nĂ©cessaires pour renforcer la rĂ©silience des groupes plus vulnĂ©rables. Ces politiques exigent des gouvernements nationaux  : (1) d’assumer un rĂŽle premier et d’afficher une volontĂ© politique forte et des efforts soutenus pour accroĂźtre la productivitĂ© des plus vulnĂ©rables, (2) de mettre en place des programmes sociaux ciblĂ©s et des interventions Ă  grande Ă©chelle qui soient cohĂ©rents et s’appuient mutuellement

afin d’assurer la rĂ©silience Ă  long terme des communautĂ©s et (3) d’agir de concert afin d’éliminer les obstacles au commerce transfrontalier.

La forte croissance agricole et économique de la région donne à penser que les chances de parvenir au succÚs des deux premiÚres mesures sont plus fortes que jamais. En outre, le fait que la région dans son ensemble affiche un excédent alimentaire tandis que certaines zones, prises isolément au sein des différents pays, souffrent des effets des déficits de production locale, constitue le meilleur argument pour faciliter davantage le commerce transfrontalier.

ParallÚlement à ces efforts, il est impératif que les différentes parties concernées au niveau national, international et multilatéral mettent en place une approche de la résilience (et plus précisément de la résilience des communautés) plus cohérente et unifiée.

IndIce de lA fAIm dAns le monde 2012

Le sahelcrise soudaine ou problÚme systémique ?

8. BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA cahier sahel

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L e sahel a Ă©tĂ© frappĂ© par deux importantes crises alimentaires ces derniĂšres annĂ©es, en 2005 d’abord puis en 2009/2010. selon certaines estimations,

cette derniĂšre aurait touchĂ© prĂšs de 10 millions de personnes dans 5 pays du sahel. La situation en 2012 s’avĂšre Ă©galement critique.

Les pasteurs, une population peu prise en compte dans les dispositifs de prévention des crises

si les dĂ©terminants des crises alimentaires et les propositions d’action sont assez clairement Ă©noncĂ©s pour les agriculteurs, l’analyse est moins dĂ©veloppĂ©e pour ce qui est des populations pastorales. Loin d’ĂȘtre anecdotique, l’élevage reprĂ©sente, dans les pays du sahel, le deuxiĂšme secteur de l’économie aprĂšs l’agriculture. La trĂšs grande majoritĂ© des animaux sont issus de l’élevage transhumant. Pour gĂ©rer au mieux les alĂ©as climatiques et la variabilitĂ© spatiale des ressources, les pasteurs et leurs familles se dĂ©placent avec leur bĂ©tail pour optimiser l’utilisation de l’eau et des pĂąturages.

En 2010, un partenariat s’est nouĂ© entre le rĂ©seau rĂ©gional d’éleveurs Billital MaroobĂ©1, oxfam2 et l’irAM3, afin de faire le point de la situation de la crise alimentaire en milieu pastoral et accompagner les organisations d’éleveurs dans l’amĂ©lioration des politiques de prĂ©vention et de gestion des crises.

Les tĂ©moignages des pasteurs collectĂ©s au cours de cette Ă©tude mettent en Ă©vidence que si le diagnostic a bien Ă©tĂ© fait Ă  temps par les dispositifs publics de prĂ©vention, il y a eu un grand dĂ©calage entre les appuis dĂ©cidĂ©s (et mis en Ɠuvre avec retard) et les besoins des Ă©leveurs. Ce dernier vient du fait que la mise en Ɠuvre des dispositifs est faite en majeure partie au moyen d’instruments « gĂ©nĂ©ralistes », qui visent l’ensemble de la population et sont mal adaptĂ©s aux spĂ©cificitĂ©s des pasteurs.

des propositions d’action qui doivent prendre en compte les diffĂ©rents niveaux d’intervention

Les propositions formulĂ©es Ă  la suite de l’étude visent Ă  mieux articuler les niveaux d’intervention : local, national et sous-rĂ©gional. Plus spĂ©cifiquement, il s’agit de rĂ©ussir Ă  mieux intĂ©grer le risque de crise pastorale dans les politiques de dĂ©veloppement rural et dans les dispositifs publics de prĂ©vention des crises.

Un soutien renforcé et mieux ciblé aux ménages de pasteurs vulnérables en période de crise

L’analyse des effets des crises successives sur les trajectoires familiales des pasteurs montre comment la perte massive et brutale des animaux peut exclure des familles du systĂšme pastoral, malgrĂ© les systĂšmes de solidaritĂ© endogĂšnes trĂšs actifs. Lors des derniĂšres crises, de nombreuses actions de soutien

des pasteurs ont Ă©tĂ© expĂ©rimentĂ©es au sahel par des associations, des oNG, des projets et les Etats. on citera l’achat des animaux et leur transformation en viande sĂ©chĂ©e, la mise Ă  disposition de cĂ©rĂ©ales et distributions de vivres, et le soutien Ă  la reconstitution des troupeaux. Ainsi, diverses expĂ©riences existent mais sont malheureusement trop peu capitalisĂ©es. L’enjeu est d’en tirer les leçons pour augmenter l’efficacitĂ© dans la construction des stratĂ©gies d’intervention.

Des actions permettant d’amĂ©liorer l’efficacitĂ© des dispositifs de prĂ©vention et gestion des crises

il s’agit de rapprocher les systĂšmes d’observation et de prĂ©vention des pasteurs de ceux des dispositifs d’intervention publics pour accroĂźtre la rapiditĂ© et la pertinence des prises de dĂ©cision. La crise de 2009 montre que la connaissance insuffisante du monde pastoral par les acteurs clĂ©s des dispositifs gĂ©nĂšre encore de nombreux prĂ©jugĂ©s, en plus des facteurs politiques, et conduit Ă  une inertie dans les rĂ©ponses. Les pistes Ă  explorer pour amĂ©liorer la synergie entre les dispositifs publics et les stratĂ©gies des pasteurs portent sur : l’élaboration de lignes directrices sur le pastoralisme Ă  l’échelle de la sous-rĂ©gion, Ă  intĂ©grer dans la charte de prĂ©vention des crises alimentaires ; la cohĂ©rence et la coordination des interventions d’appui ; et la mise en place d’un fonds sous-rĂ©gional de solidaritĂ© permettant de mener des actions rapides en cas de crise.

Des actions structurelles permettant de renforcer l’adaptation des systĂšmes pastoraux et de limiter les pertes en pĂ©riode de crise

il s’agit en premier lieu de sĂ©curiser l’accĂšs aux ressources pastorales en lien avec leur variabilitĂ© spatiale par la rĂ©habilitation des infrastructures pastorales – puits pastoraux publics, balisage des aires de pĂąturage et des axes de transhumance en zone agricole et agro-pastorale. Plusieurs expĂ©riences ont Ă©tĂ© mises en Ɠuvre au tchad et au Niger ; elles permettent de tirer de nombreux enseignements d’interventions qui associent sĂ©curisation fonciĂšre, amĂ©nagement pastoral Ă  l’échelle intercommunale et hydraulique pastorale.

