conversion biochimique de la biomasse : aspects technologiques et

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UCL UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LOUVAIN Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et environnementaux. Working Paper n°3 Pépin Tchouate Héteu (UCL-GEB) et Joseph Martin (UCL-GEB) Unité TERM Février 2003 Prix Tractebel 2001 « Contribution des certificats verts au développement de l’électricité renouvelable dans un marché libéralisé » Prof. J. MARTIN (GEB-TERM) et Prof. F. VARONE (AURAP) 1

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Page 1: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

UCL UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LOUVAIN

Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et environnementaux.

Working Paper n°3

Pépin Tchouate Héteu (UCL-GEB) et Joseph Martin (UCL-GEB) Unité TERM

Février 2003

Prix Tractebel 2001

« Contribution des certificats verts au développement de l’électricité renouvelable dans un marché libéralisé »

Prof. J. MARTIN (GEB-TERM) et Prof. F. VARONE (AURAP)

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Page 2: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

Résumé du projet L'objectif du projet est d'élaborer des outils d'analyse scientifique de la politique des certificats verts en Belgique et en Europe. La politique des certificats verts est un instrument de soutien à l’électricité verte qui repose sur la création d’un marché financier au sein duquel s’échangent des titres octroyés aux producteurs d’électricité certifiés. L'analyse scientifique sera conduite selon deux approches complémentaires: l'une, technico-économique, par le Groupe Energie Biomasse rattaché à l'Unité de Thermodynamique, Faculté des Sciences Appliquées; l'autre, politologique, réalisée par l'AURAP (Association Universitaire de Recherche sur l'Action Publique), Centre de recherche de la Faculté des Sciences Economiques, Sociales et Politiques. L'approche technico-économique visera dans un premier temps à identifier de manière précise les principales filières vertes qui entreront en compétition sur le marché des certificats verts. Dans un deuxième temps, il s'agira de déterminer la rentabilité propre hors certificats verts de ces filières vertes et d'y associer un potentiel énergétique et un potentiel de réduction des émissions de CO2. Finalement, les courbes de rentabilité obtenues permettront de déterminer pour une valeur donnée du certificat vert, les filières vertes qui devraient émerger ainsi que le potentiel de réduction des émissions de CO2 correspondant. L’approche politologique cherchera à analyser les instruments de politique énergétique visant à promouvoir l’électricité verte dans cinq pays européens : la Belgique, les Pays-Bas, le Danemark, la France et l’Allemagne. La recherche portera tout spécialement sur le choix des certificats verts en tant qu’instrument privilégié en Europe suite à la libéralisation du marché de l’électricité. Par ailleurs, l’accent sera mis particulièrement sur le rôle des principaux acteurs publics et privés du secteur électrique dans la définition de ces politiques. Enfin, les deux approches contribueront à élaborer des scénarios d’harmonisation entre les différents systèmes de certificats verts au niveau belge et européen en identifiant les opportunités et les contraintes qui y sont liées. Prof. J. Martin Unité de thermodynamique (TERM) Groupe Energie Biomasse (GEB) Place du Levant 2 1348 Louvain-la-Neuve Tel : 010/47 22 09 Fax : 010/45 26 92 e-mail : [email protected] Pépin Tchouate Heteu (TERM/GEB) Place du Levant 2 1348 Louvain-la-Neuve Tel : 010/47 22 19 Fax : 010/45 26 92 e-mail : [email protected]

Prof. F. Varone Unité de science politique et de relations internationales (SPRI) Association universitaire de recherche sur l’action publique (AURAP) Place Montesquieu 1, bte 7/8 1348 Louvain-la-Neuve Tel : 010/47 42 74 Fax : 010/47 46 03 e-mail : [email protected] Isabelle de Lovinfosse (SPRI/AURAP) Place Montesquieu 1, bte 7/8 1348 Louvain-la-Neuve Tel : 010/47 41 34 Fax : 010/47 46 03 e-mail : [email protected]

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Page 3: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

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Conversion biochimique de la biomasse humide : Aspects technologiques et environnementaux.

1. Définitions La digestion anaérobie des déchets organiques et des effluents organiques industriels est un processus biologique de décomposition de la matière organique présente, qui se déroule en absence d’oxygène et qui conduit à la formation de biogaz, mélange de méthane CH4 (50 à 75%) et de gaz carbonique CO2 (25 à 50%). Des communautés microbiennes complexes sont responsables de cette décomposition.

On peut différencier trois types de digestion anaérobie selon les zones de températures dans lesquelles s’opère le processus soit basse, moyenne ou élevée, les limites variant d’un auteur à l’autre :

- digestion psychrophile : basse température 15 à 25°C,

- digestion mésophile : température moyenne 30 à 45°C,

- digestion thermophile : température élevée 50 à 65°C.

Pour fonctionner de manière optimale, les micro-organismes anaérobies doivent recevoir régulièrement un substrat équilibré, c’est-à-dire un effluent contenant 15 à 30 fois plus de carbone que d’azote. Aux températures élevées, la décomposition et la production de biogaz sont plus rapides mais le processus est aussi plus sensible à la variabilité des substrats et de la température. La digestion thermophile permet une destruction plus complète des organismes pathogènes que les processus de digestion à basse ou moyenne température.

La matière organique, qu’elle soit d’origine naturelle ou industrielle, est composée d’un squelette de carbone sur lequel se sont fixés d’autres éléments en proportions variables : essentiellement hydrogène et oxygène (glucides et graisses), azote (protéines), phosphore (acides nucléiques) ou soufre (certains acides aminés). Une molécule riche en hydrogène (graisses) a un potentiel énergétique plus élevé qu’une molécule contenant moins d’hydrogène (glucides).

L’Agence Française de Normalisation (AFNOR) définit la demande chimique en oxygène, en abrégé DCO, comme la quantité d’oxygène, exprimée en milligrammes, consommée par les matières contenues dans un litre d’eau, oxydables dans les conditions de l’essai. La mesure de la DCO permet d’estimer la charge organique polluante d’une eau usée. Sa mesure avant et après un traitement physique, chimique ou biologique permet également de contrôler le bon fonctionnement de l’épuration ou d’évaluer l’activité de micro-organismes anaérobies dans un digesteur. La digestion anaérobie est avantageuse pour les effluents fortement chargés en matières organiques, avec des concentrations supérieures à 50-100 mgDCO/l.

2. Etapes microbiologiques et biochimiques

L’ensemble des réactions, multiples et complexes, se déroulant dans un digesteur peut se diviser en quatre étapes principales caractéristiques de l’action de différents groupes de

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micro-organismes : hydrolyse, fermentation acidogène (acidogenèse), acétogenèse et méthanogenèse (fig. 1).

- Hydrolyse, par laquelle les macromolécules qui constituent la matière organique se décomposent en petites molécules solubles, à l’origine du jus de fermentation : par exemple, la cellulose est transformée en sucres solubles tels que le glucose ou le cellobiose.

- Acidogenèse : les molécules simples (monomères) sont transformées sous l’effet des bactéries en acides de faible poids moléculaire (acide lactique et acides gras volatils) et des alcools tels l’éthanol. Du bicarbonate et de l’hydrogène moléculaire sont produits.

- Acétogenèse : C’est ici qu’interviennent des bactéries réductrices acétogènes et des bactéries sulfato-réductrices pour transformer certains produits issus des phases précédentes (acides gras volatils et alcools) en H2, CO2 et acétate. En présence de sulfate, de l’hydrogène sulfuré (H2S) est aussi généré lors de cette étape de transformation;

- Méthanogenèse : dernière phase au cours de laquelle l’acétate (CH3COO-), l’hydrogène et le bicarbonate (HCO3-)sont convertis en méthane par des micro-organismes méthanigènes. Les réactions sont les suivantes :

Réduction du CO2 : 2 2 4 24CO H CH H O2+ → + (env. 30% du méthane produit)

Décarboxylation de l’acide acétique : CH3 2 4COOH H O CH H CO2 3+ → + (70%)

Matières organiques fermentescibles

Acides aminés, acides gras, sucres

Acides organiques

Acide acétique, CO2

Biogaz

Bactériesfermentatives Bactéries

fermentatives

Bactéries acétogènes

Bactéries méthanogènes

Matières organiques fermentescibles

Acides aminés, acides gras, sucres

Acides organiques

Acide acétique, CO2

Biogaz

Bactériesfermentatives Bactéries

fermentatives

Bactéries acétogènes

Bactéries méthanogènes

Fig.1 : Schéma de la digestion anaérobie des déchets et effluents organiques

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3. Caractérisation du biogaz Le biogaz se caractérise par sa composition chimique et les caractéristiques physiques qui en découlent. La quantité et la composition chimique du biogaz produit en fermenteur dépendent du substrat, de sa DCO, du débit d’alimentation du digesteur s’il s’agit d’une alimentation en continu, de la qualité de l’agitation, du temps de séjour dans le réacteur, de la température de fermentation, etc. Dans un digesteur clos, ces paramètres sont en général mieux contrôlés et plus constants de manière à limiter la variabilité du gaz dans la marge 1-5%. Le tableau suivant fournit quelques exemples de compositions pour les cas les plus classiques.

