thèse didactique de textes littéraires
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UNIVERSITE DORAN ES -SENIA
FACULTE DES LETTRES,LANGUES ET ARTS DEPARTEMENT DES LANGUES LATINES
SECTION DE FRANAIS
DIDACTIQUE DES TEXTES LITTERAIRES OU LA LITTERATURE COMME PRETEXTE A LENSEIGNEMENT DU F.L.E
THESE DE DOCTORAT DE FRANAIS PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT
PAR ABDELKADER GHELLAL
Sous la direction de Mme le professeur Sari Fewzia Kara Mostefa et la co- direction de Mme le professeur Oriol Boyer Claudette Membres du jury : Prsident M. Miliani HadjProfesseur Universit de Mostaganem Rapporteur Mme Sari Fewzia Professeur Universit dOran Co-Rapporteur Mme Claudettte Oriol Boyer ProfesseurUniversit Stendhal-Grenoble III Examinateur Mme Ouhibi Ghassoul Bahia Matre de confrencesUniversit dOran Examinateur Mme Bnamar Aicha Docteur Crasc Oran JANVIER 2006
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DIDACTIQUE DES TEXTES LITTERAIRES
OU LA LITTERATURE COMME PRETEXTE A LENSEIGNEMENT DU F.L.E.
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A la mmoire du grand absent : feu Hadj Boudjellal GHELLAL.
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SOMMAIRE
Avant-propos p 19
Introduction gnrale p 22
INTRODUCTION p 27
PREMIERE PARTIE : LIRE UN TEXTE p 30
CHAPITRE I : PROTOCOLE DENQUETE p38 CHAPITRE
II: CRITERES EXTERNES PRESIDANT AU CHOIX DU TEXTE A EXPLOITER p 52
CHAPITRE III:CRITERES INTERNES ET ANALYSE DE TEXTES p 68
Conclusion p 124
DEUXIEME PARTIE : LIRE - CRIRE p 127
CHAPITRE I : LE TEXTE LITTERAIRE : UN DOCUMENT p 133
DOBSERVATION ET DANALYSE
CHAPITRE II : MISE EN PLACE DES ACTIVITES DECRITURE p 187
CHAPITRE III : DE LA CONSIGNE A LEVALUATION p 214
CHAPITRE IV : LEVALUATION ET LA CORRECTION
DES TEXTES p 221
CONCLUSION p 243
TROISIEME PARTIE : PROPOSITIONS DE SEQUENCES DIDACTIQUES p 245
SEQUENCE 1 : JOUER AVEC LE LANGAGE POETIQUE p254
- Objectif de production : p 255
- Savoirs en jeu : p 255
SEQUENCE 2 : ECRIRE POUR FAIRE FAIRE p 287
Objectif de production : p 288
Objectifs et comptence : p 288
Savoirs en jeu : p 288
SEQUENCE 3 : ECRIRE POUR RACONTER LE CONTE p 313
Objectifs et comptences : p 314
Conclusion p347
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CONCLUSION GENERALE p 348
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES p 352
I - Bibliographie gnrale p 353
II - Ouvrages consults p 356
ANNEXE : Questionnaire denqute
destin aux enseignants du cycle secondaire
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Avant-propos Il est trs difficile de remercier ceux dont laide ou linfluence ont t
dterminantes, cela supposerait que lon ait tenu la liste jour.
Nous tenons cependant exprimer ici notre reconnaissance ceux qui ont
permis ce travail daboutir :
- Claudette ORIOL-BOYER qui a su me laisser avancer mon allure,
mencourager quand il fallait, demeurer disponible et moffrir sa comprhension
attentive et amicale quand ctait ncessaire ;
- Fewzia SARI KARA MOSTEFA qui a su maider avec une qualit dattention extraordinaire et une amiti qui ne lest pas moins ;
- Anne Leclaire HALTE et Jean-Franois HALTE qui nont pas hsit prendre sur leur sommeil pour relire cette thse ;
- aux chercheurs dont le travail a fond le mien, Charles BONN, Bruno GELAS, OUHIBI Bahia et Hadj MILIANI dont les encouragements comptrent ;
- BOUCIF qui ralisa de multiples transferts entre ordinateurs peu compatibles,
assura la mise en page de cette thse, toujours avec une patience sans limite,
joua linterface entre mes attentes et les machines ; - Khadidja Djenet GHELLAL dont les relectures furent les bienvenues.
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Ecrire, cest se faire aussitt lecteur, lire, cest se faire
aussitt crivain. Commune lcrivain et au lecteur,
la muse, en toute occurrence, cest le centre du texte
mme, ce lieu obscur qui ne songe interminablement
qu se dchiffrer.(1)
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Introduction gnrale
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Aucun apprentissage nest plus fondamental que celui de la matrise du
langage et de la langue franaise. Par cette appellation matrise du langage et
de la langue franaise , que faut-il entendre ?
Cest lensemble des activits qui conduit chaque apprenant, au fil des jours,
exprimer par oral ou par crit ses motions, sa pense, ses rapports aux
autres, communiquer avec autrui de faon immdiate dans les conversations,
les changes, les forums de discussion, par Internet, de faon diffre par la
lecture ou lcriture.
Lire, crire, parler : lacquisition des comptences qui structurent cette trilogie
est un long parcours, incessant ou qui ne cesse quavec la mort. Chaque jour,
nous apprenons parler mieux, exprimer mieux ce que nous ressentons ou
pensons. La dcouverte dun mot nouveau, la rvlation dans un livre ou un
article de journal dune information, la meilleure comprhension que nous avons
dun phnomne, la matrise dune nouvelle rgle grammaticale ou dune
tournure pertinente, la formulation plus juste dune explication, plus prcise dun
sentiment, plus nuance dune motion constituent autant dexpriences
quotidiennes dont nous navons pas toujours conscience.
Ce que les enseignants devraient faire, cest construire une progression
rflchie de cet infini apprentissage vers la matrise toujours renouvele de la
langue. Nagure, nous appelions cela le franais , dirions-nous. Oui, cest
cela, mais cest plus encore. Lobjectif est, terme, damener les apprenants
matriser le plus possible de situations de communications, le plus grand nombre
dobjets de lecture, linfinie galaxie des types de discours : savoir lire des texte
littraires, des contes, des pomes, des rcits daventures, savoir crire toutes
sortes de discours, savoir dchiffrer et dominer plusieurs situations de
communication pour expliquer autrui, exprimer un point de vue, dfendre une
position, manifester une motion, faire natre un sentiment.
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Toutes les disciplines mobilisent ces comptences, sen nourrissent et les
alimentent en mme temps. Elles utilisent chacune un vocabulaire spcifique qui
enrichit le fonds commun ; elles mettent en jeu des situations de communication
orale et crite que lapprenant doit dominer : partout, il faut expliquer, justifier,
dire ce que lon comprend, tenter de dire o et pourquoi on ne comprend pas,
demander une explication, chercher parfaire une information.
Mais cette interaction entre les disciplines serait dune moindre efficacit si
lapprentissage de la langue franaise dans toutes ses composantes ne se
construisait pas quotidiennement par la confrontation avec des textes lire et
crire ; par la mise en uvre dactivits orales spcifiques et varies, par la
dcouverte puis lapprofondissement des rgles qui rgissent la constitution
mme de cette langue : lorthographe, la grammaire, la syntaxe des phrases, la
cohrence des textes, les rseaux lexicaux
Cest cette nouvelle interaction, non plus entre les disciplines, mais entre les
champs de la discipline dsormais nomme : Matrise du langage et de la
langue franaise , que les enseignants devraient crer.
Chaque squence devrait tre construite pour fonder lacquisition de
connaissances et de comptences multiples qui permettent, terme, de mieux
comprendre le fonctionnement de la langue, des objets quelle cre (textes,
discours, communication) et de rinvestir dans des lectures, des critures et des
activits orales. Par-del la multiplicit des comptences construire et des
connaissances transmettre, chaque squence sefforce de mettre en uvre un
apprentissage cohrent ; cest la raison pour laquelle les pdagogues devraient
chercher des principes fdrateurs. Un thme ou un type de texte sert de lien
toutes les activits : la lettre, le pome, la description, le conte, limage, etc.
Ces liens ne sont pas gratuits : ils permettent lapprenant de nouer les fils entre
les textes lus, daller de lun lautre, guid par lenseignant ou de faon plus
ludique et ainsi de fonder une culture. Les textes devraient tre varis et
emprunts des champs disciplinaires divers.
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Notre travail se propose d'exposer les raisons et les modalits d'un
apprentissage du franais qui ne dissocie pas les usages ordinaire et artistique
du langage. Son orientation est donc la fois thorique et didactique. C'est la
place de la littrature dans l'enseignement du FLE qui est, bien entendu, l'enjeu
de notre recherche. Notre objectif est de dvelopper chez l'apprenant des
comptences utiliser dans son enseignement de la lecture et de l'criture, sa
comprhension des textes de types narratif et potique, de mme que de types
descriptif et dialogal, et du processus d'apprentissage retenus par le programme
d'tudes de franais au lyce. Aussi, lui permettre de se familiariser avec le
matriel didactique disponible relatif l'apprentissage de ces textes tout en
exerant un regard critique. Lapprenant devra donc tre capable dtudier des
textes littraires et le processus dapprentissage retenus par le programme et
danalyser le matriel didactique destin lapprentissage de ces textes.
Dans cette perspective, plusieurs questions se posent nous, questions qui se
font cho :
Comment un apprenant pourrait-il comprendre des textes littraires et crire
partir de la littrature ?
Comment amener les apprenants matriser le plus possible des situations de
communication, le plus grand nombre dobjets de lecture, linfinie galaxie des
types de discours ?
Les enseignants devraient-ils manifester la prminence des textes littraires ?
Quels textes littraires faudrait-il proposer ?
Quelle(s) approche(s) du texte littraire faudrait-il adopter ?
Faut-il avoir une mthode ?
Comment permettre lapprenant de nouer les fils entre les textes, daller de
lun lautre, guid par lenseignant ?
Comment le choix vari de pomes et de textes littraires afficherait-il la
volont dassocier les apprentissages fondamentaux et lacquisition dune culture
?