Ensuite, il s’agit de renforcer la connaissance et le respect des droits Ă  la mobilitĂ© et aux ressources partagĂ©es par les organisations d’éleveurs, les acteurs institutionnels et les acteurs de la sociĂ©tĂ© civile. Plusieurs pays comme le Niger, le Mali et la Mauritanie se sont dotĂ©s de lĂ©gislations qui reconnaissent les

spĂ©cificitĂ©s des modes d’exploitation des ressources pastorales et de la mobilitĂ© des hommes et de leurs troupeaux. L’enjeu est d’accompagner les acteurs institutionnels dans l’application de ces rĂ©glementations.

1. Le rĂ©seau Billital maroobĂ© se fait l’écho des prĂ©occupations des pasteurs et travaille au renforcement des capacitĂ©s de ses membres ; il a dĂ©veloppĂ© une capacitĂ© de plaidoyer et acquiert du poids dans la nĂ©gociation des politiques publiques.2. Oxfam est une OnG spĂ©cialisĂ©e dans les actions de plaidoyer, d’urgence et de dĂ©veloppement. En Afrique de l’Ouest, elle a engagĂ© depuis plusieurs annĂ©es un appui au renforcement des capacitĂ©s des organisations d’éleveurs.3. L’IRAm (Institut de Recherches et d’Application des mĂ©thodes de dĂ©veloppement) a une compĂ©tence technique avĂ©rĂ©e sur les systĂšmes pastoraux, notamment en milieu sahĂ©lien, et a par ailleurs appuyĂ© les Dispositifs nationaux de prĂ©vention et gestion des crises alimentaires au sahel.

marIe-Jo demante CHARGĂ©E DE PROGRAmmE

JoHny eggPRĂ©sIDEnT

bernard bonnet REsPOnsABLE Du PĂŽLE ACTEuRs,

REssOuRCEs ET TERRITOIREs HenrI Leturque

CHARGĂ© DE PROGRAmmE IRAm

chaque année, depuis 1984, le sahel connaßt des crises récurrentes. Les pics de 2005 et de 2010 restent encore gravés dans les esprits.

Aujourd’hui, ce sont plus de 18 millions de personnes qui sont confrontĂ©es Ă  une situation d’insĂ©curitĂ© alimentaire et nutritionnelle dramatique au Mali, en Mauritanie, au Niger, au sĂ©nĂ©gal, au tchad, au NigĂ©ria, au Cameroun, au Burkina Faso et en Gambie.

La rĂ©silience de plus en plus limitĂ©e des populations face aux crises rĂ©currentes au sahel est une des caractĂ©ristiques de la rĂ©gion, oĂč les mĂ©nages ne parviennent plus, au lendemain d’une crise, Ă  reconstituer leurs moyens de subsistance avant que n’arrive le choc suivant. Le sahel est touchĂ© par un taux trĂšs Ă©levĂ© de malnutrition, qui affecte principalement

les enfants de moins de 5 ans, non seulement au moment de la pĂ©riode de soudure, mais Ă©galement en pĂ©riode post rĂ©coltes. 1,1 million d’enfants sont Ă  risque de malnutrition aiguĂ« sĂ©vĂšre (MAs) en 2012, et 3 millions d’enfants Ă  risque de malnutrition aiguĂ« modĂ©rĂ©e (MAM)1. Au-delĂ  des activitĂ©s de prise en charge d’urgence, des interventions Ă  moyen et long termes sont nĂ©cessaires pour inverser les cycles de malnutrition et de crise, et s’attaquer Ă  la vulnĂ©rabilitĂ© structurelle.

Une sociĂ©tĂ© rĂ©siliente commence par des enfants sains, non affaiblis par la malnutrition, qui deviendront des adultes sains. or, les Ă©pisodes de malnutrition qui surviennent au cours de la pĂ©riode allant de la conception de l’enfant jusqu’à l’ñge de 2 ans (on parle de la fenĂȘtre des « 1000 jours » ou « fenĂȘtre des opportunitĂ©s Â») peuvent

avoir des consĂ©quences irrĂ©versibles sur le dĂ©veloppement physique et cognitif de l’enfant. il est primordial d’optimiser l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant pendant cette pĂ©riode, conformĂ©ment Ă  la stratĂ©gie mondiale pour l’alimentation du nourrisson et du jeune enfant (ANJE) mais aussi de mener le maximum d’interventions prĂ©ventives sur l’ensemble du couple mĂšre-enfant.

renforcer la rĂ©silience nutritionnelle de la mĂšre et de l’enfant leur permettra de surmonter les situations d’urgence (la pĂ©riode de soudure, les Ă©pidĂ©mies de maladies comme la rougeole, la grippe ou le paludisme, les inondations qui engendrent des dĂ©placements et donc une situation de fragilitĂ©, etc.).

Par ailleurs, l’amĂ©lioration de la rĂ©silience des populations se fera au travers d’actions ciblant tant les

systĂšmes de santĂ©, le domaine agricole et l’éducation, que la sensibilisation des populations aux bonnes pratiques et l’amĂ©lioration de leurs conditions de vie quotidienne. A ce titre, la promotion des bonnes pratiques nutritionnelles, en mettant l’accent sur la sensibilisation et la prĂ©vention est un moyen peu onĂ©reux et efficace pour amĂ©liorer la situation nutritionnelle des mĂšres et des enfants.

1. OCHA, Bulletin humanitaire spécial « La crise nutritionnelle et alimentaire au sahel », n°2, 3 jui l let 2012 : ochaonline.un.org/OchaLinkClick.aspx?link=ocha&docId=1342128.

Luca PavoneDéLéGué RéGIOnAL nuTRITIOn,

BuREAu suPPORT RĂ©GIOnAL POuR L’AFRIquE DE L’OuEsT

tĂ©nIng SengHorCHARGĂ©E DE COmmunICATIOn sAHEL/BuREAu suPPORT RĂ©GIOnAL POuR L’AFRIquE DE L’OuEsT

CROIx ROuGE FRAnçAIsE

La Croix-Rouge française et la Croix-Rouge nigĂ©rienne mettent en Ɠuvre, depuis 2006 dans la rĂ©gion de Zinder, au niger, des activitĂ©s de nutrition Ă  assise communautaire (nAC) basĂ©es sur la promotion des Pratiques Familiales Essentielles (allaitement maternel exclusif, alimentation saine et adĂ©quate Ă  partir de 6 mois, lavage des mains, utilisation de moustiquaires imprĂ©gnĂ©es, vaccination, planning familial, traitement de la diarrhĂ©e et reconnaissance des signes de gravitĂ© et de maladies de l’enfant).

Au total, dans 75 Ă  90 villages, 10 000 enfants Ă  risque de malnutrition par an ont Ă©tĂ© suivis en vue d’une amĂ©lioration de leur Ă©tat nutritionnel et il a Ă©tĂ© constatĂ© une rĂ©elle implication des communautĂ©s dans la prĂ©vention de la malnutrition, et l’adoption de nouveaux comportements dans les mĂ©nages.

La résilience nutritionnelle des enfants : une priorité pour le Sahel

© Iram

Insécurité alimentaire persistante et action internationale des collectivités : comment agir ?

La rĂ©pĂ©tition des crises alimentaires qui touchent les pays sahĂ©liens – Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, tchad – finit par provoquer

une certaine perplexité parmi les collectivités locales partenaires des collectivités sahéliennes.