Tableau 2 : Composition du biogaz selon ses origines (Source : ADEME ) Composants Décharge

d’ordures ménagères (MO 80%) production naturelle sans aspiration

Décharge d’ordures ménagères (MO 80%) production forcée avec aspiration

Décharge d’ordures ménagères (50%-50%) production forcée avec aspiration

Ordures ménagères triées (en digesteur)

Boues de stations d’épuration

(en digesteur)

Lisier de bovins ou d’ovins (en digesteur)

Distillerie

(en digesteur)

CH4 % vol 50 - 58 30- 55 25 - 45 50 - 60 60 - 75 60 - 75 68

CO2 % vol 25 - 34 22 - 33 14 - 29 38 - 34 33 - 19 33 - 19 26

N2 % vol 18 – 2 26 - 6 49 - 17 5 - 0 1 - 0 1 - 0 -

O2 % vol 1- 0 8 - 2 8 - 5 1 - 0 < 0,5 < 0,5 -

H2O % vol 4 ( à 30°C) 4 ( à 30°C) 4 ( à 30°C) 6 ( à 30°C) 6 ( à 30°C) 6 ( à 30°C) 6 ( à 30°C)Total % vol 100 100 100 100 100 100 100 H2S mg/m3 20 - 50 5 - 20 100 - 900 100 - 900 1000 - 4000 3000-10000 400

NH3 mg/m3 - - - - - 50 - 100 -

Aromatiques mg/m3 2 1 0 - 200 0 - 200 - - -

Organochlorés ou organofluorés mg/m3

0 – 100 0 - 100 100 - 800 100 - 800 - -

Les facteurs affectant la qualité et la quantité de biogaz sont : le PH, la teneur en matière sèche du substrat, le rapport carbone/azote, le temps de résidence dans le digesteur, l’homogénéité et la granulométrie du substrat.

Dans la plupart des cas, le pH est auto-régulé dans le digesteur avec des valeurs optimales comprises entre 6,8 et 7,41 mais un ajout de bicarbonate de soude peut être nécessaire pour le maintien d’un pH par exemple en présence d’un taux élevé en légumes ou de matières à faible teneur en azote. Si le pH baisse en dessous de 6,2, le milieu a un effet toxique sur les micro-organismes méthanogènes. La valeur optimale du rapport carbone/azote se trouve entre 20/1 et 30/12.

1 Alain Damien. 2002. Guide du traitement des déchets, chap. 6.2, DUNOD France 2 U.S. Department of Energy : Methane (Biogas) from Anaerobic Digesters. http://www.eren.doe.gov/consumerinfo/refbriefs/ab5.html

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Page 6: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

Le tableau 3 présente une compilation de données provenant de diverses sources sur la teneur en azote et le rapport carbone azote pour une série de substrats.

Tableau 3 : Teneur en N et rapport C/N d’une sélection de substrats.

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Page 7: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

Le temps de séjour ne peut être calculé exactement que pour les installations en batch ou discontinues. Pour les systèmes alimentés en continu, la durée moyenne est estimée en divisant le volume du digesteur par le volume de substrats introduits quotidiennement dans le digesteur.

4 Différents systèmes de digesteurs Le digesteur, encore appelé fermenteur ou bioréacteur - anaérobie est généralement constitué d’une cuve fermée, étanche à l’air et de préférence isolée thermiquement de l’extérieur dans laquelle différents microorganismes se cotoyent pour dégrader chimiquement et biologiquement les déchets et effluents organiques et produire du biogaz. Le choix du digesteur varie en fonction du type de déchets à traiter et de l’application visée. On peut classer les digesteurs selon :

- le mode d’alimentation : batch, continu ou semi-continu ;

- le type de substrats : solide, semi-solide ou liquide ;

- le nombre d’étapes : mono- ou bi-étape selon que la méthanogénèse et l’acidogénèse se déroulent dans le même réacteur ou dans deux cuves séparées.

4.1. MODE D’ALIMENTATION Le digesteur batch ou discontinu : Il a l’avantage d’être d’une construction simple. Le mode opératoire consiste à remplir le digesteur avec les substances organiques et laisser digérer, le temps de rétention étant fonction de la température et d’autres facteurs. A la fin de la digestion, le digestat est évacué et le processus peut recommencer. Ces systèmes, rustiques et d’une grande simplicité technique, sont avantageux pour traiter les déchets solides comme les fumiers, les résidus agricoles ou les ordures ménagères. La production de biogaz n’est pas régulière : au début du cycle, la fermentation du substrat ne venant que de commencer, la production de biogaz est lente. Elle s’accélère, et atteint un taux maximal au milieu du processus de dégradation et chute en fin de cycle lorsque seuls les éléments difficilement digestibles restent dans le digesteur.

Dans un digesteur continu, le substrat introduit de manière continu est digéré et déplacé soit mécaniquement, soit sous la pression des nouveaux intrants vers la sortie sous forme de digestat. Le fonctionnement en continu, est bien adapté aux installations de grande taille. Il existe trois principaux types de digesteurs continus : système à cuve verticale, système à cuve horizontale et système à « cuves multiples ».

Le digesteur semi-continu fonctionne avec une combinaison des propriétés des deux précédents afin de tirer profit des avantages des deux extrêmes.

4.2. TYPE DE SUBSTRATS Cette classification des digesteurs est fonction de la teneur en matière sèche des matières organiques qui affecte leur consistence.

Solide : teneur en matière sèche > 15 % ;

Semi-solide ou pâteux : teneur en matière sèche comprise entre 5 et 15 % ;

Liquide : teneur en matière sèche inférieure à 5 %.

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Page 8: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

Les substrats liquides et pâteux sont dits pompables.

Pour traiter les effluents liquides plus ou moins riches en suspension, on préfèrera des procédés continus ou semi-continus, le contenu du digesteur étant maintenu homogène par brassage mécanique régulier du liquide.

Les différents types de digesteurs sont représentés schématiquement ci-dessous3.

Procédés pour boues

Réacteur "infiniment mélangé"(CSTR)

gazgaz gaz

Réacteur "piston"

gazgaz

Réacteur "piston"

Réacteur "contact" anaérobie

gaz

Procédés pour liquides

g a z

L it d e b o u e à flu x

a sce n s io n n e l(U A S B )

g ra n u le s

g a z

L it d e b o u e à flu x

a sce n s io n n e l(U A S B )

g ra n u le s

g a z

F iltre b a c té rie n a n a é ro b ie

b io film su r su p p o rt

g a zg a z

F iltre b a c té rie n a n a é ro b ie

b io film su r su p p o rt

g a z

L it f lu id iséL it e xp a n sé

g ra n u le s

g a zg a z

L it f lu id iséL it e xp a n sé

g ra n u le s

Procédés pour solides

recirculation de la suspension

agitation par gaz comprimé

recirculationdu liquide

solide en lit fixepercolé

solide en lit fixepercolé

(semi) -continu discontinu

gaz gazgaz

gazgaz

solide ensuspension

épaisse

3 Gerin P. Notes de cours INIS 3101 : Energies Renouvelables, Université catholique de Louvain

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Page 9: Conversion biochimique de la biomasse : Aspects technologiques et

4.3. ETAPES Cette classification met en évidence le fait que l’hydrolyse et l’acidogénèse sont séparés ou pas de la phase suivante de méthanogénèse.

acidogenèse+

méthanogenèse

acidogenèse+

méthanogenèse

acidogenèse+

méthanogenèse

2.méthano-genèse

1.acido-

genèse

2.méthano-genèse

1.acido-

genèse

1- étape 2- étapes

Dans les procédés monoétapes, toutes les étapes de la digestion ont lieu dans la même enceinte. Ils sont exploitables en continu ou en batch, et principalement appliqués pour des substrats allant jusqu’à 40% de MS.

Les procédés biétape sont caractérisés par le fait que l’hydrolyse et l’acidification sont nettement séparées de la phase suivante de méthanisation. La recirculation de la phase liquide présente l’avantage de ne pas nécessiter constamment l’ajout d’eau réchauffée. L’avantage des procédés biétape réside dans les courts temps de décomposition de la matière solide, de l’ordre de quelques jours. Cette séparation des phases réduit le risque d’intoxication des cellules méthanogènes liée à la présence d’acides gras volatils lorsque l’étape d’acidogénèse n’est pas complètement terminée car trop rapide par rapport à la capacité d’assimilation des micro-organismes méthanigènes.

