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Stimuler l’entrepreneuriat agricole Expériences avec le financement des microprojets Étienne Zinha, Sikirou Oloulotan, Patrick Levaux, Clarisse Agontiglo, Gerrit Bosman, Bonaventure Otchoun, Bertus Wennink (KIT) Décembre 2013 / Lokossa La Facilité d’Appui aux Filières Agricoles du Mono-Couffo La promotion des filières agricoles est l'axe principal du Plan Straté- gique de Relance du Secteur Agri- cole (PSRSA) au Bénin. Les filières riz et maraîchage correspondent aux stratégies d'intensification des systèmes de production des petits producteurs et offrent des opportunités pour l'améliora- tion de leurs revenus agricoles. C’est dans ce cadre que la Faci- lité d'Appui aux Filières Agricoles dans les Départements du Mono et du Couffo (FAFA MC) soutient ces deux filières. L'objectif global de la FAFA MC est d'augmenter la sécurité ali- mentaire et les revenus de la population rurale associée à ces filières. Son objectif spécifique est de renforcer les capacités et l'articulation effective des acteurs privés et publics afin d'améliorer la productivité et la rentabilité des filières riz et maraîchage dans le Mono-Couffo. La participation et le principe de la facilitation sont les particularités de l'intervention. Les bénéficiaires directs sont les producteurs et productrices ainsi que leurs or - ganisations, les transformateurs et les opérateurs privés de com- mercialisation et de fourniture d’intrants, de matériels et d’équi- pements. Mise en place pour la période 2008-2013, la FAFA MC a été dotée d’un budget global de €5.321.546, financé par la Bel- gique dans le cadre de sa coo- pération bilatérale avec le Bénin. L’Agence belge de développe- ment (CTB) fournit une assistance technique pour la mise en œuvre. Points clés La FAFA MC a mis en place un instrument de financement des projets proposés par les opérateurs privés des filières riz et maraîchage. Cet instrument « Microprojets (MIP) » vise à augmenter le revenu des bénéficiaires grâce à une augmentation de la production et du chiffre d’affaires et à une meilleure maîtrise des coûts. Celle-ci se traduit dans des marges nettes accrues et contribuent à la création d’une dyna- mique de développement pour l’ensemble des filières. L’instrument de financement permet aussi aux opérateurs d’apprendre dans la pratique comment devenir plus professionnels et plus entrepreneuriaux. Sur les 1.125 idées de MIP soumises, 183 (16 %) ont été présélectionnées en vue d’un montage de dossier. Ensuite, un comité d’étude a validé 100 dossiers de MIP (juillet 2010-juin 2012). Le coût total des MIP validés est de 870 millions de FCFA (€1,33 million), dont les subventions s'élèvent à 544 millions de FCFA (€0,83 million). Les subventions octroyées représentent 63 % du coût des projets. La subvention moyenne accordée par MIP est de 5,44 millions de FCFA (€8.293). La moitié des projets validés est portée par des individus dont la majorité sont des hommes. L’autre moitié est portée par des groupes, dont la plupart sont aussi des hommes. La majorité des projets concerne la production (82 projets) ; viennent ensuite la transformation et la commercialisation (14) puis l’approvisionnement en intrants (4). Les MIP en production maraîchère sont au nombre de 62 contre 38 pour le riz (certains combinent les deux filières), avec une majorité de femmes dans la production maraîchère (58 % des projets maraîchers). Pendant la première année de mise en œuvre des MIP, le volume moyen de produit commercialisé par promoteur de riz interviewé a augmenté de 42 %. Ce taux est de 33 % dans le cas du maraîchage. 63 % des promoteurs interrogés ont estimé avoir augmenté leur chiffre d’affaires. Ce progrès est le résultat d’un appui à la fois financier, technique et managérial des promoteurs. Les MIP financés jusqu’ici se trouvent en grande partie dans le maillon production des filières, ce qui accroît l’offre de produits sans toutefois exploiter la valeur ajoutée que la transformation et la commercialisation sont susceptibles d’apporter. À l’avenir, il sera donc nécessaire d’accorder une attention particulière aux maillons de la transformation et de la commercialisation. Comme il s’agit souvent d’investisse- ments d’envergure, il sera nécessaire qu’ils soient appuyés par des plans d’affaires de qualité (réalistes dans leur programmation technique, économique et financière), tout en tenant compte des spécificités des filières qui sont, par la nature même de leurs produits (riz et légumes), très différentes. (Suite des points clés page suivante) PROGRAMME AGRICULTURE

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Page 1: Stimuler l’entrepreneuriat agricole La Facilité d’Appui aux

Stimuler l’entrepreneuriat agricoleExpériences avec le financement des microprojets Étienne Zinha, Sikirou Oloulotan, Patrick Levaux, Clarisse Agontiglo, Gerrit Bosman, Bonaventure Otchoun, Bertus Wennink (KIT)

Décembre 2013 / Lokossa

La Facilité d’Appui aux Filières Agricoles du Mono-CouffoLa promotion des filières agricoles est l'axe principal du Plan Straté-gique de Relance du Secteur Agri-cole (PSRSA) au Bénin. Les filières riz et maraîchage correspondent aux stratégies d'intensification des systèmes de production des petits producteurs et offrent des opportunités pour l'améliora-tion de leurs revenus agricoles. C’est dans ce cadre que la Faci-lité d'Appui aux Filières Agricoles dans les Départements du Mono et du Couffo (FAFA MC) soutient ces deux filières.

L'objectif global de la FAFA MC est d'augmenter la sécurité ali-mentaire et les revenus de la population rurale associée à ces filières. Son objectif spécifique est de renforcer les capacités et l'articulation effective des acteurs privés et publics afin d'améliorer la productivité et la rentabilité des filières riz et maraîchage dans le Mono-Couffo.

La participation et le principe de la facilitation sont les particularités de l'intervention. Les bénéficiaires directs sont les producteurs et productrices ainsi que leurs or-ganisations, les transformateurs et les opérateurs privés de com-mercialisation et de fourniture d’intrants, de matériels et d’équi-pements.

Mise en place pour la période 2008-2013, la FAFA MC a été dotée d’un budget global de €5.321.546, financé par la Bel-gique dans le cadre de sa coo-pération bilatérale avec le Bénin. L’Agence belge de développe-ment (CTB) fournit une assistance technique pour la mise en œuvre.

Points clés

� La FAFA MC a mis en place un instrument de financement des projets proposés par les opérateurs privés des filières riz et maraîchage. Cet instrument « Microprojets (MIP) » vise à augmenter le revenu des bénéficiaires grâce à une augmentation de la production et du chiffre d’affaires et à une meilleure maîtrise des coûts. Celle-ci se traduit dans des marges nettes accrues et contribuent à la création d’une dyna-mique de développement pour l’ensemble des filières. L’instrument de financement permet aussi aux opérateurs d’apprendre dans la pratique comment devenir plus professionnels et plus entrepreneuriaux.

� Sur les 1.125 idées de MIP soumises, 183 (16 %) ont été présélectionnées en vue d’un montage de dossier. Ensuite, un comité d’étude a validé 100 dossiers de MIP (juillet 2010-juin 2012). Le coût total des MIP validés est de 870 millions de FCFA (€1,33 million), dont les subventions s'élèvent à 544 millions de FCFA (€0,83 million). Les subventions octroyées représentent 63 % du coût des projets. La subvention moyenne accordée par MIP est de 5,44 millions de FCFA (€8.293).

� La moitié des projets validés est portée par des individus dont la majorité sont des hommes. L’autre moitié est portée par des groupes, dont la plupart sont aussi des hommes. La majorité des projets concerne la production (82 projets) ; viennent ensuite la transformation et la commercialisation (14) puis l’approvisionnement en intrants (4). Les MIP en production maraîchère sont au nombre de 62 contre 38 pour le riz (certains combinent les deux filières), avec une majorité de femmes dans la production maraîchère (58 % des projets maraîchers).

