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Draft 1 : Article «La mesure de la performance indexée à la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques
sénégalaises en vue d’une quête de légitimité»
Par Babacar Cissokho
1- La problématique
Les dirigeants d’entreprises publiques sont-ils responsables ou imputables des résultats de leur structure à l’image d’un entraineur de Football coachant une équipe. Après une victoire d’un coach, l’équipe est contente mais aussi les supporters de l’équipe, qu’en est- il des usagers de l’entreprise publique ? En quoi leur perception peut-il légitimer le dirigeant de l’entreprise publique ?
En quoi la rémunération de ces derniers peut-il influer les résultats de sa structure positivement ou négativement ? En quoi le jugement ou l’appréciation portée sur cette rémunération par les parties prenantes centrales de l’entreprise peut impacter le résultat voire la performance de l’entreprise ?
Comment ce lien Performance(Résultats) et Rémunération du Dirigeant peut fonder le jugement ou l’appréciation de la rémunération par les autres parties de l’entreprise par rapport à légitimité de ce dernier (Dirigeant d’entreprise publique).
Chacune de ces questions soulève des problématiques de gouvernance de l’entreprise publique ?
L’imputabilité des résultats aux dirigeants d’entreprises publiques dans le contexte sénégalais est difficile. Car le dirigeant de l’entreprise publique sénégalaise n’est pas aussi autonome dans ses choix que l’entraineur de Foot Ball.
Il est parfois choisi non parce qu’il est compétent mais plutôt parce qu’il est militant du parti au pouvoir et travaille au service du Parti au détriment de la satisfaction de l’usager. Les autres acteurs de la sphère politique interférent dans sa gestion comme l’illustre la figure ci-dessous
Dans la plupart des administrations publiques, le respect des règles prime sur l’initiative et
l’innovation. Les interférences des élus dans la gestion des structures publiques limitent les
dirigeants d’entreprises dans leur pouvoir décisionnel et d’autonomie comparée au cas du
coach avec son équipe de football.
L’applicabilité de la reddition des comptes devient ainsi difficile. L’entreprise publique est
pourvoyeuse de ressources par rapport à son ministère de tutelle qui en manque. Cet état de
fait favorise un contrôle moins exigeant de l’autorité supérieure sur l’entreprise publique.
Cette relation de dépendance non profitable à l’entreprise publique, de façon générale, ne
devrait-elle pas être revue ? Ce n’est pas le cas d’un coach avec son équipe, il ne souffre pas
de ce type de relation de dépendance ?
Cette difficulté d’imputation des résultats couplés à une rémunération du dirigeant
complétement détachée de la grille salariale interne de l’entreprise met les syndicats dans une
position défensive. Elle conduit parfois à la démotivation du personnel entrainant des résultats
moins satisfaisant.
Cette interférence des élus limite la liberté d’action du gestionnaire. Dans sa relation avec
l’élu, il est tenu par une certaine loyauté qui peut aller à l’encontre de la satisfaction de
l’usager, surtout dans le contexte sénégalais, voire ouest africain.
On note que l’élu intervient dans le choix du gestionnaire public en privilégiant les intérêts de
contrôle politique de sa localité, appelé dans le jargon politique « Entretenir sa base politique
par le biais des ressources publiques communes en s’accaparant d’une structure publique ».
Parfois, le dirigeant de la structure publique est nommé sur simple proposition d’un élu
politique sans se référer aux compétences. Quant au choix des entraineurs, il y a un processus
de sélection qui garantit au moins la compétence.
La feuille de route du gestionnaire public est la massification du parti au pouvoir. Sa loyauté
par rapport aux élus est mesurée par rapport à ce critère de massification de son parti. Cette
politisation de la sphère publique a été confirmée par Rouban (1998) qui constate de façon
empirique que la plupart des directeurs centraux dans les ministères, les préfets, les recteurs,
les présidents des entreprises publiques, etc., sont limogés en cas de changement de majorité.
De ce fait, les fonctionnaires deviennent en majorité des administrateurs politiques. Cette
situation ne favorise pas une meilleure efficacité et efficience de l’action publique.
C’est pourquoi l’instauration d’un management public centré sur l’usager nécessite un
bouleversement des mentalités et une cartographie nouvelle des relations entre élus et
dirigeants de structures publiques, sur la base du réadapté de Maltais et Mazouz (2004, P.85).
Ainsi, normalement, le dirigeant de l’entreprise publique devrait être jugé par l’élu politique
sur la base des résultats obtenus (cas rare au Sénégal et peut être dans la sous-région ouest
africaine ; à vérifier par les enquêtes). Ce fait expliquerait-il en partie les contreperformances
de nos Etats dans les politiques publiques et notre retard économique ?
Quant à la relation entre administrateurs (Hauts fonctionnaires de l’Etat) et élus, elle aussi est
empreinte de politique. En fait, ils sont choisis par les élus pour administrer les structures
publiques. Bien qu’ils soient de hauts fonctionnaires garant de la continuité de l’Etat, leur
coloration politique est déterminante dans leur désignation comme administrateur de sociétés.
Mais dans les faits, nous constatons souvent la nomination de présidents de conseil
d’administration de structures publiques qui ne sont pas des hauts fonctionnaires et n’ont
aucune compétence dans la compréhension des documents techniques et financiers fournis par
l’entreprise pour validation (à chiffrer après les enquêtes).
Ce sont souvent des gens qui sont rémunérés par l’entreprise publique au détriment de la
satisfaction de l’usager public. Ils n’apportent aucune plus-value à la structure et deviennent à
la longue des parasites du système public et de ses ressources.
La base de ce problème est politique. Le manque d’encadrement et de limitation des élus dans
leur pouvoir de nomination à des postes de responsabilité dans la sphère publique est aussi un
facteur aggravant. Cette remarque entraine des questionnements sur les critères objectifs ou
les bases légales de désignation d’administrateurs et de dirigeants de structures publiques par
les élus.
C’est à travers cette relation entre élus et administrateurs que l’Etat légitime et apporte ses
reformes, sa vision et les transformations souhaitées dans les structures publiques.
Mais pour ce faire, les élus doivent veiller à ce que la croix de transmission de leur vision soit
des gens capables d’assumer ce rôle. On remarque que dans la plupart des pays de la sous-
région ouest africaine et plus précisément au Sénégal, cet élément n’est pas bien pris en
compte si on se réfère à la qualification des présidents de conseils d’administration et des
gestionnaires des structures publiques. Ainsi, nous posons la question de savoir où se trouve
la volonté de l’Etat à satisfaire l’usager public, si déjà le choix des hommes devant conduire et
apporter les changements n’est pas fait selon les règles déontologiques de base, plus
précisément le respect du critère élémentaire qu’est la compétence. C’est ainsi qu’Edwars
(1998) définit le manager public comme « un professionnel de la gestion choisi pour sa
compétence non politique et sa capacité à atteindre ses résultats ».
Quant à la relation administrateur-gestionnaire public, elle est de deux ordres : la première est
une relation de négociation pour la mise à disposition des ressources en lien avec les objectifs
à atteindre ; la seconde est une relation de contrôle de l’utilisation des ressources.
Pour une optimisation de cette relation au bénéfice de l’usager public, il est nécessaire que les
administrateurs et les gestionnaires aient une maitrise parfaite du secteur d’action de la
structure publique. Pour ce faire, il faut veiller à l’évaluation des capacités des gestionnaires à
l’entrée, et mesurer leur habileté pendant l’exercice.
Ce changement de paradigme dans la gestion des structures publiques demande une certaine
adaptation des agents de l’administration s’ils n’y sont pas bien préparés.
C’est souvent le cas et nous observons une baisse de productivité, de l’engagement, car ils
sont désorientés par rapport aux nouvelles missions du secteur public. Le moral et la loyauté
pourraient aussi être affectés.
Ainsi, ce changement nécessite une préparation par la formation, des voyages d’études et du
soutien au plus haut niveau des autorités étatiques. La prise en compte de la dimension
ressources humaines est capitale car c’est cette dernière qui est au début et à la fin du
processus transformationnel exigé par le management public.
De ce fait, il est nécessaire de revoir les conditions de travail en les mettant en adéquation
avec les résultats demandés, en vue de canaliser les attitudes et comportements dans le bon
sens.
Ces aspects relatifs au management des ressources humaines ne sont pas souvent pris en
compte dans nos administrations et établissements publics en vue d’une meilleure
implémentation du management public. D’où la caractérisation préconisée de Mazouz et
Tremblay (2006) du gestionnaire public. « Il doit se soucier de la qualité de services aux
citoyens, d’une bonne utilisation des ressources et accepter l’imputabilité des résultats ».
Les bénéficiaires de ce service peuvent être qualifiés d’usagers, d’administrés et de clients.
En se référant, aux six critères définis par Mazouz et Tremblay (2006) pour un meilleur
service aux usagers, nous sommes rendus compte après analyse que le contexte Sénégal ne
garantit pas l’effectivité de ces critères
1- « Mettre l’accent sur la pertinence des politiques / programmes publics et sur la
cohérence de leur mise en œuvre, plutôt que sur l’élaboration de politiques de
substitution et sur la restructuration permanente de l’appareil d’État. »
Ce critère exige la mise en place de politiques et d’actions publiques en phase avec les
préoccupations des usagers, et de veiller à leur mise en œuvre. Mais, il est important de souligner
que les dirigeants politiques, au moment d’exercer le pouvoir, sont tenus par les contingences
environnementales. En se référant à Derek A. Epp, John Lovett et Frank R. Baumgartner1 dans leur
article « Partisan Priorities and Public Budgeting (2014) », on note que la budgétisation des actions
publiques repose souvent plus sur le contexte que sur les priorités des électeurs ayant porté au
pouvoir le gouvernement en place. D’où la difficulté du respect du premier critère énoncé par Bachir
Mazouz. Celle-ci est accentuée aussi par les alternances au pouvoir qui pourraient également
modifier les lignes directrices de politiques publiques ; d’où le problème de cohérence et de mesure
des politiques publiques.
1 Epp, D. A., Lovett, J., & Baumgartner, F. R. (2014). Partisan Priorities and Public Budgeting.
doi:10.1177/1065912914550045
2- « Accorder plus d’attention à l’efficacité de l’État (régime politique) et à l’efficience
de l’appareil de l’État (structures de services), comme voies et moyens d’offre de
réponse aux besoins de la société, plutôt que de tout centrer sur les retombées
politiques à court terme (élus) ; ce qui veut dire se préoccuper davantage de la
participation à l’établissement des objectifs, à l’allocation optimale des ressources, à
l’évaluation comparée de la performance et au feedback des instances internes et
externes (communauté) ».
Ce deuxième critère exige au gouvernement de s’inscrire dans le long terme pour pouvoir bénéficier
des fruits de leur politique. Mais le plus souvent, ces-derniers, dans la majorité des cas, travaillent
pour le court terme à la satisfaction de besoins immédiats en vue des élections prochaines. On peut
citer actuellement le cas de la France avec François Hollande qui est en train d’entreprendre des
réformes en profondeur inscrites dans la durée et dont les effets ne peuvent être constatés que dans
le long terme. Cette situation entraine souvent des pertes d’élections et pourrait amener le
gouvernement en place à changer de cap pour satisfaire les sollicitations immédiates de son peuple.
