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Cadre de référence qualité pour les structures d’accueil de la petite enfance subventionnées par la Ville de Genève

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Cadre de référence qualité

pour les structures d’accueil de la petite enfance subventionnées par la Ville de Genève

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TABLE DES MATIÈRES

Partie I - Contexte et Principes de base

INTRODUCTION .................................................................................................................... 4

La politique petite enfance en Ville de Genève........................................................... 4

La qualité d’accueil .................................................................................................... 7

UN CADRE DE RÉFÉRENCE QUALITÉ ................................................................................ 8

Enjeux : des principes éducatifs de base ................................................................... 8

Objectifs : un référentiel commun centré sur l’enfant .................................................. 8

DES LIEUX D’ACCUEIL OUVERTS SUR LA VILLE LA CRÉATION DU LIEN SOCIAL ........... 9

UN ACCUEIL DE TOUS LES ENFANTS POUR UNE ÉGALITÉ DES CHANCES .................. 10

Prévention .................................................................................................................10

Encouragement précoce ...........................................................................................10

Les enfants à besoins éducatifs particuliers ..............................................................12

L’ACCUEIL DE L’ENFANT EN PARTENARIAT AVEC SA FAMILLE ..................................... 14

La co-éducation, un partenariat entre la structure d’accueil et les familles ................14

LA PROFESSIONNALISATION DE LA PRISE EN CHARGE ÉDUCATIVE : UNE NÉCESSITÉ ......................................................... 17

La formation de base ................................................................................................17

La formation continue................................................................................................19

Les fondements du travail : des valeurs communes et partagées .............................19

La dynamique d’équipe : l’importance de la communication et des compétences mobilisées ................................................................................20

Les outils de travail : une nécessité pour un travail performant .................................21

Partie II - Le cadre de prise en charge

LES BESOINS DE L’ENFANT : BASE DU CADRE DE RÉFÉRENCE ................................... 23

L’ORGANISATION INSTITUTIONNELLE CALQUÉE SUR LES BESOINS DE L’ENFANT .... 26

Les horaires et les abonnements ..............................................................................27

Les espaces et le matériel pédagogique ...................................................................30

Les activités pédagogiques .......................................................................................34

Les soins et les changes ...........................................................................................38

Le sommeil / le repos ................................................................................................40

L’alimentation ............................................................................................................42

La prise en charge de l’enfant malade ......................................................................44

REMERCIEMENTS ..................................................................................................46

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Partie I Contexte et Principes de base

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INTRODUCTION

La politique petite enfance en Ville de Genève Après avoir sauvé les enfants dans les années 1840, puis les avoir gardé depuis le début du 20e siècle, la structure d’accueil de la petite enfance les accueille désormais dans des espaces de vie qui se veulent diversifiés et ouverts sur la ville. Les enfants se voient dès lors proposer une véritable prise en charge éducative, centrée sur leurs besoins et ceux de leurs familles. Ce changement de paradigme autour de la prise en charge préscolaire provient d’une part de l’évolution de la recherche en éducation précoce et d’autre part des mutations sociétales, avec un besoin toujours plus fort en matière d’accueil extrafamilial pour répondre, notamment, au besoin de conciliation vie privée / vie professionnelle. Les chiffres relatifs à la demande de places d’accueil en Ville de Genève le démontrent1, les lieux d’accueil sont devenus pour beaucoup des lieux privilégiés en cas de besoin de garde, car fort bien adaptés à la prise en charge du tout-petit, offrant aux familles un niveau d’équipement élevé, des locaux adaptés et un professionnalisme inégalable au profit d’une mission première : promouvoir une prise en charge éducative de qualité dans le respect du développement de l’enfant. L’importance de l’encouragement précoce durant la petite enfance a été clairement démontrée par la recherche en éducation. Une prise en charge extrafamiliale de qualité, dès la petite enfance, stimule le développement tant social que cognitif de l’enfant, favorisant ses apprentissages futurs. Faire l’expérience de la collectivité, c’est entrer au contact de pairs, dans un contexte de valeurs et de normes partagées. C’est acquérir des références communes relatives à la société dans laquelle les structures d’accueil s’inscrivent. Ce processus d’acquisitions élargit le champ des apprentissages et des expériences réalisées dans le cadre familial. La recherche souligne en outre que le bénéfice est plus marqué chez les enfants issus de milieux socio-économiques défavorisés. La mise en place des structures d’accueil doit donc favoriser l’égalité des chances en s’adressant à tous les enfants. Ceci est d’autant plus important que depuis une vingtaine d’années, une part importante des ménages suisses – et plus particulièrement ceux avec enfants – se sont précarisés et appauvris. Les transformations tant structurelles que conjoncturelles du marché de l’emploi ont en effet entraîné une détérioration des conditions de travail qui se traduit par une augmentation des travailleurs pauvres. La plus-value apportée par la fréquentation d’une structure d’accueil est par ailleurs importante pour les enfants d’origine étrangère, dans la mesure où celle-ci leur permet d’apprendre la langue du lieu de résidence dès le plus jeune âge et d’être en contact avec d’autres familles du quartier ou de la ville. A ce titre, les structures d’accueil sont bien souvent la première « institution » que les familles expérimentent et représentent une première expérience de la vie institutionnelle et sociale genevoise. C’est pourquoi, la diversité sociale et culturelle au sein des structures d’accueil est primordiale pour l’intégration de chacun dans la cité, mais constitue aussi un défi pour les professionnel-le-s du jeune enfant qui doivent tenir compte des besoins individuels des enfants dans un milieu collectif multiple, ceci dans une démarche de partenariat éducatif avec les familles.

1 En décembre 2016, 1'155 demandes de places en structures d’accueil de la petite enfance subventionnées par

la Ville de Genève n’étaient pas encore satisfaites.

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Avec 74 lieux d’accueil répondant à différents besoins des familles, la Ville de Genève a sans cesse œuvré pour développer l’offre d’accueil sur son territoire, interrogeant les besoins des familles et leur proposant différents types de prise en charge. Si chacune de ces structures amène un accueil différencié de par ses particularités, toutes se rejoignent dans une identité commune en tant qu’institution subventionnée par la Ville de Genève. C’est cette identité, ce socle commun, partagé et cohésif qui est au cœur de la politique petite enfance de la Ville de Genève, et que ce cadre de référence a pour objectif d’illustrer. Aussi, chaque professionnel-le de l’enfance, employé-e par une structure d’accueil de la petite enfance subventionnée par la Ville de Genève, devrait pouvoir se reconnaître dans cet outil, sentir résonner dans sa pratique les valeurs promues par cet ouvrage, s’y référer et le partager avec son équipe lors de tout questionnement et réflexion sur ses actions éducatives. Vers un développement quantitatif mais aussi qualitatif Considérant les enjeux liés à la prise en charge éducative extrafamiliale, la Ville de Genève a fait de la petite enfance une de ses priorités politique depuis de nombreuses années. En témoigne l’évolution de l’offre avec près de 4'000 places d’accueil sur son territoire. Ce développement est réalisé sur la base d’outils de planification et d’une collaboration étroite avec les différents acteurs concernés, tant au niveau communal que cantonal, pour offrir des infrastructures qui permettent de répondre aux besoins des familles en matière d’accueil préscolaire. Afin de garantir une qualité d’accueil qui réponde aux besoins des enfants et qui soit en adéquation avec la réalité des familles d’aujourd’hui, l’augmentation de l’offre s’accompagne d’une réflexion sur les types de mode d’accueil à créer, ainsi que sur les prestations à proposer. Considérant les différents besoins de la population, il est important de soutenir une diversité des modes de prise en charge pour les tout-petits. C’est pourquoi, la Ville de Genève a développé différents types d’accueil. Les structures collectives dites « à prestations élargies » (espaces de vie enfantines ou crèches) permettent aux parents de concilier vie familiale et vie professionnelle en proposant une fréquentation quotidienne sur la semaine, alors que les structures dites « à prestations restreintes » (les jardins d’enfants et les crèches à temps partiel) visent plutôt une socialisation des enfants à la collectivité sur des temps courts. D’autres modes d’accueil comme les crèches familiales, les unités de dépannage, les halte-jeux, les espaces parents-enfants ou encore un accueil à horaires atypiques, viennent compléter cette offre en s’adressant à des publics divers et en visant des objectifs plus spécifiques, répondant souvent à une évolution des besoins des familles. Conjointement au développement de ces prestations, la Ville de Genève a toujours marqué son souhait de financer des prestations de qualité, qui assurent le bien-être des enfants et apportent une réelle plus-value pour les familles. Depuis 2014, déclarée comme Année de l’enfance, la Ville a formalisé sa volonté de reconnaître les enfants comme de véritables acteurs de leur vie dans la cité. Soutenir les enfants, afin qu’ils puissent endosser un rôle d’acteur dans leur développement, c’est favoriser leur curiosité, entendre leurs questionnements, leurs préoccupations, mais surtout comprendre leurs besoins et tout mettre en œuvre pour y répondre de manière appropriée. Les structures d’accueil de la petite enfance sont des lieux privilégiés pour concrétiser ces droits et mettre l’enfant au centre des réflexions. Pour ce faire, les professionnel-le-s de la petite enfance bénéficient d’une collaboration étroite avec des partenaires du domaine de la santé, de la prévention, du social et de l’éducation et travaillent en synergie avec ce réseau pour étayer leur pratique et réflexion quotidiennes, ou lors de situations spécifiques notamment dans le cas d’une prise en charge d’enfants à besoins éducatifs particuliers.

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La politique petite enfance en ville de Genève : points forts Favoriser la conciliation vie privée/vie professionnelle.

Soutenir une diversité des modes de garde, en réponse aux

différents besoins des familles et en suffisance.

Garantir le principe de non-discrimination dans l’accessibilité

aux prestations (équité d’accès).

Accompagner les équipes éducatives (formation).

Inscrire la petite enfance dans une politique sociale de proximité

et respectueuse des principes du développement durable.

Promouvoir une prise en charge de qualité garantissant :

- l’égalité des chances,

- le bon développement de l’enfant,

- l’accueil inclusif,

- le partenariat éducatif avec les familles.

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La qualité d’accueil Sachant que la qualité d’une structure d’accueil de la petite enfance peut mener à des différences notables, et surtout durables, au niveau du développement des enfants, la mise en place de lignes directrices en matière de qualité de prise en charge est dès lors indispensable. Toujours plus d’enfants fréquentent les structures d’accueil de la petite enfance. Si les politiques publiques se doivent de fournir des efforts intenses en matière de développement de l’offre, il est aujourd’hui essentiel de dépasser les considérations relatives à la conciliation vie familiale / vie professionnelle concernant l’encadrement du jeune enfant, en posant des questions fondamentales relatives à la prise en charge du tout-petit :

Quelles conditions doit remplir une structure d’accueil de la petite enfance pour assurer aux enfants qui la fréquentent un développement harmonieux ?

Quels sont les besoins de l’enfant ? Quels sont ses droits, ses attentes ? Quelle est la posture de l’adulte dans l’accompagnement éducatif de l’enfant ? Comment organiser l’environnement de l’enfant pour le rendre propice à

l’exploration ? Quel partenariat avec les familles ?

La réflexion autour de la qualité s’est construite depuis près de 30 ans par un engagement quotidien de la part du terrain, largement soutenu politiquement grâce à une vision claire de la mission des structures d’accueil de la petite enfance et une évaluation constante des stratégies et actions menées dans ce domaine. Il n’y a certainement pas qu’une seule manière de travailler sur la qualité de la prise en charge au sein des structures d’accueil de la petite enfance. Mais alors que de nombreuses démarches qualité voient le jour en Suisse et ailleurs, l’accueil du jeune enfant ne peut se soumettre aux normes et aux labels, inadaptés à la complexité et aux enjeux de l’éducation de la petite enfance. La démarche qualité proposée ici prend en compte plusieurs éléments contextuels dans l’accueil collectif des jeunes enfants, à savoir les exigences liées à l’octroi de l’autorisation d’exploitation, les normes d’encadrement, le financement et les ressources, la formation et les conditions de travail des professionnel-le-s, mais aussi et surtout les besoins de l’enfant et de sa famille. La qualité n’est pas un état, mais réellement un processus, en perpétuelle évolution, une manière de s’interroger, de prendre du recul sur les actions du quotidien, de donner du sens. L’approche défendue dans ce document valorise l’idée d’une dynamique des « normes instables2 », insistant sur l’importance d’un cadre de référence certes, mais à toujours remettre en question de manière collective, à la lumière des pratiques éducatives et générant une analyse et une prise de distance permanente. La réflexion engagée autour de ce cadre de référence doit permettre d’ouvrir à la particularité de l’accueil des familles d’aujourd’hui et à la singularité des situations. Les professionnel-le-s sont ici encouragé-e-s à réfléchir et à co-construire leurs solutions, dans un cadre qui se doit d’être formalisé, contrôlé et évalué.

2 Vial, M. (2001). Évaluation et régulation. Dans Figari, G. ; Achouche M. (dir.). L’activité évaluative : nouvelles

problématiques, nouvelles pratiques. Bruxelles : De Boeck, pp. 68-78.

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UN CADRE DE RÉFÉRENCE QUALITÉ

Enjeux : des principes éducatifs de base En tant que service public subventionnant 74 institutions de la petite enfance, la Ville de Genève se doit de définir et de déclarer des principes éducatifs de base, explicites, tout en permettant à chaque structure de garder certaines spécificités (liées notamment à la particularité des espaces, la localisation géographique, l’historique du lieu, aux types de structures, aux projets particuliers, etc.). Cet ouvrage s’inscrit dans la continuité du Guide à l’usage des institutions de la petite enfance. Pour un accueil de qualité (2002) et en propose une mise à jour, un approfondissement, à la lumière des recherches et publications actuelles dans ce domaine. Tout comme le précédent, ce véritable outil de travail à l’attention des professionnel-le-s privilégie une posture réflexive et évolutive, responsabilisant les équipes éducatives et les interrogeant sur le sens de leurs actions auprès des tout-petits.

