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ÀValSturman
Lapremièrefoisquejevousairencontré,mavies’estilluminée.Vousaveztraversélavieendansant,sourireauxlèvres,avecunengouementpourlanarrationetunmotgentilpour
quiconques’arrêtaitassezlongtempspourvousécouter.Jesuishonoréeetbénied’avoirfaitpartiedevosamis.
Vousalleznousmanquer.
Kylie Galen leva les yeux de la pizza au pepperoni sur la belle assiette en porcelaine, et tâchad’ignorer l’espritquiagitait l’épéeensanglantée justederrièresongrand-pèreet sagrand-tante.Satoutenouvellefamilleétait…trèsbien,maisuntantinetcoincée.Etdesgenscoincésn’apprécieraientsûrementpasqu’unfantômeinopportunviennebadigeonnerdesanglesmursdelasalleàmanger.L’esprit–unefemmeauxcheveuxbrunsflottants,trenteansàpeine–s’arrêtaenpleinmouvement
etregardaKyliedanslesyeux.–Outu tues,ou tu te fais tuer,c’estplutôtsimple.Lesparoles résonnaientdans la têtedeKylie.
Ellescommuniquaientpartélépathie,etvulesujetdeladiscussion,c’étaitsûrementmieuxainsi.–Cen’estpassimple,luirétorqua-t-elle.Etj’essaiedemanger,alorstuvoudraisbienpartir,s’ilte
plaît?–Çanesefaitpas,répliqualefantôme.Tuescenséeaiderlesesprits.Tudoisrespecterlesrègles.Kylietrituralaservietteposéesursesgenoux.Trèsbien.Existait-iluneclausedanslerèglement
stipulantqueceuxquicommuniquaientaveclesfantômesdevaientsemontrerpolisenversdesespritsodieux?Non, il n’y avait pas de fichu règlement, et encore moins de règles. Elle improvisait tout, en
réalité:parlerauxesprits,êtreunesurnaturelle,êtrelapetiteamiedequelqu’un.L’ex-petitecopine,oui!Cesdernierstemps,elleavaitl’impressiondetoutimproviserdanssafichuevie,etd’ymettreun
joyeuxbazar.CommesadécisiondequitterShadowFalls,lacoloquel’onvenaitdetransformerenpensionnatpouradossurnaturels.Celaavaitsemblélameilleurechoseàfaire,àl’époque.Àl’époque.Ellesetrouvaitchezlescaméléonsdepuismoinsdedeuxsemaines,etellen’enétaitplussisûre.Certes, elleavait euunebonne raisondevenir.Ensavoirplus sur sonhéritagesurnaturel.Faire
connaissanceavecMalcolmSummers,songrand-père,etFrancyne,sagrand-tante.Plusieursmois après avoir appris qu’elle n’était pas humaine, elle avait enfin découvert qu’elle
était un caméléon ; une espèce rare qui avait dû se cacher pour échapper à l’URF, l’Unité deRecherche de Fallen, une cellule organisée du gouvernement surnaturel. Cette dernière avait testécertainsd’entre euxcommedes ratsde labo,pour trouveruneexplicationà leursdons.Lagrand-mère de Kylie en était morte. Et voilà que la même branche de l’URF voulait faire subir desexpériencesàlajeunefille.Horsdequestion!Toutefois,sicelle-ciavaitunmotifpourquitterShadowFalls,celan’avaitrienàvoiravecl’URF,
niaveclesdécouvertesqu’ellepourraitfairesursonhéritage.C’étaitpourfuirLucas,leloup-garoudont elle était tombée amoureuse.Celui qui avait promis son âme à une autre, et qui espérait queKylienes’enformaliseraitpas.Commentavait-ilpuluifairecela?Commentavait-ilpul’embrasseravecunetellepassionàpeine
unmoisplustôt,chaquefoisqu’ilserendaitchezsonpère,etfréquentercettefille?CommentKyliepouvait-elleresteràShadowFallsetcontinueràlevoir?Leproblème,c’étaitqu’elleavaitbeaufuirLucas,sonchagrinl’avaitsuivie.Etàprésent,ellene
souffraitpasuniquementàcaused’uncertainloup-garou,maisparcequeShadowFallsluimanquaitterriblement.D’accord,pasvraimentleslieux,maislesgens,oui.Desamisquiétaientdevenusaussiproches que sa famille : Holiday, la fée directrice du camp, une grande sœur pour elle. Burnett,l’autre directeur, vampire sévère, à la fois un ami et une figure paternelle. Della etMiranda, sescolocs,qui s’étaient sentiesabandonnées lorsqueKylieétaitpartie.EtDerek,qui luiavait juré toutsonamour,toutensachantqu’elleaimaitLucas.Commeilsluimanquaient!Ellenesetrouvaitqu’àquelqueskilomètresdeShadowFalls,planquée
dans un endroit reclus, « le pays des collines », comme disaient les Texans, et pourtant, celaressemblaitauboutdumonde.Bien sûr, elleappelaitHoliday tous les jours.Audébut, songrand-père lui avait refusécedroit,
mais sa tante avait réussi à lui faire entendre raison. Il avait accepté, la mort dans l’âme, mais àconditionqu’ellen’utilisequ’uncertain téléphoneetque lesconversationsrestent trèsbrèves,pourquel’onnepuissepasretracerlesappels.Etenaucuncas,Kylienedevaitpréciseroùellesetrouvait.En raison de l’affiliation du camp à l’URF, son grand-père ne faisait confiance à personne à
ShadowFalls.Etsaméfianceneservaitqu’àaccentuerlesentimentd’isolementdeKylievis-à-visdetous ceux qu’elle aimait.Même vis-à-vis de sa mère, qui appela pour lui apprendre qu’elle allaits’envoler pour l’Angleterre avec John, son nouveau copain, dont Kylie n’était vraiment pas fan.Naturellement, songrand-père luipermettaitde la rappelerchaque foisqu’elle téléphonait.De fait,elless’étaientparléseulementdeuxfois.Pasplus.LagorgedeKylieseserraetdeslarmesluimontèrentauxyeux,maiselleseretint.Elledevaitêtre
forte.Seremuer,etsecomporterenadulte.–Çateplaît?demandasagrand-tante.–Oui,super, réponditKylieenregardant lesdeuxadultescouper leurpizzacommesic’étaitun
steak.Ellesavaitqu’ilsnel’avaientchoisiequepourelle.Commeellen’avaitpratiquementrienavalécesderniersjours,ilsavaientcommandésesplatspréférés.Sesentantobligée,tantdemangerquederespecterleursbonnesmanières,elleseforçaàencouperunboutqu’elleglissadanssabouche.N’étant pas vampire pour l’instant, elle devait pouvoir apprécier la nourriture. Mais non. Rien
n’étaitbon.Rienn’étaitjuste.Nimangerdelapizzaavecunefourchette,surunejolieassietteenporcelaineassezvieilleetrare
pourêtreexposéedansunmusée.Nis’asseoiràcettetabledesalleàmangerluxueuse,toujoursàlamêmeplace.Etencoremoinsparleràl’espritquiserapprochaitdesongrand-pèreetbrandissaituneépéeau-dessusdesatête.
Kylieleregardafixement.–Soittumedisexactementcequetuveux,soittut’envas.Maisnemedemandepasdetuer.Unegouttedesangtombasurlefrontdesongrand-père.Maisilnepouvaitnilavoirnilasentir,
contrairementàKylie.L’espritfaisaitsonpetitnuméro,justepourattirersonattention.Etçamarchait.–Arrête!Va-t’en,ditKylie,enadressantunregarddemenaceaufantôme.–Tuesdemauvaisehumeur?réponditlefantôme.Oui.Unchagrind’amour,çaaspiretoutlebonheurdevotrevie.Maisleplusnul,c’étaitquetoutle
mondeluimanquait.Pourtant,letempsdesonséjourlà-basn’avaitpasétévain.Elleavaitdécouvertbeaucoupdechoses
surelle-mêmeetsurlescaméléons,cestreizederniersjours.Ilsnes’étaientvraimentrévélésqu’aucoursdescentdernièresannées.S’ilsseconsidéraientcommeuneespèceàpartentière,ilsétaientenréalité unmélange de tous les surnaturels, des individus qui cumulaient l’ADN et les pouvoirs dechaqueespèce.Apprendreà lesmaîtriser était sacrémentdifficile.Laplupartd’entreeuxne réussissaientmême
pascetexploitavantd’atteindreleursvingt-cinqans.Maislesjeunesn’étaientpasnombreuxàtenterlecoup.Lescaméléonsétaientrares.Auxdiresdesongrand-père,unecentainederefugesdevaientexisterdans lemondeentier.Ondénombraitmoinsdedixmillecaméléons.Etuncouplesurdixàpeineavaitréussiàavoirunenfant.Kyliesedemandasielleseraitmère,unjour.Maismerdealors,elleavaitseizeans,elleétaittrop
jeunepours’inquiéterdeça.–Commentsesontpasséslescoursaujourd’hui?demandasongrand-père.Elle l’observa. Soixante-dix ans environ, les cheveux toujours blond vénitien, grisonnants par
endroits.Sesyeuxd’unbleuclairetvifressemblaientauxsiensetàceuxdesonpère.Uneautregouttedesangatterritsurlajoueduvieillard.Kyliefusilladuregardl’espritrailleur,qui
fenditl’aird’uncoupd’épéeàquelquescentimètresseulementau-dessusdesatête.–J’aiditstop!Kylieplissalesyeux.–Donc, ça s’estmal passé ? reprit son grand-père, qui essayaitmanifestement de lire dans ses
pensées.–Non,ehbien…je…j’airéussiàchangerdeconfiguration,jesuispasséedeloup-garouàfée!Tous les surnaturels avaient des configurations que les autres pouvaient voir. Les caméléons en
avaient une à part, qu’ils cachaient. Ils pouvaient semétamorphoser enn’importe quelle espèce, etgrâceàcettetransformation,accéderauxpouvoirspropresàcelle-ci.Maiscelan’étaitpasfacileàcontrôler.Lescoursicineportaientpastantsurl’anglais,lesmathset
lascience,ilsvisaientplutôtàapprendreàmaîtrisersesdonsetàcachersavéritableconfigurationaumonde.–C’estfantastique!Alorspourquoicettetêtedesixpiedsdelong?–C’estjusteque…Je suismalheureuse ici. Je veux retourneràShadowFalls.Cesmots traînaient sur le boutde sa
langue,sansqu’ellearriveàlesprononcer.Pastantqu’elleneseraitpassûred’avoirvraimentdonnéleur chance aux caméléons. Et surtout, elle ne savait pas si elle survivrait à ses retrouvailles avecLucas.–Jenefaisaispaslatête.Je…–Kylieadelacompagnie,expliquaFrancyne.
Satantenesavaitpascommuniqueraveclesesprits.Elleaffirmaitqu’ellenelesvoyaitpas,ninelesentendait,maisqu’ellepouvaitfacilementdétecterleurprésence.Lefantômeleval’épéeversleplafondetdéclara:–Tuvasavoirplusdecompagnieencore.Kylie ignorait ce que cela signifiait, alors elle se concentra sur son grand-père qui avait l’air
perdu.Levieilhommeregardasabelle-sœur.–De lacompagnie?Oh.Est-cemonépouseoumon fils,Daniel?demanda-t-il, tendu, lesyeux
grandouverts.KylieauraitbienvouluqueDaniel,sonpèremortavantsanaissance,vienneluirendrevisite. Elle n’aurait pas été contre un peu d’affection, et celui-ci savait très bien lui en prodiguer.Toutefois,ilavaitépuisétoutsontempsallouésurTerre.–Non.Cenesontpaseux.C’est…quelqu’und’autre,répondit-elle.Une personne qui ne lui avait pas encore expliqué ce qu’elle voulait ou désirait. Sauf pour lui
annoncerqu’elleavaitbesoind’ellepour tuerquelqu’un.Maispourqui l’esprit laprenait-il ?Unetueuseàgages?Lefantômesepenchaprèsdel’oreilledesongrand-père.–Queldommagequetunepuissespasmevoir.Tuesplutôtmignon!Puisl’apparitionentrepritde
lécherlesangsursajoue.Lentement.ToutenregardantKylie.Celle-cienlâchasafourchette.–Arrêtedeléchermongrand-père!Immédiatement!L’espritrentrasalanguedanssaboucheetlaregardafixement.–Arrêtedeluttercontretondestin.Acceptecequetudoisfaire.Laisse-moitemontrercommenttu
doisletuer.–Tuerqui?lâchaKylie,puiselletressaillitquandellecompritqu’elleavaitparléàvoixhaute.–Lécher?Tuer?Quoi?fitsongrand-père.–Rien,insistaKylie,jeparlais…–Elleparlaitàl’esprit,jecrois,ditsatante,lessourcilsfroncésd’inquiétude.–Detuerquelqu’un?demandasongrand-père,enregardantKyliedroitdanslesyeux.Commeellenerépondaitpas,Malcolm,nerveux,passalapièceenrevue.Lapeursursonvisage
rappelaittantàKyliecelledesautressurnaturelsàShadowFalls.Elle était venue ici enpensantqu’elle se sentirait chezelle, et pourtant,mêmeenvivantdansun
enclos de vingt-cinq hectares au cœur des collines texanes, en compagnie de vingt-cinq autrescaméléons,ellen’étaittoujourspasàsaplace.Etpasuniquementparcequ’ellesavaitcommuniqueraveclesfantômes,maisparcequ’elleétaitbeaucoupplusenavancequelesquatreautresadosd’ici.Ceux-cin’enétaientd’ailleurspasravis.Lesanciensdugroupe–parmi lesquelssongrand-père,sagrand-tanteetquatreautres–avaient
devinéqueKylieétaitbienplusdouée,carelleétaitenplusuneprotectrice,unesurnaturelleàlaforceexceptionnelle. Si cela avait l’air très cool, Kylie contestait cette définition pour de nombreusesraisons.Entêtedeliste,ilyavaitlefaitqu’ellenepouvaitseservirdecespouvoirsquepourprotégerles
autres,etjamaiselle-même.Cequin’avaitaucunsens.Sielleétaitchargéededéfendrelesautres,nefallait-ilpasqu’elle-mêmeresteunminimumenvie?Quidoncavaitinventécetterègle?Ellesoupiratristement.Était-elledestinéeàresterenmarge?Songrand-père sepencha et posa sa fourchette et son couteau en argent à côtéde laporcelaine
horsdeprix.–Kylie,jedétestememêlerdeteshistoiresd’esprit,maispourquoiunfantômetedemanderait-il
detuerquelqu’un?
Lajeunefillesemorditlalèvreetréfléchitàuneexplicationquinelesferaitpaspaniquer.Surtoutquand elle-même l’était. Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais fut sauvée par lehurlementd’unetrèsfortesirène.Lelustreau-dessusdelatabletrembla.Son grand-père se rembrunit encore, sortit un téléphone de sa chemise blanche parfaitement
repassée,tapasurunboutonetleportaàsonoreille.–Oui?Qui?lança-t-ild’untonsecetilbraquasonregardsurKylie.J’arrivetoutdesuite!Ilraccrocha,selevadesachaised’uncoupetsetournaverssabelle-sœur.–Kylieettoi,disparaissez.Cachez-vousdanslagrange,jen’enaipaspourlongtemps.Par«disparaître»,Kyliesavaitqu’ilentendait«sevolatiliser»,cequ’uncaméléonsavait faire.
Disparaître.Commeparenchantement.–Quesepasse-t-il?demanda-t-elleensesouvenantquelefantômel’avaitprévenuequ’elleaurait
delacompagnie.–Nousavonsdesintrus.Sontongraveetneutredevintplustragiqueetsérieux.–Desintrus?Lesyeuxduvieilhommeseplissèrent.–Oui,l’URF!Maintenant,disparaissez!Satantefitletourdelatableetattrapal’adolescenteparlamain.Puislafemmesevolatilisa,eten
unefractiondeseconde,Kylievitquesespropresjambesavaientdisparu.
Troisminutesplustard,latantedeKyliel’avaitconduitedansl’écurie.En respirant l’odeur terreuse des bottes de foin, Kylie ajouta à sa liste une autre capacité : les
caméléonsavaientledondefairedisparaîtrelesautres,puisqu’ellen’avaitpasfaitlevœudedevenirinvisibleetqu’apparemmentlesimplecontactdesatanteavaitsuffi.–Est-cequenoussommestouslà?La voix de sa tante brisa le silence étrange, tendu.Kylie passa en revue la grange vide.Elle ne
voyaitpersonne.Biensûr,ellenepouvaitpassevoirnonplus.Elleentenditàpeinelevaguebruitdepiedsquitraînaient.–Comptons,résonnadenouveaulavoixdesatante.Un,commença-t-elle.–Deux,fituneautrevoix.Ledécomptesepoursuivitjusqu’àvingt-quatre,maisilyeutplusieurspausesetonsautaplusieurs
chiffres.Kyliereconnut laplupartdesvoix.Surtoutcellesdesquatreadoscaméléons,pluscelledeSuzie, la fillettede six ans, ainsiquede sesparents, les enseignantsdugroupe.Les absents étaientmanifestementsongrand-pèreetlesquatreanciens.–Et j’aiKylie, dit sa tante.Kylie, tonnuméroest levingt-cinq.Retiens-lebien, chaque foisque
nousdevronsdisparaître,tunousledonneras,commeçanoussauronsquetueslà.Ellehochalatête,puisserappelantqu’ilsnepouvaientpaslavoir,ellerépondit:–D’accord.Millepensées traversèrent son esprit, sur cequi s’était passé, sur le fait d’être le numérovingt-
cinq,d’êtreinvisible,etsurtoutsurcequel’URFdésirait.Lesagentsétaient-ilsvenuslachercher?Puissespenséess’arrêtèrentsurunseulsujet:songrand-père.Elles’inquiétaitdesasécuritéetdecequel’URFpourraitluiinfliger,àluietauxanciens.Allait-ilbien?Devait-ellepartiràsarechercheaucasoùilauraitbesoindeprotection?Elleeutl’impressionquesonsangsemettaitàpétiller,commetoujoursquandellecraignaitquequelqu’unsoitendanger.–Nousdevrionspeut-êtreallerretrouverlesautres,proposa-t-elle.
–Non,ditsatante,d’unevoixquinelaissaitpaslemoindredoutesurquidirigeaitlegroupe.Nousattendonsici.C’étaitça,leplan,etonnes’écartejamaisd’unplan.Kylie perçut quelque chose dans sa voix. Nervosité, inquiétude. Son sang se réchauffa dans ses
veines.–Lesmembresdel’URFsontdéjàvenusici?Ilssaventquenouspouvonsdisparaître?demanda-t-
elle.–Seulementsituleleurasdit,larembarraBrandon.Brandon,l’adoquinel’aimaitpas.Oh!si,audébut,elleluiplaisaitbeaucoup,maisquandKylie
l’avait prévenu sans prendre de gants qu’il perdait son temps avec elle, cela l’avaitmanifestementvexé. Depuis, il la snobait. Et chaque fois que la jeune fille réussissait quelque chose que lesprofesseurs leur enseignaient, commemodifier leur configuration, il semblait prendre sa réussitepouruneinsultepersonnelle.Cen’étaitpasunecompétition.Kylievoulaitsimplementapprendretoutcequ’ellepouvait,puis…retourneràShadowFalls.Rentrerchezmoi.Cetteidées’attardaquelquepartenelle,toutprèsdesoncœur.–Jeneleurairiendit,rétorquaKylie.–Cen’estpaslemomentdesechamailler,lançasatante.–C’estàcaused’elle,toutça!crachaBrandon.Avant,lesagentdel’URFn’étaientjamaisvenus.Et
quisaitcequ’ilsnousferontsijamaisilsnoustrouvent!–Tais-toi,ordonnaFrancyne.Maisdanslesilencequisuivit,Kylieentenditcequelesautresnedisaientpas.Ilsétaientd’accord
avecBrandon.Àcaused’elle,l’URFavaitdécouvertleurenclos.Laculpabilité l’envahit.Ellen’avait jamaisenvisagéque savenue icipuissemettre lesautresen
danger.Etpourtantc’étaitlecas.Sonsangnefitqu’untour.Imaginersongrand-pèreblessé,etparsafaute,fitbattresoncœurencoreplusvite.Kylietâchadedégagersamain.–Non,ditsatante.Situmelâches,tudeviendrasvisible.–Jedoism’assurerqu’ilsvontbien.Et…jepeuxredevenirinvisibletouteseule.–C’estimpossible,lançaBrandond’untonsec.Tunepeuxpasyarrivertantquetun’aspasvingt
ans.Toutlemondelesait.Kylie leva les yeux au ciel. Elle en avait assez de sa jalousie mesquine. Des bruits de pas
résonnèrent.Onfitl’appel.Ellereconnutlavoixdesongrand-père,ainsiquecelledesautresanciens.–Ilsvontvenirfouillerici,déclaraMalcolm.Lesadultes,veillezàtenirbienfortlamaindevotre
enfant.Rendez-vousàl’extrémitésuddelapropriété.Lebruitdegensquisortaientrésonnaàtraverscequi,mêmepourKylie,ressemblaitàunegrange
vide.Ellesentitl’étreintedesatantesursonpoignet,quiluimontraitladirectionàprendre,maissongrand-pèrerepritlaparole.–FrancyneetKylie,vousdeux,rejoignezlalisièredesboispar-derrière.Kyliesedemandapourquoionleurréservaituntraitementparticulier.
–Pourquoi?demanda-t-elleaprèsavoirentendus’éloignerlesbruitsdepas.Elletrouvaittoujoursétrangedeparleralorsquepersonnenepouvaitlavoir.–Enétatd’urgence,onneposepasdequestion.Lavoixdesatanterésonnaitdanslagrangevide.TenanttoujourslepoignetdeKylie,lafemmese
miten routeet, àpasprudents, l’entraînavers la sortie.Kylie suivait sa tantemaisn’arrivaitpasàgarderlesilence.
–Quesepasse-t-il?Pourquoionnesuitpaslesautres?demanda-t-ellequandellepassalaportedelagrange.Lalumièredel’après-midil’éblouit.–Ilsembleraitquecesoittoiqu’ilscherchent,expliquasongrand-père.Savoixétaittouteproche,maissasilhouetterestaitinvisible.–Maisjesuisuneprotectrice,insistaKylie,siquelqu’unabesoind’aide,ilfautquejerestedansle
coin!–Jetesens,bonsang!Oùes-tu?fitunevoixfamilièrederrièreKylie,quin’appartenaitniàson
grand-pèreniàsatante.Lesoufflecoupé,elleregardaderrièresonépaule.Àunequinzainedemètres,dansl’herbehaute,
setenaitquelqu’unquicomptaitbeaucouppourelle.–Derek!cria-t-elle.Puisellesesouvintquepersonne,àpartunautrecaméléoninvisible,nepouvaitl’entendre.–Nousdevrionsyaller!Sa tante la tira légèrementpar lebras,maisKylienebougeapas.Ellese raiditets’imprégnade
l’imagedeDerek,avidedetoutcequiavaitunlienavecsavieàShadowFalls.Sescheveuxchâtainclairs’agitaientauventsursonfront,luidonnantunairinsouciant,maisses
yeuxvertsmouchetésd’orétaientinquiets.Quefaisait-ilici?–Oùes-tu,Kylie?demanda-t-il,etlabriseemportasesparoles.
–Vaàlacrique!exigeasongrand-père.Tun’auraispasdûleurdireoùtuétais!Sonaccusationetsontonlamirentsurladéfensive.Siellenepouvaitpasvoirsongrand-père,elle
imaginaitsansmalsonexpression,sévèreetintransigeante.Ellesetournaversl’endroitd’oùvenaitlavoix.–Jen’airiendit,etnon,jenepartiraipas.Tuasmenti.Cen’estpasl’URF.Unsentimentdetrahisonl’envahit.–Jerépétaislesproposdeceuxquigardentlaporte.Quandbienmême,cen’estpasunmensonge.
Touslesdeuxtravaillentpourl’URF.Lesdeux?Quid’autreétaitlà?Elleentenditdespasvenirdelamaison.Sapremièrepenséefut
quecepourraitêtreLucas.Soncœurseserraà l’idéede levoir.Ladouleurdesadéloyautépesaitlourdsursoncœuretavaittoujoursungoûtamer.Pourtant,àmesurequelespasserapprochaient,ellenepouvaitpasplussedétournerquecesserderespirer.ElleregardaderrièreelleetvitBurnettJames,l’undesdirecteursducamp.Ladéceptionl’envahit,
maisellerefusaitdecroirequel’absencedeLucasenétaitlacause.Ellenevoulaitpasqu’ilvienne.Nevoulaitpas levoir,nimaintenantni jamais.Alorsmêmequecettepensée traversaitsonespritàtouteallure,ellesentitsoncœurbattrelachamadeàcausedesonmensonge.Maisunepartiedel’amertumequ’elleressentaitétaitaussiliéeàBurnett.Elleneluiavaitpasditau
revoirparcequ’ilauraitessayédel’empêcherdes’enaller.Àprésent,elleauraitvoululeserrerdanssesbras.S’excuserd’avoirnégligélapolitessed’unsimpleaurevoir.Satanterepritlaparoleetluitiralégèrementlamain:–Kylie.Tongrand-pèresaitcequ’ilyademieuxpourtoi.Écoute-le.Ilfautyaller.Kylieinspiraetessayadenepaslaissersesémotionslasubmerger.Maisilétaittroptard.Satête
tournaitalorsquetropdesentimentstourbillonnaientenelle.Solitude,regretetcolèrequ’onluiaitmenti.–Ilsaitcequ’ilyademieuxpourlui,maispasforcémentpourmoi.
–Tudoisluifaireconfiance,insistasatante,enresserrantsonétreintesursonpoignet.Viens,s’ilteplaît.Nousvoulonsseulementteprotéger.– Je n’ai pas besoin d’être protégée de Burnett ou Derek, répondit-elle calmement, la douleur
perceptibledanssavoix.Etapparemmentmongrand-pèredevraitmefaireconfianceluiaussi.Jen’aiditàpersonneoùj’étais.Jevousaidonnémaparoleetjel’airespectée.–Cen’estpasimportant,ditsongrand-père.Kylien’étaitpasd’accord,maisavantqu’ellepuisseformulercequ’elleressentait,ilpoursuivit:–Cequicompte,c’estqu’ilsvontessayerdeteforceràrentrer.Sinouspartonsmaintenant,nous
éviteronsuneconfrontation.–Parici,criaDerekàBurnett.Jelasens.Sérieusement,ellen’estpasloin.Kylieseconcentrasurl’endroitoùellepensaitquesetenaitsongrand-père.–Personnenemeforceraàfaireceque jeneveuxpas.Nieux…ni toi,ajouta-t-elle.Monbuta
toujoursétéderentreràShadowFalls,jetel’aiditdèsledébut.– Et je n’étais pas du tout d’accord, je te l’ai dit aussi, riposta son grand-père en haussant
légèrementleton.
Kylie,attiréeparlebruitdepas,regardadenouveaupar-dessussonépaule.ElleobservaBurnettserapprocher.Fier,fort,unpeutropimpétueux.Àbiendeségards,illuifaisaitpenseràsongrand-père.Ellepritunegrandeinspiration,puisrépliqua:–Jesuisvenueicidemonpleingré,etquandjedécideraidepartir,jeleferai.–Tuesbientroptêtue.–Etjecrainsdetenirmonentêtementdemongrand-père,rétorquaKylied’untonsec.PuisellereposalesyeuxsurDereketBurnett.–Viensavecmoi,Kylie,l’implorasatante.Etelleagrippabienfortlamaindelajeunefille.–Non,répétaKylieenregardantBurnetts’avancer.Ils’arrêtaàcôtédeDerek,àcinqmètresseulementdelajeunefille.Ellemouraitd’enviedecourir
versluietdesejeterdanssesbras.– La pizza dans lamaison principale était encore chaude, déclaraBurnett. Tu es sûr qu’elle est
encorelà?–Certain,réponditDerek.Etquelquechosel’énerve.Nivue,nientendue,maistoutdemêmeperçue,pensaKylie.Satanteluitapotalamain,commesice
légercontactallaitlapersuader.MaisriennepouvaitconvaincreKylie.–Jet’enprie,laisse-moipartir,luidit-elle,maislavieilledamerefusaitdelâcherprise.–Est-elleendanger?grommelaBurnett.Derekfermalesyeuxcommes’ilessayaitdetoucherintérieurementsesémotions.–Jenecroispas,réponditDerek.Elleestfrustréeetjesens…delasolitude.Etelleressent…une
sortede…déchiremententredeuxloyautés.Kylieeutleslarmesauxyeux.Onpouvaitfaireconfianceaudemi-Faepourdécryptersesémotions
sansjamaissetromper.Ellesavaitquesongrand-pèreetsagrand-tantesepréoccupaientd’elle,qu’ilsnevoulaientquesonbien,maiscommentpouvait-ellenepasserendrevisibleàBurnettetDerek?Pourquoipensait-ellequecelareviendraitàsemontrerdéloyaleenverssongrand-père?Elleavaitessayédejouerselonleursrèglesdujeu,vraiment.Maistrop,c’étaittrop.Burnettjetauncoupd’œilautourdelui,etKylieputjurerqu’illaregardait.–Ilyenad’autresici?
–Jen’ensuispassûr,réponditDerek,jepeuxjustesentirKylie,parceque…Il ne finit pas sa phrase,mais elle connaissait la réponse. S’il sentait si bien sa présence, c’était
parcequ’ill’aimait.Burnettsetintunpeuplusdroit.–M.Summers,ilfautquejevousparle.Immédiatement!–Commentsais-tuqu’ilestici?demandaDerek.–SiKylieestlà,alorsluiaussi.–Montrez-vous.Kylieentenditsongrand-pères’avanceràcôtéd’elle.–Taplaceestici,parminous,monenfant.Laisse-lespartir,déclara-t-il.Son épaule invisible effleura la sienne.Elle avait beau être furieuse contre lui, son contact et sa
voixdeténorluirappelaientsonpère.Onnepouvaitpasnierlesliensquilesunissaienttouslesdeux.–Jenepeuxpas,répondit-elle.–Laisse-lespartiretnousenparleronsdefaçonrationnelleplustard,proposasongrand-père,et
ellecompritausondesavoixqu’ilessayaitdetempérersonhumeur.–Jesuisrationnelle,dit-elle.L’étreintedesa tantese resserrasursamain,etKyliedutprendresurellepournepas la retirer
d’uncoupsec.–Non,tunel’espas,corrigea-t-il.D’un seul coup, l’humeur deKylie s’emballa. Peut-être ne lui avait-il pasmenti, quand il avait
affirméquec’étaitl’URF.Mais,sansl’ombred’undoute,ilavaitprévudelafairepartirpourqu’ellenepuissepassavoirquiétaitlà.Depuisquandcroyait-ilavoirledroitdedéciderdequiellepouvaitvoiretnepasvoir?Laréponsesurvintàlaminuteoùlaquestionluitraversaitl’espritdansunmurmure.Depuisqueje
suisarrivéeici.Quesaconnexionaumondeextérieursoitaussilimitéedepuissonarrivéeneluiavaitpas échappé. Pas de téléphone, pas d’ordinateur. Et ce n’était pas que pour elle : le mode de viecaméléonencourageaitl’isolement.–Non!Lâche-moi,intima-t-elleàsatante.Elleparlalentement,maissurunton,quil’espérait-elle,leurmontreraitbienqu’elleneplaisantait
pas.–Faiscequ’elletedemande,ditsongrand-pèred’untonvaincu.Enunbattementdecil,ilapparutsoussesyeux.Cen’étaitpastoutàfaitcommeunfantômequise
matérialisait.Davantagecommesil’airs’entrouvraitetleramenaitdanslemonde.Satante lâchalepoignetdeKylieetcettedernièresentitunlégerpicotement,puisellebaissa les
yeuxetconstataquesespiedsetsesjambesredevenaientvisibles.–Waouh!s’écriaDerek.Ellelevalevisage:ill’observait.Elleréprimal’envieirrésistibledesejeterdanssesbras.Jetant un coupd’œil àBurnett, elle décelaune légère surprisedans sesyeux.Son regard croisa
brièvement le sien, puis elle porta son attention sur son grand-père, qui se tenait à son côté,protecteur.–Quefaites-vousici?demanda-t-il,d’untonlugubreetmenaçant.
–LaviedeKylieestendangeretsijepeuxvoustrouver,alorsceluiquilarechercheaussi.–Cen’estpasluiquejeredouteleplus,rétorquaMalcolm,sanslaisserlemoindredoutesurlefait
qu’ilconsidéraitl’URFainsiqueBurnettcommelaplusgrandemenace.
–Vous laissez le passé vous aveugler et vous empêcher de voir la vérité, déclaraBurnett.Oui,l’URF aimerait testerKylie et certains d’entre nous ont décidé que cela ne se produirait pas,maisc’estMarioetsabande,quiontdéjàtué,quisontaprèselle.–Jeprotégerailesmiens,affirmalevieilhommeenredressantseslargesépaules.–Comment?Endevenantinvisible?Savez-vousqueMarioadéjàprisKylieenotageetqu’ellea
découvertqu’ilestuncaméléontoutcommevous,etdoncqu’ilconnaîtvotretruc?Celavousrendd’autantplusvulnérables.–Jesaistoutça,réponditlegrand-pèredeKylie,surladéfensive.–Alorsceladevraitsuffireàvouseffrayer.Marion’apaspassécescinquantedernièresannéesàse
cacherpendantquevosamisetvous-mêmen’avezcesséd’allerd’unendroitàunautre.Ilatuédesinnocents. Il a usédevospouvoirs pour assassiner les autres. Il a tué sonpetit-fils de ses propresmainsdevantKylie,parcequecegarçonladéfendait.SiMarioestprêtàsacrifiersadescendance,iln’hésiterapasàtuerceuxdesonespèce.–Attends,intervintKylie,quiessayaitdesuivre,commentsais-tuqueMarioestderetour?–Onl’arepéré.–Quil’arepéré?demandaMalcolm,d’untondanslequell’irrespectperçait.L’URF?Parceque
vousallezlescroire?–Jecomprendsvosréserves,observaBurnett,dontlesparolessortaientdeseslèvresserréespar
lacolère.Maisvousdevezcomprendre…Levisageduvieilhommedevintrougedefureur.–Vousosezmedemanderde comprendre ?Ceque je comprends, c’est quevous et lesgensde
votre espèce avez tué mon épouse. À cause de vous, je n’ai jamais connu mon fils. Ce que jecomprends…c’est qu’àprésent vousdésirez faire lamêmechose àmapetite-fille ! riposta-t-il enmartelantsapoitrinedesonpoing.Kylie s’aperçut queBurnett tâchait de se contenir,mais il ne parvenait pas à dissimuler la vive
colèrequienvahissaitsesyeux.Ilfallaitqu’elleintervienne,maiscomment?Malheureusement,ellen’eutpasletempsdetrouverunplan.Songrand-pèreavançad’unpasverslevampire.–Stop!Kylietâchades’interposerentrelesdeuxhommes.Maistroptard.Aucunnes’arrêta.Songrand-
père balança le poing, et Burnett reçut le coup en pleine mâchoire. S’il était loin d’être aussivigoureuxquecedernier,levieillardnemanquaitpasdeforcesetlevampiretomba.Lebruitd’unefureurabsoluesurgitd’undescombattants,deBurnett,supposaKylie.Enmoinsd’uneseconde,songrand-pèreseruasurluietlabagarresepoursuivit.Derekarrivaàtouteallure,maisdeuxcaméléonsmâlesapparurentbrusquementetchacunluipritunbras.Commentleschosesavaient-ellespudégénéreràcepoint,etsivite?
–Arrêtez!Kyliesesentitaussitôtpasserenmode«protectrice»,lasensationfamilièredepétillementtraversa
soncorps,maisrienàfaire,ellenesavaitpasoùappliquercetteforce.Déchiréeentredeuxloyautés.LesparolesdeDerekrésonnaientdanssatête.Lescaméléonsétaientdesonespèce.Songrand-père,desonsang.PourtantBurnettetDerekétaient…safamille,euxaussi.Soudain surgit une autre silhouette qui arracha son grand-père de Burnett avec une extrême
brutalité.Malcolmparvintàresterdebout,maisdécochauncoupdepoingaunouveauvenu.Sesentantobligéed’agiravantmêmederéfléchiràcequ’ellefaisait,Kylieattrapal’intrusdansla
bagarreetleprojetaloindesongrand-père.Impuissant,ilseretrouvaàprèsdetroismètresenl’air,etenretombantsesyeuxbleuscroisèrentceuxdelajeunefille.Lucas.Alorscommeça,ilétaitvenu.Le souvenir dugarçonqui embrassait sa fiancée surgit dans sa tête et résonnadouloureusement
danssoncœur.L’espaced’uneseconde,elleregrettadenepasl’avoirjetédeuxfoisplusfort.Ellesedétourna,etparvintnonsansmalàreprendresonsouffle,quandsesyeuxseposèrentsur
Derek,quiluttaitencorecontrelesdeuxcaméléonsquiletenaient.–Lâchez-le,dit-elle,bouillonnantderage,auxdeuxhommes.Ilsfaisaientpartiedugroupedeson
grand-père,maiselles’enmoquait.ElleneleslaisseraitpasfairedemalàDerek.Sesmotsétaientàpeinesortisdesabouchequed’unseulcoup,lestypesquitenaientledemi-Fae
tombèrentcommedesmouches.Celui-ciregardaleurcorpsd’unairrenfrogné,etseredressa,avecunesortedefierté.Voir les corps inanimés par terre fit naître une vaguede panique chezKylie.Qu’avait donc fait
Derek?Elleavaitvouluqu’ilslerelâchent,maispasqu’il…Elleserappelaledondugarçondefaireperdre conscience aux gens sans leur faire de mal. Du moins espérait-elle qu’il ne les avait pasblessés.Setournantsursadroite,ellerefusaderegarderLucas.Ellel’entenditsereleveretsentitqu’illa
fixait,qu’ill’imploraitduregarddeluijeterunbrefcoupd’œil.Ilpouvaitlasupplierdetoutcequ’ilvoulait:iln’auraitjamaisrien.Pourtant,moins de deux semaines auparavant, elle lui aurait donné son cœur.De qui se fichait-
elle?Elleleluiavaitdonné!Voilàpourquoic’étaitsidifficile.Ellesoupiraetrevintverssongrand-père,quisemblaitprêtàattaquerBurnettdenouveau,lequel
se relevaitpéniblement, la lèvre fendue.Sonexpressionet son langagecorporelvéhiculaientde laférocité,maislamainqu’iltendaitmontraitqu’ilvoulaitfairelapaix.Heureusementquequelqu’unavait du bon sens, parce qu’avec son cœur brisé qui repassait la douloureuse chansondans sa têteencoreetencore,Kyliesevoyaitmalmaîtriserlasituation.Malcolmfitunpasenavant.–Jeneveuxpasmebattrecontrevous,ditBurnett.Arrêtezimmédiatementavantqu’iln’yaitun
blessé.Kyliecompritqu’elledevaitagir.–Ilaraison,dit-elle,arrête,s’ilteplaît!Elleposaunemainsurlebrasdesongrand-père.Unedoucechaleurenvahitsapoitrine,passadans
sonbras,puisdanssesdoigts.EllesepropageadanslebrasdeMalcolmqui,peuàpeu,sedétendit.Ilinclinalatêteetinspiralonguementpoursereprendre.PuisilseprécipitaversleshommesqueDerekavaitendormis.– Ils vont bien, remarquaDerek, redoutant que l’hommene vienne l’attaquer.Mais l’agressivité
dontMalcolmavaitfaitpreuveunpeuplustôtavaitdisparu.Kylieserappelalecalmequ’elleluiavaittransmis.S’était-elleinstinctivementtransforméeenfée?
Forcément,non?Lucasserapprochad’unpas.Sanslefixerdirectement,elleremarquasesmouvementsducoinde
l’œil. Elle tâcha d’emprunter un peu de la sérénité qu’elle venait de transmettre à son grand-père.Maiscelanefonctionnaitpas.LadouleurdelatrahisondeLucassurgitdanssoncœur,écrasanttouteobjectivitéetluinouantlagorge.Songrand-pèrepritlaparole:–Toutlemondes’enva,àpartKylieetM.James.–Pourquevouspuissiezdenouveaul’attaquer?demandaLucasd’untonduretfurieux.Et pourtant, elle aurait pu jurer reconnaître le remords dans sa voix. Elle imaginait bien son
expression,sesyeuxremplisd’ombresetderegret,maisellerefusaitdeleregarder.–Faitescequ’ildit,ordonnaBurnett.Kyliecompritquecommeelle,ilreconnaissaitquesongrand-pèreavaitentenduraison.Tout le monde s’en alla peu à peu. Kylie sentit de nouveau Lucas se déplacer, mais ses pas
hésitèrent quand il se postaderrière elle.Sonodeur emplissait l’air qu’elle respirait et la questionqu’ilchuchotaiteffleurasesoreilles.–Tumedétestesaupointderefuserdemeregarder?Siseulementjepouvaisledétester,pensaKylie.Puisilpoursuivitdansunmurmure:–Ellen’ajamaiscomptépourmoi.Iln’yaquetoi.Lebruitdesespasquis’enallaientressemblaitauxdernièresmesuresd’unechansontriste.Sesparolesplanaientencoredansl’air.EllesenvahirentKyliedeplusieursvaguesd’émotion.Elle
savaitqueLucasdisaitlavérité;elleétaitencorefée,elleressentaitsessentiments,ilss’infiltraientdanssapeau,seglissaientdanssoncœuretenflaient jusqu’à ladouleur.Maissavoirqu’ildisait lavériténechangeaitriendutout.
Qu’il ait eu l’intention ou pas de la blesser, il l’avait fait.Comment aurait-il pu ignorer qu’elleseraitdévastéed’apprendrequ’ilétaitpromisàuneautre?Nepouvait-ildevinerqu’elleseraitblesséededécouvrirquetoutletempsoùqu’ilss’étaientfréquentés,ilvoyaitcettefilletoutenfeignantdesesoucierd’elle?Ellesursautaquandunlégercontacteffleurasesomoplates.Unfrôlementlentetdoux,pasdansle
but de séduire ni d’attirer l’attention.Uniquement d’apaiser. Le calme chaud du toucher ne laissaitaucundoutesurl’identitédelapersonne.Derek.Ladouleurs’atténuadanssapoitrine,etd’unbattementdecils,ellefitdisparaîtreleslarmesquilui
piquaient les yeux. Tâchant de reprendre le contrôle de ses émotions imprévisibles, elle restaimmobile,lesyeuxfermés,seconcentrantsurlesoleilsursapeauetlabrisesursesjoues.–Kylie?LavoixdeBurnettluifitouvrirlesyeuxd’uncoup.Songrand-pèreetluisetenaientjustedevantelle.L’inquiétudeselisaitsurleursvisages.–Tuvasbien?demandasongrand-père.–Super.Elleébauchaunsourire,aussipeucrédiblequelaréponsequ’ellevenaitdedonner.–Alorsviens,ditlevieilhomme,ilfautquel’onparle.Àlamaisonetdevantunetassedethé.Burnett luiadressauncoupd’œilrapide: iln’étaitpasdupeetvoyaitqu’ellen’allaitpasbiendu
tout.Elle,de soncôté,discernaautrechosedansson regard.Ouavait-elle lu sesémotions?De lapeur. Comme s’il craignait qu’elle n’aime pas ce qu’il allait révéler. D’ailleurs ce qu’elle avaitentenducesdernierstempsneluiplaisaitpasdutout.Puiselleserenditcomptequ’ellen’avaitpenséqu’àelle.Égoïstement,elles’étaitconcentréeuniquementsursapropredouleur.SiBurnettavaitfaitledéplacement,cen’étaitpeut-êtrepasseulementàcaused’elle.Elles’arrêtabrusquementetattrapalevampireparlecoude.–Toutlemondevabien?Que…ques’est-ilpassé?
Cinqminutesplustard,Kylie,assiseàlatabledelasalleàmanger,attendaitquesatanteleurserveduthéglacéavantdecommencerlaconversation.Ellepriaitsimplementpourquecelan’aggravepasce qui s’était produit devant la grange. La tension entre Burnett et son grand-père remontait toutdoucement.CelledeKylie,en revanche,avaitdéjàatteint sonparoxysme.Quelqu’unavait intérêtàprendrelaparole,sinonelleallaitcraquer.Etparquelqu’un,ellepensaitàBurnett.Il avait repoussé la réponse à sa question jusqu’à ce qu’ils aient un endroit où parler.Ce qui la
mettaitenétatd’alertemaximale :elleavait raison.Iln’yavaitpasqueMario, ils’étaitpasséautrechose.Quelqu’unallaitmal.Surlaroutedelamaison,elleétaitdevenuefolleenimaginantlepire.Àprésent,assisedevantune
pizzafroideaucentredelatable,elleréprimaunesensationdenauséealorsquediversesversionsdupire transperçaient son cœur. Elle savait que Derek et Lucas allaient bien. Elle n’aurait pas dû sesoucierdeLucas,maispourtantelles’enfaisait.Holidayallaitforcémentbien,sinonBurnettn’auraitpasétédanssonétatnormal.Ill’aimaittrop
pournepaslaisserparaîtreuneémotions’illuiétaitarrivéquelquechose.Cequilaissait…Ellesongeaimmédiatementàsesdeuxplusprochesamies–aveclesquellessongrand-pèreavait
insistépourqu’elleneparlepaspendantunmoment.Maisparcequ’ilavaitfinalementacceptéqu’ellediscuteavecHoliday,elleavaitessayédes’yfaire.Mais…s’illeurétaitarrivéquelquechose…Ohnon!Sansmêmequ’elleconnaisselaréponse,deslarmespiquèrentlesyeuxdeKylie.
Ellepensa tout d’abord àDella.Lavampirebornée était enmissionpour l’URF.Quelque choses’était-ilmalpassé?Dellaallait-ellebien?Kylie se revit luidirequecelane luiplaisaitpasqu’elle travaillepour l’URF,maisquandDella
était carrément venue lui demander si elle voulait qu’elle refuse d’aider l’organisation, elle ne luiavaitpasréponduparlanégative.Ellesavaitàquelpointsonamiedésiraittravaillerpourl’agence.Maiss’illuiétaitarrivéquelquechose,Kylieauraitregrettésaréponseàtoutjamais.L’inquiétuderéduisitsapatienceenunfiltoutmince.–Est-ceDella?lâcha-t-elleenfinalorsquel’onposaitunverredethédevantelleetquesatante
sortaitdelapièce.Illuiestarrivéquelquechose?Burnettlaregarda.–Non.Dellavabien…pourcequej’ensais.Elleesttoujoursenmission.–Alorsqui…ques’est-ilpassé?Burnettpritleverrefroiddanssesmainsencoupe,maisnelesirotapas.Sicen’étaitpasdusang,
ilnebuvaitpresquerien,àpartlecafénoirqu’ellel’avaitvuconsommercertainsmatins.–AprèsavoirétéinformésqueMarioavaitétévuàFallen,nousavonsassistéàunincident.Nous
nesommespassûrsquecelasoitlié.–Ilyaeuunblessé?Cesmots la piquèrent à vif quand ils franchirent ses lèvres,mais quelque part, elle savait avec
certitudequequelqu’unnes’enétaitpastiréindemne.Ilfittournerleverredeuxfoisdanssesmainsavantderépondre:–Helens’estfaitattaquer.Kylie en eut le souffle coupé.Helen était lademi-fée laplus timide et laplusdociledeShadow
Falls.Quidoncvoudraitluifairedumal?Laréponserésonnacommeunéchonondésiré.Mario.–Est-cequ’elle…vabien?L’adjectifvivantetraînaitsurseslèvres,maiselleredoutaitdeleprononcercarcelaluiauraitfait
tropdemal.–Oui,répondit-il,çavaaller.Etnousnesavonsmêmepassitoutcelaestliéoupas.–Cen’étaitdoncpasceMarioquicherchaitKylie,observasongrand-père.Elleleregarda,puisenfonçauneporteouverte:–Burnettneseraitpaslàs’ilnelecraignaitpas.Àcontrecœur,celui-ciopinaenjetantuncoupd’œilàKylie.–Nouslecraignons.Maisenréalité,aucunepreuveneleconfirme.Elleaétéattaquéepar-derrière.
Ellenesesouvientderien.– Comment va-t-elle ? demandaKylie en priant pour que Helen ne garde pas de cicatrice – ni
physiqueniémotionnelle.–Elleestplusfortequenousnelepensions.Sesblessuresétaientgraves,maissansmettresavieen
danger. Comme tu peux l’imaginer, Jonathon reste à son chevet nuit et jour. Ses parents sont àl’hôpital, et il y a eu desmoments gênants…Apparemment,Helen ne leur avait pas parlé de sonnouvelamour.Kylie imagina le grandvampire efflanqué et piercé tenir lamain d’Helen sous le regard de ses
parents.–J’imagineaussiqu’ilesthyperénervéetqu’ilveutsevenger.UnsemblantdesourireeffleuraleslèvresdeBurnett.Maisilnedurapas.– Je vois que tu connais très bien Jonathon.Nous avons posté des gardes à l’hôpital, au cas où
l’agresseurreviendrait.
–Jepeuxyaller?demandaKylie.–Non,répondirentBurnettetsongrand-pèreenmêmetemps.Lepremierpoursuivit:–SiMarioestderrièretoutça,c’estpeut-êtreunstratagèmepourt’attireràl’hôpital.L’idéequ’elleetelleseulesoitlaraisondel’agressiond’Helenluifitmalaucœur.Puislacolère
parvintàsefrayerunchemindanslepeudeplacequirestait.ElleenavaitmarredesgensqueMariofaisaitsouffriràcaused’elle.Maiscommentpouvait-elleymettreunterme?C’étaitlaquestionàunmilliondedollarsàlaquelleilfallaitrépondre,décidaKylie,etleplusvitepossible.Burnettseredressasursachaise.– Après l’attaque d’Helen, j’ai commencé à m’inquiéter pour la sécurité de Kylie, reprit-il en
regardantMalcolm.Jemesuisditquesijepouvaisvoustrouver,alorsluiaussi,j’ensuissûr.JecroisqueKylieseraitplusensécuritésielleretournaitaucamp.–Etmoijenesuispasd’accord,répliquasongrand-père.–Vousn’êtespasd’accord?Burnettbouillonnaitderage.–Marioaétéclair:ilveutqueKylierejoignesongroupedecaméléonsescrocs,sinonillatuera.Il
sesentmenacéparsonpouvoirdeprotectrice.– Je sais tout cela, insistaMalcolm.Vous n’êtes pas le seul à quiKylie se confie.Mais si cette
attaquesurl’autrefillevisaitàéloignerKylie,alorscelasignifiequ’ilnesaitpasoùellesetrouve.–Maispourcombiendetemps?demandaBurnett.Marion’estpasdugenreàlaissertomber!–Peut-être,maiss’ilestdéjàparvenuàentreraucamppourattaquercettefille,pourquoivoudriez-
vousmefairecroirequ’ilnerecommencerapaspouratteindreKylie?–Mais…Kyliepritlaparole,maisleregardglacialqueluiadressaBurnettluiintimadelelaisserfaire.Elle
fermalabouched’uncoup,mêmesicelal’agaçait.–Jecomprendsvosinquiétudes,ditBurnett,toutefoisl’agressionn’apaseulieudansl’enceintedu
camp.Il fit denouveau tourner leverrede théentre sesmainsetbaissa lesyeux sur le liquideambré,
commes’ilréfléchissaitavantdeleboire.Puisillevalesyeux.– Ilyaunautre facteuràprendreencompte :nous sommesplusnombreuxpourcombattrecet
escrocetsesadeptes.Etsijesaisquecetteidéevousmetprobablementenrage,j’aiégalementl’aidede l’URF. Avec le bureau à Fallen, près du camp, je peux disposer d’une centaine de personnesentraînéesenquelquesminutes.Malcolmserembrunit.–Vousavezraison,celamefaitenrager.IlmarquaunepauseetKylielevitserrerlesdentsavantdereprendrelaparole.–Jedoisvousdirequelaseuleraisonpourlaquellejesuisassisàcettetableavecvous,c’estparce
que ma petite-fille a un respect profond pour vous. En l’absence de son vrai père et vu saconfigurationfamiliale,vousavezàbiendeségardsreprésentéunefigurepaternellepourelle.Burnettpassaledoigtsurlacondensationquelethéformait,commesientendretout lebienque
Kyliepensaitdeluilemettaitmalàl’aise.–J’espèredetoutmoncœurquevousméritezsonrespect.Levieilhommeinspiraprofondément.–Celadit,lalogiquedontvousfaitespreuvelàmedéconcerte.Vousprétendezéloignermapetite-
filledel’URF,etpourtantvousn’hésiteriezpasàleurfaireappelpourlaprotéger.Commentest-ce
possible?–Je ferai toutpournepasqu’ils la testent, simplementparceque jenesuispassûrque les tests
soient à cent pour cent sans risque. Je crois que leur empressement à trouver des réponses lesempêched’enmesurerlesconséquences.Maisjevousenprie,n’allezpasimaginerquejelescroiscapables de reproduire ce qu’ils ont fait à d’autres par le passé. L’URF n’est pas parfaite,M.Summers,aucuneorganisationne l’estoune lesera jamais,maiscen’estplus lamêmeagencequ’àl’époque.Lesilenceenvahitlapièce.Latensionfutpalpable.–Laissez-moiramenerKylieàShadowFalls,oùjecroisqu’elleestlaplusensécurité,poursuivit
Burnett.J’auraidesgardesquiattendrontMarioetquilesurveillerontquandilpasseraàl’acte.Nousseronsprêts.Nousl’attraperonsetmettronsuntermeàtoutcela,unebonnefoispourtoutes.–Etnouspouvonsfairelamêmechose,ajoutasongrand-père,letonencorepincé.LagrimacedeBurnetts’accentua.–Regardez-moidans lesyeuxetdites-moihonnêtementquevouscroyezquevouset lesvôtres,
vousêtescapablesdegérercela.Malcolmentrelaçasesdoigts–bien fort–etposasesmains jointessur la table.Puis il les fixa,
commes’ilsoupesaitlesparolesdeBurnett.Quandillevalesyeux,ilcroisaceuxdeKylie,puisilregardaBurnettd’unairrenfrogné.– Je ne suis pas du tout d’accord avec votre plan ; ni avec votre impression que nous sommes
prétendument incapables de protéger l’un des nôtres. Encore que je puisse me raccrocher auxpréjugés du passé. Des préjugés qui, j’en suis certain, feront partie de moi jusqu’à mon derniersouffle.Ils’éclaircitlagorgeetlaissaéchapperunsoupir.–Toutefois,simapetite-fillem’aapprisquelquechosedepuisqu’elleestici,c’estqu’elleestelle-
même.Doncsij’espèrequ’elleécouteramonconseilàcesujet,jesuisconscientqueladécisionluiappartiendra.J’aiperdubientropdemembresdemafamilledanscettevie,etjetiensbientropàellepourlafairefuirenessayantdelagarderauprèsdemoi.LeslarmespiquèrentdenouveaulesyeuxdeKylie.Elleposasesmainssurcellesdesongrand-
père.Illesserradanslessiennesetlaregarda.–Resteici,Kylie.Resteetcontinueàapprendrequituesetoùesttaplace.Soncontactlaréchauffa.Etunepartied’ellevoulutcapituler.Maisàquelprix?
AvantqueKylieneparle,elleconstataàl’expressiondesongrand-père,qu’ilconnaissaitdéjàsadécision.Ellevitlemalqu’elleluifaisaitetressentitsadouleur.–Tunemeperdraspas.L’endroitoùjevisnechangerarien.Jeseraitoujourstapetite-fille.Maisje
croisqueBurnettamarquédespoints:jedoisrepartirlà-bas.C’était,pensait-elle,leseulchoixqu’ellepuissefaire.ShadowFalls,c’étaitchezelle,maiscelan’expliquaitqu’unepartiedesadécision.Toutau fond
d’elle,ellesavaitqueBurnettnesetrompaitpas.Sisongrand-pèreetsonenclosdecaméléonsétaienttrèsdoués,ilsavaientpassélamajoritédeleurvieàéviterlaconfrontation,ànepass’ypréparer.IlsnefaisaientpaslepoidsfaceàMarioetàsonclanassassin.LeproblèmeétaitqueKylien’étaitpassûrenonplusqueShadowFallspuissefairefaceàMario.Et
sioui,combienencoreseraientblesséscommeHelen,oupire, tués?Cen’étaitpascommesicelan’étaitjamaisarrivé.Alorsqu’elleavançaitencalantsespassurceuxdeBurnettjusqu’àlaported’entrée,ilsgardèrent
lesilence.Lanuitlesenveloppait.Unepartieducieloccidental,teintéderose,indiquaitledépartdusoleil.Quandilsparvinrentàlaporte,illaregarda.–J’appelleraitongrand-pèrepourfixerl’heureàlaquellejeviendraitechercherdemain.Kylieacquiesça.Elleavaitinsistépouravoirletempsdedireaurevoiràsongrand-père.Maisà
présent, son cœur ne voulait pas voir Burnett partir. Ils n’avaient pas vraiment eu l’occasion dediscuter.Cedernierquartd’heure,songrand-pèrel’avaitpasséàdemanderàBurnettcommentillesavaittrouvés.Celui-cileurexpliquaquec’étaitgrâceàl’agenceimmobilière.Quandsongrand-pèreavaitvendusamaison,Burnettavaitputrouverquis’étaitoccupédelavente,etgrâceauxarchives,ilavaitdécouvertuneautremaisonquiavaitappartenuauvieuxmonsieur.–Promets-moiqueHelenvavraimentbien.–Commejetel’aidit,ellevaguérir.–EtlamissiondeDella?Toutsepassebien?Ellen’estpasendanger?
–Madernièrecommunicationavecelleaconfirméquetoutallaitbien.Kyliehochalatête.–EtHoliday?–Elleestinquiète.Maiselles’esttoujoursfaitdusoucipourvous,lesjeunes.Elleestcommeça,
voilàtout.–Maisentrevous,ça…va?Ilsourit.–Oui,trèsbien.LessouriresdeBurnettétaienttellementraresqu’elledevinaqu’effectivement,çadevaitallertrès
bienentreeux.–EtMiranda?demandaKylie.–Ellesesentseule.Depuisledépartdesesdeuxcolocs,ellenesaitplustropoùelleenest.Comme
beaucoupd’autres,elleseraravied’apprendrequeturentres.–Biensûr.Sansaucuneconfigurationchangeanteàvérifier,ondoitplutôts’ennuyer,c’estclair!Burnetthaussalesépaules.– Je crois que tu n’en reviendrais pas si tu savais combien de personnes ont demandé de tes
nouvelles.Tuesloind’êtrelapariaquetuimagines,Kylie!–Tout lemondememanqueaussi, avoua-t-elle. Jepeux te serrerdansmesbraspour tedireau
revoir?IlarquaunsourcildésapprobateuretKyliecompritimmédiatementpourquoi.Burnettn’étaitpasdu
genreàpassercomplètementl’éponge.–Jenepensaispasmériteruncâlin, lança-t-il, lui rappelantqu’ellene luiavaitmêmepasditau
revoirquandelleavaitquittélecamp.–J’aieutort,admit-elle,reconnaissantqu’ellen’avaitquecequ’elleméritait.Jesavaisquetum’en
voudrais.Maiscelan’auraitfaitqu’empirerleschoses.–Oui,jet’enaivoulu.J’auraisinsistéentedisantquetuavaistort,dit-il.Etj’auraisbienfait.–Pasforcément.J’aiappriscertaineschosesici.Deplus,j’aipuprofiterdemongrand-pèreetde
magrand-tante.Letempsquej’yaipassén’apasétéqu’unegrosseerreur.–Jecomprendstonbesoind’enapprendreplussurtoi-mêmeetjesuisd’accord,ilyaunmoment
pourseréconcilieraveclafamille,maispasquandtavieestendanger.Kylieleregarda:–Doncnotrebien-êtreestplusimportantquelafamille?Holiday,c’esttafamille,non?Ellesavaitqu’elleavaitmarquéunpoint.Iln’essayamêmepasdebaratiner.–J’enconviens.–Waouh,c’estraredetapart!dit-elleensouriant.
–Alors,profites-en!rétorquaBurnett.Maiscen’estpasjuste:tuconnaissaismaseulefaiblesseettut’enesservicontremoi!–Êtreamoureux,cen’estpasunefaiblesse,observaKylie.Puissoninquiétudechassalalégèretédumoment.–Es-tuvraimentsûrqueMarioafaitcelaàHelen?–Suffisammentpourêtreici,dit-il.Etsuffisammentpourordonneràdesgardesdesurveillercet
endroitcesoir.Marioadécelétonpouvoir,Kylie.Tuconstituesunemenacepoursonexistence.Pourtant,ellesesentaitimpuissantefaceàlui.Elleregardaderrièrelaported’entréeetvitlesdeux
silhouettesdeLucasetDerek.Ilssetenaientàcinqmètresl’undel’autre,commes’ilsn’étaientmême
pasensemble.Oucommes’ilsétaient…postéspour…Allaient-ilsluiservirdegardes?L’idéequeLucaspuisseveillersurellealorsqu’ill’avaittellementfaitsouffrirfitnaîtreunenouvellevaguededouleurdanssapoitrine.–PasLucas,murmura-t-elle.–PasLucasquoi?demandaBurnett.Kyliesetrouvaunpeupuériledeleressentir,etplusencoredeleformuler,maisellenevoulaitpas
lesavoirsiprèsd’elle.Elles’enpréoccuperaitdèslelendemain,quandellerentreraitàShadowFalls,maispascesoir.–JeneveuxpasqueLucasveillesurmoi.Burnett ouvrit la bouche pour dire quelque chose,mais se ravisa. Puis, fronçant les sourcils, il
hochalatête.Kylieignorasonairdésapprobateuretallaleserrerdanssesbras.L’étreintedeBurnett,bienquefroideàcausedesatempératurecorporelledevampire,laréchauffa.
Savoir que le lendemain elle rentrerait chez elle lui permit d’y mettre plus facilement un terme.Pourtant,l’idéedeseretrouverenprésencedeLucasrendaitdoux-amersonretouràShadowFalls.Kylie se remit en route vers la maison, mais à mesure qu’elle se rapprochait, elle redoutait la
conversation qui se tiendrait sûrement à l’intérieur. Comme elle avait besoin de quelquesminutespour trouver lesmots qui aideraient songrand-père et sa tante à comprendre, elle passa devant lamaison sans s’arrêter et se dirigea vers le belvédère. Le ciel étincelait d’un rose vif et le soleilcouchantéclairaitlascèned’uneteintedorée.Alorsqu’elleavançaitentreleschênesverts,sonregards’arrêtasurlatillandsiequisebalançaittoutdoucementdanslabrise.Ellesedemandasisongrand-pèresesentiraitobligédepartir,maintenantqueBurnettavaitprouvé
qu’il était facilede les retrouver.Elle espérait quenon.Aussimécontente fût-elle cette semaine, labeautédeslieuxneluiavaitpaséchappé.Leséchosdelanatureannonçaientlatombéedelanuit–unoiseau,quelquescriquets.Puislecrépusculesemblaretenirsonsouffleetlatranquillitédel’instantvolaenéclatsquandune
brindillesebrisa.LecœurdeKyliemanquaunbattementlorsquesonregardseposaverslarangéed’arbres.Pourquoi cepetit bruit lui semblait-il importun, elle l’ignorait. Il s’agissaitprobablementd’unecréatureinnocentequirentraitchezelleavantlanuit.Pourtant,cebruitn’avaitriend’innocent.Une ombre se faufila soudain entre les arbres. Sans pouvoir expliquer pourquoi, au lieu de
s’enfuir,Kyliesesentitobligéed’allerverselle.Enseruantverslalisière,ellecrut,l’espaced’uneseconde,reconnaîtrelasilhouettefémininequi
entraitetsortaitdesténèbresàtouteallure.Kylies’arrêtabrusquement.Commentétait-cepossible?Commentpouvait-elleêtre là?Quefaisait-elle?Elle l’avait suivie.
ElleavaitforcémentsuiviLucas.Sinon,queferaitlàsafiancée?Sanstropsavoirsiellevoulaitaffrontercettefille,Kylie tournales talons.Ellen’avaitparcouru
quequelquesmètresquandelleentenditunbruitdepasdanslaterredouce,calésurlessiens.–Queveux-tu?lâchaKylied’untonsec,sansregarderlapersonnequiavançaitàcôtéd’elle.–Parler, répondit celle-ci,mais la voixn’était pas lamême.Cen’était pas le ton léger et fleuri
qu’elleavaitentendupromettresonâmeàceluiqu’elleaimait.Cen’étaitpasMonique.Kylies’arrêtaetregardaJenny,uncaméléondedix-septans.Elleétaitbruneetmesuraitlamême
taille.Kyliel’avait-elleprisepour…?–C’étaittoi?–C’étaitmoiquoi?fitJenny.
Kylieregardadenouveaulestraitsdelajeunefille:unnezdroit,unmentoncarréetdesyeuxvertclair tirant sur legris.Sonvisage lui était familier ;oualors, elle ressemblait àquelqu’unqu’elleconnaissait.–Tu…tuétaisdanslesbois?–Oui.Jevenaisdecheznous.Kylieeutunbrefregardpourlapersonnequ’elleavaitprisepourMonique.–As-tuvuquelqu’und’autre?–Nonpourquoi?Ilyavaitquelqu’un?Kylieregardadenouveaulebois.–Peut-êtrepas,admit-elle.Maisellen’étaitpastotalementconvaincue.Enloup-garouqu’elleétait,
Monique pouvait semontrer très discrète si elle le désirait. Ou s’enfuir très rapidement. Kylie seremitenroute,pensantplusvitequ’ellenemarchait.–Alors…tuveuxbien?demandaJenny.Perduedanssespensées,Kylielevalesyeux.–Jeveuxbienquoi?–Quel’ondiscute,expliquaJenny,etelleserrasesmains,commesielleredoutaitquelquechose.–Je…Jedoisparleràmongrand-pèreetàmatantetoutdesuite.Maistun’asqu’àpasserunpeu
plustard?Elleremarqual’expressioninquiètedeJennyettrouvabizarrequecelle-civeuilleluiparler.Jenny
nes’étaitpasmontréedésagréableavecelledepuisqu’elleétaitlà,maisellen’avaitpasnonplusététrèsaimable.–Quelquechosenevapas?–Larumeurditquetut’envas?C’estvrai?Kylieacquiesçad’unsignedetête.Jennysemorditlalèvreinférieure,nerveuse.–Quand?–Demain,réponditKylie.Desvoixvenaientdelamaisondesongrand-père.Kylieregardaverslaporte.–Je…jedoisyaller.Jennypartitcommeuneflèche.Kylieseretournaetvitquatreanciensdeboutsurleporche,comme
surledépart.Elleregardaderrièreelleetessayadeseconvaincrequ’elleavaitvuJennyetpasMonique.Mais
ellen’enétaitpaspersuadée….Quandellesedirigeaverslamaison,ellecroisalesanciens.Ilsluidirenttousbonjourd’unsigne
detête,maisellesentitlatensionémanantd’eux.Elleétaitsûrequ’ilsétaientvenusvoirsongrand-pèrepourparlerd’elle.SielleétaitsoulagéequecedernieraitfaitlapaixavecBurnett,cen’étaitpasforcément le cas pour les autres. Et cela, comprit Kylie, pourrait causer des problèmes. Nonseulementàelle,maisaussiàMalcolm.Ellehésitaà frapperquandelleentradans lamaison.Elleyavait séjourné treize joursetni son
grand-père ni sa grand-tante ne lui avaient donné l’impression qu’elle gênait, mais elle n’avaitsimplement pas le sentiment d’être chez elle. Peut-être parce que, au fond, elle savait que sa placen’étaitpaslà,maisàShadowFalls.EllerevitBurnettdéclarerqueveniriciétaituneerreur.Etmêmesicelaluisemblaitinexact,ellen’étaitpasprêteàformulerleschosesainsi.Elleentenditdesvoixprovenantdelasalleàmanger,maisquandelleyentra,ellesseturent.Trop
vite.Detouteévidence,onnevoulaitpasparlerdevantelle.Elles’arrêtasurleseuil.Satanteetsongrand-père,assisàtable,laregardaient.Siseulementellesavaitquoidire!Pourtant,unepartied’elle
avaitconsciencequequoiqu’elledise,cela leur feraitde lapeine.Peut-êtreBurnettavait-il raison.Elleavait commisuneerreurenvenant.Neserait-cequepour lechagrinqu’elleavait causéà songrand-pèreetàsatante.–Jesuisdésoléesij’aicréédesproblèmes.Jesuisdésoléeque…–Net’inquiètepas,monenfant;assieds-toi,larassurasatante.Veux-tuquejeréchauffetapizza?–Non,jen’aipasfaim,ditKylieens’asseyantetenregardantsongrand-père.Lesancienssont-ils
énervésàcausedecequis’estpassé?Sont-ilsencolèrecontremoi?Etvous,m’envoulez-vous?Songrand-pèresoupira.–Ilssonténervés,oui,maissansraisonparticulière.Ilsn’aimentpaslechangementet,cesjours-ci,
ilyenaeubeaucoup.Surtoutàcausedemoi,pensaKylieensemordantlalèvre.–Quelqu’unm’aditunjourquec’étaitquandriennechangequ’ilfallaitcommenceràsefairedu
souci.–Jepariequecettepersonnen’étaitpasuncaméléon,lançasongrand-père.–Non,réponditKylie.
–À tort ou à raison, nous avons tendance à apprécier nos zones de confort, lui répondit-il, enhochantlatête.–Jepeuxfairequelquechosepouraider?demanda-t-elle.Lesridesentrelesyeuxduvieilhommes’accentuèrent.–Resteavecnousetcontinueàapprendrelesensdetonhéritage,dit-il.Tun’asfaitquegratterla
surfacedetoutcequ’ilyaàdécouvrir.–Malcolm,intervintFrancyne,nelametspasdansl’embarras!–Jecrainsqu’ellenes’ymettetouteseulequandellerepartira,observa-t-il.–Jeferaitoutmonpossiblepourarrangerleschoses,maisjenepeuxpasrester,déclaraKylie,qui
sentitsagorgeseserrer.–Jesuisdésolé,dit-il,enlevantlamain.Tatantearaison,jetemetslapressionetjenedevraispas.
Maissachequetuvasmemanquer.–Toiaussi,réponditKylie.Vousallezresterici?Ilhaussalesépaules.–Silesautresanciensobtiennentcequ’ilsveulent,alorsnouspartirons.–Parcequ’ilsnefontpasconfianceàBurnett?demandaKylie.–Jesuissûrequec’estenpartiepourcela.–Commentferai-jepourvouscontacter?–HaydenYatestravailleencoreàShadowFalls.Haydenétait lecaméléonquesongrand-pèreavaitembauchépourgarderunœilsurKylie.Pour
uneraisonquelconque,quandelleétaitpartie,elleavaitsimplementsupposéqu’ils’eniraitluiaussi.–Ilenseignetoujourslà-bas?Songrand-pèreopina.– Il les a convaincus que tu avais manœuvré pour qu’il t’emmène loin du camp. Ils ne savent
toujourspascequ’ilest,etc’esttrèsbiencommecela.Kylie hocha la tête, mais ne put s’empêcher d’être méfiante. On ne bernait pas Burnett aussi
facilement.–Enfait,Haydenpenseleplusgrandbiendelafaçondontleschosessontgéréesàl’école.–Tuvois,ditKylie,ilyapireendroit!
Cettenuit-là,nesachantpasàquelleheureBurnettpasserait laprendre,elle fitsesbagages.Puiselles’étenditsursonlit,danslesdrapslesplusdouxetlacouettelaplusmoelleusequ’elleeûtjamaiseus, et passa en revue les photos de son père.On aurait pu croire que rester avec son grand-pèreatténueraitlemanquepaternel,maisnon,celaavaiteuexactementl’effetcontraire.Voircethomme–uneversionplusâgéedesonpère–n’avaitfaitquerenforcersonmanque.Après avoirpassé tropde tempsà regretterque les chosesne soientpasdifférentes,Kylie resta
allongée à fixer le plafond.Elle craignait que quitter son grand-père ne lui fasse de la peine.Elles’inquiétaitpourDella, etpourMirandaqui se sentait abandonnéeparellesdeux.Elle se faisaitdusoucipoursamèrequiétaitpartieenAngleterreetquicouchaitsûrementaveccetypequiluidonnaitlachairdepoule.Oh!bonsang,ilfallaitqu’ellechassetrèsvitecetteimagedesatête,sinonelleallaitvomirlepeu
depizzaqu’elleavaitavalé.EllesepréoccupaitaussidelafaçondontelleallaitgérerLucas.–Etmoi,alors,tunet’inquiètespaspourmoi?Le froid frappa Kylie si fort que son souffle se coupa quand l’oxygène glacial envahit ses
poumons.Elleremontalacouettejusqu’àsonmenton.–Jedevraism’inquiéterpourtoi?demandaKylie,etellejetauncoupd’œilaufantôme.Ses cheveux détachés pendaient pratiquement jusqu’à sa taille et l’apparition portait le même
peignoirblanccouvertdesang.Etelleparaissait…morte.Plusmortequ’auparavant.Kylie ne comprenait pas. Si un fantôme avait le choix entre avoir l’airmort ou presque vivant,
pourquoinechoisissaient-ilspastoujoursladernièreoption?–Non,netefaispasdesoucipourmoi.Jesuisdéjàmorte.Tuvois?Elleserrasajupecontreelleet
révélaunedouzainedefentesensanglantéesdansletissublanc.Onauraitditquequelqu’unluiavaitadministrédescoupsdecouteau.–C’esthorrible!lançaKyliequidétournalesyeuxuninstant.Quit’afaitça?Lefantômeneréponditpasetcontinuaàexaminerlestrousdanssarobe.–Enréalité,cen’estpasaussihorrible.Etpourêtrehonnête,lapersonnepourlaquelletudevrais
tefairedusouci,c’esttoi.Parcequesitunem’écoutespasenfin,tumourras.Exactementcommemoi.–Écouter quoi ?T’écouter déblatérer sur le fait que je dois tuer quelqu’un, c’est ça ? demanda
Kylieenfronçantlessourcils.–Oui.Ellecontinuaàfixerlestrousdanssarobe.Etnevapast’imaginerquecesoithorrible.Ôter
unevie,ilyapireaumonde.–D’accord,jesuiscurieuse.Combiendepersonnesas-tutuées?Larevenantelevalesyeux,commesielleréfléchissaitàlaquestion.Etcelaeutl’airdeluiprendre
beaucoupdetemps.Commesielledevaitcalculer.–Tul’asvraimentfait,hein?Tun’aspastuéqu’uneseulepersonne?–J’ensuisàunevingtaine,maisjesaisquej’enailoupéquelques-unes.Quin’avaientpasl’airde
compterbeaucoup.–Qu’étais-tu?Unetueuseàgages?–Non,enfinsi,plusoumoins.Jen’aipastiréprofitdemonboulot.Jemesuisjusteoccupéedes
problèmesd’unautre.Ettrèspeudemoi.Lesangapparutbrusquementsursesmains.Ellelesregarda.Ilgouttaitduboutdesesdoigts.Ilen
tombaunpeusursarobedéjàensanglantée,etsurletapisbeige.L’odeurenvahitlapièceetdonnades
haut-le-cœuràKylie.Elleremarquaqu’elledevaitseréjouirdenepastrouvercetteodeuralléchantepourl’instant.–Essaierais-tudem’emmenerenenferavec toi?C’estbiença?J’aientenduparlerdemauvais
espritsquivontenenferetquifontcegenredechose.Maisjerefused’yalleretjerefusedet’aideràcommettreunmeurtre,alorslaissetomber.Pigé?Kylie ferma les yeux et, comme le lui avait montré Holiday, elle tâcha d’avoir des pensées
positivesquiempêchentlesfantômesdeprendrelecontrôle.Lefroiddisparut,maisl’espritchuchotadanssatête.–Jeneveuxpasquetuaillesenenfer.Jeveuxquetuyenvoiesquelqu’und’autre.–Va-t’en,va-t’en,va-t’en,murmuraKylie.Jenetueraipersonnepourtoi.Jamaisdelavie.Pasmoi.Kylie respira un bon coup.Mais le craquement à sa fenêtre la fit sursauter violemment et elle
poussaunpetitcriperçant.Sonregardseposasurlavitre,maisellenevitrien.Unefoislapaniqueinitialepassée,ellepensaaugeaibleu–celuiqu’elleavaitsauvédelamort.La
créaturel’avait-ellesuiviejusque-là?Elleseleva,sedirigeaverslafenêtreet,avecentêtedesimagesdefantômesenroutepourl’enfer,
tiraprudemment les rideauxdedentelleblanche.Unvisagedéformécolléà lavitresurgitdenullepart.Kyliehurla.
–Kylie?Toutvabien?Lavoixdesongrand-pèrerésonnaderrièrelaportedelachambreaumomentmêmeoùlajeune
filleparvenaitàdistinguerlevisageàlafenêtre.Jenny.Lajeunecaméléonsinerveusequiluiavaitparléunpeuplus tôtetqueKylieavaitprisepourMonique.Quefaisait-ellecolléeà lavitre?Quevoulait-elleàuneheuresitardive?Jennydésignaduregardlaportedelachambreensecouantlatête.Lapaniquegagnasonvisage.
Elleouvritgrandslesyeux,l’implorantdenepasdireàMalcolmqu’elleétaitlà.–Oui,jevaisbien,j’aidûrêver,mentit-elle,enespérantquesongrand-pèrenesoitpasenmode
vampire,sinonil l’auraitpercéeà jour…Enjetantuncoupd’œilà lafenêtre,ellevitapparaître lesoulagementdanslesyeuxvertsdelafille.–Dorsbien,alors,ditlavoixderrièrelaporte.–D’accord,réponditKylie.Elleattenditquelespass’éloignent,puisallaouvrirlafenêtre.Jennyportaundoigtàseslèvresetluifitsignedesortir.Auparavant,Kyliepassa la têtepar laporteet jetauncoupd’œilautourd’elle.Ellenesavaitpas
tropcequ’ellecherchait,maisnevoulaitplusde surprises.Laprésencede Jenny l’inquiétait assezcommecela.Justeaumomentoùelleallaitsortiràquatrepattes,Jennyl’arrêtaetsepenchaversl’intérieur.–Cesonttesbagages?Kylieregardasavaliseposéesurunechaise.–Oui.–Prends-les,murmura-t-elle.–Pourquoi?–Ilfautquejetefassesortird’ici.–Non.Jem’envaisdemain.
–Pasdutout.Entoutcas,tuneparspasoùtupensesaller.–Qu’est-cequeturacontes?demandaKylie.ElleeutenviederefermerlafenêtreaunezdeJenny,card’instinctellecompritquelanouvellene
seraitpasbonne.
Dixminutes plus tard, alors qu’elle traversait sans se presser le fond de la propriété, sa vieillevalisemarronàlamain,KylieneparvenaittoujourspasàcroirecequeJennyluiavaitrévélé.–Jenepeuxpascroirequemongrand-pèrefassecegenredechose.–Jetel’aidit,cen’estsûrementpaslui.Maislesautresanciens.Pourêtrehonnête,c’esttongrand-
pèreleplustolérantdetous.Kylies’arrêta.–Maisiln’accepteraitpascela!Ilneleslaisseraitpasmekidnapperetmegardercontremongré!–Écoute,jenesaismêmepass’ilestaucourant.Siçasetrouve,ilsagissentderrièresondos.Mais
toietmoi,nousavonsvulesautresanciensluiparler.LacolèreetledouteenvahirentsiviteKyliequeleslarmesluimontèrentauxyeux.–Maism’enallercommecela…jetrouvecelasiinjuste…jedevraisretournerluiparler.–Non!Situyretournes,ilyadesrisquesqu’ilsnousretrouvent.Jeconnaisl’emploidutempsdes
gardesetsinousnenousdépêchonspas,ilsteprendront.Kylie inspira. L’odeur de la forêt envahit ses poumons et elle essaya de rationaliser. La nuit
semblaitramperentrelesarbresetl’airétaitépais.–Pourquoi?Pourquoiferaient-ilsunechosepareille?–C’estclair,non?Tuesuneprotectriceettuappartiensauxcaméléons!–Jen’appartiensàpersonne!– Je ne voulais pas dire ça… je sais que tu n’appartiens à personne. Mais eux, c’est ce qu’ils
pensent.Ilsonttort,ilsonttortsurdestasdesujets.Pourquoijefaisça,selontoi?KylieregardaJenny,etlaquestionvibradanssatête.–Eneffet,pourquoi fais-tu ça, tiens ?Et nemedis pas que c’est simplement parceque tu crois
qu’ilsonttortouparcequetum’aimesbien,non,parcequ’onnepeutpasdirequetum’aiessouventadressélaparole.Moninstinctmeditqu’ilyaautrechose,etengénéral,ilnesetrompejamais!Elledétournalesyeux,maisKylieeutletempsd’ydécelerdelaculpabilité.–C’estunesortedepiège?demandaKylieenregardantautourd’elle.–Non,cen’estpasunpiège,réponditJenny.Kyliereconnutlaconvictiondansletondelajeunefille,maisellen’étaitpasenmodevampireet
nepouvaitpasjugersiellementait.ElleregardaJennyplusattentivement.–Soittut’expliquesimmédiatement,soitjetournelestalonsetjerentre.–Expliquerquoi?demandaJenny,frustrée.–Pourquoituvoudraism’aideralorsquetunem’appréciesmêmepas!Jennymaugréa:–Écoute,jenet’aimaispasparcequetuplaisaisàBrandon.Jesuiscenséeêtresafiancée,etsicela
merendfurieusequ’ilspensentpouvoirmediredequijedoistomberamoureuse,celam’atoutdemêmeénervéequandilestdevenufoudetoi.–Safiancée?Tuveuxdirequelesanciensessaientd’arrangerdesmariages?–Ilsessayentdetoutfaire.Ilssonttousfous!Enfinpastongrand-père,pascomplètement,mais…
(Jennyfrottasamainsursonjean,commesiavouercequ’elleressentaitlarendaitnerveuse.)Ilsnous
protègentdetout.Ilsprétendentquec’estparcequ’ilsneveulentpasquelesgensnousvoienttantquenousn’avonspaslacapacitédedissimulernosconfigurations.Maisregarde-toi!Tuasvécudanslemondenormal;tunet’espasfaittuerettun’espasnonplusdevenueesclave!–Esclave?–Oui,ilsseserventdelapeurpournousfaireobéir.Pournousconvaincrederestericietdene
pasallerdanslemonde.Kyliesecoualatête.–Jen’airienentendudetel.Mais elle se rendit brusquement comptequ’elle s’était vraiment sentie isoléedepuis sonarrivée.
Elleavaitététellementsubmergéequ’ellenes’enétaitpasaperçue.–Ilsfonttrèsattentionàcequ’ilsdisentdevanttoi.Maistudoismecroire.Ilsveulentqu’onreste
ici.Pournousprotéger, selon eux,mais…parfois, je penseque cequ’ondevrait redouter le plus,c’estdeselaisserétoufferparcemodedevie.Ets’ilsdécouvrentqu’onn’estpasd’accordaveceux,ilyaunsacréprixàpayer.–Cequimeramèneàmapremièrequestion,ditKylie.Situassipeur,pourquoifais-tuça?Elledétournadenouveaulesyeux.–Pourquoirefuses-tudemeledire?insistaKylie.Jennysoupira.–C’estpourHayden.–HaydenYates?–Nousparlonsparfois.Mesparentsnelesaventpas,lesanciensnonplus.Ettunedoislerépéterà
personne.Kyliefitlecalculdanssatête,comparal’âgeprobabledeHaydenetceluideJenny.–Ilesttropvieuxpourtoi.LesyeuxvertsdeJennys’écarquillèrent.Ellesecoualatête.–Cen’estpasmoncopain!C’estmonfrèreaîné!Kylietâchad’enregistrercettenouvelleinformation.–Alorspourquoitesparentsrefuseraient-ilsdeluiparler?–Parcequ’ilestparti.Lorsqu’uncaméléons’enva, ilestcensécouper lespontsavecsafamille
pournepasnousexposer.–Maismongrand-pèrel’acontacté,fitremarquerKylie.–Comme je te l’aidit,desdeuxmaux, tongrand-pèreest lemoindre ici. Ilme laissemême lui
parlerde tempsen temps.Maisnousn’avonspas le tempsdebavarder.Jesuissérieuse,sinousnepartonspastoutdesuite,lesgardesvontnousrattraper.Unbruitdepasponctual’avertissementdeJenny.– Zut ! dit-elle, cours ! Continue vers le sud, tu devrais parvenir en lisière de la propriété. Tu
devraismêmeyarriveravantlesgardes,situtedépêches!–Mais…–File!J’aipromisàmonfrèrequejeteferaissortird’ici!L’urgence dans le ton de Jenny l’avait fait détaler comme une flèche, mais à peine avait-elle
parcourucentmètresquesapoitrineseserrasouslemauvaispressentimentd’abandonnerJenny.Ellesentit le changement subtil dans son corps à l’idée que quelqu’un puisse être en danger. Ellen’abandonneraitpascettefille,non,pastantqu’ellen’étaitpassûrequeceuxquisedirigeaientversellenereprésentaientpasunemenace.Ellerebroussacheminetrepartitdansl’autresens.
–Mince alors ! fit unevoix rauquedans l’obscuritéde la forêt, unevoixqui lui était familière.Lâche-moi!–Laissez-latranquille!hurlaJenny.Ellerentrechezelle.LespiedsdeKyliemartelèrentencoreplusdurementlesollorsqu’elleseruaenlisièredesarbres.
Ellenes’étaitpasencorearrêtéequ’ellereconnutsavoix.EllevitDerekavecuneJennytrèsénervée,accrochéeàsondos,lesmainssursesyeuxetlesjambesenrouléesautourdesataille.Derekécartad’uncoupseccesmainsdesesyeux,maisJennymaintintsonétreinteautourdesa
gorge.–OùestKylie?grogna-t-il.Etilvirevoltasurlui-mêmepourfairetombersonattaquante.Kylie faillit sourireenvoyantJennyperchéesurDerek.Sonsouriredisparutquandelleconstata
qu’ilnebougeaitplusetfermaitlesyeuxpourseconcentrer.Ellecompritqu’ilallaitfairecetrucquilaisseraitJennysansconnaissance.–Arrête!Jesuislà!braillaKylie.–Tuleconnais?demandaJenny,lesjambesenserranttoujoursDerek.–Oui,jeleconnais,lâche-le,suggéraKylie,quin’étaitpassûrequeDerekcomprennequelajeune
fillen’étaitpasunemenace.Jenny relâchasonétreinte,puis recula rapidementd’unpas,commesi l’instantdepaniquepassé
avaitfaitplaceàdelapeur.Derekseretourna,regardal’adolescented’unairrenfrogné,cequeJennylui rendait bien.Au bout d’une seconde seulement, sa colère s’apaisa.Tous deux s’affrontèrent duregard,sejaugèrent.–Alorspartez…touslesdeux,ditJennyenagitantlesbrasetendétournantrapidementlesyeuxde
Derek.Allez-y,avantquelesgardesnevoustrouvent.–Quesepasse-t-il?demandaDerekàKylie.Ellevitsesyeuxseposersurlavalisequ’elletenaitàlamain.–Elleprétendquelesanciensveulentm’empêcherdepartir.Kyliesentitalorslepincementdelatrahison.Songrand-pèreétait-ilmêléàcela?–MaisBurnettadit…–Vousn’avezpasletempsdeparlerdeça!lançaJennyd’untonsec.DerekregardaKyliecommes’ilattendaitqu’elleprenneladécision.–Ondevraityaller,déclara-t-elle,tristeàl’idéedenepassavoirsisongrand-pèrel’avaittrahieou
non.EllejetaundernierregardàJenny.–Merci,dit-elle.Jennyluiadressaunsouriretimideethochalatêtejusteavantleurdépart.Kylie cala sonpas sur celuidugarçon, sachantqu’il nepourrait pas la suivre.Lavalisequ’elle
tenaitfermementàlamainétaitlégère,maisrebondissaitdemanièregênante.–J’auraispulafairetomber!Tusaisquejenevoulaispasfairedemalàcettefille!–Jesais.Elleréprimaunsourire.C’étaitquoi,leproblèmed’egodesmecs?Le bruit de leurs pas remplit l’obscurité. Mais, soudain, l’ambiance fut différente. Si Kylie ne
parvenait pas à l’expliquer, sa peau devint ultrasensible et son cœur battit un peu plus vite. Peur.Danger.Etaucoupd’œilrapidequeDerekluilança,Kyliecompritqu’ellen’étaitpaslaseuleàleressentir.
Ils hâtèrent brusquement le pas et parvinrent à une centainedemètres duportail enmoinsde cinqminutes.Kylieauraitpuyarriverendeuxfoismoinsdetemps,maispasledemi-Fae.Ilspourraient
facilementsauterpar-dessus.Elleallaitparlerdesonplanaugarçonquandellesesouvint:cen’étaitpasparcequ’ilsnepouvaientpasvoirlesgardesqueceux-làn’étaientpaslà.Elleattrapasonamiparlebras,etl’entraînaderrièreunarbre.–Attends,murmura-t-elle.–Lavoieestlibre,dit-ilenjetantunregardcirculaire.–Passûr,répondit-elle,cesontdescaméléons.Leregarddujeunehommeseposabrusquementsurlaclôture,etsonfrontseplissadeperplexité.
Ellevitàlasecondeprécisequ’ilcomprenaitcequ’ellevoulaitdire.–Commentpourrions-nouslesavoir…s’ilssontinvisibles?demanda-t-il.Kylie se souvint que si elle ne pouvait voir personne quand elle était invisible, elle pouvait
entendre.–Laisse-moivérifierquelquechose,dit-elle.Ellefermalesyeuxetseconcentrapourdisparaître.L’espaced’uninstant,ellecraignitquecelane
marchepas.Maisl’espècedechatouillementbizarrecommençadanssespiedsetmontajusqu’àsesgenoux.Les yeux de Derek s’écarquillèrent quand elle disparut. Kylie se concentra pour écouter. Son
regardpassaentre lesarbres,essayantdedistinguerquelquechosedans lenoir.Àcôtéd’elle, elleentendait Derek respirer. Elle lui jeta un coup d’œil et le vit, le regard toujours fixe, comme s’iltrouvaitsonnumérodedisparitionunpeuexagéré.Puisellel’entendit.Lebruitdepas.Mince.Quelqu’un approchait. Sans doute les gardes. Paniquée, elle chercha la bonne chose à faire. Ils
pouvaientl’entendre,invisibleoupas.Maisaumoinsilsnepouvaientpaslavoir.EtDerek,alors?Elle décida de réapparaître. Le garçon la regarda, légèrement stupéfait. Elle se pencha et lui
murmuraàl’oreille.–Ilssonttoutprès!Elle lui prit lamain et entrelaça ses doigts aux siens. En temps normal, Kylie ne craignait pas
d’affronterlesgardes.Lescaméléonsn’étaientpasdescombattants,maisàlapeurquiluipiquaitlapeau,ellecompritqu’ellenepouvaitpasprendrederisques.Pasmaintenant,pasquandilsétaientsiprèsdes’échapper.Ellesepenchatoutprèsdesonoreilleetmurmura:–Jevaisterendreinvisibleavecmoi.Tunedoispasfairelemoindrebruitcars’ilsnepeuventpas
nousvoir,ilspourrontnousentendre.Tucomprends?–Attends?Tuvasme…?Ellel’interrompitenportantundoigtàseslèvres.Puis,sansvraimentsavoirsielleréussirait,elle
fermalesyeuxtrèsfortetnepensaplusqu’àdisparaîtreavecDerek.Lentement,sesjambess’évanouirent,puisellevitlamaindudemi-Faeétinceler.Elleentenditson
légerhalètementquand ils’enrenditcompteàson tour. Il luivintà l’espritque toutecettehistoired’invisibilitépourraitnepasfonctionnerpourlesnon-caméléons.Etsicelaluifaisaitdumal?Ellefaillitlâchersamain,maisécoutasoninstinctquiluidisaitquetoutiraitbien.Bonsang,elleespéraitvraimentnepassetromper!Tousdeuxdisparaissaient lentement.Elle secramponnaà sonpoignetet sentitqu’il effleurait sa
maindesonpouce.Quandellelevalesyeuxsurlui,ellevitqu’ilregardaitsabouche.Ilsepenchatrèslégèrement.Ohmince!Heureusement,avantqueseslèvresnesecollentauxsiennes,ilavaitdisparu.Etelleaussi.Quandellesentitsonsoufflesurseslèvres,ellereculajusteunpeu.–Est-cequetum’entends?
