economie monetaire cours complet

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IUFM AUVERGNE___________________________

ECONOMIE - GESTION___________________________ Cours de Mr DIEMER __________________________________________________________________________________________

ECONOMIE GENERALE__________________________________________________________________________________________

4me PARTIE : LE FINANCEMENT DE LECONOMIECHAPITRE 13LA MONNAIE ET LE MARCHE MONETAIRE

MOTS CLES- Agrgats montaires (M1, M2, M3) - Anticipations - Banque centrale, banques commerciales - Banque Centrale Europenne (BCE) - Banque de France - Cours forc, cours lgal - Crances - Demande de monnaie keynsienne - Demande de monnaie friedmanienne - Demande de monnaie de Tobin - Dsintermdiation - Equation de Cambridge - FCP - Fonctions de la monnaie - Formes de la monnaie - Intermdiation bancaire - Loi bancaire de 1984 - Loi de Gresham - Prfrence pour la liquidit - Principe du multiplicateur, principe du diviseur - March montaire - Rserves obligatoires - SEBC - SICAV - Taux dintrt - Thorie quantitative de la monnaie - Trsor public

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PLANI. FONCTIONS, FORMES ET MESURE DE LA MONNAIE A. Les fonctions de la monnaie 1. La monnaie, moyen dchange 2. La monnaie, rserve des valeurs 3. La monnaie, unit de mesure des valeurs B. Les formes de la monnaie 1. La monnaie mtallique 2. La monnaie papier ou les billets 3. La monnaie scripturale 4. La monnaie lectronique C. Les mesures de la monnaie 1. La dfinition des agrgats montaires 2. Lutilisation des agrgats montaires II. LE MARCHE DE LA MONNAIE A. Loffre de monnaie 1. Les mcanismes de cration montairea. Les Banques commerciales b. La Banque Centrale (Banque de France) c. Le trsor Public

2. Les contreparties de la masse montaire ou crances transformablesa. Les crances sur lconomie b. Les crances sur lextrieur c. Les crances sur lEtat

3. Les limites de la cration montaire B. La demande de monnaie 1. Dtention de monnaie dans une optique transactionnellea. La thorie quantitative de la monnaie (I. Fisher) b. Lquation de Cambridge (A. Marshall, A.C Pigou)

2. Demande de monnaie comme demande dencaisse (J-M Keynes)a. Les motifs de transaction, de prcaution et de spculation b. Le motif de financement c. La prfrence pour la liquidit - La relation entre le prix dun actif et le taux dintrt - Les anticipations des agents

3. Demande de monnaie et diversification du patrimoine (Friedman) 4. Demande de monnaie, diversification du patrimoine et risque (Tobin) C. Le taux dintrt, prix de la monnaie ? D. Lorganisation du march de la monnaie 1. La loi bancaire de 1984a. Lunicit du cadre juridique b. Rglementation et contrle de la profession bancaire c. Les mcanismes et les procdures de scurit d. La banque universelle

2. Les acteurs du systme bancairea. Les tablissements de crdit b. Les autres acteurs

3. Les diffrents compartiments du march montairea. Le march interbancaire (intermdiation financire) b. Le march des titres de crances ngociables (dsintermdiation)

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Lapproche la plus courante de la monnaie la dfinit comme un moyen de paiement accept par tous, au sein dun espace gographique donn, directement utilisable pour effectuer les rglements sur les marchs des biens et services ou pour rgler dfinitivement toutes les dettes au sein dun espace montaire donn. Ltude de la monnaie nous oblige dlimiter le champ de nos investigations. - Nous nous situons dans une conomie montaire, cest--dire dans une conomie o il y a circulation de la monnaie. La monnaie a ce que lon appelle un pouvoir libratoire immdiat et gnral. La monnaie na pas dutilit prive, mais une utilit sociale. Son utilisation est en effet uniquement collective. - La monnaie est un bien indivisible (sa consommation par un individu quelconque ne diminue par la consommation des autres) qui schange sur un march. Elle est donc offerte et demande sur le march montaire. - Le march de la monnaie est organis et structur. On parle gnralement de systme bancaire, de loi bancaire, de banque centrale et de banques commerciales. Lexistence de la monnaie repose sur la confiance. Celle-ci est lie la garantie officielle qui est appose sur toute monnaie sous forme dune marque, image, emblme... La garantie donne par une autorit reprsentant la collectivit, permet lusage par le plus grand nombre. - Le march de la monnaie doit coexister avec dautres marchs (march des biens et services, march financier et march du travail). Ces 4 marchs sont interdpendants, ainsi le dsquilibre dun march entrane souvent un dsquilibre sur les autres marchs. Le march de la monnaie et le march financier sont des marchs trs volatiles, les ajustements en termes de prix sont trs rapides. Le march du travail et le marchs des biens et services sont plus rigides (les ajustements sont plus longs). - La monnaie et le march montaire doivent tre analyss en tenant compte du contexte historique, gographique et temporel. Lmergence de lUnion Economique et Montaire (UEM), larrive de lEuro, la cration dune Banque Centrale Europenne ont modifi le paysage montaire national, europen et international. - Lutilisation et la circulation de la monnaie renvoient la question du financement de lconomie, cest dire la finance directe (march financier) et indirecte (intermdiation bancaire).

I. FONCTIONS, FORMES ET MESURES DE LA MONNAIE A. Les fonctions de la monnaieOn distingue habituellement trois fonctions de la monnaie :

1. La monnaie, intermdiaire des changesDans les socits primitives, les changes se ralisaient sous la forme dun troc, un bien tant cd contre un autre bien. Cette conomie non montaire prsentait cependant une srie dinconvnients qui en limitaient son usage : - Tout agent devait trouver non seulement quelquun qui soit prt lui vendre les biens quil recherche mais aussi qui accepte en change les biens dont lagent dispose. Lchange devenait particulirement exceptionnel. - Il tait relativement difficile de dterminer la valeur dune marchandise par rapport toutes les autres. La difficult de lchange augmentait lorsque les marchs et les biens taient nombreux.

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- Enfin les cots de transaction (recherche des lieux et termes de lchange, recherche des clients, perte de temps, cots de stockage, cots de recherche dinformation...) dun tel change pouvaient tre trs importants. Le recours un moyen de paiement unique et accept par tous, la monnaie, est donc devenu une ncessit pour pallier les inconvnients du troc. Lintervention de la monnaie permet dassurer les changes et de sparer chaque transaction en deux parties : une vente et un achat. Ainsi dans une conomie montaire, celui qui dtient un bien et souhaite le vendre, va pouvoir cder ce bien contre une certaine quantit de monnaie qui en constitue le prix. La monnaie limine les cots de transaction car elle permet dviter ceux affrents la recherche dun partenaire, lattente, au transport. Plus gnralement, avec la fonction dintermdiaire des changes, la monnaie peut tre dfinie comme un moyen de rglement : indtermin (cest dire qui permet dacqurir nimporte quel bien ou service, et de rgler nimporte quelle dette), gnral (elle est admise par tout le monde et en toutes circonstances, dans un espace dtermin, gnralement national ou dans une communaut de paiement, exemple de lEURO dans lUEM), immdiat (le simple transfert de cet instrument de paiement entrane lextinction de la dette). Pour assurer ce rle, la monnaie a cours lgal, cest dire quelle ne peut tre refuse dans les paiements.

2. La monnaie, rserve des valeursDs que la monnaie est un moyen dchange, il est possible de la conserver pour raliser un achat une priode ultrieure. La monnaie donne ainsi la possibilit de transfrer du pouvoir dachat dune priode lautre. Elle sert donc de rserve de pouvoir dachat. On peut alors introduire la ncessit de dtenir une encaisse montaire et donc une vritable demande de monnaie, ce qui implique que les agents conomiques ont un comportement spcifique par rapport la monnaie qui pourtant na aucune utilit et nest donc pas lobjet dun besoin. Les encaisses montaires sont constitues par les agents pour diverses raisons : - Pour faire face au dcalage qui existe entre le moment o les agents effectuent leurs dpenses (tales dans le mois pour le mnage) et le moment o ils peroivent leurs revenus (en fois de mois pour les salaris). - Pour constituer une rserve de monnaie pour des dpenses imprvues ou pour saisir toute opportunit (placements financiers, acquisition de biens....). Cette fonction de rserves de valeur volue en fonction de linflation, cest dire de laugmentation du niveau gnral des prix. En priode de hausse des prix, le pouvoir dachat de la monnaie (la quantit de biens et services que lon peut acqurir avec une unit montaire) diminue, ce qui dgrade sa capacit tre une unit de rserve de valeur. En cas dhyper-inflation, la monnaie nassure plus la fonction de rserve de valeur car les agents conomiques prfrent sen dbarrasser et raliser leurs transactions en monnaie trangre (ou en troc). En revanche, lorsque les prix baissent, cest linverse qui se produit, le pouvoir dachat de lagent conomique augmente. La monnaie est recherche et conserve par les agents conomiques. A travers la fonction de rserve de valeur, la monnaie est considre comme un actif de patrimoine et devient une forme que peut prendre la richesse. Les agents conomiques peuvent en effet dtenir leur patrimoine sous forme dactifs rels comme les biens de production (usines, immeubles, terrainsor), dactifs financiers comme les obligations et actions dont le rendement est constitu de recettes en monnaie (lintrt pour les obligations,411

les dividendes et plus-values pour les actions), dactifs liquides comme la monnaie (billets et dpts vue) et quasi-monnaie (dpts terme, bons du Trsor). La monnaie constitue en effet, par rapport tous les autres biens, un actif parfaitement liquide permettant dacqurir tout bien nimporte quel moment. Cette proprit de liquidit fait quelle est immdiatement disponible pour acqurir des biens (le bon du trsor et les obligations sont moins liquides que la monnaie, car ils doivent tre pralablement vendus sur un march contre de la monnaie afin dtre utiliss comme moyens de paiement).

3. La monnaie, unit de mesure des valeurs (unit de compte)Le Troc ne permettait de dterminer la valeur dune marchandise que par rapport celle avec laquelle elle avait t change. Avec la monnaie, qui constitue un talon de mesure des valeurs, on ramne les multiples valuations de chaque bien en termes de tous les autres une seule valuation, par rapport uniquement lunit de compte. La monnaie est ainsi une unit de mesure commune grce laquelle, les prix individuels des diffrents biens et les transactions sont valus dans un langage chiffr commun tous les membres de la communaut. Le nombre de prix calculer a ainsi diminu.

B. Les formes de la monnaieSi la nature de la monnaie dans tout systme montaire est unique, il existe plusieurs sortes dinstruments de circulation que lon regroupe souvent dans la littrature conomique sous le terme de formes de la monnaie . En ralit, ltude de ces formes inclut celles des techniques dmission des diffrents instruments montaires, tout autant que la description des instruments de circulation eux-mmes.