� Pendant la première année de mise en œuvre des MIP, le volume moyen de produit commercialisé par promoteur de riz interviewé a augmenté de 42 %. Ce taux est de 33 % dans le cas du maraîchage. 63 % des promoteurs interrogés ont estimé avoir augmenté leur chiffre d’affaires. Ce progrès est le résultat d’un appui à la fois financier, technique et managérial des promoteurs.

� Les MIP financés jusqu’ici se trouvent en grande partie dans le maillon production des filières, ce qui accroît l’offre de produits sans toutefois exploiter la valeur ajoutée que la transformation et la commercialisation sont susceptibles d’apporter. À l’avenir, il sera donc nécessaire d’accorder une attention particulière aux maillons de la transformation et de la commercialisation. Comme il s’agit souvent d’investisse-ments d’envergure, il sera nécessaire qu’ils soient appuyés par des plans d’affaires de qualité (réalistes dans leur programmation technique, économique et financière), tout en tenant compte des spécificités des filières qui sont, par la nature même de leurs produits (riz et légumes), très différentes.

(Suite des points clés page suivante)

PROGRAMME AGRICULTURE

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

� La plupart des MIP financés ayant fait l’objet de l’étude sont rentables, créent de l’emploi et contribuent à l’amélioration de la sécurité alimentaire des populations. Les recettes les plus élevées sont constatées au niveau de la production de semences de riz (marge brute moyenne de 4.679.925 FCFA par an) et de la commercialisation des intrants (marge brute moyenne de 20.340.000 FCFA par an). Les marges nettes les plus élevées sont également enregistrées au niveau de ces mêmes activités (3.496.074 FCFA par an pour les semences de riz et 19.692.500 FCFA par an pour les intrants).

� Les bénéfices sont surtout réinvestis dans l’activité économique que le MIP supporte. Globalement 66 % des promoteurs interrogés déclarent avoir fait de l’épargne sur les bénéfices générés par leur MIP pour assurer cet autofinancement. Cette proportion est plus élevée au niveau des commerçants de riz (100 %), des producteurs de riz (73 %) et des maraîchers (69 %).

� Est-ce que financer les MIP constitue un moyen d’avoir un impact sur un plus grand nombre d’acteurs des filières agricoles ? On peut a priori dire « oui » lorsque le financement prend en compte les groupements, les coopératives etc. (plusieurs promoteurs à l’intérieur d’une organisation) ou lorsque l’investissement financé est structurant.

� Sur les 100 MIP validés, 95 ont été effectivement financés par la FAFA MC car cinq (5) promoteurs n’ont pas pu lever leur contrepartie.

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Sigles et abréviations

BCEAO Banque Centrale des États de l’Afrique de OuestCA Chiffre d’affairesCARDER Centre Agricole Régional pour le Développement RuralCCIB Chambre de Commerce et d’Industrie du BéninCEV Comité d’Étude et de ValidationCRM Conseil Régional des MaraîchersCRR Conseil Régional des RiziculteursCTB Agence belge de développementFAFA MC Facilité d’Appui aux Filières Agricoles dans les départements

du Mono et du CouffoFAIA Facilité d’Appui aux Investissements AgricolesFNDA Fonds National pour le Développement AgricoleGEL Guichet d’Économie LocaleIMF Institution de microfinanceLD MC Louvain Coopération au Développement Mono-CouffoMIP MicroprojetONG Organisation non gouvernementalePIB Produit intérieur brutPSRSA Plan Stratégique de Relance du Secteur AgricoleSONAPRA Société Nationale pour la Promotion AgricoleURP Union Régionale des Producteurs

Liste des encadrés, figures et tableaux

Encadré 1 : Une définition des microprojets (MIP) 5Encadré 2 : Les missions assignées aux partenaires pour la gestion

des guichets MIP 5

Figure 1 : Évolution du volume moyen de produit commercialisé par MIP 9Figure 2 : Augmentation du chiffre d’affaires (%) par type de promoteur 10Figure 3 : Nouvelles relations développées à travers les MIP 12Figure 4 : Appréciation globale du guichet MIP par les promoteurs interrogés 13

Tableau 1 : Échantillonnage des promoteurs interrogés 4Tableau 2 : Caractéristiques des MIP financés (nombre) 8Tableau 3 : Répartition des MIP financés par maillon des filières 8Tableau 4 : Nombre de promoteurs interrogés ayant augmenté leur CA 10Tableau 5 : Marges brute et nette et productivité du capital de quelques MIP 11Tableau 6 : Utilisation globale des bénéfices des MIP ayant fait l’objet

de l’enquête 11Tableau 7 : Proportion de promoteurs ayant épargné et ayant besoin

d’un prêt 13Tableau 8 : Forces, faiblesses et propositions d’amélioration définies

par les promoteurs interrogés 14

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

IntroductionTout en étant le premier réservoir d’emplois, le secteur agri-cole constitue également la principale source de création de la richesse économique pour les pays en voie de dévelop-pement comme le Bénin. Au Bénin, plus de 60 % des actifs masculins et 35,9% des actifs féminins réellement occupés exercent une profession agricole. En outre, ce secteur contri-bue à près de 30 % (2008) de la formation du produit intérieur brut (PIB)1.

Malgré ce tableau appréciable, le secteur agricole béninois se caractérise par des systèmes de production dits traditionnels qui sont peu performants et peu compétitifs. D’une façon gé-nérale, il s’agit d’une agriculture presque sans investissement en équipement et matériel, se basant sur le petit outillage traditionnel, avec un faible niveau d’utilisation d’intrants, une grande pénibilité des travaux et un niveau de rémunération des facteurs de production, notamment le travail, très bas. Il s’ensuit un exode rural de plus en plus prononcé chez les jeunes vers des centres urbains où les emplois disponibles sont perçus comme étant plus rémunérateurs que le métier agricole.

Les cultures vivrières, qui couvrent l’essentiel des besoins alimentaires sur le plan national, restent encore largement en deçà des potentialités offertes par les conditions écolo-giques du pays. Cela est également dû à la faible productivité, le résultat d’un manque (d’utilisation) d’intrants spécifiques, d’outils de production et de transformation rudimentaires et d’une non-maîtrise de l’eau ainsi qu’à l’insuffisance des infrastructures de stockage et de conservation. De plus, la création d’une valeur ajoutée sur place, et par conséquent la promotion de l’emploi en zones rurales, est encore peu déve-loppée alors même qu’il existe des marchés nationaux et de la sous-région ouest africaine pour écouler les produits agri-coles, transformés ou non.

Pour réduire ces faiblesses et relancer le secteur agricole bé-ninois, il est impératif de réaliser des investissements produc-tifs, structurants et durables. En dépit des investissements consentis par les pouvoirs publics, les besoins des produc-teurs en infrastructures et équipements de base, notamment

pour la mécanisation agricole, la maîtrise de l’eau, la conser-vation et la transformation des produits, sont loin d’être cou-verts. Ces contraintes sont aggravées par les limites des poli-tiques et stratégies agricoles qui se traduisent par l’absence de mesures incitatives pour l’entrepreneuriat agricole et sur-tout l’inadéquation du système de crédit et de financement agricoles face aux réalités de l’agriculture familiale qui domine le secteur au Bénin.

Les besoins d’investissements productifs en agriculture qui nécessitent des crédits à moyen et long terme sont quasi-insatisfaits (crédit d’équipements, financement des infras-tructures agricoles, etc.). En dehors de la filière coton, où le recouvrement des crédits accordés est plus ou moins assuré par la bonne structuration de cette filière et son mode de fonctionnement contrôlé, les banques sont réticentes à financer les filières des cultures vivrières, qui sont jugées à risques élevés. L’offre actuelle, essentiellement basée sur la microfinance avec des crédits à 80 % concentrés sur le court terme, reste insignifiante. À titre d’exemple, en 2007, il est noté que seulement 18,3 % des petits exploitants ont eu accès au crédit2.

