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Lconomie de la production du coton conventionnel et biologique
www.eld-initiative.org
THE ECONOMICS OF LAND DEGRADATION
Linitiative de lconomie de la dgradation des terres:Une tude de cas de la commune de Banikoara au Bnin
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Citation suggre:
Westerberg, V. (2017). Lconomie de la production de coton conventionnel et biologique. Une tude de cas de la commune de Banikoara au Bnin. Rapport soumis l'Initiative de lconomie de la dgradation des terres.
Auteur: Vanja Westerberg
Avec les contributions supplmentaires de: Victorin Houndekon, Anne Golay et Luis Costa
Photographie: Vanja Westerberg (couverture, p. 7, 18, 24, 26), Anne Golay (p. 11, 12, 13) Graphisme: MediaCompany, Bonn Office Mise en page: kippconcept GmbH, Bonn
Remerciements:
Nous remercions les personnes ressources suivantes, pour leurs contributions, conseils et appuis: Melanie Djedje; Comlan Marcel Kakpo; Firmin Amadji ; Marjorie Domergue; Davo Vodouhe; Pierre Quiblier et Kaj Juhl Madsen du PNUE Substances chimiques; Lquipe dELD Walter Engelberg, Hannes Etter, Mark Schauer et Silke Schwedes; le Comit dELD/CNULCD Bnin; le maire de la commune de Banikoara, Tamou Bio Sarako; le responsable du dveloppement rural de la commune de Banikoara, Barte Badda Daofig; la charge de supervision de lassociation AFVA, Antoinette Bak Garadima; et lquipe des enquteurs Sabi Mare Sahada, Moussa Yari Majidou, Tessi Marius, Ablefonlin Henoc et Kora Gounou Mohammed.
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Lconomie de la production de coton conventionnel et biologique
Aot 2017
Linitiative de lconomie de la dgradation des terres:Une tude de cas de la commune de Banikoara au Bnin
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Principales leons tires
Un nombre croissant dtudes mettent en exergue la gravit des problmes de sant lis lutilisation des pesticides dans le secteur du coton. Le problme est reconnu, mais aucune tude na dmontr de quelle manire lutilisation des pesticides affecte lconomie de la production de coton au Bnin. Cette tude est donc la premire du genre. Nous avons galement estim les cots des dommages conomiques dus la perte de btail suite lempoisonnement par les pesticides et compar lconomie de la production de coton biologique et conventionnel. En ce qui concerne la commune de Banikoara et la campagne de production cotonnire de 2015/2016, nous sommes parvenus des rsultats intressants:
Les problmes de sant et la perte de btail infligent des dommages conomiques de lordre de 187 euros1 (105790 FCFA) par mnage agricole et par an. Les cots de sant varient considrablement selon lquipement de pulvrisation utilis par les producteurs.
Les subventions de ltat sur les intrants agricoles entranent des cots pour le trsor public. Si lon comptabilise les dpenses de lEtat, les cots environnementaux et de sant, le bnfice net de la production de coton du point de vue de la socit baisse de 66 % pour une exploitation de taille moyenne (5 ha).
La demande pour le coton organique est en hausse. La production de coton biologique implique une courbe dapprentissage importante pour les producteurs, mais cest une technologie prometteuse. En moyenne, les producteurs de coton biologique ont des niveaux de revenus similaires ceux des producteurs de coton conventionnel, mais leurs cots dintrants ne reprsentent quune fraction des cots des intrants de la production conventionnelle.
Les revenus qui en dcoulent sont de lordre de 245 euros par ha (162700 FCFA/ha) pour un agriculteur bio moyen et 134 euros par ha (89300 FCFA/ha) pour un producteur moyen de coton conventionnel au titre de la campagne 2015/2016. Sans les subventions sur les intrants agricoles, les revenus de la production de coton
conventionnel seraient aussi bas que 77 euros par ha (51300 FCFA/ha).
Les producteurs de coton conventionnel
effectuent des dpensent non optimales sur les pesticides et lure. Leurs dpenses leves ne sont pas compenses par des rendements suffisamment levs. Les producteurs pourraient gagner des revenus plus levs, en rduisant les dpenses sur les intrants. Laccs aux rgimes dassurance agricoles faciliterait cela en attnuant la propension des producteurs se prmunir contre le risque en dpensant sans cesse sur les intrants.
Il faut des changements plus radicaux pour relever efficacement les dfis de risques sanitaires et climatiques. Des pratiques de gestion durable des terres (GDT) telles que les cultures sans labour, la couverture vgtale permanente du sol, les rotations des cultures, etc. peuvent permettre de dvelopper une rsilience climatique. Les producteurs de coton biologique utilisent gnralement ces pratiques.
Cependant, avec un accs limit aux financements, aux intrants agricoles et aux services de vulgarisation pour dautres cultures ou techniques de GDT, les producteurs ont des difficults adopter ou intensifier leurs efforts de gestion durable des sols. En effet, les producteurs de coton conventionnel ne se sentent pas encourags changer de technologie d simplement labsence dappui de lEtat et au manque daccs au crdit pour toute autre culture ou technique de production autre que les mthodes de production conventionnelles.
On peut amliorer le bientre au niveau de la socit, et lefficacit conomique en canalisant les ressources des activits destructrices de lenvironnement et moins productrices en termes dutilisation des terres vers des pratiques durables dutilisation des terres plus prometteuses et plus rsilientes au changement climatique. Dans cette optique, les possibilits de facilitation des changements transformationnels de lconomie agricole bninoise sont normes.
1 Avec un taux de change de
1 XOF=0.0015 EUR
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E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
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Principales leons tires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
Table des matires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
Liste des abrviations et terminologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Chapitre 1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.1 Mthodologie et site de ltude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
Chapitre 2 Contexte de la production de coton biologique et conventionnel au Bnin . . . . . . 9
2.1 Coton conventionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.2 Coton biologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102.2.1. Historique de la production du coton biologique au Bnin. . . . . . . . . . . . . . . . 102.2.2 Tendances mondiales dans la production et la demande de coton bio . . . . . . 10
Chapitre 3 Impacts environnementaux et sanitaires relatifs la production du coton conventionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
3.1 Le march des pesticides Banikoara . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
3.2 Impacts sur la sant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113.2.1 Faits prcdemment dmontrs au niveau de toute lAfrique . . . . . . . . . . . . 12
3.3 Impact sur le btail et autres cultures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Chapitre 4 Lconomie de la production de coton conventionnel et biologique . . . . . . . . . . . . 14
4.1 Lconomie de la production de coton conventionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144.1.1 Le cot de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144.1.2 Autres cots environnementaux Perte danimaux domestiques et de cultures. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174.1.3 Cots des intrants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174.1.4 Subventions aux intrants agricoles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184.1.5 Rendements et revenus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
4.2 Production de coton biologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184.2.1 Cot des intrants et de main duvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194.2.2 Rendements et recettes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
4.3 Bnfices nets de lagriculture biologique et conventionnelle . . . . . . . . . . . . . . 204.3.1 Les bnfices de la production de coton conventionnel lorsque lon comptabilise les cots des dommages et des subventions de lEtat. . . . . . . . . . 20
Table des matires
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Chapitre 5 Discussion et rsultats complmentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
5.1 Lien entre les rendements du coton conventionnel et les principaux intrants agricoles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
5.2 Les raisons qui justifieraient ladoption du bio . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
5.3 Obstacles lintensification de lagriculture biologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235.3.1 Mise en garde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Chapitre 6 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
Rfrences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
Annexe 1: Budget de production dtaille et rpartition des rendements entre producteurs de coton biologique et producteurs de coton conventionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
Liste des tableaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
Liste des figures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
Liste des abrviations et terminologie
AFVA Association des Femmes Vaillantes et Actives
CARDER Centre dAction Rgionale pour le Dveloppement Rural
CDM Cot de la maladie
CFDT Compagnie Franaise pour le Dveloppement des Fibres Textiles
ELD Economics of land degradation (Economie de la Dgradation des Terres)
IIED International Institute for Environment and Development (Institut international pour lenvironnement et le dveloppement)
NPK Nitrogen, phosphorus, potassium (azote, phosphore, potassium)
OBEPAB Organisation Bninoise pour la Promotion de lAgriculture Biologique
ONG Organisation non gouvernementale
Peul Les peuls musulmans dAfrique de louest constituent le plus grand groupe de nomades dans le monde. Ils sont en majorit semisdentaires de nos jours.
