capes lettres rapport du jury option llf

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EPREUVE D’ANALYSE D’UNE SITUATION PROFESSIONNELLE OPTION LETTRES MODERNES OPTION « LITTERATURE ET LANGUE FRANÇAISES » Rapport présenté par Miguel Degoulet L’épreuve d’Analyse d’une situation professionnelle (ASP) fait partie des oraux d’admission du concours rénové du CAPES/CAFEP de Lettres, session 2014. Littérature et langue françaises (LLF) est l’une des options possibles au même titre que les suivantes : Latin pour lettres modernes, Français langue étrangère et Français langue seconde, Théâtre ou Cinéma. Ce rapport est fondé sur les propositions des différentes commissions 1 au regard des prestations entendues pendant cette session, permettant aux futurs candidats d’être mieux à même d’apprécier les enjeux de cette épreuve et de s’y préparer. I. Une épreuve nouvelle a. De l’Épreuve sur dossier à l’Analyse d’une situation professionnelle La session 2014 « exceptionnelle » a amené les candidats à présenter pour la dernière fois l’Épreuve sur dossier. Il s’agissait alors de prendre appui sur des pages de manuels ou des documents professionnels. Dans la plupart des cas, les éléments proposés étaient déjà didactisés par des auteurs de manuels ou des professeurs par des notes, chapeaux introductifs, questionnaires, mises au point d’histoire littéraire ou culturelle, par exemple. Il s’agissait d’apprécier le questionnement didactique et les contenus scientifiques accompagnant des supports littéraires ou grammaticaux. La nouvelle épreuve d’ASP est définie par un arrêté du 19 avril 2013 publié au Journal officiel du 27 avril 2013 2 : « L’épreuve consiste à élaborer, pour un niveau donné, un projet de séquence d’enseignement assorti du développement d’une séance de cours, à partir d’un dossier proposé par le jury et composé d’un ou de plusieurs textes littéraires ou de documents divers (reproductions d’œuvres d’art, travaux de mises en scène, extraits de films, documents pour la classe, articles....). Cette proposition du candidat sert de point de départ à un entretien d’analyse de situation professionnelle. » Le rapport de jury de la session 2014 « exceptionnelle » souligne la parenté évidente entre les deux épreuves : « L’enjeu de l’enseignement des lettres dans le secondaire, en termes de contenus disciplinaires, de réflexion pédagogique et didactique, restera au cœur de l’analyse d’une situation professionnelle. On attendra toujours de la part des candidats une volonté de manifester des aptitudes à l’exercice d’un art de la parole, permettant d’évaluer des capacités d’analyse, de synthèse, de rigueur, alliées à une clarté de l’expression et des qualités certaines de communication » 3 . 1 Nous tenons à les remercier, ainsi que leurs Président(e)s pour l’abondante documentation qu’ils nous ont fournie. 2 Consultable sur www.legifrance.gouv.fr : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027361553&dateTexte=&categorieLien =id C’est à cet arrêté que nous renvoyons ensuite. 3 Rapport présenté par Philippe Bastard-Rosset. Tous les rapports du jury évoqués sont disponibles en ligne :http://www.education.gouv.fr/cid4927/sujets-des-epreuves-d-admissibilite-et-rapports-des-jurys.html 177

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Rapport du jury pour l'option LLF - session 2014.Présenté par Miguel Degoulet.

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  • EPREUVE DANALYSE DUNE SITUATION PROFESSIONNELLE OPTION LETTRES MODERNES OPTION LITTERATURE ET LANGUE FRANAISES Rapport prsent par Miguel Degoulet

    Lpreuve dAnalyse dune situation professionnelle (ASP) fait partie des oraux dadmission du concours rnov du CAPES/CAFEP de Lettres, session 2014. Littrature et langue franaises (LLF) est lune des options possibles au mme titre que les suivantes : Latin pour lettres modernes, Franais langue trangre et Franais langue seconde, Thtre ou Cinma.

    Ce rapport est fond sur les propositions des diffrentes commissions1 au regard des prestations entendues pendant cette session, permettant aux futurs candidats dtre mieux mme dapprcier les enjeux de cette preuve et de sy prparer.

    I. Une preuve nouvelle

    a. De lpreuve sur dossier lAnalyse dune situation professionnelle La session 2014 exceptionnelle a amen les candidats prsenter pour la dernire

    fois lpreuve sur dossier. Il sagissait alors de prendre appui sur des pages de manuels ou des documents professionnels. Dans la plupart des cas, les lments proposs taient dj didactiss par des auteurs de manuels ou des professeurs par des notes, chapeaux introductifs, questionnaires, mises au point dhistoire littraire ou culturelle, par exemple. Il sagissait dapprcier le questionnement didactique et les contenus scientifiques accompagnant des supports littraires ou grammaticaux.

    La nouvelle preuve dASP est dfinie par un arrt du 19 avril 2013 publi au Journal officiel du 27 avril 20132 :

    Lpreuve consiste laborer, pour un niveau donn, un projet de squence denseignement assorti du dveloppement dune sance de cours, partir dun dossier propos par le jury et compos dun ou de plusieurs textes littraires ou de documents divers (reproductions duvres dart, travaux de mises en scne, extraits de films, documents pour la classe, articles....). Cette proposition du candidat sert de point de dpart un entretien danalyse de situation professionnelle.

    Le rapport de jury de la session 2014 exceptionnelle souligne la parent vidente entre les deux preuves :

    Lenjeu de lenseignement des lettres dans le secondaire, en termes de contenus disciplinaires, de rflexion pdagogique et didactique, restera au cur de lanalyse dune situation professionnelle. On attendra toujours de la part des candidats une volont de manifester des aptitudes lexercice dun art de la parole, permettant dvaluer des capacits danalyse, de synthse, de rigueur, allies une clart de lexpression et des qualits certaines de communication 3.

    1 Nous tenons les remercier, ainsi que leurs Prsident(e)s pour labondante documentation quils nous ont fournie. 2 Consultable sur www.legifrance.gouv.fr : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027361553&dateTexte=&categorieLien=id Cest cet arrt que nous renvoyons ensuite. 3 Rapport prsent par Philippe Bastard-Rosset. Tous les rapports du jury voqus sont disponibles en ligne :http://www.education.gouv.fr/cid4927/sujets-des-epreuves-d-admissibilite-et-rapports-des-jurys.html

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  • Ainsi, lon observe que, si les supports et les modalits ont volu en profondeur, les finalits restent les mmes que pour lancienne preuve sur dossier. La lecture des rapports de jury des annes antrieures est donc toujours conseille et les candidats les plus aviss sauront en faire leur miel.

    Le jury prsente maintenant des dossiers comprenant essentiellement des textes littraires dpourvus autant que possible de tout appareillage didactique. Les chapeaux introductifs et les notes ont t conservs seulement sils taient jugs indispensables lexploitation des textes, ce qui a t trs rare.

    Ce changement de supports change-t-il en profondeur la nature de lpreuve ? Au terme de cette premire session, la rponse est clairement oui. Le rapport entre le candidat et le texte littraire est plus direct : cela permet aux bons candidats de faire la dmonstration de leurs qualits danalyse et de leurs savoirs littraires et culturels (ce quils prouvaient dj dans lpreuve sur dossier), mais cest aussi une preuve discriminante pour ceux qui ont peu lu et qui nont pas frquent assez profondment les uvres littraires.