Cette note présente les résultats de la capitalisation de l’ins-trument financier pour appuyer des MIP qui a eu lieu vers la fin de la FAFA MC (juin 2013). La capitalisation est surtout basée sur des interviews avec un échantillon de promoteurs de MIP dans les filières riz et maraîchage (Tableau 1). Les données ont été collectées à l’aide d’entretiens structurés et de groupes de réflexion (focus groups). Pour la conduite de ces enquêtes, il a été tenu compte de tous les types de microprojets finan-cés. Un échantillon de 32 promoteurs a été constitué, ce qui représente 34 % de l’effectif total de 95 microprojets financés. 5 autres MIP n'ont pas été financés pour raison de non mobi-lisation de la contrepartie par leurs promoteurs.

L’objectif de cette note est de présenter la démarche mise au point par la FAFA MC (chapitres 2 et 3) et les résultats des microprojets qui sont aujourd’hui fonctionnels (chapitres 4 au 6). Ces informations permettent de tirer les enseignements pour une meilleure application de cet instrument financier (chapitres 7 et 8).

Tableau 1 : Échantillonnage des promoteurs interrogés

IntrantsProduction Transformation Commercialisation

TotalMaraî-chage Riz Mixte Maraî-

chage Riz Maraî-chage Riz

Nb. total de promoteurs 4 51 22 6 5 4 0 3 95

Nb. de promoteurs interrogés 2 15 8 2 2 1 0 2 32

% de promoteurs interrogés 50 29 36 33 40 25 0 67 34

1 | Gouvernement du Bénin (2011). Plan Stratégique de Relance du Secteur Agricole (PSRSA). Cotonou.2 | Idem.

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L’instrument Financement des MicroprojetsOn comprend donc clairement qu’il est urgent de développer et mettre en place un dispositif d’appui financier aux inves-tissements agricoles (équipements, infrastructures agricoles, unités de transformation, etc.) pour lesquels les opérateurs privés ont des moyens limités. C’est dans cette optique que la Facilité d’Appui aux Filières Agricoles dans les départements du Mono et du Couffo (FAFA MC) a mis en place un instru-ment de financement des microprojets des opérateurs privés des filières riz et maraîchage communément appelé « MIP » (Encadré 1).

Encadré 1 : Une définition des microprojets (MIP)

Un microprojet (MIP) est une activité ou un ensemble d’activités élaboré ou monté par un promoteur dont la réalisation permet de résoudre un problème donné. Dans le cas d’une filière agricole, la réalisation d’un MIP permet de régler un problème ou un goulot d’étrangle-ment visant à promouvoir ou à développer la filière.

Dans le cadre de la FAFA MC, le financement d’un MIP consiste à donner un appui financier et technique à des promoteurs individuels ou collectifs pour la réalisation d’un investissement pour lequel leurs propres capaci-tés financières sont insuffisantes. Ces investissements ciblent aussi bien les maillons production que ceux de transformation ou de commercialisation des filières riz et maraîchage. Les investissements peuvent être un équipement, une construction et/ou un aménagement agricole, souvent combinés à des activités de formation et/ou d’appui-conseil dans l’objectif de soutenir les acti-vités économiques du promoteur et d’appuyer le déve-loppement de la filière dans son ensemble.

Un opérateur privé (aussi appelé promoteur ou porteur de projet) peut être un producteur individuel, un groupement de producteurs, un transformateur ou un commerçant lié à l’une des deux filières.

L’instrument MIP a pour but d’augmenter le revenu des béné-ficiaires grâce à une augmentation de leur chiffre d’affaires et une meilleure maîtrise des coûts, permettant ainsi une amélio-ration des marges de l’activité appuyée. Dans le même temps, le financement permet aux opérateurs d’apprendre dans la pratique de la mise en œuvre de leur MIP comment devenir plus professionnels et plus entrepreneuriaux (Encadré 2).

Démarche de financement des microprojets

Première phase : gestion déléguée des guichets MIPLa FAFA MC a établi des accords d’exécution, signés en décembre 2009 pour une durée de trois ans, avec deux par-tenaires clés pour la gestion de deux guichets MIP distincts (Encadré 2). Ces partenaires sont :� La Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin (CCIB) :

chargée de la gestion du guichet MIP en amont (approvi-sionnement en intrants) et en aval (transformation, com-mercialisation des produits agricoles) des filières où des opérateurs privés (entreprises, commerçants) exercent leurs métiers.

� L’Union Régionale des Producteurs (URP) : chargée de la gestion du guichet MIP relatif au maillon production des deux filières où les producteurs et productrices et leurs organisations opèrent.

Encadré 2 : Les missions assignées aux partenaires pour la gestion des guichets MIP

Les accords d’exécution permettaient de doter chacun des partenaires les moyens d’accomplir les missions suivantes, avec l’appui technique de l’équipe de la FAFA MC :- Élaborer le contenu, les outils et méthodes en respect

du manuel de procédures de mise en œuvre du finan-cement ;

- Réaliser une campagne de communication pour appel à idées de microprojets ;

- Réceptionner les idées et appuyer les porteurs de pro-jets dans le montage de leurs dossiers MIP;

- Vérifier la pertinence et l’existence réelle des MIP sur le terrain ;

- Transmettre et présenter les dossiers des MIP au Comité d’Étude et de Validation (CEV) et recevoir les procès-verbaux de validation du CEV ;

- Transférer les demandes de financement à la FAFA MC pour les MIP validés par le CEV ;

- Signer un contrat d’engagement avec le promoteur du microprojet ;

- Transférer les ressources à chaque promoteur et assu-rer le suivi-évaluation des MIP sur le plan technique (in-dicateurs de performance) et financier (justification des dépenses pour décaissement des tranches suivantes).

Repicage du riz à Lalo. © CTB

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

Cette première phase, qui a duré 18 mois (décembre 2009-juin 2011), a permis de mettre en route l’instrument.

Toutefois, après plus d’une année d’activité, il a été relevé des limites et lacunes importantes dans la gestion des deux gui-chets. Par la suite, l’équipe de la FAFA MC, dans sa mission de facilitation et de renforcement des capacités, s’est efforcée d’accompagner ces deux partenaires pour obvier aux difficul-tés suivantes :� Manque de personnel fiable et compétent, puis manque de

suivi des activités financées sur le terrain ;� Manque de transparence et de rigueur dans le traitement

des fiches d’idées ou des documents de microprojets reçus, entraînant l’inexistence des dossiers de renseigne-ment chronologique sur les microprojets approuvés et mis en œuvre. Les dossiers de renseignement ont été reconsti-tués après la reprise des guichets par la FAFA MC ;

� Conflit d’intérêt : les représentants des structures privées (CRM, CRR, URP, CIA et CCIB) au CEV qui représentent des bénéficiaires et qui sont aussi des bénéficiaires poten-tiels, sont des décideurs de validation des MIP. Ceci limitait fortement l’analyse objective des dossiers ;

� Absence de suivi des dossiers tant dans leurs aspects ad-ministratifs et financiers que dans leur aspect opérationnel sur le terrain.

Face à ces constats, il était manifeste que ces partenaires n’étaient pas suffisamment qualifiés et opérationnels pour gé-rer des guichets MIP de cette envergure financière, avec des exigences administratives et financières élevées. Par consé-quent, la FAFA MC a décidé de stopper les accords d’exécu-tion avec l’URP et la CCIB portant sur la gestion des guichets MIP afin de « reprendre la main » sur l’instrument et d’en revoir les modalités de gestion.