PIB Produit intrieur brut
SCV Semis directs sous couverture vgtale
SODECO Socit pour le dveloppement du coton
SONAPRA Socit Nationale pour la Promotion Agricole
ULV Pulvrisation en ultra bas volume
XOF Le franc CFA est la monnaie de la Communaut Financire Africaine. Le code la monnaie est : XOF
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C h a p i t r e
01IntroductionLe coton est la principale culture mondiale non alimentaire, soutenue par une demande relativement constante sur le march international. Au Bnin, le coton joue un rle extrmement important dans lconomie nationale. Le secteur constitue une source de revenus pour la moiti dune population de 8 millions dhabitants, et reprsente 40 % des recettes en devises et 13 % du PIB national (MAEP 2011). Toutefois, labsence de diversification rend les producteurs, les entreprises et la balance commerciale vulnrables aux chocs extrieurs, en particulier aux risques climatiques et aux politiques des changes commerciaux au plan mondial. En outre, le coton est une culture controverse et difficile produire: les rcoltes peuvent tre dtruites par des phnomnes mtorologiques violents et les cultures sont vulnrables aux attaques de ravageurs. Au plan mondial, la production de coton occupe seulement 2,4 % des terres cultives, mais consomme 6 % des pesticides produits au monde (PAN RU). Au Bnin, 90 % de lensemble des pesticides imports sont utiliss dans la production du coton (New
Agriculturalist 2008) et lon rapporte de frquents cas dempoisonnement par les pesticides, des problmes dirritation de la peau, des yeux et de lestomac, et bien dautres problmes de sant chez les producteurs (Williamson 2010).
Compte tenu du rle majeur que le coton joue dans lconomie du Bnin, le secteur a longtemps bnfici de lappui de lEtat, et le coton a servi de moyen de lutte contre la pauvret et de promotion du dveloppement (Sodjinou et al. 2015). Mais cela ne sest pas fait sans cots, quil sagisse du gouvernement, des producteurs ou de la nature. Les subventions accordes aux intrants dans la production du coton conventionnel ont amen les producteurs trop se fier aux engrais et pesticides non biologiques, contrairement aux autres mthodes de production qui favorisent la rotation des cultures, les priodes de jachre et lutilisation de la fumure biologique.
Les consquences indirectes du soutien unique au secteur du coton sont entre autres la disparition
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des forts et des terres pastorales, entrainant une marginalisation des leveurs seminomades, qui souffrent de la perte de leur territoire, mais galement de lempoisonnement et de la perte de leur btail. Ceci est un paradoxe, car llevage peut faciliter dimportantes synergies positives dans la production de coton, comme cela a dmontr ce document dinformation.
Dans le contexte des difficults que connait le secteur du coton au Bnin, lon peut lgitimement remettre en cause cette approche qui consiste agir comme dhabitude. Dans cette optique, ce document dinformation donne une comprhension rigoureuse de la situation actuelle, travers une valuation des bnfices et des cots de production du coton biologique et conventionnel. Concernant la production du coton conventionnel, une valuation approfondie des cots de la maladie et des dommages environnementaux, de mme que le poids sur le trsor public a t ralise. Ainsi, cette tude dmontre les consquences des mthodes actuelles de production du coton conventionnel, afin de contribuer faire la lumire sur les impacts des politiques affectant le secteur.
1.1Mthodologie et site de ltude
Lvaluation sest faite sur la base dune enqute ralise auprs dun chantillon de 90 producteurs de coton biologique slectionns de faon alatoire et 190 producteurs de coton conventionnel pris au hasard en septembre 2016 dans la commune de Banikoara, au nord du Bnin. Plus du tiers de la production nationale est produite Banikoara, communment appel capitale de lor blanc.
Le coton est produit sur prs de 50 % des surfaces cultives et les producteurs de coton conventionnel ont en moyenne de 5 hectares dexploitation de coton. Les producteurs biologiques exploitent en moyenne 1 ha de coton par mnage. Bien que les producteurs biologiques disposent de moins de terres pour les cultures, ils ont plus de btail ; 50 ttes contre 20 pour les producteurs conventionnels. Lenqute sur les mnages comprenait un volet sur les budgets dentreprise dtaills que nous avons utiliss pour obtenir les rendements, les quantits des intrants, les frais et les prix du coton bord champ pour la campagne agricole 2015/2016 (juin 2015 fvrier 2016). Le questionnaire comportait galement des questions sur les incidents de sant lis la pulvrisation de pesticides.
F i g u r e 1
BURKINA FASO
NIGER
NIGERIA
TOGO
BENIN
GHANA
Bohicon
Lagos
Lokossa
Abomey
Parakou
Natitingou
Cotonou
Djougou
Banikoara
Kandi
Porto-Novo
Mont Sokbaro658 m (2,159 ft)
Banikoara
0 100 200 300 km
Commune de Banikoara
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02Contexte de la production de coton biologique et conventionnel au Bnin2.1Coton conventionnel
La consommation mondiale de coton a augment au rythme de 2 % par an depuis 1940, bien que la part du coton dans les fibres textiles ait diminu en raison de laugmentation des textiles chimiques (TE 2016). Les ventes mondiales de coton export par pays slevaient 54,3 milliards deuros en 2015, dont 273,2 millions deuros reprsentant la part du Bnin, ce qui correspondait 0,5 % du total des exportations mondiales de coton, et a port le Bnin au rang de 27me plus grand exportateur de coton dans le monde (WTex 2016).
La filire coton joue trois rles majeurs au Bnin: la production de coton graine, lapprovisionnement en intrants, et la production de la fibre de coton ou grenage (Saizonou 2008). Le Bnin interdit lexportation des graines de coton. Les graines sont broyes localement et exportes sous forme de fibre de coton ou dhuile (Porto et al. 2010). Bien que lindustrie du coton du Bnin couvre toute la chaine de valeur (filature, tissage, confection de vtement), lactivit dans le secteur du textile transforme moins de 2 % de la fibre de coton produite, cause de la concurrence des importations. Au niveau industriel, le coton reprsente environ 60 % du secteur industriel au Bnin, avec 20 socits d'grenage, 5 usines de textile, 3 huileries et une socit de production de coton hydrophile (Porto et al. 2010).
Lorigine de la production de coton au Bnin est similaire celle des autres pays dAfrique de lOuest francophones.
Le coton a t introduit comme culture de rente dans les annes 1950 au Bnin, sous la direction de la socit parapublique franaise la Compagnie Franaise pour le Dveloppement des Fibres Textiles (CFDT). Aprs les indpendances, le coton est pass sous le monopole national de la SONAPRA, qui grait tous les aspects commerciaux. Avec les rformes structurelles des annes 1990, lapprovisionnement en intrants pour la production du coton a t privatis et des greneurs privs ont fait leur apparition sur le march. Cette phase na pas t sans problmes, ce qui a amen le gouvernement resserrer le contrle au dbut du XXIe sicle (Gergely 2009; Glin 2014; Banque mondiale 2005).
Ce qui parait remarquable, comme le note Sodjinou et al. (2015), cest que les mthodes de production utilisant dnormes quantits dengrais chimique sont restes pratiquement inchanges malgr les soulvements politiques et les changements qui ont affect le secteur. Cela vatil changer avec llection de Patrice Talon en 2016 et larrive de son gouvernement, qui ramnent le contrle des forces du march priv (Beninto 2016a)?
Bien que cela soit difficile prdire, cette tude, en apportant la lumire sur les consquences des mthodes de production du coton conventionnel (non biologique), permettra de mieux comprendre la faon dont les politiques agricoles impactent lconomie et le bientre des producteurs au Bnin.
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Culture Egrenage Filature Tricotage StockagetissuCoupe etcouture
vtements
Etapedistribution
Chane de valeur de la production de coton (tire dune reprsentation de Fast Fashion)
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2.2Coton biologique
2.2.1. Historique de la production du coton biologique au Bnin
La filire bio a t introduite vers la fin des annes 90 avec la cration dun rseau de politique internationale regroupant des institutions tatiques bninoises et hollandaises, des ONG environnementales transnationales et une ONG bninoise dnomme OBEPAB (Organisation Bninoise pour la Promotion de lAgriculture Biologique) (Kessler et al. 2003). Au moment o le gouvernement hollandais mettait fin son soutien financier en 2004, le rseau du coton biologique tait pass dune petite initiative dpendante des donateurs un important rseau de produits agricoles, autonome financirement et orient sur le march. Les ONG nationales et internationales ont impos des mesures environnementales strictes et ont jou un rle de premier plan dans la filire. Ainsi, bien que le coton soit considr comme une chaine de valeur internationale par excellence, domine par les socits textiles, le dveloppement et le soutien la filire du coton biologique au Bnin viennent essentiellement de lengagement des acteurs de la socit civile, et non des grandes socits acheteurs de coton (Oosterveer et al. 2011).