Objectifs : un référentiel commun centré sur l’enfant Ce travail participatif qui a impliqué largement et durant presque 2 ans les professionnel-le-s de la petite enfance, directions et représentant-e-s du terrain, mais également d’autres partenaires comme le Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, offre un référentiel commun, co-construit et pensé autour du bénéficiaire principal des structures d’accueil de la petite enfance : l’enfant. Ce document explicite les fondements de la qualité de l’accueil préscolaire, à la lumière d’éléments incontournables définis par la politique petite enfance de la Ville de Genève et se basant sur les besoins de l’enfant. Il permet au lecteur de comprendre les facteurs de qualité dans l’encadrement des tout-petits et de s’en inspirer dans sa pratique au quotidien. Partant du principe qu’un accueil de qualité doit pouvoir apporter des réponses contextualisées, adaptées à la réalité des institutions, ce cadre de référence respecte la diversité des lieux d’accueil tout en rappelant le seuil minimal à respecter en terme de qualité de prise en charge. Si la plupart des lieux d’accueil se doivent aujourd’hui de proposer une prestation de qualité aux enfants et à leurs familles, cet ouvrage permet de formaliser l’identité des structures d’accueil de la petite enfance de la Ville de Genève, le socle de base promouvant des valeurs sociétales, éducatives et idéologiques portées par la politique petite enfance de la Ville de Genève. Aussi, l’accueil de tous les enfants sans discrimination, le respect de l’égalité des chances, la réflexion éthique, l’ouverture sur la ville sont autant de point forts définissant l’identité des lieux d’accueil de la Ville de Genève et qui serviront de filigrane tout au long de ce document. Ce cadre s’impose comme une référence, dans la mesure où il s’inscrit dans les contrats de prestations liant la Ville de Genève aux structures d’accueil subventionnées.

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DES LIEUX D’ACCUEIL OUVERTS SUR LA VILLE LA CRÉATION DU LIEN SOCIAL

La mission première des structures d’accueil de la petite enfance consiste à accueillir de tout jeunes enfants et leurs familles au sein d’une collectivité, permettant ainsi aux parents de concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle. Leur rôle néanmoins et les effets de cet accueil dépassent largement une prise en charge éducative stricto sensu. En effet, les institutions de la petite enfance font partie intégrante du réseau social genevois et de la vie des quartiers dans lesquels elles s’inscrivent, ce qui favorise, par le biais des professionnel-le-s qui y travaillent, la création de lien social et l’ancrage des enfants et des familles accueillis dans leur environnement proche. En fréquentant une structure d’accueil de la petite enfance, les enfants et leur famille se rejoignent, durant une période déterminée mais décisive de leur vie, dans une appartenance et des valeurs communes véhiculées par le lieu d’accueil. Les parents y sont considérés avant tout comme des partenaires, développant ainsi les liens entre individus, mais favorisant également l’ouverture sociale et culturelle sur l’extérieur et les autres. Pour toutes les familles, qu’elles soient nouvellement arrivées, parfois isolées ou démunies ou au contraire déjà bien installées dans leur lieu de vie, la structure d’accueil de la petite enfance constitue une porte d’entrée vers l’information, la rencontre d’autres familles et la création d’un réseau de proximité. Le renforcement des liens sociaux, la participation des familles à la vie de leur quartier, la solidarité ou encore l’ouverture sur la mixité socioculturelle constituent autant de facteurs déterminants qui favorisent l’intégration et la cohésion sociales, enjeux majeurs de toute société inclusive et solidaire. Plus concrètement, être pris en charge au sein d’une structure d’accueil de la petite enfance permet de rencontrer d’autres enfants, d’autres parents et de tisser des liens souvent durables. Le développement des échanges est amorcé par les professionnel-le-s qui, en proposant aux familles de partager des moments au sein de la structure d’accueil (activités, fêtes, réunions, ou encore petits déjeuners, apéritifs, etc.) stimulent les discussions et offrent l’occasion de se réunir autour des enfants. Ces échanges constituent également une véritable opportunité d’intégration socio-culturelle pour les personnes nouvellement arrivées. Par ailleurs, les équipes éducatives des institutions de la petite enfance rendent visibles des prestations sociales, culturelles ou de loisirs (bibliothèques, ludothèques, musées, associations telles que l’Ecole des parents, l’Ecole des mamans, ou d’évènements spécifiques comme la Semaine du livre petite enfance et familles) pas toujours bien connues du public, donnant ainsi aux enfants et à leur famille la possibilité de mieux appréhender leur quartier. Si de nombreux autres acteurs évoluant autour du jeune enfant ont également cette fonction de relai (comme le Bureau d’information petite enfance (BIPE), les assistants sociaux de la maternité, le Service de protection des mineurs (SPMi), les pédiatres, l’Hospice Général, les Points Info Service, par exemple), la structure d’accueil de la petite enfance arrive souvent en première ligne dans la vie des familles, jouant dès lors un rôle essentiel dans la mise en réseau et l’intégration des familles dans les quartiers.

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UN ACCUEIL DE TOUS LES ENFANTS POUR UNE ÉGALITÉ DES CHANCES

Il est souvent difficile pour les personnes ne travaillant pas directement en lien avec la petite enfance, ou même pour les familles, de mesurer à quel point la prise en charge précoce des enfants cache un enjeu majeur de prévention psychologique et sociale. A un niveau plus politique, il est d’ailleurs quasiment impossible d’évaluer économiquement le rapport coût / bénéfice, lorsqu’il s’agit d’investir dans la qualité des modes de garde. Comme toujours en matière de prévention, on sait ce qu’on dépense mais on n’estime pas l’économie faite, car ce qui est évité (risques psychosociaux, problématiques de santé, échec scolaire, etc.) ne peut être chiffré de façon exhaustive. Ceci étant dit, les spécialistes de la prise en charge et de la recherche en éducation s’accordent tous à dire que la qualité de la prise en charge des enfants dans les toutes premières années de vie offre un soutien précieux et souvent déterminant pour l’évolution future des enfants. La période préscolaire est sans doute une phase fondatrice du développement affectif, social, cognitif et moteur de l’enfant.

Prévention Les structures d’accueil de la petite enfance sont des lieux de prévention globale et spécifique pour les enfants et pour leurs familles. Par leurs connaissances pointues et leurs liens privilégiés avec les familles, les professionnel-le-s du jeune enfant sont des acteurs incontournables de la prévention. Cette dernière s’articule sur de nombreux niveaux et touche aussi bien l’intégration d’enfants touchés par divers facteurs de risque (origine culturelle, socio-économique, allophonie par exemple), que le repérage de problématiques spécifiques en lien avec la situation sociale ou de santé de l’enfant. Le rôle des professionnel-le-s est ici de première importance. Leur attention à l’enfant et à sa famille ainsi que leurs connaissances élargies permettent d’identifier des vulnérabilités ou des besoins et, souvent, d’initier rapidement un suivi particulier (information, accompagnement) ou de faire intervenir des spécialistes ou des partenaires du réseau (Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Service éducatif itinérant, Service de protection des mineurs, pédiatre, par exemple) lorsque la situation le justifie.

Encouragement précoce En offrant un accueil sans discrimination à tous les enfants, et étant souvent la première institution fréquentée par les familles, la structure d’accueil de la petite enfance endosse un véritable rôle préventif favorisant l’égalité des chances. Partant du constat qu’une prise en charge éducative précoce peut grandement contribuer à augmenter les chances de réussite plus tard, et ce de manière d’autant plus significative chez les enfants de familles défavorisées, la Ville de Genève a mis en place différents projets. On peut notamment citer le projet d’Eveil aux langues et le projet A la page. L’Éveil aux langues s’inscrit naturellement dans la politique de la petite enfance de la Ville de Genève qui s’est bâtie sur le respect de la diversité culturelle et linguistique des familles accueillies et leur participation au tissu local genevois. Si ce respect peut paraître être une évidence, il demande néanmoins aux professionnel-le-s de la petite enfance de s’adapter à

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de multiples réalités afin de faciliter l’intégration des familles et le respect de la différence dès le plus jeune âge. L’approche développée par le projet d’Éveil aux langues a comme objectif de susciter chez tous les enfants une grande curiosité pour les langues de leur environnement proche et lointain. Si cette démarche est propice à l’acquisition des langues, elle ne vise pas pour autant l’apprentissage d’une langue en particulier. A travers les activités proposées, le rôle particulier de la langue commune, ici le français, et des autres langues (familiales ou étrangères) est mis en évidence. Les enfants, avec l’accompagnement des professionnel-le-s de la petite enfance, vont peu à peu se sentir à l’aise dans des contextes plurilingues et pluriculturels. Ils se construiront ainsi des représentations favorables concernant les langues et les personnes qui les parlent, et par conséquent des attitudes positives envers la différence. Cette approche a une valeur intégrative pour les enfants mais aussi pour les familles. Le Service de la petite enfance soutient les lieux d’accueil dans la mise en place de ce projet en proposant des formations pour les équipes éducatives. Par ailleurs, en collaboration avec le Service des bibliothèques et discothèques municipales, différents outils pédagogiques sont mis à disposition des professionnel-le-s : des « malles à livres, malles à langues » et des « KIT pour l’éveil aux langues » qui les aideront à développer ces activités. Le projet À la page, promu auprès des structures d’accueil de la petite enfance subventionnées par la Ville de Genève, part de ce même principe décrit en tête de chapitre, à savoir que les lieux d’accueil sont des lieux d’éveil, d’éducation et de prévention. Sachant que les enfants issus d’environnements où le livre est absent ont plus de peine à franchir les

étapes de l’apprentissage de la lecture, que pour apprendre, les enfants ont besoin d’une image valorisée et positive de l’écrit sous toutes ses formes, que le livre est réservoir de culture et source de plaisir, qu’il permet à l’enfant d’élargir sa palette d’expressions langagières et de structurer sa pensée, le Service de la petite enfance s’est donné comme objectif depuis de nombreuses années, de donner le goût du livre aux tout-petits. Si ce projet s’adresse avant tout aux enfants fréquentant les structures d’accueil, il a également pour but de sensibiliser les parents au plaisir de la lecture et à son importance dans le développement de la pensée et de l’imaginaire de l’enfant. Il a aussi pour but de sensibiliser les professionnel-le-s, à l’importance du livre et du contact qu’il favorise avec l’écrit, le récit, l’imaginaire, de susciter chez eux le goût de l’utilisation des albums comme médiateurs de leurs relations aux enfants. En outre, le travail interinstitutionnel autour du livre et du jeune enfant, en favorisant l’introduction des albums dans les lieux d’accueil, en proposant des actions et en accompagnant les projets issus des terrains, permet l’émergence d’une identité forte autour de l’éveil à la créativité. Parmi l’encouragement précoce, on compte également toutes les actions d’éveil à la citoyenneté et d’ouverture sur la ville et le quartier, mais aussi, et pas des moindres, la sensibilisation à l’importance du mouvement (activités psychomotrices dans les structures, grâce à l’engagement de psychomotricien-ne-s au sein des secteurs petite enfance et aux projets en lien avec le Service santé de l’enfance et de la jeunesse, le projet mini sport), des sorties quotidiennes ou encore la sensibilisation à l’environnement (visites pédagogiques de jardins et plantations, tri des déchets, éveil à la nature, alimentation locale et de saison). Chacun de ces projets servira à construire une identité forte chez l’enfant, lui inculquant des valeurs citoyennes en lien avec la compréhension du monde qui l’entoure, la reconnaissance de son identité propre et de celle des autres, le respect de l’environnement et de ses pairs.

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Les enfants à besoins éducatifs particuliers « Si un enfant porteur de handicap n’est pas accueilli à la crèche, quelle place aura-t-il plus tard dans notre société ? »3 La pédagogie inclusive promue par la Ville de Genève au sein des structures d’accueil qu’elle subventionne est bien plus qu’une action éducative. Elle met en pratique une volonté politique, éthique et institutionnelle : celle de la prise en charge de tous les enfants dans un même lieu et autour d’activités collectives accessibles à tous, sans discrimination. L’inclusion suppose dès lors que tous les enfants peuvent se développer harmonieusement si les collectivités qui les accueillent tiennent compte de leurs besoins. Les structures d’accueil de la petite enfance offrent aux enfants présentant des besoins éducatifs particuliers un espace de vie dans lequel ils peuvent évoluer positivement et se livrer à des activités que les professionnel-le-s sont à même d’adapter, de repenser en fonction des particularités de chaque enfant. Si l’accueil d’un enfant avec un développement atypique ou en situation de handicap peut parfois s’anticiper lorsque les besoins de l’enfant sont connus au moment de l’entrée dans une structure d’accueil de la petite enfance, certaines adaptations d’ordre matériel, organisationnel, pédagogique, de mise en place de collaboration avec le réseau, etc. sont à élaborer au fur et à mesure que les besoins particuliers de l’enfant sont observés et définis plus finement. Dans ces deux cas, la collaboration étroite et systématique avec les parents et les membres du réseau de soins, lorsque celui-ci est existant, est primordiale. La responsabilité partagée L’inclusion d’un enfant à besoins éducatifs particuliers devrait faire l’objet d’un projet éducatif concerté entre les parents, la structure d’accueil et le réseau s’il existe, en gardant toujours pour objectif le bon développement de l’enfant au sein de cet environnement collectif particulier qu’est la structure d’accueil. La collaboration avec les acteurs concernés L’institution est un interlocuteur privilégié pour les familles, le contact étant régulier. Respecter les choix des parents et s’appuyer sur leur expertise et la connaissance de leur enfant est essentiel pour accueillir de manière adéquate un enfant présentant des besoins éducatifs particuliers. La collaboration avec le réseau complète le filet de prise en charge de l’enfant et permet de coordonner l’action, d’informer, de définir les rôles et les attentes de chacun, d’agir de manière commune et cohérente dans un même but, celui du bien-être et du développement harmonieux de l’enfant concerné. La structuration de l’intervention Plus encore que l’accueil ordinaire d’enfants en structures d’accueil de la petite enfance, la prise en charge d’enfants à besoins éducatifs particuliers doit être pensée et organisée. La démarche d’intervention se structure dès lors en lien avec les parents et le réseau (définition du projet d’intégration, outils de mise en place, évaluation des objectifs, bilan, accompagnement de la transition vers l’école), à travers notamment, quand cela est nécessaire, le projet d’accueil individualisé (PAI).

