histoire de la littérature-la figure de satan

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Elena Raisi Doctorat de Recherche en Littrature de lEurope Unie XXIIe cycle

La figure de Satan entre le XVIe - XVIIe sicle. Mtamorphose du roi des Enfers entre tradition et innovation.

Introduction La figure de la divinit royale des Enfers quon trouve dans la littrature de la Renaissance et du Baroque doit beaucoup de ses caractristiques la mythologie ancienne, qui est garde sous beaucoup daspects mais, en mme temps, adapte la signification que ce personnage acquiert pendant le passage dun sicle lautre ; il y a aussi lintroduction de nouveaux lments qui enrichissent le cadre et qui servent surtout approfondir laspect psychologique du personnage. On verra aussi que cette figure a certaines caractristiques qui sont les mmes dans plusieurs littratures europennes, et cela parce quil y a eu une circulation dides et une connaissance des travails de certains auteurs qui a permis aux crivains de sinspirer aussi de sources contemporaines. Le prsent essai veut donc montrer comment se produit cette transformation du personnage de Roi des Enfers, quels sont les aspects de la tradition qui restent et ceux qui changent et pourquoi, et enfin comment les nouveaux lments se rattachent aux autres pour crer un personnage de considrable complexit psychologique.

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La figure du Roi des Enfers : lantcdent classique La figure du Roi des Enfers est trs ancienne, tandis quon la trouve pour la premire fois dans la Thogonie dHsiode sous le nom de , mari de , frre de Zeus. , , , , , , , . [Naissance de Hads : Hsiode, Thogonie, 453-458]

Les premires caractristiques de Hads sont la force et le fait dtre impitoyable dans le coeur. Son royaume se trouve sous la terre. La tradition classique suivante mlange cette divinit principale avec une mineure, Pluton, fils dune desse et dun hros mortel, qui se trouve lui-mme dans la Thogonie, et il a peu faire avec les Enfers, quand plutt avec la possession fortuite de la richesse : , [970] , , , , , . [Figure de Pluton (le demi dieu), uvre cite, 969-974]

Pourtant le liaison entre les richesses du sous-sol et la conformation du royaume infernal pourraient avoir inspir une syncrtisme entre les deux divinits ; en effet ce processus est trs frquente dans la tradition littraire ancienne et les vicissitudes de dieux et de hros se mlangent sans cesse tout au long de sicles.

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Voyons maintenant, titre dexemplification, comme, en poque romaine, la mme figure a t accueillie, avec des diffrences de lieu et de nom, car le roi des Enfers ce moment l a beaucoup de noms Dite, Pluton, etc. et le royaume garde ses deux parties, quils appellent Avernus et Elysium:

Unum oro : quando hic inferni ianua regis dicitur et tenebrosa palus Acheronte refuso, [Virgile, Aeneis VI, 106-7] devenere locos laetos et amoena virecta fortunatorum nemorum sedisque beatas. Largior hic camos aether et lumine vestit purpureo, solemque suum, sua sidera norunt. [Virgile, Aeneis VI, 638-41]

Au moins en un premier temps, les anciens ne considrent pas les deux royaumes de loutre tombe sous un point de vue morale : on a vu que le royaume infernal mme nest pas seulement un lieu de punition et Hads chez les Grecs, Dite ou Pluton chez les Romains est le roi de toutes les mes, des pcheurs comme des hros, car lElise lui-mme nest quune partie de lAverne. Cest pourtant possible que les descriptions dHads et de lAverne ont mieux contribu la cration successive des lieux infernal que limagination du paradis terrestre, car chez les anciens loutre tombe est en tout cas un lieu sans esprance, caractris par une attente infinie plonge dans le nul de lobscurit des larves, sous lautorit dun roi capable de susciter la terreur dans les curs des immortels aussi ; seulement le pre des dieux, Zeus, montre sa suprmatie sur le frre obscur et terrible : , [850] .