Elle murmurait, pensant toujours au baiser qu’ils avaient failli échanger. Pourquoi lui avait-ilsemblétellementcoupable?Ellen’avaitplusbesoind’êtreloyaleenversLucasàprésent.Maiselledevaitrespectercequiluiparaissaitjuste,etcequasi-baisernel’étaitpas.Peut-êtrepascomplètementmauvais,maispasjustenonplus.–Çava?demanda-t-elle.Elleentenditsaréponsepresquesilencieuse.–Oui,c’esttellementcool.Étrange,commeonpouvaitinterpréterdessituationsdifféremment.Lapremièrefoisquecelalui
étaitarrivé,elleavaitflippécommeunefolle.Biensûr,elleétaittouteseuleetnesedoutaitmêmepasquec’étaitpossible.–Net’éloignepasdemoi,sinonturedeviendrasvisible,murmura-t-elle.Entoutcas,ellepensaitquecelafonctionnaitainsi.Oh!super!Etsicen’étaitpasaussisimple?–Mecramponneràtoi,c’esttellementfacile,murmura-t-il,etileffleuradenouveausonpoignet
dupouce.Jen’aijamaisvouluquetupartes…–Cen’estpaslemoment…–Jesais.Unsemblantdeculpabilitérésonnadansletondesavoix.Kylietâchad’apaisersonespritquitournaitàcentàl’heure,entrelequasi-baiseretlacraintequ’il
nesouffredecettetransformation.Heureusement,ilavaitl’aird’allerbien.Àprésent,ellepriaitpourqu’ilsoitaussisimpledelefaireréapparaître.Commeelleespéraitnepasavoircommisd’erreur!–Etmaintenant ? demanda-t-il d’une voix à peine audible. Elle sentit son souffle sur sa joue et
changeadeplace.–Sij’aibiencompriscequeJennyvoulaitdire,lesgardesarpententlapropriété.J’entendsdespas,
etjesupposequecesonteuxquiapprochent.Ondiraitqu’ilssontdeux.Jepensequ’ilsvontcontinuerleurronde.–Ondiraitunplan.Ondiraituntrucditauhasard,oui!songeaKylie.Ils restèrent totalement silencieux et invisibles. Les pas se rapprochaient de plus en plus. Leur
souffle résonnait trop fort dans l’air nocturne.Kylie tendit l’oreille pour vérifier si l’on entendaitleurrespiration.Derekbrisaunebrindillesoussonpiedetlebruitenvahitl’air.Kylieseraiditetpriapourquecelanelestrahissepas.–As-tuentendu?fitunevoix.C’étaitcelledel’undescaméléons.Kylieneleconnaissaitpasassezpourl’appelerparsonnom.
Maiscelaneluiserviraitàrienpourl’instant.S’ilslesdécouvraient,ilsappelleraientprobablementlesanciens.Etcequ’ilsferaientalorsladépassait.–Qui est là ? cria une autre voix, et les bruits de pas se rapprochèrent. Ils étaient deux, c’était
évident.–Parlezmaintenant,sivousêtesdesnôtres,fitladeuxièmevoix,etelleserapprochatellementde
Kyliequecelle-ciputjurersentirlachaleurdesoncorpsinvisible,cequilaglaçadepeur.D’autantplusquelecorpssematérialisaàuncentimètred’elle.L’étreintedeDerekseresserrasur
sesdoigts,luiindiquantqu’ilressentaitsaterreur.Legardecaméléonrouxjetauncoupd’œilautourdeluietcria.–Ilyaquelqu’un?
D’autresbruitsdepassefirententendre.–Cen’estquemoi!criaunevoixféminine,àplusieursmètresderrièreKylieetDerekinvisibleset
silencieux.KyliereconnutlavoixdeJennyavantquecelle-cinesurgissedesténèbres.Ellelesavaitsuivis,à
l’évidence, pour s’assurer qu’ils avaient réussi. Elle culpabilisa légèrement d’avoir douté del’adolescente.–JennyBeth?Quefais-tudanslesboisàcetteheuredelanuit?demandal’undesgardes.Derek serra lamain deKylie, qui supposa que c’était parce qu’il s’inquiétait pour Jenny. Cette
dernièreavançadequelquescentimètres.– Je n’arrivais pas à dormir, je suis sortie faire une petite promenade, et… ensuite… j’ai vu
quelqu’un.–Qui?–Jenesaispas,jeneleconnaissaispas.Cheveuxblondroux,unpeuplusd’unmètrequatre-vingts.
Corpulencemoyenne. Jeune.Et quand le clair de lune l’a éclairé, on aurait dit qu’il avait les yeuxclairs.Kylie semordit la lèvre. Jenny décrivait-elle Derek ? Lequel se posa silencieusement la même
question.L’autrecaméléonsematérialisaàcôtédesonpartenaire.–Ondiraitl’undecesgardesquecessalestypesdel’URFnousontcollés!Celuiquinousamis
K.O.!J’adoreraismefrotterdenouveauàlui!LatensiontraversalamaindeDereketenvahitlebrasdeKylie.Lebesoindeleprotégers’agita
danssapoitrine.L’undesgardesregardaversJenny.–Pourquoies-turestéeiciavecunétrangerquis’enfuyait?demandal’homme.– Je n’ai rien fait de tel.En fait, c’est pour ça que je suis arrivéepar là. Il se trouvait entrema
maisonetmoiquandjel’airemarqué.Ilsedirigeaitverslapartienorddelapropriété.JemerendaischezM.Summerspourlesignaler.–Jesavaisquecelafiniraitmal, lançalegarded’untonsec.(Ilsortitunportabledesapocheet
composaunnuméro.L’autreserapprochadeJenny.)Jeteraccompagneàlamaison.–Jecroisquejepeuxmedébrouillertouteseule.–Pasavecdesétrangersincontrôlablesquisebaladent.Kylie vit Jenny regarder dans sa direction et celle de Derek, comme si elle savait où ils se
trouvaient.Elleeutl’aird’envoyerunmessagesilencieux,quidisaitqu’unefoislesgardeséloignés,ilsdevraientcourir.UnmessagequeKylien’avaitpasbesoinderecevoirdeuxfois.L’hommequiétaitautéléphoneracontaitqu’ilavaittrouvéJenny.–Elleprétendqu’ilsedirigeaitverslenord…Nousleferons…Ilraccrocha,puisregardal’autregarde.–Raccompagne-laàlamaison,etrejoins-moidanslapartienord.Nousavonsl’ordredesonner
l’alarmesinousnetrouvonspascegarsrapidement.– Deux fois en vingt-quatre heures, je trouve que c’est un sacré record, observa l’autre avec
dégoût.–Ouais,voilàcequisepassequandnouscommençonsàamenerdesétrangers.Protectriceounon,
jesavaisquel’arrivéedecettefilleicificheraitlebazar.Etdirequ’ilsveulentlagarder!Le cœur deKylie se serra. Elle avait cru Jenny,mais entendre ça le rendait plus réel. Et faisait
encoreplusmal.LecontactdeDerekseréchauffaetKyliecompritqu’ilessayaitdelaconsoler.L’undestypesserapprochadel’endroitoùellesavaitquesetenaitledemi-Fae.Celui-cichangea
deplace,paniquéàl’idéequequelqu’unenvahissesonespace,mêmeinvisible.Legardejetauncoupœilautourdelui,commes’ilsedoutaitqu’iln’étaitpasseul.–Etsil’undenousallaitvérifiersielleestencoredanssarésidence?–Ouais,ondevraityaller,lâchal’autred’untoncinglant.Dès qu’ils découvriraient sa disparition, ce serait d’autant plus difficile de s’échapper, réalisa
Kylie.LesgardesetJennys’enallèrent.Kylieattenditqu’ilsnepuissentpluslesentendrepourparler.Elle
avaitdesmotssurleboutdelalangue,quandelleentenditd’autrespasserapprocher.L’undesgardesétait-ilredevenuinvisible?Ouétait-cequelqu’und’autre?KylieserralamaindeDerek,dansl’espoirdeluifaireprendreconsciencedel’arrivéedunouveau
venu.L’étreintedujeunehommesecrispacommes’ilcomprenait.Lesbruitsdepass’arrêtèrentàquelquescentimètresd’eux.Elleessayadecontrôlersarespiration,
priantpourquel’airquiglissaitdansleurspoumonsnelestrahissepas.
Plusieurs longuesminutes s’écoulèrent. Enfin, celui qui traînait dans le coin laissa échapper unsouffle profond rempli d’émotion et s’en alla. Kylie fut fortement tentée de crier le nom de songrand-père.Carlacadencedecespas,ainsiquecelongsoupir,luidisaitquelquechose.Maisellenepouvait en être sûre. Peut-être prenait-elle simplement ses désirs pour la réalité.Le désir qu’il aitdécouvertsadisparitionetque,mortd’inquiétude,ilviennelachercher.Ledésirqu’iln’aitpassucequelesautrescaméléonsavaiententête.Maiscelapouvaitaussi leurattirerdes tonnesdeproblèmes.Alorselleattenditsansbouger.Dès
quelesbruitsdepasdisparurent,Kylielança:–Ilfautpartir,etvite!Quandjetelâcherai,turéapparaîtras,enfin…j’espère.
–Tuespères?fitDerek,avecuneoncedepeurdanslavoix.Ohmince!C’estlapremièrefoisquetulefais?–Euh…oui,avoua-t-elle.–Alors,espéronsqueçamarchera.Il lui lâcha lamain.Kylie ferma lesyeuxet s’adjurade redevenirvisible.Une secondeoudeux
passèrent,etelle lesouvrit.CommeellenevoyaitpasDerek,soncœurbattit lachamadeet lapeurtourbillonnadanssapoitrine.–Derek?murmura-t-elle.Deslarmesemplirentsesyeux.Oh!non,avait-ellefaitquelquechosed’horrible?–Jesuisderrièretoi,dit-il.Kylieseretournad’uncoupetsoupiradesoulagementenlevoyant.–Tuesprête?demanda-t-il.Etilsouritcommes’ilavaitluetappréciéqu’ellepaniqueàl’idéedeleperdre.Celavoulaitbien
direqu’elletenaitàlui.–Prête,dit-elle.Dépêchons-nous!Ilscoururent,côteàcôte.Elleseretintd’atteindreunrythmequ’ilnepouvaitpastenir.Quandilsparvinrentdevantlaclôturedeunmètrecinquante,Kylieluipritlamain,prêteàl’aider
s’ilenavaitbesoin.Iln’eutpasl’airfroissépourautant.Ilsouritmêmeetcollasapaumecontrelasienne.Lesourireet lasatisfactionquienvahirentsonregardrappelèrentàlajeunefillequ’ilavaitessayédel’embrasser,etcelanefitqu’aggraversonangoisse.Était-cesimplementtroptôtaprèssonchagrind’amouravecLucas?OutroptardpourDerek?Serendantcomptequecen’étaitpaslemomentdepenseràça,elleaccéléra.Serrantleursmains
avecforce,ilsfranchirentlaclôtured’unbond.Ilsatterrirentdansunbruit sourd.Derek l’attrapapar la taille.Sa respirationsoulevait son torse
sous le T-shirt sombre, en rythme avec la sienne. Leurs regards se croisèrent une seconde, unesecondetoutdroitsortied’unfilmd’amour.Dugenreavecdelamusiquedouceenfondsonorequiseterminaitparunbaisertorride.Ellereculad’unpas.–Ondoityaller.Ladéceptionselutsurlevisagedudemi-Fae,puisdisparuttoutaussivite.Ellesavaitqu’ilavaitlu
sesémotionsetressentisontrouble.Iln’insisteraitpas,dumoinspastrop.Maisessayerdeluivolerunbaiseravaitététrèstémérairedesapart.Peut-êtreétait-ceunnouveauDerek?Peut-êtredevait-ellefaireunpeuplusattention?Le garçon arracha d’un coup sec la valise de sa main et ils se remirent à courir. Fuyant ses
nouveauxproblèmes,maisfonçantdanslesprécédents.
IlsavaientparcouruunbonkilomètreetdemiavantqueKylien’abandonneetnes’arrête.Ellejetauncoupd’œilautourd’elle.Ilsétaienttoutprèsd’uneroute,etsielleavaitperdusesrepères,elleétaitsûreetcertainequ’ilssetrouvaientàmoinsdehuitkilomètresdeShadowFalls.Auloin,unoiseauappelaitsonoiselle.Dedouxbruitsd’insectesvibraientdansl’airnocturne.Les
odeurs verdoyantes de la flore tourbillonnaient autour d’eux. Le danger imminent était écarté. Ilsavaientparcouruduchemin– lesgardesneviendraientpas jusqu’ici.Maisuneinfimesensationaucreuxdesonventreluirappelaitdenepasenêtreaussisûre.–JedevraisappelerBurnett,ditDerek.–Oui,jepense.
Ellesongeaalorsàl’explicationqu’elledonneraitauvampiresévère.Lafrustrationmontaenelle.Burnett serait furieux, et il en déduirait que son grand-père lui avait menti tout du long. Kyliereconnaîtraitqueçasemblaitprobable,mêmesiellen’arrivaitpasàycroire.Elleluiconserveraitsaconfiance,tantqu’elleneluiauraitpasparlé,tantqu’ilnelaregarderaitpasdanslesyeux,tantqu’ilnelenieraitpas.Elleneleconnaissaitpasdepuistrèslongtemps,maiscependantassezbienpoursedireques’il l’avait trahie, il assumerait. Il avouerait tout,prétendraitmêmequ’ilavait ses raisons,maisnementiraitpas.Unefoisdeplus,ellesedemandasic’étaitluiquiavaitétélàunmomentplustôt,avantqu’ilsne
s’enfuientencourant.Illuimanquaitdéjà,etcelal’émut.–Hé…tuvasbien?demandaDerekenposantlamainsursonavant-bras.–Çavaaller,répondit-elle,seforçantàycroire.–Alors…tuneveuxpasquej’appelleBurnett?Dereklaissatomberlavaliseetsortitletéléphonedesapoche,maishésitaàcomposerlenuméro,
attendantsonautorisation.–Appelle-le,dit-elle.C’étaitlaseulechoseàfaire.ElledevaitjustegérerlemécontentementdeBurnettàl’égarddeson
grand-père.Ilappuyasurunboutonetfronçalessourcils.–Plusdebatterie.(Ilappuyasurd’autrestouches.)Jesuissûrdel’avoirrechargépourtant,zut!Ilsursautaetlâchasoudainsontéléphone.–C’estquoi,cebazar?Cetrucm’acarrémentenvoyéunedécharge!s’inquiéta-t-il.Kylieregardalesétincellesjaillirdutéléphone,puisunbourdonnementsortitdel’appareil,suivi
d’unnuagedefumée.–Jenesavaispasquecegenredechosespouvaitarriver!ditDerek.–Habituellement,çan’arrivepas,non.–C’estunnouveauportable,enplus,seplaignit-il.Mamèrevaavoiruneattaque!Sesouvenantquecertainsespritspouvaientagirsurlestéléphones,Kyliedéployasesantennesde
détectrice de fantômes. Aucune sensation de froid ne vint effleurer sa chair. Elle regarda autourd’elle, chercha… Elle ne savait pas ce qu’elle espérait trouver, mais quelque chose lui dit quel’incident n’était pas un hasard. Lorsque son regard balaya les alentours, la nuit ne révéla rien.L’obscuritéengloutitlepaysage,laruepavéesemblaitabandonnée.Lesréverbèresétaientéteints.Ellesentaitquelquechosedanslesparages,maisquoi?Çan’avaitpasl’aird’êtreunfantôme.–Onferaitmieuxdecourir.Illuitouchalebras.–Qu’est-cequec’est?–Jenesaispas,maisçanemeplaîtpas.–Alorsonestdeux,ditDerek.–Trois,fitunevoixàcôtédeKylie.Kylieseretourna.L’espritdelameurtrièresetenaitàcôtéd’elle.–C’esttoiquiasfaitça,pasvrai?–Pourquoijebousilleraismonpropretéléphone?demandaDerek.–Pastoi,ditKylie,maisellenedétournapaslesyeuxdel’esprit.–Non ! Ça fait des années que j’ai arrêté de faire sauter des téléphones. J’ai trouvé de bien
meilleuresfaçonsdemanifestermaprésence.KyliesetournaversDerek.
–Partonsd’ici.Ilpritlavaliseetilssemirentàcourir.–Non,parici!L’espritfiladansuneautredirection.Kylie s’immobilisa, attrapa le bras deDerek et l’arrêta dans un sursaut.Le fantôme se retourna
versKylie.–Parici,vaaucimetière.Tuaurasdel’aide.Pouruneraisonidiote,touslesmortslà-bast’aiment
bien.–Pourquoidevrais-jetefaireconfiance?demandaKylieet,ducoindel’œil,ellevitDerekfroncer
lessourcils.Pasdedoute, lavoir teniruneconversationavecunfantômeledéconcertait.S’ilavaitessayélui
aussi,ilauraitpuvoirquec’étaitdéroutant.–Parcequetuveuxresterenvie.Kylie,lesoufflecoupé,regardaDerek.–Parici,luidit-elle,enpriantpourquesoninstinctnelatrompepasetpourqu’ellepuissefaire
confianceàcetesprit.Enpriantpourquecenesoitpasunpiègepourlafaireveniraucimetièreavantdel’emmenerenenfer.Ilscoururentvite.MaisKyliesentitquequelquechose lessuivait.Etquecettechoseétaitprêteà
attaquer.Ellevit lesportesducimetière.Soncœurbattaitplusvite,etsielles’épuisait,Dereknepourrait
sûrementpasallerplusloin.–Attends!Dereks’arrêtaettenditlamainverselle.–Pourquoi…pourquoiallons-nousaucimetière?dit-ilenreprenantsarespiration.
–J’aidesamislà-bas,expliqua-t-elle.–Desamismorts,rétorqua-t-il,mécontent.–Nefaisonspaslesdifficilespourl’instant.Iljetauncoupd’œilsurlesportesrouillées.–NousdevrionsalleràShadowFalls,noussommestoutprès.–Onn’yarriverapas,ditKylie.Unecertitudes’ancraitenelle:lacréaturequilessuivaitnes’amusaitpas;c’étaitMario.Comme
elleespéraitsetromper!ElleattrapaDerekparlebrasetseremitàcourir.Malheureusement,ilsn’atteignirentpasleportail
àtemps,lamenacedevintvisible.Mario,l’escrocsuper-puissantquivoulaitlamortdeKylie,nesetenait qu’àquelquesmètres d’eux.Lemêmequi avait blesséHelen, tuéEllie, assassiné sonproprepetit-filsetquisemoquaitbiendeprendrelaviedequiconquesemettantsursonchemin.Lesyeuxnoirsdel’hommeétincelaientdehaine.Sapeausemblaitvieilleettannée.Ilportaitune
robenoire,commes’ilseprenaitpourunprince.Lessouvenirdecethommefoudroyantsonpetit-filsdéclenchèrentlafureurdeKylie–etsanature
protectrice–enunefractiondeseconde.ElleattrapaDerekparlebrasetlepoussaderrièreelle.
–Commeonseretrouve!lançaMario.Unebrisechaudeetobscureagitaitlebasdesarobe.Lecielsemblaits’assombrir.Mêmelaluneet
lesétoilesavaientl’airdereculerensaprésence.–Etc’estbienregrettable,rétorquaKylie.L’airnocturneavaitlegoûtdesavilenie.Ellesentitlesangpétillerdanssesveinesetlasensation
dedangersemblaitpuiserl’oxygènedirectementdansl’air.Derekbougeaderrièreelle,etKyliepassalamaindanssondospourl’immobiliser.Protège-le.Protège-le.Lesmotsserépétaientcommeunelitaniedanssonâme.Mariogloussacommes’ilpouvaitliredanssespensées.–Net’inquiètepas,monenfant,jememoquebiendetonpetitjoujou.Iln’arienàcraindredema
part.Levieilhommesourit.Sesdents–mincesetlégèrementjauniesparl’âge–dépassèrentdesalèvre.
Laterreurdel’instantfitnaîtreunfrissonlelongdelacolonnevertébraledeKylie.–Tupeuxcalmertoncôtéprotecteur,ricanaMario,commes’ilsentaitsoncôtédéfensifs’animer.
Celaneteserviraàrien.Pourtoninformation,laseuleàquij’enveux,c’esttoi.Jeneveuxaucunmalaugringalet.Derekselibérad’uncoupsecetfonçaverslevieilescrocterrifiant.Kylieavançapourintervenir.
MariodevintinvisibleetDereks’écrasaparterre.Marioréapparutàquelquesmètres.–Commec’estmignon!semoqua-t-il.Lepetithommeveutteprotéger!Derekn’hésitapasàl’attaquerdenouveau.Maisencoreunefois,Mariosevolatilisaetréapparut
quelquesmètresplusloin.–Arrête,ordonnaKylieàDerek.Ill’ignoraetfoudroyaMarioduregard.–Jenesuispasdugenreàdisparaître,moi,espècedesalaud!Bats-toicommeunhomme!
LaméchancetéduriredeMariotitillalesnerfsdeKylie.–Tuveuxquejemebattepourquetacopinepuisseteprotéger!Jenesuispasidiot,gamin!Celaavaitbeauluidéplaire,Marioavait raison:s’ilneblessaitpasDerek,ellenepourrait faire
appelàsespouvoirspourlecombattre.Lapeurs’installaenelle.–Va-t’en,insistaKylie.Ellevitlesespritsserassemblerprèsdesportes,marmonnantd’inquiétudepourelle.– Pas sans toi, rétorquaMario,mais sa confiance semblait légèrement érodée quand il posa les
yeux sur la porte du cimetière. Pouvait-il sentir les esprits, lui aussi ? Il se rapprocha d’elle d’unpas…ous’éloignait-ilsimplementdelaporteducimetière?Ellerecula.Ducoindel’œil,ellevitDerekessayerd’attraperunegrossepierreàsespieds.Elle
savait que son plan consistait à mettre Mario suffisamment en colère pour qu’il représente unemenacepourlui,afinqu’ellepuissedéployersoninstinctdeprotection.MaisKylienesavaitpassielleenétaitcapable.L’indécisionl’envahit:l’arrêteroupas?Queceplanluiplaiseounon,ceseraitpeut-êtreleseuletl’unique.Mario,concentréesurelle,nevitpaslapierrearriver.Ellelefrappaàlatempedansunbruitsourd.
Mais elle savait que les conséquences seraient terribles. Et elle avait intérêt à se préparer à lesaffronter.La tensionétait palpable ; lesyeuxde l’escroc seplissèrent, tandisque le sang jaillissait de son
front.MarioémitunesortedegrondementfurieuxenregardantDerek.Kyliesentitlaforcegagnerpeuàpeusesmuscles,maiscelanesuffisaitpasàfaireémergerson
véritablepouvoir.–Viensmechercher,espècedelâche!lenarguaDerek.Marioessuyalesangdesonfront,etlafureurdisparutdesesyeux.–Tunem’intéressespas.–Etmoi,salauddevampire?Lucas,commesurgidenullepart,jaillitdederrièrelesarbresetterrassalevieillard.Kylien’eutpasletempsdepenserauchaosémotionnelenelle.Dereksaisitl’opportunitéetfonça
surMario.Kylie intervint, sa force tournaitdésormaisàplein régime,maisellen’était rien faceàcelledeMario.L’escrocpropulsad’abordLucas,puisDerekloindelui.Leurscorpsfurentprojetésenl’aircommedespoupéesdechiffon.Cespectacleluicoupalesouffle.Ellefilaenl’aircommeuneflècheet les rattrapa.Aprèsune fractionde seconde seulement, elle lesdéposa tousdeuxpar terreavantdeseruersurl’ennemi.Prouvant de nouveau ce dont il était capable, il se relevad’unbond avant qu’elle ne l’attrape et
s’écartadesonchemin.Elles’arrêtanet,faceàlui;ill’observaitcommeunsimpledivertissement.Iljouaitavecelle.Etellenesavaitpascommentretournerlasituationàsonavantage.Elleserralespoingssifortqu’elleeneutmalauxmains,elledevaitl’accepter.Ilavaitbeauêtre
âgé,sonpouvoircontribuaitmanifestementàsonagilitéetàsarapidité.Laregardantfixement,ilpartitd’unrirerailleur,puis,avided’envoirdavantage,iltenditlamain
versLucas.–Jusqu’oùiras-tupourlessauver?KylievitunebouledefeujaillirdesdoigtsdeMario.Commeuneflèche,elles’interposadevant
Lucas. Elle attrapa le cercle de flammes et le retourna surMario, qui l’évita de justesse,mais enbalança deux autres. Elle en attrapa une, et l’autre passa devant elle à toute allure. Elle regardaderrièresonépauleetvitl’autrebouledefeuterrasserLucas.Legoûtdelafureur,ameretsalé,sedéversasursalangue.Endépitdelaconfusiondessentimentsqu’elleéprouvaitpourLucas,soncœur
l’implorait de s’assurer que ses blessures n’étaient pas graves.Mais le besoin d’arrêterMario lapoussaàl’affronterencore.Ungrandsourireenvahitlesyeuxgrismarquésparl’âgedecedernier.–Vas-tumourirpourlesauver?Lequelsauveras-tuenpremier?Il la scruta, amusé, visiblement sans effroi, et tellement occupé à la tourmenter qu’il ne vit pas
Derek revenir à l’attaque. Et Kylie non plus, sinon elle l’en aurait empêché. À l’instant oùDerekpercutaMariodepleinfouet,celui-cil’attrapaetserrasesdoigtsnoueuxautourdesoncou.Kyliefitunbondenavant.Safureur,sonbesoindevengeanceétaienttrèsforts.Enserrantd’unemainlagorgedeMario,elleseservitdel’autrepourdétacherducoudeDereklesmainsduvieillard.ÀlaminuteoùellesentitDerekselibérer,elleresserrasesdeuxmainsautourdelagorgedel’escroc.–Lâche-le,fitunevoixdanssonoreille,aumomentmêmeoùlefroidspectraldansaitlelongdesa
colonnevertébrale.Arrête!Kylieignoral’esprit.Cen’étaitpaslemoment.Elle entendit Derek haleter. À présent, c’étaitMario qui ne pouvait plus respirer. Elle sentit ses
tendons rouler sous son étreinte. Son objectif était simple, l’arrêter. L’arrêter à tout jamais. Ellen’avaitqu’unechoseàfaire,serrerunpeuplusfort.Elleallaitluiécraserlatrachéeenforçantencoreuntoutpetitpeu.Ellel’enverraitenenfer,chezlui.EllepensaalorsàEllie,àquiMarioavaitôtélaviebeaucouptropjeune.Ellepensaaupetit-filsde
cethomme,particonscientdecequel’undessiensétaitàl’originedesamort.Marioméritaitdemourir.Unepenséeluitraversal’esprit.Tuern’étaitpasfacile.Mêmesic’étaitlégitime.–Laisse-lepartir!hurlal’esprit.Tuesaveugle.Cen’estqu’uneillusion.Ellevoyaittrèsbien,merci!Elleresserrasonétreintesurlecouduvieillard,tâchantd’acheverce
qu’ilfallaitachever.LebruitrauquedelarespirationdeDerekretentitderrièreelle.LebrasdeMariosebalançait,essayantdetrouverquelquechoseàquoiseraccrocher.Essayantdetrouverdelavie.ElleentenditDereklâcherétourdimentsonnomd’unevoixrauque,maisl’ignora.Ignoratout,sauf
qu’elleallaitôterunevie.Soudain, une espèce de répulsion l’envahit – comme si quelque chose n’allait pas du tout. Elle
aperçutMario qui souriait, plusieursmètres en retrait. Elle suffoqua, et son regard se posa sur levisagedeceluiqu’elleallaittuer.Lucas.LeriredeMariorésonnaautourd’elle.LapaniquetraversaKyliecommeunedouleurbrute.Elle
relâchasonétreinteautourducoudeLucas.Ils’écroulacommeunemasse,maisKylienequittapasMariodesyeux.Lucasbougeaàsespieds.Deslarmesemplirentsesyeuxquandelleserenditcomptequ’elleavait
étéàdeuxdoigtsd’ôterlavieàquelqu’unqu’elleaimait.–Jedevraistetuersur-le-champ,lançaMario.Maisc’esttellementdrôledetevoirsouffrir.Ilvit,
maispourcombiendetemps?fit-il.Son ton exprimait l’excitation de lui avoir fait du mal. Sa méchanceté semblait envahir
l’atmosphère.KylienesavaitpasdutoutcommentMarioavaitinversélesrôles.Toutcequicomptait,c’étaitde l’empêcherdecontinuer.Etsiellene trouvaitpasune idéerapidement, il ladétruirait.Etelleneseraitpaslaseule.Sonsangsedéchaîna.L’airqu’elle respiraitavaitungoûtamer,celuidesémotionsqui faisaient
rageenelle,telsdesvirus.Puislapeur,commeunliquidequitentaitdelanoyer,envahitsapoitrine.Sonpoulss’emportaquandelles’aperçut,horrifiée,quec’étaitunebataillequ’ellenepourraitpas
remporter.L’espaced’uneseconde,elleacceptaladéfaiteetpleura.Pleuranonpassurelle,maispour
Derek et Lucas. Ils étaient venus ici pour la sauver et allaient enmourir. Puis d’autres suivraient.Mariones’arrêteraitjamais.Unevoixsemblasurgiraveclevent.–Tun’espasseule.Demande,etturecevras.Lesangesdelamortétaient-ilslà?ElleseconcentrasurMario,maispriapourqu’onl’aide.Des
prièressansfoi,semblamurmurersoncœur.Ledoutel’envahitetrésonnadanssonâme.Silesangesde lamort comptaient l’aider, n’auraient-ils pas été déjà là ?Pourquoi se sentait-elle aussi seule ?Aussiimpuissante?Neluiauraient-ilspasproposédel’aideavantqu’ellenesoitprèsdetuerl’undessiens?D’unseulcoup,elleserappelalesmortsauportailducimetière,etunephrasedeHolidaytraversa
sonesprit en flottant, commeunepenséeà laquelleelledevait se raccrocher.Parfois, jepensequetouslesmortssontmesangesdelamort.Kylieaspiraunsouffled’espoir.Aidez-moi.Lasupplicationrésonnadanssatête.Soyezmesanges
delamort.Uncraquementbruyant,àvousdonnerdesfrissons,retentitdanslenoir.Leportails’ouvritpeuà
peu;legrincementdumétalrouilléquel’onforçaitrésonnaàsesoreilles.Puislesmortssurgirenten trombe,parcentaines.Hommes, femmes, jeunes,vieux, ilsarrivèrent tousencourant, lesmainstendues.Lesyeuxhantés.Maisleurexpressionn’imploraitpasd’aide,elleenoffrait.Lecontactglacialde leurprésence luibrûla lapeau.L’airdanssespoumonssemblait tropfroid
pourlalaisserrespirer.Maismêmedanssadouleur,elleconstataqu’ellen’étaitpasseule.Etcelaluidonnaleseulespoirauquelellepouvaitseraccrocher.LevisagedeMario, froid et ridé, grimaçad’unedouleur intense. Il balança la tête en arrière et
grogna.Delavapeursortitdesaboucheetdansaau-dessusdeses lèvres.Reprenantsonsouffle, ilreculaàtouteallured’unebonnedizainedemètres.Commesiladistanceluioffraitdurépit,sonregardseposasurelle.Kylieplissalesyeuxetlutsa
configuration. Il était assurément caméléon. Bizarrement, avec sa vision légèrement floue, ildégageait quelque chose de différent. De familier, mais quoi au juste ? Cette pensée lui parutimportante,maiscommeunnuagemenaçantquipromettaitderevenir,elledisparut.– Tu as peut-être gagné cette fois, maismon heure approche, cracha-t-il. Tu viendrasme voir,
KylieGalen,tuviendrasmevoirpourmourir,poursouffrirentremesmains,pourmonplaisir,parcequeleprixseratropélevé!Tafaiblesseteperdra!Sa faiblesse ?Laquelle ? se demandaKylie,mais son esprit bouillonnait à la fois de douleur et
d’espoir,etlaquestionrestaitsansréponse.Alors,elleseconcentrasurl’espoir.Celuid’avoirépargnéLucasetDerek.Etquelquepartaufond
desonâme,elledésiraitqu’onlaménage,elleaussi.Les esprits, qui continuaient à grouiller autour d’elle, se ruèrent de nouveau sur Mario.
Délibérément.Leurintention–laprotéger–selisaitsurleursvisagesinquiets,cendrés.Holidayavaitraison.Touslesespritsétaient,enunsens,desangesdelamort.Unrapidecoupd’œilsurleportailducimetière,etKylievitd’autresfantômesensortirentitubant.Certainsavançaientd’unedémarchelenteetincertaine,commesil’onvenaitdelesréveillerd’un
profondsommeil.–Merci,parvintàarticulerKylie,mêmesisesdentsclaquaientetsilaprésencefroidedetropde
mortsrendaitdifficilelefaitd’êtrevivante.Alorsquelesespritsserassemblaientautourdel’escroc,Marioseremitàhurleretlebruitdesa
frustrationetdesonimmensedouleurfutladernièrechosequ’elleentendit,avantquel’élancement
glacialdanssoncorpsnedevienneinsupportable.Savisionsevoila,laglacerecouvritseslèvres,etellesesentitattiréedansl’obscurespiraledunéant.
–NousattendonsBurnett.–Onsebarred’iciimmédiatement,oui!Kylie prit peu à peu conscience des voix. Qui ? Attendre Burnett pour quoi ? Les questions
roulaientçàetlàdanssonespritconfus.Oùsetrouvait-elle?Quilatenaitsi…?Elle entendit un bruit sourd et rythmique.Un battement de cœur ?Mais pas le sien. La chaleur,
l’ardeurdequelqu’uncollétoutcontreelle,paradisiaque.Elleavaitsifroid.Maispourquoi?Sielleseconcentrait,ellepourraitlesavoir.Maisunepartied’ellenevoulaitpasseconcentrer,unepartied’ellevoulaitresterainsi.Inconsciente,bienauchaud,etensécuritédanslesbrasdeceluiquilatenaitbienserrée.Quilatenaittendrement.Quilatenaitcommes’illachérissait.–Nousnepouvonspaspartir,fitl’unedesvoix.Lavoixauloin.Pascellequilatenait.–Ilpourraitrevenir.Nousdevrionspartirtantquel’onpeut.Elleentendaitlesmotsvibrertoutaufonddelapoitrinedeceluiquiparlait.–Jenecroispas.TuasditqueBurnettétaitenroute.Nousnepartonspas.–Parcequetuaspeur…–Jen’aipaspeur,bonsang!Jesuisraisonnable.Kylieestvenueicipouruneraisonprécise.Les
esprits,jepariequecesonteuxquiontenvoyépromenercesalaud.KyliereconnutlavoixdeDerek.Toutluirevintàtouteallure.Latrahisondesongrand-père,l’aidedeJenny,Derekquilaretrouve,
Marioquidébarque, labagarre, etLucas…La sensation familièredesbrasqui l’enveloppaient luiindiquaitquilatenait,quellechaleurelleabsorbaitdésormais.Seraidissant,ellesedécolladutorsedeLucas.–Pose-moi.
Sesyeuxbleufoncé,percevantsansaucundouteledanger,seposèrentsursonvisage.–Tuarrivesàtenirdebouttouteseule?–Oui,dit-elle,etquandelleavisalebleuautourdesoncou,soncœurseserra.Bontédivine,elle
avaitfailliletuer!Leslarmesluimontèrentauxyeux,maiselleleschassad’unbattementdecils.Cen’étaitpaslemomentdes’écrouler.Plustard,ellelaisseraitlibrecoursàsespensées.Plustard,ellese lâcheraitets’apitoieraitsursonsort, longuement.Elle leméritaitbien.Maispasmaintenant.Pasmaintenant,serépéta-t-elle,essayantdecombattrelasurchargeémotionnelle.–Tuasmalquelquepart?demandaLucas.–Elle t’ademandéde la reposer, insistaDerek, le tonpincé, luttant sans aucundoute contre ses
sentiments.–J’aientendu,grommelaLucas.SonaversionpourLucasfitbrillersesyeuxdeDerekd’unorangeplusclair.–Jem’assurequ’ellevabien.–Jevaisbien,mentit-elle,sesémotionssebousculant.Trahison.Peur.SonregardseposasurlecoudeLucas.Culpabilité.–S’ilteplaît,repose-moi,insista-t-elle.Ils’exécuta.Sesgenouxétaientfaibles,maiselleveillabienàcequ’ilsnesedérobentpassouselle,
etparvintàresterdebout.Lucastenditlamainpourlarattraperaucasoùsesjambesnelasoutiendraientpas.Ellenevoulait
pasdesonaide.Quefaisait-illà?N’avait-ellepasdemandéàBurnettdenepasleposterenfactioncesoir?PuisellesesouvintavoirvuMonique.Était-cebienelle?Elledevait se reprendre.Pour l’heure, l’important étaitde rentrer sains et saufs àShadowFalls.
Comme la fiesta d’auto-affliction qu’elle avait mentalement planifiée, elle passerait du temps àpleurersurLucasetsesproblèmesplustard.–Tutesensprêteàyaller?demandaLucas.–NousnepartironspastantqueBurnettneserapaslà,lerembarradenouveauDerek.KylieregardaDerek,puisleportailàprésentfermé.Lesespritsmontaientlagarde,jetantuncoup
d’œilàtraverslesbarresdemétalrouillées.–Derekaraison,nousrestonsicijusqu’àl’arrivéedeBurnett.UnéclairpassadevantKylieàtoutevitesse,puisunautre.Burnett,accompagnédetroisautresmembresdel’URFetdeplusieurscampeurs,dontPerry, les
entourabrusquement.–Jesuislà,lançaBurnett.Sesyeuxbrillantssemblaientdirequ’ilétaitprêtàsebattre.Ilregardaautourdeluicommepour
vérifiers’ilyavaitundanger,avantdeseconcentrersureux.–Etquelqu’unaintérêtàmedirecequisepasseici.Commepersonneneparlaitassezvitepourcomblersonimpatience,ilbraqualesyeuxsurKylie.–J’étaiscensévenirtechercherdanslamatinée.IlregardabrusquementDerek.–Tuétaissupposélaprotégerchezsongrand-père.IlsetournaversLucas.–Ettoi,tum’asaffirméquetuallaischeztonpère.
– Eh bien, j’ai menti, rétorqua Lucas d’un ton sec. Je voulais m’assurer que Kylie n’avait pasbesoindemoi.Etelleavaitbesoindemoi.–Ques’est-ilpassé?demandadenouveauBurnett.Sontonindiquaitqu’ilperdaitpatience.–Mario,réponditKylie.LesyeuxdeBurnetts’illuminèrent.–Tuessûrequec’étaitlui?demanda-t-il.–Sûreetcertaine,réponditKylie.Ellefrissonnaausouvenirdelaméchancetéémanantdecethomme.Elleserappelacequ’elleavait
éprouvé,qu’ilavaitaiméjoueravecellecommeunchatavecunesouris.Maislasourisavaitgagné,cette fois. Grâce auxmorts,Mario n’avait tué personne.Mais la prochaine fois ? Elle entendit samenace résonner dans sa tête. Tu viendrasme voir,KylieGalen, tu viendrasme voir en souhaitantmourir,souffrirentremesmainspourmonplaisir,parcequeleprixenseratrèsélevé!Ilparlaitavecconviction,commes’ilavaitdéjàmisunplanenplace.Lapeurs’insinuaenelle.Burnettvérifiaànouveaulesalentoursd’unregardperçant.–Ilestpartiàprésent,ditDerek.–Jevoisça,oui.Maisétait-ilréellementparti?Entantquecaméléon,ilpouvaitsetransformer.Siçasetrouvait,il
étaitencorelà.Kyliefaillitdirequelquechosedanscesens,maisserappelalesautresmembresdel’URF. Et son manque de confiance en eux la fit se taire. Moins ils en savaient sur elle et lescaméléonsdansleurensemble,mieuxcelavalait.–Mais que faisais-tu ici ? demanda Burnett, visiblement de plus en plus frustré àmesure qu’il
réfléchissait.Lesordresétaientlessuivants:m’attendrejusqu’àdemain.Pourquoiest-cequejedonnedesordressipersonnen’yobéit?–Nous ne pouvions pas. Ils n’allaient pas la laisser partir, expliquaDerek, et il regardaKylie,
comme s’il savait que la vérité était difficile à entendre pour elle. Et il avait raison. La douleurs’accentuadanssapoitrine.–Ils?fitBurnett.Quinevoulaitpaslalaisserpartir?SonregardfitdebrusquesallersetretoursentreDereketKylie.–Lescaméléons,réponditDerek.Burnett fixaKylie et sapoitrine se serra, car elle savaitqu’il allait rejeter toute la faute sur son
grand-père.–Mongrand-pèren’étaitpasaucourant,dit-elle,maisellen’enétaitabsolumentpascertaine.Et
Burnettsavaitreconnaîtreunpieuxmensonge.Sonexpressions’adoucitunefractiondeseconde,commes’ilcomprenaitsadouleur.–Tuauraisdûm’appeler,lança-t-ilàDerek.–Ilaessayé,réponditKylie,peudisposéeàcequecelaretombesurDerek.Onadûsedépêcher
pour essayer de battre les gardes de vitesse et ensuite… ensuite… quand il a voulu téléphoner,Mario…afaitfrireleportabledeDerek.Brusquement,unfaisceaudepharesilluminal’obscurité.Unevoituresegaradansuncrissementde
pneus.CelledeHoliday.ElledescenditdesaHondaentrombe,sescheveuxrouxdétachéscommesiellevenaitdeselever.
EtquandsesyeuxlarmoyantsseposèrentsurKylie,ellemarmonna:«Dieumerci»,portantsamainàseslèvres.
UnetelleémotionchezHolidayaffaiblitladéterminationdeKyliederemettresoneffondrementàplustard.Ellecourutverselleettombadanssesbras.Quandelleblottitsafigurecontrel’épauledeladirectrice,elleentenditBurnettlaréprimander.–Jecroyaist’avoirdemandéd’attendreaucamp!KyliesentitHolidaysetendre,puisellelevalatête.–Etjecroyaisquetusavaisquejenerecevaisd’ordredepersonne.–Ya-t-ilquelqu’unquim’écoute,parici?demandaBurnett.Safrustrationrendaitsontonpresquecomique.–Àl’évidencenon,réponditunagentengloussant.Burnettgrommela,maisKylievitdusoulagementdanssesyeux.Ellesavaitqu’ilestimaitque la
protectiondetoutlemondeàShadowFallsrelevaitdesaresponsabilitépersonnelle.Etellel’aimaitpourcelaaussi.–Que s’est-il passé ? demandaHoliday en resserrant son étreinte rassurante sur les épaules de
Kylie.–Nousendiscuteronsplustard,proposaBurnett.NousdevonsrentreràShadowFallsmaintenant.Kylie savait que cette conversation viserait à accuser son grand-père.Même si cette pensée lui
faisaitdumal,seretrouverdanslesbrasréconfortantsetchaleureuxdeHoliday,etmêmel’entendresechamailleravecBurnettdonnaitunelégitimitéàcemoment.Elleavaitl’impressiond’êtrepresquerentréechezelle.Etça,c’étaitvraimentgénial.
Repasser lesportesdeShadowFalls réchauffa lecœurdeKylie.Elleyétaitàsaplace.MêmeledebriefingdeBurnett,dansuneheure,nechasseraitpasentièrementlesentimentd’êtrederetouràlamaison.–Jesuisdésolé,maisjedoisfaireçatoutdesuite,avaitrépétéBurnettplusieursfois.IlavaitdéjàtoutrabâchéavecDereketLucaspendantqueKylieétaitdanslebureauavecHoliday.
Ils n’avaient pas parlé de ce qui s’était passé ce soir, parce qu’elle savait queBurnett tenait à êtreprésent,alorsilsdiscutèrentdecequ’elleavaitapprisquandelleséjournaitchezsongrand-père.LorsqueBurnettentra,l’atmosphèredevintplussérieuse.–Jesaisquetun’aspasdormidelanuit,maisd’aprèslesstatistiques,plusonattend,plusonrisque
d’oublierquelquechose.Kylie,assisesurlecanapéàcôtéd’Holiday,hochalatête.–Jesais.Ellesemorditlalèvre,essayadeseconcentreretdelerenseignersurtoutcequis’étaitpassé.Elle
évoquaMarioetsamenace.PuisellerecommençadepuisledébutetluiparladeJennyquiétaitvenueàsafenêtre.Cequ’elleneluiprécisapas,c’étaitqueJennyétaitlasœurdeHaydenYates.Ellenesavaitmême
passiBurnettavaitdécouvertquecedernierétaituncaméléon.PuiselleracontaunefoisdeplusqueDerekavaitsurgidanslesbois.Elleluireparladélibérémentdelapersonneinvisiblequ’elleyavaitsentie avantqu’ilsnepartent.Et elle lui rappelaqu’elle croyaitquecelle-ci était songrand-pèreetqu’ilavaitétélàpourlaprotéger.–Mais tu ne lui as pas parlé ? fit Burnett.Donc tu n’es pas sûre que c’était lui, nimême si sa
présencelà-basnesignifiaitpasqu’iln’étaitpasderrièretoutcela.Kylieserembrunit.
–Jeleconnais.Jelevoismalfairecegenredechose.MêmeJennyadéclaréqu’ilétaitdifférentdesautresanciens.Etjeneveuxpasquetutemettesàleconsidérercommeunennemi.LamâchoiredeBurnettseserra.– Il t’aime,Kylie. Je l’ai sentiquandonaparlé.Mais iln’a jamaiscachéqu’ilnemefaisaitpas
confianceniàmoiniàShadowFalls.Ilpourraittrèsbienjustifiersesactionsendisantquetavieétaiten danger. Il pourrait croire qu’il a lesmeilleures intentions,mais il a tort. Et si je sais que c’estdifficilepourtoid’acceptercela,nousnepouvonsplusluifaireconfiance.LaremarquedeBurnettluiserralagorge.Ellecomprenaitsonpointdevue,maisellen’arrivait
pasàsedébarrasserdecequesoncœurluidisait.Engros,songrand-pèren’avaitrienàvoiraveclestentativespourlagardercontresongré.– Pourquoipasses-tuautantde tempsà tepréoccuperde luialorsque levéritableennemi,c’est
Mario?– Je sais, répondit Burnett.Mais c’est à cause de quelqu’un de la bande de ton grand-père, que
Marioafaillit’avoir.–Sabanden’avaitrienàvoiravecl’apparitiondeMario.– J’en conviens, mais elle était totalement liée au fait que tu te retrouvais dans une situation
fâcheuse.–J’aifaitseulelechoixdem’enfuir.Elletorditlesmainssursesgenoux.–Tu ne crois pas que l’on devrait s’arrêter pour ce soir ? intervintHoliday.Nous reprendrons
demainmatin.Burnettlaregardaenfronçantlessourcils,puisallas’agenouillerdevantKylie.Ilposaunemain
sur sesmains jointes.Soncontact était froid,mais tendre et affectueux.Lenœuddans lagorgedeKyliedoubla.Quandillaregarda,ellevitdanssesyeuxqu’illuttaitpournepaslaissersamauvaisehumeurl’emporter.Ilavaitdesexigences,ilvoulaitmenerlejeu.Pourtant,Kyliesentaitaussiqu’ilsedémenaitpourfairecequeHolidayavaitessayéd’instillerenlui:transiger,pasimposer.En regardant sa main sur ses doigts joints, elle comprit que Burnett l’aimait bien – que son
intentionn’étaitpasde lui fairedumal,maisde l’aider.Pourtant,n’était-cepasprécisémentcequeressentaitsongrand-père?–Kylie,jesaisquec’estdurpourtoi,reprit-il.Maisj’aibesoinquetumepromettesquetunevas
past’enfuirendoucepourvoirtongrand-père.Ilserrasonpoignet.–S’ilteplaît,jeneseraipasenpaixtantquetunemel’auraspaspromis.–Jeneleferaipas.Ellenepouvaitpasluirefusercela,pasquandill’imploraitpratiquementdeluiobéir.Sa loyauté
étaitvéritablementtiraillée.
BurnettetHolidayaccompagnèrentKyliedanssonbungalow.Lesétoilesétincelaientdansleciel,commesiellessavaientquelesoleilallaitbientôtleséteindreetqu’ellesvoulaientdiffuserencoreunpeudelumière.Elle était épuisée, mais se voyait mal s’écrouler sur son lit et s’endormir tout de suite. Elle
retournaittellementdechosesdanssatêtequemettresoncerveausurpauseluiparaissaitimpossible.Deplus,elleavaitunrendez-vous:sasoiréetrèspersod’auto-affliction.Ellesentaittoujourslenœuddanssagorge,etsoncœurétaitmeurtri.Danslepassé,Kylieavaitapprisqueseuleunebonnecrisedelarmespouvaitapaisercegenrededouleur.
Manifestement,leseffetsapaisantsducontactdeHolidaydisparaissaient.Oupeut-êtreétait-cetroppourquelamagied’uneféeleseffacetotalement.Ilfallait justeassumercertaineschoses.Dustylepartirdechezsongrand-pèresansluidireaurevoir;dustyle,elleavaitfaillituerLucas.Dustyle,ellesedemandaitsic’étaitvraimentMonique,lafiancéedeLucas,qu’elleavaitvuecesoir.Dustyle,samèrequiluimanquaitetquiétaitàl’autreboutdumondeentraindecoucheravecunnaze.Dustyle,unpsychopathevoulaitlazigouiller.Samenacerésonnaitcommelesparolesd’unechansonidiotequel’onnepouvaitpasoublier.Tu
viendrasmevoir,KylieGalen, tuviendrasmevoirpourmourir,poursouffrirentremesmains,pourmonplaisir,parcequeleprixenseratropélevé.Tafaiblesseteperdra!Etdans«assumercegenredechose»ilyavaitaussi«verserdeslarmes».Quipourrait luien
vouloir?Biensûr,elledevaitpasserunpeudetempsàessayerdecomprendrecequ’ilentendaitparsafaiblesse.–Etsionallaitsebaladerauxcascadesdemain?proposaHolidayd’unseulcoup.Puis,devinantle
chagrindeKylie,elleluiserraaffectueusementlebras.–J’estimeraiquandceseralebonmomentdemainmatin,àlapremièreheure,ajoutaBurnett,pour
leurfairecomprendrequ’illesaccompagnerait.Lesilencetombasureuxcommeunedoucepluie.Leciels’étaitlégèrementempourpré,commesi
lematinarrivaitdansuneheure.Burnetts’éclaircitlagorge.–Tusaisquenousallonsdenouveautefaireescorter,n’est-cepas?–Jem’endoutais,réponditKylie.–Avantquejenemetteenplaceleplanningdesurveillance,ilya…ya-t-ilquelqu’unparquitune
voudraispasêtreprotégé?–Uneseulepersonne,répliquaKylie,ettusaisqui.Burnettsecontentadehocherlatête.Leurspascrissaientsurlegravier.–CommentvaHelen?demanda-t-elle.–Bienmieux,réponditHoliday.–Ellesesouvientdequelquechose?C’étaitMario?–Non,réponditHoliday.–Nousmenonsencorel’enquête,expliquaBurnett,unelégèrefrustrationdanslavoix.Maisnous
savonsqueMarioaétérepéréàFallencematin-là.Etavecsonapparitioncesoir,toutporteàcroirequ’ilestbienderrièretoutcela.Ils étaient presque arrivés au virage dans le chemin. Au loin, Kylie parvint à distinguer le
bungalow.Pasuneseulelumièrenetremblotaitàl’intérieur.KyliedemandaàBurnett.–Dellaest-elledéjàrentrée?–Non,pasencore,etsafaçondeprononcercestroismotsdéclenchadesalarmespartoutenelle.Ellelepritparlebras.–Ques’est-ilpassé?Burnettlevalamain.–Ellevabien.Elleaeuquelquesproblèmes,maistoutvabienàprésent.Ellenedevraitplustarder.–Quelgenredeproblèmes?demandaKylie.L’inquiétudequeDellaluiinspiraitluifitmettresespropresproblèmesentreparenthèses.Burnetthésitaavantdeluirépondreetcelaéveillaencoreplussaméfiance.–Ques’est-ilpassé?insista-t-elle.–Elleaeuunealtercationaveclesmembresd’ungang.Mais…
–Es-tusûrquecen’étaitpasMario?–Sûretcertain.–A-t-elleétéblessée?Jesavaisquec’étaitunemauvaiseidéedelafairetravaillerpourl’URF.–Elleajustedesbossesetdesbleus.–Commentça,desbossesetdesbleus?–Riendegrave,c’estsonegoquialeplussouffertdanstoutça.–Ellevavraimentbien,jetelepromets,luiassuraHoliday.Jeluiaiparlé.Kylie inspira, sachant qu’elle dramatisait sûrement, mais son barrage émotionnel était à deux
doigtsderompre.Elleseremitenroute,sehâtaverslebungalow,désirantsetrouverseuleavantsondélugedelarmes.Holidaylarattrapaetglissasamaindanscelledesonamie.–Veux-tuquej’entreavectoi,commeçanouspourronsparlerunpeu?–Non,réponditKyliequisesentaitbête.Ilmefautjusteunpeudetempspourdigérertoutcela.ElleétreignitHoliday,absorbantencoreunpeudesoncontactapaisant.Kylies’apprêtaitàouvrirla
portelorsqueBurnetts’éclaircitlagorge.Ellelevalesyeux.Iltenditlesbras.–Etmoialors?KylielutlasurprisedanslesyeuxdeHoliday,puiscefutplusfortqu’elle,maisellesefenditd’un
grandsourire.–Faisattention,lesgenspourraientbiencroirequetuesdevenugentilavecnous!–J’endoute,dit-il,etill’étreignitrapidement.Lementoncollédanssescheveux,ilmurmura:«Je
l’attraperai,cesalaud,jetelepromets.»–Merci,dit-elle,etelleseretira.L’odeur du bungalow envahit ses sens. Elle ne savait pas au juste de quoi était constituée cette
odeur,maisseseffetsétaientapaisants.Puisellecompritquec’étaitleparfumdesgensqu’elleaimait.Miranda.Della.Et ilyavaitcetteodeurboiséequ’ellereconnaissait.Uneodeurquiappartenaità…non!C’étaitjustel’odeurdesonchez-elle,pensa-t-elle.La porte de la chambre à coucher de Della était ouverte – comme une enseigne lumineuse qui
indiquaitqu’ellen’étaitpaslà.Lavamp,unepersonnetrèsdiscrète,gardaittoujourssaportefermée.LeregarddeKylieseposasurlaportedeMiranda.–Ilmefautdutempspourreprendremesesprits,sedit-elle.Si elle devait craquer, elle voulait le faire toute seule.Elle se dirigeavers sa chambre ; à peine
avait-elleouvert laportequ’elleentendit le légercraquementdusolenbois.Ellen’étaitpas seule.Dansuncoindelachambre,ellevitunesilhouette.Décidément,personnenevoulaitqu’ellesoitseulecesoir.
Kylievirevolta sur sesReebok, laissantprobablementdesmarquessur leplancher,et sortitde lapièce.–Neparspas,ditLucas,s’ilteplaît!Ilfaudrabienquetumeparlestôtoutard!Tard,ceseraittrèsbien.Puis,decolère,elleserralespoings.Cen’étaitpasjuste.Ellesedétourna,
ellenevoulaitpasl’affronter.–Pourquoi?Pourquoidevrais-jeteparler?Jenetedoisrien.Paslamoindreexplication,pasla
moindreexcuse.Cen’estpasmoiqui…Sagorgeseserraetellesetut.Ellel’entenditbougerderrièreelle.– Je sais, j’ai tout fait foirer. Je le reconnais. Je… j’aurais dû t’en parler. Non, c’était mal, je
n’aurais jamais dû laisser les choses aller si loin. J’aurais dû envoyer promenermon père dès ledébut. C’estmoi, le fautif,mais… je n’ai rien fait… d’autre. Je n’ai pas couché avec elle. Je l’aiembrassée deux fois. Tu nous as vus une fois. Et l’autre, on m’a mis au pied du mur. C’étaituniquementpourconvaincremonpèrequej’iraisjusqu’auboutdecemariage,maisjen’aijamais,pasuneseuleminute,eul’intentiondel’épouser.Lenœud se resserradans sagorge.Sesyeux lapiquaient, son cœur aussi.Elle secoua la tête et
parvintàdireunseulmot.–Non.Ellenesavaitmêmepasàquoielledisaitnon.Puiselleseretournaverslui.Cequ’elledisaitn’avaitaucuneimportance,carilnel’écoutaitpas.Ilrestaitplantésurplaceàla
dévisager,danssonpropremondedepeineetdedouleur.–Tum’aimes,dit-il,jelesais.C’étaitàcemoment-làqu’elleauraitdûluirépondre«non»,maiselleneparvintpasàprononcer
unmot.Oh, il se trouvait sur leboutde sa langue,mais ilyétait colléà lacolle forte.Elleauraitmenti,certes,maislavéritéfaisaitbeaucouptropmal.–Jesaisaussiquetumepunis.Etçamarche,puisquejesouffreénormément.Maisjelemérite.
Ilpassalamaindanssanuque.Kylieréprimaunocéandelarmesquimenaçait.Mêmedanslenoir,elleparvenaitàdistinguerles
bleus autour de son cou.Des bleus qu’elle lui avait elle-même infligés.Elle serra lesmains en sedisantqu’elleavaitétéàdeuxdoigtsdeluicomprimerlatrachée.–Jenevoulaispast’étrangler,lança-t-elle,c’étaitunpiège…deMario.Jenesaispascommentila
fait,mais…–Je le sais, tunevoulaispasmepunir…de cette façon,dit-il en tâtant sesbleus.Cen’est rien,
comparéàtoutcequejeressensprofondément.Jeveuxdire,queturefusesdemeparler,quetuneveuilles pas que je t’approche.Tunepeuxpas savoir combien cela faitmal d’être là, tout près detoi…Siprès…Peux-tumêmeimaginercommec’estdurd’êtrelàtoutensachantquetuneveuxpasquejetetouche?Ilavançad’unpas,commes’illatestait.S’ilnesetrouvaitqu’àquelquescentimètres,sonodeurlasuivaitpartout.Elleserevitinhalerson
parfumen entrant.Elle aurait pu se douter que l’odeur familière qui l’avait accueillie ici était sonessenceàlui.Ilétaitsonchez-elle.Oul’avaitété.Àprésent,ellesesentaitsans-abri.Ilavaitdûrassemblerunpeuplusdecourage,parcequ’ilfitunautrepas.Ellereculad’uncentimètre.Etcepetitcentimètreétaittellementéloquent!–Tuvois,dit-il,d’unairdouloureux.Maisjesaisquejecompteencorepourtoi,parceque…tu
m’assauvélavie.Tuauraisput’écarteretlaisserMariometuer.Tunel’aspasfait.Tuasinterceptélesboulesdefeuquim’étaientdestinées.L’émotion deKylie était à son comble, et elle aurait donné n’importe quoi pour ne pas avoir à
ressentircela.Combiendebouleversementsencorepourrait-ellesupporter?Yavait-ilune limite?Elleavaitassurémentatteintlessiennes.–Oui,jet’aisauvélavie,maisnem’obligepasàleregretter.Elledésignalaported’unsignedela
main.–Pars,jeneveuxpasdetoiici.Etc’étaitlavérité,ellenevoulaitpasdeLucas,celuiquil’avaittrahie.Ellevoulaitlegarçonenqui
elle avait confiance, celui qui était prêt à aller au bout dumondepour la protéger, pensait-elle.Etpourtant,c’étaitlemême.Ilavançaencore.Ellevitsapommed’Adammonteretdescendre.–Jet’aiblessée,dit-il,jelesais,etjesuisprêtàacceptertoutcequetumebalancerasàlafigure.Je
lemérite.C’estcequejesuisvenutedire:jereconnaisquecequej’aifaitétaitnul.Etquandtuneserasplusencolère,jeseraiencorelà.Jememoquebiendutempsqu’ilfaudra.Elledétournalesyeux,ellelerevitdeboutdevantsafamilleetsesamis,danssonsmokingchic,et
ilétaitsibeau,déjàunhomme!MaisellelerevitaussiprendrelesmainsdeMonique,etelleentenditlespromessesqu’ilséchangeaient.Dugenredecellesquel’onnebrisaitpas.Unenouvellevaguededouleurlasubmergea.Ellereposalesyeuxsurlui.–Tuluiasdonnétonâme.Ilsecoualatête,etréponditd’unvoixtremblante:–Non,tutetrompes.Jeneluiaipasdonnémonâme.J’aimenti.Jen’auraispaspulaluidonner.
Parcequejel’aidéjàdonnée.Tul’asprisequandj’avaisseptans.Etsijamaisilm’enrestaitunpeu,tu l’asprise le jourde tonarrivéeàShadowFalls.Dans laculture loup-garou,oncroitqu’iln’yaqu’uneseuleâmesœur.Ettueslamienne,KylieGalen.Jelesavaisdéjààl’époque,etcelan’apaschangédepuis.
Ses yeux étaient humides. Elle inspira, espérant maîtriser sa faiblesse, ses larmes.Mais elle ensentituneglissersursajoue.Elle l’essuya. Son souffle trembla, quand elle aspira l’oxygène dont elle avait besoin. Pourquoi
celafaisait-ilaussimalderespirer?Tum’appartiens, KylieGalen. Ses paroles résonnèrent dans son cœur. Elle ne pouvait pas nier
qu’unepartied’ellevoulait allervers lui, lui faire répéter celaencoreet encore, jusqu’àceque ladouleur qui bouillonnait dans sa poitrinedisparaisse. Jusqu’à cequ’elle puisse le regarder sans sesouvenircombiencelaavaitétédurdelevoiréchangerdespromessesavecuneautre.Maisellenepouvaitpasallerverslui,parcequ’ellesavaitqueladouleurnedisparaîtraitpas.Pasmaintenant.Peut-êtrejamais.Ellenepouvaitpaslesavoir.Ilmarqua une pause et elle vit lamême douleur que celle qu’elle ressentait dans sa poitrine se
refléterdanslesyeuxdugarçon.Celas’amplifiadesavoirqu’elleluiavaitfaitdumal.Maisn’était-cepassafaute?Pourquoidevait-elleculpabilisers’ilsouffraitàprésent?– Je suis désolé de t’avoir fait tout cela, dit-il. Et tu as beau être en colère contremoi, tu dois
comprendrequejesuisencoreplusfurieuxcontremoi-même.C’estmoiquit’aifaitcela,nousaifaitcela.J’aiblessélapersonnequicompteleplusdansmavie.Siquelqu’und’autret’avaitfaitautantdemal,jeluiauraisarrachélecœur.Ilrestait lààladévisager.Lesilencedanslapièceétait tropfort.Ouétait-celadouleurdansson
cœurquiluiperçaitlestympans?–Jevaisyaller,annonça-t-il.J’aiditcequejevoulaisdire,etsachequejetedonneraitoutletemps
nécessaire pour me pardonner. Mais ne pas me pardonner, ce n’est pas une option. Parce que jet’aime.Elle ne l’avait jamais entendu aussi vaincu. Aussi perdu.Elle le laissa passer et il sortit. Elle se
dirigeaverssonlit.S’assit.Ôtaseschaussuresd’uncoupdepied.–Minou,minou…fit-elle,cherchantquelquechoseàquoiseraccrocher.MaisSocksrestacaché.Il
n’aimaitvraimentpaslesloups-garous.Pourl’heure,unepartied’elleétaitd’accordaveclui.Elleremontalesjambes,serrasesgenouxsifortcontresapoitrinequecelaluifitmal.Puiselleattendit.Attenditqueleslarmescoulentàflot.Attendit qu’une partie de la pression quimontait dans son cœur disparaisse.Mais les larmes ne
coulèrentpas.Lapressiondemeura.Elle ferma lesyeuxet semordit la lèvre.Pourquoin’arrivait-ellepasàpleurer?Était-elle juste
tropcrevéeémotionnellement?Elleétaitsacrémentperdue.CommentLucaspouvait-il brusquement se rendre comptequ’il s’était trompé sur toute la ligne,
sansl’avoirvuauparavant?Commentavait-ilpupromettresonâmeàuneautre,s’ilaimaitKylie?Maispourquoimentirait-il?Pourquoiviendrait-il luidire toutesceschosessiellesn’étaientpas
sincères?Ellerestaassisedanslapièceenténébréependantplusieurslonguesminutes.Ellesesentaitseule.
Isolée.Unepenséefolleetquelquepeupuérile lui traversal’esprit : jeveuxmamaman.Maissamaman
n’étaitpaslà.NiàShadowFalls.Nimêmedanslepays.SamamanétaitenAngleterreavecuntypequeKyliedétestait.
Maisellepouvait toujoursl’appeler.Etpuisflûte,ellepourraitmêmefaireavorterlesprojetsdecoucheriedeJohn.Celarendaitsonappelencoreplustentant.EllevoulaitqueJohnsachequesamèren’étaitpasseuleaumonde.Ellefouilladanssapoche,puisrâla.Elleavaitlaissésonportablechezsongrand-père.–Zut!,marmonna-t-elle.Soudain, elle pensa à Jenny, à ce qu’elle lui avait confié concernant Hayden, et à certaines
accusations qu’elle avait portées contre les anciens. Les jeunes caméléons étaient-ils vraimentcontraintsàvivredansunmonded’isolement?Celasemblaitsinul…ElledevaitparleràHaydenYatespouravoirdesréponses.Peut-êtreluiassurerait-ilmêmequeson
grand-père n’était pas derrière tout cela. Elle se releva d’un coup, sortit puis ralentit dès qu’elleparvintàlaporte.Génial!Elleétaitcenséeêtreescortée!Burnettallaitexplosers’ilsavaitqu’ellesebaladaittouteseuledanslanuit.Tantpis!Etparfoisil
suffisait de briser les règles. Elle sortit, referma tout doucement la porte pour ne pas réveillerMiranda. En descendant les marches du perron, elle prit le chemin qui menait au bungalow deHayden.Ildormaitsûrement,maiselles’enmoquait.Ellen’avaitparcouruquequelquesmètresquandellevitquelqu’unsurgirdesarbres.L’expression
quiluivintàl’espritétaitcellequeNanadisaitsouventquandelleseretrouvaitenmauvaiseposture:elleétaitmalbarrée.
–Je…jesuisdésolée,marmonnaKylie.–N’essaiemêmepasdemeconvaincredemecalmer!grommelaBurnett.Pasunseulmot!–J’aijuste…–Çaenfaittroisetj’aiditpasunmot!aboya-t-il.Etilbalayal’airdelamainpoursefairebiencomprendre.Kyliesemordit la lèvre,etcommeparhasard,cefutàcemoment-làque les larmessemirentà
couler.Degrosseslarmesbienrondesetrapides.Ellereniflaets’essuyalesjouesdudosdelamain.Sonsoufflesecoinçadanssapoitrine.Pff,celan’aurait-ilpaspuseproduirequandelleétaitseule?–Ceslarmesnemetouchentpas,jeunefemme!Il lamontra du doigt. Si elle ne pouvait pas entendre le cœur deBurnett battre au rythme d’un
mensonge,ellelereconnutdanssavoix.Seslarmesletouchaient.Passuffisammentpourl’empêcherd’êtreencolère,maisassezpourquesavoixseserred’émotion.Etsavoirqu’ellel’avaitdéçuremitunecouchededouleurdanssapoitrine.Exactementcequ’illui
fallait…Encoresouffrir.Ellevoulutcesserdepleurermaisleslarmescontinuaientàcouler.Ilnedisaitrien.Secontentaitde
fairelescentpasdevantelle.D’alleretvenir.D’alleretvenir.En la fixantd’unairmécontent etdéçu.Elle allait rebrousser cheminquand il semit àgrogner.
Juste un grognement. Pas de mots, mais suffisamment d’inflexions pour lui faire savoir qu’il nevoulaitpasqu’ellebouge.Àl’évidence,sapunitionétaitderestericietdereconnaîtrequ’ellel’avaitdéçu.Ellesedemandasic’étaitcelaqueLucasavaitressenti.–J’aijuste…–Ai-jeditquetupouvaisparler?demanda-t-il.Ilfittroisautrestoursàtoutevitessecommes’ilsedéfoulait,puislaregardadenouveau
–Oùallais-tu?Commeellelefixaitsansriendire,illâcha:–Réponds-moi.–Tuasditquejenepouvaispasparler.Elles’essuyadenouveaulesjoues.–Oùallais-tu,Kylie?Bonsang,ellenesavaitpasquoidire.Ellenepouvaitpasluiavouerlavérité.Elleavaitpromisà
songrand-pèredenejamaisdénoncerHaydenYates.Ouaip,elleétaitmalbarrée.Hypermalbarrée,même.–Allais-tuvoirLucas?demanda-t-il.Elle allait hocher la tête, mais elle sentit son cœur battre la chamade, rien que parce qu’elle
envisageaitdementir.–Donccen’étaitpasLucas,fulmina-t-ilendevinantqu’elleétaittentéedementir.Il se rapprochad’unpas et ses yeux foncés la scrutèrent.De tropprès.Engros plan.Elle vit la
déceptiondanssonregardetlenœudsereformadanssagorge.Elleessayadepenseràcequ’elleallaitdire,quelquechosed’utilequinetrahisserien.Etquine
soitpasunmensonge.–J’aijuste…–Nedisrien,sic’estpourmebaratiner.OK,soncœurnelaisseraitmêmepassortirunpieuxmensonge.–Jeveuxlavérité,exigea-t-il.Allais-turetrouvertongrand-père?–Non,réponditKyliehonnêtement,etellesesentitimmensémentsoulagée.Illaregardadeplusprès,sesyeuxseplissèrent.–Bien, je vais te poser une question directe, et je veux que tume répondes par « oui » ou par
« non ».N’essaie pas de travestir la vérité, parce que je le devinerais. (Ilmarqua une pause pourl’effet,etpeut-êtrejustepourrassemblersespensées.)Allais-tuvoirHaydenYates?MillepenséesdéfilèrentdanslatêtedeKylie.QuesavaitBurnettaujuste?Quandsongrand-père
luiavaitconfiéqueBurnettcroyaitlemensongedeHayden–queKylieavaitsimplement,parlaruse,amenél’enseignantàcroirequ’elleavaitl’autorisationdepartir–ellenes’étaitpasditqueHaydenavaitdupéBurnett.Ilsavaitquelquechose.–OK,tonsilencerépondparfaitementàmaquestion.Viens.Illuifitsignedesemettreenroute.–Pouralleroù?demanda-t-elle,redoutantsaréponse.– Tu voulais voir Hayden, alors allons-y, et ensuite vous aurez intérêt àm’expliquer ce qui se
passe,vousdeux,sinonvousallezpasserunsalequartd’heure!Unesaledemi-heure,même!
Kylieavaitentendul’expression«marchersurlaligneverte»,lorsquelescondamnésempruntaientlecouloirdelamortavantd’êtreexécutés,etlamarchejusqu’aubungalowdeHaydenétaitsaligneverteàelle.Burnettneparlapas.Ellel’entendaitàpeinerespirer.Etpourtant,ilavançaitàcôtéd’elle,durcommeleroc,etsaposturetrahissaitsonimpatience.Saloyautéenverssongrand-pèreetBurnettluidéchiraitlecœur,commedansunepartiedelutteàlacorde.–Pouvons-nousd’abordparleràHoliday?demandaKylie,quisavaitquecettedernièresauraitle
calmeretluifairecomprendre.–Non!fit-ild’untoncassant.Jeveuxlavéritéetjel’aurai!« Mais à quel prix ? » songea Kylie. Hayden se rendrait-il compte que Kylie ne l’avait pas
dénoncé ? Elle l’espérait. Mais son grand-père comprendrait-il pourquoi elle brisait la promessequ’elleluiavaitfaite?Ellenelepensaitpas.Commel’hommequiavançaitavecbrutalitéàcôtéd’elle,songrand-pèren’étaitpasindulgent.Unefoisqu’ilsfurentarrivésauvirageprèsdubungalowdeHayden,Kyliecherchadésespérément
uneéchappatoire.–Ildoitdormir…Onpourraitpeut-être…– Il ne dort pas, répondit Burnett avec sévérité. Il n’arrête pas de se retourner dans son lit, de
s’inquiéterpourdestasdechoses.S’attendait-ilàtevoircematin?Es-tudéjàenretard?–Non,marmonna-t-elle.Ils gravirent les marches du bungalow, quand, d’un seul coup, Kylie comprit quelque chose.
Secouéeparlacolère,elleattrapaBurnettparlecoude.–C’estbon,tupeuxtoutentendre!– Et quel est ton intérêt dans tout ça, tout à coup ? demanda-t-il, en constatant son nouvel état
d’esprit.Etoui,lacolèredonnaitunlégerrépitàsaculpabilité.–Tout à l’heure, quand tum’asdéposée àmonbungalow, tu savaisqueLucas était là ; n’est-ce
pas?Tusavaisqu’ilattendaitpourmeparler?LaculpabilitéselutsurlevisagedeBurnett.–Ilm’asuppliédeluilaisserdixminutes.–Ettulesluiasdonnées.Tupensaisquec’étaitàtoidefairecechoix,l’accusaKylie.Burnettfronçalessourcils,maislaculpabiliténedisparutpascomplètement.–Simessouvenirssontbons,tuasbienmistongraindeseldansnotrehistoired’amour,àHoliday
etmoi.–Aucundevousdeuxnes’estenfuipoursefianceràquelqu’und’autre!Ilnetressaillitpas,mais,àsonexpression,ellevitquesonargumentavaitfaitmouche.–Tout lemondedevraitpouvoir s’expliquer, lança-t-il,mais son tonmanquait complètementde
conviction.–Iln’yaaucuneexplicationpourcequ’ilafait,rétorqua-t-elle.Burnettinspiraetpinçal’arêtedesonnez.–OK,jereconnaisquej’aipeut-êtreeutortdeluilaisserceprivilège.Etjerenonceraiàcegenre
d’actionsdans le futur.Etàprésent,peut-êtrequeHaydenet toipouvez faireamendehonorableenm’expliquantcequevousmecacheztouslesdeux.IlregardaKylieenarquantunsourcil,levalepoingettapasurlaportedeHaydensifortqueles
gondstremblèrent.Une fois qu’il eut passé ses humeurs sur la porte,Burnett reposa les yeux sur elle. Elle vit son
esprit bouillonner, chercher des réponses. C’était la première fois qu’elle avait le sentiment queBurnettnesavaitpaslamoitiédecequ’ellecraignaitqu’ilsache.–Soisprévenue,ditBurnett,que si j’apprendsqu’il sepassequelquechosede romantiqueentre
vous,ilvam’entendre…Kylieouvritlaboucheengrand.–Romantique?Oharrête,ilestvieux!Aussivieuxquetoi!LefrontdeBurnettseplissa.Etilserembrunitencoreplus.–C’estbiença,leproblème!Maisjenesuispassiâgéquecela!
HaydenouvritlaporteetsonregardalladeBurnettàKylieàtouteallure.Burnettgrommela.Puisentrasansyavoirétéinvité,pourbienmontrerquiétaitlepatronici.Ce
quinefitpasplaisiràHayden.Kyliedéglutit,ellenesavaitpasquelletournureallaitprendrecettevisite.Burnettseraitfurieux,et
dèsquesongrand-pèreapprendraitqu’ils’enprenaitàHayden,ilseraitfurieuxluiaussi.–OK,qu’unechosesoitclaire,commençaBurnett.Personnenequittecettepiècetantquejen’ai
pas de réponses. Et jememoque bien de faire usage de la force pour les obtenir, affirma-t-il enregardantHaydendroitdanslesyeux.Etcommejenefrappepaslesfilles,jevoussuggèredevousexpliquer.Haydenseredressa.–Expliquerquoi?demanda-t-il,sansmontrerlemoindresigned’intimidation.Kyliedutl’admirerpourcelaaussi.ElleaimaitBurnettetsavaitqu’iln’étaitpasinjustenidéloyal,
maiselletremblaitunpeuenl’écoutant.Cethommeavaitfaitdel’intimidationunart.Danslequelilexcellait,enplus.–Quelestlelienentrevousdeux?demandaBurnett.–Lelien?fitHayden.– Il y a quelque temps,Kylie vous tenait pour responsable de lamort de ces filles, et d’un seul
coup,vousvoilàsonallié.Vousavezmentiquandvousm’avezaffirméqu’elleavaitdemandéàce
qu’onlalaissesortiraucimetière.–Jel’aibienlaisséesortir.– Ensuite, vous avez menti en prétendant qu’elle était venue vous voir. Je connais Kylie, elle
n’auraitpassollicitévotreaidesansraison.– Je suis son enseignant, répondit Hayden. Je pensais qu’aider une élève dans des situations
difficiles,ici,c’étaitunplus.–Etjevouscroyaissuffisammentintelligentpoursavoirquandtoutavouer.Laseuleraisonpour
laquellejenevousaipasencorefichuàlaporte,c’estparcequejeveuxd’aborddesréponses.Alors,parlez!Kylie,decraintequecelanedégénère,sepostaentrelesdeuxhommes.–J’aimeraisparleravecHaydenentêteàtête.Justeuninstant.L’expressiondeBurnettsedurcit.–S’ilteplaît,insistaKylie,je…jecroisquecelanousaideraàalleraufonddeschoses.LamâchoiredeBurnettseserraaupointqu’ellesemblaitprêteàcraquer.–Etquandtureviendras,j’auraidesréponsespourtoi.Sonfrontseplissa.–Jeseraijustedevantlaporte.–Maistupourrasquandmêmeentendre…–C’estçaetriend’autre!exigea-t-il.Elleréalisabrusquementquecelasuffisait–carHaydenetellepourraientdevenirinvisiblesetles
oreillesintrusesduvampiren’entendraientpasleurconversation.EllehochalatêteetobservaBurnetts’enallerencolère.Dèsquelaporteseferma,ellecollaundoigtsurseslèvres,puisattrapalamaindeHaydenetl’emmenadansleroyaumeinvisible.–Tuarrivesdéjààfaireça?–Oui,ditKylieetelleluitintlamainpourqu’ilsacheoùelleétait.–C’estgénial,Kylie,sais-tuquetuestrèsenavance?Quandas-tu…?–Désolée,maisnousn’avonspas le tempsdeparlerdecelapour l’instant.Qu’allez-vousdireà
Burnett?Jecroisquenousdevrionstoutavouer.–Ilinsisterapourquejem’enaille,réponditHayden.Ettuperdrasmaprotection.–D’abord, jen’aibesoind’aucuneprotection ici.Mais jeneveuxpasquevouspartiez. Jeveux
avoirquelqu’unversquimetournersij’aidesquestions.Ensuite,jenesuispassûrequeBurnettvousvire…maissinousneluidisonspas,ilvousenverrasûrementbalader.Notremeilleurechancepourquevousrestiez,c’estdeluidirelavérité.–Jecomprendstonpointdevue,ditHayden,mais…–Jeneluiairiendit,voussavez.Ilnesaitmêmepasquevousêtesuncaméléon.Ilajuste…–Jesais,ditHayden.Ilseméfiaitdéjàdemoiavanttondépart.–C’estmafaute.Je…–Lebruitdelaported’entréequiclaquaitfittaireKylie.Burnettrevintentrombedanslapièce,les
yeuxétincelantsdefureur.–Cethommeestincroyable!s’écriaHayden.–Bonsang!Kylie,oùes-tu?–Jevaisluiparler,ditKylieàHayden.Vous,restezinvisible.Ellerelâchasamainetréapparut.Ellevitimmédiatementl’airrenfrognédeBurnett.–Oùest-il?lança-t-ild’untonsec.
–Ilestlà.Nousparlonsencore.Enprivé,commejel’aidemandé.–Tupeuxrendrelesautresinvisibles?Elleopina.Maisjen’aipaseubesoinderendreHaydeninvisible–étantdonnéquec’estuncaméléon–mais,
ça,Burnettnelesaitpas.–C’estridicule!Jeveuxdesréponses!–Ettulesaurassitumelaissesagircettefois,exigea-t-elle.Jetedemandedemefaireconfiance
commetul’asréclamésisouventdemoidanslepassé.Il grommela et leva lesyeuxvers le plafond, comme s’il implorait la patience.Kyliedisparut à
nouveau.–Jesuislà,fitHayden.Alors,queveux-tuquejeluidiseaujuste?– Tout, répondit Kylie. Que c’est mon grand-père qui vous a envoyé ici et que vous êtes un
caméléon–etquevousvoulezrester.Ellemarquaunepause.Etcelaneferaitpasdemald’ajouterque cet endroit vous impressionne.Si nouspouvons l’amener àvous considérer comme son allié,alorspeut-être…–Peut-êtrequoi?demandaHayden.–Jenesaispassic’estpossible,maisjemedisaisquebeaucoupdesplusjeunescaméléonscomme
JennypourraienttirerprofitdeShadowFalls.–J’aimoi-mêmeeucettepensée,avouaHayden,maislesanciensne…–OK!C’estl’heure!lançaBurnettd’untonsecetilfitlescentpasdanslapièce.Ramenez-vous
immédiatement!–Encoreuneminute,insistaKylie.Nousavonspresqueterminé.–Ilnepeutpast’entendre,ditHayden.–Ohsi.Elle marqua une pause, les questions pour Hayden traversaient son esprit à toute allure, mais
Burnettétaitsurlepointdecraquer.EtunBurnettcraquant,voilàquideviendraitviteingérable.–Êtes-vousprêt?demandaKylie.J’aibeaucoupd’autreschosesàvousdire,maispourl’instant…
jecroisquenousdevronsnouscontenterdecela.Attendez!lança-t-elled’untonsec.–Oui?– Croyez-vous que mon grand-père avait adhéré au plan qui consistait à me kidnapper, et à
m’éloignerdeShadowFalls?–Non,jenecroispas.Ilsefaisaitbeaucoupdesoucipourtoi,ilamêmeappelésixfoisavantque
tun’arrives.Lesoulagementl’envahit.–Voulez-vousbienluidirequejesuisdésoléede…nepasluiavoirditaurevoir?–Jeleferai.–Kylie!grondaBurnett.Respirantunboncoup,elleseforçaàredevenirvisible.Haydenapparutàsoncôté.Burnettn’eutpasl’airimpressionné.IlattrapaHaydenparledevantdesachemise.–Disparaisencoreunefois,etjeveilleraiàcequecesoitpourtoujours!–Ducalme,fit-elleenserapprochantdeBurnett.Haydenn’estpasl’ennemi.C’estgrâceàluique
nousavonspuretrouverHolidayquandWarrenl’avaitcapturée.Enréalité,c’estencoregrâceàluiquej’aipum’échappercesoir.KylievitHaydenlaregarder,commeétonnéqu’elleconnaissecettepiècedupuzzle.Burnettlerelâchaetscrutaensuitesonfront.
–Vousêtesuncaméléon?Celui-ciseraidit.–Ondiraitquec’estuneinsultepourvous!LesépaulesdeBurnettsetendirent.–Ondiraitplutôtquevousm’avezmentitoutdulong.Haydenlissasachemisetoutefroissée.–Jesuisvenuicipourm’assurerqueKylien’étaitpasvendueàl’URFparquelqu’unquiavaitun
réelproblèmed’autorité.Burnettserenfrogna.–C’estmoi,l’autoritéici.Etj’aifaitdesrecherchessurvous.Toutporteàcroirequevousêtesmi-
vampire,mi-fée.Vousêtesmêmeenregistrécommetel.–Oui,réponditHayden.–Maisc’estfaux?Haydennecillapas.–C’estainsiquej’aidécidédevivremavie.Burnettsecoualatête,commes’ilessayaitdecomprendre.–Mais selonmes recherches, legrand-pèredeKylieest catalogué«humain»par l’URF.Et les
rarescaméléonsquej’aivusdevantleurenclosarboraientlaconfigurationhumaine.Jepensaisquec’étaitcequevouslaissieztouscroireaumonde.Justement,pourquoin’avez-vouspaschoisidevivredanscetenclosaveclesautres?Seriez-vousunrebelle?Haydensetendit.–Êtes-vousunrebelleparcequevousnevivezpasauseind’unecommunautédevampires?On
devraitvivresaviecommeonledécide,n’est-cepas?Jepréfèresimplementvivretoutseul,etj’aidécidédevivremavieentantquesurnatureletnonentantqu’humain.–Alors,vousavezsimplementchoisiuneespèceettruquésaconfiguration?–Jen’airienfaitdemalpourquevousmejugiez,répliquaHayden.Burnettavaittoujoursl’airconfus.–Combienilenexistecommevous?Àvivresousuneformedesurnatureldifférente?– Pas assez pour se sentir à l’aise au point de se faire connaître, répondit Hayden. Pas quand
l’histoireaprouvéquecelapouvaitsepasser.KylievitBurnettessayerd’intégrercequ’ilentendaitetdeleclasser.–Donc,quandvousavezvuque jenereprésentaispasdemenacepourKylie,pourquoinevous
êtes-vouspasfaitconnaître?–Vousm’auriezenvoyébalader,oupire,m’auriezfaitarrêter.Burnettavaitbeauexcellerdansl’artdebousculerlesgens,ildevaitreconnaîtrequeverbalement
Haydensedéfendaitbien.Etcelal’agaçait.–Voustravaillezpourlegrand-pèredeKylie?demandaBurnett.–Travaillerpourlui?Non.Sijel’aidais?Oui.Commevouslesavezd’aprèslesrecherchesque
vous avez effectuées surmoi plus d’une fois, j’ai enseigné dans le secondaire pendant trois ans àHouston.–L’aidez-voustoujours?LaquestiondeBurnettrestaensuspens,commesilaréponseallaitêtredécisive.–Toutdépenddecequevousentendezpar«aider».Est-cequej’essaied’allercontrevouspour
fairedumalàKylie?Non.Maisest-cequejegardeencoreunœilvigilantsurelleetest-cequejerépondsauxangoissesdesongrand-père?Oui.
–Lemêmegrand-pèreinquietquiavaitl’intentiondelakidnapper?–Iln’avaitrienàvoiravecça,intervintKylieavantqueHaydennepuisserépondre.Etjeneveux
pasqueturenvoiesHaydennonplus.S’ilteplaît,Burnett,fais-lepourmoi.Burnettlaregarda.–Jenesaispassijepeuxtravailleravecquelqu’unquiestdéchiré.Kylierouladesyeux.–Tuveuxdire,entrel’URFettoi?LesyeuxdeBurnettseplissèrent–Maloyautéatoujoursétédevousprotéger.–Maistucontinuesàtravailleraveceux?Parcequecommetudis,tuvoislebienquefaitl’URF.
Pour Hayden, c’est pareil. Il veut me protéger, mais il comprend que mon grand-père est bienintentionné.Pourquoinepeux-tupasacceptercela?Burnettserenfrogna,maisKylieconstataquesesproposl’avaienttouché.–JevaisyréfléchiretendiscuteravecHoliday.Hayden opina. Son expression indiquait qu’il ne les supplierait pas pour rester. Kylie ne lui en
voulaitpas,maisellen’étaitpasbouffied’orgueilaupointdes’enabstenir.SavieseraitsimplementplusfacilesiHaydenrestait là,etcelafaciliteraitsonlienavecsongrand-père.Elleavaitvraiment,vraimentbesoindelui.–Mesrègles,toutefois,tiennenttoujours,poursuivitBurnett.Quoiquejedécidequantàl’avenirde
M.YatesàShadowFalls,reprit-ilenseconcentrantsurKylie, tunedoispas t’enfuirpourvoir tongrand-père.Tuaurasencoredesescortes,etsijedoispersonnellementsurveillertonbungalowtouteslesnuitspourt’empêcherd’enfreindrelerèglement,jeleferai.Kylieopina.Ellereconnaissaitqu’illuifaudraitregagnersaconfiance.IlreportasonattentionsurHayden.–EtsijedécidaisdevousgarderàShadowFalls,jevousdemanderaisderespectermesrègleset
de m’aider à maîtriser Kylie. Et de m’apprendre comment m’y prendre avec un escroc de votreespèce.–Sivousdécidezquejepeuxrester,jeréfléchiraiàvotreproposition,ditHayden,latensiondans
savoixmontrantquel’attitudedeBurnettlelaissaitmanifestementdeglace.Maisjepeuxvousdireunechose,jerefusequel’onmemanquederespect.–Manquerderespect?grondaBurnett.Puistoutpartitenvrille.BurnettetHaydens’injurièrentàquimieuxmieux.PourHayden,Burnettétaitun«connard»,et
pourBurnett,Haydenétaitun«enfoiréprésomptueuxetunmenteur».Ellen’étaitpassûreàcentpourcentqu’ilsn’enviennentpasauxmains.S’ilssecassaientlenez,
alorssoit.Ellenepensaitpasqu’ilsiraientjusqu’àsetuer.Maisbon,ellepouvaitsetromper.Maiselleétaitbientroplassepouressayerdelesarrêter.Sesgenouxtremblèrentetsesyeuxs’alourdirent.Elleduts’asseoirpournepastomber.Ignorant
les deux hommes qui se disputaient, elle traversa la pièce et s’affala lourdement sur le canapé deHayden.Sentant un froid glacial la submerger, elle remonta ses genoux contre elle. Elle était tellement
fatiguée qu’il lui fallut uneminute pour se rendre compte que le froid n’était pas qu’une réactionnaturelledueàsagrandefatigue. Il lui fallutaussiunesecondepours’apercevoirque leshommesavaientcessédesebattreetlaregardaientfixement.Kylielesignorapours’occuperdel’esprit.
–Pasmaintenant,marmonna-t-elle,etelleregardafixementlatablebassedevantelle,nesouhaitantpas affronter le fantôme et ses discours demeurtre insensés.Et ne désirant pas nonplus affronterBurnettetHayden.–Alorsquoi,maintenant?demandaBurnett.–Rien,ditKylie.Et le fantôme se posta devant elle. Sa robe rose clair trempée de sang pendillait lourdement.
Beaucoupdesang.Dumoins,celayressemblait.Tueousoistuée.Lesparolesdel’espritserpentèrentdanslatêtedeKylie.Ellesepenchaenarrièreetfixalesyeuxmortsetfroids.–Pourl’heure,jevaisfaireaveclesoistuée.Jesuisbeaucouptropfatiguée.–Es-tuprêteàretournerdanstonbungalow?Burnett regardait autour de lui, il sentait une présence. En réalité, il n’arrivait pas vraiment à
percevoirlefantôme,maiscommeilavaitpudistinguerHannah,lasœurdeHoliday,Kylienesavaitpastrop.–Peux-tulavoir?demanda-t-elle.–Voirqui?demandaHayden.–Larevenante,réponditBurnettàHayden.–Zut!articulaHaydensilencieusement,etsonregard inquiet restarivésurKylie.Tunevaspas
t’évanouir,hein?–Jenecroispas,répondit-elle.–Bon,onyva,fitBurnett.–Oui,acquiesçaKylie.Alorsqu’elleallaitselever,ellevitletéléphonedeHaydensurlatablebasse.–Jevousl’emprunte,luidit-elle;j’ailaissélemienchezmongrand-pèreetjevoudraisjoindre
mamère.Haydenfronçalessourcils.–N’appellepasmacopine,parcontre!Commeladernièrefoisoùtuasempruntémontéléphone.Elle se dirigea vers lui, ignorant l’esprit qu’elle sentait près de la porte, et l’étreignit. Peut-être
n’aurait-elle pas dû, parce qu’il se raidit. C’est quoi, le problème des mecs avec les câlins ? sedemanda-t-elle.–Merci,dit-elle,ensortant.–Derien,répondit-il.Elle jeta un coup d’œil à Burnett. Il avait l’air énervé, comme si elle venait de pactiser avec
l’ennemi.–Tusais,votreproblèmeàtouslesdeux,c’estquevousvousressemblezbeaucouptrop.Tous les deux se raclèrent la gorge. Kylie roula des yeux avant de se mettre en route. Et son
fantôme,quitenaituneépéeensanglantéedansunemain,et…unetêtedansl’autre,seplantadevantelle. La tête, qui venait d’être coupée et qui dégoulinait encore de sang, pendillait et rebondissaitcontresahanchequandilavançait.Kylies’arrêtabrusquement.L’espritseretourna,etsourit.Puissoulevantlatêteparunepoignéede
cheveux,commeuntrophée,ill’agitaendisant:–Jetel’aidit,tuer,c’estdugâteau!Lesyeuxtressautèrentcommes’ilsétaientenlibertédansleurcavité,etdusanggicladucou.Kylie
laissaéchapperuncrideterreuretseprécipitaauxcôtésdeBurnett.
–Jesuistropfatiguée,jen’enpeuxplus,marmonna-t-elle.Fais-lapartir,jet’enprie,fais-lapartir!
Cinqminutesaprèsledépartdufantôme,KyliegravitlesmarchesdesonperronetseretournapourdireaurevoiràBurnett.Illadévisageaaveccompassion.Ilnes’étaitpasexcusédes’êtremontréaussidurenverselle,etil
ne le ferait sûrement pas. Pas de doute, il devait penser qu’elle leméritait. Et en un sens, il avaitraison,estimait-elle.Ilouvritlaporte.–Promets-moiquetuvastecoucher,etquetun’essayeraspasderepartir?–Jelepromets.–Etessaiedemefaireconfiance.–Jetefaisconfiance.–Non, c’est faux, dit-il sombrement. Si c’était le cas, je ne serais pas en train d’apprendre des
chosessurHayden.–Quelqu’unm’a fait jurerdenepas enparler, avoua-t-elle.Si tu avaispromisquelque chose à
quelqu’un,n’essaierais-tupasd’honorercettepromesse?Ilsoupira,luioffrantprobablementlameilleurecompréhensionpossible.–Maistudoisfaireattentionauxsermentsquetufais.Ilregardaautourdelui,unpeuméfiant.Est-
ellepartie?Kylieregardaàgauche,puisàdroite.–Jenelavoisplus.Mais au fond d’elle, elle craignait que l’esprit ne revienne. Demain, elle s’entretiendrait avec
Holidaysurlafaçondesedébarrasserdufantômeàtoutjamais.Holidayavaitraison.Kylienedevaitenaucuncasaiderquelqu’und’aussiméchant.–Sais-tucequ’elleveut?Ouàquilatêteappartenait?demandaBurnett.–Aucuneidée,celaapuseproduireilyadesannées,pourcequej’ensais.Maiscequ’elleveut,
oui,jelesaisplusoumoins.