3 Lévy, J. ; Rapoport, D. (1978). Un enfant parmi les autres. Film du SFRS.

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Les mesures d’appui Lorsque l’intégration d’un enfant à besoins éducatifs particuliers nécessite un appui supplémentaire et des adaptations plus importantes pour subvenir à ses besoins, une personne surnuméraire peut soutenir le groupe, afin de lui offrir une meilleure flexibilité d’organisation, de répartir les tâches différemment entre professionnel-le-s, d’adapter les activités proposées ou de venir en renfort pour certaines animations, comme les sorties par exemple. Si la pédagogie inclusive a pour but de soutenir le développement du sentiment d’appartenance à un groupe dès le plus jeune âge, elle permet en structure d’accueil de la petite enfance de faire naître chez les enfants des comportements sociaux positifs (entraide, empathie, respect, etc.), des attitudes saines et non craintives face à la différence. En ce sens, la mission des structures d’accueil de la petite enfance ne se limite pas à repérer, accompagner, soutenir et organiser l’accueil des tout-petits à besoins éducatifs particuliers, mais elle vise également à proposer un contexte d’accueil en collectivité permettant à tous les enfants d’être accueillis et d’acquérir des bénéfices. Un document de soutien à la pratique professionnelle et à la réflexion au sujet de l’inclusion a été édité en 2011 par la Ville de Genève4. Il permet de poser le cadre des pratiques inclusives dans les structures d’accueil subventionnées par la Ville, de nommer les différents cas de figure relatifs aux processus d’intégration, de rappeler les principaux partenaires institutionnels du réseau et les éléments incontournables favorisant les bonnes pratiques inclusives. Une plateforme intégration réunissant les principaux acteurs en la matière se réunit par ailleurs régulièrement à ce propos et peut être interpelée en tout temps pour toute question relative à la prise en charge d’enfants à besoins éducatifs spécifiques.

L’accueil de l’enfant à besoins éducatifs particuliers L’intérêt et les bénéfices de l’enfant comme point de départ.

Le droit pour chaque enfant, quel qu’il soit, à être inclus au

milieu d’autres enfants et d’accéder aux activités proposées par

la structure.

Les parents, les professionnel-le-s et le réseau de spécialistes

comme partenaires.

Des bénéfices pour tous les enfants (comportements pro-

sociaux, empathie, entraide).

4 Intégration des enfants à besoins éducatifs particuliers dans les institutions de la petite enfance subventionnées

par la Ville de Genève. Plateforme intégration, Ville de Genève, Service de la petite enfance, (2011).

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L’ACCUEIL DE L’ENFANT EN PARTENARIAT AVEC SA FAMILLE

La co-éducation, un partenariat entre la structure d’accueil et les familles Accueillir un enfant et sa famille est impensable sans une réflexion autour du concept de co-éducation entre la structure d’accueil et les parents. Ce terme reflète l’importance de la richesse relationnelle entre les différents acteurs de l’éducation des enfants. Aujourd’hui en vogue dans de nombreux débats sur la parentalité et notamment en lien avec certaines fragilités parentales, la co-éducation est une notion qui a le vent en poupe. Mais alors que la plupart des structures d’accueil de la petite enfance parlent de co-éducation dans leurs projets pédagogiques :

Comment définir la place des parents et des professionnel-le-s autour de l’accueil de l’enfant ?

Jusqu’où va le rôle des uns et des autres ? La démarche de co-éducation implique-t-elle d’être toujours d’accord ? Peut-on co-éduquer malgré les parents ? Comment poser des limites faces aux demandes et aux situations multiples des

familles ? Jusqu’où les parents peuvent-il s’impliquer, participer à la vie de l’institution ?

Définition La co-éducation est la réunion des acteurs de l’éducation pour tenter de proposer une prise en charge dans une cohérence des modes d’approche. Elle renvoie à la volonté de placer le parent usager dans un rôle actif, participatif, valorisant ses compétences propres, complémentaires à celles du-de la professionnel-le. On le sait, les parents restent les premiers éducateurs de leurs enfants. En devenant usagers de structures d’accueil, ils ne sont toutefois plus les seuls. L’institution joue à leur côté un rôle de relai complémentaire et soutenant dans l’éducation de leur-s enfant-s. Ceci n’est possible que si l’institution se montre ouverte aux parents, prête à instaurer avec eux une relation de confiance et un dialogue basé sur la transparence, l’écoute, le respect et le non-jugement. La co-éducation ne signifie pas pour autant qu’il y ait un accord constant des parents et des professionnel-le-s. Elle ne se décrète pas mais se co-construit à travers le dialogue, la confrontation, la négociation, ayant toujours comme préoccupation commune : le bien-être de l’enfant. Ceci amène une rencontre entre des normes, des valeurs et des pratiques éducatives parentales différentes de celles de l’institution d’accueil5. Enjeux Les structures d’accueil de la petite enfance sont des espaces de transition entre les familles et la société et se situent à l’interface entre besoins individuels et fonctionnement collectif. La notion de co-éducation présuppose que l’enfant appartient à différents environnements éducatifs dans lesquels il a des comportements différents. L’enfant est ainsi reconnu dans cette double appartenance : il est reconnu dans ses habitudes de vie à la maison (valeurs, culture, langue d’origine, habitudes, etc.) et est soutenu par les professionnel-le-s dans son nouvel espace de vie collectif.

5 Bouve, C. Confrontation des pratiques éducatives entre familles et crèches collectives. Recherches et

Prévisions, CNAF, n° 57-58, Petite enfance, normes et socialisation : points de vue, sept/déc. 1999, p. 45-48.

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Des engagements de part et d’autre Ceci étant, et s’il est évident que les professionnel-le-s doivent être ouvert-e-s aux besoins des familles concernant les enfants confiés et les attentes spécifiques et ou particulières, le cadre de l’accueil collectif institutionnel doit être clairement communiqué aux parents, et ce, dès les premiers entretiens relatifs à l’inscription de l’enfant au sein de la structure. La présentation du projet institutionnel et pédagogique, l’explication du sens des actions éducatives proposées, la présentation des partenaires amenés à collaborer avec l’institution ou encore l’organisation de l’accueil sont autant de points permettant de définir le cadre de prise en charge. Si le contrat d’accueil règle la plupart des engagements formels de l’institution et des parents, il n’en demeure pas moins que différents éléments devront être bien communiqués aux familles, afin d’établir une bonne relation. Des documents, comme le règlement aux parents par exemple, le projet pédagogique, etc., permettent de compléter l’information donnée aux parents (abonnements, horaires d’ouverture, procédures médicaments, etc.). Une communication transparente Une des clés d’une prise en charge éducative de qualité pour l’enfant et sa famille réside dans une bonne communication que ce soit sur les règles et le fonctionnement de l’institution, sa mission, la place donnée aux parents, le déroulement de la journée de l’enfant, le personnel présent et absent, les personnes de remplacement, les liens avec le réseau, ou tout ce qui a trait à la vie de l’enfant au sein de la structure d’accueil. En plus des réunions de parents qui permettent de clarifier le cadre institutionnel et les projets qui seront menés durant l’année, des entretiens individuels sont organisés et proposés à toutes les familles, au moins une fois par an (entretien de fin de période d’adaptation, entretien de fin d’année). Ces derniers permettent d’entretenir, régulièrement et de manière systématique, ce lien entre familles et professionnel-le-s, de rendre compte du vécu de l’enfant à la crèche ou au jardin d’enfant, de valoriser son évolution au sein de ce milieu, de porter un regard complémentaire entre parents et professionnel-le-s sur le développement de l’enfant dans ce contexte d’accueil collectif, d’aborder des difficultés éventuelles ou préoccupations relatives à l’enfant. D’autres occasions plus informelles comme les fêtes de fin d’année, des petits déjeuners, des apéritifs, des évènements divers, etc., permettent non seulement de faire découvrir certains éléments de la culture locale (genevoise mais également institutionnelle), mais surtout de renforcer ce lien, de créer les relations entre familles et institution ainsi qu’entre familles usagères. Ces moments plus spontanés favorisent largement les partages et discussions sur l’enfant et le fonctionnement de l’institution. Les échanges portant sur la vie institutionnelle peuvent également se faire de manière non verbale, en proposant des photos de groupes d’enfants que les parents pourront regarder librement dans la salle de vie, le vestiaire. Des expositions de dessins, de créations d’enfant peuvent également être imaginées. Ces supports sont souvent utiles pour entamer la discussion et favorisent les liens positifs, tout en offrant une transparence de ce que l’enfant vit en l’absence de ses parents. Ces derniers pourront ainsi le découvrir autrement, dans ses moments de vie au sein du groupe d’enfants. La communication est d’autant plus importante pour les familles allophones, pour qui l’institution devra s’assurer que certains éléments essentiels, relatifs à la prise en charge de l’enfant, à l’organisation institutionnelle aient bien été compris. Il est possible de faire appel à des interprètes professionnel-le-s (Croix-Rouge, associations diverses, etc.), à des proches

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ou encore des voisins, d’utiliser des pictogrammes, afin d’accompagner les familles lors d’entretiens importants. Des transmissions adéquates et réfléchies A force de trop bien vouloir communiquer, on a parfois tendance à communiquer sur n’importe quel sujet, à n’importe quel moment, au risque parfois de ne pas respecter les principes6 relatifs à la Loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles (LIPAD, 2010) édictés à l’attention des professionnel-le-s de la petite enfance. Les professionnel-le-s doivent dès lors distinguer quelles informations l’on peut donner entre deux portes, de manière informelle, sans garantie de confidentialité, et quels sont les éléments à apporter lors d’un entretien. Que puis-je communiquer aux parents en présence de l’enfant et que dois-je garder pour un entretien entre adultes ? Dans quel espace communiquer quelle information et comment la communiquer sont des questions primordiales que le-la professionnel-le devra se poser. Lors de l’arrivée ou du départ de l’enfant, les échanges entre le-la professionnel-le et la personne qui vient amener / chercher l’enfant doivent porter sur des aspects factuels, du quotidien (état général de l’enfant, humeur, anecdotes, repas, sommeil, par exemple) et ne devraient en aucun cas déborder sur des discussions, des préoccupations, des prises de décision ou des conseils qui risqueraient de prendre trop de temps en présence des enfants et pour lesquels le moment n’est pas opportun. L’âge de l’enfant est bien évidemment à prendre en considération. La restitution d’une journée d’un bébé, par exemple, portera certainement plus sur les soins, le sommeil, l’alimentation, ses moments d’éveil, ses progrès. L’ancienneté de l’enfant au sein de la structure déterminera également le retour fait aux parents. Les parents d’un enfant en adaptation auront besoin de savoir si l’enfant a pleuré, s’il a bien pu jouer, s’endormir, manger, etc. Plus l’enfant grandit et plus les retours faits aux parents seront axés sur le déroulement de la journée, en mettant en avant le vécu de l’enfant dans sa vie en collectivité, des anecdotes, de manière personnalisée et individualisée, tout en essayant d’intégrer au maximum l’enfant dans ce moment d’échange et de le valoriser. Afin de discerner ce qui doit être communiqué et au sein de quel espace de parole, il est important de définir ce qui va prendre du temps, ce qui nécessite de la confidentialité, de la préparation, des échanges, une discussion.

6 Directive relative à la protection des données personnelles dans les structures d’accueil de la petite enfance

subventionnées par la Ville de Genève (données concernant les enfants).

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LA PROFESSIONNALISATION DE LA PRISE EN CHARGE ÉDUCATIVE : UNE NÉCESSITÉ

Existe-t-il des professions qui, en si peu d’années, ont plus évolué dans leurs pratiques que celles des métiers de la petite enfance ? Passant d’un ersatz maternel à un véritable partenariat éducatif, les professionnel-le-s se sont vu assigner de nouvelles missions : soutien à la parentalité, aide à l’intégration des familles dans la cité ou encore coordinateurs de réseau, les plaçant en peu de temps dans un rôle central, à l’interface des domaines de l’éducation, de la santé et du social. De leur côté, les familles, convaincues des compétences des professionnel-le-s, cherchent souvent un soutien auprès des éducateur-trice-s de leurs enfants. Plus que jamais, le-la professionnel-le doit s’ancrer dans un positionnement clair, passant par la reconnaissance des limites de son champ d’action, doublé de connaissances du réseau et de mise en place de collaborations pluridisciplinaires permettant d’orienter les parents vers les personnes adéquates. L’exercice des métiers de la petite enfance se situe donc au carrefour entre les attentes et représentations des politiques, des parents, les contraintes liées au fonctionnement en collectivité et aux objectifs pédagogiques, et la volonté d’offrir un accueil sans discrimination, portant attention à chacun. Au vu de la profonde mutation de l’identité des professionnel-le-s de la petite enfance, de leur responsabilité éducative dans le parcours de l’enfant et de leur rôle à jouer auprès des familles, la qualité de la prise en charge de jeunes enfants dans une structure d’accueil ne peut être garantie que par une professionnalisation des métiers de la petite enfance. La formation de base, mais aussi la formation continue répondent à cette exigence en permettant aux professionnel-le-s d’acquérir des connaissances pointues et régulièrement actualisées du développement de l’enfant, afin de pouvoir accompagner son évolution dans une relation individualisée au sein d’une collectivité, en concordance avec les apports de la recherche en éducation.