LOBEPAB joue toujours un rle principal dans la promotion du coton biologique au Bnin, facilitant les services tels que laccs aux intrants organiques, la commercialisation des semences biologiques, le stockage de fibres de coton organique et la ngociation de services dgrenage. LOBEPAB a form plus de 13000 producteurs biologiques et supervise dsormais environ 1 % de la production du coton bninois, qui est vendu dans les circuits du commerce quitable sous le label certifi biologique dEcocert (Rustin 2014).
Selon le Textile Exchange (TE 2016), on estime le nombre de producteurs biologiques au Bnin 2682 pour une superficie de 2065 ha de terres, produisant 377 tonnes mtriques de fibres bio au cours de la campagne 2014/2015. Au cours de la mme campagne, la production de coton bio et de coton du commerce quitable en Afrique de lOuest (Mali, Bnin, Burkina Faso, Sngal) a connu un taux de croissance de 38 % et une augmentation des taux de rendement de 7 %. Toutefois, les rendements moyens dans la rgion (500 kg/ha) restent infrieurs au potentiel de la rgion, estim 800 1.000 kg/ha.
2.2.2 Tendances mondiales dans la production et la demande de coton bio
Depuis lincendie et leffondrement de lusine Rana Plaza au Bangladesh en 2013, les questions de sant et de scurit dans lindustrie mondiale du vtement font lobjet dune attention particulire. Suite la pression des ONG, syndicats et politiciens, certains distributeurs investissent pour amliorer les choses. Lindustrie du coton a spcifiquement lanc des programmes tels que le Better Cotton Initiative2, et le coton du commerce quitable, le coton biologique, et les socits font lobjet de plus en plus de certification sur la base de normes de traabilit telles que la norme Organic Exchange 100 (TE 2016) et la norme Cotton made in Africa (CmiA 2017).
Etant donn que de nouveaux segments de consommateurs sont plus enclin acheter des tissus sans produits chimiques et provenant de matriaux produits dans le respect de lenvironnement, le coton biologique est en train de prendre sa part de march. Les 10 premiers utilisateurs de coton organique sont : C&A, Tchibo, Inditex, Nike, Decathlon, H&M, Carrefour, Lindex, Stanley Stella et LimlliamSonama (TE 2016). Les chanes de magasins des rues commerciales tels que H&M et C&A ont pour objectif dtre 100 % plus respectueux de lenvironnement dici 2020. Toutes les deux disent que les rsultats de recherche montrent que les clients accordent de la valeur aux vtements bio et veulent en acheter, mais condition quils se vendent aux mmes prix que les vtements non bio (Rustin 2014).
Bien quil existe videmment des leaders en la matire, la plupart des grands dtaillants ont des politiques de dveloppement durable. Mais on note gnralement labsence dune transparence totale tout au long de la chane dapprovisionnement. Comme la indiqu Rustin (2014), les exploitations partir desquelles sapprovisionnent les chanes de magasins des rues commerciales en tissus ne sont que le premier maillon de la chane dapprovisionnement internationale et les informations sur ce qui se passe dans les champs ne vont pas loin. Pendant ce temps, de plus en plus dtudes mettent en exergue la gravit des problmes de sant du travail lis lutilisation des pesticides, et reconnaissent quils constituent une menace pour le dveloppement et la productivit agricoles (Kloos et Renaud 2014; Hurley et al. 2000; Sunding et Zivin 2000; Bwalya 2010; PNUE 2013).
2 uvre rduire limpact environne-
mental et amliorer les moyens de
subsistance des producteurs, en les aidant adopter de
meilleures pratiques culturales et rduire
les dpenses en intrants agricoles.
La BCI vise produire 30 % de lensemble du
coton dici 2020.
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03Impacts environnementaux et sanitaires relatifs la production du coton conventionnelDe tous les continents du monde, les exploitations africaines sont celles qui reoivent le moins de produits chimiques agricoles. Le coton est une exception, car il est trait profusion avec des engrais et des pesticides (Banque mondiale 2000; Arslan 2000).
3.1 Le march des pesticides Banikoara
A Banikoara, la commercialisation des pesticides se fait par la SODECO, une socit prive de dveloppement du coton. Avant 2017, la vente des intrants du coton tait gre par le CARDER, un organisme rglement par le gouvernement. La SODECO assume dsormais ce rle. Mais les producteurs trouvent parfois que les pesticides sont trop chers sur le march formel, ou pas en quantits suffisantes, ou sont inefficaces. Et dans ces cas, ils se tournent vers le march noir pour sapprovisionner en pesticides. Dans le cadre de cette tude, nous avons entrepris un inventaire
exhaustif de tous les pesticides disponibles Banikoara. Voir Westerberg et al. 2017 pour plus de dtails.
3.2Impacts sur la sant
Une grande partie des pesticides que lon trouve Banikoara contiennent des agents chimiques classs dangereux par lOrganisation Mondiale de la Sant, inscrits sur la liste de la convention de Rotterdam ou interdits en vertu de la Convention de Stockholm3. Par exemple, on retrouve de la cypermthrine, du chlophyrifos, de la deltamthrine et de lendosulfan dans Cotton Plus, Spider, Pyrinex ou Thionex (CmiA 2014). Il est avr que ces ingrdients provoquent la nause, les vomissements, des irritations de la peau, de la paresthsie, des maux de tte, des tourdissements, des douleurs pigastriques, des contractions musculaires, des vanouissements, de la paralysie, des troubles de la vision; et mme la mort en cas dingestion ou dexposition excessive (EJF 2007). Les
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A gauche, le pesticide Pyrinex, contenant du chlorpyriphos et de la deltamthrine, vendu par le CARDER, lAgence tatique prcdemment rglement par le gouvernement. A droite, des employs dchargeant les pesticides.
3 a) la liste de pesticides hautement dangereux et dange-reux de lOMS : classe 1a et 1b (page 19 et suivants): http://www.who.int/ipcs/publications/ pesticides_hazard_ 2009.pdf
b) Pesticides interdits par la Convention de Stockholm sur les Polluants Organicques Persistants (POP): Annexe A (page 33 et suivantes): http://chm.pops.int/ Portals/0/download. aspx?d=UNEP-POPSCOP-CONVTEXT.En.pdf
c) Pesticides figurant sur la liste de la Convention de Rotterdam sur la procdure de consente-ment pralable en connaissance de cause applicable certains produits chimiques dangereux qui font lobjet dun commerce international : Lannexe III (page 29 et suivantes): www.pic.int/Portals/5/ download.aspx?d=RC_Convention_Text_ 2011_English.pdf
http://http://http://http://http://www.who.int/ipcs/publications/pesticides_hazard_2009.pdf http://chm.pops.int/Portals/0/download.aspx?d=UNEP-POPSCOP-CONVTEXT.En.pdfhttp://chm.pops.int/Portals/0/download.aspx?d=UNEP-POPSCOP-CONVTEXT.En.pdfhttp://chm.pops.int/Portals/0/download.aspx?d=UNEP-POPSCOP-CONVTEXT.En.pdfhttp://chm.pops.int/Portals/0/download.aspx?d=UNEP-POPSCOP-CONVTEXT.En.pdfhttp://chm.pops.int/Portals/0/download.aspx?d=UNEP-POPSCOP-CONVTEXT.En.pdfwww.pic.int/Portals/5/download.aspx?d=RC_Convention_Text_2011_English.pdfwww.pic.int/Portals/5/download.aspx?d=RC_Convention_Text_2011_English.pdfwww.pic.int/Portals/5/download.aspx?d=RC_Convention_Text_2011_English.pdfwww.pic.int/Portals/5/download.aspx?d=RC_Convention_Text_2011_English.pdf
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pires cas sont gnralement lis lutilisation des insecticides. Car ils contiennent des substances qui agissent sur le mtabolisme des insectes par des procds qui sont communs lensemble du rgne animal, et de fait, affectent galement les tres humains.