–Etc’est?demanda-t-il.–Elleveutquejetuequelqu’unpourelle.Kylieétaittropfatiguéepourmettredusarcasmedanssavoix.Burnettserenfrogna.–Qui?–Ça,ellenel’apasencoreexpliqué.–Finalement,cen’estpasgrand-chose,si?dit-il,ironique.Visiblement,ilétaitaussifatiguéqu’elle.Kyliehaussa les épaules.Elle allait faireunpas en arrière,mais cette fois, ce futBurnett qui la
surprit, quand il avançapour la serrerdans sesbras.L’étreinte fut courte,mais affectueuse, et elles’aperçutqu’elleenavaitvraimentbesoin.– Tu veux que je reste un peu ? demanda-t-il, l’air mal à l’aise après cette démonstration
d’affection.–Non,réponditgentimentKylie,luiôtantuneépinedupied.–Veux-tuquej’aillechercherHoliday?–Non,çava,jeveuxjustemecoucher.Ellelevalesyeuxversleciel:c’étaitpresquelematin.Elleavaitvraimentbesoindesommeil.Et
elleétaitépuiséephysiquement,maisleretouràpiedavaitremissoncerveauenmarche.EntouchantletéléphonedeHaydendanssapoche,ellesesouvintqu’ellevoulaitaussiappelersamère.Burnettn’arrivaitpasàpartir.Illadévisageaitavecuneinquiétudetoutepaternelle.Ellerevitsongrand-pèreluiaffirmerqueBurnettavaitendossélerôled’unpèreet,enunsens,elle
supposaitqueoui.–Çavaaller,l’assura-t-elle,sansenêtretoutàfaitsûre.–Promets-moiquetunequitteraspaslebungalow,répéta-t-il.–Promis,fit-elleensouriant,puisellefermalaporte.Unefoisqu’elleentenditsespass’éloigner,Kylies’adossaauchambranleetnebougeaplus.Puis
quelquechosesouslaporteattirasonattention.Soncœurseserraquandellevitdelavapeurs’éleverenvolutes,luiindiquantqu’elleavaitdelacompagnie.Oh non, a-t-elle encore apporté d’autres petits objets à montrer, style leçon de choses ? Quels
morceauxdecorpsa-t-elletraînéavecelle,cettefois?Bonsang,Kylien’avaitvraimentpasbesoindecettecompagnie.Elleavaitbesoind’unami.Elleavaitbesoind’unedesesmeilleuresamies.Elleregardaderrière
sonépaule ; laportedeMiranda.Aucunevapeurnes’enéchappait.Elleouvrit laporte. Il était tôt,maisquelquechoseluiditqueMirandan’yverraitaucuninconvénient.
Elle poussa un soupir de soulagement quand elle vit la sorcière qui dormait dans son pyjamarecouvertdesmileys,etquifaisaitdesmamoursàunimmenseoursenpeluchecommesic’étaitsonamoureux. Kylie contempla ses cheveux blonds aux mèches roses, vertes et noires, étalées surl’oreiller.Elles’approchatoutdoucement,maisfitcraquerleplancher.Mirandasursauta.–Jecroyaisquel’ondevaitattendrepourcoucherensemble,marmonna-t-elle.LesouriredeKylies’élargit.–Jecroisqueceseraitplussage.Jenesuispassûrequenotrebellehistoirepuissesupporterce
genredechoseencemoment.
Mirandaseretournad’uncoup,sanslâcherl’oursenpeluche.Sesyeuxendormisétaientdésormaisgrandsouverts.–Deplus,ajoutaKylie,jepensequel’oursettoi,vousl’avezpeut-êtredéjàfait,non?Mirandapoussauncriperçant,balançalapeluchesursonamieetsortitdulitàtouteallure.–J’aicruquec’étaitPerry!Engloussant,lajeunefilleserraKyliedetoutessesforcesdanssesbras.–Waouh,tuesrentrée!Jesuisteeeeeellementcontentequetusoisderetour!Ellelarelâcha,reculad’unpas,etlaregardacommesiellecraignaitàmoitiéqu’ellenesoitpas
réelle.–Tuesbienrentrée,hein?Cen’estpasunrêve?–Cen’estpasunrêve,acquiesçaKylie,mêmesielleauraitaiméquetoutecettenuitenfûtun.Lesouriredelasorcières’évanouitetelletapadupied.– Imagines-tu comme j’ai étémalheureuse ?D’abord, tume laisses tomber, et ensuiteDella se
barrepourjouerlessuperhéroïnes!Jedevraisêtrefurieusecontretoi!Pascontentedetevoir!–Non,nesoispasencolère.Réjouis-toiquejesoisderetour!Kylieattrapal’oursetlerejetasurlelit.Mirandalaregarda,incrédule.–Est-cequetuvasrester?Tunevasplust’enfuir?–Jenevaisplusm’enfuir.–Promis,juré?demandaMirandaentendantl’auriculaire.Qu’est-cequ’ilsavaienttous,àvouloirdespromesses?Kylieregardalepetitdoigtdesonamie,
unearmedesorcière.–Jenesaispassic’estsansdangerdefairecegenredepromessealorsque…–Çanerisquerien,c’estunsermententresorcières.Etcommetul’esenpartie…c’estlapromesse
laplussacréequetupourrasfaire.–Trèsbien,promis.Kylietenditlepetitdoigtpourvalidersaparole.Etcelaavaitbeauêtreungesteidiot,àlaminute
oùleurspetitsdoigtssejoignirent,unevagued’émotionenvahitsapoitrine.Peut-êtrequecegenredepromessesentresorcièresétaitbeaucoupplusqu’ungestepuéril.Oupeut-êtreétait-ellesimplementtropheureused’êtrerentréechezelle.–Tum’astellementmanqué!ditKylieenserrantaffectueusementMirandadanssesbras.–Toiaussi!Mirandarebonditsursonlit.–Maintenant, assieds-toi et raconte-moi tout ce qui s’est passé.Elle plissa les yeux et vérifia la
configurationdeKylie.Tuasretrouvécetteconfigurationétrange.–Jecroisquec’estcelled’uncaméléon.SiKylieavaitétéuntoutpetitpeuparano,commelamajoritédesautrescaméléons,elleauraitdû
essayerdecachercetteconfiguration.Maisilétaitunpeutroptardpourcela,non?Troptardpourcommencer à feindre d’être quelque chose qu’elle n’était pas ? Tout lemonde ici l’avait vue. Et,d’ailleurs,pouvait-ellefairesemblant?Bien sûr, elle avait pumodifier sa configuration quelquefois, mais comment faisait-on pour la
conserver ? Selon ce qu’elle avait appris, la plupart des caméléons n’en étaient pas capables tantqu’ilsn’avaientpaseuvingt-cinqans.Etbonsang,ellene laisseraitpersonne l’enfermer tantquesaconfigurationn’avaitpascesséde
malsecomporter.EllerepensaàJennyetauxautresadoschezsongrand-père.Soudain,Kylieeutle
sentiment qu’aider les jeunes caméléons faisait partie de ce qu’elle avait l’intention de faire.MaiscommeHaydenl’avaitaffirmé,convaincrelesancienssemblaitimpossible.–Maistupeuxtetransformerenpresquetout,n’est-cepas?LaquestiondeMirandalatiradesespensées.–Plusoumoins,répondit-elle.Maiscelarestedifficile.–Quelleschosesinsenséespeux-tufaireàprésent?demandaMiranda.Sesyeuxvertsétincelaientd’excitation.Kyliehaussalesépaulesets’affalasurlelitàcôtéd’elle.–Riendenouveau,jemaîtrisejusteunpeupluscequejesaisfaire.Ohsi,attends,ilyaquelque
chose.Jepeuxrendred’autrespersonnesinvisibles.–Sérieux?Rends-moiinvisible,alors?Toutdesuite,vas-y,vas-y!–Non,pasmaintenant,jesuisépuisée.Deplus,jenesaispastrop…çafaittoujourspeur,cegenre
detruc.ElleserappelaavoireulatrouilledesaviequandelleavaitcruavoirperduDerekdanslemonde
invisible,cesoir.Puis,n’ayantplusenviedeparlerd’elle,elleattrapal’oursetleserrabienfort.–Alors commeça, il y aquelque chose entre cet ours et toi, hein ?Çaavait l’ait super sérieux
quandjesuisentréedanstachambre.Mirandasourit.–Perrymel’adonnépourmetenircompagnieensonabsence.Maisiln’embrassepasaussibien
quelui!Kyliesourit.C’étaitcelaquiluiavaitmanqué.Avoirquelqu’unàquiparler,avecquirigoler.–C’estmignon.–Oui,ditMiranda,puiselledemanda:Arrives-tuàt’embraserquandtuveux,maintenant?Elleremontasesgenouxcontresapoitrine.–Non,réponditKylie.Non,seulementquandjesoignedesgens.Oulesfaisrevenirdeparmilesmorts,songea-t-elle.Quand elle se rendit compte de tous les pouvoirs fous qui semblaient aller et venir, elle fut
effrayée.Elle espérait sincèrement qu’Hayden etBurnett puissent régler leurs différends.Ce seraitvraimentbienqueHaydensoitlàpourl’aidersileschosesrepartaientenvrille.–Dommage,toutcetembrasement,c’étaittropcool!C’estvrai,j’yarrivemoiaussi,maiscen’est
paspareil.Jenesaispaspourquoi,maisc’estdifférent.Kyliesecoualatête.–Cen’étaitpassicoolqueça,crois-moi.–Si,çal’était.Mirandafitlagrimace.Toutlemondeesttombéd’accord,turessemblaisàunange.
Ilssedemandaientmêmesipeut-êtretun’enavaispasunentoi.–Jenesuispasunange.DemandeàBurnett.–Toutlemondeenparleencore,repritMiranda.Super.Maismêmel’idéed’êtrelesujetdeconversationgénéraletd’attirerlesregardsgênésdes
autresélèvesneluifaisaitplusaussipeurqu’avant.C’estvrai,elleétaitravied’êtrederetour,mêmesi,pourcela,ilfaudraitencorequ’onlaprennepourunmonstre.EllemittoutceladecôtéetrevintversMiranda.–Alors,qu’ai-jeloupédepuismondépart?
–Tout.Çaaétédelafolie.Oh…Unelueursombreapparutdanssesyeux.Es-tuaucourantpourHelen?–Oui.Holidaym’aditqu’elleallaitbien.Mirandafituneautregrimace.–Sais-tuquiilssoupçonnent?CesaletypedeMarioaétévu…–Jesais.Mirandaserembrunit.–Jecroisquec’étaitlui,moiaussi.J’avaisrecommencéàsentiruneprésenceétrange.Commesi
quelqu’untraînaitdanslecoin.C’étaitflippant.Etj’étaistouteseule,moiaussi.–Jecomprendscequetuveuxdire.Un frisson horrible parcourut la colonne vertébrale de Kylie, quand elle se remémora sa
confrontationavecMariounpeuplustôt.PuiselleregardaMiranda.–Etjesuisdésolée.C’estmafaute,s’ilestlà.–Cen’estpastafaute,ilestmauvais.–Oui.C’était un fait. Kylie savait qu’elle devait dire àMiranda ce qui c’était passé ce soir, mais elle
n’avaitpasl’énergiedes’yatteleraussitôt.–Tunelesenspasencemoment,si?Mirandaattendaitavecappréhensionlaréponse.–Non.–Tantmieux.Kyliechassalesentimentd’insécuritéquinelaquittaitpas.Ellevoulaitvraimentcroirequ’ellene
couraitaucunrisqueàShadowFalls,maisdequisemoquait-onaujuste?–Tuvasbien?demandaMirandaenlajaugeant.–Bien,etàl’école,quoideneuf?–Nous avons un nouveau prof d’histoire. Pour remplacer l’autre naze, CollinWarren.Unmec
cool,unloup-garou,lavingtaine.C’étaitungéniequandilétaitpetit,maisonnelediraitpas.SituvoyaisFredericka,elleestfolledelui!Kylieopina,maispréféraitqu’onne la surprennepasen traindecommérerà sonpropos.Elles
avaientplusoumoinsfaitlapaix.–Etquelsautrestrucsfoussontarrivés?Mirandaarquasonsourcildroit.–Nikki,voilàcequiestarrivé!Etsiellecontinue,jevaisluifaireapparaîtredegrosboutonsun
peupartout!Ellelevalamain,agitalepetitdoigtd’unairrenfrogné.IlluifallutunmomentpourserappelerqueNikkiétaitlanouvellemétamorphequiavaitunfaible
pour Perry. Kylie fronça les sourcils, en pensant à l’Heure pour faire connaissance qu’elle avaitpasséeaveclajeunefille.Celle-cicraquaiteneffetpourPerry.–Mince!Commentçasepasse?–Çaaintérêtànepassepasserdutout,oui!JesuistellementfurieusecontrePerry.C’estvrai,il
jurequ’ilnelatoucherapas,maisjecroisqu’iljubileparcequ’unefilleestraidedinguedelui.Etjevois trèsbienquecela lui faitplaisirque je sois jalouse. Il l’évoquedansdesconversations futiles.Commesiçaluiplaisaitdevoirqueçam’énerve.KyliesemorditlalèvreetsedemandasiLucasn’avaitpasétélégèrementraviqueMoniquecraque
pour lui. Lucas disait-il vraiment la vérité quand il affirmait qu’ils n’avaient fait que partager
quelquesbaisers?Était-cebienMoniquequeKylieavaitentrevue?Lesquestionsluivenaientsivitequ’elleavaitenviedes’enfouirlatêtesousl’eau.Mirandaselaissaretombersurlelitavecunpeud’exagération,etKyliecompritquesespensées
l’avaientramenéeàsesproblèmesalorsqu’elledevaitplutôtseconcentrersurMiranda.–Tuluifaisconfiance?demanda-t-elle.Sioui,arrêtedefaireunefixation.Mirandapinçaleslèvres,commesielleréfléchissait.–C’estcequetuasfaitavecLucas?–C’estdifférent,rétorquaKylie.Mirandas’appuyasuruncoude.–Tuvasbien?Bonsang,jesaiscombientuasdûsouffrir.–Çaira.Illefaut.Elle regarda fixement le plafond et tâcha de chasser son chagrin. Ce n’était pas comme si elle
n’avait pas des tonnes d’autres problèmes qui la préoccupaient.Comme le fantôme qui trimballaitplusieurs têtes coupées et qui devait sûrement l’attendre dans sa chambre.Un frisson parcourut sacolonnevertébralequandelleyrepensa.Mirandaserallongeasurlelit.–Tusaisqu’aprèstondépart,ilestvenunousvoir,Dellaetmoi?Kyliesetournaverselle.–Ahbon?–Oui,jecroisqu’ilespérait’qu’onteparledelui.Qu’onarriveàteconvaincredeluipardonner.Kylieattrapal’oursenpelucheetleserrabienfort.–Jesuisdésoléequ’ilvousaitembêtéesavecça.–Pasdutout,réponditMiranda.Jenesaispassituveuxlesavoir,mais…ilsouffraitvraiment.Je
nedispasquetudevraisluipardonner,maisilnousajuréquelaseuleraisonpourlaquelleilallaitsefiancer,c’étaitpourintégrercestupideConseildesloups-garous!–Jenecroispasquelaraisonsoitimportante,ditKylie.Maisqu’ill’aitfait,oui.Etderrièremon
dos.Jenel’auraisdetoutefaçonpasacceptés’ilmel’avaitdit,mais…Sagorgeseserra.Elleserral’oursdeMirandaplusfort.– Je sais.Mirandamarquaune pause.Della lui a pratiquement dit lamême chose, elle lui a fait
vivreunenfer.Legenred’enferqueseuleDellapeutfairevivre!Luiasortiqu’iln’étaitqu’ungrosnazeetqu’ildevaitallersefairecastrer.Mirandalaissaéchapperunprofondsoupir.Lorsqu’elles’estdéfouléesur lui,audébut, j’aicruque j’auraisàgérerunebagarrevampcontre loup-garou.C’estvrai, jepensaisqu’ilallaitpéteruncâble.Les loups-garousnese laissentpassouvent fairepar lesvampires, pas dans ce sens, en tout cas.Mais il n’amême pas réagi. Il n’a pas bronché et a toutencaissé. Plus tard, même Della a reconnu qu’elle était admirative qu’il ait encaissé sa punitioncommeunhomme.LecœurdeKylieseserraunpeuplus.–Jeneveuxpasenparler.Lesilenceenvahitlapièce.Mirandafinitparprendrelaparole.– Alors parlons d’autre chose. Quelque chose de bien. Savais-tu qu’Holiday et Burnett avaient
l’intentiondesemarierici,aucamp?–Non,jel’ignorais.CettenouvellerassuraKylie.Quandest-ceprévu?–Ilsn’ontpasencore fixédedate. J’ai lesentimentqu’elleattendait ton retour.Maiscela risque
d’êtretrèsbientôt.JesuisalléevoirHolidayl’autresoir,etilyavaitdesaffairesdeBurnettpartout
chezelle. Jepensequ’ilhabite làmaintenant. Ilssont tellement faits l’unpour l’autre ! Jeparieraisqu’ilsfontl’amouraumoinstroisfoisparnuit.Kyliefitlagrimace.–Onpeutlefairesisouvent?–Jenesaispas,ditMiranda,maisjel’espère.Ellesrirentbêtement.UnechaleurenvahitlapoitrinedeKylie.–BurnettetHolidayméritentd’êtreheureux.–Noustous,non?fitremarquerMiranda.Jevaisdireunedernièrechose,etensuitejemetais.Je
sais que tu es très en colère contre Lucas et je ne te le reproche pas, mais… tu ne devrais pascomplètementlelaissertomber.Tunevoudraispasquej’abandonnePerry,hein?Kyliesecoualatêteetfronçalessourcils–Ilyadeuxsemaines,tumedisaisquejedevaisluiflanquerunboncoupdepiedauderrièreet
retournervoirDerek.–C’étaitavantquejeconstatequeLucassouffraitréellement,jepensequ’ilt’aime.–Jen’aivraimentpasenvied’enparler.Jeneveuxpasypenser.Jeveuxsimplement…appelerma
mère,etensuiteallermecoucher.Medétesteras-tusijevaismecouchermaintenant?–Tunevaspasàl’écoleaujourd’hui?demandaMiranda.Kylieréfléchit.–Non,jecroisquejevaissécherlescours.Jenemesuispasencorecouchée.–Alors,aulit!ditMirandaenlaregardant.Pourquoiai-jelesentimentquetunemedispastoutce
quis’estpassé?Kyliefronçalessourcils.–Parcequec’estlecas,maisjesuistropfatiguéepourdévelopper.Jetedonneraitouslesdétails
lesplushorriblesplustard.Mirandaopina.–Horriblescomment?–Vraimenthorribles.–OK.Mirandafronçalessourcils.Maisjepourraisbienpassertevoir,justepourteregarder.Tu
m’asvraimentmanqué.Kyliesourit.–Toiaussitum’asmanqué.–TupeuxemprunterNounourssituveux,ajoutaMirandaensouriant.–Jecroisqueoui.Merci,ditKylieenserrantaffectueusementlamaindesonamie.Elleseleva,sortitavecl’énormeanimalenpeluchedanssesbras.Ellepourraittoujourss’enservir
pourcachersonvisageafindenepasvoirdetêtecoupée.
Heureusement, le fantôme avait dû se lasser d’attendre, parce queKylie trouva sa chambre bienaccueillante,grâceàSocks,sonchatnoiretblancquisereposaitpaisiblementsursonoreiller.Quand elle le rejoignit sur le lit, l’animal fila, lui cédant la place, puis avec sa patte blanche il
donnadespetitscoupsàl’oursenpeluche.–Bon,j’imaginequec’estmieuxdetecâliner,toi.Elle posa l’ours par terre. Le chat grimpa sur la poitrine de samaîtresse, qui lui accorda cette
attentiontantdésirée.Auboutdeplusieursminutes,Kylies’assit,etreposalefélinàsoncôté.–Désolée,monpote,fautquej’appellemaman,maisnet’inquiètepas,jeseraibrève.Elleestbien
tropoccupéeavecJohnpourmeconsacrerdutemps,àprésent.Àlaminuteoùcesparolessortaientdesabouche,ellecompritsonproblème:elleétaitjalousede
John.Elleavaitl’impressionquesarelationavecsamèrevenaitdetrouverdesbasessolides,lorsqueJohnétaitarrivéetlaluiavaitpiquée.Kylieavait-elletortdevouloirêtrecellequicomptaitlepluspourelle,justeuninstant?Probablement,répondit-elleàsaproprequestion.D’autantplusqu’ellevivaitloindechezelle.Sa
mèreavaittoutàfaitledroitdevivresavie.Lajalousien’étaitpasleseulgriefqu’elleavaitcontrecetype.C’étaitsimple,ellenel’aimaitpas.
Burnettavaitfaitdesrecherchessurluietriendelouchen’enétaitressorti.Ilavaitétéextrêmementchoquéd’apprendrequeHaydenn’avaitrienàvoiraveccequesesrecherchesavaientrévélé.Kylienedevraitpeut-êtrepasaccordertropdecréditàsesenquêtes.Maisbon,elledevaitarrêterdedépeindreJohncommeleméchant,etaccepterqu’ilfassepartiede
laviedesamère.D’autantplusqu’ilsemblaitlarendreheureuse.Celle-cileméritaitbien,non?Déterminéeàselajouersympa,ellecomposasonnuméro.Il sonna une fois. Puis deux. En temps normal, elle décrochait rapidement. Kylie craignait
d’interromprequelque interlude romantique ;elle fronça lessourcilset regarda l’heure ;çadevait
êtreledéjeunerenAngleterre,ilsn’étaientsûrementpasentrainde…fairedeschoses…oucommediraitDella,defairecrac-crac.Elle chassa cette pensée le plus vite possible et laissa son esprit vagabonder versDella.Burnett
avaitracontéquelapetitevampavaiteuunesorted’altercationavecungang.VoirMirandaavaitétésuperapaisant,maislesavoirtouteslesdeuxàsescôtés,voilàprécisémentleremèdequ’illuifallait.Uneautresonnerieauboutdela ligne.Elles’attendaitàcequ’ellebasculesurmessagerieà tout
moment.Samamanallait-ellebien?ElleenvoulutdenouveauàJohn.S’illuiarrivaitquelquechoseaucoursdecevoyage…–Allô?Samèreavaitl’airdistant,pournepasdirefroid.–Toutvabien?demandaKylieenserrantplusfortleportabledeHayden.–Kylie?Avecqueltéléphonem’appelles-tu?Quandellecompritquec’étaitpourcelaquesamèreavaitmisdutempsàrépondreetdemanière
sifroide,Kylies’écroulasurl’oreiller.–Oùesttonportable,jeunefille?–Oh…je…Elledevaittrouverunmensonge,etvite,etqu’ilsoitconvaincant.Samèrenepouvaitpeut-êtrepas
entendresoncœurbattre lachamade,maiselleavaitunesortededétecteurdemensongesmaternelnaturel,quil’avaitmisedanslepétrinbiendesfois.–J’aiégarémontéléphonehiersoir,alorsj’aiempruntéceluid’unami.Pasvraimentunmensonge.–Ehbien,celaexpliquepourquoitunem’aspasrappeléehiersoir,rétorquasamèresurletonde
laréprimande.OhmonDieu,tuneterendspascompteduprixquecelavanouscoûterderemplacertontéléphone?–Je…jecroisque jepourrais le retrouver.Et jesuisdésolée.KyliecaressaSocksquand ilvint
frottersatêtecontresonmenton.Quelquechosenevapas?Pourquoim’appelais-tu?–Non…juste…tonpèreétaitinquiet.Beau-père,voulutrectifierKylie,maisellen’enfitrien.–Iladitqu’ilt’avaitappeléetroisfoistardhiersoir,etquetun’avaispasrépondu.Etensuiteilm’a
appeléetroisfoisalorsqueJohnetmoiétions…enfin,quandj’étaisaulit.Beurk !Ledégoût deKylie passa enmode« surchargemaximale», et intima à son cerveaude
bloquertouteimagementaleinappropriée.–Jesuisdésolée,lança-t-elle,puisellesemorditlalèvre.Elle s’était dit qu’elle devait arrêter d’espérer que samère et son beau-père revivent ensemble,
mais parfois, c’était difficile. Toutefois, pour ce qui comptait le plus – là où elle chérissait lessouvenirsdecequesafamilleétaitalors–uneétincelled’espoirsubsistait.–Troisfois,c’estridicule,repritsamère,d’autantplusqu’ilsavaitquelleheureilétait!–Jesais,ditKylie,maisellesongea:Fiche-luilapaix,maman!Ilsefaisaitdusoucipourmoi!–Bon,ilesttempsquetonpèreapprennequejenesuispasunpotequ’ilpeutappelerjouretnuit!–Jesuissûrequ’ilcomprendraavecletemps.Jevaisluitéléphonerpourvoircequ’ilveut.–Fais-le,oui,acquiesçasamère,puisellemarquaunepause.Attends.Si tunesavaispasque je
t’avaisappelée,alorsqu’ya-t-il?Toutvabien?–Oui,jevoulaisjusteprendredetesnouvelles.Tues…tellementloin.– Je sais. Tu me manques. Non pas que je ne passe pas un super séjour. L’Angleterre, c’est
charmant!Kylie,quandJohnetmoiyretourneronslaprochainefois,tupourrasnousaccompagner?
Laprochainefois?Prévoyaient-ilsdéjàunautrevoyage?–Oui,marmonnaKylie,etelleserappelaqu’elleétaitcenséeêtreenmode«sympa.»–Tusaisquoi,mabelle?repritsamaman.Lapeurenvahitbrusquementsapoitrine.MonDieu, jevousenprie, faitesqu’ellenem’annonce
pasqu’ilssesontmariés!–Quoi?fitKylie.Àsavoix,onauraitditqu’elleavaitavaléunegrenouille.–Johnm’ademandési…–Non,larembarra-t-elled’untonsec.–Nonquoi?–Tuneleconnaispasassezbien.Lesilences’installaunpeutroplongtemps.–Quem’a-t-ildemandé,d’aprèstoi?Kylieeutenviederentrersousterre.– Je ne sais pas, dit-elle et elle comprit qu’elle était trop fatiguée pour tenir une conversation
logique–surtoutsielledevaitfairesemblantd’aimerquelqu’unqu’ellen’aimaitpas.–Ilveutquejeviennetravaillerpoursasociété,expliqua-t-elle.Ilestprêtàmepayerpratiquement
ledoubledecequejegagneici.OK.Quesamèretravaillepourcethommen’étaitpasaussihorriblequedel’épouser,maisKylie
n’appréciaitpascelanonplus.–Jecroyaisquetuaimaistonjob.–Oui,mais…ledoubledusalaire,etdesvoyagesgratuits,çaneserefusepas.–Mais…tu…–couchesaveclui–sorsaveclui!Çanes’apparentepasàduharcèlementsexuel?
Ilexistedesloiscontrecela,non?– Pas si nous sommes tous les deux consentants. John et moi avons conscience que notre
collaboration pourrait être difficile. Mais il a souligné que je ne serais pas directement sous sesordres.Doncceneseraitpascommesil’ontravaillaitvraimentensemble.Kyliel’entenditdanslavoixdesamère:sadécisionétaitprise.Elleallaitaccepterlejob.–Oui,mais jenesuispassûrequecesoit judicieuxdecollaboreravecquelqu’unavecqui tu…
sors.–JepensequeJohnetmoisommesassezmaturespourgérercela.Oui,maturecommeladernièrefoisoùtul’asamenéici,quandilafiléunebeigneàpapaetinitié
unemêléegénéraleauréfectoire.Kyliesemorditlalèvrepournepasajouterautrechosedeblessant.–J’imaginequejeneleconnaispasassezbien,conclut-elle.–Et j’aibien l’intentiond’y remédier laprochaine foisque tu rentreras. Jemesuisditque l’on
pourraitpartirensembleunweek-end.Pitié,non!–Jenecroispas…pourêtrehonnête,j’aimebiensavoirquecesweek-endsnesontquepourtoiet
moi.–Maistudoisfairesaconnaissance,Kylie,c’estuntypesuper!Jesuissûrequ’ilteplairaitsitu
apprenaisàleconnaître.–Oui,trèsbien,maispasdeprécipitation,d’accord?Chaquechoseensontemps.Samèresetut.–Çava,mabelle?Jeviensderéaliserl’heurequ’ilestcheztoi!Quefais-tudeboutàcinqheures
etdemiedumatin?
–J’avaisdutravailàrattraper,mentitdenouveauKylie.Etjeferaismieuxdem’ymettre.–Encoredesproblèmesdegarçons?demandasamère.Etdefantômequisebaladeavecunetêtecoupée.–Non,rienquejenepuissegérer.–Ques’est-ilpassé,moncœur?–Rien,çava.Enfait,jepréfèrenepasenparler.Plustard,peut-être.Samèrepoussaunlongsoupir.–Jesuislà…quandtuserasprête…–Jesais,etjet’aime,maman.–Moiaussi,mabelle.Etenrepassantencoreetencorelesparolesdesamèredanssatête,Kylies’endormitenfin.
–Oùallons-nous?demandaKylieàDerekalorsqu’ellesesentaitsombrerdanscetétatbrumeuxetpaisibledu rêve.Rectificatif :de l’effractionde rêve.Puis lasensationdecalmes’envola.Voilàunmomentqu’ellenes’yétaitpasadonnée,maisellecompritimmédiatementquecen’étaitpassonrêve.Ellen’étaitpasalléevoirDerek.C’est luiquiétaitvenulavoir.Etàprésent, il l’emmenaitquelquepart,marchaitdevantelle,maislamaindanssondosserraitbienfortlasienneetlaconduisaitlelongd’uncheminboisé.Elle essaya de se réveiller.Quelle heure était-il ?Depuis combien de temps dormait-elle ? Elle
devaitarrêtercela.MaisDerek regardaalorsderrière sonépauleet lui sourit.Elle se retrouvadansunmondesans
danger. Elle leva les yeux. Le soleil faisait danser de doux rayons de lumière matinaux entre lesarbres.–Nousallonsànotrerocher.Tuaimesbienyaller,non?Samain serra légèrement la sienne. Sa paume était chaude contre la sienne.Rassurante.Bizarre
commelesimplefaitdetenirlamaindequelqu’unpouvaitressembleràuneétreinte.Maisbon,elleparlaitdeDerek.Ilpossédaittouscespouvoirsdeféequirendaientsoncontactplus…Significatif.Ellesesouvintvaguementqu’ilavaittentédel’embrasser,quandelles’étaitéchappéedechezson
grand-père,etqu’elles’étaitditqueceneseraitpasfaciledeleteniràdistance.Maisétait-cevraimentcequ’ellesouhaitait?La réponse semblait se trouverquelquepart entre soncœuret sonesprit, et ellen’arrivaitpasà
tirer de conclusion. « Mais ce n’était qu’un rêve » se dit-elle en guise d’excuse. Plus tard, ellecomprendraittout.Elleselepromettait.–Tuadoraisalleraurocher,avant,repritDerek.–Oui,mais…ElleportaitunjeancoupéenshortetunT-shirt.Maiselleétaitpiedsnus.C’étaitagréable.Undoux
lit d’herbehumide et de terre sous ses pieds.Un rêve, forcément.Si cela avait été réel, elle auraitressenti les petits cailloux et les épines. Ce n’était pas réel. Pas vraiment. Mais elle devait faireattention.Elleagitalesorteilsetessayadenouveaudeseréveillersuffisammentpourtrouvercequiallaitetcequin’allaitpas.Derekseretourna,luitenanttoujourslamainetluifitdenouveauface:–Viensavecmoi,Kylie,accorde-moiça,s’ilteplaît.Elleentendaitdéjà lefiletd’eauduruisseauquicoulaitdans la terre,quiéclaboussait lespierres
lissées par le temps. L’odeur de l’herbe, des bois, et les grands arbres parfumaient l’air qu’elle
respirait.UnebriseagitalescheveuxdeDerek.–Donne-moiunpeudetempspourêtreavectoi.Elle le regarda fixement à travers ses cheveuxqui dansaient devant ses yeux.Vit la supplication
danssonregard.Lemotnonreposaitsurleboutdesalangue,maisellevitensuitelesbleusdanssoncou.Desbleus
qui semblaient tout aussi graves que ceux de Lucas.Mais elle n’était pas responsable de ceux deDerek.Mario,oui.Maistoutcelaétaitsafauteàelle.Ils’étaitjetésurMariopourlaprotéger.Derekétaitprêtàmourirpourelle.Ill’aimait.–S’ilteplaît,dit-il,etlesondesavoixrésonnadanssoncœurcommeunechansontriste.Alleravecluineluiparutpascomplètementjuste,maisrefusernonplus.–Justepourparler,leprévint-elle.–Bien.Ilse fenditd’ungrandsourireet lesmoucheturesordanssesyeuxétincelèrent.Ellese rappelait
aussiceregard.Unregardsexy,insouciant,quimontraitqu’ilavaitquelquechosederrièrelatête.Ilseretournaetellecontinuaàlesuivre.Ilsarrivèrentprèsduruisseau.Ildésignalerocherd’unsignedelamain.– La voiture deMadame est avancée ! dit-il d’une voix très formelle, et il lui fit la révérence,
commedansunepiècedethéâtrepouramateurs.Ilétaittellementmignonqu’elleneputs’empêcherdesourire.–Cequetuesbête!–Oui,maiss’ilfautenpasserparlàpourtefairesourire,jeferail’idiottoutelajournée.Tuaseu
unenuitdifficile,tuméritesdet’amuserunpeu.–Oui,n’est-cepas?dit-elle,puisellesautasurlerocher.Sursa«voiture».Il bondit dessus juste après elle ; son épaule effleura la sienne. Elle ne put s’empêcher de se
rappeler lapremière foisqu’ilsétaientvenus ici.Cela luiavaitparu tellementmagique,commeunconte de fées, une image tout droit sortie d’un livre pour enfant.Bien sûr, à l’époque, cela s’étaitproduitsouventquandelleétaitavecDerek,etcen’étaitpasforcémentlà.Kylie regarda, tout autour d’elle, les bois et le paysage. Aucune sensation de conte de fées ne
dominaitleslieux.Peut-êtrecelanesepassait-ilpasdanslesrêves.Nonpasquecenefûtpasjoli,niapaisantd’êtreici.Lesoleilenvoyaitunecouleurdoréeentreles
arbres,etleursfeuillesquis’agitaient.L’airsentaitlafraîcheurdumatin.C’étaitagréabled’êtreassisàcôtédeDerek,desentirsonépauleeffleurerdélicatementlasienne.Etsiellesedétendait?Ellenelaisseraitriensepasserentreeux.Ilsétaienticipourparler,serappela-t-elle.Elle le regarda et l’attirance lui chatouilla le cœur. Pour la première fois, elle remarqua les
changementssubtilsdecesderniersmois.Legarçonavecquielleétaitvenueaurocheravaitpresquedisparu,etunhommeavaitprissaplace.Lescheveuxsursonfrontavaientlégèrementfoncé.Ilavaitunprofilviril,unemâchoirecarréeetdeslèvresmagnifiques.Ilbaissalesyeuxsurelle.–Tusais,c’étaitcoolquandtum’asrenduinvisible.–Oui,maisj’aieutrèspeurquandjenet’aipasvutoutdesuiteaprèst’avoirfaitrevenir.–Jesais,j’aipusentirtesémotions.Ilhésita.Maisçaaussic’étaitcool.Enfait,c’étaitcequ’ily
avaitdepluscool!–Non,dit-elle,sérieux,çam’afaitflipper!
– Je sais, c’est bien pour ça que c’est cool. Parce que c’est à ce moment-là que j’en ai eu lacertitude.C’estàcemoment-làquej’aisuquetum’aimaisencore.Sesmotsrésonnèrentdanssatêteetrebondirentdanssoncœur.Ilsebaissa.Sondoigteffleurasa
joue.Sonsoufflechuchotacontresatempe.Oh!non,songeaKylie.Merevoilàhypermalbarrée!
Ellesentitqu’illuieffleuraitlementon.Avecdouceur.Avecbienveillance.Avecamour.Elle se rappelait avoir pratiqué l’effraction de rêves avecDerek,mais pas comment cela s’était
terminé.L’effleurement recommença.Lasensationdedrapsque l’onfrottaitcontreelle.Ohmince,était-elleencoreaveclui?Aulit?Qu’avait-elledoncfait?Elleouvritlesyeuxd’uncoup,craignantde…de…Desyeuxjauneslafixaient.Desyeuxdefélin.
Etunepatteblanchereposaitsurleboutdesonnez.–Socks?Ellegloussadesoulagement,soncœurbattantlachamadeàcausedurêve.–Salutbébé,murmura-t-ellequandlechatredonnadescoupsdepattesursonnez.Alorscomme
ça,jet’aivraimentmanqué,hein?–Tuasmanquéàtoutlemonde,fitunevoixàl’autreboutdelapièce.Avantqu’ellenepuisseidentifierlavoix,voiresavoirsielleétaitmasculineouféminine,ellese
levacommeuneflèche,lesyeuxécarquillés…D’accord,ellerespiraunboncoup.Pasderaisondepaniquer.Cen’étaitqueHoliday.–Jenevoulaispastefairepeur,jesuisjustepasséevoircommenttuallais.Jem’inquiétaisunpeu.
Tuasdormipendantdesheures.Jesuisvenuetevoiruneoudeuxfoisettun’asmêmepasbougé.Kyliecillaetregardal’heuresursatabledenuit.Troisheures.–Jenevoulaispasdormiraussilongtemps.–Tuétaisépuisée,observaHoliday,puiselle fronça lessourcils.Burnettm’aparléde l’épisode
«Hayden».Socksdescenditdulitd’unbondetsemitàdessinerdeshuitautourdeschevillesd’Holiday.LadirectriceignoralechatetcontinuaàfixerKylie.–Àcepropos,reprit-elle.À son expression,Kylie comprit qu’elle allait lui passer un sacré savon.Ce n’était pas dans les
habitudesdeHoliday,maisquandelles’ymettait,celafaisaitdeuxfoisplusmal.Et,biensûr,Kylieavaitbeaulemériter,ellenesavaitpassiellepourraitlesupporter.Alors,elle
s’affaladenouveausurlelit,attrapal’oursenpelucheetleserrabienfort.–Tunepeuxpasnousfairedescachotteries,Kylie.Çayest,lepassageàsavoncommençait!
–Jesaisquejen’auraispasdûlecacher.LapoitrinedeKylieseserra.Etjesaisquej’aibeaucoupdéçuBurnett et tu es sûrement en colère contremoi, toi aussi, et j’ai compris pourquoi, vraiment.Mais…EllerespiraunboncoupalorsqueladésapprobationnequittaitpaslesyeuxdeHoliday.Enserrantl’oursplusfort,ellepoursuivit:–J’aipromisàmongrand-pèredenepasexposerHayden.Jen’auraispastenucettepromessesije
croyaisqu’ilétaitmauvaisouqu’ilessayaitdemefairedumal.Sanslui,jenet’auraispastrouvée,lanuitoùCollinWarrent’aenlevée.Et jen’auraisprobablementpaspu…tesauver. Ilm’aaidéeà tesauverlavie.Holidayfronçalessourcils.–Jenedispasquec’estquelqu’undemauvais,Kylie.MaisBurnettaraisondeteprotéger.Nous
devonssavoircequisepasse.–Ehbienmaintenant,tusaistout.J’imaginequeBurnettt’atoutdit.–Oui,acquiesçaHoliday.Kyliesemorditlalèvreetrepoussasonourssurlecôté.–BurnettetHaydensesont-ilsreparlés?T’a-t-ilexpliquéqu’ilsenétaientvenusauxmainsl’autre
soir?Burnettaditqu’ilréfléchiraitavantdedéciders’illelaissaitrester.Réfléchir!SurquoiHaydenarétorquéqu’ilallaitréfléchirpourdéciders’ilvoulaitrester.Ellesoupiraetselança.Burnetts’estcomportécommeunenfoiré.Holidayfronçalessourcils.– Quand il s’agit de protéger ceux qu’il aime, Burnett n’hésite pas à se servir un peu de ses
muscles.–Unpeu?Vraiment?Kylierouladesyeux.Tuarrivesàdireçaengardanttonsérieux?Unlégersourires’ébauchasurleslèvresdeladirectrice.–D’accord,unpeubeaucoup,peut-être,maislaplupartdutempsilaraison.
Elletirasescheveuxd’uncôtéetsemitàlestresser.–Maisdanscecas,ilatort.Etc’estbiencela,leproblème.J’auraisbienaiméqueBurnettnefasse
pasfuirHayden.Jesaisqu’ilamentipoursefaireembaucher,maisceseraittellementimportant…d’avoirquelqu’uniciquicomprennecequec’estqued’êtrecaméléon.C’estvrai,tuessuper.Tuastoujoursétélàpourmoi,depuisledébut,etBurnettaussi,maiscommetumel’asrépétéàplusieursreprises,tuneconnaisrienauxcaméléons.Holidayopina.–Jesaisqueceseraitbienqu’Haydensoitlà,etçaaussijel’aiditàBurnett.Etjetelepromets,ily
réfléchit.–Tucompteslelaisserdécider?demandaKylie,quin’aimaitpascela.Qu’est-ilarrivéaubossque
tuétais?–Maintenantquel’onestvraimentensemble,onadécidéqueBurnettauraitlederniermotsurtout
cequitoucheàlasécuritédeShadowFalls.–Ohnon !Tusaisqu’ilpeutêtre tellementexcessif,parfois !Tuviensde le reconnaître,ajouta
Kylie.Être amoureuse de Burnett avait-il semé le trouble dans sa tête ? Kylie avait entendu dire que
l’amournousrendaitbêtes,etmaintenant,elleenétaitsûre.–C’estvrai,ilpeutsemontrerexcessif.Etmoi,tropcoulante,avouaHoliday.Etpourlasécuritéde
nos élèves, je préférerais pécher par excès de prudence. Mais ne t’inquiète pas. Je suis sûre queBurnetttrouveçabienqueHaydensoitparminous.Pasuniquementpourtoi,maispournousaideràprendrenosprécautionscontreles…attaquesfutures.Kylie remontasesgenouxet lesserra.Ellesavaitque,par«attaquesfutures»Holidaypensaità
Mario.SiHelenneserappelaitabsolumentpassonagression,Kyliesavaitaufonddesoncœurquec’était Mario. Une vague de tristesse l’envahit et certains événements de la nuit précédenteréapparurentdanssatête.Ellelevalesyeux.– Jenecroispasque je supporteraisqueMario fassedumal àquelqu’und’autre.Elle serra les
poings.D’abordHelen,puisDerekafaillisefairetueràcausedemoihiersoir.EtMarioafaillimefaireassassinerLucas!–Jesais.Holidayl’interrompit,commesiellesedoutaitquelesimplefaitdelerépéterseraitdifficilepour
elle.–Çaadûêtreduràsupporter.MaiscelanefaitquesoulignercequeditBurnett:quetudoisêtre
prudente. Ila faitbeaucouppour lesystèmedesécuritédepuisque tuespartieet ilpensevraimentqu’ilestinfaillible.CelaauraitdûdonneràKylielesentimentd’êtreprotégée,etc’étaitlecas,mais…– Je suis donc prisonnière ici, dit-elle, en songeant que si les choses ne changeaient pas, ça
deviendraitaussidurquedevivredansl’enclosdesongrand-père.–Non,pasdutout,insistaHoliday,jesavaisqueturessentiraiscela,etBurnettetmoienavonsdéjà
parlé.Onnet’interditpasdesortir,maistantqueleschosesneseserontpascalmées,Burnetttientàresteràtoncôtéoùquetuailles.Jenesaispass’ilt’enaparlé,maisMarioaétévuàFallen.Etdonc,Burnettneveutpastelâcheretn’endémordrapas.Crois-tuquetupourraslesupporter?Ilveutjustes’assurerquetuesensécurité,Kylie.Iltientbeaucoupàtoi.Kylieopina.–Jesais,etmoiaussi je l’aimebeaucoup.Ellesesouvintdesaconversationavecsamère.Et le
week-enddesparents,dansquelquessemaines?Mamèretiredéjàdesplanssurlacomète.Elleveut
queJohnetmoi…ons’entendebien.Kylie s’imagina contrainte de semontrer polie avec le copain de samère pendant tout un fichu
week-end.Bonsang,ladernièrefoisqu’elleavaitvucetype,elleavaitcomplètementpétélesplombs,etl’avaitcouvertdetoutessortesd’injuressanspouvoirs’arrêter.Ilavaitfaitressortirlagarcequiétaitenelleàlapuissancedixmille.Holidayselaissatombersurleborddulit.–Ons’occuperadeceproblèmeentempsvoulu.MaisKylievitl’inquiétudeétincelerdanssesyeux.Elleserrasesgenouxplusfort.–Pourêtrehonnête,situtrouvaislemoyend’annulerceweek-end,jenet’envoudraispas.Tuas
maparole.Holidaysoupira,compatissante.–Bon,etcetespritquitrimballeunetête?Raconte!Kylierouladesyeux.–Tuveuxdirequetesfantômesnefontpascegenredechose?demanda-t-elle,sarcastique.Holidaygloussa,mêmesiKylien’avaitpaseul’intentiondefairedel’humour.–J’enaieuunquitrimballaitsonbrasetsajambependantunmoment.Illesavaitperdusdansun
accidentetnevoulaitpasleslâcher.C’étaitdégoûtant.–Onenadelachance!s’exclamaKylie,maisellepensaensuiteauxespritsducimetière,ets’en
voulutd’êtreaussicynique.Laplupartétaientjustedesâmesperduesquicherchaientunpeud’aide.Holidaymitunemainsursonbras.–Ce sont euxqui ontde la chancedenous avoir, dit-elle comme si elle avait ludans la têtede
Kylie. Mais tous ne méritent pas notre aide. Je t’en ai déjà parlé, tu peux les faire fuir. Tu asabsolumentledroitdedirenonàcertains.– Je sais, et j’ai essayé, mais j’imagine que je m’y suis mal prise. Ou peut-être n’ai-je pas
suffisammentinsisté.–ÀcequeBurnettm’adit,envoyerbaladercetespritseraitunebonneidée.Pourquoitedemande-t-
ildetuerquelqu’un?T’a-t-ilprécisédequiils’agissait?–Non.Commetouslesfantômes,ilnesenoiepasdansdesdétails.Jenesuismêmepassûrequ’il
connaisselesréponses.–A-t-ill’airméchant?Kylieréfléchituneminute.–Ouietnon.Cen’estpasunange.Ilaavouéavoirtuébeaucoupdemonde.Laplupartdutemps,
quandjelevois,iladusangsurlesmains,maisondiraitqu’ilculpabilise.Ou,parfois,dumoins,ditKylie en se souvenantqu’il avait transporté la tête coupée sansménagements.Mais jenecroispasqu’ilsoitlàpourmefairedumal.Jeluiaimêmedemandés’ilvoulaitm’emmenerenenfer.Holidayarquaunsourcil.–Ettucroisqu’illereconnaîtrait,sic’étaitvrai?–Non,maisiln’apascomplètementnié,commesic’étaitunmensonge.Ilm’aannoncéd’unair
détaché qu’il voulait que j’envoie quelqu’un d’autre en enfer.Et je crois que cette histoire de tête,c’étaitparcequej’avaisdécidédel’ignorer.Ildésiraitjusteattirermonattention.–Etjepariequecelaamarché,lançaHoliday.–Presque,réponditKylie.c’estplutôtdifficiledenepasfaireattentionàcela.Ellefrissonnaenrevoyantcetteimage.–Jepersisteàcroirequ’envoyerbaladercetespritseraitunebonneidée.
– Je sais, et hier soir, je pensaismême que c’était ce qu’il fallait faire,mais une choseme faitdouteràprésent.–Laquelle?demandaHolidayenremontantunejambesurlelit.Kylie soupira. Jusqu’àprésent, celane l’avait pas trop inquiétée,maismaintenant, elledevait en
tenircompte.–Lefantômeprétendquesijenetuepascettepersonne,jemourrai.Holidayplissalefront.–Voilàquiapporteuneperspectivedifférentesurleschoses.As-tulesentimentqu’ilessaiedete
protéger?Ouqu’ilfaitjustedumalàquelqu’und’autre?Kylieyréfléchit.–Lesdeux, jecrois. Jenesaispaspourquoi ilvoudraitmeprotéger.Maisbon,hiersoir,quand
Dereketmoiquittionsl’enclos,ilm’apousséeàalleraucimetière.Jecroisqu’ilm’aidait.Holidayfronçalessourcils.–OK,gardons-lepourl’instant,maisjet’ensupplie,soisprudente.Ilyadéjàquelqu’undansce
mondequiessaiedetefairesouffrir,nulbesoinqu’unêtredel’au-delàtefasseenplusdumal.Tuesbientropexceptionnellepourquel’onveuilleteblesser.LesparolesdeHolidayrésonnèrentdanslatêtedeKylie,etellerevitbrièvementquelqu’unluidire
lesmêmes choses.Quelqu’un auxyeuxverts, tachetésd’or, et aux lèvres…chaudes.Brusquement,ellesesouvintdurêve.EtplusparticulièrementdumomentoùDerekl’embrassait.–Ohmince,marmonna-t-elle.Etellelaissatombersatêteentresesmains.Qu’ai-jedoncfait?–Quoi?fitHoliday.Kylielevalesyeuxsurelle.–Dans les effractions de rêve, la personne qui initie le rêve contrôle tout,mais celle que l’on
amènededanspeutempêcherlesévénementsdeseproduire,pasvrai?–Oui.Àconditionqu’elleaitréellementenviequecelanesepassepas.–Merde,lâcha-t-elle.Quevoulait-elleaujuste?Cequiétaitbienetcequiétaitmal.Etsielleétaitperduedanslerêve,
alorselleavaitpeut-êtrelaisséseproduiredeschosesquin’auraientpasdû.–Nedevrais-jepasêtreenmesuredetoutmerappeler?–Si,saufquand…Ellefitlagrimace,commesiellepensaitqueKylienevoudraitpasentendrela
suite.Saufquandtuestrèstrèsfatiguée.–Cequiétaitmoncas.Lessivée,marmonnaKylie.– Du calme. Une fois que tu auras mangé quelque chose et que tu te seras détendue, tu te
souviendrassûrementdetout.–Jenesaispassij’enaienvie,grommela-t-elle.Holidayserembrunit.–Veux-tuquej’enparleàDerek?LefrontdeKylieseplissa.–Jen’aipasditquec’étaitDerek.Holidaylaregardad’unairdedire:«Àd’autres!».–Vousdeuxetmoi,noussommeslesseulsàpouvoirinitieruneeffractionderêve,ici.Çadevait
forcémentêtrelui.Kyliesemorditdenouveaulalèvre.– D’accord, c’était lui, mais non, je ne veux pas que tu lui en parles. Je devrais pouvoir me
débrouillertouteseule.Ellelaissaéchapperunprofondsoupir.Ilcroitquejel’aimeencore.–Etcen’estpaslecas?demandaHoliday.
– Non, répondit Kylie, et elle était sincère. Alors pourquoi avait-elle l’air d’essayer de s’enconvaincre?JeneveuxpasparlerdeDerek.Holidaylaregardaattentivement.–Veux-tuparlerdeLucas?–Non,réponditKylie.–Trèsbien,maissituasenviedeparlerdeluioudequoiquecesoit,jeserailàpourtoi.–Jesais.Puis,justepoursefairepasserpourunementeuse,lesmotsluiéchappèrent:Jemesuis
renducompteque je l’aimais justeavantque toutcelane seproduise. Jecomptais le luidireen lerevoyant.Etjustement,quandjel’airevu,ilpromettaitsonâmeàMonique.Holidayfitlamoue,commesiellehésitaitàdirecequ’ellepensait.–Jenecroispasqu’ilétaitsincère.–Peuimporte.Iln’auraitpasdûlefaire.–C’estvrai.Maisjesaisqu’ilnementpassursesintentions.Etjetedissimplement,situl’aimes
encore,quejenepensepasquecesoitquelqu’undemauvais.Kylieinspiralentement.–Unjour,j’aidemandéàmamèresielleaimaitencoremonbeau-père.Ellem’aréponduqu’elle
ne savait pas. Qu’une fois qu’elle ne serait plus en colère contre lui, elle verrait bien ce qu’elleressentirait. Peut-être que c’est ce qui va se passer entre Lucas etmoi.Mais pour l’instant, çamegonfleroyalementquetoutlemondemerépètequec’estunmecbien.J’ail’impressionquec’estmoiquiaifaitquelquechosedemal.Deslarmesluiserrèrentlagorge,maiselledéglutitetseraidit.–Jesuisdésolée.Holidaylevalamain.Tun’asrienfaitdemal.Etjenedirairiendeplus.–Merci.Sonestomaclaissabrusquementéchapperungrondementbas,commepourluifairecomprendre
qu’ilétaitaussimécontentqu’elle…etvide.–Ilfautquejemangequelquechose.Jecroisquemonventreestentrainderongermacolonne
vertébrale!–Tiens,ditHolidayenluidonnantunsacenpapierposésurlatabledenuit.Jet’aiapportécela
toutàl’heure,enmedisantquetuneseraispascontreunpetiten-cas.Kylieouvritlesachetenplastiqueetvitundemi-sandwichdanslequelquelqu’unavaitmordu.–Désolée,j’aieuunpetitcreuxpendantquej’attendaisquetuteréveilles.PendantqueKyliedéballaitlesandwichetenmangeaitunebouchée,Holidayplongealamaindans
lesacetensortitunsachetdechips.–J’aiencorefaim!Ellesouritd’unaircontritetfourraunechipsdanssabouche.Soudain, Kylie eut l’impression qu’un énorme poids disparaissait. Pas complètement, mais
suffisamment pour lui laisser un peu de répit. Elle avait encore des tonnes de problèmes à traiter.Mais son retour à Shadow Falls, ça, c’était génial. Et être en compagnie d’Holiday, voilà qui ycontribuait.Kylieplongealamaindanslesacdechips…vide.Holidayfitunedrôledetête.–Désolée,jenesaispascequim’arrive.Monappétitestdétraqué.–C’estsûrementl’amour,observaKylie.Tuesrayonnante!Chaquefoisquetuprononceslenom
deBurnett,tesyeuxsemettentàbriller.– En réalité, l’amour a exactement l’effet contraire sur l’appétit. Il paraît que l’on peut vivre
d’amour.Pasbesoindemanger.
Kyliearquaunsourcil.–Alorstuespeut-êtreenceinte.Holidayléchalagraisseetlesmiettesdechipssursesdoigts.–Paspossible.–Oharrête,Mirandam’aracontéqu’elleétaitvenuecheztoietqu’ilyavaitdesaffairesdeBurnett
partout.Vousdeux,vousallezvousmarier.Mirandame l’adit,çaaussi.Le faitquevouscouchiezensembleest…normal.Etsituprétendslecontraire,tuaurasl’airstupide.Holidayinclinalatêtedecôté,regardantKylied’unairàmoitiésérieux.–Jeneprétends riendu tout.Et jenedevraispasm’expliquer,mais je…jen’aipasditqu’ilne
dormaitpaschezmoi,niquenousne…couchionspasensemble.J’aiditquecen’étaitpaspossible.Noussommesprudents.Nousnousprotégeons.Cequiestlemeilleurconseilquejepuissedonneràtous les ados du camp. Elle désigna le sachet en papier sur le lit : Il y a des biscuits dans le sac.Désolée…j’enaimangéquelques-unsaussi!KylieattrapavivementlesachetaufondduquelilrestaittroisOréo.Elleenpritunpourelle,etpar
politesseenoffritunàHolidayquil’acceptaavecenthousiasme.–J’adorelesOréo,lança-t-elleàKylieestomaquée.Puislaféefourralebiscuitentierdanssabouche,enuneseulegrossebouchée.–Tusaisquelespréservatifsnesontpas infaillibles?déclaraKylieenouvrantsonbiscuiteten
léchantleglaçageblancentrelesgaufrettesauchocolat.D’aprèslesstatistiques,ilsnesontefficacesquedanslaproportionde85à90%pouréviterunegrossesse.Certainsprétendentquejusqu’à10%cetteerreuresthumaine,oudanstoncas,vampirique,etpasdueaupréservatif.Kyliesentitsonvisageseréchauffer.Holidayrougitavecelle.Puis,labouchetoujourspleined’Oréo,laféelevalamaincommepour
direqu’elleavaitbesoind’uneminuteavantdeparler.Kylie,qui,étrangement,n’étaitplusgênée,sesentitfièredetoutcequ’elleconnaissait,etcontinua
àparlerentredeuxléchouillesdeglaçage.–Etsiungarçonentrimballeuntroplongtempsdanssonportefeuille,ilpeutsedéchirer.Ensuite,
ilyalesdéfaillancesliéesauproduit,onnesaitpastroppourquoi,maislepréservatifseperce,ouilyauntoutpetittroudedans.Ettuseraisétonnéesijetedisaisqu’ilsuffitdepresquerienpourqu’unefilletombeenceinte.Ayantterminéleglaçage,Kyliemangeaunboutdugâteauauchocolatetcontinua,labouchepleine
d’Oréo.Holidaydéglutitlonguement.–Tu…enconnaisunrayonsurlescapotes!–Jetel’aidit,mamèrelaissaitdesprospectussurmonlitdeuxfoisparsemaine.Situsavaistoutes
lesinformationsquej’aidanslatête!JepourraisteparlerdetouteslesMST,maiscen’estpasjoli-joli.Jepréfèrenepasypenser.Holidayrit.–Quandj’auraiunenfant,jepensequejedemanderaiàtamèreoùtrouvertoutescesbrochures!–Ohnon,surtoutpas!Çametlebazardanslatêtedeceluiquileslit.Jesuissûrequec’estpourça
quejesuisencorevierge.Holidaygloussa.– Ce qui est précisément la raison pour laquelle j’achèterai ces brochures àmes enfants ! Son
sourires’évanouit.Sérieusement,onnedevraitpasfairel’amouràlalégèrequandonestado.
–Exact,ditKylie.Elleattrapaledernierbiscuitetlecoupaendeux.Maistropd’informations,cen’estpasnonplusunebonnechose.ElleenoffritunemoitiéàHolidayquin’hésitapasàlaprendre.–Merci.–Es-tu sûreque tun’espas enceinte ? insistaKylie enobservant son amie fourrer lamoitié du
biscuitdanssabouchecommesiellemouraitdefaim.Oucommesiellemangeaitpourdeux.– Sûre et certaine. Les fées, ou dumoins les fées deBrandon, savent toujours quand elles sont
enceintes.Kyliesefenditd’ungrandsourire.–Attends,l’undessignes,cen’estpasqu’ellessontaffaméesetavalentlesrepasdeleursamiesen
attendantqu’ellesseréveillent?–Non.Avoirfaim,c’estunsymptôme,c’estvrai,maislepluscommun,cesontleshoquetsetles
rots.J’aiunecousinequiaeulehoquetpendanthuitmoisquandelleétaitenceinte,c’étaittriste.Holidaycontemplalesachetenpapiercommesielleregrettaitqu’ilsoitvide.– Et si tu allais mettre tes chaussures ? Comme ça, nous irons piquer d’autres cookies à la
cafétéria?EnsuitenouspasseronschercherBurnettpourallerauxcascades.Quelquechosemeditqu’unpeudecalmeteferaitleplusgrandbien.Àcetteidée,Kyliesentieuneondedechaleurlaparcourir.–Oui,super.Peut-être qu’une fois là-bas, elle se rappellerait la fin du rêve.Bon sang, elle espérait vraiment
qu’ellen’avaitrienfaitdestupideavecDerek.Nonpasqu’elleredoutât…êtrealléetroploin–jusqu’aubout,parexemple.Troploin.Avouons-
le,commeellel’avaitditàHoliday,cesbrochuresl’avaientbousillée,letropd’informationspouvaitvraimentêtrenégatif.Ou,danscecasparticulier,positif.Alors,ellecompritquesiellen’avaitpasétésiprudenteenmatièredesexe,elleauraitpeut-être
déjà couché avec Lucas. Elle était contente de ne pas l’avoir fait. La douleur titilla de nouveau sapoitrineetelleneputs’empêcherdesedemanderquelleétaitlapartdevéritédanscequ’elleavaitditàHoliday.QuandelleneseraitplusencolèrecontreLucas,pourrait-elleluipardonner?Méritait-ilunesecondechance?Chassant Lucas de sa tête, elle le remplaça par Derek, qui surgit pile au premier rang de ses
pensées.Ellese rappelasonbaiserdans le rêve.L’avait-ellearrêté?Ous’était-elle laisséentraînerdedans?Mince,mince!Donnerdel’espoiràDerek,cen’étaitpasbien.Et si elle lui en avait donné, elle devait l’étouffer dans l’œuf avant de provoquer des dégâts
irréversibles. Du genre où les gens souffraient. Et le fait qu’elle tienne tellement à ne pas fairesouffrir Derek aurait dû lui donner le loisir de réfléchir, mais elle ne laisserait pas son espritvagabonderdanscettedirection.Pasquestion!Kylieattrapaseschaussures,lesenfilaetpartitavecHoliday.SesouvenantdutéléphonedeHayden,
ellelefourradanssapoche.Hiersoir,elleavaitenvisagéd’appelersongrand-père,maiscommeellenesavaitpasquoidirenicomment,ellenel’avaitpasfait.Etsiellel’appelait,Burnettconsidérerait-ilcelacommeuneautretrahison?–Peut-onpasseraubungalowdeHayden?Jedoisluirendresonportable.J’ailaissélemienchez
mongrand-pèreetjevoulaisappelermamère.–Biensûr,ditHoliday.Elles n’étaient pas sorties de la chambre de Kylie que Holiday laissa échapper un petit bruit
nerveux.Puisunautre.
Kylielaregarda.Holidayflanquaunemainsurseslèvresetlapaniqueenvahitsesyeuxverts.–Était-cecequejecrois?demandaKylie.Unhoquet?–Ohmince!s’écriaHoliday.Etellehoquetadenouveau.Kyliecriad’excitation.–Jemedemandeàquiressembleralebébé.ÀBurnettouàtoi?
Hayden ne se trouvait pas dans son bungalow, mais Holiday, toujours un peu paniquée par seshoquets,acceptadepasservoirdanssasalledeclasses’ilyétait.– Je suis sûre que ce n’est rien, dit-elle en tapant sur sa poitrine. C’est psychosomatique. Nous
avonsparlédehoquetsethop,voilà,c’estarrivé.Kylie n’était pas convaincue, et apparemmentHoliday non plus.Elle n’arrêtait pas de répéter la
mêmechose,commepours’enpersuader.– Tu ne veux pas d’enfants ? demanda Kylie, qui se souvint de ce qu’elle avait appris sur les
caméléonsquiavaientdumalàtomberenceintes.–Simais…Burnettn’estpasconvaincu.Ilprétendquecommeiln’apaseudepère,ilnesaurait
pasenêtreun.–Jecroisqu’ilferaitunsuperpapa.– J’en suis sûre. Il serait sûrement surprotecteur, comme la plupart des vampires, mais tout de
mêmefabuleux.Songeantàunautrevampirequipourraitsemontrersurprotecteur,Kyliedemanda:–Dellaest-ellerentrée?–Non,pasavantcesoir,réponditHoliday,maisellevabien,ajouta-t-elle,devinantl’inquiétudede
sonamie.BurnettaencoreparléavecStevecematin.Kylieopina.–EtHelenvabien?–Ilsl’ontlaisséesortirdel’hôpitalhier,enfindejournée.Sesparentsvoulaientqu’ellerentrechez
euxpourunmoment.Justepours’assurerqu’elleaillebien.Biensûr,Jonathonestfurax!– Tu m’étonnes ! lança Kylie qui les revoyait, tous les deux, pratiquement collés-serrés en
permanence.HolidayetKylieparvinrentdevant la sallede classedeHayden.Kylievit quelque chosebouger
derrièrelerideau.
–Ilestlà.Holidayacceptad’attendreàl’extérieur,etKylieentra.Hayden,seuldanslasalle,étaitassisàsonbureau,untéléphoneàlamain.–Salut,ditKylie.Illevalesyeuxetfittomberletéléphone.–J’allais t’appelerpourvoirsi tuallaisbien.Etprendredesnouvellesdemonportable ; je t’en
prie,nemedispasquetuasrappelémacopine?–Non,justemamère.–Ettuvasbien?–Oui.Ellesortitl’appareildesapoche.Jevoulaisvousledéposer.Mercidemel’avoirprêté!Ilhochalatête.–Tun’aspasappelétongrand-père?LabellehumeurdeKylies’assombrit.Ellesecoualatête.–Jenesaispasquoiluidire.Jel’appelleraidansunjouroudeux.D’accord,elleavaittendanceàremettrebeaucoupdechosesaulendemain,maiselledécidadefaire
unepetitepause.–Luiavez-vousexpliquéqueBurnettsavaittout?Sesyeuxs’assombrirentquandilhochalatête.–J’aidûtentermachanceetutiliserletéléphonedubureau,carjen’avaispaslemien,dit-il.Elleluiadressaunregardcontrit.–Mongrand-pèreest-il…d’accordaveccela?–Iln’estpascontent.Jecontinueàcroirequ’iln’apasparticipéaucomplotquivisaitàt’empêcher
departir.Etilavaitl’airimpatientdet’enparler.–Jesais, jevouscrois.C’est justeque…j’ai l’impressionde luiavoir faitdumalenpartant,et
maintenant il sera en colère parce que j’ai parlé de vous àBurnett.L’idée qu’il soit énervé contremoi…c’estjustetroppourmoi.–J’aiexpliquélesraisonspourlesquellesilfallaitquel’onenparleàBurnett.Haydensecaladans
sachaise.Tongrand-pèret’aimebeaucoup.Jesaisqu’ilpeutsemontrerentêté,maisilaperdutropdechosesdanssavie.Sonenfant,safemme.Àprésent,ilapeurdeteperdretoiaussi.–Jesaisetpourtant…mêmesimaplacen’étaitpasici,àShadowFalls, jenepourraispasvivre
commeilslesouhaitent.Coupéedumonde.–Jesais,cen’estpasfacile.LaraideursoudainedanssesépaulesmontraàKyliequecelaavaitététrèsdurpourlui.–Quelâgeaviez-vousquandvousvousêtesenfui?Ilpritunstylo.–Commentsais-tuquejemesuisenfui?–C’étaitjusteunesupposition,ditKylie.Ilhésita.–Dix-septans.–Avez-vousrevuvosparentsdepuis?Ilsecoualatête.–Tongrand-pèremetient informéde leursanté…et ilacommencéàmelaisserparleràJenny
quand…–Quandquoi?demandaKylie.–Quandils’estmisentêtequ’ellevoulaits’enfuirelleaussi.
–C’étaitlecas?–Jecroisquejel’aicalmée.Ellen’aplusqu’unanoudeuxàpasserlà.Elleestpresquemature.–Mature?demandaKylie.– Oui. Quand tu arrives à modifier ta configuration. La règle, c’est que si tu pars après cette
maturité, alors tun’espasexcommunié.On te regardebizarrement,mais tupeux revenir.Mais lesanciensessaientdelapousseràsemarier,c’estunautrestratagèmedeleurpartpourqu’ellecontinueàvivredansl’enclos.KyliesentitladouleurdeHayden,etellelaressentitpourJenny,également.–Nevoient-ilspasqu’ilspoussent les jeunesàpartir?Ondiraitundecescultesqui forcent les
gensàvivrecommeen1800!– Ils croient qu’ils les protègent, déclaraHayden. Et peut-être qu’à l’époque des anciens, c’était
bien,maisdepuisleschosesontchangéetilsn’ontpasl’airdes’enrendrecompte.J’airéussiàmecréeruneexistenceetjenevispasdansledanger.Kylieopina,maiselleneputs’empêcherdesedemandersi lavievalaitvraiment lecoupd’être
vécue, s’il fallait cacher sa véritable identité. Néanmoins, elle supposait que c’était la meilleureoption.–Comptez-vousresterici?Elleretintsonsouffled’espoir.Ilsecaladanssachaise.–Burnettn’estpasrevenuversmoi.–Maiss’ilditquevouspouvezrester?Ilattrapaunstyloqu’ilfitroulerdanssamain.–S’ilvousplaît, j’aimeraistantquevousrestiez!J’aiencoredesquestionsetceseraitvraiment
bienquevoussoyez là.Et…je jeveuxessayerdechanger leschoses.Voussavez,aider lesautresjeunes caméléons. Je n’en ai pas encore parlé àHoliday ni àBurnett, j’attends simplement le bonmoment.–Jevaisyréfléchir,dit-il.Maislaisse-moitedirequetonamiBurnettal’airdecroirequepartir,
c’estlameilleureoption.–Iln’estpassimauvais,répliquaKylie.Jesaisqu’ilpeutêtre…difficile.Àbiendeségards,ilme
faitpenseràmongrand-père.Etmêmeàvous,unpeu.–Jesuisloind’êtreaussitêtu,déclaraHayden.Iln’apasledroitdemetraitercommecela.Kylieauraitpuluirétorquerqueveniriciencachantsavéritableidentitén’avaitpasvraimentmis
Burnettenconfiance,maisàquoibon?–Promettez-moiquevousallezréfléchiretrester.J’aivraimentbesoindevousici.–Jevaisyréfléchir,maisc’esttoutcequejepeuxpromettre.
Avec un autre sandwich, desOréo etBurnett à leurs basques,Kylie etHoliday se rendirent auxcascades.Burnettavançaitavecelles,maislevampnecessaitdetrébucher,surtoutparcequ’ilrestaitconcentréetpréoccupéparHoliday,aulieuderegarderoùilallait.Ellen’avaitplus lehoquet,maisellen’avaitpasnonpluscessédepaniquer.Dumoins,c’étaitce
qu’il semblait, parce qu’elle n’avait pas perdu cette expression de « ohmince ! » sur son visage.Manifestement,Burnettavaitprislemêmeairqu’elle.–Toutvabien?demanda-t-ilpourladeuxièmefois.–Jetel’aidit,cesontjustedesmauxdeventre,réponditHoliday,etKyliereconnutquesaréponse
étaituneversiondelavérité,etquedefaitsespulsationsnetrahiraientpassonmensonge.
–As-tubesoindevoirunmédecin?Sessourcilssefroncèrentetlegrosméchantvampiredevintuntypeinquietd’apparencenormale,
quisepréoccupaitbeaucoup,beaucoupdesonamie.Rien qu’en les regardant, elle sentit une chaleur envahir sa poitrine. Avec la sensation d’avoir
réussiquelquechose.Lesentimentdenepasavoiruniquementcontribuéàréunircesdeux-là,maisd’avoirparticipéàlaquêtequ’elleavaitachevée,etbienachevée.– Non, pas besoin de voir de médecin, répondit Holiday. Du moins pas encore, ajouta-t-elle
rapidementpourcontrerunautremensonge.– Sûrement la trouille dumariage, ajoutaKylie dans l’espoir d’éloigner la conversation de ses
problèmesdeventreavantquesonamienepuissetrouverd’autredemi-véritéàbalancer.Détournant les yeux du couple qui se tenait par la main, Kylie aurait pu jurer entendre le
chuchotementdel’eauquitombaitencascade.Elleralentitlepasettenditl’oreille.Oui,c’étaientbienles cascades, et pourtant elles se trouvaient encore à cinq centsmètres.Elle inspira profondément,mourantd’enviederetrouverlapaixquisecachaitsûrementderrièrelemurd’eaumagique–unlieuoùtouslesmauxsemblaientmoinsdouloureux.Ou,dumoins,paraissaientgérables.–Lafroussedumariage?demandaBurnettcommes’ilréfléchissaitàcequevenaitdedireKylie.
Ellen’aaucuneraisond’êtrenerveuse.Ilparutpresqueblessé.Jeferaitoutcequiestenmonpouvoirpourêtreunbonmari.–Lesfuturesmariéesstressenttoujours,expliquaHoliday.– À cause de quoi ? Ce n’est pas comme si tu ne connaissais pas déjà toutes mes mauvaises
habitudes.Oumoi,lestiennes.Holidayleregardad’undrôled’air.–Quellessontlesmiennes?–Tuesungoinfre, fit-il toutsourire,et il la regardaavecdévouement.Kylieavaitdéjàvucette
expressionchezlui,maisàprésent,ill’arboraitavecfierté.–Maissérieusement,poursuivitBurnett,pourquelleraisonserais-tunerveuse?Kylie constata qu’ils étaient si complices que plus rien n’existait lorsqu’ils était ensemble. Et
n’avait-ellepasressentilamêmechoseàproposdeLucas?Ellechassacettepensée.–Etsituavaislesjetons?demandaHoliday,sérieuse.KyliesesouvintqueBlake,l’exdesonamie,l’avaitplaquéedevantl’autelaprèsavoircouchéavec
sajumelle.Pasdedoute,Holidayavaitsûrementlafrousse.–Jen’aipaslesjetons,j’ailespiedsfroids,jesuisunvampire,ditBurnettd’untontaquincomme
s’ilessayaitdefairedisparaîtrelagravitéd’Holiday.Etsimessouvenirssontbons,tut’enesplaintela nuit dernière. Il prit Holiday par la taille. T’épouser ne me fait pas peur du tout. Je net’abandonneraijamais.Jeserailepremierarrivéàl’église.LecœurdeKyliesegonflaenl’écoutant.ElleentenditHolidaylaisseréchapperunsoupir,attendrie.–Quandtudiscegenredechose,jesaispourquoijesupportetespiedsfroids.Holidaysehissasurlapointedespiedsetl’embrassa.Burnettaccentualebaiser.–Hé,ditKylie,toutsourire,yadesyeuxdeviergequivousregardentencemoment!–Alorstournelatête,rétorquaBurnettensouriant.J’aibienledroitd’embrassermafiancée,non?Kyliegloussa.– Oui, mais tu ferais mieux de faire attention, ils vont te retirer ton permis de vampire si tu
continuesdansleromantismeetlamièvrerie!
–Net’inquiètepas,ditBurnett,lesyeuxplisséscommes’ilétaitsérieux.Jerestetoutdemêmeunimbécile,etjecassedesgueulesquandillefaut!Oui,commehiersoir,songeaKylie.Sonegoavaitencorequelquesbleus,etHaydenYatesaussi,maisellen’enditrien.Toutaufond
d’elle-même,ellesavaitqueBurnettavaitdesraisonsdes’êtreénervéaussifort.Elle repensa à sa conversation avecHayden,mais déjà le calme des cascades lui procurait une
sensation de paix, et elle arriva à chasser ses inquiétudes. Elle jeta un coup d’œil sur les deuxinséparablesquimarchaientensetenantlamain.Cen’étaientpeut-êtrepasuniquementlescascadesqui offraient cette sensation de bien-être, reconnut-elle. Être de retour à Shadow Falls, parmi sesamis,c’étaittellementgénial!Presqueaubonmoment,lebruitdescascadess’intensifiaetuncalmel’envahittoutentière.Kylie
duts’avouerqueleschutesd’eaucontribuaientdetouteévidenceàcettesensationmagiquedebien-être.Etaprès toutcequiétait arrivécesdernièresvingt-quatreheures, ellevoulait se raccrocheràcettemagie.OubliermalgréHolidayetBurnettqu’elleétaitamoureuse,elleaussi.OublierqueLucasl’avait trahie.Oublierqu’elle s’était confrontéeàMario.Oublier qu’elle avait sûrement blessé songrand-pèreenpartantsansluidireaurevoir.Oh!oui,ellevoulaitlecalmequiallaitaveccetendroitdegrâce,celieuquinourrissaitunesprit
depaix.Quioffraitunesensationdesérénité.Etdecourage.Une voix résonna dans sa tête. Kylie s’arrêta net. La voix semblait vouloir dire quelque chose
qu’elleignorait.Pourquoiaurais-jebesoindecourage?Sans cette tranquillité, la petite intrusion dans sa tête aurait pu la précipiter dans l’angoisse.Les
parolesn’accompagnaientpaslefroidglacialhabituelqu’elleressentaitlorsqu’unfantômeluirendaitvisite. Non pas que Kylie n’eût jamais entendu cette voix auparavant – elle l’avait entendue, et àplusieurs reprises. Dans le passé, elle l’avait imputée à son subconscient, mais cette fois, c’étaitdifférent.Lebruitpaisibledeschutesapaisasoninquiétude.Ellenevoulaitpaspaniqueràcausedecettevoix
intérieure.Nimêmes’inquiéterdelaraisonpourlaquelleilluifaudraitêtrecourageuse.Elleaccéléralepas.Cinqminutesplustard,ilsarrivèrentàl’entréedescascades.L’ambiancesereinel’envahit.Même
lesfeuillessurlesarbresavaientl’airdelasalueràvoixbasse.L’eauquitombaitencataractedelafalaiseau-dessusemplit l’aird’unedoucehumidité.Labrise légère,qui transportaitdeminusculespointsd’eaulumineux,imprégnaitl’aird’unlointainparfumdefleurs,d’herbeetdenature.L’airhabituellementgravedeBurnettfitplaceàuneexpressionbeaucouppluspaisible.Ils’arrêta
en lisière des arbres et accepta de les attendre là, les laissant vivre leur expérience habituelle descascades. Après s’être déchausséeset avoir remonté les jambes de leurs jeans, Holiday et Kylietraversèrentensemblelemurd’eauquitombaitenrideau.Au-delà,ilfallutunesecondeauxyeuxdeKyliepours’accoutumer.Ilnefaisaitpascomplètement
noir, seule filtrait la lumière cachée derrière les chutes. Des ombres iridescentes aux couleurs del’arc-en-cieljouaientsurlesmursdurocher.Del’eaufraîchegouttaitdesescheveux,danssondos,elleappréciaitlafraîcheursursapeau.KylieetHoliday retrouvèrent leurplacesur lespierres lisses, justeaubordde l’eau.Aucunene
parla pendant plusieursminutes.La révérence emplissant l’espace semblait imposer uneminute desilence.
LecalmeambiantchassacomplètementlessoucisetpréoccupationsdeKylie.–As-tumisunenouvellequêteenplace?demandaHoliday.Àl’instantoùlaquestionsefrayaitunchemindanslespenséesdeKylie,lebesoind’êtreconseillée
montaenelle.–Ai-jeréellementachevél’autre?Laquestionn’étaitpasuniquementdestinéeàHoliday,maisaussiàelle-même.–Tusaiscequetuesettucomprendslaplupartdetespouvoirs.N’était-cepascela,taquête?–Si,maisjenelesmaîtrisepasencorecomplètement.Ellemarquaunepause.Etjeneconnaispas
tout.Lebesoininexplicabledemeurait,etlasoifd’avoirunnouveaubutenvahitsapoitrine.Elledevait
savoirsurquoiseconcentrer.Illuifallaitunenouvellequête.–Tuasraison.Ilfautquej’arriveàcomprendretoutcela.Commentfaire?Commentsavoirparoù
commencer?EllesetournaversHoliday,calme,maisimpatientedecommencer.–Bien,tudoistedemandercequiestimportantpourtoiencemoment.Engénéral,nosquêtessont
deschosesquinouspèsentsurlecœur,quititillentnotreconscienceouquifigurentsurnotrelistedechosesàfairequel’onaignorées.Kylieinspiralentement.–OK, je voudrais avoir ton avis.Mais je n’ai pas encore eu la possibilité de réfléchir au sujet
commeillefaudrait.–Qu’est-cequec’est?demandaHoliday.–Lesjeunescaméléons,lesados…Lesancienslesempêchentpratiquementdesortirdel’enclos.
Ils ont très peu de contact avec le monde extérieur. Ils n’ont pas le droit d’avoir ni portables niordinateurs.Jeneveuxpasdonnerl’impressionqu’ilssontmaltraités,c’estjustequelesancienssontcoincésdansunétatd’espritde l’époqueoù ilsétaientpersécutés. Ilspensentque leseulmoyenderesterensécuritéc’estdevivrecaché.Ilsontunepolitiquestricte:tantquel’onnesaitpascontrôleretdissimulersavéritableconfiguration,onnedoitpasêtreautoriséàsortirdanslemonde.Ilssontaussimauvaisquelesloups-garous.Avectoutesleurscroyancesrétrogrades.–Çam’enatoutl’air,observaHoliday,marquantunepauseenfixantl’eau.Quellehistoire!Ilest
difficiledemodifierdesconvictionsfondéessurunepeurjustifiée.–Jesais,maisildoitbienyavoirunmoyen,non?–Çavautlecoupd’yréfléchir.C’estunebonnequête.Quoid’autre?fitlavoixdanssatête.Lamêmequetoutàl’heure.Maisellenefutpaspluseffrayée
pourautant.C’étaitunequestionqu’elledevaitabordertouteseule.Kylieremontasesgenouxetnouasesbrasautourdesesjambes.–Ilyaautrechose,aussi.Etsoncœurchercha,maisnetrouvapas.– Quoi ? fit Holiday en prenant une grande inspiration, comme si elle voulait s’imprégner de
quiétude.–Jen’ensuispassûre.Elleavaitencoresesmotssurleboutdesalangue,quandtouteslesétincellesdelumièredansla
grottesemirentàtourbillonnercommepourdansersurl’eau.Lechatoiementdecouleursformaunhalo.Pourtant,mêmeaveclemouvementdelalumière,l’eau
semblait d’une immobilité totale et devint claire comme le cristal. Le cercle de lumière semblaitéclairerunobjetsousl’eau,quisoudainremontaendansantàlasurface,puisdérivaverslebord.
Déboussolée,Kyliereculadequelquesmètres.EllesesentitunpeumoinslâchequandHolidayenfitautant.L’objet flottait à la surface de l’eau et ne se déplaçait pas au hasard. Il arriva à environ trente
centimètresdurocher.Qu’est-cequecelasignifiait?
Kyliese retourna,chercha le fantômedesyeuxetessayadesentir le froid.Rien.Pasde fantôme.Aucunqu’ellepûtsentir,entoutcas.Mais l’épéequi s’approchait toutdoucementdevaitbienappartenir à la revenante,non?Elle en
trimballaitunedepuisplusd’unesemaine,commesielleallaitfaireunexposéàcesujet!–Maisd’oùa-t-ellepuvenir?demandaHoliday,lavoixpleined’inquiétude.Kylien’arrivaitpasquitterdesyeuxl’armequiserapprochaitlentement.–Desousl’eau.–Jesais,j’aivu,mais…–Jecroisquecelaaunrapportaveclefantôme,dit-elle.Holidayfronçalessourcils.–Tuparlesdeceluiquisebaladeavecdestêtescoupées?Elleopina.–Çapourraitêtreelle.–Pourquoidis-tucela?demandaHoliday.–Jen’ensuispasentièrementsûre,maisondiraitbiensonépée.Moinstoutlesang,biensûr.–Ohzut,criaHoliday,dansquoim’as-tuentraînée?–Jenesaispas,maiscen’étaitpasvolontaire.Kyliesemorditlalèvre.Sansl’ambiancepaisibledescascades,elleauraitcomplètementflippé.Holidays’emparadel’épéeetlaretournaentresesmains.–Elleal’airréelleetancienne.Crois-tuvraimentqu’ils’agissedelamême?Ellesecoualatête,
médusée.Lesfantômesnepeuventpasrapportercegenredechose.–Ondiraitbienquesi.Maisbon, jenesuispasexperteenépées,ditKylieensaisissant l’arme.
Maisdèsqu’elleletoucha,lefichutrucs’embrasa.Ellelabalançaparterreetrecula.–Pourquoia-t-ellefaitcela?
–Jepréfèrenepassavoir,réponditHolidayenreposantlesyeuxsurl’épée.As-tuapprisquelquechosesurlescaméléonsquifonts’embraserlesépées?–Non.–Tuenessûre?–Oui,jepensequejem’enseraissouvenue.–OK,dit-elle,encontinuantàréfléchir.Ellegratifial’épéed’unautreregardperplexeetreposales
yeuxsurKylie.Ons’enva?–Ouais.KylieselevaetvitHolidayattraperl’épée.Onnepeutpaslalaisserici?Holidayseredressaetregardasonamie.–Jenecroispas.Àmonavis,elleétaitlàpourtoi.–Tusais,jecraignaisquetunedisescela.Maiscommentsais-tuqu’ellen’étaitpaslàpourtoi?–Parcequ’ellenes’estpasembraséequandjel’aitouchée.Kyliefronçalessourcils.–J’enaivraimentmarredetouscestrucsbizarresquim’arrivent.Holidaysoupira.–Sicelapeutterassurer,celanemeplaîtpasnonplus.–Alorscommeça,onestdeux.Kyliesemordillalalèvred’inquiétude.Holidayeutundemi-sourire.–Nousdécouvrironscequisecachederrièretoutcela.Quandnousrentreronsaubureau,jeferai
desrecherches.EtnousparleronsàHayden,aussi.Noustrouverons.Kylieavait lanette impressionquesiHolidaytrouvaituneexplication,ellerisquaitdenepas lui
plaire.
Kylie,Holiday etBurnett, qui portait l’épée, dénichèrentHaydendans sonbungalow. Il examinal’objet,maisn’avait rienàdire.Pasmêmeune suppositionbien informée.Burnett lui tendit l’épéepourvoirsielles’embrasaitàsoncontact.Pasdutout.Puis,commeilnel’avaitpasvuechatoyer,ildemandaàKyliedelaprendre.Délicatement.Etdirequecettechoseavaitdûdécapiterdescentainesdevictimes!À la seconde où elle posa les doigts sur la poignée, le métal se réchauffa contre sa paume et,
exactementcommeàlacascade,ils’embrasa.Celaluirappelaitcesautocollantsphosphorescentsquel’onachetaitdanslesparcsàthème.–Çaira?demandaKylie,presséedelareposer.–Oui,ditBurnett,l’airdéconcerté.C’étaituneexpressionqu’ellen’avaitpasvuesouventsurlevisageduvampire.Ilattrapal’épéeet
attenditqu’elles’embrase…Envain.Ileutmêmel’airunpeudéçu.Quandillareposasurlatable,ilfixalefrontdeKyliecommepourvérifiersaconfiguration.SurlaroutemenantchezHayden,ilavaitsupposéqueKylies’étaittransforméeensorcièreetavait
perdu le contrôle de ses pouvoirs, comme le jour où elle lui avait jeté le presse-papiers dessus,heurtantsespartiesintimes.SiKylieespéraitquecesoitaussisimple,ellen’ycroyaitpas.Cen’étaitpasparcequ’elleavaitpenséàuneépéequ’elleenavaitfaitapparaîtreune.–Jenesuispasunesorcière,si?demanda-t-elleàBurnett.–Non,répondit-ilenhaussantlesépaules.–Jetel’aidit,lançaHoliday,j’aivérifiésaconfigurationdèsqueletrucs’estmisàétinceler.Çaa
l’airfou,maisjenesuispassûrequecesoitl’œuvredeKylie.Maisplutôtcelledel’épée.
–Tupensesqu’elleestpossédée?demandaHayden.–Quoi?fitKylie.Lesépéespeuventêtrepossédées?C’estbientropbizarrepourmoi!Ellesefrottalesmains,commepourlesnettoyer.–Non,jenecroispas,ditHolidayentouchantlebrasdeKyliepourlacalmer.Jepensejusteque
pouruneraisonquelconque,elleréagitàKylie.Ilyauneconnexionentrel’épéeetelle.–C’esttrèsétrange,observaHayden.Jepourraisinterrogertongrand-pèreàcesujet.Ilensaurait
sansdouteplusquemoi.BurnettserembrunitenentendantparlerdeMalcolm,maisilhochalatêteetellelevitbataillerdur
pourdissimulersonmécontentement.– J’apprécierais, oui. Pourriez-vous me contacter immédiatement, dès que vous aurez obtenu
quelquechose?Haydenopina.–Biensûr.Alorsqu’ils étaient sur lepointdepartir,Burnett tendit lamainàHayden.Celui-ci la serra sans
hésiter. Kylie eut le sentiment que toute cette histoire d’épée avait dû jouer en sa faveur pourconvaincre Burnett que Hayden devait rester. Même si ce dernier n’avait pas les réponses, elleconstata queBurnett appréciait d’avoir quelqu’un vers qui se tourner s’il y avait un sujet qu’il nemaîtrisaitpastrèsbien.Peut-être, songeaKylie, l’épéen’était-elle pasquelque chosedenégatif, après tout.Mais chaque
foisqu’ellelaregardait,ellerevoyaitl’esprit,quienportaituneensanglantéeaveclatêtecoupée,lanuitprécédente.Etellecraignitquetoutcelaneconduiseàunnouveaubaindesang.
Ilsrangèrentl’épéedanslebureaudeHoliday,puispartirenttousdîner.LesnouveauxétudiantsdeShadowFallslavirentpourlapremièrefoisetplusieurscampeurslasaluèrent.Perryseruaverselleet lasoulevadanssesbras,enlafaisant tournerpardeuxfois.Quandil lareposa,ellechancelaunpeu,maiselleétaitcontente.Ellenes’étaitmêmepasrenducomptecombienleloup-garouluiavaitmanquéjusqu’àcequ’ilrîtetcelafitnaîtreenelleunesensationbienvenuededéjà-vu.–Alorscommeça,tutripotesmameilleureamie?fitlavoixdeMirandaderrièrePerry.PerrylarelâchaetgratifiaMirandad’ungrandsourire.–Justeunpeu,dit-il,et il reposa lesyeuxsurKylie.Zutalors, tunousasmanqué!Mirandame
rendaitfou,tellementellesesentaitseule.–Vousm’aveztousmanqué,vousaussi,fitKylie,etelleétaitsincère.Un groupe de loups garous passa à côté d’elle.Kylie reconnut d’abordClara, la demi-sœur de
Lucas. Elle croisa son regard, et sa posture sembla brusquement exprimer dumécontentement.D’accord,toutlemonden’étaitpascontentqu’ellesoitrevenue.Ellepouvaitl’accepter.Maisensuite,derrièreClara,quelqu’und’autresurgit:Fredericka.Ellenesouritpas,maisn’avaitpasnonplusl’airmenaçant,etlagratifiad’unlégerhochementde
tête.Pourluisouhaiterlabienvenue,sûrement,pourluidire«raviedeterevoir».Kylielasaluaetluiadressamêmeunpetitsourire.Pour Fredericka, ce petit signe était sûrement une plus grandemarque d’affection que celui de
Perry.SurtoutquandClararegardaFrederickad’unairmécontentetquecelle-cihaussalesépaulescommepourdire«tut’enremettras».Kylierespiraunboncoup.C’étaitbondesavoirqu’elleavaitréussiàperdreuneennemie.
–Viens-tu de faire ce que je pense ? chuchotaMiranda à l’oreille deKylie.As-tu souri à cettepétasse?–Jetel’aidit,ons’estplusoumoinsréconciliées,réponditKylie.–C’estunebonnechose,lançaHoliday,quivintsemêleràlaconversation,etjepensequed’autres
icidevraientenfaireautant.–EtmoijecroisqueDellaaraison,marmonnaMiranda.Kylieestbientropgentille.Ignorantl’airrenfrognédeHoliday,lasorcièrejetauncoupd’œilàBurnett.–Enparlantduloup…Dellaest-ellerevenue?– On l’attend d’un moment à l’autre, répondit Burnett alors qu’ils se rendaient dans la salle à
manger.Dès qu’ils passèrent la porte, les conversations se turent, comme si quelqu’un avait coupé le
volume.Des têtesse tournèrent.Leseulbruitquiserépercutaitdans legrandespaceétaitceluidesfourchettessurlesassiettes.Puis,simultanément,aumoinscinquantepairesd’yeuxseplissèrentpourvérifierlaconfigurationdeKylie.Ellesefigea,sentantqu’elleétaitsouslesfeuxdelarampe,cequineluiplaisaitpasdutout.HolidaypassaunemaindansledosdeKylie.–Tuveuxquejefassequelquechose?murmura-t-elle.–Non,marmonnaKylie,déterminéeàmenersespropresbatailles.De plus, elle avait désiré revenir ici, c’était chez elle, et bon sang, elle ne dissimulait pas sa
configuration!Tôtoutard,ilss’habitueraientàelle.Non?Ilsfiniraientbienparl’acceptercommel’unedesleurs.–Bonjevaisagir,grommelaPerry.Ils’avança.Vousvoulezvoirquelquechose?hurla-t-il.Alors,
regardezça!Il se plia en deux, baissa son pantalon et montra ses fesses aux cinquante paires d’yeux qui le
dévisageaient.–Perry!s’écriaHolidayd’untonperçant…etamusé.Burnettfaillitlaisseréchapperunfourire,maisilrefermalabouched’uncoupquandilremarqua
lesourcilarquédesacompagne.–Nemontrepastesfesses,Perry!fitBurnettsansconvictionetensepinçantleslèvres.Danslasalle, tout lemondeéclataderire,mêmeKylie.OnpouvaitfaireconfianceàPerrypour
transformerunmomentdegêneenhilaritégénérale.Kylie regardaMirandaqui levait lesyeuxauciel,mais de la fierté y étincelait. Et elle avait de quoi ! Si baisser son pantalon avait pu semblerextrême,ill’avaitfaitdansdebonnesintentions,pourmettreuntermeàunmomentgênantetdansunseulbut,queKyliesesentemieux.Etcelaavaitmarché.Pantalonremonté,Perryseretournaetfitunclind’œilàKylie.Alorsqu’ilsserendaientvers le
comptoirdesplatschauds,KyliesepenchaversMirandaetmurmura:–T’asintérêtàlegarder,tonPerry!Mirandaroulaencoredesyeuxeteutungrandsourire.–Jesais.Etenplus,iladejoliesfesses,non?Kylieritdenouveau.–Jenelesaipasvues.Maissongrandcœur,oui!Pendant qu’elle attendait son hamburger et ses frites – qui sentaient, en plus, divinement bon –
plusieurspersonnesvinrentluisouhaiterlabienvenue.Mandy,unedesamiessorcièresdeMiranda,Chris,levampire,etJonathon,quifaisaitlatêtecarHelenluimanquaitsûrement.