La formation de base Dans le canton de Genève, la formation de base des éducateurs et des éducatrices de l’enfance diplômé-e-s s’effectue à l’École supérieure d’éducatrices et d’éducateurs de l’enfance (ESEDE-CFPS) qui propose à la fois une formation à plein temps et une formation en emploi. Les éducateurs et les éducatrices de l’enfant sont des spécialistes de l’enfance autonomes ayant acquis une culture professionnelle et scientifique nécessaire à la maîtrise de situations complexes (le plan d’études cadre (PEC) est disponible sur le site Internet de l’ESEDE-CFPS). Par ailleurs, depuis 2005, l’École d’assistant-e-s socio-éducatif-ve-s forme des assistant-e-s socioéducatif-ve-s (ASE) qui sont des généralistes de l’encadrement et de l’accompagnement de personnes, soit en école à plein temps, en alternant cours et stages, soit en formation duale, à partir d'une place d'apprentissage dans un établissement accueillant des tout-petits, des jeunes, des personnes âgées ou des personnes en situation de handicap. Dans le contexte qui nous occupe ici et dans le but d’ouvrir la petite enfance à d’autres domaines, l’ESEDE-CFPS, avec le soutien du Centre de validation des acquis de l’expérience de l’Université de Genève et de la HES-SO a également mis en place une procédure de reconnaissance et de validation des acquis de l’expérience, qui permet à

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d’autres professionnel-le-s d’obtenir un diplôme d’études supérieures par le biais de formules passerelles notamment. Ce système encourage aussi l’engagement du personnel non diplômé dans une démarche de formation et de certification. Durant tout leur cursus de formation, les étudiant-e-s sont amené-e-s à faire des stages dans les structures d’accueil de la petite enfance qui doivent offrir un encadrement adéquat à ces apprenant-e-s. Ceci nécessite des compétences en matière de transmission des savoirs et une disponibilité de la part des responsables de formation – les praticien-ne-s formateur-trice-s – ainsi qu’une organisation spécifique de la part de la structure d’accueil, en même temps que des ressources suffisantes et adaptées en personnel. Cette professionnalisation permet aux intervenant-e-s de la petite enfance de mettre en place une distanciation critique par rapport à leurs pratiques, leurs compétences, leurs représentations et leur manière d’agir en même temps qu’elle constitue un processus qui vise à préciser une identité professionnelle toujours en voie de reconnaissance. En effet, le travail des professionnel-le-s de la petite enfance est malheureusement encore considéré par certains comme peu spécifique, ne nécessitant pas de qualifications particulières, car relevant d’une expérience que tout adulte peut avoir avec un enfant, les activités réalisées par les équipes éducatives réputées identiques à celles pratiquées dans la sphère domestique. En parallèle, les attentes par rapport aux lieux d’accueil sont très élevées ceux-ci étant investis d’une mission sociale et éducative importante - notamment en raison de leur augmentation dûe à leur rôle dans la conciliation entre le travail et la famille - dans la construction de la société de demain. Un mouvement itératif entre la théorie et la pratique Si la nécessité d’une formation de base pour les métiers de la petite enfance apparaît aujourd’hui comme un élément acquis, la définition de son contenu rencontre deux difficultés. La première difficulté concerne l’équilibre à trouver entre les enseignements théoriques et les apprentissages pratiques : d’un côté, certain-e-s professionnel-le-s reprochent aux formateur-trice-s d’être en décalage avec les réalités du terrain, de l’autre côté, les formateur-trice-s estiment que la qualification ne peut se résumer à une expérience de terrain, à un vécu propre et des valeurs, mais doit être pensée de manière plus globale et confrontée à d’autres idées et connaissances théoriques. La seconde difficulté se réfère à l’existence d’une multiplicité de représentations et de normes possibles dans le champ de l’éducation des petits enfants, c’est-à-dire au fait que plusieurs visions, entraînant chacune des manières différentes d’agir, peuvent parfaitement coexister. La réponse à une situation n’est en effet jamais univoque. Pour tenter de dépasser ces deux difficultés, caractéristiques de manière plus générale de tous les « métiers sur autrui », il est nécessaire de penser les pratiques pédagogiques dans un mouvement itératif entre la théorie et la pratique et de renoncer à une perception clivée entre ces deux dimensions. Ce qui ressort en tous les cas, c’est que c’est dans l’action que se révèlent les compétences professionnelles7. Au niveau des formateur-trice-s, cela signifie qu’il faudrait s’intéresser « aux manières de former à des raisonnements, des hypothèses, des analyses et non pas seulement à l’effectuation de bonnes pratiques, qui ne s’ajustent jamais parfaitement à la singularité des situations » (Ulmann, 2015). Au niveau des professionnel-le-s, cette articulation entre l’expérience et les savoirs doit faciliter la définition des normes et des procédures et partant un ajustement constant des manières de faire. Ce travail ne peut se faire pour tous les lieux

7 Zogmal, M. ; Fillietaz, L. (2014). Observer les compétences professionnelles dans l’interaction. Colloque petite

enfance, Ville de Genève, 15-16 novembre 2013, pp. 89-95.

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d’accueil de manière identique, mais, au sein des équipes éducatives, dans un processus participatif et une réflexion commune qui permet d’établir un socle commun de valeurs et de fondements pédagogiques devant orienter l’action. Ces derniers n’étant jamais définitifs, il faut accorder de l’importance à la formation continue.

La formation continue En Ville de Genève, le personnel de la petite enfance bénéficie, selon la Convention collective de travail, de sept jours par année de formation continue. Cette dernière vise à actualiser et à développer les connaissances et les compétences des professionnel-le-s. Elle aide le personnel dans son travail quotidien auprès des jeunes enfants et a pour objectif de garantir la qualité et l’adéquation de l’accueil offert aux familles. La formation continue ouvre par ailleurs un espace d’analyse de pratiques, permettant de prendre le recul indispensable par rapport à sa pratique professionnelle et/ou de partager ses expériences de travail. A ce titre, la formation continue représente également une opportunité pour préciser et redéfinir le contenu d’une culture professionnelle particulière, en constante évolution. Cette harmonisation est d’autant plus importante que les membres des équipes éducatives ont parfois suivi des cursus différents et sont issus d’horizons divers. Des professionnel-le-s de la petite enfance, conscient-e-s de ces besoins, ont constitué un groupe de réflexion intitulé FOCPE (Formation continue petite enfance). Cette association, en collaboration avec le Centre d’études et de formation continue pour les travailleurs et les travailleuses sociaux (CEFOC) de la Haute école de travail social (HETS), organise depuis plus de vingt-cinq ans des formations ciblées pour les professionnel-le-s de la petite enfance. Les thèmes qui sont proposés sont riches et ouvrent également la petite enfance à d’autres champs socio-éducatifs. L’Ecole d’études sociales et pédagogiques de Lausanne (éésp – Haute école de travail social et de la santé) est aussi impliquée dans ce processus de formation continue en proposant des formations destinées aux professionnel-le-s de la petite enfance. D’autres types de formations continues existent également et auxquelles les équipes peuvent recourir pour aborder et traiter des sujets divers concernant leur structure. Il s’agit notamment de formations d’équipe initiées par la direction ou les équipes, mais aussi de la venue d’un intervenant extérieur lors d’un colloque interne, par exemple. La formation émanant du terrain joue un rôle essentiel, dans la mesure où elle répond à des interrogations et à des besoins concrets et permet la réflexion et l’analyse des pratiques. La direction joue ici un rôle déterminant puisqu’elle peut également nourrir ses équipes, en diffusant l’information pour des conférences et colloques, en présentant des mémoires de fin d’année, en mettant à disposition des équipes des articles ou autres ressources sur l’avancée des recherches dans le domaine de la petite enfance ou la pédagogie. Complémentaire à la formation continue individuelle, la formation continue collective ou d’équipe permet à la fois l’émulation et le renforcement de la cohésion et de la solidarité des équipes, tout en instaurant un état d’esprit positif et stimulant.

Les fondements du travail : des valeurs communes et partagées L’organisation des structures d’accueil, et plus particulièrement dans le cadre de la mise en secteurs, demande une gestion du travail au sein des équipes qui favorise la réflexion institutionnelle, que ce soit au niveau pédagogique ou organisationnel, les échanges entre pairs, la coordination des actions, la transmission de l’information et la communication, la collaboration avec les familles, le réseau et la hiérarchie.

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Le travail d’équipe ne va pas de soi, il doit être réfléchi et coordonné pour être efficace. Pour cela, il est nécessaire d’établir un socle capable de véhiculer les valeurs partagées de l’institution et de fédérer les équipes autour de ces principes de base via un projet institutionnel et pédagogique. Certaines structures d’accueil ont établi des chartes, d’autres des fascicules qui mettent en lumière la réflexion des équipes. Quel que soit le support, l’objectif est de créer un cadre commun qui permette ensuite à chaque professionnel-le d’inscrire sa réflexion et sa pratique dans une collaboration respectueuse des spécificités de chacun-e.

La dynamique d’équipe : l’importance de la communication et des compétences mobilisées Pour garantir le bon fonctionnement de la structure ainsi qu’une collaboration et une implication de l’ensemble du personnel, il est important que la répartition des tâches et des responsabilités soit claire pour toute l’institution. L’organisation des secteurs petite enfance, regroupant pour certains différents types de structures, renforce cette nécessité de clarifier les rôles de chacun, tous interdépendants. Le rôle de l’adjoint-e pédagogique est significatif car il se situe au cœur de la relation terrain-direction ; c’est lui-elle qui fait le lien entre les professionnel-le-s et le-la responsable de secteur. Son rôle est d’accompagner les équipes à travailler ensemble, d’interroger sans cesse leur pratique, de montrer les forces et les limites de leur rôle auprès des familles. L’importance de la collaboration entre le-la responsable de secteur et l’adjoint-e pédagogique est à souligner. A tous les niveaux (responsables de secteurs, adjoint-e-s pédagogiques, équipes éducatives), les rencontres entre pairs sont autant d’occasions d’échanger sur diverses problématiques, de partager et mutualiser des bonnes pratiques et de créer des dynamiques de travail constructives.

Le travail des professionnel-le-s de la petite enfance mobilise des compétences variées qu’il est nécessaire de nourrir Compétences pédagogiques (inciter, soutenir, évaluer,

observer, analyser, susciter la réflexion).

Compétences conceptuelles (analyser, synthétiser, construire,

rédiger).

Compétences relationnelles (écouter, transmettre, négocier,

gérer les conflits, collaborer, travailler en équipe).

Compétences organisationnelles (prioriser, gérer le temps,

mobiliser, coordonner, articuler les contraintes et les possibles).

Compétences personnelles (motiver et être motivé-e, se

remettre en question, s’adapter aux changements).

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Les outils de travail : une nécessité pour un travail performant D’une manière générale, chaque institution doit se doter d’outils pour permettre aux professionnel-le-s d’enrichir leur réflexion, de susciter la curiosité, de générer des échanges et des discussions. Les directions des structures d’accueil ont un rôle prépondérant dans la mise à disposition des outils de travail dans le but de « nourrir » intellectuellement les équipes. Ce travail n’est toutefois pas fait de manière unilatérale, et il est important d’encourager l’ensemble des professionnel-le-s à contribuer à la constitution des outils de travail. Par exemple, des ouvrages, articles scientifiques ou autres supports doivent être à disposition de l’ensemble du personnel et être facilement accessibles. Pour garantir une prise en charge de qualité au quotidien, les professionnel-le-s ont besoin d’espaces de réflexion, d’échange, de discussion et de préparation. A ce titre, le temps de préparation octroyé à chaque professionnel-le offre un temps de travail hors de la présence des enfants qui permet, en plus de préparer du matériel pédagogique, de cultiver la relation avec l’ensemble de l’équipe pédagogique en participant à des colloques, avec le comité, mais aussi avec les familles et le réseau en lien avec l’enfant. Le temps de préparation est indispensable à l’exercice de la fonction d’éducateur-trice. A ce propos, le « Manifeste pour la formation, l’accueil et l’éducation de la petite enfance en Suisse »8 cite en exemple les communes qui ont intégré explicitement le temps de préparation dans l’horaire de travail comme une des conditions permettant d’offrir un contexte de travail optimal pour accomplir leurs tâches. La prise en charge quotidienne des enfants exige un suivi pointu et continu de la part des professionnel-le-s. Pour ce faire, il est essentiel de réfléchir sur les outils de communication utilisés pour transmettre les informations concernant les enfants. Les cahiers de transmission / communication permettent d’échanger entre les professionnel-le-s sur les éléments significatifs en rapport avec la vie de l’enfant et son évolution dans la structure d’accueil. Toutes les observations et informations consignées doivent suivre scrupuleusement les règles édictées par la LIPAD.

8 Manifeste pour la formation, l’accueil et l’éducation de la petite enfance en Suisse. Réseau suisse d’accueil

extrafamilial & Commission suisse pour l’UNESCO [éd.] (2015). Zofingue, p. 20.

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Partie II Le cadre de prise en charge

GUIDE PRATIQUE

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LES BESOINS DE L’ENFANT : BASE DU CADRE DE RÉFÉRENCE

Le besoin de sécurité physique et physiologique Afin de se développer de manière harmonieuse, l’enfant a besoin, dès sa naissance, d’évoluer dans un environnement sain, lui offrant des espaces de vie adéquats favorisant la découverte, l’exploration, le mouvement, des activités adaptées à son niveau de développement, des moments de calme et de repos, une alimentation saine et équilibrée en fonction de son âge et de ses besoins. Sous le regard bienveillant de l’adulte, l’enfant doit pouvoir évoluer vers une autonomie relative à son âge, dans des locaux garantissant sa sécurité. Le besoin de stabilité et de repères Si un accueil de qualité doit garantir que les normes d’encadrement soient respectées, il implique également que la vie de l’enfant au sein de la structure d’accueil se passe dans des groupes bien pensés, en termes de capacité d’accueil mais également d’aménagement de l’espace et d’organisation des moments et activités de la journée. Une collectivité trop grande surcharge en effet les capacités sociales encore en construction de l’enfant en âge préscolaire, ce qui peut susciter fatigue, difficultés d’adaptation et comportements difficiles. Le besoin de sécurité affective Dès sa naissance, l’enfant doit pouvoir construire un lien avec les personnes qui l’entourent. L’attention bienveillante et constante d’un nombre limité d’adultes auprès de lui favorise cet attachement et construit petit à petit la sécurité affective de l’enfant, son sentiment d’appartenance et d’identification à une culture (famille, structure d’accueil, etc.). C’est dans cette intention que bon nombre de structures d’accueil ont institué un système de référence9 permettant à l’enfant d’être sécurisé, réconforté par une personne stable, lors de sa période d’adaptation notamment. Ce lien lui permettra par la suite de s’ouvrir au groupe et de s’y intégrer pleinement, construisant petit à petit de nouveaux liens avec les autres membres de l’équipe éducative. Cela l’aidera à se préparer et à accepter la séparation momentanée avec ses parents, séparation que les professionnel-le-s auront préparée rigoureusement, tenant compte de la personnalité de l’enfant, de son âge, de son histoire, des besoins et disponibilités de ses parents. Ces relations stables et sécurisantes vont permettre à l’enfant de se percevoir en tant que personne appartenant à un groupe ; elles vont lui permettre de développer une estime de soi, sa capacité d’adaptation aux situations, d’apprendre à faire confiance, de s’ouvrir au monde qui l’entoure. Au travers de ses relations aux autres, l’enfant découvre ses émotions, ses sentiments et les confronte à ceux des autres. C’est également dans son rapport significatif à l’autre que l’enfant va apprendre à communiquer, à s’exprimer, à échanger, que ce soit de manière verbale ou non verbale.

