la protection des refugies en droit international · la protection des refugies en droit...

836
LA PROTECTION DES REFUGIES EN DROIT INTERNATIONAL

Upload: lylien

Post on 11-Sep-2018

223 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • La protection des refugies en droit internationaL

  • La protection des refugies en droit internationaL

    sous la direction de erika feller, Volker trk et frances nicholson

    dro

    it in

    tern

    atio

    nal

  • groupe de Boeck s.a., 2008 ditions Larcier Rue des Minimes, 39 B-1000 Bruxelles

    tous droits rservs pour tous pays. il est interdit, sauf accord pralable et crit de lditeur, de reproduire (notamment par photocopie)

    partiellement ou totalement le prsent ouvrage, de le stocker dans une banque de donnes ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manire que ce soit.

    imprim en Belgique

    Dpt lgal 2008/0031/028 ISBN 978-2-8044-2385-8

    pour toute information sur notre fonds et les nouveauts dans votre domaine de spcialisation, consultez notre site web : www.larcier.com

    La collection droit international a pour objectif de publier des monographies sur les problma-tiques les plus actuelles du droit international public. Elle offre aux praticiens la possibilit de suivre les dveloppements du droit international public par ses ouvrages d'une haute qualit scientifique, crits par des spcialistes de la matire.

    sous la direction de :

    Philippe VINCENT, professeur l'Universit de Lige et aux Facults universitaires Saint-Louis.

    Dans la mme collection :Vincent p., droit de la mer, 2008Kieffer B., Lorganisation mondiale du commerce et lvolution du droit international public, 2008feLLer e., nicHoLson f., trK V., La protection des rfugis en droit international, 2008

    Photo de couverture : chad / sudanese refugees / refugee women and children queuing for water in Breidjing camp/ UNHCR / H. Caux / August 2004

  • NOTES SUR LES AUTEURSET LES DIRECTEURS DE LA PUBLICATION

    1

    T. Alexander Aleinikoff

    T. Alexander Aleinikoff est Professeur au Centre de droit de lUniversit Georgetown et ana-lyste politique senior au Migration Policy Institute Washington DC. Spcialiste du droit delimmigration, des rfugis et de la citoyennet, il a publi de nombreux articles dans cesdomaines, dans des revues amricaines et internationales. De 1994 1997, il a travaill auService amricain de lImmigration et de la Naturalisation (INS), dabord comme Conseillergnral puis comme Commissaire excutif associ pour les programmes. Il est co-auteur(avec David A. Martin et Hiroshi Motomura) de

    Immigration and Citizenship : Process andPolicy

    (4

    e

    dition, West Publishing Co., St Paul, MN, 1998).

    Daniel Bethlehem

    Daniel Bethlehem est entr au Barreau en 1988 et pratique le droit international dans soncabinet, situ au 20 Essex Street Londres. Il a enseign le droit international la LondonSchool of Economics de 1992 1998. En 1998, il a pris le poste de Directeur adjoint au CentreLauterpacht de recherche en droit international et occupe un poste denseignant-chercheurau Clare Hall College au sein de lUniversit de Cambridge. Il intervient rgulirement entant que conseil la Cour internationale de Justice et dans dautres tribunaux internatio-naux et nationaux.

    Rafael Bonoan

    Rafael Bonoan est chercheur auprs de lInstitute for Defense Analyses (IDA) WashingtonDC, et doctorant dans le Dpartement des sciences politiques du Massachusetts Institute ofTechnology. Ses domaines principaux de recherche sont les relations internationales, lascurit et la politique trangre amricaine. Avant de rejoindre lIDA, il a enseign les rela-tions internationales en tant que professeur invit lUniversit Ateneo de Manila (Philippi-nes) et il a travaill comme consultant pour le projet GrantCraft de la Fondation Ford.