–CommentvaHelen?demandaKylie,etbrusquement, laculpabilité la submergea,carc’étaitàcaused’ellequesonamies’étaitfaitattaquer.Jesuisvraimentdésoléepourça.–Cen’estpastafaute,dit-ilavecuncoupd’épaule.Maislaisse-moimettrelamainsurcesalaud
quiluiafaitdumal,etilleregrettera.–Ellevavraimentbien?demandaKylie.–Oui,sesparentsprétendentqu’ellepourrarevenirdansunesemaine.–Tantmieux,observaKylie.–Tantmieux?Maisc’estuneéternité!Unesemaineentière!Septjours.Jevaisdevenirfou!Elle
estcommeunedroguepourmoi.Jenesuispashabituéàvivresanselle.Ildéguerpit,pascontentdutout.Kylie le regarda s’en aller, les épaules tombantes. Un garçon blessé et vaincu. Et elle revit ce
qu’elleavaitressentiquandLucasétaitparti.Commeelles’étaitsentieseule,vide.Sapierredetouchedanslavieavaitdisparu.Elletentadechassercettepensée.Tâchantdenepassefaireremarquer,maiscraignantdesavoir
exactementquilaguettait,elleregardalatabledesloups-garouspar-dessussonépaule.Forcémentilyétaitetlascrutaitdesesgrandsyeuxbleuspleinsd’unetristeculpabilité.Soncœurseserra.Cesserait-elleunjourd’êtreencolère,suffisammentpourluipardonner?Elledétournalesyeux,
filaàtouteallure,percutantuntorsemuscléetfamilier.Contrelequelellesesouvints’êtreblottielanuitprécédente,dansuneeffractionde rêve.Lorsqu’elle leva lesyeux sur levisagedeDerek, soncerveausemblaitavoirdécidéquelemomentétaitparfaitpour télécharger toutcequis’étaitpassé.Touteslespiècesmanquantesdupuzzleluirevinrentviolemment.Lebaiser.Sesbrasautourd’elle.Ladouceuraveclaquelleill’avaitétreinte.Oh,mince!
Kylieavait arrêtéde l’embrasser,maispasassezvite.Puis elle avaitposé la tête sur son torseettellementpleuréqu’ellesesentaitperdue.Enlaserranttoutcontrelui,ill’avaitlaisséfaire.Celaavaitétécathartiqueetapaisant.Maiscen’étaitpasunebonneidée.Àcausedecequ’elleavaitvuserefléterdanssesyeux.Del’espoir.Del’optimisme,dustyle,une
foisqu’elleauraitoubliéLucas,toutrecommenceraitentreeuxcommeavant.Cettepenséefutunerévélation–l’unedecesétonnantesprisesdeconsciencequi,engénéral,font
desravagesdansunevie.Etoui,elleressentaitcesravages,maisaussidestasdequestionsmonterenelle…etunbesoindecomprendre.Derekl’avaittrompée,avaitmêmecouchéavecEllie,contrairementàcequeLucasavaitfait–ouà
ce qu’elle imaginait. Et si Derek l’avait blessée, et qu’elle s’était sentie trahie, cette histoire avecLucassignifiaitpourellebeaucoupplusquecela.Pourquoi?Était-cerévélateurdel’importancequeDerekavaitpourelle?Était-ilplusfaciledel’oublier,lui?
Oucelafaisait-ilréférenceàlaprofondeurdesessentimentsenversLucas?Ceuxqu’elleressentaitpourluiétaient-ilsplusvrais?–Tuvasbien?demandaDerekenlaregardantavecintensité.Elleopina.–Justeaffamée,mentit-elle,etelleavançadevantluidanslafiled’attente,afindenepasl’affronter.
Niluinilemensongequ’ellevenaitdeluidire.Ilsebaissaetluimurmuraàl’oreille.–Tun’espasencolèrecontremoi,si?Elleréfléchitetsaréponserevint:Jenepeuxpasêtreencolèrecontretoi,maiscontremoi,si.Elleavaitété faible.Elleauraitdûmettreun termeàcetteeffractionderêveavantmêmequ’elle
n’aitcommencé;etelleyseraitparvenue.Alors,pourquoin’avait-ellerienfait?– Non, je ne suis pas en colère, murmura-t-elle. Juste… S’apercevant qu’ils étaient entourés
d’oreillesdevampiresquipouvaiententendretoutessortesdesecrets,elleajouta:–Onendiscuteraplustard.–Çamarche,dit-il,jeteserviraid’escortecesoir,doncnousauronslargementletemps.Kyliefronçalessourcils.Peut-êtredevait-elleajouterDerekàlalistenoiredesescortesdeBurnett.
Entoutcas,jusqu’àcequ’elleaitfaitletridanssessentiments.
Unplateauàlamain,ellesedirigeaverslatableoùMirandaetPerryétaientassis.Elles’installa,jeta un coup d’œil sur Perry et, une fois de plus, ressentit une vague de gratitude envers lemétamorphe.–Merci,dit-elle.–Chaquefoisquetuaurasbesoinquejemontremesfesses,jeserailàpourtoi,dit-iltoutsourire.Kylieentenditquelqu’unprendrelaplacevoisineetcraignitd’avoirdenouveauencouragéDerek.
Elle attrapa une frite et regarda droit devant elle, tâchant d’ignorer le demi-Fae le plus longtempspossible.Ellepassa lapièceen revue ; son regard s’arrêta sur la tabledes loups-garouset sur lesquatreairsdésapprobateursdeceuxquiyétaientassis.Tous,sauf…Lucas.Uneodeurboiséeémanaitdelapersonneàcôtéd’elleetemplitbrusquementsessens.Lafritelui
glissadesdoigts;lentement,elletournalatêtepourconfirmersonerreur.Erreurconfirmée.Sonsouffles’entrecoupaquelquepeu.Cen’étaitpasDerek,maisLucas.Détournant lesyeuxdesonassiette,elle fixa lehamburgerquibrusquementnesentaitplusaussi
bonetn’avaitplusl’airappétissant.–Tunedevraispasêtreavectabande?murmura-t-ellesansmêmeleregarder.–Enfait…dit-ilensepenchanttoutprèsd’elle,siprèsquesonépauleeffleuralasienne…Jesuis
exactementàmaplace,murmuraLucas.Ellereculadequelquescentimètresaumomentmêmeoùunplateauheurtaitlatabledevantelle.Un
peutropbruyamment.Elleseditquelepropriétairedevaitêtreundemi-Faetrèstrèsénervé.Uncoupd’œil vers lui le lui confirma. Derek se laissa tomber sur la chaise, reluquant Lucas comme s’ilviolaitsonespace.Génial,songeaKylie.Elleréfléchitàcequ’ilfallaitfaire,filerd’iciensachantquetoutlemondela
regardaitdéjàpourvoircommentelleallaitréagir.Resterenespérantqu’iln’yaitpasdedrameentreleloup-garouetledemi-Fae,etessayerdecalmertouslesragots.Se sentantobligéede faire comme si tout allait bien, elleprit sonhamburger et planta lesdents
dans le petit pain blanc et doux. Si elle ne pensait pas au goût qu’il avait, son ventre avait dûapprouver, parcequ’il gargouilla de reconnaissance à laminuteoù la premièrebouchéedescenditdanssonorganevide.Ellenelaissapasletempsàsonestomacdeluienréclameruneautreetcraquapourlasuivante.Cettefois,legoûtdupetitpainlégèrementsucrémélangéausteakhaché,augoûtdefromageetdeketchuppiquantravirentsespapilles.Derek,quilisaitprobablementsondésird’éviterlechaos,pritsonhamburgeretlemangea.Lucas
fitlamêmechose.Latensionretomba,maispasdebeaucoup.–Quiestpartantpourunmatchdebasketaprèsledîner?demandaPerry.Quelques«oui» se firent entendre.Kylie seditqueDereketLucasavaient également répondu,
maisn’enétaitpassûre.Elleseconcentraaumaximumsurlanourritureetévitadecroiserleregarddequiquecesoit.PuisDerekajouta:
–Maislapartiedevraêtrecourte,jesersd’escorteàKyliecesoir.C’étaitplus la façondont il l’avaitdit,quecequ’il avaitdit,quimontraclairementqu’iln’avait
qu’unseulbut,énerverLucas;etcelafonctionna.Lucaspoussaviolemmentsonplateau,quitraversalatableàtouteallureetpercutaceluideDerek,faisantvalsersesfritessursesgenoux.–Laissetomber,ditLucas.Danspeudetemps,onressortiraensemble,detoutefaçon.–Tuenessûr?demandaDerek.–Arrêtez,lesrembarraKylie.– J’en suis sûr, grommela Lucas, comme s’il ne l’avait pas entendue. Tu vois,moi, je n’ai pas
couchéàdroiteetàgauchecommequelqu’und’autre.–Oui,maismoijenemesuispasfiancéderrièresondos,répliquaDerek.–Moi nonplus, ripostaLucas.Les fiançailles n’ont jamais été validées, car je n’ai pas signé le
papieraprèslacérémonie.–Tuasditquoi?Kylieleregarda,choquée.Elleavaitsimplementsupposéque…–EtleConseil,alors?demanda-t-elle.–Tuesplusimportante.Jetel’aidéjàdit.Non,ilneleluiavaitpasdit.Pasvraiment.Etilneluiavaitpaspréciséqu’ilnes’étaitpasfiancé
nonplus.–Jet’aiexpliquéquec’étaituneerreur,que…Ilhésitajusteuneseconde…Quejet’aime.Elle savait très bien qu’il était très difficile pour lui d’exprimer ses sentiments en public et on
pouvaitparierquechaqueoreilledans lapièceétait tendue,mais il l’avait fait. Il lui avaitditqu’ill’aimaitdevanttoutlemonde.Etcelal’agaçaprodigieusement.QuePerrymontresesfessesavaiteubeaucoupplusdesuccès.–Ettun’auraispasput’enrendrecompteplustôt?Ellelaissatombersonhamburger,jetasonplateausurlatableetquittaleréfectoire.Elleentendait
sesproprespassurlesolcarrelé.Cequisignifiaitquetoutlemonde,toutcefichucamp,venaitd’êtreaucourantdesesbouleversementspersonnels.Super.Génialmême.
Kylie sortit avant d’entendre qu’on la suivait. Pensant que c’était Derek, et prête à l’envoyerbalader,ellefitvolte-face.Mirandaluirentradedans.–Désolée,lançacelle-ci.Kyliechassad’unbattementdepaupièrescequiressemblaitaudébutd’unecrisedelarmes.–C’estbon,tun’espasobligéedem’accompagner.ResteavecPerryetfinistondîner.–Jeviensavectoi,ditMiranda.–Non,tun’espasobligée.–Si,insista-t-elle.Premièrement,parcequetuesl’unedemesmeilleuresamies,etdeuxièmement
parce que…Burnett l’a exigé.Mais je serais venue de toute façon, pour la première raison. ElleétreignitKylie:TuveuxquejedemandeàPerrydemontrerdenouveausesfesses?Kyliesedétachadesonétreinte,gloussaetessuyaseslarmes.–Jenecroispasqu’ilssupporteraientdelesvoirunedeuxièmefois.–Tuplaisantes?Ellessontbelles,pourtant!EllesretournèrentaubungalowetMirandaparladePerry.Beaucoupbeaucoup.Dustylenon-stop.
MaisKylies’enmoquait,ellepréféraitcelaausilencedechaqueinstantqu’elleavaitconnuchezsongrand-père.EtmêmesiMirandaparlaitunpeutrop,Kyliel’aimait,elleadoraittraîneravecelle.
Ellesparvinrentaubungalow,entrèrent,etleursregardsseposèrentsurlaporteferméedeDella.Etcelanepouvaitavoirqu’uneseulesignification:elleétaitrentrée.Enhurlant,ellesseruèrenttouteslesdeuxdanslachambredelavamp.–Oh!làlà!Vousnesavezpascequ’uneporteferméeveutdire,lesfilles?Maintenantretournez-
vouspendantquejem’habille.–Ons’enmoquequetusoistoutenue,onesttellementcontentesdetevoir!s’exclamaMiranda.–Exact,renchéritKylie.– Oui, mais vous ne devriez pas me voir en entier ! Vous allez vous moquer de mes seins
minuscules!Maintenantretournez-vous.–Ilsnesontpassipetits,observaMirandaenl’examinantdetrèsprès.–Retourne-toi!grondaDella,etd’unemainellecachasesseins,etdel’autresonpubis.– Pas si vite ! lançaMiranda et elle la montra du doigt. D’abord, tu as une explication à nous
donner,machérie!–Machérie ?Mais je ne suis la chérie de personne ; et quelle explication ? demanda-t-elle en
souriant,visiblementaussiheureusedelesvoir.–Cenesontpastespetitsseinsquetudevraiscacher.Maiscesuçonau-dessusdel’épaule.Delladissimulalamarquejustesoussoncou.–Cen’estpasunsuçon.Envirevoltantsurelle-même,elleattrapalepeignoirsurlelitetl’enfila.–Vraiment?demandaMiranda.–Çayressemblaitbien!Kyliegloussa, tellement contenteque toutes les trois soient denouveau réunies.Elle semoquait
bien qu’elles recommencent à se chamailler ou àmenacer de s’arracher les yeux.Rien que le faitd’êtrelà,aveccesdeux-là…Voilàcequec’étaitqued’êtrederetourchezelle.–Çaressembleàunsuçon,çaal’odeurd’unsuçon,doncc’estunsuçon,lançaMiranda.–Lessuçonsnesententpas,rétorquaDella.–Tucomprendscequejeveuxdire.Deplus,jesaisenreconnaîtreunentremille!ElleremontasonT-shirtpourrévélerunemarqueroseau-dessusdesonseindroit.Kylierit,puissoupira.– Je te jure,quelsmauvaisexemplesvousêtespourmoi ! Jene sais si jepourrai resterdans le
mêmebungalowquevous!Vousrisquezdesalirmaréputation.–Oh,arrête!ditDella.Tuasconnuplusd’actionqu’unepoupéesurremontoirsousacide,depuis
quetuesarrivée.–Non,réponditKylie.–Tuessortieavectroistypesdifférents.–Trois?Faux!–TuoubliesqueTreyestvenutevoir!–Treynecomptepas.Deplus,jen’aijamaiseudesuçon.–Ohmapauvre!s’exclamaDella.Voussaviezquel’onpouvaits’enfaireunavecunaspirateur?
Jemesuisfaitmonpremiersuçonensixièmeetj’airacontéàtoutlemondequec’étaitunquatrième!C’étaitvraimentnul!Kylierouladesyeux.–Quandjepensequetuessortieavecunaspirateur!–Oui,etc’étaitmieuxqu’avecmonpremiercopain.Ilétaitcarrémentnulensuçons!KylieetMirandasemirentàrire.PuisDellasecalma.
–Waouh,c’estbond’êtrederetour!Ellesautasurlelitetrebonditdeuxfois.PuisMirandaetKylieplongèrentdessusàleurtour.–Alorscommeça,tunecomptespasnousexpliquercesuçon?demandaMiranda,enattrapantun
oreilleretleserrant.–Pasquestion,réponditDella,riensurlesuçon!–Aumoinstupourraisnousdirequic’est?insistaMiranda.–D’accord.Elle cessade rire et s’éclaircit la gorge. J’ai retrouvémonvieil aspirateur.Et nous
avonseuungrosmomentdenostalgie.C’étaittellementromantique!lançaDellaenéclatantderire.Ce rire ne dupa pasKylie.Elle distingua quelque chose dans ses yeux.Un semblant de douleur.
Dellan’avaitpasdutoutenvied’enparler.–L’aspirateurs’appelait-ilSteve?demandaMiranda.Dellaserenfrogna.–Oubliezlesuçon.–Maiscen’estpasjuste!Onsedittout!–C’estbon,fitKylie,Etsil’onparlaitdesfessesdePerryquej’aivues?–Tum’asditquetunelesavaispasvues!s’étonnaMiranda.–Attends,quoi?s’enquitDellaenfixantKylie.TuasvulesfessesdePerry?–Oui,vitefait,expliquaKylie.Maislesautressesontbienrincél’œil,enrevanche.–LesfessesdePerry?répétaDella.Mirandahocha la tête, puis lui raconta quePerry s’était vraimentmontré héroïquepour venir à
l’aidedeKylieenbaissantsonpantalon.Dellasefenditd’ungrandsourire.–Jesavaisquecemétamorphemeplaisaitbien.–Ilestmignon,non?Mirandasoupiraetpritsonairdechienbattu.–Alors,ettoi?demandaDellaàKylie.As-tudonnéuncoupdepiedauculàLucasettoutdemême
décidédeluipardonner?Ondiraitunchiotquiaperdusonseulosàronger.Kylieserembrunit.–N’enparlonspas.Mirandafitdesbondssurlelit.–Tuauraisdûassisteraudîner !DereketLucasétaientassisàcôtéd’elle, tous lesdeux!C’est
vrai, quoi, je pensais qu’ils allaient se casser la figure. Puis Lucas a avoué àKylie qu’il l’aimait,devanttoutlemonde.C’étaitsiromantique!LapoitrinedeKylies’alourdit.–Non,pasdutout.C’était…triste.– Triste, voilà qui le décrit parfaitement depuis ton départ, déclaraMiranda. Comme s’il avait
perdutoutejoiedevivre.–Jeneveuxpasenparler,répétaKylie.–Tuesdonctoujoursencolèrecontrelui?demandaDella.Jenetelereprochepas.Kylielaregardad’unairsévère.–Hé,j’airespectétonsouhaitdenepasparlerdusuçon.Alorsàtoiderespecterlemien.Mirandaselaissatombersurleventreengrognant.–Cen’estpasjuste,moijevousracontetout,lesfilles.Jenegarderienpourmoi.–Crois-moi,jesais,ditDella.J’ensaisplussurtonhistoireavecPerryquecequejedevrais.–Necommencepas!fitMirandaenfronçantlessourcils.
–Et si on allait boire unCoca light ? proposaKylie avant que les deux ne se chamaillent à lapuissancedix.Elles descendirent du lit d’un bond et se dirigèrent vers la cuisine. Pour l’instant, elle voulait
oubliertoussesproblèmes.Elledésiraitsimplements’asseoiràlatabledelacuisineetrireunpeuavecsesamies,échangerdesblaguesetsesouvenirque,quelquesoitlelotdeproblèmesquelavieoffrait,toutiraitbientantqu’ellesétaientlàl’unepourl’autre.Dellaserenditlapremièredanslacuisine.–C’estquoi,cebazar?marmonna-t-elle.ÀlaminuteoùKylievitcequisetrouvaitsurlatable,ellecompritqu’oubliersesproblèmesne
seraitpasaussisimplequecela.–Zut ! grommela-t-elle.Quelqu’un peut-il appelerBurnett etHoliday et leur dire de rappliquer
illico?
–Commenta-t-ellepuarriverlà?demandaHolidayenfixantl’épéeposéesurlatable.–Àtoidemeledire,répliquaKylieenseserrantlesmainsd’inquiétude.Commentcelaa-t-ilpuse
produire?–Comment?répétaBurnettd’unevoixtonitruante.C’estévident.Quelqu’unl’aapportéeicipour
tefaireunefarce,maismoijenetrouvepasçadrôle,etlecoupablenerigolerapasnonplusquandj’enauraifiniaveclui.Sonfroncementdesourcilsdevintmenaçant.–PrendrequelquechosedanslebureaudeHolidayetl’apportericipourrire,çavaluicoûtercher.
IlregardafixementKylie:Àquias-tuparlédel’épée?–Àpersonne,jen’airiendit.Àper-son-ne.J’aifaittoutcequej’aipupournepasypenser.Donc,
çanepeutpasêtreuneblague.–C’estvrai,marmonnaDella.Ellenenousariendit.Etellenousdittout.Nousdisaittout.DellaregardaKylieenfronçantlessourcils.–Ellenenousditpastout,intervintMiranda.Commecertainespersonnesavecdessuçonsnenous
racontentpastout.DellajetaunregardmauvaisàMiranda,puisreposalesyeuxsurKylie.–Franchementj’aimeraisbiensavoirpourquoionpaniquecommeça.Cen’estqu’uneépée!BurnettcontinuaàfixerKylie,commes’ilréfléchissaitencore.–Alorscommentl’épéeest-ellearrivéeici,selontoi?Kyliehaussalesépaules.–Jenesaispas,maispeut-êtredelamêmefaçonqu’elleestarrivéeauxcascades.Magie,vaudou,
ouparceluiquil’yalaissée.–Tuastrouvécetteépéeauxcascades?fitMiranda.Quil’abandonneraitlà-bas?Ondiraitunobjet
ancien,etengénéral,celacoûteunsacrépaquetdefric!–Çaaussi,jel’ignore.Maiscequejesais,enrevanche,c’estquecelanemeplaîtpasdutout.Alors
emportezcetruc.Etallez-ymollo.Etcettefois,rangez-ladansunlieuunpeuplussûr.Dustyle,unechambreforte.–Waouh!s’écriaMiranda.–Waouhquoi?fitBurnettenmêmetempsqueKylie.Mirandadésignal’épée.–Elleauneaura.–L’épéeauneaura?Holidays’approchadeMiranda,intriguée.–Quelgenred’aura?demandaHolidayàlasorcière.–Peut-êtrequ’Haydenavaitraison,elleestpossédée,expliquaBurnett.–Attends!Lesobjetsinaniméspeuvent-ilsvraimentl’être?Kyliecroisalesbras,l’inquiétudeselisaitsursonvisage.–Non,réponditDella.Mirandalaregardaenroulantdesyeux.–Biensûrquesi.–Vraiment?fitDella.Cool!–Pascool!lesrembarraKylie.Mirandareposalesyeuxsurl’épée.–Ilfautquelasorcière–ouledémon–soittrèsdouéepourposséderl’objet.Maisjenecroispas
qu’ils’agissedeça.–Pourquoi?demandaHoliday.–Tuasaffirméqu’elleavaituneaura?fitBurnett.–Oui,réponditMiranda,fièredeluifournirl’information.Maiscen’estpasparcequ’unobjeta
uneauraqu’ilestpourautantpossédé.Certainsobjets,lesarmesparexemple,transporterontuneauraparcequel’émotionestplusoumoinsabsorbéeparlamatièrephysiqueaucoursd’uneattaque.–Etdonccetrucatuébeaucoupdemonde?demandaKylie,enserappelantl’épéedufantômeetla
têtequ’illuiavaitsifièrementapportée.– Probablement,mais je ne crois pas qu’elle soit possédée.Normalement, quand quelque chose
l’est,c’estqu’ilestcomplètementmauvais.–Alors,dequelgenred’auras’agit-il?demandaKylie.–Unpeumauvaise,réponditMiranda,quisecontredisait.–J’adore!Dellasefrottalesmains.Kyliegémit.–Maistuviensdedire…–J’aiditquequelquechosequiestpossédéestcomplètementmauvais,expliquaMirandaenfixant
l’épée.C’estjusteque…d’accord,siçasetrouve,ellen’estmêmepasmauvaise.Maisjepeuxsentirqu’elleaôtédesvies.Beaucoupdevies.Maissonauraportesurtoutsurlajusticeet…Ellepenchalatêtedecôtéetseconcentrasurl’épée,commesielleessayaitdeliresaconfiguration
surnaturelle.Sescheveux,striésderose,noiretvertcitron,voilaientuncôtédesonvisage.–Etcelaal’airfou,maiselleporteaussisur…lecourage.–Lecourage?Kylieserappelalavoixqu’elleavaitentendueenallantauxcascades.Commentça,
lecourage?Demande-luicequ’elleentendparcourage?Mirandapartitd’unrirerailleur.–Lesaurasnerépondentpasauxquestions.Jetedisjustecequel’auraal’aird’émettre.
–Commentlesais-tu?demandaDella.–Lescouleurs,leurintensité,leurfaçondesedéplaceretdesemélanger.Celarevientunpeuàlire
unebagued’humeurmagique.–Siseulementjesavaislirelesauras!confiaDellaàMiranda.Pourrais-tumecommuniquersuper
vitecedon-là?–Non.Pasplusquetunepourraismetransmettretondondevoler.Kyliecontinuaàfixerl’épée,enserappelantcellequelefantômeportait.–Jecontinueàpenserqu’elleaunlienaveclefantôme.Ilauraitpul’apporterici.–Ohnon!Ilyaunfantômeparminousencemoment?demandaDella.– Pas en ce moment, lui répondit Holiday, et elle reposa les yeux sur Kylie. Les fantômes ne
peuventpastransporterd’objetsdematièreréelle.–Faux.Ilyenabienunquiafaittombermontéléphonedematabledenuit,lançaKylie.–Oui,ilssontpeut-êtrecapablesdecréersuffisammentd’énergiepourdonnerunpetitcoupdans
quelque chose de tout petit, et ils peuvent jouer avec l’électronique dans tous les sens,mais ils nepeuventpasdéplacerphysiquementunobjetd’unendroitàunautre.Celanécessiteraituneimmensequantitéd’énergie.C’estimpossible.–Ehbien,voilàquimeréconforteunpeu,observaDella.Holidayserapprochadelatable.–Celan’apasdesens.–Jesais,ditKylie,etcelarésumeassezbienmavieencemoment,rienn’adesens.
Burnett emporta l’épée. Il refusa de laisser Holiday la toucher au cas où elle se réveille. Aumomentoùilsallaientpartir,KylieentenditHolidayémettreunpetitrot.Laféesemorditlalèvre,cequifitsourireKylie,etmalgrésoninquiétudeausujetdel’épée,elle
seditqueceseraitchouettesielleattendaitvraimentunbébé!LorsqueBurnettetHolidayfurentsortisdubungalow,DellaetMirandasetournèrentversKylie.–Bon,assieds-toi,ditDella.Explique-nouspourquoitunenousaspasparlédel’épéeetraconte-
nouscequetunouscachesparailleurs.Kylie rappela àDellaqu’elle aussigardait ses secrets– commecelui àproposdu suçon–mais
d’un seul coup, celane ladérangeaitplusde le leurdire.En fait, celapouvaitmêmeêtreutile.Cen’étaitpascommesielleleuravaitcachéquelquechosedélibérément.Commeellel’avaitdéclaréunpeuplustôt,ellen’avaitpaseuenvied’ypenser.Elleserenditdanslacuisine,regardaautourd’ellepours’assurerquel’épéen’avaitpasréapparu
commeparmagie.Envoyantlatablevide,elleselaissatombersurunechaiseenpoussantunsoupirvaincu.Dellaprittroissodaslightaufrigoetlesdistribua.Lebruitdescapsulesquel’onenlevaitrésonna
dans lapetitecuisine.PuisKylie racontaentredeuxgorgéesdesoda.Cequi s’étaitpasséchezsongrand-père, la façondonton traitait les jeunescaméléons.Ellecachaqu’elle s’étaitenfuieenpleinmilieudelanuitparcequequelqu’unavaitleprojetdelakidnapper.Puisellelâchalapartielaplusdifficile:quandMarioavaitdébarquéetqu’elleavaitfaillituerLucas.–Paspourrien,entoutcas,observaDella.Lucasl’amérité.Jesuissûrequec’étaitagréable!–Non,pasdutout,insistaKylie.–Attends,intervintMiranda,avantd’aborderlesujet«garçons»,tun’aspasparlédel’épisodede
l’épée.KylieleurracontasavisiteauxcascadesavecHoliday.
–Etcefantôme?demandaDellaenregardantautourd’elle.Est-cequetuvasencorenousprendrelatêteavectesvisions?Ladernièrefoisquetuaspétéuncâbleencoursetquej’aidûdéfoncerlaporteduplacarddelaclassedeMlleCane,çam’afichuunedecestrouilles!Jetejure,dèsqu’ellemevoit,ellesecroitobligéedemedire:«Maisj’avaislacléduplacard!»Maiszut,tuhurlaisaumeurtre,là-dedans!–J’espèrequejenevaispasencorevousfairepeur,ditKylieenfronçantlessourcils.Etjevous
priedem’excuserparavancesic’estlecas.Maisjen’aiaucuncontrôlelà-dessus.Sérieux,sil’unedevousétaitcoincéedansuncercueilavectroisfillesmortes,jeparieraisquevousdeviendriezfolles,vousaussi.–Ohqueoui!Jeleurcasseraislafigure,auxmortes!DellareposasonsodaunpeutropfortetduCocaserépanditsurlatable.–Jenesaispascommenttufaispourgérerça.Çadoitcraindre.–Oui,ditKylieendessinantdesrondsdanslacondensationsursacannette.Parfois,çacraintd’être
moi.PuisMirandafoudroyaDelladuregard:–Alors,lavéritésurlesuçon?Dellarouladesyeux.–Iln’yarienàdire.Ças’estpassé,point.–Qu’est-cequis’estpassé?demandaMiranda.As-tu…tusais?–Non!larembarraDella.Jen’aipas«tusais».Ons’estjusteembrassés.Etaprèsj’airegretté.Et
celanesereproduirapas.–C’étaitqui?demandaKylieensemêlantdelaconversation,énervantunpeuplusDella.Dellase
rembrunit.–Sijevousledis,est-cequevousjurezdenerienrépéter?Parcequesivousditesquelquechose,
jedevraivoustueretensuitejemesentiraimal.Dumoinspourunmoment.–Jejurequejeneraconterairienàpersonne,ditMiranda.–Moiaussi,ditKylieenoubliantunmomentsesproblèmespourseconcentrersurceuxdeDella.Celle-cisecaladanssachaise.–C’étaitSteve.– Je savais que tu l’aimais bien, ditMiranda en se frottant lesmains.Des détails !On veut des
détails!Dellaplaça lesdeuxmains sur la tableet sepenchabienbas, levantdesyeux furieux surelleet
dévoilantlégèrementsescanines.–Jen’endonnepas,tutesouviens?–D’accord,pasdedétails,ditKylie,maisexplique-moipourquoicelaaétéuneerreur.Etpourquoi
celanesereproduiraplus.Parcequ’àl’évidence,c’étaitagréable…–Parceque…jen’aijamaisditquec’étaitagréable.–Oh!arrête,ditMiranda!Tuasunsuçon,doncvousavezvraimentdûêtreàfondpourallersi
loin.Mirandajetauncoupd’œilàKyliepourqu’ellelasoutienne.Pasvrai,Kylie?Celle-ciposalescoudessurlatable.– Je ne suis pas une experte en suçons, donc je n’affirmerai rien à cent pour cent, mais il
semblerait,oui.ElleregardaDella.Donctun’asmêmepasaimé?Dellalaissaéchapperungrondementbas.–Bon,d’accord,j’aipeut-êtreétéàfondjustequelquessecondes.
–Ilfautplusquequelquessecondespouravoirunsuçon,fitremarquerMirandaens’agitantsursachaise,appréciantmanifestementqueDellaparleenfin.–Cequevouspouvezêtrelourdes!s’exclamaDella.–Alors,combiendetempsfaut-ilpouravoirsuçon?demandaKylie.Mirandapritsonsodalight.–Uneminute,allez,quelquessecondes,toutdépenddutype,s’ilaspirefortoupas.–Çafaitmal?demandaKylie,essayantdes’imagineràsaplace.–Non,répondirentMirandaetDellaàl’unisson.–C’estmêmeplutôtagréable,ditMirandaensouriantàDella.Tunetrouvespas?–Si,acquiesça-t-elleen roulantdesyeux,commesielleavaitdumalà reconnaîtrequ’elleavait
aimécela,puisellesefenditd’ungrandsourire.Veux-tuquejeteprésenteàmonaspirateur?–Qu’ilaillesefairevoir,tonaspiro!s’écriaMiranda.KyliedevraitcouriraprèsSteve.C’estvrai,
elleesténervéecontreDereketLucas,etSteveestdisponibleparcequetunecraquespluspourlui,etmanifestementilsaitfairedessuçons.Dellaluijetaunregardmauvais.–Jenecroispasquecesoitunebonneidée.Mirandasetrémoussadenouveausursachaise.–Parcequetul’aimesencore.Parcequetuveuxqu’ilt’enfasseunautre.Avoue!A-voue!–Tuesodieuse!lançaDella.–Oui,c’estvrai,acquiesçaKylieenfronçantlessourcils.Maislasorcièreamarquéunpoint.– Elle peut garder ses points pour elle ! Della écrasa sa canette dans sa main. Puis ses yeux
s’ouvrirentgrands.–Mince!–Quoi?fitKylie.–Elleestrevenue!s’écriaDellad’unevoixchantantequidonnaitlachairdepoule.–Quiestrevenue?demandaKylie.Maiselleavaitpeurdelesavoir.Elleseretournaet,eneffet,
l’épéetrônaitsurlecanapé.Kylien’avaitpasvoulurappelerHolidayniBurnett,maisDellarefusaitdedormiravecuneépée
possédéedanslebungalow.Miranda,qui luirépétaqu’ellen’étaitpaspossédée,semoquaitbiendel’unecommedel’autreoption.Respectant lessentimentsdeDellaet lescomprenantparfaitement,Kylieempruntason téléphone
pourappelerBurnettetHoliday.Avantqueceux-cinerepartentavecl’épée,Burnettdonnaunordre:–Celanedoitpasallerplusloin.Vousneditesrienàpersonne,compris?–Pourquoi?demandaKylie,quinecomprenaitpaspourquoiilconsidéraitcelacommeunsecret.–J’expliquedéjà tropdechosesà l’URF.Etcela lesrendencorepluspressésde te tester.Mieux
vautnepasébruitercelatantquenousn’avonspastoutrésolu.Àconditionquel’onycomprennequelquechose,songeaKylie,maisellen’enditrien.Quand Burnett et Holiday s’en allèrent, Kylie les suivit sur le perron. Holiday se pencha et
murmura:–Nousl’emportons,maissielleafaitceladeuxfois,rienneditqu’ellenerecommencerapas.–Jesais.Kyliepriapourque,sil’épéedécidaitderevenir,ellelasuivedanssachambreetnedérangepas
Della.Mêmesiunfrissongrimpaitlelongdesacolonnevertébraleàl’idéededormiravecuneépéeenflammée,c’étaitmieuxquesiDellapétaitunplombousiBurnettetHolidaydevaientrevenir.
ElleespéraitseulementqueMirandaavaitraison,quel’épéen’étaitpasunearmemaléfique.
–Alors,auprogrammeaujourd’hui…,lançaChris,levampireresponsabledel’Heurepourfaireconnaissance.Il sepréparait à annoncer lescouplesqui seraient formés.C’étaituneheurependant laquelle les
étudiants se retrouvaientpardeux, avecunautre élèveducamp, justepour encourager l’harmonieinter-espèces.Chrisbranditsonhaut-de-forme,histoired’ajouterunpeud’intensitéàl’instant.KyliesetenaitentreDellaetMiranda,laquelletenaitlamaindePerry.Depuisqu’elleavaitappris
queNikki, lamétamorphe, craquait pour Perry, la sorcière ne lâchait plus son petit copain d’unesemelle.Kylieavaitégalementremarquéquel’auriculairedeMirandas’agitait.SiNikkisavaitcequiétait
bon pour elle, mieux valait qu’elle renonce à Perry. Elle voyait mal son amie lui jeter un sortvraimenthorrible,sicen’estdeluifaireapparaîtredespustulessurlevisage,biensûr.Maisdanslamesure où Socks avait passé des mois dans la peau d’une mouffette, les sortilèges de Mirandapouvaientavoirdesrésultatsaccidentelsterribles.Kylie regarda autour d’elle, à l’affût. Pas d’une personne en particulier –mais d’une épée.Elle
n’étaitpas revenue lanuitdernière.Cequi étaitun soulagement.Peut-êtren’était-cequ’uncoupdebol.Ellenecroyaitpasvraimentàlachance,maiselleenavaitenvie.–OK,repritChris,voyonsquiestlepremier.Pour paraphraser le vampire : « Voyons qui a payé de son sang pour passer une heure avec
quelqu’un. »Àune époque,Kylie trouvait tout celabizarre,mais àprésent elle comprenait que cen’était qu’une façon de nourrir les vampires. Ils avaient besoin de sang, et c’était simplement unmoyendepousserlesautresàenoffrirunepinte.C’étaittoutdemêmegênantd’êtrecellepourquil’ondonnaitdusang,justepourpasseruneheure
avecelle.Etmanquedebol,leregarddeChrispercutalesien.Ohnon,pasmoi!
Ohsuper!Àquiletour,cettefois?Ellejetauncoupd’œilautourd’ellepourtrouverDerekouLucas.Tousdeuxsetenaientàl’écart;chacunfixaitl’autred’unregardglacial.Bon…sicen’étaientpascesdeux-là,alorsqui?–À ta place je serais prudente, déclaraChris. Je vais commencer à croire que Fredericka a un
faiblepourtoi.Enl’occurrence,KylieétaitconcentréesurLucaslorsqueChrisfitsonannonce.Souslechoc, le
loup-garousetenditavantdeprendreunairféroceetprotecteur.Ilpassarapidementlafouleenrevueà la recherche de Fredericka. Quand son regard tomba sur elle, de l’autre côté du cercle, il serenfrognaencoreplus.LafilleluijetaunregardmauvaisàsontouretavançaversKylie.KylieentenditLucasgrogneret
levitapprocherd’unpaslourd.Génial.Àprésent,c’étaientdeuxloups-garousencolèrequis’approchaientd’elle.–Veux-tuquej’intervienne?proposaDella.–Non.–Etsijemontraisencoremesfessesàtoutlemonde?suggéraPerry.–Non,réponditKylie,etjusteparacquitdeconscience,elles’éloignadeplusieursmètresdeses
amis,afinqu’aucunnesoittentédelancerunebagarreoudebaissersonpantalon.Lesdeuxloups-garousdéboulèrentenmêmetemps.L’unàsagauche,l’autreàsadroite.–Rienneteforceàlefaire,lançaLucasàKylie,quibouillonnaitderage.Jepaieraipourqu’elle
aitdusang.Maistun’espasnonplusobligéedepartiravecmoi.EllelaissaallersonregarddeLucasàFredericka.Ladouleurapparutdanslesyeuxdelalouve.–SiKylieneveutpasvenir,ellen’yestpasobligée.Etjepaieraitoutdemêmelesang.Jen’aipas
besoinquetumecouvres.– C’est bon, marmonna Kylie en sentant tous les regards impatients autour d’elle. Un léger
picotement grimpa le long de ses jambes. Son cœur fit une embardée quand elle reconnut lespremières étapes de la disparition.Elle se concentra très fort pour ymettre un terme.La dernièrechosequ’ellesouhaitait,c’étaitsevolatiliserdevanttouslesautrescampeursetdevenirencoreplusunphénomènedecirqueàleursyeux.–Situposesunseuldoigtsurelle,jechasseraitonculdeloup-garouendehorsdelameute.C’est
terminé,detetrouverdesexcuses!Kylie ne savait plus quoi penser.Comment pouvait-il semontrer loyal envers elle, et rejeter un
membredesonespèce?Etvivrecemomentenpublicdevaitêtredifficilepourl’âmedeloup-garoudeFredericka,d’autantplusqu’elleaimaitLucas.Outrel’empathiequeKylieressentaitpourelle,elleétait…choquée.C’étaitlapremièrefoisqu’il
lafaisaitpasseravantlessiens.Oh,illeluiavaitrépétédesmilliersdefois,maissesactesnel’avaientjamaisprouvé.Pasjusqu’à
présent.Cetteprisedeconscienceétaitdouce-amère!Ellenevoulaitpasqu’illachérisse,pasaprèsl’avoirtrahie.Ellenevoulaitpasculpabiliserdelefairesouffrir.Maissi.Laculpabilité,cetaffreuxsentiment,montaenelle.Maispourquoi?Était-celafautedequelqu’un
siellen’arrivaitpasàpardonnerceluiquis’étaitmontrésiinjusteenverselle?Illaregardaencore,ladouleurbrillantdanssesyeux,puiss’enalla–lalaissantdansunbrouillard
de souffranceetdans laconsciencequ’une foisdeplus, tous lesélèvesdeShadowFallsétaientaucourantdesavieprivée.
Frederickaleregardas’enfuiretsetournaverselle.Kylievitsesœillèress’ouvrirsursespropresémotions, alors qu’elle essayait de cacher sa douleur.Elle déglutit comme si elle essayait de fairepasserunegrossebouledouloureuse,puisbaissalatêteetparla:–Jeluiaiditquej’avaisfaitlapaixavectoi,maisilnem’apascrue.Kylieopina,etcommeellesentaitqueFrederickaétaitaussimalàl’aisequ’elled’êtrelasourcede
divertissement,elles’enalla.Frederickaluiemboîtalepas.Unefoishorsdeportéedevoix,Frederickalança:–Oùveux-tualler?Kylieentenditdesailesbattreau-dessusd’ellesetsesouvintquePerryluiservaitd’escorte.–Onvaavoirdelacompagnie,déclara-t-elle.Monescorte.Ellelevalamain.–Ouij’avaisbiencompris,réponditFredericka.Crois-tuqu’ilpuissenousentendredelà-haut?–Aucuneidée.Jenesaispassil’ouïed’unoiseaupréhistoriqueestdéveloppéeoupas.–Alors,faisonscommesicen’étaitpaslecas,proposaFredericka.–OK.Puiselleposalaquestionfatidique.–Lucassait-ilquec’esttoiquim’enasparlé?–Oui, ilestaucourant. réponditFrederickaenhésitant. Ilcroitque je te l’aiditpourvousfaire
rompretouslesdeux.KyliesesouvintqueFrederickal’avaitalorsnié,mais…–Est-celavérité?Ladouleurétinceladanssesyeux.Ellefitquelquespas.–Tunemecroispas,toinonplus?Jenesuispasstupide.Jesavaisquesijel’empêchaisd’aller
jusqu’auboutavecMonique,ilsetourneraitverstoipourdebon.–Mais tu as aussi reconnuque tu l’aimais.Et tu avaisdéjà essayédenous faire rompredans le
passé.– J’ai enfin réalisé que j’étais pathétique. Il ne m’aime pas. Il t’aime toi. T’a toujours aimé et
t’aimeratoujours.Lapiluleétaitamère,maisjel’aiavalée.Kylieinspiraetserenditcomptequ’ellelacroyait.–D’accord,alorspourquoias-tudonnédusangpourmerevoir?–Pourdeuxraisons,réponditleloup-garou.–Lesquelles?–J’aientendudirequetuétaisunetrèsbonneconseillèreconjugale.LabouchedeKylies’ouvritgrande.–TuveuxdesconseilspourrécupérerLucas?Frederickafitunedrôledetête.–Non,jetel’aiexpliqué,jesuispasséeàautrechose.KyliesesouvintdecequeMirandaluiavaitdit.–Jet’enprie,nemedispasquec’estcenouveauprof?M.Cannon?Frederickaeutl’airchoqué.–Commentes-tuaucourantpourCaryetmoi?Cary?Alorscommeça,ellel’appelaitparsonprénom?–D’aprèslarumeur,tucraqueraispourlui.Leloup-garouserenfrogna.–Jenepensaispasquec’étaitaussi…flagrant.
–Ehbien,tut’estrompée.Etlaisse-moitedire,cen’estpasunebonneidée.C’esttonprof.–Ilavingtans.C’estunjeuneprodigequiafinisesétudesuniversitairesàdix-neufans.Etmoi,
j’enauraidix-huitlemoisprochain.Onadeuxansd’écartàpeine.Kylieentendait lesailesdePerrybattredans labrise.Elle leva lesyeuxet,pourFredericka,elle
espéraitqu’iln’entendaitrien.–Écoute,cen’estpasl’âgequiposeunsouci.C’esttonenseignant.–Jenevoispasoùestleproblème,rétorquaFredericka.Kylielaissaéchapperunprofondsoupir.–Leproblème,c’estqu’il tientàsestesticules.BurnettadéjàmenacéderenvoyerHaydenYates,
lessiennesenmoins,quand…–M.Yatesettoi,vousavezeuuneliaison?demandaFredericka,lesyeuxécarquillés.Jecroyais
quetuaimais…–Non!C’étaitcequeBurnettpensait.–Pourquoidonc?Frederickafituneautregrimace.Kyliecompritqu’ellen’auraitpasdûenparler.–C’estunelonguehistoire.Burnettserasuperénervésicenouveauproftereluqueunpeutrop.–Etsitumelaissaism’occuperdeBurnettetdesbijouxdefamilledeCary,etsitum’expliquais
simplement…commentfairepourqu’ilsepassequelquechoseentrenous,commetul’asfaitpourlesautres?Kyliesoupira.–Pourquoitoutlemondes’évertue-t-ilàraconterquejesuisuneexperteenconseilsconjugaux?
Tunevoispasquemaproprevieamoureuseestundésastre?Sij’étaisaussidouéequecela,crois-tuquejeseraisdanslepétrindanslequeljesuisencemoment?Frederickahaussalesépaules.–Mais tous ceuxqui sont venus te voir avec leurs problèmesprétendent que tu as tout arrangé.
Perryettacopinesorcière.HelenetJonathon.BurnettetHoliday.–Commentsais-tuqu’ilsn’auraientpaspusedébrouillersansmoi?Frederickafronçalessourcils.–Ilsn’ontpastarid’élogessurtoi.Kyliesecoualatête.–Écoute,jenecroispasquetonprofettoi,cesoitunebonneidée.–Donc,turefusesdem’aider?ditFredericka.Alorsmêmequejet’aipratiquementjetéedansles
brasdeLucasetquejel’aiempêchédepasserlerestedesavieavecquelqu’unqu’iln’aimepas?Kylieexpira.–OK,levoici,monconseil:vavoirHoliday,parle-luidecequetuéprouvespourlui,et…–Ellediranon!Ellenepeutpasmevoir…–Ohquesi!Avectoutlebazarquetuasmis,ilyalongtempsqu’ellet’auraitfichuàlaportesi
ellenet’appréciaitpas.Etsituaspeurqu’ellenesoitpasdutoutd’accord,pourquoinecommences-tupasparluidirequetucraquespourquelqu’unquin’aquedeuxansdeplusquetoi,ettuverrascequ’elleterépondraavantdeluidiredequiils’agit.Amène-laàdirequecen’estpassigrave,puislarguelabombecommequoic’estunprofesseur.–Tucroisvraimentqu’ellem’écoutera?–T’écouter,oui.Qu’elle teconseilleoupasdelefaire,ça,c’estuneautrehistoire.Maisc’est la
personnelaplusjustequejeconnaisse.
Frederickaeutl’airderéfléchir.–OK.EtCary?Commentjefaispourqu’ilme…–Remarque?–Non, c’est déjà fait. Je sais que je lui plais,mais il place sans cesse des obstacles entre nous,
sûrementpourlaraisonquetuasévoquée.C’estunprofesseuretjesuissonélève.–Alorspourquoi tunevaspas levoirpour luiexpliquerquetucomprendsquecesoitdifficile,
maisquetul’appréciesvraiment,etquetuaimeraisaumoinsquevoussoyezamisjusqu’à…–Jeneveuxpasquenoussoyonssimplementpotes.–Trèsbien,maistucommencescommeça,puis,quandtuauraslefeuvertdeHoliday,alorsvous
pourrez…vousenfuirdanslesboisetfairelestrucslesplusfous…oucequevousvoulez.Ilneteresteplusqueneufmoisdeclasse.Donc,lepirescénarioseraitquevousconstruisiezuneamitiétouslesdeux,puisquevouspassiezàlavitessesupérieureunefoisl’écoleterminée.Elleapprouvad’unhochementdetête.–Tu as raison, j’ai attenduLucas pendant deux ans. Je pourrais bien attendreCary encore neuf
mois, s’il le fallait. Tu vois que tu es une pro !Merci pour tes conseils, ajouta-t-elle, sincère, ensouriant.–Bien,avons-nousterminé?JecroisquePerrys’impatiente.–Non,ilyal’autreproblème.–Lequel?demandaKylie.–Qu’ilfaudraitquetupardonnesàLucas.–Écoute,tum’asdemandéconseil,pasmoi.Elleaccéléralepassurlecheminquimenaitàsonbungalow.Unefuiterapide,bienorchestrée.Frederickanelalâchaitpasd’unesemelle.–Il t’aime.Tunecomprendspaspourquoiils’estdésintéressédesesfiançailles?Ilarenoncéà
tantdechosespourtoi.Peut-êtremêmeàsapropremeute.Kylies’arrêtabrusquementetsetournaverselle.–Pourquoim’enas-tuparlé?Pourquoinel’as-tupaslaisséallerjusqu’aubout?Mincealors,il
n’auraitjamaisdûfaireça!À cet instant précis,Kylie reconnut unepartie de l’angoisse que lui faisait éprouverLucas.Elle
n’avaitpasvoulusel’avouer.Ellenes’étaitmêmepasautoriséeàlaisserleschosesfaireleureffet.Maiselleétaitlà,lavérité,justesouslatrahisonqu’elleressentait.Lucasavaittoutperdupourelle.Sesrêves.Sesquêtes.Mêmesielleluipardonnait,tôtoutard,illadétesteraitpourcela.Frederickaluirenvoyalaquestionenpleineface:–Pourquoi?Parceque,idiote,s’ilétaitalléjusqu’aubout,ilt’auraitperdue.Etquetulecroiesou
non,tuesbienplusimportantepourluiqu’intégrerleConseil.C’esttoiquicompteslepluspourlui.
Kyliearrivaunpeuenretardàsonpremiercours,Perryjustederrièreelle.Elleselaissatomberlourdementsur lachaisevidedevantDella,posason livresur lebureau, l’ouvritet fitsemblantdelire.Kylie eut de nouveau le cœur brisé à la minute où elle sentit le regard de Lucas sur elle. Elle
l’ignora.Essaya,toutaumoins.Elleétaitperdue.Toujourstellementencolèrecontrelui.Toujourstellementamoureusedelui.–MlleGalen,quelbonheurquevoussoyezderetourparminous!lançaMlleCane.MlleGalen?Kylielevalesyeuxmaisneditrien.Unhochementdetête,c’étaittoutcequelaprof
obtiendrait, rien de plus. Elle espérait qu’elle s’en contenterait. Elle se concentra sur son livre
d’anglais, elle n’avait envie de croiser le regard de personne. Comme celui de Derek, assis troisplacesplusloin,etquilascrutaitavecunegrande,grandeinquiétudeparcequ’ilpouvaitliresonétatémotionnel.Dellasepenchaverselle.–Qu’est-cequinevapas?murmura-t-elle.Est-cequejedoismordreunculdeloup-garouaprès
lescours?–Non.–Ondiraitquetuaspleuré.Quesepasse-t-il?–Allergies,marmonnaKylie.Etelleregrettadenepasavoirséchélescours.Était-iltroptardpourseleveretsortir?–Tun’oseraispasmementir,toutdemême?chuchotaDella.Kylieserralesmâchoires.–Ettoi,tun’oseraispasmemettredansunpétrintelquejesoisobligéedementir,toutdemême?– OK, dit Della. On dira que cette conversation est simplement due à l’humeur de dogue de
MlleGalen.
La journée deKylie ne s’était pas améliorée.Mais ce n’était pas pire non plus. Elle se surprit àtrouver des raisons de se réjouir. Nana disait toujours que quand on commençe à se dire que lemondenouscherchedesnoises,ilfautdécouvrirlespointspositifs.Et lepointpositifnumérounsur la listedeKylie,c’étaitsonretouràShadowFalls.Endépitde
touteslesquestionsquecelasoulevait,saplaceétaitlà-bas.Detempsentemps,ellesesouvenaitdeson séjour chez son grand-père. Et si ce dernier lui manquait, tout comme sa grand-tante, on nepouvaitpasendireautantdelasensationdelourdeurqu’elleavaitressentielà-bas–celled’êtreaumauvaisendroit.Endeuxièmepositionsursaliste,c’étaitl’épéequiavaitdécidédenepasréapparaîtrecommepar
magie.Biensûr,siçasetrouvait,ellel’attendaitàsonbungalowencemomentmême,maiselleétaitbiencontentedenepasdevoirl’expliqueràquiquecesoitpourl’instant.Etenfin,cen’étaitpaslemoindre,ilyavaitlefaitqueMarios’étaitdetouteévidencecachécommeunratsousunrochersaleetcrasseux.Aumoins,Kylienedétectaitpassaprésence.EtMirandanonplus.Ellesouhaitaitplusquetoutau
mondeneplusavoiràlecroiser,maisautantcroireauPèreNoël…La grande question était : serait-elle prête à l’affronter ? Elle n’avait pas lamoindre idée de la
façondontonsepréparaitàluttercontrequelqu’und’aussipuissant,d’aussimauvais.Attendantladernièresonnerie,quimarqueraitlafinducoursd’histoire,ellelevalesyeuxsurCary
Cannon. Celui-ci notait les devoirs écrits au tableau. Sa chemise blanche amidonnée épousaitparfaitementsontorsemusclé.Oui,Frederickaavaitraison,leprofesseurétaitunpurplaisirpourlesyeux.S’illaissaittomberla
cravateet lepantalonchic,onauraitpuleprendrepourunétudiant.Grand,brun, lesyeuxnoirs, ilétaitplutôtbeaumec.Etsuperbonprof!Iltransmettaitsapassionpourl’histoiredanssescours.Pourunloup-garou,ilétaitd’uneamabilitéincroyable.Ilavaitsûrementappriscelaàl’école.Kylie l’avaitmêmevuposer les yeux surFredericka aumoins unedouzainede fois.Cequi lui
confirmaitquecetengouementn’étaitpasàsensunique.Troisminutes plus tard, l’école terminée,Kylie sortit de sa classe.Della, son escorte officielle,
l’accompagnait.Àpeineavait-ellemisunpieddehorsqu’onl’attrapaparl’avant-bras.Ellesursauta,puisvitHoliday.–Salut!Jedoist’emprunterKylie,dit-elleàDella.–OK,tularaccompagnerasaubungalow?Oujedoisteretrouverquelquepart?–Jelaraccompagneraichezelle.Dellaeutl’airunpeuembêtéequ’onluipiquesonjobd’escorte.Etellen’étaitpaslaseule.–Qu’est-cequinevapas?s’enquitKylie.–Rien…(Hoquet).Àpartça…,ditelleendésignantsabouche.Enfait, ilyaquelquestrucsdont
j’aimeraisdiscuteravectoi,maischaquechoseensontemps.Ellelaissaéchapperunprofondsoupir,commesielleallaitannoncerunemauvaisenouvelle.–J’aiplusoumoinsbaratinéBurnett.Etj’auraisbesoindetonsoutien.–Tuveuxquejementeàunvampire?demandaKylie.Waouh,tuexagèresunpeu,non?Holidayenroulasescheveuxenchignon.–Non,pasmentir.Ilnevarientedemander.Ilfaudraitjustequetuaillesjusqu’auboutdequelque
chose.–Jenecomprendspas.–Bon,voilàcequis’estpassé:j’airacontéàBurnettqu’ilfallaitquejepasseaudrugstoreetilm’a
proposédem’yaccompagner.– J’ai donc ressorti mon couplet habituel : comme quoi je t’avais dit que tu n’étais pas une
prisonnièreicietquejepensaisquetuauraisenviedesortir.J’airacontéqu’enfaittuavaisbesoindetampons.Kyliesuffoqua.–TuasditàBurnettquej’avaisbesoindetampons?–Non,enfin…justequej’avaislesentimentquetupourraisenavoirbesoin.Et,heureusement,ce
n’était pas un mensonge parce que Miranda m’a raconté qu’en ton absence elle avait dû t’enemprunter.–OK…ditKyliequinecomprenaittoujourspasoùellevoulaitenvenir.Donc…–Donc…j’aimeraisquetunousaccompagnes,Burnettetmoi,etquandtuirasacheterlestampons,
j’aimeraisquetumeprennesaussi…hoquet…untestdegrossesse.– Ah, j’ai compris.Mais s’il demande… non, il ne demandera rien parce qu’il croira que j’ai
achetédestampons…etlesmecsnesupportentpasquel’onparledecela.–Voilà,tuastoutcompris,jelesavais!–Trèsfuté!–Ilfautsemontrermalinquandonaaffaireàunvampire.Ellessemirentenroute.–Maisattends…l’arrêtaKylie,quelgenredetestpréfères-tu?– Je ne sais pas, je n’en ai jamais acheté… hoquet…mais prends-en deux. Différents. Fiables.
Burnettm’accompagnerapourm’aideràtrouverunmédicamentcontrelehoquet.Kylieessayaderéfléchir.–Commentdistingue-t-onuntestdegrossessefiabled’unautrequinel’estpas?–Achètes-endeux,maispaslesmoinschers.Tiens,dit-elle,etelleluidonnadeuxbilletsqueKylie
rangeadanssapochedanssonpetitporte-monnaie.Maintenantquec’estréglé,laisse-moiteparlerde
l’autretruc.–Qu’est-cequec’est?demandaKylie,brusquementinquiète.–Tonbeau-pèreatéléphoné.Tudoislerappeler.–D’accord.Puis-jemeservirdetontéléphone?–Oui,répondit-elleenfouillantdanssapocheetenleluidonnant.Etensuite…–Cen’estpasfini?–Non,demaintuaurasdesvisiteurs.Situveuxlesvoir.–Desvisiteurs?Qui?Kylierangealeportabledanssapoche.–LesBrighten.Lesparentsadoptifsde tonvraipère. Ils sont rentrésd’Irlandeetonteu tous les
messages.Ilssontimpatientsdeteconnaître.DesfrissonsparcoururentlesbrasdeKylie.–J’avaispresquerenoncéàlesrencontrer.–Ehbien,ilsserontlàdemain,àdeuxheures,sicelateconvient.Kyliedéglutit.–Oui,biensûrquejeveuxlesvoir.Ellepensaàsonpère.Illuimanquaitterriblement.Commeelleaimeraitqu’ilsemontreàelle…
ArrivéesaubureaudeHoliday,ellestrouvèrentHaydenetBurnett,silencieux,prèsdelamachineàcafé.Apparemment,ilss’étaienttusàleurapproche.Avaient-ilsdessecrets?Parlaient-ils d’elle ? Elle faillit le leur demander, mais comprit qu’une dispute risquerait de
retarderleurpetiteescapadeenville.EtHolidayavaitbesoind’elle.Celle-ci,d’ailleurs,devinasonmarathonémotionnel.Aprèsquelquessignesdetêtegênésenguise
debonjour,Holidays’adressaàBurnett:–Prêt?Holiday conduisit et hoqueta tout du long.Burnett, préoccupé, resta sur le qui-vive, comme s’il
craignaitqueMarionedébarque.–Nousdevrionsappelerlemédecin,déclara-t-ilalorsqueHolidayenlaissaitéchapperunautre.–Jevaisprendreunantiacideouautrechose,çaira,répliquaHoliday.Quand ils entrèrent dans la pharmacie, Kylie commença par les « produits féminins ». Burnett
entreprit de la suivre,mais lorsqu’il constata qu’elle arpentait le rayon « tampons », il tourna lestalons.KylievitHolidayl’entraînerdansuneautreallée.Avecun soupirde soulagement, ellepartit à la recherchedes testsdegrossesse.Se sentant sous
pression, elle passa les divers emballages en revue, mais elle était perdue. Il y avait de trèsnombreusesmarques,dontchacuneoffraitunepromessedifférente.Comprenantqu’ellen’avaitpasletempsdetousleslire,elleenchoisitdeuxpuis,justepours’assurerqu’elleavaitlebon,elleenprituntroisième.Lorsqu’ellefutsûrequepersonnenelaregardait,ellefilaàlacaisse.Maisquandellevitl’hommed’uncertainâgederrièrelecomptoir,ellecompritqueceseraitdifficile.Letype,stylevieuxpasteur,allaitcroirequelestestsétaientpourelle.Super.Ellepritsoncourage
àdeuxmainsetposalestroisboîtessurlecomptoir.L’homme regarda les tests, puis leva les yeux.Kylie vit dans ses yeux gris qu’il la jugeait, son
visagereflétantsadésapprobation.Charmant!Illapensaitenceintealorsqu’elleétaitencorevierge!–Sais-tut’enservir?demanda-t-ilsuruntontrèscondescendant.Ellesesentitrougir.
–Je…lirailemoded’emploi.–Souhaites-tuqu’Angela,monassistante,teparlede…quoiquecesoit?Dustyle,«rapportsprotégés»,Kylieétaitsûrequ’ilpensaitàcela.–Non,lâcha-t-elle.Commeletypecontinuaitàlafixer,elleajouta:Merci.Ilpassalentementlesarticles.LecœurdeKyliebattaitaurythmerégulierdel’embarras.–Ilssontpouruneamie,sesentit-elleobligéedepréciser.Maisquelleschancesyavait-ilqu’illacroie?–Celaferaquarante-deuxdollarsetquatre-vingt-seizecents.KyliecherchalesbilletsqueHolidayluiavaitdonnés.–Merde,marmonna-t-ellequandelleconstataqu’ellen’enavaitpasassez.–Pardon ? fit le petit vieux, qui était à présent outré non seulement parce qu’elle était enceinte,
maisaussiàcausedesonlangage.Etilyavaitdequoi!Ellesegardaitbiendejurerenpublic.Maisbon,elleétaitdéjàgrilléeauprès
delui,alorsqu’est-cequ’unseulpetitmotallaitchanger?Pourtantellelançatoutdemême:–Désolée.–Vouslesprenezounon?Elleopina.–Oui,c’estjustequejenecroispasavoirbesoindestrois,justedeux.Sourcilsfroncés,ilregardalestroisboîtes.–Laquellerendez-vous?Ellerespiraunboncoup,s’apercevantqu’àunmomentdonnéelleavaitcessédelefaire.Puissesouvenantdelacartedecréditdesamère–àutiliseruniquementencasd’urgence–elle
sortitleportabledeHoliday,puislepetitporte-monnaie.–Cen’estpasgrave,jelesprendstous.Jetantlacartesurlecomptoir,ellesemorditlalèvre.Elleignoraitsic’étaitàcegenred’urgence
quesamèrepensait,maiss’éloignerdesyeuxcritiquesdecethommeétaittoutcequicomptait.Ilétudialacartetrèsattentivement.Génial!Etmaintenantill’accusaitdefraudeàlacartebancaire?–C’estbon,déclaraKylie.Jevouslejure.Iln’avaitpasl’airconvaincu.–Puis-jevoirunepièced’identité?Elle entendit Burnett et Holiday quelques allées plus loin. Elle se mordit la lèvre, ouvrit son
portefeuille,etluimontrasonpermisdeconduire.Ellen’avaitjamaisvupersonneprendreautantdetempsàlireunepièced’identité.Lapeurdedevoirfairefauxbondàsonamieluifitmalauventre.–Jesuisunpeupressée,déclara-t-elle.Enfin,illâchasonpermisetmituntermeàlatransaction.Elleentenditquelqu’uns’agiterderrière
elle,etsoncœurseserra.ElleregardaparterreenpriantpournepasvoirlestennisdeBurnett.Non, ce n’était pas lui. Une paire de chaussures chic, comme celles que portaient les hommes
d’affaires,ornaitlespiedsdutypederrièreelle.Merci,monDieu!Lecaissierpoussaunticketverselle.–Souhaiteriez-vousdesbrochuresd’information?demanda-t-il.– Oui, merci, répondit Kylie qui signa le reçu, puis le regarda glisser des prospectus sur les
rapportssexuelsdanssonsac,aveclestestsdegrossesse.S’ilsavait!Cesbrochuresétaientdésuètes!Ellelesavaitluesilyaplusd’unan!
Quandil lui tenditenfin lesac,Kylieseretournapours’enaller,maiselles’arrêtabrusquementlorsqu’ellereconnutlevisagedel’hommederrièreelle.–Etmerde,répéta-t-elle.
Mincealors!Detouteslespersonnesaumondequil’avaientvueachetertroistestsdegrossesse,c’étaitluilapiredetoutes.–Ilssontpouruneamie,rabâcha-t-elle.–Quoi?fitlevieilhomme.Etsonfrontseplissad’inquiétude,quandilregardasonpetitsacblanc.Trèsbien,iln’avaitpasvu
sesachats.Maisildevaitcroirequ’elles’étaitprocurédespréservatifs.Etvulatailledusac,elles’enconstituaitunsacréstock!D’un seul coup,Kylie réalisa qu’il y avait bien plus grave que le fait que son grand-père croie
qu’elles’étaitprocurédescapotes.SiBurnettlavoyaitaveclui,çaallaitchauffer!–Quefais-tuici?Nerveuse,KyliepassaleslieuxenrevueàtoutevitesseenpriantpournetombernisurHolidayni
surBurnett.Ellenelesvitpas.Ilsortitletéléphonedesapochedechemise.–Jevoulais te le rapporter.Etpourêtre sûrque tunemecroiespasà l’origineducomplotqui
visaitàt’empêcherdepartir,j’aidonnémaparoleàBurnett.Etça,jenelefaispasàlalégère.Jedoisyaller,maintenant.Cefutplusfortqu’elle,maisKylieleserradanssesbrasetseraccrochaàluiunesecondedeplus
quenécessaire.Quandelleseretira,ellevitBurnettfonceràtoutealluredansl’allée,danssadirection.Heureusementsongrand-pèredisparut.–Quesepasse-t-ildonc?fitlecaissier,ahuri.–C’estpourçaquetuasvouluvenir!lançaBurnettd’untonsec.–Ya-t-ilunproblème?demandalecaissier,puisilajouta:avez-vousvu…?–Toutvabien,luiassuraKylie.–Jen’endiraispasautant,répliquaBurnett.J’enaiassezdetouscesmensonges!–Dois-jeappelerlapolice?demandalecaissier.
–Non!répondirentBurnettetKylieenchœur.Burnettlapritparlebrasetlafitsortir.–Êtes-voussûrequeçava,jeunefille?crialecaissier.Elleseretourna.–Toutvabien.C’estmonami!Tantpiss’ilnesecomportaitpasenami.–Ques’est-ilpassé?demandaHolidayquiarrivaitencourant.–Sortonsd’abordd’ici,lança-t-ilenbouillonnantderage,etilregardaKylie,lesyeuxbrillantsde
colère.IllesconduisitverslavoituredeHoliday,garéejustedevant.–Ques’est-ilpassé?répétalajeunefemme.ElleregardaKylie,parcequ’àl’évidence,ellesavaitqueBurnettsecomportaitdemanièreinjuste.Elledéverrouillalavoitureautomatiquement,unefractiondesecondeavantqueBurnettn’ouvrela
portièrearrièred’uncoup.LevampirefurieuxfitsigneàKylied’ymonter.Celle-cihésita,ellenesavaitpasquoidire.Ellesedoutaitbienqu’ilétaitfurieuxquesongrand-
pèreaitdébarqué,maiscen’étaitpassafaute.Ellegardasonsang-froid.–Situveuxbienmelaissert’expliquer…–Montedanslavoiture!exigea-t-il.Àprésenttrèsénervéequ’ilsemontreaussiinjuste,ellesejetasurlabanquettearrière.Burnettlui
arrachalesac.Puisellerefermaviolemmentlaportière.Oh!zut!Celaallaitvraimentmal!Kylieregardaparlavitre.Burnettpritlevolant.HolidaysetournaversKylie,desquestionsplein
lesyeux.–Mongrand-pèreétaitlà,expliqua-t-elle.–Elle t’amenti, lâchaBurnett d’un ton sec. Elle n’avait pas du tout besoin de foutus tampons !
C’étaitunstratagèmepourlevoir!–Maisnon,pasdutout!Kyliesepenchaets’agrippaausiègepassager.–Ellen’apasmenti,protestaHolidayenposantlamainsurlebrasdeBurnettpourlecalmer.Kylie ne pensait qu’à une chose : il lui fallait un contact apaisant à elle aussi. Parce que pour
l’heure,elleétaittrèsencolèred’êtreaccuséeàtort.–Jenesavaispasqu’ilseraitlà!dit-elle,d’unevoixaiguë.–Ellenepouvaitpasledeviner,répliquaHoliday.Laférocitédel’expressiondeBurnetts’atténuaquelquepeu,maispassuffisammentpoursatisfaire
Kylie.IlregardafixementHoliday.–Elleademandéàvenir iciet tuveuxmefairecroirequec’estunecoïncidencequ’ildébarque
commeça?–Jeneluiaipasditquejevenaisici,rétorquaKyliedutacautacensecarrantviolemmentaufond
de labanquette.Ellecroisa lesbrassursapoitrineet se revitpetite,envoitureavecsesparents,etcombien,parfois,elleleurenvoulaitàmort.–Attends,lançaHoliday.As-tuditàHaydenoùnousallions?LarideentrelesyeuxdeBurnetts’accentua.–Tucroisqu’ill’arépétéà…
–Tunedevraismêmepasêtreénervé, répliquaKylied’un tonsec.Toutcequemongrand-pèrevoulait,c’étaitmerendremontéléphoneetm’assurerqu’ilétaitétrangeraucomplotquivisaitàmekidnapper.Ettoi,tupassestesnerfsdevampiresurmoi!–J’aipassémesnerfsdevampiresurtoiparcequetum’asdéjàmentiàplusieursreprises.Burnettagitalesacpoursoulignersespropos.Lesecouabienfort.Kylie retint sonsouffle,craignant lepire.Quiseproduisit.Lesacsedéchiraet les trois testsde
grossesse atterrirent sur le siège avant, entre Holiday et Burnett, ainsi qu’une brochure sur lesrapportssexuelsprotégésetuneautresurlablennorragie.Burnettbaissalesyeux,abasourdi,puisregardaKyliedanslerétroviseur.–Pourl’amourdeDieu!marmonna-t-il.–Attends!fitHoliday,puisellerota.Trèsfort.Burnettl’ignoraetregardafixementKylie.–Situesassezmûrepourcoucher,tul’esaussipoursavoirteservird’uneprotection!Kylieouvritlabouchepourparler,maisellenevoyaitpasdutoutcequ’elleallaitdire.Alorscela
sortittoutseul:–Jesaistoutsurlespréservatifs.Ilserenfrognadavantage.–Alors,pourquoidoncteretrouves-tudanscepétrin?–Attends,Burnett,ditHoliday,tunecomprendspas.Cen’estpasKyliequiadessoucis.BurnettétaittropoccupéàremonterlesbretellesàKyliepourécouterlesaveuxdesonamie.–Enréalité,lespréservatifsnesontefficacesqu’àquatre-vingt-cinqpourcent,expliquaKyliequi
bouillonnaittoujoursderage.–Situlesutilisescorrectement,ilsfonctionnent!J’aijustementparlédecesujetavecLucasilya
deuxsemaines!Jeluiaimêmedemandédefaireattention,bonsang!–Burnett!leréprimandaHoliday.Oh, mais Kylie aimerait bien que son amie la ferme et qu’elle laisse le vampire s’enfoncer
davantage.Etellel’yaida.–Jenelesaipasachetéspourmoi,déclara-t-elle,maispourunecopine.–Tun’espas…enceinte?– Sauf si ces brochures mentent et prétendent que l’on peut être enceinte en s’asseyant sur les
toilettes.Jetel’aidit,ilssontpouruneamie.LesyeuxdeBurnetts’écarquillèrent.–Miranda?Ohmince!J’aieuexactementlemêmefoutudiscoursavecPerry!–Ce sont des choses qui arrivent, c’est tout, réponditKylie, bien plus calmemaintenant qu’elle
avaitcomprisqu’iln’auraitquecequ’ilméritait.–C’esttout?répétaBurnettd’unevoixtonitruante.Tutefichesdemoiouquoi?Tucouches,tute
protèges,point!C’estaussisimplequecela!Cesbêtisesnedoiventpasarriver!Cen’estquedelanégligence!C’estirresponsable!C’estimpardonnable!–Burnett!HolidayregardaKylieenlevantlesyeuxaucieletserembrunit.Laféesavaitexactementceque
sonamieavaitderrièrelatête.MaisKylien’enavaitpasencoreterminé.–Nousdevrionspeut-êtremettreunerègleenplace:toutmâlequimetunefilleencloquedevrait
sefairecastrer.–Çasuffit!criaHoliday.
–Enfait,cen’estpasunemauvaiseidée!grommela-t-il.–Burnett!s’écriaHolidayd’unevoixgrave.Tais-toiavantd’aggravertoncas.Kylien’apasacheté
lestestspourMiranda,maispourmoi.Kyliesedélectadevoirlevisagedécomposéduvampire.–Aimerais-tulenomd’unbonmédecinquis’occuperaitdetelescouper?lança-t-elle,cinglante.
Leproblèmede ladoucevengeance,c’estqu’avecdurecul,ellen’est jamaisaussidouce.Burnettfut…abasourdi.IlrentraàShadowFallssansdireunmot.Holidaynecessadehoqueter,commesielleallait semettreàpleurer.Manifestement, la réactiondeBurnettn’étaitpasdu toutcellequ’elleavaitespérée.Oupeut-être,seditKylie,c’étaitprécisémentcellequelaféeavaitredoutée.EllerevitHolidaylui
confierqueBurnettn’étaitpassûrdevouloirêtrepapa.Kylievoulaitbrusquements’excuserpourlerôlequ’elleavaitjouéenannonçantlanouvelled’unemanièreaussi…blessante,maislemomentneluisemblaitpasindiqué.Après avoir garé la voiture, Burnett vit Perry et lui demanda de raccompagner Kylie à son
bungalow.–Qu’y a-t-il ? demanda-t-il, en scrutantKylie et en regardant Burnett qui s’en allait. Je ne l’ai
jamaisvuaussi…ahuri.Commesileslumièresétaientallumées,maisqu’iln’yavaitpersonneàlamaison.–Rien,réponditKylie,quieutenviedepleureretdesedonnerdesgiflespouravoirétéaussipeu
délicate.Dèsqu’elleentradanslebungalow,ellefiladroitdanssachambre.MaisDellalatraversaàtoute
vitesseetbloqualaporte.–Qu’est-cequinevapas?demanda-t-elle.D’abord,tuarrivesencoursenpleurant,puisHoliday
débarque,toutebizarre,etvoilàquetureviensavecl’aird’unchiotàquil’onauraitdonnédescoupsdepied.Etnemedispasquecelanemeregardepas.Jesuistonamieetcelamedonnetouslesdroitsdumondedememêlerdetavieprivée.Kyliel’étreignit.–Jet’aime.–Bon…Je…jen’essayaispasd’êtretoutemièvre,sedéfenditDella,etelleseretira.– Je sais,mais tu l’étais, réponditKylie.Malheureusement, jenepeuxpas…parlerdecelapour
l’instant.J’aidescoupsdefilàpasser.EllefitsigneàDellades’éloignerdelaporte.Celle-cis’exécutalamortdansl’âme.Le premier coup de fil de Kylie fut pour avertir Hayden que Burnett pourrait débarquer d’une
minuteàl’autreetqu’ilétaitd’humeurmassacrante.–Pourquoi?Qu’ai-jedoncfait,cettefois?demandaHayden.–Mongrand-pèreadébouléaudrugstore.Jesupposequec’estvousquiluiavezditoùj’étais.–Mince!J’enaibienparlé,oui,mais…jamaisjen’auraiscruqu’ils’yrendrait.J’imaginequeje
doisfairemesbagages?marmonna-t-il.–Non,ditKylie,jevousenprie,expliquez-luisimplementquevousnesaviezpasqu’ilviendrait.
Calmez-le.Ditesn’importequoi,maisnepartezpas.J’aibesoindevousici…Etnevousmontrezpastropdurenverslui.Il…aeuunejournéedifficile.–Ahbon?–Iladûmesupporter,ajoutaKylie.–Oh,quellecorvée,eneffet!lataquina-t-il.MaisKylien’étaitpasd’humeuràplaisanter.Ensuite,elleappelasonbeau-père.Elleluiparlacinqbonnesminutes,luiassuraqu’elleallaitbien,
qu’elle avait perdu son téléphone, qu’elle venait de le retrouver et qu’elle était désolée d’avoirmanquésesappels.Elledevinaàsontonqu’ilétaitbouleverséd’apprendrequesamèreétaitàLondres.Oupeut-être
n’était-ce pas sa voix qui lui indiquait cela,mais ses paroles : «Bon sang, elle aurait dûme direqu’ellequittaitlepays!»–Jesuissûrequ’ellen’yasimplementpaspensé,mentitKylie,quinevoyaitpasquoiajouter.Après avoir raccroché, elle sentit brusquement sa poche gauche vibrer. Oh mince ! Elle avait
complètementoubliéqu’elleavaitencoreletéléphonedeHoliday.Ellesortitl’appareiletconstataqueBurnettavaitenvoyéuntextoàHoliday.Soninstinctluiditque
sonamiedevaitlelire.EllesortitprécipitammentdelachambreetcriaàDella:–Onyva!Sachantquesonamielarattraperait,elledétala.Enquelquessecondes,Dellaseretrouvaàsoncôté.–Onvaoù?–Aubureau,jedoisvoirHoliday.–Ettunecomptestoujourspasm’expliquercequisepasse?–Désolée.Kylieaccéléralepas.Elle lui demanda de l’attendre dehors. La vampire roula des yeux,mais s’exécuta.QuandKylie
entradanslebureau,elletrouvalaportedeHolidayfermée.Ellefrappa.–Quiest-ce?demandasonamie.EtKyliedevinaquelaféeattendaitBurnett.–C’estmoi,répondit-elleenouvrantlaporte.Holidayétaitdeboutderrièresonbureau.Ellesoupira.Sesyeuxn’étaientqu’unfatrasde larmes.
Quineréussissaientpasplusàlaféequ’àKylie.–Jesuisvraimentdésolée,dit-elle.Laculpabilitéfitunnœuddanssapoitrine.–Cen’estpastafaute.–Si.Iln’auraitpasdûapprendrelanouvelledecettefaçon.J’étaistellement…
–Encolère!finitHolidayàsaplace.Ettuavaistouteslesraisonsdel’être.Ilacarrémenttirédesconclusionshâtives.Ilalatrèsmauvaisehabitudedefaireça.Savoixtremblait.Kylievitlesboîtesdestestsdegrossesseàlapoubelle.–Lesas-tufaits?Ellehochalatête.–Et?Elleopinadenouveau.–Lestroisdisenttousoui.Ya-t-ildeschancespourqu’ilssetrompent?–Burnettestaucourant?demandaKylie.–Non.Ilaprislavoitureetilestparti.Sansunmot.–Attends,si,iladitquelquechose.Kyliesortitletéléphonedesapoche.–Ilt’aenvoyéuntexto.C’estpourçaquejesuisvenue.Jemesuisditqueçadevaitêtreimportant.Holidayprit leportableet,presquepaniquée,appuyasurquelques touches.Deslarmesemplirent
sesyeuxetelleportaunemainàseslèvrestremblantes.–Bonneoumauvaisenouvelle?demandaKylie,anxieuse.Holidaylevalatête,lesyeuxmouillésmaissouriante.–Ilaécrit:«Jesuischezlefleuriste,oùj’essaiedetrouverunefleurquidirait:“Jesuisunidiot,
pardonne-moi,s’ilteplaît.”Quelidiot!Ellesoupira,puishoqueta.–Maistonidiotàtoi,lançaBurnettdepuisleseuildelaporte.Kylielevitentrer,portantlebouquetleplusgrosetleplusbizarrequ’elleaitjamaisvu.Holidayse
laissatombersursachaisedebureau.Quelqueslarmesroulèrentsursesjoues.IlpassadevantKylieetdéposalesfleurssurlatable,quioccupèrentquasimenttoutelaplace.–Tunem’aspasditquelgenredefleurs.Alorsj’enaiprisunedechaquesorte.Sesyeuxseposèrentsurlapoubelleoùilremarqualesboîtesvides.IllevalesyeuxsurHoliday.–Sommes-nousenceints?Elleopinaetessuyasesjoues.–Pardonne-moi,dit-il,lavoixremplied’émotion.J’aipeur,voilàtout.Jen’aipaseudepèreetla
plupartdemesparentsadoptifsn’étaientpasceque l’onpourraitqualifierdebonsexemples.Maisensuite,j’aicomprisquetuferaisunemèresigénialequepeuimportesijesuisunpeunulcommepapa.–Tuneseraspasnul,hoquetaHoliday.–Maissic’estlecas,tumeremettrasàmaplace,hein?–Jelejuresurtespiedsfroids!Kyliesefenditd’ungrandsourireettournalestalons.Elleétaitpresqueàlaporte,quandBurnettl’interpella:–Jetedoisdesexcusesàtoiaussi.–Etmoiaussi.Burnettsourit.–Acceptées.–Maisplusdesecrets,ajoutaKylie.MêmeentreHaydenettoi.Sicelameconcerne,jeveuxsavoir.Ilsoupira.
–Marchéconclu.Maintenantquenousavonspresquetouttiréauclair,pourrais-tut’enallerpourquejepuisseembrasserlamèredemonenfantsansavoirpeurd’offensertesyeuxinnocents?–Netegênesurtoutpaspourmoi!ditKylieentraversantlapièce.–Kylie?ditHoliday.–Oui.–LesBrightenontappeléennotreabsence.Ilsonttoujoursl’intentiondevenirdemain.Jevoulais
justetelerappeler.Kylieopinaetsortit,essayantdetrouvercommentlesgérer.Ellen’avaitpasfaitunpassurleperronqueDellaseruaitdéjàverselleenhurlant:–Holidayestenceinte?Kylierecouvritlabouchedelavampavecsapaume,etserenfrogna.–Tun’étaispascenséeécouter!Dellasouffladerrièrelesdoigtsdesonamie.–Jenel’aipasfaitexprès!Burnettaunevoixquiporte,voilàtout.–Exact.Kyliebraquadesyeuxincrédulessurelle.Dellapoussadenouveauunpetitcri.–C’esttropcool!Kylie,quimitdecôtésesinquiétudessurlesBrighten,eutbrusquementenviedecrierelleaussi.–Qu’est-cequiestcool?demandaMirandaenlesrejoignant.DellaregardaKylie.–OndoitledireàMiranda.JusteàMiranda.–Oui!criacelle-cid’unevoixperçante.J’ignoredequoiils’agit,maisjeveuxlesavoir!–D’accord,maisdéfensedelerépéter.–Promis,juré,alors,c’estquoi?Ellesefrottalesmains,excitéedeconnaîtreunsecret.Dellalesemmenaloindubureau,sousunbosquetd’arbres,prèsduchemin.–Devinequiestenceinte?murmura-t-elle.MirandaregardaKylie,bouchebée.–Maistuasditquetunel’avaisjamaisfait?–Pasmoi!rétorqua-t-elle.Holiday!Mirandaouvritgrandelabouche.–Waouh!OnvaavoirunbébéBurnettquivacourirpartout?Cool!Ellesefenditd’ungrandsourire.–C’estgénial,fitKyliequinepouvaitpluss’empêcherdesourire.Dumoinsjusqu’àcequel’onfassetomberunetêtecoupéequiatterritàsespiedsdepuisl’arbreau-
dessusd’elle.Kyliehurla etdonnauncoupdepieddedans.Elle rouladeuxbonsmètresplus loin.Kylieseremitàcrierquandellevitlesyeuxcilleretlaregarder.
Lelendemainmatin,Kylieallaconsultersese-mailssursonordinateuravantd’allerprendresonpetit-déjeuneravecDellaetMiranda.Ellefixal’écrannoir,ahurie.Iln’yavaitpaseud’autresrêves,pasdetêtescoupéesquitombaientdesarbres,etplusd’épéesvisiteuses.Malgrétout,ellen’avaitpasfermél’œil.Toujoursàcausedeceshistoiresdecœur.Elle était restée éveillée unmoment en songeant qu’elle allait rencontrer les parents adoptifs de
Daniel aujourd’hui, et en sedemandant cequ’elledirait.Elle avaitdes relations avec sonvéritable
grand-père,maiscen’étaitpasluiquiavaitélevésonpère.Ilneluiavaitpasapprisàfaireduvélo,niàjoueraubaseball,ilneconnaissaitpasvraimentsonproprefils,maiseux,oui.Queluidiraient-ilsdesonpère?L’avaient-ilsaimé,leuravait-ilmanquédepuisqu’onluiavaitôtélavie–troptôt?Elle sortit les photos et passa une bonne heure à les regarder, à lui parler. Oui, elle lui parlait
comme s’il était là, qu’il écoutait tout cequ’elledisait.Elle lui parlade sesquêtes, qu’ellevoulaittrouver lemoyend’aider tous lesadoscaméléons. Ilne lui restaitplusqu’à savoircomment faire.ElleluiparladeMario–ellesentaittoutaufondd’ellequ’elledevraitl’affronter.Enpersonne.Elleavouaàsonpèrequecelal’effrayaitvraiment.Àcausedumalquiémanaitdecethomme.Et
qu’ellenepensaitpasavoircequ’ilfallaitpourlecombattreetgagner.Àdeuxreprises,elleputjurersentirlaprésencedesonpère;cefrissonlégèrementfamilierqui,
en réalité, la réchauffait de l’intérieur.Quimurmurait qu’elle ne serait pas seule – pour affronterMario ou la visite de ses parents. Puis elle entendit les paroles qu’il lui avait dites peu de tempsauparavant.Maisbientôt.Bientôt,nousdécouvrironscelaensemble.Était-cesondestind’affronterMarioetdeperdre?rejoindrait-ellesonpèredel’autrecôté?Elle rangea lesphotosdans leurenveloppe, lecœurbattantunpeuplusvite, et revitHoliday lui
confierqu’ellenecroyaitpasquec’étaitcelaqu’ilvoulaitdire.MonDieu,ellenel’espéraitpas!Ellen’étaitpasprêteàquittercemonde.QuandelledécidadeneplussepréoccuperdumessagedeDanieletchoisitdecroireHoliday,ou
du moins d’essayer, et qu’elle cessa de se tracasser sur sa rencontre avec les grands-parents, lespropos de Fredericka se mirent à l’obséder. C’était à cause de Kylie que Lucas n’intégreraitprobablementpasleConseildesloups-garous.Ellesavaitquecen’étaitpassafaute–ils’étaitmistoutseuldanscepétrin–maislaculpabilitéétaitbeletbienlà.C’étaitdifficiled’êtretrèsencolèrecontre quelq’un et de culpabiliser en même temps. Comment faisait-on pour gérer cela ? Ellel’ignorait.ElledevaitaussisepréoccuperdeDerek.Étoufferleschosesdansl’œufavantqu’ellesnedérapent
totalement.Sicen’étaitpasdéjàlecas.Elleserappelaitledéjeunerdelaveille,raisonpourlaquelleelle avait demandé àMiranda de leur rapporter quelques parts de pizza pour le dîner.Aaahhh, sabonnevieillestratégied’évitementfonctionnaitencoreàmerveille!Devait-elleenêtrefière?Mais honnêtement, elle savait qu’il n’y avait pas de quoi se vanter et qu’elle ne pouvait l’éviter
éternellement.Derekméritaitdeconnaîtrelavérité.Encorefallait-ilqu’ellelasache.Attendez,ellelaconnaissait,
n’est-cepas ?Enpartie, en tout cas.N’avait-ellepas avouéqu’elle aimaitLucas ?Qu’elle l’aimaitencoreendépitdecequ’ilavait fait.Alorspourquoiavait-ellemêmeautoriséDerekà l’embrasserdansl’effractionderêve?Était-ceparceque,toutaufondd’elle,elleéprouvaitencoredessentimentspourlui?Parcequ’elle
craignaitdeperdreLucasetdeneplusavoirpersonne?Parcequ’elleétaitencolèrecontreLucas,etqu’embrasserDerekétaitsarevanche?Parcequ’elleétaituntoutpetitpeustupide?Desquestions.Pasderéponse.–Alors,ceptit-déj?ditDella.– Oui, marmonna Kylie, et elle regarda l’écran noir de son ordinateur. Je consulte juste mes
messages.Dellaéclataderire.–Àmon avis, lemieux serait d’abord d’allumer l’ordi, non ?Àmoins que tes pouvoirs ne te
permettentdeliretese-mailslamachineéteinte?
KylieregardaDellad’unairrenfrognépar-dessussonépaule.–Tuasoubliélarègle?Interdictiondejouerlespetitesmalignesavantlepetit-déjeuner!Jedois
d’abordfairelepleind’énergie!Mirandafiladansleséjour.–Perso,jepensequel’ondevraitmêmeattendrelerepasdemidi!Celanousdonneraitdeuxrepas
pleinsd’énergiepourréagiràsesbêtises!–Vousvoustrouvezdrôles,vousdeux?lançaDellad’untoncassant.–Oui,onestdrôles!lançaMiranda.– Vous êtes hilarantes, même ! ajouta Kylie en ouvrant sa boîte de réception pour la consulter
rapidement.Unmaildesonbeau-père.Yrépondreplustard.Unautrede…Sara.Zutalors,voilàprèsdedeuxsemainesqu’ellen’avaitpaspenséàsonex-meilleureamie.Étrange
commequelqu’unpouvaitêtretrèsimportantdansvotrevie…etvoussortircommeçadelatête.Cen’était la fautedepersonne.Lavievous faisaitprendredesdirectionsopposées.Elleavait lu
dansunmagazinepouradosquec’étaitgénéralementcequisepassaitunefoisquel’onavaitlebac.Elle supposait que son « chemin différent », elle l’avait simplement pris un peu plus tôt. Tout demême,c’étaittriste.Elleouvritlemaildesacopine,priantpourquecenesoientpasdemauvaisesnouvelles,dustyle:
soncancerestréapparu,ouellecroyaitqu’elleétaitencoreenceinte,ouelleavaitdécidéd’entreraucouventetdesefairenonne.AvecSara,toutétaitpossible.«Salut!Mesuis faitcouper lescheveux.Jemesuisditquetuvoudraisvoirça!Nerispas!Je
déborde de courage maintenant que j’ai survécu au cancer, je suis sûre que ton amie Mirandaapprouverait.Appelle-moiquandtuaurascinqminutes!»ConscientequeDellaetMirandal’attendaient,Kyliecliquasurlaphoto.Quandl’imagedeSara,les
cheveuxcourts,enbrosse,envahitl’écran,unsourires’ébauchasurseslèvres.Elleentendittraînerdespiedsderrièreelle.–J’arrive!fit-elle,ensedisantqu’àtoutmomentDellaallaitseplaindre.Elle attrapa son téléphone et son porte-monnaie, mais au moment où elle se levait, un autre
messagearriva.Ilétaitdesamère,censéeêtrerentréeauxÉtats-Unisparlevoldenuit.Àl’évidence,elleétaitderetour.–Ahbon?Jenetevoispasbouger!observaDella.Trèsbien,lemaildesamèredevraitattendreluiaussi.Retrouvantlesfillesàlaporte,Kyliejetauncoupd’œilsursesdeuxamiesetlatristessel’envahit.
Paspourcequiétait,maispourcequipourraitêtre.–Promettez-moiquelquechose.–Quoi?demandèrent-ellesenchœur.–Quandnoussortironsdiplôméesdecetteécole,nousnenousperdronspasdevue.Nousdevrions
mêmefréquenter lamêmefac.Et jesuishypersérieuse.Holidayparlaitdesdossiersd’inscriptionàl’université, et nous devrions postuler dans la même. Et nous pourrions même prendre unappartementensemble.–Etaussidevenirlesbiennesetfairedestrucsàtrois,lançaDellaengloussantbêtement.–Désolée,ditMiranda,enriant,maisjet’aidéjàvuetoutenueetçanem’arienfait.–Àcausedemespetitsseins,pasvrai?fitDella,toutsourire.Etellesrirentsurlechemindupetit-déjeuner.
DereketLucasnesemontrèrentpasauréfectoireetcelaconvintparfaitementàKylie.Moinsdedrames,celaouvrait l’appétit,parcequ’elleavalasesœufsbaveuxet sonbacongrilléenun tempsrecord.Sontéléphonesonnapileaumomentoùelleallaitrepoussersonplateau.Quandellereconnutle numéro de son beau-père, elle décida de le rappeler plus tard. Elle se voyait mal l’entendrepleurnichersursamèresitôtlematin.Sontéléphonesonna;elleavaitreçuuntexto.Çanepouvaitpasêtresonbeau-père,iln’envoyait
pasdeSMS.Elleattenditunesecondeavantdevérifierdequiilprovenait.Quatremotsapparurent.«Tumemanques.Lucas.»Toiaussi,pensa-t-elle,maiselleneréponditpas.Uneviveémotionl’empoigna.Ellelevalesyeuxaubruitd’unautreplateauquel’ondéposaitsurlatable.Steve, le métamorphe canon, qui avait laissé un suçon juste sous la clavicule gauche de Della,
s’assitàcôtédelapetitevamp.Celle-cinebougeapas,paralyséesurplace,etfoudroyaduregardsonpetit-déjeunerintact.Sises
yeuxavaientputuer,sonpetit-déjauraitmangélespissenlitsparlaracine.–Salut!lançaSteve.–Tudoist’enaller,rétorquaDellasansmêmeleregarder.–Pourquoi?demanda-t-il.Ellehésita.–Parcequej’escorteKylieetjen’aipasbesoindedistraction.C’était laplusnulledesexcusesqueKylieeût jamaisentendue.Etàenjugerpar l’expressiondu
métamorphe,ilétaitdumêmeavis.–Alorscommeça,jetedistrais?fit-ilens’appuyantcontreelleetensouriantàmoitié.–Va-t’en!s’écria-t-elle,énervée.Lesouriredisparutdesonregardetilselevad’uncoup,pritsonplateaupourallers’asseoiràla
tabledesmétamorphes.–Cen’étaitpasgentil,ditKylie.–Jesais,réponditDella.J’ignorepourquoiilafaitcela.–Jeparlaisdetoi,précisaKylieenlaregardantd’unairaccusateur.–Ouais,etc’étaitaussiunmensonge,ajoutaPerryens’asseyantdeuxplacesplusloin.C’estmoi
quisersd’escorteàKylieencemoment.Dellafitlagrimaceetseleva.–Tuasfinidemanger?Quelques minutes plus tard, elles sortirent pour écouter l’annonce de l’Heure pour faire
connaissance –Della d’un côté,Miranda et Perry de l’autre. Kylie se surprit à chercherDerek etLucasdu regard.Toujoursauxabonnésabsents.Puiselle sentit sespoils sedresserdans sanuque.ElleseretournaetvitDerekàdeuxmètresderrièreelle.SesyeuxvertscroisèrentlessiensetKyliesesouvintdubaiserdurêve.–OK,ditChris.Alorsaujourd’hui,nousavons…Ilsortitunboutdepapierdesonhaut-de-forme–cequeKylieavaittoujourstrouvéridicule,mais
apparemmentc’étaitsontruc.EllesedemandasiChrisavaittoujoursrêvéd’êtreunmagicien.Enlisantlepapier,levampireen
chefbalayalafouleduregard.LecœurdeKyliebattitlachamadequandsesyeuxseposèrentsurelle.Ahnon,pasencorecettefois!PuissesyeuxpassèrentdevantelleetMiranda,puiss’arrêtèrent.Pouruneraisonidiote,Kylieeut
unmauvaispressentiment.LesouriresournoissurleslèvresdeChrisluiindiquaqu’elleavaitraison.