Seconde phase : gestion directe du guichet MIPLa révision des modalités de gestion de l’instrument MIP a reposé sur les points clés suivants :� La gestion directe par la FAFA MC des flux financiers :

transfert des fonds depuis le compte de la FAFA MC vers chaque compte individuel des porteurs de projets, contrôle et suivi des fonds et justifications par la FAFA MC ;

� Un seul guichet MIP pour les différents maillons de cha-cune des filières afin de simplifier la gestion du processus ;

� Le passage d’accords à des contrats de prestation de services répartis sur deux contractants différents : l’ONG Louvain Coopération au Développement (LD) pour la ges-tion globale de l’aspect technique du guichet MIP et un consultant fiduciaire pour le suivi administratif, financier et comptable de chaque dossier de MIP validé par le CEV ;

� La révision et la mise à jour du manuel de gestion des procé-dures de MIP pour l’adapter à cette nouvelle organisation ;

� L’accompagnement des prestataires de services par l’équipe de la FAFA MC avec un travail en commun très conséquent en début du contrat et dégressif par la suite ;

� Le suivi de la traçabilité de chaque dossier depuis son ins-cription dans une base de données en tant qu’idée jusqu’à

la décision d’accorder ou non le financement (avec un suivi des décisions lors des différentes étapes) ;

� La constitution d’un répertoire de rédacteurs locaux MIP, leur formation et suivi-appui. Les rédacteurs aident les por-teurs à rédiger leur projet et à constituer leur dossier.

Montage assisté des dossiers MIPLes rôles des différents intervenants dans le processus de mise en œuvre des MIP sont décrits ci-après.

Il est essentiel que les dossiers présentés au CEV soient éva-lués du point de vue de leur faisabilité technique et leur réa-lisme économique, aussi bien qu’au plan des capacités tech-niques, entrepreneuriales et morales de leur promoteur avant le montage même du dossier.

Le premier contact entre promoteur et programme est la réception de l’idée de projet au niveau du guichet MIP par le conseiller LD. À cette occasion, le porteur du projet reçoit les informations de base sur le processus d’instruction et de sélection et échange avec l’agent LD sur le contenu de sa proposition. L’agent LD explique aussi les conditions d’accès et d’éligibilité afin d’éviter le montage de dossiers qui n’au-raient aucune chance d’être financés. Si l’idée de projet est conforme aux conditions d’accès et critères d’éligibilité, le porteur remplit une fiche d’idée. Le dossier est inscrit dans le registre de dépôt de fiches descriptives d’idées de MIP. Ce registre est maintenu sous forme d’un cahier papier et d’une base de données informatisée. L’enregistrement de l’idée est confirmé au porteur par un accusé de réception.

Les idées ainsi enregistrées sont par la suite soumises à une première étape d’évaluation, la présélection. Un comité de présélection, composé du conseiller LD et de deux chargés de facilitation de la FAFA MC, évalue les idées de projet sur la base de la fiche d’idée et décide s’il y a lieu de poursuivre le projet par une visite de terrain.

Le comité de présélection travaille avec les outils suivants :� La grille de vérification des conditions d’accès et des cri-

tères d’éligibilité ;� Le tableau de répartition qui donne des orientations sur le

nombre de MIP par filière, par secteur d’activité et par zone géographique ;

� La grille de notation de la pertinence de l’idée et sa pré-sentation.

Si le projet remplit les conditions requises, une équipe tech-nique composée du conseiller LD et du Chargé des MIP de la FAFA MC donne rendez-vous au porteur de projet pour une visite de terrain sur son site.

Cette première visite de terrain (visite de préfaisabilité) sert à vérifier la faisabilité technique et économique du projet – profondeur de la nappe phréatique, qualité de l’eau, proba-bilité d’inondation, accessibilité du site, proximité des mar-chés, etc. – et à faire la connaissance du porteur, à évaluer

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son expérience dans l’activité, sa capacité à mettre en œuvre le projet proposé et, dans la mesure du possible, sa moralité financière. Dans le cas d’un groupement, l’équipe technique fait aussi une analyse du fonctionnement du groupement à partir des statuts, du règlement intérieur et des procès-ver-baux de réunions.

Dans le cas où l’équipe juge la faisabilité et l’émargement au fonds MIP possible, des éléments technico-économiques sont dès lors collectés sur place. Un compte rendu précise les élé-ments clés du dossier avec les avis des techniciens qui ont fait la visite de terrain. Le compte rendu est envoyé à la FAFA MC.

L’équipe technique informe le porteur de ses conclusions et, si positives, lui demande de commencer la rédaction de son document de projet. Afin de faciliter le travail de rédac-tion, l’équipe lui propose une liste de rédacteurs au sein de laquelle le porteur de projet fait son choix en fonction des be-soins techniques du dossier et de la position de son projet. Le rédacteur choisi réalise la rédaction d’un document de projet selon le canevas proposé par le programme et aide le porteur à constituer son dossier.

Le dossier de projet établi, une réunion technique se tient entre le conseiller LD, le consultant fiduciaire, le rédacteur et le porteur de projet afin d’avoir une même compréhension du contenu. Le conseiller LD enregistre le dépôt du dossier de MIP dans un registre (sous forme papier et électronique dans la base de données) et délivre un récépissé au porteur de pro-jet. Le conseiller inscrit également le dossier à la prochaine session du CEV.

L’évaluation du dossier de projet par le CEV est l’étape finale du processus de sélection. Une fois le dossier de projet validé, le processus de mise en œuvre peut démarrer. Lors du CEV, le dossier de projet est présenté aux membres du comité par le porteur lui-même. Le comité analyse le dossier, échange avec le porteur pour obtenir des éclaircissements et effectuer des vérifications, formule des remarques, délibère et statue. Un dossier peut être validé, ajourné ou rejeté. Pour les dossiers validés, les rédacteurs intègrent les observations et remarques du CEV juste après la réunion du CEV, sous la supervision du conseiller LD et du consultant fiduciaire.

Une fois le dossier mis à jour avec le budget et le plan de décaissement validés, le consultant fiduciaire procède à la vérification de la mobilisation de la contrepartie par le porteur sur un compte spécifique. Si la contrepartie est effectivement disponible, le porteur est invité à une formation sur la gestion des MIP. Une fois la formation terminée, le porteur signera le contrat d’engagement pour la réalisation de son projet.

Le contrat signé, la FAFA MC ordonne le transfert des fonds sur le compte du porteur domicilié dans une institution de microfinance (IMF) ou dans une banque commerciale, par tranche en fonction des modalités retenues dans le plan de décaissement approuvé du dossier. Pour l’acquisition des

biens et des services dans le cadre de leurs projets, les por-teurs doivent faire des demandes de prix conformément aux procédures décrites dans le manuel de financement des projets.

Accompagnement technique des porteurs de projetAprès la validation de leurs dossiers et avant le transfert des fonds, la FAFA MC organise des formations (de 2 jours) en gestion administrative et financière de projet et en collecte de données.

Les formations sont organisées pour que les porteurs puissent bien gérer les moyens qui sont mis à leur disposition et col-lecter les données qui permettent un suivi-évaluation de l’in-vestissement. Pendant les formations, on leur explique l’en-semble des procédures et règles à suivre lors du processus de mise en œuvre de l’investissement. D’autre part, on les forme à la collecte et l’analyse des données (outils et leur utilisation) afin de permettre un suivi technico-économique – pour eux-mêmes et pour le programme – de leur projet.

La formation regroupe les porteurs de projets d’une même session du CEV. Elle est faite par le conseiller LD et le consul-tant fiduciaire avec l’appui de l’équipe de la FAFA MC. La for-mation se fait grâce à des outils simples en lien avec le niveau d’instruction de la plupart des porteurs, c’est-à-dire école primaire ou illettré. La formation permet aussi d’identifier les appuis techniques nécessaires pour chaque MIP.

L’accompagnement technique prévu pendant la mise en œuvre et l’exploitation de l’investissement permet aux por-teurs de projet d’accéder à un paquet de services de facilita-tion en matière d’acquisition des équipements, du matériel, et des matériaux nécessaires pour la réalisation des ouvrages, la mise en relation avec les commerçants pour l’écoulement de leurs produits et la mise en relation avec les institutions financières (IF) pour l’obtention des fonds de roulement afin de pouvoir subvenir aux charges (intrants, main-d’œuvre) du cycle de production. L’appui technique est un appui sur mesure, de façon à apporter une réponse personnalisée aux besoins. Des appuis spécifiques supplémentaires sont fournis par les prestataires LD et le consultant fiduciaire, les agents des structures partenaires de la FAFA MC (CARDER, LD, CRM, CRR, URP, CCIB, etc.).