Dans de pareils cas, les gouvernements sont dans une situation perplexe : continuer les réformes
pour l’intérêt général et futur du pays au prix de la perte des élections, ou bien gérer le court terme
tout en sachant qu’on crée des difficultés futures à son pays par rapport à ses pairs. En ce qui
concerne ce deuxième critère, nous faisons face à des difficultés d’applications liées à des
contingences politiques.
3- « Être plus comparable, par rapport à la sphère privée d’où provient la critique mais
aussi les comparaisons à l’offre de services de substitution, sans pour autant importer
tout de go toutes et chacune de ses pratiques, si nouvelles et prometteuses soient-
elles ».
Ce troisième critère suggère l’utilisation du managérialisme (transfert et utilisation des pratiques du
privé dans le public). En cela, le privé est souvent qualifié d’efficient au regard de l’exigence des
actionnaires. Ainsi, s’inspirer du privé reviendrait à utiliser les outils d’optimisation et de
rationalisation des ressources avec, à l’idée, de créer un profit appréciable. Dans le cas du public,
cette exigence de l’actionnaire n’est pas très visible et présente. Les autorités publiques ne
demandent pas des comptes aux structures publiques sur la question de la satisfaction de l’usager.
Ce transfert d’outils du privé vers le public peut sensiblement améliorer l’efficacité et l’efficience.
Mais il y a des contraintes notoires à cette mise en œuvre.
On peut citer la culture bureaucratique au niveau du public, la capacitation des agents du public aux
nouveaux outils de management, le manque de transparence dans le public, la difficulté de mesure
du profit social. On peut aussi dire que l’application de ce troisième critère exige des réformes en
profondeur dans la sphère publique.
4- « Généraliser l’imputabilité dans le système, et non pas la restreindre aux seuls
prestataires des services publics (fonctionnaires) quand les politiques de service leur
échappent totalement ou presque, pour incomber aux seuls décideurs (élus) ».
Ce quatrième critère demande l’élargissement de l’imputabilité des résultats aux décideurs, au lieu
de se limiter aux opérationnels. Cet élargissement est justifié par le fait que ce sont les décideurs qui
conçoivent les politiques et ils sont également les dépositaires des engagements électoraux. En ce
sens, ils ont une responsabilité dans l’insatisfaction des usagers. Les difficultés à la mise en place de
ce critère résident dans la clarification des rôles et tâches au niveau stratégique et opérationnel dans
les structures publiques et la définition des indicateurs de performance. On ne peut imputer un
échec ou un succès d’une action publique à un décideur si au préalable la ligne de base et la situation
désirée ou recherchée de l’action ne sont pas définies avec la cascade de niveau de responsabilité
pour la chaine de production du système public. Dans la plupart des cas, surtout en Afrique
subsaharienne, l’imputabilité d’une action publique est difficile à établir, de sa conception à sa mise
en œuvre.
5- « Centrer l’attention, et, partant de là, rendre l’imputabilité plus conséquente sur
les intrants (nature des ressources et qualité des compétences), sur
les processus (notamment la cadence et les modes de traitement mises à contribution),
tout autant que sur les outputs (services rendus) et les outcomes (impacts sur la
population), ainsi que l’environnement (la capacité économique et la condition sociale
et culturelle de la communauté). »
Ce cinquième critère pose le débat sur la rationalisation des moyens et le rythme de traitement des
dossiers au sein du secteur public. Il s’intéresse tout aussi à l’atteinte des résultats opérationnels et
développementaux. La mise en application de ce critère nécessite des outils très pointus de suivi
pour déterminer le temps moyen de traitement d’un dossier, les coûts y afférent, et le résultat
obtenu en terme de satisfaction de l’usager. Il faut noter que les outils d’opérationnalisation de ce
critère ne sont pas disponibles dans les administrations publiques en Afrique subsaharienne. Ainsi, il
faudra d’abord penser à la mise en place des instruments de mesure du critère, avant sa prise en
compte dans le management public ouest africain. D’ailleurs, les indicateurs de mesure de la
satisfaction de l’usager sont difficiles à établir. L’appréciation du citoyen des actions publiques est
souvent biaisée car ce dernier ne dispose pas souvent de toutes les informations. Il n’a une
perception, en générale, que sur les services qui lui sont rendus directement. Ce fait est confirmé par
Alexander (2002) qui met en exergue que : « les nombreux sondages sur la satisfaction des usagers
de services publics ne nous apprennent souvent rien de concret, ni d’utile sur les attentes réelles des
citoyens en matière de justice par exemple. »
6- « Privilégier, là où cela s’impose, une approche public/privé dans la prestation des
services, de sorte que les services rendus par l’appareil public soient appréciés à raison
de leur valeur comparative réelle dans le marché (Halachmi et Holzer, 1993) ».
Ce sixième critère privilégie l’utilisation du marché pour apprécier la performance du secteur public.
L’essence même du secteur public est une réponse, là où le marché a failli. En ce sens, il ne vise pas
le profit mais doit optimiser l’utilisation des ressources.
De ce fait, faire appel aux privés pour réaliser certaines missions publiques dans une approche de
partenariat peut être une forme de raccourci pour utiliser l’expertise du secteur privé dans
l’exécution des missions, dans des délais plus courts. Cela aura l’avantage d’utiliser des organisations
à structuration légère, pour gagner du temps, qui vont se substituer à une administration souvent
très bureaucratique avec des régimes de conventions collectives qui ne tiennent pas compte de la
performance des individus. Mais cela aurait une conséquence sur le budget de l’Etat si celui-ci devait
utiliser son personnel pour ces missions publiques ; lequel personnel n’est pas souvent très qualifié,
habitué qu’il est aux lenteurs administratives. Dans ce cas de figure, l’Etat aura payé le service rendu
par le privé mais aura toujours à supporter les charges de son personnel.
L’application de ce critère est possible, mais il renchérit les coûts pour l’Etat dans un contexte où les
ressources financières sont rares.
En analysant les six critères de base de Mazouz et Tremblay (2006) dans le cadre du management
public, on arrive à la conclusion qu’aucun des critères n’est applicable présentement, à l’exception du
sixième critère, dans une certaine mesure au Sénégal, voire dans la sous-région ouest africaine. Cela
veut dire que notre façon de gérer, de manager les structures publiques, ne prend pas totalement en
compte l’optimisation de l’utilisation des ressources et la satisfaction de l’usager. C’est en ce sens
que nos administrations sont rigides, avec une suprématie des protocoles et règles en lieu et place
d’une flexibilité exigée par le management public.
De ces différents constats, il semble nécessaire que nos administrations et structures publiques
opèrent une mue pour pouvoir remplir les six critères de base nécessaires au management public et
dégagées par Mazouz et Tremblay (2006).
Ainsi, le management public exige de nouvelles façons de faire, de nouvelles compétences, de
nouveaux rôles et de nouvelles fonctions, d’où la préconisation par Alain Charles Martinet et Hocine
Cherhabil2 de revoir le profil du fonctionnaire.
Ce nouveau profil en adéquation avec les exigences du management public va nécessiter des
formations sur les aptitudes professionnelles et les qualités individuelles, en vue de faire passer le
gestionnaire public de gardien des processus au serviteur des usagers et responsable des résultats
opérationnels et développementaux.
Cette exigence de résultats par le management public a aussi été développée par Pascal Gaudron3 qui
préconise un changement du rôle du directeur qui passe de l’encadrement par les règles à celui de
l’efficience stratégique de marché. C’est-à-dire que le directeur d’une structure publique sera évalué
sur l’atteinte des objectifs de satisfaction des usagers et de la finalité de sa structure. Le tableau ci-
après explique le changement de paradigme opéré dans les différentes fonctions de l’entreprise par
l’introduction du management public
2 Mazouz, B. (2008). Le métier de gestionnaire public à l’aube de la gestion par résultats : Nouveaux rôles -
Nouvelles fonctions - Nouveaux profils. Presses de l’Université du Québec (p. 68). Presses de l’Université du
Québec.3 Mazouz, B. (2008). Le métier de gestionnaire public à l’aube de la gestion par résultats : Nouveaux rôles -
Nouvelles fonctions - Nouveaux profils. Presses de l’Université du Québec (p. 68). Presses de l’Université du
Québec.
La ressource humaine étant centrale dans le processus de livraison d’un service de qualité à
l’usager, il est important de s’intéresser au travail et aux perceptions des agents publics.
Dans ce cadre, les conclusions des recherches sur l’éthique au travail d’Emery et Wyser
(2006) ont montré que cette qualité chez le travailleur de la fonction publique permet de
compenser la dissonance existante entre les moyens à disposition et le travail à fournir.
Cela veut dire que les politiques devraient développer, au niveau de l’agent, la culture de
l’éthique au travail. Mais cela exige des changements fondamentaux dans la conduite des
affaires publiques du plus haut au plus bas niveau.
Qu’est ce qui peut amener un fonctionnaire à avoir l’éthique au travail, gage d’une
performance ? Un élément de base fondamental est le sentiment de patriotisme. Ce sentiment
est renforcé ou détérioré en fonction de la légitimité des dirigeants et de la façon dont les
affaires publiques sont conduites.
L’impunité, la corruption, le sectarisme, la dilapidation des fonds publics, les écarts
importants de rémunération entre échelons, entrainent souvent une démotivation de l’agent
public et une perte de l’éthique au travail.
Par ailleurs, « leur perception au point de vue synchronique (comparatif avec les contextes
politico-administratif différents), diachronique (en fonction des différentes réformes
entreprises) et en fonction des indicateurs objectifs de performance, influent sur la motivation
et l’éthique au travail ».
Dans le premier cas, un agent se comparant avec un autre de même rang d’un pays voisin
peut, sur cette base, trouver une motivation ou une démotivation à mieux travailler pour sa
structure.
Pour le second cas, l’appréciation péjorative et l’incompréhension des différentes réformes
peut entrainer, chez l’agent, des sentiments de rejet et de non-participation effective aux
actions de l’Etat.
Dans le troisième cas, la culture de la mesure de la performance, n’étant pas souvent ancrée
dans la plupart de nos administrations publiques, entraine souvent des bouleversements. Ces
derniers, très stigmatiques, peuvent créer une démotivation au travail.
On peut retenir que les relations entre élus, hauts fonctionnaires et dirigeants d’entreprises
publiques sont souvent assujetties à des pressions politiques. Ces dernières peuvent
compromettre la satisfaction de l’usager.
D’autres aspects comme la motivation, l’éthique, les modes de désignation des dirigeants, les
conditions de travail peuvent aussi affecter l’atteinte des résultats. Qu’en est-il de l’entreprise
publique sénégalaise ?