–Perry,monpote,annonça-t-il,tuasleplaisirdepasseruneheureavecNikki!
Pouravoirvujuste,elleavaitvujuste!Etc’étaitvraimenthorrible.Kylie laissa aller son regard de l’air choqué de Perry àMiranda. La petite sorcière était raide
commelajustice.Laseulechosequiremuaitchezelle,c’étaientsesyeux,quandellepassalafouleenrevueàlarecherchedeNikki.Etquandilss’immobilisèrent–cequivoulaitdirequ’elleavaittrouvélacoupable–ilss’emplirent
dejalousie.Enfin,uneautrepartieducorpsdelasorcières’agita:sonpetitdoigt.–Non!lâchaKylieàlava-vite,maistroptard.Nikkilajolieblondedisparutet,àsaplace,setenait
unkangouroutrèschoquéettrèsencolère.Oh,maisMirandan’enavaitpasencoreterminé!Sonauriculairecontinuaitàs’agiter.Kylie haleta quand des boutons surgirent brusquement sur le pauvre marsupial d’un mètre
cinquante.Elleentenditlamenacepréféréedesonamiesorcièrerésonnerdanssatête.Jevaistefaireapparaîtrelapirecrised’acnéquetuaiesjamaisendurée!Mirandaavaitraison.Kylien’avaitjamaisvudeboutonsaussihorribles.Bond’accord,ellen’avait
jamaisvudekangourouacnéique,point.Tout lemondedans la foulehurladerire.MêmesiNikkis’était infligécela touteseule,Kyliese
sentaitmalpourelle.Etfranchement,siMirandan’avaitpasétévertedejalousie,ellenonplusn’auraitpastrouvécela
drôle.Kyliel’attrapaparlebras,sepenchaetmurmura:–Elleaeutort;mais…fais-laredevenircommeavant!Retransforme-latoutdesuiteavantquetu
n’oubliescommentromprelesort.Miranda se renfrogna,maisKylie vit la logique se frayer un chemin dans son cerveau. Elle se
mordit la lèvre, leva le petit doigt, marmonna quelques mots, et pouf, Nikki apparut comme parmagie–plusenkangourou,maisenmétamorphesupergênéettrèsencolère.Lesriresdanslafouleavaientdûdépasserlequotient«niveaudegêne».Aulieudesetransformer
encréatureféroceetderéduirelapetitesorcièreenlambeaux,Nikkiéclataensanglotsets’enfuitencourant.PerryseretournaversMiranda.–Pourquoias-tufaitcela?Mince!songeaKylie,quisavaitquecelui-cin’avaitpasditcequ’ilfallait.Miranda,déjàpleinederemords,leregardaenfronçantlessourcils.–Tuprendssadéfense?Elleessaiedetevoleràmoiettoi,tuprendssadéfense?–Non,pasdutout.Mais…c’étaitstupide,déclara-t-il.Levisagedelasorcièredevintrougevifetdeslarmesemplirentsesyeux.–Stupide?aboya-t-elle.Trèsbien,sijesuistellementstupide,pourquoituneluicourspasaprès
pourlaconsoler?Parcequ’ellerêvedet’avoir,situveuxlesavoir!–Quesepasse-t-il?Holidayarrivaduréfectoireàtouteallure.Pendantqueplusieurspersonneslamettaientaucourant,
Mirandadéguerpitàtoutesjambes.KyliesetournaversPerry,quiregardaitsansbougeruneMirandatrèsblessées’enaller.–Hé!dit-elle.Commeilnerépondaitpas,elletiraunboncoupsurlamanchedesonT-shirt.–Nerestepaslà!Cours-luiaprèsetvasluidirequetuesdésolé.–Désolédequoi?–D’abord,tuluiassortiqu’elleétaitstupide.Commeelleestdyslexique,elledétestecemotplus
quetout.Ensuite,quecelateplaiseounon,tuasvraimenteul’airdeprendreladéfensedeNikki.–Non,j’aiditquecequ’elleafaitétaitstupide.Etc’estvrai.PerrylançaunregardàHoliday.– Elle va se faire sacrément enguirlander ! Mais qu’est-ce qui lui a pris de faire une chose
pareille?–Sûrementpourlamêmeraisonqu’uncertainmétamorphes’esttransforméengrosours,puisen
lion géant pour essayer d’en déchiqueter un autre qui avait embrassé quelqu’un. Parce qu’elle estjalouse.Tunetesouvienspasdecequeçafait?Perryserembrunit,etlaculpabilitéobscurcitsonregard.–Si.Mince,j’aitoutfoutuenl’air,non?dit-ilenpassantunemaindanssescheveuxblonds.Mais
jenedéfendaispasNikki.JeveillaisjusteàcequeMirandanes’attirepasdestonnesdeproblèmes.–Alors,va le luiexpliquer.Etensuite, rends-toi serviceetàNikkiaussi,demande-luide laisser
tomber!–Jenel’aipasencouragée…dutout.–Maisluias-tuditquetusortaisavecMirandaetqu’ilnesepasseraitrienentreelleettoi?Parce
qu’apparemment, elle croit encore que cela pourraitmarcher entre vous. Et ce n’est pas juste queMiranda doive supporter ces bêtises, ni queNikki continue à espérer alors qu’elle ne devrait pas.Maintenant,varéparertoutcebazaravantqu’ilnesoittroptard.Les conseils de Holiday portèrent leurs fruits, et Kylie en profita aussi. C’était ce qu’elle avait
besoin d’entendre. Perry n’était pas le seul qui devaitmettre les choses à plat.Elle devait parler àDerek.Elledevaitêtreclaireaveclui.–Jenepeuxpasyaller,ditPerry.–Si,tupeux,sinontuvasleregretter.–Non,impossible.Jet’escorte.Burnettmepasseraunsacrésavonsijamaisjetelaissaistomber.Kyliegrommela.Dereklesavaitrejoints.Ellelepritparlebras,etletraînadevantPerry.
–Derekvaprendrelarelève.–Super.Celui-cisouritetellecompritqu’ilavaitmalinterprétésaproposition.Perrysecoualatête.–MaisBurnett…–Jevaisleluiexpliquer.Maintenant,fileavantqueMirandadécidedenepastepardonner.File!Ellepoussalepetitcrétin.Perrysetransformaenoiseauets’envola.Kylieenlevaquelquesétincellesdesonbrasetaffronta
Derek.–Viens,lança-t-elle.–Où?demanda-t-ild’unevoixmielleuse.–Parler,précisa-t-elle.Ilfautqu’onparle.–Etl’Heurepourfaireconnaissance?Ellepoussaunprofondsoupir.–Oublie-la.Tuviensavecmoi!Ellelepritparlebrasetl’entraînaavecelle.Etbiensûr,c’estàcemoment-làqueLucasfitsonapparition.Ses yeux bleus trouvèrent les siens. Elle vit comment il la dévisageait. Elle eut le désir le plus
étrangedes’arrêterpourluiexpliquer,maisquandelleessayadetrouverexactementcequ’ellediraitoupourquoiellepensaitqu’ilméritaituneexplication,celaluiparuttropdifficile.Alors elle croisa son regard avec l’air de s’excuser et invita Derek à la suivre. Plus tard, elle
s’occuperaitdeLucas.Comment,ellen’enavaitpaslamoindreidée.
–Veux-tualleraurocher?proposaDerek.–Non.Ladouleurqu’elleavaitvuedanslesyeuxdeLucasnecessaitdefaireéchodanssoncœur.Illui
avaitfaitdumal,maisleblesser,mêmesanslevouloir,lachagrinait.–Tuveuxparlerdequoi?demandaDerek.–Tulesaistrèsbien.L’espaced’uneseconde,elleregrettasesmots.CeseraitsifaciledechoisirDerek.Iln’avaitpasde
meutequiessayaitdelesséparer.Iln’avaitpasabandonnésaquête,etneluienvoudraitpasunjour.Mais le cœur à ses raisons... Et le sien voulait Lucas, de toute évidence. Ce n’était pas juste pourDerek,maisellen’ypouvaitrien.–Pourquoiai-jelesentimentquecelafiniramal?Elleleregardafurtivement.–Çaneseterminerapeut-êtrepascommetulesouhaites,maisc’estmieuxcommeça.–Jen’ensuispassûr.Elle le conduisit dans son bungalow puis, se souvenant queMiranda et Perry pourraient régler
leurspropresproblèmesàl’intérieur,elles’affalasurlesmarchesduperronetluifitsignedefairedemême.Elle regarda rapidement la porte en espérant que Perry avait réussi à calmerMiranda. Si ça se
trouvait,ilsétaientpeut-êtreentraindeseréconciliersurl’oreiller!EllerespiraunboncoupavantdesetournerversDerek.–Tusaiscequejeressens.Pourquoiessaies-tudemeconvaincrequecen’estpasvrai?–Qu’est-cequin’estpasvrai?Allez,Kylie,tum’aimes,toiaussi.
Elleremontaunejambecontresapoitrineetlaserra.–Oui.Jenementiraipas,maiscen’estpaspareilavecLucas.Ettulesais,parcequeturessensce
quejeressens.–Maissitoietmoirevenionsensemble,nouspourrionsarrangercela.Ellesecoualatête.–Tuneméritespascela.–Neméritepasquoi?demanda-t-il.Jeveuxteretrouver.Tucroisquejeneseraispascontent?–Pasvraiment,dit-elle.Tuméritesunefillequisoitaussidinguedetoiquetuesfoud’elle.Tune
méritespasquelqu’unqui…enaimeunautre.Ellesemorditlalèvre.–C’est cequi est arrivé àmesparents.Mamanaimaitmonvraipère.Elle appréciaitmonbeau-
père,maisilatoujourssuqu’ellepréféraitmonpère.Mêmemamèreprétendquec’estprobablementl’unedesraisonspourlesquellesilafiniparlatromper.Ellen’arrivepasàluipardonner,maisellesaitquec’estenpartiesafaute.–Alorscommeça,tuveuxrécupérerLucas?Tuvasluipardonnerdes’êtreenfuiavecuneautreet
des’êtrefiancéavecelle?Elleresserrasonétreintesursajambe.–Ilnes’estpasvraimentfiancé.Ilatoutarrêtéavantd’enarriverlà.Derekserembrunitencoreplus.–Uniquementparcequetuasdébarquéàl’improviste.Quetuasdécouvertsonsalepetitsecret.–Jelesais,ça.Etj’ignorecequejevaisfaire.Jeneluiaipasencorepardonné.Maisjen’aipas
nonpluscessédel’aimer.–Mais si tunous laissaisune chance, tupourrais retomber amoureusedemoi ? Je croisque tu
m’aimaisvraiment,avant.Nouspourrionsessayer,aumoins.Ellesoupira,mesurantcequ’ilvenaitdedire.–Nous?Tuvois,tuneressensmêmepluslamêmechose,toinonplus.–Jenevoulaispasdire…Ilsecoualatête.–Si,tul’asdit.Derek,jecroisquenousétionsamoureux,avant,reconnut-elle.Etjeneveuxpaste
fairedemal,Derek.Tucomptesvraimentpourmoi,etjet’aimeencore…maispascommecela.Etjecroisquec’estpareilpourtoi.Ilregardafixementlacimed’unarbre,etellecompritqu’illuifaudraitquelquessecondesdeplus
pourremettredel’ordredanssessentiments.Ellelevitdéglutiretressentitsadouleur.–Maiscequel’onvivaitétaitsifort!–Jelesais,etjesuisvraimentdésolée.Ellesentitsavoixtremblerd’émotion.C’étaitsidurdeluifairedumal.Ilreposalesyeuxsurelle,etelleyvitl’honnêteté,l’inquiétudesincère.C’étaituntypesigénial.Et
rienquepourcela,ilméritaitquelqu’unquil’adorerait.Quil’aimeraitplusquetout.–Tun’asaucuneraisondet’excuser,dit-il.Vraimentaucune.Sil’ondoittrouverunresponsable,
c’estmoi,quandj’aiprispeuretquej’aifaitcequej’aifait.Ouprobablementn’était-cequeledestin.C’étaitcensésepasserainsi.Elleopina.–Jevoudraisuneseulechosedetoi.Unepromesse.–Quoi?demanda-t-elle,sachantqu’ellelaluiferaitsicelaétaitpossible.
–Restemonamie.Nem’évitepasparcequecelategêne.Quandtuaurasbesoindequelquechose,n’hésitepasàvenirmevoir.Jepeuxaccepterquenousnesortionspasensemble,maisjeneveuxpasteperdreetcenesontpasdesparolesenl’air.Jelepensesincèrement.–Jetelepromets.Deslarmesenvahirentsesyeux.–EtquandturetournerasavecLucas,fais-luibiencomprendrequej’aimeraistoujoursfairepartie
detavie.–Jetel’aidit,jenesaispassinous…Ilessuyaunelarmesursajoue.–Mais si, c’est évident. Parce que quand tu aimes quelqu’un, tu lui pardonnes, dit-il d’une voix
tremblante.–Commetuesentraindelefaireencemomentmême?Etuneautrelarmes’échappa.–Jetel’aidit,tun’asrienàtefairepardonner.Maissic’étaitlecas,alorsoui,jel’auraisfait.Elleinspiraetregardafixementsachaussure.–Mêmesi,àcausedemoi,tun’aspaspuaccomplirlaseulechosedonttuastoujoursrêvé?–Là,jenetesuisplus,avouaDerek.–Jesuisdésolée,jepenseàvoixhaute.–C’estausujetdeLucas?Kyliehochalatêteets’aperçutqu’ellesemontraitvraimentinsensible.–Jesuisdésolée,répéta-t-elle.–Ne lesoispas.C’est justementceque je tedemandedenepas faire.Jeveuxque tumeparles.
Écoute,jedétestedirecela,maisLucast’aimesincèrement.Jelesens.Etilsouffreénormémentencemoment.J’ignoreceque,d’aprèstoi,ilnepourrapastepardonner,maistutetrompes.Ellepassasamainsursajambeavantdeparler.– À cause de moi, il n’intégrera pas le Conseil des loups-garous. Il ne sera pas en mesure de
modifiertoutcequ’ilvoulaitchangerchezlessiens.Sameutelerenieraprobablement.Tôtoutard…–Maisilt’achoisie,Kylie.Ilafaitcechoix.Tunel’yaspasforcé.Kylieopinaetleregardadanslesyeux.–Cen’étaitpeut-êtrepaslebon.Ilsepenchaetsonépauleeffleuralasienne,chaude.–Jepariequ’ilpenselecontraire.Ellesecoualatête.–Êtreunloup-garousignifietoutpourlui.LetéléphonedeKyliebipadanssapoche:untexto.Unesecondeplustard,cefutletourdeceluide
Derek.EllelesortitetvitlenomdeBurnetts’afficheràl’écran.Ilséchangèrentunregard.–UntextodeBurnett,dit-il.–Ohmince,lançaKylieenlisantlemessage.«Vienstoutdesuiteaubureau!»Bonsang!Quesepassait-ilencore?
LemessagedeBurnettàDerekdisaitpratiquementlamêmechose:«AmèneKylieaubureau,toutdesuite!»Touslesdeuxs’yruèrentdonc.Elleauraitpuavancerplusvite,maisattenditDerek.Néanmoins,quandellearrivadevantlebureau,soncœurmartelaitdanssapoitrine.D’épuisement
oudecraintedecequil’attendait,Kylien’étaitpassûre.
Ellen’avaitpasencoregravilesmarchesqu’elleentenditlesvoix.Mince,songea-t-elle,quefichaitdoncsonbeau-pèreici?–C’estmonbeau-père,annonça-t-elleàDerek.Jeferaismieuxdegérerçatouteseule.Elle se rua à l’intérieur et y trouvaBurnett,Holiday, son beau-père et Jonathon.Que fabriquait
doncJonathonici?TomGalen,aumilieudelapièce,étaitenfacedubureaudeHoliday.Celle-ciétaitassise,détendue, lecalme incarné,mais laposturedesonbeau-pèrenereflétaitpas l’humeurde lajeunefemme.Sesépaulesétaienttendues,sesmainsserrées.Et comme son beau-père, Burnett semblait un peu crispé, mais elle devina qu’il tâchait de se
maîtriser.QuantàJonathon…levampireavaitl’aircoupable.EtKylieeutunmauvaispressentiment.LeregarddeHolidayseposabrièvementsurelle,commeceluideBurnett,maissonbeau-pèrene
serenditpascomptequ’elleétaitlà.–Àlatêtedequelgenred’établissementêtes-vous?lançaTomGalend’untonmordant.–Dumêmegenrequeceuxquel’Étatdirige,réponditHolidayd’unevoixtranquille.Nousavons
unportailsécurisépourunebonneraison.Vousl’avezpasséetvousavezdéclenchélesalarmes.Nousavonscruquevousétiezunemenace.–Jenesuispasunefichuemenace!Jesuislepèred’uneélève!–Engénéral,lespapasn’entrentpaspareffractiondansuneécole,insistaBurnett.–Ques’est-ilpassé?demandaKylie.Sonbeau-pèreseretournad’uncoupetsedétenditunpeuaussitôtqu’illavit.–J’aisautépar-dessusleportailaulieud’appuyersurlebouton,etondiraitquejesuisentrépar
effractiondansFortKnox.Jemesuisfaitattaquerparcepseudogamin!HolidaylevalesyeuxetKylieconstataqu’elleessayaitdelajouercool.– Jonathon a vu ton beau-père et il s’est trompé. Au lieu de l’interroger comme il aurait
raisonnablementdûlefaire,ill’aretenu…–Retenu?Ilm’acarrémentplaquéausol,oui!protesta-t-ilensefrottantlatempe.Etlaissez-moi
vousdire,pourunmaigrichon,ilsaitsacrémentbientacler.–Noussommesdésolés,luiassuraHoliday.N’est-cepas,Jonathon?–Oui,monsieur,toutàfait,affirmacelui-ci.–Papa,ditKylie.LacopinedeJonathons’estfaitagresserlasemainedernière.Tucomprendsqu’il
puissesemontreruntantinetsurlequi-vive.Holidayfitunclind’œildiscretàKylie,commepourluidire:Bienjoué.Burnetteutl’aird’accord
avecelle.Sonbeau-pèresoupira.–Jesuisdésolépourtapetiteamie.Va-t-elleserétablir?demanda-t-ilàJonathon.–Oui,réponditcelui-cietiltressaillit,commes’ilserappelaitsoudainsesbonnesmanières.Euh,
oui,monsieur,merci.Alorsquelatensionretombait,Kylieregardasonbeau-père.–Quefais-tuici,papa?Ilfronçalessourcils.–Jesuisvenutevoir.Jet’aienvoyéunmailtardhiersoiretjet’aitéléphonécematin.Tul’aurais
susituavaisprismesappelsoulumonmessage.–Jesuisdésolée.Çaaétéunematinéedefolie.–Etelleadescours,ajoutaBurnett.Sonbeau-pèreeutl’aircontrit.–Maboîtem’a envoyé ici pour une réunion avec une filiale qui ne commencera qu’à quatorze
heures.Etj’aipenséque,peut-être,jepourraist’enleverpourt’emmenerbruncheravecmoi.
DerrièreTomGalen,Kylieremarqual’airrenfrognédeBurnett.Levampireavaitétéclair,ellenequittaitpas l’écolesans lui tantqu’ilsn’étaientpassûrsqueMarionesoitpasdans lecoin.BurnettregardaKylie droit dans les yeux et secoua la tête, déterminé. Il ne disait pas simplement non ; ildisait:Jamaisdelavie.–Hum,j’aidéjàprismonpetit-déjeuner,réponditKylie.–Alorsnousironsprendreunpot,proposasonbeau-père.Burnettsecouaencorefermementlatête,toujourspourdire:Jamaisdelavie.–J’ai…j’aidescours,repritKylie.Ladéceptionenvahitlesyeuxdesonbeau-père.Elledétestaitluifairedelapeine.Aujourd’hui,elle
avaitdéjàfaitdumalàLucas,ensuiteàDerek,etmaintenantàsonbeau-père.Cen’étaitpasunebonnejournée.–Écoute,Kylie,insista-t-il,jesuissûrquetupourraismeconsacrercinqminutesdetontemps.Ellesentitlatensionmonterd’uncran.Sonbeau-pèrenecapituleraitpas,etapparemment,Burnett
nonplus.Celasetermineraitmal.
Kylies’employaàregardersonbeau-pèreettâchadenepasseconcentrersurlascènequisepassaitderrièrelui–unedisputemuetteentreHolidayetBurnett,avecforcegestesetregardséloquents.–Kylieseraclalagorgeuniquementpourgagnerdutemps,parcequ’ilfallaitbienlereconnaître,
ellenesavaitpasdutoutquoidire.–Biensûrquetudevraispasserunmomentavectonbeau-père,finitparlâcherHoliday.LamâchoiredeBurnettserefermasi fortqueKylieput jurerquesesdentss’étaientraccourcies
d’unquartdecentimètre.Holidayseleva.–Toutefois,Kylieaunexamendans sonprochaincours.Vouspourriez revenirdansuneheure.
Kyliem’a confié l’autre jour qu’elle avait bien envie d’essayer le fast-food au centre de Fallen ?Comments’appelle-t-ildéjà?BurgersR’Us?Kylieopina,elleneconnaissaitpasdutoutlerestaurantauquelsonamiefaisaitréférence.Le visage de Burnett s’illumina : soit il entendait raison, soit il comprenait le plan deHoliday.
Kylieauraitbienvouluêtredanslaconfidence,ellenesavaitpasdutoutcequisetramait.Sonbeau-pèresetournaverselle.– Je pense que je pourrais aller faire un tour au drive et revenir vers onze heures. C’est la
campagne,parici.–Ceseraitparfait,ditKylie.Etill’attiracontreluipourl’undesessupercâlinsquifaisaitfondresoncœur.Lachaleurdesonétreintes’infiltradanssapoitrine;elleauraitdûfairedisparaîtresapanique.Et
c’eûtprobablementétélecassi,derrièrel’épauledesonbeau-père,ellen’avaitpasvul’épéetomberàcemoment-là,pointeverslebas.Elleseplantaavec force,dansunbruit secetmétallique, toutedroite,enpleinmilieudubureau
d’Holiday.LecœurdeKyliefituneembardéeensentantsonbeau-pèretressailliràcausedubruit.Unepensée
sedéchaînadanssatête.Commentallait-elleluiexpliquerça?Burnettréagitàlavitessed’unvampire:ilattrapal’épéed’ungestevif,renversalatassedethéde
Holiday,puiscachal’armederrièresondosendeuxtempstroismouvements.Unefractiondesecondeplustard,sonbeau-pèreseretournapourvoirl’originedufracas.–C’est quoi ce…bor…bazar ?marmonna Jonathon, puis il rougit en se rendant comptede ce
qu’ilavaitfaillidire.Burnettluijetaunregardmauvais.Holidaysourit;elleauraitdûremporterl’oscardelameilleure
actrice.–Zutalors!C’estladeuxièmetassequejecasseaujourd’hui!Le beau-père de Kylie reposa les yeux sur elle, alors qu’elle avait cessé de respirer depuis
l’apparitionmiraculeusedel’épée.–Jeteretrouvetoutàl’heure.Ellehochalatêteetrepritsarespiration.–Çateva?s’enquit-il.Tumeraccompagnesàlavoiture?Elle avait l’impression d’être une poupée de chiffon ; elle opina, puis sourit dans l’espoir de
paraîtreunpeuplusconvaincante.Sonbeau-pèrelaregardafixement.–Tuvasbien?Ondiraitquetuviensdevoirunfantôme!Unfantôme,elleauraitpugérer,songea-t-elle.–Çava,oui,dit-elled’untonqu’elleauraitaiméplusferme.Malheureusement,ellen’avaitpaslestalentsd’actricedeHoliday.
– Je pense que c’est faisable, confiaKylie à son père, et il leva les yeux de la brochure d’unerandonnéeguidéeà travers leGrandCanyon.Unvoyagequ’ilvoulaitorganiserpoureuxdeuxcetété.–Çaal’airsuper!Cen’étaitpasvraimentunmensonge,maisellepariaitqueChris,levampireassisàcôtéd’euxau
restaurant,avaitsûremententenduquesoncœurdisaitautrechose.Lucas,installéenfacedeChris,laregardabrièvement,etelleenfuttouteretournée.Pourjouerles
gardesducorps,Burnettavaitchoisilesdeuxpersonnesquesonbeau-pèreavaitlemoinsdechancesdereconnaître.Quandilluiavaitannoncéquedeuxgarçonsseraientpostésaurestaurant,ellen’avaitpasimaginéqu’ilpuissedésignerLucas.Burnettétait loindesedouterqueKyliecraignaitquesonbeau-pèrenereconnaisselegossequiavaithabitéjusteàcôtédechezeux.Celuiqu’elleavaitaccuséd’avoirtuésonchat.Heureusement, son beau-père ne s’était jusque-là pas attardé sur Lucas. Il n’avait pas non plus
remarquélefauconquiavaitsuivilavoiturejusqu’enville.Elleauraitpariésonplusbeausoutien-gorgequelerapacerépondaitaunomdePerry.Kylie avait pris le temps, avant le retour de son beau-père, d’aller voirMiranda pour s’assurer
qu’elleallaitbien.Lapetite sorcière était encorebouleversée.Elle s’était réconciliée avecPerry,mais avait euune
sérieusediscussionavecHoliday.Sesactesneseraientsûrementpassansconséquences.SiMirandan’étaitpasimpatientedelesconnaître,elleconvenaitqu’elleavaiteutort.– J’étais sûrque cela teplairait, dit sonbeau-père en attirant son attention.C’est unpeucomme
celuiquel’onafaitàTaos,auNouveau-Mexique.Ilyauradukayak,maisriendetropdangereux.
Lesyeuxdesonbeau-pères’illuminèrentd’excitation.Kyliesesentaitmaldenepaspartagersajoie.Elleavaitpassélesquarante-cinqminutesiciàprierpourquel’épéeneviennepaspoignarderl’undesclientsdurestaurant.Maisenvoyantlesyeuxdesonbeau-pèreseteinterd’inquiétude,elles’efforçadefairebonnefigure.–Tutesouviensdubébécerfquenousavionsvudurantcevoyage?lança-t-elle.Etcettedirectrice
decoloquis’estfaitfairepipidessus?–Ohoui!répondit-il,avecunlargesourire.Onenafait,desupervoyages!–Jesais.Elleposa lamain sur la sienneet il la serra affectueusement.Elle sentit tout l’amourqu’il avait
pourelledanscegeste.–Sais-tucombientumemanques?J’aimeraisvraimentquetusongesàrevenirvivreavecmoi.Ellesemorditlalèvreensesouvenantquequandilavaitquittésamère,elleavaitcruquec’étaitce
qu’elledésirait.Savieavaittellementchangécestroisderniersmois.Elleserradenouveausamainetdéclara:–J’aimebeaucoupShadowFalls.Maisnouspartironsenvoyageensemblecetété.Elleespéraitqued’icilà,elleenauraitfiniavecMario.Ilhochalatête.–J’aicompris!Mapetitefillegrandit!L’émotionenvahitsesyeuxetilregardaautourdelui.Kylietressaillit:ets’ilreconnaissaitLucas?–As-tuaimétonhamburger?lâcha-t-elleencherchantunmoyend’attirersonattention.–Adoré.Tuavaisraisondemeproposerdevenirici.Maistun’aspratiquementpastouchéautien!Ilmontrasonassietteoùlesfritesetlehamburgerrefroidissaient.–J’aiprisuncopieuxpetit-déjeuner,mentit-elle.Maisc’étaitbon.Ellejetauncoupd’œilàsamontre.Ilétaitpresque13heures.Burnettluiavaitdemandéderetenir
sonbeau-pèreafinqu’ilsneseretrouventpasparmilafouleàl’heured’affluence.Soncœurseserralégèrementquandelleserenditcomptequedansmoinsd’uneheureelleaffronteraitlesBrighten,sesvéritablesparentsadoptifs.Etellen’avaittoujourspasdeméthoded’approche.Ellereposalesyeuxsursonbeau-père.–Tusais,ilsefaittard.–C’estvrai,tuvastetransformerencitrouillesijamaisjeneteramènepasaucamp.IlsignalafacturettedecartedecréditqueKylieavaitdéjàdemandéàlaserveused’apporter.D’unseulcoup,lestroisCocasqu’elleavaitavalésparpurenervositéluititillèrentlavessie.–Ilfautquej’ailleauxtoilettesavantquel’onneparte!–Vas-y,j’aiuncoupdefilprofessionnelàpasser,detoutefaçon.Quandellepritlechemindestoilettes,Lucasserembrunit.Ohnon,songea-t-elle,quepouvait-ilse
passerauxW.-C.?D’accord,beaucoupdechosespouvaientarriver.Mariopouvaitarriver.Maiselledevaitfairepipi.Chris et Lucasmurmurèrent à leur table, puis le premier se leva et la devança en direction des
toilettes.Elleespéraitqu’ilsavaitqu’ilnel’accompagneraitpasàl’intérieur.Avecsavessietimide,ellen’iraitjamaisjusqu’aubout.Elleletrouvaappuyéàlaportedestoilettespourhommes.Commes’ilavaitl’intentiondemonter
la garde et d’écouter. Et rien que le fait de savoir qu’il pourrait l’entendre faire pipi rendraitjustementcelaimpossible.–Faiscequetuasàfaireetsors,lançaChris,commeunesorted’agentspécialsérieux.–Promis,réponditKylie.
À la minute où la porte se referma, quelqu’un mit une étrange musique cajun dans l’une descabines.Chacunsesgoûts,sedit-elle.Finalement,ellecommençaitàapprécierlerythmeendiablédelamusique,quandelleentenditun
bruit.Ellelevalesyeuxetvitdeuxmainsquiagrippaientlehautdelacabine.Puisunpiedapparut:quelqu’ungrimpait.Mince.Iln’yavaitriendepirequedevousfairesurprendreentraindefairepipi,accroupieau-dessusde
lacuvettedesW.-C.alorsquevousdevezaffronterunintrus.Elleserelevad’uncoup,prêteàdéfiercequiallaitdescendre,quoiquecefût.Malheureusement,
ellen’avaitpasréussiàarrêtercomplètementleflux.Ellecompritimmédiatementqu’elles’étaittrompée.Si,ilyavaitpire.Sefairesurprendreavecdu
pipiquidégoulinaitlelongdevotrejambe,parlapresque-fiancéedutypequevousaimiezencore.–Quefais-tuici?lançaKylied’untonsec,sachantquemontrersapeuràunloup-garoupouvaitla
desservir.–Çanesevoitpas?J’étaiscurieuse.–Demafaçondefairepipi?Ellepartitd’unrirerailleur.–Detoi!Doutantquelafilleluisauteàlagorge–etsic’était lecas,Kylienevoulaitpasmouriravecde
l’urine dégoulinant le long de sa jambe– elle arracha des feuilles de papier toilette et s’essuya lacuisse.Culotteremontée,jeanattaché,elleaffrontaMoniqueetdécidadesedébarrasserd’elle.–Tudevraissavoirqu’àtoutmomentunvampirepeutdéboulerici.Sij’étaistoi,jemebarreraisà
touteallure.Moniquearquaunsourcil.–Alorscommeça,Lucasnet’apasenseignéletrucsecretpouraffronterlesvampiresindiscrets,
hein?Justeunpeudezarico,etleursuperouïedevientHS.Kylieserenfrogna.Non,elleneconnaissaitpascetruc,etelleétaitunpeufâchéequeLucasnele
luiaitpasappris.Maispourquoil’aurait-ilfait?Lescachotteries,c’étaitsaspécialité.–Queveux-tuaujuste,Monique?demandaKylie.Celle-cihaussalesépaules.–Jetel’aidit.Jesuiscurieuse.Sais-tuquedenombreuxprétendantsontdemandémamainàmon
père?Etleveinardquemonpapaafiniparchoisirpourmesupportertoutesavieneveutmêmepasdemoi!Kylie perçut le ressentiment dans sa voix. Mais, curieusement celui-ci semblait dû au mariage
arrangéquiluiétaitimposéplutôtqu’àlaréticencedeLucasàs’engagerjusqu’aubout.Maislapartie«LucasneveutpasdeMonique»n’avaitpaséchappéàKylie.Illeluiavaitconfié,Frederickaaussi,maisl’entendredelabouchedel’intéresséemême,quec’étaitagréable!–Donc,maintenanttuveuxt’enprendreàmoi,hein?–Non.ElleplissalefrontetsemitàvérifierlaconfigurationdeKylie.Celle-citournalatêteetessayade
lamodifier,maismanifestement,ellenefutpasassezrapide.–Waouh,c’estbizarre!Tuesquoiaujuste?–Unmystère,réponditKylie,etseretrouverdansunecabineavecMoniqueéveilladeplusenplus
sa méfiance – parce que c’était précisément ce que tous les caméléons redoutaient : se faire
remarquer,attirerl’attentionsurleurrace.Çatedérangeraitdereculer?demanda-t-elle.Monique fitmachinearrièred’unpas traînantetdéverrouilla laportede lacabine,enpassant la
mainderrièreellesansjamaisquitterKyliedesyeux.–Es-tusûrequetun’aspasdetumeuraucerveau?–Cedoitêtreça,réponditKylieenluifaisantsignedereculerencore.Maislafilles’avançad’unpas.– On raconte que tu es une protectrice, aussi. Et à la cérémonie, on m’a dit que tu avais une
configurationdeloup-garou.Commentas-turéussià…?Kylieseglissadevantellepoursortirdestoilettesetallaselaverlesmains.Elleavaitbeaunepas
vouloirypenser,sonespritseremémoraitlebaiserqu’elleavaitvuLucaséchangeravecMonique.–Tuestoujoursencolèrecontrelui?Jesuissûrequetuesfurieuse!Kylies’acharnasurledistributeurdesavon.Quandellevitlerefletduloup-garoudanslemiroir,
ellefutdenouveaufrappéeparlabeautédeMonique.Sesyeuxnoisetteétaientencadrésdelongscilsnoirsassortisàsescheveuxbruns.Ses lèvresétaientpulpeusescommecellesdesactricescélèbres.Ouais,elleavaitunjolivisagequiallaitparfaitementavecsoncorpsbienroulé.Ensefrottantlesmains,Kylielança:–Siçanetedérangepas,jenecroispasquecesoitunsujetdontj’aieenviedeparleravectoi.–Àtaplace,jem’inonderaisdequestions.ElleinclinalatêtedecôtéetscrutalerefletdeKylie,commepouressayerdelacomprendre.–Commetun’espascurieuse,celasignifiequetulecroisquandilt’aaffirméquel’onnes’était
pastripotéstouslesdeux,déclaraMonique.Vas-y,pose-moilaquestion.UnedouleurviveenvahitKylie.–Tuasdéjàditqu’ilnevoulaitpasdetoi.–Peut-êtreque j’entendaispar-làqu’ilnedésiraitpassemarier.Mais tuconnais lesgarçons, ils
veulenttoujoursd’autrestrucs.Kylieselavalesmains.Puiss’adressaaurefletdeMoniquedanslemiroir.–Jelecrois.Unpointc’esttout.Lesmotssortirentdesabouchesanslamoindrehésitation.Elleenfutmêmeunpeusurprise.–Alors,pourquoies-tutoujoursencolèrecontrelui?D’aprèsClara,tunelecalculesmêmepas.
Ondiraitunchienbattu.Kylieattrapadesserviettesenpapier.–Permets-moidemerépéter:jenetiensvraimentpasàdiscuterdecelaavectoi.MoniquesecoualatêtecommesilecomportementdeKylieladéconcertait.– Il lui en a fallu du courage, pour faire ce qu’il a fait. Pour rompre ses fiançailles. Pour tout
risquer.Tulesais,n’est-cepas?Celle-cineréponditpas.Ellefermalesyeuxunesecondeetauraitbienvoulunepasentendrecela.–Sapropremeuteenvisagedelebannir,poursuivitMonique.S’ilnepeutpasintégrerceConseil,
ilauratoutperdu.Sonpèrel’apratiquementrenié.Ilparaîtquelesanciensontorganiséuneréunionpourdiscuterdesesactes.Monpèresedemandeencores’ilnevapasmettresatêteàprix.Kylieseretournaetlaregardafixement.–Ettucompteslelaisserfaire?–Lelaisserfaire?Jeluiaiditquej’étaisraviedeneplusmemarieraveclui,maismesparoles
n’ontaucuneimportancepourmonpère.CommeLucas,jesuiscenséesuivrelesrègles.C’estdrôle,ilafalluqu’ilrompenosfiançaillespourquejememetteàappréciercetype.Moniqueserapprochalégèrement.
–Traite-moideromantique,maisjetrouvecelaplutôttristequetuneveuillespasdeluiaprèscequ’ilafait.Maistunelegarderaispastrèstrèslongtemps.L’espérancedevied’unloupsolitaireesttrèscourte.Soittuappartiensàunemeute,soittouslesloupsaffamésenchasseteconsidèrentcommeunmenugibier.Laportedestoilettess’ouvritàgrandfracas.Leloupsolitairefitirruption,prêtàtuer.Quandses
yeuxseposèrentsurMonique,sonagressivitésetassa,maisileutl’airdeplusenplusmauvais.–Quefiches-tuici?Moniquehaussalesépaules.–Quandunefilleaenviedefairepipi,ellevafairepipi.Ellepassadevantluisanslamoindrehonteetsortit.–Quelaviesoitbellepourtoi,Lucas.Ilnelaregardamêmepaspartir.IlfixaitKylie,lacaressantpresqueduregard.–Jesuisdésolé,ellen’avaitpasledroitde…–Ellen’arienfait.Kyliejetalesserviettesenpapierdanslapoubelle.–Tudevraisluicouriraprès.Accepterd’allerjusqu’auboutdesfiançailles.–Quoi?Illaregardafixement,commesielleavaitperdulatête.–Tum’asbienentendu,insista-t-elle.Ilsecoualatête.–Tunelepensespas.–Si,jelepense.Commentpourrait-elleresterlesbrascroisésàleregardertoutperdre?Regardersapropremeute
lepousserdehors,ensachantquec’étaitàcaused’elle?–Tuesjusteencolèrecontremoi.–Oui,tuascomplètementraison!Jesuistoujoursfurieusecontretoi.Deslarmesemplirentsesyeux.–Tum’astrahie.Çafaittellementmaldesavoirquechaquefoisquetumelaissais,tuallaislavoir.
Maisveux-tuquejetedisecontrequijesuisleplusencolère?Contremoi.Jesavaisdepuistoujourscomment cela se terminerait. Que je ne sois pas un loup-garou aurait fini par détruire toutes noschances.–Jememoquebiendecequetues!grogna-t-il.–Tunedevraispas!Parcequeleprixquetuvasdevoirpayeresttropélevé.Ellevitladouleurapparaîtredanssesyeux.–Mêmesi tunem’avaispas trahie, jene te laisseraispas toutabandonner.C’est terminé,Lucas,
accepte-leetnefichepastavieenl’airàcausedemoi.La tête haute, elle sortit.Mais son cœur était comme les serviettes qu’elle venait de jeter – tout
déchiquetéetentortillé.
KylieregardaPerry–toujourssoussaformedefaucon–suivrelavoituredesonbeau-pèrequandils rentrèrent à Shadow Falls. Ce dernier évoqua leur projet de randonnée. Quand il ralentit pourtourner dans le parking de Shadow Falls, elle constata que la Cadillac métallisée devant eux,clignotantallumé,segaraitaussi.Lesvitres teintéesl’empêchèrentdevoirquiétaitauvolant,maisellesedemandasicen’étaientpaslesBrighten.
Ellecommençaàavoirdespalpitations.Ellenesavaittoujourspasquoidire.Soncœurnecessaitdefaireéchoàladouleurqu’elleavaitressentieenparlantàLucas,maiselleavaitbesoindechangerde vitesse dans sa tête, à présent. Malheureusement, elle avait bien trop de préoccupations pourpouvoirseconsacreràuneseuled’entreelles.Ellejetauncoupd’œilàsamontre.13h40.C’étaitpeut-êtreeux,s’ilsétaientdugenreàarriveren
avance.Sonbeau-pèreénuméraitdésormaislematérieldecampingqu’illeurfaudrait,elleréalisaquece
seraitvraimentbizarres’ildevaitrencontrerlesBrighten.Celalespousseraitàexpliquerdestasdechoses.Etcelafiniraitparfairedelapeineàsonbeau-père,cequ’ellenesouhaitaitpas.Lavoituremétalliséesegarasurunemplacement«visiteur»dansleparking.Sonpèrestationna
deux places plus loin.Détachant sa ceinture avantmême qu’il ne puisse couper lemoteur, elle sepenchaetdéposaunbaisersursajoue.–Mercipourledéjeuner.Jevaisrentrertouteseule!–Passivite.J’ailetempsdet’accompagner.J’aienviedeprofiterdechaquesecondeavectoi.
–D’accord,réponditKylie,quelquepeuinquiète.Ehbien,ilfaudrafaireviteparcequej’aienviede…fairepipi.–Tuyesalléeaurestaurant,observasonbeau-père.–Minusculevessie,répliqua-t-elle.Elledescenditdelavoitured’uncoup,regardarapidementl’autrevéhicule,vitlaportièrepassager
s’ouvrirpuis…–Ohmince!Cen’étaitpaslesBrighten.Etcommeelleleregrettait!Samèreet…Elleregarda,horrifiée,latêtedeJohnapparaîtresurl’autresiège.–Kylie?criasamèred’unevoixsévère.Ellesetournaverssonbeau-père.–Tudevraispartiravant…avantquecelanedégénère.– C’est bon, répondit celui-ci, gêné. Tu sais, nous pouvons nous montrer courtois l’un envers
l’autre.Lapostureetl’expressiondesamèrequandellesedirigeaverslavoitured’unpaslourdn’avaient
pasl’airenaccordavecladéclarationde«courtoisie»desonbeau-père.Oh!non,Kylien’étaitpasd’humeuràsupporterlesdramesdesesparentsencemoment.Mais quand elle se rapprocha, elle constata que sa mère, les cheveux décoiffés, les vêtements
froissésetlesyeuxinjectésdesang,n’adressaitpassonairdepitbullàsonbeau-père,maisàelle.OK…Dequeldrames’agissait-il?Celuidesesparents?Ou…–Est-cevrai?fitsamèred’untonbrusque.Kylie se souvint aussitôt que celle-ci venait de rentrer d’Angleterre – ce qui expliquait son
apparence,maispascequin’allaitpas.Elleinterrogeasonbeau-pèreduregardpoursavoirs’ilavaitlamoindreidéedecequesamère
racontait.Maisilsemblaittoutaussiperplexe.
–Dequoituparles?demandaKylie.Johnlesrejoignit.Iln’avaitpasl’airfroissénifatiguéparledécalagehoraire,maissaprésencefit
naîtreunmauvaispressentimentenelle.–Tuasappelétonpèrepourcela,maispasmoi?demandasamère.KylievitHolidayetBurnettsortirprécipitammentdubureauenpensantsûrementquecelaallaitde
nouveaufinirenmêléegénérale.–Jeneluiaipastéléphoné.Qu’est-cequeturacontes?–T’es-tuserviedelacartedecréditquejet’aidonnée?Kylieaccusalecoup.–Es-tuenceinte?lâchadirectementsamère.Kylieenrestabouchebée.Sonbeau-pèrejetaàKylieunregardnoiretsévère.–Elleattendunbébé?Nousnepourronspaspartirenrandonnée,ducoup!–In-cro-ya-ble!J’ycroiscarrémentpas!fitsamèrequibouillonnaitdecolère.Tuapprendsqueta
filleestenceinte,ettunepensesqu’àtarando?–Non…j’étaissouslechoc.Iln’étaitpasleseul.–Stop!lançaKylie.–Réponds-moi,jeunefille,exigeasamère.–Non,jenesuispasenceinte.Jen’aimêmejamais…jesuis…Jesuisencorevierge!Cesmotsrestèrentsurleboutdesalangue,ellen’arrivaitpasàlescracher.–Alors,pourquoiachetertroistestsdegrossesse?–Tuasachetétroistestsdegrossesse?répétasonbeau-père.KylieremarquasoudainuneautrevoituregaréeàcôtédelaCadillacdeJohn.Levieuxcoupleavait
levisagetournéetassistaitàlascène.LesBrighten.Charmant!Justecharmant!Sesgenouxsemirentàlapicoter,signalantsondésirdedisparaître.Pasmaintenant,pasmaintenant!–Respireunboncoupetdétends-toi.Lavoixsurgit,accompagnéed’unfroidglacialfamilier.Kylieregardaautourd’elleetnelevitpas,maiselleputl’entendre.–Papa?–Jesuislà.Çavaaller.Jetelepromets.–Tesparentsvontmeprendrepourunetraînée.–Non. Ils vont t’adorer.Tu verras.Tu vas les impressionner et bientôt, très bientôt, nous serons
ensemble.Kyliehaleta.–Vais-jemourir?Papa?Daniel?Luietsonfroidfamilieravaientdisparu.Elleaspiraunebonneboufféed’air.Àprésent,enplusdes’inquiéterdesamortéventuelleetde
convaincretoutlemondequ’ellen’étaitpasenceinte,elledevaitsepréoccuperdesBrightenetdeleuramourpourelle.Parceques’ilsnel’aimaientpas,celaferaitsansaucundoutedelapeineàsonbeau-père.Ohzut!Etsielledisparaissait,toutsimplement?
Danielavait raison,dumoinssur le faitque tout iraitbien.Maiselledevaitencoreaffronter lesBrighten. Elle fut soulagée de voir que Holiday les avait pris par le bras et les accompagnait aubureau.Ouf,sesparentsnesavaientmêmepasquiilsétaient.Son beau-père s’en alla. Sa mère n’était pas tout à fait remise, mais plus calme. Holiday avait
expliquétoutecetteconfusionavecles testsdegrossessedefaçonbienplusrationnellequecelanes’était réellement passé. Avait prétendu qu’ils étaient pour elle, qu’elle avait oublié son porte-monnaie, queKylie avait eu la gentillesse de lui proposer sa carte de crédit, et qu’elle avait déjàenvoyéunchèqueàsamère.Etpatatietpatata.Oui,Holidayavaitmenti,maissonmensongeavaittoutarrangé.Sa mère expliqua qu’à son retour elle avait appris que la banque avait appelé, pensant que les
opérations étaient frauduleuses. Parce que la carte n’avait jamais été utilisée et que les paiementsavaientétéeffectuésàFallen,pasàHouston.Voulants’assurerquesacarten’avaitpasétévolée,elleappeladonc ledrugstorepourvérifier l’achat.Onl’informaalorsquecelacorrespondaitaux troistestsdegrossesseetquel’acheteuseétaitunecertaineKylieGalen.Kylieécoutaquelquesminutes samère, feignantd’être intéresséepar sesdéliresbizarroïdes sur
l’Angleterre.Enfin,samèreluiavouaêtretropcrevéeetnepaspouvoirresterpluslongtemps.Ellel’embrassasurlefront,luiassuraqu’elleétaitsoulagéequ’ellenesoitpasenceinte,ets’enallaavecJohn.Celui-ciavaitàpeinealignédeuxmotsdepuisleurarrivée.Toutefois,quandl’hommepassaunbrasautourdesépaulesdesamère,etembrassadélicatementsonfrontenluidisantqu’ellepourraitdormirpendantqu’ilconduirait,Kylieressentitunepointedeculpabilitédenepasl’aimer.Peut-êtreavait-ellebesoinderajustersonattitudevis-à-visdeJohn?Parceques’ilrendaitsamère
heureuse,celaluisuffisait.Menteuse, semblait dire son cœur en loupant quelques battements. Elle n’aimait pas John.Mais
peut-être devrait-elle travailler cela.Essayer de l’apprécier.Cela lui semblait impossible. Pourtant,ces derniers temps, tant de choses dans sa vie lui avaient paru impossibles – comme sa mortimminenteoucommelaissertomberLucas–qu’elledevaitpeut-êtreredoublerd’efforts.Maintenant,c’étaitautourdesBrighten.Ellefitunehaltejusteavantd’ouvrirlaporte,mentalement
épuisée, et pensa à sa journée qui avait entamé une spirale vers le bas, depuis queMiranda avaittransforméNikkienkangourouacnéique.C’étaitassurémentl’unedesesjournéeslesplusbizarres.Carrant lesépaules,déterminéeàgérercommeunchefsarencontreavec lesparentsadoptifsde
Daniel,Kyliedécidaqu’aprèscettevisite,elleretourneraitdanssonbungalowoùellecraqueraitunboncoup,oumangeraitbeaucoupdechocolat.Lesdeux,peut-être.Elle se rappela la promesse de son père, que les Brighten l’adoreraient, et si elle lui faisait
confiance de tout son cœur, elle ne pouvait s’empêcher de se faire du souci.Mais bon, peut-êtreseraient-ilstellementheureuxd’avoirunepetite-fillequecelaleurseraitbienégaldepenserqu’ellecouchaitàdroiteàgaucheetqu’elleétaitsûrementenceinte.Quoi qu’il arrive ici,Kylie saurait le gérer.Elle pouvait presque entendreNana, sa grand-mère
maternelle,chuchoterdepuisl’oréeduparadis:MapetiteKyliegrandit.Kylieentradanslebureau.Holidayseruaverselle.–BurnettaserviduthéauxBrightendanslasalledeconférence.Ilaemportél’épéechezmoietl’a
enferméedansunplacard…Espéronsque…Jeleuraiégalementexpliquétoutecettehistoiredetestsdegrossesse.Holidaysemorditlalèvred’inquiétude.
–Oh,Kyliejesuisvraimentdésolée!Toutcelaestdemafaute!C’estmoiquit’aimisedanscepétrin!–C’estbon,réponditKylie.Holidaylaserrarapidementdanssesbraspourl’apaiser.–Tuvasvraimentbien?Kylieinspira.–Unpeunerveuse,maisoui,çava.–Veux-tuquejevienneavectoi?Kylieréfléchitquelquessecondes.–Non…jecroisquejevaispouvoirmedébrouillertouteseule.Holidaysoupira.–Tugrandis.Kylieregardafixementlafée.–Jepourraisjurerquejeviensd’entendremagrand-mèremedirelamêmechose!–C’estvrai,ditHoliday,elleétaitjustelà.Kyliesefenditd’unlargesourire.–Vraiment?Elleopina.–Ellepassetevoirauxmomentslesplusétranges.KyliesentitsonamourpourNanas’agiterenelle.–Dis-luique je l’aime, lança-t-elle,etellepartit rencontrer lesdeuxpersonnesquiavaientélevé
sonpèreetsûrementcontribuéàfairedeluilegrandhommeetfantômequ’ilétaitdevenu.
LorsqueKylieentra,Burnettseleva.–Jevaisvouslaissertouslestrois.Quandilpassadevantelle,ilposalamainsursonépaule,etlaserraaffectueusement.Lemessage
était clair : «Vas-y,ma belle, à toi ! » Elle se dit qu’elle avait beaucoup de chance d’être si bienentourée.Lorsqu’ellefutseulefaceauxBrighten,soncœursemitàbattreplusvite.M. Brighten avait un début de calvitie, des yeux gris tirant sur le brun et un visage aimable.
MmeBrightenarboraitunetrèsbellecheveluregriseépaisse.Elleparaissaitdouce.Rondelette,unefiguresympathique.Commequelqu’unquel’onchoisiraitaubeaumilieud’unefoulepourjouerlerôledelagrand-
mèreaimante.–Bonjour, lançaKylie en souriant.Elle avançad’unpasdans lapièceetdécidadeclarifierune
bonnefoispourtoutesasituation.J’aimeraisjusteconfirmerquejenesuispasenceinte.
–Tondirecteurnousl’aexpliqué,réponditMmeBrightenencontinuantdelafixer.– Je voudrais également dire que… je sais que vous devez trouvermamère etmon beau-père
cinglésaprèslascèneduparking,mais…Mais…ehbien,parfoisilssontunpeufous,maiscesontdesgensbien.Ilsm’aimenttouslesdeux.L’émotionluiserralagorgeetelledéglutit.Mme etM. Brighten opinèrent de nouveau. Une sorte d’embarras étrange emplit la pièce,mais
Kylienelelaissapass’installer.Elledésiraittellementquecelasepassebien.Pasuniquementpoursonpère,maispourelleaussi.– Je suis désolée de te dévisager comme ça, déclara enfin Mme Brighten, mais tu ressembles
tellementàtonpapa.C’eststupéfiant!Kyliesouritdenouveau,d’unsourirecettefoiscomplètementsincère.Elleallas’asseoirenface
d’euxàtable.–Jesais,répondit-elle.–Tuasvudesphotos?demandaMmeBrighten.Oui,sonvraipèreetsatantemelesontapportéesquandilssesontfaitpasserpourvous.Bon,elle
devraitmentir.–Mamèreavaitquelquesphotosdelui.Puisellesesouvintquecelle-ciavaitconservélanécrologieoùfiguraitlaphotodeDaniel.UnairmécontentapparutsurlevisagedeMmeBrighten.– Je ne comprends pas pourquoi elle n’a rien dit à ton sujet. Nous aurions pu… nous aurions
tellementaimétevoirgrandir.Celanousauraitaidés…àsupporterlamortdetonpère.KylierevitsamèreluiconfierquelesBrightenladétesteraientdeleleuravoircaché.–Ellesaitquec’étaituneerreur,expliquaKylie.Maispoursadéfense,elleétaitjeune,enceinteet
terrorisée.Parlasuite,monbeau-pèreavoulum’élevercommesaproprefille…Ilavaittort,certes,maisilsessayaientsimplementdefairedumieuxpossible.MmeBrightenopina.
–J’imaginequec’étaitdifficile.Kyliesedétenditunpeu.–J’espèrequevousluipardonnerez.Parcequec’estunemamanvraimentgéniale.–J’aimeraisdiscuteravecelle.Kyliefutprisedecourt.–Euh…oui,biensûr,jeluienparlerai…Ellepriapourquesamèresoitd’accord.Maiscommelaconversationseraitdifficile!DeslarmesenvahirentlesyeuxdeMmeBrighten.–J’aiapportéd’autresphotos,situveuxlesvoir.–J’adorerais,réponditKylie.Merci.Lavieilledamesortitunpetitalbumd’ungrossacbeige.AlorsqueKyliefeuilletaitlespages,elle
reconnutcertainsclichés.Sonvraigrand-pères’étaitfaufiléendoucechezlesBrightenetavaitfaitdesmontages-photographiquesafindeleurressembler.Enrevanche,elledécouvritdesphotosdesonpèrequ’elleneconnaissaitpasetsentitl’émotionl’envahir.–Situveux,tupeuxlesgarder,proposaMmeBrighten.Jelesaifaitrefairepourtoi.Kyliesourit.–Merci,jevaisenprendresoin,promis!M.Brightens’assitbiendroit.–Tuaslesmêmesréactionsquetonpère,ilétaittellement…poli.–Oui,acquiesçaMmeBrighten.C’étaitungarçonsiparfait.Undouxesprit.Unpeutimideparfois,
mais…–Jepeuxl’être,moiaussi,déclaraKylie.Jenesupportepasquandonmedemandedemeleveret
deparleroudefaireunexposéenclasse.Ouquandtoutlemonderegardemaconfigurationbizarre.Oupensequejesuisenceinte.MmeBrightensourit.–Iln’aimaitvraimentpasl’école.Ilatoujoursditnepass’ysentiràsaplace.–C’estdingue!Exactementcequejeressens!s’exclamaKylie.–Maiscelaneluiapasposédeproblème.Enfinsi,unefois,lorsdesadernièreannéedelycée.Ily
avaitungarçon,Timmy.Unjourenrentrantdel’école,Danielesttombésurdestypesplusâgésquiavaientdécidéd’embêtercegarçon–delemaltraiter,même.Ilsdevaientêtresix,etDanielestdevenufou.Onnesaittoujourspascommentilafait,maisilssesonttousretrouvésàsaignerdunez,etavecdesyeuxaubeurrenoir!Etnotrepetitbonhommesansuneseuleégratignure!Kylieécoutal’histoire,avided’ensavoirplussurunpèrequ’elleconnaissaitsipeu.–L’écolel’arenvoyé,poursuivitMmeBrighten,maisquandlesparentsdeTimmyl’ontappris,ils
se sont rendus à notre chaîne localed’informations continues et ont fait non seulement savoir queDanielavaitinjustementétérenvoyé,maisqu’ilfallaitplutôtletraiterenhéros.Etlespetitsdursonteudesproblèmes.L’établissementaétécontraintdeleverl’exclusion.Biensûr, toutecetteattentionl’agêné.LachaîneTVluiamêmeremisuntrophée,qu’ils’estempresséd’alleroffriràTimmy.Iladéclaréquec’étaitlui,levéritablehéros,quiavaitdûsupportercesgrosdurstoutescesannées.Kylieéprouvade la fiertépoursonpère. Ilavaitétéunprotecteurcommeelle,etcommeelle il
n’enrevendiquaitpaslemérite.Pourquoiétait-ilpartisitôt?–Maistusaisqu’aprèslebac,ils’estplusoumoinstrouvé.Enl’occurrence,unjour,ilestrevenu
d’unvoyageetm’aannoncéqu’ilavaitdécouvertquiilétait.Kylie revitsonpère lui raconterqu’ilavait rencontréunvieillardetquecelui-ci luiavaitconfié
qu’iln’étaitpashumain.Ellesedemandas’ils’agissaitdecevoyage-là.
–Je luiai répondu,poursuivitMmeBrighten,que jesavaisdéjàqui ilétait.Quec’étaituneâmedouceetcharitable.EllefixaKylie.–J’aivulamêmechoseentoi.Commesi…tuavaisunespritmagiquedonttrèspeudepersonnes
sontdotées.Elletenditlebrasdel’autrecôtédelatableetposasamainsurcelledeKylie.Àcetinstant,Kylie
compritcombienilseraitfaciled’aimercesgens,etquellechancesonpèreavaiteud’êtreélevéparcecouple-là.
Ilétaitpresque17heuresquandBurnettetHoliday,maindanslamaincommedeuxinséparables,raccompagnèrentKyliedanssonbungalow.Dellaattendaitàl’extérieurpourprendrelarelève.–Tuessûrequeçavaaller?s’enquitHoliday.–Oui.Et, étonnamment, Kylie le pensait. Oui, elle avait toujours une folle envie de chocolat pour
contrebalancercettejournéededingue,etoui,soncœurétaitbriséàtoutjamaisàcausedeLucas;maiselleiraitbien.Ensongeantàsonautrecoloc,Kyliedemanda:–As-tuparléavecMirandadel’épisode«Nikki»?–Oui, répondit Holiday, dont les yeux s’obscurcirent, bien que je ne lui aie pas encore trouvé
d’autrepunition.Kylieneputs’empêcherdemettresongraindesel:–JeneveuxpasexcuserMiranda,maisNikkis’estmontréeunpeulourde,non?Jel’aimiseen
garde,maisellenem’apasécoutée.– Je sais, dit Holiday, Nikki a eu tort, mais Miranda ne peut pas transformer les gens en
kangourousquandcelaluichante!–Vraiment?Çaaeu l’airde teplairepourtant,quand tuasapprisqu’ellem’avait fait ça, lança
Burnett,sarcastique.Holidayhoqueta.–C’étaitdrôle.Ellelegratifiad’unsourirediabolique.Kylielesregardas’enalleravantderentrer.ElletrouvaDellaassiseàlatabledelacuisine,entrain
de siroter un verre de sang, desmanuels scolaires ouverts devant elle. La petite vamp prenait sesdevoirstrèsausérieux.Ellelevalesyeux.–Jesuisd’accordavecHoliday.C’étaitdrôle,quandMirandaatransforméBurnettenkangourou!Kylieselaissatombersurunechaise.–Oùest-elle?Dellarouladesyeux.– Partie avec Perry, faire « presque l’amour » pour se réconcilier – ses mots, pas les miens.
Personnellement,jemeseraisbienpasséedelesavoir!Maisjedoisavouerquejemedemandecequeveutdire«presquel’amour»aujuste.Maisbon,Perrydoitsûrementluiléchouillerleslobesdesoreilles,etjen’aivraimentpasenvied’entendreparlerdeça.Unefoisdeplus.Kyliegloussa.–Quandonypense, tousces trucssexuelssont…commentdire…mêmese roulerdespelles…
avoirlalanguedequelqu’undanssabouche…c’estdégueulasse.
–Saufsic’esttoiquilefais,ditDella.Etlà,cen’estpasdégoûtant.C’estpresquemagique.Sesmotssortirentcommedansunrêve.Kylieétaitsûrequ’ellepensaitàSteve.KylieserappelaavoirembrasséLucasetmêmefaitplus,lanuitdeleurretourducimetière.Oui,
celaavaitétémagique.Maistoutecettemagieavaitdisparuàprésent.PlusdeLucas.–Oui,c’estvrai,cen’estplusdégoûtantquandc’estnous.Elleserelevad’unbondetallajeteruncoupd’œildansleminusculegarde-manger.–Riendechocolatédanscettecuisine?Riendutout?–Jecroisqu’ilyadusiropdechocolataufrigo.Maisnousn’avonspasdelait.Entoutcas,jene
l’aipasbu!Çadoitêtrelasorcière.Kylietrouvalesiropdanslefrigo.Oh!zut,nécessitéfaisaitloi!Ellefitsortirunpeudechocolat
sursonindexetfourraledoigtdanssabouche.–Alorscommeça,laréunionaveclesBrightennes’estpasbienpassée?demandaDella.–Si,çaaété,marmonnaKylie,enléchantsondoigt.–Alors, pourquoi lèches-tu le chocolat sur ton doigt comme si c’était duwhisky ?Attends ! Je
sais!J’aientenduparlerdufiascoavectonbeau-pèreettamère–toutecettehistoiredegrossesse!Hilarant!Dellaposasescoudessurlatableetéclataderire.Kyliefronçalessourcils.–Pashilarantdutout.Commentes-tuaucourant?Dellahaussalesépaules,l’airunpeucoupabled’avoirmislesujetsurletapis.–Quelqu’unatoutentendu.Ettoutlemondeenaparlé.Désolée.Ellefitunegrimaced’excuse.–Pourquoidois-jesanscesseêtrelasourcederagotsparici?râla-t-elle.Ellepenchalatêteenarrièreetbutdirectementàlabouteille.–Pourlecoup,c’estdégoûtant,gloussaDella.Kylieseléchaleslèvres.–Jen’aipastouchéleflaconavecmabouche.J’aijusteversélechocolatdedans.–Etsurtonmenton.–Désolée,jesuisdésespérée,avoua-t-elleens’essuyantaveclamain.Elleattrapaunboletunecuillère,retournaàtableetvidaunedemi-tasseduchocolatdanssonbol.–Ahoui?Vraimentdésespérée.–Moniquem’asuiviejusquedanslestoilettes.–Quoi?Quiça?–Monique.LaMoniquedeLucas.ElleestentréeparforcedanslesW.-C.durestaurantavecmoi.–Ohnon!Vousvousêtesbagarréesouquoi?Kylieléchalacuillère.–Non.Jemesuisjustefaitpipidessus.Ellemituneautrecuilleréedechocolatdanssabouche.Dellasoupira.–Tuvasbien?–Çaira,oui,quandj’aurailiquidélabouteille.Dellasouritàmoitié.–Sij’étaisunevéritableamie,jet’enempêcherais.Kyliesecoualatête.–Situétaisunevéritableamie,tum’aideraisàlafinir.–Mince!Pourquoipas?Ellerepoussasonverredesang.
–Allez,donne.Kyliearquaunsourcil.–Pourdevrai?–Oui.Dellapoussasesmanuelsscolairesdecôté.–Auxchiotteslesdevoirs,soûlons-nousauchocolat!Moinonplus,jeneseraispascontreunpetit
remontant.Kylie vit le chagrin se refléter dans les yeux de son amie. Elle lui versa une bonne rasade de
chocolat.–Ques’est-ilvraimentpasséenmonabsence,Della?
Lavampfixasoncocktaildesangetchocolat.Ellefittournerleliquidedansleverre,enregardantlesingrédientssemélanger.–J’aiposéunlapinàStevelepremiersoiretjesuisalléevoirLee.CelanesurpritpasKylie,ellesavaitquesonamieétaitencoreaccroàLee,maiscelan’expliquait
paspourquoielleavaitdes suçonsdeSteve.Etquelquechose luidisaitqu’iln’yavaitpasqueLeedansl’histoire.Maiségalementunmétamorpheauxjoliesfesses.–Et?demandaKylieenreplongeantsacuillèredanssonchocolat.–Etilestsortiavecsanouvellefiancée.Elleportaleverreàseslèvresetlesirota.–Hé,c’estvraimenttropbon,cettesaleté!–Oui.KylieattenditqueDellapoursuive.Ellen’eutpasàpatienterlongtemps.–Ill’aemmenéedansunrestaurantchinois,etjelesaisuivis.Deslarmesemplirentsesyeux.Kylieposalamainsurlasienne.Dellalaretira.–Ilsm’ontremarquée…Jemesuissentietellementidiote...J’étaishypergênée.Puis,telunsauveur,
Steve a débarqué. Il m’avait suivie. Il m’a empêchée de me ridiculiser totalement. Il a simulé unrendez-vousavecmoietm’aembrasséedevanteux.Commesionétaitunsupercouplequis’aimaitardemment.Kylieprituneautrecuilleréedechocolat.–Etcebaiserétaittellementgénialquevousvousêtestripotésensuite?–Non.Enfinoui.Kyliebraquasacuillèresursonamie.–Cequiveutdire?–Oui,c’étaitbien,maiscelan’apaseulieuavantlelendemain.Dellasepenchaetfronçalessourcils.
–Lamissions’estmalpassée.Jemesuisfaitpoignarder,avoua-t-elle.Kylieenrestabouchebée.–MaisBurnettaaffirméque…–J’aifaitpromettreàStevedeneriendire.Cen’étaitpasmortel.Leproblème,c’estqueStevem’a
sauvé la vie. Pas uniquement au restaurant devant Lee, mais avec les escrocs, puis quand noussommestombéssurdeméchantsloups-garous.Jen’étaispasenformedutout,jen’arrivaispasàmebattre.J’aidétestéça…Ilnousaréservéunechambredansunhôteletilm’asoignée.Jenesaispascommentc’estarrivé;ilétaitentraindepansermesblessures,etd’unseulcoupnousavonsjouéaudocteur.–Oh!làlà!s’écriaKylie.Alorscommeça,vousavez…–Non,maispresque.Heureusement,nepasconclureauderniermoment,çanetuepersonne.–Quoi?demandaKylie.Dellarouladesyeuxetsefenditd’ungrandsourire.–Siuntypet’affirmequ’ilpeutenmourir,ilment.Etcrois-moi,certainsgarçonsledirontmême
pourculpabiliserlafilleetlapousseràdanserlalambada.Yenaunquiaessayéunefoisavecmoi,avantLee.Jeluiairéponduquej’iraisàsonenterrementetjenesuisplusjamaissortieaveclui.Dellaéclataderire.Kylierougit,maisbon,celan’avaitpasgrandeimportancedevantsacopine.–Alorscommeça,Steveétait...Dellasoupira.–Ilétaitsupermalàl’aise.Jen’auraispasdûlelaisseralleraussiloin.J’étaisjuste…envrac.–Oupeut-êtrequetul’aimesvraiment.Jenedispasquevousauriezdûcoucherensemble,maisce
typeestfoudetoi,etàl’évidencetul’aimesbien.Alors,pourquoiletraites-tucommeunemaladie,àprésent?Dellabutunebonnegorgéedesonsangchocolaté.–Parceque…quandj’aicompriscequiarrivait,jenepensaisplusqu’àunechose:dansunanou
deux,jeseraisdansunautrerestaurantentrainderegarderSteveetsafiancée.Jenepeuxpasrefairecela.Deslarmesemplirentsesyeux.–Maistunesaispascequivasepasser!–Jenesaispassicelanevapassepassernonplus.Dellaattrapalabouteilledesiropetenrajoutadanssonverre.–Voilà,tusaistout.Ettoi,oùenes-tuavecLucas?Kylieremualechocolatdanssonbol.–C’estterminé.LesyeuxdeDellas’écarquillèrent.– Pourquoi ? Monique t’a dit qu’ils avaient couché ensemble ? S’ils ont couché ensemble, on
devraitdemanderàMirandadeluifaireapparaîtrelagalelàoùjepense.–Non,Moniquem’aaffirméqu’ilsn’avaientrienfait.–Alorspourquoiest-ceterminé?Kyliedonnauncoupdecuillèresursonbol.Parcequ’autrement,ilperdraittout.Dellalascruta.–Maisilnet’apastrompée…Kyliesentitlacolèremonter.
– Même s’il n’ont rien fait, c’est tout comme. C’est vrai, il s’était fiancé derrière mon dos,s’énerva-t-elle.D’abordTrey,puismonbeau-pèrequitrompemamère.Ensuite,DereketmaintenantLucas.Pourquoilesgarçonsfont-ilscela?Dellahaussalesépaules.–Aumoins,Lucasn’acouchéavecpersonne.C’esttoutdemêmeunetrahison.Unegrosse.–Cequimemethorsdemoi,c’estquejel’aimeencore.Aupointqu’ellenepouvaitpasresterlesbrascroisésàleregardertoutperdreàcaused’elle.–Maisjesuistellementencolèrecontreluiquejepourrais…–Luidonnerlagale?pouffaDella.–Non,uncoupdepoing!–Alorstudevraispeut-êtrelefaire,ditDellaenbaissantlesyeuxsursonverre.–Fairequoi?– Lui donner un coup de poing. Peut-être que comme ça, tu ne serais plus en colère et que tu
pourraispasseràautrechose.Kyliesecoualatête.–J’aimeraisquecesoitaussisimple.–Çal’estpeut-être.Tunelesauraspastantquetun’auraspasessayé.Valevoir,supercool,puis
défoule-toi!Sérieusement,çateferaitdubien.–CommetoiavecSteve?–Hé,jesuiscommeunebonnemère!Jeneveuxpasquetufassescequejefais,maiscequeje
dis!Ellegloussa.Kyliesecoualatête.–Etenplus,maintenant,c’est…Ellefermalabouchesanstropsavoirsielledésiraitenparler.–C’estquoi?demandaDella.Autantcracherlemorceau.–Cen’estpasuniquementcequ’ilafait.Ilatoutabandonnéquandilarefusédesignerlecontrat
de fiançailles. Il n’intégrera pas le Conseil, sa propre meute est remontée contre lui. Le père deMoniquemenacedelefairetuer.Tôtoutard,ilmedétesterapourcela.–Àmonavis,tuteprendstroplatête.Kylieraclalebolavecsacuillèrepourrécupérerlesderniersvestigesdechocolat.–Etjecroisquel’ondevraitchangerdesujet.Dellayconsentitetrepritsonverre.Ellesgardèrentlesilencequelquesminutes,puisDellapritlaparole.–Avantd’allerchezLeecesoir-là,jesuispasséeàlamaisonoùj’aijouéàlavoyeuse.–Etalors,commentçaallait?demandaKyliequisentaitquecelas’étaitmalpassé.–Bien, si bien que çam’amise hors demoi. Ils jouaient aux échecs, commeunepetite famille
heureuse.Paparacontaitdesblaguesetilsrigolaienttous,jesuissûrequejeneleurmanquemêmepas.Elleregardafixementlatablequelquesminutes.–SiDella, tu leurmanques. Ils essaient justede s’en sortir.As-tudéjà envisagéd’enparler à ta
mèreouàtonbeau-père?
–J’étaisàdeuxdoigtsd’entreretdevidermonsac:«Écoutepapa,jenesuispasuneadodifficileniuneparesseuse,jenemedroguepas,jesuisjusteunvampire.»Kyliesemorditlalèvre.Ellenesavaitpasquoidire.–Jesuisterroriséeàl’idéequ’ilspensentquelavéritéestpireencorequecequ’ilscroient.Kylieauraitbienvoululuiaffirmerquecen’étaitpaslecas,maisellen’enétaitpassûre.–J’aipensél’avoueràmamanaussi,maisjenesaispascommentelleréagirait.Dellahochalatête.–Onsecachesurtoutdeceuxquel’onaime.Triste,non?–Oui.Aumoins,tunetecachespasdumondesurnaturel.–Toinonplus.– Si, de l’URF. Tout le monde ici a vu ma configuration, donc c’est un peu tard pour s’en
préoccuper,maisjesaisquelamajoritédesgenspensentqu’àtoutmomentmatumeuraucerveauvadevenirapparente.Dellalaregardad’unairtriste.–Enréalité,ilsparientlà-dessus.–Super…LorsqueMoniqueestentréedanslestoilettes,j’aiessayédechangermaconfiguration.
Maisjen’aipasétéassezrapide.Elleamêmesortiquelquechose,commequoij’auraisunetumeuraucerveau.Laplupartdessurnaturelsnesaventmêmepasquemonespèceexiste.MêmeHaydencachecequ’ilest,pensa-t-elle.–Alors,ilestpeut-êtretempsdechangercela,suggéraDella.–Changerquoi?–Sortirduplacard.Tu sais,genre« je suisgayet j’assume». Il te faudraitun slogandifférent,
peut-être«jesuisunlézard,etsiçanevousplaîtpas,j’avaleraivotregésier»,gloussaDella.Bon,d’accord,çamériteunpeudeboulot,maistuvoiscequejeveuxdire.–Jeneplaisantepas.– Je sais, etmoi non plus.Hormis le slogan débile, bien sûr. Tu ne peux pas le faire avec des
humains,maisavecdessurnaturels,çadevraitêtrepossible!Kyliepassaledoigtsurlebordduverrepourrécupérerlechocolatetréfléchitauxproposdeson
amie.–Elle a raison, fit la voix dans sa tête. La même que tout à l’heure. Celle qui surgissait aux
momentslespluscurieux.–Quies-tu?marmonnaKylie.Dellaredonnauncoupdanssachaise.–OK,jerepenseàlatumeuraucerveau,maintenant.–Pastoi.LesyeuxdeDellas’agrandirent.–Oh!mince!Ilyaunfantômeparminous?–Non,grommelaKylie,justeunevoix.Dellainclinalatêtedecôté.–Jen’airienentendu.–Là-dedans!Kyliemontrasatêtedudoigt.– As-tu déjà entendu parler de schizophrénie ? demanda Della d’un ton sarcastique – elle la
taquinait,maisKylienetrouvaitpasceladrôle.–Jenesuispasfolle,déclara-t-elle.
Dellasourit.–Situl’étais,jet’aimeraisquandmême!Neserait-cequepourm’avoirapprisquelemélangede
sangetdechocolatestdélicieux.TandisqueDellavidaitsonverre,Kyliepassaenrevuelesmillefaçonsde«sortirduplacard».
Elleavaitchoisipoursaquêtedesauverlesjeunescaméléonsd’unevied’enfermement,maisavantcela,peut-êtreaurait-ilfallus’assurerd’abordqu’ilspuissentfaireleurcomingoutentoutesécurité.Peut-être que Della et cette voix enquiquinante avaient raison. Si elle parvenait à imposer aux
surnaturels de l’accepter pour ce qu’elle était vraiment, les autres caméléons en auraient aussi lecourage.UnpeucommeRosaParksdanscebusdanslesannées1950.Ilfallaitquequelqu’un,uncaméléon,
selèvepourquel’onpuisselesconsidérercommepartieintégrantedumondesurnaturel.Ilsdevaientêtrefiersdequiilsétaient,etnepasavoiràcacherleurvéritablepersonnalité.Instantanément, elle sentitmonterenelleuneémotionqui était à la fois chaleuret confirmation.
C’était saquête, sonnouveaubut, qui rejoignait enpartie l’ancien.Et cela luiparaissait la choseàfaire.Oui,ilneluirestaitplusqu’àtrouvercommentsortirduplacard.Cettenuit-là,latêtecachéesousl’oreiller,ellefutréveilléed’uncoupparlepicotementd’uneautre
présence.Cen’étaitpasuneprésencefroide,cequisignifiaitqueceluiquiétaitlàn’étaitpasunmort.Quandelleouvritlesyeux,unparfumfloralluichatouillal’odorat.Elleremarqualaroserougesursatabledenuit.Uneseulepersonneluilaissaitdesroses.Lucas ? Son cœur chuchota son nom et cela lui fit aussitôtmal. La nuit précédente, elle s’était
allongée sur son lit et avait accepté l’évidence. Le laisser partir.Malgré la peine endurée, elle nepouvaitpaslelaisserdétruiresavieàcaused’elle.Elleretintsonsoufflepourécouter.Était-ilencorelà?Ouétait-ilreparti?Ellevitlerideaublanc
voleterquandunedoucebrisenocturneentra.S’ilétaitparti,ilauraitfermélafenêtre.Ellerefermalesyeux.Peut-êtres’enirait-ilsiellefaisaitsemblantdedormir?–Jesaisquetuesréveillée,fitsavoixgravedanslanuitcalme.–Etjesaisquetunedevraispasêtrelà.Elledéglutitetchassalavagued’émotionsquimontaitenelle.Elleroulasurlecôtéetremontases
genouxcontresapoitrine.Il luifallutencorequelquessecondespourrassemblersoncourageet leregarder.Ellesavaitquecelalaferaitsouffrir.Elleavaitraison.Sescheveuxétaientébouriffésparlevent,commes’ilavaitcouruunsprintetson
regardétaittriste.Unedouleurbruteluitombadessus.Ellesouffraitdesolitude.–Jenepouvaispasdormir,expliqua-t-il.Le silence envahit la pièce. Il se rapprocha. Ses genoux touchèrent le lit. Il s’assit. Le matelas
s’inclina sous sonpoids.Soncœurbattait la chamadeau souvenirde toutesces foisoùelle s’étaitlovéecontrelui,ici,surcelit.Elleavaitmêmedormiserréedanssesbras,avecl’impressiond’êtreensécurité,protégée.Aimée.–Çanepeutpasêtreterminé,Kylie.Toiseulecomptespourmoi.Ellesecoualatête.–Faux.Tameuteestimportante.Ellel’atoujoursété.Tagrand-mère.Ettuasbeauprétendrequetu
n’aimespastonpère,tulesupportes.Alors,ildoitbiencompterpourtoi.Etensuite,ilyatasœur.Ettulesperdraistoussitumechoisissais.
–Trèsbien,jelesaimetous,c’estvrai.Tous,saufmonpère.Pourl’heure,jememoquebienqu’ilpourrisse en enfer. J’en ai assez qu’il manipule ma vie. Mais les autres, oui. Je le reconnais, ilscomptenttouspourmoi.Maisilsnesontpastoi!–LepèredeMoniqueenvisagedeteliquider!lâcha-t-elled’uncoup.–Cetabrutiricheetprétentieuxnecherchequ’àsefairemousser!Cen’estqu’unegrandegueule!
Ilsaittrèsbiencommentmonpèreréagiraitsijamaisilmefaisaitdumal.Lucass’interrompitetlaregarda.–Maiscelaprouveunechose:tutiensàmoi.Sinon,çateseraitbienégalqu’ilaitl’intentiondeme
tuer.Tuasbeauêtreencolère,etjelemérite,tum’aimes,etvoilàpourquoiçanepeutpasêtrefinientrenous.Ellesecoualatête.Deslarmesobscurcirentsavision.Elleavaitenfincompris,lanuitprécèdente.–L’amournesuffitpas!Tunepigespas,Lucas?NoussommesRoméoetJuliette.Noussommes
les Hatfield et lesMcCoy1. Nous sommes n’importe quelle histoire d’amour malheureuse qui aitjamaisexisté.Noussommesceuxquisefontdumal,àeuxetauxautres,enlaissantégoïstementleursémotionslesguideràlaplacedelalogique.–C’eststupide,grommela-t-ilentendantlamainpourlatoucher.Elleserecula.–Non!Veux-tusavoircequieststupide?JecontinueàtevoirembrasserMoniquedansmatête.À
t’entendreluipromettretonâme.Etjesuissiblesséeetsifurieusequej’aienviedehurler.Maisenmêmetemps,jecomprendsparfaitementpourquoituasfaitça.Àtaplace,j’auraissûrementagidelamêmefaçon.J’aimespropresquêtes–lesfantômes,essayerd’aiderlesautrescaméléons–etjeveuxachevercesquêtes,quoiqu’iladvienne.Elledéglutitetluiassénaladernièrevérité,ledernierargumentquijustifiaitqu’ilsnepuissentpas
êtreensemble:–Jevaislefaire,mêmesituensouffres.Voilàcommentjelesais,Lucas.Voilàcommentjesais
quecen’estpasbien.Quandfairecequiestbienpoursoi-mêmepeutblesserquelqu’unquetuaimessifort,çanepeutpasêtrebien!Nousdeux,cen’estpasbien.Alors,s’il teplaît,arrêtonsdenousfairedumal.Va-t’en.Ellen’avait jamaisvupersonnel’airaussiblesséetdutsefaireviolencepournepas lerappeler
quandilressortitparlafenêtre.
1.LesHatfieldetlesMcCoysontdeuxfamillesaméricaines,célèbrespourleconflitquilesopposapendantprèsdetrenteansàlafinduXIXesiècle.
Le lendemain,pendant lecoursdesciences,KylieécoutaàpeineHaydenYatesparlerdes loisdumouvementdeNewtonetdeE=MC2.Elleaimaitpourtantlascience,maiscommentexpliquerqu’uneépéepuissesedéplacer touteseule?EtHaydenn’avait-ilpasaffirméqu’EinsteinetNewtonétaientdes surnaturels tous les deux ?Mais cela l’aurait étonnée que des épéesmagiques les aient suivispartout…Nonpasqu’ellefûttotalementrongéed’inquiétudeàcausedel’épéeàcemoment.Samatinéeavait
été de la folie douce. À commencer par une conversation téléphonique d’une demi-heure avec samèrequiavaitentraînédesexcusesdepartetd’autre.Samère,pouravoirdramatisé l’histoiredestestsdegrossesseetavoirfaitunescène;etKylie,pournepasl’avoirinforméequ’elleavaitrégléces articles avec sa carte.Uncoupde fil utile,maisdésagréable.Surtoutquand samère lui confiaqu’ilyavaitdeforteschancespourqueJohnsoitsonâmesœur.Kylie avait tout de même réussi à chasser ses préoccupations à propos de sa mère. Celles
concernant Lucas n’étaient pas aussi faciles à évacuer. Elle souffrait pour lui, mais s’était aussitracasséepourtrouverlemoyendesortirduplacard.Elleavaitmêmeséchél’Heurepourfaireconnaissanceetlepetit-déjeunerafindemettreunplanau
point.Ettoutcelapourrien.Biensûr,ellen’étaitpasaumieuxdesaforme.AprèsledépartdeLucas,l’esprit,commes’ilétait
jalouxqueKylieneseconsacrepasqu’àlui,avaitdécidédepasserlavoirtouteslesheuresdelanuitprécédente. Il n’avait pas apporté sa tête coupée et son épée, et Kylie lui en était éternellementreconnaissante. Mais au cours de sa dernière visite, il lui fit partager une chose troublante. Sonchagrin.Ilsanglotait,marmonnaitquelquechosesursonfilsquiavaitététué.Kylie ressentit sa souffrance et lui en fit part, mais l’esprit était bien trop bouleversé pour lui
répondre.Ellesedemandasilefantômeentendaitparlàquesonfilsvenaitdesefairetuerous’ilrevisitait
quelque chose de son passé. Le temps et les esprits, ça faisait deux ; et cela pouvait être hyper
perturbantpourlesvivantsquitâchaientdelesaider.Maisbon,celui-làn’avaitpas l’airdecalculerbeaucoupdechoses. Ilne répondait àaucunedes
questionsdirectesdeKylie.Dustyle:Quiveux-tuquejetueaujuste?OuPourquoimoi?Pourquoim’as-tuchoisiepourtueràtaplace?QuandHolidayétaitpasséeaubungalow laveilleausoir, elleavait rappeléàKyliequ’unesprit
avaittoujoursuneconnexionaveclapersonnequ’ilvisitait.–Trouve-la,ettusaurascequ’ilveutvraiment,luiavaitconseilléHoliday.Plusfacileàdirequ’àfaire.Jusque-là,l’espritn’avaitpasdituneseulechosequipuisselaissercroirequ’ellel’avaitconnu,ou
qu’ilsavaientuneconnaissanceencommun.Lapremièrefoisqu’elleétaittombéesurlui,c’étaitenserendantàlacérémoniedefiançaillesde
Lucas.Kyliepensaitqu’ilavaitpeut-êtreététuédanslesbois,nonloindulieudes«réjouissances»,etqu’ill’avaitrencontréeparhasard.Elles’étaitmêmesurpriseàespérerquecesoitlecas.Traitez-ladeprude,maisellenevoulaitpasavoirdelienavecquelqu’unquicoupaitdestêtesetlestrimballaitpartout comme des trophées. Et si Kylie avait connu quelqu’un de ce genre, cette personne ne seserait-ellepassingulariséedanslamémoiredelajeunefille?Biensûr,elleétaitquasisûrequelefantômeavaitapportélatêterienquepourattirersonattention,
mais quelque chose d’un peu moins théâtral aurait suffi. Holiday lui conseilla également deconsidérertoutcequefaisaitouapportaitl’espritcommeunindice.Commel’épée,quiressemblaitàcellequiavaitfaitsonapparitionauxcascades.Latêteétait-elleunindiceouunsigne?Maislàencore,n’était-cepascenséêtreunpeuplussubtil?
Unetêtecoupéen’avaitabsolumentrienderaffiné.Là,Kyliesepréoccupaitdufantômeetnonpasdesaquête.Biensûr,elleétaitobligéederésoudrelesdeux,maissaquêtesemblaitprioritairepourl’instant.
Ouleserait,sil’espritvoulaitbienlalaisserenpaix.Au tableau,Haydenmontrait lesdevoirsdudoigt.Elle les recopiaità lava-vite, lorsquequelque
choseatterritsursesgenouxdansunbruitsourd.Ellefitunbond.Seule sonaversionà sortirdu lot encours lui fit ravaler lepetit hurlementqu’elle s’apprêtait à
pousser.Àcontrecœur,Kyliepassa lamainsoussonbureaupour toucher l’objetenmétal froid.Comme
ellelecraignait,ilétaitlongetvertical,avecunepoignée.L’épéeétaitderetour.Elle entendit quelqu’un s’éclaircir la gorge à quelques places de là. Elle jeta un coup d’œil sur
Derek,quiluiservaitd’escorte,etquiarticulasilencieusement:«Tuvasbien?»Manifestement,ilavaitsentiquelquechose,maisn’avaitpasvul’épée.Ellehochalatête.Auboutd’uneminute,Haydenannonçaquelaclasseétaitterminée.Kyliefeignitdeliresesnoteset
nebougeapas.Burnetttenaitàcequepersonnenesoitaucourantpourl’épée,etbrandirunearmeaubeaumilieud’uncoursdesciencessemblaittoutdroitsortid’unjeuvidéoetavaitdeforteschancesd’attirerl’attention.–Kylie,tuviens?lançaDerekàlaporte.–Euh…jedoisdiscuteravecM.Yates.Jeterejoinsplustard!Ellejetauncoupd’œilàHaydenquilascrutaitd’unairanxieux.–Attendsdehors,demandaunHayden,inquiet,àDerek.KylievitLucas sur lepasde laporte.Son regardcroisa le sien,maiselleavaitd’autreschatsà
fouetter. Pourtant, lorsqu’elle vit l’inquiétude dans ses yeux, l’amour absolu avec lequel il la
regardait, son cœur fit une nouvelle descente en piqué. La mort dans l’âme, elle ne pouvait nierqu’ellel’avaitdanslapeau.–Fermezlaporte,leurintimaHayden,etils’approchadesonbureau.Fermezlaporte.Lesparolesdel’enseignantrésonnaientdanssatête.Elledevaitfermerlaporteà
sessentimentspourLucas.Maiscomment?–Quelquechosenevapas?demandaHayden.Toutemafichuevie.Kyliecroisaleregardduprof,chassantlapeinequeluiinspiraitLucas.–Oui,ilyauneépéesurmesgenoux.–L’épée?demanda-t-il.Ellegrimaça.–Jenel’aipasregardée,maisjesupposequ’iln’yenaqu’unequiapparaîtcommeparmagieet
quivientanéantirtouteslesrèglesetthéoriesquevousvenezd’aborderdanscecours.Haydensouritetbaissalatêtepourvoirl’arme.–Oui,cesthéoriesnevalentpasunclouquandlamagieintervient!–Lamêmeépée,jeprésume?demandaKylie.Ilopina.–Super.Puisellefitlerapprochementavecsespropos:–Vouspensezquec’estlamagiequifaitcela?CommelaWicca?–Ouautrechosedetoutaussidéconcertant,affirma-t-il.–Donc,d’aprèsvous,ilnes’agitpasdutoutdespouvoirscaméléons?Iltorditlabouche.–Ceux-cisontenpartiedespouvoirswiccans.–Oui,acquiesçaKylie,etellerepensaàsatoutedernièrequête.Cequimedéroutecomplètement,
c’estpourquoic’estsinuld’êtrenous.Ileutl’airperplexe.– Ce n’est pas nul, dit-il. Bon, je vais allez chercher mon sweat, je la cacherai dedans et nous
l’emporteronsaubureau.Tuveuxbienmel’apporter?Ellen’aimaitpastouchercetruc,maiss’emparadélicatementdelapoignéeetluitenditl’arme.À
soncontact,l’épées’embrasa.Ellelafittomberdanslesweatàcapuche.– Si ce n’est pas si nul d’être nous, alors pourquoi dissimulez-vous votre configuration ?Vous
portezmêmeunecapuchepourquepersonnenelavoie.Etpourquoi lesanciensestiment-ilsqu’ilsdoiventcachertouslesjeunes?– Parce que les gens ne comprendraient pas, parce que dans le passé, cela a conduit à notre
persécution,maispasparcequec’estnuld’êtreuncaméléon.– Mais ne serait-ce pas mieux si vous n’aviez pas à le cacher ? Si nous pouvions l’arborer
fièrementcommelesautres?Ilregardafixementl’épée,commes’ilécoutaitàmoitiécequ’elledisait.–Unjour,celaarrivera.–Non,insistaKylie,passitoutlemondecontinueàseplanquer.Illevalesyeuxsurelle.–Tunecomprendspascombienleschosesontétédifficilespournosparents.–Vousavezraison,jenecomprendspas.Etpeut-êtreest-cepourcelaquejevoislasituationplus
clairement.Ilfautqu’ilyaitunchangement.Maisquelqu’undoitleprovoquer.Iln’arriverapastoutseul,niparhasard.
–OK,ondiraitquetuyasbeaucoupréfléchi.Commentchangerions-nouscela?demanda-t-il.–Jen’aipasencoretrouvé,maisjeleferai.Elleseleva.Ilsoupira,commes’iln’aimaitpascequ’elledisait.–Quand tu trouveras quelque chose, soumets-le-moi d’abord. Je sais que tu ne voudraismettre
personneendanger.–Jeveuxjusteaider.Etjevousenparleraisijelepeux.Ellebraquasonregardsurl’épée.–Qu’est-cequecelaveutdire«sijelepeux»?Pourquoinepourrais-tupasmelesoumettre?Ellelefixa.–Jefaissimplementattentionànepasfairedepromessesquejenesuispassûredepouvoirtenir.Ilserenfrogna.–Nefaisriendestupide,Kylie.–Maintenant,sijepeuxfairedespromesses,dit-elle,j’éviterailastupiditéàtoutprix.Saréponsen’eutpasl’airdelesatisfaire,maisilpassaàunautresujet.–Tongrand-pèrem’aappeléàl’heuredudéjeuner,ilvoulaitsavoirsielleavaitdesmarques,dit-il
enretournantl’épée.Jenevoisriendutout.–Moinonplus,ditKylie.–Est-cequecelat’afaitmaldelatenir?–Mal?Non.Flipper,oui.Pourquoi?–Voudrais-tu réessayer pourmoi ? Juste quelques secondes. Peut-être qu’autre chose apparaîtra
dessus.Kylieserembrunit.–Trèsbien,maissil’épéeoumoidevenonsdingues,voustuonsouautrechosedanslegenre,ce
neserapasmafaute.LadernièrefoisqueHolidaym’afaitessayerquelquechose,Burnettafailliseretrouverstérile.Haydenfronçalessourcils.–Nousdevrionspeut-êtreattendreetessayeraubureau,avecBurnettetHoliday.–Bonneidée,acquiesçaKylie.
– Êtes-vous sûrs que ce soit une bonne idée ? demanda Kylie. Je ne voudrais pas reproduirel’incidentdupresse-papiers…Burnettétaitunpeuinquiet,maisn’enmontrarien.–Tul’asdéjàtenueetelles’estseulementembrasée.–Maisjamaisplusdequelquessecondes.– Kylie, intervint Holiday, tu n’es pas obligée de le faire, et Derek, qui se tenait à côté d’elle,
approuva.PuisqueBurnettluiavaitdemandédefairedesrecherchessurInternetàproposdecetteépée,autant
qu’ilassisteàtoutlereste.–J’aisimplementpeurqu’onnepuissepaslamaîtriseretqu’ellesemetteàtuerdesgens,ditKylie.–Pourquoiferait-ellecela,d’aprèstoi?demandaHoliday.– Je… je ne sais pas… peut-être à cause de l’épée du fantôme, répondit Kylie, et parce qu’il
trimballepartoutunetêteavecl’épée.–Crois-tuvraimentqu’ilyaitunlienentrelefantômeetcetteépée?demandaHoliday.Parceque
jenecomprendstoujourspascommentunfantômeauraitpul’envoyerici.