Le conseiller LD, le consultant fiduciaire et le chargé des MIP de l’équipe de la FAFA MC assurent un suivi continu des por-teurs de projet afin de capitaliser les informations liées aux effets et impacts du MIP et de les accompagner dans la réso-lution des difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre du MIP. Ces agents établissent l’état des lieux initial avant la mise en place des investissements afin de pouvoir mesurer ensuite leurs effets sur l’activité du porteur de projet. Ces agents faci-litent aussi une mise en relation étroite et systématique avec les organisations professionnelles (CRM, CRR, URP, CCIB, etc.) pour que le porteur de projet puisse, au besoin, s’insérer dans un réseau relationnel lui permettant d’accéder à d’autres conseils et aux opportunités de marché.

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

Les MIP validés et financésSur les 1.125 idées de MIP enregistrées pendant la période de juillet 2010 à juin 2012, 183 (16 %) ont été présélectionnées par le comité de présélection, en vue d’un montage de dossier et 100 dossiers finalement validés (8,9 %) par le CEV, au cours de neuf sessions d’analyse et de validation.

Le coût total des dossiers de MIP validés s'élève à 870 mil-lions de FCFA (€1,33 million), avec un montant de subventions de 544 millions de FCFA (€0,83 millions). Les subventions oc-troyées représentent donc 63 % du coût des projets. Le coût moyen d’un MIP s’élève à 8,70 millions (€13.263) et le mon-tant moyen de la subvention accordée est de 5,44 millions de FCFA (€8.293).

Ces projets validés ont les caractéristiques suivantes (Tableau 2) : � La moitié des projets est portée par des individus dont la

majorité sont des hommes. L’autre moitié est portée par des groupes dont la plupart sont des hommes ;

� La majorité des projets concerne la production (82 projets) ; viennent ensuite la transformation et la commercialisation (14) puis l’approvisionnement en intrants (4) ;

� Les MIP en production maraîchère sont au nombre de 62 contre 38 pour le riz, avec une majorité de femmes en acti-vité dans la production maraîchère (58 % des projets en production maraîchère contre 44 % en moyenne des MIP) ;

� La plupart des MIP ont été encadrés par l’ONG Louvain Développement.

Sur les 100 MIP validés, 95 ont été effectivement financés par la FAFA MC car cinq (5) promoteurs n’ont pas pu lever leur contrepartie. Ces 95 MIP financés se présentent comme suit (Tableau 3). Au total 1.483 personnes bénéficient directement de ces MIP.

Tableau 2 : Caractéristiques des MIP financés (nombre)

Types de promoteursParticuliers-hommes Particuliers-femmes Groupes-hommes Groupes-femmes

32 19 39 10Maillons ciblés des filières

Intrants Production Transformation & commercialisation4 82 14

Filières ciblées en productionMaraîchage Riz

62 38Encadrement technique des promoteurs

CCIB URP ONG-LD12 24 64

Tableau 3 : Répartition des MIP financés par maillon des filières

Maillon filière Nombre de MIP

BénéficiairesHommes Femmes Total % femmes

Intrants 4 4 0 4 0Production riz 22 229 162 391 41Production maraîchage 51 139 201 340 59Production riz & maraîchage 6 52 44 96 46Production et transformation maraîchage 1 1 0 1 0Transformation maraîchage 4 1 3 4 75Transformation riz 4 471 173 644 27Commercialisation riz 3 3 0 3 0Total 95 900 583 1.483 39

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Les effets des MIP

Évolution des volumes de produits commercialisés Le volume moyen de produit commercialisé par promoteur de riz (promoteurs interrogés) est passé de 9.486 kilos avant le financement d’un MIP à 13.507 kilos la première année de mise en œuvre du projet, soit un taux d’accroissement de 42 %. Pour ce qui concerne le volume moyen de produits maraî-chers commercialisés par promoteur (promoteurs interrogés), il est passé de 4.365 kilos l’année avant le financement du microprojet à 5.822 kilos la première année d’exécution du MIP, soit un taux d’accroissement de 33 % (Figure 1).

Ces augmentations de volume de produits commercialisés sont si considérables qu’elles permettent une amélioration des revenus des promoteurs. Cependant, il reste à savoir si ces augmentations sont surtout dues à une extension des superficies emblavées, une intensification de la production ou une combinaison des deux stratégies. Le défi est de maintenir, voire améliorer, ces niveaux de production durant les années à venir, d’autant plus que les promoteurs auront déjà plus d’expérience en matière de conduite et de gestion entrepre-neuriale de leurs activités.

Évolution du chiffre d’affaires des promoteursLe chiffre d’affaires (CA) est le montant total des ventes ef-fectuées par une entreprise durant une année. En d’autres termes, c’est le volume de production multiplié par la valeur

unitaire du produit (le prix). En termes d’effectif de promoteurs interrogés ayant augmenté leur chiffre d’affaires, 63 % des promoteurs interviewés ont estimé avoir augmenté leur CA, avec toutefois des différences entre les types de promoteurs (Tableau 4).

En termes d’augmentation du CA par rapport à celui de l’année avant le financement des MIP, elle est en moyenne de 59 % par promoteur interrogé, selon leurs déclarations. Ce pourcentage est variable selon le type de microprojet (Figure 2). Les raisons qui expliquent ces augmentations de chiffre d’affaires sont principalement dues à l’augmentation des superficies et l’accroissement du rendement.

Par contre, environ le tiers des promoteurs interrogés (41 %) ont déclaré ne pas avoir pu augmenter leur chiffre d’affaires. La principale raison tient au fait que la production ou la com-mercialisation n’a pas encore démarré ou n’a pas achevé son cycle entier. Au moment de l’enquête, qui portait surtout sur des projets validés en mai et juin 2012, la plupart étaient encore à l’étape d’installation des équipements ou d’aménagement.

Pour d’autres promoteurs (5 % environ), ils ont déjà produit mais n’ont pas pu augmenter leur chiffre d’affaires. Les prin-cipales raisons évoquées sont : la difficulté de commercia-lisation des produits de transformation (la purée de tomate et le ketchup dans le cas d’une ONG transformatrice) ; et la destruction des cultures (tomate) par un nuisible (les mouches blanches) dans un autre cas.

Figure 1 : Évolution du volume moyen de produit commercialisé par MIP

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

Rentabilité financière des MIPL’équipe de la FAFA MC a fait une analyse de la performance économique des MIP financés. Pour ce faire, on a pris un échantillon de onze (11) promoteurs qui ont déjà exercé du-rant une année au moins et qui ont eu des résultats. Pour ces onze promoteurs, les paramètres d’analyse financière (marge brute, marge nette et productivité du capital) ont donné les résultats suivants (Tableau 5) :

Les calculs des marges brutes indiquent que les recettes les plus élevées sont constatées au niveau de la production de semences de riz et de la commercialisation des intrants, avec une marge brute moyenne respective de 4.679.925 FCFA et de 20.340.000 FCFA au cours de l’année. Les marges nettes les plus élevées sont également enregistrées au niveau de la production de semences de riz et de la commercialisation

des intrants avec une marge nette moyenne respective de 3.496.074 FCFA et de 19.692.500 FCFA par an. L’analyse de la productivité du capital montre que les différents types de MIP ont tous une productivité supérieure à un (1).

Il ressort de l’analyse de ces trois paramètres que la plupart des MIP financés par la FAFA MC sont rentables. De plus, ils permettent non seulement d’améliorer le revenu des promo-teurs appuyés, mais aussi de créer de l’emploi (main-d’œuvre occasionnelle et permanente) et de contribuer à l’amélioration de la sécurité alimentaire des populations.