Certains digesteurs sont dits mixtes ou intégrés. Plus exactement, c’est l’installation et non le digesteur qui est mixte. Le principe consiste à faire subir au substrat organique une digestion anaérobie et récupérer le sous-produit qui est ensuite stabilisé par l’étape de compostage. Ces procédés mixtes permettent la réduction des systèmes de traitement du liquide issu du digesteur anaérobie, ce dernier servant en grande partie pour l’humidification du compost. Le second avantage est la stabilisation quasi totale du substrat organique en raison de la complémentarité des deux systèmes.

5. Description et classification des installations de biométhanisation

La digestion proprement dite n’est qu’une étape du processus global de cette filière technologique qui comprend en amont une étape de préparation du substrat et en aval une étape de post-traitement. Le schéma de principe d’une installation de biométhanisation est représenté à la figure 2 et détaille les quatre étapes principales de cette filière :

- le pré-traitement du substrat,

- la digestion proprement dite,

- l’utilisation du biogaz,

- le post-traitement des effluents.

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Cette figure représente une installation de traitement de déchets ménagers, le cas le plus complexe des installations de digestion anaérobie. Puisqu’elles traitent des substrats mieux définis, les installations agricoles et agro-industrielles présentent des étapes de pré- et post-traitements plus simplifiés.

Utilisationdu biogaz

torchère

stockage

groupe électrogène

électricitéchaleur

productionvapeur

Utilisationdu biogaz

torchère

stockage

groupe électrogène

électricitéchaleur

productionvapeur

réception

déchets organiques

broyage

tamisage

dosage

Pré-traitement

réception

déchets organiques

broyage

tamisage

dosage

Pré-traitement

solide

maturation aérobie

liquidepresse

traitement eaux usées

eau compost

Post-traitement des effluents

solide

maturation aérobie

liquidepresse

traitement eaux usées

eau compost

Post-traitement des effluents

Digesteur

pompage

Digestion

Digesteur

pompage

Digestion

Digesteur

pompage

Digestion

Digesteur

pompage

Digestion

Digesteur

pompage

Digestion

Fig. 2 : Schéma de principe d’une installation de biométhanisation dans le cas le plus

complexe du traitement des déchets organiques.

La préparation consiste à nettoyer les ordures collectées, réduire leurs dimensions, les désagréger et réduire le volume afin d’améliorer leur manipulation. Elle vise ainsi une modification:

- de la matière par les étapes de tri successives : tri magnétique (séparation des métaux magnétiques et autres parties métalliques), tri balistique, par ventilation et tamisage, et finalement un tri manuel (enlèvement de plastiques, verres et métaux non magnétiques),

- des propriétés de la matière par le broyage qui peut être humide comme dans le cas du vieux papier, par le détrempage (mouillage des déchets organiques pendant lequel il y a ensemencement des micro-organismes) et par le pré-traitement thermo-alcalin (décomposition assistée chimiquement par ajout alcalin dans un réacteur spécial et chauffé).

La granulométrie du substrat obtenu après tamisage dépend des exigences de chaque procédé de digestion. Elle est en règle générale, comprise entre 3 et 10 mm. La teneur en matières sèches souhaitée pour la fraction organique se situe entre 25 et 35% (digestion « sèche ») ou entre 12 et 18% (digestion humide). Dans ce cas, un ajout d’eau est souvent nécessaire pour obtenir une boue susceptible d’être pompée.

Le post-traitement consiste principalement en l’affinage des déchets méthanisés, c’est-à-dire la déshydratation par presses ou centrifugeuses suivi d’un compostage, permettant d’obtenir un compost avec une teneur en matières sèches d’au moins 40%, pour faciliter son stockage.

On peut classer les installations de biométhanisation en fonction de leur taille et de la nature de leur exploitation. On distingue ainsi :

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- les installations centralisées de grande taille traitant principalement des déchets ménagers urbains,

- les installations industrielles décentralisées

- les installations agricoles décentralisées utilisant des résidus propres de l’utilisateur (résidus d’élevage, cultures énergétiques, etc.),

- les installations agricoles centralisées traitant les résidus provenant de plusieurs fermes. Le principe consiste à collecter les effluents d’élevage produits par les fermes d’une zone donnée et les digérer dans un digesteur centralisé. Le digestat peut être redistribué aux agriculteurs pour l’amendement de leur sol. Ces installations, bien qu’elles offrent l’avantage d’améliorer la qualité des substrats et donc du biogaz tout en déchargeant le fermier du suivi de l’installation, est fortement pénalisé par les frais importants de transport et d’analyse.

5.1. EXEMPLE D’INSTALLATION DE TRAITEMENT DE DECHETS

MENAGERS : LE PROCEDE DRANCO Le procédé DRANCO de la société O.W.S. fut spécialement développé pour la biométhanisation anaérobie de déchets organiques, contenant un taux de matières solides relativement élevé. Le procédé consiste en une conversion anaérobie de substrats organiques sous conditions thermophiles (50-55 °C), suivie directement d’un post-compostage aérobie du digestat. De cette conversion de matières organiques résultent du biogaz et un résidu solide semblable au compost, nommé Humotex. Les fractions organiques appropriées à la biométhanisation sont principalement la part organique des ordures ménagères, des déchets de restaurant et d’industrie.

Le pré-traitement des déchets dépend de leur composition. Si la collecte des déchets n’est pas sélective, le contenu organique doit être extrait du mélange d’ordures. Les déchets organiques sont réduits dans un tambour rotatif ou un broyeur et tamisés à 40 mm afin d’obtenir les dimensions favorables à la conversion et au traitement ultérieur, et afin d’écarter les composants non-dégradables. La partie non tamisée est détournée vers un container, tandis que la partie tamisée traverse un séparateur magnétique, afin d’écarter les parties métalliques, et aboutit dans l’unité de dosage, côtoyant l’installation DRANCO. Juste avant son transfert au réacteur, la fraction tamisée est mélangée à du résidu converti provenant du réacteur, et ensuite réchauffée à 50 ° C par injection de vapeur. Une pompe à succion, connectée à l’unité de dosage, pompe ensuite le substrat inoculé et chauffé dans le réacteur à travers une ou plusieurs ouvertures dans le toit du réacteur vertical.

La digestion dans le procédé DRANCO est une action stationnaire, sans brassage mécanique quelconque. Cela permet une construction simple du réacteur et de ce fait un fonctionnement durable et fiable, sans problèmes mécaniques. Le substrat dans le réacteur est de consistance pâteuse. La digestion a lieu sous conditions thermophiles, de 50 à 55 °C. Le temps de rétention moyen est 20 jours. D’éventuels composants pathogènes dans le substrat sont éliminés par les températures élevées et autres conditions défavorables à leur croissance.

Le résidu digéré est retiré du réacteur, floconné puis déshydraté à 50 % de matière sèche par une presse à vis. L’eau de presse est centrifugée, puis jointe à l’eau de drainage provenant du dépôt d’ordures, et conduite à une installation d’épuration d’eau locale.

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La fraction pressée du digestat est transférée sur un tamis vibrant à 12 mm ; le produit tamisé subit ensuite un post-compostage aérobie pendant deux semaines. Le produit final, nommé Humotex a un degré de maturation élevé. Comme le contenu en métaux lourds dans du compost dépend de la nature et de la composition des déchets initiaux, le Humotex contient un taux minimal en métaux lourds, grâce à une collecte sélective des déchets organiques triés à la source. Le Humotex est vendu en tant qu’amendement de sol de haute qualité.

Le biogaz formé dans le réacteur est accumulé dans un gazomètre. Le biogaz est transformé en électricité au moyen d’un moteur à biogaz. L’électricité produite est en partie utilisée pour le fonctionnement de l’installation, le surplus est vendu. Une partie du chaleur des moteurs à gaz est utilisée et, à l’aide d’un échangeur, est transformée en vapeur afin de chauffer le substrat entrant dans le réacteur.

6. Potentiel de déchets Les déchets solides et agroindustriels sont constitués par les sous-produits issus des procédés de fabrication qui ne trouvent pas de débouchés en compostage (légumes, champignons, viticulture, sucreries, etc.) ou en alimentation animale et qui sont très souvent mis en décharge ou incinérés. Leur digestion entraîne une plus-value – production d’énergie et compost – et une réduction des coûts de mise en décharge. En plus, elle peut contribuer à donner aux industries concernées une certaine « image environnementale ».