–Jenesaispasquoipenser,avouaKylie.Maisjetrouvequ’ellesseressemblent.–Maisc’estuneépéedesplusbanales,observaBurnett.–Jenecroispasquetuferaisdumalàquiconque,ajoutaDerek.Tuesuneprotectrice,si l’épée
réagitavectoi,alorsc’estqu’elledoitseconnecteràcettepartiedetoi.Jenepensepasqu’ellesoitmauvaise.–Jesuisd’accord,lançaHayden.–Trèsbien,vosviessontenjeu,prévintKylieens’emparantdel’arme.–Maisaucasoù,fitHolidayenarrêtantsonamie,soyonstousprêtsànousbaisseretànousenfuir
encourant.Kyliefronçalessourcils.Holidayhaussalesépaules.–Aucasoù.Kylieattrapal’épée.BurnettpoussaHolidayderrièrelui,puisilsreculèrenttousd’unpasdeplus.
À laminuteoùelles’emparadel’épée,cettedernières’embrasa.Lachaleurdel’armeimprégnasamainetgrimpalelongdesonbras.–Tuvasbien?demandaHoliday,commesiellesentaitlemalaisedeKylie.Celle-ciréprimal’envieurgentedelâcherl’armeetrespiraunboncoup.Àlaplace,ellelaserra
plus fortetveillaàcequesonpoidsne la fassepas trembler.Ellen’étaitpassi lourde,elledevaitpesermoinsdedeuxkilos,etpourtantcelaluiprocuraitunesensationbizarre.Latenirlamettaitmalàl’aise.–Oui,çava,répondit-elle.Elleesttiède,c’esttout.–Nelalaissepastebrûler,ditHoliday.L’épée continua à flamboyerdeplus enplusvivement,maispas aupoint de les aveugler, plutôt
commes’ilsobservaientdelalumièrefiltrée.Kylieretintsonsouffle,puis,d’unseulcoup,n’eutpluspeur.C’étaitcomme…tenirquelquechosequ’elleconnaissait.Unepierremagiqueouuncadrephotoqu’elleavaitregardétroplongtemps.Pourquoiétait-cesiagréabledanssamain?Commesi son sentimentde calme segénéralisait,Burnett etHoliday se rapprochèrentd’unpas.
Dereklessuivit.–Jenevoispasdemarquesdessus,observaHayden.–Moinonplus,ditBurnett.Kylie examina l’épée : elle ne la trouvait même plus encombrante. La gêne avait disparu. Son
étreintesurlapoignéeétaitferme,l’objetdanssamainfaisaitpresquepartied’elle-même.Elletournasonpoignetetvituneinscriptionsurlebouton,toutenhautdupommeau.–Lavoilà,l’inscription,fit-elleendésignantlamarque.Touslesquatreserapprochèrent.–C’estdulatin,observaHoliday.Celaveutdireguerriersaint.–JevaisvoircequejepeuxtrouversurInternet,mais…Dereklaregardacommepours’excuser,commes’ilsavaitquesesproposallaientl’énerver:
–…maisilyaquelqu’uniciquis’yconnaîttrèsbienenépées.Burnettopina.–Jeviensdem’ensouvenir.LevampireregardaKylieaveclemêmeaird’excusequeDerek.Ellecompritdequiils’agissait
sansqu’ilsaientbesoindeledire.Burnettsortitsontéléphone.–J’appelleLucas.Kyliesecoualatête.–Pourquoi?Depuisquandunloup-garouserait-ilexpertenépées?Burnetthaussaunsourcil.–Sesancêtresétaientscandinaves.–Etalors?–Danssafamille,onsebatàl’épéedepuismilleans.Onl’yaforméquandilétaitpetit.Ellepoussaungémissement.ElleavaitespéréresteràdistancedeLucaslepluspossible.–Trèsbien,appelle-le.Montre-la-lui.Moi,j’yvais.Elles’apprêtaàreposerl’arme.–Enfait,j’aimeraisqu’illavoieenfeu…Lucas,dit-ilautéléphone,peux-tuveniraubureau?J’ai
quelquechoseàtemontrer.Oui…Oui,non,ellevabien…Tuverrasquandtuseraslà…Super.Ilraccrocha.–Ilarrive,ilétaitauréfectoire.Kyliecompritqu’ilavaitdûlessuivreaubureauetattendait,aucasoùquelquechosesepasserait
mal.Qu’ilpenseàellel’émutdenouveau.Ellefermalesyeuxunesecondeetsepréparaàlevoir.Unbruitdepasprécipitéssurleperronbrisalesilence.Laportedubureaus’ouvritd’uncoup.–Entre!direntBurnettetHolidayenmêmetemps.LucasseprécipitaversKylie,maiss’arrêtanetenvoyantl’épée.–Bonsang!s’exclama-t-il,lesoufflecoupé.–Connais-tuquelquechosesurcegenred’épée?demandaBurnett.Lucas approcha. II attrapa le poignet de Kylie délicatement et scruta l’arme de plus près. Elle
l’entendaitrespirer,souffledouxetcalme.Ellesentitqu’ilnepensaitpasseulementàl’épée.Ellesemorditlalèvrepournepassoupirer.–Et?demandaBurnett.Lucasinspira.Il tournalégèrementlamaindeKyliepourregarder l’épéecorrectementdesdeux
côtés.–Elledatedudouzièmesiècle.Trèsprobablementuneépéedecroisé.–J’enétaissûr,lançaBurnett.Aucuneidéedelaraisonpourlaquelleelles’embraserait?Lucaslevalesyeuxsurelle.–CedoitêtreKylie.Sonpouceeffleuralebasdesonpoignet.Soncontactétaitdouxetduràlafois.Elleavaitenviede
pleurer.Elledéglutitdenouveauetpriapourtenirseslarmesenéchec.Maismincealors!Mêmeencolèrecontrelui,mêmesûreetcertainequeleurrelationétaitmaudite,ellel’aimaittellementfort!Ledésirdes’appuyercontrelui,delesupplierdelaprendredanssesbrasétaitintense,maiselleseforçaànepascraquer.–Oui,ons’endoute,répliquaBurnett.Maispourquoi?Lucascontinuaàlacaresserduregard.–Ça,jel’ignore.Maisjepourraisdeviner.–Alorsdevine!luiordonnaBurnett,àboutdepatience.
–C’estuneguerrièresainte,ditLucas,etilluijetauncoupd’œilrapide.KyliechassasesinquiétudesausujetdeLucaspourseconcentrerànouveausurl’épée.–Non,jesuissimplementuneprotectrice.Jenesuispasuneguerrière.Jen’aimepaslaguerre!–Pourtant,c’estexactementcequeditl’épée,observaBurnett.Guerrièresainte.–Jepeuxvoir?demandaLucas.Kylieretournasonpoignetetluimontral’inscription.–Incroyable!Tuesbienuneguerrièresainte.Ileutl’airintimidé.Impressionné.Àuneépoque,elleauraitétéraviedesuscitercetteexpressiondanssesyeux.Maispasàcetinstant.
EllenevoulaitpasseprendrepourJeanned’Arc,nipouraucuneguerrière.–Onnepeutpascroiretoutcequ’onlit,dit-elle.Saréactionlelaissaperplexe.–C’estpresquelamêmechosequ’uneprotectrice,maispourmoi,c’estencoreplusextraordinaire.
Ilyadeslégendessurça.Jenem’ensouvienspas,maismagrand-mèreaunlivrequienparle.–Maistun’asjamaisrencontrédeguerrièresainte,si?demandaKylie.–Toi,répéta-t-il,légèrementfier.–Avantmoi!lerembarra-t-elled’untonsec.–Non,avoua-t-il.Ellesetournaverslesautresdanslapièce:–L’und’entrevousena-t-ildéjàrencontréune?Ilsfirenttousnondelatête.–Donc la voilà,ma preuve, affirma-t-elle catégoriquement. Ce ne sont que des légendes. Elles
n’existentpasdanslaréalité.Ellenevoulaitpascroirequ’elleétaituneguerrière.Elleessayaitencoredesefaireàl’idéequ’elle
étaituneprotectrice.HolidayapprochaetposaunemainsurlebrasdeKylie.–Nousignorionsl’existencedescaméléonsjusqu’àilyaquelquessemaines.–Ellearaison,approuvaDerek.–Bon,trèsbien,vapourcetargument,songeaKylieentâchantdesecalmer.Lucas,quitenaitencoresonpoignet,leserraunpeuplusfort.–Cen’estpas…grave.Êtreuneprotectrice,c’estpratiquement lamêmechose.Tudois tebattre
pourprotégerquelqu’un.Elle baissa les yeux sur l’épée qui brillait et se rendit compte que le contact deLucas était plus
chaudqueceluidel’arme.– Bon, supposons qu’elle soit une guerrière sainte, mais qu’est-ce que ça veut dire ? demanda
Burnett. Pourquoi l’épée vient-elle d’apparaître ? Est-ce une sorte de rite de passage ? Juste unequestiondetiming?Ou…autrechose?Safaçondedire«autrechose»donnal’impressionquec’étaitgrave.EtKyliedevinaqueçal’était,
eneffet.Etçaneluiplaisaitpasdutout.Lucaslaregardad’unaircompatissant.– Je crois qu’on lui offre une épée dans un but bien précis. Oui, peut-être parce que, jusqu’à
présent,ellen’étaitpasencoreprêteàlarecevoir.Maisjepensequec’estplusparceque…Unairprotecteurtraversasonvisage.Ellesavaitqu’ilspensaienttouspareil.–Parcequequoi?s’enquirentBurnettetHolidayenchœur.–Parcequ’ellepourraitenavoirbesoin.L’épéeapparaîtquandvientl’heuredesebattre.
–C’estexactementcequ’affirmentlesanciens,lançaHayden.Sionlaluiadonnée,c’estqu’elleenaurabesoin.–Commentenêtresûr?demandaBurnett.Lucassecoualatête.–Aucuneidée.Mais…Sais-tut’enservir?–Commentlesaurais-je?Jenesaismêmepascommentmarcheunéconome!Etc’estjustement
pourcetteraisonquec’estn’importequoi.Jenesuispasuneguerrière.–Jet’aivuetebattre,lançaDerek.Tuesgéniale!– Il a raison, insista Lucas. Tu as également un cœur de guerrière.Mais elle doit apprendre à
manierl’épée,affirma-t-ilenreposantlesyeuxsurBurnett.Manifestement,Kylien’auraitpassonmotàdire.Ellefronçalessourcils.–Peux-tuleluienseigner?demandaBurnett.LeregarddeLucascroisalesien.Non,pensaKylie,etellefinitparretirersamaindelasienne.Ce
n’étaitpasunebonneidée.–Sielleveutbienmelaisserfaire,lançaLucas.–Kylie?insistaBurnett.Avait-ellelechoix?Non.Ellenepourraitpasyéchapper.Ellelesavait.Enétaitconvaincue–si
l’épéesetrouvaitdanssamain,c’étaitparcequec’étaitsaplace.Elleacquiesça,mêmesicelaluiétaitinsupportable.–Bien,approuvalevampire,avant tout j’aimeraisquetum’apportes les livresdelégendesdeta
grand-mèreetensuite,tonjobconsisteraàluiapprendreàmanierl’épée.Lucassetournaverslajeunefille.–J’aihâte,lança-t-il.Pasmoi,songea-t-elle,maisellegardasespenséespourelle.
Dix minutes plus tard, Kylie retourna dans son bungalow, accompagnée de Derek, son escorteofficielle, jusqu’à ce que Della revienne de sa réunion avec ses sœurs vampires. Les courscommenceraientlelendemain.–Jesaisquecelanetefaitpasplaisir,lançaDerek.–Tuesmonescorte,toutvabien.–Non,pasça,jeparledescoursavecLucas.Ellesoupira.–Jenepensepasavoirlechoix.–TuauraispuinsisterpourqueBurnetttetrouveunautreprofesseur.–Jen’yaipaspensé.Maispourquoi?Parcequejedésireêtreaveclui?–C’estsûrementmieuxainsi.–Pourquoi?demandaKylie,quisentaitqu’ilneluidisaitpastout.Ilsourit,maisavecunelégèretouchedetristesse.–Tul’aimes.Jel’airessentisifort.Toutcommetacolère.–J’ailedroitd’êtrefurieuse,marmonna-t-elle,bienqu’ellesûtquecen’étaitpaslepireproblème.–Oui,tuasledroit,réponditDerek,maiscequetuéprouvaisétaitplusfortqueça.Ellecroyaitqu’ilfaisaitallusionaufaitqueLucasfiniraitparladétester,maisilpoursuivitd’unair
penaud:
–Jel’airessenti.Lemêmetourmentquit’habitaitquandons’estrencontrés.Quandtusouffraisàcausedetonex.Ensuite,c’étaitlapeinequetuéprouvaisàcausedetonbeau-père,quandilatrompétamère.Etpuiscesentimentd’avoirététrahie.Ellevoulaitlenier,maisn’yparvintpas.–Alors,j’imaginequecelaveutdirequevousêtestousdesenfoirés,lesmecs!Soncœursenouaetelledéglutitpouréviterqueleslarmesluimontentauxyeux.Ilsoupiraetluitouchal’épaulepourl’apaiser.–CequeLucasafaitétaitmal,Kylie.Cequenousavonstousfaitétaitmal.Etjeneprétendspas
qu’ilneméritepastacolère,maisilnedoitpaspayerpourleserreursdetouslesautres.Endépitdesesefforts,deslarmesluivoilèrentlesyeux.EtsiDerekavaitraison?Soncontactchaudluifitdubien,maisn’arrangearien.Parcequelepassén’étaitpasréparable.–Mêmesijepouvaisoublier,notrerelationnefonctionneraitpas.–Pourquoipas?demanda-t-il.–Jetel’aidéjàexpliqué.Ilperdraittout.Safamille,sameute.Etsurtout,sesrêves.Jerefused’en
êtrelaraison.Elle se remit en route.Vite, regrettant de ne pas pouvoir courir, s’enfuir loin de tout ce qu’elle
ressentait,detoutcequ’elleavaitperdu.Il la rattrapa, et elle ralentitquand ilsprirent lecheminquimenait à sonbungalow.L’air sentait
l’automne,commepourdirequelaviechangeait.Lechangementétaitdifficile.Ledemi-Faes’éclaircitlagorgeetrompitlesilencefragile.–Alors,tutrouveraslemoyend’esquiverça.Elleleregarda,sanstropcomprendrecequ’ilvoulaitdire.–Esquiverquoi?–Lefaitqu’ilperdetout.–Jenecroispasquecesoitpossible,dit-elle.–Toutestpossible,tuesKylieGalen.Illuiadressaunsouriresincère.Ellesecoualatête.–Tusais,lesgensm’accordentbientropdemérite.–C’estparcequetunetevoispastellequetues,rétorqua-t-il,ungrandsouriresurleslèvres.–Jen’aipasl’étoffed’uneguerrière,Derek.– Tu t’en sortiras très bien. Et tu te souviens quand tu m’as conseillé d’accepter mes dons la
premièrefoisquenoussommesarrivésici?–C’étaitsûrementunmauvaisconseil,lança-t-elle.–Non,pasdutout.Tum’asditquejedevaislesaccueillir.Tuavaisraison.Jenemevoispasnepas
utiliser mes pouvoirs en ce moment. Ils font partie de moi. Et toute cette histoire d’épée et deguerrièrefaitpartiedetoi.–J’aidéjàdupainsurlaplanche,pasbesoind’enrajouter.–C’est-à-dire?–Monfantômeattitré,jedoislerenvoyerdel’autrecôtéavantqu’ilnemerendefolle.Etpuisilya
mesquêtes.–Maistunecroispasquetoutecettehistoired’épéefaitpartiedetesquêtes?Jepensequelefait
qu’elles’embrasequandtulatouchesestunsignequetunedoispasnégliger.–Ehbien,cen’estpasmapriorité,lerembarra-t-elle.–Puis-jet’aiderd’unefaçonoud’uneautre?
Elleréfléchit.–Jenecroispas.–Raconte-moitonhistoiredefantôme.Elleluiparladel’esprit.Etdelatêteetdel’épée.–Mince,ilyadequois’angoisser!Toutceladoitavoirunrapport.JesaisqueLucasrapportera
ces livres de chez sa grand-mère,mais je ferai des recherches sur Internet. Je trouverai peut-êtrequelquechose.–Merci.Pourtout.–Tout?–Jeneméritepastonamitié.–Oh!quesi!Ilsmarchèrentquelquesminutesensilence.Lebruitdeleurspassurlecheminrocheuxsemêlaità
lamélodiedelanature.Descrisd’oiseaux,desinsectesquibourdonnaient.–Tuveuxsavoirquelquechose?demanda-t-il.–Quoi?–Tuasfaitcequ’ilfallait…pournousdeux.J’avaisbesoinquetumeledises.Çaabeauavoirl’air
fou,maisjemesensmieuxenréalité.–Tudisçapournepasquejeculpabilise?–Non,jesuissérieux.C’estmieuxcommeça.Elleleregardaetsentitqu’ilétaittotalementhonnête.–Çaira,nousdeux,hein?demanda-t-elle.–Biensûr.Etjeneplaisantepasquandjetedisquejesuistonami.–Moinonplus.Ilsmarchèrentencoreunpeuensilence.–Quellessonttesautresquêtes?demanda-t-il.Ellenevoulaitpasaborderlesujetduplacard,alorselleparladel’autre.–Jeveuxaider lesadoscaméléons.Lesanciens les isolentde tout. Impossiblededeveniradulte
commecela.–CommecetteJenny?Elleal’airplutôtnormale.–Elleestcomplètementcoupéedumonde.Elleluiracontaqu’ilsn’avaientnitéléphonesniamisendehorsdel’enclos.–C’esttriste.Jennyal’airsympa.–Oui, c’estvrai,ditKylieen se souvenantde la jeune filleaccrochéeaudosdeDerekquand il
couraitdanstouslessenspouressayerdelafairetomber.Ellesourit.–Jesaisàquoitupenses.–C’étaitdrôle,reconnut-elle.–J’auraispulablesser.–Maisnon,tunel’auraispasfait.–Pasdélibérément,maiselleasurgidenullepartetm’asautédessus.Jenesavaispasquec’était
unenanasexyquis’étaitaccrochéeàmoi.–Donc,tul’astrouvéesexy.Jelesavais!J’aivucommentvousvousregardieztouslesdeux.Ilhaussalesépaules.–Pasdutout!–Si!Tulamatais,même!Etelleaussi.Ilhaussaunsourcil.
–Vraiment?Ellerit.–Oui,vraiment.–Alorsjevaispasserlavoir,ilsembleraitquej’aiunfaiblepourlescaméléons.–Bonnechance!Ilparaîtqu’ilssontcompliqués.–C’estvrai,admit-ilenriant.–C’estvraimentsidifficilepourlesadoscaméléons?demandaauboutd’unmomentDerek.–Engros, ilsn’ontpas ledroitde semontrer enpublic tantqu’ilsnepeuventpaschanger leur
configuration.Etavantdesavoirlefaire,ilsdoiventavoirdix-huitouvingtans.–Tusaischangerlatienne.– Oui, je ne suis pas différente pour rien, dit-elle, fronçant les sourcils. Apparemment, c’est
l’histoiredemavie.–Çacraintpoureux,c’estvrai.Pourquoi tune lesferaispasvenir ici?JesuissûrqueHoliday
seraitd’accord.–Crois-leounon,j’yaipensé,maisceneserapassisimple.D’abord,ilfallaitqueKylietrouvelemoyendepousserlescaméléonsàfaireleurcomingout.–Entoutcas,tupeuxcomptersurmoi.–Jem’ensouviendrai.Quand ilsparvinrentaubungalow,DellaetMirandas’y trouvaientdéjà.Ellesétaientassisesà la
tabledelacuisine,sodaàlamainetl’airpréoccupé.– Super, te voilà ! s’exclama Miranda comme si elles l’attendaient pour tenir une table ronde
importante;uneconversationàcoupsdeCocalight.PuissesdeuxcolocsregardèrentDerekenluisignifiantqu’iln’étaitpasconviéàleurpetitefête.Il
pouffa.– La dernière fois que j’ai vu cette tête chez les filles, unmot était écrit sur la cabane demon
voisin;ildisait:«Interditauxgarçons.»Àplustard!EtsijetrouvequelquechosesurInternet,jeteleferaisavoir.KyliesetournaversDellaetMiranda:–Pourquoijenel’aipaschoisi,lui,toutauraitététellementplussimple!–Parcelescœurssontdeméchantspetitssalaudssournois,conçuspourprovoquerlemalheur.Ils
sefichentéperdumentdecequifaciliteraitoucompliqueraitlaviedeleurspropriétaires,lançaDellad’untoncassant.Çacraint,vraiment!ajouta-t-elled’unevoixstridente,endonnantungrandcoupdepoingsurlatable.Jeproposequel’onsereprenneunecuiteauchocolat!KylieregardaMiranda,l’airdedire:«Qu’est-cequisepasse?»Celle-cihaussalesépaulesetlutmanifestementlademandesilencieusedesonamie,parcequ’elley
répondit.–Stevel’appelletouteslesdemi-heures,maisellerefusederépondre.
Lelendemain,aprèsl’école,Kyliesouffraittoutdemêmed’unegueuledeboisauchocolat.Oui,çaexiste.Elleenétait lapreuvevivanteetnauséeuse.Holiday,quiprétendaitqu’ellesméritaient toutesles troisdenoyer leurchagrindans lecacao, leuravaitnonseulement fourni lesiropauchocolat,maisavaitenvoyéBurnettacheterdelaglaceauchocolatetunpaquetd’Oréos.Bien sûr, il en restait moins de la moitié quand Burnett et Holiday arrivèrent, et celle-ci avait
encoredesmiettessurlementon.–Jemangepourdeux,expliqua-t-ellepours’excuser.Dellas’enétaittenueàsesBloodyMarychocolatés,maisKylieetMirandas’étaientgoinfréesde
toutcequ’ellespouvaient.Kylieneseseraitpasétonnéed’enêtredégoûtéeàvie.Ellenepouvaitpasnierquelechocolatavaitréussiàapaisertemporairementtoussesproblèmes.Apaiser,pasrésoudre.Della avait râlé contre Steve, qui n’acceptait pas que ce soit terminé. Miranda se demandait
commentprésentersesexcusesàNikki.Kylieavaitfaillipleurnichersurlesgarçonsquiétaientdesbons à rien, des menteurs. Puis elle se rappela ce que Derek avait dit : qu’elle passait toutes sescolèressurLucas.Etc’étaitvrai.Ellepréféradoncattaquerlechapitredelaguerrièresainte.Elle leur raconta toute l’histoire de l’épée, en leur faisant jurer de ne pas la répéter. Miranda,
naturellement, trouvait l’épisode de la guerrière supercool, et Della était jalouse. Kylie, encoreénervée,vidaunautreboldecrèmeglacéepourl’aideràsupportertoutcela.Puisellesfinirentparrigolerbêtementdechosesidiotes.Parmilessujetsqu’ellesabordèrent,ilyavaitlesexe,lesgarçonsetcequiétaitleplussexy,slipsouboxers.Lesboxersl’emportèrent.–Bond’accord, peut-être que le chocolat et le sangne font pas bonménage, en fin de compte,
déclaraDella,l’airplutôtlugubrecetaprès-midi-là.C’étaitKyliequiauraitdûêtredelapirehumeur.Elleallaitprendresonpremiercoursd’escrimeavecLucas.Auborddulac,enplus.Pourquoiavait-ilchoisicelieupours’entraîner?Mais,biensûr,parcequec’étaitl’endroitqu’ilchoisissaittoujourspourflirter.S’ilavaituneidée
derrière la tête, il valait mieux qu’il l’oublie très vite. Elle était venue pour se battre, pas pourl’embrasser!Il l’attendait, nonchalamment adossé à un arbre.Elle ne l’avait pas revu depuis la veille dans le
bureau,maiscelaluiparaissaittrèsloin.Ilavaitséchélescours.QuandMmeCanes’étaitinterrogéesur son absence, Fredericka était intervenue et avait expliqué qu’il avait dû aller chercher quelquechosechezsagrand-mère.Kyliepensaqu’ils’agissaitdeslivresqueBurnettvoulait.Il semblait plus loup qu’humain, et elle en déduisit que la pleine lune arrivait. Elle avait déjà
remarquéquequelquesjoursavantlapleinelune,l’animalenluiprenaitledessus.Ses cheveux noirs rebiquaient par endroits, il avait franchement besoin d’une bonne coupe.Ces
bouclesquis’agitaientsouslabrisedonnaientl’envied’ypasserlesdoigts.Ilportaitunjeanmoulant.OndevinaitsesmusclessoussonT-shirtbleu.Ilsemblaittoutdroitsortid’unepub.Il se dirigea vers elles, sans se presser. Sa démarche était lente, assurée.Kylie en eut le souffle
coupé.–Tusaisqu’unloup-garoupeutsentirtesphéromones,n’est-cepas?chuchotaDellaàl’oreillede
sonamie.Génial,songea-t-elle.–Sicelapeutterassurer,tun’espaslaseuleàpolluerl’airencemoment.Kylienes’étaitpashabilléepourattirersonattention.SonT-shirtroseaudécolletérondnerévélait
qu’unpeudepoitrine.Biensûr,ilétaitsuffisammentmoulant,maisc’étaitlecasdelaplupartdesesvêtements. Son short était un jean coupé, rien de trop court, ses chaussures, des tennis blanchesordinaires, sur des chaussettes roses assorties à son T-shirt. Et le seul maquillage qu’elle portait,c’étaitdumascaraetdubrillantàlèvres.Lucass’arrêtadevantelle.Ellefitcommesisaprésencelalaissaitindifférente.Maislorsqueleursregardssecroisèrent,lecœurdeKyliefitunbonddanssapoitrine.–Est-cequevousvoulezquejereste?Le«oui»deKylieetle«non»deLucasrésonnèrentenmêmetemps.– Désolé, fit Lucas, mais pas si désolé que ça. J’ai besoin de toute l’attention de Kylie, et tu
risqueraisdeladistraire.–Mouais,répliquaDella,totalementincrédule.Lucasregardalavampenfronçantlessourcils.–C’estbon,jevaisfaireunpetittour.Appelle-moiquandtuaurasterminé.–Jelaraccompagneraiàsonbungalow,ditLucas.–Jet’appelleraidèsquej’auraiterminé,décrétaKylie.Della partit à toute allure. Kylie se demanda comment elle allait trouver la force de supporter
l’heurequiallaitsuivre.
Aucundesdeuxneparlapendantuneminute.Ellerespiraunboncoupetsetournaverslui.–Jesuisprête.–Attends,jevaischercherlematériel.Il retourna vers l’arbre sous lequel reposait un gros sac en toile. Il en sortit une serviette
enveloppant l’épée. Un frisson la parcourut. Ce n’était pas de la peur, mais une folle prise deconscience.Rienquesafaçondelatenirévoquaitlerespect,larévérence.Kylieserapprochaetleregardaen
sortirunedeuxième.Légèrementdifférente,maissimilaire.Latailleetlaformesemblaientpresque
identiques.Puisuneautreapparutcommeparmagie.–D’oùvientcelle-là?demanda-t-elle.–Celle-cim’appartient.Jel’aipriseenallantchercherleslivrespourBurnett.Mongrand-pèreme
l’aofferteavantdemourir.Elleremarquaquelesarmesseressemblaient.–Étaient-cedescroisésoudesguerrierssaints?Il lui adressa l’unde sesgrands sourires sexydemauvaisgarçon.Et tantpis si elle se retrouva
hyperembarrassée.Àcetinstant-là,ellesesouvintdugoûtdeseslèvres.–Enréalité,c’étaientdesVikings.DessortesdeRobindesBois,pasdespiratesmeurtriers.Enfin,
c’estcequ’onm’araconté.Elleessuyasesmainsmoitessursespochesarrière.–Burnetta-t-ilapprisquelquechosed’intéressantdansteslivres?–Jel’aivujusteaprèsledéjeuneretilm’aditqu’ilétaitencoreentraindelesétudier,expliqua-t-il
ensortantdusacdeuxépéesenbois.–Ettoi,tulesaslus?– Oui. Quand mon grand-père me donnait les cours, je les ai dévorés. Je me prenais pour un
guerriersaint.Sonsourires’illumina.Jefaisaissemblantdesauverdesdemoisellesendétresse.Ellelevoyaittrèsbiendanscerôle.Ellesesouvintquandilsétaientpetitsetqu’ilavaitrattrapéla
pierrequedegrossesbrutesavaientjetéesurelle.Àsixans,elleleconsidéraitcommeunhéros.Àseize,commeunbourreaudescœurs.–Bon,d’abordjevaistemontrercommenttenirl’épée,etensuitejet’apprendraidesmouvements
défensifstrèssimples.Puisnousnousbattronspourdebon.Ilramassasonépéeetsepositionnaderrièreelle.Elleluifitfaceimmédiatement.–Retourne-toi,jeveuxt’expliquercommentlatenir.–Pourquoitunemepeuxpasmemontrertoutsimplement?Ilserembrunit.–C’estcommeçaquemongrand-pèremel’aenseigné.S’ilteplaît,retourne-toi.Elle le regardad’unair renfrogné,mais s’exécuta.Puiselle retint sonsouffleetattenditqu’il la
touche.Desentirsoncorpscontrelesien.Attenditladouleurdanssoncœurquinemanqueraitpasdesuivre.Ellesentitsontorsechaudsecollercontresondos.Ilplaçaunemainsoussoncoude,puis lafit
lentement glisser le long de son bras. Elle désirait autant ce contact qu’elle l’appréhendait. Elledéglutitetcebruitluiparutpresquetropfort.–Prendsl’épée,murmura-t-il.Elleentouralapoignéedesapaume.–Maintenant,bougeuntoutpetitpeulepoignetjusqu’au…Ilmarquaunepauseaumomentmêmeoùl’armesemettaitàs’embraser.Safaçonderespirerluimontraqu’ilétaitàlafoisrespectueuxetintimidéparcequefaisaitl’épée.
Kylieétaitbientroppréoccupéeparsoncorpscontrelesienpoursesoucierdel’arme.–Commeça,dit-il,etildéplaçatrèslégèrementsonpoignetsurladroite.Ellesentitsajouedanssanuque.–Sens-tuquel’épéeestàl’horizontaledanstamain?Ellehochalatête,nefaisantpasconfianceàsavoix.Sonodeurl’enivrait.–Tutedébrouillesbien.
Ilsrestèrentainsidelonguessecondes.–Lasuite,c’estquoi?lâcha-t-elle,ensereprenantunpeu.–Maintenant,jevaistemontrerdesmouvements.Armeàlamain, il luifit face.Sonregardbleulapénétra.Ellevit lachaleurdanssesyeux,et le
désir.–Désolée,jenevoulaispasquecelaseproduise.Ellesedétournarapidement.Etespéraqueceduelneseraitpasqu’unjeudeséduction.
Elle passa les trenteminutes suivantes à imiter sesmouvements, encore et encore. À donner ungrandcoupd’épéeparci,unautrepar là. Ilaboyait lesordres.Commesongrand-père le luiavaitappris.– Pointe l’épée vers l’extérieur, là où se trouvera ton adversaire. Et ne regarde pas en bas.
Maintenant,équilibretonpoids.Étiretesmouvements.Encoreetencore,ilsrecommencèrent.Enfait,c’étaitépuisant.Lesoleilétaitchaudsursapeau,l’air,épais.Lesmusclesdesesjambesla
brûlaient.Maispasunefoiselleneseplaignit.Ellecraignaitquecelanel’inciteàlatoucher.–C’estbien,lafélicita-t-ileneffectuantlesmêmesmouvementsàcôtéd’elle.Tuyarrives!–Tuasçadanslesang!Elleentenditlavoixavantmêmedesentirlefroidquiaccompagnaittoujourslefantôme.Celui-ci,
àgauchedeKylie,tenaitsapropreépéeetsuivaitlesconseilsdeLucas.–Quefais-tu?demanda-t-il.Déplacelepoidsdetoncorpsenarrière,puisenavant.ElleignoraLucas,maiscontinuaàbouger.Elleseconcentraitdésormaissurl’armedel’espritet
nesuivaitplussesinstructions.Comparant les épées, elle constata que celle du fantôme n’était pas tout à fait comme celle qui
étincelait dans ses mains. Elle était bien plus mince et pointue. Et le manche, que Lucas appelait«poignée»,étaitpluslong.–Quel genre d’épée as-tu ? demanda Kylie à l’apparition, en pensant que si elle la poussait à
s’ouvrir,ellepourraitluidonnerunindicedontelleseserviraitpourlafairedisparaître.–L’épéed’unsalaud.Jel’aivoléeàunsalaud.Ellerit,maisnefitpasunseulfauxpas.Elleavait
l’airenforme.Sestalentsd’épéistevalaientlargementceuxdeLucas,etlesdépassaientmême.–Jesuissérieuse.Kylietrébucha.
–Çava?s’inquiétaLucas.–Oui,répondit-elle.Ilfallaitqu’ellecomprennetoutcela.Plustôtlefantômes’enirait,plusviteellepourraittravailler
sursesautresquêtes.– Qui veux-tu que je tue ? demanda-t-elle en continuant à bouger, mais pas assez bien,
apparemment,parcequeLucass’étaitimmobiliséetladévisageait.–Veux-tufaireunepause?demanda-t-il.–Quiest-ce?criapresqueKylie.L’espritregardaLucas.–Écoutecegarçon,c’estunbonprofesseur.Avecunpeud’entraînement,tuserasprête.Tutueras
monennemi,etensuitejetelaisseraiprendremaplaceenenfer.–Enenfer?LesouffledeKylies’entrecoupa.Ellen’avaitjamaiseuaffaireàcephénomène.Elle
ne put s’empêcher d’espérer qu’il se trompait.Mais sachant ce qu’elle savait, connaissant tous lesgensquel’espritprétendaitavoirtués,ellerisquaitbiend’allerenenfer.Lefantômes’évanouit.Kylie tapadupiedde frustration.Elleétaitmaintenant sûreque le fantômeavaitun rapportavec
l’épéequ’elleavait reçue.Maisqu’est-cequecelavoulaitdire?Était-ellecenséeobéirà l’espritettuerquelqu’unpourlui?L’idéed’ôterunevielafitfrissonner.Encoreuneraisonpourlaquelleelleremettaitenquestionses
donsdeguerrièresainte.–Tuveuxdel’eau?demandaLucas.Elle le regarda. Sa peau, déjà dorée par le soleil, étincelait de sueur. Le devant de son T-shirt
moulaitlehautdesontorseetmettaitsespectorauxencoreplusenvaleur.Ellebaissalesyeuxsurlalame.–Existe-t-ildes…desépéesbâtardes?–Oui,pourquoi?Il sortitdeuxbouteillesd’eaude son sac. Il lui endonnaune.Samaineffleura la sienne.Elle la
retira,ilserembrunit.–Pourrien,répondit-elle.Ellesavaitqu’iln’avaitpasenvied’êtreaucourant.Iln’aimaitpaslesfantômes.Maisilestalléau
cimetièrepourmoi,pourm’aider.Mêmeàuneépoqueoùj’étaisunvampire.Ellereposal’épéeetl’observaperdresateintedorée.–C’esttellementétrange,fit-il.–Oui.Labouteillequ’illuiavaitdonnéeglaçal’intérieurdesapaume.Ellel’ouvritetenpritunelongue
gorgée.Ilsburentsansriendire.–Tuesprêteàreprendrel’entraînement?demanda-t-il.Elleregardasonépée,etcellequireposaitsurlaserviette.Devraiesarmesquipouvaienttuer.Un
écart,etlablessurepouvaitêtretrèsgrave.–Jenecroispas.–Pasaveccelles-là.Tun’espasprête.Aveccelles-ci,oui.Ilsortitlesépéesdebois.Ellevoulaitrefuser,maisseditqueplustôtelleapprendraitàsebattre,moinselleverraitLucas.
Ellerebouchalabouteille,ladéposaàcôtédel’épéeetpritl’unedesarmesdebois.–Prête!
Vingtminutesplustard,elleparvenaitàbloquerlaplupartdesesattaques.Maistroisfoisilesquivasonépéeetluitouchalapoitrineavecleboutenbois.–Deuxpointspourleprof,disait-ilàchaquefois.Puisilsrecommençaientàdonnerdegrandscoups,avançaient,reculaientettournaientparfoisen
rond. Le bruit de leurs épées de bois qui s’entrechoquaient résonnait à ses oreilles. De la sueurdégoulinaitencoredesonfront.Maisellel’ignora,déterminéeàgagnerquelquespointstouteseule.Elleenregistraitlemoindredesesmouvements.Seservantdecequ’elleavaitappriscontrelui,elle
attenditsonopportunitéetlasaisit.Elletouchaenfinsontorseavecleboutenbois.Ellesentitlasueurruisselerentresesseins.–Deuxpointspourl’élève,claironna-t-elle,savourantcemomentdesuccès.Etelleadoraitça.Ils’arrêtaetbaissasonépée.–Tunepeuxpassavoircommecesourirem’amanqué.Pourromprelecharme,elleassénaungrandcoupdesalamesurlasienne.–Noussommesvenusicipournousbattre,lança-t-elle.Illevasonarmeetseremitàl’entraînement.–Tumemanques,souffla-t-ilenimmobilisantl’épéedeKylie.Ellerecula,puisrevintaussitôtàlacharge.L’épéedeLucasl’arrêta.Ellereculaetreculaencore.–Tuesmonâmesœur,déclara-t-ilenlabloquantàchaquefois.L’émotion l’envahit. En partie car elle se souvenait l’avoir entendu dire cela à Monique, mais
surtoutparcequ’ellesavaittoutcequ’ilavaitàperdre.Ellefrappaplusfortetsonépéeheurtalesoldansunbruitsourd.L’impactfitvolerl’épéedeLucasdesesmains,etlasiennesebrisaendeux.–Tu devrais faire ce que veut ton père.ÉpouserMonique.Entrer auConseil, comme tu l’avais
prévu.–Jeneveuxpasl’épouser,lâcha-t-ild’unevoixgrave.Jen’auraisjamaisdûaccepter.–Jecroisquenousenavonsterminé,répondit-elle,lecœurbattantàtouteallure,etunmondede
douleurpesantsursapoitrine.Lamélancolieenvahitsonregard.–Pourl’épée,oui,maispasentrenous.Ilrangealeursaffaires,tandisqu’elleessayaitdereprendresonsouffle.Iltrouvalamoitiédeson
épéeetlaramassa.Elleneputs’empêcherdesedemandersicen’étaientpaslesmêmesépéesquesongrand-pèreet
lui utilisaient. Et si c’était le cas, elles devaient sûrement signifier quelque chose pour lui. LaculpabilitéenvahitKylie.–Jenevoulaispaslacasser.–Jesais,c’estbon,celaarrivesouvent.Ilmarquaunepauseetàlafaçondontillaregarda,ilsemblaitsurlepointdedirequelquechose
qu’elle ne voulait pas entendre. Le téléphone de Kylie sonna. Elle le sortit de sa poche. Lucas serembrunit.–Sic’estDella,dis-luiquejevaisteraccompagneràtonbungalow.–C’estmamère, précisaKylie en s’éloignant de quelquesmètres, un peu inquiète que samère
l’appelledurantsesheuresdetravail.–Quoi,maman?fit-elle,anxieuse.–Quoi?C’estjustementcequetuvasmedire,toi!rétorqua-t-elled’untonsec.–Quedevrais-jetedire?–Commentoses-tumefaireça,KylieGalen?
Letondesamèrelarenvoyaàl’époqueoùellesnes’entendaientsurrien–àl’époqueoùellelasurnommaitlaReinedesGlaces.–Maman,qu’ai-jefait?Kylies’éloignaencorepournepasqueLucasentendelaconversation.–Tusaistrèsbiencequetuasfait,nejouepasl’innocenteavecmoi.–Jenejouepas,s’énervaKylie.–TuasrencontréM.etMmeBrighten,pasvrai?Samère parlait si fort que cela lui faisaitmal aux oreilles, et elle était sûre que Lucas pouvait
l’entendre.ElleavaitprévudeluienparlerdèssonretourauxÉtats-Unis,maisaprèslefiascodelagrossesse,
lemomentneluiavaitpasparuidéal.Ethiermatin,avectouteslesexcusesetlesélogessurJohn,celaneluiavaitpassembléopportunnonplus;deplus,c’étaitunsujetqu’ellesdevaientaborderentêteàtête.–Oui,etjecomptaist’enparler.–Comptais?Tucomptaism’enparler?Tunecroispasquetuauraisdûmeledireavantd’agir!–Jet’aiditquejevoulaislefaire.Nousl’avonsévoquéilyadesmois,tutesouviens.–Tuauraisdûendiscuterd’abordavecmoi.Et toi, tu aurais dû m’en parler voilà des années. Mais elle ne dit mot. Sa mère n’était jamais
raisonnablequandelleétait énervéeàcepoint, etmettrede l’huile sur le feudanscesmoments-làn’étaitpasintelligent.–Ilst’ontappelée?demandaKylie.Pourquoiavaient-ilsdécidéde l’appeler?C’estellequidevaits’encharger…Maisbon,elle les
voyaitmalsemontrergrossiersenverssamère.–Oui,ilsm’ontpasséuncoupdefil!Tuimaginesàquelpointlaconversationétaitbizarre?–Jesuisdésolée.MaistuétaisenAngleterre.–Depuiscombiendetempscelaétait-ilprévu,jeunefille?– Ils s’étaientabsentéset jenecroismêmepasqu’ilsaienteumonmessageavantde rentrer. Ils
m’ontrappeléepourmeprévenirqu’ilsvoulaientvenirimmédiatement.–Tuauraisdûd’abordm’enfairepart,missGalen!Ohmince, dès que samère l’appelaitmissGalen,Kylie savait qu’elle était cuite. Et comme de
nombreusesfoisdanslepassé,ellenepensaitpasmériterça.–J’auraisdûêtrepréparéeàleurparler,maisnon,cecoupdefilm’esttombédessussansprévenir.–Jesuisdésolée,répétaKylie.–Johnétaitavecmoiquandl’appelestarrivé.Deslarmesemplirentsesyeuxetelleneparvintplusàcontenirsacolèrepluslongtemps.–C’estpourçaquetuesénervée?ParcequeJohnétaitlà?–JeneluiaipasditqueTomn’étaitpastonpère,c’étaitvraimentlahonte.–Tuashontedemoi?–Arrêtederetournerlasituation.–Retournerlasituation?Jesuisdésolée,maman,maissitusavaiscommetutetrompes…–Ce n’est pas toi quime fais honte.Mais le fait d’avoir attendu un enfant d’un homme que je
connaissaisàpeine.Kylieessuyaseslarmes.–Maistum’astoujoursaffirméquetul’aimais.Samèreseraclalagorge.
–Biensûr,mais…– Mais quoi ? Tu avais peur que ton cher John prenne ton omission de la vérité pour un
mensonge?–Kylie,nesoispas…–Etceneseraitpasbien,n’est-cepas?poursuivit-elle.Attends,tun’espasobligéederépondre,
parcequejepeuxtedirecequecelafait.Quandquelqu’unquetupensaisconnaîtretecachequelquechose,quelquechosequiauraitdûcompter.Jenepeuxpascroirequetusoisencolèrecontremoidenepas t’avoirditque j’avaiscontacté lesBrighten,alorsque tunem’ascarrément jamaisparlédemonproprepèrenidemesgrands-parentspendanttoutescesannées!Samèreinspiraungrandcoup,cequifuttrèséloquent.–Je…jecroyaistel’avoirexpliqué…–Oui, tum’as expliqué que tu étais folle amoureuse de papa, et voilà que tu prétends que tu le
connaissaisàpeine?–Je…jenecroispasquenousdevrionsdiscuterdecelaautéléphone.–Vraiment?C’estunpeucequejemesuisditàproposdesBrighten.D’autreslarmesruisselèrentsursesjoues.Elleraccrocha,tellementencolèrequ’elleavaitenviedejeterleportable.Ellen’enfitrien,mais
ellel’éteignitaucasoùsamèreessaieraitdelarappeler.–Jesuisdésolé,fitLucasderrièreelle.Elleessuyadenouveauseslarmesetseretourna.Ellenesavaitpasqu’ilsetrouvaitsiprès,etsans
réfléchir elle courut se blottir dans ses bras.Après quelques secondes, durant lesquelles elle sentitcombienc’étaitbond’êtrecontrelui,ellesereculaensedisantqu’ellenedevaitplusjamaisselaisserallercommeça.
Levendredisuivant, ilétaitpresqueminuit,maisKylienedormaitpas.Allongéesursonlit,ellefixaitleplafondenressassanttoussesproblèmes.Samère,contrelaquelleelleétaitencoreencolère,etsaquêtevisiblementimpossiblepoursauver
lesjeunescaméléons.Sonfantômecomplètementinsupportable.EtLucas.Elleavaituneenvieinsoutenabledeparleràsonpère,qu’ellen’avaitnivunisentidepuislavisite
desBrighten.Etenfin,etcen’étaitsûrementpaslemoindre,unescroccruel,dontlamenacerésonnaitencoreà
sesoreilles :TuviendrasmevoirKylieGalen,prêteàmourir, à souffrir entremesmainspourmonplaisir,parcequeleprixseratropélevé!Tafaiblesseteperdra!Pourl’instant,safaiblesse,c’étaitsonincapacitéàcomprendre.Elleavaitl’impressiondepatauger
dansl’incertitudedanstouslesdomainesdesavie.Le seul dans lequel elle s’était sentie productive cette semaine, c’était son don àmanier l’épée.
ParfoisellesedemandaitsicetteétonnantecapacitéétaitsimplementliéeàLucas.Aufaitd’êtreavecluiuneheureoudeuxparjour.Oh!non,ellen’avaitpassuccombéàsesavances.Pasdutout.Desgestessubtils,commemarcher
siprèsquesonépauleeffleuraitlasienne,satactiquedeluimontrersonintérêtensepostantderrièreellepourluifaireadopterunecertainepostureouunmouvement.Etpuis,ilyavaitsatechniquededraguepassisubtile : ilssebattaientenduelavec leursépéesenboisquand,d’unseulcoup, il lui
sortait : « Je t’aime » ou « Sais-tu comme tu es belle ? » ou «Te souviens-tu de la nuit où noussommesrentrésducimetièreetoùnousavonsfaillifairel’amour?»Elleavaitcassétroisautresépéesdeboisquandilluiavaitditcela,enplus.Elles’étaitditquecela
lerefroidirait,maispasdutout:Lucasavaitmêmeriladeuxièmefois.Maiscen’étaitpasdélibérédelapartdeKylie,non,c’étaitjustesacrémentdifficiledenepaslaissersesémotionssetraduiredanssescoups.Ce jour-là, alors qu’ils partaient, elle avait appelé ce qu’ils faisaient « de l’escrime » et Lucas
l’avaitcorrigée.Illuiexpliquaqu’ellen’apprenaitpasl’escrime.Quecelacomportaitunensemblededonsdifférents.Elleapprenaitàsebattre.Ilnel’exprimapas,maisellelelutdanssespensées.Elles’entraînaitàtuer.Maisqui?Etcomment?Oh,ellesavaitqueceseraitavecuneépée,maiselleignoraitsielleseraitcapablede
lefaire.Deprendrevraimentunevie.Laissant échapper un profond soupir, elle roula sur le côté, donna un coup de poing dans son
oreiller,etserappelaCollinWarrenquandellel’avaitbalancéàl’autreboutdelapièce.Sonintentionn’avaitpasétédeletuer,maissimplementdeprotéger.Ellenel’avaitpastué,maiselleauraitpu.Etpeut-être«cela»sepasserait-ilainsi.Peut-êtrequesisonmodeprotecteurétaitenmarche,elle
serait capable de le faire sans réfléchir ?La grande question, cependant, était : pourrait-elle vivreavecça?Peut-être,sic’étaitpoursauverquelqu’unqu’elleaimait.Oupourtuerquelqu’unqu’elledétestait.Lefroidlasubmergea.Kylies’assitbiendroiteetvitlefantômeàl’autreboutdesonlit,sonépéeà
lamain.Ellel’avaitvutouslesjourspendantqu’elles’entraînaitavecLucas.Ildébarquaitcommeçaetvenait faire les exercicesaveceux,mais endépitde tous les effortsdeKylie, il ne lui avaitpasparléuneseulefois.–Pourquoiest-cequejedétesteautantcela?demanda-t-elle.–Tulesais,réponditlefantôme.–Dis-le-moi,bonsang!J’enaiassez,detesjeux!Della,àmoitiéendormie,fitirruptiondanslachambredesonamie.–Tuvasbien?–Oui.Va-t’en!Commeilnepartaitpas,elleajouta:C’estunproblèmedefantôme.Dellafilad’uncoup.Kylieregardaautourd’elle,maislefantômeavaitdisparu.–Pourquoijedétesteautantcela?répéta-t-elle.Le fantômene revint pas,mais brusquementKylie comprit.Elle en était sûre et certaine.Mario.
ElleétaitsupposéetuerMario.Aufondd’elle,elleavaittoujourssuqu’ilss’affronteraientdenouveau.Cequ’elleignorait,c’était
commentelleallaitlevaincre.Ilavaiteudesannéespourconstruiresespouvoirs.Commentpourrait-elleêtreàlahauteur?Puisuneautrequestions’imposa.Était-celuiquelefantômevoulaitqu’elletue?Quelsétaientses
liensavecMario?
Samedimatin, au réfectoire,Kylie attendait que samère arrive pour la journée des parents. Ellen’avaitpasprécisésiJohnl’accompagnerait.Ellepriaitvraimentpourqu’ilneviennepas.Conscientedecequesarelationavecsamèreétaitbranlante,ellen’avaitpasbesoindeluienplus.Finalement, lebeau-pèredeKylieavaitdûquitterlavillepourdesraisonsprofessionnellesetne
seraitdoncpaslà–cequil’arrangeait.Sanslui,leniveaudecombustionbaisseraitauminimumd’undegré.Ellen’avaitpascesséd’aimerTomGalen,maispour l’heure, la figurepaternellequeKyliemouraitd’enviedevoir,c’étaitsonvraipère.DepuislavisitedesBrighten,elledésiraitplusquetoutpasserdutempsavecDaniel.Presquetouslessoirsavantdesecoucher,ellesortait l’albumphotosque ceux-ci lui avaient laissé, et presque toutes les nuits elle finissait par pleurer. Elle avaitl’impressionquelaviel’avaitescroquée.L’avaitescroqué,luiaussi.Kylieregardalesparentspasserlaportesanssepresser.CeuxdeMirandaentrèrentetlatrouvèrent
sagementassiseàunetable.VoirMirandaainsi,celadétonnait,commesil’onportaitseschaussuresaumauvaispied.LamèredeMirandamobilisaittoutelaconfianceetlapersonnalitédelasorcière.C’étaittellement
injuste.LamèredeDerekentra,pleined’exubérance,impatientedevoirsonfils.Voilàcommentdevraient
secomporter lesparents, songeaKylie.La femmebalaya lapiècedu regard.Quandelle remarquaKylie,ellesourit,luiadressaungestedelamainetsedirigeaverselle.Heureusement,Derekl’appeladepuis l’autre bout de la salle, lui évitant ainsi une conversation gênante. Que dire à la mère dugarçondontvousvenezdebriserlecœur?Les parents d’Helen arrivèrent, l’air inquiet, ils n’avaient ramené leur fille que quelques jours
auparavant.Jonathonn’avaitcessédesouriredepuisleretourd’Helen.Kylies’étaitassiseaveceuxàpresquechaquedéjeuner,laissantMirandaetDellaavecleursgroupesrespectifs.Laveilleàmidi,elle
avait examiné toutes les différentes tables réunissant chaque communauté en se demandant s’il yauraitunjourunetabledecaméléonsàShadowFalls.Ensuite, ce fut le tour des parents deDella et de sa sœur. Son père avait toujours lemême air,
énervéetmécontentd’être là. Il luiavaitmêmeconfiéunefoisque laseule raisonpour laquelle ilvenait,c’étaitparcequesafemmel’yforçait.Kylieauraitadoréinjecterunpeudebonsensenlui.Commentpouvait-ilignorerlemalquecesparolesfaisaientàsafille?Àl’autreboutdelasalle,Della,sourcilsfroncés,regardaitsafamillepasserlaporte.Kylieétaitde
toutcœuravecelle.Sitantestquecefûtpossible,saviedefamilleétaitpirequelasienne.–Tuvasbien?demandaHolidayens’approchantd’elle.–Oui,jemedemandaisjustepourquoicesfamillessonttoutesaussitarées.Onnepeutpass’aimer,
toutsimplement?Holidayeffleural’épauledeKylie,enluiprodiguantunpeudecalmeaffectif.–Ilss’aiment,si.Lesdrames,c’estmonnaiecourantequandonaunefamille.Cequetuvoisdans
cettepièceencemoment,c’estsûrementlepirecasdefigure.–Commentça?– Lemoment le plus difficile dans une relation, c’est le changement. Et rien n’apporte plus de
changementdans ladynamiqued’une famillequequandunadodevient lui-même ;c’estaussivraipourleshumainsquepourlessurnaturels.HolidaysurpritleregarddeKyliequiallaitdeMirandaàDella,etajouta:–Dansquelquesannées,Mirandasemoquerabienquesamèreapprouveseschoixounon.Etsa
mèreaccepterapeuàpeuqueMirandasoitunepersonneàpartentière.Dellagrandiraetaccompliradegrandeschosesparcequecesera leminimumqu’elle s’imposera.Sonpèreserabienobligédereconnaîtreque,mêmes’iln’apascomprisleschangementsdanslaviedesafillecelle-ci,unefoisadulte,réussiramagnifiquementsavie.–Ettunecroispasquecetterancœuraltéreraleurrelation?Holidaysoupira.–Oh, ilyaurabiendescicatricesetdes raccommodagesà faire,etdanscertaines familles,cela
finit mal. Elle marqua une pause. Mais pour la plupart, les problèmes que tu vois ici sont desdifficultésdontl’environnementfamilialpourraseremettre.–C’estencourageant,fitKylie.–As-turappelélesBrighten?demandaHoliday.–Oui,jeleuraiparlé.Ilsvoulaientveniràlajournéedesparentspourrencontrermaman.Holidaysetendit.–Tunemel’aspasdit.– Ilsneviennentpas finalement. Jepensequemamèren’estpasprêteà les rencontrer.Après la
disputequel’onaeueparcequejelesvoyais,nousn’avonspratiquementpasparléd’eux.Elles’estexcusée, mais depuis, nous faisons toutes les deux comme si de rien n’était. J’ai un peu peur deremettreçasurletapis.–Celavas’arranger,tamèren’apasl’airdugenredéraisonnableouexcessif.–Onvoitquetunelaconnaispas,répliqua-t-elle.Sielleavaitditcelaenplaisantantàmoitié,elleycroyaitdurcommefer.–J’aieudelavisitehiersoir,annonça-t-ellepourchangerdesujet.–Luias-tuparlé,cettefois?–Unpeu.Ellesemorditlalèvre.Jecroisquetoutestlié.L’épée,lefantômeetMario.Holidayplissalefront.
–Pourquoipenses-tucela?Kylies’approchad’elle.–Quelquechosequ’iladit.Etjusteunpressentiment.–MlleBrandon?criaquelqu’undepuisl’autreboutdelasalle.Holidaycollaunemainsurlebrasdesonamieetfronçalessourcils.–Nousdiscuteronsplustard.Kylieopina,etalorsqueladirectrices’enallait,ellevitLucasarriver.Ilallarejoindreungroupe
deloups-garous.L’und’euxditquelquechose,puisilsselevèrenttousd’unbondetlaissèrentLucastoutseul.Çacommence,songea-t-elle.Ilslefichaientdehors.Elleavaitmalpourlui.–Triste,n’est-cepas?fitunevoixderrièreelle.Etc’estdetafaute.KylieseretournaetfitfaceàlasœurdeLucas,maiscettedernièredétala.Elleretintsonsouffleet
reposa les yeux surLucas.Ellemourait d’envie d’aller le voir, de le consoler,mais cela ne feraitqu’empirerleschoses.Cinqminutesplustard,lagrand-mèreduloup-garouentraavecpeinedanslasalleàmanger.Kylie
passa la foule en revue. Lucas était toujours assis tout seul à la table du fond. La vieille dameparcourutlasalleduregardettrouvaKylie.Alors qu’elle se dirigeait vers elle de sa démarche traînante, son cœur s’arrêta. Oh non ! Elle
n’avaitpasenviede l’entendre l’enguirlanderparcequ’elleavait ruiné lesobjectifset lesquêtesdesonpetit-fils.Kylieallaitfileràtouteallureparlaportelatérale,quandelleentenditsamère.Elleseretournaet
lavit…avecJohn.Oh!mince,ilestvenu!Kylieseruaverssesinvitésavecunempressementfeint,priantpourqueceladécouragelavieille
damed’approcher.Aprèsuneétreinterapideavecsamère,etaprèsavoirignoréJohn,ellelesconduisitversunetable
vide,leplusloinpossibledeLucas.Soncœurneretrouvapassonrythmenormaltantqu’ellen’eutpasvulagrand-mèredeLucassedirigerverssatable.–MercimonDieu,marmonna-t-elle.Etelleleurfitsignedes’asseoir.–MercimonDieuquoi?demandasamère,toujoursdebout.Kylie ouvrit la bouche, en priant pour que quelque chose d’intelligent,même unmensonge, en
sorte.Cesdernierstemps,sesprièresn’avaientpasétéexaucéesetcelacontinuait.Ellenefutcapabled’aucuneexplication.Pireencore,soncerveaus’étaitfermé.–MercimonDieuquoi?redemandasamère.–Quemonmalauventreaitdisparu,inventa-t-elleencollantunemainsursonabdomen.–Tuasdesdouleursauventre?s’enquit-elle,inquiète.–Cen’estrien.–Tun’ensaisrien,insistasamère.–Si,réponditKyliesuruntonhautperché,craignantquesamèrenelatraîneauxurgences.Siça
setrouvait,ellel’accuseraitdenouveaud’êtreenceinte.–Commentsais-tuquecen’estrien?laquestionnaencoresamère.–Parcequecesontdes…gaz.J’aidesgaz.SamèrerougitetregardabrièvementJohn.Kyliesentitsonproprevisageseréchauffer,commeun
fourBettyCrocker.Detouslesbobardsqu’elleauraitputrouver,pourquoidesgaz?Samamansepenchalégèrement.–As-tubesoind’alleraupetitcoin?
–Non,c’estparti.–Tuessûre?–Certaine.Kylie se laissa tomber surunechaiseetpriapourquecelane soitpasprémonitoirede la façon
dontleschosesallaientsedérouler.
Quarante-cinqminutesplustard,Kylie,Johnetsamèreétaienttoujoursassisàtableetbavardaient.Enfin,lajeunefilleouvraitàpeinelabouche,tandisqueJohnetsamèrediscutaientàbâtonsrompus.Ils parlèrent de son nouveau boulot, qu’elle commencerait dans deux semaines, et même del’Angleterre.–Oh,jet’aiapportéquelquechose.Ellesortitunsachetdesonsacàmain.–JesaisquetuaimesbienlesT-shirts,ajouta-t-elle.Kylieneput s’empêcherdepenser :Mamèreestallée enAngleterre, et ellem’a rapportéunT-
shirt!maisellesourit,lesortitdusacetgloussaquandellelutlemessagesurledevant:MamèreestalléeenAngleterreetellem’arapportéunT-shirt!–Parfait,lança-t-elle,etenplusilestrose.–Jet’aiaussirapportécela.Ellesortitunepetiteboîteblanche.Lebraceletàbreloquesreflétalalumière,presquecommeparmagie,lorsqueKylieouvritlaboîte.
Son cœurmanquaunbattement envoyant les breloques.Une épéequi ressemblait beaucoup àuneépéedecroisé,unecroixquiressemblaitbeaucouptropàcellequiornaitl’arme,etunemblèmedeJeanned’Arc.– Je l’ai acheté dans l’un des châteaux et il n’y avait pas grand choix,mais… pour une raison
étrange,jemesuissentieobligéedechoisircelui-ci.J’espèrequetunetrouvespasçadébile.Explique-moitaraisonauraitvoululuidemanderKylie,maiselleseretint.–Non,j’aimebien,merci.Unfrissonglacialqu’ellereconnaîtraitentretouslaparcourut.Daniel était-il là ? Son père avait-il poussé samère à acheter ces breloques ?Elle jeta un coup
d’œilautourd’elleenespérantlevoir,maisilnesematérialisapas.–Bientôt,Kylie,bientôt.Lesparolesrésonnèrentdanssatête,lapeurenvahitsoncœur.–Tumemanques, dit Kylie intérieurement. Je ne sais pas si je suis prête àmourir,mais tume
manques.Despasrésonnèrentdanslasalle.Etellevitlesautresparentspartir.Samèreregardaautourd’elle.–Cesvisitespassentsivite!Jedoisfaireuntourauxtoilettesavantdem’enaller.Elleselevad’uncoupetdétala.Kylieallaitsuivresamère,quandJohnposasamainsurlasienne.
Lecontactde sapaume fitnaîtreun frisson le longde sacolonnevertébrale. Iln’étaitni chaudnifroid.Justeémotionnellementmauvais.Elleretirasamain.–J’espéraisavoirunechancedeteparler,avoua-t-il.Etmoi,non.Ellejetauncoupd’œilverslestoilettes.–Jecroisqueje…–Pourquoitunem’aimespas,Kylie?Elleleregarda.Décisions,décisions…Allait-ellesemontrerdiplomateouhonnête?Qui a donc déclaré que l’honnêteté payait toujours ? Elle ne se souvenait pas, mais pensa que
c’étaitungénie.
–Voyonsvoir,commençaKylie,quineperditpasuneseconde.CommençonsparlabagarreavecTomquetuasdéclenchéedevanttoutemonécole?John,surladéfensive,carralesépaules.–C’estluiquim’afrappé.–Tul’avaisinsulté.Ettuasaussifourrétalanguedanslagorgedemamèredevanttouslesélèves
etleursparents.Veux-tuquejepoursuive?Jepensequejetrouveraitrèsvited’autresraisons.Lacolèreenvahitsesyeux,maisileutl’airdelamaîtriser.–Tunemâchespastesmots,hein?Elleluiadressaunsourirecrispé.–Sijustement,jelesaimâchés.–C’estunplaisirdeparleravectoi!lança-t-il.Toutefois,leproblème,c’estquetamèrem’aime
vraimentetquec’estréciproque.Jenecroispasprendrederisquessijetedisqu’ilvaudraitmieuxquel’ons’entendebien.Kyliesepenchaverslui.– Je ne crois pas prendre de risques si je te dis que tu ne connais pas ma mère depuis assez
longtempspourmesortircegenredechoses.Elle put jurer voir ses yeux s’illuminer. De façon non-humaine. Elle fronça les sourcils pour
vérifiersaconfiguration.Quiétaitdonccethomme?Saconfigurationhumaineapparutclairement.Celanevoulaitpasdirepourautantqu’iln’étaitpas
uncaméléon,mais…Lacolèreenvahitsesyeuxgris.–Celapourraitfinirparfairedumalàtamère.Sesparolesétaientsifroides,simenaçantesqueKyliesentitsoninstinctdeprotectionsemettreen
branle.–Commentça?Elleserralespoings
Ildétournaleregardpuis,quandillaregardadenouveau,sesyeuxétaientredevenusnormaux.–Justequedesproblèmesentrenouspourraientfairesouffrirtamère.Ellelefixadroitdanslesyeux.Elledevinaqu’ilmentait,quesesparolesavaientbeletbienétéune
menace.Elletâchad’apaiserlepétillementdanssesveines,maiscelui-cicontinua.Par-dessusl’épauledeJohn,ellevitsamèresortirdestoilettes.Ellesepenchaau-dessusdelatableetmurmura.–Siquelqu’unosefairedumalàmamère,jeletue.Kyliecompritsoudaindeuxchoses:elleavaitbeletbienledondedeveniruneguerrièresainte.
ParcequesiJohnposaitunseuldoigtsursamère,ellepourraiteffectivementletuer,etleferaitsansregret.Etdeuxièmement,ellenepouvaitsimplementpasmourir,pasmaintenant.Passipourcelaelledevaitlaissersamèreaveccetenfoiré.–Toutvabien?demandasamèreensentantlatensionquirégnaitentreeux.KylieattenditdevoircommentJohnallaitlajouer.–Toutvabien,nousdiscutions,c’esttout.Ilseleva.J’imaginequec’estl’heuredepartir.Ilssemirentenroute,maislapeurpoursamères’intensifiaitàchacundesespas.Kylienepouvait
paslalaisserpartiraveccetype,passanslamettreengarde.Elleluiattrapalebras.–J’aimeraisteprésenterquelqu’un.Johnseretourna.–Peux-tunouslaisseruneminute?Kylieluiadressaunregardquiledéfiaitd’intervenir.Ilhésita,puisdit:–Jet’attendsàlavoiture.–Alors,quiaimerais-tumeprésenter?–Maman, je sais que ce que je vais te dire ne va pas te plaire, mais Johnm’angoisse. Je suis
inquiètepourtasécurité.–Quoi?Jenecomprendspas.Qu’a-t-ilfait?–Jeneluifaispasconfiance.Ilmefichelatrouille.Etjesuisbonnepsychologue.Ladouleurapparutdanslesyeuxdesamère.–Moiaussi,jeunefille.Désoléequ’ilneteplaisepas,maismoijel’aime.LadouleurdesamèreserépercutadanslapoitrinedeKylie.–J’aimeraisjustequetusoisprudenteetquetunelaissespascelaallertropvite.Samèreserenfrogna.–C’estparcequetuveuxquetonpèreetmoirevenionsensemble.– Premièrement, lança Kylie, à présent embêtée, Tom est mon beau-père. Deuxièmement oui,
j’aimeraisquevousvousréconciliiez,maislàn’estpasleproblème.–Ohquesi,jeunefille,parcequeJohnestl’hommeleplusdouxquejeconnaisse.Ellesepenchaet
l’embrassa sur la joue. Maintenant, je te prie de te faire à l’idée que ton beau-père et moi nereviendronsjamaisensemble.Ellepartit.–Çava?Lavoixmasculinesurgitprèsdesonoreille.Ellecrutquec’étaitDerek.Ilavaitledondedevinerquandellesubissaitunchocémotionnel.Mais
ellereconnutviteletongraveetsexy.Celuiqu’elleavaitessayé,toutelasemainedernière,deréduireenlambeauxàl’aided’uneépéeenbois.Elleseretourna.
– Oui. Puis sa colère réprimée envahit sa poitrine et elle comprit ce qui allait l’aider. Veux-tut’entraîner?–Maintenant?demandaLucas.–J’aibesoind’expulsermonagressivité.Demedéfouler.–Delapassersurmoi?Ilsouritàmoitié.–Non…Veux-tum’entraîneroupas?répéta-t-elled’untonsec.Ellen’étaitpasd’humeuràfairedel’humour.C’estvrai,quelqu’unluiavaitenvoyéuneépéepour
apprendreàsebattreets’ilsvoulaientqu’ellesebatte,ehbienc’estqu’ilsavaientdésiréqu’elleresteen vie, à l’évidence. Et elle avait bien l’intention de le faire pour protéger samère de sales typescommeJohn.Resterenvie,voilàquiluisemblaitunebonneidée.–Biensûr,fitLucas,unpeuinquiet.Laisse-moienparleràBurnett.Sonregardnequittapasson
visage.Ques’est-ilpassé?–Pasenvied’enparler.Jeveuxjustemebattre.
Unedemi-heureplustard,KylieavaitdéjàcasséuneépéesansqueLucasluiaitsortiqu’ill’aimaitnirien,niqu’elleétaitbelle,nimêmequ’ilaitfaituneallusionàleurscâlinsdansl’herbe.Il lui fit faire des étirements, insista pour la voir évacuer sa tension. Elle n’y parvenait pas, ça
tourbillonnaitenelle.Lapeurpoursamèrerongeaitsasantémentale;lapeurpourLucasetpourcequiluiarriveraitsijamaislameuteseretournaitcontreluientamaitsatranquillitéd’esprit.–Tuneveuxtoujourspasparler?demanda-t-ilalorsqueleursépéess’entrechoquaient.Si,maisjenesaispasquoidire.–Non,mentit-elleenchangeantdepostureetenparvenantàpassersonépéepar-dessuslasienne,
puiselletapotasapoitrineduboutdesonarme.–Tudeviensbonne,observa-t-il,enregardantfixementleboisquitouchaitsoncœur.Ellereculapourlelaisserreprendresonéquilibre.Quelquessecondesplustard,ilsseremirentà
fairedesfeintes,quandellesentitlefroidlasubmerger.–Excellent.L’élèvedépasselemaître.Iltefautunnouveauprof.Kyliejetauncoupd’œilsurlefantômedeboutavecsonépée.–Quid’autrepourraitm’apprendre?–Moi,biensûr.Maispasdecombatdechochotteavecdesépéesenbois.Tudoisapprendreà te
battreavecunearmevéritable.LecœurdeKylies’accéléraaurappeldesapeurprincipale.–Vais-jemourir?Lefantômesoupira:–Àtoidevoir.C’étaittriste,non,qu’ellepréfèrecroireunespritmeurtrierplutôtquesonpère?Maislefaitétait
qu’ellevoulaitvivre.–Tuesprête?demandaLucas.Kyliesetournaverslui.–Uneseconde.Ellesetournaversl’esprit.–Connais-tumonpère?Laquestionquittaseslèvresàl’instantmêmeoùl’espritdisparaissait.
AffrontantdenouveauLucas,ellelevasonépéeetlecombatreprit.–Dois-jeluidonneruneleçon?demandaLucasquandsonépées’entrechoquacontrelasienne.–Àqui?–Aucopaindetamère,répondit-ilenbloquantsalame.–Non,jedoisl’arrêter.Àconditionqu’ellenemeurepasd’abord.Puisellesentitunincendieembrasersonventre.Ellene
mourraitpas.Elleallaitsebattreetgagner.EtLucasdevaitfairelamêmechose,réalisa-t-elle.– Tu commences à avoir du cran, reconnut-il, mais d’un seul coup elle se déconcentra. Il la
contournaavecsonépéeetluidonnauncoupsurl’épaule.Kylieregardalapointe.–Cen’étaitpasuncoupmortel.Tunepeuxpasdirequec’estunevictoire.–Non,maistusaigneraistellementquetuneferaispaslongfeu.–Trèsbien.Ellerecula,prêteàrecommencer.Cettefois,ellefitplusattention,bloquatouteslesattaques.Dela
sueurdégoulinaitdesonfront.Elleavaitmalauxmuscles,malaucœur.–TuauraisdûmeparlerdeMonique,déclara-t-elle sans se rendrecomptedecequ’ellevoulait
dire.Lebruitduboisquel’onentrechoquaitemplitl’aircommeletonnerre.Sij’avaissu…Qu’aurait-elle fait ? Donner sa bénédiction ? Sûrement pas, mais peut-être ne se serait-elle pas
sentieaussitrahie.Peut-êtrenel’aurait-ellepasmisedanslemêmesacquetouteslesautrestrahisonsdesonpassé.– Tu ne l’aurais pas accepté, finit-il à sa place. Il entama de nouveau ces mouvements de pied
compliquésautourd’elle.Ettuauraiseubienraison.C’étaitunemauvaiseappréciationdemapart.–Mauvaisepournous,peut-être,maispeut-êtrecequ’ilfallaitpourtoi.Tuastropàperdre,Lucas.–C’esttoiquejeneveuxpasperdre!Leursépéess’entrechoquèrent,lebruitviolentcrépitadansl’air.Ilss’éloignèrentl’undel’autre.–Jet’aiditquec’étaitterminé.DisàMoniquequetuveuxl’épouser.–Non.–Alorsretourneàtonplanoriginel:dis-luiquetul’épouseras,intègreleConseil,etensuitetute
rétractes.–Non,c’étaitunmauvaisplan.–Toutlemondem’enveutdegâchertesrêves,lança-t-elle.Etunjour,tum’envoudrastoiaussi.Àconditionquejevive.Illevasonépée.Ellel’imita.Ilparlatoutensedéplaçant.–Celuiquitetientpourresponsableestunidiot.C’estmoiquiaidécidédenepassignerlecontrat
defiançailles.Pastoi.Lesépéess’entrechoquèrentdenouveau.–Tasœurlecroit.Mêmetagrand-mère.Jel’aivudanssesyeuxaujourd’hui.–Masœureststupide.J’aimemagrand-mère,maiscelaneveutpasdirequ’ellearaison.Ellesuit
beaucoupdecroyancesdesanciens.–Tameutete tourneledos, je l’aivu.Sagorgeseserradenouveau.Tunepeuxpaslesperdre,
Lucas.Tum’asrépétémillefoiscombienilsétaientimportantspourtoi.–Maistoitul’esbeaucoupplus.Jenepeuxpasteperdre.–Tum’asdéjàperdue,lança-t-elle,bouillonnantderage,etellebloquadenouveausonépée.
Ellenepouvaitpas le laisser fairecela.Ellenepouvaitpas le laissersacrifier toutcequ’ilavaitdésiré.Ellenepouvaitpasimaginerqu’illadétesteraitunjour.Il se retira. Elle s’attendait qu’il surgisse sur la gauche, mais il arriva sur la droite. Et elle ne
parvintpasàlebloquer.Ilplaçasonépéepilesursoncœur.Celui-ciétaituncoupmortel.Ildonnadélibérémentuncoupd’épéesursapoitrine.–Toncœurm’appartient.Nel’oubliejamais.Elle recula en titubant, la colère l’envahit à l’idée de savoir tout ce qu’il pourrait perdre. Elle
balançal’épée,seretournaetregardafixementl’eau,sagorgeseserraetsavisiondevinttoutefloue.Ils’approchad’elle.Nelatouchapas,commes’ilsedoutaitqu’ellenelelaisseraitpasfaire.Maisil
sepostasiprèsd’ellequesesparoleseffleurèrentsajoueetenvoyèrentdesfrissonsderegretlelongdesacolonnevertébrale.–J’aiétéaveuglé,murmura-t-il.J’aieutort.J’aiétéstupide.Maispasuneminutejen’aicesséde
t’aimer.Je…jeméritequetumepardonnes.Ilétaitpardonnédepuislongtemps.Maiscen’étaitpasleplusgrosproblème…Unelarmeglissade
sescils.Elles’éloignadequelquesmètres.–Finipourmoi,déclara-t-elle.Jeveuxretourneraubungalow.–OK,fit-il,l’airmalheureux.Ilramassaetrangealematériel.–Jecroisquetuesprêteàt’entraîneravecdevraiesépées.Elleréfléchitaunombredefoisoùleboisavaittouchéaccidentellementsoncorps,puissesouvint
desproposdufantôme.Mourirétaitsonchoix.Etelleavaitdécidédevivre.Elledevaitêtreprêteàsebattrepoursauversapeau.–D’accord,acquiesça-t-elle,entâchantdenepaslaisserlapeurimprégnersavoix.
–Es-tuprête?Kylievenaitàpeinedes’endormir,lorsquelavoixetlefroidglaciallaréveillèrent.–Prêteàquoi?demanda-t-ellesansouvrirlesyeux.–Àt’entraîner.Jetel’aidit.Iltefautunmeilleurprof.–C’estunsuperprof,rétorqua-t-elle,défendantLucassansmêmes’enrendrecompte–Ilestsuperàregarder,oui.Etjereconnaisqu’ilacertainstalents,maisil tefautplusquecela.
Alorsréveille-toi.Kylieouvritunœilnonsansmaletsursautaenvoyantlevisagedufantômeàquelquescentimètres
dusien.–Sais-tuquelesvivantsontbesoindehuitheuresdesommeil?– C’est la règle pour les humains. Les surnaturels peuvent survivre avec beaucoup moins.
Maintenant,deboutetauboulot!–Jen’aipasmonépée.–Aaaah,maissitutelèves,tuverrasqu’elleestdéjàlà.KylierevitHolidayluiaffirmerquecen’étaitpaspossible.«Unfantômenepeutpasdéplacerdes
objets.»–Jen’aipasditquejel’avaisbougée;simplementqu’elleétaitlà.–Alorsquiladéplace?demandaKylie.–Nefaispascommesitunesavaispas.Lesmêmesquit’ontremiscetteépée.Lesangesdelamort.LesouffledeKyliesecoupa.–IlsveulentquejetueMario?
– Eh bien, je ne leur ai pas parlé directement. Il se pencha. Franchement, ils me rendent trèsnerveux.MaisquantàtuerMario,c’estbiencequ’ilsemblerait,non?–Ettoi?demandaKylie.Queveux-tu?Lamêmechose?–Tu sais, j’ai essayé de comprendre toute seule. Mais chaque fois que je me rapproche de la
réponse,ondiraitqu’elles’éloignedavantage.Pourquoidonc?Lafemmefantômeavaitl’airsincèrementperplexeetvulnérable.Kylie se rappela le fantôme qui pleurait son fils. Peut-être n’était-il pas si mauvais, en fin de
compte.Elles’assitbiendroitetregardal’horloge.–Ilestdeuxheuresdumatin.Tuveuxvraimentquejemelève?–Jetevoismaltebattreallongéeaulit.Jet’auraistranspercéeavantmêmequetun’aieslevéton
épée!Bien,l’espritn’étaitpassimauvais,aprèstout.Enselevant,elleremarqual’épéeauboutdulit.Et
aussiSocks,dontlepetitvisagefélindépassaitàpeinedesouslelit.–OK…jesuisprête,annonça-t-elleens’emparantdesonépée.–Enfileunerobeblanche.Ouquelquechosedeblanc,ditl’esprit.Kyliebaissalesyeuxsursachemisedenuitnoire.–Pourquoi?–Neveux-tupasmourirenblanc?LecœurdeKylies’arrêta.L’espritrit.–Tu démarres au quart de tour !Mets du blanc, parce que sinon, comment sauras-tu que tu es
blesséeetquetusaignes?Kyliereposasonépée.–Jenesuispassûredevouloirjouer.L’espritritdenouveau.–Net’inquiètepas.Jevaisjustemarquertarobe.Jenepeuxpastetoucher,danslaréalité.KylieattrapaunT-shirtetunboxerblancs.Ellesserendirentdansleséjour.L’épéedelajeunefille
étincelaitd’unjaunevif.EllesvenaientdecommenceràfairedesfeinteslorsqueDellasurgitbrusquementdesachambre,
lesyeuxrougeoyants,etregardasonamiequibrandissaitl’épée.–Jem’entraîneunpeu,expliqua-t-elle.–Enpleinmilieudecettefoutuenuit?Etavecunefoutueépéequibrille?–Tuboisdusang.Jem’amuseavecdeslamesquibrillent.Dellas’entouradesesbrascommesielleavaitfroid.–Tuasdelacompagnie,pasvrai?Incapabledementir,Kylieopina.–Bonsang!s’écrialavampetelleretournadanssachambreenclaquantlaportederrièreelle.–Cettefilleadegravesproblèmes.–Pasautantqued’autrespersonnesquejeconnais.Maintenant,allons-yetfinissons-en.Lesquinzeminutessuivantes,Kylienes’étaitjamaisbattueplusâprement.Elleseservitdechaque
techniquequeLucas lui avait apprise,maiscette femmene seconformaitpasaux règles.Elleétaitdéloyaleetfièredel’être.Chaquefoisquel’épéedelarevenanteentraitencontactaveclecorpsdeKylie,unemarquerouge
apparaissaitsursonT-shirtblancousursonboxer.Chaquefoisquel’épéedeKylieentraitencontactavec le corps de l’apparition, elle exhibait une blessure ouverte et du sang. Bien sûr, le fantôme
n’avaitqu’unepetiteégratignure sur lehautdesonbrasgauche.Pasdegrosdégâts, tandisque lesvêtementsdeKylieétaientcouvertsdemarquesrouges.Celalarenditplusvulnérableetmoinsapteàaffronterunvraicombat.Lequel,ellelesentait,était
sadestinée.UncombatavecMario,qu’ellepourraitbienperdre.Soudain,l’espritaboyadesordres,unpeucommeLucas.–Vaparlà,tienstonépéecommecela.Plusvite,neperdsjamaistalamedevue.Kyliefinitparprendrelepli,etbloquamêmecertainscoupsdel’esprit,quandlaported’entréedu
bungalows’ouvrit avantde sortirviolemmentde sesgonds.Lepanneaudebois s’écrouladansungrandfracas.IdemaveclaportedeDella,quiheurtalesolenfaisanttoutautantdebruit.Levampireapparut,lesyeuxétincelantsetlescaninesacérées.
Lefroidintensedisparutenmêmetempsquel’esprit.Kyliesepréparaàl’assaut:jambesfléchies,corpstendu,épéepointée.Burnett se tenait au-dessus de la porte à terre, les yeux plus flamboyants que ceux de Della.
Derrièrelui,unearméed’élèvesdeShadowFalls:Lucas,Derek,ChrisetJonathon.Toushypnotisésparl’armequibrillait.–Mincealors!C’étaientChrisetJonathon,quin’avaientjamaisvul’épéeenflammée.–Interdictionderépétercequevousavezvuici!lançaBurnettd’untonsec.Kyliebaissasonarmeetsouffla,espérantquel’airferaitdiminuersonadrénaline.Etmaintenant,
quesepassait-ilencore?EllecroisaleregarddeBurnett.–Qu’ya-t-il?Ilregardaautourdelui.–Quiestlà?–Justel’esprit,répondit-elle.ChrisetJonathonreculèrentd’unpas.Derek, habitué à cette histoire de fantôme, resta sur place. Lucas aussi. Elle remarqua les yeux
orangevifduloup-garou,prêtàsebattre.Sonregardrestarivésurelle.Burnettperditdesaférocité.MaispasassezpourtranquilliserKylie.D’autrespasretentirentsurleperron.Haydenentra,enjetantuncoupd’œilrapidesurlaporte.–Vousfaitesquoi,là?demandaKylie.– Puis-je répéter cette question ? demandaDella d’un ton cassant, et elle dégagea un rideau de
cheveuxbrunsetraidesdesonvisage.Sesyeuxn’étincelaientplus,maisleurteintevertedemeurait,lachemisedenuitnoireuniequiluiarrivaitauxgenouxlamettantencoreplusenvaleur.–Quelqu’unasautélaclôtureetestentrédanslecamppareffraction.–Qui?fitBurnett.
Miranda,enpyjamableuparsemédeSchtroumpfs,sortitdesachambreenbâillant,agrippéeàsonoursenpeluche.Kylieresserrasonétreintesurl’épée.Était-elleprêteàaffronterMario?«Sûrementpas»,futlaréponse.Maisriennel’empêchaitd’essayer.Pasquandtouteslespersonnes
qu’elleaimaitpouvaientêtred’éventuellesvictimes.– J’ai reconnu l’alarme, expliqua Burnett. Puis je t’ai entendu te battre et j’ai supposé que l’on
t’attaquait.–Jet’avaisprévenuequecen’étaitpasbiendes’entraînerenpleinenuit,marmonnaDella.–OùestPerry?demandaMiranda,commesiellecraignaitqu’ilnesoitmêléàtoutcela.– Il fait le tour de la propriété, pour voir s’il trouve quelqu’un, répondit Burnett, puis il fit un
mouvementde têteversHayden,commes’il luidonnaitunordresilencieux.Lecaméléonressortitsurleperron.Kyliecomprit.Burnettavaitdonnél’ordreàHaydendedevenirinvisiblepourvérifiers’ilentendaitd’autrescaméléons.Elleenvisageadelefaireelle-même,maisavectouslesyeuxrivéssurelle,ellenevoulaitpasfaireflippertoutlemonde.Quelquesminutesplustard,Haydensurgitderrièrelesautres.–Lavoieal’airlibre,lança-t-il.MaisKylie savaitque siun intrus invisible restait complètement immobile,onpouvaitnepas le
détecter.BurnettposalesyeuxsurDella.–ResteicietsurveilleKylie,ordonnaBurnettàDella.Nousallonsjeterunœilalentour.–Siçanetedérangepas,j’aimeraisbienrester,moiaussi,lançaLucas.Sesparoleslafirenttressaillir.Burnettaccepta.Puis,ilss’enallèrent.KylielaissaallersonregarddeLucasàDella,puisàMiranda.Lasorcièreétaittoujoursaccrochéeàsonoursenpeluche.–Quiestlà,d’aprèsvous?demanda-t-elle.Personnenerépondit.ElleregardaKylie.–Oh!lui!Dellasoupira.–Ondiraitquelanuitseralongue,folleetcinglée.Lucass’installadanslefauteuildusalon.Kylie,essayadel’ignorer,etdéposasonépéesurlatable
basse.Ellelaregardaperdredesonéclat,puiss’adressaàMiranda.–Sens-tuquelquechose?Lasorcièrefermalesyeux,etauboutd’unelongueseconde,ellelesrouvrit.–Oui,maiscen’estpasméchant,enfinc’estcequejeressens.LecœurdeKylieseserra.Oh!non,Marioétait-illà?Elletenditlamainverssonépée.–Tunel’aspassentil’autrenuit,si?–Non,maisilauneaura,doncc’estlogiquequejepuisseledeviner.Kylielaissaéchapperunprofondsoupir.Elleespéraitquesonamieavaitraison.Soudain, lebruitdepassur leperronmit tout lemondeenalerte.Lucasselevad’unbonddesa
chaise.Dellatraversalapièceàtouteallure.MaisKyliefutlaplusrapideetseretrouvalapremièreprèsdelaporte.Sic’étaitMario,ildevraitluipasserdessusavantdeleurfairedumal.Steveentra.Dellaserenfrogna.–Quefais-tulà?–Jeviensvérifierquetuvasbien.
Dellafronçalessourcils.–Jen’aipasbesoinquetumeprotèges.Il repartitd’unpas lourdavecun terrible rugissement.Pashumain : lemétamorphevenaitde se
transformerenungrosfélinénervé.Kylies’apprêtaitàluicouriraprèspourl’apaiser,maiscommeelleavaitfailliservirdedîneràunlionencolèrequandelleétaitarrivéeàShadowFalls,elledécidadelaisserStevegérersonegotoutseul.–Cen’estpasunefaçondetraiterlegarçonquit’afaitunsuçon!s’énervaMiranda.–Quoi?Tuasvulavitesseàlaquelleilestparti?S’ilstressaitvraiment,ilseraitresté!rétorqua
Della.Kylielevalesyeuxauciel.Lucas arqua les sourcils – sûrement à cause de la réflexion sur les suçons. Puis son regard
protecteurseposasurKylie.Maisenmoinsd’uneseconde,quelquechosedeplusdouxapparutdanssesyeux,quelquechosedetendre.«Jet’aime»,semblaient-ilsdire.Le lion, qui se trouvait dehors quelque part, rugit encore et encore, puis un immense oiseau
préhistoriqueseposaàgrandfracas,surlepasdelaportesansporte.Mirandapoussauncriperçant,lâchasapelucheetallaétreindrel’oiseau.Kyliese laissa lourdement tombersur lebrasducanapé.Lavampavaitvu justequandelleavait
déclaréquelanuitseraittrèslongue,folleetcinglée.
–Àquoi sert ce rubanadhésif ?demandaKylie àLucas le lendemain,quand ilvida son sac, sepréparantàl’entraînement.La jeune fille ne s’était pas réveillée et avait loupé les cours. Il l’avait appelée peu après onze
heurespoursavoirsiellevoulaitannulerl’entraînement,vuqu’ilsn’avaientpasdormidelanuit.Elleauraitvoulurépondreoui,maisn’écoutantquesoncœur,ainsiquelamiseengardedufantômequiestimaitqu’elleavaitbesoind’apprendreàsebattre,elleacceptades’entraîner.–Parprotection,nousenvelopperonsleboutdelalame.Ilregardalesboiscommes’ilavaitentenduquelquechose.Ouquelqu’un.–Quiestlà?criaLucas.–ChrisetWill,répondirentceux-là.Vu que l’on n’avait pas trouvé l’intrus la nuit passée, et qu’aucune autre alarme ne s’était
déclenchée pour leur indiquer que quelqu’un était ressorti, tout le camp était en alerte rouge. Ellen’avaitpasuneescorte,maistrois.Charmant. Simplement charmant. Quand elle regarda Lucas sortir les épées, un souffle froid
traversasanuque.Cequifaisaitquatreescortes.–Quelle chochotte !Dis-lui de ne pas protéger les épées. Tu dois apprendre à te battre pour de
vrai!Ilnenousresteplusbeaucoupdetemps.Regardantderrièresonépaule,Kylieconstataquel’espritavaitrenfilésarobetrempéedesang.–Quet’est-ilarrivé?Quit’atuée?demandaKylie.L’esprithésita.–Moijenecomptepas.Toi,si.Mourantd’envied’obtenirdesréponses,Kyliepoursuivit:–Commentmeconnais-tu?Quelestnotreliendeparenté?Ilmefautdesréponses!–Tudoisapprendreàtebattre.Sinontuserasaussimortequemoi.Cetavertissementl’emplitdeterreur.–A-t-onvraimentbesoinderubanadhésif?fit-elleàLucas
Illevalesyeux,surpris.–Tuessérieuse?Elleopina.–Jedoisapprendreàmebattrepourdevrai.Ilsereleva,inquiet.–Pourquoi?Quesais-tuaujuste?–Justeunpressentiment,mentit-elle.–Jen’aimepascepressentiment.–Apprends-moiàmebattre.Résigné,ilramassalesdeuxarmes.CelledeKylies’embrasaplusquelesautresfoisàlaminuteoùellelapritdanssamain.L’heuredu
combatavait-ellesonné?Ilscommencèrentleséchauffements.Le téléphone deKylie bipa dans sa poche : elle avait un texto.Elle attendit la pause avant de le
sortir.C’étaitDerek.«Appelle-moi.»–Quiest-ce?demandaLucas.Ellehésitapuislâcha:–Derek.Ilfronçalessourcilsmaisgardalesilence.Ilsreprirentleursexercices.–Bon,oncommence?fit-elle,impatiente.–Quandvas-tuluidirequec’estvraimentterminéentrevous?– Je l’ai déjà fait, répondit-elle avant de se rendre compte qu’elle n’avait pas de comptes à lui
rendre.Ilcessadebouger.Sonépée,dirigéeverslehaut,serabattitbrusquement.Ilsetournaverselle.–Tul’asfait?Ilétaittroptardpourretirercequ’ellevenaitdedire.–Oui.Ilsourit.–Merci.–Jenel’aipasfaitpaspourtoi.Maispourlui.–Maisjesuislaraisonpourlaquelletul’asfait,précisa-t-ilsanssedépartirdesonsourire.Unsourireencorepluslargeapparutdanssesyeux.Unsouriredeconfiance.Unsourired’espoir.–Jet’aime,déclara-t-il.Elleluiadressaunregardnoir.–Cegenrededéclarationn’est-il pasdangereuxdans lamesureoùcene sontpasdes épées en
bois?Ilrit.Unvrairire,quilasubmergeacommeunedoucepluied’été.Puisellerevitbrusquementla
têtequ’il avait faite quand les loups l’avaient laissé seul le jourdesparents.Et elle se souvint queChrisetWillétaientlàetécoutaientsûrementtoutcequ’ilsdisaient.Willétaitcenséêtreunami,maistournerait-ilàsontourledosàLucas?Elledésignalesboisd’uncoupdementonetmurmura:–Nousnesommespasseuls,tutesouviens?–Jem’enmoque,jet’aime!hurla-t-il.Ellefronçalessourcils.
–Rienn’achangé.–Si,tout,dit-il.Non,rienn’avaitchangé.Ilavaitbeaucroirequ’ilpouvaits’éloignerdetoutcequiavaitcompté
pourlui,ellenelelaisseraitpasfaire.Ellel’aimaittrop.–Bon,sionnecommencepas,jem’envais.–Alors,allons-y.Maissouviens-toiquecen’estpasdubois.Onvayallertoutdoucement.Ilneplaisantaitpas.–Avecquitebattais-tulanuitdernière?demanda-t-il.Saquestionbrisalelongsilencetendualorsqu’ilsprenaientenfindelavitesse.–Lefantôme.–Elleestdouée?demanda-t-il.Qu’ill’interrogesurlarevenantelasurprit.–Elleprétendqu’elleestmeilleurequetoi.–Maintenant,jesaispourquoijenel’aimaispas,lâcha-t-ilavecunbrind’humour.Quiest-ce?–Jenesaispas,répondit-ellesincèrement.Ellecompritsoudaincombienilétaitimpératifqu’elleledécouvre.
KylieoubliaderappelerDerek.Lucasetelles’entraînaientbien. Ilsnese lâchèrentpasvraimentcommeilsl’auraientfaitavecdesépéesdebois,maispresque.Quandelleconsultasontéléphoneàprèsdeminuit,etqu’elletrouvaunautremessagedeDerek,
elleculpabilisa.«Appelle-moiimmédiatement!»Ellel’avaitvuaudîner–bienaprèssontexto–etilneluiavaitriendit.Aucontraire,ilnes’était
mêmepasassisàcôtéd’elle,ilavaitprissonplateauetétaitreparti.Toutdemêmeunpeu inquiète,mais ignorants’ilétaitencoreéveillé,elle lui renvoyaun texto :
Quesepasse-t-il?Elleattendittroisbonsquartsd’heurequ’ilveuillebienluirépondre.Rien.Frustrée,elleretombasursonoreiller.Lefroidglacialetspectraltraversalapièceenserpentant,
pourlatroisièmefoisdepuisqu’elles’étaitcouchée,maisl’espritnerestapas.La conversation avec Holiday cet après-midi-là avait ajouté foi à ses pressentiments. Si elle
parvenaitàtrouverl’identitédel’esprit,celaluipermettraitderépondreàuntasdequestions.Si l’esprit ne l’avait pas confirmé, Kylie était presque certaine que le fantôme avait un lien de
parentéavecMario.–Qui es-tu ? demanda-t-elle à la volute de froid qui avançait commeuneombre rapidedans la
pièce.Dis-le-moi.Ouaumoinsmontre-moiquelquechose.Aucuneréponse.Lesespritsneparlaientpastantqu’ilsn’étaientpasprêts.Elleroulasurlecôtéet
essayadedormir.Sanspluspenseraufantôme.Niàcommettreuncrime.Niàmourir.NiàLucasetàl’espoirqu’elleavaitvudanssesyeux.Lesommeilvenaittoutjustedel’attirer,quandelleentenditdespassurleplancher.Elleouvritles
yeux et chercha l’épée sous son oreiller. Sous son oreiller ?Mais elle ne dormait pas avec elle !Instinctivement,ellecompritqu’ilsvenaientlachercher.Maisqui?Quelquechosen’allaitpas.Kyliesaisit l’armeet se jetahorsdu lit.Sespiedsseposèrentsurun
tapis.Elleregardaletapisoriental.Somptueux.Horsdeprix.Oùétait-elle?Ou,meilleurequestion:quiétait-elle?Lecœurbattantlachamadeenentendantlespasquiapprochaient,ellepassalapièceenrevue.Une
chambre.Paslasienne.