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[Raction dHads la fureur de Zeus, lorsque le pre des Deux saperut de la dangerosit de Tife, uvre cite, 848-852]

Le Moyen-ge : lajout dune connotation morale La figure de Satan comme ange dchu drive dune interprtation dun verset dIsae et de quelques lieux plutt obscurs du Nouveau Testament1; le judasme et puis le christianisme rcuprent des religions les plus anciennes la distinction forte entre le deux principes du Bien et Mal, et ils crent une nouvelle image du roi de lEnfer en lui associant une caractrisation morale spcifique et laspect du diable, du prince du Mal. On connat plusieurs variantes de la faon reprsenter le diable mais, surtout pendant le Moyen ge, liconographie est focalise sur les aspects les plus dsagrables et monstrueux quon puisse imaginer ; on montre la stricte liaison qui se passe entre le Mal et la bestialit, car le but est loigner le plus quil soit possible limage humaine de la pire crature du cosmos et, dans le mme temps, le montrer aussi pouvantable mais surtout misrable que le croyant ne peut pas sempcher de le craindre et de le tenir pour le maximum exemple de pcheur puni. Donc, si dans lantiquit on a eu une certaine rticence dcrire un personnage ainsi mystrieux que redoutable, le Moyen ge au contraire semble vouloir lui donner une majeure visibilit et cela signifie le pouvoir connatre car, en suivant lhritage des anciens, pour lhomme mdival aussi voir est connatre. Pendant la Renaissance aussi, sera surtout la connotation morale malgr la dcouverte des classiques qui conditionnera limage de cette divinit : le diable reste le menteur, le mchant et, principalement, le vaincu par excellence. XVIe XVIIe sicle : la mtamorphose du Roi des Enfers

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Isae, 14 12; Lucas, 10 18; Jean, 8 44; Apocalypse, 12 9.

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Entre la Manire et le Baroque, on trouve des nouveauts dans la faon reprsenter le prince du Mal, et cela sexprime en au moins trois textes fondamentaux pour le milieu culturel de lpoque, la Gerusalemme Liberata de Torquato Tasso, le Paradise Lost de John Milton et le Le diable boiteux de Le Sage. Il ne faut pas oublier le clbre Faust de Goethe, qui cependant est postrieur, et reprsente une ultrieure phase du changement qui a son dbut dans les uvres cits auparavant. 1. Gerusalemme Liberata. Le Pluton de Torquato Tasso

Une entre les plus intressantes reprsentation de Satan se trouve dans la Gerusalemme Liberata (1559-1575) de Torquato Tasso. Les caractristiques principales en cette reprsentation du diable sont dabord la reprise de la tradition classique prsente tout de suite dans le nom Pluton, ensuite la facult de parler avec autorit et enfin la royaut quil garde malgr la chute, souligne par lentourage des diables de mine chevaleresque, si on peut dire cela en parlant dombres monstrueuses, car on a la perception dassister la reprsentation dun systme fodale dont les rapports du pouvoir apparaissent renverss. Limportance de la premire question est vidente, parce que pendant lpoque de Tasso ntait pas possible crire un seul mot qui navait pas une raison forte, et donc, seulement utiliser le nom Pluton signifie se rattacher au mythe classique ; cela est une acquisition trs connue mais il faut en tout cas la rappeler. On a dit ensuite que ce diable parle : cela est une question dimportance fondamentale tandis que la parole est une prrogative des tres libres et son pouvoir est norme ; dans la tradition prcdente si les diables parlent, cest surtout pour tromper quelquun, et souvent est suffisant invoquer le nom de Dieu pour les vaincre. On peut voir comme Dante Alighieri, qui a t une source trs importante pour Tasso, reprsente le prince du diables Dite dans sa Comdie :Lo mperador del doloroso regno/ da mezzo l petto uscia fuor de la ghiaccia;/ e pi con un gigante io mi convegno,/ che i giganti non fan con le sue braccia; Inf. XXXIV 28-31; Sel

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fu s bel comelli ora brutto,/ e contra al suo fattore alz le ciglia,/ ben dee da lui procedere ogni lutto. Inf. XXXIV 34-36