    Les dossiers comprennent plusieurs textes qui forment un corpus (sur cette notion, voir infra II. b). Les plus belles pages de la Littrature franaise ont t proposes, cest--dire celles qui appartiennent au patrimoine et qui sont rputes connues des candidats au concours. Ces derniers doivent donc matriser les textes dauteurs comme Corneille, Racine, La Fontaine, Diderot, Voltaire, Hugo, Baudelaire, Flaubert ou encore Proust, pour ne citer queux, revenus plusieurs fois dans les dossiers. Le jury attend galement une ouverture la cration littraire contemporaine et le candidat doit par consquent tre attentif lactualit culturelle. On ne saurait alors tre tonn davoir lire dans un corpus un texte de Michel Vinaver, Jean Echenoz ou Marie NDiaye.

    b. Le droulement de lpreuve Les modalits de passage de lpreuve dASP sont fixes par larrt publi au Journal

    officiel. Les candidats disposent de trois heures de prparation pour une preuve qui dure une heure face au jury et dont le coefficient est 2.

    Le candidat reoit un dossier avec une page initiale qui rpertorie les textes et les documents complmentaires proposs, ainsi que le libell dun sujet qui cerne le cadre didactique de leur exploitation (un niveau denseignement et un objet dtude). Les autres pages reproduisent textes et documents. Il est prcis sur la page initiale quils peuvent tre annots.

    ANALYSE DUNE SITUATION PROFESSIONNELLE : LITTERATURE ET LANGUE FRANAISES

    Nom et prnom du candidat : Commission n

    1) Documents analyser (ces documents peuvent tre annots) : Textes : Texte%1%%Denis%Diderot,%Jacques(le(fataliste(et(son(matre,%1796%(publication%posthume)%Texte 2 Marguerite Duras, LAmour, 1971 Texte 3 Sylvie Germain, Magnus, 2005 Texte%4%%Eric%Chevillard,%Dino(Egger,%2011%%2)%Documents%complmentaires%:%Document%1%%Francis%Bacon,%Autoportrait,%1973%Document%2%%Alain%RobbeJGrillet,%Pour(un(nouveau(roman,%1963%

    Le Signature du candidat :

    Sujet : Dans le cadre de lenseignement du franais en classe de premire et plus particulirement de lobjet dtude Le personnage de roman, du XVIIe sicle nos jours , vous analyserez le corpus propos. Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun projet de squence assorti du dveloppement dune sance de cours. Cette squence comportera obligatoirement une sance dtude de la langue.

    Exemple de page initiale

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  • Loral a lieu devant un jury compos de deux personnes, enseignants du secondaire ou

    du suprieur, inspecteurs dacadmie-inspecteurs pdagogiques rgionaux. Les oraux des concours sont publics : les candidats ne doivent pas tre tonns, le cas chant, de la prsence dun auditeur.

    Lexpos est de trente minutes, de mme que lentretien. Les deux temps de lpreuve sont spars par un court moment pendant lequel le candidat sort de la salle, ce qui permet au jury une premire dlibration.

    Pendant la phase dexpos, le candidat doit parler sans tenter dinterpeller le jury, de le prendre tmoin ou de dialoguer avec lui. Les rles nont pas tre inverss : le jury na pas rpondre dventuelles questions du candidat, que ce soit pendant lexpos ou pendant lentretien.

    c. Notation des prestations

    Comme lors des sessions prcdentes, le jury a t amen utiliser tout lventail des notes sa disposition. En effet, il nhsite pas attribuer les notes maximales aux prestations qui prsentent une lecture littraire efficace se traduisant par une proposition de squence judicieuse. Ce type de cas nest pas rare. Au contraire, les notes les plus faibles sanctionnent un manque de connaissances et/ou une squence didactique insuffisante au regard du corpus propos. Tous les ans, des candidats se prsentent une nouvelle fois au concours aprs une premire tentative infructueuse. Ils reviennent mieux arms, mieux forms. Le succs est alors dautant plus mritoire que lon a su dpasser un chec, se remettre en question et repartir de lavant.

    Face des exposs dcevants, les commissions ont toujours mis profit les temps dentretien pour amener les candidats formuler les lments manquants, permettant souvent in fine lattribution dune note correcte. Certains candidats se sont parfois enferrs dans des considrations pdagogiques gnrales au dtriment de lapprciation dlments littraires et de lapproche didactique des textes ou ont formul des contresens fcheux : il leur a toujours t propos un temps de reprise permettant de se remettre en capacit danalyser littrairement le corpus et les documents proposs et de faire la dmonstration de leurs connaissances et comptences. II. Les dossiers proposs pendant la session 2014

    a. Une perspective dominante comparatiste Les dossiers comprennent deux types de supports (Cf. exemple reproduit supra) : dune

    part, des textes , dautre part, des documents complmentaires . Les deux nont pas le mme statut. Le jury attend une exploitation optimale des textes dans le cadre dune squence didactique, alors que les documents complmentaires , plus varis dans leurs formes, doivent connatre des exploitations diffrentes (Cf. infra II. b).

    Lobservation des dossiers proposs cette anne amne plusieurs constatations : - Les dossiers se rpartissent de faon peu prs quitable entre le collge et le lyce. - Tous les niveaux sont exploits, de la classe de sixime celle de premire, y compris

    les objets dtude spcifiques la premire littraire. - Une trs large majorit des dossiers comportait quatre textes, quelques-uns trois

    seulement ou cinq. - Les documents complmentaires sont le plus souvent au nombre de deux. Un

    document iconographique est presque systmatiquement propos. Ces lments rappellent que les candidats doivent se prparer proposer une squence

    didactique pour chacun des niveaux denseignement possibles du secondaire. Aucun nest cart.

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  • La nature mme des dossiers proposs cette anne permet de dfinir lpreuve dASP-LLF comme une preuve dimension comparatiste. Il sagit bien de saisir la Littrature dans le cadre du dialogue quelle suscite entre les auteurs, les uvres et avec dautres formes artistiques. La prsence significative de reproductions picturales, mais aussi dautres types diconographies, nest pas un prtexte une sance d Histoire des Arts , comme le jury la trop souvent entendu. Il sagit au contraire de donner loccasion au candidat de montrer quil est capable dveiller et denrichir la conscience esthtique de ses futurs lves. Les documents complmentaires ne sont pas de simples illustrations, lies aux programmes par un effet de mode, mais bien des lments part entire de la problmatique construire.

    Le corpus suivant, qui a donn lieu des prestations convaincantes, peut illustrer notre propos :

    ANALYSE DUNE SITUATION PROFESSIONNELLE :

    LITTERATURE ET LANGUE FRANAISES Nom et prnom du candidat : Commission n

    1) Documents analyser (ces documents peuvent tre annots) : Textes : Texte%1%%Homre,%LIliade,%chant%I%(extrait),%texte%adapt%par%Martine%Laffon,%ditions%Hatier,%collection%%Classiques%et%Cie%,%2013%Texte 2 Homre, LIliade, chant VI (extrait), texte traduit par Mario Meunier, Albin Michel, 1956 Texte%3%%Homre,%LIliade,%chant%XXII,%texte%adapt%par%Martine%Laffon,%ditions%Hatier,%collection%%Classiques%et%Cie%,%2013%Texte%4%%Rabelais,%Gargantua,%chapitre%44,%dition%Guy%Demerson,%ditions%du%Seuil,%1973%Texte%5%%Paul%Scarron,%Le(Virgile(travesti,%II%(extrait),%1653%%2)%Documents%complmentaires%:%Document%1%%Affiches%des%films%Troie%de%Wolfgang%Petersen%(GrandeJBretagne,%2004)%et%Hlne(de(Troie%(version%italienne)%de%Robert%Wise%(tatsJUnis,%1956)%Document%2%%Extrait%de%lappareil%pdagogique%du%volume%consacr%%LIliade%dans%la%collection%%Classiques%et%Cie%,%ditions%Hatier,%2013%

    Le Signature du candidat :

    Sujet : Dans le cadre de lenseignement du franais en classe de sixime et plus particulirement de lobjet dtude Textes de lAntiquit , vous analyserez le corpus propos. Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun projet de squence assorti du dveloppement dune sance de cours. Cette squence comportera obligatoirement une sance dtude de la langue.