Le légerclairde lune filtrait à traversune largebaievitréequidonnait surdespalmiers, faisaitmiroiterdesmeublesenboismassif.Terroriséeetencolère,ellelevasonépée.Puisserenditcomptequecen’étaitpascellequ’onlui
avaitremise,maiscellede…Touts’expliquaitàprésent.Elleétaitl’espritetellesetrouvaitdansunevision.Elleremarquaun
lourd miroir en bois au-dessus d’une coiffeuse. L’espace d’une seconde, elle fixa l’image. Sescheveuxbrunsétaientdétachés,malpeignés.Mais ce qui provoqua sa première vague de panique, ce fut la robe.Celle que la femme devait
porterquandelles’étaitfaitassassiner.EtKylieallaitrevivrecettemort.Ellefuttentéedehurler,puissecalmaetcherchadesréponses.Des pas gravissaient les vieilles marches de bois. Instinctivement, elle comprit que la femme
attendait ses attaquants. Elle avait su que cette nuit-là ellemourrait. Elle avait choisi de porter dublanc,toutensedemandantsilesignedelapuretéluiserviraitàquelquechose.Àprésent, alorsqu’elle attendait la fin, un accèsde regret, de remordspour laviequ’elle avait
vécueluitraversal’esprit.Troptard.Troptardpourchangerlafaçondontelleavaitvécu.Maisellepouvaitchangercelledontelleallaitmourir.Etelleleferait.–Quies-tu? chuchota-t-elledans sa tête.Ellepriapourcomprendre la réponseafindepouvoir
sortirdecettevisionavantdedevoirrevivrelamortdecettefemme.L’espritregardaverslafenêtre,presquecommes’ilenvisageaitdes’échapper.–Sors,luiintimaKylie.Tun’espasobligéedemourir.Maistoutétaitdéjàécrit.Ellen’avaitpasprisl’enveloppecharnelledel’espritpourchangerquoi
quecesoit.Maispourlevivre.Pourapprendrelavérité.Laquelle?Pourquoil’espritn’était-ilpasparti?Kyliesentitquevivreavaitétéuneoption.Cette
femmeavaitdécidédemourir.Pourquelleraison?–Maman!Lejeunegarçonpassalaporteencourant.– Ilnousa trouvés!Sesyeuxs’écarquillèrentdepeuretses larmescoulèrent. Ilnousa trouvés.
Maintenant,quefaisons-nous?Elleattrapa l’enfantpar lesépaules.Ellevoulut l’étreindre, enfouir sonvisagedans sescheveux
pourpouvoirmouriravecl’odeurdesonfilsunique.Maisellen’avaitplusletemps.Ellelepoussadansleplacard.–Passeparlatrappequejet’aimontrée.Coursetneteretournepas.Ellefermalaporteduplacardaumomentmêmeoùcelledelachambres’ouvraitd’uncoup.
LafemmeréincarnéeparKylie,sepréparaitàsebattre.Paspourvaincre,maispourlaisserletempsàsonfilsdes’échapper.Ellesavaitqu’ellemourrait,maisc’étaitpoursongarçon.Ilsentrèrent. Ilsétaient trois,vêtusdenoiret sansmasque.Elle les reconnut.Elle lesconnaissait
bien.Avaitmangéàleurtable.Rideleursblagues.Ellereconnutaussil’expressiondansleursyeux,leurbesoinurgentdemenerunboulotàbien.Donnerlamortétaitleurdevoir.Elle leva son épée et se battit. Pour son fils. Pendant quelques instants, elle eutmême le dessus.
Personnenepourraitdirequ’elleavaitmanquédecourage.La première douleur lancinante surgit dans ses côtes.Kylie hurla. Elle essaya de se convaincre
qu’ellen’était pas réelle, quecen’était pas elle,mais elle avaitmal.C’était ladouleurque l’espritavaitressentiedurantlesdernièresminuteshorriblesdesavie.Ellesentitleursarmesentaillersapeau,atteindresesos.Soncorpsseramollit,ladouleurétaittrop
vive. Elle se laissa tomber à genoux, puis en avant. Son propre sang coulait de ses blessures. Leliquide épais réchauffa le froid glacial et soudain. Elle ne lutta pas. Elle espérait que le sangs’échapperait vite pour ne plus souffrir. La dernière chose qu’elle vit fut la porte du placardentrouverte,etsonjeunefilsquiassistait,horrifié,àsonderniersoupir.Iln’avaitpascouru.Lafureurenvahitsonâme.Comprendrait-ilunjourqu’elleétaitmortepour
qu’ilresteenvie?Pourleprotégerdugenred’existencequesonpèreetelleavaientvécue?Justeavantquelamortnelaprenne,ellejuradesevenger.Pasdeceuxquil’avaienttuée,non,ils
n’étaientquedespantinsqui faisaient leboulotdudiable.Elle le savaitparcequ’elleavait été l’und’eux.Elle voulait se venger de celui qui les avait envoyés, le diable en personne.Et de celui quil’avaitpermis:lefilsdudiable.
–Net’approchepastrop,ellepourraittecouperlatêteaveccetruc.LavoixaiguëdeMirandarésonnadansl’espritdeKylie,maiselleétaitloin.–Ellenemetuerapas,réponditDella.
–Cen’estpascequejeveuxdire.Maisbonsang,tuasvucommentelledansaitaveccetteépée!Sa conscience se débattit contre le vide de l’obscurité.Elle voulait retomber dedans.Le vide ne
contenaitpasdesouvenirs,iloffraituneéchappatoireàcequ’ellevenaitdevivre.Cettefichuevoix,cellequ’ellen’arrivaitpasàidentifier,parladenouveau.–Tudoistesouvenir.Kylieouvritenfinlesyeuxensuffoquant.LesyeuxnoirsetlégèrementenamandedeDellaluiapparurent.–Elleestrevenueàelle,dit-elled’unevoixchantante.Kylieessayadeserelever,maissesentaittropfaible.Dellal’aidaàs’asseoir.Elleregardaautour
d’elle.Ellesetrouvaitdanslacuisinedesonbungalow.Elleserraittoujoursfortl’épéedanssamain.Lavisionavaitdûlapousseràs’ensaisir.Ellejetal’épéeetpassalamainsursonventrepourvoirsielleétaitblessée.Rien.Seul restait lesouvenirde ladouleur.C’était terminé.Tout,hormis lespleurs.Comment la
viepouvait-elleêtresibrutale?Simauvaise?–Tunevaspasnoustuer,hein?demandaMiranda.Kyliefitnonde la tête.Aussidouloureuxfût-ildesesouvenirdesdétails, il fallaitqu’ellese les
rappelle–illuifallaitdesréponses.Unevisionéclairdupetitgarçondansleplacardapparutdanssatête.Quelquechosedefamilierlui
chatouilla l’esprit. Oui, il lui disait quelque chose. Un sentiment de déjà-vu s’insinua dans sa tête.Quelqu’unluiavaitracontécettehistoire.Qui?D’unseulcoup,ellecomprit.Elleseleva.Sesjambessedérobèrentsouselle.Dellalarattrapa.–Ondoityaller,annonçaKylie.–C’estdurd’yallerquandtunepeuxpastenirdebout,observaDella.–Jepeux.KylieseforçaàselevertouteseuleetrepoussalamaindeDella.–OK,tutiensdebout,lançaDellad’untonsec,étapenumérodeux:marcher.Kylieavançadequelquespasetjetaunregardnoirsurlavamp.–Étapenuméro trois :arriveràcomprendre.Etpourmoi,celaneveut riendiredesortirdece
bungalowsansquejesacheoùnousallons.Kylieinspira.–ChezDerek.J’aibesoindelui.–Derek? fitMiranda.Etdireque jepensaisqu’elle l’avait laissé tomberetqu’elleétaitpresque
revenueavecLucas!Kylieimploralapetitesorcièreduregard.–Jesuissérieuse.–Puis-jed’abordenfilermonsoutien-gorge?demandaDella.–Tun’enaspasbesoin,réponditMirandad’untonrailleur.Dellalaregardad’unairrenfrogné.–Tueslaplussorcièredessorcièresquejeconnaisse.Kylie, trop angoissée pour s’occuper de leurs chamailleries, se dirigea vers la porte. Il fallait
qu’elle sache. Della avait dû décider que Miranda avait raison, car elle sortit derrière Kylie. Enpyjama.–TusaisqueBurnettauramatêtepourtelaisserfairesansleprévenir.Kyliecourut,sonbesoindesavoirluidonnaitdesailes.Ellesentitleventdanssescheveux,etles
larmesruisselèrentsursesjoues.
Enmoinsdedeuxminutes,elles’arrêtadevantchezDerek.–Trèsbien,grossemaligne,etmaintenant?Della la regarda et son expression deMadame-je-sais-tout se transforma en inquiétude une fois
qu’ellevitleslarmesdeKylie.–Jesuisdésolée,dit-elle,çan’apasdûêtrefacilepourtoi.Kylieopina.–Jevaisessayerlafenêtre.Les fenêtres étaient très hautes. D’un bond, elle accrocha ses doigts au rebord et se hissa pour
regarderàl’intérieur.Et ce qu’elle vit la… la… déconcerta. L’embrouilla. La choqua. Elle cilla, comme si cela allait
changercequ’elleregardait.Maisdeuxoutroisbattementsdecilsplustard,elleparvinttoutdemêmeàdiscernernonpasune,
maisdeuxpersonnesdanslelitdeDerek.L’uneétaitlegarçon.Elledistinguaclairementsasilhouettemasculine… Mais l’autre était… une fille. Elle avait de longs cheveux noirs et des fesses trèsfémininesenpyjama,quidépassaientdesouslacouverture.EtKyliereconnutmêmecepantalondepyjama!C’étaitceluideDerek.La fille s’agita. Kylie retint son souffle. Elle espérait qu’elle se tournerait vers la fenêtre pour
qu’ellepuissevoirquiréchauffaitlelitdeDerek.Kyliemitunesecondepoursavoirsielleétaitjalouse.Quelquepart,toutaufondd’elle-même,ily
enavaitunresteinfimebiencaché.Derekdevaitallerdel’avant.Maisétait-ilobligéd’allersivite?Lafilleseretourna.Kylievitsonvisageet…«Mince!»Sesdoigtslâchèrentaccidentellementle
reborddelafenêtre,elletomba,etatterritsurlesfessesavecungrandbruit.Comment?Commentétait-cepossible?
–Quesepasse-t-il?demandaDellaquisurgitderrièreelle.–Rien,mentitKylie,toujoursparterre.–Essaieencore,insistaDella.–Laissonstomber.Ets’ilteplaît,j’aimeraisunpeud’intimité…pourluiparler.–Jesuistonescorte,luirappela-t-elle.–Jesais,maisjet’ensupplie.S’ilteplaît,j’aibesoind’intimité.–Pourquoifaire?Pourluisauterdessus?Kylienepritmêmepaslapeinederépondre.Dellatournalestalonsets’enallad’unpaslourd.Kylieremontasurlereborddefenêtre,s’accrochad’uneseulemainetfrappadel’autre.Lesdeux
individusaulitseredressèrentd’uncoup.LeregardpleindesommeildeDerekseposabrusquementsurlafenêtre.Kylienesavaitpasceque
Jenny–oui,Jenny,lasœurdeHayden–avaitfait.Elleavaitdisparu.Passant unemain sur sa figure,Derek s’approcha de la fenêtre.Kylie se laissa tomber quand il
remontalavitre.Iltenditlamainetlaregardaenfronçantlessourcils,puislahissaàl’intérieur.–Ilétaittemps,marmonna-t-ilenlafaisantrentrer.Pourquoidoncas-tuétésilongue?–Tum’asvueaudînerettun’asriendit.–Quepouvais-jediredansunesallerempliedevampires?C’estvrai,ilavaitraison.–Quesepasse-t-il?Elleregardaautourd’elle.EttoiJenny,tupeuxredevenirvisible.Jet’aivue.Jennyréapparutetsesjouesdevinrenttoutesrouges.–Cen’estpascequetucrois.Nousn’étionspasentrainde…Ellemontralesoloùétaientjetésunecouvertureetunoreiller.–Tuétaiscensédormirparterre,lança-t-elleàDerekd’untonsec.–Jen’arrivaispasàdormir…alorsj’aijuste…Jenet’aipastouchée.Kyliesecoualatête.
–Çam’estégal.–Pasàmoi,répliquaJennyenfoudroyantlegarçonduregard.–Jenet’aipastouchée!répéta-t-il.Kyliegémit.–Jenny?Maisquefiches-tuici?Ellesesouvintalorsdel’alarme.C’esttoiquiassautépar-dessus
laclôture?Jennyserembrunit.–Jenesavaispasqu’ilyavaitdessystèmesd’alarmepartout,ici.Mêmedansl’enclos,iln’yena
pas!Maislescaméléonsnes’attendaientpasquedesescrocspsychopathesviennentlesattaquer.–Mince!lâchaKylie,Haydensait-ilquetueslà?DereketJennysecouèrentlatêtetouslesdeux.–Tut’esenfuie,pasvrai?–S’ilteplaît…nem’enveuxpas,implora-t-elleenjoignantlesmains.DerekregardaJennyaveccompassion,puisfixaKylieavecdéfi.–Pourquoies-tuaussiénervée?Tuasditquetuvoulaisl’aider.–Oui,maiss’enfuirn’estpaslasolution.–Allez,marmonnaDerek.Pourquelqu’unqui s’est enfui ily adeux semaines, je te trouvemal
placéepourporterunjugement.–Jenemesuispasenfuie.J’aiprévenutoutlemondequejepartais.Etjenejugepersonne.AmuséequeDerekprenne ladéfensede Jenny,Kylie inspiraet laissaaller son regardde l’unà
l’autre.–Siuncaméléons’enfuitavantd’êtremature,ilestexcommuniédesafamille.DerekjaugeaJennydehautenbas.–Ellem’al’airplutôtmature,non?Kylierouladesyeux.–Jeneparlepasdesoncorps.Maisdufaitqu’ellesachechangersaconfiguration.Maistupeux
devenirinvisible.Jecroyaisquecelan’étaitpossiblequeplustard?–Entempsnormal,c’estimpossible.J’aitravaillétrèsdurtouteseulecesdeuxdernièresannées,
pourpouvoirpartirtôt.Maisjen’arrivetoujourspasàcontrôlermaconfiguration.Latristesseenvahitlesyeuxdelafille.–Es-tuvraimentprêteàt’éloignercomplètementdetafamille?Jennyselaissatombersurlelitetserradanssesmainslepyjamaextra-largedeDerek.–Çafaitsupermal,maiscettefamilleveutmeforceràépouserquelqu’unquejen’aimepasetqui
neressentrienpourmoi.Jeneveuxpasvivrecommecela.Millechosesdéfilèrentdansl’espritdeKylie.ElleavaitditàHolidayquelespratiquesdesanciens
étaientsemblablesàcellesdesloups-garous.IlsinfligeaientàJennycequelepèredeLucasinfligeaitàcelui-ci.Celasignifiait-ilpourautantqueLucasavait raisondes’opposeràsameuteetàsonpère?Elle
étaittellementpaumée.RéalisantqueDereketJennylaregardaientfixement,elledécidaquecen’étaitpaslemomentdepenseràlui.Unproblèmeàlafois.Problème numéro un, son grand-père et toute la communauté de caméléons allaient la tenir
responsabledecela,parcequ’elleétaitlaraisondelaprésencedeHaydenàShadowFalls.Commentréglerait-ellecela?–Bien,alorsmaintenant,explique-moipourquoitunet’espasenfuieavecHayden?
–Parceque,commençaJenny,chaquefoisquejeluiaiparlédemondépart, ilm’aréponduquej’avaistort.Quejedevaistenirlecoupjusqu’àcequejesoismature.Maistoutlemondesavaitquecejour-là, je partirais, alors les anciens ont essayé de trouver un autremoyen dem’arrêter. Je doisépouserBrandonlasemaineprochaine.Deplus,jenesuispasvenueiciàcausedeHayden,maisàcausedetoi.Jecroyaisquetucomprendrais.J’imaginequejemesuistrompée.LaculpabilitésubmergeaKylie.–Non,tunet’espastrompée.Simplement…jenesaispascommentarrangercela.Kylieregarda
autourd’elle.Commentt’es-turetrouvéeavecDerek?–Tuétaistoujourstellemententourée.J’aivuDereketjemesuisditquesituluifaisaisconfiance,
alorsjelepouvaismoiaussi.–Es-tuvraimentprêteàperdreledroitdevoirtafamille?Lucasl’était-il?DeslarmesenvahirentlesyeuxdelajeunefilleetKylieressentitlamêmeémotions’agiterenelle.–Non,réponditJenny,maisjenesuispasprêteàépouserBrandonnonplus.–Jesais,ditKylie,nousdevonsjustetrouvercommentgérercela.IdempourLucas.Maismincealors,ellenesavaitpaspluscommentfaire.–Onadupainsurlaplanche,fit-elleens’adressantàDerek.–Commentça?demandaDerek.Kylienes’étaitpasrenducomptequ’elleavaitparléàvoixhaute.Puisdesfragmentsdesavision
passèrentdanssatête,telunfilmd’horreur.–TutesouviensdeRoberto,lepetit-filsdeMario?Tum’asracontéqu’ilavaitassistéaumeurtre
desamère?–Oui.–Terappelles-tucommentelles’estfaitassassiner?Ilpassaunemaindanssescheveuxbruns.–Jecroisqu’unarticledisaitqu’elles’étaitfaitpoignarder.Kyliefronçalessourcils.–C’estbiencequejecraignais.–Pourquoi?demandaDerek.–Elleestmonfantôme.Derekeutl’airinquiet.–LamèredeRobertoesttonfantôme?–Jet’enprie,nemedispasqu’elleestlàencemoment!–C’estbon,fitDerekenposantunemainsurl’épauledeJennypourcalmersapeur.–Arrête!lança-t-elleenluidonnantunetapesurlamain.Jen’aimepasquetumetouches.Tu…
mefaisressentirdeschoses…bizarres.Derekserembrunit.–J’essayaisdefaireensortequetuaillesmieux.–Jen’enaipeut-êtrepasenvie!rétorqua-t-elled’untonsec.Sanstropsavoirpourquoi,leurschamailleriesrappelaientàKyliecellesdeBurnettetHolidayou,
mieuxencore,Dereketelleautoutdébut,etellecompritpourquoi:tensionsexuelle.SiKylieavaitétéunvampire,elleauraitpariéqu’ellepouvaitsentirlesphéromones.–Tuvoiscequejedoissupporterdepuisvingt-quatreheures?La seule chose qui empêchaitKylie de sourire, c’étaient les vestiges de la vision et la prise de
consciencequ’ellen’avaitpaslamoindreidéedelafaçondontelledevaitgérerJenny.Sielleallait
voirHoliday, elle ne savait pas si la directrice la laisserait rester ou pouvaitmême le faire.Maiscombiendetempsencorepourraient-ilslacacher?D’unseulcoup,lafenêtredeDereks’ouvritetDellaseruaàl’intérieur.–Bon,alorsvoilà :Burnettvientdem’appeler, il faisait leguetdevantnotrebungalowquand il
s’est renducomptequenousétionsparties. Ilvaarriverd’uneminuteà l’autre.Tuasune secondepourcacherWonderGirl.Jenny se volatilisa.Della, qui assistait à une disparition pour la première fois, eut l’air éberlué.
Burnettentraentrombeparlafenêtreouverte.–Quesepasse-t-ilmaintenant?–J’aieuunevision,expliquaKylie,quiluidonnaitunepartiedelavérité.Jevoulaisenparlerà
Derek.–Ettun’auraispaspum’appeleravant?–Tusaiscommentjesuisaprèsunevision.J’étaisfolle,jenepensaisqu’àunechose,découvrirla
vérité.–Laquelle?–Jesaisquiestlarevenanteàprésent.Ellea…avaitunliendeparentéavecMario.C’étaitsabelle-
fille.LamèredeRoberto.Mariol’afaittuer.Kyliesouffraitenserappelant lesdernièresminutesdelaviedelafemme.EnrevoyantRoberto
assisteràcetteterriblemort.Burnettsoupira.–L’épéeluiappartient?–Non,elleprétendqu’elleprovientdes…angesdelamort.Unlongsilenceenvahitlapiècecommes’illeurfallaitplusieurssecondesàtouspourlecroire.–Sais-tupourquoiilsl’ontenvoyée?demandaenfinBurnett.Toutlemondemaintenantsavaitquec’étaitpourqu’elleaffronteMario.Maispersonnen’osaitle
dire.–Nonpasvraiment.Cen’étaitmêmepasunmensonge.Ilyavaitunedifférenceentresavoirquelquechoseetavoirdes
doutes.–Viens,allonsparlerdecettevisionàHoliday,proposaBurnett.KyliequittalebungalowdeDerekpourréglerceproblème,conscientequetôtoutardelledevrait
s’occuperdeceluiqu’ellelaissaitici.Jenny.Pendantcombiendetempspouvaient-ilscacheruncaméléonenfuite?Avecunpeud’espoir,assez
longtempspourqueKyliepuissetrouverunplan.
Burnett et Holiday raccompagnèrent Kylie à son bungalow après leur petite réunion. Elle étaitparvenuejusqu’auboutdeladiscussionsansmentir,engardantlaconversationsurlavision.Elleneleur avait pas parlé de Jenny ni de son père, qui lui répétait sonmessage – qu’ils seraient bientôtréunis. Pour être honnête, elle tâcha de ne pas y penser. Holiday n’avait-elle pas déclaré qu’unepersonnequicommençaitàseprépareràlamortselésaitdupeudeviequiluirestait?Et…quelquepart,toutaufondd’elle,elleseraccrochaitaufaitquesonpèrepouvaitavoirl’espritconfus.Quesadéfinitionde«bientôt»pouvaitaussiseproduiredansquatre-vingtsouquatre-vingt-dixans.LapremièrechosequefitKylieaprèsledépartdeBurnettetHolidayfutdeprendresontéléphone.Derekréponditàlapremièresonnerie.–Tuassurvécu?
–Àpeine,répondit-elle.–Commentas-tumentiàBurnett?–Enévitantlavérité.Ilsoupira.– À propos, j’ai relu les articles sur la mère de Roberto. La cause du décès est la suivante :
«Multiplesblessurespararmeblanche.»Ah,etsonnom:LucindaEsparza.–Merci.Kylierépétalenomdanssatête.–Etpourmonproblème,queprévois-tudefaire?demanda-t-il.IlconsidéraitdoncJennycommesonproblème,n’est-cepas?–Jenesaispas,maispourrais-tulacacherencoreunpeu,letempsquej’élaboreunplan?Tantque
tun’aspasdecolocvampireniBurnettquifaitleguetdevantcheztoi,elleamoinsderisquesd’êtredécouverteenrestantlà.–J’avaisprévuqu’elleresteraitici,l’informaDerek,l’airpresqueinsistant.Ainsi,sonanciensoupirantcraquaitpourJenny.Elleressentitleurconnexion,commeellel’avait
ressentie entre Holiday et Burnett, Perry et Miranda, et Jonathon et Helen. Elle pouvait presqueentendreDereketJennyraconteràleursenfantscommentilss’étaientrencontrés.«Tamamanm’asautédessuscommeunetigresse.Ellecroyaitpeut-êtrequej’allaisluifairefaire
unebaladesurmondos!»Jennyavaitdelachance.EtDerekméritaitd’êtreheureux.Etmoiaussi.Etsonbonheurétait liéàLucas.Cefutcommesiquelquechoses’allumaitdanssa
tête,etellecompritqu’elleavaiteutort.Ellen’auraitpasdûlerepousser,maistrouverunmoyendetoutarranger.– Hé, euh… je viens de me rendre compte que je dois faire quelque chose. Peut-on discuter
demain?–Fairequoi?demandaDerekquilisaitmanifestementquelquechoseenelle.Convaincrequelqu’unquejeméritequel’onsebattepourmoi.–Salut!Elle raccrocha et entreprit de composer le numéro deLucas. Juste avant qu’elle n’appuie sur la
dernièretouche,ellechangead’avis.Ilyavaitunautremoyen.Bienmeilleur.
Il lui fallut dixminutes pour s’endormir et quelques-unes encore pour prendre le contrôle et serendre,via l’effractionderêve,danslebungalowdeLucas,puisdanssachambre.Ilétaitadorable,endormidanssonlit.Ledrapluiarrivaitàlataille,etelleneputs’empêcherdesedemanders’ilétaitnu.Enréalité,elleendoutait.Mentalement,ellel’habillaenboxerlong,puisseglissadanssonespritetdanssesrêves.–Lucas.Ellemurmurasonnom.Ellerevitsontorsenuetsedemandapourquoiellen’avaitpasrêvédelui
habillé.Sûrementparcequ’elleaimaitlevoirtorsenu.Elleeutenviedeseblottircontrelui.Lucasseréveillad’uncoup.–Salut!fit-il,encoresomnolent.–Viens,allons-y,dit-elle.–Oùça?demanda-t-il.–Quelquepart,pourparler.
Iltapotasonmatelasetlaregardaàtraverssesépaiscilsbruns,avecunsouriresexy.Avait-illusespenséesdetoutàl’heure?sedemanda-t-elle.–Nouspourrionsparlerici,suggéra-t-ild’unevoixrauqueEllerouladesyeux.–Biententé!Ilrit.Puisilremontaledrapetjetauncoupd’œilendessous.Elleseconcentraetdéplaçalerêvederrièrelebureau,oùilsallaientsouventdiscuter.Lanuitétait
noire,seulesquelquesétoileséclairaientleciel.–Jecroisquejepréféraislerêvedulac,lança-t-ilenparlantdel’effractionderêvequ’ilsavaient
partagéequandilss’étaientbaignésnus.Illapritparlesépaulesetl’attiracontrelui.Soncorpsétaitsichaud,sitentant.Elleauraitadorése
laisseraller.Explorertoutesceschosesencoreinconnuesd’eux.Maispasencore.–Soissage,dit-elleensedétachantdelui.Sonsourires’évanouit.–Quelquechosenevapas?–Non,enfinsi,çanevapas.Toutvamal.Elleinspira.TudoisintégrerceConseil,Lucas.–Jen’épouseraipasMonique,grommela-t-il.–Pasenl’épousant,non.Tudoistrouveruneautresolution.–Ilfautquemonpèreseportegarant.Etilneleferapasmaintenant.Elleserralesdents.–Parle-lui.Tuasditqu’ilteprotégeait.Manifestement,tucomptespourlui.Peut-êtrequesitu…–Tuneleconnaispas.Lafureurmontaenelle.–Alors,trouveuneautresolution.Trouveunautregarant.Ouparletoi-mêmeauConseil.Tum’as
ditquetouslesjeunesvoulaientchanger.Montre-leauxanciens.Ilsontétéjeunesaussi.Pousse-lesàsesouvenir…Quiaditquand laporteest fermée, trouveunefenêtre?Si la fenêtreest fermée,ehbien…casse-la.Siellenesecassepas,ehbienemploielesgrandsmoyens.Ilsecoualatête.–Tunelesconnaispas.– Si, je les connais ! Les anciens, chez les caméléons, sont exactement les mêmes. Ils veulent
arrangerdesmariagesetdécidentdetout.Jenesaispascommentjevaischangertoutcela,maisquejesoismauditesijenetentepaslecoup!–Cen’estpaspareil,rétorqua-t-il,commesisonaccusationlefroissait.–Peut-être,maisturenoncestoutdemême!–Jenerenoncepasànous,voilàcequicompte.–Maissi,turenoncesànous.Situn’intègrespasleConseil,iln’yaurapasde«nous».–Tunelepensespas!s’énerva-t-il.– Je sais que si tu perds ce que tu as toujours désiré, tu m’en voudras un jour. Peut-être pas
maintenant,maisunjour,sûrement.Etjenepeuxpascontinuerainsiensachantça.Jenepeuxpas.Enunéclair,Kyliemituntermeàl’effractionderêveetfiladanssonlit.Puiselles’endormiten
pleurant.Maisjusteavantdesombrer,elleentenditsonpère,unefoisdeplus.–Bientôt,bientôtnousnousretrouverons.Elle ne put s’empêcher de se demander si, quand elle seraitmorte, elle souffrirait encore pour
Lucas.
Le lendemainmatin,Kylie,quin’avaitqu’uneheurede sommeilaucompteur, attendaitparmi lafoulequeChrisfassesonshowetlancel’Heurepourfaireconnaissance.Perry,sonescorteofficiellepour lamatinée, se tenait à côté d’elle,Miranda collée à lui.Della et ses copains vampires étaientabsents.Lucasn’étaitpaslà.Maiselleavaitreçuuntextodeluiquidisait:«Jepensequej’aitrouvéune
fenêtre.»L’espoirluidonnadel’énergie.EllesesouvintcombienLucasétaitbeaudanssonlitlanuitdernièreetcombienelleavaitététentéedeseblottirtoutcontreluietdelaissersimplementleschosesse faire.Chassant le loup-garou sexyde sa tête, elle chercha autre chose à quoi penser – du style,commentprocéderavecLucinda,quisetenaitaubeaumilieudelafoulecommesielleétaitchezelle,maisneparlaitpasàKylie…Attendait-ellevraimentqu’elletueMariopourpartirdéfinitivement?C’étaitunechose,d’encouragerlesâmesàdestinationdesportesduparadisàlaisserleurexistence
solitaire sur terre et aller de l’avant.Mais comment pouvait-elle encourager quelqu’un à aller enenfer?Cettepenséelafitfrissonner.–Tuesbiencalme,observaMiranda.Toutvabien?Kylie opina et remarquaDerek qui rejoignait la foule. Elle pensa à Jenny et se dit que la seule
choseàfaireétaitd’affronterHayden.EllesavaitqueJennyavait trèspeurqu’ilnelarenvoiechezelle,maisKylien’enétaitpassisûre.Lesbavardagesdanslecercled’étudiantsseturent.Kylielevalesyeux.Chrispritlaparole.–Aujourd’hui,nousavons…Ilregardadanssonchapeau,puislevalesyeux.PilesurKylie.Ohnon,songeacelle-ci.Quiétait-ce,cettefois?– Kylie Galen ? Chris sourit. La fille qui nous a rapporté en l’occurrence plus de sang que
n’importequelcampeurdanslepassé.Ilhésita.Toi,monamie,tuaurasleplaisird’êtreaccompagnéepar…Ilmarquaunepausepourl’effet.Steve!Kylie vit Steve, le métamorphe au beau cul, celui qui avait fait un suçon à Della, se diriger
lentementverselle.Pasuneseuleminuteellen’avaitpenséqu’iléprouvaitdel’intérêtpourelle.Ellesavaitqu’ilcherchaitsimplementdesconseilsamoureux.Maisquepourrait-elledoncluidire,àpartdesemontrerpatient?DellaétaitlapersonnelaplusbornéeetlaplusrésoluequeKylieconnût,etilauraitfallulapatienced’unsaintpourépuiserlavampire.
–Êtrepatient?C’esttoutcequetuasàmedire?seplaignitStevedixminutesplustard.KylielevalesyeuxsurPerryquitournaitautourd’eux,assisderrièrelebureau,puisregardaSteve
enfronçantlessourcils.–Jenesaispaspourquoivousalleztousvousimaginerquejesuislegouroudel’amour.–Allez,donne-moiunvraiconseil.Tulaconnaismieuxquepersonne.Kylieselaissatomberàcôtédel’arbre.–Quetedire?Dellaestcompliquée!TellementcompliquéequesilavampapprenaitqueKylieavaitdonnédesconseilsàSteve,ellelui
retireraitsacartedemeilleureamie.–Tucroisquejenelesaispas?Ellevitsonregarddésespéré.–Quelqu’unluiafaitbeaucoup,beaucoupdemal.–Jelesais,çaaussi,dit-ilencroisantlesbrassursonlargetorse.Elleméritetellementmieuxque
lui.
–Oh ! zut, lançaKylie, et elledécidade se lâcher.OK,voilà tout ceque jepeux tedire :Dellavoudraitunebonnebagarre.–Jeneveuxpasmebagarrer,déclaraSteve.Toutcequejeveux,c’est…Ilrougit,commes’ilpensaitàsesvéritablesdésirs.Mais,mincealors,KylieappréciaitSteve.–Écoute,jeneveuxpasdire«tebagarreravecelle».Maistebattrepourelle.Quandelleteditque
tu ne peux pas t’installer avec elle pour déjeuner, fais-le quandmême. Quand elle te demande departir,neparspas.Ellevaenavoirmarre.C’estDella,elleestcommeça,maisjepensequecelateferagagnerdesbonspoints.Lemétamorpheréfléchit.–Maisoui,tuasraison.Quandnousétionsenmission,elleaessayédemerepousser,maisjene
l’aipaslaisséefaire.Jenepouvaispas,parcequeBurnettm’avaitavertiques’illuiarrivaitquelquechose,ilmeferaitcouperlatête.Etc’estlàquenous…Hé,jesaiscequej’aiàfaire!–Quoi?demandaKylie,redoutantcequ’elleavaitmisenroute.–Attendsdevoir.Unsourires’étalasurseslèvres.Desétincellescrépitèrentpartoutautourdelui.Ilsetransformaen
oiseau,pasaussigrosniaussimajestueuxqueceluiqui lasurveillaitd’enhaut,mais toutdemêmeimpressionnant.Battantdeuxfoisdesailes,ils’envolaaumomentoùPerryatterrissait..–Tuestrèsdouéepourcela,dit-il,toujourssoussaformed’oiseau.Ilpourrafaired’ellecequ’il
veut.Biensûr,entre-temps,ellet’auraarrachélecœurpourl’avoirtrahie.–Nemeparlepasquandtun’espasdanstaformehumaine!Ellelaissatombersonfrontsursesgenoux.Mince ! Perry avait raison, Della allait la tuer. Mais comme le destin avait déjà décidé de
l’assassiner…
–Vous attendez un appel ? demanda Kylie à Hayden Yates quand elle entra dans sa classe dixminutesplustardetnelâchaitpassonportable.–Je l’espère,dit-ilenfronçant lessourcils.Et il regarda toutautourde luipours’assurerqu’ils
étaientbienseuls.C’estJenny.Elleestpartie.Dieuseulsaitoù.Kyliesemorditlalèvre.–Sivouslatrouviez,queferiez-vous?–Commentça?demanda-t-il,méfiant.– La ramèneriez-vous chez ses parents ? Si elle s’est enfuie, c’est sûrement parce qu’elle est
commevousquandvousétiezjeune,etqu’ellenesupportepluscettevie.–Ellenesaitpascommec’estdurd’êtrecomplètementseul.–Elleneleseraitpas,répliquaKylie,ellevousaurait,vous.Ilserembrunit.–Jenesaispasdutoutcommentgéreruneado.Kylierouladesyeux.–Vousêtesprof.Vousnousgéreztouslesjours!–J’enseigne, jenematernepas. Ilyaunedifférence.Maisdiscuterdecelaest idiot. Ilpassa les
doigtsdanssescheveux.Elleestjeune,elleestnaïve.–Pastantqueça.KylierevitJennytenirtêteàDereketcommentellelesavaitaidésàs’échapper.–Etsijesavaisoùellesetrouvait?Illuijetaunregardnoir.–Bonsang!L’alarme?BurnettetHolidaysont-ilsaucourant?–Pasencore.–Silesanciensapprennentqu’elleestlà,ilss’attendrontqueBurnettetHolidaylaramènent.–Jesais,ditKylie.C’estbienleproblème.
Haydencroisasesdeuxmainsderrièresatête.–EtHoliday etBurnett devront le faire. Ils ne peuvent pas légalement la garder sans de graves
conséquences.–C’estl’autrepartieduproblème,soupira-t-elle.Ilplaquaunemainsursonbureau.–Commec’estcompliqué!MillepenséesdéfilèrentdanslatêtedeKylie.–J’aimeraisparlerdecelaàBurnettetHoliday,maissitoutecettehistoiredeMariosetassait,je
pensequej’auraisplusdechancedelesconvaincre.Ilselevad’uncoup.–Oùsetrouve-t-elleencemoment?–ChezDerek.Ileutl’airperplexe.–Derek?Haydenpassade«professeur»à«grandfrère»etKylieeutlesentimentqueDerekpourraitbien
seretrouverdanslepétrin.–C’estmieuxquechezmoi,parcequeBurnettnemequittepasdesyeux.QuandJennyasautépar-
dessus leportail, ellenepouvaitpasm’approcher à causedemesescortes. JennyetDerek se sontrencontréslanuitoùjemesuiséchappéeetelles’estditqu’ellepouvaitluifaireconfiance.Etellearaison.Derekestletypeleplusgentilquejeconnaisse.Ilneferaitjamais…voussavez.–Ilaintérêt…tusais!rétorqua-t-ild’untonsec.–Jepensequ’ilvaudraitmieuxquevousl’ameniezchezvous,pasàcausedeDerek,mais…–Ceseraitplussûrsiellerentraità…–Non!s’écriaKylie,laissez-moiunpeudetemps.Jecroisquejepeuxtrouverunesolution.–Comment?Ellen’estpasencoremature.Kyliedésignasaconfiguration.–Jenesuispascomplètementmatureetjevaistrèsbien,merci.–Tupeuxvraimentdirecelaenrestantsérieuse?demanda-t-il.Tuasunassassinquitecourtaprès,
etL’URFsaliveàl’idéedetemettrelamaindessuspourtetester.Chezmoi,çaneveutpasdire«allerbien».–Laissez-moiquelquesjours,s’ilvousplaît.–Tunepeuxpasréglerçatouteseule.LesparolesdeHaydenrésonnèrentdanssatête.L’URFsaliveàl’idéedetemettrelamaindessus
pourtetester.Pourlapremièrefois,Kylieentrevitleschosestellesqu’ellesétaient.Vite,unefenêtre!–Jepeuxessayerd’arrangerça,reprit-elle.Peut-êtremourirenessayant,songea-t-elle,maispeut-êtrepas.Deplus,resterenvien’étaitpeut-
êtreplusàl’ordredujour,detoutefaçon.Ellesedirigeaverslaporteàreculons.–Ilfautquej’yaille,jediraiàDerekd’amenerJennychezvousaprèslescourscesoir.
Pendantledéjeuner,KylieattenditdevoirsiLucassemontrait.Elleétaitassiseàcôtéd’uneDellaen colère, qui la regardait d’un air noir tout du long, parcequ’elle avait entendudire qu’elle étaitpartie avec Steve. En face d’elle était installée uneMirandaméfiante, qui avait été avertie par sonmétamorpheetescortedeKyliequ’ellesecomportaitbizarrement.
Perryavaittort.Ellenesecomportaitpasbizarrement,elleétaitmortedetrouille.Pourtant,mêmeterrorisée,ellesavaitquec’étaitlachoseàfaire.Soninstinctleluidisait.EllenepensaplusdutoutàsespeurslorsqueLucasentradanslapièce.IlportaitunT-shirtbleu
marine et son vieux jean, celui qui était délavé de partout et dont le tissu caressait son corps. Sescheveuxétaientébouriffésparlevent.Ilpassalapièceenrevue.Ellecroisasonregardbleu.Ilsedirigeaversellesansmêmeprendrelapeined’allerchercherunplateau.Quandils’assit,son
épauleeffleuralasienne.Ellelaissatombersafourchetteetchuchota.–Serais-tuprêtàsécherlescourspourt’entraîner?–Quesepasse-t-il?Était-ellelisibleàcepoint?–J’aidéjàéclaircicelaavecHoliday.Etladirectriceluiavaitposélamêmequestion:Quesepasse-t-il,Kylie?ElledonnaàLucaslamêmeréponsequ’àHoliday.–J’aienviedem’entraîner.Il était évident qu’elle ne pouvait pas lui dire la vérité ici.Mais elle avait l’intention de tout lui
raconterunefoisseuls.–Commentvatafenêtre?demanda-t-elle.–Toujourscoincée,maisjetravailledessus.L’optimismedanssavoixlafitsourire.Ilattrapalepetitpainsursonassiette.–J’aibesoind’alimentsbiennutritifspourtebattre.Tum’asl’airpleined’entrainaujourd’hui.–Tuasraison,tuferaismieuxdefinirmasaladeaussi,letaquina-t-elle.Ilbaissalatêteetmurmura:–Jet’aime.Moiaussi,songeaKylie,maiselleneparvenaitpasencoreàleluidire.Ellevoulaitattendreque
leursfenêtressoientouvertesetquelavieleuroffrecettepromesse.
QuandilsallèrentchercherlesépéesdanslebungalowdeLucas,Kylieessayadetrouvercommentluiparlerdecequ’ellefaisait.Instinctivement,ellesavaitqu’ilneseraitpasd’accord.Ets’ilyavaitunjouroùellenevoulaitpassedisputer,c’étaitbienaujourd’hui.–Alorscettefenêtre,tuasunplanpourl’ouvrir?demanda-t-elle.Ilhochalatête.–J’ai repenséàceque tum’asditàproposdesanciensquiavaientété jeunesà leurépoque.Eh
bien,iln’yapassilongtemps,magrand-mèrem’ainterrogéesurl’undesanciensduConseil.Ellem’a racontéquesasœur jumelleet lui s’étaientpluquand ilsétaient jeunes,maisqu’elleétaitdéjàpromiseàunautre.Jenesavaismêmepasqu’elleavaiteuunejumelle.Quandjel’aiinterrogéesursasœur,ellem’aréponduqu’elleétaitmorte.Maisj’ailesentimentqu’iln’yavaitpasquecela.Jesuisallélavoircematin.–Et?–Ellem’aavouéquesasœurs’étaittuéelaveilledujouroùelleétaitcenséeépouserl’autre.–Donctuvasallerparleràcetancien?–Cen’estpassisimple.Ilrefuseraitdemevoir,maisilpourraitaccepterderecevoirmagrand-
mère,quiplaideraitmacause.–Tagrand-mèreestd’accord?
–Non,répondit-il,frustré.Elleesttêtue.Jesuiscenséprendrelethéavecelledansdeuxheures.Ilsoupira.Lethéaledondel’adoucir.Jecroisquejepourraislaconvaincre.–Jel’espère.Ilsarrivèrentprèsdulacets’échauffèrentpendantvingtminutes,répétantlesmouvementsqu’illui
avaitappris.Kylien’avaitpasbesoindeleregarderpoursuivrelerythme.Maisellel’observatoutdemême. Elle adorait la façon dont son corps bougeait, avec force, contrôle, et ses muscles quiondulaientsoussonjeanetsonT-shirtencoton.Ilarrêtaleséchauffementsetsetournaverselle.–Prête?Ellefitouidelatête.Ilslevèrentleurépéel’unecontrel’autre;ilreculapuisavança,sonépéefendantl’airàunebonne
dizainedecentimètresd’elle.Ellel’imita,etauboutdecinqminutes,elleeutl’impressionqu’ilssebattaientvraimentpourlapremièrefois.Lasensationdedangernelaretenaitpas,enfait,ellelaséduisait.Était-elleamatricedesensations
fortes?Ellesentitlasueurdégoulinerdesonfront,etquandellejetaderapidescoupsd’œilsurlui,ellevit
lelustresursapeau,etleT-shirthumideluicolleràlapeau.Lecotonétaitencoreplussexymouilléquesec.–Tuesgénialequandtutebats,déclara-t-ilàboutdesouffle.Elle leva les yeux et se déconcentra, sans se rendre compte que cette petite erreur pouvait être
mortelle,puisellesentitsalameletoucher.
Kylie suffoqua. Elle lâcha son épée. Celle de Lucas lui glissa de lamain et atterrit à côté de lasienne.Ilreculad’unpas.Sachemisependillait,ouverte,déchirée.–Oh!non,es-tu…?–Toutvabien,justeuneégratignure.Ilcollasapaumesursesabdos.–Montre-moiça,dit-elleens’approchantdelui.–Çava,lança-t-ilenreculant.C’estmafaute.Jet’aidéconcentrée.–Montre-moi,exigea-t-elledenouveau.–Cen’estqu’uneégratignure,insista-t-il.Elle parcourut les quelques pas qui les séparaient, et toucha sa chemise. Son cœur se serra,
redoutant ce qu’elle verrait.Des larmes emplirent ses yeux, quand elle avisa les traces rouges au-dessusdesonnombril.–Cen’estrien,tuvois?Ilavait raison,cen’étaitqu’uneégratignure,maiscelaavait toutdemêmel’airdouloureux.Elle
colla deux doigts sur son ventre et se concentra pour le guérir. Ses mains se réchauffèrent, etlentementellepassasapaumesurlablessure.Ellel’entenditgémir,ouétait-ceungrognement?Ellecroisasonregard.–Est-cequejetefaismal?Puisellediscernalachaleurdanssesyeux.–Non,dit-il,leronronnementhypnotiquequiémanaitdeluienvibrantluiindiquantquesoncorps
cherchaitunepartenaire.Elleeffleurasonabdomendehautenbas.Lesdoucesetchaudesondulationsdesmusclesetdela
peau étaientmerveilleuses sous sa paume. Elle désirait plus. Plus de lui, plus de contacts, plus decaresses,elledésiraittellementqu’illatoucheluiaussi.Commes’il lisaitdans sespensées, il l’attiracontre lui.Ses lèvres trouvèrent les sienneset leur
baiserfut intense.Ellenesavaitpascomment ilsseretrouvèrentpar terre,maisd’unseulcoup, ilsétaientétendusausol.L’herbedouceluichatouillaitlecou,maissurtout,ellesentaitlamaindeLucassefaufilersoussonT-shirt,soncontactdouxettendresursesseins.Ellesentitsonpoidsàmoitiésurelle,sesjambessurlessiennes.Partoutoùunepartiedeluilatouchait,ellebrûlaitetmouraitdedésir.Ellen’avaitpaspeur,elle
glissasamaindansledosdesachemise.Soudain, l’émerveillement disparut. Elle ouvrit les yeux et vit Lucas debout au-dessus d’elle, le
regard fou, l’air presque sauvage. Ses mains étaient coincées derrière son cou, et il inspirait etexpiraitcommes’ilavaitbesoind’unetonned’oxygène.–Nousnepouvonspas…jenesuispasprêt…jen’aipas…Comme elle essayait elle aussi de respirer, il lui fallut une seconde pour comprendre ce qu’il
essayaitdedire.Iln’avaitpasdeprotection.–Nousnedevons…pascommeça,dit-il.–Jesais.Elleseleva,avalasidifficilementsasalive.–Jesuisdésolée,jen’auraispasdû…Elledétournalesyeux,sanstropsavoircommentformulerleschoses.Ilcomblaladistancequilesséparaitettournadélicatementsonvisageverslesien.–Tun’asrienfaitdemal,nousn’avonsrienfaitdemal.Simplement,ceseraitmieuxdeleprévoir.Ellehocha la tête.Son téléphone sonna.Ellene l’avaitmêmepas sortide sapochequeceluide
Lucascarillonnaàsontour.Elle savait ce que cela voulait dire. L’URF était là. En avance. Elle sortit son portable, vit que
Burnettl’appelaitetcompritqu’ellenes’étaitpastrompée.–C’estBurnett,etjesuissûrequetoi,c’estHolidayquit’appelle.Elleattrapalesépées.Neréponds
pas,onn’aqu’àallerdirectementaubureau.Illadévisagea.Etellesentitlaculpabilitétourbillonnerdanssapoitrine.Elleauraitdûluidire.À
présent,elleavaitlesentimentqu’elleleluiavaitcaché.–Pourquoijenerépondraispas?fit-il.Ilouvritlessacsetrangealesépées.–J’allaist’enparler,mais…Jesavaisquetumetiendraistête.–Quesepasse-t-il,Kylie?–C’estmafenêtre,expliqua-t-elle.–Commentça?–LaraisonpourlaquelleBurnettetHolidayappellent.C’estl’URFquivientmechercher.–Maispourquoidonc?Ellesemitenroute.Ill’attrapaparlecoude,desinterrogationspleinlesyeux.–J’aiacceptédemefairetester.Ilsecoualatête.Sesyeuxpassèrentimmédiatementdebleuàorangefoncé.–Non!– Il le faut,Lucas, c’estma quête.Tout comme la tienne consiste à changer les choses chez les
loups-garous.Jedoislefaire.–Non ! Il seplantadevant elle et l’empêchade faireunautrepas.Oublierais-tuque j’ai vuune
partiedelavisiondecequ’ilsontfaitàtagrand-mère?–C’étaitilyaplusdequaranteans.Leschosesontchangé.
C’étaitcequ’ellevoulaitcroire.Ellel’esquivaetcontinuatoutdroit.–Non!cria-t-ilenlarattrapant.Elleleregarda,lesuppliadecomprendre.–Jedoislefaire,Lucas.Ettudoismelaisser.–BurnettetHolidaynelepermettrontpas,dit-il,bouillonnantderage.–Burnettpensequel’URFnemeferapasdemal,insista-t-elle,sentantunebrisefraîcheeffleurer
sapeau,etellecompritqu’ellen’étaitpasseule.Sonpèreétait là.Ellepriapourqu’ilapprouvecequ’elleétaitentraindefaire.–Ilyadesrisques,ilmel’aaffirméenpersonne.Ilm’aexpliquéqu’ilavaitcachélecorpsdeta
grand-mèrepourlesmêmesraisons.–Ilyadesrisquesdanstout,Lucas.Ellesetouchaleventre.Danslefaitd’apprendreàsebattreou
pas.Jefaiscequ’ilfaut.Jelesais.
–Nousnel’avonspascontactée,fitlavoixmasculinequisortaitdubureaudeHoliday.C’estellequil’afait.KylieetLucasentrèrentdanslebureau.Lucasétaitencorefurieux,maisiln’essayapasdel’arrêter.
Ellecompritqu’ilsentaitqu’elleneplaisantaitpas.– Kylie n’aurait pas pu le faire, elle ne saurait même pas comment vous contacter, rétorqua
Holiday.Kylies’arrêtaàlaporte.–J’aiappelémamèrepouravoirleurnuméro.Jeluiaiditquec’étaitpourHoliday.Kyliecroisa leregardinquietdesonamie.Burnett,àsoncôté,avait lesyeuxbrillantsdecolère.
Elleespéraitsimplementquecelle-cin’étaitpasdirigéecontreelle.Holidaysecoualatête.–Ehbien,jem’yoppose.Kylieavança,suiviedeLucas.ElleregardaBurnett,espéranttrouverunalliéenlui.–Depuisledébut,Burnettm’aassuréequ’ilsnemeferaientpasdemalvolontairement.Holidayseleva.–Ilaaussireconnuqu’ilpourraityavoirdesrisques,raisonpourlaquelleilaaccepté…quetune
soispasobligéedelefaire.–Ellearaison,acquiesçaBurnett,jeneveuxpasrisquerde…–Lesrisquessontpratiquement inexistants,expliqual’agentde l’URFauxcheveuxgris.C’estce
quejemetueàvousdire.Maisvousrefusiezd’écouter.Kylieignoral’agent,ets’adressaàHoliday:–C’estmaquête.Tuastoi-mêmeditqu’elleétaitbonne.–Maistunedoispasmettretavieenpérilpourautant.–Ellenel’estpas,répétal’agent.–Alors,pourquoiunmédecinnormalnepourrait-ilpasfairepasserlestests?demandaHoliday,
surletond’unemèreencolère.Pasdedoute,elleenferaituneexcellente.–Jevousenaidéjàparléquandnousl’avionsévoquéilyaplusieursmois.Cen’estriendeplus
qu’unscanneretdesexamenssanguins.Etlaraisonpourlaquelleonnepeutpasleseffectuerdansunhôpitalnormal,c’estquecestestsnesontpasfaitspourleshumains.–Maisilspourraientfaireunscanneretdesprisesdesangdansunhôpitalnormal!insista-t-elle.–Lescanestdifférent.Idempourlesprisesdesang.Unlabonormalnepeutpaslesfaire.
–Etcombiendecestestsont-ilsdéjàétéeffectués?demandaHoliday.–Desmilliers.L’URFlespratiquedepuisplusieursannées.–Dansquelbut?Ilserenfrogna.–Larecherche.–Surqui?Quelgenrederecherche?–Principalementpourétudierlesaffairescriminelles,mais…–Vousvousenservezsurdescriminelsetvoustrouvezçabiendevousenservirsuruneado?
s’énerva-t-elle.–C’estsansdanger.–Vousallezmerépéterqu’iln’yaeuaucuneffetnégatifindésirable?–Pasàmaconnaissance.–Doncilyenaeudontvousn’êtespasaucourant?Holidaynelelâchaitpas.–Jedoislefaire,intervintKylie,jelesais.Jet’enprie.N’essaiepasdem’arrêter,madécisionest
prise.Ellevitdeslarmesapparaîtredanslesyeuxdesonamieetensouffrit,maisellesavaitquec’étaitla
choseàfaire.Elleregardal’agent.–Avez-vousapportélespapiersquejevousaidemandés?–Lesquels?s’enquitBurnett.–Undocumentécritdel’URFquistipuleques’ilsprouventquejesuisissued’uneracespéciale,
alorsilsreconnaîtrontquenousexistonspourlemondesurnaturel.–Maisalors,quoi?demandaHaydenquifitsonapparitiondanslecoindelapièce.Touslesautres
devrontsubircestests?L’agentdel’URFeutl’airméduséparl’apparitiondeHayden,maisnesedémontapas.–Ilfaudraquecesoitconfirméparaumoinsuneautrepersonnedevotreespèce.Maisunefoisque
Kylieetcetteautrepersonneserontenregistrées,nousn’auronsplusbesoinqued’unexamensanguin.HaydenregardaKylieetellecompritcequ’ilpensait.–Vousn’êtespasobligé,luidit-elle.Mettresavieenjeuétaitunechose,demanderàquelqu’undelefaireaussienétaituneautre.–Si, tuasraison, ilest tempsqueleschoseschangent.Haydenreposalesyeuxsur l’agent.Vous
l’avez,votredeuxièmepersonne.L’agent et Lucas plissèrent les yeux et regardèrent, admiratifs et intimidés, la configuration du
professeur.–Çanemeplaîttoutdemêmepas.Ets’ilsnetenaientpasleurpromesse?demandaLucas.Kylie implora silencieusement Burnett de prendre la parole. Il avait toujours fait preuve d’une
grandeloyautéenversl’URFetelleavaituneconfianceaveugleensonavis.–Ilsneferaientjamaiscela,déclaraBurnett.
Lapièce,froide,faisaitbientroppenserKylieàlavisionqu’elleavaiteuedesagrand-mère.Maiselle se raccrochait fort à la présence de Lucas, Burnett et Holiday, qui l’attendaient dehors. Ilsl’avaienttoutd’abordrevêtued’unebloused’hôpital.Magnifique.L’infirmièrevintlavoir.
–Jevaisvousfairedeuxpiqûrespourvousengourdir.C’estlemêmegenredechosequ’undentisteutilisequandiltravaillesurunedent.Nousdevonspréleverdusangdevotreartèreradialepourcetexamen, c’est donc un peu plus désagréable qu’une simple prise de sang. Mais ces injectionsdevraientêtrebénéfiques.Kylienesavaitpassilespremièrespiqûresfurentbénéfiquesmaisellesluifirentunmaldechien.
Elleserralesdents.En quelques minutes, ce fut terminé. Avant que l’on ne conduise Kylie dans l’autre pièce pour
passerlescanner,ilslaissèrentLucas,HolidayetBurnettentrer.Ellecompritqu’ilsavaientd’abordfaitpasserlescanneràHayden.–Haydenvabien?Cefutlapremièrechosequ’ellevoulutsavoirquandilsentrèrent.–Jeviensdelevoir,réponditBurnett.Iladitquec’étaitdugâteau.Kyliesourit.Holidayétaittoujourssoucieuse.–Tupeuxtoujoursannuler.–Holiday,répondit-elle,jevaislefaire.Laféesoupira,exaspérée,etcollaunemainsursonventre.–J’espèrequemonenfantneserapasaussibornéquetoi.Kyliejetauncoupd’œilàBurnettavecunlargesourire.–Aveclepèrequ’ilaura,jediraisquetun’aspaslamoindrechancequetonenfantnesoitpastêtu.–Hé,yapirequemoi!Il sourit aussi, mais elle devina que c’était forcé. Il essayait d’alléger l’atmosphère, mais
l’inquiétudeselisaitdanssesyeux.Quelques secondes plus tard, Burnett et Holiday s’en allèrent. Lucas resta et alla s’asseoir près
d’elle.Ilpritsamainbandéeetpassalepoucesurlepansement.Elledevinaqu’ilpensaitàlafoisoùellel’avaitguéri.–Quandtoutcelaseraterminé,ilfaudraquel’onparle.Jen’aimepasquetum’aiescachécequetu
avaisl’intentiondefaire,ouqueleprofétaituncaméléon.Etjesais,jeneméritaispasquetum’enparlesàl’époque.Maistuavaisraisonquandtum’asditcejour-làquenousn’avionspasbesoindesecrets.Jen’enveuxplusentrenous.–Moinonplus.D’unseulcoup,Kylieserappelaquelquechose.–Tuétaiscenséprendrelethéavectagrand-mère?Ilsecoualatête.–C’estplusimportant.–Non,Lucas.TudoisintégrerceConseil.–Jen’yaipasrenoncé.J’aijustereportémapetiteentrevueavecelle.Ilsoupira.MaisConseilou
pas,jerefusedeteperdre.Uneinfirmièreentra.–Nousallonsl’emmener.Lucaslâchasamainàregret.Kylierefusaqu’onlapoussedansunechaiseroulantejusqu’aulabo.Ellen’étaitpasmalade.Mais
elles’assuraquesablouseétaitbienferméeavantdedonnerunaperçudesessous-vêtementsrosesàtoutlemonde.Holiday serra affectueusement samain.Burnett lui tapota l’épaule.Lucas, énervé et très inquiet,
restaenretrait.L’infirmièrelaprécédadanslasalle,Kylieallaitlasuivre,maisquelqu’unlatiraen
arrière.LabouchedeLucassecollabrièvementsurlasienne.«Jet’aime»traînaitsurleboutdesalangue,
maiselleneleditpas.Ellenevoulaitpasqu’ilpensequelapeurdecequiallaitsepasserétaitlaseuleraison pour laquelle elle le lui avouait. Et il ne faisait aucun doute que s’il savait qu’elle lui étaitacquise,ilneferaitplusd’effortspourintégrerceConseil.La porte se referma dans un bruissement derrière elle. Kylie regarda autour d’elle, et constata
l’absencedecouleursdanslapièce.Pasunetouchedepeinture.Toutétaitblanc.–Bien,lançal’infirmière,avez-vousdéjàpasséuneIRM?–Oui,quandj’avaisdesterreursnocturnes.–Eh bien, cela y ressemble beaucoup. Lamachine est un peu bruyante et vous risquez de vous
sentiràl’étroit,maisilfaudraquevousrestieztotalementimmobile.Dixminutesserontnécessairespourpasserl’examen.Vousn’êtespasclaustrophobe,n’est-cepas?–Pasvraiment,réponditKylie.Ellesesouvintpourtantdequandelles’étaitretrouvéecoincéedans
unepetitetombeaveclestroismortes.Maisc’étaientpluslestroismortesquel’espaceconfinéquiluiavaientfichulatrouille.– Bien, expliqua l’infirmière, voici des bouchons d’oreilles.Maintenant, montez là-dedans, que
nousenfinissions.Kylie enfonça ses boules Quies et ravala une angoisse soudaine. Dans sa tête, elle entendit les
parolesdesonpère:Maisbientôt,bientôtnousdécouvrironscelaensemble.Soncœurbattaitlachamade,quandelles’allongeasurlatableglacée.Elleespéraitunmotdeson
pèreluidisantqu’ellen’allaitpasmourirtoutdesuite,voilàquiseraitbien!Lamachinel’attiraàl’intérieur.Sonnezsetrouvaitàmoinsd’uncentimètredudessusetlescôtés
del’appareiltouchaientmêmesesavant-bras.Unemachine,pasuncercueil,sedit-elle.Maisvoilààquoiellepensait:ellereposaitdansuncercueilfermé.Le bruit retentit. Même avec ses bouchons d’oreilles, elle avait du mal à s’entendre penser,
tellementlamachineétaitbruyante.Ellefermalesyeux.Tâchadenepasréfléchir.Ellenesavaitpascombiende tempselleétait restée là-dedans,quandellesentitun légerpicotementdanssa tête.Quis’intensifiajusqu’àluifairemal.Devenirdouloureux.Trèsdouloureux.Elleouvritlabouchepourhurler,essayadebouger,envain.Brusquement,ellesentitunelumière
exploserdanssatêteetellenevitplusquel’obscurité.–Bientôt,bébé,bientôtnousseronsensemble.
Quelqu’unluitenaitlamain.Auloin,onentendaitlegrondementdevoixfurieuses.EllereconnutcelledeBurnett.Kylieouvritlesyeux,ellenesavaitpastropoùellesetrouvait.Àl’instantoùellevitleplafondblanc,ellesesouvintdelagrossemachineblanche.Deladouleur.Ellenesouffraitplusàprésent.–Dieumerci!KyliesetournaversHolidayquiluiparlaitetluitenaitlamain.Lefrontplisséd’inquiétude,elle
appuyasurunboutonpourappelerl’infirmière.–Elleestréveillée.–Ques’est-ilpassé?demandaKylie.–Tuasperduconnaissance.Holidayavaitleslarmesauxyeux.Onaeuunesacréetrouille!Tuvas
bien?–Jepeuxsentirmesdoigtsetmesorteils.Laportes’ouvritd’uncoupetunBurnetttrèstrèsencolère,entraentrombe,suivid’unhommeen
blouseblanche.Etderrièrelemédecin,l’agentdel’URF.EtenfinLucasetHaydenYates.–Jevousaiditqu’elleiraitbien.LemédecinregardaKylie,puisHoliday.Parle-t-elle?–Oui,réponditlajeunefemme.–Bouge-t-elle?–Oui,etjevousentendsaussi!Illaregardad’unairrenfrogné.–Évidemmentquevousm’entendez.–Lestestssontterminés?Lemédecinhochalatête.–C’étaitfinilorsquevousavezcommencéàsouffrir.–Savons-nousdéjàquelquechose?demanda-t-elleàl’autreagent.
– Nous avons besoin de temps pour tout analyser, mais il semblerait que vous ayez toutes lescaractéristiquesdessurnaturels,exactementcommeM.Yates.Kylieseredressa.–Celafait-ildenousunenouvelleespèce?–J’ail’impressionqueoui,maislàencore,lesautresdoiventyjeteruncoupd’œil.Kyliesemorditlalèvre.–Quesaviez-vousaujustedetoutcela,d’aprèslestestsdupassé?Lesilenceenvahitlasalle.KylievitlesépaulesdeBurnettsetendre.L’agentmarquaunepause.–Lesrésultatsquenousavionsmontraienttouslamêmechose,maisquatre-vingt-dixpourcentdes
preuvesontétédétruitesparlesmédecinsetadministrateursresponsablesdel’étude,pourdissimulerleursméfaits.– Si vous aviez ne serait-ce que des soupçons sur leurs actes, pourquoi ne pas avoir tenté
d’arrangerleschosesplustôt?demandaHayden.–Nous avons essayé, répondit l’agent.Peut-être pas assez,mais pour notre défense, le domaine
danslequelvotreespèceexcelle,c’estdesecacher.Nousavonscherchédesmembresdelafamilledescassur lesquelsnousavionsconservédesdossiers.Tousavaientdisparu.Àunmomentdonné,nousavionsenvisagédepublierdesavispourdemanderauxgensdeseprésenter,maismalgrétousnosefforts,celaavaittoutd’unechasseauxsorcières.Etvucequis’étaitdéjàpassé,celanesemblaittoutsimplementpaslachoseàfaire.–Etquandcesinformationsseront-ellesdévoiléesaumondesurnaturel?interrogeaKylie.–Probablementpasavantquelquessemaines.Nousannonceronsaussil’enquêteinternesurl’URF
et nos méfaits du passé. Quiconque touché par nos études – ou les membres de leur famille –recevrontunecompensationfinancières’ilsseprésentent.Kyliesongeaàsagrand-mère.–L’argentnerendrapasdesvies.–Non,réponditl’agent,maisc’estlafaçonhumainedereconnaîtrelesméfaitsdel’organisation.
Etcommenousvivonsdansunmondehumain,c’estlemieuxquenouspuissionsfaire.–Pourquoi?demandaKylie.–Pourquoiquoi?fitl’agent,confus.–Vous ne reconnaissez pas vosméfaits et n’offrez pas de compensation sans raison, quelqu’un
menacesûrementdevousperceràjour.Qui?L’agentseraidit.–Cequicompte,c’estcequiestfait.Kylieeut l’impressionqu’ilsneconnaissaientpas lapersonnequi leur forçait lamain.Maiselle
avaitlesentimentqu’elle,si.Quelquesinstantsplustard,lemédecinetl’agentsortirent.KylieregardaBurnett.–Tuneseraisaucourantderien,parhasard?–Riendutout.C’était un mensonge, elle le voyait. Tout du long, il avait fait en sorte que l’URF agisse
convenablementvis-à-visd’elle.Elleaimaitcethomme,ellelesavait.Elle fitunclind’œil àHaydenet sourit.Celui-ci lui rendit son sourire. Ils avaient réussi.Enfin,
avecl’aidedeBurnett.Ellesavaitquecen’étaitpascomplètementterminé,qu’illeurrestaitencoreàconvaincrelesanciensqueleschosesseraientdifférentes,etilsdevaientencoredirelavéritéausujetdeJenny.Mais,dorénavant,aumoins,lescaméléonsn’auraientplusàsecacher.
Le lendemain, Lucas passa à cinq heures dumatin. Kylie dormait encore quand il sauta par safenêtre. Il avait reporté à cematin-là son entrevue avec sa grand-mère et il voulait prendre de sesnouvellesavantd’yaller.Justeavantqu’ilneparte,ellel’attirapourl’embrasser.–Essaierais-tudemeconvaincrederester?demanda-t-il,lesyeuxbrillantsdepassion.–Non,vas-y.Nouspoursuivronsplustard,fit-elleenriant.–Promis?–Promis.Elleétaitsincère.Elleneluiprécisapasquetouslesparisétaientannulés,qu’elleleprendraittel
qu’ilétait.DansleConseiloupas.Ques’iln’yentraitpasetqu’ilfinissaitparluienvouloirplustard,elleassumerait.Maisellel’aimaittroppoursedétournerdeluiàprésent.Alorsqu’ellesortaitdesvêtementsdesonplacard,Dellas’invitadanssachambre.–C’étaitrapide,lança-t-elleenfaisantréférenceàlabrèvevisitedeLucas.–Ilestjustepassémedirequ’ilallaitvoirsagrand-mère.–Jesais,j’aientendu,frima-t-elle.–Tupourraisteboucherlesoreilles,tusais.–EttupourraisarrêterdefairedelalècheàSteve,siffla-t-elle.Kyliesoupira.–Écoute,ilfautquejem’habille.JevaisparlerdeJennyàBurnettetHoliday,avecHayden.–Burnettvaêtreénervé.–Jesais,maisquandilnel’estplus,ilestplutôtraisonnableengénéral,non?–C’estvrai,maisc’esttoujourssoncôté«énervé»quialedondemefoutrelatrouille.Kylierit.–Pourquoiparles-tuàStevederrièremondos?–Qu’étais-jecenséefaire?Iladonnédusangpourpasseruneheureavecmoi.–Dis-luinon.Crois-leoupas,engénéralcelasuffitpourluicoupersonélan.Peut-êtreplusmaintenant,songeaKylie.–Quevoulait-il,aufait?demandaDellaenselaissanttombersurlelitjumeau.Kylierouladesyeux.–Tulesaistrèsbien.Desconseilspoursavoircomments’yprendreavectoi.–Etqueluias-turépondu?Etn’oubliepasquejepeuxdevinersitumens.Kyliesemitàbrossersescheveux.–Jeluiaiconseilléd’êtrepatient.Desebattrepourtoi,parcequetulevalaisbien.–Conseilsstupides,observaDella.–Passtupides.Vrais.Tulevauxbien.Elleallaserralavampdanssesbras.–C’estquoi,touscescâlins,cesjours-ci?gémitDella.–Jet’aime,ditKylieetellesefenditd’ungrandsourire.–Tumel’asdéjàdit.Alorssérieux,quoideneuf?CommeellenepouvaitpasmentiràDella,elleluidonnauneréponsevague.–Ilfautdireauxgensquetulesaimes,commeça,s’ilarrivequelquechose,ilssaurontcequetu
ressentais.Siseulementellepouvaittrouverelle-mêmelecouragedeledireàLucas.Dellaeutl’airméfiant.–Queva-t-ilsepasser,d’aprèstoi?–Rien,j’espère,fitKylie.
Elleseditqu’elleavaitsurvécuauxexamensdel’URFqui,enl’occurrence,n’avaientpasétéaussiflippantsqu’ellenel’avaitcru,maisilluirestaitencoreMarioàaffronter,etcelarisquaitdenepasêtreaussifacile.–Queveux-tudire?demandaDella.Unlégercoupfutportéàlaportedubungalow,etsauvaKyliedel’explication.–Haydenestlà,ilfautyaller.Quandellesortit,elleentenditDella:–Perryaraison,tuasdessecrets.Tunepeuxpasnouslescacher!Si,ellepouvait.Bientôtnousseronsensemble.Lesparolesdesonpèretraversèrentsatêtedansun
murmure.Ellesemorditlalèvre.Siçanetedérangepas,papa,j’aimeraisencorerestericiunebonnecentained’années.
HaydenetKylieentrèrentdanslebureau.Burnettlesaccueillitàlaporte.Holiday,deboutderrièresagrandetable,avaitl’airinquiet.–Qu’est-cequinevapas?demandèrent-ilsenchœur.–Rien,vraiment,réponditKylie.–Ilfautquel’onparle,lançaHayden.Burnett,préoccupé,leurfitsignedes’asseoir.Dèsqu’ilssefurentinstallés,Burnettpritlaparole:–Celapose-t-ilunproblèmeauxanciensquevousvoussoyezfaittester,touslesdeux?–Cen’estpasça,réponditHayden,ilsontsoi-disantcontactétouslesanciensdesautresencloset,
del’opiniongénérale,ceseraitunebonnechose.Biensûr,ilyaencorebeaucoupdeméfiancevis-à-vis de l’URF.Ce genre de chose ne change pas du jour au lendemain. Il y aura un long chemin àparcourir.Delaconfianceàreconstruire.Iljetauncoupd’œilàKylie.Personnellementjepensequecertainsanciensont tout simplementhontequ’ilait falluquecesoituneadodeseizeansquinousforceàaffronternospeurs.–Jen’étaispastouteseule,précisa-t-elleenreconnaissantleméritedeHayden.–Non,maisjen’yseraispasallésitun’avaispaspréparéleterrain.Haydenreposalesyeuxsur
BurnettetHoliday.Maiscen’estpaspourcelaquenoussommesici.–Pourquoiai-jelesentimentquecelanevapasmeplaire?Burnetts’assitsurleborddubureaudeHoliday.–Épargne-noustesconclusionshâtives,ditHolidayenluitouchantlajambe.–D’abord,jetiensàdirequej’endossetoutelaresponsabilitédecettehistoire,précisaHayden.–Non,répliquaKylie,sivousvoulezuneresponsable,alorsc’estmoi.–Celanemeplaîttoujourspas,ditBurnettd’untonsec.Maisj’aimeraissavoircequ’ilenest,afin
depouvoirsuivreleconseildeHoliday!–Vousvoussouvenezquandjevousaiditquel’undesautrescaméléonsnousavaitaidés,Dereket
moi,ànousenfuir?–Oui,fitBurnett,etHolidayopina.–CettefilleestlasœurdeHayden.–Et?ditBurnett.–Elles’estenfuie.–Et?répétaBurnettd’untonsec,enfaisantunsigneimpatientàKylie.–Elleestici.–Ici?demandaBurnett.Ici,encemoment?KylieetHaydenopinèrenttouslesdeux.
–Commentaurait-ellepu?Ilfitlagrimace.Lanuitoùl’alarmes’estdéclenchée?KylieetHaydenopinèrentdenouveau.Ellevitl’undeslustrestrembloterdanslapièce.Pourune
raisonquelconque,ellesentitqueJennyvenaitdepasserparlà.KyliecroisaleregarddeBurnett.–Jet’enprie,netemetspasencolèreetnehurlepas!PaspourHaydennipourmoi,maispour
Jenny;tularendsnerveuse.–Elleaétélàtoutdulong,etc’estmaintenantquetutedécidesàmeledire?Tum’aslaissépasser
ce foutu camp au peigne fin pendant presque vingt-quatre heures et tu savais depuis le début quic’était?Ilselevaetsemitàfairelescentpas.Holidaysemitdeboutet,quandilpassadevantelle,elleposa
unemainapaisantesurlebrasduvampireetl’arrêta.–Nousl’avonssuplustard.Ellesecachaitet…KylienevoyaitaucuneraisondesacrifierDerek:
J’aiignoréqu’elleétaitlàjusqu’aulendemain;etHaydenaussi,jusqu’àcequejeleluidise.–Est-elleencorelà?aboyaBurnett.–Oui,réponditKylie,etelleaimeraitrester.Pourfinirsescours.–Sesparentsvont-ilsl’inscrire?demandaHoliday.LamâchoiredeHaydenseserra.– Je ne sais pas ce qu’ils ressentiront quand ils apprendront qu’elle est ici. Vu les dernières
nouvellesdel’URF,ilspourraientl’yautoriser.Sicen’estpaslecas,j’intenteraiuneactionenjusticepourobtenirsagarde.–Est-elleiciencemoment?s’enquitHoliday.Danscettepièce?Kyliehochalatête.–Jenny?Celle-ciapparut,trèsloindeBurnett,unepaniqueabsoluedanssesyeux.Burnett avait dû reconnaître cette expression, car sa posture s’adoucit aussitôt. Il lui adressa un
signedetête.–Bonjour,Jenny,dit-il.BienvenueàShadowFalls.KylievitHolidayrayonnerdefiertéfaceàlatransformationdesonfuturépoux.Pasdedoute,elle
luiapprenaitàs’humaniser.Etcelafonctionnait.Kylieespéraitsimplementquecelasignifiaitqu’ilyavaitdeforteschancespourqueJennyresteàShadowFalls.
HolidayetHaydenallaientorganiserunetéléconférenceaveclegrand-pèredeKyliepourévoquerl’éventualitéqueJennyresteici.Enattendant,lajeunefilleresteraitavecHoliday,quiavaitleprojetdelaprésenteràtoutlemondeaudéjeuner.Kylieproposadecommencerparsesamis.Ainsi,Jennynepenserait-ellepeut-êtrepasquetousà
ShadowFallsétaientgrossiers.Ellepassaquelquescoupsdefiletdemandaàtoutlemondedelaretrouveraubureauà10h45.
Elleneprécisaàpersonnedequoiils’agissait,maiselleavaitbonespoirqu’ilsviennenttous.Lorsqu’ellequitta lebureau,Della laretrouvaà l’extérieuretellesserendirentà«l’Heurepour
faireconnaissance».Mirandalesrejoignitencourant,accompagnéedePerry.–Alors,c’estpourquoi,laréunion?– Tu le sauras bien assez tôt, répondit Kylie, qui ne voulait pas s’expliquer devant toutes ces
oreilles qui traînaient. Comme Della était déjà au courant pour Jenny, ou comme celle-ci l’avaitsurnommée,WonderGirl,elleluiavaitditlavérité.–Moijesais,lanarguaDella.Kylieluilançaunregardnoir.
–Pourquoituleluiasditetpasàmoi?fitMiranda,estomaquée.–Jeteprometsquetucomprendrasplustard.Mirandaserenfrogna.–Tuneparspasencore,hein?Parcequetonpetitdoigtm’apromisquenon!Deslarmesapparurentmêmedanslesyeuxdelasorcière.–Jeneparspas,luiassuraKylie.Pas de son plein gré, en tout cas, songea-t-elle, et elle repensa à l’épée et à tout ce que cela
signifiait.–TuvascracherlemorceauetnousavouerqueHaydenettoi,vousêtesamants?lançaPerry.Kylieécarquillalesyeux.–Hé,jenefaisquedessuppositions.Ilyabienquelquechoseentrevous,non?Lucassurgitàcemoment-làetgrognacontrelemétamorphe.PuisilembrassaKylie.–Commentcelas’est-ilpasséavectagrand-mère?demanda-t-elleàvoixbasse.–Lafenêtreestouverte.Ill’embrassadenouveau.Ellevaluidemanderdemerecevoir.Ilpourrait
bienrefuser,maisc’estundébut.–C’estunsuperdébut,oui!Kylielaissaéchapperuncriperçantetpendantquelquesminutes,ellefutsûrequetoutdanssafolle
vieallaits’arranger.PuisChris,annonceurdegrandesnouvelles,sortitsonchapeaudederrièresondosetparcourutla
fouledu regard, s’arrêtant surKylie.Elleeutenviedehurler, tropc’était trop.Mais son regardsedéplaçalégèrementsursadroite.Laregardait-il?Ou…–OK,ditChris,l’undenospropresvampiresacarrémentapportéunpeudesang.Ilétaittemps!Oh!non,songeaKylie,etelleeutlesentimentqu’ellesavaitquiavaitpayéensangpourDella.Et
ellen’étaitpassûrequecesoitunebonnechose.–Della,notreamie,tuasleplaisirdepasseruneheureavecSteve,legénialmétamorphe.LabouchedeDellas’ouvritgrande.Ellecherchalecoupabled’unregardmauvaisetétincelantde
colère.Stevesortitdelafouleensepavanant,etallaaffronterlavampénervéed’unedémarcheassurée.Kyliesavaitqu’elleluiavaitditdesebattrepourDella,maispasdevanttoutlemonde.Ilyavaitde
forteschancespourquesonamie,quin’aimaitpassefaireremarquer,riposte.–Prête?demandaSteve.Dellalefusilladuregard.–Non,jerefusedepasseruneheureavectoi.Steverestaplantésurplace.–J’aiversédubonsangpourtoi.–Alors,tul’asvraimentfoutuenl’air.–Pasdutout.SteveregardaChris,puislaquarantained’élèvesquiprofitaientduspectacle.Quelles
sontlesrègles,Chris?Toutlemonden’a-t-ilpasacceptéd’honorerlebesoindesang?Chrisavaitl’airchoquéqueSteveosesedisputeravecDella.–Ouais,c’estbiença.SteveseretournaversDella.–Prête?Celle-ciinclinalementonetfixalegarçon.PerrysepenchaetmurmuraàKylie.–Sielleletue,ceseratafaute.
Kyliesepréparaàintervenir.–Jen’yvaispas!lançaDellad’untonsec,lesmainssurleshanches.–Nousallonsvoirça.Steve haussa les épaules et fitmine de tourner les talons,mais il se retourna d’un coup, attrapa
Dellaparlesmollets,lajetasursonépauleetsemitenroute.Toutlemondes’esclaffa.PasKylie. Elle vit une vamp très énervée s’arc-bouter sur les fesses de Steve et lever les yeux.
Ceux-ci étaient verts de colère,mais il y avait autre chose.Quelque chose qui dit àKylie que lesfessesdeSteven’allaientpassefairebotter.Àchaquefractiondesecondequipassait,KylieétaitdeplusenplussûrequeDellan’allaitpaspéter
uncâbleavecSteve,bienaucontraire,ellepartiraitmêmeaveclui.Mincealors,songea-t-elle.Peut-êtreétait-ellelameilleuredesentremetteuses,enfindecompte.
–Puis-jedisparaître?demandaJennyàKyliealorsqu’ellesse tenaientsur lepasde laporteduréfectoireavecHoliday.–Jeneteleconseillepas,réponditKylie.Souris,c’esttout.Crois-leounon,tut’yhabitueras.LarencontreentreJennyetlesamiesdeKylies’étaitpasséesansproblème.Toutlemondeeutl’air
desincèrementl’apprécier.Derek,biensûr,montraleplusgrandintérêt.–Unautresecret,chuchotaLucasensurgissantderrièreelle.Kylieluilançaunrapide«Désolée»etriend’autre.Ellesentaitqueleteniràdistancejusqu’àce
qu’ilrencontreleConseilseraitdifficile.Pourtouslesdeux.Maiselleétaitdéterminée.–Nesavent-ilspasquec’estimpolidemeregardercommeça?demandaJenny.–Si,maisapparemmentc’estplusfortqu’eux,observaKylie.Haydenselevaetallarejoindresasœur.
Ilnesouriaitpasetelle reconnaissait l’attitudeprotectricedegrandfrèreàsa façonde fixer lesélèves.–Avalezvotredéjeuneretarrêterdelaregardercommeça,ordonna-t-il.Holidaypritalorslaparole.–M.Yatesaraison.Cen’estpasunefaçond’accueillirunenouvelleélève.Puiselleseretournaverslafoule.–J’aimeraisvousprésenterJennyYates.C’estlapetitesœurdeHaydenYates;alorsmaltraitez-la,
etvousaurezdestonnesdedevoirsenplus!–ElleestcommeKylie?demandaquelqu’un.Haydenavançad’unpas.–Etcommemoi,aussi.Tous les yeux se plissèrent. Kylie alla s’asseoir avec Hayden et Jenny, à la table… DES
CAMÉLÉONS!Unsentimentdelégitimitél’envahit.Unepartiedesaquêtevenaitdes’achever.Naturellement, tous les amis deKylie s’empressèrent de se joindre à elles, y comprisLucas. Et
c’étaittoutsimplementparfait;parcequesic’étaitsympad’avoirquelqu’undesonespèceàsoncôté,la configuration d’une personne ne devait pas vous dicter qui accueillir dans votre vie, ni à votretable.
Plus tardcesoir-là, ils se rendirentau lacpournager,parceque l’automnearrivant, l’eauseraitbientôt trop froide.Kylie avait failli refuser,mais quand elle vit queDella y tenait, elle céda.Elleenfila sonmaillot, etune robedebainnoirepar-dessus.Alorsque tout lemondenageait, elle allas’asseoirsurlajetéepourappelersamère.ElleavaittoujourslesentimentqueJohnpréparaitunmauvaiscoup.Laconversationfutbrève.Sa
mèreetJohndînaientdansl’undesmeilleursrestaurantsdeHouston.Enraccrochant,Kylieessayadesavourerlecoucherdusoleil.Justeaumomentoùils’éclipsait,la
nuittombaettransformalecielenuneimpressionnantecollectiondecouleurs.Lesoiseauxvoletaientd’un arbre à un autre, se régalaient d’insectes.En allant rejoindre les autres aubordde l’eau, ellesentit le froidde l’esprit lui tomber dessus.Elle regarda autour d’elle : l’apparition était assise auborddelajetée,l’airperdueetsiterriblementtriste!–Jesaisquitues,Lucinda,ditKylie.Tuétaislabelle-filledeMario.–Je sais, j’ai compris cet épisode.Mais les chosesme sont venues une à une, commequand on
assembleunpuzzle.Jepouvaisvoirpresqueentièrementcequ’étaitmavie,maislorsquecesdernièresdizaines de pièces se sont mises en place, j’ai pu bénéficier d’une vue d’ensemble. Sa voix étaittendue,prêteàsecasser.Çanem’apasplu.Aprèsunelonguepause,elleregardaKylie.–J’aivécuunevie terrible, faitdeschoses terribles.Blessé tantdegens,etmonpropre filsena
payéleprix.J’auraisdûêtreunbonexemplepourlui.Kylielevalesyeuxversleciel.Lesteintesdoréesavaientdisparu,nerestaientplusquelesroses.–Ilestauparadis,murmuraKylieenvoyantlatristessedanslesyeuxdeLucinda.–Jenecroispas.Jesuissûrequesongrand-pèreluiatransmistoutessessalesmanières.Ilétaitsi
jeune,siimpressionnable.Puissonpropregrand-pèrel’atué.L’atmosphèrequientouraitl’esprit–dévastation,sorttragique–fitpressionsurlecœurdeKylie.–Tuétaisunexemplepourlui.Ilestmortensauvantquelqu’und’autre,exactementcommetul’as
faitpourlui.Tuluiasappriscela.Etc’estcequiasauvésonâme.Lesyeuxdufantômesemouillèrentd’émotion.
–Enes-tusûre?Commentlesais-tu?Kyliehésita,decraintequel’espritneluienveuille.–Ilestmortenmesauvant.L’espriteutuninstantl’airperdudanssespensées.–Alors,c’estpourcelaqu’ilsm’ontenvoyéeici?–Quit’aenvoyéeici?demandaKylie,quasisûredelesavoir,maisellevoulaitl’entendre.–Lesangesdelamort.–Est-celeurvoixquej’entendsdetempsentemps?–Çasepourrait.–Mais pourquoi est-ce que je les entends plus que…Holiday et les autres, qui savent pourtant
communiqueraveclesfantômes?–Ilsveillentdavantagesur lesprotecteurs.Ils ledoivent,parcequetoiseulepeuxtebattrepour
protégerlesautres.–Veulent-ilsquejetueMario,ouest-ceuniquementtoi?Kylieespéraitqu’ellesetrompaitdanssessuppositions.–Au début, je croyais que ce n’était que moi, mais ensuite j’ai compris que c’était aussi leur
souhait.LecœurdeKylieseserra.–Ilfautl’arrêter.Tuesl’élue.Personned’autren’apul’arrêter.–Maissijenepeuxpasmeprotéger,alors…quivais-jeprotégerquandjemebattraicontrelui?–Jenepeuxpasvoircetavenir.–Etsijenepeuxpasl’affronter?Jenesuispassibonnequecelaavecuneépée.–Alors,tumourrasenessayant.Parfois,c’esttoutcequenouspouvonsfaire.Kylie savait que l’esprit faisait également référence à elle-même. Pourtant, en dépit de tout ce
qu’elleressentaitpourlefantôme,lapeurtenaillaitKylie.–Jenesuispasprêteàmourir.–Alorstudoist’entraîner,c’estuneautreraisondemaprésenceici.T’apprendreàtebattre.Parce
quesituéchoues,demauvaiseschosesarriverontàbeaucoupdemonde.Desgensquetuaimes.Desgensquitefontconfiancepourlesprotéger.–Jegagnerai, rageaKylie.Mincealors, ellene laisseraitpasMario fairedumalàceuxqu’elle
aimait.–Quoi?Elle regardapar-dessus son épaule en entendant la voixdeLucas.Torsenu, les cheveux encore
mouillés, avec quelques gouttelettes collant à sa poitrine. Il nageait encore quelques minutesauparavant.Ilavaitdûenfilersonjeansursonmaillotmouillé.Ellelevoyaitdépasser.–Tuvasbien?demanda-t-il.Ellelerassura,maisc’étaitunmensonge.Ellenepensaitplusqu’àl’éventualitédemourir,àceux
quisouffriraientparcequ’ellenepourraitpasreleverledéfi.PuisellefixaLucasetsentitàquelpointelledésiraitvivre.Ellereposalesyeuxsurl’eau,etentenditsespaspresquesilencieuxsurlajetéeàmesurequ’ilserapprochait.–Tuasdelacompagnie?–Non,elleestrepartie.Sontéléphonesonnaetillesortitrapidementdesapoche,commes’ilattendaitl’appel.Ilregarda
lepetitécrand’unairrenfrogné,puislecoupa.–Quelquechosenevapas?demandaKylie.
–Non,c’estjusteWill.–Ilt’appelleencore?–Ilestdemoncôté,iln’estpasconvaincuparlesvieillesrègles.–C’estunbonami,dit-elle.–Oui.J’espéraisquec’étaitmagrand-mère.Ellevitl’inquiétudedanssesyeux.–Àproposdurendez-vousavecl’ancien?–Ça,etellem’aconfiéqu’ellenesesentaitpasbiencematin.J’aiappeléilyaunmoment,etelle
n’apasrépondu.Elleestsûrementsortiejouerauloto.C’estunefanduloto.Lelotoetlejardinage,c’esttoutesavie.–Tul’aimessincèrement,pasvrai?ditKyliequipercevait ledévouementdanssavoixquandil
parlaitd’elle.Ilinspira,commeungarçonlefaitquandilapeurdepasserpourunfaibleàcausedecequ’ilva
dire.–Elleétait làpourmoi,quandmesparentsontdécidéque jen’étaispoureuxqu’une sourcede
problèmes.Elleétaitcequipouvaitm’arriverdemieux,mais jene lesavaispasà l’époque.Jemesuissentiabandonnéparmesparents.J’aifaitdesavieunenferpendantunmoment.Puis,quandilssesontséparésetquemonpèreestvenumechercher,magrand-mèreafaitdespiedsetdesmainspourmegarder.Jeneseraispasceluiquejesuisaujourd’huisiellen’avaitpasfaittoutçapourmoi.–Tuasdelachancedel’avoir.Kylie culpabilisa légèrement de ne pas aimer cette femme, et de l’avoir évitée le dimanche
précédent.–Oui,c’estvrai.J’airépétécequejevaisdire.Elleleregarda,étonnée.–Direàqui?–L’ancienavecquij’espèredécrocherunrendez-vous.Ellesourit.–C’estbien.–Jeseraiaccepté.Parcequesic’estcequ’ilfautpourterécupérer,alorsjeleferai.–Non,tulefaisparcequec’esttaquête.–Oui,aussi.Ildégageaunemèchedesajoue.Maiscesdernierstemps,jepensequec’esttoi,ma
quête.Illapritparlataille.Elleposalamainsursontorse,sentitsachaleurdeloup-garou,lemartèlementdesoncœur…Il l’embrassa.Elle savait qu’elle nedevait pas le laisser faire,mais elle le désirait, elle en avait
besoin.Songoût et le glissementmouillé de sa langue entre ses lèvres, c’était le paradis,mais dugenrequel’ontrouvaitdanslavie,pasdanslamort.Etellevoulaitchoisirlavie.Espéraitqu’ilenseraitainsi.Elleentenditsonronronnement:ceseraitsisimpledeselaisserprendreaupiège.Ilmituntermeaubaiser,luisourit,puissoupira.–Jeferaismieuxd’yalleravantdenepluspouvoirpartir.Elleregardalecielpresquenoiretespéradetoutsoncœurqu’onnel’enlèveraitpasdecemonde
tant qu’elle n’aurait pas vécu sa vie en entier. Elle souhaitait du fond du cœur queLucas en fassepartie.
Cettenuit-là,aprèsavoirécoutéDellaetMirandasechamaillerpendantdeuxheures,Kyliesortitdelasalledebainscommeuneflècheetsedirigeaverssachambre.ElleavaitàpeinefaitdeuxpasqueDellaseplantadevantelle.– Non, trouve la solution toute seule ! dit-elle d’un ton sec, persuadée que c’était ce queDella
voulait.J’enaimarredejouerlesarbitres.Celle-cimarquaunepause,luifitunsouriremachiavéliqueetlança:–Tantpis.Contournantlavampàtouteallure,Kylierefermasachambreenfrimant.Ellejetasaserviettesur
sacoiffeuseetsetournaverssonlit,oùelleavaitlaissésonpyjama.Saufquecelui-cin’étaitplusseuldessus,àprésent.Lucas,lesyeuxécarquillés,étaitassisaupieddesonlit,àunmètreenvirondel’endroitoùellese
tenaitentièrementnue.Ellepoussauncriperçant.Ilrit.Elleseruaverssaserviette.Unefoisqu’ellel’eutenrouléeautour
desoncorps,elleregardalaporteaveccolère.–Della,jevaistetuer!Ilritdenouveau.–Jecrainsdedevoirlaprotégersurcecoup-là,lança-t-il.–J’aiessayédeteledire,pouffaDella,etMirandas’esclaffaavecelle.LafureurdeKyliesetransformaengêne,puisquandellevitleregardsexyqueLucasluilançait,
sesémotionssetransformèrentenautrechose.Ilselevaetsedirigealentementverselle.–Tuessacrémentbelle.Elleresserrasonétreintesurlaserviette.Ils’arrêtaàtrentecentimètresd’elle.–Jesuisjustevenutedirequemagrand-mèrem’aappelé.L’ancienaacceptédemerencontrer.Kyliesourit.–Super.Ilparcourutduregardsoncorpsàpeinecachésouslapetiteserviette.–Jesupposequejenepourraipasavoirunautreaperçudecequisetrouvesousceboutdecoton?Elleposalesyeuxsurlui.– Jeneveuxpas avoir l’air tropprésomptueux,mais tu saisbienque tôtou tard je leverrai en
entier,detoutefaçon?–Jesais,dit-elle,etenvéritéelleavaithâte.Simplement,pasavecsesdeuxcolocsquiécoutaient.Sonsourires’élargit.–D’accord,alorsjusteunbaiserd’aurevoir.Il s’approcha.Lebaiserétait fougueuxethypergênant. Ilavaitpassésamainsous laservietteet
touchaitsondosnu.Un quart d’heure plus tard, elle fixait le plafond, dans une heureuse hébétude, lorsque son
téléphonesonna.Elles’enemparabrusquementenpensantquec’étaitLucas.–Jenesaispaspourquoituespartisivite,letaquina-t-elle.Maisellelesavait:illadésirait.–Hum,jenesuispaspartie.C’estSara.–Oh,jecroyaisquec’était…–Tupensaisquej’étaisqui?Oudevrais-jedirelequel?Kylierougitetdécidadejouerfranc-jeu.–Lucas.Unsilences’ensuivit,puisSarareprit.