Les effluents industriels sont essentiellement constitués d’eaux résiduaires des procédés de fabrication. Leur traitement anaérobie tend à devenir une technique standard et permet de réduire considérablement la taille et le coût des installations classiques de traitement aérobie. Néanmoins, il faut mentionner que la biométhanisation des matières organiques n’est pas aussi complète qu’un traitement aérobie et constitue dans le traitement des eaux résiduaires une étape intermédiaire avant le traitement aérobie ultime. Les secteurs susceptibles d'utiliser la biométhanisation pour le traitement de leurs eaux résiduaires sont cités ci-dessous avec les concentrations et quantités respectives.

Industrie Production spécifique d’effluents

Industries laitières 0,5 – 3 m3 par tonne de lait

Elaboration de café et thé

Abattoirs et transformation de viande 0,6 – 9,6 m3 par bovin (400 kg poids vif)

0,3 – 0,4 m3/ porc (100 kg vif)

20 – 40 l/volaille

Industrie vinicole 1650 – 1870 m3 par 100 ha de vignoble

Production et transformation de fruits

Distillerie de fruits

0,5 – 0,8 m3 par jour

Brasseries 0,4 – 12 m3 par hectolitre de bière

Industrie papetière 1000 m3 par tonne de pâte à papier blanchie,

160 – 300 m3 par tonne de cellulose,

125 – 2000 m3 par tonne de papier utilisé dans les cartonneries et papeteries

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La valorisation énergétique des effluents industriels est souvent limitée parce que certains ne sont disponibles que pendant quelques semaines mois sur l’année, par exemple les sucreries, distilleries et conserveries.

Les déchets d’entretien paysager constituent un gisement de substrats organiques méthanisables, essentiellement constitués de :

- tontes d’herbe et de gazon (pelouses de jardin, terrains de sport), qui ne sont guère appréciés en compostage à cause des échauffements et des émissions malodorantes. On les évalue à 2tMS/ha/an.

- déchets d’entretien de talus et bords de routes et de chemins de fer dont la teneur élevée en métaux lourds ne favorise pas l’utilisation du compost qui résulterait de leur traitement par compostage

- feuilles récoltées lors du nettoyage d’automne des routes et parcs, évaluées à Zurich au ratio de 10kg/habitant/an.

Diverses données bibliographiques et expérimentales ont permis à ARBI-PROBAG4 d’estimer les productions spécifiques de biogaz en fonction du type des déchets :

Tableau 4 : Production spécifique de biogaz pour divers types de déchets

Types de déchetsProduction spécifique de biogaz [m3/kg M.O]

Déchets ménagers (collecte sélective) 0,45

Industrie laitière 0,6

Production et transformation de légumes 0,6Abattoirs 0,45Transformation viande 0,5Préparation potages et condiments 0,4Industrie sucrière 0,65Moulins céréales 0,4Elaboration café et thé 0,6Industrie vinicole 0,4Production et transformation de fruits 0,55Brasseries 0,5Industrie papetière 0,35Production champignons 0,6Aliments divers (levures, etc.) 0,4Autres déchets (tabac, cuir, etc) 0,45

Déchets d'entretien paysager (gazons,plantes aquatiques,feuilles, broyats ligneux) 0,45

La teneur en méthane du biogaz varie en fonction des substrats. La teneur moyenne devrait se situer entre 55 et 75%, ce qui correspond à un contenu énergétique de 20 à 27 MJ/m3.

Le potentiel théorique mondial s’élèverait aujourd’hui à 750Mtep/an si tous les déchets étaient méthanisés en décharge ou en réacteurs, valeur à laquelle il faut rajouter les sous produits agricoles, d’un potentiel proche de 1000 Mtep/an (d’après E. Nyns, cité par l’ADEME). Toutefois en tenant compte des sites économiquement valorisables et du taux de 4 Association Suisse de promotion du biogaz

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disponibilité réelle du gaz, on peut estimer que la ressource réellement récupérable dans le monde varie entre 100 à 300 Mtep/an5.

En 2000, l’AIE comptabilisait 125 installations de biométhanisation en exploitation et 35 en construction, les déchets ménagers ou la fraction organique des résidus industriels constituant la principale ressource, totalisant une capacité annuelle de traitement de plus de 5 millions de tonnes de matières organiques, équivalent à une puissance installée de 600 MW d’électricité6. En Europe, environ 17 millions de tonnes de déchets organiques sont collectées auprès des ménages annuellement, soit le tiers du potentiel disponible.

Le potentiel théorique suisse en biogaz à partir des déchets ménagers, industriels et des déchets d’entretien paysager s’élève à 2,9 – 3,0 PJ/an. En tenant compte de la consommation propre au processus de digestion et de l’énergie grise contenue dans les installations de méthanisation, il vient pour la Suisse un potentiel net d’environ 1,2 PJ par an (PACER, 1993)7. En 1999, 68 installations de biométhanisation étaient opérationnelles en Suisse dont 36 produisant de l’électricité à partir d’un groupe de cogénération TOTEM. La production de biogaz brut étaient de 28664 GJ/an pour ces installations alors que les 32 autres produisaient 15818 GJ/an de biogaz convertis en chaleur uniquement8.

Une enquête réalisée (Tableau 5) en France sur l’état de la biométhanisation révèle l’existence de 95 installations en fonctionnement, réparties sur 76 sites et produisant près de 30 ktep/an de biogaz dont la moitié seulement environ est valorisée, essentiellement dans les papeteries, les industries de transformation de la pomme de terre et les brasseries (BOGDAN et al, 2001)9. Tableau 5: Biogaz produit et valorisé par secteur d’activité en France (BOGDAN et al. 2001).

5 ADEME-GDF, le biogaz et sa valorisation : guide méthodologique 6 IEA BIOENERGY. Systems and markets overview of anaerobic digestion. July 2001. 7 PACER 1993. Biogaz à partir de déchets industriels et ménagers. ISBN 3-905232-11-1. 8 Kurt Egger, Landwirtschaftliche Biogasanlagen in der Schweiz, i. A. E2000/BFE, Stand 1999. 9 BOGDAN et al. 2001. Les installations industrielles de méthanisation en 2001. Publication du Club Biogaz et de l’ATEE.

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L’évaluation de la quantité de déchets méthanisables dans les différents secteurs cités ci-dessus permettra de connaître le potentiel de production de biogaz en Belgique.

La première estimation minimaliste se base sur les données fournies par les opérateurs industriels et financiers sur la quantité des déchets ménagers actuellement récoltés en Belgique.

Les déchets ménagers constituent une source idéale pour la biométhanisation. La fraction organique est la partie fermentescible et varie selon les pays, régions et ménages mais représente typiquement 40 à 70% des déchets collectées.

Les études sur la collecte sélective de la fraction organique des déchets ménagers indiquent que la quantité de déchets collectés annuellement en Belgique par habitant est d'environ 130 kg. Sur base des productions de biogaz annoncées par les opérateurs de biométhanisation, soit 0,12 – 0,13 m3

biogaz/ kgdéchet organique brut , il vient un potentiel théorique de production de biogaz de 156 millions de m3 par an à partir des déchets ménagers collectées en Belgique. Si nous supposons une teneur moyenne de 0,6 m3

CH4/m3biogaz, ce potentiel équivaut à 3,4 – 3,7 TJ

d’énergie primaire, soit environ 9 – 10 lfuel/habitant/an ou 9 – 10 m3CH4/habitant/an. Ce

potentiel correspond à une production d’électricité brute moyenne de 295 GWh si l’on considère une conversion avec 30% de rendement.

Selon l’hypothèse que la biométhanisation permet une production nette d’électricité, évaluée à 75 à 150 kWh par tonne d’intrants, le potentiel net en Belgique varierait entre 100 et 200 GWh d’électricité. Ces valeurs n’inclut pas les consommations propres aux centrales évaluées souvent à 40 – 50% de la production brute.

7. Tendances technologiques (déchets ménagers)10 Sur le marché européen la demande d’installations de biométhanisation est fortement accrue dans les années quatre-vingt dix. Sur la période de 1990 à 2000, le nombre d’installations exploitées en Europe est passé de 6 à 53, de sorte que la capacité disponible pour la biométhanisation de déchets organiques est passée de 106.000 à 1.037.000 t/a.

7.1. Evolution de la capacité

La capacité a augmenté à raison de 30 ktonnes par an pendant la période de 1990 à 1995, et ensuite à raison de 150 ktonnes par an pendant la période de 1996 à 2000. Une augmentation de 200 kton était prévue pour l’an 2001.