    Le dossier propos prsente un ensemble vari : textes littraires adapts, traduits4, mais

    aussi affiches de films. Le matriau ncessaire la construction dune squence stimulante pour les lves de sixime et permettant lapproche dynamique des textes antiques se trouve mis disposition des candidats, pour peu quils disposent de connaissances relativement assures sur L'Iliade, au centre du dossier, prennent en compte lensemble des documents et partent d'une lecture attentive des textes. Il sagissait dviter les clichs et de montrer comment se dgageait dans ce dossier une reprsentation nuance des hros de l'pope.

    Des dossiers portant sur un seul auteur ou sur une seule uvre peuvent tre proposs, mme sils demeurent quantitativement la marge des dossiers entrecroisant uvres et auteurs. Voici un exemple, soumis la sagacit des candidats pendant cette session :

    4 Les textes, mme extraits dditions scolaires, sont remis en forme par le jury. Aucun nest propos sous la forme dune photocopie dans son dition dorigine.

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  • ANALYSE DUNE SITUATION PROFESSIONNELLE : LITTERATURE ET LANGUE FRANAISES

    Nom et prnom du candidat : Commission n

    1) Documents analyser (ces documents peuvent tre annots) : Textes : Texte%1%%Victor%Hugo,%Les(Misrables,%premire%partie,%livre%deuxime,%chapitre%III,%1862%Texte 2 Victor Hugo, Les Misrables, premire partie, livre huitime, chapitre IV, 1862 Texte 3 Victor Hugo, Les Misrables, cinquime partie, livre quatrime, chapitre I, 1862 %2)%Documents%complmentaires%:%Document%1%%Victor%Hugo,%Discours((lAssemble(Nationale(Lgislative,%9%juillet%1849%Document%2%%Eugne%Delacroix,%La(Libert(guidant(le(peuple,%1830%%

    Le Signature du candidat :

    Sujet : Dans le cadre de lenseignement du franais en classe de quatrime et plus particulirement de lobjet dtude Le rcit au XIXe sicle , vous analyserez le corpus propos. Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun projet de squence assorti du dveloppement dune sance de cours. Cette squence comportera obligatoirement une sance dtude de la langue.

    Pour un dossier de ce type, le jury nattend pas du candidat des connaissances littraires

    exhaustives sur Victor Hugo ou sur le roman dont sont extraits les textes, qui doivent tre exploits dans loptique de lobjet dtude de la classe de quatrime : Le rcit au XIXe sicle . Les questions se poser sont donc les suivantes : pourquoi le choix de Hugo, quapporte cet auteur au genre tudi pendant la squence et pour ce niveau denseignement ? quelles caractristiques du rcit le roman met-il en place travers les extraits choisis ? Quels sont les liens, les chos entre les textes et quels apprentissages ce corpus permet avec les lves ?

    b. Des textes au corpus

    Le matriau fourni par le jury, concepteur du dossier, constitue ce que lon appelle un corpus . Il faut bien le comprendre pour envisager la phase de problmatisation (Cf. infra III. a).

    Les textes Les textes proposs doivent tre tout dabord envisags pour eux-mmes. Aucun nest

    un prtexte illustrer une notion, quelle quelle soit. Ainsi, l tiquetage trop rapide toujours trop commode est un pige car il rduit et empche la rflexion. Il faut donc accueillir chaque texte dans sa singularit et avec tonnement. On vitera tout prix de tomber dans la caricature, le raccourci ou lanachronisme : Hugo ne serait que lyrique et romantique , Corneille classique , Baudelaire le chantre de la Modernit , Voltaire le dfenseur des Droits de lHomme , etc. Toutes ces notions sont problmatiques et mritent dtre interroges5. Nombre dentre elles sont assez fragiles lpreuve de textes et de la complexit des parcours artistiques. En tout tat de cause, le candidat doit tre en capacit de prouver ce quil avance par des exemples et lappui de rfrences savantes ou critiques.

    Il convient donc de procder dans lordre : dabord recueillir avec la plus grande ouverture intellectuelle possible le sens et les enjeux de chaque texte sans grille de lecture prtablie pour, dans un second temps, instaurer un dialogue entre tous les lments du dossier, en sappuyant sur des notions choisies et matrises.

    5 Pour une premire approche : Yves Stalloni, coles et courants littraires, Armand Colin, 2009 (2nde dition). A complter par des ouvrages plus spcialiss ensuite.

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  • Les documents complmentaires Souvent, il sagit de documents iconographiques : reproductions de tableaux,

    photographies, notamment de mises en scne, planches de bande-dessine, dessins de presse. Les textes critiques sont aussi souvent convoqus, en particulier lorsquils sont rdigs

    par des crivains. La plupart du temps, il sagit de textes critiques utilisables avec les lves. Il est aussi arriv que des textes hors cadre chronologique ou ressortissant dun autre objet dtude soient proposs, ou encore des pages de Littrature trangre en traduction.

    Le corpus Les dossiers proposs sont donc le plus souvent une invitation lchange. Prenant acte

    de ce quest devenu le champ littraire au XXe sicle, lpreuve dASP-LLF est conue pour proposer aux lves des confrontations, des dialogues. Cest ici que se justifie la notion de corpus : les documents ont t runis par le concepteur parce quils ont des enjeux et des vises communes et cest au candidat de les mettre au jour, ce qui lui permettra de formuler une problmatique. Aucun texte na t choisi par hasard et cest la lecture la plus fine qui va permettre den dcouvrir peu peu les raisons. Mais que lon ne sy trompe pas : il nexiste pas une seule problmatique quil sagirait de trouver . Le jury est ouvert tous les choix que le candidat peut motiver de faon convaincante.

    Voici un exemple de dossier qui a permis un candidat de mettre au jour un dialogue fructueux entre les formes littraires et artistiques proposes :

    ANALYSE DUNE SITUATION PROFESSIONNELLE :

    LITTERATURE ET LANGUE FRANAISES Nom et prnom du candidat : Commission n

    1) Documents analyser (ces documents peuvent tre annots) : Textes : Texte%1%%Jean%de%La%Fontaine,%%Le%Loup%et%le%Chien%,%Fables,(1668%Texte%2%%Denis%Diderot,%%Autorit%politique%,%LEncyclopdie,%1751%Texte%3%%mile%Zola,%Germinal,%1885%%2)%Document%complmentaire%:%Document%1%%JacquesJLouis%David,%Le(Serment(du(jeu(de(Paume,%1791%

    Le Signature du candidat :

    Sujet : Dans le cadre de lenseignement du franais en classe de premire et plus particulirement de lobjet dtude La question de lHomme dans les genres de largumentation, du XVIe sicle nos jours , vous analyserez le corpus propos. Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun projet de squence assorti du dveloppement dune sance de cours. Cette squence comportera obligatoirement une sance dtude de la langue.