Au Bnin, des accidents dramatiques lis lusage de ces pesticides sont rapports chaque anne. LOrganisation Bninoise pour la Promotion de lAgriculture Biologique (OBEPAB) a ralis de nombreuses tudes pour recenser les victimes dempoisonnement. Entre 2000 2003, au total 577 cas dempoisonnement ont t rapports. La plupart de ces cas sont lis aux produits contenant de lendosulfan (PAN UK 2006). Lendosulfan est un polluant organique persistant inscrit sur la liste de la Convention de Stockholm, lannexe A4 depuis 2011. A Banikoara, 3,3 % des mnages interrogs dans le cadre de lanalyse prsente dans cette tude ont perdu au moins un membre de leur famille durant les 10 dernires annes suite un empoisonnement par les pesticides.
3.2.1 Faits prcdemment dmontrs au niveau de toute lAfrique
Comme nous le verrons la section 4.1, les problmes de sant se traduisent directement en perte de productivit et en divers cots mdicaux. Les cots des soins de sant lis lutilisation des
pesticides ont dj t dmontrs dans diffrentes parties de lAfrique, par exemple, dans le bassin versant de Kafue en Zambie, les produits chimiques utiliss dans les champs de coton ont provoqu des empoisonnements trs graves, entrainant un cot annuel de 2,1 millions de dollars amricains pour la socit. Les pertes sur les revenus de travail reprsentent la moiti de ces cots, et les cots de soins de sant et de transport lautre moiti (Bwala 2010). Au Mali, Ajayi et al. (2002) ont valu la perte de productivit due lutilisation des pesticides 50 % du PIB agricole par habitant. Au Zimbabwe, Maumbe et Swinton (2006) ont dmontr que les effets graves des pesticides sur la sant dans deux villages de production cotonnire ont entran des cots de sant annuels de lordre de 45 % 83 % de leurs dpenses en pesticides. En fin, partir dune mtaanalyse, le PNUE (2013) a estim le cot total de la maladie lie lutilisation des pesticides en Afrique subsaharienne environ 90 milliards de dollars amricains entre 2005 et 2020.
3.3 Impact sur le btail et autres cultures
En plus des cots des soins de sant, le travail de terrain de cette tude a rvl quun autre impact ngatif li lutilisation des pesticides tait lintoxication et la mort de btail suite la
F i g u r e 4
Trois pesticides que lon trouve sur le march noir de Banikoara. Ils contiennent de la cypermthrine et du chlorpyriphos, deux molcules toxiques pour les humains et les organismes aquatiques, avec une demi-vie dans le sol jusqu 180 jours (OMS 2010; Scientific American 2010).
4 Dans le cadre de la Convention de
Stockholm, les parties doivent prendre des
mesures pour liminer la production et lutilisation des
substances chimiques listes lAnnexe A.
Le Bnin est une partie signataire de la
convention.
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E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
13
consommation deau de rivires contamine et de zones de pturage contamines proches des zones ayant t pulvrises de pesticides. Le cas de Banikoara est particulirement inquitant, car il a longtemps servi de routes et de corridors de transhumance pour les bergers et leurs troupeaux (CADTM 2005). Selon le Directeur du dveloppement rural de la commune de Banikoara, M. Barte Badda Daofig (communication personnel 2016), le nombre du cheptel a t rduit de moiti au cours des 10 dernires annes. Les leveurs vitent la commune cause des risques quelle reprsente pour leurs btails.
Bien que ces problmes soient reconnus au Bnin, lamplitude des dommages environnementaux et de sant, et ce que cela reprsente pour lconomie de la production de coton demeure nbuleux. Toutefois, si les effets de lutilisation des pesticides sont importants, les petits exploitants de coton pourraient surestimer les bnfices net des pesticides par rapport la production organique du coton ou autres utilisations de la terre. Nous traiterons ces impacts dans la prochaine section, lorsque nous examinerons minutieusement lconomie de la production du coton travers lanalyse des soidisant budgets dentreprises.
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C h a p i t r e
14
04 Lconomie de la production de coton conventionnel et biologiqueDans cette section, nous comparons sur la base dun hectare, lconomie de la production de coton conventionnelle et biologique partir des budgets des entreprises qui ont t utiliss pour lucider les quantits des intrants, les rendements et les prix du march bordchamp pour 190 producteurs de coton conventionnel et 90 producteurs de coton biologique. Les cots environnementaux et de sant de lutilisation des pesticides sont galement estims pour un producteur de coton conventionnel de taille moyenne.
4.1 Lconomie de la production de coton conventionnel
4.1.1Le cot de la maladie
Les cots des soins de sant relatifs lutilisation des pesticides ont t estims partir dune approche cot de la maladie (CM5) base sur la prvalence. Lapproche cot de la maladie a t largement utilise dans lestimation des cots rsultant dune maladie cause par la pollution, lintoxication alimentaire et leau contamine
(Harrington et al. 1989; Maumbe et Swinton 2006). Lapproche cot de la maladie (CM) est base sur lide que les gens sont productifs et contribuent lconomie. Une maladie empche signifie donc que lon a vit des cots.
Nous avons pris en compte les cots qui dcoulent des symptmes graves court terme, suite la pulvrisation et la manipulation de pesticides. En se rfrant aux jours o les producteurs ont pulvris ou manipul des pesticides ou les jours qui ont immdiatement suivi, il leur a t demand prcisment le nombre de fois, le cas chant, quils ont 1) achet des mdicaments, 2) se sont rendus lhpital, ont vu le docteur ou le tradipraticien, ou 3) ont t incapable de travailler et ont d embaucher un ouvrier remplaant. Nous nous sommes galement renseigns sur les cots unitaires associs ces activits. Sur cette base, nous avons calcul les cots totaux associs aux visites lhpital (y compris les cots de laboratoire et de transport), les visites aux mdecins et tradipraticiens et lachat de mdicament sur un an, couvrant la saison agricole de 2015/20166.
5 Une approche base sur la prvalence
mesure les cots dune maladie en une anne et inclut tous les frais mdicaux et les cots
de morbidit dune maladie au cour de
lanne de ltude.
6 Nous avons calcul la valeur de la
production perdue pour cause de maladie en utilisant la tranche infrieure de lestima-
tion du niveau de salaire journalier des
ouvriers agricoles (5,3euros), obtenue
partir de lenqute faite par ELD auprs des mnages. Le mme
taux a t utilis pour estimer les frais pays
un ouvrier rempla-ant en cas de maladie.
F i g u r e 5
60%
45%
31%
24%
13% 11%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
Etaient incapablesde travailler
Ont embauchmain duvre
pour travailler
Ont visit unTradi-practicien
Ont pris desmdicaments
Ont visitun mdicin
Ont thospitalissincapacit
Nombre de mnages ayant utilis des mdicaments, visit un mdecin ou un tradi-praticien, t hospitaliss, t incapables de travailler et ayant embauch de la main duvre au moins une fois au cours de lanne prcdant lenqute sur les mnages.
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E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
15
La figure 5 prsente le pourcentage de rpondants7
sur lensemble de notre chantillon qui ont pris des mdicaments, ont t hospitaliss, ont visit un mdecin et un praticien traditionnel et ont t incapables de travailler au moins une fois. Comme on peut le constater, 60 % des personnes interroges ont achet des mdicaments, alors que 45 % taient incapables de travailler et un quart de la population a t hospitalis. Ces chiffres confirment que la situation est critique Banikoara.
Dans lensemble, 70% des personnes interroges, ont souffert au moins dune des consquences prsentes dans la figure 5. Le cot moyen de la maladie est de lordre de 84 euros par an par mnage affect, ou 61 euros pour toute la population pris dans son ensemble. Nous avons galement essay dvaluer les frais encourus suite aux maladies long terme dues lexposition aux pesticides. 25 % des rpondants ont souffert de maladies long terme, qui sont probablement attribuables aux pesticides, dont les cots slvent 35 Euros par mnage affect et par an.
Lincidence de la maladie due la pulvrisation ou la manipulation de pesticides dpendent dun certain nombre de facteurs, y compris lutilisation de protection pendant la pulvrisation, la frquence des pulvrisations, et lheure de la
journe pendant laquelle la pulvrisation a lieu (Wilson 2002). A Banikoara, la quasitotalit des producteurs nutilisent pas dquipement de protection. Par consquent, nous avons constat que le dterminant le plus important de la maladie relve de la technique de pulvrisation de pesticides quutilisent les producteurs. Ils utilisent trois principales mthodes: larosol, les sacs dos ou les pulvrisateurs en Ultra Bas Volume (ULV)8.