9 Le système de référence exprime un fonctionnement interne de l’équipe éducative qui permet de porter une

attention particulière à chaque enfant. Le rôle de l’éducateur-trice de référence sera important durant la période d’adaptation de l’enfant au sein de la structure, comme une personne ressource pour l’enfant, comme pour les parents. La personne de référence observe régulièrement l’enfant et partage ses observations avec ses collègues. Elle peut coordonner le lien avec les parents, les acteurs du réseau en cas de besoin.

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Le besoin d’une prise en charge adaptée à son développement L’enfant se développe en passant par différents stades, que ce soit dans le domaine cognitif, affectif, moteur ou sensoriel. Chaque recommandation, chaque réflexion autour de la qualité devra toujours mettre en perspective le fait que toute réflexion ou action pédagogique s’évalue et se décide à la lumière d’une multitude d’éléments : âge de l’enfant, unicité de chaque enfant, dynamique du groupe, personnes en présence, activité, moment de la journée, etc. La réflexion autour de la mise en place des activités proposées, de l’organisation des journées, de l’aménagement des espaces, etc., doit permettre à l’enfant d’expérimenter à son rythme, de bouger, d’explorer l’espace, de nouer des relations, des liens avec ses pairs et les adultes en présence. Le besoin de tester ses limites A travers le cadre qu’on lui impose, l’enfant apprend à contrôler ses pulsions et à développer un comportement socialement admis. Poser des limites va aider l’enfant à se structurer, à comprendre ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas. Cela va également diminuer l’angoisse pouvant émerger d’un sentiment de liberté totale et de toute puissance non maîtrisé par l’enfant. L’acceptation des limites est facilitée par la construction de relations stables et bienveillantes. En effet, les enfants qui ont noué un lien de confiance et une sécurité affective suffisante pourront intégrer ces limites et ne pas les percevoir comme menaçantes. Mettre des limites à un enfant c’est aussi lui exprimer que l’on a des attentes envers lui et qu’on le croit capable de les atteindre. Les limites, les règles et le cadre peuvent être signifiés à l’enfant par le langage non-verbal (faire non de la tête, du doigt par exemple). Elles doivent être exprimées sans ambiguïté, c’est-à-dire que le ton et l’attitude doivent être cohérents. Petit à petit l’enfant pourra intérioriser ces règles, anticiper ce qui se passera s’il franchit la limite et se réprimer lui-même. Comme pour toutes les recommandations qui peuvent être faites ici, dans le domaine de la discipline, il est absolument nécessaire de respecter le rythme d’acquisition de l’enfant afin de lui procurer un sentiment de fierté, de maîtrise, plutôt que de frustration et d’échec. Si l’on veut que les limites puissent être assimilées par le tout jeune enfant, elles doivent être peu nombreuses, mais cohérentes. Aussi, et autant que faire se peut, des limites matérielles peuvent être installées (ex. une barrière interdisant l’accès à un endroit dangereux). Cela libèrera l’enfant et l’adulte de consignes répétées et constantes. Le besoin d’identification et d’être reconnu dans ses appartenances multiples Pour devenir une personne autonome, l’enfant a besoin de s’inscrire dans un système de valeurs, une culture. La famille transmet à l’enfant ses valeurs éducatives, celles liées à la culture d’origine, à son mode de vie. En intégrant une structure d’accueil de la petite enfance, l’enfant va découvrir une nouvelle culture, porteuse des normes et des valeurs de la société dans laquelle il va grandir. La reconnaissance par les professionnel-le-s de la culture d’origine individuelle de chaque enfant (sa langue, son origine, ses habitudes, etc.) et leur acceptation vont renforcer le sentiment d’estime de soi. Les parents eux aussi se sentiront reconnus et acceptés au sein de l’institution.

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La conciliation entre l’éducation familiale et l’accueil au sein de l’institution vont permettre à l’enfant de se reconnaître et de s’accepter à la fois comme différent et semblable aux autres, et d’accepter l’autre dans sa différence et dans sa ressemblance avec lui. Le besoin d’explorer L’être humain est un explorateur-né. Dès sa naissance, l’enfant découvre le monde en commençant par la découverte de son propre corps. Il expérimente, touche, observe, découvre. Il incombe dès lors aux adultes entourant l’enfant de lui offrir un environnement propice à l’exploration, riche, varié et stimulant, aménagé selon son niveau de développement. Le jeu notamment, qu’il soit libre ou dirigé, permet à l’enfant d’assouvir son besoin de découverte et de stimuler différents aspects du développement.

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L’ORGANISATION INSTITUTIONNELLE CALQUÉE SUR LES BESOINS DE L’ENFANT

L’adéquation de l’organisation institutionnelle aux besoins des enfants accueillis est un gage de qualité. L’organisation de l’accueil a pour objectif d’optimiser la prestation en regard des valeurs institutionnelles, des ressources humaines et matérielles. Elle doit partir des besoins des enfants (de quoi ont-ils besoin, à quel moment, quel accompagnement, quelles activités et quels aménagements de l’espace doivent être mis en place compte tenu du niveau de développement des enfants accueillis ?) et répondre aux principes éducatifs de ce guide et à ceux inscrits dans le projet institutionnel de la structure d’accueil.

L’organisation institutionnelle vise : La cohérence : adhésion de l’ensemble du personnel au projet

institutionnel, cohérence des actions éducatives soutenues par

une posture réflexive favorisée par de l’analyse de pratique, de

la formation continue.

La continuité, la stabilité, et cela d’autant plus que l’enfant est

petit. Il s’agira dès lors de penser les horaires du personnel,

l’organisation des remplacements, des stagiaires, de façon à

bien penser le nombre d’adultes présents auprès des enfants.

Un milieu familier doublé d’une organisation prévisible rendra

l’enfant plus disponible pour se livrer à ses propres découvertes

et se développer positivement.

La flexibilité, en s’adaptant aux besoins des enfants et en

respectant la réalité des familles en perpétuelle évolution.

La transparence, à travers une communication optimale à

l’interne comme avec les parents ou les partenaires extérieurs,

et une collaboration avec les familles.

L’organisation de l’accueil tend vers un équilibre entre les besoins de l’enfant, les contraintes institutionnelles de l’accueil collectif (horaires d’ouverture, abonnements, activités, repas, etc.), et la réalité des familles (trajets, activité professionnelle, situations familiales particulières, etc.). L’enfant grandit en constante interaction avec son environnement. En organisant le lieu de vie de manière adaptée, les professionnel-le-s permettent à l’enfant de se livrer à des activités variées, à des découvertes multiples en toute sécurité. Faute d’espace adéquat, les enfants risquent de se retrancher dans un rôle passif. Si l’aménagement de l’espace peut inciter à certaines activités plutôt qu’à d’autres (exemple : coin dînette, coin voitures, etc.), il ne doit pas cloisonner l’enfant dans ses expériences. Un agencement bien pensé doit servir au bon développement de l’enfant et ne pas entraver son besoin de jouer librement. La dynamique du groupe d’enfants et des adultes en présence dépend largement de l’espace à disposition et de son installation.

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Malgré les limites architecturales qu’il peut y avoir, il est important d’évaluer régulièrement l’aménagement de chaque espace et de définir s’il convient tant aux enfants qu’aux adultes. L’aménagement des lieux doit aussi tenir compte du travail d’équipe qui se fait dans l’institution et de la présence des parents à certains moments de la journée.

Les horaires et les abonnements La question de l’horaire de l’accueil des enfants fait l’objet de différents points de vue et mérite d’être traitée ici, tant elle dépend d’un équilibre entre le bien-être de l’enfant, la réalité des familles et les obligations de l’organisation de l’accueil en collectivité. Un cadre clair et communiqué de manière transparente L’accueil collectif répond à certaines règles organisationnelles. Afin d’assurer une prise en charge de qualité, l’institution se doit d’instituer des temps d’accueil et de départ des enfants, durant lesquels le personnel sera disponible et disposé, pour l’enfant et ses parents, à partager différentes informations (humeur du jour, vécu de l’enfant, état de santé, alimentation, sommeil, anecdotes ou informations particulières, etc.). Pendant ce temps, les enfants présents peuvent jouer librement, grâce à du matériel approprié et adéquat qui leur est mis à disposition. L’horaire d’accueil des enfants, tout comme l’horaire de départ du soir, doivent être communiqués clairement aux parents en leur expliquant la plus-value d’un tel espace d’échange.

Pour l’enfant, il sera accueilli comme chacun, et n’aura pas l’impression d’arriver alors qu’une activité a déjà commencé ou de repartir au beau milieu d’une animation.

Le parent pourra échanger sereinement avec le-la professionnel-le présent-e et pourra ainsi se séparer de son enfant ou le retrouver dans de bonnes conditions.

Le-la professionnel-le pourra quant à lui-elle se montrer disponible et à l’écoute de la famille et échanger différentes informations utiles.

Un cadre adapté aux besoins des familles Il est évident que plus l’enfant est petit, moins le cadre relatif aux horaires est strict. On constate d’ailleurs que dans la plupart des groupes de bébés, l’accueil est libre. Ceci étant, et les familles vivant elles-mêmes différentes contraintes, notamment professionnelles, on constate que la plupart des enfants arrivent dans la plage horaire qui y est dédiée. Par ailleurs, certaines situations particulières (congé maternité à l’arrivée d’une fratrie, problématiques de santé, horaire de travail atypique du parent, etc.) devront être prises en considération. L’institution et la famille se mettront alors d’accord sur de nouvelles règles, propres à la situation, mais dans la mesure du possible régulières, afin de favoriser la création de repères pour l’enfant dans cette organisation et de permettre à l’institution de réaménager son organisation en conséquence, de manière pérenne, afin de ne pas déstabiliser le fonctionnement du groupe et les habitudes des autres enfants. Les horaires des différents moments de la journée doivent à nouveau tenir compte des besoins des enfants, tout en garantissant un fonctionnement institutionnel optimal. Une collation peut est proposée le matin, après le moment d’accueil des enfants. Les repas des bébés sont pris à la carte, en fonction du rythme propre de chaque enfant. Pour les autres groupes, et suivant l’organisation en place (repas dans les salles de vie, réfectoire, etc.) les repas sont pris selon un horaire variable, aux alentours de midi, toujours en fonction de la dynamique du groupe, de l’âge des enfants, de l’organisation de la sieste, etc.

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Les transitions sont des passages importants entre une activité et une autre et doivent être pensées de manière cohérente et anticipée. Certains enfants peuvent souffrir de ces moments d’entre deux, où ils se retrouvent face à eux-mêmes, dans l’attente de consignes, sans vraiment savoir ce qui les attend. La communication est alors essentielle, car elle permet à l’enfant de se projeter, d’être rassuré. Ce sont également des moments qui peuvent devenir des activités à part entière, intégrant la participation de l’enfant, en fonction de son âge. Les enfants peuvent ainsi aider à mettre la table et à débarrasser, à changer les draps, à préparer le matériel pour une activité, à nettoyer, à ranger, etc. Chacun de ces moments permet de passer du temps ensemble et d’échanger sur les actions effectuées, tout en servant de base à divers apprentissages (langage, motricité fine, vivre ensemble, respect des règles, attente, compréhension des consignes, etc.) et à la construction de l’estime de soi (autonomie, réussite des actions entreprises, etc.). Des abonnements pensés pour répondre aux besoins des enfants et de leurs parents Le temps d’accueil des enfants et la prise en charge sur la journée pour les espaces de vie enfantine sont découpés en plusieurs temps forts (accueil, activités, repas, repos, départ), comme décrit ci-dessus. Ces jalons ont inspiré différents abonnements, qui permettent de répondre aussi bien aux besoins des enfants qu’à ceux des parents. En effet, selon la capacité d’un enfant à pouvoir fréquenter un accueil en collectivité, mais aussi pour correspondre à différents taux d’activité professionnelle des parents, les familles peuvent choisir la durée d’accueil aussi bien sur la journée que sur la semaine. Toutefois, pour le bien des enfants et la cohérence pédagogique dans le cadre d’une prise en charge éducative en milieu collectif, l’accueil ne peut se faire uniquement « à la carte » et doit présenter une stabilité dans le temps, pour une intégration optimale de l’enfant dans ce lieu de vie particulier qu’est la structure d’accueil. A ce titre, la Ville de Genève propose quatre types d’abonnements sur la journée et un minimum de temps de fréquentation sur la semaine, que les structures d’accueil subventionnées doivent appliquer, à savoir pour les structures d’accueil à horaires élargis :

100% (accueil possible entre l’ouverture et la fermeture, avec une recommandation d’accueil de l’enfant de 10h d’affilée au maximum)

75% du matin (dès l’ouverture jusqu’à la fin de la sieste) 50% du matin (dès l’ouverture jusqu’à la fin du repas) 45% de l’après-midi (dès la fin de la sieste jusqu’à la fermeture)

pour une fréquentation minimum de deux jours à temps plein ou de trois demi-journées sur la semaine. Les jardins d’enfants proposent quant à eux des accueils à la demi-journée (maximum 4 h 30 d’ouverture par demi-journée) et n’offrent pas de repas de midi, ni d’accueil durant les vacances scolaires. L’adaptation : la création du lien La période d’adaptation établie déjà depuis la fin des années 70 par les professionnel-le-s avait pour but d’éviter une séparation trop abrupte de l’enfant avec sa mère. Elle prévoyait d’accompagner l’arrivée de l’enfant en structure collective en proposant aux parents de se séparer progressivement sur des périodes de plus en plus longues. L’enfant intégrait alors qu’après toute séparation, quelle que soit la longueur, il y aurait des retrouvailles. Si la période d’adaptation garde les mêmes objectifs de base aujourd’hui, elle est devenue une véritable modalité d’accueil, permettant la mise en place de sociabilités progressives, de création de lien non seulement entre l’enfant et les professionnel-le-s, mais également entre ces derniers et les parents. L’adaptation est primordiale, tant pour les parents que pour

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l’enfant. C’est dans ces premiers moments que se tissent les liens de confiance entre la famille et l’institution. Les parents doivent se sentir uniques et écoutés sans être jugés. Pour bien connaître l’enfant, il faut connaître ses parents. L’adaptation est donc faite pour les accompagner dans ce processus de séparation, lequel doit s’inscrire dans la continuité et se faire progressivement. Il est cependant utile de mentionner une dérive courante de ce processus d’adaptation qui consiste à institutionnaliser cette pratique, au risque de la rendre protocolaire et rigide, imposée aux parents et incontournable. Si l’apprivoisement réciproque permet effectivement de créer le lien entre professionnel-le-s, enfants et parents, comment le faire de manière contrainte, sachant que le temps nécessaire aux uns et aux autres pour créer ces liens est différent ? L’adaptation ne peut dès lors se réduire à un protocole rigide, car chaque famille a ses propres contraintes et obligations, ses propres besoins, qui sont tout autant à prendre en considération que ceux des professionnel-le-s. La période d’adaptation devrait en somme se résumer à une phase de mise en lien, de négociations réciproques et de communication et de partage d’informations autour d’un projet commun : permettre à tous les acteurs, professionnel-le-s, parents et enfants, de se sentir à l’aise dans ce nouveau lieu de vie à partager. Les mesures mises en place dépendent bien entendu de l’âge de l’enfant, de ses besoins, de son développement, et du contexte familial. Le passage d’un groupe à l’autre à la rentrée scolaire ne nécessite pas forcément une adaptation stricto sensu, au même titre que celle qui prévaut à l’arrivée d’un enfant au sein d’une structure d’accueil de la petite enfance. Ceci étant, ce changement de groupe doit faire l’objet d’une réflexion de la part des équipes, afin de permettre à l’enfant de se familiariser avec les nouveaux espaces, les éventuelles nouvelles personnes accompagnant le groupe. Pour les professionnel-le-s également, et suivant l’organisation en place, il s’agira de se séparer des enfants suivis durant toute une année et de faire connaissance avec un nouveau groupe d’enfants.