Le nombre de nouvelles installations dans les périodes ci-dessus a grimpé de 2,4 à 7,2 par an. Rien qu’en 1998, jusqu’à 10 installations furent mises en service. La plupart des installations (30) ont été construites en Allemagne, totalisant une capacité globale de 449.605 tonnes, soit une capacité moyenne annuelle d’environ 15 ktonnes par installation. Neuf installations furent construites en Suisse ayant une capacité globale de 78.500 tonnes par an, soit une capacité moyenne annuelle d’environ 8,7 ktonnes par installation. Ces capacités sont plutôt

10 Traitement des déchets municipaux par le système DRANCO ; document O.W.S. nv, Dok Noord 4, B-9000 Gand, Belgique; Tél. 32 / 9 / 233.02.04, fax 32 / 9 / 233.28.25

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modestes comparées aux grandes installations construites en Belgique, aux Pays-Bas et en France, qui ont une capacité moyenne se situant plutôt dans l’ordre de 30 à 50 ktonnes par an.

On peut observer une tendance générale vers des projets de construction de grande capacité. Suite à la construction de petites installations pour déchets fermentescibles en Suisse et en Allemagne, la capacité moyenne initiale de 24.420 tonnes par an a graduellement diminué. Néanmoins, à partir de 1998 la capacité des installations proposées pour les années à venir, a monté vers une moyenne de 50.000 tonnes par an, car de gros projets de traitement de déchets gris ou mixtes sont prévus. Ceci hausserait la capacité totale moyenne de 15.632 tonnes par an en 1997 à 21.704 tonnes par an en 2001.

Toutes les installations de fermentation fonctionnaient initialement à des températures mésophiles. Les premières installations thermophiles étaient des installations à fermentation sèche et firent leur apparition en 1992 et 1993. La capacité de fermentation mésophile a augmenté de 350.000 tonnes dans la période de 1994 à 1999, soit de 70.000 tonnes par an, tandis que la capacité de fermentation thermophile a augmenté de 280.000 tonnes, soit de 56.000 tonnes par an. Pendant certaines années davantage d’installations mésophiles furent construites, tandis que pendant d’autres années davantage d’installations thermophiles furent construites. On ne peut pas discerner de tendance nette. On peut s’attendre à une augmentation égale des deux types de fermentation, même si de plus en plus de firmes commencent à également proposer la fermentation thermophile. Le procédé thermophile fut développé plus récemment mais s’est depuis établi comme une méthode de fermentation fiable et d’autant mieux acceptée que la méthode thermophile bénéfice intrinsèquement d’une destruction accrue des germes pathogènes durant la phase anaérobie grâce au traitement à plus haute température.

7.2. Fermentation sèche versus humide

Au début des années 90, la majorité de la capacité de traitement de déchets solides était tenue par des systèmes de fermentation humide (teneur en matière sèche < 15 %). A partir de 1993, davantage d’installations à fermentation sèche furent construites et en 1998, plus de 60 % de la capacité de traitement était tenu par des systèmes de fermentation sèche. Pour l’instant quelques grandes installations à fermentation humide sont en construction. On prévoit une capacité de fermentation sèche de 561.000 tonnes par an pour l’an 2000, représentant 54 % de la capacité totale. A ce moment on ne peut pas discerner de tendance nette en ce qui concerne la technologie préférée. Beaucoup dépendra du succès des systèmes à fermentation humide envers le traitement de déchets mixtes et gris provenant de déchets municipaux solides.

7.3. Fermentation en une étape versus en deux étapes Il y a eu beaucoup de recherche concernant la fermentation en une étape et celle à deux étapes. Une fermentation en trois étapes fut même proposée à un moment donné. Mais en pratique, la fermentation en deux phases n’a jamais pu concrétiser les avantages qu’on lui reconnaît en théorie. D’une part, les bénéfices additionnels liés à une plus haute efficacité d’hydrolyse et de méthanisation n’ont pas été prouvés. D’autre part, de hauts niveaux de fermentation sont déjà obtenus avec les systèmes en une étape. Le coût d’investissement supplémentaire et la complexité du fonctionnement du système en deux étapes ont fait qu’il n’a pris qu’une part mineure du marché. L’augmentation de la fermentation en deux étapes s’est limitée à moins de 60.000 tonnes sur une période de 10 ans, d’une capacité existante de

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50.000 tonnes en 1990 à une capacité de 110.000 tonnes en l’an 2000, donc seulement 10,6 % de la capacité disponible est fournie par des systèmes de fermentation en deux étapes.

7.4. Co-digestion

La co-digestion a été moins utilisée que prévu. Il est assez commun qu’un co-substrat organique solide soit ajouté en petites quantités à des digesteurs de lisier, mais souvent ces co-substrats sont des boues industrielles à haute teneur énergétique, et ce n’est qu’exceptionnellement qu’on ajoute des déchets solides ménagers ou de marchés. Parmi les projets identifiés, seulement 70.605 tonnes ou 6,7 % de déchets organiques solides traités furent fermentés par moyen de co-digestion, le plus souvent avec du lisier.

Des déchets solides nécessitent souvent un maniement et un pré-traitement spécifique, ce qui fait qu’une installation conçue pour le traitement de liquides peut seulement traiter des types de déchets propres, ne nécessitant pas ou très peu d’élimination d’inertes ou de réduction en granulométrie. Aussi, les déchets solides en fonction de leur origine ont tendance à polluer le lisier de différents types de métaux lourds et d’inertes, autrement absents dans le lisier ou la boue.

L’addition de lisier ou de boue à des installations de traitement de déchets solides est également très limitée. L’investissement additionnel pour les containers et les pompes n’est souvent pas fait. De plus, les déchets liquides sont indésirables à cause du surplus d’eau à traiter.

7.5. Déchets mixtes versus déchets fermentescibles Tout un développement a eu lieu avec l’introduction de la collecte séparée, par laquelle la collecte de déchets organiques se fait dans différents containers au niveau ménager. Ceci a causé un boom dans la construction d’installation de compostage pour déchets verts. La fermentation de déchets ménagers mixtes reste stable, mais les deux dernières années ont été marquées par un intérêt accru pour le traitement de déchets mixtes. Les prévisions annonçaient une augmentation de la capacité de traitement de déchets mixtes, de 79.500 tonnes en 1998 à 374.500 tonnes en 2001, soit presque 100.000 tonnes de capacité par an.

8. Aspects environnementaux de la digestion anaérobie La combustion du biogaz produit du CO2 et de l’eau.

Le biogaz issu de la digestion anaérobie contient du méthane (CH4), qui, non utilisé, contribue substantiellement à l’effet de serre. Il est donc indispensable d’éliminer les excédents de gaz en torchères. Néanmoins, le stockage du digestat entraîne une émission de gaz dont la composition est différente de celle qui serait issu du stockage du substrat non digéré. Une revue de la littérature réalisée par Edelmann et al (2001) indique que le gaz issu du stockage du digestat est composé de 24% en méthane et 75% en CO2. Ils estiment que cette valeur de méthane est très faible étant donné les conditions anaérobie qui y prévalent. Les mesures ponctuelles, sans interprétation statistique, ont donné des valeurs plus élevées de méthane et a conduit à supposer une concentration de 45% pour le CH4. Toutefois, l’on devrait penser à récupérer ce gaz en couvrant le lieu ou la cuve de stockage car cela permet d’éviter ou de compenser le surplus d’émission de CH4 par rapport à la référence qui est la non-digestion des substrats.

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Le SO2 s’oxyde en SO3 qui réagit en présence de l’humidité pour donner l’acide sulfurique, principale cause des pluies acides. Bien que le soufre du biogaz, issu des cycles naturels, puisse être considéré comme restitué à la nature, il est recommandé de prévoir les installations de désulfuration.

La matière en fin de fermentation subit une séparation solide-liquide au cours de laquelle de l’eau de pressage fortement chargée en matière organique et inorganique est produite. Celle-ci doit être traitée avant rejet, à moins d’être utilisée pour l’arrosage des tas de compost dans les systèmes mixtes. Souvent cette fraction liquide du digestat est utilisée pour diluer les substrats frais avant leur introduction dans le digesteur. L’utilisation du digestat ou de sa fraction liquide comme fertilisant dépend de la qualité et de la réglementation en vigueur localement.

Emissions de N2O : Il est difficile de quantifier l’effet de la production du biogaz sur les émissions de N2O car la production de ce gaz dépend de plusieurs facteurs (propriétés des sols, teneur en humidité et en azote de la couche supérieure du sol, du climat, etc.) et peut varier fortement d’un endroit à l’autre (FAL, 2000)11. Dans le contexte de cette étude, les émissions à considérer sont celles liées au stockage du digestat et celles qui ont lieu après épandage du digestat sur les sols. Sommer et al (2000)12 pense qu’il n’y a pas nécessairement un surplus d’émissions de N2O lors du stockage du digestat et Hüther (1999) justifie cela par une nitrification limitée due aux concentrations élevées d’ammoniac. Une réduction des émissions de N2O pourrait être créditée à l’épandage du digestat (Klingler, 2000)13 parce que les émissions correspondantes sont évitée dans le processus de fabrication des engrais minéraux, mais la quantification exacte de la quantité d’azote (N) absorbée en plus par les plantes comparée à la situation d’épandage du substrat non digéré est presque impossible. En conclusion, nous considérons qu’aucune différence n’est mesurée en ce qui concerne les émissions de N2O si l’on compare au substrat brut utilisé comme fertilisant. Par contre, elle est importante si le traitement de référence avait été l’enfouissement des déchets.