Comme lindique le Tableau 2, les producteurs utilisent principalement les pulvrisateurs ULV+ (44 %) et les pulvrisateurs sac dos (43 %), tandis quune minorit (12 %) utilisent principalement des arosols. La moyenne des cots de sant annuels associs la pulvrisation de pesticides varie considrablement en fonction des outils utiliss par les producteurs. Par exemple, ceux qui utilisent essentiellement les pulvrisateurs sac dos dpensent en moyenne 84 euros par an (55900 FCFA par an) pour le traitement de maladies court terme, alors que ceux qui utilisent principalement lULV+ ont seulement des cots de sant de 27 euros par an (18250 CFA par an) (Figure 6). On ne peut donc pas sousestimer limportance de la promotion de lutilisation de lULV+ par rapport aux autres mthodes de pulvrisation.
T a b l e a u 1
Cot de la maladie Banikoara suite aux effets court et long terme sur la sant
Cot de la maladie (euro/an)Cot moyen par mnage touch
Cot moyen pour lensemble de la population Min Max
Cot de la maladie par mnage en raison de maladies court terme, dont:
84,4 61,2 0 700
Les frais dhospitalisation 29,3 7,3 0 312
Consultations chez les mdecins 16,2 4,8 0 165
Consultations chez les tradi-praticiens 18,4 2,0 0 108
Cot des mdicaments 21,7 13,7 0 303
Valeur du temps de travail perdu, y compris le cot des ouvriers embauchs
72,4 33,4 0 452
Cot de la maladie long terme (Ex: perte de vue, douleurs muscu-laires, douleurs lestomac, engourdissement des doigts)
35,0 8,1 0 150
7 Nous avons interrog le principal respon-sable ou son second charg de la pulvrisa-tion des produits dans chaque mnage. Il sagissait dans 70 % des cas des chefs de famille.
8 Un pulvrisateur ULV est un pulvrisateur manuel disque rotatif conu pour les applications contrles par gouttelettes dinsecticides et de fongicide faible volume et volume trs rduit.
-
C h a p i t r e 0 4
16
T a b l e a u 3
T a b l e a u 2
Cot des dommages causs par la pollution et lempoisonnement aux pesticides.
Cot de la maladie selon loutil de pulvrisation utilis par les producteurs
Cots des dommages conomiques
Pourcentage de mnages touchs
Cot moyen par mnage touch (euro)
Cot moyen par mnage, sur lensemble de la population (euro)
Perte danimaux domestiques (Bovins, moutons, chvres, porcs, poulets)
11% 698 77
Pertes de rcolte (mas ou coton) 14% 96 13
Cot total des dommages conomiques (CDM, perte de cultures et danimaux)
174
Cot de la maladie par mthode de pulvrisation
Pourcentage des agricul-teurs utilisant principalement
CDM (euro/an)
Ecart type (euro/an)
Min(euro/an)
Max(euro/an)
ULV 45% 27 55 0 356
Pulvrisateur sac dos 43% 84 130 0 700
Pulvrisateur arosol 12% 172 155 0 699
F i g u r e 6
27
3200
84
172
0
50
100
150
200
250
CDM
(eur
o/an
)
ULV Pulvrisateur sac dos Arosol
CDM annuel par outil de pulvrisation utilis par les producteurs9
9 Les barres derreur reprsentent linter-valle de confiance 95 % de la moyenne
des valeurs.
-
E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
17
4.1.2 Autres cots environnementaux Perte danimaux domestiques et de cultures
En plus des effets sur la sant personnelle, la pulvrisation de pesticides entrane galement les cots externes sur les mnages voisins. Le travail de terrain prparatoire de cette tude a rvl que plusieurs mnages ont subi des pertes de rcoltes en raison de la pulvrisation faite par un producteur voisin10 ou la perte danimaux par suite d'intoxication. La valeur des cultures dtruites correspond approximativement au bnfice net que le producteur aurait d avoir si ses rcoltes taient arrives maturit et avaient pu tre rcoltes. Alors que les pertes en btail sont values selon leur valeur au prix du march11 (Pafilav 2015).
Au cours de la campagne 2015/2016 prcisment, 11 % des mnages ont t affects par la mort dau
moins un animal domestique. Le tableau 3 montre les dommages conomiques qui ont affect les mnages producteurs de coton et toute la population dans son ensemble.
4.1.3Cots des intrants
En labsence de lutilisation de techniques de lutte intgre contre les ravageurs et autres pratiques de gestion durable des terres, la production de coton conventionnel ncessite une utilisation intensive de ressources, et pousse les producteurs investir normment dans les engrais, lure et les pesticides. Par consquent, il faut que les producteurs aient des rendements raisonnables pour pouvoir payer leurs dettes la fin de la campagne. Les intrants agricoles sont fournis crdit par des structures de distribution nationales au Bnin. Les crdits sont rembourss quand les producteurs vendent leurs rcoltes. Les cots
10 La perte de cultures intervient gnrale-ment lorsque les cultures de coton dun producteur sont plus jeunes et plus vulnrables par rapport celles dun voisin qui peut tre pulvrise des pesti-cides. Lorsque lon produit du mas ct des champs de coton, ce mas est galement vulnrable et peut tre dtruit par la pulvrisation des champs de coton voisins.
11 Prix des bovins = 375 Euro/tte; moutons = 60 Euro/tte; cochons = 52,5 Euro/tte; chvres = 30 Euro/tte; poulets = 4 Euro/tte. (Pafilav 2015).
T a b l e a u 4
Budget des entreprises de production de coton biologique et conventionnel
La production con- ventionnelle 1 ha Recettes
La production biologique 1 ha Recettes
Prix (euro/kg) 0,32 Prix (euro/kg) 0,45
Rendement (kg/ha) 1060 Rendement (kg/ha) 697
Recettes (euro/ha) 315 Recettes (euro/ha) 313
Cots des intrants (euro/ha)
Avec subventions Sans subventions
Cots des intrants (euro/ha)
Montant moyen des dpenses
Graines de coton 5,4 5,4 Graines de coton 6,1
Engrais NPK 52,0 78,0 Graines de neem 4,5
Ure 23,1 34,6 Compost et fumier 7,5
Engrais organique 1,3 1,3 Fumier organique 9,2
Main duvre salarie
9,1 9,1Main duvre salarie
20
Pesticides vendus sur le march noir
38,7 38,7 Bio-pesticides 9,2
Pesticides vendus sur le march formel
57,0 78,1Autres produits naturels
12,0
Total des cots 186 245 Total des cots 69
Bnfice net (euro/ha) Moyen Sans subventions
Bnfice net (euro/ha) Moyen
Bnfice net* 134** (106) 77 (50) Bnfices nets 244** (190)
* Mdiane par hectare bnfice net fournis entre parenthses; ** Statistiquement significative diffrence dans les moyens au niveau 95 PCT de confiance.
-
C h a p i t r e 0 4
18
moyens des intrants par hectare sont prsents dans le tableau 412 sur le budget de lutilisation des terres. Les dpenses sur les pesticides reprsentent 50 % de tous les cots des intrants (96 euros/ha sur un cot total de 187 euros/ha).
4.1.4Subventions aux intrants agricoles
Lanalyse conomique, contrairement lanalyse financire pure, ncessite que lon comptabilise, non seulement les cots privs, mais galement les cots pour la socit ou les bnfices dans une tude dvaluation. Le secteur du coton conventionnel bnficie dun important appui du gouvernement, en particulier en matire de subventions sur les intrants. Toutefois, les subventions ont t supprimes pour certains pesticides partir de la campagne 2016/2017 (Commodafrica 2016a). Nos calculs montrent que si les producteurs devraient payer les vrais prix du march au cours de la campagne 2015/2016, leurs dpenses en pesticides sur le march formel auraient t de 36 % plus levs. Le nouveau gouvernement maintient toujours une subvention de 50 % sur lure et les engrais NPK (Commodafrica 2016b).
4.1.5Rendements et revenus
Le gouvernement a fix un prix dachat de 0,32 euro par kg de coton (210 FCFA/kg) pour la campagne 2015/2016. Avec un rendement moyen de 1060 kg par hectare (et une mdiane de 880 kg/ha), le revenu de la production du coton conventionnel est de lordre de 315 euros par ha (207000 CFA/ha).
Lannexe 1 fournit plus de dtails sur la rpartition des rendements, des cots des intrants et les recettes des producteurs de coton conventionnel et biologique qui ont t chantillonnes Banikoara.