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Notre travail rpond ces questions et essayera dy apporter quelques
propositions.
Notre recherche prsente des ensembles littraires organiss selon une
cohrence thmatique et souhaite offrir un panorama aussi large que possible
de la littrature franaise. Elle vise faire rflchir les apprenants sur le principe
de groupement de textes et voudrait leur donner la matrise de cette nouvelle
faon dapprhender la littrature.
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INTRODUCTION
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Le travail que nous prsentons essaie de rendre compte de lvolution dune
dmarche qui sest construite partir dinteractions multiples entre rflexion
thorique, pratiques de formation, lectures de textes, pratique dcriture
personnelle. Le but de ce travail de recherche est de construire les raisons et les
modalits dun apprentissage de lcriture qui ne dissocie pas les usages
ordinaires et artistiques du langage. Il a donc une double proccupation
thorique et didactique.
Notre travail se compose de trois parties simbriquant progressivement au fur et
mesure de la dmonstration et de lanalyse.
Aprs un bilan de lenseignement de la lecture et du texte littraire en classe de
langue, nous montrons lchec des institutions de la lecture. Cet chec est
corrobor par une enqute ralise en Oranie auprs de cent enseignants du
cycle secondaire : notre enqute prouve, quen matire de lecture, la russite est
faible et/ou peu durable et, ce qui est vraiment pire, elle ne concerne
pratiquement pas les tablissements de milieux dfavoriss. De plus, la lecture
est disjointe de lcriture : les apprenants ne lisent pas pour crire.
Dans un deuxime temps, nous tenterons de mettre en vidence le travail sur
les problmes spcifiques de lenseignement de la lecture en liant troitement
pdagogie de la lecture et pdagogie de lcriture. Nous essayerons de montrer
quil est possible denseigner crire des textes de manire nouvelle, cest--dire
sans senfermer dans lalternative rdaction ou texte libre , alternative que
beaucoup ressentent comme une impasse puisquelle donne lenseignant le
choix entre linculcation active des modles strotyps (mais explicites) et la
patience attentive (ou attentiste) devant des productions tout aussi strotypes
mais rputes spontanes , donc trangres tout apprentissage collectif.
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Dans un troisime temps, nous proposons des exemples de squences
didactiques au service de lapprentissage de lcriture-lecture-rcriture.
Chaque squence propose poursuit des objectifs dapprentissage concernant
la liaison lecture-criture-langue ou larticulation entre les savoirs linguistiques et
stylistiques. Le travail effectu sur les textes que nous avons slectionns est
orient vers la prparation de pratiques dcriture et donc dune comptence
scripturale chez les apprenants. Ces comptences cognitives sont le plus
souvent prcises dans les infinitifs qui intitulent chaque squence (par exemple
: Ecrire pour faire voir , Ecrire pour faire comprendre , Ecrire pour
informer , Jouer avec le langage potique , Ecrire la suite dun texte ,
Ecrire un texte consignes .
Les objectifs viss par chacun des chapitres sont des objectifs de production :
lobjectif de chaque squence est de lordre dun savoir-faire : savoir crire et
rcrire. Cest donc en apprenant rcrire que lapprenant sappropriera les
savoirs conceptuels mis en jeu par la dmarche.
Par ailleurs, les connaissances en matire de langue sont des outils au service
de lapprentissage vis en tout premier lieu par lenseignement de la langue
franaise : apprendre chaque lve rencontrer les textes produits par la
socit o il vit et lui donner les moyens : le pouvoir de les produire lui-mme.
Enfin, placs en annexe, sont convoqus un certain nombre de documents :
- Un questionnaire denqute destin aux professeurs de franais du cycle
secondaire.
- Le questionnaire denqute dment rempli par quelques enseignants.
- Copies des corpus que nous avons utiliss.
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Premire partie
LIRE UN TEXTE
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Lorganisation des contenus des objectifs dapprentissage de la langue
franaise dans lenseignement secondaire se prsente selon le droulement
suivant :
La premire tape met lapprenant en contact avec des supports varis partir
desquels il va dcouvrir lobjet dtude.
Dans une deuxime tape, cest la capacit de lapprenant analyser qui est
sollicite directement et dune manire systmatique.
Une troisime tape propose des activits susceptibles daider lapprenant
vrifier son degr dassimilation des notions et sa capacit les rinvestir dans
des situations particulires.
Un moment de rcapitulation est prvu la fin de ces trois tapes afin daider
lapprenant faire le bilan de ses connaissances. Une partie exercice vise
une pratique de la langue au service de la comprhension et de lexpression.
Un test dvaluation, ax plus prcisment sur lautovaluation, constitue la
phase finale de la dmarche.
Lespace de lecture offre lapprenant loccasion de donner du sens ces
activits en se plaant dans une situation de lecteur pour le plaisir . []
Une attention particulire a t accorde au choix des supports, des illustrations
et des contenus des espaces rservs lapprenant (le coin des proverbes, des penses, du sourire) pour faire rflchir, parler la sensibilit, veiller la
curiosit, en un mot, crer le dsir et le besoin dapprendre. (1)
Comment offrir la possibilit aux apprenants du cycle secondaire de consolider
les comptences de lecture et dcriture acquises au cours des annes
prcdentes ?
Comment dvelopper de nouvelles comptences ?
Selon lobjectif principal du cycle secondaire expos dans les programmes
officiels, les activits proposes visent faire progresser lapprenant dune
manire efficace vers le statut dutilisateur autonome de la langue franaise.
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Dans cette perspective, une question se pose nous : Pouvons-nous sparer la
sance de lecture de celle de lcriture ?
La grande rvolution de ces dernires annes en matire de production dcrits a
t de comprendre quEcrire, cest surtout Rcrire, Retravailler son brouillon.
Pour que cela soit possible, il faut que la consigne de rdaction intgre la
rfrence un crit social connu qui soit un modle pour lapprenant.
La production dcrits doit tre en troite relation avec le manuel de lecture ou
les textes proposs par lenseignant ses apprenants lors de lacte
pdagogique. Les activits de production dcrits doivent tre la rsultante de
lobservation de textes et documentaires et le lieu de rinvestissement des
activits rflexives (orthographe - grammaire - vocabulaire) contenues dans les
manuels scolaires ou dans les textes tudis en classe.
Lenseignant et les apprenants en tirent quelques caractristiques textuelles,
cest--dire ce qui en fait un texte original et particulier, qui deviennent autant de
critres dcriture (ce qui est ncessaire pour Lire-crirecrire) et de vrification pour les apprenants (ce que jai retenu et utilis pour lcriture).
La dmarche pdagogique est conforme toute dmarche dappropriation
active, prenant en compte les diffrents rythmes dacquisition des apprenants.
Pour chaque comptence ou acquisition, nous retrouvons la structure suivante :
1-Lapprenant prend connaissance dun type textuel particulier.
2-Lapprenant propose une premire comprhension du texte dans sa structure
et son organisation.
3-Lapprenant rinvestit les premiers lments perus dans les activits 1 et 2.
4-Lapprenant recherche dans le texte quelques caractristiques langagires
propres au type textuel analys.
5-Lapprenant construit une fiche outil de production/ valuation.
6-Lapprenant produit un texte : lactivit de rcriture est guide par une grille
danalyse propose.
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Malheureusement, lEcole algrienne, cette structure nest pas totalement prise
en considration : lapprentissage conjoint de la lecture et de lcriture nexiste
pas.
Quel que soit le niveau culturel de lapprenant, cet apprentissage lecture/ criture
ne peut tre mis en place que si transmission culturelle et exercices techniques sont troitement associs. La production de textes est une activit qui doit tre
apprise, pas seulement value : les consignes et les situations diversifies
offrent des modles, imposent des rgles, suggrent des ides.
Dans cette perspective, Lire /Ecrire des textes est un instrument indispensable
pour lenseignant. Il offre, dans le cadre dune progression, une pdagogie de
lcriture o alternent et se compltent lments thoriques indispensables et
propositions diversifies dexercices.
Ni exercice scolaire se rclamant de nouvelles technologies, ni un projet naf de
communication, Lire /Ecrire des textes est un mode dentre dans la culture
crite.
Le verbe Lire , nous dit J. Kristva, avait pour les anciens une signification qui
mrite dtre rappele et mise en valeur en vue dune comprhension de la
pratique littraire.
Lire tait aussi ramasser , cueillir , pier , reconnatre des
traces, prendre , voler .
Lire dnote donc une participation agressive, une active appropriation de lautre.
Dans cette perspective, nous citons Fewzia SARI KARA MOSTEFA :
[] crire, cest savoir saisir et donner du sens un texte ; cest dcouvrir,
organiser et interprter la signification de ce qui est crit.
Lire est une activit complexe danalyse et de synthse, conduisant la
comprhension dune pense partir de la combinaison de certaines units.
Chez les jeunes apprenants, ces units sont les signes crits, chez ltudiant
universitaire, elles deviennent plus complexes. Dans son acte de lecture, le
lecteur efficace reconnat globalement des traces et mne en mme
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temps une activit analytique en vue dune synthse ultrieure de ces traces. Mis
en situation active, le lecteur labore une interprtation cohrente et riche dun
ensemble singulirement cod.
Ainsi, la lecture est aborde dans sa vraie fonction qui consiste donner sens
un texte(1)
A la fin du cycle secondaire, lapprenant doit avoir une matrise de la langue,
suffisante pour lui permettre daccder une documentation diversifie de la
langue franaise. (2)
Leffort porte dabord sur la lecture. Entre les instructions ministrielles prudentes
et les innovations audacieuses, lEcole algrienne apprend travailler avec le
livre et linformation crite, faisant de la comprhension des textes lus son
vritable objectif. Inventer une pdagogie de la comprhension ne va pas de soi.
Vritable point aveugle de lacte mme de lire, la comprhension est ce dont les
enseignants les plus vigilants vrifient ou non la prsence. Peut-elle faire lobjet
dun apprentissage ? A lEcole algrienne, cest bien l que sarrte le pouvoir
de lenseignant, confront des aptitudes naturelles que lon constate, et que
lon constate, hlas, ingales ! Pour passer outre, il faut se donner les moyens
denseigner comment on comprend , inventant des situations permettant aux
apprenants de prendre conscience de leur capacit de comprendre, de
construire une appropriation vritable de lcrit.