1. La monnaie mtalliqueElle fait partie de la catgorie plus vaste de la monnaie marchandise. On appelle ainsi la monnaie dont la fonction dunit de compte est rattache une quantit dun talon qui est un bien matriel et une marchandise ayant un cot de production et une valeur. Linstrument de paiement est ainsi un objet tangible. Ces objets ont t divers selon les socits (btail, sel, coquillages, morue....) mais la monnaie marchandise la plus connue est la monnaie mtallique. Si les mtaux tels que le cuivre, le fer, le bronze ont constitues les premires monnaies, ce sont les mtaux prcieux (or et argent), en raison de leurs qualits particulires, qui se sont progressivement imposs comme instruments montaires. Quatre qualits essentielles de lor et largent peuvent tre prsentes : - leur inaltrabilit (lor et largent peuvent tre stocks sans inconvnients) - leur divisibilit (il est possible dobtenir des lments de dimension voulue, la valeur de ceux-ci tant proportionnelle leur poids). - leur mallabilit (les mtaux prcieux peuvent recevoir lempreinte dun symbole montaire) - leur simplicit (une valeur importante pour un faible volume) Les mtaux prcieux ont subi de nombreuses modifications dans leur utilisation comme monnaie, ce qui a permis de favoriser considrablement les transactions. A Babylone et en Egypte, lor et largent circulent sous forme de lingots sans poids ni forme dtermins : il faut donc mesurer le poids du mtal et sa puret lors de chaque paiement. On parle de monnaie pese. Vers 800 A.V J.C, les lingots prennent un poids et une forme dtermins donnant naissance aux pices mtalliques. On parle de monnaie compte.

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Durant lAntiquit, les pices sont frappes par les autorits religieuses qui garantissent ainsi la valeur des pices, cest dire le titre et le poids du mtal quelles contiennent. On parle de monnaie frappe. Au moyen ge, les souverains tentent leur tour de prendre le monopole de la frappe de la monnaie. Le mtal est transform en instruments montaires, des pices frappes dans des organismes spcialiss (Htels des Monnaies), reprsentant un pouvoir politique (le Prince), qui achtent le mtal prix fixe et arbitrairement dtermin, dit prix lgal. A cette occasion, la quantit de mtal contenue dans la pice est pese et certifie par lapposition dune marque officielle. Linstauration de systmes montaires mtalliques, reposant sur le bimtallisme, or et argent, date du XVII et XVIIIme sicles. Ils cherchent organiser le moyen de garantir la stabilit des monnaies mtalliques face larbitraire politique en imposant une rgle concernant la dfinition et lusage de la monnaie nationale, notamment par une relation fixe entre lunit montaire et une quantit de mtal prcieux ainsi que la mise en oeuvre de la frappe par un organisme spcialis. Ce systme est apparu en France avec le franc germinal, en mars 1803. Les francs sont des pices dargent et dor qui circulent pour les paiements et qui auront un pouvoir libratoire illimit (tout dbiteur peut sacquitter dune dette au moyen de pices dor et dargent, ce qui lui confre cours lgal). Le systme sinspire des principes libraux comme la libre frappe des monnaies (quiconque possde le mtal peut lapporter lHtel des Monnaies pour le faire diviser, possibilit dchanger des pices contre des lingots) toutefois seule la loi peut modifier le rapport officiel entre les deux mtaux (le franc tait alors dfini selon un rapport lgal entre lor et largent soit 1g dor gal 15,5 g dargent). Le systme du bimtallisme voluera vers la seconde moiti du XIX sicle vers le monomtallisme du fait des rapports entre le mtal monnaie et le mtal marchandise. En effet, les pices du mtal le plus apprci sur le march furent lobjet de spculation (le cours des mtaux prcieux ft largement influenc par la dcouverte des mines dor et dargent) et de thsaurisation grce aux possibilits de transformation. Ainsi si largent se dprcie par rapport lor sur le march, ce dernier sera thsauris. On assiste alors une rivalit entre les deux mtaux marqu par le triomphe du monomtallisme-or. Il est instaur en Grande Bretagne ds le dbut du 19me sicle, puis en Allemagne et aux Etats Unis, et en France en 1876. Ce phnomne est plus connu sous le nom de Loi de Gresham : Lorsque deux monnaies circulent dans un pays, la mauvaise a tendance chasser la bonne . Comment expliquer ce phnomne ? Considrons un agent qui reoit deux pices dor senses avoir la mme valeur montaire. La premire est compose dor pur alors que la seconde est compose de 50% dor pur et de 50% dargent. Chaque pice possde officiellement le mme pouvoir dachat. Cependant, la seconde a moins de valeur que la premire et cela est parfaitement connu. Si ces deux monnaies circulent en mme temps, les agents conomiques vont garder la monnaie compose entirement dor pur et utiliser lautre pour le rglement de leurs transactions. A la veille de la premire guerre mondiale, rgne le systme montaire international dit de ltalon-or sous lgide de lAngleterre, cest dire rglement par la politique montaire et les interventions de la Banque dAngleterre. Toutes les monnaies sont alors dfinies en un poids dor et les taux de change entre elles sont donc des rapports de quantits physiques dor.

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Malgr quelques expriences, la premire guerre mondiale est marque par labandon des mcanismes de ltalon-or. Cette suspension sexplique principalement par le dveloppement dautres formes de monnaie et de crdit li aux ncessits des dpenses de guerre et de limpossibilit de satisfaire aux exigences de convertibilit en mtal de ces instruments. Certains pays comme la Grande-Bretagne (1925), la France, ont tent de rtablir lancien systme. On instaure en France, ds 1928, ltalon lingot dor. Le franc est convertible nouveau en or, mais seulement en lingots dun poids minimum de douze kilogrammes et non plus en pices, afin dconomiser lor. La crise de 1929 et ses suites contraindront lensemble des pays abandonner toute convertibilit en or mme en lingots. Lor ne jouera plus aucun rle dans les paiements et toute rfrence lui aura dfinitivement disparu au niveau international lorsque le dollar, seule monnaie encore dfinie en or, en sera dtach en 1971 avec la fin des Accords de Bretton Woods.

2. La monnaie de papier ou les billetsLa monnaie papier est accepte en vertu de la confiance de son metteur (do sa dnomination de monnaie fiduciaire). On dit galement que cest un instrument montaire qui a une faible valeur intrinsque en comparaison de sa valeur faciale. La mise au point de cet instrument montaire sest rvle relativement longue. Trois grandes tapes ont marqu lvolution du billet de banque : Dans lAntiquit, puis au Moyen Age, les particuliers dposent de lor et de largent auprs de banquiers et reoivent en contrepartie des billets reprsentatifs de ces dpts. Le Billet est alors un certificat reprsentatif dun dpt de mtal prcieux. Utilis pour effectuer des rglements, le billet ne constitue pas pour autant une vritable monnaie. Il faut attendre le XVIIme sicle pour que le banquier sudois Palmstruck procde une relle cration du billet de banque. En mettant un nombre de billets suprieur au nombre de dpts de mtal prcieux, Palmstruck fait des billets une vritable monnaie sajoutant la monnaie mtallique. La circulation de cette nouvelle forme de monnaie repose avant tout sur la certitude de pouvoir convertir tout moment les billets en mtal. On parle alors de billet de banque convertible. Cette convertibilit du billet de banque ft favorise par lEtat (la loi), qui lui confra cours lgal (le billet ne pouvait tre refus en paiement par tous). Cest alors sur la loi que repose la confiance dans cette forme de monnaie. A la suite dvnements tels que les guerres et les demandes massives de conversion des billets en mtal prcieux, lEtat ft amen prononcer le cours forc des billets (il devenait impossible den obtenir le remboursement en pices). Cette mesure mise en place temporairement par de nombreux pays, devint dfinitive aprs la crise conomique de 1929 et les nombreux chocs montaires de cette fin de sicle. On parle alors de billet de banque inconvertible.

3. La monnaie scripturale ou la monnaie de banqueOn appelle ainsi la forme de la monnaie consistant en une criture dans les livres dune banque sous la forme de louverture dun compte un client donnant naissance un dpt qui est une reconnaissance de dette de la banque envers son titulaire, et qui circule, sert payer ses cranciers, est transfre sur le compte dun autre agent par lintermdiaire dinstruments tels que les chques, les ordres de virement et les cartes bancaires. Il sagit de pratiques trs anciennes. Ainsi les Grecs et les Romains connaissaient les virements de mme que les arabes qui les utilisaient au IXe et Xe sicles. Cependant leur vritable dveloppement date du XIIe sicle grce aux marchands italiens et flamands.414

Les premires techniques dites bancaires apparaissent sous la forme de virements effectus partir des comptes courants de marchands tenus par des banquiers changeurs. Les transferts pouvaient soprer entre banques. Les rglements se faisaient par dbits et crdits de comptes et des avances en comptes courants (dcouverts ou prts gags) taient possibles. Les comptes taient ouverts sans dpts despces pralables. Viendront ensuite les procds de paiements distance et lettres de change. Ces techniques prsentent lavantage de permettre de payer sur une autre place un exportateur tranger par exemple. Pour cela, on utilisait les reconnaissances de dettes crites chance fixe. Au moment des Foires ou Places, on concentrait en un lieu et une date, un grand nombre de ses crances pour lesquelles on procdait la compensation gnrale. Les soldes taient rarement pays en espces (car dangereux et coteux) et plus gnralement par report la Foire suivante. La lettre de change ft le type de reconnaissance de dette le plus rpandu. Elle apparat au XIVe sicle et va devenir un outil indispensable du commerce et plus particulirement du commerce international. Ce mcanisme permet le paiement distance et met en relation plusieurs agents. Ces pratiques en se gnralisant, notamment dans le cadre de Foires, vont donner lieu de vastes systmes de compensation multilatrale dans lesquels les intermdiaires spcialiss vont sinterposer pour centraliser les lettres de change, valuer leur qualit (juger la liquidit des dbiteurs) et effectuer le change de celles-ci puisquelles sont libelles dans des units de compte diffrentes. Ainsi apparaissent des marchands de dettes spcialiss : les banquiers. Le rle de ces intermdiaires spcialiss va progressivement saccrotre. Ils vont tout dabord permettre au systme des paiements de samliorer en acclrant la circulation des dettes par la technique de lendossement de lettres de change qui cependant peut tre opr par nimporte quel agent. Le transfert de crance seffectuant alors par signature du nouveau crancier, les banquiers vont accepter de se substituer aux cranciers, ce qui permet de rgler plus vite les cranciers initiaux. Ils vont ensuite faciliter le tirage de lettres de change en les mettant spontanment sur eux-mmes pour permettre leur client de rgler et amliorer la compensation. A partir du XVIIIe sicle, apparat lescompte. A cette occasion, ils ajoutent leur fonction de participation aux mcanismes de paiements celle de faire des crdits. La Banque achte alors la traite son client et lui remet en change des espces ou des billets. Cette opration loblige dtenir des rserves. Ce sera un facteur de dveloppement dune autre activit caractristique des banques; celle de recevoir des dpts du public. La monnaie scripturale reprsente de nos jours, une part trs importante des moyens de rglement. La lettre de change et le billet ordre sont cependant de moins en moins utiliss au profit dautres instruments : - Le chque est un ordre de paiement crit adress sa banque (le tir) que le payeur (le tireur) remet au bnficiaire. Celui-ci peut se faire payer auprs de la banque du tir directement ou le remettre sa propre banque pour crditer son compte. Ainsi un dpt bancaire (une dette du tir) sera transfr du compte du payeur vers le compte du bnficiaire. - Le virement est un ordre du payeur adress directement sa banque afin que celle-ci effectue un transfert de fonds sur le compte dun bnficiaire par dbit ou crdit. Celui-ci peut tre un ordre automatique (permanent) donn la banque afin que cette dernire vire date fixe un montant dtermin un tiers dsign lavance par le payeur. Le virement et le chque sont rdigs sur du papier mais sont traits par linformatique.