4.2 Production de coton biologique
Lusage excessif des engrais et intrants chimiques peut entraner une baisse progressive de la fertilit des sols et entrane souvent de nombreux effets sur la sant (comme mentionn cidessus). En outre, certains producteurs de coton, en particulier les femmes, ne peuvent pas prendre part au march de production du coton conventionnel, car elles nont pas le niveau de revenu leur permettant dacheter les intrants. En vue de surmonter ces problmes, les femmes productrices de coton biologique ont cr une association dnomme AFVA (Association des Femmes Vaillantes et Actives) en 2008 dans
12 tant donn que nous avons labor les
budgets dtaills des entreprises sparment
pour le coton et le mas, nous sommes
certains que les quanti-ts dintrants rapports
ici ont t utiliss uniquement pour le
coton.
-
E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
19
F i g u r e 7
-200
-150
-100
-50
0
Cot
s fi
nanc
iers
(EU
R/ha
)
Biopesticides,graines de neem,diffrents mlanges
Semences, fumier compost, main-duvre salarie
Organique Conventionnel
Semences,NPK, uremain-duvre
Pesticides march
Pesticidesmarch noir
EUR 69/ha
EUR 245/ha
Subventionsde lEtat
Dpenses en intrants et les frais encourus par le trsor public par hectare de coton biologique et conventionnel
le village de Gomouri Banikoara en vue de promouvoir lagriculture biologique. Lassociation est soutenue par Helvetas et OBEPAP et compte environ 200 productrices.
4.2.1 Cot des intrants et de main d'uvre
En ce qui concerne la production du coton biologique Banikoara, le dsherbage se fait la main et on remplace les insecticides par des biopesticides, prpars partir de graines et de feuilles de neem. Ces produits sachtent sur le march, ou sont ramasss dans la nature. Lon utilise le fumier en lieu et place des engrais non biologiques. Avec des cots dintrants de 68 euros/ha (45315 FCFA/ha) en moyenne, les agriculteurs biologiques dpensent peu pour les intrants, les cots sont similaires ceux investis dans la production de mas Banikoara (voir Westerberg et al. 2017 pour plus de dtails). La figure 7 prsente les cots par ha des producteurs de coton biologique et conventionnel.
Les agriculteurs biologiques ont plus de btail que les agriculteurs qui ne produisent pas bio, ce qui facilite la production de coton biologique.
Par exemple, avant les semis, les producteurs conduisent leur btail dans les champs, pour les faire brouter, ce qui facilite le nettoyage des champs et contribue fertiliser le sol avec le fumier produit. Le pastoralisme et la production de coton biologique sont par consquent trs fortement complmentaires. Les producteurs utilisent galement le systme de semis direct sous couverture vgtale (SCV) bas sur le principe de culture sans labour, de couverture permanente du sol et de rotation des cultures. Ce systme permet la rgnration des matires organiques du sol et permet de gagner du temps par rapport au dsherbage et au sarclage.
4.2.2Rendements et recettes
Le coton biologique est certifi par Ecocert International et vendu au prix de 0,45 euro/kg (300 FCFA/kg). Le gouvernement bninois achte le coton biologique depuis 2012. Les producteurs biologiques ont un rendement moyen de 700 kg/ha et un rendement mdian de 630 kg/ha. Avec le prix du coton graine biologique qui est plus lev, le producteur biologique moyen a un recette de lordre de 315 euros/ha (162700 FCFA/ha), qui
-
C h a p i t r e 0 4
20
* Mdians entre parenthses
T a b l e a u 5
Travail familial sur 1ha dexploitation de coton biologique et conventionnelle
Demandes en main duvre (jours/ha/an)Agriculture biologique Conventionnel
Dfrichage, fauchage, labours, semis, sparation des plantes 32 22
Fertilisation dsherbage, ramassage de graines et de feuilles de neem, traitements avec des biopesticides
38 25
Temps moyen total du travail familial en jours, sans les rcoltes 70 (65)* 47 (41)
est similaire celui des producteurs de coton conventionnel.
Toutefois, comme indiqu dans lannexe 1, la rpartition des rendements est trs ingale, avec un groupe dagriculteurs bnficiant de rendements dpassant 800 kg/ha et un autre groupe produisant moins de 700 kg/ha. Cela nest pas surprenant tant donn quun bon nombre de producteurs biologiques sont des peuls, bergersagriculteurs, qui accordent diffrents niveaux dimportance la production agricole. En outre, il y a une courbe dapprentissage lie la russite dans lagriculture biologique, et beaucoup dagriculteurs se sont convertis lagriculture biologique rcemment. Pour plus dinformations sur la production du coton biologique Banikoara, le lecteur peut se rfrer une vido (en franais), dans laquelle sexprime la charge de supervision de lassociation des productrices biologiques AFVA13 de Gomouri Banikoara.
4.3 Bnfices nets de lagriculture biologique et conventionnelle
Etant donn que les producteurs biologiques obtiennent des revenus similaires ceux des producteurs conventionnels, mais encourent trs peu de frais dintrants, les producteurs biologiques gagnent dans lensemble des revenus plus levs par hectare. Plus prcisment, pendant la campagne 2015/2016, les producteurs biologiques ont gagn en moyenne 254 euro/ha (163000 FCFA/ha) net de tous les cots dintrants, alors que les producteurs conventionnels ont gagn 134 euro/ha (124000 FCFA/ha), soit la moiti des bnfices des producteurs biologiques. Si lon comptabilise les cots du trsor pour la subvention des intrants agricoles, le bnfice net pour la campagne 2015/2016 taient aussi bas que 77 euros per ha
(89300 FCFA/ha) pour la production cotonnire selon les moyens conventionnels (tableau 4). Voir annexe 1 pour plus dinformations.
Comme on le voit dans le tableau 5 toutefois, les agriculteurs biologiques travaillent 24 jours supplmentaires/ha/an, par rapport aux producteurs non biologiques. Aucune tentative na t faite pour valuer la valeur du temps de travail de la famille ici, car cela dpend de la personne qui travaille (enfants ou adultes) et la priode pendant laquelle ils travaillent (haute saison versus saison creuse). Le champ de cette tude ne couvrait pas ce type dinformation. Les entraves lintensification de la production du coton biologique et lefficacit de la production sont traites la section 5.3.
4.3.1 Les bnfices de la production de coton conventionnel lorsque lon comptabilise les cots des dommages et des subventions de lEtat
Le bnfice socital de la production du coton conventionnel est la valeur ajoute qui reste une fois que les cots de production, les cots des dommages environnementaux et les dpenses du gouvernement en subventions aient t dduits de la valeur des ventes. La figure 8 prsente la rpartition de ces cots pour un champ de coton de 5 hectares (taille moyenne) et le bnfice net qui en rsulte pour la campagne agricole 2015/2016.
Si lon tient compte des dommages causs par les pesticides sur la sant et lenvironnement, le bnfice net qui revient aux producteurs sur une exploitation de 5 ha baisse de 23 %, et passe de 670 euros (447125 FCFA) 518 euros (346427 FCFA). En outre, si lon comptabilise les cots pour les contribuables sur les subventions des intrants agricoles, de mme que les cots
13 Lassociation AFVA Association des
Femmes Vaillantes et Actives compte 200
producteurs biolo-giques comme
membres. Lassociation est soutenue par
Helvetas. Lentretien (en FR) avec Antoinette
Garadima Bak est accessible ici :
https://www. youtube.com/watch?v=JxV8ypd
OzAo&t=997s
https://www.youtube.com/watch?v=JxV8ypdOzAo&t=997shttps://www.youtube.com/watch?v=JxV8ypdOzAo&t=997shttps://www.youtube.com/watch?v=JxV8ypdOzAo&t=997s
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E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
21
F i g u r e 8
-1 500
-1 000
-500
0
500
1 000
Euro Semences, ure,
engrais, cots de lamain-duvre
Pesticides vendus sur le march informel et formel
Cots des dommagesenvironnementaux & CDM
Subventions
Bnfice netnon corrige
Bnfice net aveccots de dommages
(-23%)
Bnfice net aveccots de dommageset sans subventions
(-66%)
Cots
Bnfice net par producteur moyen (5 ha)
Cots privs et cots pour la socit et bnfices nets de la production du coton conventionnel
environnementaux qui en dcoulent, le bnfice net rel pour la campagne agricole baisse de 66 % seulement 226 euros (155600 FCFA).