Comment, en effet, continuer Ă  mobiliser les acteurs locaux et l’argent public face Ă  une situation qui devient rĂ©currente ? Comment convaincre l’opinion publique de rester solidaire dans un contexte oĂč elle est elle-mĂȘme touchĂ©e par la crise ?

Les collectivitĂ©s qui n’ont pas les moyens des Etats ou des instances multilatĂ©rales n’ont pas pour autant dĂ©laissĂ© leurs partenaires.

PrĂšs de 400 collectivitĂ©s françaises ont nouĂ© des liens forts avec des collectivitĂ©s africaines, dont une grande partie dans les pays du sahel. AnimĂ©es par des Ă©lus et des Ă©quipes qui entendent bien peser sur le cours des choses, elles agissent depuis des dizaines d’annĂ©es – certaines depuis plus de 40 ans – et ont accumulĂ© une expertise unique sur l’ensemble des territoires dont elles connaissent tous les acteurs, qu’ils soient politiques, religieux ou Ă©conomiques.

Ainsi, malgrĂ© leurs contraintes, en concertation permanente avec leurs homologues sahĂ©liennes, elles continuent de se mobiliser. Avec, toujours, la mĂȘme prĂ©occupation : veiller Ă  ce que toute aide d’urgence puis de long terme vienne en rĂ©ponse

Ă  des analyses conjoncturelles et structurelles ; veiller Ă  ce que la finalitĂ© de toute action demeure le renforcement des capacitĂ©s des collectivitĂ©s sahĂ©liennes pour leur permettre d’assurer les services de base aux populations de leurs territoires.

La crise politique et militaire du Mali, qui affecte les pays voisins, a sans aucun doute rĂ©activĂ© les flux de solidaritĂ©. Depuis l’enlisement du pays, aprĂšs le coup d’Etat du 22 mars, un plaidoyer collectif s’est mis en place au sein des groupes-pays de CitĂ©s Unies France comme au niveau local. Dans les rĂ©unions publiques ou lors des assemblĂ©es dĂ©libĂ©rantes, les Ă©lus prennent la parole pour mobiliser et rendre hommage Ă  leurs partenaires, qui nous montrent chaque jour leur engagement auprĂšs des populations.

CitĂ©s Unies France (CUF) a multipliĂ© les rencontres entre Ă©lus du Nord Mali et Ă©lus français et a lancĂ© un fonds d’urgence qui sera gĂ©rĂ© par les collectivitĂ©s donatrices. La question de l’insĂ©curitĂ© alimentaire pourrait ĂȘtre un des aspects traitĂ©s par ce fonds.

En outre, nous avons lancĂ© une rĂ©flexion sur les modalitĂ©s d’une possible collaboration entre collectivitĂ©s travaillant dans le dĂ©veloppement et acteurs de l’urgence humanitaire. Nous affirmons la possibilitĂ© de faire collaborer de maniĂšre complĂ©mentaire ces deux mondes qui se connaissent mal.

Ce réinvestissement collectif au Mali sur fond de crise politique grave pose

la question de l’insĂ©curitĂ© humanitaire et du rĂŽle central que peuvent jouer les collectivitĂ©s locales sur cette question. Lorsque, le moment venu, et nous souhaitons que ce soit le plus tĂŽt possible, les dĂ©sordres politiques s’attĂ©nueront, l’humanitaire laissera Ă  nouveau la place au dĂ©veloppement. La solidaritĂ© dont font preuve les collectivitĂ©s locales françaises ne se dĂ©mentira pas. Elle tirera les leçons de l’expĂ©rience actuelle.

bertrand gaLet DIRECTEuR GénéRAL CITés unIEs FRAnCE

VOIR Ă©GALEmEnT L’EnTRETIEn AVEC L’ADjOInT Au mAIRE DE PARIs PIERRE sCHAPIRA En PAGE 12.

La gestion et la prévention des crises pastorales sahéliennes

9.BAROmÈTRE FAIm 2012DE LAcahier sahel

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d’ici Ă  2020, 20% de l’énergie consommĂ©e en Europe devra provenir de sources renouvelables. C’est l’objectif ambitieux que s’est fixĂ©e

l’Union europĂ©enne en adoptant en 2009 la directive sur « la promotion de l’utilisation d’énergie produite Ă  partir de sources renouvelables » - dite « directive Enr ».

Dans le contexte actuel de dĂ©rĂšglement climatique et de pressions croissantes sur les ressources naturelles de la planĂšte, rĂ©duire nos Ă©missions de gaz Ă  effet de serre (GEs) en limitant au maximum l’utilisation de ressources fossiles polluantes et en favorisant le dĂ©veloppement des Ă©nergies renouvelables n’est pas seulement un choix Ă©conomique intelligent : c’est une nĂ©cessitĂ© vitale. Pourtant, la directive Enr pose problĂšme. ParallĂšlement Ă  cet objectif global positif, elle fixe

un objectif spĂ©cifique au secteur des transports, hautement polluant. Dans ce secteur, c’est au moins 10% de l’énergie consommĂ©e qui devra provenir de sources renouvelables d’ici Ă  2020. Aux dires de la Commission europĂ©enne elle-mĂȘme, cet objectif sera atteint Ă  90% Ă  travers l’utilisation d’agrocarburants.

Les agrocarburants, et non biocarburants comme de nombreux acteurs voudraient les appeler pour mieux les vendre, sont produits Ă  partir de matiĂšres premiĂšres agricoles. il s’agit soit d’agrodiesels issus d’olĂ©agineux (palme, soja, tournesol, colza, jatropha
), soit d’éthanols Ă  base de cĂ©rĂ©ales (maĂŻs, blé ), de betterave ou de canne de sucre. ils constituent bel et bien une Ă©nergie renouvelable, mais ne tiennent pas pour autant leurs promesses en matiĂšre environnementale : si l’on

prend en compte les effets directs et indirects liĂ©s Ă  leur production, 80% des agrocarburants utilisĂ©s aujourd’hui produisent plus de GEs que l’essence ou le diesel ! Alors, les politiques de promotion des agrocarburants seraient-elles une fausse bonne idĂ©e pour lutter contre le changement climatique ? incontestablement oui ! D’autant plus que leurs impacts sur la sĂ©curitĂ© alimentaire mondiale sont dramatiques.

En effet, la demande croissante en agrocarburants de l’Union europĂ©enne et d’autres pays riches comme les Etats-Unis dĂ©rĂšgle complĂštement les marchĂ©s alimentaires mondiaux. Les cĂ©rĂ©ales et les olĂ©agineux destinĂ©s aux marchĂ©s des agrocarburants n’alimentent plus les marchĂ©s alimentaires, alors qu’au niveau mondial, la demande alimentaire augmente. rĂ©sultat implacable : les prix des denrĂ©es alimentaires

augmentent. En outre, une concurrence se crĂ©e entre les marchĂ©s alimentaires et les marchĂ©s Ă©nergĂ©tiques : les cours des produits agricoles tendent Ă  suivre les cours du pĂ©trole, particuliĂšrement volatiles. or, on le sait, la sĂ©curitĂ© alimentaire mondiale est intimement liĂ©e aux prix alimentaires. Assez de denrĂ©es alimentaires sont produites chaque annĂ©e pour nourrir l’ensemble de l’humanitĂ©. Pourtant, une personne sur huit dans le monde souffre de la faim, pour la simple et bonne raison que les mĂ©nages les plus pauvres ne peuvent pas acheter de quoi se nourrir. Dans ce contexte, favoriser la hausse des prix alimentaires en crĂ©ant de toutes piĂšces une demande artificiellement Ă©levĂ©e sur le marchĂ© des agrocarburants est tout simplement irresponsable, voire criminel.