Nous constatons, malheureusement, qu lEcole algrienne, tous cycles
confondus, la lecture est totalement dissocie de lcriture.
Lapprentissage de lcriture pose beaucoup de problmes non seulement au
collge et au lyce, mais aussi au niveau de luniversit. Les enseignants,
malgr leur bonne volont, dplorent le fait que la plupart des apprenants du
secondaire, quand ils lisent correctement, narrivent pas crire. A dfaut de
pouvoir rendre lenseignement du franais langue trangre (FLE) facile et
agrable, nous pouvons au moins exiger quil soit justifi et suffisant. Si nous
voulons que les apprenants obtiennent des rsultats, nous ne devons pas leur
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cacher que lcrit du franais est bien difficile. Ce serait une erreur psychologique
de laisser croire le contraire : un certain nombre dapprenants narrive jamais
prendre conscience des exigences de lcrit.
Rcemment, un tudiant qui prparait lexamen du DALF(1) a quitt ses cours
en protestant parce quil navait pas obtenu les units B1(2) et B3(3) quil
esprait avoir. Je lis trs bien , disait-il, je comprends tout ce quon me dit,
tout le monde me comprend lorsque je parle ; la preuve, jai eu les units B2(4)
et B4(5) avec de trs bonnes notes .
Ctait juste, malheureusement, sa langue crite tait nulle ; du nimporte quoi.
En revanche, lapprenant du franais langue maternelle (FLM) peut tmoigner
que lapprentissage de lcrit, lcole primaire, au collge et au secondaire,
quelles que soient les mthodes employes, est long et rude. A lEcole
algrienne, les manuels scolaires proposs par lInstitut pdagogique national
(IPN) accordent un intrt particulier au fonctionnement de la langue : grammaire
- vocabulaire - orthographe, et la comprhension de lcrit. Quant la
production dcrits, elle est peu ou pas prise en considration. Mais il nen
demeure pas moins quun apprenant est cens lire, donner du sens son texte
et produire son propre texte. Or, le systme scolaire dans lequel il volue le
confine dans une structure cloisonne : une conduite de rflexion lui est
impose. Les difficults des lves de niveau secondaire (15 ans 17 ans ), en
franais, se manifestent autant lcrit qu loral et sont dues non seulement
des facteurs linguistiques, mais aussi au choix des textes, des uvres littraires
et un manque de motivation.
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CHAPITRE I
PROTOCOLE DENQUETE
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Nous avons men une enqute auprs de cent enseignants du cycle
secondaire en Oranie en ce qui concerne lutilisation du texte littraire en classe
de langue et lenseignement/apprentissage conjoint de la lecture et de lcriture.
Ce choix a t tabli suivant des critres donns par le dpartement de
Sociologie, critres confirms par le dpartement de Mathmatiques pour
laspect statistique.
I-1. QUESTIONNAIRE DENQUETE Notre enqute a t mene au moyen dun questionnaire particulirement
indiqu pour localiser les attitudes des enseignants du cycle secondaire face aux
problmes de la lecture des textes en classe de langue, de ladaptation des
manuels proposs par lInstitut pdagogique national (IPN) lapprentissage de
la lecture et des objectifs des units didactiques. Notre questionnaire (cf.
annexe) est compos de vingt (20) items se rapportant essentiellement
lenseignement/apprentissage de la lecture-criture et de lutilisation des textes
littraires en classe de franais langue trangre.
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I-2. ANALYSE DES RESULTATS DE LENQUETE Item n1 : Suivez-vous la lettre le programme de franais propos par
lInstitut pdagogique national (IPN) ?
Les rsultats obtenus montrent que quatre-vingt-dix pour cent (90%) des
enseignants interrogs suivent le programme propos par lIPN sans y apporter
aucun changement.
Les raisons voques sont : cest le programme officiel provenant dune
institution tatique, pour ne pas tre en dfaut.
Quatre pour cent (4%) des enseignants ne rpondent pas cette question. Les
six pour cent (6%) qui restent rpondent par la ngative car ils estiment que
lenseignant du secondaire est souverain : cest le seul matre bord en classe. Il
doit laborer lui-mme son programme. Celui-ci doit rpondre aux attentes de
ses apprenants et est labor partir du programme propos par lIPN.
Item n2 : Parmi les textes proposs dans le(s) manuel(s) scolaire(s), lesquels
prfrez-vous ? Pourquoi ?
Soixante pour cent (60%) des enseignants prfrent les textes qui renferment les
points de langue parce quils sont courts et abordables, ajoutent-ils. Trente pour
cent (30%) privilgient les textes expositifs. Ces derniers intressent les
apprenants parce quils sont dactualit. Les apprenants se sentent interpells.
Dix pour cent (10%) des enseignants nont pas de prfrence : ils suivent la
lettre le programme et le manuel proposs par lIPN. Nous navons pas le droit
de prendre des initiatives personnelles, faute de quoi nous serons sanctionns
par linspecteur gnral de franais .
Nous remarquons que parmi les cent enseignants interrogs, personne na
voqu le texte littraire.
Item n3 : Ces textes sont-ils tous la porte de vos apprenants ? Pourquoi ?
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Quatre-vingt-dix pour cent (90%) des enseignants estiment que tous les textes
proposs dans les manuels scolaires ne sont pas la porte de leurs apprenants
parce quils sont longs et difficiles . Ce sont les mmes textes que
lenseignant utilisait quand la langue franaise avait un autre statut, celui de
franais, langue maternelle (FLM). Nos apprenants ne matrisent pas aussi bien
la langue franaise que leurs ans de vingt ans que nous avions comme lves
, ajoutent-ils.
Les dix pour cent (10%) qui restent partagent le mme avis et pensent que les
niveaux htroclites des classes font que les textes proposs par lIPN sont
difficiles daccs pour la majorit de leurs apprenants. Peu dapprenants arrivent
comprendre ce quils lisent.
Item n4 : Les textes proposs dans le(s) manuel(s) scolaire(s) poussent-ils
vos apprenants aller vers dautres textes ?
1) OUI, Donnez un exemple de textes qui va inspirer et orienter vos
apprenants vers dautres textes.
2) Non, Pourquoi ?
Tous les enseignants (100%) trouvent que les textes proposs dans le(s)
manuel(s) scolaire(s) ne poussent pas leurs apprenants aller vers dautres
textes parce quils sont dsuets, dnus de tout intrt et lassants.
Item n5 : Quels sont les textes que vous privilgiez le plus ? Pourquoi ?
Soixante-dix pour cent (70%) des enseignants interrogs prfrent les textes
narratifs et les textes expositifs parce quils sont les seuls tre intressants et
complets.
Par contre, vingt pour cent (20%) privilgient seulement les textes expositifs
parce quils incitent les apprenants faire des recherches sur les auteurs de ces
mmes textes.
Quant aux dix pour cent restants (10%), ils respectent le programme et travaillent
par unit didactique conformment aux instructions de linspecteur gnral de
franais.
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Item n6 : Utilisez-vous les mmes textes pour toutes les filires ? Pourquoi ?
Quatre-vingts pour cent (80%) des enseignants interrogs rpondent par
laffirmative car ils estiment quils nont pas le choix puisque le niveau des
apprenants est peu prs le mme dans toutes les filires.
Dix pour cent (10%) rpondent par la ngative pour la simple raison que les
attentes diffrent dune filire lautre.
Les dix pour cent (10%) restants utilisent plutt des textes scientifiques pour les
classes scientifiques et des textes littraires pour les classes littraires sans
donner de raisons.
Item n7 : Les textes proposs dans les manuels de lecture sont-ils, selon
vous, adapts lapprentissage de la lecture ?
Oui, Non Pourquoi ?
Cent pour cent (100%) des enseignants interrogs ne pensent pas que les textes
proposs dans les manuels de lecture soient adapts lapprentissage de la
lecture parce quils sont longs, difficiles daccs, ne sont pas dactualit, donc
non motivants.
Item n8 : Vous arrive-t-il dexploiter ces textes dune autre manire
(personnelle) ?
Parfois - Souvent - Toujours - Jamais.
Vingt pour cent (20%) des enseignants exploitent souvent les textes proposs
par lIPN dune manire autre que celle qui figure dans le livre du professeur.
Soixante-dix pour cent (70%) suivent la lettre le livre du professeur. Les dix
pour cent (10%) restants ne rpondent pas cette question.
Item n9 : Les textes proposs dans les manuels scolaires permettent-ils vos
apprenants de devenir de bons lecteurs ?
Oui - Non. Pourquoi ?
La majorit des enseignants interrogs (quatre-vingt-douze pour cent, 92%)
rpondent ngativement car ils estiment que, dune part, lhoraire consacr la
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lecture est insuffisant. Dune autre part, les apprenants dchiffrent trs mal, ce
qui pose normment de problmes.
Les huit pour cent (8%) restants ne rpondent pas cette question.
Item n10 : Quelle dfinition donneriez-vous un texte littraire ?
Pour cinquante-deux pour cent (52%) des enseignants, un texte littraire est un
texte qui permet aux lecteurs de svader et doublier les soucis quotidiens.
Cette dfinition nous semble trop vague et trop simpliste.
Vingt pour cent (20%) associent le texte littraire la rhtorique et la
stylistique.
Les dix-huit pour cent restants (18%) dfinissent le texte littraire comme tant
un texte authentique, original, adapt une certaine sphre culturelle.
Item n11 : Quelle est lutilit dun texte littraire en classe de langue ?
Aussi tonnant que cela puisse paratre, quatre-vingt-dix pour cent (90%) des
enseignants interrogs ne trouvent aucune utilit introduire un texte littraire en
classe de langue puisque lobjectif actuel est dapprendre aux apprenants
communiquer.
Huit pour cent (8%) pensent que le texte littraire apporte des informations sur
une poque donne, sur une socit, sur un courant littraire, sur le style et la
forme du texte.
Les deux pour cent (2%) restants estiment quun texte littraire est un texte
ordinaire, comme nimporte quel autre texte : tous les textes utiliss par
lenseignant servent travailler des points de langue.