Srement ce diable est monstrueux, pouvantable, gigantesque, ses ailes battent sr la surface du Cocyte en le glaant, mais ses trois bouches ne font autre chose que broyer les trois pires pcheurs de lEnfer et, cest qui est la chose la plus humiliante, il est renvers, bloqu dans la glace qui produit lui mme, en un mot cest lemblme du vaincu. Il faut souligner que cette reprsentation est admise parce que dans la comdie est prvu lutilise du grotesque, mais dans le genre pique, comme celui de la Liberata, il faut choisir des mots de plus haut niveau linguistique. En effet le diable de Tasso est un roi, brlant de rage, qui pense se venger de Dieu et des ses paladins ; sa bouche, comme celle du diable dantesque, est trempe de sang, mais laspect, quon peut dfinir vnrable, de cet ancien dieu entre ses diables, qui porte aussi le sceptre et qui est assis sur le trne, cest bien diffrent que celui de lautre. Mais ce quest surtout diffrent cest la facult de parole, qui dans la Comdie caractrise plutt les diables mineurs bien quon ne puisse pas oublier la figure de Pluto, qui accable les plerins avec des mots rageurs et incomprhensibles2 car on peut voir lpisode de Guido da Montefeltro et le diavolo loico 3, beaucoup plus voisin la vision traditionnelle de lpoque ; mais, dans ce cas, le discours de Pluton ses diables ressemble singulirement celui de Ulysse (Inf. XXVI) ses camarades :Tartarei numi, di seder pi degni/ l sovra il sole, ond lorigin vostra,/ che meco gi da i pi felici regni/spinse il gran caso in questa orribil chiostra,/ gli antichi altrui sospetti e i feri sdegni/ noti son troppo, e lalta impresa nostra; (GL IV 9, 1-6) O frati dissi, che per cento milia/perigli siete giunti a loccidente,/ a questa tanto piccola vigilia/ (Inf. XXVI, 112-114) Ma che rinovo i miei dolor parlando?/ Chi non ha gi le nostre ingiurie intese?(GL IV 12, 1)2 3

Inf. VII 1-2. Inf. XXVII 112-123.

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Noi trarrem neghittosi i giorni e lore, /n degna cura fia che l cor naccenda?/e soffrirem che forza ognor maggiore/il suo popol fedele in Asia prenda?(GL IV 13, 1-4)

Non vogliate negar lesperienza, // Considerate la vostra semenza:/ fatti non foste a viver come bruti,/ ma per seguir virtute e canoscenza. (Inf. XXVI, 116 e 118-119)

Dj Crescimanno avait soutenu la liaison entre le diabolique de Tasso et la reprsentation dantesque des Enfers et, en mme temps, il avait dplor son puration dans la Conquistata qui, cause de cela, aurait perdu sa qualit potique. Sur la mme ligne, Praz dit que : Ancora nella Gerusalemme Liberata Satana conserva la orripilante maschera medievale4 mais, au contraire, Baldassarri soutient que le Tasso avait choisi de suivre plutt la reprsentation classique et en particulier celle de Virgil en sloignant de la tradition mdivale, de Dante en premier lieu :Nella prima Gerusalemme, in effetti, mentre il meraviglioso celeste trova cittadinanza a prescindere per lo pi dalla mediazione della tradizione classica, mitologica, la componente infernale, diabolica, del meraviglioso verosimile individuata gi nellArte poetica viene sottoposta a un costante processo di sublimazione che ha per catalizzatore proprio la tradizione mitologica:5

La figure du Satan de Tasso est le rsultat dun mlange de deux traditions, classique et mdivale, mais ce quest notable est le nouveau espace qui occupe ce figure dans luvre littraire, et sa liaison avec la reprsentation classique, particulirement celle virgilienne.

2.4 5

Paradise Lost. Satan selon Milton

Le metamorfosi di Satana, en La carne, la morte e il diavolo, p. 55. Inferno e cielo, op. cit. p. 36.

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Limage de Pluton quon trouve dans luvre de Tasso se rvle autant plus intressante si on voit que Milton a choisi ce modle et aussi des lments tirs de Giovan Battista Marino (Strage degli Innocenti), selon la pense de Praz pour son Satan, spcialement laspect du rebelle indomptable ; cette caractristique est trs vidente dans luvre de Milton, au point que ce Satan ressemble plutt un empereur roman qu un diable. Dautre ct, Loretta Mannucci6 voit dans le Satan de Milton un tre multiforme, vou lchec en tous ses manifestation, irrsistiblement raccroch au pass et toutefois assimilable un guerrier mythique, lorsquil se promne sur la plage aprs la chute. Mais, au moment o il montre laspect le plus hroque cest l quil devient lemblme de la ralit des hommes, proies du pouvoir et de la domination. Il ny a doute pourtant que le prince du Mal devait ncessairement tre le mauvais exemple de lorgueil puni, mais cest le fait de montrer dfauts humains qui le rende charmant, surtout parce quil nest plus une silhouette sans autre qualit que le fait dtre mchant et menteur mais un personnage complexe, on peut couter sa voix, our se discours, partager aussi ses sentiments. Donc on ne doit pas stonner si William Blake et les Romantiques ont vu dans celui-ci le vrai hros du Paradise Lost : noble prince vaincu, ses idaux et son caractre ne sont point clabousss par la dfaite, au contraire se dtachent aussi mieux quauparavant ; en outre le choix de commencer la narration avec la consquence de la rbellion des anges Dieu qui est soi-mme une chose bien original ne peut que mettre au premier plan la figure de Satan. Pour la caractrisation de rebelle qui est aussi centrale dans ce diable, Mario Praz a vu une liaison entre celui-ci et le Promthe dEschyle et le Capane dantesque :[] fu il Milton a conferire alla figura di Satana tutto il fascino del ribelle indomito che gi apparteneva alle figure del Prometeo eschileo e del Capaneo dantesco []7

