velmans, tania, le dessin à byzance

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  • 7/25/2019 VELMANS, Tania, Le Dessin Byzance

    1/35

    Monuments et mmoires de laFondation Eugne Piot

    Le dessin ByzanceMadame Tania Velmans

    Citer ce document Cite this document :

    Velmans Tania. Le dessin Byzance. In: Monuments et mmoires de la Fondation Eugne Piot, tome 59, 1974. pp. 137-170 ;

    http://www.persee.fr/doc/piot_1148-6023_1974_num_59_1_1545

    Document gnr le 20/05/2016

    http://www.persee.fr/collection/piothttp://www.persee.fr/collection/piothttp://www.persee.fr/doc/piot_1148-6023_1974_num_59_1_1545http://www.persee.fr/author/auteur_piot_669http://www.persee.fr/doc/piot_1148-6023_1974_num_59_1_1545http://www.persee.fr/doc/piot_1148-6023_1974_num_59_1_1545http://www.persee.fr/author/auteur_piot_669http://www.persee.fr/doc/piot_1148-6023_1974_num_59_1_1545http://www.persee.fr/collection/piothttp://www.persee.fr/collection/piothttp://www.persee.fr/
  • 7/25/2019 VELMANS, Tania, Le Dessin Byzance

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    LE DESSIN BYZ NCE

    Les

    artistes

    byzantins se sont

    servis

    de

    trs

    nombreuses techniques. Toutes

    sont

    actuellement

    bien

    connues

    et

    ont fait

    l'objet de

    nombreuses

    tudes. Il en

    reste une,

    dont

    il

    n'a jamais

    t

    question

    autrement

    que d'une

    faon marginale :

    le dessin.

    On pourrait

    s'tonner de cet

    oubli en

    songeant

    que

    l'histoire de

    l'art

    occidental fait une place importante au

    dessin

    qu'il soit anglo-saxon, carolingien,

    ottonien,

    roman,

    sans

    parler

    de celui trs tudi du quattrocento en Italie.

    Il

    s'explique

    pourtant.

    Les dessins byzantins

    connus sont

    peu nombreux, et

    se

    prsentent presque toujours sous forme d'esquisses qui apparaissent

    travers

    la couleur

    caille.

    Dans

    les

    rares

    cas

    o

    les

    dessins existent pour eux-mmes,

    il s'agit

    d'un

    art

    assez

    discutable quant

    sa qualit. Deux

    manuscrits indits

    (1)

    sont

    pourtant en

    mesure

    de

    montrer que

    des

    dessins

    de trs belle qualit, qui

    n'taient

    pas destins

    servir de support

    la couleur,

    ont dcor certains

    manuscrits grecs. Tous deux se trouvent

    la

    Bibliothque du Magdalen

    College Oxford. Le premier est de loin le plus important.

    Il faut reconnatre que la

    technique du

    dessin

    (indpendant

    de la couleur)

    n'tait certainement pas rpandue

    Byzance.

    Fait surprenant,

    lorsqu'on pense

    que la

    plupart

    des divers

    styles

    de l'art byzantin ont t des

    styles

    minemment

    graphiques, o l'expressivit de

    l'image

    dpendait de

    la

    ligne rythmique, o les

    contours

    fortement

    appuys

    dcoupaient

    personnages

    et

    objets,

    et

    o

    les

    plis

    et le model taient rarement raliss

    par

    des

    moyens

    picturaux. Nous

    sommes donc en prsence d'une peinture

    qui

    est en

    grande partie graphique,

    mais ct de laquelle on ne trouve pas de dessins indpendants.

    Ce

    phnomne,

    premire vue trange, s'explique facilement si l'on tient compte

    du got du

    luxe

    (1) Nous

    remercions M. O.

    Pcht

    de nous

    avoir autoris, par l' intermdiaire

    de M. A.

    Grabar,

    publier ses

    photographies

    de certaines

    miniatures

    du codex

    grec

    3 du

    Magd.