Item n12 : Quentendez-vous par lire un texte ?
Quatre-vingt seize pour cent (96%) des enseignants pensent que lire un texte,
cest dabord le dchiffrer puis le comprendre et linterprter.
Trois pour cent (3%) voquent la lecture plaisir et la lecture travail . Le un
pour cent (1%) restant ne rpond pas la question.
Item n13 : Combien de sances consacrez-vous la lecture lors de chaque
unit didactique ?
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Vingt pour cent des enseignants (20%) consacrent deux sances, soit deux
heures la lecture lors de chaque unit didactique. Quarante pour cent (40%)
consacrent une sance, soit une heure la lecture. Les quarante pour cent
restants (40%) prvoient quinze minutes une demi-heure lors de chaque unit
didactique. Tous ces enseignants pensent que les sances prvues pour la
lecture ne sont pas suffisantes : ils ne consacrent pas beaucoup de sances la
lecture car le programme est trop charg et doit tre achev avant le mois de
mai.
Item n14 : Quelles sont les difficults que rencontrent vos apprenants pendant
la sance de lecture ? Pourquoi ?
Tous les enseignants interrogs (cent pour cent, 100%) pensent que, pendant la
sance de lecture, les apprenants narrivent pas dchiffrer, rencontrent des
mots pour la premire fois, manquent daisance (articulation, prononciation,
rythme, prosodie, etc.) parce que, dun ct, ils ne lisent pas en dehors de
lcole, dun autre ct, les sances consacres la lecture en classe sont
insignifiantes.
Item n15 : Quel est votre principal objectif lors de la sance de lecture ?
Pourquoi ?
Cinq pour cent des enseignants (5%) estiment que lobjectif principal lors de la
sance lecture est de donner aux apprenants le got de la lecture (le plaisir de
lire) parce quun apprenant qui ne sait pas lire ne peut pas russir : un apprenant
qui lit est un apprenant qui a beaucoup plus de possibilits de russir dans ses
tudes quun apprenant qui ne sait pas lire ou qui ne lit pas.
Trente-cinq pour cent (35%) pensent que lobjectif principal lors de la sance de
lecture est dabord denrichir le vocabulaire de lapprenant puis lamener
apprendre lire pour quil puisse enfin sinformer.
Soixante pour cent (60%) des enseignants trouvent que lobjectif principal lors de
la sance de lecture est la comprhension du texte : cest la communication qui
est mise en vidence en franais langue trangre (FLE).
-
Item n16 : La sance de lecture doit-elle seulement amener vos apprenants
la matrise de la langue et du langage ou bien vise-t-elle autre chose ?
Cinquante trois pour cent (53%) des enseignants estiment que la sance de
lecture doit amener lapprenant la matrise de la langue et du langage : elle ne
vise pas autre chose et permet seulement llve dapprendre bien lire pour
comprendre.
Vingt-huit pour cent (28%) pensent que la sance de lecture ne permet pas
seulement aux apprenants la matrise de la langue et du langage mais vise bien
dautres choses : lamour du livre et de la lecture, linformation et louverture sur
dautres cultures, dautres civilisations.
Dix pour cent (10%) affirment que la sance de lecture vise seulement la
comprhension du texte. Lapprenant doit comprendre ce quil lit.
Neuf pour cent (9%) ne rpondent pas cette question.
Item n17 : Si vous devez choisir des textes, quels auteurs franais et /ou
dexpression franaise proposeriez-vous vos apprenants ? Pourquoi ?
Auteur Electa (Pourcentage)Mohamed Dib90%Jules Verne1%Alphonse
Daudet1%Emile Zola47%Victor Hugo19%Albert Camus 17%Mouloud
Feraoun20%Guy de Maupassant15%Rachid Mimouni12%Gustave
Flaubert1%Marcel Pagnol30%Yasmina Khadra2%Rachid Boudjedra1%
Daprs les rponses des enseignants, nous remarquons que, dune part, des
auteurs comme Sartre, Duras, Proust, Molire, Pennac, Stendhal, Vian,
Bendjelloun, Kateb Yacine, Assia Djebar nont pas t cits. Dune autre part,
aucun enseignant ne justifie son choix.
Quelques enseignants citent des crivains franais et/ou dexpression franaise
mais sont incapables de donner un titre de leurs uvres.
Item n 18 : Selon vous, quest-ce quune unit didactique russie ? Pourquoi ?
Quatre-vingt-deux pour cent (82%) des enseignants interrogs pensent quune
unit didactique russie est celle qui amne lapprenant matriser les points de
-
langue pour pouvoir communiquer. Le franais langue trangre privilgie la
communication.
Dix-huit pour cent (18%) seulement estiment quune unit didactique russie doit
amener lapprenant produire un crit allant dans le sens de cette mme unit
didactique et o il applique ce quon lui a appris : lapprenant doit rinvestir le
modle propos.
Item n19 : Que manque-t-il aux units didactiques proposes dans le
programme ?
Tous les enseignants que nous avons interrogs pensent que les units
didactiques proposes dans le programme ne rpondent pas aux attentes des
apprenants et des enseignants : ce sont des units plates, dnues de tout
intrt, manquent de nouveauts et ne tiennent compte ni de la communication
ni de lcriture. Une fois arriv en terminale, voire en 1re anne universitaire et
aprs neuf ou dix ans dapprentissage de la langue franaise, lapprenant
algrien ne sait ni parler, ni lire, ni crire.
Item n 20 : Quentendez-vous par lecture, criture, rcriture ?
Huit pour cent (8%) des enseignants interrogs entendent par lecture, criture,
rcriture, lappropriation des rgles lexicales, morphologiques et syntaxiques
aprs la sance de lecture. Lapprenant devra tre capable de produire un texte
similaire, du mme type que celui quil tudie.
Un pour cent (1%) des enseignants dfinit la notion de lecture, criture,
rcriture comme une rcriture en soi : aucune autre prcision nest donne.
Les autres enseignants, savoir quatre-vingt onze pour cent (91%) ne rpondent
pas cette question. Nous supposons que ces enseignants nont jamais entendu
parler de la notion de lecture-criture-rcriture.
I-3. DE LA DIFFICULTE DECRIRE
-
Selon les cent enseignants interrogs lors de lenqute, un nombre important
dlves montre une dsaffection pour les uvres littraires franaises et/ou
dexpression franaise.
Ces apprenants arabophones lisent mal et sont incapables de restituer le
sens dun texte quils ont lu pendant plusieurs sances : ils ne dpassent pas le
stade du dcodage mot mot, ne possdent pas les stratgies techniques de la
lecture qui leur permettent de reprer certains indices et dmettre des
hypothses de sens sur un texte, ce qui entrave la comprhension globale du
texte et rend leur tche difficile. Pour ces apprenants, la lecture en franais
passe par la traduction : le recours au dictionnaire bilingue (arabe/franais,
franais /arabe) est une ncessit dont ils ne peuvent pas se passer.
De plus, lcriture, selon eux, nest pas moins difficile que la lecture.
Ecrire en franais ncessite la gestion de plusieurs codes : ponctuation, syntaxe,
orthographe, morphologie, vocabulaire, etc. Plac en situation dcriture,
lapprenant algrien prouve des difficults matriser simultanment tous ces
codes. Les mmes enseignants soutiennent que la majorit de leurs apprenants
sont de faibles scripteurs : ils crivent, mais nutilisent pas le texte lu pour
produire, ninvestissent pas et ne sinvestissent pas dans leurs textes. Ils ne se
relisent pas non plus pour percevoir leurs erreurs et les corriger.
Selon ces enseignants, la tche de relecture est pratiquement incomprise des
apprenants : rviser, pour ces apprenants, cest effacer une lettre ou la
remplacer par une autre, non replacer ou ajouter une phrase. Ils ne pensent pas
quon puisse restructurer les phrases dans une tche de relecture. Toute leur
attention est focalise, quand cest le cas, sur les problmes de transcription
graphique et sur les erreurs orthographiques et morphologiques. Rorganiser un
paragraphe, dplacer une phrase, remplacer un connecteur mal employ par un
connecteur pertinent pour assurer un lien logique entre deux paragraphes par
exemple sont des tches trs difficiles : elles dpassent leurs capacits.
-
Ces apprenants se limitent le plus souvent une rvision de surface. Lenqute
mene auprs de ces mmes enseignants montre que les apprenants algriens
du secondaire sont incapables dexprimer leurs ides ou leurs connaissances
lors dune discussion. A cet ge (ce sont pratiquement tous des adolescents), ils
vitent de sexprimer en franais par crainte dtre ridiculiss par leurs
camarades. Ces mmes apprenants communiquent trs peu entre eux et se
posent des questions ayant recours une langue mtisse : le francarabe .
Larabe dialectal et le franais se ctoient lintrieur dune mme phrase.
Parler franais ncessite donc beaucoup dinquitude chez les enseignants
algriens de langue franaise et beaucoup danxit chez les apprenants. Par
ailleurs, les difficults auxquelles fait face lapprenant algrien qui suit des cours
de franais (FLE) ne sont pas seulement linguistiques, le choix des textes
influence aussi la motivation des apprenants et pousse les apprenants ne pas
sengager cognitivement dans les tches de lecture.
I-4. LES UVRES FRANAISES ENCORE IGNOREES Selon les enseignants, les romans franais et francophones dauteurs
algriens et /ou maghrbins sont ignors des apprenants algriens. Ces derniers
ne voient pas lutilit de ces textes littraires en langue trangre quon leur
propose de lire, textes qui ne se rattachent pas leur culture et dans lesquels ils
ne se reconnaissent pas. Comme tout lecteur en langue trangre, ils nont pas
de reprsentations pralables de ce quils vont lire parce quils disposent de peu
dinformations sur la culture franaise. Dpourvus dhorizon dattente qui dpend
du bagage socioculturel du lecteur, les apprenants entrent dans le texte
laveuglette, ce qui provoque un dcrochage par rapport au texte et ses
ressources extrieures.