NH3 : En présence des substrats riches en azote, la matière extraite du digesteur peut contenir un peu d’ammoniac. Cet excès d’ammoniac sera libéré pendant la période de stabilisation finale du digestat où il subit une aération avant utilisation comme compost. Edelmann (2001) conclut après une analyse de la littérature que la digestion anaérobie des résidus d’élevage conduit à une augmentation des émissions de NH3 de l’ordre de 15%. Ce chiffre est une moyenne de l’augmentation de 40% en stockage et de 10% en épandage par rapport à la situation de non digestion de ces résidus. Menzi et al (FAL, 1997) tout comme Heinzer (2000) indiquent une augmentation moyenne de 16%, alors que selon KTBL (1999), la production de biogaz à partir des résidus d’élevage entraîne un excès d’émission d’ammoniac de 14 à 17%. Ce surplus d’émission peut être réduit en respectant des techniques et conditions adéquates (saison, dilution du digestat, temps) d’épandage et la fermeture de la cuve de stockage. Les recherches récentes à l’université de Bonn (Wulf et al., 2001)14 parlent plutôt d’une baisse significative (plus de 40%) des émissions de NH3 à l’épandage du digestat et justifient cela tout comme Christensen et Sommer (1991) par l’amélioration de l’écoulement.

11 FAL (2000): Lachgasemissionen aus der schweizerischen Landwirtschaft, Schriftenreihe der FAL (33), Zürich-Reckenholz (Schweiz). 12 Sommer S., Petersen S., Sogaard H. (2000): Greenhouse gas emissions from stored livestock slurry. J. environ. Q., 29 13 Klingler (2000): Environmental aspects of biogas technology, in AD-Nett (ed): AD: Making energy and solving modern waste problems, Ortenblad H., Herning municipal utilities, Denmark, pp. 22-33 14 Wulf S., Bergmann S., Maeting M., Clemens J. (2001): Importance of simultaneous measurement of NH3, N2O and CH4 for evaluating the efficiency of measures to reduce trace gas emissions, in Phyton (Austria), spezial issue: Nitrogen emissions, Vol. 41, pp. 131-142.

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8.1. LCA d’un système de traitement des déchets : méthodologie L’analyse du cycle de vie d’un système de traitement de déchets permet aux gestionnaires des déchets de mieux apprécier la dimension environnementale de leurs choix et permet de comparer les différents systèmes entre eux.

La première étape consiste à définir les limites du système ou de la filière à analyser. Dans le cas du traitement des déchets, le système commence aux sources de production des déchets (ménages, industries, etc.) et se clôture par la mise à la nature des résidus finaux, en passant par les étapes de collecte, transport, tri, traitement biologique, production d’énergie, traitement des résidus. Nous excluons du système à étudier la fabrication des véhicules utilisés pour la collecte des déchets ou des pièces de rechange et nous limitons à leurs consommations énergétiques et celles des autres machines liées au traitement des déchets (IEA, 199715).

La filière de digestion anaérobie est représenté à la figure 5.

BIOMASSE (fumier, lisier, déchets organiques, purin, plantes énergétiques, déchets organiques de l’industrie agroalimentaire, boues de step)

Matières organiquesfraîches

Hydrolyse et acidogénèse

Acétogénèse

Méthanogenèse

Matières organiques solubilisées

Acétates et hydrogène

BIOGAZ : CH4 + CO2

Substrat digéré : DIGESTAT

Fig. 5 : Schéma de la filière de digestion anaérobie des matières organiques

Aussi, il est envisageable si l’on considère que quel que soit le mode de traitement des déchets ménagers, les étapes de collecte et de transport auraient eu lieu, de se limiter aux procédés de traitement sur site et des émissions qui y sont associées. En cas de valorisation du compost, les différences entre les quantités et qualités des composts produits doivent être prises en compte, ainsi que les bénéfices liés à la substitution des engrais chimiques. Selon Meier-Ploeger, l’utilisation d’un compost « bon, mature », permet d’éviter 360 MJ/tonne de 15 IEA: LCA of Anaerobic Digestion, a literature review, Final report, 12/1997

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déchet qui aurait servi à la fabrication d’engrais minéraux de valeur nutritive équivalente. La valeur nutritive du compost varie selon le type de sol sur lequel il est susceptible d’être appliqué et dépend fortement de la composition des déchets digérés. Cette complexité joue souvent en défaveur de leur prise en compte dans les LCA. Il y a lieu de mentionner que l’utilisation du compost comme engrais est réglementée dans certains pays (Allemagne, Pays-Bas, Suisse). En Suisse par exemple, les teneurs en N, P, K ne doivent pas dépasser respectivement 13, 16, et 16 kg par tonne de MS (compost) afin d’éviter les risques d’eutrophisation.

Les unités fonctionnelles que l’on peut utiliser lors du LCA d’un système de traitement de déchets sont : la tonne de déchets à l’entrée du système, le m3 du digesteur utilisé, le kWh électrique produit, le kWh thermique produit. Les sous produits tels que l’énergie produite ou récupérée et le compost doivent être comptabilisés parce que leur production est ainsi évitée par les moyens conventionnels.

La figure 6 montre les limites du système étudié au paragraphe 8.2.

Co-substratchez le producteur Lisier de bovin Lisier de porcin

TransportCo-substrat

Conditionnement(broyage, mélange)

Digesteur(digestion anaérobie)

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Réseau gaz(épuration et stockage)

Cogénérateur

Système de référence

ÉnergieDigestat (amendements,fertilisants)

Co-substratchez le producteur Lisier de bovin Lisier de porcin

TransportCo-substrat

Conditionnement(broyage, mélange)

Digesteur(digestion anaérobie)

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Réseau gaz(épuration et stockage)

Cogénérateur

Système de référence

Co-substratchez le producteur Lisier de bovin Lisier de porcin

TransportCo-substrat

Conditionnement(broyage, mélange)

Digesteur(digestion anaérobie)

Conditionnement(broyage, mélange)

Digesteur(digestion anaérobie)

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Stockage(Stockage du digestat)

Épandage

Réseau gaz(épuration et stockage)

Cogénérateur

Réseau gaz(épuration et stockage)

Cogénérateur

Système de référence

ÉnergieDigestat (amendements,fertilisants) Fig. 6 : Schéma de la filière de digestion anaérobie dans une ferme

8.2. Etude de cas : installation de biométhanisation dans une ferme Il s’agit d’une installation agricole décentralisée comportant un digesteur d’un volume de 300 m3. L’installation est alimentée par des résidus d’élevage. Nous considérons ici deux types de cuves (acier et béton), divers types de substrats (lisier de porc, lisier de vache, mélange des deux types et co-digestion des résidus agricoles frais).

Bilan matière : Le tableau 5 présente l’inventaire des matériaux utilisés pour la construction des différents composants de l’installation, prenant en compte la production de biogaz et le stockage du substrat post digestion. Les données sur les besoins en superficie et en matériaux de construction proviennent de 2 constructeurs suisses, de même pour le hall d’entreposage. Les valeurs sont indiquées par m3 de digesteur et par an.

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Les durées de vie des différents composants sont supposées comme suit: 20 ans pour les digesteurs, 15 ans pour les machines et le cogénérateur, 5 ans pour le gazomètre en plein air et 10 pour le gazomètre sous toit.

On tient aussi compte du démantèlement, principalement du recyclage des métaux. On suppose que le béton y compris le fer des armatures est mis dans une décharge de matières inertes. Les bois de construction et les matériaux d’isolation sont brûlés dans un incinérateur avec traitement des fumées.

Description des substrats utilisés :

1) Le lisier de vache est produit à raison de 55 litres par « unité de bovins » et par jour. Les teneurs en matières sèches et en matières organiques sont respectivement 9% et 82%. La teneur en matière sèche représente une moyenne annuelle (été : 8% ; hiver : 10%). Le temps de rétention étant de 28 jours, le digesteur devra donc être alimenté en continu à raison de 10,7 m3 par jour, soit l’équivalent de la production de 156 vaches si l’on tient compte de l’utilisation de l’eau de dilution dans le but de faciliter le pompage et de réduire les émissions de NH3, ce qui représente le cinquième du mélange. La productivité de l’installation est de 270 litres de biogaz par kg de matières organiques, soit 20 m3 de biogaz par tonne de purin.