    College.

    Les autres

    ont t

    excutes pour nous

    par

    la Bodleian

    Library lorsque

    nous

    y

    avons tudi ce codex.

  • 7/25/2019 VELMANS, Tania, Le Dessin Byzance

    3/35

    138

    MONUMENTS

    PIOT

    du Byzantin, de

    l'attrait

    qu'exeraient sur

    lui les

    couleurs

    clatantes

    (mosaque,

    mail) et les

    matires

    prcieuses. D'autre part,

    l'art

    tait

    Byzance une

    faon

    de

    glorifier

    le

    Christ,

    les

    saints, l'empereur,

    de

    les

    magnifier

    et

    de

    les faire

    apparatre, si possible, dans un monde irradi de

    lumire.

    Gomment le dessin

    aurait-il pu

    avant les

    innombrables

    tapes successives qui, en

    Occident,

    mnent

    Durer,

    puis

    Rembrandt

    rendre compte de cette

    lumire

    blouissante

    laquelle

    on

    demandait

    sans

    doute de produire

    sur

    le

    spectateur

    un effet

    analogue

    celui du

    rutilement

    d'or qui

    accompagnait

    l'apparition de l'empereur

    dans les grandes crmonies auliques.

    Nous examinerons d'abord trs rapidement

    des miniatures peintes

    o

    le

    dessin est

    beaucoup

    plus important

    que

    la couleur,

    pour

    nous arrter ensuite

    sur

    des

    dessins

    lgrement colors,

    puis sur

    les esquisses destines tre

    couvertes

    de

    peintures,

    et

    enfin sur

    des

    dessins

    excuts

    pour eux-mmes.

    Les peintures

    que

    l'on

    pourrait

    appeler dessines sont nombreuses. Il

    s'agit l d'un style graphique

    outrance,

    o la ligne est absolument souveraine

    et dtruit toute apparence

    de volume

    et

    de

    perspective. Elle est

    tel

    point

    envahissante qu'il est parfois difficile de comprendre ce que vient y ajouter la

    couleur. Un bon

    exemple

    de ce genre de peintures serait le manuscrit du xe sicle

    de

    la Bibliothque

    de l'Universit de Leipzig, codex

    grec

    6 (fig. 1), ou bien le

    Dionisiou codex 2

    (xe

    sicle)

    (1).

    On pourrait leur

    ajouter

    un manuscrit de la

    Bibliothque

    nationale

    Paris,

    le codex grec 68 (fig. 2), o

    l'image

    qui reprsente

    l'vangliste

    Marc

    est

    couverte

    d'un

    rseau de lignes

    contournant

    minutieusement

    le moindre dtail,

    jusqu' l'indication

    des

    ombres et

    des lumires (genoux).

    Le mme procd

    se

    laisse observer dans le

    manuscrit

    de

    la

    Bibliothque nationale

    d'Athnes,

    le codex grec 74 (xe-xie sicle) (2).

    La diffrence entre ces peintures que

    nous

    avons appeles dessines ,

    et

    les

    dessins

    lgrement

    colors

    est la

    suivante :

    les premires,

    normalement

    peintes, ont des couleurs compactes, nettes, bien discernables, mais un rseau

    de lignes recouvre les

    surfaces

    colores. Les

    seconds

    sont rehausss de couleurs

    trs

    dilues, ples, et

    limites

    deux ou trois teintes, avec des parties rserves

    au

    parchemin

    ; par

    contre, figures

    et architectures n'y sont

    pas

    toujours

    recouvertes d'un rseau linaire. On le devine, l'exemple la fois le plus beau

    et

    le

    plus connu de ce genre est le

    fameux rouleau

    de Josu de la

    Bibliothque

    Vaticane

    (grec 431). Ces dessins

    harmonieusement

    quilibrs (fig. 3) nous font

    penser

    des sinopia

    italiennes qui seraient agrmentes de

    bleu. L'ocre y joue le

    rle de

    dominante. Elle est

    soutenue

    par des bruns

    nuancs de

    faon

    rendre compte

    des

    (1 )

    Cf.