Les conditions nécessaires à l’adaptation : Expliquer clairement à l’enfant ce qui va se passer, verbaliser

ce qui lui arrive.

Faire en sorte que les parents puissent accompagner leur

enfant tout au long de la démarche.

Désigner une personne de référence durant cette période, à qui

les parents pourront se confier.

Penser clairement les rôles entre parents et professionnel-le-s.

Prendre le temps d’observer l’enfant, de le connaître, de

reconnaître ses besoins.

Permettre à l’enfant de se séparer en douceur grâce à un objet

transitionnel (doudou, objet de la maison, etc.).

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Les espaces et le matériel pédagogique L’aménagement des espaces La structure d’accueil de la petite enfance est aujourd’hui devenue un véritable lieu de vie, de co-éducation, de rencontre et d’accueil, qu’enfants, parents et professionnel-le-s doivent se partager. Si l’institution ne remplace pas la maison, son aménagement doit permettre que chacun s’y sente à l’aise, dans le rôle qu’il a à y jouer. La décoration et l’aménagement des structures d’accueil offrent une indication précieuse de la prise en considération du jeune enfant et de sa famille dans cette microsociété. « Comment donner à penser que l’enfance est importante, respectable et éminente, si on bêtifie le lieu où on la reçoit ? »10. L’aménagement de la structure d’accueil révèle la conception que les professionnel-le-s ont de leur mission d’accueil. Si l’espace peut et se doit d’être pensé comme un lieu transitionnel entre la maison et la collectivité, un lieu garantissant la sécurité et la santé des enfants, il est avant tout un lieu d’éducation, favorisant le développement de l’enfant. L’enfant, un explorateur né On le sait, l’enfant grandit et se développe dans son rapport à l’espace. Partant de la découverte de sa propre spatialité (son corps), il s’ouvre au fil des mois à l’environnement qui l’entoure. L’organisation et l’aménagement de structures d’accueil du jeune enfant, ainsi que le matériel utilisé, doivent ainsi être pensés dans le but de favoriser et d’accompagner le développement des enfants tant sur le plan affectif, moteur, sensoriel, cognitif que créatif. Les agencements doivent être en adéquation avec les besoins des enfants et adaptés à leur âge pour permettre à la fois leur développement individuel harmonieux, leur socialisation au sein d’une collectivité, mais aussi leur autonomisation progressive. Il s’agit donc d’offrir à l’enfant des lieux sécures, permettant de découvrir, d’entreprendre, d’explorer, de manipuler, de bouger. L’agencement des institutions, que ce soient les salles de vie, les espaces communs (salles de psychomotricité, salle de sieste, espace de change, toilettes, etc.) ou les espaces extérieurs (vestiaires, jardins, terrasses, préaux, etc.) doivent offrir à l’enfant des repères, qui l’aideront à s’approprier cet espace, à s’y identifier, à s’y attacher, à se séparer. Les repères au niveau de l’espace (casier du vestiaire, lit, boîte à doudou, etc.) sont en effet extrêmement importants dans cet univers collectif où rien n’appartient vraiment à l’enfant, tout se partage. Dans ce contexte, les notions d’intimité versus visibilité devraient être prises en considération, afin de permettre aux enfants à la fois de se mettre en retrait, dans un espace plus protégé, mais également de permettre l’observation et la surveillance par les adultes, avec donc une certaine visibilité. L’aménagement des espaces de vie devrait également offrir la possibilité aux enfants d’être en contact visuel permanent avec les adultes afin qu’ils puissent évoluer en toute confiance dans un environnement sécure et sécurisant.

10

Rameau, L. (2009). Le lendemain des crèches : réinventer l’accueil de la petite enfance. Editions Érès.

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Les adultes L’aménagement des lieux ou le matériel utilisés doivent être repensés de manière régulière afin d’évaluer s’ils conviennent tant aux besoins des enfants qu’à ceux des adultes, professionnel-le-s et parents compris. Afin de prévenir les risques professionnels, une partie de l’ergonomie dans les salles de vie devrait être également adaptée aux adultes et l’agencement devrait par ailleurs être étudié pour accueillir les parents à la fois dans les espaces collectifs (au moment des transmissions, accueil et départs) mais aussi dans des espaces appropriés, hors de la présence des enfants, afin de pouvoir échanger entre adultes et de manière confidentielle. Si les repères sont importants pour le bien-être et l’évolution de l’enfant, l’environnement doit bien entendu rester stimulant et, pour se faire, il doit être renouvelé en fonction du développement des enfants accueillis, des contraintes architecturales des lieux, des cycles de vie (fêtes, saisons) et des projets menés par l’institution (thématiques pédagogiques particulières, etc.). Le choix du mobilier, de l’aménagement ou encore du matériel éducatif se fait de manière concertée, les équipes changeant de groupe chaque année et devant évoluer dans chacun des espaces institutionnels. Les enfants et leurs besoins changent également d’une année à l’autre, mais aussi en cours d’année. Par conséquent, les acquisitions s’envisagent de manière globale, en cohérence avec le développement des enfants de chaque groupe, tout en gardant à l’esprit que les espaces de rangement sont limités. Les paramètres déterminants Les équipements devraient également être pensés de manière à pouvoir évoluer et à être polyvalents, en privilégiant les éléments mobiles et les modules à la fois légers et déplaçables, mais stables. L’isolation phonique doit aussi être au cœur des préoccupations afin de limiter au maximum la pollution sonore, fatigante et source de stress tant pour les enfants que pour les adultes. La lumière et l’éclairage des espaces sont également déterminants et participent de manière significative à l’ambiance des lieux. Enfin la notion de sécurité (physique et affective) doit être présente en permanence et guider le choix des matériaux, de la hauteur des meubles (à l’échelle des enfants), des couleurs ou encore des jouets, en fonction de l’âge des enfants, afin de préserver leur intégrité physique et de maximiser leur sentiment de sécurité et leur confiance. Le matériel pédagogique Dans les structures d’accueil de la petite enfance, le jeu joue un rôle primordial : il permet aux tout-petits d’appréhender le monde qui les entoure, de se développer, de se construire et de s’exprimer. Qu’il soit symbolique, moteur ou encore créatif, le jeu stimule les enfants et leur permet de faire de nouvelles expériences tant sur le plan cognitif, physique, qu’émotionnel. Sous ses différentes formes, libre/spontané ou structuré, le jeu permet à la fois la construction identitaire et la socialisation au sein d’une collectivité. C’est pourquoi, le choix des jeux et des jouets revêt une importance primordiale et leur volume, matière, couleur, forme, ou encore fonction, doivent être pris en compte. En outre, le matériel pédagogique et les jeux devraient également refléter la diversité des enfants accueillis tant sur des aspects culturels que de genre11.

11

Voir la publication La poupée de Timothée et le camion de Lison, Guide d’observation des comportements des professionnel-l-e-s de la petite enfance envers les filles et les garçons, Le 2e Observatoire, Véronique Ducret et Bulle Nanjoud, 2

ème édition, (2015) ; www.2e-observatoire.com.

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La question du renouvellement du matériel pédagogique devrait être discutée au sein des équipes. L’emprunt de jeux dans les ludothèques ou de livres dans les bibliothèques de quartier, ou même la création au sein de la structure de petites ludothèques / bibliothèques permet de renouveler régulièrement les jeux, les livres et le matériel proposé. Attention toutefois à ce que le remplacement du matériel, des jeux et de l’aménagement ne soit pas une fin en soi. Comme évoqué plus haut, les jeunes enfants ont ce besoin de stabilité et de répétition, tout en étant stimulés. Le besoin de changement des adultes ne devrait donc pas prévaloir dans les choix et les décisions qui sont prises, mais c’est bien l’évolution et le développement des enfants qui devraient guider ces choix. Le matériel pédagogique, les jeux, doivent favoriser la créativité des enfants et leur laisser la possibilité de jouer librement, sans perdre de vue que, dans ce cas, la surabondance peut s’avérer néfaste. En ce sens, il est important de penser le matériel et l’aménagement des espaces qui doivent pouvoir être modifiés, sans perdre pour autant leur finalité (ex. un coin calme peut le rester même si les jeux changent). Selon les âges des enfants, une certaine stabilité doit être maintenue pour le bien-être des enfants et la cohérence de l’accueil. Il est également intéressant de questionner l’utilisation des jeux et de proposer des environnements non meublés12. Des agencements et du matériel adaptés aux groupes d’âge et aux besoins des enfants Les structures d’accueil de la petite enfance subventionnées par la Ville de Genève ne disposent pas toutes des mêmes espaces (intérieurs et extérieurs) pour accueillir les enfants. Cette diversité fait partie de la richesse du dispositif d’accueil en Ville de Genève et le nombre d’enfants accueillis est déterminé notamment par la surface à disposition et la configuration des lieux. L’aménagement de ces lieux de vie en dépend également. La fonctionnalité des salles (espace de vie conjugué à un espace d’accueil pour les parents, circulation des enfants comme des adultes, etc.) est primordiale, tout comme le sont les limites, qu’elles soient physiques ou symboliques. L’aménagement des salles de vie doit être pensé en fonction du développement des enfants qui y évoluent et en fonction de leur degré d’autonomie : que cela soit un endroit protégé pour les bébés, un espace moteur, un coin repas, un espace de repos, du matériel, des jeux, des livres, etc., chaque « coin » doit être en adéquation avec les aptitudes des enfants accueillis. Chez les plus jeunes (0-2 ans), l’accent est mis sur un matériel mobile et modulable et sur des contenants appropriés. Chez les plus grands (2-4 ans), les aménagements peuvent s’envisager de manière plus pérenne, mais les contenus évoluent régulièrement, l’accent étant mis sur l’autonomisation. Une réflexion relative aux rangements des jeux devrait également être de mise. Que penser en effet des objets tentateurs mais inaccessibles pour les enfants ? Que dire de l’apprivoisement précoce des livres lorsque ces derniers ne peuvent être manipulés que par les adultes, par peur de les abîmer ? Il semble dès lors indispensable de ranger les jeux dans des endroits fermés lorsqu’ils ne sont pas proposés aux enfants ou d’aménager des ludothèques au sein de la structure par exemple, permettant une mutualisation du matériel entre les groupes de l’institution et une activité à entreprendre avec les enfants lorsqu’il s’agit de changer le matériel de l’espace de vie.

12

« Et si on jouait à rien ? » dans les institutions de la petite enfance subventionnées par la Ville de Genève. Les cahiers pédagogiques du SDPE. Genève. 2012.

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L’aménagement des espaces et le matériel à disposition Des agencements et du matériel en adéquation avec les

besoins des enfants et adaptés à leur âge.

Un environnement sécure et sécurisant, pensé en tenant

compte des notions d’intimité et de visibilité et offrant des

repères aux enfants.

Un environnement et du matériel stimulants, régulièrement

repensés et adaptés au développement des enfants.

Un aménagement et du matériel mobile et modulable pour les

plus petits et des espaces et des jeux permettant

l’autonomisation des plus grands.

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Les activités pédagogiques Activités : un terme fourre-tout ? Les journées des enfants dans une structure d’accueil collectif sont jalonnées de différents moments ; des temps forts, qui structurent leur prise en charge. Parmi ces temps forts, les activités ont une place majeure. Avant de parler d’activité, il est important de réfléchir à la définition du mot et au sens qui l’accompagne car on observe que ce terme regroupe toute une palette de significations. On parle d’activité structurée, organisée, autonome, spontanée, libre, symbolique, de jeu, d’ateliers, d’animations, de découvertes, etc., mais sans toujours y donner le même sens et les mêmes objectifs. Le jeu libre : indispensable à la construction identitaire et sociale du jeune enfant S’il est intéressant pour le développement social des enfants d’avoir des moments d’activités structurées, pensées et organisées par des professionnel-le-s de l’enfance, il est néanmoins absolument primordial de laisser une place pour les activités spontanées, libres, qui sont autant d’occasions pour les enfants de développer leur créativité, leur imaginaire, leur confiance et leur estime de soi. Mais qui dit « libre » ne signifie pas pour autant que l’enfant est livré à lui-même. La place de l’adulte dans ces moments est indispensable. S’il ne dirige en effet pas l’activité elle-même, il endosse un rôle d’observateur du groupe et de chaque enfant, il peut étayer certaines actions, commenter, valoriser l’enfant, prendre du recul et analyser plus finement le niveau de développement de chaque enfant, ce qui lui permettra d’être plus à même de proposer ensuite des activités ciblées en fonction des besoins et des niveaux d’acquisition du groupe. On le sait, le jeu est au cœur de l’action de l’enfant. Il débute dès les premiers mois, avec la découverte par le bébé de ses mains, des sons qu’il est capable d’émettre, de la lumière, des effets de surprise et de la répétition avec lesquels l’enfant va s’amuser, s’étonner. En effet, le jeu favorise le développement et l’équilibre de l’enfant dans sa construction identitaire et sociale. L’enfant expérimente et construit, à travers divers types de jeux, sa relation aux autres et au monde. Il est ainsi important, dans une structure d’accueil de la petite enfance, que tout soit orienté vers le jeu et que les professionnel-le-s soient au clair avec les finalités, les objectifs pédagogiques et la pratique du jeu libre. Dans le jeu libre, l’adulte doit pouvoir observer de manière bienveillante et sécure afin de donner confiance aux enfants pour s’exprimer de manière spontanée. On observe d’ailleurs souvent plus d’agitation chez les enfants quand les adultes sont insuffisamment présents. Par ailleurs, les professionnel-le-s doivent être en mesure d’expliquer aux parents en quoi consiste le jeu libre et quels en sont les enjeux afin que ces derniers ne perdent pas de vue son rôle central dans le développement de leur-s enfant-s ; la tendance observée allant plutôt vers des attentes des parents à ce que l’accueil dans une institution de la petite enfance représente une plus-value à ce qui se fait à la maison en proposant une palette d’activités structurées et de productions (bricolages, dessins, etc.). Soutenant depuis de nombreuses années l’éveil culturel et artistique de la petite enfance, la Ville de Genève subventionne depuis 2015 la Maison de la créativité. Cet espace s’inscrit dans cette même volonté de laisser libre cours à la créativité de l’enfant, tout en la stimulant et en lui offrant des supports, un cadre stimulant pour l’accompagner. Ce lieu est un véritable outil pour les professionnel-le-s, accueillant les groupes d’enfants dans des espaces pensés et aménagés par des professionnel-le-s de la créativité et de l’éducation, proposant des ateliers avec des artistes résidents, un parc, des livres en lien avec les thématiques abordées, des évènements.