2) Le lisier de porc est produit à raison de 42 litres par individu et par jour. On suppose aussi un temps de rétention de 28 jours et la quantité de lisiers traitée par jour correspond à la production de 204 porcs. La productivité en biogaz, 460 litres par kg de matière organique est supérieure à celle du lisier de bovin parce que la nature du substrat et le degré de digestion est différent pour les porcins (mono-gastriques que pour les bovins (ruminants). Le taux de digestion/désintégration atteint ainsi globalement 55%. On suppose en plus que 3 kg de matières organiques sont digérées lors du stockage du digestat provenant d’une tonne de lisiers frais.

3) En cas de co-digestion, on suppose que 2 tonnes d’un mélange de graisses et de résidus agricoles est ajouté au lisier par jour. Le substrat ainsi obtenu est constitué de 12% de matières sèches et 85% de matières organiques et permet avec la même installation une productivité de 520 litres de biogaz par kg de matière organique. Le taux de dégradation du digestat lors du stockage est de l’ordre de 5 kg de matière organique par tonne de substrat frais.

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Tableau 5 : Bilan matière d’une installation de digestion anaérobie décentralisée traitant du lisier (les données sont rapportées à 1 m3 de digesteur et par an).

UnitésCuve en

bétonCuve en

acierHall de stockage des substrats

post digestionConstructionSurface m² 0,36 0,367 1,1Béton (sans fer) kg 28,8 11,2 80Acier (sans alliage) kg 1,08 1,3 2,72Acier (très allié) kg 0,13 0,24 0,04Bois kg 0,66Cuivre kg 0,025 0,017Polystyrol kg 0,057PE kg 0,017 0,133PVC "schlagfest" kg 0,033Acier (légèrement allié) kg 0,341 0,017Caoutchouc EPDM kg 0,167Laine minérale kg 0,12 0,105Mortier kg 0,2Polyesterharz gesätigtes kg 0,133Transportpar camion 28 tonnes tkm 0,77 0,42 1,87par rail tkm 0,15 0,33 0,03Traitement des déchetsbéton armé kg 29,88 12,5 82,72bois non traité kg 0,66polystyrol kg 0,06PVC kg 0,03plastique kg 0,14 0,43Laine minérale kg 0,11Unité de conversion énergétiqueConstruction cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Electrotechnique cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Moteur à gaz 206 kW pièce 0,00022 0,00022Générateur 200 kW pièce 0,00022 0,00022Chauffage/sanitaire cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Mise en service cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Montage du module cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Conception cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Armoire électrique cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Insonorisation cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Réservoir 10000 litres pièce 0,00022 0,00022Echangeur de chaleur cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Ventilation cogénérateur 160 kW pièce 0,00022 0,00022Assemblage générateur-moteur pièce 0,00022 0,00022 Bilan énergétique : Pendant les phases de construction et de démantèlement de l’installation, la consommation énergétique est essentiellement liée à la fabrication des matériaux entrant dans le système. Pendant la phase d’exploitation, elle varie en fonction du type de substrats, selon qu’il y a co-digestion de produit de culture ou pas. Par exemple, si en été l’insuffisance de lisier oblige l’exploitant à mélanger des cultures énergétiques (herbes, céréales) au lisier, l’énergie consommée pour réaliser cette culture devra être comptabilisée. Aussi seules les productions nette d’énergie sont prises en compte, faisant ainsi abstraction de l’énergie auto-consommée.

Le tableau 6 résume le bilan énergétique de la phase d’exploitation. On remarque une production nettement plus élevée de biogaz , donc d’énergie en présence de co-substrat, ce qui traduit la richesse du mélange. Les besoins en électricité de l’installation sont presque doublés en cas de co-digestion afin de prendre en compte l’accroissement des activités de pompage et d’agitation. On suppose aussi que 40% des besoins annuels en électricité est prélevée du réseau lorsque le cogénérateur n’est pas en service et les 60% restant provenant du groupe de cogénération. Le groupe de cogénération convertit le biogaz avec un rendement électrique de 33% et un rendement thermique de 50%. Les besoins en chaleur sont couverts par 5 tonnes de mazout pour l’élevage de bovins dont 80% pour le chauffage et 20% comme consommation en base toute l’année pour la production d’eau chaude. Pour l’élevage des porcs, 40% des

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10 tonnes de mazout sont utilisés en base pour la production d’eau chaude et le reste pour le chauffage en hiver.

Le biogaz produit a un contenu énergétique de 24 MJ/m3.

Tableau 6 : Bilan énergétique d’une installation agricole de digestion anaérobie décentralisée de 300 m3 traitant du lisier en phase d’exploitation (les données sont

rapportées au m3 de digesteur par an )

Exploitation par m3 digesteur par an unitésLisier de vache Lisier de porc

Lisier de vache + Cosubstrat

Lisier de porc + Cosubstrat

Diesel dans les machines TJ 0 0 0,0001 0,0001Biogaz produit par an m3 208,1 225,9 337 354,9Biogaz produit par an kg 233 252,9 377,3 397,4Biogaz produit par an MWh 1,39 1,51 2,25 2,37Consommation Chaleur digesteur MWh 0,0022 0,0025 0,0016 0,0019Chaleur perdue MWh 0,307 0,2635 0,7648 0,6748Production d'électricité MWh 0,4295 0,4665 0,6958 0,78Consommation d'électricité MWh 0,0333 0,0333 0,05 0,05Electricité prélevée du réseau MWh 0,01332 0,01332 0,02 0,02Electricité fournie au réseau TJ 0,0015 0,0016 0,0024 0,0027

Bilan environnemental : le calcul des émissions liées aux infrastructures a été fait en utilisant les valeurs spécifiques d’émissions16 liées à la fabrication des matériaux inventoriés au tableau 5. Les valeurs individuelles sont exprimées en g/m3 de digesteur par an et le total (dernière ligne) en kg/m3digesteur/an comme indiqué dans le tableau 7.

Tableau 7 : Emissions relatives à une installation avec cuve en béton Construction SO2 NOx CO2équiv. NMVOC CO

Béton (sans fer d'armement) 0,29 72,00 20246,40 0,00 0,00 Acier (sans alliage) 17,55 11,50 2818,14 0,19 1,13 Cuivre 0,89 0,58 164,96 0,01 0,04 Polystyrol 231,48 PE 69,04 PVC 0,49 0,35 103,71 0,01 0,03 Laine minérale 0,73 0,34 126,21 0,01 0,10 Traitement des déchets béton armé 0,30 74,70 21005,64 0,00 0,00 polystyrol 1,37 0,88 238,79 0,01 0,07 PVC 0,44 0,31 94,28 0,01 0,03 plastique 3,21 6,33 0,00 0,64 6,96 Total en kg/m3digesteur/an

0,03 0,17 45,10 0,001 0,01

16 voir Working paper n°2 du même projet

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Tableau 8 : Emissions relatives à une installation avec cuve en acier

SO2 NOx CO2équiv. NMVOC CO 0,11 28,00 7873,60 0,00 0,00 27,27 17,87 4380,92 0,30 1,75

0,61 0,39 112,17 0,00 0,03 0,00 540,11

0,00 0,00 0,00 0,00 0,00

2,68 1,77 567,47 0,02 0,01 0,64 0,30 110,43 0,01 0,09

3,05 1,96 529,32 0,03 0,15

Traitement des déchets 0,13 31,25 8787,50 0,00 0,00

0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 9,85 6,33 1711,35 0,09 0,47

Total en kg/m3digesteur/an 0,04 0,09 24,08 0,000 0,00

Tableau 9 : Emissions relatives au hall de stockage SO2 NOx CO2équiv. NMVOC CO

Béton (sans fer d'armement) 0,80 200,00 56240,00 0,00 0,00 Acier (sans alliage) 40,27 26,38 6467,74 0,44 2,58

Traitement des déchets

Béton armé 0,83 206,80 58152,16 0,00 0,00

Total en kg/m3digesteur/an 0,04 0,43 120,86 0,000 0,00

En résumé, la construction et le démantèlement de l’installation de bio-digestion contribue aux émissions suivantes, exprimées en kg/m3 de digesteur/an : Pour une installation avec cuve en béton :

SO2 NOx CO2équiv. NMVOC CO 0,067 0,600 165,96 0,001 0,011

Pour une installation avec cuve en acier,

SO2 NOx CO2équiv. NMVOC CO 0,083 0,519 144,94 0,001 0,005

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En phase d’exploitation, l’élaboration du bilan environnemental est fonction des hypothèses. En règle générale, on suppose que le CO2 émis dans l’atmosphère lors de la combustion du biogaz dans un moteur ou groupe de cogénération provient du cycle naturel de la biomasse. Le taux de dégradation du substrat est différent selon qu’il est digéré ou pas. En prenant pour hypothèse que quelques semaines après l’épandage le niveau de désintégration du carbone est identique, l’on peut ne pas tenir compte dans le bilan du CO2 émis après épandage. Cette hypothèse n’est valable que pour les installations agricoles pratiquant l’épandage.