    Lexpos a montr avec efficacit dans sa phase initiale de prsentation que les trois

    textes proposs prsentaient une unit thmatique puisquils abordaient les questions de justice et de pouvoir . Pour autant, le corpus est marqu par des diffrences gnriques : deux fictions dialoguent avec une page dencyclopdie. Le candidat est ensuite parvenu replacer chacun des textes dans son contexte historique et littraire afin den prciser les enjeux en termes argumentatifs, puis didactiques dans la perspective dune approche en classe. Le tableau de Jacques-Louis David a fait lobjet dune exploitation judicieuse partir de la question de la reprsentation de la dfense des droits. Lexpos a donc montr au jury que les enjeux propres chaque texte avaient t perus et que le candidat stait vraiment attach faire dialoguer toutes les uvres.

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  • III. Ce que le jury value pendant cette preuve

    Pour commencer, rappelons les attentes fixes pour cette preuve dASP par larrt publi au Journal officiel :

    Lpreuve danalyse dune situation professionnelle vrifie la capacit des candidats : - analyser ces textes ou ces documents et faire preuve desprit critique ; - inscrire lensemble des textes et documents dans une dmarche dapprentissage en relation avec les programmes et proposer de manire prcise et rflchie la mise en uvre dune sance dans une classe ; - mobiliser, un premier niveau de matrise, les procds didactiques courants mis en uvre dans un contexte professionnel rel, procds susceptibles notamment de favoriser lintrt et lactivit propre des lves, au service des apprentissages, - se projeter dans lexercice du futur mtier, - communiquer loral de manire claire et organise.

    Comme la prcdente preuve sur dossier, il sagit de vrifier la capacit d'un candidat transposer les savoirs qu'il a pu acqurir durant ses annes d'tude en savoirs enseigns. Le candidat doit tre capable de ngocier la transition entre l'tudiant qu'il a t et le professeur qu'il entend tre deux mois plus tard.

    L'preuve est un travail de construction : construction d'une squence d'enseignement aussi cohrente que possible partir du matriau textuel propos. Ce matriau, le dossier soumis au candidat, est constitu selon des genres, des mouvements littraires, des poques, des formes de discours, des registres ou des tonalits varis. L'preuve prend donc appui avant tout sur une lecture attentive et une confrontation rflchie des textes et des documents complmentaires.

    Il s'agit finalement de vrifier des capacits de lecture et de procder un travail de comparaison et de synthse : comparaison des textes, dgagement d'axes d'tude. Dans un mme mouvement, le candidat doit mettre au jour les lments qui, dans les textes, pourront devenir matires d'enseignement. Les textes, les documents et leur tude permettent alors de construire des connaissances et des comptences chez les lves.

    a. Des savoirs pour mener une lecture littraire

    La lecture est donc fondamentale pour lpreuve dASP-LLF. Elle amne le candidat mobiliser des savoirs prcis sur la discipline quil entend transmettre aux lves. Il ne semble pas inutile de rappeler ici quelques lments importants, sans ambition dexhaustivit6.

    Entendons-nous tout dabord sur ce quest un texte . Ce pralable a son importance. Si le candidat na pas encore eu loccasion de le faire pendant ses annes dtudes, il est urgent quil frquente quelques auteurs qui ont examin la question. La pense de Roland Barthes7, les essais de Grard Genette, Jean Rousset8, Jean Starobinski9 ou encore les textes critiques dcrivains comme Jean-Paul Sartre et Paul Valry sont trs enrichissants. Les travaux de Vincent Jouve sur la lecture permettront davoir un point de vue synthtique10. Luniversitaire Pierre Bayard renouvelle aussi profondment la critique en employant des

    6 Nous donnons ici quelques rfrences qui nont aucunement vocation de se substituer aux bibliographies beaucoup plus compltes fournies par les prparations universitaires. 7 En particulier Le Plaisir du texte, Seuil, 1973 et Le Bruissement de la langue. Essais critiques IV, Seuil, 1984. 8 Forme et signification, Jos Corti, 1962. 9 LOeil vivant II : la relation critique, Gallimard 1970, rdit dans la collection Tel en 1999. 10 La Lecture, Hachette, 1993.

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  • mthodes nouvelles et rjouissantes11. Pour ce qui est de lcriture, Le Degr zro de lcriture, du mme Barthes (Seuil, 1953) et En lisant en crivant, de Julien Gracq (Jos Corti, 1980) semblent indispensables. Ces essais et ces textes critiques permettent, en amont de la lecture littraire, de savoir un peu mieux de quoi lon parle. On peut aussi, si lon en a le loisir, sinterroger sur la place du livre et de la lecture dans notre socit. Si le candidat manque de temps pour prendre connaissance des mises au point savantes fondamentales de Roger Chartier, il pourra toujours lire le texte quil a prononc loccasion de sa leon inaugurale au Collge de France : couter les morts avec les yeux (Fayard, 2008).

    Pour ce qui est de la la lecture littraire , un premier travail consiste matriser les savoirs savants qui la fondent. Ainsi, pour le roman, on pense aux catgories narratives les plus courantes : instance narrative (point de vue et focalisation), distinction auteur-narrateur-personnage, modalits du discours rapport, construction du personnage, temporalit12. Pour la posie, la matrise technique de la mtrique et de la prosodie est indispensable13. On attend aussi du candidat quil puisse dfinir assez finement le lyrisme : il pourra consulter les travaux de Dominique Rabat14 et Jean-Michel Maulpoix15. Le thtre doit faire lobjet dune approche adapte, en cohrence avec la complexit de sa situation de communication et sa dimension scnique. La lecture des ouvrages de Anne Ubersfeld16 est tout fait indispensable. Les travaux de Pierre Larthomas sont galement prcieux17. Enfin, il est trs utile de se pencher particulirement sur les textes dargumentation directe (notamment les prfaces auctoriales), plus particulirement sur ceux des XVIIe et XVIIIe sicles qui sont tudis plusieurs niveaux en collge et lyce. La question de lart oratoire mrite dtre connue18.

    Les exposs qui ont obtenu les notes les plus basses conjuguent les erreurs sur le sens littral des textes et un manque criant de connaissances thoriques fondamentales. Prenons un exemple : un corpus propos des lves de premire dans le cadre de lobjet dtude La question de lHomme dans les genres de largumentation, du XVIe sicle nos jours comprenait un extrait dun essai de Montaigne, une fable de La Fontaine et un passage du Dernier jour dun condamn de Victor Hugo. Le candidat a rapidement t mise en difficult en parlant de textes dargumentation et en voulant tout prix les tiqueter comme textes engags . Les genres et formes de largumentation sont ici mal matriss : lessai est mal connu et mal dfini, le texte de Hugo est prsent comme autobiographique (!) et non comme une fiction.

    Les savoirs savants voqus permettent donc au lecteur expert de passer du sens littral son interprtation. Ltape initiale de comprhension simple est indispensable ne serait-ce que pour viter un contresens mais elle nest pas suffisante. On attend dun professeur de Lettres quil mette au jour les subtilits des textes, quil mobilise une culture

    11 On pense notamment Comment parler des livres que lon na pas lus, ditions de Minuit, 2007 et Comment amliorer les uvres rates, ditions de Minuit, 2000. 12 Pour une mise au point efficace et rapide, on pourra se reporter aux ouvrages de Vincent Jouve, en particulier La Potique du roman, Armand Colin, 2010 (3e dition). 13 A toutes fins utiles, on reprendra avec profit La Versification applique aux textes, coll. 128 , Nathan Universit, 1993 (3e dition : 2010, Armand Colin) de Michle Aquien.

    14 Dominique Rabat (dir.), Figures du sujet lyrique, Presses Universitaires de France, 2001 (2nde dition) et Gestes lyriques, Jos Corti, 2013.