Utilisation des bénéfices par les promoteursCertains promoteurs de MIP ayant déjà des résultats de mise en œuvre de leurs microprojets ont pu faire des réalisations supplémentaires grâce aux bénéfices issus de leurs micro-

Figure 2 : Augmentation du chiffre d’affaires (%) par type de promoteur

Tableau 4 : Nombre de promoteurs interrogés ayant augmenté leur CA

Type de promoteur Nb. ayant augmenté leur CA

Nb. de promoteurs interrogés

% des promoteurs ayant augmenté leur CA

Producteur de riz 7 8 88Producteur maraîcher 7 15 47Producteur riz et maraîchage 0 2 0Transformateur de riz 1 1 100Transformateur maraîcher 1 2 50Commerçant d’intrants 2 2 100

Commerçant de riz 1 2 50

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projets : il s’agit de 15 (47 %) des (32) promoteurs interro-gés. Selon les déclarations des promoteurs interviewés, le montant global cumulé des bénéfices réinvestis s’élève à 22.798.800 Francs CFA. La répartition globale des investisse-ments indique que les bénéfices sont surtout réinvestis (achat de matériels et équipements agricoles, micro-irrigation avec des tourniquets, augmentation de la superficie cultivable) dans l’activité économique soutenue par le MIP (Tableau 6). Cependant, ces chiffres sont à traiter avec circonspection car ils se basent sur un faible échantillon et englobent des activi-tés différentes.

Une grande partie (88 %) du bénéfice issu de la mise en œuvre des microprojets est réinvestie dans ces mêmes projets par les promoteurs. Cela soutient l’idée que la plupart des pro-moteurs soutient une logique d’accroissement du volume de produits à commercialiser afin d’augmenter le bénéfice. C’est une logique d’extension ou de développement des activités économiques. Une autre partie (12 %) du bénéfice réalisé est orientée vers les besoins fondamentaux comme le logement, l’éducation, l’alimentation, etc. Il convient de noter que les MIP ne sont pas les seules sources de revenus de ces pro-moteurs.

Nouvelles relations développées Le financement et la mise en œuvre des MIP ont favorisé la naissance et le développement de nouvelles relations entre les différents acteurs des filières riz et maraîchage (Figure 3).

En effet, une fois que l’idée de leur projet est acceptée, les promoteurs sont mis en relation avec les rédacteurs locaux pour la rédaction de leur microprojet, souvent des agents du CARDER et parfois des agents des organisations profes-sionnelles agricoles. Ensuite, pour les besoins en intrants et l’achat de matériels et équipements, ils sont mis en contact avec des opérateurs privés (commerçants) ou des services étatiques (SONAPRA, CARDER). Et surtout, ces promoteurs sont mis en relation avec des commerçants pour appuyer l’écoulement de leurs produits.

Tableau 5 : Marges brute et nette et productivité du capital de quelques MIP

Type de MIP Marge brute (FCFA)1

Marge nette (FCFA)2

Productivité du capital (ratio)3

Production de riz semences 4.679.925 3.496.074 1,72Production de riz paddy 2.297.712 582.007 1,18Production maraîchère 1.001.250 779.025 1,94Commercialisation de riz 1.360 000 927.060 3,05Commercialisation d’intrants 20.340.000 19.692.500 1,80

1 | Recettes après déduction du chiffre d’affaires des charges d’intrants et des coûts de la main-d’œuvre occasionnelle.2 | Recettes après déduction de la marge brute de toutes les autres charges engagées dans le projet.3 | Ratio bénéfice/coût. C’est le revenu par unité de capital investi.

Tableau 6 : Utilisation globale des bénéfices des MIP ayant fait l’objet de l’enquête

Type de promoteur Francs CFA %

Réinvestissement dans l’activité 20.183.100 88Construction de maisons 1.310.000 6Scolarisation des enfants 650.000 3Épargne à la banque 540.000 2Alimentation 75.000 <0,5Acquisition d’un moyen de déplacement 40.000 <0,5Total des bénéfices 22.798.800 100 %

Champ de riz à Klouékanmè. © CTB

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

Ces différentes relations permettent de renforcer l’articulation entre les acteurs des filières agricoles, notamment les filières riz et maraîchage dans le Mono et le Couffo. Cependant, on note l’absence de développement de relations entre les pro-moteurs (surtout de production) et les IMF malgré les mul-tiples efforts effectués par l’équipe de la FAFA MC et d’autres acteurs comme l’ONG Louvain Développement à travers son Guichet d’Économie Locale (GEL). Cette situation est princi-palement due à la réticence des IMF et des banques à finan-cer les activités agricoles en général et, tout particulièrement, la production. Les raisons avancées sont la non-solvabilité de certains producteurs et le caractère aléatoire de l’agricul-ture (tributaire des aléas climatiques), qui créent des risques élevés. Les institutions financières qui se sont investies dans le secteur par le passé ont souvent fait de mauvaises expé-riences.

Une autre raison tient au faible niveau de maîtrise du secteur agricole par les agents des institutions financières chargés des dossiers de financement. De plus, bien souvent, le rap-port entre le montant d’investissement et les frais de suivi n’est guère favorable pour les dossiers « production ». Finale-ment la politique de refinancement de la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) ne semble pas faciliter les prêts à moyen et long terme, donc des prêts en lien avec des investissements prépondérants dans la production et la transformation agricoles.

Toutefois, tout réel développement du secteur agricole est inconcevable sans l’implication du secteur financier (banques et IMF) et il faut donc trouver des moyens et des mécanismes

pour une mise en relation effective des promoteurs agricoles et des structures de financement.

Dispositions pour assurer la durabilité des MIPPour assurer la durabilité des microprojets, il est nécessaire que les promoteurs mettent en place un mécanisme de refi-nancement de leurs microprojets. Lorsqu’on s’intéresse à l’épargne, globalement 66 % des promoteurs interrogés dé-clarent avoir fait de l’épargne sur les bénéfices générés par leur MIP pour assurer l’autofinancement de leurs activités. La proportion des promoteurs ayant fait de l’épargne varie selon les types de MIP (Tableau 6). Cette proportion est plus élevée au niveau des commerçants de riz (100 %), des producteurs de riz (73 %) et des maraîchers (69 %). Les données avan-cées sur l’utilisation des bénéfices suggèrent que l’épargne ne représente qu’une infime proportion (Tableau 6).

Un tiers environ des promoteurs n’ont pas pu épargner pour assurer le refinancement de leurs projets. Ceci s’explique par diverses raisons, notamment :� Ils ne sont pas encore dans la phase de production ; cette

catégorie représente 12,5 % de ceux qui n’ont pas épargné ;� Ils ont déjà produit mais n’ont pas fait de bénéfice ; cette

catégorie représente 50 % de ceux qui n’ont pas épargné ;� Ils ont réalisé des bénéfices qu’ils ont directement réinves-

tis dans les activités. Cette catégorie représente 37,5 % de ceux qui ont déclaré n’avoir pas épargné. Mais il faut souligner que ce réinvestissement est en réalité une forme d’épargne.

Figure 3 : Nouvelles relations développées à travers les MIP

CARDER

CARDER

Commerçant d'intrants

Transformateurs & commerçants

OP faîtières

SONAPRA

Producteurs

Achat des intrants

Appui-conseil organisationnel

Fourniture des intrants agricoles

Appui-conseil technique

Vente des produits

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Une grande partie des promoteurs interrogés a exprimé le besoin de souscrire des emprunts au niveau des IMF ou des banques (Tableau 7). Les raisons qui les motivent sont princi-palement : � Accroître la superficie de production ou augmenter ou amé-

liorer les équipements de travail ;� Faire face au besoin de fonds de roulement qui constitue

une pierre angulaire dans la réussite de leurs projets (le cas des commerçants de riz et d’intrants).