-
Malgr linsistance des programmes sur la formation dun citoyen fier de son
identit, de son pays et de son histoire, on ne fait pas lire aux apprenants
algriens des textes francophones algriens ou maghrbins, tels que ceux de
Mohammed DIB, Rachid BOUDJEDRA, Rachid MIMOUNI, Yasmina KHADRA,
Tahar BENDJELLOUN, ct des uvres franaises. Ces uvres-l auraient le
mrite de les alimenter dans le travail de construction de leur identit arabe et de
leur appartenance nationale. Au contact des uvres littraires maghrbines
dexpression franaise, les apprenants sinitieraient aux richesses culturelles du
patrimoine culturel de leur pays.
-
CHAPITRE II
CRITERES EXTERNES PRESIDANT AU CHOIX DU TEXTE A EXPLOITER
-
II-1. RECIT OU DIALOGUE ?
II-1-1. Rcit On entend par rcit, dans ce contexte, un texte rapport la troisime personne
du singulier et dans lequel les personnages ninterviennent pas directement.
En voici un exemple :
Jean-Baptiste Grenouille est le personnage principal du roman Le parfum de
Patrick SUSKIND.
Aprs avoir pass plusieurs annes de sa vie vivre seul dans une caverne,
Grenouille, revenu parmi les hommes, se regarde pour la premire fois dans un
miroir.
Ctait la premire fois que quelquun disait monsieur Grenouille. Il savana
vers le miroir et regarda. Jusqu prsent, jamais il ne stait regard dans un
miroir. Il vit en face de lui un monsieur dans un bel habit bleu, avec une chemise
blanche et des bas de soie, et il se tassa instinctivement sur lui-mme, comme il
lavait toujours fait devant de beaux messieurs comme cela. Mais le beau
monsieur se tassa lui aussi, et quand Grenouille se redressa, le monsieur en fit
autant. Alors ils se figrent tous les deux et se regardrent fixement.
Ce qui sidrait le plus Grenouille, ctait davoir lair si incroyablement normal. Le
maquis avait raison : il navait rien de particulier, il ntait pas beau, mais pas
particulirement laid non plus. Il tait un peu court sur pattes, il se tenait de faon
un peu gauche, le visage tait un peu inexpressif, bref, il ressemblait des
milliers dautres gens. Sil descendait dans la rue, personne ne se retournerait
sur son passage. Lui-mme, sil se rencontrait, ne se remarquerait pas []
Et pourtant, voil dix jours peine, les paysans senfuyaient sa vue en
poussant des cris. Il ne se sentait pas alors autrement qu prsent, et prsent,
-
lorsquil fermait les yeux, il ne se sentait pas le moins du monde diffrent de ce
quil tait alors []
Il ouvrit les yeux en plissant les paupires et vit le monsieur du miroir lui rendre
son clin dil : un petit sourire flottait sur ses lvres carmines, comme pour lui
manifester quil ne le trouvait pas antipathique. Et Grenouille lui-mme trouva
que ce monsieur dans le miroir, cette silhouette sans odeur, dguise et
maquille en homme, avait quelque chose ; elle lui sembla en tout cas - pourvu
quon perfectionne le maquillage - quelle pourrait faire quelque effet sur le
monde extrieur, un effet dont Grenouille naurait jamais rv pour lui-mme. Il fit
un petit signe de tte la silhouette et vit quen le lui rendant, elle dilatait
discrtement les narines.
Patrick SUSKIND, Le Parfum,
Editions le Livre de poche.
II-1-2. Dialogue On entend ici par dialogue un texte dans lequel les personnages sont mis
en scne, ils interviennent directement et leurs propos sont rapports tels quels.
En voici un exemple :
- Bonjour ! dit le renard.
- Bonjour ! rpondit poliment le petit princeQui es-tu ? Tu es bien joli.
- Je suis un renard.
- Viens jouer avec moi, lui proposa le petit prince. Je suis tellement triste
- Je ne puis pas jouer avec toi, dit le renard. Je ne suis pas apprivois.
- Ah ! Pardon, fit le petit prince.
Mais aprs rflexion, il ajouta :
- Quest-ce que signifie apprivoiser ?
- Tu nes pas dici, dit le renard. Que cherches-tu ?
- Je cherche les hommes, dit le petit prince. Quest-ce que signifie apprivoiser
? []
-
- Cest une chose trop oublie, dit le renard. a signifie crer des liens
SAINT- EXUPERY, Le Petit Prince.
En principe, le rcit est utilis comme support pour travailler sur lcrit,
parce quil est justement caractristique de lexpression crite, tandis que le
dialogue sera utilis de prfrence pour travailler sur lexpression orale parce
quil prsente diffrents types dintonation.
On notera cependant que le dialogue ne respecte pas toujours les
caractristiques de loral dans la mesure o il nest souvent que la transcription
de lcrit (crit oralis).
II-2. TEXTE LONG OU TEXTE COURT ?
II-2-1. Texte long Voici un texte extrait des Caractres de La Bruyre :
Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes, lil fixe et assur,
les paules larges, lestomac haut, la dmarche ferme et dlibre. Il parle avec
confiance : il fait rpter celui qui lentretient, et il ne gote que mdiocrement
tout ce quil lui dit. Il dploie un ample mouchoir et il se mouche avec grand bruit
; il crache fort et loin, et il ternue fort haut. Il dort le jour, il dort la nuit, et
profondment ; il ronfle en compagnie ; il occupe table et en promenade plus
de place quun autre. Il tient le milieu en se promenant avec ses gaux ; il
sarrte et lon sarrte ; il continue de marcher, et lon marche : tous se rglent
sur lui. Il interrompt, il redresse ceux qui ont la parole : on ne linterrompt pas, on
lcoute aussi longtemps quil veut parler ; on est de son avis, on croit les
nouvelles quil dbite. Sil sassied, vous le voyez senfoncer dans un fauteuil,
croiser les jambes lune sur lautre, froncer le sourcil, abaisser son chapeau sur
-
ses yeux pour ne voir personne, ou le relever ensuite, et dcouvrir son front par
fiert et par audace. Il est enjou, grand rieur, impatient, prsomptueux, colre,
libertin, politique, mystrieux sur les affaires du temps ; il se croit des talents et
de lesprit. Il est riche.
Phdon a les [], il sourit ce que les autres lui disent, il est de leur avis ; il
a les yeux creux, le teint chauff, le corps sec et le visage maigre ; il dort peu,
et dun sommeil fort lger ; il est abstrait, rveur, et il a avec de lesprit lair dun
stupide, il oublie de dire ce quil sait, ou de parler dvnements qui lui sont
connus ; et sil le fait quelquefois, il sen tire mal, il croit peser ceux qui il
parle, il conte brivement, mais froidement ; il ne se fait pas couter, il ne fait
point rire. Il applaudit court, il vole pour leur rendre de petits services. Il est
complaisant, flatteur, empress ; il est mystrieux sur ses affaires, quelquefois
menteur, il est superstitieux, scrupuleux, timide. Il marche doucement et
lgrement, il semble craindre de fouler la terre ; il marche les yeux baisss, et il
nose les lever sur ceux qui passent. Il nest jamais du nombre de ceux qui
forment un cercle pour discourir ; il se met derrire celui qui parle, recueille
furtivement ce qui se dit, et il se retire si on le regarde. Il noccupe point de lieu, il
ne tient point de place ; il va les paules serres, le chapeau abaiss sur les
yeux pour ntre point vu ; il se replie et se renferme dans son manteau ; il ny a
point de rues ni de galeries si embarrasses et si remplies de monde, o il ne
trouve moyen de passer sans effort et de se couler sans tre aperu. Si on le
prie de sasseoir, il se met peine sur le bord dun sige ; il parle bas dans la
conversation, et il articule mal ; libre nanmoins sur les affaires publiques,
chagrin contre le sicle, mdiocrement prvenu des ministres et du ministre. Il
nouvre la bouche que pour rpondre ; il tousse, il se mouche sous son chapeau,
il crache presque sur soi, et il attend quil soit seul pour ternuer, ou, si cela lui
arrive, cest linsu de la compagnie : il nen cote personne ni salut ni
compliments. Il est pauvre.
LA BRUYERE, Les Caractres.
-
Ce texte prsente deux portraits en parallle. Nous ninsisterons pas sur les
difficults dordre linguistique quil prsente.
Sens des termes : estomac (= poitrine), libertin (= libre penseur), abstrait (=
rveur),
politique (= qui aime discuter des vnements politiques).
Catgories grammaticales : colre (employ comme adjectif) et stupide
(employ comme nom).
Ce qui retiendra surtout notre attention, cest que le texte est trop long. En
effet, si lon veut travailler sur la description des personnes,
et cest justement dans cette perspective que le texte est propos, lun des
deux portraits suffit : on aura ainsi le temps dexploiter dune manire complte
toute cette accumulation de traits physiques et moraux.
Travailler sur les deux textes ne peut se justifier que si lon veut sintresser au
style de lauteur : on pourra alors, par comparaison, tudier les effets obtenus
par convergence ou par divergence des deux portraits.
II-2-2. Texte court Voici un texte propos dans le cadre de lunit sur le rcit dans
Le franais au lyce, 1re anne secondaire, Editions Libris, Alger, 1999 :
Les nigmes
Il tait une fois un homme qui vivait lentre dun village bti au sommet
dune colline. Il stait rendu clbre par sa vive intelligence et la facilit avec
laquelle il rsolvait les nigmes. Cest ainsi quil parvint inculquer son fils,
alors g de dix ans, le got des devinettes.
Ce dernier promettait beaucoup, car il donnait limpression de marcher sur les
traces de son pre. Le brave homme talait partout sa fiert [] La mre,
-
fatigue dentendre sans cesse les mmes rflexions, lui rpliqua un jour : Mes
frres sont plus intelligents que notre petit, et pourtant je nen fais pas cas.
Daprs Tahar OUSSEDIK Contes populaires, SNED (1985).
Ce texte est court mais cela constitue, ici, un aspect ngatif et non pas une
qualit : le texte est en fait tronqu, il est incomplet aussi bien en ce qui concerne
le sens (lhistoire nest pas finie, on nen connat pas la suite ; on ne sait mme
pas pourquoi on a donn ce titre - Les nigmes - au texte) quen ce qui
concerne la structure (on na pas un schma narratif complet).