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- Lavis de prlvement automatique est linitiative du crancier qui opre un prlvement dans le cadre dune autorisation donne par le titulaire du compte. Cet instrument est gnralement utilis pour le paiement des impts et des factures (tlphone, lectricit). La somme est automatiquement et rgulirement prleve sur le compte du dbiteur. - Le titre interbancaire de paiement ; le dbiteur donne son accord pour le paiement de chaque opration, mais le titre fait ultrieurement lobjet dun traitement informatique. - La carte bancaire est linstrument le plus dmatrialis. Lors du paiement, les coordonnes bancaires du payeur sont saisies par lecture dune piste magntique de sa carte. Elles permettront de pouvoir automatiquement dbiter son compte et crditer le bnficiaire de faon immdiate ou diffre selon le type de contrat qui lie la banque et le dtenteur de la carte. Il existe des formes labores qui permettent des oprations encore plus rapides, plus sres et plus anonymes. Ainsi un code secret peut tre joint la carte qui est compos par le payeur rendant le dbit immdiat. Les cartes puces sont des cartes bancaires possdant un ordinateur miniaturis permettant de stocker des informations sur un compte bancaire et de le dbiter trs rapidement. On parle galement de monnaie lectronique. Si lvolution des formes de la monnaie a t peu marque durant les sicles prcdents, la France (comme beaucoup de pays europens) connat depuis les annes 50 trois mutations importantes en matire dutilisation des formes de monnaie et des moyens de paiement. La premire concerne le fort dveloppement de la monnaie scripturale face la monnaie fiduciaire. Entre 1950 et 2000, la part des billets et des pices de monnaie est passe de 51% 16% (celle des dpts vue de 48,9 84%). Cette volution est lie la croissance conomique enregistre durant les Trente glorieuses (dveloppement de la consommation de masse, besoins croissants de financement, essor du secteur bancaire). Ce phnomne marque un dplacement du pouvoir de cration montaire de la Banque Centrale aux Banques commerciales. La seconde ne concerne que la monnaie scripturale. Elle est relative aux moyens de paiements qui bnficient des progrs de la technologie et seffectue au dtriment des modes de paiements traditionnels. Evolution des principaux moyens de paiements scripturaux 1997 2005 Chques 47% 28.8% Cartes bancaires 23% 37.1% TIP 1% 1.1% LCR 2% 0.9% Prlvements 12% 16.2% Virements bancaires 15% 15.8%Source : Banque de France (2006)

La monnaie lectronique ou montique constitue la troisime mutation en matire de modes de paiement. Elle correspond lensemble des techniques informatiques, magntiques et tlmatiques assurant le transfert de sommes dun compte vers un autre sans recourir un support papier. Lessor des NTIC (Internet) autorise le dveloppement de ce que lon appelle le porte-monnaie lectronique. Ce systme repose sur un chargement, par un metteur, dunits lectroniques sur le microprocesseur dune carte contre le dbit du compte du porteur.

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C. Les mesures de la monnaieLes mesures de la monnaie reposent sur la constitution dagrgats qui tiennent une place importante tant pour la connaissance du comportement financier de agents conomiques que pour l dfinition et la conduite de la politique montaire.

1. La dfinition des agrgats montairesLes agrgats montaires sont dfinis comme : des indicateurs statistiques refltant la capacit de dpense des agents non financiers rsidents. Ils regroupent les moyens de paiement de ces agents, et parmi les placements financiers, ceux qui peuvent tre utiliss en rglement des transactions aprs conversion rapide et facile en moyens de paiement sans risques de perte de capital . Cette dfinition gnrale appelle certains commentaires : - Un agrgat montaire est une mesure comptable de la monnaie en circulation (encore appele masse montaire). La monnaie utilise pour des oprations entre agents financiers nen fait donc pas partie. - Le contenu de la masse montaire variera en fonction des actifs financiers choisis pour comptabiliser la monnaie en circulation (pices, billets, monnaie scripturale ?) - Une telle dfinition conduit exclure des agrgats, les actions et les obligations (dont la conversion en moyen de paiement fait courir un risque de moins-value), les formes de placement exigeant une dure minimale de dtention (cest le cas des plans dpargnelogement, mais aussi des contrats collectifs dassurance-vie pour lesquels une immobilisation minimale de 4 ans et 8 ans est ncessaire). - Les dpts en devises ou en euros dans une banque franaise dun non-rsident correspondent une opration internationale de portefeuille qui naffecte pas lactivit conomique interne. On peut donc les exclure de la masse montaire. Jusquen dcembre 1998, la France comptabilisait 4 agrgats montaires (M1, M2, M3, M4) et 3 agrgats de placements (P1, P2, P3).M1 Monnaies mtalliques et billets Les dpts vue en francs

M1

M2

M3

M4

M2 - M1 Les Livrets soumis limpt Les Livrets A et livrets bleus Livrets dEpargne Populaire Les Comptes pour le Dveloppement Industriel (CODEVI ) Les Comptes dEpargne Logement (PEL) M3- M2 Titres dOPCVM court terme Les Avoirs en devises trangres Les Placements court terme non ngociables mis par les banques, la Poste, le Trsor Les Titres de Crances ngociables mis par les tablissements de crdit

M3 - M4 Titres de crances ngociables en francs

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Au del de M4, on entrait dans lpargne financire, classe en trois sous-ensembles cohrents et non embots. Il sagissait ici de ressources longues correspondant un financement non montaire de lconomie. - P1 : Formes dpargne contractuelle (PEL, PEP, Bons de Capitalisation). Rassemble des placements stables par vocation et non ngociables sur un march. - P2 : Obligations et parts de SICAV obligataires dtenues par les agents non financiers. - P3 : Obligations et parts de SICAV actions dtenues par les agents non financiers. Depuis le 1er janvier 1999, les agrgats montaires sont tablis par la Banque Centrale Europenne et diffuses sur des bases mensuelles, trimestrielles et semestrielles. La prsentation par la BCE des agrgats montaires de la zone Euro repose sur des dfinitions harmonises des secteurs metteur et dtenteur de monnaie. Le secteur metteur de monnaie regroupe les institutions financires et montaires (IFM) rsidentes de la zone Euro dont les exigibilits vis vis des non IFM situes dans la mme zone prsentent un caractre fortement montaire. En France la notion dIFM englobe la Banque de France, les tablissements de crdit au sens de la loi bancaire, la Caisse des dpts et consignations, les OPCVM montaires, le Trsor public et la Poste en tant que collecteur de dpts. Le secteur dtenteur de monnaie recouvre lensemble des non-IFM rsidents dans la zone Euro, soit : les mnages, les socits non financires, les gouvernements dEtats fdrs, les collectivits locales, les administrations de scurit sociale et les institutions financire autres que les IFM (Caisse nationale dautoroutes). La BCE retient trois agrgats montaires : - Un agrgat montaire troit M1 : Billets et pices en circulation, + Dpts vue - Un agrgat montaire intermdiaire M2, comprenant M1 + Dpts remboursables avec pravis < 3 mois (comptes sur livret) + Dpts terme non ngociables dune dure < 2 ans - Un agrgat montaire au sens large M3 ajoutant M2 des instruments ngociables mis par les IFM (les titres de crances dune dure < 2 ans, les titres dOPCVM montaires dont SICAV ET FCP).Encours brut (milliards d) Novembre 2007 1636,6 Taux de croissance annuel brut (%) Novembre 2007 15.8 12 4.3 16.5 91.6 4.7 14.7 3.0 19.3 61.1 3.8

Contribution franaise M3 (a) Engagements montaires vis--vis des rsidents franais 1543,2 458,2 Dpts vue Autres dpts court terme 549,9 Dpts terme < 2 ans 122,4 Comptes sur livret 427,5 Instruments ngociables 535,1 Titres OPCVM montaires 351,5 Pensions 46,2 Titres de crances < 2 ans 137,3 Engagements montaires nets vis-vis du reste de la zone euro (b) 93,5 Source : Banque de France (dcembre 2007)

Si nous comparons les anciens agrgats utiliss par la Banque de France en 1998 et ceux adopts par le SEBC depuis 1999, on peut noter les points suivants : - une parfaite correspondance entre lancien et le nouvel agrgat M1 - le nouvel agrgat M2 est suprieur lancien. Les dpts avec pravis infrieur ou gal 3 mois recouvrent les placements vue ayant un caractre de transfrabilit incomplet. Dans le cas de la France, il sagit des livrets A et bleu, CODEVI, CEL, livrets dpargne populaire,

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livrets jeunes, livrets soumis limpt). Sont aussi comptabiliss dans M2, les dpts terme dune dure infrieure ou gale 2 ans. - les composantes M3-M2 sont estimes comme le solde des encours mis et dtenus par les IFM. Au niveau franais, elles peuvent tre ngatives lorsque les IFM rsidant en France dtiennent plus de titres mis par les IFM de la zone Euro quelles nen mettent elles-mmes. Nous retrouvons dans M3-M2 : * les titres des OPCVM montaires * les titres de crances mis dune dure initiale infrieure ou gale deux ans * les instruments du march montaire (titres mis court terme, infrieur 1 an et ngociables sur le march montaire) * les pensions (espces perues en contrepartie des titres vendus aux IFM un prix donn dans le cadre dun engagement de rachat desdits titres un prix et une date dtermine). Les parts franaises dans la zone euro sont respectivement de 19,9% pour M1, 16,6% pour M2 et 20,4% pour M3. Malgr lUnion Montaire et Economique, et le nouveau statut de la BCE, la Banque de France continue avoir une batterie dindicateurs nationaux : - dcomposition des comptes sur livrets (livret A : 44%, livret bleu : 18%) - dcomposition des dpts terme dune dure > 2 ans (PEL : 200 Milliards d ; PEP : 70 milliards d). Le plus important des indicateurs de la Banque de France reste cependant lEIT (endettement intrieur total). Il sagit de lendettement de lEtat et des agents non financiers sous la forme de crdits et de financements sur le march montaire et obligataire.DECOMPOSITION DE LENDETTEMENT INTERIEUR TOTAL (milliards d) Endettement intrieur total 3502.2 Mnages et assimils 883.4 Socits non financires 1429.4 Administrations publiques 1189.3 Crdits obtenus auprs des IFM rsidentes 1774.9 Crdits obtenus auprs des non rsidents 423.7 Financements de march 1303.5 Socits non financires 293 Administrations publiques 1010.5 Source : Banque de France (octobre, 2007)

Le suivi de lEIT renseigne sur les ressources demprunt dont disposent les agents non financiers rsidents et permet dapprcier un risque daugmentation excessive de la demande interne (une hausse de linflation).