D’autant plus que le marchĂ© juteux des agrocarburants pousse les entreprises

privĂ©es Ă  accaparer de plus en plus de terres agricoles dans les pays du sud ! L’Europe est incapable de produire l’intĂ©gralitĂ© des agrocarburants dont elle aura besoin pour atteindre ses objectifs. il faudra donc importer environ 60% des agrocarburants que l’on consommera en Europe en 2020, et les investisseurs ne s’y trompent pas ! Environ deux tiers des terres accaparĂ©es entre 2000 et 2010 serviraient Ă  produire des agrocarburants. Quand on sait que 80% des personnes souffrant de la faim dans le monde sont des producteurs d’aliments, une conclusion s’impose : priver les paysans de leurs terres revient Ă  bafouer le droit Ă  l’alimentation des plus vulnĂ©rables, et Ă  aggraver l’insĂ©curitĂ© alimentaire mondiale.

Face Ă  ce constat catastrophique, la seule solution raisonnable consiste Ă  renoncer aux objectifs d’incorporation d’énergies renouvelables dans le secteur des transports. La lutte contre le changement climatique et la promotion des Ă©nergies non polluantes doit rester une prioritĂ© de l’UE, mais les agrocarburants n’ont tout simplement pas leur place dans une telle stratĂ©gie.

cLara Jamart REsPOnsABLE DE PLAIDOyER

POuR LA séCuRITé ALImEnTAIREOxFAm FRAnCE

nourrir ou conduire : il faut choisir !

Les agrocarburants paysans dits « de proximité » ou « en filiÚre courte » peuvent apporter une solution durable pour satisfaire les besoins primaires des populations

qui n’ont pas d’accĂšs Ă  l’énergie.

Bien loin des objectifs visĂ©s par la production industrielle et intensive d’agrocarburants, les pet i tes productions dĂ©veloppĂ©es en filiĂšre courte dans le cadre de projets visant Ă  amĂ©liorer l’accĂšs Ă  l’énergie des zones enclavĂ©es dans les pays en dĂ©veloppement peuvent prĂ©senter une alternative durable et intĂ©ressante sur le plan de la sĂ©curitĂ© alimentaire.

Le s p r oduc t i ons mass i v e s d’agrocarburants visant Ă  satisfaire le secteur des transports europĂ©ens nĂ©cessitent de gros volumes et entraĂźnent dans leur joug une cascade de problĂ©matiques et de consĂ©quences nĂ©fastes sur le plan tant environnemental que sociĂ©tal.

Ainsi les biocarburants industriels en

production intensive sont de plus en plus contestĂ©s, et Ă  juste titre, car leur impact peut s’avĂ©rer dĂ©vastateur pour la sĂ©curitĂ© alimentaire. Leur essor tend Ă  resserrer les liens dĂ©jĂ  existants entre marchĂ© de l’énergie et marchĂ© agricole, la volatilitĂ© de l’un entretenant la volatilitĂ© de l’autre.

En revanche, la production d’agrocarburants paysans, dĂ©veloppĂ©e uniquement dans l’objectif de rĂ©pondre au besoin crucial de l’accĂšs Ă  l’énergie des populations les plus vulnĂ©rables, devrait lĂ©gitimement ĂȘtre admise. il est important sur ce point de se prĂ©munir des amalgames ou raccourcis simplistes. il n’existe pas qu’un seul modĂšle de production de biocarburants  : sont-ils destinĂ©s Ă  un usage local ou international ? Au secteur industriel, automobile, ou pour l’énergie des particuliers ? sur ce plan, il apparaĂźt indispensable de distinguer le bon grain de l’ivraie.

Lorsqu’il s’agit d’Ɠuvrer pour l’accĂšs Ă  une Ă©nergie durable et abordable

en zones rurales, la production d’agrocarburants participe Ă  sĂ©curiser les activitĂ©s de transformation agroalimentaire, qui par ricochet permettent de soutenir la sĂ©curitĂ© alimentaire des populations concernĂ©es.

En effet , la t ransformation agroalimentaire motorisée diminue les pertes post-récoltes et permet une alimentation locale diversifiée. Elle réduit la charge de travail de la cuisiniÚre et génÚre des revenus aux transformateurs.

C’est dans cette optique que le GErEs a dĂ©veloppĂ© une nouvelle approche : dimensionnĂ©e pour un territoire donnĂ©, la production locale d’une huile vĂ©gĂ©tale pure Ă  base de jatropha se substituant au gasoil trop cher rĂ©pond ainsi Ă  un besoin constant d’énergie pour les transformateurs et gĂ©nĂšre aussi de nouveaux revenus aux producteurs.

Une filiĂšre ? oui, mais locale et responsable !

Le projet « ALtErrE-JAtrorEF » proposé au Bénin et au Mali est avant tout basé sur un diagnostic approfondi des acteurs de la filiÚre qui vise à dimensionner une offre répondant à la demande des transformateurs locaux.

Dans le Zou (BĂ©nin), M. BadĂ© achĂšte quotidiennement 3 litres de gasoil pour le fonctionnement de son moulin. Cette charge, qui augmente avec le cours du baril, se rĂ©percute aujourd’hui Ă  70% sur le prix de vente de la cĂ©rĂ©ale moulue. A terme, son activitĂ© risque de s’interrompre car le consommateur final ne peut pas subir la fluctuation des prix.

En substituant totalement ou partiellement le gasoil par de l’huile vĂ©gĂ©tale pure de jatropha, M. BadĂ© rĂ©duit sa dĂ©pendance aux Ă©nergies fossiles et garantit l’accĂšs aux produits Ă  un prix constant. Le dĂ©fi reste alors de sĂ©curiser la production locale d’une huile vĂ©gĂ©tale pure.

Pour ce faire, le GErEs, l’irAM et ses partenaires ont inscrit au cƓur de leur dĂ©marche l’engagement volontaire des paysans Ă  produire sur des surfaces agricoles correspondant Ă  la demande en carburant des opĂ©rateurs Ă©conomiques alentours.