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Egalement accessible aux parents les mercredis et les samedis, cette maison offre de nouvelles possibilités aux familles de se retrouver, de réapprendre à jouer ensemble, de découvrir les capacités créatrices de tout un chacun dans des espaces originaux et évolutifs. La motricité : comment satisfaire le besoin naturel d’exploration des enfants ? Le développement moteur est primordial chez les enfants de 0 à 2 ans. En effet, le développement psychomoteur, qui est lié à la maturation du système nerveux, concerne non seulement les activités motrices, mais aussi cognitives ainsi que les possibilités d’interaction sociales de l’enfant. Alors que l’on constate que la plupart des enfants sont accueillis sur des périodes de plus en plus longues au sein des structures d’accueil, la question du mouvement à l’intérieur comme à l’extérieur est devenue incontournable. La prise en charge des enfants devra dès lors soutenir l’activité motrice des enfants, en la déclinant dans sa ligne pédagogique. Les sorties En plus des activités psychomotrices qui peuvent avoir lieu au sein des structures d’accueil, les sorties constituent une véritable nécessité pour les enfants, tout comme pour les professionnel-le-s qui les encadrent. Il est important de sortir du lieu d’accueil, ainsi que des espaces extérieurs rattachés à la structure d’accueil (terrasses, préaux, jardins, etc.). Dans l’idéal, une sortie par jour, si possible en dehors du périmètre de la structure d’accueil, devrait être proposée à tous les groupes d’enfants. En effet, si elle favorise l’oxygénation (stimule les défenses de l’organisme, favorise l’appétit, le sommeil), le défoulement des enfants lors des promenades par exemple, la sortie est également l’occasion d’explorations, d’échanges et de découvertes avec les adultes de référence du groupe. Encadré par un adulte structurant et garant de sa sécurité psychique et physique, l’enfant pourra s’épanouir et développer sa curiosité naturelle. Durant les sorties, l’enfant apprendra à reconnaître son environnement proche et moins proche, à se repérer progressivement dans son quartier, sa ville, à faire des liens avec les endroits qu’il fréquente en famille, etc., autant d’occasions d’échanger, d’enrichir sa culture, de s’adapter à de nouveaux environnements (rues, parcs et jardins, musées, bibliothèques, ludothèques, transports en commun, etc.). Dans ce cadre, les objectifs pédagogiques visés et la posture professionnelle à adopter sont :

Préparer la sortie avec les enfants en amont. Penser la préparation des enfants au moment de la sortie comme une activité en soi. Rechercher l’intérêt et la curiosité naturelle de l’enfant, son bien-être et celui du

groupe. Ne pas brusquer, mais encourager chaque enfant. Etre attentif en cas de peurs et

aider l’enfant à les surmonter. Répondre aux questions des enfants, les faire participer aux découvertes, à

l’observation de la nature (saison, température, faune, flore, etc.), de leur environnement (véhicules, chantiers, monuments, nature, etc.).

Transmettre aux parents les informations concernant le déroulement de la sortie, des anecdotes sur l’enfant.

Discuter avec l’enfant de son vécu, de son ressenti, de ce qu’il en retient. Echanger entre professionnel-le-s sur les bienfaits de la sortie, la dynamique de

groupe, les responsabilités, les difficultés, les observations, les améliorations à mettre en place.

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Les réunions On observe depuis plusieurs années que les réunions au sein des groupes d’enfants sont devenues une activité en soi porteuse de véritables objectifs pédagogiques. Les objectifs et la mise en œuvre Les réunions occupent une place importante dans le déroulement de la journée et ont généralement lieu après le moment d’accueil des enfants. Elles ont pour but de rassembler tous les enfants en groupe pour se dire bonjour et de constituer ainsi un repère dans la journée. On y nomme les enfants présents, mais également les absents, on y chante, on y discute du jour de la semaine, de la saison, du temps qu’il fait, etc. Ce moment d’échange participe au sentiment d’appartenance de l’enfant à son groupe d’accueil, favorise le développement du langage, ainsi que la confiance en soi et le partage. Les enfants apprennent à écouter l’autre, à attendre leur tour, à confronter leurs ressentis à ceux des autres, à se percevoir en tant qu’individu dans un groupe. Les réunions doivent être préparées en équipe afin d’y donner un sens, une cohérence pédagogique avec le projet institutionnel, ainsi qu’avec les projets et thématiques abordés au sein de la structure. Elles permettent également de communiquer aux enfants le programme de la journée. Si la réunion doit permettre à chaque enfant de trouver sa place, la taille du groupe doit également être prise en considération. Aussi, une réunion de qualité ne devrait pas rassembler trop d’enfants pour que chacun puisse participer. La durée de la réunion ne devrait pas non plus être trop importante, afin de correspondre au niveau d’attention des enfants. Elle se déroule ainsi en fonction de l’âge des enfants, de leur niveau de développement, de leurs compétences, mais aussi de la dynamique du groupe au moment de la débuter. Même si elle doit se préparer, elle peut ne pas avoir lieu si la situation ne s’y prête pas ce jour-là, ou au contraire porter sur une thématique particulière suivant les évènements de la veille ou de la journée. L’objectif et la mise en œuvre de la réunion doivent ainsi être flexibles pour en garantir le sens. Lors de la réunion, l’enfant est libre de se lever ou de rester assis dans le cercle. Même debout, en marge, un enfant un peu réticent face à cette activité de groupe, écoute, participe et se rapprochera probablement pour y participer, mais à son propre rythme. Les professionnel-le-s doivent veiller à permettre à chaque enfant de s’exprimer s’il le souhaite. La réunion est également un moment extrêmement propice à l’observation du groupe et de chaque enfant en particulier. Une forme et des contenus adaptés au niveau de développement des enfants Dans le groupe des bébés, la réunion, si elle a lieu, prend une forme relativement libre. L’adulte la suggère en se mettant dans un coin, en chantant par exemple, en prenant un livre. L’enfant a donc le choix de venir vers l’adulte et de participer à ce moment d’échange, même si l’attention des bébés est de courte durée. Dès l’âge de 1-2 ans (groupe des petits), la réunion revêt une importance grandissante. Elle amène l’enfant à prendre une place dans le groupe, à jouer un rôle dans cette petite collectivité. C’est un repère rassurant, une routine qui se met en place, permettant à l’enfant de se sentir valorisé en tant qu’individu dans un groupe, de prendre connaissance du déroulement de la journée, de se réjouir, de s’exprimer sur les thématiques éventuellement abordées, sur ce qu’il vit, ressent, d’échanger avec les adultes en présence ou avec ses pairs.

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La réunion Une activité pédagogique en soi, constituant un repère dans la

journée des enfants.

L’opportunité pour l’enfant d’exister en tant qu’individu dans le

groupe et d’y prendre sa place.

La durée de la réunion ainsi que la taille du groupe doivent être

adaptées à l’âge des enfants et à leur degré d’attention pour

que chaque enfant puisse y prendre part dans des conditions

optimales.

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Les soins et les changes L’intimité et la confiance Les moments de soins et de change constituent des moments d’intimité et de relation individuelle privilégiée avec l’enfant. A cet égard, la notion de confiance est ici déterminante, à la fois pour l’enfant qui doit se sentir en sécurité, mais aussi pour les parents avec lesquels les professionnel-le-s peuvent tisser, autour de ce thème, des liens étroits. Pour l’enfant, la verbalisation des actes, l’adéquation des gestes ou encore le lien par le regard constituent des éléments essentiels, tout comme le respect de sa pudeur et de son intimité. Lors des moments de change et de soins, la notion du corps est omniprésente et le fait de nommer les différentes parties du corps permet de favoriser la découverte par l’enfant de son propre corps et, petit à petit, d’appréhender également son appartenance de genre. La qualité relationnelle prend ici tout son sens. Durant la période d’apprentissage de la propreté, le dialogue avec les parents est particulièrement important et facilite le lien avec les familles. Lors des échanges, le respect du rythme de l’enfant doit être au cœur des préoccupations et son développement devrait primer sur la volonté des parents. L’autonomisation progressive et l’accès à la propreté devraient, dans la mesure du possible, se faire en parallèle à la maison et dans la structure d’accueil. Les demandes des parents doivent être écoutées et entendues et des retours en arrière sont possibles, cet apprentissage n’étant pas linéaire. Chez les bébés, où la fréquence du change est importante, la discussion avec les parents en amont et en aval est primordiale et les professionnel-le-s peuvent accéder à certaines demandes (crème spécifique, type de couches, etc.) dans la mesure du possible et dans les limites institutionnelles. Un protocole de change est vivement conseillé pour les équipes, en particulier en ce qui concerne les notions de prévention et d’hygiène. Il peut également mettre en évidence l’importance de la ritualisation de ces moments qui constituent des repères essentiels pour les plus jeunes. Les soins Dans le cadre des soins de nature plus médicale, les professionnel-le-s se doivent de suivre un cours de « premiers secours » tous les deux ans afin d’être à jour et potentiellement opérationnel-le-s dans ce domaine. Ils-elles doivent également, dans le cadre de la formation continue, bénéficier de formations de type « bobologie », afin d’avoir les gestes adéquats lors de petites blessures et autres bosses. Dans les structures d’accueil du jeune enfant, la sensibilisation des enfants à l’apprentissage de certaines formes d’hygiène comme le lavage des mains, du visage après les repas, des dents, le mouchage ou encore la prévention des effets néfaste du soleil constitue des moments importants. Pour ce faire les professionnel-le-s peuvent notamment se tourner vers le SSEJ qui propose différentes animations de sensibilisation. Enfin, et parce que cela peut questionner les parents plus particulièrement autour du thème du change et des soins, les structures d’accueil de la petite enfance devraient avoir une position institutionnelle très claire, définie et explicitée aux familles, quant à la diversité de la composition des équipes éducatives (origine culturelle et sociale, genre, âge, langue, etc.). La diversité, tant des expériences que des personnalités, fait partie de l’accueil en collectivité en Ville de Genève et les concepts de respect et de transparence doivent prévaloir dans le cadre d’un accueil de qualité.

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Les soins et le change Un moment d’intimité et de relation privilégiée avec l’enfant.

La qualité relationnelle avec l’enfant au centre.

Le dialogue avec les parents et le respect du rythme de l’enfant.

Le respect de l’intimité et de la pudeur des enfants est

également primordial.

La sensibilisation des enfants à l’apprentissage de certaines

formes d’hygiène.

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Le sommeil / le repos Le sommeil ou le repos constituent un besoin essentiel de l’enfant, besoin qui est lié à son âge et à son développement. Ils lui permettent de se ressourcer et de récupérer son énergie, tant sur le plan physique que sur le plan cognitif. Ils permettent également à l’enfant de se recentrer sur lui-même, alors qu’il est en permanence en présence des autres dans le cadre d’une collectivité. Respecter le rythme de l’enfant et ses besoins en termes de sommeil revêt donc une grande importance. De plus, ses besoins peuvent être différents dans le cadre d’une collectivité (stimulation, socialisation permanente, etc.) que dans le cadre familial. Le sommeil des enfants accueillis devrait être pris en compte dans sa globalité (le sommeil diurne et le sommeil nocturne sont très différents), en observant à la fois ce qu’il se passe dans la structure d’accueil et à la maison. En effet, une mise en dialogue des pratiques ayant lieu à la maison et dans la structure d’accueil collectif permet de mieux comprendre les besoins de chaque enfant et de s’ajuster si besoin. La ritualisation La qualité de l’accompagnement à la sieste et la ritualisation de ce moment sont cruciaux pour permettre à l’enfant de lâcher prise et d’accéder à un bon endormissement, ou en tout cas à un moment de calme ou de repos. La phase de transition que représente le rituel de la mise à la sieste devrait se passer dans le calme (prendre le temps, prendre conscience du moment présent, parler doucement, travailler l’humour, le rire), avec des repères et des habitudes qui permettent aux enfants de se sentir en sécurité (petits lits ou matelas attribués

/ réservés à chaque enfant, couvertures, doudous, lolettes, etc.). Chez les plus grands, l’accompagnement à la sieste constitue aussi un accompagnement vers l’autonomie (déshabillage / habillage, brossage des dents, passage aux toilettes, etc.). Il est essentiel pour les équipes éducatives de s’interroger sur les pratiques liées à l’endormissement des enfants. En effet, la souplesse et l’ouverture sont de rigueur, mais sans perdre de vue les contraintes de la collectivité. L’entreaide éducative au sein de l’équipe (le fait de passer le relai dans certaines situations plus difficiles d’endormissement) peut être d’une grande utilité. L’organisation Chez les bébés, le sommeil est à la carte et l’observation des signes de fatigue est essentielle (frottement des yeux, bâillements, pleurs, irritabilité, nervosité, etc.). L’endormissement se fait également de manière individualisée. Le travail de lien et le dialogue avec les parents, dans une attitude de non-jugement, permet de mieux comprendre les spécificités liées au sommeil de chaque enfant et d’aiguiller petit à petit les familles sur les modalités de la collectivité. Au niveau des aménagements, des petits hamacs ou matelas peuvent parfois être prévus dans la salle de vie, certains tout-petits ayant plus de facilité à s’endormir dans le groupe avant parfois d’être transportés dans leur lit, dans la salle de sieste. Chez les petits, le début d’année constitue une période de transition où l’on passe progressivement d’un sommeil à la carte à une sieste plus longue après le repas de midi. Chez les moyens et les grands, la mise à la sieste s’effectue également après le repas de midi, et peut être envisagée en deux temps et en deux groupes si l’organisation le permet, afin de respecter au maximum le rythme des enfants. L’organisation des horaires du personnel encadrant le moment de la sieste doit permettre la présence permanente d’un adulte dans la salle de sieste et la présence d’un autre adulte au moment où les enfants commencent à se réveiller. Dans l’idéal, les salles de sieste devraient être attenantes aux

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salles de vie, à la fois pour des questions pratiques (par exemple enfants qui se réveillent avant les autres), de sécurité, mais également afin de favoriser l’autonomie des plus grands. La question des abonnements pratiqués dans les institutions détermine parfois le moment du réveil (car certains enfants doivent partir et d’autres arrivent), mais celui-ci devrait s’effectuer de la manière la plus naturelle et douce possible, sans rupture (lumière progressive, porte entre-ouverte, etc.), afin de ne pas réveiller des enfants en phase de sommeil profond. Si les demandes des parents quant à la durée de sommeil de leur enfant doivent être entendues, les équipes éducatives doivent pouvoir argumenter les choix qui sont faits au sein de la collectivité. On ne réveille pas un enfant qui dort, à part en cas de sortie particulière ou d’évènement exceptionnel.