Alors nous chercherons à travers notre article à démontrer comment la gouvernance de
l’entreprise publique dans le contexte sénégalais peut compromettre l’atteinte des résultats
voir la satisfaction de l’usager public et remettre en question la légitimité de la rémunération
du dirigeant d’entreprise publique sénégalaise.
2- Les concepts mobilisés
2-1-La rémunération
La rémunération a toujours été et reste au centre des préoccupations des différentes parties
prenantes de l’entreprise que sont principalement les actionnaires, les dirigeants et les salariés.
Adam Smith fut le premier à proposer une théorie relationnelle entre le travail et la compensation
sous forme de rémunération. Il la caractérise comme un avantage résultant d’un échange que le
travailleur procure à l’employeur (Mahoney, 1979 ; Smith, 1776/1976). Cette compensation concerne
l’aspect pécuniaire.
Thomas Aquin, en le complétant, la définit comme une occupation rémunérée à laquelle on se livre
pour gagner sa vie (Somme théologique, 1265, question 187, article 3.329, rapporté par Sandrine
Frémeaux et Christine Noél 2011).
L’article 23 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme en parle comme suit : « quiconque
travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui assurant ainsi qu’à sa famille une
existence conforme à la dignité humaine et complétée, s’il y a lieu, par tous autres moyens de
protection sociale ».
Mais cette notion de travail contre salaire a été élargie à un ensemble d’avantages en sus de celui
pécuniaire en contrepartie de la contribution du travail de l’employé (Bloom, 1995 ; Cappelli &
Rogovsky, 1994 ; Gerhart & Milkovich, 1993 ; Tsui, Pearce, Porter, & Hite, 1995).
Cet élargissement de la notion de salaire a permis d’améliorer les relations entre actionnaires,
dirigeants et salariés en termes d’amélioration de la performance et de diversification des avantages
accordés au salarié. Mais il interpelle également sur la lancinante question de la fixation du niveau de
la rémunération en lien avec les résultats attendus.
Frémeaux Sandrine et Noël Christine (2011), en se basant sur les réflexions de Thomas d’Aquin,
considèrent que l’employeur et le salarié peuvent librement définir le prix du salaire. Mais ils
précisent que le salaire ne doit pas être insuffisant à faire subsister le salarié et sa famille.
2-2-La rémunération des dirigeants
Par rapport à la rémunération des dirigeants, Frémeaux Sandrine et Noël Christine (2011 ont
préconisé l’intervention de l’Etat pour corriger les distorsions des rémunérations de certains
dirigeants et salariés. Mais malgré cette intervention de l’Etat, ils sont arrivés à la conclusion que la
politique de plafonnement des salaires des dirigeants est insuffisante. Cette dernière est un acte qui
moralise les rémunérations mais ne garantit pas l’équité au niveau des différents échelons. Ils
recommandent des actions en amont des politiques de rémunération.
St-onge, S. Magnan, M. & Montr, H. E. C. (2008), dans leur article « La rémunération des dirigeants :
mythes et recommandations » abondent dans le même sens. Ils précisent que la rémunération n’est
plus une question de gouvernance des entreprises, mais concerne la société toute entière. Ils
estiment que l’écart entre les salariés les mieux payés et les travailleurs du bas de l’échelle ne cesse
de se creuser, d’où l’intérêt du grand public pour la rémunération des dirigeants.
Cet intérêt est relayé par la presse et la télévision en ce qui concerne les rémunérations jugées
amorales ; une situation qui a suscité beaucoup de polémiques. La remise en question par l’opinion
publique de certaines rémunérations des dirigeants d’entreprises publiques comme privées
démontre tout l’enjeu de la problématique de la rémunération de ces dernières. Les réponses
apportées par les pouvoirs publics en sont une confirmation.
On peut l’illustrer avec les cas ci-dessous :
- Les salaires distribués par les entreprises leaders représentent jusqu’à 1 500 fois le SMIC (Le
Monde 5 & 6 décembre 2004) à l’exception du Japon où l’écart est de 1 à 20.
- Le journal des Finances (du 14 au 20 juin 2003) affirme que les résultats des sociétés du CAC
40(cotation assistée en continu), qui affichaient en 2002 des pertes cumulées importantes,
ont vu paradoxalement les revenus des dirigeants de la moitié de ces mêmes sociétés
augmenter de 13% la même année.
- Le cas Michael Ovitz aux USA : il a été dirigeant de Walt Disney entre août 1995 et décembre
1996 et a perçu lors de son départ 130 millions de dollars américains. (Source : cour suprême
Delaware 906 A.2d 27 (2006))
- Le cas Richard Grasso : ancien Président du Conseil d’Administration de New York Stock
Exchange (NYSE), il a bénéficié d’une rémunération de 187 millions de dollars et a fait l’objet
d’une poursuite judiciaire ordonnée par le Procureur général de l’Etat de New York. Il a été
condamné à rembourser au moins 100 millions de dollars à NYSE, car une rémunération au
niveau d’une société publique ne doit pas dépasser un certain niveau. (Source : cour
suprême New York Slip Copy, 2006 WL 3016952)
- Le cas de l’ex PDG de l’Oréal qui est devenu le retraité le mieux payé de France avec une
pension annuelle de 3,4 millions d’euros. (Source : CREG - La rémunération des dirigeants
français 2009)
- Le cas Daniel Bernard, PDG de Carrefour, avait déclenché des contestations de l’opinion en
s’octroyant des goldens parachutes de 40 millions d’euros. (Source : CREG - La rémunération
des dirigeants français 2009)
- Le PDG d’ALCATEL est parti avec 5,6 millions d’euros d’indemnités malgré un cours en bourse
en chute libre de 35%. (Source : CREG - La rémunération des dirigeants français 2009)
- Le cas Amadou Kane Diallo au Sénégal, ancien Directeur général du COSEC (Conseil
sénégalais des Chargeurs, entreprise publique sénégalaise), qui a tenu les propos suivants :
« Un golden parachute qui me revenait si je devais partir après des années de bons et loyaux
services, on devrait me payer une certaine somme pour que je ne tombe pas dans la dèche. »
(Source : Journal Walfadjiri au Sénégal, 4 mai 2011)
Selon, Marie-Hélène Vigliano (2002) dixit : «Indépendamment de cet intérêt du grand public, la
rémunération des dirigeants a retenu l’attention des chercheurs dans de nombreux domaines :
Economie, Ressources humaines, Comptabilité, Finance et Management.(O’Reilly, Main et Crystal,
1988 ; Main et Johnston, 1993).
Il a été relevé par Barkema et Gomez-Mejia (1998) « plus de 300 recherches sur la rémunération des
dirigeants dont la plupart sont anglo-saxonne. »
Cette rémunération des dirigeants est considérée par la plupart des auteurs comme un moyen
d’aligner les intérêts du dirigeant à celui de l’actionnaire (cas surtout de l’entreprise privée).
St-onge, S. Magnan, M. & Montr, H. E. C. (2008) ont pu mettre en évidence les questions essentielles
autour de la notion de rémunération des dirigeants sous le vocable de 7 mythes (voir tableau 1 ci-
dessous).
Tableau 1 Mythes en matière de rémunération des dirigeants
Source : St-onge, S. Magnan, M. & Montr, H. E. C. (2008)
Dans le cadre de l’entreprise publique, la rémunération des dirigeants est considérée comme une
contrepartie pour l’atteinte d’un certain nombre d’objectifs. La documentation sur la question de la
rémunération des dirigeants concerne surtout les entreprises privées. Elle a fait l’objet de nombreux
travaux. Par exemple aux Etats-Unis, ces questions sont traitées depuis longtemps. Parmi les
principaux travaux, on peut citer : Berles et Means (1932), Vance (1964 / 1983), Burt (1983), Waldo
(1985), Anderson et Anthony (1986), Lorsch et Maclver (1989), Carver (1990), Demb et Neubauer
(1992), Coulson – Thomas 1993, Charkham (1994), Jensen et Meckling (1976), Fama (1980), Fama et
Jensen (1983).
En France, on peut citer : Charreaux et Pitol-Belin (1990), Cosh et Hughes (1987 et 1989) en Grande
Bretagne.
Il faut souligner que la plupart des travaux sur la rémunération des dirigeants se sont intéressés aux
modes, à la composition et aux variables explicatives de rémunération pour une meilleure
performance. Ils avaient une orientation économique. Mais face à l’exigence des parties prenantes,
l’orientation sociale tend à prendre de la place, et est devenue le leitmotiv des entreprises sous le
vocable RSE (Responsabilité sociale et environnementale).
Ainsi, certains auteurs ont mis en évidence des écarts importants entre la rémunération des
dirigeants et celle des employés dans le cadre de la gouvernance.
Crystal (1991) indique que l’écart de rémunération entre les dirigeants et le travailleur du bas de
l’échelle se situe entre 120-150 aux USA, 20-30 en Europe, 15-20 au Japon, surtout dans les
structures privées. Il souligne que dans certains pays, des politiques publiques essaient de réguler ces
salaires jugés excessifs.
David Callahan (2004) explique qu’en 1965, le salaire des directeurs généraux était en moyenne 50
fois plus élevé que celui du travailleur du bas de l’échelle. Aujourd’hui, ce chiffre a quintuplé et pose
la question de justice et d’équité dans les organisations privées et publiques. Une étude de Siegel et
Hambrick en 2005, confirme l’existence de disparités importantes de rémunération au sein de
l’équipe de direction. Ceci a un effet négatif sur la performance financière de l’organisation.
Swanson et Orlitzky (2006), dans une autre recherche, ont montré que plus les dirigeants sont
demandeurs d’une rémunération très élevée, moins ils sont épris de valeurs d’éthique dans leur prise
de décision aussi bien dans le public que le privé.
Le constat sur le niveau élevé des écarts entre la rémunération des dirigeants et celle des employés
est réel. Ce fait est devenu central sous le rapport de l’équité et de la légitimité.
Wade et al. en 2006, affirment dans le même ordre d’idée que les employés tiennent compte de la
rémunération et des comportements des dirigeants pour évaluer l’équité de leur rémunération. Cela
détermine leur comportement au travail. Cette situation révèle que les écarts peuvent être tolérés
par certaines parties prenantes sous certaines conditions ; ce qui concerne le plus souvent les
dirigeants qui bénéficient de la confiance de leurs employés et qui se soucient du niveau d’écart
entre les rémunérations.
P. DRUCKER (2012 cité par Ahmed Koudri dans rémunération du premier dirigeant et gouvernance
des entreprises publiques en Algérie) estimait que le rapport entre le salaire le plus bas de l’échelle
et celui du PDG devrait se situer entre 1 et 25.
Aux Etats-Unis, cet éventail a tendance à s’élargir : de 1 à 40 en 1980, il se situe de 1 à 85 en 1990
pour atteindre des proportions inimaginables de 1 à 400 en l’an 2000.
James March (1984) considérait que : « la rémunération des dirigeants devrait être raisonnable,
justifiée, et appropriée aux circonstances du travail, en vue de satisfaire les actionnaires et préserver
le système de légitimité de l’entreprise ».