DĂ©veloppĂ©e en relation avec des organisations paysannes locales sur des superficies limitĂ©es Ă  l’échelle de chaque exploitation et de la zone d’intervention, l’initiative ne met pas en danger les productions vivriĂšres traditionnelles.

une expĂ©rience riche d’enseignements pour l’afrique de l’ouest

Les enjeux locaux et globaux sont bien compris des acteurs du projet. Parfaitement conscients des risques Ă©conomiques liĂ©s Ă  l’émergence de cette nouvelle filiĂšre sur leur propre sĂ©curitĂ© alimentaire, ils contiennent leurs activitĂ©s dans un cadre circonscrit aux impacts positifs : maĂźtrise des coĂ»ts de l’énergie, accĂšs aux services de transformation, amĂ©lioration de l’alimentation, crĂ©ation d’emplois, augmentation des revenus. Lorsque la filiĂšre s’ajuste aux rĂ©alitĂ©s d’un territoire, l’économie se dĂ©veloppe ; par et au bĂ©nĂ©fice des populations locales.

gĂ©raLdIne PaLLIĂšreCOORDInATRICE AFRIquE DE L’OuEsT

caroLIne PIerretCHARGĂ©E DE COmmunICATIOn,

GEREs

Les politiques de soutien aux agrocarburants mettent en péril la sécurité alimentaire mondiale

amĂ©liorer la situation alimentaire des villages en afrique :la solution passe aussi par l’accĂšs Ă  l’énergie

L’énergie solaire n’est pas rĂ©servĂ©e Ă  l ’éclairage  ! En rendant possible des activitĂ©s de production et de transformation, l’accĂšs

Ă  l’énergie solaire contribue au dĂ©veloppement et constitue un moyen pertinent pour amĂ©liorer les conditions de vie des populations rurales et renforcer la sĂ©curitĂ© alimentaire. C’est une nouvelle encourageante pour les zones rurales qui sont les grandes oubliĂ©es des politiques publiques d’électrification en raison de contraintes trop lourdes ou de rentabilitĂ© trop faible.

Depuis 2008, le Gret met en Ɠuvre en Mauritanie des projets d’électrification rurale par un systĂšme de plates-formes solaires multiservices. Entre l’équipement individuel et le rĂ©seau Ă©lectrique, ces bĂątiments, Ă©quipĂ©s de panneaux solaires, proposent des services Ă©lectrifiĂ©s. si les usages individuels sont possibles (recharge de tĂ©lĂ©phones portable, de batteries, etc.) la plate-forme solaire sert avant tout Ă 

dĂ©velopper des activitĂ©s Ă©conomiques dans le village. En plus d’activitĂ©s artisanales comme la soudure, la rĂ©paration de pneus ou la couture, certaines activitĂ©s contribuent fortement Ă  renforcer la sĂ©curitĂ© alimentaire des populations. C’est le cas de la mouture de cĂ©rĂ©ales et de la conservation des aliments dans des rĂ©frigĂ©rateurs ou congĂ©lateurs solaires.

Le moulin Ă  cĂ©rĂ©ales permet aux populations de prĂ©parer leur farine en fonction des besoins. Fini le stockage de grandes quantitĂ©s de farine qui pouvaient s’abimer du fait des conditions de conservation inadĂ©quates. Les cĂ©rĂ©ales sont maintenant stockĂ©es en grains, puis moulues au jour le jour pour rĂ©pondre aux besoins de la consommation de la famille et du bĂ©tail. L’introduction d’un moulin dans le village diminue la pĂ©nibilitĂ© du travail pour les femmes, Ă  qui incombaient la corvĂ©e et qui laissent de cĂŽtĂ© leur pilon pour passer plus de temps dans des activitĂ©s productrices, agricoles ou artisanales.

En permettant de stocker les aliments, le congĂ©lateur ouvre de nouvelles perspectives dans le village. il permet par exemple d’accroĂźtre la disponibilitĂ© du poisson dans les zones qui ne sont livrĂ©es qu’épisodiquement et facilite la conservation de la viande. Les productions locales sont Ă©galement renforcĂ©es. C’est notamment le cas du lait, qui peut maintenant ĂȘtre stockĂ© dans le village, alors qu’il Ă©tait auparavant consommĂ© immĂ©diatement aprĂšs la traite. Le lait peut aussi ĂȘtre transformĂ© pour fabriquer glaces et yogourts qui sont ensuite consommĂ©s localement ou vendus dans les villes avoisinantes.

GrĂące aux plates-formes multiservices, les populations deviennent actrices de leur dĂ©veloppement : elles choisissent les services qu’elles souhaitent voir installer et elles en financent une partie. Ainsi, sur la premiĂšre phase du programme (2008-2011), les villages ont contribuĂ© en moyenne Ă  hauteur de 16% du montant total de l’investissement, soit prĂšs de

5500 euros par village. s’ils sont d’accord pour investir un tel montant dans la plate-forme, c’est parce que les bĂ©nĂ©fices sont importants : les services, autrefois Ă©loignĂ©s, sont maintenant disponibles directement dans les villages. Ceci diminue leur coĂ»t (en supprimant les frais de dĂ©placement), fait gagner du temps pour mener d’autres activitĂ©s, et facilite la transformation des productions agricoles et alimentaires locales.

La plate-forme solaire constitue une solution idĂ©ale pour les zones isolĂ©es, oĂč l’approvisionnement en carburant pour les groupes Ă©lectrogĂšnes est souvent complexe et coĂ»teux. Les faibles contraintes d’entretien des solutions solaires sont un atout considĂ©rable pour certains villages qui peuvent rester coupĂ©s du monde pendant plusieurs semaines lors de la saison des pluies. Des solutions hybrides sont aujourd’hui aussi envisagĂ©es, avec des moteurs diesel ou Ă  base d’huile

de jatropha, dans les gros villages oĂč des activitĂ©s de transformation agricole (dĂ©corticage, broyage, etc.) nĂ©cessitent une puissance Ă©nergĂ©tique plus importante.

AprĂšs une phase pilote rĂ©ussie dans 24 villages, une centaine de nouveaux villages mauritaniens bĂ©nĂ©ficiera bientĂŽt de ce systĂšme. Les autoritĂ©s mauritaniennes se sont d’ores et dĂ©jĂ  appropriĂ© le dispositif et pensent Ă  son institutionnalisation Ă  grande Ă©chelle. Une maniĂšre d’amĂ©liorer la vie de milliers de personnes tout en renforçant durablement la situation alimentaire du pays.

Plus d’informations sur ce projet : http://www.gret.org/2012/06/projets-delectrification-rurale-du-gret-en-mauritanie.

JacqueS monvoISREsPOnsABLE Du DĂ©PARTEmEnT REssOuRCEs

nATuRELLEs ET sERVICEs EssEnTIELs ET JuLIen cerqueIra

REsPOnsABLE Du PROjET ERuDI En mAuRITAnIE GRET

un agrocarburant pas comme les autres

10. BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

Page 11: SOLIDAIRES ET RESPONSABLES : INVESTIR ET AGIR POUR LES

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La gestion soutenable des ressources naturelles, rendue plus complexe par les changements climatiques, est intimement liée à la croissance

Ă©conomique de long terme. En prenant l’exemple de la tanzanie, la question est aussi de savoir quel impact cette relation peut avoir sur ses populations les plus vulnĂ©rables. de la relation entre changement climatique, sĂ©curitĂ© alimentaire et croissance Ă©conomique

L’économie tanzanienne, basĂ©e essentiellement sur une agriculture de type pluvial, est trĂšs impactĂ©e par les variations climatologiques, comme dĂ©montrĂ© par la relation Ă©tablie entre produit national brut et variabilitĂ© des pluies (Van Aalst et al., 2007). Ces variations sont sous tension des changements climatiques accrus, entraĂźnant une hausse de la frĂ©quence et de la sĂ©vĂ©ritĂ© des sĂ©cheresses, des inondations et des orages (GiEC, 2007). Ces Ă©vĂ©nements climatiques impactent ensuite en cascade la production agricole, la sĂ©curitĂ© alimentaire et finalement la croissance Ă©conomique globale.