II-2-3. Conclusion Pour une sance de comprhension de lcrit, il faut opter pour un texte court
pour pouvoir lexploiter correctement dans le temps imparti la sance. Mais il
faut veiller ce que ce texte prsente une certaine unit, pour que les
apprenants aient une ide complte de la structure du modle textuel et quils
dcouvrent une histoire complte, ce qui sera plus motivant et plus incitant pour
eux.
-
II-3. TEXTE LITTERAIRE OU DOCUMENT AUTHENTIQUE ? On peut utiliser trois sortes de supports dans le cadre de la comprhension de
lcrit.
II-3-1. Texte littraire Le texte littraire est une notion vivante. Elle prend de la ralit pour revenir
sur son espace ferm.
Il peut tre dun autre franais (comme BALZAC, MOLIERE, STENDHAL,
FLAUBERT, MALRAUX, CAMUS, Anatole FRANCE) ou dexpression franaise
(Mohammed DIB, KATEB Yacine, Tahar BENDJELLOUN, Assia DJEBAR) et
consiste en un extrait de roman, un conte, un pome ou un extrait dune pice de
thtre.
Le texte littraire nest pas seulement un phnomne de langage, il est aussi un
phnomne de voyages, de rencontres, de dcouvertes, dvasion, dexotisme.
Cest beaucoup plus une aventure quune affaire de lecture .
Par opposition aux autres textes, le texte littraire prsente une certaine
spcificit, qui, selon P. MACHERY, rside dans son autonomie qui est elle
seule sa propre rgle dans la mesure o elle se donne ses limites en les
construisant. Ouvert toutes les possibilits, il offre des lectures plurielles et se
prte plusieurs interprtations alors que le texte non littraire prsente un seul
sens, et avant dtre lu par personne, il a toujours t lu par tous. (1)
Nous ajouterons que cest dans la perspective du beau que se situera la
dfinition fonctionnelle du texte littraire : un langage systmatique qui devient
autotlique (qui ne trouve pas sa justification en dehors de lui-mme).
La notion du beau renvoie laccomplissement en soi (avant, elle renvoyait
lutilit puis cette dernire fut remplace par lesthtique, la forme, la structure).
-
Cette dfinition permet de rendre compte de plusieurs uvres qualifies
habituellement de littraires : elles se trouvent en rapport daffinit mutuelle mais
non dimplication. Nous restons dans l-peu-prs.
Lopposition entre littraire et non littraire cde la place une typologie des
discours. Ce dernier, par sa multiplicit, permet lapparition des genres
littraires.
Lusage littraire est donc autotlique, opaque, connotatif, ambigu. Quant
lusage scientifique, il est transparent, univoque, dnotatif.
Voici un exemple :
La rentre
(Souvenirs denfance)
Je vais vous dire ce que me rappellent, tous les ans, le ciel agit de
lautomne et les feuilles qui jaunissent dans les arbres qui frissonnent ; je vais
vous dire ce que je vois quand je traverse le Luxembourg dans les premiers jours
doctobre, alors quil est un peu triste et plus beau que jamais, car cest le temps
o les feuilles tombent une une sur les blanches paules des statues.
Ce que je vois alors dans ce jardin, cest un petit bonhomme qui, les mains dans
ses poches et sa gibecire au dos, sen va au collge en sautillant comme un
moineau. Ma pense seule le voit, car ce petit bonhomme est une ombre, cest
lombre du moi que jtais il y a vingt-cinq ans. Vraiment, il mintresse ce petit,
quand il existait, je ne me souciais gure de lui ; mais maintenant quil nest plus,
je laime bien. Il tait bien tourdi, mais il ntait pas mchant ; et je dois lui
rendre cette justice, quil ne ma pas laiss un seul mauvais souvenir : il est bien
naturel que je le regrette ; il est bien naturel que je le voie en pense, et que mon
esprit samuse ranimer son souvenir.
Il y a vingt-cinq ans pareille poque, il traversait, avant huit heures, ce beau
jardin pour aller en classe. Il avait le cur un peu serr : ctait la rentre.
-
Pourtant il trottait, ses livres sur son dos et sa toupie dans sa poche. Lide de
revoir ses camarades lui remettait de la joie au cur : il avait tant de choses
dire et entendre. Et puis cest si bon de retrouver des camarades cest ainsi
quil traversait le Luxembourg dans lair frais du matin. Tout ce quil voyait alors,
je le vois aujourdhui. Cest le mme ciel et la mme terre, lui seul nest plus.
Cest pourquoi, mesure que je vieillis, je mintresse de plus en plus la
rentre des classes.
Anatole FRANCE (uvres, Calmann-Levy, Edit.)
II-3-2. Document authentique Cest un texte que lon peut trouver dans lenvironnement de lapprenant, qui na
pas t conu pour tre exploit en classe et dont lutilisation des fins
didactiques est assez rcente. Entrent dans cette catgorie : les articles de
journaux, les lettres, les textes publicitaires, les affiches, les tracts, les recettes
de cuisine, les rglements de toutes sortes, les prospectus divers (mdicaments,
produits dusage courant divers), les modes demploi, etc.
En voici un exemple : Prospectus distribu par les assurances pour sensibiliser
les conducteurs de deux-roues aux risques daccident (document extrait de
pratique de la communication, Editions Larousse).
Votre voiture est puissante mais vous tes fragile.
Le conducteur dun deux-roues est trs vulnrable :
Aucune carrosserie ne le protge.
Il est toujours - et surtout en cas de manuvre brusque - confront aux lois de
lquilibre.
-
Il prouve une dangereuse sensation de facilit qui le pousse couper les
virages en rase campagne et se faufiler au travers des encombrements dans
les villes.
Que faire ?
Indpendamment des mesures que les pouvoirs publics devaient mettre en
uvre (multiplication des pistes rserves aux deux-roues, lgislation trs ferme
quant aux normes de construction, priorit accorde une vritable formation
pralable), lexamen des causes principales daccident montre que les
conducteurs de deux roues doivent veiller particulirement lobservation des
rgles suivantes :
respecter les stops, les feux, les rgles de priorit ; modrer la vitesse ; ne jamais doubler droite ; mettre toujours le casque (mme si le port nen est pas obligatoire pour les cyclomotoristes).
- se mfier de la proximit latrale dautres vhicules ;
- rouler feux allums pour tre toujours vus.
Nous notons les caractres de dimensions diffrentes, lemploi du gras et les
puces , choses que lon ne trouve gnralement pas dans le texte littraire.
II-3-3.Texte didactique Cest un texte qui a t fabriqu par un enseignant ou lauteur dun manuel
pour rpondre un besoin prcis dans la mesure o lon ne trouve pas toujours
un texte bien adapt pour travailler sur une notion donne.
II-3-4. Conclusion
-
Dans les manuels de franais actuels, on ne trouve que des textes
authentiques ou des textes littraires. En effet, les textes littraires conviennent
bien pour travailler sur le rcit ou la description, tandis que les documents
authentiques sont plus indiqus pour travailler sur dautres types textuels comme
la prescription ou linjonction. Les textes didactiques par contre ne se retrouvent
pratiquement que dans les manuels destins aux dbutants.
Cest donc en fonction du type de support dont on a besoin que lon choisira le
type de texte exploiter. Lenseignant aura donc combiner textes littraires et
documents authentiques pour rpondre aux diffrentes situations impliques
pour les programmes et pour donner loccasion aux apprenants de frquenter les
diffrents types de supports.
II-4. TEXTE DE LITTERATURE FRANAISE (OU DEXPRESSION FRANAISE) OU TEXTE TRADUIT ?
II-4-1. Texte originel en franais Un auteur franais ou dexpression franaise est le plus indiqu pour donner un
modle de langue des apprenants qui tudient le franais. En effet, son
sentiment linguistique de locuteur natif (ou assimil, pour un auteur dexpression
franaise qui manipule le franais depuis sa plus tendre enfance et qui a t
nourri de culture franaise) lui permet de trouver spontanment les tournures
adquates et dviter toutes les constructions, tous les emplois quil ne sentirait
pas comme typiquement franais.
II-4-2. Texte traduit Un texte traduit prsente un double inconvnient :
-
Le traducteur na peut-tre pas traduit exactement la pense de lauteur. En
effet, le texte originel peut prter ambigut et le traducteur pourra opter pour
un sens autre que celui voulu par lauteur.
Le traducteur peut tre amen utiliser des structures grammaticales pas tout
fait franaises parce quil aura eu des difficults rendre un passage et quil se
sera laiss, malgr lui, traduire mot mot, ce qui ne correspond pas
ncessairement aux normes de la langue franaise.
En ce qui nous concerne plus directement, vaut-il mieux utiliser un texte dauteur
algrien ou un texte dauteur franais ?
Pour rpondre cette question, on en posera une autre : en quoi un auteur
algrien est-il plus accessible quun auteur franais ?
En quoi des auteurs tels que Mohammed Dib ou Yasmina Khadra par exemple
sont-ils dun abord plus facile quAlbert Camus ou Andr Gide ?
Il faut en effet tenir compte dun facteur psychologique important : si lcrivain
franais crit dans sa langue maternelle (et donc dune manire plus spontane),
lcrivain algrien dexpression franaise crit dans une langue demprunt et voil
ce qui se produit :
Ou bien il se croit oblig de montrer quil possde le franais et sera amen
se guider un peu, ce qui aura pour consquence de rendre son discours un peu
artificiel parce que ce sera plus un exercice de style quun vritable travail de
cration littraire.
Ou bien il introduira dans son discours des calques , cest--dire des
expressions traduites telles que de larabe ou du berbre. Lcrivain le fera en
toute conscience, pour donner un certain cachet son style, mais lapprenant
ne le saura pas et il risquera de reprendre son compte ces expressions ou ces
structures, ce qui se traduira par des interfrences qui seront sanctionnes
par lenseignant.
-
Le seul aspect positif dans lutilisation des textes maghrbins et, partant,
algriens, cest quils ne poseront pas de problmes au niveau culturel, dans la
mesure o ils traiteront des problmes plus ou moins connus des apprenants.