    15 Jean-Michel Maulpoix, Du Lyrisme, Jos Corti, 2000 et Le lyrisme, histoires, formes et thmes , Site Jean-Michel Maulpoix & Cie, http://www.maulpoix.net/lelyrisme.htm 16 Les trois tomes Lire le thtre publis chez Belin Sup en 1996. 17 Le Langage dramatique, Presses Universitaires de France, 2012 (3e dition). 18 Pour commencer, Michel Meyer, Questions de rhtorique. Langage, raison et sduction, Le Livre de poche, 1993 et Cham Perelman, L'Empire rhtorique. Rhtorique et argumentation, Vrin, 2000.

    184

  • littraire, mythologique et religieuse lui permettant de comprendre les intertextes et linscription de luvre dans la Littrature. partir de cette lecture experte, le candidat pourra entrer dans la phase de problmatisation du corpus (dveloppe infra IV. a).

    b. Une transposition didactique La connaissance des Instructions officielles du collge et du lyce est un pralable

    indispensable19. On ne construit pas une squence sur la posie en classe de cinquime sans savoir prcisment quels sont les contenus attendus pour ce niveau denseignement ni ce qui a t tudi en amont en classe de sixime, voire ce qui est envisag en quatrime. Il en est de mme au lyce, o chaque objet dtude de seconde inaugure celui de premire qui le contient. Ainsi, la posie en seconde, du Romantisme au Surralisme prfigure Posie et qute du sens du Moyen-ge nos jours en premire. Les programmes sont donc lire dans leur continuit. Le candidat doit tre capable de situer une squence dans tout un processus dapprentissage pour les lves.

    Par ailleurs, lpreuve est bien une preuve de didactique. Rappelons lutile distinction formule par le rapport de lpreuve sur dossier de 2003 prsent par Jeanne-Antide Huynh et Yves Maubant :

    La didactique sattache aux savoirs, leur transmission et la rflexion sur cette transmission. Elle se distingue de la pdagogie qui concerne la mise en uvre effective de ces savoirs dans une classe et les moyens adopts, en situation, pour rendre la transmission des savoirs efficace et active. 20

    Le jury attend donc que le candidat mobilise des connaissances fondamentales qui lui permettront de travailler ds le mois de septembre suivant, mme sil ne sagit pas de prsenter en trente minutes un ensemble exhaustif - ce qui est de toute faon impossible.

    La question de la lecture scolaire pourra tre approfondie grce deux textes crits assez rcemment par lInspection gnrale de Lettres et disponibles en ligne. Pour commencer, Patrick Laudet, Inspecteur gnral de Lettres, offre avec Explication de texte littraire, un exercice revivifier 21 une rflexion fconde sur la place de lexplication de textes en classe et sur les moyens de passer de la comprhension littrale la comprhension littraire 22. On mditera en particulier les conseils quil donne aux enseignants la fin de sa communication. Anne Vibert, galement Inspectrice gnrale de Lettres, a aussi crit un texte ncessaire : Faire place au sujet lecteur en classe : quelles voies pour renouveler les approches de la lecture analytique au collge et au lyce ? 23. Ces deux lectures sont vivement recommandes.

    19 On retrouvera lensemble des programmes sur le site duscol : http://eduscol.education.fr Une connaissance de premire main est exige. 20 Accessible en ligne. Pour aller plus loin, on consultera avec profit des ouvrages universitaires. Parmi les plus rcents : Jean-Maurice Rosier, La Didactique du franais, Presses Universitaires de France, coll. Que sais-je ? , 2002 ; Jean-Louis Chiss, Jacques David, Yves Reuter, Didactique du franais, Fondements dune discipline, De Boeck, 2008, le numro 137-138 de la revue Pratiques : La didactique du franais , 2008. 21 Dat de 2011 : http://media.eduscol.education.fr/file/Francais/09/5/LyceeGT_Ressources_Francais_Explication_Laudet_182095.pdf 22 Sur cette notion de lecture littraire , deux ouvrages sont connatre : Jean-Louis Dufays, Louis Gemenne et Dominique Ledur, Pour une lecture littraire, De Boeck, 2005 (2nde dition) et Sylviane Ahr (dir.), Vers un enseignement de la lecture littraire au lyce. Exprimentations et rflexions, Scren/CRDP de Grenoble, 2013. 23 Dat de 2011 galement : http://eduscol.education.fr/lettres/im_pdflettres/intervention-anne-vibert-lecture-vf-20-11-13.pdf

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  • IV. La prestation a. Lexpos et ses deux temps

    Dune dure de trente minutes au maximum, lexpos compte deux temps : une phase didentification, puis une autre dapplication. Cest lorganisation qui a t le plus souvent suivie par les candidats et elle est en effet la plus convaincante. Dautres approches sont nanmoins envisageables.

    Une phase didentification Pour commencer, le candidat doit donc identifier les textes et les documents qui lui ont

    t proposs. Il ne sagit aucunement de relire la page initiale du dossier et de paraphraser les lments qui ont t mis sa disposition. Il doit au contraire montrer quil a saisi les enjeux littraires, culturels et esthtiques de chacun des textes et, simultanment, quil sait reprer les liens qui unissent les uvres convoques, bien conscient quil travaille un corpus. Ces liens peuvent tre de diffrents ordres : thmatiques, chronologiques, gnriques, formels ou esthtiques. Le brassage des angles dapproche les plus pertinents permet dinstaurer un dialogue. On vite ainsi l effet-catalogue , qui montre que lon est en pleine paraphrase.

    Le candidat doit formuler une problmatique littraire. Cest une exigence rappele par toutes les commissions. Cela ne se traduit en rien par une avalanche de questions qui masquent trop souvent maladroitement une difficult du candidat saisir les vritables enjeux du corpus. Au contraire, la problmatique est une question simple qui part, pour reprendre les termes dun prcdent rapport de jury, dun tonnement qui guidera ltude avec les lves, et dont on attend une traduction en termes didactiques. Cest une ouverture, alors que les questions qui senchanent ferment la rflexion.

    Il nest pas attendu, comme le jury a souvent pu le constater, de formuler imprativement (et surtout artificiellement) deux problmatiques, lune littraire et lautre didactique . Cest videmment possible, mais il faut encore savoir quoi sen tenir et les quelques tentatives qui nous ont t soumises cette anne nont pas vraiment convaincu. Une seule question, simple et efficace, doit pouvoir tre propose une classe pour le niveau donn.

    Par exemple, partir dun corpus consacr au personnage de roman en classe de premire et regroupant des textes de Madame de La Fayette, Balzac, Marguerite Duras et Michel Houellebecq, un candidat sest demand comment la construction et la dconstruction du personnage romanesque pouvaient reflter lvolution du roman et de la socit.

    Prenons un autre exemple : partir dun corpus consacr au rcit denfance en classe de troisime, comprenant des textes dHerv Bazin, Albert Cohen et Romain Gary (document complmentaire : un dessin de presse de Sergue), un candidat a identifi les diffrences formelles, et plus prcisment nonciatives entre les trois uvres, mais aussi les points communs qui relvent de lcriture autobiographique, convoquant discrtement et habilement les travaux de Philippe Lejeune. Au terme de la phase didentification, une problmatique tout fait fconde sur le plan littraire et ancre dans les textes tait construite : crire sa vie, est-ce finalement se dconstruire pour se reconstruire ?

    On peut imaginer galement que la problmatique ne soit pas donne au dbut de lexpos et que les textes ne soient pas identifis demble. Il sagit alors de le faire au fur et mesure de la squence. Cette option, plus complexe mettre en uvre, a peu t suivie par les candidats, mais elle est tout fait recevable.