    Alice Edwards

    Alice Edwards est juriste en droit international des rfugis et en droits de lHomme. Elle atravaill comme consultante au Dpartement de la protection internationale du HCR, ser-vant de point de contact pour le deuxime volet des Consultations mondiales sur la pro-tection internationale, de juillet 2001 juillet 2002. De 1998 cette date, elle tait officier deprotection du HCR en Bosnie-Herzgovine et au Rwanda. En 1997, elle a travaill auMozambique comme charge de la communication pour lorganisation Food for the Hungry

    1. Ces informations taient correctes au moment de la parution de ldition anglaise.

  • La protection des rfugis en droit international

    6

    LARCIER

    International, et en 1998, elle est devenue avocate Melbourne (Australie). En 1996, elle aparticip la rdaction des actes dun symposium du HCR sur la perscution lie lappar-tenance sexuelle, qui ont t publis dans une dition spciale de l

    International Journal ofRefugee Law

    en 1997. Pendant son sjour en Bosnie-Herzgovine, elle a effectu des recher-ches et rdig une importante tude publie par le HCR, sous le titre

    Daunting Prospects Minority Women : Obstacles to their Return and Reintegration

    (avril 2000).

    Erika Feller

    Erika Feller est actuellement la Directrice du Dpartement de la protection internationaledu Haut Commissariat des Nations Unies pour les rfugis, Genve. Le fil conducteur desa carrire a t son travail dans le domaine du droit international, tant au plan thorique,notamment son laboration, quau plan pratique. Elle possde en outre une connaissanceapprofondie du travail dans le domaine des droits de lHomme. Avant doccuper son pre-mier poste au HCR, en tant que Conseiller juridique senior auprs du Bureau du Directeur,Division du droit des rfugis et de la doctrine, elle a travaill pendant quatorze annes entant que diplomate au sein du ministre des Affaires trangres australien, Canberra, Ber-lin, Rome et Genve. Depuis quelle a rejoint le HCR, elle a travaill Genve, et sur le ter-rain en tant que reprsentante du HCR pour la Malaisie, Brunei et Singapour.

    Joan Fitzpatrick

    Joan Fitzpatrick tait Professeur de droit lUniversit de Washington (Jeffrey & SusanBrotman) Seattle. Elle tait lauteur de six ouvrages dont

    Human Rights in Crisis : The Inter-national System for Protecting Rights During States of Emergency

    (University of PennsylvaniaPress, 1994) et elle a coordonn les ouvrages suivants :

    Human Rights Protection for Refugees,Asylum-Seekers, and Internally Displaced Persons : A Guide to International Mechanisms andProcedures

    (Transnational Publishers, Ardsley, NY, 2002). Elle tait membre du comit derdaction de l

    American Journal of International Law.

    Le HCR regrette profondment dondcs prmatur en mai 2003.

    Michelle Foster

    Michelle Foster est actuellement candidate au diplme de SJD lUniversit du Michigan.Elle est diplme de lUniversit de New South Wales et a occup plusieurs postes de juristeen Australie, notamment dans le Service du Procureur gnral du Commonwealth, le Ser-vice du Procureur gnral de New South Wales, et lUniversit de New South Wales.

    Geoff Gilbert

    Geoff Gilbert est Professeur de droit lUniversit dEssex (Royaume-Uni). Il dirige leDpartement juridique et le LLM en droit international des droits de lHomme. Il a parti-cip au programme de recherche du Centre des droits de lHomme de lUniversit dEssex,sur les droits de lHomme dans les situations de crise extrme, qui a t ralis au nom duDpartement britannique pour le dveloppement international. Il a donn des formationsdans le domaine des droits de lHomme pour le compte du Conseil de lEurope et du HCRen Fdration de Russie (Sibrie et Kalmoukie), Bosnie-Herzgovine, Croatie, ex-Rpubli-que yougoslave de Macdoine et au Kosovo. Il a t expert consultant sur les rfugis et leterrorisme pour le HCR et, depuis 2002 il est rdacteur en chef de l

    International Journal ofRefugee Law.

    Ses domaines de spcialit sont le droit international des droits de lHomme, laprotection des rfugis en droit international et le droit international pnal.