Du coup :
[], ds les annes 1950-1960, les grands crivains algriens ont t
confronts au problmes de lcriture. Forcs dutiliser une langue que lhistoire
leur a impose, ils ont pris conscience que celle-ci tait drimante leur projet
de signifier le monde. Aussi, vont-ils la violenter et la stigmatiser, laissant en
elle des traces propres leur culture. En sappropriant la langue franaise,
lcrivain algrien la transformera, en effet, par la violence, la subvertira. Et, de
fait, il prendra du champ, en introduisant dans cette langue de nouvelles
structures et des musiques indites, tel point quun lecteur franais serait
tranger dans sa propre langue . (2)
Mais on peut aussi considrer cet aspect comme ngatif puisque cela ne
permet pas dlargir les horizons des apprenants, alors que nous avons signal
prcdemment que ctait un objectif important de la comprhension de lcrit.
Aprs avoir examin les critres externes prsidant au choix du texte exploiter,
nous allons tudier dans ce chapitre les critres internes qui ncessitent une
analyse approfondie du texte.
-
CHAPITRE III
CRITERES INTERNES ET ANALYSE DE TEXTES
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III-1. TEXTE-PRETEXTE OU TEXTE-MODELE ?
III-1-1. Texte-prtexte Cest un support que lenseignant utilisait dans les annes 1960-1970,
jusquaux annes 1980, lorsque lon parlait encore de lecture explique . A
lpoque, la sance de comprhension de lcrit ne sinscrivait pas dans une
perspective donne, comme cest le cas actuellement. Lobjectif tait de
dvelopper laptitude des lves la comprhension des textes ; le professeur
pouvait donc choisir nimporte quel texte pour en exploiter le contenu smantique
; il ntait soumis aucune contrainte.
En voici un exemple, pris du Recueil de textes et techniques dexpression dun
manuel de franais conu pour la deuxime anne secondaire (2.AS), I.P.N.,
Alger 1985.
La grand-mre
Elle se disait que ses enfants et petits-enfants laimaient bien, mais quelle
leur semblait dun autre ge, dpasse, ne comprenant au fond pas grand-
chose, et que tout ce quelle pourrait dire et faire maintenant ne servirait rien.
Elle avait t jeune elle aussi et se le rappelait ; mais elle avait limpression
quautour delle on ne parvenait pas le croire : elle tait pour tout le monde une
vieille de toujours. Or, elle avait dans, rv, dsir, attendu beaucoup de
choses, et pourvu quelle ne se regardt pas dans une glace, il ne lui semblait
pas quelle et tellement chang. On ne voyait delle que ce visage rid, ces
lunettes toujours de travers quelle retenait par un lastique, cette dmarche un
peu cahotante, toute la laideur de la vieillesse. Bien mieux, elle avait limpression
que sa prsence gnait. Elle remarquait quon la recevait volontiers chez lun de
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ses enfants, mais personne ne la retenait au bout dune semaine si elle parlait de
repartir. En effet, quel plaisir recevoir une vieille ?
Sans doute, se disait-elle, est-ce une bonne prparation au dpart dfinitif, et
mme une grce de Dieu : se sentir de trop partout. Elle naurait donc presque
plus rien quitter mais elle ne pouvait se dfendre dtre triste en songeant
cela.
Jos CABABANIS, Les cartes du temps.
III-1-1-1. Comprhension globale 1) Comment ses enfants et petits-enfants la voient-ils ?
2) Accepte-t-elle facilement limage quils lui renvoient ?
3) A-t-elle de tout temps t telle quils la voient actuellement ?
4) Comment sa prsence est-elle ressentie ? Pourquoi ?
5) Quelle conclusion en tire-t-elle ?
III-1-1-2. Comprhension approfondie 1) Comment la grand-mre est-elle actuellement ? 2) Comment tait-elle dans le pass ?
3) Quelles sont ses relations avec les siens ?
4) Comment se console-t-elle ? Mais est-ce vraiment une consolation ?
Pourquoi ?
5) Que pensez-vous de la situation des vieux dans le monde urbain daujourdhui
?
III-1-1-3. Exploitation linguistique 1) Morphosyntaxe : tude de la compltive. 2) Lexique : tude du champ lexical en rapport avec la vieillesse.
3) Prolongement crit :
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- Quelle place occupe votre grand-pre ou votre grand- mre dans votre famille ?
- Quel est votre comportement avec eux ? Etes-vous heureux de les avoir la
maison ? Pourquoi ?
On aura not que lexploitation propose pour ce texte ne sinscrit dans
aucune approche mthodologique pralablement dfinie : les autres affirment
seulement quils ont essay de prendre en charge les proccupations
linguistiques dune part, et, dautre part, le problme de la motivation, facteur
psychologique dune relle importance. Plus loin, ils ajoutent que llve et le
professeur trouveront dans ce livre :
- des textes dont la thmatique essaie de rpondre aux proccupations de
ladolescent ;
- des questionnaires dtude et de comprhension proposs titre indicatif ;
- des exercices de langue susceptibles denrichir ou de consolider les
mcanismes fondamentaux de la langue.
On laura constat : il ny a aucune stratgie dans cette dmarche ; peu
importe le texte, pourvu quil donne loccasion aux lves de se livrer des
activits de comprhension et dexpression.
Actuellement, le texte-prtexte est utilis uniquement comme cadre intgrateur
de notions linguistiques que lon veut faire fonctionner en contexte, pour viter de
revenir aux pratiques traditionnelles qui consistaient travailler sur des phrases
isoles.
Ce faisant, on se place dans une double perspective : celle de la grammaire de
texte et celle de lapproche communicative.
III-1-2. Texte modle
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Cest un texte qui illustre bien les caractristiques dun modle textuel parmi
ceux qui figurent au programme (narratif, descriptif, explicatif, argumentatif,
etc.).
En voici un exemple :
Pour la premire fois la vieille Rahma dcouvrait une femme bien diffrente
de celles du village. Elle voyait se dresser devant elle une personnalit mrie par
les preuves sous les apparences de la jeune fille nave. Rahma tait comme
fascine. Sur les lvres flottait un mystre qui attirait. La bouche sduisante, les
dents rgulirement plantes, clatantes, exprimaient la joie de vivre. De longs
cils, des sourcils bien fournis aux arcs parfaits, accentuaient le charme du regard
: ils rehaussaient la beaut du visage autant quils dcelaient la vigueur du
caractre.
Le mouvement des mains sharmonisait avec les paroles et leur donnait plus de
chaleur. La tresse, abondante, souple, dans une courbe gracieuse, retombait sur
la ceinture blanche .Et les fleurs damandiers sur la robe apportaient une note
de printemps.
Abdelhamid BENHADOUGA, La fin dhier.
Ce texte peut tre utilis pour travailler sur la description des personnages (le
portrait). En cela, il constitue un modle que lon peut imiter dans son
organisation.
III-1-3. Conclusion Le choix sera donc en fonction de lobjectif vis :
- si lon doit travailler dans une perspective mthodologique, dans une
perspective dtermine, on optera pour un texte-modle ;
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- si lon doit travailler dans une perspective purement linguistique, sans axe ni
critres pralablement dfinis, on optera pour un texte-prtexte.
III-2.TEXTE CLASSIQUE OU TEXTE MODERNE ?
III-2-1.Texte classique Nous entendons par l un texte de littrature franaise des XVIe, XVIIe et
XVIIIe sicles, qui na pas t modernis , cest--dire quil na pas t
rcrit en franais contemporain ou standardis.
En voici un exemple :
Ce discours me surprend, il faut avouer.
Je ne vous cherchais pas pour lentendre louer.
Quoi ? Pour vous confier la douleur qui maccable,
A peine, je drobe un moment favorable,
Et ce moment si cher, Madame, est consum.
A louer lennemi dont je suis opprim.
Qui vous rend vous-mme, en un jour, si contraire ?
Quoi ! Mme vos regards ont appris se taire ?
Que vois-je ? Vous craignez de rencontrer mes yeux ?
Nron vous plairait-il ? Vous serais-je odieux ?
RACINE, Britannicus, acte II, scne 6 (1669).
Que remarque-t-on la lecture de ce texte ?
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La langue utilise prsente certaines diffrences par rapport la langue
daujourdhui.
? Au plan du vocabulaire :
- peine (ligne 4) : avec peine ;
- opprim (ligne 6): dont on subit les mfaits ;
- qui (ligne 7) : qui est-ce qui ;
- contraire (ligne 7) : diffrente ;
- odieux (ligne 10) : hassable.
? Au plan de la syntaxe :
- Il faut avouer (ligne 1) : il faut lavouer ;
- dont (ligne 6) : par qui, vous rend vous-mme ;
- si contraire (ligne 7) : vous rend si contraire vous-mme.
III-2-2. Texte moderne Nous entendons par l un texte des annes 1950, crit au XIXe ou au XXe
sicle.
En voici un exemple :
Eugne se trouva seul face face avec Vautrin .
Je suis bien que vous y arriviez, lui dit cet homme en gardant un
imperturbable sang-froid. Mais coutez ! Jai de la dlicatesse tout comme un
autre. Ne vous dcidez pas dans ce moment, vous ntes pas dans votre assiette
ordinaire. Vous avez des dettes. Je ne veux pas que ce soit la passion, le
dsespoir, mais la raison qui vous dtermine venir moi. Peut-tre vous faut-il
un millier dcus. Tenez, le voulez vous ?
Ce dmon prit dans sa poche un portefeuille et en tira trois billets de banque
quil fit papilloter aux yeux de ltudiant. Eugne tait dans la plus cruelle des
situations. Il devait au marquis de Juda et au comte de Trailles cent louis perdus
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sur parole. Il ne les avait pas et nosait aller passer la soire chez Mme de
Restau-u, o il tait attendu. Ctait une de ces soires sans crmonie o lon
mange des petits gteaux, o lon boit du th, mais o lon peut perdre six mille
francs au whist.
Honor de BALZAC, Le Pre Goriot
Quand on lit ce texte, on remarque que, bien quil ait t crit en 1834, le
vocabulaire et la syntaxe nen sont pas tellement diffrents de ce que lon peut
voir dans la langue actuelle.