-
C h a p i t r e
22
05 Discussion et rsultats complmentairesLes rsultats prsents cidessus dmontrent que la production du coton conventionnel nest pas trs avantageuse pour la socit par rapport la production du coton biologique et autres cultures vivrires et cultures de rentes (voir lanalyse de lELD sur Bant et Banikoara)14. Les cots levs des intrants lis la production de la culture en sont la principale raison. Cela met les producteurs dans une situation de vulnrabilit en cas de mauvais rendement, tant donn que la plupart des intrants soctroient crdit, et sont rembourss aprs la vente du cotongraine la cooprative. Une tude rcente effectue par lIIED en Zambie
a abouti des rsultats similaires, relevant que les producteurs gagnent trs peu de revenus une fois quils ont rembours les crdits des intrants (Weng et al. 2017).
5.1 Lien entre les rendements du coton conventionnel et les principaux intrants agricoles
En rendant les intrants agricoles bon march, les subventions de ltat encouragent lutilisation excessive des pesticides. Une analyse conomtrique de la fonction production effectue dans le cadre
T a b l e a u 6
Dpenses optimales et relles en intrants agricoles
Dpenses en euro/ha Dpenses optimales Dpenses moyennes effectives
Pesticides vendus sur le march noir 5 39
Ure 11 26
Engrais NPK 46 54
F i g u r e 9
00 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
100
200
300
400
500
600
Rend
emen
t (kg
/ha)
Dpenses (euro/ha)
Engrais NPK
Ure
Pesticides
Fonction production Cobb-Douglas relation entre rendements et dpenses agricoles pour les engrais, lure et pesticides du march noir15)
14 Les rsultats prsents ici sont tirs
de la campagne de production cotonnire
2015/2016; toutefois, les faits montrent que les
rendements de cette saison sont similaires ceux des saisons prc-
dentes, selon le MAEP (2016) et les rsultats
des enqutes (pour plus de dtails, voir
Westerberg et al. 2017).
15 Il na pas t possible dtablir une
relation statistique-ment significative
entre les rendements et lutilisation des
pesticides vendus sur le march formel. Ceci
nimplique pas que les pesticides vendus sur le
march formel ne contribuent pas
amliorer les rende-ments, mais reflte
plutt les problmes de concordance entre les donnes des mnages
et les informations sur les pesticide reus des institutions tatiques
sur ces mnages.
-
E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
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de cette tude a montr que les producteurs de Banikoara dpensent trop sur les intrants agricoles (figure 9). Plus de 5 euro/ha pour les pesticides du march noir, 11 euro/ha pour lure et 46 euro/ha pour lengrais NPK, toutes autres dpenses supplmentaires sur ces intrants ne sont pas contrebalances par une augmentation suffisante des rendements (tableau 6). Les producteurs font donc des pertes inutiles, dpensant bien plus que ce qui est conomiquement optimal, en particulier sur les pesticides et lure.
Les rsultats prsents ici ne sont pas un cas unique au Bnin. Une tude, rcemment publie dans le magazine Nature, a analys 1000 agriculteurs dans toute la France, et a conclu que pratiquement tous les agriculteurs pouvaient rduire de faon significative lutilisation de leurs pesticides tout en continuant de produire la mme quantit de nourriture (Lechenet et al. 2017). Les agriculteurs qui utilisent de faibles quantits de produits chimiques utilisent dautres mthodes pour lutter contre les ravageurs tels que la rotation des cultures, le dsherbage mcanique, lutilisation de varits de cultures rsistantes et la gestion minutieuse des dates de semis.
Une tude prcdente sur la comptitivit de la filire coton au Bnin suggre que lutilisation excessive des intrants constituait la norme il y a de cela une dcennie (Matthess et al. 2005). En particulier, Matthess et al. (2005) montrent que dans certaines zones de production, la quantit dengrais disponible pour une campagne agricole tait 300 fois plus leve que les doses recommandes par hectare.
La rcente rduction des subventions sur les engrais et les pesticides sous le gouvernement de Talon est par consquent la bienvenue (voir section 4.1.4). Toutefois, tant donn quil y a un risque que cela pousse les producteurs se tourner vers les pesticides du march noir, il est recommandable que la rforme soit assortie de campagnes de sensibilisations sur les dangers lis lutilisation des pesticides, leur inefficacit audel dun certain niveau de consommation, de mme que les mthodes alternatives et les quipements qui peuvent tre utiliss pour lutter contre les insectes nuisibles.
5.2 Les raisons qui justifieraient ladoption du bio
Les rsultats et argumentations prsents cidessus indiquent quil existe plusieurs raisons la fois financires et environnementales qui justifieraient que les producteurs de coton changent de systme de production pour passer lagriculture biologique. Si lon examine les motivations des producteurs biologiques de Banikoara (figure 10), il ressort que labsence deffets ngatifs sur la sant constitue la raison la plus importante qui amne les producteurs cultiver le coton biologique. Plusieurs producteurs en particulier ceux qui disposent dun cheptel important tel que les Peuls trouvent que la production du coton biologique est plus facile.
5.3 Obstacles lintensification de lagriculture biologique
Si lagriculture biologique est meilleure pour le budget des mnages et la sant, on peut se demander pourquoi y atil moins de 1 % de producteurs biologiques de Banikoara? Parmi les producteurs biologiques, la figure 12 montre que la disponibilit de la mainduvre, du crdit et des intrants (charrettes, fumier, biopesticides) sont perus comme constituant des entraves majeures lintensification de leurs oprations.
En effet, pendant le travail de terrain de cette tude, nous avons observ que les producteurs de coton conventionnel se peroivent comment tant enferms dans la production de coton conventionnel, car cest lunique secteur qui bnficie de lappui du gouvernement, et par consquent, la seule culture pour laquelle ils peuvent obtenir des intrants agricoles ou des crdits. La culture du coton conventionnel constitue donc le choix par dfaut pour la plupart des agriculteurs. Matthess et al. (2005) abondent dans le mme sens en indiquant que des efforts devraient tre faits au Bnin pour garantir laccs au crdit aux agriculteurs pour les cultures autres que le coton et pour dautres mthodes de production.
5.3.1Mise en garde
Les agriculteurs biologiques ont moins de terres et plus de btail que les producteurs conventionnels. La question essentielle se poser est donc de savoir
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C h a p i t r e 0 5
24
F i g u r e 1 1
Photo de bergers-agriculteurs Peuls dans le village de Gomouri, o se trouve lassociation de productrices biologiques AFVA.
F i g u r e 1 0
80%
70%
34%
29%
21%
20%
12%
6%
1%
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90%
Mieux pour la sant
Pas compliqu/facile cultiver
Primes sur la vente du coton bio
Cot des intrants du coton conventionnel trop levs
Autre (meilleure rentabilit, absence de dette )
Meilleure option pour lenvironnement
Meilleur accs aux intrants et leur disponibilit
Assistance technique disponible
Terre trop dgrade pour produire autre chose
!
Pourquoi les agriculteurs produisent-ils du coton biologique plutt que du coton conventionnel?
-
E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
25
F i g u r e 1 2
20%
41%
37%
21%
21%
20%
13%
9%
5%
2%
Pas de contraintes
Retard de paiement pour les rcoltes
Absence de main-duvre
Pas dengrais ni de biopesticides en vente
Absence de crdit
Autres (fumier difficile trouver, charrettes non disponsibles)
Ncessite plus de travail plus que le coton conventionnel
Prsence de ravageurs
Manque dassistence technique
Rendements plus faibles que ceux du coton
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90%
Quels sont les principaux obstacles lagriculture biologique?
si les agriculteurs biologiques seraient capables de maintenir les marges leves que nous avons dmontr plus haut, sils avaient de plus grandes surfaces? Cela dpendra sans doute de leur capacit investir dans des intrants agricoles essentiels tels que les charrettes pour les aider transporter le fumier dans les champs ou embaucher de la main duvre supplmentaire. A ce stade cependant, lanalyse prsente cidessus noffre pas une comparaison parfaite sur la mme base de la situation conomique des producteurs bio par rapport celle des agriculteurs conventionnels.
En outre, il est important de noter que le gouvernement bninois achte le coton graine des producteurs conventionnels et biologiques audessus des prix du march mondial. Les dpenses publiques sur ces prix planchers nont pas t comptabiliss dans cette tude, cause des difficults trouver des informations prcises ce sujet.