Cette assertion pose les prémisses de la base de réflexion sur l’équité et la légitimité de la
rémunération du dirigeant de façon générale. Dans le cadre de la philosophie thomiste, un écart de
rémunération est juste si le dirigeant a du talent ou est performant. Ainsi, il se réfère à la
compétence et au résultat du dirigeant pour justifier un certain niveau de rémunération. Pour le
domaine du sport, pour le cas du foot-ball, ce principe est bien respecté pour les entraineurs. Ils sont
choisis pour leurs compétences, leur rémunération varie en fonction des résultats, et si les résultats
ne sont pas là, ils sont libérés.
C’est pourquoi une déconnexion entre l’évolution des salaires des dirigeants et les performances
économiques et financières peut avoir plusieurs conséquences : des actionnaires exaspérés, des
salariés mécontents, une opinion négative sur la rémunération du dirigeant. Cette situation remet en
surface la question de justice sociale sur les écarts de rémunération.
Cette dernière (justesse des écarts de rémunération) ne cesse de prendre de l’importance dans les
politiques de rémunération. Déjà, le romain Publicola proposait un écart maximal de 12 entre la
superficie du terrain dévolu au citoyen de base et celle accordée au sénateur.
Au début du 20ème siècle, le banquier J.P Morgan définissait l’écart maximal légitime entre les
rémunérations dans une même entreprise de 1 à 20. Aujourd’hui, dans les multinationales, les écarts
de salaire peuvent aller de 1 à 1 000. Alors, faut-il plaider pour une réduction des écarts de
rémunération ? On note déjà que les sociétés anglo-saxonnes sont moins sensibles aux écarts de
richesse que les pays scandinaves et latins.
- Aux USA, Obama et son secrétaire au Trésor Timothy Geithner annoncent que les sociétés
recevant une assistance exceptionnelle ne pourraient pas verser plus de 500 000 dollars par
an à leurs dirigeants (publié le 4 février 2009 par Indexnet).
- En France, F. Hollande plafonne les salaires des dirigeants à 450 000 euros brut / an par
Décret n° 2012-915 du 26 juillet 2012.
- Au Sénégal, le décret 2012-1314 du 16/11/2012 du Président Macky Sall plafonne et organise
la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques.
De plus, en termes d’exemple, on observe qu’un facteur 11 est l’écart maximal des salaires (primes
incluses) existant déjà dans la fonction publique française.
Donc, toute politique de rémunération doit effectivement prendre en compte un écart optimal,
équitable et juste, en vue d’asseoir une activité durable dans un climat social apaisé. Cela devrait
conduire à mettre sous surveillance la rémunération des dirigeants pour avoir un écart raisonnable.
Cette notion d’écart raisonnable renvoie à la question de justice, d’équité et de légitimité de la
rémunération des dirigeants. C’est la légitimité qui définit les normes de l’acceptable ou de
l’inacceptable, du conforme et du non conforme, du convenable et de l’inconvenable des actions
humaines.
2-3- Les théories de légitimité mobilisées et concept de légitimité
Les travaux de base sur la légitimité ont été réalisés par Weber (1978) et Parsons (1960) et reposent
sur l’existence de forces normatives et cognitives qui contraignent, construisent, et renforcent les
acteurs de l’organisation. Ce point de vue stipule que la légitimité est basée sur l’application des
normes et règles.
Ils ont été complétés par Laufer et Burlaud, (1997) qui considèrent que la légitimité suppose
l’existence de normes symboliques partagées, permettant aux membres d’une société d’interagir de
façon coopérative. Ces normes peuvent constituer l’épine dorsale pour la compréhension de la
source de la légitimité dans les organisations publiques qui sont soumises à beaucoup de règles et de
réglementations.
D’ailleurs Parsons (1956), Pfeffer et Dowling (1975) affirment que les théories organisationnelles ont
toujours considéré que la légitimité est une ressource critique pour les organisations.
Ce constat a été approuvé et confirmé par la perspective néo institutionnelle par DiMaggio et Powel
(1983), Meyer et Rowan (1977), Tolbert et Zucker (1983).
En s’appuyant sur ce qui précède, la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques peut- elle
être considérée comme légitime ?
L’appréciation de la légitimité, de la justesse, et de l’équité des rémunérations des dirigeants par les
différents acteurs de l’entreprise se heurte à plusieurs difficultés qu’il faut surmonter, dont entre
autres la disponibilité d’informations transparentes et pertinentes ; l’existence de bases pouvant
servir de comparaison, la pertinence de la comparabilité de ces bases, et enfin l’existence de critères
objectifs d’appréciations des rémunérations. Certains auteurs ont abordé ces questions de légitimité
de la rémunération des dirigeants sous divers angles en s’appuyant sur différentes théories.
Une première approche s’inspirant de la philosophie thomiste fait appel à la justice distributive qui
s’appuie sur le mérite pour justifier ou légitimer un certain niveau de rémunération. Cette
justification ou légitimation implique préalablement ou postérieurement l’action d’une acceptabilité
sociale basée sur des critères formels ou conventionnels de jugement.
En complément à la philosophie thomiste, Magnan et al. (2000) développent l’approche symbolique
qui étudie la rémunération des dirigeants sous l’angle de sa légitimité par rapport aux différentes
parties prenantes (actionnaires, dirigeants, salariés, organisation syndicale, opinion publique). Elle
inclut deux volets : la théorie de la justice organisationnelle et la théorie institutionnelle.
Par contre Laufer (2000), s’inspirant de Max Weber avec son étude représentative de l’approche
classique, admet que l’action légitime est celle qui se conforme aux impératifs définis par l’origine du
pouvoir. Ce dernier est lui-même légitime lorsqu’il est fondé en droit, en équité et/ou en justice.
Cette légitimité peut se mesurer par confrontation avec des critères formels à priori (règles de droit,
évaluation scientifique). Cet appel ou la référence aux normes ou valeurs standards devient un
impératif pour pouvoir légitimer une organisation, une action, voire un niveau de rémunération.
Scott et al. (2000) indiquent que les bases de cette légitimité sont l’acceptabilité sociale, la crédibilité
et la compétence (Hearit, 1995).
Dans une autre vision, Patel et al. (2005) dans « Toward a model of organizational legitimacy
in public relations theory and practice », définissent la légitimité comme une perception
généralisée ou l’acceptation que les actions d’une organisation sont désirables, propres et
appropriées, basées sur un système construit sur des normes, valeurs, croyances et coutumes
(Suchman 1995, p 574).
Dans cette approche de légitimité, Suchman (1995) développe la théorie de la légitimité autour du triptyque (la légitimité pragmatique, la légitimité morale et la légitimité cognitive) sur la base des approches stratégiques et institutionnelles de la légitimation. Il y développe le mode opératoire de chaque type de légitimité et explique comment améliorer, maintenir, et réparer une légitimité. Ainsi, si les attentes des parties prenantes sont satisfaites (légitimité pragmatique de Suchman, 1995), l’organisation peut acquérir de la légitimité. Par contre, celle dite normative (Suchman, 1995) est le résultat d’une évaluation morale de l’organisation et de ses activités par les parties prenantes. La dernière forme de légitimité, toujours de Suchman, se réfère à des standards ; elle est dite de légitimité cognitive.
Et enfin, il souligne la nécessité de faire appel à la théorie de la légitimité pour avoir une performance au sein de l’entreprise. Ainsi, on peut dire que la légitimité, bien que difficile à asseoir, est un facteur déterminant pour la performance de l’entreprise.
Pour expliciter les propos de Suchman sur le lien entre performance et légitimité, nous nous sommes référés aux travaux de Totsi et al. (2000) qui analysent 137 articles de recherche portant sur le lien de rémunération des dirigeants et la performance dont le constat est : la taille de la firme influence plus la rémunération des dirigeants que la performance dans le privé. Pour le public, le réseau du dirigeant au sein de la haute administration est déterminant.Ce fait remet en surface l’espoir de pouvoir légitimer ou de lier la rémunération à la performance. Cette dernière concerne les résultats quantitatifs et qualitatifs. .Les résultats quantitatifs concernent les attentes des propriétaires en termes de résultat financier. Dans le cas du public, le propriétaire c’est l’Etat, à travers le conseil d’administration. Les résultats qualitatifs sont aussi les attentes des propriétaires par rapport à la satisfaction de l’usager du service public. L’attente de l’Etat est difficilement mesurable.Mais cette performance en termes de résultats quantitatifs et qualitatifs peut ne pas résulter des attentes mais plutôt d’une comparaison par rapport à d’autres structures de même nature évoluant dans des zones économiques similaires. Pour le quantitatif, il est facile de mesurer la performance par rapport à ses pairs. Quant à l’aspect qualitatif, la comparaison est presqu’impossible car l’information n’est pas souvent disponible. Les gouvernements de la sous-région n’ont pas mis en place des outils de collecte et des bases de données sur la satisfaction de l’usager public.
2-4- Le concept de performance, de légitimité et leurs liens
La notion de performance est l’élément de base consensuel entre les parties prenantes dans l’appréciation de la légitimité. Charreaux (1998) la définit en distinguant deux types de performances :
la performance absolue qui est appréciée par une mesure (qui repose sur les objectifs de celui qui cherche à mesurer la performance) ;
et la performance relative qui renvoie à un classement (niveau de réalisation comparé aux autres).
Ainsi, la notion de performance devient contingente par rapport aux objectifs des différents stakeholders. De ce fait, une organisation peut être performante pour une partie prenante et ne pas l’être pour une autre. D’où la complexité de la notion et la difficulté à pouvoir légitimer l’organisation ou son action, selon le point de vue de toutes les parties prenantes, en se basant sur la performance. Ceci constitue aussi un angle d’attaque du problème de la rémunération des dirigeants avant de passer à l’appréciation de celle-ci par les parties prenantes pour juger de sa légitimité ou non, en lien avec la performance. Dans le contexte des entreprises publiques, ce sont normalement les élus qui cherchent à mesurer la performance en vue de la satisfaction de l’usager / électeur. Mais le constat est que les élus ne s’intéressent pas à cette mesure mais plutôt à celle des déficits.Par rapport à la performance relative, ce sont souvent les dirigeants d’entreprises publiques qui s’y intéressent en vue de permettre une amélioration continue de leur action. Mais nous constatons aussi que les dirigeants des entreprises publiques sont surtout préoccupés par leur maintien à leur poste. Cela les conduit à travailler pour le compte du parti au pouvoir, au détriment de la satisfaction de l’usager ou des indicateurs financiers et/ou sociaux. C’est le cas aussi de l’entraineur de foot ball en poste pour son maintien. Mais pour le cas de l’entraineur de foot ball, il travaille à la satisfaction de toutes les parties prenantes par le résultat obtenu. Il est sanctionné en cas de non satisfaction ce qui n’est pas le cas du dirigeant d’entreprise publique sénégalaise, le résultat satisfaction des usagers n’est pas pris en compte dans l’évaluation du dirigeant. Cette situation expliquerait en partie les contreperformances des entreprises publiques sénégalaises, comme l’a souligné El Hadj Faye (2003).La performance de l’organisation peut être liée à celle du dirigeant, comme le révèlent les travaux de Suchman (1995), couplés à ceux de Totsi et al. (2000).