  • Notes sur les auteurs et les directeurs de la publication

    LARCIER

    7

    Guy S. Goodwin-Gill

    Guy S. Goodwin-Gill est Professeur de droit international des rfugis et Directeur derecherche lInstitut des tudes europennes de lUniversit dOxford (Royaume-Uni).Depuis octobre 2002, il est chercheur senior au All Souls College dOxford. De 1994 2000, ila enseign galement le droit de lasile lUniversit dAmsterdam (Pays-Bas). Il a travaillpour le HCR, principalement comme conseiller juridique, de 1976 1988, puis a men desactivits denseignement, de recherche et de conseil en droit international et dans ledomaine des rfugis, et dautres questions relatives aux migrations. Il est le rdacteur fon-dateur de l

    International Journal of Refugee Law,

    et il en a t le rdacteur en chef de 1989 2001. Parmi ses publications, on trouve

    The Refugee in International Law

    (2

    e

    dition, Claren-don Press, Oxford, 1996) et

    The Reality of International Law : Essays in Honour of Ian Brownlie

    (Clarendon Press, Oxford, 1999), en tant que co-directeur et auteur (pour le dernierouvrage). Depuis 1997, il est prsident du Refugee Legal Centre (organisation non gouver-nementale britannique assistant et reprsentant les rfugis et les demandeurs dasile) et,depuis 2000, il a t nomm par les Nations Unies comme Prsident de la Commissiondappel des mdias du Kosovo. Il est membre du Barreau dAngleterre et du Pays de Galles.

    Rodger Haines QC

    Rodger Haines QC (Queens Counsel) a t nomm la New Zealand Refugee StatusAppeals Authority (Instance dappel des rfugis de Nouvelle-Zlande) lors de sa crationen 1991, et il est lauteur de nombreuses dcisions importantes de cette instance. Il en estactuellement le Prsident adjoint. Depuis 1993, il enseigne le droit de limmigration et desrfugis la Facult de droit, Universit dAuckland (Nouvelle-Zlande).

    James C. Hathaway

    James C. Hathaway est Professeur de droit lUniversit du Michigan (tats-Unis), et il enest le Directeur-fondateur du Programme en droit des rfugis et de lasile, dans lequel lestudiants ont la possibilit dtudier le droit des rfugis dans une perspective internatio-nale, compare et interdisciplinaire. Il est galement chercheur associ senior invit auRefugee Studies Centre de lUniversit dOxford (Royaume-Uni). Il a t Professeur de droitet Recteur adjoint de la Facult de droit Osgoode Hall de Toronto (Canada) et Professeurinvit des Universits de Tokyo et de Californie. Parmi ses publications, on trouve

    The Lawof Refugee Status

    (Butterworths, Toronto, 1991),

    Reconceiving International Refugee Law (

    Mar-tinus Nijhoff, La Haye, 1997) en tant que Directeur, et plus de quarante articles. Il appartientaux comits de rdaction des revues

    Journal of Refugee Studies

    et

    Immigration and Nationa-lity Law Reports,

    et dirige le Refugee Caselaw Site, un site Internet qui recueille, indexe etpublie une slection de dcisions judiciaires rcentes dans le domaine du droit des rfugis.Il a rcemment t nomm la direction du premier cours spcialis en droit des rfugispour lAssociation internationale des juges du droit des rfugis et il termine son prochainlivre intitul

    The Rights of Refugees under International Law.

    Kate Jastram

    Kate Jastram est actuellement Professeur la Facult de droit Boalt Hall de lUniversit deCalifornie Berkeley (tats-Unis). Elle est actuellement en cong du HCR, o elle a occupdiffrents postes Genve, notamment comme Officier de liaison senior pour les droits delHomme et comme Reprsentante rgionale adjointe pour les tats-Unis et les Carabes.Avant de rejoindre le HCR, elle tait Directrice du projet sur les rfugis et lasile de lorga-

  • La protection des rfugis en droit international

    8

    LARCIER

    nisation Minnesota Advocates for Human Rights et travaillait San Francisco en tantquavocate spcialise en droit de limmigration et de la nationalit. Elle a travaill commeconsultante auprs du Migration Policy Institute, de lInstitute of International Law andEconomic Development et du International Migration Policy Program de la Fondation Car-negie pour la paix internationale. Elle est auteur, co-auteur ou directrice dun certain nom-bre de monographies et de documents de formation et dinformation sur le droit desrfugis et les droits de lHomme.

    Walter Klin

    Walter Klin est Professeur de droit constitutionnel et international la Facult de droit delUniversit de Berne (Suisse). Ses ouvrages incluent des tudes sur le principe du non-refou-lement (1982), la loi suisse sur lasile (1990), la question des droits fondamentaux dans lessocits multiculturelles (2000) et des annotations aux Principes directeurs sur les dplace-ments de personnes lintrieur de leur propre pays (2000). Il a t Rapporteur spcial de laCommission des droits de lHomme des Nations Unies sur la situation des droits de lHommeau Kowet pendant loccupation irakienne (1991-1992) et il a travaill plusieurs reprisescomme consultant pour le HCR, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits delHomme, le Programme de dveloppement des Nations Unies et dautres organisations.