L’étude prise comme base Ă  cet article a Ă©tĂ© menĂ©e dĂ©but 2012 dans les basses et hautes terres du bassin du Pangani (rĂ©gion du Kilimandjaro), afin de rendre au mieux compte de la grande diversitĂ© agro-climatique de cette zone trĂšs affectĂ©e par le changement climatique et caractĂ©risĂ©e par une forte dĂ©pendance Ă©conomique Ă  la production agricole et Ă  l’élevage, et donc aux ressources en eaux. Qu’elles soient captĂ©es dans les systĂšmes d’irrigation traditionnels existant (par exemple les ndiva) ou

directement reçues par les sols, les ressources en eaux sont maintenant caractĂ©risĂ©es par une forte variabilitĂ© et imprĂ©visibilitĂ©, ce qui est un facteur d’inquiĂ©tude renforcĂ© pour les habitants de la zone.

ils perçoivent ainsi comme principaux changements : une rĂ©duction de la pĂ©riode de pousse (68%), de plus longues pĂ©riodes sĂšches pendant la saison des pluies (84%) et de forts orages plus frĂ©quents. La hausse des tempĂ©ratures et des vents plus forts sont eux considĂ©rĂ©s comme Ă©tant des facteurs d’exacerbation du manque d’eau. Enfin, la dĂ©gradation gĂ©nĂ©rale de l’environnement est aggravĂ©e par les sĂ©cheresses Ă  rĂ©pĂ©tition, l’accroissement constant de la population ou encore l’application dĂ©faillante des lois sur l’exploitation forestiĂšre.

si l’analyse statistique de long terme (sur 60 ans) ne montre pas de tendance nĂ©gative globale du niveau des prĂ©cipitations locales, la recherche a mis en lumiĂšre sur le moyen terme (20 Ă  30 ans) des changements tels que le dĂ©clin de la saison longue, des prĂ©cipitions annuelles totales et du nombre de jours pluvieux sur l’annĂ©e ou encore la fin prĂ©coce des pluies. L’ensemble de ces facteurs impacte nĂ©gativement sur la zone les productions vivriĂšres et animaliĂšres et donc la sĂ©curitĂ© alimentaire. 80% des mĂ©nages dĂ©clarent ainsi que leur capacitĂ© Ă  produire des aliments est menacĂ©e par le changement climatique, et le manque d’eau reste le principal problĂšme identifiĂ©.

de la relation entre changement climatique, stratĂ©gies d’adaptation et migrations

ConsidĂ©rant le manque d’alternatives locales d’emploi hors secteur agricole, la mobilitĂ© devient une stratĂ©gie d’adaptation au risque climatique importante dans les villages Ă©tudiĂ©s. Dans l’ordre, les principales raisons de migration avancĂ©es par les rĂ©pondants sont : (1) une intensification de la frĂ©quence des sĂ©cheresses ; (2) des pĂ©riodes de sĂ©cheresse plus longues ; et (3) le manque d’eau. si le flux migratoire privilĂ©giĂ© reste entre zones rurales, un tiers des rĂ©pondants choisirait prĂ©fĂ©rablement de migrer en zone urbaine, notamment Ă  Dar es salaam.

Enfin, il faut souligner que les personnes ĂągĂ©es et les femmes avec des enfants en bas-Ăąge sont plus susceptibles de rester sur place et en cela peuvent donc ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme les groupes les plus vulnĂ©rables aux impacts nĂ©gatifs de la variabilitĂ© des pluies sur la sĂ©curitĂ© des mĂ©nages. Le soutien Ă  ces communautĂ©s rurales doit prendre en compte la nature des flux migratoires potentiellement induits, mais Ă©galement les besoins des sous-groupes rendus plus vulnĂ©rables par l’ensemble des consĂ©quences du changement climatique.

En conclusion, ces situations appellent Ă  la mise en Ɠuvre de projets d’agriculture rĂ©siliente au changement climatique, Ă  une gestion et conservation optimisĂ©e des ressources en eau, et enfin Ă  des stratĂ©gies de diversification des sources de revenu des communautĂ©s Ă  risques et en particulier des femmes.

aLeXandre moreL DIRECTEuR DEs PROGRAmmEs

ET Du PLAIDOyERCARE FRAnCE

SĂ©curitĂ© alimentaire, variabilitĂ© des pluies et mobilitĂ© humaine : l’exemple de la tanzanie

870 millions1 d ’ ĂȘ t r e s huma ins souffrent de la faim

dans le monde, et les changements climatiques menacent d’accroĂźtre fortement le nombre de personnes exposĂ©es Ă  ce flĂ©au. selon les prĂ©visions, l’ampleur et la frĂ©quence des sĂ©cheresses et des tempĂȘtes vont augmenter et s’accompagner d’effets encore plus dĂ©vastateurs. La rarĂ©faction des ressources exacerbera les tensions sociales et accentuera les risques de conflit. Des millions de personnes supplĂ©mentaires seront exposĂ©es Ă  la faim et Ă  la dĂ©nutrition d’ici 2050. La plupart d’entre elles se trouveront dans les pays les plus pauvres de la planĂšte, oĂč faim, dĂ©nutrition et insĂ©curitĂ© alimentaire sont dĂ©jĂ  largement rĂ©pandues.

La lutte contre l’aggravation de la faim et de la dĂ©nutrition provoquĂ©e par les changements climatiques sera l’un des principaux piliers du travail du PAM et de l’ensemble des acteurs locaux, nationaux et internationaux au XXiĂšme siĂšcle. De la prĂ©vision des chocs Ă  la rĂ©action rapide en cas de crise, en passant par le renforcement de la capacitĂ© de rĂ©sistance aux menaces futures ou la consolidation des systĂšmes de protection sociale et des filets de sĂ©curitĂ©, un Ă©ventail d’activitĂ©s seront dĂ©terminantes auprĂšs de dizaines de millions de personnes dont la vie et les moyens

de subsistance sont mis en pĂ©ril par la dĂ©gradation de l’environnement, la pauvretĂ© et les effets cumulĂ©s du changement climatique sur la sĂ©curitĂ© alimentaire et la faim.

Dans le cadre des programmes d’emploi ciblĂ©s qu’il mĂšne en faveur des communautĂ©s exposĂ©es Ă  l’insĂ©curitĂ© alimentaire, le PAM met d’ores et dĂ©jĂ  en Ɠuvre des activitĂ©s de conservation de l’environnement, de boisement et de reboisement, de gestion des terres et des eaux ou encore de production alimentaire et agricole en Afrique, en Asie et en AmĂ©rique latine. Au Kenya, les programmes d’emploi ciblĂ©s dans les zones arides exposĂ©es aux sĂ©cheresses ont contribuĂ© Ă  remettre en Ă©tat 28 000 hectares de terres.

Ces activitĂ©s sont essentielles pour aider les communautĂ©s Ă  dĂ©velopper et Ă  exploiter leurs ressources naturelles ainsi qu’à Ă©laborer et renforcer des systĂšmes de sĂ©curitĂ© alimentaire, et ce de maniĂšre durable. La restauration des infrastructures vitales endommagĂ©es par des phĂ©nomĂšnes mĂ©tĂ©orologiques extrĂȘmes, et la construction de systĂšmes de drainage et d’irrigation, de routes et de voies d’accĂšs aux marchĂ©s, comptent aussi parmi les opĂ©rations vitales menĂ©es dans bon nombre de zones isolĂ©es en proie aux catastrophes.