Le sommeil Le respect du rythme de l’enfant et de ses besoins en termes

de sommeil revêt une grande importance.

Une mise en dialogue des pratiques ayant lieu à la maison et

dans la structure d’accueil permet de mieux comprendre les

besoins de chaque enfant.

La qualité de l’accompagnement à la sieste et la ritualisation de

ce moment sont cruciaux pour permettre à l’enfant de lâcher

prise et d’accéder à un bon endormissement.

Les enfants en phase de sommeil profond ne devraient pas être

réveillés.

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L’alimentation L’alimentation du tout-petit constitue un des piliers de son développement. Durant les premières années de vie, l’alimentation évolue rapidement en fonction des besoins des enfants. Mais l’alimentation ne se réduit pas au seul besoin physiologique de se nourrir ; manger est également une source de plaisir et de bien-être, une activité sensorielle importante, sociale et émotionnelle qui offre une occasion propice d’apprentissages multiples (découverte de goûts, de saveurs, d’odeurs, de textures, intériorisation de règles du vivre ensemble, etc.). Si manger est en effet un acte social, pour les tout-petits, le repas est une occasion d’intégrer cette culture dans et par la collectivité. L’heure des repas, le déroulement, l’ordre des plats, les ustensiles et couverts utilisés sont autant de symboles culturels qui font partie de l’éducation du jeune enfant. On le sait, l’alimentation véhicule tout un ensemble de valeurs individuelles que la structure d’accueil devra prendre en considération (habitudes, goûts, culture, religion par exemple) et que le travail des professionnel-le-s tentera de concilier. Il s’agira d’une part de respecter les valeurs, les habitudes de l’enfant et de sa famille et de l’autre, de l’inclure dans une culture et ses usages. Nourrir un enfant n’est pas chose facile, d’autant que très tôt l’enfant peut refuser certains aliments ou à l’inverse avoir envie de se nourrir à l’excès d’un aliment. Son appétit fluctue également rapidement en fonction des étapes de développement qu’il traverse ou de son état de santé. Des recherches ont cependant montré que lorsque le libre choix est donné à l’enfant, il équilibre de lui-même les quantités et les nutriments nécessaires à sa croissance. Ceci étant, sachant que l’acquisition des habitudes se fait dès les premières années de vie, l’enfant doit être éduqué depuis tout petit à l’importance de l’équilibre alimentaire. Les interactions lors des moments de repas façonnent les comportements alimentaires de l’enfant et ses préférences, qui eux-mêmes ont un impact sur le développement psychosocial et effectif13. Se soucier de bien nourrir un enfant, c’est lui proposer une alimentation riche et variée, lui donner envie de manger, en partageant des moments agréables à table, permettant d’associer alimentation et plaisir, lui donner un cadre, des limites. La structure d’accueil de la petite enfance a un rôle extrêmement important à jouer en matière d’éducation alimentaire. Si les recommandations diététiques (SSEJ), l’équilibre alimentaire et la diversité d’aliments, de saison et de bonne qualité sont proposés à l’enfant, l’approche pédagogique autour des repas et des collations est primordiale. Elle devra être réfléchie en équipe et présentée aux parents. L’organisation des repas ainsi que le rôle des adultes durant ces moments doivent être pensés en équipe et inscrits dans le projet pédagogique qui servira de référence à ce propos. L’alimentation étant l’objet de nombreuses demandes particulières de la part des familles, les professionnel-le-s doivent élaborer en amont des réponses à leur fournir quant aux possibilités ou non d’entrer en matière, mettant toujours en perspective les besoins de l’enfant dans un contexte institutionnel collectif contraignant en termes d’hygiène et de sécurité alimentaire. La question de l’accès à l’eau devrait être pensée (gourdes par exemple) pour que les enfants puissent boire en tout temps, selon leurs besoins.

13

Liu Y. H. ; Stein, M. T. (2013). Comportement alimentaire des nourrissons et des jeunes enfants et impact sur le développement psychosocial et affectif. University of California San Diego.

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L’alimentation doit être différenciée en fonction des âges des enfants et fait partie intégrante de la relation parents-professionnel-le-s. Sans rappeler les étapes relatives à chaque âge, il est important de garder à l’esprit certaines conditions qui soutiennent l’apprentissage et les découvertes alimentaires. Ces conditions sont :

Suivre l’introduction des aliments faite à la maison pour les plus petits. Etre en lien avec les familles dans le rapport à l’alimentation. Réfléchir à l’organisation des repas sur le plan de l’aménagement des espaces, de

l’heure des repas, ainsi que de la taille des groupes. Etre attentif à certaines périodes plus sensibles dans la prise en charge collective,

notamment dans le groupe des petits où débute concrètement la collectivité. En outre, les structures d’accueil doivent contribuer à soutenir les mères dans leur désir d’allaitement et leur proposer si ce n’est un lieu pour allaiter, une écoute et des conditions de conservation du lait maternel appropriées. La question des régimes particuliers est de plus en plus présente au sein des structures d’accueil de la petite enfance. Les régimes liés aux allergies ou aux intolérances alimentaires doivent être affichés de manière rigoureuse et systématique dans la cuisine (de production et de régénération) ainsi que dans les groupes. Toute personne amenée à effectuer un remplacement doit en être impérativement informée, une négligence en la matière pouvant avoir des conséquences graves. Tout régime spécial doit faire l’objet d’une information par le biais de la « Fiche de régime spécial » émanant du SSEJ, dûment remplie par le pédiatre de l’enfant et transmise à la direction de l’institution. Des consignes plus précises concernant les repas peuvent figurer sur la fiche « Administration de médicaments et de régimes spéciaux en IPE » émanant du SSEJ.

L’alimentation vise à : Favoriser une ambiance conviviale autour du repas.

Susciter la découverte d’aliments nouveaux et susciter l’envie

de goûter.

Soutenir l’apprentissage de l’autonomie, en fonction de l’âge et

du niveau de développement de l’enfant et être attentif à ne pas

mettre l’enfant « en situation d’échec ».

Encourager le dialogue avec l’enfant, entre les enfants, autour

du menu proposé (nommer les aliments, leur couleur, leur

aspect, partager sur le goût, l’odeur, les émotions, etc.).

Offrir un environnement calme à table (les adultes s’organisent

pour éviter les déplacements inutiles, les discussions

personnelles, les commentaires sur les plats servis, etc.).

Stimuler l’enfant à manger sans jamais le forcer.

Respecter l’enfant dans son histoire personnelle (allergies,

régimes spéciaux, habitudes, culture, goûts).

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La prise en charge de l’enfant malade L’accueil de l’enfant malade dans les structures d’accueil de la petite enfance est un thème délicat à aborder, tant il est présent de manière quasi quotidienne dans les lieux d’accueil et tant il est sujet à discussions de par les questions sociétales auxquelles il renvoie. Si les professionnel-le-s doivent être conscient-e-s de la pression exercée par certains employeurs sur les parents en cas d’absence, cette contrainte ne saurait être le seul critère d’acceptation d’un enfant malade. En effet, les enfants ne devraient pas avoir à subir dès le plus jeune âge le fonctionnement et les aspirations actuels de nos sociétés. D’un autre côté, les contraintes professionnelles des familles sont parfois telles, qu’un dialogue permanent et un juste équilibre dans les solutions amenées doivent être proposés. Le bien-être de l’enfant Si le bien-être et le confort de l’enfant malade dans le cadre de la collectivité doivent être au cœur des préoccupations, il n’en demeure pas moins qu’un cadre institutionnel doit être clairement posé et qu’il convient de préciser les critères d’accueil ou d’éviction. Le SSEJ émet des recommandations dans ce sens et pose certains critères d’éviction. Par ailleurs, en cas d’épidémie, ce service peut soutenir les institutions en diffusant des recommandations et critères d’éviction ad hoc. Le dialogue et un lien de confiance entre les parents et les équipes éducatives sont à nouveau essentiels et peuvent être l’occasion de sensibiliser les familles aux effets bénéfiques du repos pour l’enfant malade, celui-ci permettant de mieux récupérer et de guérir. Dans les cas litigieux, la cohérence du discours institutionnel doit être présente et différents niveaux de ressources doivent être actionnables, avec une gradation de l’intervention (équipe éducative, puis adjoint-e pédagogique, voire responsable de secteur). Un intervenant extérieur (type infirmière du SSEJ) peut aussi s’avérer très utile. Ainsi l’équilibre entre les besoins de l’enfant malade, de sa famille et de l’équipe éducative est à réfléchir et à re-questionner régulièrement, afin d’offrir une certaine souplesse dans l’accueil, un regard individuel dans le cadre d’une collectivité. Le défi pour les équipes consiste à être créatives dans la prise en charge des enfants malades, mais sans ressources supplémentaires (principe de réalité à garder en tête). Cela peut consister en l’aménagement d’un petit coin repos et lors d’une sortie, par exemple, en la division du groupe en deux si le nombre d’adultes le permet. Les documents / mesures utiles Dans le cas de maladies ponctuelles, la question de la médication et de l’administration des médicaments doit être pensée et soutenue par un formulaire, signé par les parents, qui précise la nature des médicaments et la posologie. En cas de fièvre ou autres symptômes nécessitant une médication, le contact téléphonique avec les parents s’impose afin de les informer et de discuter de l’éviction ou non de l’enfant. Il permet également de les orienter, si besoin, sur le pédiatre de l’enfant. La transmission et la communication avec les parents jouent ici un rôle primordial. Les équipes éducatives peuvent parfois se sentir dépourvues face au repérage des symptômes, à la pose d’un « pré-diagnostique » qui leur est parfois enjoint ou encore face à la sur-médication de certains enfants. Jusqu’où va leur responsabilité ? Ces questions devraient être discutées en équipe et le recours au tiers prescripteur et au spécialiste peuvent aussi constituer une solution.

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Afin de limiter la transmission des virus et autres bactéries, quelques mesures d’hygiène peuvent être prises comme le lavage des mains lors de l’arrivée de l’enfant au sein de la structure, puis régulièrement dans la journée, le nettoyage des jeux, des poignées, etc. Le SSEJ publie des directives dans ce sens auxquelles le personnel se réfère. (Voir également thématique soins et change). Enfin, pour les enfants présentant des problèmes de santé chroniques (allergies, intolérances, maladies chroniques, etc.), le « projet d’accueil individualisé (PAI) » permet de préciser les besoins spécifiques et les responsabilités des différents acteurs et propose un protocole d’intervention en situation d’urgence.

La prise en charge de l’enfant malade L’accueil de l’enfant malade renvoie à des questions sociétales

auxquelles les équipes éducatives doivent réfléchir.

L’équilibre entre les besoins de l’enfant malade, de sa famille et

de l’équipe éducative est à examiner et à questionner

régulièrement.

Les professionnel-le-s se réfèrent aux recommandations

publiées par le SSEJ au sujet des critères d’accueil ou

d’éviction, ainsi qu’au sujet des mesures d’hygiène.

La transmission et la communication avec les parents

concernant l’enfant malade jouent un rôle primordial dans sa

prise en charge.

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REMERCIEMENTS Aux membres de la plateforme qualité, pour les échanges intenses mais constructifs, leur engagement et leur professionnalisme en faveur de la qualité. Sandra Capeder Cheffe du Service de la petite enfance

Bruno Domergue Responsable du Secteur petite enfance A.Carfagni - Pâquis

Valérie Fallot Responsable du Secteur petite enfance des Grottes

Alain Flament Responsable du Secteur petite enfance de la Servette

Marceline Galland Theler Responsable du Secteur petite enfance St-Gervais

Cristina Gonzalez Adjointe pédagogique, EVE Jeanne Hersch, Secteur petite enfance de Plainpalais

Isabelle Kovacs Adjointe de direction, Service de la petite enfance

Lynn Mackenzie Oth Chargée de projets, Service de la petite enfance

Myriam Meddeb Adjointe pédagogique, EVE Bertrand, Secteur petite enfance de Champel

Chrystel Perret Responsable du Secteur petite enfance des Nations

Julie Schnydrig Kettenacker Adjointe de direction, Service de la petite enfance

Jacqueline Sommer Ancienne responsable du Secteur petite enfance de St-Jean

Aline Sommer-Bieler Sociologue, Service de la petite enfance

Anne Spira Psychologue, Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

Suzanne Stofer Sociologue, Service de la petite enfance

Mai 2017

Contact

Service de la petite enfance Avenue Dumas 24 Case postale 394 1211 Genève 12

Tél. +41 22 418 81 00