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LORETTA VALTZ MANNUCCI, Ideali e classi nella poesia di Milton, Milano : Edizioni di Comunit, 1976. PRAZ MARIO, La carne, la morte e il diavolo nella letteratura romantica, introduzione di Paola Colaiacomo, Firenze : Sansoni 1930, p. 58.7

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En outre, si on pense que dans lintention de lauteur limage du diable aurait d tre fortement ngative, mais au contraire sa personnalit a fascin le lecteur de telle faon que le cri de Satan a t entendu comme celui de Milton attrist pour la dsillusion politique, on peut comprendre entirement la complexit et limportance de cette personnage, caractris en outre par un dsir dexprimenter et exercer sa libert dindividu cote que cote8 qui rappelle bien lesprit de lUlysse dantesque. Enfin, si lorazion picciola du diable miltonien peut venir du Tasso, ou de la connaissance directe de la Comdie dantesque selon la pense de George Butler, la fonction de deus ex machina du diable tassien dans la Liberata est change chez Milton par une partie de protagoniste qui aurait sa plus accomplie ralisation dans le Romantisme. 3. Le diable boiteux : Asmode, le diable honnte Avec Le diable boiteux de Le Sage on a un cart notable non seulement par rapport aux uvres littraires des autres pays europens, mais aussi avec les uvres produites en France dans la priode immdiatement prcdent. En effet, spcialement dans la premire moiti du XVIIe sicle, on avait la circulation de brves fables avec une fonctionne didactique : il sagit dun genre beaucoup plus populaire et simple dont la narration est caractrise par une structure cadre ; c'est--dire que la morale contient la narration, tant donn que celle-ci doive servir comme exemple de la conduite que les prceptes morales conseillent au lecteur. Entre ces fables on en a choisi une Les estranges et espovventables amours dune Diable, en forme de Gentillme, et dune Damoisselle, de Bretagne, imprime par Jacques Courtois dans le 1620 qui veut montrer que lAmour sensuel est une chose viter, parce quil sduit avec tendresse mais, une fois quil soit bien plac dans le cur, le rend esclave et donc incapable discerner nimporte quoi.8

MARCELLO CAPPUZZO, Il Paradise Lost di John Milton, Messina : Peloritana Editrice, 1969.

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La figure du diable dans ce cas est trs lie limagination populaire et superstitieuse de tradition mdivale on peut voir Bonvesin de la Riva, Giacomino da Verona, etc. car se fonde sur certains lieux commun qui donnent un rsultat trs schmatique et un peu ingnu ; il ny a pas de description physique prcise, on apprend seulement quil a le visage dhomme juste : un homme en faon dun gentilhomme, ayant lapparence noble9 ; on peut aussi comparer cette phrase avec la description dantesque de Gryon, bien quil ne soit pas exactement un diable : La faccia sua era faccia duom giusto, /tanto benigna avea di fuor la pelle,/ e dun serpente tutto laltro fusto;10 En effet le personnage de Gryon dans la Comdie reprsente le pire des trompeurs, car la partie de lui quon peut voire est seulement la meilleure, c'est--dire son visage, mais son corps, qui rvle sa vrai nature, est aussi bien cach quon le voit lorsque il est trop tard. Ceci de la mensonge est tellement laspect caractrisant ce personnage et on peut dire le seul vraiment importante que lauteur introduit le champ smantique de la duperie presque chacune fois quil parle de lui ; on peut voir que cela est aussi le caractre principale du diable Malacoda ( Inf. XXIII, 140-41). Sur ce diable on apprend aussi quil a une mine lgante et des belles manires et que autres deux diables laccompagnent, une Trinit renverse, en quelque sorte. a va sans dire quil na pas nom et que cest sa mme lourdeur desprit qui permet au pre de la demoiselle protagoniste de la fable de le dmasquer : il suffit prononcer le nom de Dieu pour causer la fuite du diable. Au contraire Le Sage attribue au diable le rle du protagoniste de faon explicite, en lui donnant des caractres prcis et une complexit psychologique vraiment remarquables. On peut dire en outre que le nom de Satan arrive mme donner, pour la premire fois, le titre une uvre littraire, car il ne reprsente plus seulement le personnage dune narration mais il symbolise le vritable centre du9 10

Les estranges et espouventables amour dun diable, p. 7, carta 193 recto. DANTE ALIGHIERI, Divina Commedia, Inf. XVII, 10-12.