2. Lutilisation des agrgats montairesSachant que les agrgats ont pour objet de prciser les comportements montaires et financiers des agents conomiques, limportant est de connatre leurs volutions. Un des objectifs prioritaires de la politique conomique, et plus particulirement de la politique montaire est la lutte contre linflation. Certains thoriciens (classiques) ont avanc quil existait une relation positive entre la croissance de la masse montaire et la hausse des prix (de nombreux constats empiriques sont venus confirmer cette thse). Cest pourquoi la BCE surveille lvolution de lagrgat M3 et sen sert comme indicateur avanc du taux dinflation. Lvolution de la structure de la masse montaire reflte les changements de comportement des agents face aux actifs financiers.

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Ltude des agrgats indique les mouvements de substitution entre les divers lments de la masse montaire. On peut galement chercher analyser les volutions des agrgats montaires par rapport au PIB. Pour prciser celles-ci, on emploi un ratio : la vitesse de circulation de la monnaie. En la matire, il convient de distinguer la vitesse-transaction de la monnaie qui donne le nombre de fois que lunit montaire moyenne est change pendant lunit de temps (lanne) et la vitesse revenu de la monnaie qui est le nombre de fois que lunit montaire moyenne est la contrepartie de transactions gnratrices de revenus pendant lunit de temps, soit V = Y / M (Y est le revenu national identique au PIB). La vitesse-revenu de la monnaie sera diffrente de sa vitesse-transaction dans la mesure o le PIB ne reprend pas lensemble des transactions effectues au cours dune anne, mais seulement celles ayant engendr une cration de biens et services. Les ratios prsents ici sont donc reprsentatifs de la vitesse-revenu. La vitesse de circulation de la monnaie V estime par rapport entre le PIB et lencours de lagrgat pris en compte. En 1999, VM1 = PIB/M1 = 4,36 ; VM2 = PIB/M2 = 2,30 ; VM3 = PIB/M3 = 1,57. Au cours des deux dcennies, la vitesse revenu de M3 a affich une tendance assez rgulirement oriente la baisse puisque durant cette priode, la progression de M3 a t suprieure de quelque 1% celle du PIB. Lvaluation de la vitesse de circulation de la monnaie peut fournir de prcieuses indications aussi bien conjoncturelles (la hausse de V est associe une priode de croissance conomique) que structurelle (modifications des habitudes de paiement).

II. LE MARCHE MONETAIREAvec le dveloppement de lactivit et des changes conomiques, les agents ont besoin dune quantit croissante de moyens de paiement. Loffre de monnaie est le plus souvent la consquence dune offre de crdits par les banques ou dune montisation par celles-ci de titres de crances sur les agents non financiers (mnages et entreprises), sur lEtat ou sur lextrieur. Dtermine par les comportements respectifs des banques, de la Banque Centrale et du secteur non bancaire, loffre de monnaie repose sur un processus de cration montaire, plus connue sous la maxime : Les crdits font les dpts . Aprs avoir prsent les mcanismes de la cration montaire, nous en prciserons les limites.

A. Loffre de monnaie Un acte de cration montaire consiste transformer des crances en moyens de paiement (Banque de France, 1986). Cette simple dfinition appelle trois questions : qui a pouvoir de transformation ? Quelles crances sont transformables ? Quel intrt tirent les agents conomiques de ces oprations ?

1. Les mcanismes de cration montaireLe pouvoir de transformation des crances en moyens de paiement est exclusivement dtenu par les institutions financires, principalement les banques. La cration montaire met toujours en relation deux catgories dacteurs : les agents non financiers et les agents financiers qui seuls ont pouvoir de cration montaire. Cette cration montaire est assure par trois types dagents : les banques commerciales, la Banque Centrale (BCE et Banque de France) et le Trsor Public.

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a. Les Banques commerciales A lorigine, les banques ne prtaient qu hauteur du montant de monnaie mtallique dtenue leur actif. Ainsi lorsquun dpt dor tait effectu pour une dure dun an par exemple, la banque pouvait prter cette somme pour une dure infrieure. Les banques saperurent toutefois que leurs stocks de monnaies mtalliques (or, argent) ne descendaient jamais en dessous dun certain seuil puisquune partie des sommes prtes revenaient toujours dans leurs caisses sous forme de dpts. Les banques dcidrent alors de prter une nouvelle fois ces encaisses, donc daccorder de nouveaux crdits, sans prendre trop de risques, puisque les dpts se reconstituaient dans les comptes des nouveaux emprunteurs. Ainsi les banques prtaient plusieurs fois les mmes sommes. Chaque dposant considrait ses dpts comme disponibles alors quils taient lorigine de nouveaux crdits. Il y avait une cration montaire puisque les moyens de paiement dont pouvaient disposer les individus taient bien suprieurs aux encaisses mtalliques et billets en circulation dans lconomie. Aujourdhui les banques ne sont plus de simples intermdiaires qui prtent des fonds partir des dpts reus. Elles crent de la monnaie lorsquelles accordent des crdits. Ce sont ainsi les crdits qui font les dpts et non plus linverse. Les oprations de crdit ralises par les banques reprsentent donc une source majeure de cration montaire. Il sagit des crdits accords aux particuliers, aux entreprises mais galement lEtat1. La cration montaire peut tre analyse simplement en prenant le cas dune conomie comprenant une seule banque, puis le cas dune conomie plusieurs banques. Cas 1 : conomie comprenant quune seule banque Supposons quun agent conomique non financier, une entreprise X, nait plus de ressources montaires pour payer son fournisseur Y, cette dernire va demander sa banque A de lui octroyer un crdit de 100 . Lorsque lopration est ralise, la banque A acquiert une crance de 100 sur lentreprise X. Les bilans de lentreprise X et de la banque A peuvent tre reprsents de la manire suivante : BILAN de la banque A Actif Crance sur X + 100 Passif Dpt de + 100 Bilan de lentreprise X Actif Dpt en A + 100 Passif Dette envers A + 100

Lentreprise X va utiliser lencaisse de 100 pour payer son fournisseur (lui-mme client de la banque A). Au terme de cette opration, les bilans de lentreprise X, du fournisseur Y et de la banque A se prsentent ainsi : BILAN de la banque A Actif Passif Bilan de lentreprise X Actif Mat 1re + 100 Passif Dette envers A + 100 Bilan du fournisseur Y Actif Passif

Crance sur X Dpt de Y + 100 + 100

Mat 1re -100 Dpt en B + 100

Lorsque le Trsor Public, banquier de lEtat, veut financer le dficit budgtaire, il peut mettre des bons du Trsor qui seront achets par les banques. Ces dernires acquirent donc une crance sur le Trsor Public en crant de la monnaie.

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Ainsi ds lopration de crdit, le passif de la banque sest accru de 100 . Un point important concerne cependant la relation entre dpts et crdits. On peut croire que la banque accorde le crdit lentreprise X sur la base des dpts quelle collecte pralablement. En fait, il nen est rien et cest mme le contraire qui se produit. Ce sont bien les crdits qui font les dpts et non linverse dans la mesure o cette opration conduit crditer le compte courant de lentreprise X. Plus gnralement, au titre des crdits de lconomie, les agents non financiers peuvent obtenir de la monnaie en mettant des titres financiers (cest dire des valeurs mobilires : actions et obligations), en vendant des actifs rels (immeubles, terrains), en vendant des devises, des crances (billets ordre, lettre de change, crance sur lEtat). Notons cependant, que lorsque des crdits lEtat ou lconomie sont rembourss, les titres financiers ou les actifs rels sont repris par le secteur non bancaire, enfin lorsque les agents non financiers demandent des devises dans le but de rgler des transactions conomiques, il y a destruction montaire. Ainsi lorsque lentreprise X utilise les fonds dont elle dispose sur son compte courant pour rembourser la banque A, son compte et dbit dun montant de 100 . En contrepartie, la dette contracte par lentreprise X disparat. Le remboursement du crdit met un terme lexistence de leffet reprsentatif de crdit. En conclusion, loctroi dun crdit par une banque un agent non financier se traduit par une cration de monnaie et le remboursement du crdit entrane une destruction de monnaie.Disparition de leffet reprsentatif du crdit

BILAN de la banque A Actif Crance sur X - 100 Passif Cpte courant de X - 100

Bilan de lentreprise X Actif Passif

Cpte courant en A Dette envers A - 100 - 100

Remboursement du crdit et destruction montaire

Cas 2 : conomie comprenant plusieurs banques Considrons maintenant les transactions conomiques de deux agents non financiers X et Y, dans une conomie deux banques, A et B, qui leur ont accord des crdits. BILAN de la banque A Actif Crance sur X + 100 Passif Dpt de X + 100 BILAN de la banque B Actif Crance sur Y + 200 Passif Dpt de Y + 200

Supposons que Y tire un chque de 30 lordre de X, et qu la suite dune autre transaction, X tire un chque de 20 lordre de Y. Des oprations de rglement vont devoir tre effectues entre les deux banques. Aprs compensation (cest dire annulation des crances et des dettes), la banque B doit 10 la banque A. Au terme des transactions, lagent X possde un dpt de 110 la banque A et lagent Y dispose dun dpt de 190 la banque B. Les bilans des deux banques apparaissent de la manire suivante :

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BILAN de la banque A Actif Crance sur X 100 Crance sur B 10 Passif Dpt de X + 110

BILAN de la banque B Actif Crance sur Y + 200 Passif Dpt de Y + 190 Dette envers A 10