    Sir Elihu Lauterpacht QC

    Elihu Lauterpacht est entr au Barreau en 1950, a t nomm QC (Queens Counsel) en 1970et a t fait Chevalier en 1996. Il pratique dans un cabinet situ 20 Essex Street Londres. Ilest devenu membre du Trinity College lUniversit de Cambridge (Royaume-Uni) en 1953.Fondateur du Centre de recherche en droit international en 1983, il en a t le premierDirecteur jusquen 1995, puis le Prsident dhonneur. Il a t nomm Professeur honoraireen droit international lUniversit de Cambridge en 1994. Il a t juge

    ad hoc

    dans

    laffairedu gnocide

    devant la Cour internationale de Justice, sige rgulirement comme arbitredans des procdures internationales et intervient frquemment en tant que conseil devantles tribunaux nationaux et internationaux.

    Kathleen Newland

    Kathleen Newland est Co-directrice et cofondatrice du Migration Policy Institute, un groupede rflexion sur les questions de migration et de rfugis, tabli Washington DC en 2001.Auparavant, elle tait Associe senior la Fondation Carnegie pour la paix internationale,o elle a codirig le International Migration Policy Program. Elle prside le Conseil dadmi-nistration de la Womens Commission for Refugee Women and Children, et sige au Conseildadministration de lInternational Rescue Committee. En 1992-93, elle a rdig le premier

    State of the Worlds Refugees,

    rapport du HCR. De 1988 1992, elle a enseign la LondonSchool of Economics, elle a galement cofond et dirig Humanities, un fonds pour lduca-tion destin dvelopper la sensibilisation aux questions humanitaires internationales. Elleest lauteur ou la directrice de cinq ouvrages, onze monographies plus courtes et dautrespublications, et elle a produit trois films documentaires sur les questions humanitaires.

    Frances Nicholson

    Frances Nicholson est consultante, dans le domaine de la recherche et de la rdaction, surles questions de protection des rfugis et de droits de lHomme. Elle est co-directrice de lapublication de

    Refugee Rights and Realities : Evolving International Concepts and Regimes

  • Notes sur les auteurs et les directeurs de la publication

    LARCIER

    9

    (Cambridge University Press, 1999) et a travaill pour le HCR comme responsable de lapublication

    The State of the Worlds Refugees 2000/Les Rfugis dans le Monde

    (Oxford Univer-sity Press, 2000). Aprs avoir termin un master en relations internationales lUniversitde Cambridge (Royaume-Uni), elle a travaill comme chercheuse (Airey Neave) au HumanRights Law Centre de lUniversit de Nottingham (Royaume-Uni). Ses travaux rcentsincluent la rdaction et la sous-direction du rapport

    Kosovo/Kosova, As Seen, As Told

    pour leBureau des institutions dmocratiques et des droits de lHomme de lOrganisation pour lascurit et la coopration en Europe (OSCE) et la rdaction de documents de travail pourles Consultations mondiales du HCR sur la protection internationale.

    Volker Trk

    Volker Trk est actuellement Responsable de la Division de la politique de protection et delaide juridique, du Dpartement de la protection internationale du HCR, Genve. CetteDivision a assum des responsabilits significatives dans le processus des Consultationsmondiales. De 1997 dbut 2000, il a travaill comme Chef adjoint de mission (protection)pour les oprations du HCR en Bosnie-Herzgovine et au Kosovo. De 1995 1997, il a tconseiller juridique la Division de la protection internationale du HCR Genve ; de 1993 1995, conseiller juridique rgional pour lEurope centrale et orientale (Bureau Europe,HCR, Genve) et de 1991 1993, officier de protection pour le bureau du HCR au Kowet. Ila galement effectu des missions de courte dure en Asie centrale et en Rpublique dmo-cratique du Congo. Auparavant, il a travaill comme assistant lInstitut du droit internatio-nal lUniversit de Vienne, o il a termin sa thse de doctorat sur le HCR et son mandat(publie en allemand par Duncker & Humblot, Berlin, 1992). De 1985 1988, il a t assistantde recherche lInstitut de droit pnal de lUniversit de Linz (Autriche). Il a beaucouppubli en matire de droit international des rfugis.