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texte ; cela marque un cart avec Milton aussi, parce quil choisit de mettre au point surtout la vicissitude de Adam et Eve et donc le diable est un personnage fondamental pour lhistoire mais il nest pas le protagoniste. Le Sage met donc en vidence le dfaut physique de son diable, en faisant le contraire exact par rapport la fable morale, dans laquelle laspect du mauvais personnage est captivant et le dfaut est beaucoup plus cach puisqu'il est seulement spirituel. Le diable biblique Asmode se prsente comme un entre les diables les plus influents, car il dfinit Lucifer le diable des charlatans11 ; en outre sa vrai identit est celle de Cupidon et son aspect, qui ne concide pas avec la description des potes, car ceux-ci ont la propension raconter des mensonges, est d a une bataille dontPilladore fut le plus fort, et me jeta sur la terre de la mme faon que Jupiter, ce que disent les potes, culbuta Vulcain.12

Le parallle est autant plus ironique si on pense la proposition quon trouve peu auparavant, lorsque lcolier don Clophas avait relev la tendance des potes cacher la vrit sous des belles mensonges. Donc la particularit de ce personnage est la franchise et il a aussi un penchant pour la vrit qutonne dans un diable parce que, pour la premire fois, il reprsente le bon gnie qui permet le dnouement heureux dune comdie, car il donnera don Clophas aussi lamour que la connaissance des misres humaines, pour le remercier de son aide. En outre on trouve dans le texte une liaison explicite avec la philosophie platonicienne, pour ce qui concerne aussi laspect comme la personnalit de Cupidon, autant que celui-ci instaure un paralllisme entre lui-mme et le gnie platonicien (type de rapprochement dj aim par Tasso13)

11 12

Le diable boiteux, p. 11. Le diable boiteux, p. 17. 13 Pota Melancholicus, op. cit.

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Je serai vtre dmon tutlaire, et, plus clair que le gnie de Socrate, je prtend vous rendre encore plus savant que ce grand philosophe14.

La direction imprime cette argument sera suivie par Goethe (Faust) car Mphistophle aussi promet le don de la connaissance au protagoniste, mais au contraire de celui de Le Sage, il prtendra lme de Faust comme payement pour son service, sil russira le rendre heureux. propos du diable de Le Sage, Roland Villeneuve a crit Au fond, ce dmon que lauteur dnomme Asmode na rien de trs mchant15 mme sil est cit comme exemple de permanence dans la tradition iconographique mdivale.

Conclusion Pour ce qui concerne les aspects que ces trois auteurs ont conserv par rapport lantiquit, on a vu que Tasso et Milton ont apport le maximum laspect de la majest de ce personnage, le premier en soulignant en particulier la terreur quil provoque, le seconde en montrant la grandeur dme qui caractrise un vrai roi ; quant au diable de Le Sage, il y a eu le recouvrement de la figure du demi dieu Pluton pour ce qui concerne laspect de la richesse imprvue quon peut acqurir en le rencontrant, ici sous forme de acquisition de connaissance et de bonheur ; cependant la royaut qui appartenait Hads non seulement ne fait plus partie de ce personnage, qui a dans le mme temps perdu sa capacit dinspirer la terreur, mais aussi elle est totalement incompatible cette image du diable, dont ce qui est plus important est lesprit. Ensuite, on a vu de quel faon la figure du diable a eu une augmentation de place, de complexit et par consquent dimportance qui a eu son prcdent le plus significatif dans la Liberata de Tasso, mais qui a connu un graduel accroissement14 15

Le diable boiteux, p. 14. Satan, op. cit., p. 1192

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surtout au XVIIe sicle (le niveau maximum de cela a t celui de Milton), de telle faon que le dbut du XVIIIe sicle prsente une type de reprsentation du diable trs novatrice qui dun ct conserve ensemble les traditions ancienne et mdivale, de lautre montre des caractres tout fait neufs qui seront accueillis par les auteurs de lpoque suivante, en faisant du prince du Mal lhros du XIXe sicle.

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