Dans le cas dun systme banques multiples, on constatera gnralement une certaine ingalit des parts de march dans la distribution des crdits comme la collecte des dpts. Dans notre exemple, le march de la banque B en matire de crdits est de 66% (200 / 300) alors sa part dans la collecte des dpts nest que de 63% (190 /300). Il y a donc une fuite de 10 dans le retour des dpts de la banque B, le respect de la contrainte de lquilibre du bilan obligera la banque B se refinancer, cest dire lemprunt auprs de la banque A des 10 de ressources financires ncessaires lquilibre de son bilan. En gnralisant, un systme banques multiples peut tre compos par trois sortes de banques : (i) Des banques qui quilibrent leurs oprations de crdits et de dpts. Une banque C distribuerait 1000 de crdits et capterait 1000 de dpt. (ii) Des banques qui distribuent beaucoup plus de crdits que de dpts. Lquilibre du bilan leur impose un endettement (donc une obligation de se refinancer). (iii) Des banques qui captent plus de dpts quelles naccordent de crdits. Elles peuvent assurer le bouclage financier du systme en permettant aux autres banques de se refinancer. Elles procderont lacquisition de crances sur cellesci. De cet exemple, nous pouvons tirer deux enseignements. Dune part, chaque banque commerciale cre sa propre monnaie scripturale en accordant des crdits aux titulaires de comptes. Dautre part, les banques sont tenues dassurer la circulation de la monnaie scripturale entre les comptes de leur client. Ds lors toute banque qui cre et fait circuler de la monnaie scripturale, se trouve confronter des fuites hors de son circuit montaire. * Si les fuites du rseau bancaire A vers le rseau bancaire B sont juste compenses par les fuites du rseau bancaire B vers le rseau bancaire A. Il y a parfaite compensation des dettes que les banques ont lune envers lautre et nulle opration de refinancement nest ncessaire. Ce rsultat est mis en vidence par le principe de croissance quilibre du systme bancaire. BILAN de la banque A Actif Crdits 6000 Passif Dpts 6000 BILAN de la banque B Actif Crdits 4000 Passif Dpts 4000

Les parts de march sur les crdits (ou dpts2) des deux banques sont gales : Banque A : 6000 : (6000 + 4000) = 60% Banque B : 4000 : (4000 + 6000) = 40% Ce calcul des parts de march est important car il souligne que 60% des agents non financiers sont clients de la banque A et que les 40% restant sont les clients de B.

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Nous considrerons ici quil existe une galit entre dpts et crdits.

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Si la banque A octroie de nouveaux crdits sa clientle (montant : 1200 ), il se produit des fuites interbancaires de A vers B. Les clients de A vont en effet les dpenser auprs de lensemble des agents non bancaires de lconomie dont on connat la rpartition. Ainsi, il reste 720 (soit 60% des 1200) dans le rseau de la banque A et 480 (soit 40% de 1200) se retrouvent dans le rseau de la banque B. Cette fuite donne naissance une dette de 480 de la banque A envers la banque B (on peut encore dire que la banque B a une crance de 480 sur la banque A). Si la banque B ne ragit pas, la banque A va de la distancer sur le march du crdit et elle risque de perdre une partie de sa clientle (au profit de la banque A). Cest pourquoi la banque B ragira en octroyant elle aussi des crdits sa clientle. Il en rsultera des fuites interbancaires de la banque B vers la banque A. Pour assurer une croissance quilibre du secteur bancaire, cest dire que les parts de march sur les dpts et les crdits restent inchanges, il est ncessaire que le montant des crdits accord par B sa clientle vienne compenser les fuites que A enregistre lorsquelle a distribu ses propres crdits. En dautres termes, il convient de respecter lgalit suivante : Fuites bancaires de A vers B = Fuites bancaires de B vers A FA = FB (1) Le montant des fuites pour chacune des banques scrit : FA = CA (1 dA) (2) FB = CB (1-dB) (3) avec dB + dA = 1 FA , FB reprsentent les fuites des banques A et B, CA , CB les crdits ; dAet dB les parts de marchs. Compte tenu des quations (1), (2) et (3), on peut calculer le montant des crdits que la banque B devra accorde ses clients : Soit FA = CB (1-dB) => CB = FA : (1-dB) CB = 480 : (1- 40%) = 800

Sur ces 800, une proportion gale 40%, soit 320 restera dans le rseau bancaire de B, le reste (soit 480) se retrouvera dans le rseau bancaire de A, compensant exactement les fuites qui ont eu lieu lors de loctroi des 1200 de crdits par A. A terme, aucune banque nest crancire ou dbitrice de lautre. La masse montaire est passe de 10 000 12 000 (la hausse de 2000 correspondant aux crdits accords par le banques A et B). Les parts de march sur les crdits (et les dpts) nont pas chang. BILAN de la banque A Actif Crdits 7200 Passif Dpts 7200 BILAN de la banque B Actif Crdits 4800 Passif Dpts 4800

dA= 7200 : (7200 + 4800) = 60%

dB = 4800 : (4800 + 7200) = 40%

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En gnralisant, on peut dduire des quations (1) (2) et (3), une rgle simple qui exprime les conditions de croissance quilibre du secteur bancaire. CA / CB = dA / dB La cration montaire des deux banques doit tre proportionnelle leur part de march respective. Dans le cas dun systme bancaire gnralis, cette rgle rappelle que la croissance de ce dernier sera quilibre si chaque banque cre de la monnaie proportionnellement sa part de march. Ajoutons que les banques ont intrt respecter cette rgle. Une banque ne cherchera pas limiter sa cration montaire en de de sa part de march (rarfaction du crdit), elle se priverait en effet de la rmunration des oprations de crdits (intrt) et risquerait de perdre des clients (qui iraient obtenir des crdits chez les concurrents). De la mme faon, une banque ne cherchera pas accorder davantage de crdits (stratgie agressive pour dstabiliser les autres banques) que sa part de march ne lui permet, ses concurrents ragiraient aussitt en accordant leur tour des crdits (or les stratgies de course aux clients dtriorent le bilan des banques et accroissent les risques vis vis des emprunteurs. Nen concluons pas pour autant que la rgle de croissance quilibre limite la concurrence entre les banques. Ces dernires ont dautres armes leur actif (diffrenciation des produits, tarification des services, stratgies de rgionalisation, de diversification, ). * Si les fuites du rseau bancaire A vers le rseau bancaire B ne sont pas compenses par les fuites du rseau bancaire B vers le rseau bancaire, alors une opration de refinancement sera ncessaire. Elles peuvent se refinancer essentiellement de deux manires : sur le march financier par mission dobligations ou sur le march montaire. Ce dernier se dcompose luimme en trois compartiments : le march interbancaire (n sous limpulsion des banques dsireuses de compenser entre elles leurs excdents et leurs dficits de trsorerie, cest aussi le lieu privilgi des interventions de la Banque Centrale) ; le march des titres ngociables (ouvert tous les agents conomiques, les banques y mettent des certificats de dpts et des bons moyen termes ngociables) ; la titrisation des titres (par cette technique apparue en France en 1988, les banques vont regrouper les crdits en ensembles homognes, puis les cder par paquets des organismes tels que les Fonds communs de crances, les OPCVM, qui vont se financer en mettant auprs du public des parts reprsentatives de leur capital).FUITES INTERBANCAIRES

PAS DE REFINANCEMENT CAR CROISSANCE EQUILIBREE DU SYSTEME

REFINANCEMENT DES BANQUES

March montaire

March financier

March interbancaire

March des titres ngociables

Titrisation des titres

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b. La Banque Centrale Notre systme bancaire se complexifie puisquil se trouve maintenant composer dune multitude de banques commerciales et dune Banque Centrale. La Banque Centrale est au cur de lenchevtrement du systme bancaire. On peut apprcier la place et le rle de la Banque Centrale dans la cration montaire en faisant rfrence son bilan. Ce dernier se prsente gnralement de la manire suivante : Bilan de BC ACTIF PASSIF Fonds propres Billets et pices Compte courant du Trsor Compte courant des banques (rserves obligatoires)

Or et devises Concours au Trsor Effets et titres (refinancement des banques commerciales)

- Les stocks dor sont gnralement grs par lInstitut dmission. Les devises trangres (dollar, yen, franc suisse) sont utilises lors des interventions sur le march des changes pour assurer la stabilit de lEuro. - Les concours au Trsor reprsentent les bons du Trsor que la Banque Centrale a achet aux intermdiaires financiers. Il sagit donc dune crance de la Banque Centrale sur le Trsor. - Les effets et titres regroupe lensemble des prts que la Banque Centrale a consenti aux banques commerciales par ses interventions sur le march montaire. La Banque Centrale refinance les banques commerciales lorsque ces dernires sont incapables de faire face aux oprations de financement des agents non financiers (compensation interbancaire). - Les billets et pices constituent la monnaie Banque Centrale (prcisons que les pices sont en fait produites par le Trsor Public). Il sagit dune crance quont les banques commerciales et les agents non financiers sur la Banque Centrale. - Le compte courant du Trsor rappelle quen consentant ce dernier des concours, la Banque Centrale se voit dans lobligation de lui crer un compte. - Les comptes courants des banques commerciales sont galement appels rserves obligatoires. Ils rpondent des dispositions lgales et facilitent le mcanisme de compensation interbancaire. La Banque Centrale et la cration montaire Agents conomiques non financiers

Financement

Banques commerciales

Refinancement

Banque Centrale

Monnaie banque

Monnaie centrale

La Banque Centrale peut crer deux sortes de monnaie : - Il sagit dabord de la monnaie fiduciaire (monopole dmission des billets). La Banque Centrale cre de la monnaie fiduciaire lorsque les agents conomiques non financiers souhaitent dtenir une partie de leurs avoirs sous formes de billets : on parle de prfrence pour la liquidit. Comme la cration de monnaie scripturale par les banques commerciales

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saccompagne toujours dune demande de billets (fuite bancaire), elles sont obliges de sen procurer auprs de la Banque Centrale. Exemple : Lorsquun tudiant retire au distributeur de sa banque 40 , il oblige cette dernire se procurer de la monnaie Banque Centrale (une monnaie que les banques commerciales ne peuvent pas mettre). - Il sagit ensuite de la monnaie scripturale quelle peut crer selon les mmes mcanismes que la cration montaire des banques, cest dire lorsquelle transforme une crance (sur les particuliers, sur lextrieur ou sur le trsor public) en moyens de paiement. Il convient cependant de discerner deux formes de monnaie. * Lorsque la Banque Centrale consent acheter des actifs rels, financiers, des devises (ou encore accorder des crdits lEtat), elle cre ce que lon appelle de la monnaie externe ou libre (la cration de la monnaie est dfinitive). Cette monnaie a pour principale caractristique de ne pas augmenter lactif global du systme non bancaire. En effet, ces oprations ne concernent que la banque centrale, les banques commerciales et le Trsor Public. Si une banque commerciale cde des devises la Banque Centrale pour un montant de 1 000$ (nous considrerons une parit 1 $ = 1 ), la Banque Centrale va crer de la Monnaie Banque Centrale en crditant le compte courant de la banque commerciale de 1000. Le stock de devises de la Banque Centrale va saccrotre de 1000 $. On saperoit ici que la monnaie cre est de type scriptural (elle nest pas convertie en billets). En outre, cette monnaie est dite externe ou libre dans la mesure o elle est cre dfinitivement par la Banque Centrale. La base montaire (Monnaie Banque Centrale) se sera accrue de 1000. BILAN BANQUE COMMERCIALE A Devises : - 1000$ CC la BC : + 1000 BILAN BANQUE CENTRALE Devises : + 1000$ CC de A :+1000