En 2000, les travaux de Suchman sont complétés par Scott et al. Ils ont construit une
typologie de légitimité ; à savoir les légitimités normative, régulative et cognitive, et ont
introduit l’idée de standard pour évaluer la légitimité. Il en ressort qu’il y a beaucoup de
difficultés à les concevoir et les mettre en place. Ces standards sont composés de la culture,
des normes, des règles, et des lois.
Mais les parties prenantes, par exemple les usagers du service public, peuvent aussi utiliser
d’autres bases pour évaluer les actions d’une organisation en donnant une opinion. Ce fait
confirme la difficulté à cerner les bases objectives d’appréciation d’une légitimité.
Patel et al. (2005), dans le même sens que Suchman (1995), estiment que la légitimité est
nécessaire pour avoir la stabilité, assurer la survie (Daunno et Zuckerman, 1987) et sécuriser
la viabilité (Barnett, 1997) d’une organisation.
Cette dernière peut construire sa légitimité de trois façons : en se conformant au système
social existant, aux normes sociales et en s’identifiant aux valeurs sociales. Cette assertion
reste valable si toutefois toutes les parties prenantes se référent à ces bases pour légitimer une
action d’une structure. Il est difficile de cerner les motivations et les référentiels de jugement
de chaque partie prenante.
Mais cela n’est pas suffisant selon DiMaggio et Powell qui, en 1991, introduisent la notion de
perception de la légitimité par le biais de la théorie institutionnelle.
Cette dernière a commencé à prendre de l’importance suite à la publication en 1977 de l’article classique de Meyer et Rowan. Tolbert and Zucker, Baron et al. (1986), Edelman (1992), en complétant Meyer et Rowan, ont assuré la propagation de quelques politiques spécifiques. Ces dernières ont conduit à la redéfinition fondamentale des missions et formes de l’organisation (DiMaggio 1991, Fligstein 1985). Cela a permis le développement des politiques internes et internationales au niveau des organisations publiques (Strang 1990, Zhou 1993).Cette approche d’analyse de l’organisation nous ouvre la possibilité de mieux cerner le processus de légitimation d’une organisation sur la base de la théorie institutionnelle. Une autre notion viendra compléter celle-ci, il s’agit du pluralisme institutionnel. Ce dernier se définit selon Mattew S. Kraatz et Emily S. Block (2008) comme étant des organisations devant faire face à plusieurs
systèmes de régulations avec des normes multiples et plusieurs logiques de culture. Dans le cadre d’un pluralisme institutionnel, les bases de légitimation deviennent difficiles à établir. Selon Brunson (1989), Dutton et Dukerich (1991), Stone et Brush (1996), le pluralisme institutionnel est surtout observé dans le cas des organisations publiques et des organisations à but non lucratif. Les recherches récentes dans la théorie des parties prenantes qui s’appuient sur le néo institutionnalisme sont unanimes par rapport au fait que la plupart des organisations sont considérées comme des entités pluralistes (Donaldson and Preston, 1995 ; Mitchell, Agle et Wood, 1997). Pourquoi alors toutes les organisations sont considérées comme telle aujourd’hui ? Un fait nouveau, la responsabilité sociale, environnementale, économique voir politique serait l’explication que toutes les organisations sont la plupart des entités pluralistes.
Cet état de fait va entrainer beaucoup de conflits divergents et convergents dans l’appréciation de la légitimité en fonction des centres d’intérêts de chaque partie prenante. Il ne suffit pas à l’organisation d’être légitime
dans ses actions, mais la perception ou la représentation que se font les différentes parties
prenantes est tout aussi importante ; d’où la question suivante « Dans quelle mesure la
rémunération des dirigeants d’entreprise publique sénégalaise est-elle perçue comme légitime
par les usagers publics et les salariés ? »
Ainsi, Powell et DiMaggio, en 1991, énoncent la notion de perception de la légitimité par les différentes parties prenantes. Ils développent la notion d’isomorphisme institutionnelle qui s’approche de la notion d’homogénéisation. Cette notion d’isomorphisme peut aider dans la compréhension de la construction de la légitimité d’une organisation, et par ricochet, l’adapter à celle de la rémunération des dirigeants. Ils ont établi trois formes de types de pression susceptibles de conduire les organisations à devenir similaires (le cas le plus souvent des entreprises
publiques) : la pression coercitive, la pression mimétique et la pression normative.
Ces formes de pression nous édifient sur les bases et le processus de la légitimité d’une action ou d’une organisation. Comment alors cette légitimité est-
elle perçue, bien qu’elle soit issue de l’une des pressions ?
Pour Powell et DiMaggio (1991), cette question de perception de la légitimité est centrale. Ils
conclurent dans leurs travaux que : « la survie d’une organisation dépend non plus des
ressources matérielles et de l’information technique, mais plutôt de la perception de la
légitimité qu’ont les différentes parties prenantes de l’organisation. »
En complément à la notion de perception de légitimité, DiMaggio et Powell (1991) développent l’isomorphisme de marché en sus de l’institutionnel pour justifier les actions de l’organisation en vue de sa légitimité. Une analyse croisée des types de légitimités de Schuman et des éléments de la théorie néo institutionnelle de DiMaggio et Powell permet d’apprécier la légitimité des actions de l’entreprise en prenant en compte la perception des parties prenantes (stakeholders). Beaucoup de travaux ont été réalisés sur les parties prenantes, et parmi ceux-ci celui de Freeman « A stakeholder Approch (1984) » où les fondamentaux de l’approche sont développés. Cette approche met en exergue le lien entre les mesures prises et les effets attendus. Elle met aussi en relief le début du processus de légitimité des actions de l’entreprise. Les parties prenantes ont trois attributs selon Freeman (1994) : le pouvoir d’influencer l’organisation, le pouvoir de légitimité des relations et le pouvoir de réclamation.Cette approche du stakeholder a aussi été approfondie par Donaldson et Preston en 1995. Elle ne limite plus la relation entre actionnaires et dirigeants, mais l’étend aux autres acteurs internes et externes de l’entreprise. Le stakeholder est défini comme une personne ou un groupe de personnes qui a un intérêt dans les activités ou au niveau de la performance d’une organisation (Viljoen et Dann, 2003). Il concoure au succès et à la survie de l’organisation (Cutlip et al. 2000 ; Scott et al. 2000).
L’approche du stakeholder est composée de trois théories sur la base des travaux de Donaldson et Preston en 1995 : la théorie normative (les entreprises et les managers doivent agir selon certaines mesures), la théorie instrumentale (certains résultats sont plus probables si les organisations et les managers agissent d’une certaine manière) et la théorie descriptive empirique (les organisations et les managers agissent actuellement avec certaines manières). Ces différentes théories des parties prenantes nous ont permis d’affiner l’approche d’analyse que nous avions d’elles, à travers leur perception, en vue de légitimer la rémunération des dirigeants.Elles ont été reformulées à partir de l’adapté d’Andriof et Waddock (2002, p.32) qui tente de trouver les sources de légitimité des actions de l’entreprise par le biais des approches stratégiques et normatives, ou du pouvoir. (Voir le détail
au niveau de la figure 1 ci-dessous).
C’est sur cette approche de stakeholders que s’appuie la RSE (Responsabilité sociale et environnementale) qui est un nouveau mode de gouvernance visant la prise en compte des préoccupations de l’ensemble des parties prenantes. Elle peut constituer aussi une porte d’entrée pour traiter les questions de légitimité de l’organisation et de ses actions.
Justification de la théorie des parties prenantes
Justification de l’existence des parties prenantes
Légitimité
Pouvoir
Approche stratégique
Approche normative
Dépendance Mutuelle
Stakeholder Dominant
Firme dominante
Théorie néo institutionnelle
Bien commun
Ethique féministe
Risque
Théorie des contrats sociaux intégrés
Droits de Propriété
Ethique Kantienne
Juste contrat
Principe d’équité
Théorie de la dépendance envers les ressources
2-5- L’affinement de la question de recherche
En analysant les assertions des différents auteurs, il ressort que la perception des parties
prenantes de l’organisation ou de son action est difficile à cerner, en sus des difficultés à
établir des standards sur lesquels il faut se baser pour jauger, voire établir, la légitimité d’une
action ou d’un fait émanant d’une organisation.
Mais tous les auteurs sont unanimes à ce que la performance d’une organisation dépend de la
perception de la légitimité des parties prenantes.
C’est cette perception de la légitimité de l’organisation ou de ses actions (la rémunération des dirigeants) en lien avec la performance qui est au centre des préoccupations de notre article. Elle vise à savoir si :
les différentes rémunérations du dirigeant d’entreprise publique qui viennent
ponctionner les résultats économiques ou les résultats développementaux (la
satisfaction de l’usager public) se justifient et sont légitimes aux yeux des salariés, des
organisations syndicales et des usagers du service public ;
et si elles ont permis une performance intrinsèque de la structure publique.
Sur la base de cette question, nous avons émis l’hypothèse selon laquelle aujourd’hui, la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques est illégitime au regard de la rémunération des salariés et de la satisfaction de l’usager public. Elle a permis de formuler une question de recherche sur laquelle se base notre article :
1) Quel est le lien entre la performance et le niveau de
rémunération des dirigeants d’entreprises publiques
sénégalaises ? Cette performance conduit-elle à une légitimité
de la rémunération du dirigeant ?
Les réponses apportées à ces questions de recherche devraient nous permettre d’avoir une idée
claire de la légitimité de la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques sénégalaises.
Ainsi, nous pourrons dégager les bases d’un système de rémunération au mérite afin d’éviter
de verser des salaires élevés à des dirigeants qui ne posséderaient pas les compétences que
requièrent leur rémunération ou en deçà de leur valeur sur le marché. En sus de ces aspects, il
y aura quelques implications de la résolution de nos questions de recherche sous forme
interrogatoire :
1) Que peut-on faire pour rendre ou maintenir légitimes les rémunérations des
dirigeants d’entreprises publiques via la performance ou autre ?
2) Quels enseignements peut-on tirer de cette analyse de la légitimité de la
rémunération des dirigeants d’entreprises publiques sénégalaises ?
3) Et en quoi ces enseignements prédisent-ils les intentions futures des gouvernants
dans l’élaboration des politiques de rémunération des dirigeants basées sur le mérite et la
satisfaction de l’usager public ?
Dans le cadre de cet article, nous nous limiterons à expliquer les théories et outils que nous
avons mobilisés pour répondre aux attentes énumérés ci-dessus de cette recherche.