    Une phase dapplication Une fois les enjeux littraires poss, on peut passer lorganisation des apprentissages

    avec les lves. Rappelons prcisment ce que dit larrt pour lpreuve dASP-LLF :

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  • Le candidat construit une squence d'enseignement partir d'un corpus choisi en rfrence aux entres des programmes et comportant un texte littraire long ou plusieurs textes littraires, ventuellement accompagns de documents. Un temps consacr l'tude de la langue est obligatoirement compris dans cette squence.

    La squence denseignement propose sappuie sur les textes et les documents complmentaires proposs par le jury. Cette vidence mrite dtre rappele : de trop nombreux candidats se sont crus obligs de multiplier les allusions des uvres ne figurant pas dans le dossier qui leur avait t fourni, au mpris de ltude lgitime des textes proposs. Cest une stratgie de fuite qui ne trompe personne et qui est dmasque lorsque le jury demande pendant lentretien quels seraient prcisment les extraits en question.

    Les documents complmentaires peuvent trouver deux exploitations qui ne sexcluent pas lune lautre. Ils peuvent tre abords avec les lves, mais alors le jury nen attend pas une exploitation aussi dtaille que celles des textes. Ils peuvent aussi aider la construction de la problmatique littraire. En tout tat de cause, le candidat ne saurait les ignorer. Il serait aussi maladroit de les exploiter dans le cadre de la sance dveloppe. Finalement, on attend surtout une mise en relation avec les textes du corpus : document dappui pour entrer dans la rflexion et problmatiser avec les lves, comme lecture complmentaire, en bilan de squence, comme support dune valuation mais la liste nest pas exhaustive.

    On part donc des textes pour en organiser ltude. Rien nest attendu tout prix par le jury : pour cette partie de lexercice comme dans sa future pratique professionnelle, le candidat peut faire le meilleur usage de sa libert pdagogique , inscrite dans les programmes et issue de la Loi dOrientation de 2005. Toujours est-il quil faut bien que cette squence propose un parcours qui permette aux lves dapprendre quelque chose. Cette anne, deux travers ont attir lattention du jury : dune part, lmiettement des sances, dautre part, les considrations pdagogiques prdominantes, qui ne sont rien dautre, l aussi, quune nouvelle stratgie dvitement. Lmiettement trahit en ralit un manque de vision densemble de la squence : quels objectifs littraires, culturels et didactiques poursuit-on si on les multiplie lenvi ? Le discours pdagogique est aussi une stratgie qui montre tout aussi grossirement que lon ne va pas tudier le corpus : mettre les lves en groupes, se dplacer au CDI, crire en bleu, faire un tableau, une carte heuristique, des sances en salle multimdia etc. sont autant de questions que lon peut se poser, mais une fois seulement que lon a mis au jour les enjeux didactiques. On doute fort quun expos qui dure seulement trente minutes permette dentrer dans ces considrations. A cet gard, lutilisation dun jargon pdago-didactique, au demeurant mal matris, est le plus souvent un signal pour le jury : nous ne saurions trop conseiller aux candidats lemploi dun vocabulaire simple, vitant les expressions la mode qui traduisent de faon absconse ce qui pourrait tre expliqu avec clart.

    Le plus important, au fond, est le parcours imagin par le futur professeur entre les textes et les documents : comment commencer ? O veut-on en arriver ? Comment, et dans quelle vise articuler les sances ? Quels liens peut-on faire entre les diffrents textes et dans quel ordre les exploite-t-on ? Quauront fait et appris les lves pendant ce parcours ? Ce sont ces questions qui gouverneront la progression de la squence (et ce que lon peut appeler, si lon veut, la problmatique didactique qui double la problmatique littraire). Il nest pas, pour cela, utile de se perdre entre les valuations (formatives, sommatives, diagnostiques) et la multiplication des objectifs. En revanche, il est ncessaire de placer rapidement cette squence dans une progression annuelle, dvoquer les objectifs de sance, les acquis et les rinvestissements de sance en sance.

    Des temps de confrontation des textes, dans leur ensemble ou par extraits, de lectures analytiques, de synthse doivent permettre aux lves de travailler en profondeur les enjeux soulevs dans la phase didentification. Il nous semble alors aussi inutile, parce que le temps

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  • ne le permet pas, de multiplier les sances dhistoire littraire qui convoquent dautres textes que ceux du corpus ( nouveau : lesquels ?), de multiplier les sances liminaires techniques , fort maladroites galement.

    cet gard, la posie a particulirement t maltraite. Trop souvent, les candidats se sont crus obligs de proposer deux, trois, voire quatre sances liminaires avant daborder le premier texte avec les lves. Ainsi, propos dun dossier consacr linitiation la posie en classe de sixime et donc cens donner le got den lire aux lves un candidat a propos une premire sance pour apprendre reprer la qualit des rimes. La deuxime sance devenait un moment de travail sur lorganisation de la rime, le rythme et les accents, tandis que la troisime sance dsirait faire le tour des figures de style. Alors, seulement, le malheureux lve de sixime pourrait commencer lire un premier texte sil lui en reste lenvie. Cet exemple excessif nous permet de redire que lentre techniciste ne fonctionne pas. Elle na aucune chance damener llve goter vraiment un texte. Cest aussi une forme dinstrumentalisation de la Littrature. Une uvre littraire na jamais t crite pour illustrer telle ou telle notion littraire : Baudelaire na jamais compos un pome pour quil devienne un support pour la lecture analytique , ni une bonne occasion de rviser la mtaphore .

    Que lon sen tienne des principes de bon aloi : une squence suppose un dbut et une fin et cest cette fin qui doit guider la construction densemble. O veut-on amener les lves en fonction de la problmatique littraire choisie ? Que la logique chronologique, historique, esthtique ou autre prime, le plus important reste que le candidat ait conscience des choix quil a oprs et quil soit capable de les expliciter, voire de les nuancer pendant lexpos et lentretien.

    La sance dveloppe Le libell du sujet appelle explicitement le dveloppement particulier dune sance, que

    lon ne confondra pas avec lautre sance exige, celle dtude de la langue, intgre dans lexposition de la squence. Le jury attend alors une proposition de cours fonde sur la rsolution dune problmatique adapte, mais lie celle de lensemble de la squence. Lors de cette session, la sance dveloppe a t le plus souvent loccasion pour le candidat dapprofondir ltude dun texte en proposant une lecture analytique. Cela suppose un descriptif prcis de la sance : sa construction, ses tapes, les pistes danalyse et une tude rapide des procds marquants. Les connaissances savantes du candidat doivent tre manifestes et mises au service de linterprtation. Notons enfin que le jury nattend absolument pas une lecture haute voix du texte choisi comme support pour la sance dveloppe. Cette comptence, fondamentale, est value pendant lpreuve de Mise en situation professionnelle.

    Dautres types de sance peuvent tre conduits : travail sur la question de corpus, comme lcrit du baccalaurat, lecture compare, du texte limage ou inversement.

    ce moment aussi, il est inutile de s'attacher aux processus relevant des pratiques de classe et de la pdagogie : le document iconographique doit-il tre tudi sous forme de photocopie ? Projet en salle pupitre ? Travaill individuellement ? Par groupes ? Par groupes de quatre ? Par groupes de huit ? Ce qui importe avant tout est bien l'analyse elle-mme : que dit le document ? Quel est son intrt ? Finalement, sen tenir avant tout au corpus est un principe qui relve du sens pratique.

    Le candidat doit pouvoir in fine rpondre clairement une question centrale propos de cette sance en particulier : quont appris les lves en termes de savoirs littraires, linguistiques, en termes de comptences ? Comment un parcours de sens travers les textes leur permet-il daider construire leur vision du monde ?