Cession des devises Le compte courant de A est crdit * Lorsque la Banque Centrale cre de la monnaie scripturale au titre du refinancement des banques commerciales (octroi de crdit, oprations de rescompte dun effet de commerce), la monnaie cre est dite interne dans la mesure o sa cration nest pas dfinitive. Si la Banque Centrale refinance les banques commerciales et le Trsor Public, elle cre de la monnaie scripturale qui circule entre les diffrents comptes. Cette monnaie est appele Monnaie Banque Centrale (MBC) ou galement base montaire. Elle apparat au passif du bilan et ses contreparties lactif. La Monnaie Banque Centrale assure ainsi une forme de communication entre les diverses banques (et le Trsor). Nous avons vu prcdemment quune compensation interbancaire quotidienne tait ralise sur le march montaire entre les crances et les dettes de chaque banque. De cette compensation, se dgage pour chaque banque un solde excdentaire ou dficitaire, inscrit au crdit ou au dbit de son compte dans les livres de la Banque Centrale. Ceci se traduit par une hausse ou une baisse de ses avoirs en monnaie Banque Centrale. Dans le cas o le montant de Monnaie Banque Centrale dtenu par une banque commerciale devient insuffisant, cette banque doit immdiatement acheter de la monnaie Banque Centrale en cdant par exemple des effets reprsentatifs de crdits, soit dautres banques commerciales, soit la Banque Centrale (opration de refinancement).

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BILAN Banque commerciale A CC la BC + 1000 Refinancement auprs de BC +1000

BILAN BANQUE CENTRALE Refinancement de A + 1000 CC de A + 1000

Financement de A auprs de BC Le compte de A est crdit Par contre, si le montant de monnaie Banque centrale dtenu par une banque commerciale est suprieur ce qui lui est ncessaire pour satisfaire la demande de ses clients et pour constituer dventuelles rserves obligatoires, elle a la possibilit daccrotre le volume de crdits quelle accorde. Lopration de rescompte dun effet de commerce peut tre introduite de la manire suivante : la socit X doit une somme dargent une socit Y, X signe donc une reconnaissance de dettes, si Y a besoin de cette somme avant lchance, elle peut porter ce papier (traite, effet de commerce) sa banque qui lui changera contre des moyens de paiement disponibles immdiatement, moyennant un cot qui est le taux descompte. La banque peut son tours escompter ce papier auprs de la Banque de France; par le rescompte, la Banque de France cre de la monnaie au profit de la banque. La dette de la socit X est ainsi transfre lactif de la Banque de France. Nous voyons ici que la cration montaire de la Banque Centrale nest que transitoire dans la mesure o le remboursement du refinancement (effet de commerce) donne lieu une destruction de monnaie identique. La question est maintenant de savoir qui, des banques commerciales ou de la Banque Centrale dtient le pouvoir de cration montaire ? Et quels sont les dterminants majeurs de loffre de monnaie ? Le rle de la Banque Centrale : le mcanisme du multiplicateur Une premire rponse dite du multiplicateur, insiste sur le rle moteur de la Banque Centrale, qui en alimentant le systme bancaire en liquidits, permet ce dernier de dvelopper sa propre activit de cration montaire. La relation entre la monnaie Banque Centrale (somme des billets, B ; et des rserves, R) et la monnaie en circulation (somme des billets, B ; et des dpts, D) sappuie sur les comportements des agents non financiers en matire de dtention de billets et de pices (b) et ceux des banques commerciales en matire de rserves obligatoires (r). - Les agents non financiers contraignent les banques commerciales changer une partie de leurs avoirs montaires en comptes courants auprs de la Banque Centrale (plus prcisment elles doivent change leur monnaie banque commerciale contre de la monnaie Banque Centrale) lorsquils souhaitent dtenir une partie de leurs encaisses en billets (B = b M), - Les banques commerciales sont contraintes de mettre en rserves (de dposer dans leur compte courant la Banque Centrale) une partie de leurs dpts : R = r D La monnaie Banque Centrale (MBC) peut scrire de la manire suivante : MBC = B + R = bM + rD = bM + r (1-b) M MBC = M [b + r (1-b)]

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La relation entre la monnaie Banque Centrale (MBC) et la monnaie en circulation (M) introduit le Multiplicateur de Crdit. Ce dernier souligne la limite thorique de la cration montaire des banques commerciales, compte tenu dun excdent de monnaie Banque Centrale. Le volume de monnaie cre M + sera alors dfini par la formule suivante : M+ = M BC b + r rb M BC : Excdent en monnaie Banque Centraleb : taux de prfrence des agents pour les billets r : taux de rserves obligatoires

Ainsi avec un taux de prfrence des agents conomiques pour la dtention de billets de 17% et un taux de rserves obligatoires de 10%, un excdent de monnaie Banque Centrale de 200 permet la banque commerciale daccorder pour 790 de crdits supplmentaires. Loptique du multiplicateur insiste sur le rle de la Banque Centrale, qui en alimentant le systme bancaire en liquidit, permet ce dernier de dvelopper sa propre cration montaire. La masse montaire (M) est un multiple de la monnaie Banque Centrale. On dira galement que la Banque Centrale est capable de contrler la masse montaire en circulation et que loffre de monnaie est exogne (La Banque centrale peut imposer la masse montaire de son choix). Le multiplicateur de crdit repose cependant sur plusieurs conditions : - lexistence dun besoin de financement de la part du secteur non bancaire (rien ne permet daffirmer que les banques commerciales trouveront prter lintgralit de leur Monnaie Banque Centrale). - lutilisation de la Monnaie Banque Centrale excdentaire se traduit par un accroissement du stock de monnaie en circulation. Si cette monnaie excdentaire sert acqurir des bons du trsor, la cration montaire peut ne pas tre totale. - la stabilit des coefficients b et r. Si le coefficient des rserves obligatoires est contrle par la Banque Centrale (et donc stable), il nen va pas de mme pour le taux de prfrence pour les billets (trs variable). En modifiant leur prfrence pour les billets, les agents non financiers peuvent entraner une variabilit du multiplicateur. - le sens de causalit. Le multiplicateur considre que la dtention de rserves obligatoires et la prfrence pour les billets, sont des pralables la distribution de crdit. En dautres termes, on va de la Banque Centrale vers les banques commerciales (on explique la cration de monnaie par la dtention de Monnaie Banque Centrale) M BC M+ = b + r rb Or on peut inverser la causalit en considrant que la cration de monnaie entrane une cration de Monnaie Banque Centrale. Sous cette hypothse cest la banque commerciale qui a linitiative de la cration montaire. Elle octroie dabord des crdits et recherche ensuite la Monnaie Banque Centrale dont elle a besoin. La Banque Centrale devient suiveuse et la cration montaire simpose elle-mme. Cette situation correspond une pratique gnralise et quasi-automatique du refinancement des banques commerciales par la Banque Centrale. La relation devient : MBC = M . (r + b rb) On parle non plus dun multiplicateur de crdit mais bien dun diviseur de crdit. Le rle des banques commerciales : le principe du diviseur Le principe du diviseur repose sur lhypothse que cest la monnaie cre par les banques commerciales qui dclenche le recours la Monnaie Banque Centrale, et pas linverse. MBC = M . (r + b rb)

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Le crdit accord par les banques commerciales aux agents non financiers se traduit par une cration de monnaie banque commerciale qui figure au crdit des agents non financiers. Ces derniers chercheront convertir une partie de cette monnaie en billets (B = b M) et conserveront lautre partie sous forme de dpts [D = (1 b)M] sur lesquels les banques constitueront des rserves (R = r D). Les banques devront assurer un volume de refinancement gal RF [bM + r(1-b)M]. A la suite de la cration montaire des banques, M, les besoins de refinancement conduisent une cration de monnaie Banque Centrale gale : MBC = b M + r(1-b) M = (r + b rb) M La Banque Centrale entrinerait par un refinancement quasi-automatique loffre de crdit des banques leur clientle. Le principe du diviseur met en vidence trois rsultats : - Il souligne que la quantit de Monnaie Banque Centrale que pourrait obtenir les banques commerciales, serait une fraction du crdit quelles ont pris linitiative doffrir leurs clients. Cette hypothse conduit ainsi une conception de la monnaie endogne. La Banque Centrale aurait juste la qualit de prteur en dernier ressort (elle assure la cohrence du systme bancaire et reste la banque des banques). - La prise en compte du comportement des banques en matire de crdits et la distinction entre le refinancement leur initiative et celui impuls par la Banque Centrale permettent la rintroduction des taux dintrt dans la fonction doffre de monnaie. Les agents conomiques sont en effet rarement altruistes, et en matire montaire encore moins quailleurs. Crer de largent immdiatement disponible est une production de services qui a un prix, le taux dintrt, pay par celui qui en bnficie. A loppos, si les banques ne souhaitent pas offrir davantages de crdits, il leur suffit daugmenter les taux dintrt. Il est important de comprendre ici que ce mcanisme ne sapplique pas seulement entre agents non financiers et agents financiers, mais galement entre les agents financiers eux-mmes. La Banque Centrale peut choisir de faire payer plus ou moins cher le refinancement fourni aux banques (ces dernires seront alors dans lobligation de rpercuter cette hausse des cots sur leur clientle par la hausse de leur taux dintrt). - Le principe du diviseur rompt enfin avec laspect mcanique et macroconomique du multiplicateur, il renvoie en effet au rapport de force entre les diffrentes banques (approche microconomique). Les ides de concurrence et de comportement de la firme bancaire (maximisateur de profit, minimisateur de cots) sont alors introduites. La concurrence entre banques rappelle que chaque firme bancaire recherche le maximum de profit ou tout du moins le rsultat qui lui permet de maintenir ou de dvelopper ses parts de march (en matire de crdits mais galement de dpts3). Pour cela, elle dveloppera plusieurs activits : une activit de crdit (la demande de crdit de la clientle sera une fonction dcroissante des taux dintrt appliqus sur les crdits accords), une activit de collecte des dpts (en dveloppant le nombre des guichets et en offrant des services diversifis), une activit de trsorerie (garantir un quilibre entre les rentres et les sorties de fonds en matire de dpts et de liquidit bancaire), une activit de gestion portefeuille (acqurir et mettre des titres). Par ses activits, la banque obtiendra des recettes (intrts perus sur les crdits accords et les titres dtenus) et supportera des charges (intrts verss sur les dpts, les titres mis). La notion de charges renvoie plus prcisment lide de cots fixes (la banque doit engager des dpenses indpendantes du volume dactivit), de cots variables dexploitation (frais de personnels, frais de tenue de compte, frais de traitement des moyens de paiement, cots fixes) et de cots variables financiers (elle verse des intrts aux titulaires de comptes rmunrs, elle doit par ailleurs se3

Le multiplicateur prenait en compte loffre de monnaie sous laspect des crdits.