Enfin, il convient de mentionner que la situation de Banikoara nest pas reprsentative de la situation dautres communes productrices de coton au Bnin Cest une situation bien connue pour tre un cas extrme en ce qui concerne la quantit de coton produit, la prsence dun march noir de pesticides bien dvelopp et les dommages causs la sant et lenvironnement de manire gnrale. En outre, limportance relative du coton comme culture de rente dans la commune de Banikoara implique galement que Banikoara bnficie dun meilleur niveau de prestation de services, par exemple, dcoles mieux quipes que dautres communes au Bnin (Bertenbreiter, communication personnelle 2017).
-
C h a p i t r e
26
06 ConclusionLes risques de sant dans la production agricole constituent un problme de plus en plus grave en Afrique (Banque Mondiale 2000; Ajavi 2000; PNUE 2013). A Banikoara, nous avons dmontr que les cots des dommages environnementaux et de sant sont de lordre de 174 euros (114200 FCFA) par mnage. Avec environ 16600 mnages producteurs de coton, le cot global des dommages slve 2,9 millions deuros par an Banikoara.
Nous avons galement dmontr que la valeur nette de la production de coton baisse de 66 % pour une exploitation moyenne lorsque lon prend en compte les subventions sur les intrants accordes par lEtat et les cots des dommages environnementaux. Ceci constitue un important clairage, car si
dimportantes sommes sont dpenses de faon inefficace, il faut donc investir des fonds publics en vue de raliser de meilleurs bnfices pour la socit dans un autre secteur ou pour dautres mthodologies de production.
En particulier, nous pensons que cest le cas de ladoption de pratiques de gestion durable des terres tel que la rotation des cultures et les semis directs sous couverture vgtale, car ces mthodes peuvent aider rduire la dpendance des agriculteurs sur les intrants couteux, non biologiques et chimiques. Ladoption dapproches de GDT pourrait se faire de faon progressive et cela prpare les producteurs intresss la production biologique.
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E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
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En effet, la demande internationale de coton biologique est en hausse. En outre, cette tude a dmontr que les revenus moyens par hectare des agriculteurs biologiques de Banikoara sont presque deux fois plus levs que ceux des producteurs de coton conventionnel et trois fois plus levs lorsque lon excluent les subventions sur les intrants pour les producteurs conventionnels.
Par ailleurs, les pratiques GDT utilises par les agriculteurs biologiques contribuent lenrichissement du sol en matires organiques et sont trs complmentaires aux activits pastorales. Cela rend les systmes dagriculture biologique plus rsistants la variabilit climatique (Kloos et Renaud 2014) et un instrument de gestion des conflits entre leveurs et agriculteurs au nord du Bnin. Ainsi, lagriculture biologique peut contribuer latteinte de lobjectif de dveloppement durable vie terrestre, en particulier lobjectif 15.3, par la restauration des terres dgrades et la promotion dun tat sans dgradation de terres.
Actuellement, les agriculteurs biologiques Banikoara disposent de petites exploitations (1 ha en moyenne), et ils dpendent de laccs aux financements, la main d'uvre et aux intrants agricoles pour leur permettre dagrandir leurs exploitations et surmonter les obstacles. Dans le mme temps, les producteurs de coton conventionnel doivent savoir quils peuvent bnficier de soutien dans leurs efforts de produire le coton diffremment.
Dans cette optique, il est ncessaire de parvenir une situation plus quitable, dans laquelle laccs aux connaissances et aux opportunits dinvestissements dans la gestion durable des terres seront plus accrus. Linitiative rcente du gouvernement de rduire les subventions sur les
intrants pour le coton conventionnel constitue une avance dans la bonne direction, bien quil faille veiller ce que les producteurs ne se tournent vers une utilisation plus accrue des produits chimiques du march noir.
Par consquent, la rduction des subventions distorsives devrait saccompagner de services de vulgarisation, afin dapprendre aux agriculteurs les voies et moyens dadopter la gestion intgre des ravageurs et la gestion de la fertilit des sols. Par ailleurs, nous avons vu que les cots de la maladie dus la pulvrisation de pesticides peuvent tre rduits travers lutilisation doutils de prcision pour la pulvrisation faible volume tel que lULV+ (contrairement lutilisation des pulvrisateurs sac dos ou des arosols). Une fois de plus, il faut mener des campagnes dinformation pour assurer que les producteurs adoptent les meilleures pratiques. En conclusion, nous dirons que la prise de conscience plus accrue des consommateurs, lengagement national du Bnin pour les objectifs de dveloppement durable et les dfis du changement climatique toujours plus urgents ont cr une dynamique pour le changement. Le moment est opportun, pour faire un bond en avant, et dvelopper des politiques et des mesures conomiques incitatives dans un sens qui pourrait transformer le paysage des zones rurales, et amliorer les moyens de subsistance et les perspectives des producteurs car ils sont les vrais piliers de lconomie bninoise.
-
R e f e R e n c e s
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A p p e n d i c e 1
30
Annexe 1:
Tableau A 1.1:Budget dentreprise coton conventionnel
Table A 1.1: Enterprise budget conventional cotton
La production conventionnelle 1 ha Moyenne cart-type Min Max
Prix (euro/kg) 0,32 0,0 190 220
Rendement (kg/ha) 1060 0,9 170 3250
Recettes (euro/ha) 315 201 78,8 1134
Cots des intrants (euro/ha) Moyenne Sanssub-ventions cart-type Min Max
Graines de coton 5,4 3 1 15
Engrais NPK 52,0 78 35 0 258
Ure 23,1 35 19 2 120
Fumure organique 1,3 5 0 45
Main-duvre salarie 9,1 18 0 113
Pesticides vendus sur le march noir 38,7 30 0 168
Pesticides vendus sur le march formel 57 78 49 2 288
Total cots financiers 186 245 82 95 614
Bnfice net (euro/ha) Moyenne cart-type Min Max
Bnfice net 134 77 127 -158 755
Figure A 1.1: Rpartition des rendements entre producteurs de coton conventionnel (#190), tronqus
05
1015
2025
% d
es e
xplo
itat
ions
agr
icol
es
0 500 1000 1500 2000 2500
Rendement coton conventionnel (kg/ha)
Moyenne(1060 kg/ha)
-
E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
31
Tableau A 1.2:Budget dentreprise coton biologique
Table A 1.2 Enterprise budget organic cotton
La production biologique 1 ha Moyenne cart-type Min Max
Prix (euro/kg) 0,45 32 213 360
Rendement (kg/ha) 697 415 100 2000
Recettes (euro/ha) 313 190 53 927
Cots des intrants (euro/ha) Moyenne cart-type Min Max
Graines de coton 6,1 5 0 23
Engrais NPK 4,5 5 0 31
Ure 7,5 31 0 315
Fumure organique 9,2 17 0 90
Main-duvre salarie 20 40 0 252
Pesticides vendus sur le march noir 9,2 15 0 67
Pesticides vendus sur le march formel 12 18 0 86
Total des cots 69 58 2 376
Bnfice net (euro/ha) Moyenne cart-type Min Max
Bnfices nets 244 190 21 675
Figure A 1.2:Rpartition des rendements entre producteurs de coton biologique (#90)
05
1015
% d
es e
xplo
itat
ions
agr
icol
es
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000
Rendement coton biologique (kg/ha)
Moyenne(700 kg/ha)
-
32
Tableau 1 Cot de la maladie Banikoara effets court terme et long terme de la maladie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Tableau 2 Cot de la maladie en fonction du principal outil de pulvrisation utilis par les agriculteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
Tableau 3 Cot des dommages rsultant de la pollution et de lempoisonnement par les pesticides . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
Tableau 4 Budget denterprises de la production de coton biologique et conventionnel . . . 17
Tableau 5 Travail familial sur 1 ha dexploitation de coton biologique et conventionnel . . . 20
Tableau 6 Dpenses optimales et relles sur les intrants agricoles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
Tableau A 1.1 Tableau A 1.1 : Budget denterprise coton conventionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
Tableau A 1.2 Tableau A 1.2: Budget denterprise coton biologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
Liste des tableaux
-
E t u d E d E c a s d E l a c o m m u n E d E B a n i k o a r a a u B E n i n
33
Figure 1 Commune de Banikoara . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
Figure 2 Chane de valeur de la production de coton (base sur une description de Fast Fashion) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
Figure 3 A gauche, le pesticide Pyrinex, contenant du chlorpyriphos et de la deltamthrine, v