–Jepeuxtedemanderquelquechose?–Biensûr,demandetoujours.–Penses-tuqu’entreTreyettoi,c’estcomplètementfini?Dustyle…finidechezfini?Ouya-t-il
unechancepourquevousdeux…?–C’estarchifini.Kylieserraletéléphoneplusfort.Écoute,sic’estluiquit’envoie…–Non,cen’estpasça…C’est…quedirais-tuàunecopinequisortavecl’exd’uneamie?Kyliefixaleplafondentâchantdesefaireàcetteidée.–Waouh…hum…jeluidiraisd’êtreprudente,parcequeTreyaquelquesdéfauts.Sarasoupira.–Jesais,mais…Ilaétésiprochependantmoncancer,et tusais…certainespersonnesméritent
unedeuxièmechance.J’enaieuune.Peut-êtrequeTreyenmériteuneaussi.KyliereconnutquelquechosequiluiplaisaitdanslavoixdeSara.Ellereconnutl’ancienneSara.
Ellesourit.– Tu as raison. Tout lemondemérite une seconde chance. Et quand j’y pense, jusqu’à ce qu’il
devienneunobsédésexuel,c’étaitunmecplutôtbien.–Donc,tun’yverraisaucuneobjection?insistaSara.–Non,jevousdonnemabénédiction!Jechanteraimêmeàvotremariage.–Arrête,gloussaSara.Jedoisêtrel’unedesrarespersonnesàsavoirquetuchantescommeune
casserole.Souviens-toi,ensixième,quandnosmèresnousontfaitpasserdesessaispourlapièce?Etilfallaitquetuchantes.Tuassortiquelquesmots,ettuasvomisurscène!Elles rirent toutes lesdeux.EtKylie reconnutquesiSaraetelleneseraientplus jamaisproches
commeavant,ellereprésentaitunepartiedesaviequ’ellechériraittoujours.Lorsquelesrirescessèrent,Saras’éclaircitlagorge.–Alors,quandvas-tumedirelavéritésurlafaçondonttum’asguérie?Kylieréfléchit.–Tusaisquoi,Sara?Situveuxcroirequejet’aiguérie,alorscrois-le.Maisàtaplace,jenele
diraisàpersonne.Onteprendraitpourunefolle.
Le jeudi soir,Kylie s’entraîna avecLucinda.Ces troisderniers jours s’étaientpassés sans chaosmajeur.SteveetDella s’adressaientmême laparole.Kylienepouvaitpas le jurer,mais elle auraitpariéqueSteveetlavampsevoyaientmêmeendouce.Jennys’adaptait,maiselleavaitencoredumalparcequetoutlemondeladévisageait.Mêmesicela
neplaisaitpasàHayden,Dereketellesefréquentaientbeaucoup.DerekétaitmêmevenuvoirKyliepourluiannoncerqu’iléprouvaitdessentimentspourlecaméléon.Audébut,Kylieavaitcruqu’ilétaitvenupours’assurerqu’ellenevoulaitpasdesecondechance
aveclui,avantqu’ilnepasseàautrechose,maisenréalité,luiaussiattendaitdesconseilsenmatièredecouple.Elleluiendonna.«Soistoi-même,toutsimplement,Derek.Tuesgénial,etellet’aimeradufondducœur.»Holiday était allée voir le médecin et avait découvert que sa grossesse était bien plus avancée
qu’ellenel’avaitcru.Pourcetteraison,elledécidadechangerladatedumariage.Ceneseraitpasunegrandefête.Justesafamilleproche,lesélèvesetquelquescollèguesdeBurnett.Della,KylieetMirandal’aidèrentàchoisirsarobesurInternet.Ellesavaientri,veilléjusqu’àpas
d’heure,discuté,s’étaientgoinfréesdecochonneriesetavaientessayédetrouverunprénompourlebébé.Ellene tenait absolumentpasà l’appelerBurnettBankheadJames Jr, etnulnepouvait lui envouloir.
KylieetLucasseretrouvaientchaquematinavantqu’ilnepartepasserdutempsavecl’ancien.Cethomme avait non seulement écouté Lucas, mais avait accepté de l’aider à se racheter devant leConseil,qu’ilétaitcensérencontrerlasemainesuivante.Enattendant,levieilhommeoccupaitLucaschaque jour en débattant et en écoutant tous ses arguments pour l’aider à prendre des décisions.C’étaitsuper,maisàpartpendantlesentraînements,ellen’avaitpasvubeaucoupleloup-garouetilluimanquaiténormément.Lepire,c’étaitqu’ilne l’avaitpas touchéeniembrasséedepuis lanuitoù il l’avaitvuenue.Elle
savaitpourquoi.Pluslapleineluneapprochait,moinsilavaitdevolonté.Elleconstatalechangementen lui, en corps et en esprit. Son corps était devenu plus canon, les muscles de ses bras plusprononcés.Ellesentaitqu’ilperdaitpatience.Nonpasqu’ilsesoitjamaismontrébrusqueenverselle,pasdutout,ellelesentait,voilàtout,àsafaçondesetenir,demarcher,deparler…Puis les entraînements s’étaient intensifiés.Mais ceux-ci ne lui faisaient plus peur. Ses combats
nocturnesavec l’esprit l’ypréparaient.Lesmarques rouges làoù le fantôme touchait sonpeignoirs’étaientbeaucoupatténuées.Lesblessuresouvertesquel’espritarboraitàcausede l’épéedeKylies’étaientmultipliées.– Je crois que j’ai terminé, lança-t-elle en détournant les yeux de la blessure qu’elle venait
d’infligeràLucinda.–Tut’améliores.–Jepourraisfairebeaucoupmieux,sijen’étaispasobligéedetevoirsaigner.–Ilfautquecelaaitl’airvrai,observaLucinda.–C’estdéjàlecas,réponditKylie.Ellelaregardavérifiersesblessures.Crois-tuquej’aicequ’il
fautpourcombattreMario?Pourgagner?–Avecl’aidedesangesdelamort,peut-être.Sanseux,tun’aspaslamoindrechance.–Bonsang,tusaiscommentrenforcerlaconfianceensoi,lançaKylie.–Jen’aivuqu’uneseulepersonnecapabledel’affronter.Sonproprefils.Kyliesesouvintdel’histoirequeluiavaitracontéeDereksursadisparition.–Queluiest-ildoncarrivé?–Jenesaispas,j’espèrequ’ilpourritenenfer;maisilyadegrandeschancesqu’ilsoitencoreen
vie.SonregardcroisaceluideKylie.Cesonttoujourslesplusgentilsquimeurentjeunes.–Alors,jedevraispeut-êtrepartirencourantetfairequelquechosedemal,observaKylie,quila
taquinaitàmoitié.–Tu ne pourrais pas. Le bien est en toi. Un peu comme le mal était ancré en monmari. C’est
uniquementgrâceàtoiquemonfilsaétésauvé.–Non,c’estgrâceàlui-mêmequ’ilaétésauvé.–Tuvois,celafaitpartiedetabonté.Tunereconnaismêmepastonmérite.–Était-ilàl’originedetonmeurtre?Tonmari?–Non,maisilalaisséfaire.Etilalaissésonpèreprendrenotrefils.L’éleverpourdevenirmauvais.
Cequiétaitfou,c’estquemonépouxtoutendétestantsonpère,enviaittoutcequ’ilavait.Elleregardapar-dessussonépaule,commesielleentendaitquelquechoseouquelqu’un.Puiselle
disparut.Kylieallaprendresadouche.Delasueurdégoulinaitdesanuquedanssondos.Mêmeaveclefroid
del’esprit,elleavaittoujourschaud.Réglant l’eau sur « tiède», elle fit tomber sesvêtements et entradans la cabinededouche.Elle
ferma les yeux, et le jaillissement chaud touchant sa peau apaisa les muscles qu’elle avait tantsollicitésaucoursdel’entraînement.
Lechangementdetempératurebrusqueluifitouvritlesyeuxd’uncoup.Sonsoufflesecoupa.Ellefixalemurdelacabine.Lefroidluidonnalachairdepoule.Unevapeurépaissemontaenvolutestoutautourd’elle.Ellen’étaitpasseule.Quelqu’unsetrouvaitsousladoucheavecelle.Etc’étaitunfroiddifférent.
Qu’ellen’avaitencorejamaisressenti.–Tunepeuxpasm’évitercettefois,hein?Ellenereconnutpaslavoix.
Kylieseretourna,secachantdumieuxqu’ellepûtavecsesmains.Lavapeurétaitsiépaissequ’elleavaitdumalàdistinguerlasilhouette.Maisuncorpssedessinaitderrièrelerideaudevapeur.Touteslesmélodiesflippantesdesfilmsd’horreuravecleursscènesdedouchemortellespassèrent
danssatête,maisplusqu’effrayée,elleétaitfurieuse.Lesfantômesn’avaient-ilsdoncaucunenotiondel’intimité?–Jesuissousladouche!lançaKylie.Çanepeutpasattendre?–Non,fitlavoix.Ilvientchezmoi,etcelaluiferasimal!Ilnedoitpasêtreseul.Kylieconnaissaitcettepersonne,maisd’où?Sansplussepréoccuperdesanudité,elleagitaunemaindansl’air,lavapeurs’étalantcommedela
condensationsurunmiroir.Quandellevitquisetenaitdanslacabineavecelle,soncœurseserra.Pas de peur,mais de chagrin. Et pas pour la femme qui était devant elle, non, pour son petit-fils.Lucas.–Ilarrive.Dépêche-toi!Nelelaissepasseul!Kyliesortitdelacabined’unbondetfilas’habiller.Alorsqu’ellesedémenaitpourvêtirsoncorps
mouillé,elleeutmalpourLucas,pourcequ’ilressentiraitquandildécouvriraitlecorpsdesagrand-mère.–Oùhabitez-vous?Attendez,Burnettlesait-il?–Levampire?Est-ceàluiquetupenses?–Oui,réponditKylie,etelleregrettaqueparlerprenneautantdetemps.–Oui,ilestvenu.–Della!cria-t-elle.–Ilyaunelettredansletiroirdemonbureauqu’ildoitlire.Veilleàcequ’illatrouve.Dellaarrivaencourantdanslachambre.–Quoi?
–Ilavaitraison,tusais.–Quiavaitraison?demandaKylieàl’esprit,ignorantlevampirequipaniquaitdanssonpyjama
MickeyMouse.–Tufaispartiedesaquête,et luide la tienne.Jevois leschosesplusclairement,de là-haut.Tu
sais,vousfaitespartiedelaquêtel’undel’autredepuisquevousvousêtesrencontrés,ilyatoutescesannées.Tueslaraisonpourlaquelleilaccompliralamissiondesavie,etilseralàpourtesauveretquandtuaurasbesoind’aidepouracheverlatienne.Maispars,maintenant.Val’aider.–Est-ceunevision?fitDellaenfixantsonamie,avecincertitude.–Allons-y!Kylie sortit dubungalowen trombe.Elle se trouvait presquedevant chezHoliday,quandelle se
renditcomptequ’ellevolait,etqu’elleavaitdûsetransformerenvampire.–J’espèrequetum’amènesàunesoirée-pyjama,lançaDella.–OnvachercherBurnett,réponditKylie,alorsquedeslarmeschaudesruisselaientsursesjoues.Ellesatterrirentdansunbruitsourdsurleperron,etn’avaientpasencorefaitunpasqueBurnett
ouvraitlaported’uncoup.–Qu’ya-t-il?–Sais-tuoùhabitelagrand-mèredeLucas?Ilavaitl’airperdu,lesyeuxpleinsdesommeil.–Oui,ilaappeléilyadixminutes,ilallaitprendredesesnouvelles.–Nousdevonsallerchezelle.–Pourquoi?s’enquitBurnett.–Elleestmorte,lâchatoutdegoKylie,alorsqueleslarmesemplissaientsesyeux.Ilnedoitpasla
découvrirtoutseul.–Ohnon!Burnettretournadanssachambreàtoutevitessepourprendresontéléphone.Ilregarda
Kylie.Ilnedécrochepas.–Turesteslà,ordonna-t-ilàDella,puisKylieetluidécollèrent.Sespiedsnetouchèrentterreque
troisfoispendantletrajet.En moins de dix minutes, Burnett amorça enfin sa descente. Ils s’arrêtèrent devant une grande
maison d’un étage en briques blanches, qui évoquait l’argent et l’amour du jardinage. Le jardinsemblaittoutdroitsortid’unmagazine.MaisKylienepassapasbeaucoupdetempsàapprécierlepaysage.Sespiedsavaientàpeinetouché
lapelousemanucuréequ’elleseprécipitaverslamaison.Elleentenditdeprofondssoupirsdechagrinetdetristesse.–Ilestdéjàlà.Jerentre.Burnettluibarralepassage.–Non,j’yvais.–Non!exigea-t-elle.Etelleledevança,presséederejoindreLucas.–Kylie!Burnettluipritlebras.Lorsqu’unloup-garouestendétresse,surtoutsiprèsd’unepleine
lune,ilpeutavoirdesaccèsdecolèreincontrôlables.Elleessuyaquelqueslarmessursesjoues.–Tunecomprendspas.Ilm’aime.Ilnemeferapasdemal.Ilnemeferaitjamaisdemal.Burnetthésita.–C’estexactementcommeHolidayettoi,ajouta-t-elle.Il soupiraet s’éloignade laporte.Elleentradans lamaison.Ellesentait lePlizcitronqueNana
utilisait. Tout dans la demeure, depuis les meubles anciens aux peintures à l’huile, évoquait la
richesse.–Lucas!Ellecriasonnom.Ilneréponditpas.Elles’approchadelachambreoùellel’entendaitgémir.Ilétaitassisauborddu
lit.Lecorpssansviedesagrand-mèregisaitaumilieudumatelas.–Lucas,murmura-t-elleenentrantdoucement.Ilseretournad’uncoup.Sesyeuxbrillaientd’unelueurqu’ellen’avaitjamaisvue.–Va-t’en!gronda-t-il.–Non,tuasbesoindemoimaintenant.C’étaitcequesagrand-mèreavaitdit.Iltraversalapièceàtouteallureetlaplaquacontrelemur.Il
n’yavaitqu’unefolledouleurdanssesyeux.Ilgrognaet,pourlapremièrefois,ellevitsescaniness’allonger.–C’estmoi,Lucas,dit-elle,sentantsesdoigtss’enfoncerdanssesavant-bras.Puisilrevintàlui.Illalâcha,s’éloignad’elleetcollasatêtecontrelemur.Elleentourasesbrasautourdesataille,collasonvisageentresesomoplatesetlesoutint.–Elleestpartie,dit-il,lavoixrauquedechagrin.–Jesais.Elle le serra plus fort. Il se retourna et l’attira contre lui. Ils restèrent ainsi très longtemps,
accrochésl’unàl’autre.– Je suis tellementdésolée,murmuraKylie, et elle comprit sadouleur, se rappela clairement ce
qu’elleavaitressentiquandonluiavaitannoncéqueNanaétaitmorte.Toute folie avaitdisparude sesyeux.Les larmes sur ses jouesn’était pasun signede faiblesse,
maisdedévouement,del’amourqu’ilressentaitpourlaseulevéritablemèrequ’ilavaitconnue,puisperdue.–Jesavaisqu’ellen’enavaitpluspourlongtemps,maisjen’étaispasencoreprêt.Jecroyaisque
j’avaisencoreunan,voiredeux.Kylietouchasamain.–Jesuisvraimentdésolée,jesaiscequec’est.Ilsoupiraetregardasagrand-mère.Elleentenditsonsoufflecourt.Ellelefitsortirdelachambre.–Commentas-tu…commentas-tusu?–Elleestvenuemevoir.C’estellequim’ademandédeterejoindreici.–Mêmedans lamort,elleveillait surmoi,dit-ildansunsanglot.Elleva tellementmemanquer.
Elleétaitàlafoismagrand-mèreetmamère.Elleseulesesouciaitdemoiquandj’étaispetit.Kylies’approchadelui.Ill’enlaça.–Elleaditqu’ilyavaitunelettrepourtoidansletiroirdesonbureau.–Merci,dit-ilenessuyantseslarmes.J’ailaisséunmessagesurlerépondeurdemononcle.Luiet
lesautresmembresdelafamillerisquentd’arriverd’uneminuteàl’autre.Ilfautquetut’enailles.–Jeveuxêtrelà,déclara-t-elle.Jeveuxêtrelàpourtoi,Lucas.–Jesais,sicelanetenaitqu’àmoi,tupourraisrester.Maislacoutumechezlesloups-garous,pour
sepréparerà lamort,n’est limitéequ’auxliensdesang.Il l’embrassa.Etmêmesicen’étaitpaslacoutume,tuesunvampireencemoment.Jenepeuxpascourirlerisquequetusoisblessée.S’ilteplaît,comprends-moi.Parcequesiquelqu’unposeundoigtsurtoi,jeletue.Celaneluiplaisaitpas,maisellecomprenait.–Çaira?–Grâceàtoi,oui.
–Jen’airienfait.–Tuesvenue.Ils’arrêta,commes’ilserappelaitquelquechose.Mince,jesuisdésolé.Est-ceque
jet’aifaitmalquandtuesentréedanslachambre?–Non,répondit-elle.IlremontalesmanchesdesonT-shirtetvitclairementdesbleussursesbras.–Ohnon!Jet’aifaitmal!Ilfermalesyeuxetserralesmâchoires.–Cenesontquedesbleus.Ellesehissasurlapointedespiedsetl’embrassadélicatement,espérantapaisersadouleur.–JevaisbienLucas,regarde-moi.Ilouvritlesyeux.Ellesourit.–Jevaisbien.Ilreniflal’airplusieursfois.–Est-ceBurnettquiestdehors?Elleacquiesça.–Iln’auraitjamaisdûtelaisservenir.Ilsaitquec’estdangereux.–Ilaessayédem’enempêcher.J’aiinsisté.Jesavaisquetunemeferaispasdemal.–Maisjet’enaifait,fulmina-t-ilentouchantdélicatementsesbras.–Cen’estrien.Ilsaurontdisparudemain.Illaregardadroitdanslesyeux.–Jet’aime,KylieGalen.Tefairedumalestladernièrechosequejesouhaite.Ellesourit.–Jet’aimeaussi.Levoiledechagrindanssesyeuxchangeauneseconde.Ilcollasonfrontausien.–Ai-jebienentendu?–Oui,tuasbienentendu.EtmêmesijedésireplusquetoutquetuintègresceConseil,danslecas
contraire,celanechangerarienentrenous.Ilpoussaunprofondsoupirdesoulagementetl’embrassatendrement.–J’aimeraisnepasavoiràtechasser.–Jesais,dit-elle.Illaraccompagnajusqu’àlaporte,samaintenantlasienne,etelleconstataqu’eneffetilnevoulait
paslalâcher.Dèsqu’ilsouvrirentlaporte,Burnettluiprésentasescondoléances.–Merci.Safaçondeparler,desetenirdevantBurnett,c’étaitpourcachersadouleur.Etpourtant,ill’avait
laissée lavoir. Ilne luiavait riencaché,àelle. Il lui faisaitentièrementconfiance.Pouruneraisonidiote,cela lerendaitencorepluscheràsesyeux.Des larmes luiserrèrentdenouveaulagorge.Ilavaitautantbesoind’ellequ’elledelui.Cequisignifiaitqu’ellenepouvaitpasmourir.LucasregardaKylie.–Demain,c’estlapleinelune.Ensuite,ilyauradescérémonies.Jeneteverraiprobablementpas
pendantplusieursjours.Ellehochalatête,celaneluiplaisaitpas.Ellevoulaitêtreavecluiencemomentdechagrin.Mais
elleaccepta.Burnettplissalesyeux.–Quelqu’unarrive.
–Allez-y,ditLucas.
–Est-cejusteLucasouautrechose?demandaHolidaylelendemainmatin.Kyliecontemplaitleschutesd’eau.ElleétaitvenuedanslebureaudeHolidayauxpremièreslueurs
du jour et lui avait demandé de l’accompagner aux cascades.Comme d’habitude,Burnett attendaitplusloin.–J’aijustebesoindecela,ditKylie.Elles’étaitréveilléecematin,inquiètepourLucas,et…Àcausedecequelefantômeavaitdit.Que
siellesebattaitetperdait,lesgensqu’elleaimaitsouffriraient.Elleavaitbesoinde sentir l’énergiedescascades.Ellenevoulaitpasmourir, ellevoulait être là
pourLucas,pourtousleshautsetlesbasdelavie.Maissurtout,ellenevoulaitpasmourirensachantqu’elleavaitlaissétomberceuxqu’elleaimait.Holidaylaregarda.–Qu’est-cequinevapas?Kylie se força à sourire et réprima les larmes qui menaçaient. Elle la sentait ici, la paix,
l’acceptationquetoutiraitbien.–N’as-tujamaiseusimplementbesoindevenirici?–Entempsnormal,c’estqu’ilyaquelquechosequitouchemonéquilibre.Alorsqu’est-cequite
dérange?–Tout.JemefaisdusoucipourLucas.Ilétaittellementbouleversé.Ilpleurait.Etjenecroispas
qu’ilpuisselefairedevantsafamilleousonpère.Ilabesoindemoi,maisjenepeuxpasêtrelààcaused’unerègledébilechezlesloups-garous!Etjesuisinquiètepourmamère.JenefaistoujourspasconfianceàJohn!Ladouceatmosphèredescascadesl’apaisa.EtlamaindeHolidaysursonbrasaussi.–Çaira,hoquetacelle-ci,etsituveux,jedemanderaiàBurnettdefaireunenouvelleenquêtesur
John.–Non,tuasraison,çavaaller.Ilfallaitqu’ellelecroie.Illefallait.–As-tuexpliquéàtamèrecequetuéprouvaispourlui?demandaHoliday.–Oui.Etellepensequejesuisencolèreparcequ’elleneretournerapasavecmonbeau-père.Kylie
plongeasesorteilsdansl’eaufraîche.Jel’aimêmeappeléeavantdevenirtevoir.Ellepassequelquesjours dans samaison sur la plage, elle liquide ses congés, avant de quitter son boulot pour allertravailler avec lui. On dirait qu’il la phagocyte entièrement. Elle vit pratiquement avec lui. Etmaintenantellevatravaillerpourlui.HolidayserraaffectueusementlebrasdeKylie.– Parfois les parents sont aussi ingérables que nous quand on faisait notre crise d’opposition à
deuxans.Mamèreestcarrémentsortieavecunstripteaseuraprèssondivorce!Kyliegloussa.–Bon…assezparlédessujetsnégatifs.Queveux-tuquejemettepourlemariage?fit-elled’unton
frivole.–Tupeuxvenirenshort,çam’estégal.Tuesmademoiselled’honneur,tuportescequetuveux.–J’aiunerobeencachemirepastel,jepensequ’elledevraitaller.–Parfait.Aufait,t’ai-jeditquej’aiinvitéBlakeaumariage?–TuveuxdireBlake-ton-ex?–Çadevraitêtrelui,oui.
Kyliegrimaça.–Est-cequeBurnettestaucourant?Ellel’imaginaitarracherlesmembresdeBlakejustepourleplaisir.Ellesefenditd’ungrandsourire.–C’estsonidée.Iladitqu’ilvoulaitqu’ilyassistepourqu’ilcomprennebienquejen’étaisplus
surlemarché.–Ça,c’estbienBurnett,lançaKylie,toutsourire.–Biensûr,Blakearefusé.JecroisqueBurnettluifaitunpeupeur.–Çaprouvequetunecraquesquepourlespetitsmalins,ajoutaKylieenriant.Elless’allongèrentetfixèrentleplafonddelagrotte.– Je saisque tu es jeune,maisBurnett etmoinous sommesdit que ce serait bienque tu sois la
marrainedubébé.C’estquandmêmegrâceàtoiquenoussommesensemble!–Jeseraistrèshonorée,fit-elle,touchéeparcetteproposition.Aprèsquelquesminutesdesilence,Holidayrepritlaparole:–J’ailesdossiersd’inscriptionàlafacquetum’asdemandés.Burnettoumoipourronsvousaider
àlesremplirquandvousvoudrez.Aprèsunautremomentdesilencepaisible,Holidaysoupira.–Levois-tu?–Quoi?–Jeviensd’avoirunaperçudecequeseralefutur.Tutermineslafacdanscinqansenviron,puis
turevienstravailleràShadowFalls.–Tum’embaucherais?–Sanshésiter.Kylieluiadressaungrandsourire.–Commetuastoutréglé,quevais-jefaireàlafac?Etquelgenredeboulotferais-jeici?–Psycho,biensûr!Tuferaisunesuperpsychologue!–Tusais,c’estexactementcequejepensais.Ellemarquaunepause.Quandturegardesl’avenir,
peux-tuvoirsiMiranda,Dellaetmoientreronsdanslamêmeuniversité?–Si c’est cequevousvoulez, les filles, alorsoui, c’est cequi sepassera.Mincealors,onvous
embaucherapeut-êtretouteslestrois.Mirandaferaituneexcellenteenseignante.Vusonhandicap,ellesauraittravailleraveclesélèvesàproblèmes;etDella,bonsang,ellecollaboreraitavecBurnettsurlasécurité.–Tonidéedel’avenirmeplaîtbien,observaKylie,puiselledemanda:Lucassera-t-illà?–Devine!Ellesoupira.IltravailleraitavecBurnettàl’URF,eticiàmi-temps.–Jel’aime,avouaKylie.–Jesais.–Waouh!Jen’aipasdroitaudiscours«Tuestropjeunepourêtreamoureuse»?Holidaysoupira.–Tuesjeune,maiszutalors,tuasunevieilleâme,etparfoiscelaterendplussagequetonâge.ElletapotalamaindeKylie.–Çavaaller,vraiment.–Oui,approuvaKylie.Lavisionquesonamieavaitdel’avenirluiplaisaitbeaucoup.Toutcequ’elleavaitàfaire,c’était
deresterenvie.
Cettenuit-là,Kylie,assisesursonlit,faisaittournerautourdesonpoignetlebraceletàbreloquesquesamère luiavaitoffert.Presqueminuit.Lucasallaitbientôt se transformer.Elle luiavaitparlédeuxfoisaujourd’hui.Ladernièrefoisqu’ill’avaitappelée,c’étaitjustepourl’entendreleluirépéter.Ellesavaitdequoiilparlait,alorselleluifitcepetitplaisir.Jet’aime.Iln’avaitpasprécisés’ilpasseraitlavoircesoir-là,maisellel’espéraittoutdemême.LeregarddeKylieseposasurlavivelumièreàl’autreboutdelapièce.L’épéen’avaitpascesséde
reluiredetoutelajournée,alorsqu’ellenel’avaitmêmepastouchée.Commesielleessayaitdeluidirequelquechose.Manifestement,Kylieneparlaitpaslalanguépée.Cen’étaitpas fauted’avoiressayé.Après ledîner,elles’étaitassiseetavaiteuuneconversation
avec ce truc.Lui avait demandé s’il y avait quelque chosequ’elle avait besoinde savoir.Lui avaitconfiésesinquiétudessurlefaitderesterenvie.L’épée ne lui répondit pas.On ne pouvait pas dire qu’elle s’y attendait,mais sérieusement, elle
n’aurait pas été trop choquée si cela avait été le cas. Il fallait bien avouer qu’il se passait tout etn’importequoiàShadowFalls.Constatantqu’ilétaitprèsdeminuit,Kylieseleva.Dellasortitdesachambreenmêmetemps.–Oùvas-tu?luidemanda-t-elle.–Jeveuxjustem’asseoirsurleperron.Seule.–Tuespèresqu’ilviendra,n’est-cepas?Kyliehochalatête.–Bien,acquiesçaDella.Mêmesidemaintuaurasunehaleinedechien…Kylie rit bêtement et sortit.Elle contempla la lune en sedemandant si la transformation aiderait
Lucasàgérersonchagrin.Ellel’espérait.
Lesouvenirdeluienloup,quandilavaitempêchéFrederickadel’attaquer,latitillaitencore,etellemouraitd’enviedelerevoirsouscetteforme.Ilyavaittantdechosesqu’ellevoulaitsavoirsurlui.Àquoiressemblait-ilquandilseréveillaitlematin?Dequelcôtédulitdormait-ilentempsnormal?Ronflait-il?Elleconsultasese-mailssursontéléphone.Ellen’avaitqu’unmessage.DeDerek.Illuiavaitfait
suivretouslesliensqu’ilavaittrouvésenrapportavecLucindaEsparza.Commel’espritn’étaitpasréellementparti,elleseditqu’ilresteraitjusqu’àlaconfrontationavecMario.Oupeut-êtren’était-ilsimplementpaspresséd’allerenenfer.Cette idéefitnaîtreunfrisson le longdesacolonnevertébrale.Elleallaitcouperson téléphone,
maisappuyaaccidentellementsurundesliens.Ellelelut,maissansrienapprendredenouveau.Puisellevitlederniersurlaliste,unevieillecoupuredepresse,quiannonçaitlemariagedeJohnAnthonyEsparzaetdeLucindaEdwards.Kylie cliqua sur le lien.Elledécouvrit unephotodeLucinda en robedemariée.Elle était jolie,
jeune et innocente, toute de blanc vêtue. Sur la photo suivante, le couple coupait le gâteau. Kylieregarda l’imagedeplusprès.Soncœurs’arrêta.Ellecilla,priantpourquesesyeux lui jouentdestours.Maisnon,c’étaitbienlui.Pasétonnantqu’ellenel’aitjamaisaimé.John,leJohndesamère,étaitJohnAnthony,lefilsdeMario.Ellepassaimmédiatementenmodeprotectrice,sonsangpétillaalorsquel’adrénalineparcourait
toussesmembres.L’épéeapparutàsoncôtéetétincela,luisignifiantd’agir.Trèsclairement,elleserappelalamenacedeMario.Tuviendrasmevoir,KylieGalen,tuviendrasmevoirpourmourir,poursouffrirentremesmains,pourmonplaisir,parcequeleprixseratropélevé!Tafaiblesseteperdra!Ilavaitélaboréceplantoutdulong.Kylieenvisagead’appelerDellaoud’allerchercherBurnettmais toutau fondd’elle-même,elle
savaitquec’étaitsoncombat.Qu’elledevaitlegagner.Ouperdre.Ellen’avaitpasl’adresseprécisedelamaisondeplagedeJohn,maissamèreavaitditqu’ellese
trouvait dans lamême rue que les vieillesmaisons de planteurs qu’elles avaient visitées voilà unmoment.L’épéetremblotaitetKyliesentitqu’ellesavaitpeut-êtreprécisémentoùellesallaient.S’emparantde l’arme,elleput jurerentendrequelquechose s’agiterdans lesbois ; elle regarda
derrièreelle,nevitrien,puisserenditinvisibleetdécolla.Ellevolapar-dessus leportail, sachantque l’alarme sedéclencherait,mais sans jamais regarder
derrière elle.Burnett serait furieux.Pourtant, tout en elle lui disait que c’était cequ’il fallait faire.Vivreoumourir,cen’étaitmêmepasimportant.Sauversamère,si.Et elle sut exactement cequeMario entendait par «point faible ».L’amour.Point faible oupas,
l’amourétaitlaseulechosepourlaquellemourirvalaitlecoup.
Elle suivit la côte aprèsGalveston, jusqu’à la petite île suivante. La lune suspendue dans le cielobscurétaitrondeetbrillante.ElletrouvalarueoùdevaitsesituerlamaisondeplagedeJohn,etpluselleavançait,plusl’épéebrillait.Quandelles’approchad’unevastemaisonjaunesurpilotis,ferméeparungrandportaildedeuxmètresdehaut,ellesutinstinctivementqu’ellel’avaittrouvée.Ellenotaquel’habitationlongeaitlaplage,maisqu’iln’yavaitqu’untoutpetitportailquidonnaitsurlesableetl’océan.Quiachetaitunedemeuresurlerivagepourlabarricaderainsi?Quelqu’unquiavaitpeurdesintrus.L’épéesemblaitl’attirerencoreplusprès.Bonsang,peut-êtrequel’épéeetelleparlaientlamême
langue,enfindecompte.
Kylie faillitatterrirà l’intérieurde lapropriété,maissedoutaqueJohndevaitavoirunsystèmed’alarmequivalaitlargementceluideShadowFalls.Lecœurbattantlachamade,lesangpétillantdanssesveines,elles’intimaderalentiretderéfléchir
avantdefairequelquechosequipourraitmaltournerpourelleousamère.Elleinspectalesenvirons.Lavégétationétaitclairsemée,parrapportàHoustonetàtoutelarégion
decollines.Despalmiersetdegrands lauriers rosesbordaient laclôture.Elleentenditdesgensauloin.Elle fila à toute allure jusqu’à l’ombre noire qui longeait le portail, loin du clair de lune, etsuivit laclôturetoutautourdelapropriété,plusprèsdesvoix.Instantanément, lalumièredel’épéedisparut pour lui éviter d’être repérée. Mais sa main qui la tenait était encore imprégnée de sonpouvoir,desonénergie.Aprèsunlégervirage,elleremarquaunevoieprivéeetunportailenfer.Elleavançacalmement
jusqu’à un autre gros buisson de laurier-rose.Regardant entre les branches et les feuilles, elle vitdeuxhommesdeboutderrièreleportail,quidiscutaient.Desgardes.Quelgenre?Elledevaitsavoiràquoielleavaitàfaire.Plissantlesyeux,elleseconcentrasurleursfronts–des
caméléons.Maisleursconfigurationsétaientsombres,presquenoires.Cellesdumal.Ellerespiraprofondément,ellesavaitetacceptaitcequ’elleallaitaffronter.Leronrond’unmoteurattirasonattention.LaCadillacmétalliséeàcôtédelaquelleilssetenaient
avait lemoteurqui tournait.Unautrebruitdemoteuremplit lanuitéclairéepar la lune.Leportailcliquetaets’ouvrit.Elleguetta,tapiedansl’ombre,alorsquel’undesgardesentraitdanslavoitureblanche.C’étaitsachance.Peut-êtrelaseule.Elledevaitpasserceportail.Elledevaitsauversamère.Elleseditqu’ilétaitpeut-êtretroptard.Ellechassacettepensée,incapabledel’accepter.Serendant invisible,conscientequ’elleavaitaffaireàd’autrescaméléons,elleseconcentrapour
savoirs’ilyavaitquelqu’und’autredansleroyaumeinvisible.On n’entendait que le silence dans ce monde à part, mais comme elle, ils étaient peut-être là,
silencieux.Quiécoutaient.Conscientequel’onpouvaitentendresespas,elleattenditquelemoteurdelaportefasseunpeu
plus de bruit, lui procurant un infime avantage.Quand il s’ouvrit de quelques centimètres, elle sefaufilaàl’intérieur.Elleretintsonsouffle,tâchantdeserendrelapluslégèrepossibleetavança.Ellevenaitdepasserle
portaillorsqu’elleentenditunautrebruit.Depas.Ellen’étaitpaslaseuleinvisible.Ungardeapparutàquelquesmètresdel’autre.Ilbalayalesenvironsduregard.–Avons-nousdelacompagnie?demandalepremier.–Peut-être.Fermecefichuportail,commeçajelesaurai!Elles’enfuità touteallure.Accroupiederrièreunbuissonépineux,sachantquelesrisquesd’être
vue dans le monde visible étaient peut-être moins importants qu’être entendue dans la sphèreinvisible,elleréapparut.L’excitation qu’elle ressentait dans son mode protecteur était toujours à son apogée, et elle se
surpritàavoirbesoindeplusd’oxygène.Agrippanttoujoursl’épée,ellefermalesyeuxuneseconde,etl’entenditalors:ungrondementdecolère,grave.Mince.Ilsavaientdeschiensdegarde.Ouvrantlesyeux,elleregardafixementunmuseauauxdentspointuesetdesyeuxjaunesbrillants.
Lecollieràpiquesnoireslui indiquaqu’elleavaitraison:c’étaitunchiendegarde,maissesyeuxsauvagesluiindiquèrentquel’animalétaitenpartieloup.
Kylieravalasapeuretsentitl’haleinedel’animal.Ilrelevasonmuseaud’uncoupsec,enmontrantencorepluslesdents.Songrognementdevintplusbas,plusintense.Lesplaquesquipendillaientdesoncolliertintèrent;ellesavaientl’airtroplourdes.Elleregardal’animaldroitdanslesyeuxetresserrasonétreintesurl’épée.Nemeforcepasàte
tuer.Moncombatn’estpascontretoi.D’ailleursj’aimebienleschiensloups.Instantanément, l’animalrecula.Sesyeuxjaunesnecillèrentpasuneseulefois. Ils’accroupitsur
son arrière-train et détourna le regard de Kylie. Celle-ci se souvint du loup sur lequel elle étaittombéeàShadowFallsetquiluiavaitmontrésasoumission.Ellenelecomprenaitpas,maiselleprofiteraitdetoutcequiseprésentaitàelle.Parcequ’ilfallait
bienreconnaîtrequ’elleenauraitbesoin.Ellelançauncoupd’œilverslesgardes,prèsduportail.Iln’enrestaitplusqu’un.L’autreétaitrepartidansleroyaumeinvisible.Ilpouvaitêtren’importeoù.Serendantdenouveauinvisible,elleécouta.Entenditlespasquiavançaientdevantlebuisson.Ils
ralentirent.Soncœurbattaitsifortqu’elleétaitsûrequ’ilpouvaitl’entendre.Lechien-loupsurgitd’uncoupdufourré.–Espècedebâtard!fitlavoixdugarde.Jecroyaisquej’avaistrouvéquelquechose!Àtraverslesfeuilles,Kylievitl’hommeapparaître.Ilsedirigeaitversl’animald’unpaslourdet
donna un coup de pied dans sa patte arrière. Violemment. Le chien glapit, et le sang de Kylie sedéchaîna pour le pauvre animal sans défense. L’homme s’apprêtait à le battre encore, alors Kylieramassaunepierreetlajetadanslesbuissonsàsadroite.Legardevirevoltaetallaregarderdanslefourréàcôtéd’elle.Plusilserapprochait,pluselleavait
dumalàrespirer.–Rientrouvé?hurlaceluiduportail.–Jenecroispas,marmonna-t-ilens’éloignant.Justecesaleclébard!Cesaleclébardvientdemesauverlavie,songeaKylie.Son besoin de protéger était à sonmaximum. Comme l’homme restait visible et se remettait à
discuteravecl’autregarde,elledécidad’entrerdanslamaison.Denouveau invisible, elle contourna lamaison silencieusement, cherchant une entrée.Le chien-
louparrivaenboitantverselle,confirmantsesdoutes:ilpouvaitlavoir.Redevenant visible, elle se baissa et toucha la patte arrière du chien. Elle sentit sa main se
réchauffer.Fais-moientrerdans lamaison,monami,dit-elleà l’animal télépathiquement,sans tropsavoirsicelaallaitmarcherousielle l’espéraitsimplement.Maisbon,Dereksavaitcommuniqueraveclesanimaux.Peut-êtrequ’elles’étaitchangéeenfée.Lechiensedirigeasouslespilotisquisoutenaientlamaison.Ellelesuivit.Aprèsavoircontourné
demultiplespoutres,elledoutadesadécision,maislechiens’immobilisadevantcequiressemblaitàune rampe, quimenait à une chatière. Toujours invisible, elle essaya d’avancer au rythme de soncopaincanin.Pasfacilecommeprouesse,quandontenaituneépée.Elleendonnaaccidentellementuncoupsurleborddelaporte.Siquelqu’unsecachaitàl’intérieur
decettedimension,ilouellel’auraitentendue.Àl’intérieur,elles’arrêtapourécouter.Pasunseulbruitdansl’obscurité.Elleavisadeuxsacsde
couchageetdesécuellesvides.Jepariequ’ilsnetenourrissentpasrégulièrement,heinmonpote?Mais si les animauxmangeaient ici, c’était qu’il devait bien y avoir une porte quimenait dans lamaison.Qu’ellesoitferméeàcléoupas,c’étaituneautrehistoire.Passantenrevuelapiècesombre,elletrouvalaporte.Ellecaressadenouveaul’animal.Merci.Elle
selevaetouvrit.Elleinspira,sentantqu’elleavaitplutôtbienréussisoncoupjusqu’àprésent.Maiselleneseleurraitpas,leplusdurrestaitàfaire:trouversamèreetlafairesortird’ici.Vivante.
L’épéesemblavibrerdanssamain,commepourluirappelerques’échappercesoirneseraitpassisimple.Cesoir,elleseserviraitdel’arme,maiscettefois,paspours’entraîner.Pensantquetout lemondedormait,ellesefrayauncheminà traversunegrandecuisine,puisse
retrouvadansunvasteséjouroùtrônaitunegrossecheminéeenpierre.Cettepièceétaitapparemmentle centrede lamaison.Uneportedonnaitde chaquecôté.Elle remarquaune lumière auboutd’uncouloir.Elleentenditdesvoix.Avançantàpasdeloupdanslecouloir,elleécouta.Elle reconnut toutde suite lavoixde John.Soudain, elle futparcouruede frissons.L’autrevoix
appartenaitàMario.Pasdevoixféminine.Elledécidadepartiràlarecherchedesamère.Àcetteheuredelanuit,elle
dormaitsûrement.Ellepritl’autrecouloir,quidevaitdonnersurleschambres.Lapremièreétaitunechambred’amis.Espérantquesamères’ytrouvait,ellel’ouvrit.Ilyrégnait
unsilencesinistre;elleétaitvide.Elle aperçut une autre porte au bout du couloir et sut immédiatement que c’était là que samère
dormait. Elle couchait avec John. Avec l’ennemi. Mais Kylie était là pour y remédier. Elle seraccrochaàsonépéeettournadélicatementlebouton.Surlelitétaitallongéeunesilhouettefamilière.Uneveilleusel’éclairait.Kylieserappelatoutesces
nuitsoù,enfant, elleétait entréedans lachambredesamère,àcausedecauchemarsoud’unbruitlouche.Pasuneseulefoiscettedernièrenes’étaitmiseencolère.Ellen’avaitpeut-êtrepasétélapluscâline du monde, mais elle avait toujours été là. La colère que Kylie avait ressentie à cause del’histoiredesBrightenluiparutbrusquementhorsdepropos.Elleentraetseplantaàcôtédulit.–Maman?murmura-t-elle.Pasderéaction,etl’espaced’uneseconde,Kyliepaniqua,puisellevitsescôtessesouleverquand
ellerespirait.Elleregardalacoiffeuseetyvitunverredevin.Laveilleusel’éclairaitetmontrademinuscules
particulestoutaufond.Elleletintàlalumièreetremarqualespilulesécrasées.Johnavait-ildroguésamère?Ellelereposaet,denouveauenmode«protectrice»,elleempoignasonépéeetsebaissa:–Maman!Samères’agita,maistrèspeu.Ellesecoualégèrementsonépaule.–Maman,réveille-toi!Sesyeuxs’ouvrirentd’uncoup.–Kylie?Quefais…?Elle regardaautourd’elle,commesielleneparvenaitpasàseconcentrer.Était-ceparcequ’elle
dormaitencoreouàcausedesmédicaments?–Oùest…–John?finit-elleàsaplace.Respirant profondément, Kylie se rendit compte qu’elle n’avait pas pris le temps de trouver
commentelleallaitluiexpliquertoutça.Elledécidadedirelavérité.Lemomentétait-ilbienchoisi?Samèrepourrait-ellelasupporter?–John!criasamère.Kyliemitdeuxdoigtssurseslèvres,priantpourqu’ilnel’aitpasentendue.–Chuuut…–Mon Dieu, qu’est-ce que c’est ? s’exclama-t-elle quand elle vit l’épée qui miroitait à présent
vivement.Ellegrimaça.C’estunrêve,n’est-cepas?
–Maman.Kylietâchadeparlercalmement.Johnn’estpasceluiquetucrois.Cen’estpasquelqu’undebien,nousdevonspartir.Samèredétournalesyeuxdel’épéeetlesreposasurKylie.–Tudoisarrêterdepensercegenredechose.Jesaisquecelafaitsouffrirtonpère,mais…–Maman,ilfautvraimentquetutetaisesetquetufassescequejedis,d’accord?Le front de sa mère se plissa et Kylie fut convaincue qu’elle avait été droguée. Elle secoua
légèrementlatêtecommesielleessayaitdeseréveiller.Puisellerejetauncoupd’œilsurl’épée.–Commentes-tuarrivéelà?Çadoitêtreunrêve.–Viens.Kylieaidasamèreàselever.Celle-cisemitdebout,maisretombasurlelit.Kylieréessayaetconstataaupassagequ’elleportait
unenuisettesexy.Pasletempsdes’enpréoccuper.Elledevaitlafairesortird’iciauplusvite.Elleluipritlamainetl’accompagnaverslaporte.Justeavantqu’ellesn’yparviennent,celle-cis’ouvritàlavolée.Johnétaitsurleseuil:ilfixaitKylie.Puis,commesurgid’unmauvaisrêve,Marioapparutàson
côté.Kyliepoussasamèrederrièreelleettenditsonépée.–Pousse-toi!Marioluiréponditparunsourirediabolique.–Jesavaisquetuviendraismevoir.–Quiêtes-vous?demandasamère.EtelleessayadeseplanterdevantKylie.Celle-cil’attrapaparlebrasetl’empêchad’avancer.–Etellenousaapportéunpetitjouet,commec’estgentil,ironisaMarioendésignantl’épée.
Kylienesavaitpasquoifaire.Maiselleoptapourlapremièrechosequiluivintàl’esprit.Attrapantlamaindesamère,ellelarenditinvisiblecommeelle.Cettedernièrehurla.Refusantdecéderàlapaniquematernelle,Kylieseruaverslaporteenesquivantlesdeuxhommes.
Malheureusement,samèreluifutarrachéedesmains.Virevoltantsurelle-même,Kylienepouvaitpaslavoir,maisellel’entendaithaleter,etellecompritqueMario,quis’étaitrenduinvisibleàsontour,lamaintenait.–Lâche-la!criaKylie,quibouillaitderageetredevintvisible.Marioapparutquelquessecondesplustardavecsamère.Samainserraitsifortsagorgequeson
visagebleuissaitpeuàpeu.Kyliebranditl’épée.–Traite-ledelâche!Lavoixdel’espritrésonnaitauxoreillesdelajeunefille,aumomentmêmeoùlefroiddescendait
lelongdesacolonnevertébrale.–Insistepourqu’ilsebattecommeunhomme!–Nesoispas lâche !Laisse-laetbats-toicommeunhomme! lançaKylieenpriantpourqueça
marche.Mario,lamaintoujoursautourducoudesamère,regardafixementKylie,lesyeuxplissés.–Trèsbien.IlbalançasamèreàJohn.Celle-citombaàsespieds,àboutdesouffle.Il larelevabrusquement.
Kylieenrageait.Elleavaitenvied’attaquer.D’oublier l’épéeetdedéchiqueterceshommesàmainsnues. La seule chose qui l’en empêchait, c’était l’esprit qui se tenait devant elle et qui répétait lesmêmesparolesencoreetencore.–Lepouvoirquetuasestdanscetteépée.Lepouvoirestdansl’épée.
Soudain samère se libéra d’un coup de John et fonça surMario. Elle n’était peut-être pas unesurnaturelle,mais l’amourmaternel était extrêmementpuissant.Malheureusementpas autantque lamagiedecesdeux-là.Johnlarattrapaparlescheveux.–Arrêtedetebattre,pauvreidiote!Samère écarquilla les yeux de stupeur. Pour la première fois, elle voyait qui il était vraiment,
quelqu’undemauvaisquis’étaitservid’elle.Kylie souffraitpourelle, etpriapourquecene soientpas lesderniers instantsde savie.Onne
devraitpasmourirenpensantàseserreursetrongéparleregret.Marioagitaunemainetuneépéeapparut.–Jetetueraiàpetitfeu,ettamèreseraobligéederegarder.Ceseradrôle,non?–Non!hurlaKylie.John coinça les bras de samère dans son dos et les maintint avec force : elle ne pouvait plus
bouger.–Pasici,fitJohn.Cetapism’acoûtécinquantemillelivres!SamèrehurlaencoreetJohnlatirabrusquementverslui.–Laferme,sinonellemourraencoreplusvite!Marioregardasonfils.–Lesangaugmenterasavaleur!SamèrescrutaKylie,deslarmescoulèrentsursesjoues.LarevenantefixaJohn.–Tupourrirasenenferpourtoutcequetuasfait!Kylienepouvaitquesouhaiterqu’elleaitraison,etqu’ilpartetrèsvitepourl’enfer.Marioalla seposterdevant Johnetdirigea lapointede sonépéevers lapoitrinede samèreen
regardantKylie.–Nousallonssortird’ici.Situdécidesdenepasnoussuivreousitutentesquelquechosed’idiot,
jelatuerai.Etavecgrandplaisir.Samèrelaissaéchapperunhorriblehurlementdeterreurabsolue.Quandellelevalesyeux,safille
vitqu’elle imploraitsonpardon.Ellecroyaitqu’ellesétaientmaudites,etKyliepensaqu’ellenesetrompaitpeut-êtrepas.–Jevoussuivrai,déclara-t-elle.Etelles’exécuta.Ellelesuivitdanslecouloiretdansleséjour.Marioagitaunemain,etlesmeublessepoussèrent,leurlaissanttoutelaplacepoursebattre.Kylie
devinaqu’iltiraittoussespouvoirsdumal.–Attendsune seconde, jeveuxprofiter du spectacle, dit Johnen entraînant samère avec elle. Il
ouvrituntiroiretensortitunrouleauderubanadhésifqu’ilenveloppaautourdesespoignets.Puisilfit pareil avec ses chevilles. Il la poussa brutalement contre lemur alors qu’elle se débattait et lesuppliaitd’arrêter.Sonrireretentit,cruel.Ilenarrachaunautrebout,qu’ilcollasursabouche.Kylieobservalascène,entrehorreuretcolère;elleavaitbiendumalàsenepassautersurcesale
typeetànepasluiarrachersoncœurnoir.–Pasmaintenant,pasencore,patience,patience,murmura l’esprità l’oreilledeKylie. Ilyaun
planettudoislesuivresituveuxéchapperàlamort.Elle ne comprenait pas ce qu’il voulait dire, mais elle n’avait pas le temps de réfléchir. Le
hurlementdel’espritl’avertitjusteàtempsdel’attaquedeMario.Elleretintsonépéedelasienne.Lecliquetisrésonnaàsesoreilles,maisellel’entenditàpeineàcausedubruitdusangquiparcouraitsoncorpsenbourdonnant.
Il l’attaqua de nouveau, et Kylie répondit coup par coup. Leurs épées cliquetèrent,s’entrechoquèrent bruyamment.Lucas aurait été fier d’elle.Mais aussi bonne fût-elle à bloquer lescoups,ellen’eutjamaisl’opportunitédepasseràl’offensive,tropoccupéeàsedéfendre.Siellenes’arrêtajamaispourregarder,elleimaginaitbienquesamèrel’observait,horrifiée.Et
endépitde seseffortspournepasécouter, elleentendait leshurlementsdésespérésétoufféspar lerubanadhésif.–Aidez-nous,criaKylieauxangesdelamort,àDieu,àquiconqueécoutait.Auloin,lehurlement
duchien-loupfenditl’air,commes’ilpriaitpourelle,luiaussi.–Neperdspassonépéedevue.Regarde-lebien,ilvasebaisser,cettefois.Lesordresdel’espritarrivaientviteetbien.Kylies’efforçadelesécouter,d’oublierquec’étaitune
questiondevieoudemort.Ellesuivitlesinstructionsetécoutalebruitdumétalsurlemétal.L’espaced’unebrèveseconde,KylieperçutlevisagedeMario.Ilsouriait,commes’iljouaitavec
elle.Combiendetempspourrait-elletenir?Commentpourrait-ellegagner?–Necessepasdecroireentesdons!crial’esprit.Puis Kylie vit John apparaître derrière son père, avec sa propre épée. Deux contre un ? Les
souvenirs de la vision de Lucinda envahirent sa tête. Pourtant, seule une très légère appréhensionentradanssoncœur.Pasletempsd’avoirpeur.CommeLucinda,lanuitoùelleavaitperdulavie,Kylienepensapasàlamort.Ellesebattait,tout
simplement.Sebattaitdetoutsonêtre,uneprièreauxlèvres.Soudain,Johnpritsonélanetenfonçasonépéedansledosdesonpère,letransperçantdeparten
part.Lesangassombritsachemise.LesyeuxdeMarioétincelèrentd’unvertflamboyant,justeavantquelavienelequitte.Unevolutedefuméenoiresemblableàdubrouillardsortitdesabouche.Sonâme.Souilléeetmauvaise.Puis,lebruitleplusaffreuxqueKylie,eûtjamaisentenduserépanditdansl’air;commedesrats
qui piaillent et des cafards qui se nourrissent. Plusieurs êtres flous, les sous-fifres du diable,traversèrentlapièced’uncoupetvinrentemporterl’âmenoiredeMario.Johnressortitvivementsonépéeducorpsdesonpère,etdusanggicladelablessure.L’épéene
soutenantplussoncorps,Marios’écroula.Samortn’étaitpasbelleàvoir.Kylieleregardafixement,tendantsapropreépéedevantellesansbouger.PourquoiJohnavait-il
faitcela?S’était-elletrompéeàsonsujet?Ellescrutasonvisage,etlesourirefroidqu’ilarboraitluiindiquaquenon,ellenes’étaitpasdutouttrompée.–Commec’estpratique,observa l’esprit.Tuas tué l’hommequia tué ton fils.Maispaspour le
nôtre. Elle se rapprocha de lui, le regarda droit dans les yeux. Puis dit à Kylie.Ne lui fais pasconfiance.–Pourquoiavez-vousfaitça?demanda-t-elleàJohn,sonépéetoujourslevée,prêteàsebattre.–J’attendaisqu’ilmeurepourprendresaplace,l’occasionétaittropbelle.Kyliesentitleméprisdanssavoix.–Etmaintenant?–C’estclair,non?Ilsourit.Tuaslechoix.Soittuacceptesquetamèreettoivousm’apparteniez.
Tufaiscequejedemande,tamèrevit.Sinonellemeurt.Lesyeuxdesamèreluilancèrentdeséclairspleinsdehaine.–Jecroisquel’onpréféreraitencoremourir,réponditKylie.Maiscertainementpastoutdesuite.–Tucroisquetupeuxmebattre?Tun’esqu’unegamine,avecdespouvoirsquetunesaismême
pascontrôler!
Il l’attaqua avec une rapidité féroce. Son épée avançait et reculait. Elle avait du mal à tenir lerythme.–Vaàgauche,àdroitemaintenant.L’esprithurlaitsesordres.Kylie tâcha de se défendre. Son épée s’abattit,mais la sienne fut plus rapide.Elle sentit la lame
tranchante commeun rasoir s’enfoncerdans sonavant-brasgauche.Lapiqûre et le sang suivirent.Elle ne ralentit pas. Ne pouvait pas. Ralentir, quitter l’épée des yeux une seconde, c’était la mortassurée.Pourelle.Poursamère.Puisellesentitlefroidfamilierdesonpère.Ilétaitlà.Maisétait-cepourl’aideroupourl’emmeneraveclui?Ungrandfracasretentitquelquepart,pasloin.Elleseforçaànepaspenseretàresterconcentrée
surleduel.Puisunaffreuxgrognementsourdvibradanslapièce.Ellevitlelouplatraverserd’unbond.Lagueuleouverte,lesbabinesretroussées,lescrocsacérés,prêtsàmordrelachair.Sonamiétaitvenusebattreavecelle.Soudain, elle comprit.Ce n’était pas le chien-loup.Celui qui s’élançait vers John, c’était Lucas.
Johnpointasonépéeverslanouvellemenace,prêtàtranspercerlapoitrinedufauve.Detoutessesforces,sentantlebesoindeleprotégerdanstoutsonsang,KylieabattitsonépéesurcelledeJohnetlafittomberdesesmains.L’hommerugitdefureur,esquivaLucasetessayadereprendresonarme.MaisKyliefutplusrapidequelui.Ellel’attrapaetl’enfonçadanssonflanc.Unefois.Deuxfois.Il
s’écroula.Soncorpstrembla.Ilhaleta.Dusanggouttaitdel’épéedelajeunefille.ElleregardaLucas.Lesyeuxbrillants,ilmontraittoujourslesdents.Puis,commeprécédemment,desbruitshorriblesenvahirent lapiècealorsque lediableenvoyait
lessienscollecterl’âmeobscures’écoulantdelabouchedeJohn.Lâchantsonépée,Kyliesesentitsouilléed’avoirôtéunevie.Puisellesetournabrusquementvers
samèrequi,étendue,contemplaitlascène.Non,ellen’avaitpasprisunevie,elleenavaitsauvéune.Elletombaàgenouxetsedémenapourdécollerlerubanadhésifdesabouche.Lucas,danstoutesa
splendeurdeloup,s’approchad’elle.Samèresetortillacommesielleavaitpeurdel’animal.LucaseffleuraKylie,croisabrièvementsonregard,puiss’enalla.Kyliesesouvintdecequesagrand-mèreavaitdit:tufaispartiedesaquête,etluidelatienne.–Çavaaller,maman..Elle finit d’enlever le rubanadhésif de sabouche.Lehurlementde samère se répercuta sur les
murs.–Çava,répétaKylie.Calme-toi,nebougepas,jevaistedétacher.Sitôtlibérée,elleétreignitsafilletrèsfortetlonguement.–Quelcauchemar!Puiselle se recroquevillaenboule, sebalançantd’avantenarrièrecommesielleattendaitdese
réveiller.Kylieregardalesdeuxcadavre.Elledevaitappelerlapolice.Ellesedemandacommentsamèreréagiraitquandelleluiraconteraittout.Puis elle se souvint ; elle était peut-être venue toute seule ici, mais elle avait des amis. Elle
s’emparadesontéléphoneetcomposalenumérodeBurnett.Justeavantquesondoigtn’effleurelatouche«appel»,unautrebruitenvahitlapièce.Douxetrassurant.Celuidel’eauquicoule.Celuidescascades.Lasensationdechaleur,delégitimité,dejusticel’envahit.Lemomentdepaixfutbrisélorsquesamèrehurladenouveau,lesyeuxrivéssurquelquechose
derrièreKylie.–Il…quoi?Comment?Samèrerecula.
Kylie fit volte-face, attrapa son épée enmême temps, et pria pour que le cri de samère ne soitqu’unaccèsdepaniqueàretardement.Elleavaittort.
Daniel, son père, se tenait devant Kylie, se manifestant intégralement. Encore plus clairementqu’auparavant.Lebruitdecascades’intensifia.Lebourdonnementpaisibledel’eau.–Papa?chuchota-t-elle.–Salutmabelle!–Salut!Ilregardaderrièresonépauleetserembrunit.–Tamères’estévanouie.Kyliejetauncoupd’œilsurelle.–Elleaeuunenuitdifficile.–Toiaussi.IlluimontralesangsursonT-shirt.–Justeuneblessurelégère,dit-elle,ouétait-ceplusquecela?Ellebaissalesyeux,sedemandantsielleavaitseulementimaginéqu’elleétaitsuperficielle,etque
çayétait,quesonpèreétaitvenulachercher.LesangavaitimprégnétoutsonT-shirt,pasbeaucoup,maissuffisammentpourquelasensationde
paixs’amoindrisseetque lapeurprennesaplace.Étrangement,cen’étaitpasde lapeurpourelle-même.Mais la crainte que si jamais ellemourait, elle abandonnerait les autres.Ou sa victoire surJohnetMarioavait-ellerésolutoutcela?Sonheureétait-ellesimplementarrivée?Ellelevalatête,lavuelégèrementvoiléeparleslarmes.–Vais-jemourir?Lesautressouffriront-ilsàcausede…?Ilseruaverselle.Sesmainsserrèrentsesépaules.Sonfroidétaitunréconfortqu’ellereçutavec
plaisir.–Non,Kylie.Tuastantàvivre,monenfant.Jenesuispasvenutechercher.–Lesangesdelamortt’ont-ilsdonnéplusdetempssurterre?–Unpeuplus,oui,maiscequ’ilsm’ontoffertétaitmieuxencore.Uneplacechezeux.
Kyliemitunesecondepourcomprendre.–Tuvasdevenirunangedelamort?–Oui, après t’avoir aidée une dernière fois. Mais la beauté de tout cela, c’est qu’à partir de
maintenant,jeseraitoujourslàpourveillersurtoi.Lasagessequetuentendrasdanstoncœur,elleviendrademoi,mafille.DeslarmesenvahirentdenouveaulesyeuxdeKylie.–Commentvais-jefaireaccepterçaàmaman?–C’estpourcelaquejesuisici.Nousleferonsensemble.PuisKyliesesouvint:–Elleaputevoir…avantdes’évanouir?–Oui,elleatoujourssentimaprésence,maisl’onm’adonnésuffisammentd’énergiepourqu’elle
puissemevoir.Ilregardaautourdeluietfronçalessourcilsenvoyantlescadavres.–Maispourl’instant,appelleBurnett.Kylierecomposasonnuméro.
–Elleestpresqueréveillée.Le père deKylie s’avança.Kylie, assise sur une chaise à côté du lit dans la chambre d’amis de
John,levalesyeuxsurlui.Samèreavaitperduconnaissancedepuispresquequatreheures.BurnettetHolidayétaientarrivés
quelquesminutesaprèsqu’elleleseutappelés.Levampireavaitaussitôtfaitvenirdupersonnelpourtoutnettoyer.L’URFferaitpassercelapouruncoderouge,unaccidentdevoiture.Commentferaient-ilspasserdescoupsd’épéepourunaccidentdelaroute,ellel’ignoraitetpréféraitnepaslesavoir.Aprèsunebonnecrisedelarmessurl’épauledeHoliday,Kylieexpliquacequis’étaitpassé.Elle
parlaégalementdeDaniel.Holiday futadmirativepourcequesonamieconnaisseenpersonneunangedelamort.Kylieavaitfaillirétorquerqu’elleauraitpréféréavoirsonpèreavecelledanssavie,maiselleserappelaqu’elleavaitdenombreusesraisonsdes’estimerheureuse.Quand elle leur raconta que Daniel était venu pour expliquer la situation à sa mère, Burnett
exprimasoninquiétude:celle-ciallait-ellesupporterlavérité?Alorsilsuggéraquel’onconvoqueDerekpourluieffacerlamémoire.MaisDanielavaitrefusé.–Elledoitsavoirlavérité,avait-ilinsistésansdonnerd’explication.Kyliedevaitfaireconfianceàsonpère.HolidayfitremarquerquelamèredeKylien’étaitpasunhumainnormal.Entantquedescendante
d’unetribuamérindienne,elleétaitconscientedespouvoirssurnaturels.Ainsi,avecl’aidedeDaniel,futurangedelamort,Kyliepourraittoutluiraconter.Maisellen’était
paspressée.Samèreouvritlesyeux.Elleseconcentrasursafille,puislesmotssortirentdeseslèvres.–J’aifaitunhorriblecauchemar.Elleseredressadanslelit.Danielétaitparti.Ellesupposaqu’ilsemontreraitquandelleauraitbesoindelui.Samèrecligna
plusieursfoisdesyeuxenréalisantoùellesetrouvait.–Quefais-tuici?Kylieluipritlamain.–Tuavaisdesproblèmes.Samèresoupira,secoualatêteetretombacontresesoreillers.
–Jerêveencore.–Non,maman,cen’étaitpasunrêve.–Si,si.C’étaitaffreux.Entoutcas,certainesparties.Tutebattais,et…–C’étaitaffreux,oui,maiscen’étaitpasunrêve.Kylieneconnaissaitqu’uneseule façonde le luiprouver.Ellebaissa lecoldesonT-shirtet lui
montra l’entaille sur sa peau.Bien sûr,Holiday avait vu le sang sur le vêtement et n’avait pas étécontente.Jusqu’àcequ’elletrouvequelquechosedanslamaisonpournettoyerlablessure.Lesyeuxdesamères’arrondirentcommedesbilles.–Est-cequetu…vas…bien?Bienétaituntermetellementvague,réalisaKylie.Ilétaitloind’exprimercequ’elleressentait.Mais
enmêmetempslesmotsluimanquaient.Elleavaitvusamèreàdeuxdoigtsdemourirétranglée.Elleavaitdûsebattrepoursauversapeau
avecuneépéelumineuse.Elleavaitregardésonravisseurtuersonproprepère.Elles’étaitlui-mêmefaittailladerparuneépée.Puiselleavaittuéunhomme.–Oui,opina-t-elle,çava.Elleinspiraettâchadesesouvenirenquelstermeselleavaitprévudeluidirelavérité.–Biensûrquetuvasbien.Puisquec’estunrêve.Kylie luiserraaffectueusement lamain.Danielavaitaffirméqu’ilessaieraitdes’introduiredans
lesrêvesdesamèrepourarrangertoutcela.Avait-ilréussi?–Maman,tesouviens-tum’avoirditquetupensaisqueDanielavaitquelquechosedemagique?–Oui,mais…–Ehbien,tuavaisraison.Ill’était.Etcelam’arenduemagique.Samèreserralesdrapsdulit.–J’aiégalementrêvédelui.Oh!monDieu!Çan’apasdesens!dit-elleensecouvrantlesyeuxde
sesmains.–Si,maisd’abordtudoism’écouter,maman.Elleattenditquelquesminutes.–Tutesouviensquandjepensaisquequelqu’unmesuivaitpartout?Tusais,quandtum’asenvoyé
voircepsy?Samèreopina,maisfaiblement,presquecommesielleallaitdenouveaus’évanouir.–Respire,maman.Ellepritunegrandegouléed’airetKyliepoursuivit:–Tutesouviensquandjetedisaisqu’ilportaituntreillis?Samèrehochadenouveaulatête.–Jecomprendsmaintenantquecelaadûtefaireflipper…Monpèreestmortàl’armée,c’estbien
ça?N’est-cepasunepartiedecequitebouleverse?–Iladitquetumeraconteraistoutcela.Quesepasse-t-il,Kylie?–Exactementcequepapat’adit,répondit-ellecalmement.Jesaisquecelaal’airfouetqueceque
tuasvécu…estdifficile,maistudoisessayerdelecroire.Les yeuxde samère, rivés derrière l’épaule deKylie, s’écarquillèrent brusquement.Le froid la
frappa à l’instant même où sa mère haletait et Kylie comprit que Daniel était apparu. Et vul’expressiondesamère,ellepouvaitlevoirelleaussi.–Respire,maman,répétaKylie.Elleeutleslarmesauxyeux,quandellevitlechagrinenvahirlevisagedesamèreencontemplant
l’hommequ’elleavaitaimésifort,ilyavaitsilongtemps.
–Dansmonrêve…tu…Lavoixdesamèretremblait.– Je t’ai dit que tu me verrais. Daniel se rapprocha du bord du lit.Maintenant, je veux que tu
écoutestafille.Ellevat’expliquerleschosesmieuxquemoi.Jedoisyalleràprésent,maisrappelle-toicequej’aidit.Tutrouverasdenouveaul’amour.Neluttepascontrelui.Danielsepenchaetl’embrassadélicatementsurleslèvres.–Tuasétél’amourdemavie,déclara-t-il.DeslarmesemplirentdenouveaulesyeuxdesamèrequandDanielseretira.Iljetauncoupd’œilà
Kylieetdéposaundouxbaisersursajoue.DanielregardadenouveausamèreetdésignaKylie.–Onl’aplutôtréussie,n’est-cepas?Ellefitouidelatête.–Jeseraitoujourslàquandtuaurasbesoindemoi.Ildisparut,etKylieessuyaleslarmessurses
joues.–J’aifaitunrêve,ilm’aditqu’ilveilleraittoutletempssurnous.–C’estvrai,maman.Jen’aicommencéàlevoirquerécemment,maisilsavaitdestasdechoses
surmavie.Kylie se faufila à côté d’elle dans le lit, la serra très fort, et elles pleurèrent. Elles pleurèrent
quelqu’un qui était mort des années auparavant, mais qui leur manquerait toujours. Puis elle luiexpliqua queShadowFalls était destiné aux ados surnaturels, lui parla deMario etRoberto, et luiraconta que John était en réalité le fils de Mario. D’un ton doux, elle lui avoua qu’ils étaientmagiques,maisqu’enfaitMarioetJohnl’avaientéténégativement.Samèrehaleta.–JeviensdemesouvenirqueJohnatuéquelqu’un!Unhomme?Oùsontlesflics?–C’étaitMario.EtBurnetts’enestoccupé.ElleagrippalamaindeKylie.–Burnett?Detonécole?Kylieopinaetconstataquesamèreavaitencorearrêtéderespirer.–Respire,maman.–CeBurnettestmagique,luiaussi?s’enquit-elleenreprenantsonsouffle.–Oui.Kylie décida d’attendre pour expliquer cette histoire d’espèces différentes à samère. Vampires,
loups-garousetlesautres…toutcelapourraitbienluifairepeur.CelaavaitétélecaspourKylie,entoutcasjusqu’àcequ’elledevienneamieavecl’uneettombeamoureusedel’autre.Sa mère ferma les yeux comme si elle essayait d’oublier quelque chose… ou peut-être de se
souvenir.–Ensuite,unloupestentré,ettuastué…John.OhmonDieu,mapuce,ilfallaitquetuletues!Que
va dire la police ?Elle s’assit un peu plus droite.Nous lui dirons que c’étaitmoi.M’entends-tu ?C’étaitmoi,pastoi!LecœurdeKylieseserrafaceàl’empressementdesamèredes’attribuerlemeurtre.Comment,se
demanda-t-elle,avait-ellepudouterdesonamourpourelle?–Iln’yaurapasdepolice.BurnetttravaillepouruneorganisationcommeleFBI.Ils’occupedeça
pournous.Cequiveutdirequenousnedevronsenparleràpersonne.Samèreacquiesçaetsepenchaverselle.–MaisKylie,commentBurnettva-t-ilexpliquerlescadavres?OnsauraquejesortaisavecJohn!–Ilsechargeaussideça.
Elleretombasursesoreillers.–Ilmefaudrabeaucoupdetempspourycroire.–Jesais,ditKylie,c’étaitpareilpourmoi.
Lelundimatinsuivant,jourdelafêteduTravail,Kylieselevatôtetpréparalepetit-déjeunerpoursamère.Elleétaitrestéeavecelleetdutluirappelerfréquemmentderespirer.Ellesdormirentdanslemêmelit.Parlèrentlesoir,tardaprèsminuit.Samèrelamatraquadequestions.Certainesnécessitaientdesréponsesdifficiles.Elleluiparlade
toutescesespècesdifférentes.Vampiresetloups-garousfurentlesplusdifficiles,àcausedelapeurinstinctive liée à tout le folklore qui les entourait.Kylie lui expliqua qu’elle était un caméléon, etdécidad’attendreencoreunpeupourajouterqu’elleavaitenréalitéunpeudetouteslesespècesenelle.Pendantleweek-end,elleavaitaussiparléàDellaetMiranda.Dellaétatfurieusequesonamieait
encoredisparu,alorsqu’elleétaitcenséelasurveiller.–Çavacommenceràcraindrepourmoi,fitDella.Kylie luipromitdeparleràBurnett etd’endosser toute la responsabilité.Miranda lui rappela sa
promessedenejamaispartir,etKylieluiassuraqu’ellereviendrait.Cejourétaitlegrandjour:lemariagedeHolidayetBurnett.Samèreetellearriveraienttôtpour
lesaideràtoutinstaller.LucasavaitappeléKylietroisfois.Ilséjournaitchezsononcledepuislapleinelune.L’enterrement
était une épreuve de plusieurs jours pour les loups-garous. Et la veille du mariage, il avait sonrendez-vousavecleConseil,commeprévu.Elleluiavaitproposédel’accompagner,maisilluiavaitassuréqu’ildevaitsedébrouillertoutseul.Kyliepriapourqu’ilsl’acceptent.Maiscelanechangeraitrienentreeux.Commel’avaitaffirmésagrand-mère,chacunfaisaitpartie
de la quête de l’autre, des quêtes qui étaient en cours depuis qu’ils s’étaient rencontrés longtempsauparavant.Certaineschosesdevaientsefaire,toutsimplement.KylieespéraitquecequeDanielavaitassuréàsamère–qu’elle rencontreraitunautreamour–
étaitvrai.C’étaittriste,maiselleavaitlesentimentqueceneseraitpassonbeau-père.Elleavaitmêmeparlé à Tom Galen, ce matin-là – ils avaient passé vingt minutes à faire des projets pour leursprochaines vacances d’été. Avant qu’ils ne raccrochent, elle lui dit qu’elle l’aimait, et elle étaitsincère.ElleavaitbeausavoirqueDaniel resterait toutprèsd’elleenangegardiende lamort, sonbeau-père occupait sa propre place dans son cœur et l’occuperait toujours. Elle savait queDanielauraitvouluqu’ilensoitainsi.Kylieallasortirlesœufsduréfrigérateur.Delavapeurs’élevadelaboîteencarton,bizarrement.–Devinequoi?Ellereconnutlavoixdel’esprit.–Quoi?–Ilsnem’envoientpasenenfer.Kylieregardal’espritassissurleplandetravail,etsourit.Elleportaitunejolierobesansentailles,
sanstachesdesang,etnetenaitpasd’épée.–Tuvasauparadis?–Non, enfin pas encore. Ils me donnent une seconde chance. Tu sais, travailler pour eux pour
racheter tousmesméfaits.Ensuite,si j’engagneledroit, jepourraiyaller.Jeseraiavecmonpetitgarçon.Ellerayonnait.Kylieluisourit.
–J’aimelessecondeschances.–Sais-tupourquoiilsmedonnentcettesecondechance?Parcequej’aimaismonfils.Kylie se souvint queMario avait appelé cela une « faiblesse », et pourtant c’était cette faiblesse
mêmequil’avaitperdu.–C’estunsentimentpuissant,déclaraKylie.Etellesongeaàtoutl’amourqu’elleavaitconnudanssavie.Safamille.Sesamis.Lucas.–Ilfautquej’yaille,lançal’esprit.Sonimagedisparut.–Raviedet’avoirconnue,lançaKylie.–Moiaussi.Lavoixdisparutaveclesrelentsdefroid.Kylieseremitàlapréparationdupetit-déjeunerquandsa
mèreentradanslacuisine.–Àquiétais-tuentraindeparler?Kyliesedemandasielledevaitluidirelavérité,etdécidaquenon.–Letéléphoneasonnétoutelamatinée.–Quit’aappelée?demandasamèreenallantseservirunetassedecafé.–Papa,LucasetSara.Lesyeuxdesamères’écarquillèrent.–Tonpère?–Tom,clarifiaKylie.–Jevoismaltonpèreseservird’untéléphonepourtecontacter.Kyliesefenditd’ungrandsourire.–Moiaussi.–CeLucas…compte-t-ilpourtoi?demanda-t-elleenajoutantdulaitenpoudredanssoncafé.–Beaucoup.Jel’aime.Samèreouvritdegrandsyeux.–Est-cequevousavez…tusais?Ellen’arrivaitpasdire«couchéensemble».–Pasencore,réponditlajeunefille.Maisçanesauraittarder.–Tudevraisvoirunmédecinpour…–Qu’ilmeprescrivelapilule,finitKylieàsaplace.Ellehochalatête.–Jevaislefaire,luiassura-t-elle.Samèrerepritsonsouffle,commesilaconversationavaitétédouloureuse,puiselledemanda:–Sarapasseratevoiravantquetunerepartes?–Non,elleestàlaNouvelle-Orléanspouruneréuniondefamille.C’estpourçaqu’elleaappelé,
pourmeledire.Etpourmeraconterquesestantesl’étouffaientavecleursgrosseins.Samèregloussa,puissonexpressionchangea.Ellesecontentadesirotersoncafé,etdeleremuer
encoreetencore.Lecliquetisdelacuillèrecontrelatassesemblaitleseulbruitdelapièce.Ellefinitparleverlesyeux,lefrontplisséd’inquiétude.–Quandj’aiemmenéSarapourvenirtevoir,ellem’aracontéquetul’avaissoignée.Tunel’aspas
vraimentfait…si?–Si.Elles’activaàpréparerlestartinesetfitcommesicen’étaitpassiimportant.–Ya-t-ilautrechosequetusachesfaire?demandasamèreenretenantsonsouffle.
–Etsij’engardaisunpeupourplustard?proposaKylie.Samèrepoussaunprofondsoupir,quiressemblaitbeaucoupàdusoulagement.–Bonneidée.
KyliegardasontéléphoneàlamainenrentrantàShadowFalls,elleattendaituncoupdefilouuntextodeLucas.Avait-ilintégréleConseil?Sicen’étaitpaslecas,ladétestait-ildéjà?Oh,biensûr,ilavait soutenu que cela ne changerait rien entre eux, mais elle avait conscience que cela comptaitbeaucouppourlui.Ilétaitprèsde troisheurescetaprès-midi-làquand ils segarèrentdevant lapancarte«Lycéede
Shadow Falls ». Holiday et Burnett accueillirent Kylie et sa mère au portail. On s’étreignit, ons’enlaça,mêmesamèreselaissaallerauxembrassades.Maisaumomentd’enfranchirleseuil,elles’arrêta.–Quelquechosenevapas?demandaBurnett.– Juste un peu nerveuse, répondit sa mère. Je ne suis pas sûre d’être prête à rencontrer des
vampiresoudesloups-garous.Burnettjetauncoupd’œilàKylie,quihaussalesépaules,l’airdedireonverrabien.Ilreposalesyeuxsursamèreetsourit.–Nevousinquiétezpas,ilssontloind’êtreaussiintimidantsquevousnelepensez.–Yenavait-illorsdesjournéesdesparents?demanda-t-elle,hésitante.–Quelques-uns.Kylierouladesyeuxenréalisantqu’elle luiferaitvivreunenferquandelleapprendraitquiétait
vraimentBurnett.–Alors,paroùcommençons-nous?demanda samèreàHoliday, commesi ellevoulaitoublier
toutecettehistoiredesurnaturel.C’estvrai,quoi,noussommesicipouraideràmenercemariageàbien.Holiday les accompagna jusqu’à l’endroit où devait avoir lieu la cérémonie. Plusieurs élèves
installaientdéjàleschaises.DèsqueKyliefutsûrequesamèrenepouvaitpasl’entendre,elledemandaàHoliday:
–As-tudesnouvellesdeLucas?–Non,ilaappelépourdirequesonrendez-vousavecleConseilavaitétéunpeuretardé.Ilseralà
dansuneheure,maisilnepeutpasarriverenretard,c’estl’undestémoinsdeBurnett.Pourlapremièrefois,lesyeuxdeHolidayseplissèrentd’inquiétude.Ellepassalamainderrière
sonépauleettressasescheveux.Puisellehoqueta.–Ettamère,commentva-t-elle?KylielavitentraindebavarderavecChrissanssedouterlemoinsdumondequ’elleparlaitàun
vampire.–Mieuxquejenelepense.Biensûr,quandellesauraqu’elleadéjàdiscutéavecdeuxvampires,
ellevapéteruncâble!Holidaysefenditd’ungrandsourire,puisrepritsonsérieux.–Ettoi,commentvas-tu?–Pastropmalnonplus,dit-elleensouriant.MaisçairamieuxquandjeverraiLucas.–OùsontDellaetMiranda?–Ellessontpartiesenvillechercherlegâteauetlesfleurspourlaréception.Siellessedisputentet
fonttomberlegâteau,jecroisquejevaispleurer.C’estvrai, jen’aijamaisvudeuxfillesaimersedisputeràcepoint!–Exact,maiselless’aimentsincèrement.Assezparlédesautres!Tunedevraispasêtreentrainde
tedétendredansunebaignoireavantlegrandévénement?Holidaysourit.–Crois-leoupas,mais cettehistoire avec tamèrea étéunebénédiction. Jeme suis faitplusde
soucipourvousdeuxquepourmonmariage.L’heuresuivantefilaàtouteallure,alorsqueKylieetsamèrefinissaientd’installerdeschaiseset
d’aideràdécorerlacantinepourlafête.KylieavaitcraquéetenvoyéuntextoàLucas,maiscelui-cin’avaitpasrépondu.Ellen’avaitpasvunonplussesdeuxcolocsetlemanquecommençaitàsefairesentir.D’unseulcoup,elleentenditdescrisperçants.Familiers.CeuxdeDellaetMiranda.Ellepritsesdeuxmeilleuresamiesdanssesbrasetcelasetransformaenétreintedegroupe.–Vousai-jeditcombienjevousaimais?demanda-t-elle.–Oui,acquiesçaDella.Etlaseuleraisonpourlaquellej’acceptequetusoiscucul,c’estparceque
j’aientendudirequetuavaisassurécommeunebêtel’autrenuit!–Assurécommeuncaméléon,oui!
Kylie,samère,DellaetMirandaallèrentsechangerdansleurbungalow.Elleavaitadorépartagersamèreavecsesamies.Ouaurait adorésiellen’avaitpaspenséqu’àLucas.Oùétait-il ?Lapeurqu’iln’aitpasréussi,etqueducoupilneveuillepluslavoir,envahitsoncœur.Ellesortitdelasalledebainsoùlesfillessemaquillaientpourconsultersonportable.– Tu sais qu’un téléphone que l’on regarde tout le temps ne sonne jamais, l’avertitDella après
l’avoirsuiviedehors.Kylielevalesyeux.–Jesuisjuste…–Inquiète,jesais.Maismoninstinctmeditqu’ilvabien.Kylieregardasacopinevamp.–Depuisquandes-tupositive?–Depuisquel’onm’aobligéeàpartagermonbungalowavecunefichueoptimiste!
Kylieritetlaserradanssesbras.Quelquesminutesplustard,ellessortirenttoutespimpantes.Ellesavaient prévenu Holiday qu’elles arriveraient avec une demi-heure d’avance pour l’aider à toutinstaller.Kylie avait failli lui envoyerun textopour luidemander si elle avait eudesnouvellesdeLucas,maisrenonçaàl’embêterlejourdesonmariage.Toutes les quatre venaient de prendre le dernier virage, lorsque Kylie le vit. Il se dirigeait
lentementverselles.Sesyeuxbleus,mystérieuxetavides,étaientrivéssurelle.Visiblementhabillépour le mariage, il portait une veste marine et une chemise blanche. Il était craquant. Kylie restaimmobilejusqu’àcequesamèreluimurmure:–Respire,Kylie.C’esttonLucas,pasvrai?J’espèrebienquec’estlemien,oui!Ils’arrêtadevantelle.–MamantutesouviensdeLucas,n’est-cepas?demandaKyliesanslequitterdesyeux.–Etsinousleslaissionsseulsquelquesminutes,cesdeux-là?proposaMiranda.LamamandeKylieeutl’airnerveuse.–Biensûr…Dumomentquejenemeretrouvepasentouréedevampiresoudeloups-garous…Dellatoussapournepasrire.–Nevousinquiétezpas,ditLucas,jevaislaprotéger.Etilleferait,oui,songeaKylie.Ill’avaitprotégée.Illuiavaitsauvélavie.–Enfait,jemefaisaisdusoucipourmoi,précisasamère.Kylieestamieaveceux.Etjesuissûre
quejefiniraisbienparm’yhabituer,maiscetteidéemefaittoutdemêmeflipper.–Jecomprends,ditLucas.Alorsquelesfilless’éloignaient,Kylieentenditsamèredemander:–Est-cequ’ilsnesortentquelanuit?KylieregardaLucasenroulantdesyeux,etsepenchaverslui.–Jenesaispastropcommentellelesimagine!–Net’inquiètepas.Elles’yfera.Safilles’yestbienfaite.Kylieeutunsourirejusqu’auxoreilles.–Pourquoitun’aspasréponduàmestextos?J’étaismorted’inquiétude.–J’avaisdûcoupermontéléphoneetquandjesuissorti,ilétaittroptardetjevoulaistel’annoncer
enpersonne.–TuasintégréleConseil?Sesyeuxbleuss’illuminèrent.–Oui.Ilregardaderrièresonépaule,commepours’assurerquesamèrenelesvoyaitpas.Puisill’attira
contrelui.Etl’embrassa.Undouxbaiser.–J’aiquelquechosepourtoi,dit-il,seslèvressoufflantcesmotscontrelessiennes.Ilpassalamaindanslapochedesaveste,d’oùilsortitunebagueenorsertied’ungrosdiamant.
Magnifique,enformedelarme,etquiressemblaitàunebaguedefiançailles.Kylieeneutlesoufflecoupé.–Elleappartenaitàmagrand-mère.Danssalettre,elleaécritqu’elleétaitpourtoi.Etavantquetu
ne temettes àpaniquer, laisse-moi tepréciserque je saisquenous sommes trop jeunespournousfiancer.C’estpourcetteraisonquejet’aiaussiapportécela.Ilsortitunechaîneenor.Jeveuxquetulagardesautourducou.Appelonsçaunepromesse,unepromessequ’unjourjeglisseraiàtondoigt.L’émotionlasubmergea.–Tun’espasobligédemedonnerquoiquecesoit,pourquejetefassecettepromesse.
–Peut-être, dit-il englissant labague sur la chaîne,qu’il refermaautourde soncou.Mais c’estjusteunpetitrappelpourtouslesDerekdumonde:tuesprise.Ellesehissasurlapointedespiedsetl’embrassaencore.Cettefois,ill’entraînadanslesfourréset
leur baiser rempli de promesses se fit plus intense.De promesses d’autres baisers…De plus, toutsimplement.Elleglissalamainàl’intérieurdesavesteetcaressasontorsetiède.Sonronronnementfitvibrertoutsoncorpsetellebrûlad’enviedes’abandonneràlatentation.Elleétaitàdeuxdoigtsdesortirunpandechemisedesonpantalonetdetouchersondosnu.Ilrecula,àboutdesouffle.–Jeferaismieuxd’alleraumariage.Sinon,onn’yserajamaisàl’heure!–Sijen’étaispaslademoiselled’honneur,jeteprendraisbienaumot.Ellehaussaunsourciltaquin.–Lasemaineprochaine,jevaisàDallasréglerlasuccessiondemagrand-mère.Crois-tuque…tu
pourraism’accompagner?Onsetrouveraitunpetithôtel.LecœurdeKyliebattitlachamade,sachantcequ’illuidemandait,etellen’hésitapas.–J’adorerais.Soudain,Burnettapparut.Ilavaitl’airpréoccupé.–LesBrightensontici,annonça-t-il.–Pourlemariage?demandaKylie.–Non, ils n’étaient pas au courant, ils sont juste passés en espérant te voir. Il se renfrogna. Et
histoire de compliquer les choses, ton grand-père et ta grand-tante sont là eux aussi. Je peux lesrenvoyerchezeux,ouleurdemanderderester.Àtoidevoir.Kylieregardasamèrequidiscutaitaveclesautresinvités.–Non,jecroisquec’estl’heure.
Unedemi-heureplustard,Kylie,dansl’entrée,attendaitl’arrivéedeHoliday.Lucas,del’autrecôtédurang,lacaressaitduregard.Ellesavaitqu’ilpensaitàlasemainesuivante.
Etcommentnepasypenser?ÀcôtédeLucas,Burnettnetenaitpasenplace.Ellenel’avaitjamaisvucommeça.Onauraitditun
enfantquiavaitenvied’allerauxtoilettes.Lorsque Kylie l’avait taquiné un peu plus tôt en lui disant qu’il avait l’air nerveux, il lui avait
rétorqué : «Oh ! que oui ! Je suismort de trouille à l’idée qu’elle se rende compte qu’elle peuttrouvermieuxquemoi!»Lamusiquecommença.Kylieregardalafoule.SamèreétaitassiseàcôtédesBrighten.Elleavait
éténerveuseàl’idéedelesrencontrer,maisKylieluiavaitassuréqu’ilsl’aimeraientbien.Plusloin,ilyavaitsongrand-pèreetsagrand-tanteFrancyne.Kylieleuravaitégalementprésentésamère.Etquelques minutes plus tard, elle présenta les Brighten à Malcolm Summers et à sa grand-tante.Commeellenepouvaitpasleurpréciserqu’ilsétaientlevraipèreetlavraietantedeDaniel,ellelesfitpasserpourdesamisdelafamille.Cefutbizarre,l’espaced’uneseconde,maisensuitesongrand-père serra lamain deM. Brighten et leur dit que c’était un grand plaisir de les rencontrer. Kyliedevinaque sonvraigrand-pèreétait reconnaissantenvers lesBrightenpour l’amourqu’ils avaientdonnéàsonfils.ToutlemondedanscetterangéeregardaKylieensouriant.Étrangement,onauraitditunegrande
familleheureuse.Etilsétaientsafamille.Kylien’avaitjamaisétéaussifière.Ettoutaufondd’elle,elleentenditlavoixdesonpèrequidisait:«Parfait.»
Derrièreeux,KylievitMirandaassiseàcôtédePerry.Elleauraitmissamainaufeuquecesdeux-làplanifiaientdéjàleurpropremariage.EtDella,àcôtédeMiranda,fixaitlarangéedechaisessursagauche.Matait-elleSteve?Voudrait-ellede luiun jour?Pendantun temps,Dellaavait légèrementcraquépourlui,puiss’étaitremiseàl’éconduire.Hayden,assisàcôtédeJenny,souritàKylie.ÀdroitedeJenny,ilyavaitDerek.Elleremarquabien
son épaule collée à la sienne. Il se passait quelque chose d’exceptionnel entre ces deux-là et ils leméritaientbien.Toutaufond,audernierrang,Frederickaétaitencompagniedunouvelenseignant.Ellen’avaitpas
entenduHolidaydirequeFrederickaavaitdemandélapermissiondelefréquenter,maiselleavaitlesentimentqu’ils’étaitpasséquelquechoseetquecelaavaitétéauprofitdecelle-ci.Il y avait de l’amour dans l’air. D’un seul coup, Holiday descendit l’allée entre les chaises au
rythme de laMarche nuptiale. Burnett, hypnotisé, fixait sa future femme. Holiday, dans toute sasplendeurdefée,étaitmagnifique.Sesyeuxvertsétincelaient.Sapeaubrillait.Sans savoir pourquoi, Kylie se souvint du jour où son beau-père était parti. Elle avait cru que
c’étaitlepiredesavie,avaitsentiquetoutchangeaitdanssonmonde,etquerienneseraitplusjamaispareil.Etelleavaiteuraisonsurunpoint:toutavaitchangé.Tout.Certaineschosesavaientétédifficilesàgérer,maispourlaplupart…waouh!Elle toucha la bague autour de son cou et regarda Lucas qui lui souriait. Il articula
silencieusement:«Jet’aime.»Kylieluimurmuralamêmechoseetneputs’empêcherdesedirequecejourétaitleplusbeaude
savie.
Remerciements
ÀRoseHilliard,monéditrice,quim’aentraînéedanslalittératurepourjeunesadultesetm’aaidéeàréalisercerêvefantastiqueet incroyable.Tues tropforte!ÀKimLionetti,monagent,quiafaitempruntermillecheminsetviragesextraordinairesàmacarrière!Cefutunsacrévoyageetj’aihâtedeconnaîtrenotreprochainedestination!ÀSteveCraig,monmarichéri,àl’originedetoutlorsqu’iladéclaré:«Situveuxêtreauteur,alorsvas-y,fonce!»Etmerciàluides’occuperdelacuisineetdes lessives ! (Au fait, les soutiens-gorge ne passent pas au sèche-linge !) À Kathleen Adey etShawnna Perigo, pour leur aide dans tout ce qui concerne l’écriture. Vous deux, vousme donnezl’impressiond’êtretrèsdouées,merci!Àmesfans:cese-mailsquevousm’envoyez,cescommentairesquevouspostezsurFacebook,et
touscestweets,toutcelametmonâmed’auteurenjoie.Vousêtesmoninspiration.Unimmensemercià tous lesparentsqui achètentmes livrespourque leurs adospuissent seperdredansmonmondefictifet,surtout,auxmamansetpapasquilesaccompagnentauxséancesdedédicacesetprennentletempsdemeconfiercombienleursenfantsaimentmeslivres.Àtouslesadultesquiosentavouer :«Jenesuispasunjeuneadulte,maisj’adorevotresérie.»Etenfin,jenevoudraissurtoutpasoubliercesauteursàladéterminationinébranlablequiveulentsefaireuneplacedanslemondedel’édition:pour avoir essuyé des milliers de refus, croyez-moi quand je vous dis de ne jamais, JAMAIS,abandonnervotrerêve.
Déjàparus
Nésàminuit,tome1:AttirancesNésàminuit,tome2:SoupçonsNésàminuit,tome3:Illusions
Nésàminuit,tome4:Frémissements
TitreoriginalShadowFalls,ChosenatNightfall©ChristieCraigHunter,2013
Tousdroitsdetraduction,d’adaptationetdereproductionréservéspourtouspays.
PremièrepublicationenlangueoriginaleparSt.Martin’sPress,2013.PubliéenaccordavecSt.Martin’sPress,LLC.
©ÉditionsMichelLafon,2014,pourlatraductionfrançaise
118,avenueAchille-PerettiCS70024–92521Neuilly-sur-SeineCedex
www.lire-en-serie.com
Photographiesdecouverture:Fille:©SusanPittard—Mouettes:©nagib/Shutterstock—Arbres:©SiriStafford/Gettyimages—Jetée:©AVTG/Gettyimages
ISBN:978-2-7499-2246-1
Cetteœuvreestprotégéeparledroitd’auteuretstrictementréservéeàl’usageprivéduclient.Toutereproductionoudiffusionauprofitdetiers,àtitregratuitouonéreux,detoutoupartiedecetteœuvre,eststrictementinterditeetconstitueunecontrefaçonprévueparlesarticlesL335-2etsuivantsduCodedelaPropriétéIntellectuelle.L’éditeurseréserveledroitdepoursuivretouteatteinteàsesdroitsdepropriétéintellectuelledevantlesjuridictionscivilesoupénales
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