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refinancer et payer un intrt sur le volume de refinancement la Banque Centrale). La stratgie de maximisation du profit impliquera que le profit sera maximal au point o la recette marginale est gale au cot marginal. c. Le Trsor Public Le Trsor Public est la dernire institution qui cre de la monnaie. Le Trsor est lagent financier de lEtat puisquil peroit les recettes publiques (sous forme dimpts) et excute les dpenses. Cest aussi le banquier de lEtat. Le Trsor cre de la monnaie divisionnaire (il a le monopole de fabrication des pices) et peut crer aussi de la monnaie scripturale. Exemple : lorsque le Compte Chque Postal (CCP) dun fournisseur de lEtat ou dun fonctionnaire qui lEtat doit verser un salaire est crdit, le Trsor cre sa propre monnaie scripturale. Lorsque lEtat souhaite financer la croissance conomique par un dficit budgtaire, le Trsor public fait appel au concours de la Banque Centrale en sendettant auprs de celle-ci (1000) BILAN Trsor public CC la BC + 1000 Endettement auprs de BC +1000 BILAN BANQUE CENTRALE Concours du trsor + 1000 CC du Trsor + 1000

Financement du Trsor auprs de BC Le compte courant du Trsor est

2. Les contreparties de la masse montaire : les crances transformablesNous avons soulign prcdemment que la cration montaire revenait transformer des crances en moyens de paiements. Il nest donc pas indiffrent pour une conomie de savoir si laccroissement de la masse montaire est d un afflux de devises trangres, un endettement de lEtat court terme ou une vigoureuse demande de crdits de la part des entreprises et des mnages (cest ltude de la contrepartie de la monnaie). On distingue gnralement trois sources potentielles de cration montaire ou de destruction montaire : les crances sur lconomie, les crances sur lextrieur et les crances sur le Trsor. a. Les crances sur lconomieLes Crances sur lEconomie constituent lessentiel des contreparties de la masse montaire. Elles reprsentent en gnral lensemble des crdits accords aux entreprises, que ce soit pour leur besoin de trsorerie ou pour financer des investissements, et lensemble des prts accords aux mnages pour le logement, la consommation...Comme prcdemment, on les classe sous deux rubriques, crdits et titres, selon lorigine du financement. Les entreprises sont lorigine de plus de la moiti des crances sur lconomie, et environ un tiers rsulte de prts immobiliers accords aux mnages.

Dans le cas dune crance commerciale, un industriel reoit une lettre de change dun client avec promesse de lui payer une certaine somme dans trois mois. Sil a besoin immdiatement dargent, il porte cette lettre son banquier qui crdite le compte de lindustriel moyennant un taux descompte, et qui percevra sa place la lettre de change lchance convenue. Il y a bien cration montaire : les moyens de paiement disponibles dans trois mois sont utilisables immdiatement grce lintermdiaire du banquier. Notons ici quil y a un processus continu de cration et de destruction montaire. En effet, lchance, le client qui avait sign la lettre de change auprs de lindustriel, rembourse le banquier. Des moyens de paiements sont ainsi rendus lagent financier et retirs de la masse montaire utilise par les agents non financiers.431

Le crdit bancaire fonctionne selon le mme mcanisme, la tierce personne en moins. Il sagit toujours de disposer immdiatement de moyens de paiement contre une promesse de remboursement, mais laccord qui fixe les chances est conclu bilatralement entre le banquier et son client. Les oprations de crdit prennent la forme dune mission de billets de banque ou de cration de monnaie scripturale (par une inscription au crdit dun compte vue). Exemple : une banque accorde un particulier un crdit de 200 000 directement vers sur son compte. Bilan de la Banque Actif Passif Crances sur lconomie 200 000 b. Les crances sur lextrieur Lorsquun industriel franais vend des marchandises ltranger et reoit en rglement de la monnaie trangre (cest dire des devises), il peut lchanger auprs de sa banque contre de la monnaie nationale. Cette opration souligne le fait que la banque achte les devises trangres en crant de la monnaie nationale. En termes de comptabilit, cette opration se traduit, au passif du bilan de la banque, par une mission de billets et lactif par un accroissement des devises dtenues. Cette dernire rubrique est gnralement prsente sous lappellation Crances sur lExtrieur . Exemple : Un touriste franais, revenant de voyage, revend sa banque des devises amricaines (des dollars) pour une valeur de 500 . La cration montaire qui sen suivra, dans le cas dune mission de billets, prendra la forme suivante : Bilan de la banque ActifExtrieur 500

Compte vue 200 000

PassifEmission de Billets 500

Les crances sur lextrieur mesure lincidence du solde des transactions courantes (importations et exportations de biens et services) de la balance des paiements et du solde des mouvements de capitaux court et long terme des agents non financiers sur les avoirs montaires des rsidents. On lit dabord sur cette ligne les rpercussions de la balance des paiements : un dficit des transactions courantes (Importations > Exportations) entrane une demande accrue de devises contre des euros sur le march des changes afin de payer les importations. En systme de change fixe, il y a une diminution des rserves de change et contraction de la masse montaire (la Banque Centrale reoit en effet des euros, ce qui correspond une destruction de monnaie). Inversement, un pays en excdent commercial connat une expansion commerciale. c. Les crances sur lEtat LEtat peut tre considr comme un agent non financier qui a des besoins de financement. Sil les satisfait par une mission dobligations long terme, il ny a pas cration montaire, des particuliers placent simplement leur pargne en emprunts dEtat comme ils auraient pu la placer en emprunts de grandes entreprises. Par contre sil fait appel au systme bancaire, il bnficiera dune cration montaire son profit.

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La Banque Centrale va ainsi crer de la monnaie (une forme davances) par une inscription au crdit dun compte quelle ouvre dans ses livres au nom du Trsor Public. Cette monnaie cre aura bien entendu une contrepartie intitule Crances sur lEtat porte au bilan de la banque. Les crances sur lEtat sont prsentes depuis 1987 sous deux grandes rubriques. La ligne Crdits, qui regroupe les liquidits, principalement celles recueillies par le circuit du Trsor, et les avances de la Banque de France (en deux tranches plafonnes 10 milliards de francs chacune, la premire gratuite, la seconde avec un taux dintrt gal celui du march montaire). La ligne Titres, qui correspond lacquisition de titres publics par les tablissements de crdit. Lvolution de la contrepartie Crances sur lEtat dpend non seulement du montant du dficit budgtaire mais aussi de la rpartition des titres publics entre tablissement de crdit et agents non financiers, et en dfinitive des choix de portefeuille de ces derniers. Si des titres publics souscrits par des banques sont achets sur le march par des agents non financiers, la cration montaire initiale est annule. Inversement, lachat par les banques des titres dEtat des agents non financiers correspond de la cration montaire (les banques crent en effet de la monnaie quelles offrent aux agents non financiers en change des titres publics). Cette prsentation des contreparties de la masse montaire montre que lexpansion montaire dpend principalement des financements accords par le systme bancaire aux agents privs.

3. Les limites de la cration montaireSi un banquier na besoin que de son stylo pour crer de la monnaie, on peut se demander ce qui empche une cration infinie de monnaie. En fait, la cration montaire est limite par la demande de monnaie, par les besoins des banques en billets et par les interventions de la Banque Centrale. a. La contrainte de la demande de monnaie Les banques ne crent pas de la monnaie pour le plaisir, mais en rponse une demande de monnaie. La cration montaire est donc borne par les besoins de liquidits des agents non financiers, et ces besoins eux-mmes sont levs durant les priodes de forte activit, mais rduits dans les priodes de ralentissement de lactivit. La contrepartie crances sur lconomie est source de cration montaire si la consommation des mnages, linvestissement des entreprises et des mnages jouent un rle moteur dans lconomie (demande de crdit pour la consommation, pour linvestissement). La contrepartie crances sur lextrieur pse sur la liquidit des banques commerciales, elle lamliore en cas dexcdent commercial et donc entre de devises (apports de celles-ci la Banque Centrale), elle la dtriore dans le cas inverse. La contrepartie crance sur le Trsor Public dtriore la liquidit bancaire lorsque le budget de lEtat est excdentaire (notamment au moment du recouvrement de limpt), le compte des banques la Banque Centrale est en effet dbit du montant des impts prlevs, au profit du compte du Trsor public. b. Les besoins des banques en billets Les clients des banques font circuler une partie de la monnaie cre par les banques, non sous sa forme initiale de monnaie scripturale, mais sous forme de monnaie. Or les banques ordinaires ne peuvent pas mettre de billets, elles doivent se les procurer en effectuant des retraits sur leur compte la Banque Centrale. Si la banque nest pas assure de disposer de ces billets en cas de besoins, elle ne peut crer davantage de monnaie. Les avoirs en monnaie Banque Centrale constituent ainsi la base montaire indispensable tout cration de monnaie en circulation. Quand une banque ne dispose pas dun crdit suffisant la Banque Centrale, nous avons vu quelle pouvait emprunter sur le march montaire auprs des banques qui disposent dun compte crditeur la Banque Centrale (il sagit dun