Le CH4, composante principale du biogaz est lui même un gaz à effet de serre avec un potentiel de réchauffement supérieur au CO2. La combustion du biogaz convertit ce CH4 en CO2 et constitue ainsi la contribution de la biométhanisation aux mesures d’atténuation du réchauffement climatique. Lors du stockage du digestat, les émissions de méthane sont plus élevées du fait de la température élevée et de la présence des bactéries anaérobies. On suppose que le gaz émis a la même composition que le biogaz, donc composé à 67% de méthane. Ce surplus dans l’exemple présent doit être pris en compte dans le bilan environnemental de l’installation. Les valeurs sont résumées dans le tableau 10, exprimées en kg/m3 de digesteur et par an.

Tableau 10 : Surplus d’émissions de gaz dû à la biométhanisation (Stockage et épandage)

Lisier de vache Lisier de porc Lisier de vache + Co-substrat

Lisier de porc + Co-substrat

CH4 4,41 8,15 9,26 13,01

CO2 15,79 20,87 22,36 27,44

CO2 équivalent 108,4 192,07 216,82 300,64

Il vient alors pour la filière biométhanisation étudiée les émissions de CO2 équivalent suivantes en fonction du substrat et du digesteur :

Tableau 11 : Emissions de CO2 de la filière biométhanisation pour divers types de substrats

Purin de vache Purin de porc Purin de vache + Co-substrat

Purin de porc + Co-substrat

Cuve en béton 274,36 358,03 382,78 466,6

Cuve en acier 213,35 337,02 361,76 445,58

Les productions nettes d’électricité et de chaleur sont respectivement données dans le tableau 6 ainsi que la consommation supplémentaire de diesel en cas d’utilisation de co-substrat, ce qui constitue une autre source d’émissions. En tenant compte de cela et en prenant pour hypothèse que toute la chaleur non utilisée par le digesteur est utilisée dans la ferme ou injectée dans un réseau de chaleur, le bilan CO2 est résumé dans le tableau 12. Il en ressort que les émissions évitées de CO2 varient de 81 kg à 345 kg par MWh d’électricité produite par l’installation en fonction du substrat et du digesteur utilisé. La référence utilisée ici est une centrale TGV à 55% de rendement pour la production d’électricité et une chaudière à gaz de 90% de rendement pour la production de chaleur. Les émissions évitées sont beaucoup

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plus élevées si la chaleur est considérée être produite à partir d’une chaudière à mazout comme c’est souvent le cas dans les fermes.

Tableau 12 : Bilan CO2 de la digestion anaérobie pour divers types de substrats

unitésLisier de

vache Lisier de porcLisier de vache +

CosubstratLisier de porc + Cosubstrat

CO2 émis (diesel machines et électricité prélevée du réseau) kg CO2/m3digesteur/an 5,79 5,79 17,19 17,19CO2 lié à électricité nette produite kg CO2/m3digesteur/an 190,29 207,31 309,19 326,30CO2 lié à la production nette de chaleur kg CO2/m3digesteur/an 179,97 195,33 291,97 307,42CO2 (installation avec digesteur en béton) kg CO2/m3digesteur/an

274,36 358,03 382,78 466,60

CO2 évité kg CO2/m3digesteur/an 90,11 38,83 201,18 149,93CO2 (installation avec digesteur en acier) kg CO2/m3digesteur/an

213,35 337,02 361,76 445,58

CO2 évité kg CO2/m3digesteur/an 151,12 59,84 222,20 170,95CO2 évité (digesteur en béton) kgCO2/MWh élect 205,81 81,40 282,79 199,69CO2 évité (digesteur en acier) kgCO2/MWh élect 345,16 125,44 312,34 227,69

En faisant la moyenne pour le même substrat, on peut dire indépendamment du digesteur que les émissions évitées varient entre 103 et 298 kgCO2 par MWh d’électricité produite par l’installation.

Si l’on ne tient pas compte des surplus d’émissions dus au stockage et à l’épandage du digestat du fait de l’incertitude accompagnant les hypothèses soutenant leur évaluation, la moyenne des émissions évitées varie entre 506 et 614 kgCO2 par MWh d’électricité exportée par l’installation.

9. Conclusions La digestion anaérobie est une technologie mûre et commercialisée dans une gamme très large de capacité (1000 à 100 000 tonnes par an). Les considérations environnementales et les dispositions légales y associées font d’elle une option attrayante pour le traitement des déchets, qu’ils soient d’origine industrielle, agricole ou ménagère ou encore solide ou liquide. Une des exigences principales sur les déchets est qu’ils doivent contenir une fraction organique importante. On peut citer les résidus d’entretien paysager, les résidus des entreprises agroalimentaires (pulpes de pomme de terre, transformation de fruits, etc.), les brasseries, la fraction organique des déchets ménagers collectés de façon sélective, les résidus agricoles (élevage et cultures), etc. Leur traitement par voie anaérobie procure des avantages environnementaux tels la diminution des odeurs, la réduction de la quantité de déchets à incinérer ou à mettre en décharge et la réduction de la pollution de l’atmosphère par les industries.

En plus, la valorisation énergétique du biogaz obtenu permet d’éviter les émissions de gaz à effet de serre qui auraient été induites dans les centrales classiques par une production équivalente. En effet, Le biogaz produit à l’issue de la digestion anaérobie des déchets peut alimenter les moteurs à combustion interne au même titre que le gaz naturel pour la production d’électricité. Les moteurs susceptibles de fonctionner au biogaz sont disponibles commercialement et présentent de rendements électriques convenables :

- 25% pour ceux de puissance nominale inférieure à 200 kW

- 30 à 35% pour les plus grands jusqu’à 1,5 MW.

En cogénération, le rendement global des moteurs alimentés au biogaz varie entre 65 et 85%.

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Dans un futur proche, les turbines à gaz seront alimentées au biogaz pour la production d’électricité. Quoique les microturbines se développent assez rapidement, seules les turbines de puissance nominale supérieures à 800 kW ont un rendement égal ou supérieur aux moteurs à combustion interne. Néanmoins, l’utilisation des turbines permet une meilleure valorisation de la chaleur et le rendement global pourrait dépasser 70%.

Des développements sont en cours pour l’utilisation du biogaz dans les moteurs Stirling et les piles à combustibles dans l’espoir de produire ainsi de l’électricité à moindre coût.

L’exemple précédent montre combien l’évaluation de la réduction d’émissions est complexe. Contrairement aux autres filières énergétiques, les émissions de la filière biogaz ne sont pas seulement liées à la consommation énergétique, mais aussi et surtout les émanations de gaz lors du stockage et de l’épandage du digestat. Dans les installations agricoles, le surplus d’émissions de CO2 et de méthane est un point crucial. Son évaluation est fonction de plusieurs paramètres (climat, moment d’épandage, etc.). La récupération du gaz émis lors du stockage améliore significativement le bilan des émissions, surtout de méthane.

Le cas étudié précédemment montre que les émissions évitées passe de 100 – 300 kg CO2éq à 500 – 600 kgCO2éq. L’augmentation des émissions de NH3 suite à la digestion anaérobie est une certitude justifiée par plusieurs auteurs par l’augmentation du pH et de la pression partielle du milieu. Un stockage ne fut-ce qu’intermédiaire dans une cuve fermée contribue à la réduction de méthane et d’ammoniac.

Les préoccupations sont différentes dans les installations industrielles ou centralisées traitant les déchets ménagers parce que ceux-ci auraient été traités différemment et l’utilisation du compost issu de leur bio-digestion constitue un gain énergétique, donc des émissions évitées qu’il faut prendre en compte dans le bilan. L’évaluation de la quantité d’engrais chimique substitué tient compte de la composition du compost. En supposant que l’apport du compost doit compenser les éléments nutritifs extraits du sol lors de la récolte, un hectare de plantation nécessiterait 33 kg de N, 11 kg de P2O5 et 42 kg de K2O pour compenser l’effet d’une production annuelle de 1,0 – 1,2 tonnes de sorgho ou d’arachides, ce qui équivaut à 3 – 6 tonnes de digestat solide. En supposant que les effluents du digesteur sont à 90% d’humidité, la quantité de digestat nécessaire devient 30 à 60 tonnes par hectare et par an, ce qui correspond à la production d’un digesteur de 6 – 8 m3 de capacité annuelle (GATE, 1999)17.

17 ISAT/GTZ, 1999. Biogas Digest Vol. II. : Biogas Application and Product Development