Par ailleurs, face à une opinion publique de plus en plus exigeante dans la gestion des ressources publiques et la pression dans la recherche de la satisfaction de l’usager public, il semble nécessaire de mener des investigations irréfutables du point de vue scientifique, dans le but d’éclairer les différentes parties prenantes (Etat, dirigeants, syndicats, salariés, usagers publics, etc.). De ce fait, nos travaux contribueraient à la réduction de l’asymétrie d’information sur l’utilisation des ressources qu’il y a entre les actionnaires (Etat), les dirigeants d’entreprises, les salariés, les organisations syndicales et les usagers du service public. Cela permettrait un apaisement des tensions sociales.
3- Approche de résolution de la problématique
Pour résoudre notre problématique et aboutir à des recommandations, nous avons opté pour le paradigme épistémologique interprétativiste. Il permet de
déterminer l’appréciation de chaque partie prenante pour lever la difficulté de lecture de la
perception de la légitimité. Ce choix est couplé à l’utilisation de la théorie de légitimité de
Suchman qui a été retenue suite à l’analyse comparative des différentes théories de légitimité.
La collecte de données est en cours.
1- Le lien entre le type de légitimité et la rémunération des dirigeants
Légitimité pragmatique
La légitimité d’échange est basée sur la valeur attendue (performance). Cette valeur
attendue peut-elle légitimer la rémunération du dirigeant ?
La légitimité d’influence est basée sur une attente en fonction d’une action mise en place. Le
salarié apporte son travail et s’attend à une contrepartie. La rémunération du dirigeant peut-
elle être légitimée en fonction de cette attente ?
La légitimité dispositionnelle, est basée sur le stéréotype. C’est-à-dire l’image que renvoie
l’organisation. La rémunération du dirigeant peut-elle être légitimée par rapport à l’image
que renvoie son organisation ?
Légitimité normative
La légitimité conséquentielle est basée sur les résultats et leurs conséquences. La
rémunération du dirigeant peut-elle être légitimée par rapport aux résultats et aux
conséquences de ces derniers ?
La légitimité procédurale est basée sur l’évaluation des techniques et procédures pour leur
acceptation sociale. La rémunération du dirigeant peut-elle être légitimée en fonction de
cette attente ? (Acceptation sociale des procédures de mise en place des rémunérations).
La légitimité structurelle est basée sur les structures et les catégories. La rémunération du
dirigeant peut-elle être légitimée par rapport aux autres catégories et à la façon dont
l’entreprise est structurée ?
La légitimité personnelle est basée sur le charisme du Dirigeant. La rémunération du dirigeant
peut-elle être légitimée en fonction de l’appréciation de son charisme ?
Légitimité cognitive
La légitimité basée sur la compréhensibilité est sous-tendue par des modèles culturels explicatifs des
systèmes et procédures mis en place. La rémunération peut-elle être légitimée en se référant à ces
modèles culturels ?
La légitimité « taken for grantedness » est basée sur une forte institutionnalisation. La rémunération
du dirigeant peut-elle être légitimée en fonction du support institutionnel en place ? Exemple un
décret qui plafonne les rémunérations des dirigeants.
2- La sélection de la théorie de légitimité la mieux adaptée à la résolution du problème
Nous avons utilisé l’entonnoir de sélection pour filtrer les théories sur la base de leur
approche et leur cohérence avec notre problématique. (Voir figure 2 ci-dessous) et du tableau
3 comparaison des théories de légitimité.
Après le choix de la théorie de légitimité de Suchman, nous avons utilisé le modèle de mesure
réflective pour cerner la perception des différentes parties prenantes sur la légitimité de la
rémunération des dirigeants d’entreprises publiques sénégalaises.
Cette méthode de mesure consiste à sélectionner en un premier temps des indicateurs de
mesure (voir tableau 5 sur les indicateurs de légitimité) qui sont les reflets du construit à
savoir les types de légitimité de Suchman (voir le tableau 4 des variables de légitmité
retenues).
Ainsi, à travers la mesure de ces indicateurs, on apprécie le construit (la légitimité de
Suchman) par l’approche épistémologique interprétativiste qui permet l’appréciation des
indicateurs de chaque variable de légitimité de Suchman (les significations données par les
différentes parties prenantes à une situation donnée ; comment les sujets donnent du sens à la
situation qu’ils vivent, la construction de sens par rapport au phénomène étudié soit exposé
aux critiques mutuelles jusqu’ à obtenir un consensus).
Ce consensus peut être élaboré sur la base de la triangulation de l’information ou de la
validation par les parties prenantes centrales des connaissances élaborées par la méthode du
focus groupe. C’est une forme de validation consensuelle des variables et des indicateurs
pour apprécier la légitimité. C’est un travail difficile dans le contexte sénégalais où il n’y a
aucune base de référence d’outils et d’indicateurs de légitimité au niveau de l’entreprise
publique.
Donc l’appel à la démarche du consensus va beaucoup aider dans la confirmation des
variables et indicateurs que nous avons conçus sur la base de la littérature.
Nous avons procédé au niveau de la SENELEC à la mise en place d’un comité de validation
des variables et indicateurs, et les méthodes de mesures. (Validation des indicateurs et leurs
méthodes de mesures). Ces outils validés constituent pour notre recherche, la base de travail
sur la légitimité de la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques.
Concernant la démarche de mesure des indicateurs, voir le tableau 5 sur les indicateurs de
légitimité de Suchman.
Théorie de la légitimité
Légitimité originelle
Légitimité Pragmatique
Légitimité normative
Légitimité cognitive
Théorie d’agence Théorie des parties prenantes
Théorie néo institutionnelle
Théorie de la dépendance
Théorie de la justice organisationnelle
Théorie évolutionniste de Penrose
Analyse des théories par rapport à la légitimation
de la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques sénégalaises pour le choix de la théorie adaptée
Théorie d’agence va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base de la performance (légitimité pragmatique)
Théorie néo institutionnelle va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base de standards établis par mimétisme, par coercition, ou par normes professionnelles (légitimité cognitive ) pragmatique da
Théorie évolutionniste de Penrose va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base originelle des rémunérations ( légitimité originelle)
Théorie de la dépendance va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base des relations de dépendance qui peuvent exiger des règles, des valeurs et normes, des standards, des performances, ou de se focaliser sur la raison d’être de la structure (légitimité originelle, pragmatique, normative, cognitive)
Théorie de la justice organisationnelle par le biais de la justice distributive, la justice procédurale et la justice informationnelle et interperonnelle va légitimer la rémunération des dirigeants par le bien fondé de la légitimité par rapport à l’impartialité, et l’équité, et une explicitation de l’information salariale (légitimité cognitive
L’entonnoir de sélection
Théorie de la légitimité
Légitimité originelle
Légitimité Pragmatique
Légitimité normative
Légitimité cognitive
Théorie d’agence Théorie des parties prenantes
Théorie néo institutionnelle
Théorie de la dépendance
Théorie de la justice organisationnelle
Théorie évolutionniste de Penrose
Analyse des théories par rapport à la légitimation
de la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques sénégalaises pour le choix de la théorie adaptée
Théorie d’agence va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base de la performance (légitimité pragmatique)
Théorie néo institutionnelle va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base de standards établis par mimétisme, par coercition, ou par normes professionnelles (légitimité cognitive ) pragmatique da
Théorie évolutionniste de Penrose va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base originelle des rémunérations ( légitimité originelle)
Théorie de la dépendance va légitimer la rémunération des dirigeants sur la base des relations de dépendance qui peuvent exiger des règles, des valeurs et normes, des standards, des performances, ou de se focaliser sur la raison d’être de la structure (légitimité originelle, pragmatique, normative, cognitive)
Théorie de la justice organisationnelle par le biais de la justice distributive, la justice procédurale et la justice informationnelle et interperonnelle va légitimer la rémunération des dirigeants par le bien fondé de la légitimité par rapport à l’impartialité, et l’équité, et une explicitation de l’information salariale (légitimité cognitive
3- Le tableau de comparaison des théories
ThéorieType de
légitimité pragmatique
Valeur attendue
CommentaireThéorie
correspondanteJustification de la correspondance
Observations
Légitimité de Suchman
Echange
FinancierLe salaire du dirigeant est légitime s’il y a une bonne performance financière
La théorie instrumentale de la théorie des parties prenantes vise la maximisation du profit en optimisant l’utilisation des parties prenantes externes et internes à l’organisation
Les deux théories ont la même finalité : le profit
Les rémunérations sont légitimes par l’accroissement du profit. Mais le lien n’est pas évident
Evolution carrière
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de l’évolution de sa carrière
Evolution personnelle
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de son évolution personnelle
Auteur
ThéorieType de légitimité
pragmatiqueValeur
attendueCommentaire
Théorie correspondante
Justification de la correspondance
observations
Légitimité de Suchman
Légitimité d'influence
Pouvoir et influence
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction du pouvoir et de l'influence dont il jouit au sein de l'organisation
Légitimité dispositionnelle
Intérêt commun
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de l'intérêt commun
Identification et Valeurs communes
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction des valeurs communes d'identification
Auteur
ThéorieType de
légitimité morale
Valeur attendue
Commentaire Théorie correspondanteJustification de la correspondance
Observations
Légitimité de Suchman
Légitimité conséquentielle
Les conséquences morales d'une pratique
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction des conséquences de la pratique de rémunération
Théorie de légitimité par jugement des parties prenantes par le biais de contenus instrumentaux qui s’intéressent à l’utilité de l’action de l’entreprise
C’est une théorie qui s’intéresse aux conséquences des actions de l’entreprise en termes d’utilité
Le point commun entre les deux approches reste la finalité des actions de l’organisation
La légitimité procédurale
L’évaluation morale de la procédure liée à une pratique
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de la moralité de la procédure de rémunération
1- Théorie de légitimité par jugement des parties prenantes par le biais de contenus moraux qui s’intéressent aux démarches de la structure en termes d’équité, de moral et d’intégrité.
2- La théorie de l’équité et de la justice distributive de la théorie organisationnelle s’apparentent à la légitimité procédurale
C’est une théorie qui s’intéresse aux procédures pour légitimer
Le point commun entre les deux théories est le questionnement sur la légitimité des procédures
La légitimité structurelle
L’évaluation des catégories et des structures
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction des écarts de rémunération et des responsabilités
1-Théorie normative de la théorie des parties prenantes. Elle s’intéresse à l’équité des actions de l’organisation. Elle est proche de la RSE et de la pression normative de la théorie néo institutionnelle
2- La théorie de l’équité et de la justice distributive de la théorie organisationnelle s’apparente à la légitimité structurelle dans l’application des procédures jugées justes
La théorie normative vise à limiter la recherche du profit par le biais de l’équité, la légitimité structurelle cherche l’équité dans les catégories et structures de l’organisation
Le lien commun est la recherche de l’équité que nous allons appliquer aux rémunérations dans les entreprises publiques sénégalaises. Cela renvoie à la notion de justice organisationnelle
La légitimité personnelle
L’évaluation des leaders et de leurs représentants
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de son charisme et de ses « capabilities »
Auteur
Type de légitimitéType de légitimité
cognitiveValeur attendue Commentaire Théorie correspondante
Justification de la correspondance
Observations
Légitimité de Suchman
La compréhensibilité La Prévisibilité Evaluer le caractère prévisible de l’adoption de la pratique en fonction de l'évolution de l'environnement
La théorie néo institutionnelle utilise des justificatifs basés sur l’environnement pour légitimer son action via la pression coercitive, le mimétisme et les normes professionnelles.