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  • La sance de langue La sance dtude de la langue est un moment important de lexpos de la squence.

    Elle prend toujours appui sur un ou plusieurs textes du corpus ou sur des extraits. La notion choisie pour ltude doit permettre aux lves dobserver le fonctionnement de la langue, en lien avec le sens des textes, la squence et ses objectifs. Les oprations de reprage et les manipulations fondamentales doivent tre explicites pendant lexpos.

    Trop souvent, le jury a eu limpression dentendre la rcitation de fiches apprises par cur. La sance prend alors la forme simpliste dune leon. Trop frquentes, les sances sur lnonciation ne trompent personne : on peut toujours en faire une. Mais est-ce justifi ? Les lves ont-ils appris quelque chose qui leur permette de mieux lire les textes suivants ou ont-ils travaill un point de langue qui puisse tre rinvesti dans un travail dcriture ? Le candidat doit pouvoir rpondre cette question de lui-mme pendant lexpos.

    La sance de langue porte sur une notion choisie par les candidats eux-mmes. Il est donc important de prendre le temps ncessaire lors de la prparation pour slectionner une question pertinente au regard de la problmatique littraire choisie, mais aussi des connaissances grammaticales mobilisables24. De ce point de vue, on a trop souvent dplor des mconnaissances graves et des exposs indigents : les discours rapports notamment, frquemment convoqus, ont trs rarement t lobjet dune tude pertinente, les candidats confondant trop souvent monologue intrieur et discours narrativis, mode direct, indirect ou indirect libre. La sance de langue doit envisager une dmarche prcise qui allie relev et travail sur des occurrences, lecture et criture.

    Un choix judicieux peut tre rapport ici. propos dun corpus sur les Genres et formes de largumentation aux XVIIe et XVIIIe sicles , un candidat a propos ltude de la phrase complexe dans plusieurs extraits. Il a su montrer rapidement et aisment que les propositions subordonnes compltives taient porteuses du jugement et faisaient entendre dautres voix, quelles permettaient la prsence dautres tmoignages, de nouveaux interlocuteurs et donc quelles jouaient un rle majeur dans la porte argumentative des extraits.

    Pour conclure son expos, le candidat pourra donc faire le point sur les acquis des

    lves lissue de la squence, sappuyant sil le souhaite sur la rsolution de la problmatique et les grandes articulations de sa progression. Il est possible de proposer une ouverture sous la forme de lectures complmentaires ou de prolongements pour les lves.

    b. Lentretien

    Lentretien dure le mme temps que lexpos : trente minutes maximum. Il est conu comme un vritable dialogue qui permet au jury dvaluer plus profondment le candidat. Il peut comprendre plusieurs moments dont la dure varie en fonction de la prestation initiale.

    Une phase de reprise

    24 De nombreuses prestations ont mis au jour des connaissances trs approximatives, produisant un effet trs ngatif sur le jury. Les candidats seront pour beaucoup des professeurs de Franais en collge et ils devront enseigner leurs lves une langue vivante. Lactualisation des connaissances grammaticales, pour cette preuve comme pour lpreuve de Mise en situation professionnelle, est fondamentale. Il convient de choisir rapidement une grammaire de rfrence et de la frquenter quotidiennement. Nous ne pouvons que rpter les prconisations habituelles : Martin Riegel, Jean-Christophe Pellat, Ren Rioul, Grammaire mthodique du franais, Presses Universitaires de France, 2014 (5e dition) ; Dominique Maingueneau, Prcis de grammaire pour les concours, Paris, Bordas, 1991(4e dition : Armand Colin, 2010) et Delphine Denis et Anne Sancier-Chateau, Grammaire du franais, Le Livre de poche, 1994. Pour une approche plus didactique : Dominique Maingueneau, (en collab. avec Eric Pellet), Les notions grammaticales au collge et au lyce, Paris, Belin, 2005 et plus rcemment Gersende Plissonneau (dir.), Grammaires au lyce, Scren/CRDP de Grenoble, 2012.

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  • Pour commencer, l'entretien s'appuie sur lexpos du candidat : prcisions, approfondissements, justifications ou retour critique sont attendus. Souvent, il s'agit de revenir au corpus et sa constitution : pourquoi les textes ont-ils t rassembls ? En quoi se rapprochent-ils ? En quoi se distinguent-ils ?

    L'entretien conduit aussi revenir au sens littral ou linterprtation des textes ou des documents : corriger faux-sens et contresens, justifier une affirmation partir d'lments des textes, procder une analyse plus fouille d'un passage. Ce retour au plus prs des textes est opr, en particulier, dans le cas de la question de langue : relev d'occurrences, analyse de faits grammaticaux, examen de la pertinence du point de langue choisi.

    Le jury peut galement parfois vrifier certaines connaissances ou certaines ignorances dans le cas o celles-ci semblent de nature interdire une analyse srieuse du dossier. La phase de reprise permet galement de vrifier la culture littraire (historique parfois) du candidat. Certaines hsitations ne manquent pas dtonner, voire dinquiter. Les rapports des sessions 2013 et 2014 exceptionnelle 25 ont rappel quelques ouvrages fondamentaux, dans les domaines de la mythologie, de la religion ou encore de lhistoire.

    Le candidat a tout gagner tre ouvert aux questions poses, se montrer combatif : le jury ne cherche pas le mettre en difficult, mais voir dans quelle mesure il peut tre ractif et enrichir sa prestation initiale.

    Une phase douverture Ouverture littraire, artistique et culturelle

    Ensuite, le jury va prendre un moment pour ouvrir le champ de la rflexion. Cette ouverture peut tre littraire, selon les ides, les thmes et les rfrences appeles par le dossier et par lexpos du candidat. Elle porte aussi sur dautres domaines. Les documents complmentaires peuvent servir ce moment de point dappui. Des connaissances artistiques sont videmment ncessaires au futur professeur de Lettres. A cet gard, le manque de culture picturale des candidats a parfois tonn les membres du jury. Par exemple, des notions aussi courantes que celles de classicisme , romantisme , impressionnisme , naturalisme et symbolisme sont encore trs mal matriss.

    De faon plus gnrale, les candidats ne doivent pas stonner dtre interrogs sur dautres arts que la Littrature. Peut-on comprendre le ralisme en peinture sans avoir quelques rfrences littraires ? Au contraire, certains mouvements littraires et culturels ne sont-ils pas avant tout issus dautres formes artistiques que la Littrature ?

    En tout tat de cause, le jury sefforce de repartir de la problmatique choisie pour enrichir le propos. Les documents complmentaires, en particulier lorsquils reproduisent une uvre dart, sont souvent le point de dpart.

    Ouverture professionnelle

    Un moment spcifique est prvu dans la dfinition de lpreuve pour ouvrir la rflexion du futur professeur dautres problmatiques quil rencontrera dans sa pratique professionnelle quotidienne :

    Au cours de lentretien qui suit lexpos du candidat, la perspective danalyse de situation professionnelle dfinie par lpreuve est largie la capacit du candidat prendre en compte les acquis et les besoins des lves, se reprsenter la diversit des conditions dexercice de son mtier futur, en connatre de faon rflchie le contexte dans ses diffrentes dimensions (classe, quipe ducative, tablissement, institution scolaire, socit), et les valeurs qui le portent dont celles de la Rpublique. 26

    25 Disponibles en ligne. Voir adresse cite supra. 26 Arrt cit supra.

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  • Les questions poses par les diffrentes commissions relvent donc la plupart du temps de ce que lon pourrait appeler des tudes de cas , en fonction des propositions pdagogiques du candidats ou de la nature du dossier. En ce sens, cette dernire partie de lentretien est vraiment individualise. Cette phase de lpreuve orale reprend pour partie les attentes de lancienne preuve Agir en fonctionnaire de ltat et de faon thique et responsable, mais si les modalits en sont trs diffrentes, la principale tant que le jury ne propose plus de document-support27.