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refinancement sur le march montaire). Une banque particulire peut donc crer de la monnaie sans disposer momentanment de la monnaie Banque Centrale ncessaire pour faire face aux retraits en billets en lempruntant une autre banque, mais cette autre banque diminue alors de faon quivalente sa propre base montaire et donc sa capacit crer de la monnaie scripturale. Le systme bancaire pris dans son ensemble ne peut donc pas crer de monnaie sil ne dispose pas des avoirs en compte la Banque Centrale lui permettant de retirer les billets qui lui seront demands ensuite par la clientle. Or, cela ne dpend pas simplement du bon vouloir des banques, mais aussi de la demande de billets de la clientle (b) et de la volont qu la Banque Centrale de refinancer le systme bancaire (MBC) sur le march montaire en lui procurant la monnaie Banque Centrale dont il a besoin pour fonctionner. Ceci est vrai quel que soit le principe (multiplicateur ou diviseur) voqu : M = MBC / (r + b rb) MBC = M.(r + b rb) c. Le contrle de la cration montaire par la Banque Centrale La Banque Centrale contrle indirectement la cration montaire des banques commerciales en contrlant la mesure dans laquelle elles pourront satisfaire les besoins en monnaie Banque Centrale engendrs par cette cration montaire (refinancement des banques commerciales en situation de dsquilibre). Toutefois, on ne doit jamais perdre de vue les principaux objectifs assigns la Banque Centrale, savoir la lutte contre linflation au travers de la stabilit interne et externe de la monnaie. La stabilit interne a trait la surveillance et au contrle de la masse montaire. Il sagit de suivre lvolution des agrgats montaires. Si laugmentation de la masse montaire est lie celle de lactivit conomique, les risques dinflation peuvent tre raisonnablement contenus (laccroissement de la monnaie en circulation fait suite aux besoins des agents conomiques). Si par contre, la hausse de la quantit de monnaie nest pas justifie par la croissance conomique, elle peut gnrer de linflation. La stabilit externe est lie la surveillance des taux de change, cest dire de la valeur de la monnaie (ici leuro) par rapport aux autres devises. Ainsi le renchrissement de certaines importations, comme les matires premires et nergtiques, libelles en dollars, accrot les cots de production des entreprises europennes et peut conduire une hausse des prix. A travers la politique montaire, la Banque Centrale a gnralement recours trois types dintervention : la politique dencadrement du crdit, la politique dintervention sur le march montaire, la politique de rserves obligatoires. * la politique dencadrement du crdit Elle dsigne la slectivit sur le crdit par un contingentement de celui-ci. La Banque Centrale va favoriser le financement doprations quelle jugera prioritaires (les secteurs dactivit privilgis agriculture, industries, commerce- recevront un financement avantageux sous la forme de prts bonifis). Dans les faits, la Banque Centrale impose aux banques commerciales une norme de croissance du volume de leurs crdits. Cette norme est mensuelle et fixe par rapport au mme mois de lanne prcdente. Si une banque dpasse cette norme, elle se trouve sanctionne par lobligation de dposer des rserves supplmentaires la Banque Centrale. La politique dencadrement du crdit a t mise en place par le gouvernement franais dans un contexte inflationniste (1958, 1963-1965, 1968-1970, 1973-1984). Accuse de figer les structures bancaires et les parts de march de chaque banque (empchant la concurrence), elle a t supprime en 1987 mais fait toujours partie des instruments de la politique montaire.

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* la politique dintervention sur le march montaire La Banque Centrale intervient sur le march montaire pour prter de la monnaie Banque Centrale aux banques, moyennant paiement dun intrt et presque toujours en contrepartie dune crance dtenue par les banques (bons du Trsor, effets de commerce...). Elle peut dj moduler ses concours en dfinissant la liste des crances quelle accepte de refinancer sur le march montaire, elle tend la liste si elle veut faciliter la cration montaire, elle restreint cette liste dans le cas contraire. Elle dtermine ensuite le taux dintrt auquel elle prte la monnaie Banque Centrale, et ce faisant elle joue un rle directeur pour les taux dintrt pratiqus entre banques. La Banque Centrale peut faciliter le refinancement des banques et donc la cration montaire en offrant beaucoup de liquidits et en faisant baisser les taux dintrt, ou au contraire freiner la cration montaire en rduisant son offre de monnaie et en relevant les taux. Plus gnralement, ces interventions prennent deux modalits : la politique de rescompte et la politique de lopen market. - Nous avons vu prcdemment que lopration de rescompte (effet de commerce, lettre de change) prenait gnralement la forme suivante : la socit X doit une somme dargent (100 ) une socit Y, X signe donc une reconnaissance de dettes, si Y a besoin de cette somme avant lchance, elle peut porter ce papier (traite, effet de commerce) sa banque qui lui changera contre des moyens de paiement disponibles immdiatement, moyennant un cot qui est le taux descompte (si taux gal 5%, la banque donnera Y seulement 95 ). La banque peut son tours escompter ce papier auprs de la Banque Centrale; moyennant un taux de rescompte. La Banque Centrale dcide ainsi quel taux elle fournit la liquidit bancaire. Elle a la matrise du prix mais pas de la quantit, car le montant global de la liquidit rescompter appartient aux banques commerciales. Notons enfin que cest le taux de rescompte de la Banque Centrale qui fixera le taux descompte des banques commerciales (ce service que la banque commerciale offre sa clientle doit en effet lui garantir une rmunration quelconque). A partir de 1986, les autorits montaires franaises ont dcid de supprimer cette procdure au profit dune autre : celle de lopen market. - Dans la politique de lopen market, la Banque Centrale cherche freiner la progression de la masse montaire en rendant plus difficile le refinancement des banques sur le march montaire. Cette politique consiste en lachat ou la vente de titres par la Banque Centrale aux banques commerciales aux conditions en vigueur sur le march montaire. Sur le march montaire, on change de la Monnaie Banque Centrale (MBC) contre des titres (privs ou publics) qui sont escompts au taux dintrt i. La demande de Monnaie Banque Centrale (DMBC) mane des banques commerciales qui ont besoin de se refinancer. Loffre de Monnaie Banque Centrale (OMBC) rsulte principalement de la Banque Centrale, mais galement des banques commerciales ayant de la Monnaie Banque Centrale ngocier (les banques qui ont tout simplement des crances > dettes).

i OMBC DMBC (1) i* (2) i*(1) DMBC (2) MBC MBC *(1) MBC*(2)

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La confrontation entre la demande et loffre dtermine la quantit de Monnaie Banque Centrale change un moment donne et le taux dintrt dquilibre (i*). Si la DMBC augmente (DMBC 1 DMBC 2), le taux dintrt, cest dire le cot de refinancement des banques commerciales augmente (i*1 i*2).Laction de la Banque Centrale consiste agir sur le march montaire en se portant vendeuse ou acheteuse de titres contre de la Monnaie Banque Centrale. Si la Banque Centrale souhaite augmenter la quantit de monnaie en circulation, elle achtera des titres publics en change de Monnaie Banque Centrale. Les agents financiers (banques commerciales) et non financiers (mnages, entreprises) vont participer cette opration en vendant leurs titres contre de la Monnaie Banque Centrale. Loffre de Monnaie Banque Centrale (OMBC) augmente, ce qui fait baisser le taux dintrt. Non seulement la quantit de Monnaie Banque Centrale saccrot (effet quantitatif positif) mais le cot de refinancement diminue (effet prix positif).

DMBC (1) i* (2) i*(1)

OMBC1 OMBC2

MBC

MBC *(1)

MBC*(2)

* la politique des rserves obligatoires La Banque Centrale a galement le pouvoir dimposer aux banques commerciales la dtention de rserves obligatoires dans une proportion fixe par rapport aux dpts des agents du secteur non bancaire. Ces rserves geles ne donnent pas lieu une cration montaire par lintermdiaire de crdits. Une banque commerciale a 100 000 en dpts et le taux de rserves obligatoires est de 6%, il faut que son compte courant la Banque Centrale soit crdit de 12 000. Si tel nest pas le cas, elle devra cder des titres privs (crances sur lconomie, cest dire des crdits ou de la monnaie banque commerciale) ou des titres publics (quelle pourrait dtenir sur le Trsor Public). - Si la Banque Centrale dcide daugmenter le taux de rserves obligatoires, elle rduit la liquidit des banques et les conduit se refinancer sur le march montaire. Comme la demande de Monnaie Banque Centrale augmente, le taux dintrt a tendance slever et restreindre la distribution de crdits. - Si la Banque Centrale dcide de rduire le taux de rserves obligatoires. La baisse de r va entraner lapparition de rserves excdentaires que les banques pourront employer pour accorder de nouveaux crdits (R = C). r => R (apparition de rserves excdentaires) => C (hausse des crdits)

hausse des fuites en billets (b R) rserves obligatoires supplmentaires [r (1-b)] R

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A la suite de la baisse du taux de rserve obligatoire, les banques disposent dun excdent de rserves gal la diffrence entre lexcdent initial (R) et les fuites provoques par les nouveaux crdits [b + r (1-b)] R, soit [(1-b) (1-r)]. Si lon rpte ce mcanisme plusieurs fois, on saperoit que le montant des crdits nouveaux (C) suit une progression gomtrique de raison [(1-b) (1-r)]. C = R + [(1-b) (1-r)] R + [(1-b) (1-r)] R + .

B. La demande de monnaieLes premires thories de la demande de monnaie ont mis laccent sur le caractre transactionnel de la monnaie. La monnaie nest pas dtenue pour elle-mme mais parce quelle est utile pour effectuer des transactions (thorie quantitative de la monnaie, Ecole de Cambridge). Lune des composantes essentielles de la rvolution keynsienne aura t de montrer que toute lpargne nest pas ncessairement place sous une forme rmunre et de faire merger limportance de la demande de monnaie. Les analyses postrieures quelles soient montaristes avec Milton Friedman ou keynsiennes avec Tobin mettent laccent sur lintgration de la monnaie comme demande dencaisse, au comportement de diversification de la demande dactifs financiers, composante dune diversification du patrimoine.

1. Dtention de monnaie dans une optique transactionnelleIl faut attendre le XIXe sicle pour que la monnaie soit considre comme un bien conomique, faisant lobjet dune offre et dune demande en raison de son caractre intrinsquement utile. Toute lanalyse classique (Ricardo, J-S Mill) est articule autour dune demande de monnaie destine aux paiements (demande de monnaie de transaction). Il ny a pas de demande de dtention de monnaie pour elle-mme : la monnaie nest dtenue que parce quelle facilite les changes. La monnaie dpense est strictement gale aux marchandises quelle permet dacheter. Lune des thories les plus compltes (et ayant eu le plus de porte) se fonde non sur la notion de demande de monnaie mais sur le concept de vitesse de circulation de la monnaie. Irvin Fisher est lconomiste le plus troitement associ ce point de vue dcoulant sur lquation quantitative de la monnaie. Cette thorie quantitative de la monnaie (TQM) a t ensuite exprime sous la forme dune quation de demande : lquation de Cambridge. a. La thorie quantitative de la monnaie (I. Fisher) La thorie quantitative de la monnaie formule par I. Fisher, repose sur une identit comptable. Toute transaction mettant en relation un acheteur et un vendeur, chaque vente correspond un achat et le montant des ventes est gal au montant des achats pour lensemble de lconomie. Sachant que le montant des ventes est gal au nombre des transactions ralises (T) multipli par le prix moyen de celles-ci (P), et que le montant des achats est gal la quantit de monnaie en circulation (M) multiplie par le nombre de fois que celle-ci change de main au cours dune mme priode, lidentit comptable prend la forme suivante : M Vt = P T (1) Ou si lon appelle M, la monnaie fiduciaire (billets) et M, la monnaie scripturale, V et V, reprsentant leur vitesse de circulation respective : M Vt + M Vt = P T (2) Cette quation des changes nest pas une vritable f