Mis au point en coopération avec des partenaires gouvernementaux dans le

monde entier, ces programmes ont permis et continuent d’apporter des changements notables et mesurables, de la remise en Ă©tat de dizaines de milliers d’hectares de terres au Kenya Ă  la rĂ©paration de centaines de puits et de rĂ©servoirs d’eau en Afghanistan, sans oublier la plantation d’une ceinture vĂ©gĂ©tale pour protĂ©ger des villages maliens contre l’avancĂ©e du dĂ©sert du sahara.

DĂ©terminer comment renforcer la rĂ©silience des communautĂ©s rurales face aux risques climatiques devient crucial pour lutter contre la pauvretĂ© dans le monde. Pour relever ce dĂ©fi, le PAM et oxfam America ont lancĂ© le projet r4, axĂ© sur une combinaison de quatre stratĂ©gies de gestion des risques  : gestion amĂ©liorĂ©e des ressources (rĂ©duction du risque), microcrĂ©dit (prise de risque calculĂ©e), assurance (transfert du risque) et Ă©pargne (rĂ©serves contre le risque). Le premier exemple de cette approche novatrice est le projet de transfert des risques pour l’adaptation dans la Corne de l’Afrique (hAritA). Le projet hAritA a permis aux paysans Ă©thiopiens les plus dĂ©munis de souscrire Ă  une assurance pour protĂ©ger leurs cultures au moyen de leur propre travail. Au cours de ses trois premiĂšres annĂ©es d’exĂ©cution en Éthiopie, le projet a donnĂ© des rĂ©sultats prometteurs, puisqu’il a fait passer le nombre de mĂ©nages contractant une assurance de 200 la premiĂšre annĂ©e Ă  plus de 13 000 en 2011.

Nous avons aujourd’hui les outils, l’expertise et les connaissances pour juguler les effets dĂ©vastateurs du changement climatique qui se sont accĂ©lĂ©rĂ©s ces derniĂšres annĂ©es. il est donc temps d’agir, maintenant.

1. Chiffres du rapport « The state of Food Insecurity » 2012 publiĂ© par la FAO, le PAm et l’IFAD.

marIna catena, DIRECTRICE Du PAm POuR LA FRAnCE

ET LA PRInCIPAuTĂ© DE mOnACO

construire la résilience face aux changements climatiques

Cet article est basĂ© sur les rĂ©sultats prĂ©liminaires de l’étude “Where the Rain Falls” menĂ©e conjointement par CARE et l’universitĂ© des nations unies dans 8 pays et qui cherche Ă  mieux comprendre les liens entre variabilitĂ© des pluies, sĂ©curitĂ© alimentaire et mobilitĂ© humaine afin d’amĂ©liorer le soutien aux communautĂ©s dans leurs efforts d’adaptation au changement climatique : http://wheretherainfalls.org. Les rapports dĂ©taillĂ©s de recherche seront publiĂ©s et disponibles fin novembre aprĂšs COP 18 Ă  Doha sur ce mĂȘme site.

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11.BAROmÈTRE FAIm 2012DE LA

Page 12: SOLIDAIRES ET RESPONSABLES : INVESTIR ET AGIR POUR LES

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remerciements : CĂ©line Allaverdian, ousmane Badiane, Bernard Bonnet, Gregory Bulit, Marina Catena, Jean-Baptiste Cavalier, Emilie Chassagnard, Christophe Chauveau, Julien Cerqueira, Marie-Jo Demante, Marc Dufumier, Lila Durix, Johny Egg, Antonia Estrada, Alain Faujas, heidi Fritschel, Bertrand Gallet, Klaus von Grebmer, Guillaume Grosso, Marie-Charlotte henrion, Judith Jakubowicz, Clara Jamart, Gilles van Kotte, Constance Koukoui, Jean-Marc Leblanc, Mathilde Lestra, henri Leturque, Christina Lionnet, Kristel Malegue, Jacques Monvois, Alexandre Morel, Laurent Muratet, tolulope olofinbiyi, Constanze von oppeln, GĂ©raldine Palliere, Luca Pavone, Caroline Pierret, Anna Postel, Joseph rahall, sarah de rekeneire, Claudia ringler, Mark W. rosegrant, Pierre schapira, tening senghor, Mathieu szeradzki, Jennifer thompson, Adrien tomarchio, Maximo torero, Christian troubĂ©, Etienne du Vachat, Doris Wiesmann, Yisehac Yohannes.Pour plus d’informations : www.convergences2015.org citation suggĂ©rĂ©e pour ce document : BaromĂštre de la faim 2012 Convergences 2015. remerciements particuliers Ă  : Emilie Chassagnard et Alexia tronel de Convergences 2015, Marie-Charlotte henrion et Adrien tomarchio d’ACtED. conception graphique: Advitam. mise en page : Marie-Charlotte henrion, Alexia tronel. copyright : Convergences 2015 octobre 2012 – Convergences 2015, 33, rue Godot de Mauroy, 75009 Paris - France contact : [email protected] // 01 42 65 33 33.

Les opinions exprimĂ©es dans les articles de cette Ă©dition du BaromĂštre de la faim 2012 n’engagent que leurs auteurs et ne reflĂštent pas nĂ©cessairement celles de Convergences 2015 et de ses partenaires.

LE BAROmÈTRE DE LA FAIm 2012

Pascal Canfin, ministre dĂ©lĂ©guĂ© au dĂ©veloppement, est, avec CĂ©cile Duflot, l’autre reprĂ©sentant Ă©cologiste au sein du gouvernement. il

dit vouloir fusionner les notions de développement économique et de développement durable.

vos prĂ©dĂ©cesseurs Ă©taient ministres de la coopĂ©ration. Pourquoi ĂȘtes-vous devenu ministre du dĂ©veloppement ? C’est la conclusion d’une sĂ©quence historique engagĂ©e depuis trente ans. La mondialisation a signĂ© la fin d’une relation fondĂ©e sur le passĂ© colonial et a rendu indispensable un nouveau

partenariat avec l’Afrique. Ministre Ă©cologiste du dĂ©veloppement, je peux consacrer 100 % de mon temps Ă  une politique qui incite les pays les plus pauvres Ă  adopter un mode de dĂ©veloppement soutenable. Autrefois, dĂ©veloppement Ă©conomique et dĂ©veloppement durable Ă©taient deux notions distinctes. il faut les fusionner.

qui l’aide française doit-elle privilĂ©gier ? Les plus pauvres ou les plus dynamiques ?

il s’agit d’un faux dĂ©bat. Quand nous intervenons dans les pays Ă©mergents, nous le faisons sous forme de prĂȘts. Ainsi la Chine ne reçoit plus d’argent

du contribuable français, mais l’Agence française de dĂ©veloppement (AFD) lui prĂȘte des fonds pour dĂ©carboner son Ă©conomie, car il est important - en Chine comme en France - qu’on protĂšge le bien public mondial qu’est le climat.

En revanche, quand nous intervenons en matiĂšre d’éducation, de santĂ© ou de lutte contre la pauvretĂ© en Afrique, nous le faisons Ă  travers des dons.

La France a choisi de faire passer par l’Union europĂ©enne une grande partie de son aide aux pays les plus pauvres  : 20 % des financements europĂ©ens sont français.