Les promoteurs qui déclarent ne pas avoir besoin de faire un emprunt évoquent non seulement le taux d’intérêt des crédits qui est trop élevé (souvent 24 % par an pour les IMF) mais aussi le risque que représente un crédit. En cas de non-remboursement, le promoteur peut se retrouver en pri-son.

Forces et faiblesses de la démarche utiliséeDans l’ensemble, les promoteurs sont satisfaits des fonds MIP : 29 % se disent très satisfaits et 55 % se disent satisfaits (Figure 4). Plusieurs raisons sont à l’origine de cette satisfac-tion :� Il s’agit d’une subvention, donc sans intérêt et sans rem-

boursement ;� Le dispositif a permis de renforcer leurs capacités de ges-

tion ;� La manière dont les fonds ont été débloqués est sécuri-

sante ; c’est-à-dire par tranche et uniquement après justifi-cation de la tranche précédemment reçue ;

� Il y a un suivi (technique, financier, comptable) régulier par l’équipe du Guichet d’Économie Locale (l’ONG LD), le consultant fiduciaire, les agents de la FAFA MC pendant la phase de mise en œuvre afin d’assurer la bonne gestion des moyens accordés ;

� Il y a un accompagnement technico-économique de la production du promoteur par les partenaires (CRM, CRR, URP, CARDER, etc.) et les agents de la FAFA MC pendant la phase de mise en œuvre et par la suite pendant la phase de mise en exploitation.

Une proportion non négligeable, soit 16 %, se dit déçue ou pas satisfaite du dispositif MIP. Pour cette catégorie de pro-moteurs :� La manière dont le guichet demande les pièces à joindre

au dossier (p. ex. facture pro forma) est très contraignante ;� La recherche de contrepartie épuise toutes les capacités

financières du porteur et empêche l'évolution de l'activité avant le décaissement par le guichet ;

� La mise en place de la subvention nécessite des forma-lités administratives qui ralentissent le décaissement des fonds. Cependant, cette lenteur provient aussi et surtout des promoteurs qui, bien souvent, ne savent pas appliquer correctement les formalités demandées : par exemple, ils ont des difficultés à apprécier le contenu des factures pro forma exigées.

Il est important de souligner que les fonds de financement des MIP sont issus d’un fonds public dont l’utilisation doit être justifiée conformément la réglementation des marchés publics du Bénin. La notion de fonds public et les règles qui encadrent son utilisation sont mal connues des promoteurs des MIP, ce qui explique les efforts déployés par l’équipe de la FAFA MC pour expliquer leur utilisation.

Tableau 7 : Proportion de promoteurs ayant épargné et ayant besoin d’un prêt

Type de promoteur % ayant épargné % ayant besoin d’un prêt

Producteur de riz 73 73Producteur maraîcher 69 85Producteur mixte 0 100Transformateur de riz 0 100Transformateur maraîcher 50 50Commerçant de riz 100 100Commerçant d’intrants 50 100

Figure 4 : Appréciation globale du guichet MIP par les promoteurs interrogés

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

Ces raisons rejoignent les forces et faiblesses de la démarche utilisée (Tableau 8). Une faiblesse notable est le caractère souvent théorique des plans d’affaires des MIP qui doivent démontrer leur viabilité économique.

Les principales difficultés rencontrées par les promoteurs lors la mise en œuvre de leur MIP sont :� Un déphasage entre les dépenses réelles et celles prévues :

certaines prévisions sont inférieures aux dépenses réelles (surtout en ce qui concerne la réalisation des puits dont la profondeur nécessaire pour obtenir un bon débit en eau dépasse souvent les prévisions) ;

� Le manque de compétences de certains rédacteurs des MIP dans le domaine de l’aménagement, qui fait que les devis élaborés ne cadrent pas toujours avec les investisse-ments réellement nécessaires ;

� Le forage des puits de qualité : soit le puits réalisé ne regorge pas d’eau soit l’eau du puits est salée, ce qui ne convient ni au maraîchage ni à la riziculture. Il faut signaler que certains promoteurs ne choisissent pas des puisatiers qualifiés capables de détecter les lits et nappes d’eau, car ils cherchent à minimiser les coûts afin de maintenir leur contrepartie à un niveau relativement bas ;

� Le risque d’inondation du site et ses conséquences pour la viabilité économique de l’investissement.

Tableau 8 : Forces, faiblesses et propositions d’amélioration définies par les promoteurs interrogés

Forces Faiblesses Propositions d’amélioration

- Mise à disposition des formulaires de facture pro forma.

- Recherche de 3 factures pro forma pour des montants supérieurs à 100.000 FCFA. Cela permet de choisir les offres des mieux disant.

- Difficultés des promoteurs à obtenir les factures pro forma auprès des vendeurs de matériels.

- Faciliter l’obtention des factures pro forma grâce à la constitution d’une liste de fournisseurs agréés avec obligation de fournir des pro forma aux promoteurs qui en demandent.

- Mise en place des fonds par tranche et justification des tranches reçues avant l’octroi d’une autre tranche. Cela réduit l’utilisation des fonds à d’autres fins.

- Certains plans d’affaires (MIP) sont théoriques car certains rédacteurs choisis par les promoteurs eux-mêmes ne vont pas sur le terrain avant de rédiger les MIP ou n’associent pas suffisamment les promoteurs lors de la rédaction. Ceci entraîne une incohérence entre le plan rédigé et la réalité du terrain.

- Faire une évaluation des rédacteurs locaux et organiser leur recyclage, le cas échéant.

- Changer leur mode de travail : intégrer une prime (25 % du tarif total) de résultat (approbation du MIP par le CEV) dans le tarif des rédacteurs.

- S’assurer que les promoteurs contribuent effectivement au règlement (50 %) de la prestation du rédacteur.

- L’orientation (formation) et le suivi faits par le programme (l’équipe LD, consultant fiduciaire, équipe de la FAFA MC) pour assurer le respect des procédures et la gestion appropriée des fonds.

- Durée de formation des promoteurs insuffisante.

- Effectif pléthorique dans les salles de formation (40 promoteurs). Cela ne permet pas aux promoteurs de bien suivre.

- Réduire les effectifs dans les salles de formation.

- Assurer un recyclage des promoteurs.

- L’accompagnement de la mise en œuvre du MIP (proximité des animateurs des différents partenaires) permet de régler les problèmes techniques rencontrés par les promoteurs.

- La souplesse du mécanisme de mise en œuvre : les dépassements en termes de dépenses d’investissement n’amènent pas directement à un blocage.

- La non-disponibilité d’un fonds de roulement / fonds de campagne dans le dispositif du programme.

- L’absence de ce fonds et la réticence des IMF et banques à financer l’agriculture en raison de son caractère aléatoire posent un problème pour la mise en exploitation de l’investissement au niveau d’une partie importante des promoteurs.

- Soutenir la disponibilité des fonds de roulement grâce à une meilleure implication des banques / IMF qu’il faudrait convaincre du rôle qu’elles ont à jouer dans les filières riz et maraîchage dans le Mono-Couffo.

- Tenir compte des besoins de fonds de roulement pour la fixation du niveau de la contrepartie à exiger des promoteurs.

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Enseignements

Ce qu’il faut continuer à faireCombiner et articuler l’appui financier et technique des promoteurs MIP. Même si cette capitalisation n’a étudié qu’un échantillon ré-duit d’un ensemble très divers de microprojets, les premiers résultats indiquent qu’ils permettent aux promoteurs d'ac-croître leur volume de production et de commercialisation et donc d’augmenter leur chiffre d’affaires. Cette contribution aux volumes de produits mis sur le marché est le résultat d’un appui à la fois financier, technique et managérial des promoteurs, avec pour résultat final une amélioration de la sécurité alimentaire et des revenus des promoteurs concer-nés.