Donc une légitimité basée sur les pratiques en cours dans le secteur ou le domaine
La prévisibilité légitime sur la base de la conformité avec les éléments de l’environnement en tenant compte de son évolution, elle est en phase avec la théorie néo institutionnelle dont les justificatifs sont basés sur les éléments de l’environnement
L’évolution de l’environnement est la base de légitimité justifiant les actions de l’entreprise. Les éléments de l’environnement peuvent concerner des rémunérations, des règles, des normes, des pratiques de structure de même nature.
La plausibilité Comprendre la cohérence des modèles culturels et des expériences
1-La justice procédurale de la théorie de la justice organisationnelle vise à établir le bienfondé de la légitimité des organisations par l’analyse de l’impartialité et la cohérence
2-La théorie de la justice interactionnelle dite informationnelle de la théorie de la justice organisationnelle
1 L’élément commun fondamental est la compréhension des fondements de la légitimité
2 - Elle exige une explicitation des démarches et décisions et renvoie à la notion de cohérence
1- La recherche des sources de légitimité permet d’avoir des éléments pour construire un bon discours « légitimant »
2- L’explicitation des décisions permet de gagner en légitimité
Taken for grantedness L’inévitabilité Evaluer le caractère inévitable de l’adoption de la pratique liée à l'évolution de l'environnement
La permanence ou la constance
L’alternative devient impensable
Auteur
4- Les variables de légitimité
Type de légitimité
pragmatique
Valeur attendue
CommentaireMaintien
de la variable
Justification ObservationQualité du
légitimateur
Echange
Financier Le salaire du
dirigeant est
légitime s’il y a
une bonne
performance
financière
Oui Il est facile de
disposer des
données
La
corrélation
entre salaire
et résultat
financier
n’est pas
toujours
établie
Le conseil
d'administration,
le citoyen, le
personnel
Evolution
carrière
Le légitimateur
apprécie la
rémunération
du dirigeant en
fonction de
l’évolution de sa
carrière
Oui L'appréciation
est basée sur
un élément de
la politique de
l'entreprise
(Plan de
carrière)
C'est une
appréciation
très
subjective
Le syndicat, le
personnel, le
Directeur de
l'entreprise
Evolution
personnell
e
Le légitimateur
apprécie la
rémunération
du dirigeant en
fonction de son
évolution
personnelle
Oui L'appréciation
est basée sur
un élément de
la politique de
l’entreprise
(Plan de
carrière) et du
développement
personnel
C'est une
appréciation
très
subjective
liée à
l'intérêt de
l’évaluateur
Le personnel, le
Directeur de
l'entreprise
Type de légitimité pragmatique
Valeur attendue
CommentaireMaintien
de la variable
Justification ObservationQualité du
légitimateur
Légitimité d'influence
Pouvoir et
influence
Le légitimateur
apprécie la
rémunération du
dirigeant en
fonction du pouvoir
et de l'influence
dont il jouit au sein
de l'organisation
Oui L'appréciation
est basée sur
l'analyse des
forces internes
C'est une
appréciation
très subjective
liée à l'intérêt
de l'évaluateur
Le syndicat, le
personnel, le
Directeur, le
conseil
d'administratio
n
Légitimité dispositionnelle
Intérêt
commun
Le légitimateur
apprécie la
rémunération du
dirigeant en
fonction de
l'intérêt commun
Oui L'appréciation
sera basée sur
les écarts de
salaires
C'est une
appréciation
objective dont
les données
sont
mobilisables
Le syndicat, les
salariés, le
conseil
d'administratio
n, le Directeur
général,
l'inspection
d'Etat, les
auditeurs
Identificati
on et
Valeurs
communes
Le légitimateur
apprécie la
rémunération du
dirigeant en
fonction des
valeurs communes
d'identification
Oui L'appréciation
sera basée sur
la politique de
rémunération
C'est une
appréciation
objective dont
les données
sont
mobilisables ;
on peut juger
si la politique
est équitable
Le syndicat, les
salariés, le
conseil
d'administratio
n, le Directeur
Général
Source : auteur
Type de légitimité morale
Valeur attendue
Commentaire Maintien de la
variable
Justification Observation Qualité du légitimateur
Légitimité conséquentielle
Les conséquences morales d'une
pratique
Le légitimateur apprécie la
rémunération du dirigeant en
fonction des conséquences de la pratique
de rémunération
Oui C'est une appréciation
qui va se baser sur la politique
de rémunération
Les données sont disponibles et le jugement
sera basé sur les écarts de
salaires et leurs conséquences
morales
Les bénéficiaires
du service public, les
salariés, les syndicats
La légitimité procédurale
L’évaluation morale de la
procédure liée à une pratique
Le légitimateur apprécie la
rémunération du dirigeant en fonction de la moralité de la procédure de rémunération
Oui C'est une appréciation
qui va se baser sur les
fondements moraux de la politique de
rémunération
Il peut y avoir des problèmes de données sur les sources et
bases de la politique de
rémunération
Les syndicats, les salariés,
les Directeurs généraux, le
conseil d'administrati
on
La légitimité structurelle
L’évaluation des catégories
et des structures
Le légitimateur apprécie la
rémunération du dirigeant en
fonction des écarts de
rémunération et des
responsabilités
Oui C'est une appréciation
qui va se baser sur la grille
salariale et les fonctions occupées
Les données sont disponibles et faciles à avoir
Les syndicats, les salariés,
les Directeurs généraux, le
conseil d'administrati
on
La légitimité personnelle
L’évaluation des leaders et
de leurs représentants
Le légitimateur apprécie la
rémunération du dirigeant en fonction de son charisme et de
ses « capabilities »
Oui C'est une appréciation
qui va se baser sur la capacité du dirigeant à
manager
Il sera difficile de mesurer la
capacité à diriger et le charisme du
dirigeant
Les syndicats, les salariés, le
conseil d'administrati
on, le bénéficiaire du service
public
Type de légitimité cognitive
Valeur attendue
CommentaireMaintien
de la variable
Justification ObservationQualité du
légitimateur
La compréhensibilité
La Prévisibilité
Evaluer le caractère prévisible de l’adoption de la pratique en fonction de l'évolution de l'environnement
Oui La rémunération du dirigeant sera appréciée en fonction de l'évolution de l'environnement
Les données sur les rémunérations au niveau de l'environnement peuvent ne pas être accessibles (exemples : les entreprises publiques de la sous-région, les entreprises privées)
Le Directeur général, le conseil d’administration, les salariés, les syndicats
La plausibilité Comprendre la cohérence des modèles culturels et des expériences
Non Le lien avec la rémunération n'est pas évident
Difficile à évaluer
Taken for grantedness
L’inévitabilité Evaluer le caractère inévitable de l’adoption de la pratique liée à l'évolution de l'environnement
Oui La rémunération du dirigeant sera appréciée en fonction de l'évolution de l'environnement
La nouvelle rémunération du dirigeant est basée sur des éléments extérieurs qu'il faudra mobiliser et expliquer
Les syndicats, les conseils d’administration, les salariés
La permanence ou la constance
L’alternative devient impensable
Non Le lien est difficile à établir avec la rémunération
Difficulté d'évaluation
5- Les indicateurs de mesure de la légitimité
Type de légitimité
pragmatique
Valeur attendue
CommentaireMaintien
de la variable
Justification ObservationsQualité du
légitimateurIndicateur de mesure
Notion de performance et lien avec l’indicateur
Echange
Financier / social
Le salaire du dirigeant est légitime s’il y a une bonne performance financière (création valeur, croissance, rentabilité) ou une satisfaction de l’usager public (qualité prix, niveau de service)
Efficience de gestion (coûts, délai, qualité)
Oui Il est facile de disposer des données pour l’aspect financier
La corrélation entre salaire et résultat financier et social n’est pas toujours établie
Conseil d'administration, le citoyen, le salarié
Utilisation des progrès réalisés sur les indicateurs financiers comparativement aux années précédentes (on peut utiliser les données de l'année en cours par rapport aux prévisions budgétaires, les données de l'année écoulée, avec une comparaison de l'année d'avant et une moyenne pondérée des indicateurs sur au moins 5 années avant.) Une comparaison des niveaux de salaires et des résultats financiers se feront aussi par rapport à des structures de même envergure avec une zone géographique économiquement similaire. En essayant sur les bases d'une formule de trouver le lien qui existe entre salaire et résultat financier
Utilisation de l’approche qualitative inspirée de la Théorie de l'enracinement (Strauss et Corbin, 2004). Cette approche qui est inductive permet de mesurer le rendement financier en lien avec le niveau de la rémunération du dirigeant
Evolution carrière
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de l’évolution de sa carrière
Oui L'appréciation est basée sur un élément de la politique de l’entreprise (Plan de carrière)
C'est une appréciation très subjective
Le syndicat, le personnel, le Directeur de l'entreprise
Indicateurs de la politique des plans de carrières et lien avec la rémunération
Voir si l’évolution de la rémunération du dirigeant est en fonction de l’évolution de sa carrière et de celle de ses salariés.
Plan de carrière du dirigeant et performance (voir quel type de performance)
Cas de légitimité selon le marché du dirigeant
Il s’agit de voir si l’évolution de la carrière du dirigeant est un élément déterminant dans la formation du résultat (financier et non financier) de l’entreprise
Evolution Le légitimateur apprécie la
Oui L'appréciation est basée sur
C'est une appréciation
Le personnel, le Directeur de
L'évolution dans la grille salariale de l'évaluateur, voir les politiques et
Plan de carrière du salarié et performance par rapport
personnelle rémunération du dirigeant en fonction de son évolution personnelle
un élément de la politique de l'entreprise Plan de carrière et du développement personnel
très subjective liée à l'intérêt de l’évaluateur
l'entreprise indicateurs d’une grille salariale (à voir)
Est-ce que l’évolution de l’évaluateur dans la grille salariale joue dans l’appréciation du niveau de rémunération du dirigeant.
à l’évolution de l’individu (le salarié). Il s’agit de mettre en relation l’appréciation de la rémunération du dirigeant par le salarié et la performance de ce dernier par rapport aux objectifs de l’entreprise
Type de légitimité pragmatique
Valeur attendue
CommentaireMaintien
de la variable
Justification ObservationsQualité du
légitimateurIndicateur de mesure
Notion de performance et
lien avec l’indicateur
Légitimité d'influence
Pouvoir et influence
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction du pouvoir et de l'influence dont il jouit au sein de l'organisation
Oui L'appréciation est basée sur l'analyse des rapports de forces internes entre les différentes parties prenantes
C'est une appréciation très subjective liée à l'intérêt de l'évaluateur
Le syndicat, le personnel, le Directeur, le conseil d'administration, les inspecteurs d’Etat et la cour des comptes.