La France a une politique de dons de plus en plus parcimonieuse. qu’en pensez-vous ?

François hollande a promis durant sa campagne électorale que les dons bilatéraux seraient remontés à leur niveau de 2007. Cette promesse sera tenue.

il s’était aussi engagĂ© Ă  augmenter la part de ces dons confiĂ©e aux organisations non gouvernementales. Le montant dont celles-ci recevront la responsabilitĂ© augmentera dĂšs 2013 et passera de 45 millions Ă  90 millions d’euros d’ici Ă  la fin du quinquennat.

a quoi l’échec de l’économie verte au sommet rio +20 est-il dĂ» ?

Pour les pays pauvres, ce n’est pas la

prioritĂ©. Les pays Ă©mergents ne veulent pas se faire imposer de modĂšle. Quant aux pays riches, ils Ă©prouvent le plus grand mal Ă  s’engager dans la voie d’une transition Ă©cologique et Ă  financer celle-ci.

Nous sommes dans une situation de blocage. Mon rĂŽle est d’identifier ceux qui, dans le monde en dĂ©veloppement, pensent autrement et estiment que le dĂ©veloppement durable n’est pas un luxe rĂ©servĂ© aux pays riches.

comment cela se traduira-t-il dans votre politique ?

Nous avons rĂ©orientĂ© la politique Ă©nergĂ©tique de l’AFD. Pour les trois prochaines annĂ©es, les investissements dans ce domaine, soit de 5 Ă  6 milliards d’euros, auront pour prioritĂ©s les Ă©nergies renouvelables, l’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique et la dĂ©carbonisation. Par ailleurs, je veux promouvoir le concept d’agriculture Ă©cologiquement intensive. il faut, au sud, augmenter la production agricole, mais pas n’importe comment.

Et, alors que les projets d’investissement de l’agence sont Ă©tudiĂ©s par un comitĂ© d’engagement qui Ă©value uniquement les risques financiers, l’AFD va se doter d’un deuxiĂšme comitĂ© qui Ă©valuera les projets Ă  partir de critĂšres sociaux et environnementaux. Nous souhaitons que ces critĂšres soient mieux intĂ©grĂ©s dans les appels d’offres des bailleurs.

quelle sera la part des recettes de la taxe sur les transactions financiĂšres affectĂ©e Ă  l’aide aux pays pauvres ?

Le prĂ©sident de la rĂ©publique a confirmĂ©, le 25 septembre, devant l’AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies, ce qu’il avait annoncĂ© lors de la campagne Ă©lectorale, Ă  savoir qu’au moins 10 % de la taxe française sur les transactions financiĂšres seraient affectĂ©s au dĂ©veloppement et Ă  la lutte contre les flĂ©aux sanitaires et les pandĂ©mies. Cela reprĂ©sentera environ 160 millions d’euros.

a quoi serviront les assises du développement et de la solidarité internationale annoncées par le premier ministre ?

Cela fait quinze ans qu’il n’y a pas eu sur le sujet un dialogue de cette ampleur. il s’agit de rĂ©unir tous les acteurs du dĂ©veloppement pour discuter de la façon de mettre la politique française de dĂ©veloppement au service du dĂ©veloppement durable.

PROPOs RECuEILLIs PAR aLaIn FauJaS ET gILLeS van Kote

LE mOnDE

EnTRETIEn PARu DAns L’éDITIOn Du mOnDE Du 2 OCTOBRE 2012, REPRODuIT AVEC

L’AImABLE AuTORIsATIOn DEs AuTEuRs

entretien avec Pascal canfin article initialement paru dans

« L’économie verte n’est pas une prioritĂ© pour les pays pauvres »

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Pierre schapira est Adjoint au Maire de Paris chargé des relations internationales, des Affaires Européennes et de la Francophonie.

dans un monde oĂč les ressources en eau, en Ă©nergie et en terres se rarĂ©fient, quel peut ĂȘtre le rĂŽle des autoritĂ©s locales?

La rarĂ©faction de ces ressources, essentiel les pour la sĂ©curitĂ© alimentaire, pose l’enjeu de leur bonne gestion. Comment optimiser des ressources dĂ©jĂ  contraintes ? Comment assurer leur rĂ©partition

équitable sur un territoire ? Le rÎle des pouvoirs publics, et plus particuliÚrement des autorités locales, est crucial à cet égard.

Les autoritĂ©s locales ont un rĂŽle de coordinateur des politiques publiques sur leur territoire ; cela comprend Ă©galement la gestion des ressources en eau, en terres et en Ă©nergie. Pour assurer ce rĂŽle, les autoritĂ©s locales des pays en dĂ©veloppement ont besoin d’un renforcement de leurs capacitĂ©s. La coopĂ©ration dĂ©centralisĂ©e est une des pistes pour amĂ©liorer la gestion et la planification des ressources dans les pays en dĂ©veloppement.

quel est l’engagement de la ville de Paris en la matiùre ?

A titre d’exemple, la Ville de Paris a notamment crĂ©Ă© un partenariat fort avec la municipalitĂ© de JĂ©richo, en Cisjordanie, sur la question de l’eau. Paris a ainsi soutenu la ville de JĂ©richo dans la rĂ©alisation d’un schĂ©ma directeur de l’eau pour dĂ©velopper une stratĂ©gie de gestion durable de l’eau. Ce projet allie renforcement des services techniques des services d’eau de la ville de JĂ©richo, mais aussi renforcement des capacitĂ©s de gestion et de planification.

Ce sont des partenariats qui doivent ĂȘtre renforcĂ©s et multipliĂ©s. Les solutions se feront Ă  l’échelle de chaque territoire. Abordons un problĂšme global de maniĂšre locale. seule une approche multi-acteurs, autoritĂ©s locales – acteurs de la sociĂ©tĂ© civile – entreprises – institutions internationales, sera efficace et valable pour la gestion de ressources essentielles Ă  l’humanitĂ©.

VOIR Ă©GALEmEnT L’ARTICLE DE BERTRAnD GALLET, DIRECTEuR GĂ©nĂ©RAL DE CITĂ©s unIEs FRAnCE, En PAGE 9.

Ville de Parisentretien avec Pierre Schapira

SOLIDAIRES ET RESPONSABLES :INVESTIR ET AGIR POUR LES OBJECTIFS DU MILLENAIRE

lancĂ©e en 2008, convergences 2015 est la premiĂšre plateforme de rĂ©flexion en europe destinĂ©e Ă  Ă©tablir de nouvelles convergences entre acteurs publics, privĂ©s et solidaires pour promouvoir les objectifs du millĂ©naire pour le dĂ©veloppement (omd) et lutter contre la pauvretĂ© et la prĂ©caritĂ© dans les pays du nord et du sud. vĂ©ritable rĂ©seau fĂ©dĂ©rateur, convergences 2015 rassemble plus de 200 acteurs autour des enjeux des partenariats intersectoriels, de la coopĂ©ration internationale, de la microfinance, de l’entrepreneuriat social, et du dĂ©veloppement durable. chaque annĂ©e, le think-tank organise le forum mondial convergences 2015 et produit des publications phares, telles que le BaromĂštre de la microfinance et le BaromĂštre de l’entrepreneuriat social.www.convergences2015.org

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