III-2-3. Conclusion Pour lenseignement du franais langue trangre (FLE), le texte classique est
viter pour deux raisons essentielles :
1) Il prsente des particularits linguistiques qui peuvent gner les apprenants
dans la mesure o il sagit dacceptions ou de tournures qui ne sont plus en
usage aujourdhui. On va donc prsenter lapprenant des mots et des
structures quil ne pourra pas rutiliser dans ses productions, cela reviendrait en
fait encombrer son esprit inutilement ;
2) il traite des thmes qui ne sont plus dactualit et qui ne sont donc pas
susceptibles dintresser les apprenants.
Le texte moderne, par contre, fait usage dune langue que lapprenant peut
rutiliser telle quelle et traite des thmes beaucoup plus en rapport avec ses
proccupations (les proccupations de lapprenant) : notion didentification.
Nous noterons cependant que le texte classique prsente un aspect positif qui
est denrichir la culture littraire de lapprenant et de lui permettre de prendre
connaissance duvres marquantes de la littrature franaise.
A ce titre, et sans en faire un usage trop frquent, nous pouvons prsenter aux
apprenants quelques textes classiques au cours de lanne, en prenant soin de
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choisir les moins marqus cest--dire ceux dont la langue se rapproche le plus
de celle daujourdhui.
En voici un exemple :
Le narrateur voque ses souvenirs denfance.
Aprs le dner, hlas, jtais bientt oblig de quitter maman qui restait
causer avec les autres au jardin sil faisait beau, dans le petit salon o tout le
monde se retirait sil faisait mauvais. Tout le monde, sauf ma grand-mre qui
trouvait que cest une piti de rester enferm la campagne et qui avait
dincessantes discussions avec mon pre, les jours de trop grande pluie, parce
quil menvoyait lire dans ma chambre au lieu de rester dehors. Ce nest pas
comme cela que vous le rendrez robuste et nergique, disait-elle tristement,
surtout ce petit qui a tant besoin de prendre des forces et de la volont.
Mon pre haussait les paules et il examinait le baromtre, car il aimait la
mtorologie, pendant que ma mre, vitant de faire du bruit pour ne pas le
troubler, le regardait avec un respect attendri, mais pas trop fixement pour ne
pas chercher percer le mystre de ses supriorits. Mais ma grand-mre, elle,
par tous les temps, mme quand la pluie faisait rage et que Franoise avait
prcipitamment rentr les prcieux fauteuils dosier de peur quils ne fussent
mouills, on la voyait dans le jardin vide et fouett par laverse, relevant ses
mches dsordonnes et grises pour que son front simbibt mieux de la
salubrit du vent et de la pluie. Elle disait : Enfin, on respire !
Marcel PROUST (1872-1922) :
A la recherche du temps perdu,
Du ct de chez Swann (1913).
III-3.TEXTE ORIGINEL OU ADAPTE ?
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III-3-1. Texte originel Un texte originel est un texte que lon reprend tel quil a t crit par son auteur,
sans y apporter aucune modification, ni dans le fond dans la forme.
En voici un exemple :
Le fil de laurore ne faisait quapparatre quOmar apportait dj la laine
achete Socq El-G. [] Le bonheur de ces aubes tendres, rayonnantes, la
fracheur blouie, le dchirait comme une charde.
Il commenait tout de suite dvider les cheveaux. Puis il allait aux
commissions pour les ouvriers. Il se sentait moins sombre et triste ; les
conversations dsabuses des tisserands, il les coutait de loin, dans un demi
engourdissement. Il courait ensuite jusqu Bab Zir, chez Mahi Bouanane, pour y
prendre un couffin et des consignes. Il avait la charge de faire le march du
patron. Mais sa mission ntait jamais remplie selon les dsirs de dame
Bouanane ; il coutait religieusement les remontrances de celle-ci.
Pour aider le vieux Skali que la snilit rendait, certains jours, impropre tout
travail, il embobinait de la chane des Trara, tnue comme des cheveux dange.
Un peu plus tard, il portait de la laine au teinturier et len rapportait sitt que
lhomme la retirait de son chaudron noir.
Sacquittant tant bien que mal des mille et une corves que lon requrait de lui, il
narrivait satisfaire personne. Toujours quelquun le poursuivait de ses insultes,
le tanait.
Quon linjurie ! Bah, il sy est habitu ; ce dont il ne veut pas, ce sont les coups
de poing, les navettes quon lui envoie la tte. Si, daventure, il lui arrivait
dembrouiller un cheveau, tous les tisserands de leurs mtiers lui envoyaient
des jets de salive.
Mohammed DIB, Le mtier tisser.
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III-3-2. Texte adapt Cest un texte qui a t retouch par lenseignant pour des raisons
pdagogiques Cest un texte qui a subi des transformations. Ces modifications
portent sur le vocabulaire (des mots sont remplacs par dautres), sur la syntaxe
(des phrases sont reconstruites) et mme sur la structure du texte (des passages
entiers sont supprims ou ajouts), et elles sont justifies par le dsir de rendre
le texte plus abordable .
Quand le texte est adapt, cest signal par la mention suivante : Daprs ,
qui prcde lindication du nom de lauteur.
En voici un exemple, cest en fait le texte originel prcdent qui a t adapt (cf.
III-3-1) :
Le soleil se levait peine ; dj Omar apportait la laine quil avait achete la
veille au souk. Il commenait tout de suite dvider les cheveaux puis il faisait
les commissions pour les ouvriers.
Il courait ensuite jusqu Bab Zir chez Mahi Bouanane, pour y prendre un couffin
; en effet, ctait lui qui tait charg de faire le march du patron mais dame
Bouanane ntait jamais contente : les lgumes ntaient pas frais, la viande tait
trop grasse, il avait oubli de porter le pain au boulanger [] Il coutait sans
rpondre, en baissant la tte, les svres reproches de dame Bouanane.
Il y avait dans latelier un vieil ouvrier, que lge rendait, certains jours, incapable
de travailler. Pour laider, Omar embobinait des fils fins comme les cheveux ; les
faibles yeux du vieillard narrivaient pas les distinguer. Un peu plus tard, il
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portait de la laine au teinturier et len rapportait ds que lhomme la retirait de son
chaudron noir.
Chacun lui donnait des ordres ; il essayait de rendre service tout le monde ;
mais il narrivait satisfaire personne.
Il y avait toujours quelquun pour lui lancer des reproches. Bah ! Il sy tait
habitu ; ce dont il ne voulait pas, ctaient les coups de poing, les navettes
quon lui envoyait la tte.
Si par hasard, il embrouillait un cheveau, tous les tisserands, de leurs mtiers,
le grondaient vivement.
(Texte extrait du manuel de franais, 5e et 6e AF, IPN, Alger)
Nous noterons quil sagit l pratiquement dun autre texte, puisquil ne
subsiste de loriginel que les passages souligns. En effet, certains mots ont t
remplacs par dautres, certains passages ont t supprims et dautres ont t
rajouts ; si les deux premires oprations peuvent se concevoir (mots difficiles,
passages non ncessaires la comprhension du texte), nous pouvons, par
contre, nous interroger sur lopportunit de laddition de passages.
Le rsultat de cette adaptation, cest que lon a compltement dnatur le texte
de lauteur : le texte obtenu nest plus un texte de Mohammed Dib.
Nous pouvons donc nous demander quel peut tre lintrt de telles pratiques,
que rien ne peut justifier sur le plan pdagogique, car ou bien le texte originel
correspond lusage que lon veut en faire (dailleurs, rien nempche dexpliquer
les mots difficiles en notes) ou bien on en cherche un autre, et lon a toujours les
ressources de fabriquer un texte pour la circonstance ; cest ce que font de
nombreux enseignants, surtout pendant les premires annes de
lapprentissage.
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Voici un exemple de texte fabriqu (nous dirons aussi, texte didactique ) :
Monsieur le chef de personnel ,
Comme vous me le demandez par votre lettre du 20 mars, je mempresse de
vous donner les renseignements me concernant.
Je travaille actuellement dans lunit de production Batimtal o joccupe le poste
de secrtaire de direction du service commercial, en relation constante avec les
clients et les fournisseurs. Je mintresse beaucoup aux problmes du btiment ;
je me permets de vous prciser que je suis seconde par une dactylographe et
que jai lentire responsabilit du secrtariat.
Du fait de la rcente nomination de mon mari Mostaganem, je dois envisager
de quitter Alger ; jaimerais nanmoins que mon exprience me soit utile dans
mon nouvel emploi.
Cest pourquoi je souhaite vivement quil vous soit possible de retenir ma
candidature.
Malika MOKHTAR
Texte extrait de Le franais au lyce,
1re A.S, Editions Libris, ALGER, 1999.
Ce texte a t fabriqu pour donner aux apprenants un modle de lettre.
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III-3-3. Conclusion Le texte originel est gnralement un texte riche, que lon peut exploiter sur
diffrents plans ; il donne une ide exacte du style de lauteur, de sa sensibilit,
de la langue quil utilise.
Le texte adapt trahit la pense et le style de lauteur, son utilisation ne se
justifie en aucune faon.
Si, pour un raison ou pour une autre, on ne peut pas utiliser un texte originel, il
vaut encore mieux fabriquer un texte qui convienne la situation.
III-4. TEXTE TYPE OU VARIANTE ?
III-4-1. Texte type Nous entendons par l un texte qui comporte les principales caractristiques du
modle textuel tudi. Ce texte donnera aux apprenants un aperu complet de la
structure de ce modle. En voici un exemple :
La fleur aux mille couleurs
Il y a bien longtemps, un prince nomm David, charmant et valeureux, tait
amoureux dune belle princesse. Le roi, pre de la princesse dsirait pour gendre
et successeur un prince parfait. Il fit savoir que les prtendants la main de sa
fille devraient, pour lobtenir, rapporter la fleur aux mille couleurs de larc-en-ciel.
Un beau matin, le prince dcida alors de partir la recherche de la fleur
merveilleuse.
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Deux autres princes prirent la mme rsolution. Les trois prtendants
empruntrent trois chemins diffrents. Le premier se noya en traversant un
fleuve. Le second fut dvor par un tigre.
Sur son chemin, Davi