Indicateurs de pouvoir et d'influence en entreprise publique et liens avec l'appréciation de la rémunération des dirigeants. Il s’agit de faire la grille d’évaluation des parties prenantes en fonction du pouvoir, de l’influence et de l’intérêt ; et voir à partir de cette position comment la partie prenante apprécie-t-elle la rémunération du dirigeant
Lien de pouvoir et influence avec la performance ?
La position de la partie prenante au niveau de la Grille d’évaluation influe-t-elle sur la performance du salarié dans son travail via l’appréciation qu’elle fait du niveau de rémunération du dirigeant.
Légitimité dispositionnelle
Intérêt commun
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de l'intérêt
Oui L'appréciation sera basée sur les écarts de salaires
C'est une appréciation objective dont les données sont mobilisables
Le syndicat, les salariés, le conseil d'administration, le Directeur général, l'inspection d'état,
Déterminer les écarts entre les niveaux de la grille salariale et comparée à des structures similaires
Lien entre écarts de rémunération et performance ;
Plus l’écart est raisonnable, plus les résultats sont
commun les auditeurs bons (à vérifier par rapport aux données collectées)
Identification et Valeurs communes
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction des valeurs communes d'identification
Oui L'appréciation sera basée sur la politique de rémunération en matière de valeur commune partagée
C'est une appréciation objective dont les données sont mobilisables ; on peut juger si la politique est équitable par rapport aux valeurs de l’entreprise et celles de la communauté dans laquelle l’entreprise baigne
Syndicat, salariés, le conseil d'administration, le Directeur général
Mesure de l'équité des rémunérations (voir les indicateurs pour cela)
Lien entre indicateurs d’équité et performance
Type de légitimité
morale
Valeur attendue
CommentaireMaintien
de la variable
Justification ObservationsQualité du
légitimateurIndicateur de mesure
Notion de performance et
lien avec l’indicateur
Légitimité conséquentielle
Les conséquences morales d'une pratique
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction des conséquences de la pratique de rémunération
Oui C'est une appréciation qui va se baser sur la politique de rémunération
Les données sont disponibles et le jugement sera basé sur les écarts de salaires et leurs conséquences morales
Bénéficiaires du service public, les salariés, les syndicats
Egalité et équité dans la fixation des salaires des dirigeants et dans le traitement des usagers (éthique) en fonction de l’appréciation de chaque partie prenante et par comparaison à des structures similaires dans des zones géographiques et économiques identiques.
Lien entre conséquences des écarts et performance. Il s’agit de voir comment les écarts peuvent jouer sur l’engagement, et les résultats des salariés
La légitimité procédurale
Evaluation morale de la procédure liée à une pratique
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de la moralité de la procédure de rémunération
Oui C'est une appréciation qui va se baser sur les fondements moraux de la politique de rémunération
Il peut y avoir des problèmes de données sur les sources et bases de la politique de rémunération
Syndicats, salariés, Directeur généraux, le conseil d'administration
L’égalité et l’équité dans le traitement des salariés
Liens procédures et performance. Il s’agit de voir comment l’appréciation de la procédure de rémunération peut entrainer des conséquences sur le travail des salariés, voir leur résultat et par ricochet le résultat de
l’entreprise
La légitimité structurelle
L’évaluation des catégories et des structures
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction des écarts de rémunération et des responsabilités
Oui C'est une appréciation qui va se baser sur la grille salariale et les fonctions occupées
Les données sont disponibles et faciles à avoir
Syndicats, salariés, Directeur généraux, le conseil d'administration, les inspecteurs de la cour des comptes
Fiche de poste, CV de l'occupant et position dans la grille salariale, objectifs assignés au poste
Lien entre structuration, grille salariale et performance. Il s’agit de voir si les positions des salariés au niveau de la grille salariale sont acceptées par rapport à leur compétence. Et selon la réponse apportée, si celle-ci a des conséquences sur le résultat du salarié, voir le résultat de l’entreprise
La légitimité personnelle
L’évaluation des leaders et de leurs représentants
Le légitimateur apprécie la rémunération du dirigeant en fonction de son charisme et de ses « capabilities »
Oui C'est une appréciation qui va se baser sur la capacité du dirigeant à manager et l’estime dont il jouit au sein de la structure
La mesure de la capacité à diriger et du charisme du dirigeant seront difficile à mesurer
Les syndicats, les salariés, le conseil d'administration, le bénéficiaire du service public, les inspecteurs de la cour des comptes
Indicateur de « capabilities » du dirigeant à manager et indicateur du charisme et leadership du dirigeant ; L’engagement des collaborateurs est un signe de légitimité du dirigeant, la réputation est aussi facteur de légitimité du dirigeant, L’expertise, la confiance accordée au dirigeant sont un facteur de légitimité, facteur de légitimité
Ces différents facteurs de légitimité seront appréciés sur la base de l’analyse des
Lien entre charisme et performance. Il s’agira de voir comment le charisme du dirigeant influe sur le travail des salariés et celui de la contribution des autres parties prenantes dans l’atteinte des résultats de l’entreprise
représentations du dirigeant par les différentes parties prenantes,
Visionnaire (facteur important) à mesurer la capacité du dirigeant par rapport à la lecture de l’avenir, leadership personnel du dirigeant tiré de l’équité dans ses décisions et actions,
La capacité à obtenir le consensus et du rendement qui peut être mesuré en vérifiant s’il est suivi par son équipe, et si elle croit au discours du dirigeant
Capacité du dirigeant à nouer des relations avec l’extérieur, qui peuvent être mesurées par les protocoles et les conventions signées et la qualité des relations avec les parties prenantes centrales,
Evaluer le style du dirigeant : est-il top down ou bottom up et voir comment il est apprécié par les employés.
Type de légitimité cognitive
Valeur attendue
CommentaireMaintien de la variable
Justification ObservationsQualité du
légitimateurIndicateur de
mesure
Notion de performance et
lien avec l’indicateur
La compréhensibilité
La prévisibilité Evaluer le caractère prévisible de l’adoption de la pratique en fonction de l'évolution de l'environnement
Oui La rémunération du dirigeant sera appréciée en fonction de l'évolution de l'environnement
Les données sur les rémunérations au niveau de l'environnement peuvent ne pas être accessibles (exemples : entreprises publiques de la sous-région, les entreprises privées)
Le Directeur général, le conseil d’administration, les salariés, les syndicats, les inspecteurs de la cour des comptes
Indicateur de comparaison sur les rémunérations des dirigeants de même type d'entreprise et de zone géographique économique similaires en comparant les différents décrets de fixation des salaires des entreprises similaires dans la sous-région
Prise en compte de l’évolution de l’environnement et la performance. Il s’agira de voir si les corrections apportées dans le traitement salarial des dirigeants via l’environnement vont permettre une amélioration des résultats de l’entreprise
La plausibilité Comprendre la cohérence des modèles culturels et des expériences
Non Le lien avec la rémunération n'est pas évident
Difficile à évaluer Lien entre modèles culturels, expériences et performance
Taken for grantedness
L’inévitabilité Evaluer le caractère inévitable de l’adoption de la pratique liée à l'évolution de l'environnement
Oui La rémunération du dirigeant sera appréciée en fonction du changement imposé par une mesure liée à l'évolution de l'environnement
La nouvelle rémunération du dirigeant est basée sur des éléments extérieurs qu'il faudra mobiliser et expliquer
Les syndicats, les conseils d’administration, les salariés
Evaluer l’effet de la mesure imposée sur la rémunération du dirigeant en termes quantitative et qualitative (comment les salariés l’apprécient)
Prise en compte de l’évolution de l’environnement et la performance. Il s’agira de voir si la nouvelle mesure sur la rémunération du dirigeant
est bien appréciée par les salariés en rapport avec leur niveau de
rémunération. Cette appréciation affecte-t-elle le résultat de l’entreprise ?
La permanence ou la constance
L’alternative devient impensable
Oui La rémunération du dirigeant est appréciée en fonction du passé
Il s’agit du cas où la rémunération du dirigeant n’évolue pas du tout en fonction de l’environnement. Les décrets et lois les fixant ne sont presque jamais modifiés. La constance est de règle..
Les corps de contrôle de l’Etat, les dirigeants, les salariés, les syndicats
Indicateur d'évolution de la rémunération des dirigeants dans l’environnement comparée à la situation dite constante
Lien entre la prise en compte du passé et la performance. Il s’agit de voir comment la non-évolution de la rémunération du dirigeant peut affecter le résultat de l’entreprise. Il s’agit également de voir le niveau de motivation du dirigeant comparé à ses pairs dont la rémunération évolue et voir si cela a une incidence sur les résultats de l’entreprise
En analysant les différents tableaux (le Tableau 4 sur les variables de légitimité , le tableau 3 sur la correspondance des théories de légitimité et le tableau 5 sur les indicateurs de légitimité), on peut conclure que toutes les théories de légitimité parcourues (la théorie néo institutionnelle, la théorie des parties prenantes, la théorie de la justice organisationnelle, la théorie de la dépendance) sont prises en compte par celle de Suchman dans la perspective de légitimer les rémunérations des dirigeants d’entreprises publiques.Ce fait confirme la pertinence du choix de la théorie de légitimité de Suchman qui prend en compte l’appréciation des parties prenantes comme base de légitimité et l’utilisation du discours « légitimant ». Ce discours tire ses références sur les pratiques des autres, sur les normes professionnelles, sur les règles, les lois, les décrets, les us et coutumes, les directives d’une relation de dépendance et les actions distributives de la richesse produite.Quant à l’appréciation des parties prenantes comme base de légitimité, elle se fonde principalement sur l’intérêt de celles-ci. Chaque partie prenante essaie d’optimiser sa relation avec l’organisation sous forme de rémunération, de satisfaction morale et de sauvegarde de l’intérêt commun.C’est pourquoi la prudence devrait être de rigueur dans l’interprétation des représentations de la légitimité de l’organisation par les différentes parties. Les intérêts corporatistes peuvent biaiser l’appréciation et remettre en question une légitimité bien fondée. L’analyse croisée des représentations des différentes parties pourraient réduire ce biais. Ceci conforte notre méthodologie concernant le choix des parties prenantes.Ces différents variables et indicateurs de légitimité de la théorie de légitimité de Suchman vont permettre d’apprécier, d’appréhender, de jauger la perception des parties prenantes sur la rémunération des dirigeants d’entreprises publiques sénégalaises dans une perspective de son acceptation ou de son rejet par le biais d’indicateurs en lien avec la performance.
Pour Chaque variable et indicateur, il a été conçu un formulaire de renseignement et une approche de mesure (Voir en annexe les formulaires en question et les méthodes de mesures des indicateurs pour chaque variable).Cette phase doit être poursuivie par une collecte de données qui nous permettra de confirmer ou d’infirmer si la performance indexée à la rémunération du Dirigeant légitime ce dernier ou ses actions. (C’est une forme de confirmation par le terrain). Le lien est supposé établi au point de vue théorique.