Les MIP constituent aussi un outil d’articulation des acteurs des filières agricoles. On peut alors se demander : Est-ce que financer les MIP constitue un moyen d’impacter un grand nombre d’acteurs des filières agricoles ? On peut a priori dit oui. Oui, lorsque le financement prend en compte les grou-pements, les associations ou les coopératives (plusieurs pro-moteurs à l’intérieur d’un groupement, d’une association ou d’une coopérative) ou lorsque l’investissement financé est structurant. De plus, en dehors des bénéficiaires directs de la subvention, il existe aussi des bénéficiaires indirects.

Maintenir un contrôle du programme sur le processus d’attribution et d’utilisation des fonds d’appui aux inves-tissements.La première phase de mise en œuvre des MIP s’est basée sur une responsabilisation et une gestion directe des fonds d’appui aux investissements par les deux partenaires (URP

et CCIB) par le biais des guichets MIP respectifs. Malgré les efforts de renforcement des deux partenaires déployés par la FAFA MC (formations, appui logistique, financement de per-sonnel, etc.), la maîtrise des procédures et le niveau de rigueur nécessaires pour l’attribution et la gestion des fonds (publics) se sont révélés insuffisants. En conséquence, la FAFA MC a dû reprendre en main les guichets et revoir le processus, pour à la fois assurer l’efficacité de l’outil MIP, la transparence du processus et la justification des fonds octroyés. Il est impor-tant que le programme3, étant l’acteur « neutre » dans le pro-cessus d’attribution et d’utilisation du fonds, se réserve un rôle de superviseur avec droit de véto.

Ce qu’il faut adapter Renforcer le nombre des investissements (MIP) dans la transformation afin de créer davantage de valeur ajoutée au niveau local.Les MIP financés jusque-là se trouvent en grande partie dans le maillon production, de sorte que le maillon qui contribue le plus à la création de la valeur ajoutée – la transformation – est sous-exploité. Il convient de souligner que très peu de dos-siers de transformation sont soumis au financement, notam-ment dans la filière maraîchère. Il faudra à l’avenir accorder une attention particulière aux investissements viables dans la transformation comme le décorticage, les mini-rizeries, la transformation de produits maraîchers (piment, tomates, etc.). Toutefois, généralement, les investissements dans la trans-formation nécessitent des financements conséquents. Ces financements ne peuvent être accordés que s’ils sont soute-nus par des plans d’affaires de qualité, basés sur des analyses réalistes à mettre en œuvre par des promoteurs entrepreneurs munis d’une connaissance approfondie du segment de mar-ché visé.

Décorticage du riz à Lalo. © CTB

3 | Ou envisager de le confier à une autre structure neutre : agence fiduciaire ou institut de financement.

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Stimuler l’entrepreneuriat agricole

Une mise en relation réelle entre banques/IMF et promo-teurs, notamment pour le maillon « production », afin de faciliter l’accès aux fonds de roulement.Une implication des banques et IMF comme fournisseurs de fonds de roulement dans les filières est important pour la réussite du programme, pour la pérennité de l’intervention et pour le développement du secteur agricole dans son en-semble. Ceci est d’autant plus important dans la perspective de la création d’un Fonds National de Développement Agri-cole (FNDA) par l’État béninois.

Un nombre important de promoteurs, notamment au niveau du maillon production, ont une faible capacité financière. Par-venir à mobiliser une contrepartie financière généralement supérieure à 100.0004 FCFA pose déjà de sérieux problèmes sans parler de la mobilisation du fonds de roulement. Pour la production (une campagne agricole), les ressources néces-saires s’élèvent souvent aussi à plus de 1.000.000 FCFA/ha (tomates et piment). Cumulés, la contrepartie financière et le fonds de roulement qu’un promoteur doit mobiliser peuvent facilement dépasser 1.500.000 FCFA/ha en capitaux propres, alors que les investissements s’étendent souvent sur 2 hec-tares ou même plus. Ceci fait qu’une fois la contrepartie mo-bilisée, les promoteurs n’arrivent pas à réunir suffisamment de fonds pour exploiter à pleine capacité l’infrastructure mise en place. Il en résulte que l’investissement reste sous-utilisé. L’implication des banques/IMF dans les fonds de roulement pourrait résoudre ce problème et c’est là un élément du dispo-sitif futur à promouvoir en priorité. Pour susciter l’intérêt des banques/IMF, il faut mettre en avant les éléments suivants : � accroître la notion de la rentabilité des investissements

dans le secteur agricole (en dehors des filières coton et anacarde) ;

� proposer des mécanismes de maîtrise de risque ;� proposer des mécanismes de réduction des frais (de suivi)

de dossier par un suivi conjoint des promoteurs par les dif-férents partenaires impliqués (banques/IMF, organisations professionnelles agricoles et CARDER) ;

� jouer sur l’effet d’économie d’échelle en regroupant les demandes de fonds de roulement pour plusieurs promo-teurs par le biais d’organisations professionnelles agricoles qui assureraient une partie du risque et grâce à d’autres modes de collaboration autour des investissements encore à développer.

Améliorer le système d’appui technique et managérial aux MIP (p. ex. l’appui à la rédaction des projets).Une fois que l’idée d’un microprojet est retenue et que les conditions de faisabilité sont étudiées et validées par le co-mité, le promoteur choisit son rédacteur (parmi les agents du CARDER formés à cet effet) pour l’aider à rédiger un plan d’af-faires. Dans la pratique, certains promoteurs ne sont pas suffi-samment associés au processus de rédaction de leur dossier de microprojet et cela pose un problème pour la validation par le CEV et, plus encore, pour sa mise en œuvre après validation. Ces problèmes sont surtout relatifs à un manque

d’adéquation entre les coûts prévus dans le dossier et la réa-lité du terrain. De plus, les projets qui concernent des aména-gements méritent davantage d’expertise technique de la part des rédacteurs. À cet effet, il est proposé de mettre en place un « pool » de rédacteurs de MIP, multidisciplinaires expéri-mentés. Si un rédacteur manque de compétences dans un domaine, il devra se faire aider par un autre rédacteur au sein du pool ayant davantage de connaissances dans ce domaine particulier.

Arrêter les nouveaux financements (MIP et autres) au moins un an avant la fin de l’intervention.La durée de mise en place des équipements ou des aménage-ments (phase d’installation) prend souvent plus de temps que prévu. Certains promoteurs font preuve de lenteur (absence de dynamisme) et ne respectent pas les délais contractuels. Il en résulte que certains MIP ne sont pas entrés en phase de production avant la fin de la FAFA MC (août 2013). Dans ces conditions, il est difficile de déterminer la rentabilité de l’investissement et sa contribution au développement des fi-lières agricoles. Dans le financement des projets, il faudra tenir compte de la durée du programme, des saisons de production et de la durée de l’installation des MIP. Cela évitera que les infrastructures soient réalisées sans qu’il y ait eu un accompa-gnement cohérent durant la phase d’exploitation et sans pou-voir dégager les premiers résultats avant la fin de l’intervention.

Ce qu’il faut faire en plusProcéder à une évaluation de tous les MIP appuyés dans le cadre de la FAFA Mono-Couffo5.Dans la perspective de l’opérationnalisation du Fonds National de Développement Agricole (FNDA), les expériences et résul-tats de l’instrument de financement des MIP constituent une source de renseignements intéressante. L’évaluation (quanti-tative et qualitative) de tous les MIP opérationnels depuis plus d’une année, sur des points tels que les bénéficiaires atteints, la performance technico-financière et la contribution au déve-loppement des filières, permettrait d’alimenter la conception et la mise en œuvre de ce dispositif sur le terrain et les discus-sions avec les institutions financières au Bénin.

Transformation de tomates en purée à Klouékanmè. © CTB

4 | Le taux de cofinancement varie entre 10 et 20 %, ce qui fait que, pour un hectare d‘aménagement hydro-agricole avec un système de tourniquets (= 4 à 4,5 millions FCFA), à un taux de 15 %, il faudra déjà réunir la somme de 600.000 FCFA.

5 | De préférence, l’évaluation intégrera aussi les MIP mis en œuvre dans le cadre de la FAFA dans les départements de l’Atacora et de la Donga.

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