    K.

    Weitzmann, Die

    Byzantinische Buchemalerei

    im

    IX

    u. X. Jahrhunderl, Berlin, 1935,

    fig. 415,

    p.

    64.

    (2 ) Ibid., fig.

    580,

    p. 85.

  • 7/25/2019 VELMANS, Tania, Le Dessin Byzance

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    Illustration non autorise la diffusion

    Via. 1.

    Leipzig,

    Bibliothque de

    l'Universit,

    fol.

    280

    v.

    L'vangliste

    Jean.

    Fig.

    2.

    Paris, Bibliothque nationale,

    codex

    grec 68,

    fol.

    280

    r. L'vangliste

    Marc.

    ombres

    et

    modeler

    les

    formes.

    On a

    trop

    crit

    sur les

    illustrations

    du

    rouleau

    de

    Josu pour

    qu'il soit

    ncessaire

    de s'y arrter (1). Avec

    leurs

    ombres lgres

    qui sont toujours de la mme couleur que les parties illumines et ne

    changent

    que

    d'intensit de ton, ces miniatures sont

    trs

    proches de ce

    que

    nous appellerons

    le dessin color dans les

    manuscrits

    byzantins

    (2).

    Un autre codex qui peut figurer

    de

    plein

    droit sous

    cette tiquette est celui

    de

    la Bibliothque

    nationale

    d'Athnes,

    (1) La

    date

    de

    l 'excution

    de

    ces miniatures (xe-xie sicle), ainsi

    que

    les

    modles

    qui les ont inspires,

    ont fait

    l'objet

    de diverses

    hypothses. Com me

    ce problme ne

    concerne

    pas

    directement

    notre recherche,

    nous nous

    contenterons

    de

    citer

    deux

    tudes approfondies : K. Weitzmann, Illustration

    in

    Hall

    and Codex

    (Studies

    in Manuscript

    illumination, 2),

    Princeton,

    1947

    ; In., The Joshua Roll

    (Studies

    in Manuscript

    Illumination, 3), Princeton, 1948.

    Voyez

    une bibliographie complte chez V. Lazarev,

    Storia

    della pittura

    byzantina,

    Torino,

    1967,

    p.

    172,

    n.

    46.

    (2) Ces

    observations

    nous semblent valables, malgr l'opinion (que nous

    ne

    combattons

    pas pour

    autant) de V.

    Lazarev qui

    pense que les

    miniatures

    du rouleau de

    Josu auraient

    perdu beaucoup de

    leurs

    couleurs

    primitives et

    auraient

    subi

    des restaurations

    postrieures

    (cf.

    V. Lazarev, Storia. . .,

    p. 138),

    et

    malgr l'explication

    de ce

    genre peu habituel Byzance qu'en donne J. Tikannen :

    le

    grand

    nombre des pisodes reproduire

    aurait

    incit les artistes

    cette

    Farprestotechnik

    (cf.

    J.

    Tikkanen,

    Studien ber die Farbgebung in

    der millelallerlichen

    Buchmalerei, Helsinki,

    1933,

    p.

    109-1

    10). Cette dernire

    hypothse nous

    semble improbable pour

    deux raisons

    :

    1) on ne

    prend pas plus

    de temps

    appliquer une

    couleur dense qu'une couleur dilue ;

    2) en

    cas

    de

    miniatures

    trop

    nombreuses, les scriptoria byzantins

    distribuaient

    le

    travail plusieurs

    artistes,

    comme

    on le voit constamment,

    sans

    se soucier de

    la technique

    employe.

    Le terme

    dessin color que nous employons

    propos de ce manuscrit nous semble, par

    ailleurs, parfaitement

    justifi.

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