    Par exemple, propos dun dossier portant sur le texte dramaturgique, un candidat pourra tre amen rflchir lorganisation dune soire au thtre avec ses lves : du point de vue matriel, financier et des responsabilits juridiques en cas de problme. Une squence comprend la mise en ligne de textes sur un blog : le jury interroge alors sur le droit dauteur, le droit limage, les autorisations ncessaires. Aprs un corpus consacr lducation en classe de seconde, une question peut provoquer un change stimulant sur le rle de lenseignement du Franais et des Lettres dans notre socit.

    Les questions poses par les diffrentes commissions occupent quatre champs : la vie de llve, de ltablissement, les missions du professeur et la connaissance du systme ducatif.

    Le jury value la capacit du candidat se projeter dans le mtier denseignant, dans sa dimension institutionnelle et ducative en partant de sa proposition didactique. On dpasse alors la question de la transmission.

    c. Une posture juste adopter Tous les rapports du jury insistent sur limportance de la posture que le candidat doit

    adopter loral face la commission qui linterroge. Commenons par formuler une vidence : pour le jury, le candidat nest ni un collgue, ni un tudiant. Le jury cherche percevoir dans le candidat le futur professeur qui, deux mois plus tard, prendra en charge des lves quil aura le devoir de former littrairement, intellectuellement et thiquement.

    Le jury value la capacit du candidat communiquer. Celui-ci doit capter lattention des membres de la commission, ce qui se traduit par des gestes simples : ne pas lire son texte, regarder les deux membres de la commission qui coutent, parler distinctement et, pourquoi pas, sourire. La tension inhrente au concours engendre des attitudes inhabituelles, chacun en est conscient, mais il faut, lors dun oral, savoir se matriser pour convaincre. Les candidats les plus anxieux auront tout avantage rflchir bien en amont ce problme. Cela leur sera trs directement profitable au moment o il prendront leurs classes en charge.

    Plusieurs formules sont proscrire car elles sont inadaptes la situation de communication. Les circonlocutions comme ce nest sans doute pas ce que vous attendez , je ne sais pas si ce que je vais dire va vous convenir et toutes les formes de mtadiscours, en particulier pendant lexpos, sont des interventions pnibles et pnalisantes. On sait ou lon ne sait pas. Si lon ne sait pas, on peut mettre des hypothses, de bonne foi, essayer de se battre pour rpondre aux questions poses. Ce faisant, on fait comprendre au jury que dans dautres circonstances, avec tel ou tel usuel, on pourrait rsoudre le problme. Cest une attitude positive, souvent rcompense parce quelle est honnte.

    Les oraux du CAPES/CAFEP de Lettres sont un moment dattention particulire la langue utilise par le candidat. Le rapport de 201328 a fait une liste trs large des expressions fautives utilises : les futurs admissibles sy reporteront avec profit. La multiplication des ok et autres ouais agacent, pour ne pas dire plus, les membres du jury. Labrviation prof pour professeur est tout autant proscrire. Elle rappelle aux membres des 27 Les candidats pourront se reporter avec profit au rapport de la session 2014 exceptionnelle rdig par Vronique Joubert-Fouillade pour mieux comprendre les volutions entre les deux preuves. Il est disponible en ligne, adresse cite supra. 28 Rdig par Frdrique Cauchi-Bianchi, disponible en ligne, pages 100-101.

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  • commissions un film assez bas de gamme du milieu des annes 80 au lieu de valoriser le mtier auquel lon aspire.

    Il sagit dapprendre aux lves bien dire et bien crire : commenons par le professeur. Lexpos nest pas en soi un exercice nouveau : il est travaill tout au long du parcours universitaire, et mme en amont. Il faut matriser sa parole au moment o lon postule dans un mtier qui lui est pleinement consacr.

    Notons enfin quil est curieux que lon doive encore aborder la question de la tenue aux oraux dun concours de recrutement. Indniablement, certains font le choix de vtements rvlant une dcontraction qui dissone avec la solennit du moment et de la fonction espre. Le candidat na pas non plus forcer ses gots et porter pour la premire fois une tenue qui ne lui convient pas du tout. Il doit tre laise et lon peut simplement imaginer que dans sa garde-robe il possde un ensemble correct, neutre qui pourrait correspondre un futur professeur de Lettres. Cest tout ce que le jury sattend voir et quil ne verra dailleurs pas puisquil sera alors absorb par le propos et non par des dtails priphriques.

    V. Aux futurs candidats

    Pour finir, le jury souhaiterait formuler quelques conseils, de faon synthtique.

    a. Sentraner en temps rel On ne peut pas dcouvrir le jour mme les modalits de lpreuve, quand bien mme

    elles sont nouvelles en termes de session. Stre prpar du point de vue des connaissances est videmment indispensable, mais cest dautant plus profitable que lon aura pris en compte toutes les dimensions : temps imparti, qualit de la langue, capacit communiquer de manire adapte avec le jury, posture et tenue vestimentaire. Les colles et oraux blancs , mais aussi un travail critique entre pairs, par groupes, sont une bonne faon de se prparer aux preuves dadmission du concours.

    b. Lire et relire, voir et revoir La prparation au CAPES/CAFEP de Lettres est le moment de parfaire sa culture

    littraire et dapprofondir ses connaissances. Il faut donc jouer avec toutes les possibilits dont on dispose aujourdhui : lire de faon cursive des romans, des pices de thtre, de la posie, des essais, certains ouvrages par extraits dans des anthologies. Mais lire aussi stylo la main dautres uvres pour sen imprgner particulirement. Alterner les deux modes de lecture est la meilleure faon de ne pas se lasser. Et lon tirera le meilleur profit des versions audio des textes, des adaptations filmiques et des captations de pices de thtre. Aller au thtre, au cinma, dans les muses si lon en a la possibilit est aussi un divertissement des plus rentables .

    En somme, il sagit de mettre profit la prparation au concours pour multiplier les accs la Littrature et aux Arts, pour le travail comme pour le plaisir.

    c. Rflchir aux questions didactiques et lactualit de la discipline

    Le candidat au CAPES/CAFEP de Lettres na souvent pas lexprience suffisante pour prendre du recul sur sa pratique professionnelle. Il peut nanmoins anticiper et, avec la lecture de quelques publications didactiques, rflchir lenseignement des Lettres et aux discussions dactualit. Les Centres de Documentation et dInformation des coles Suprieures de lEnseignement et du Professorat (SP) disposent de multiples abonnements aux priodiques professionnels : on ne saurait trop conseiller aux futurs admissibles den arpenter les rayonnages. La frquentation du site gouvernemental duscol est galement fructueuse.

    *

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  • * *

    Au terme de la premire session du nouveau CAPES/CAFEP de Lettres, les membres des commissions de Littrature et langue franaises ont acquis la conviction que lpreuve dAnalyse dune situation professionnelle est un bel exercice littraire. Le nombre important de prestations convaincantes, parfois brillantes, leur a fourni les preuves quen sy prparant vraiment, les candidats acquirent les connaissances et les comptences ncessaires pour devenir des professeurs prts mener leurs futurs lves la russite en leur transmettant le got de la Littrature et de la langue franaise.

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