  • AVANT-PROPOS

    Je me rjouis de la publication de cette dition en langue franaise du livre

    Refugee Protection in International Law : UNHCRs Global Consultations on InternationalProtection

    , qui contribue rendre plus accessible au monde francophone les dilem-mes et les dveloppements du droit international contemporain relatif aux rfugis.

    Ce livre reprsente une issue majeure du deuxime volet des Consulta-tions mondiales du HCR sur la protection internationale de 200002. Ce volet desConsultations tait consacr lanalyse et la discussion de questions requrant uneclart accrue sur certains aspects de la Convention de 1951 relative au Statut desRfugis la lumire dinterprtations modernes, dont certaines avaient commenc diverger tant au sein de certains tats quentre certains tats.

    Depuis sa publication en anglais en 2003, et lactuelle dition franaise, lana-lyse et les conclusions des processus exposes dans ce livre servent doutil de plus enplus utile aux juristes, juges, fonctionnaires gouvernementaux et autres personnesqui cherchent clarifier linterprtation de questions diverses en matire de droitinternational relatif aux rfugis.

    Ce livre a galement servi de base une srie de Principes directeurs du HCRsur la protection internationale, publis conformment au mandat du Haut Commis-sariat, tel que contenu dans son Statut de 1950 en conjonction avec larticle 35 de laConvention de 1951 et larticle II de son Protocole de 1967. Il fut demand au HautCommissariat de les publier dans lAgenda pour la Protection, qui fut lui-mmeapprouv par le Comit excutif du HCR et accueilli par lAssemble Gnrale en2002. Ces Principes directeurs, qui sont disponibles sur le site Internet du HCR enplusieurs langues, dont le franais, servent dorientation en matire dinterprtationaux gouvernements, aux praticien(ne)s du droit, aux dcisionnaires et la magistra-ture, ainsi quaux membres du personnel du HCR qui effectuent la dtermination dustatut de rfugi sur le terrain. Elles compltent le

    Guide du HCR des procdures et cri-tres appliquer pour dterminer le statut de rfugi au regard de la Convention de 1951et du Protocole de 1967 relatifs au statut des rfugis.

    Jusque mi-2007, sept Principes directeurs ont t publis dans cette srie. Ilsproviennent de nombreuses questions traites dans ce livre : la perscution lie augenre ; lappartenance un certain groupe social ; la cessation dans le contexte delarticle 1 C 5 et 1 C 6 de la Convention de 1951 ; la possibilit de fuite ou de rinstal-lation interne ; lapplication des clauses dexclusion ; les demandes dasile fondessur la religion, et lapplication de larticle 1 A 2 de la Convention aux victimes de latraite et aux personnes risquant dtre victimes de la traite.

  • La protection des rfugis en droit international

    12

    LARCIER

    Nous esprons que ces Principes directeurs, qui sappuient fortement surlanalyse de la jurisprudence comparative accompagnant le deuxime volet du pro-cessus des Consultations mondiales, contribueront surmonter les divergences dansla pratique des tats et promouvoir une approche plus harmonise et plus structu-re de linterprtation de la Convention de 1951. Cela commence dj : un nombrecroissant de cours et tribunaux citent des contributions et des conclusions des tablesrondes dexpert(e)s contenues dans ce livre, ainsi que des Principes directeurs sur laprotection internationale qui en dcoulent.

    Je loue la publication de ce livre en franais, dans lattente quil rende son con-tenu important encore plus accessible au monde francophone.

    Antnio GuterresHaut Commissaire des Nations Unies pour les Rfugis

    Genve, juillet 2007

  • PRFACE

    Le monde a radicalement chang depuis la cration du HCR et lentre envigueur de la

    Convention relative au statut des rfugis

    il y a cinquante ans. Le rgimemoderne de protection internationale des rfugis a t construit au lendemain de laSeconde Guerre mondiale et il reprsente dsormais une structure complexe, assu-rant une protection vitale des millions de personnes dplaces de force. Au coeurde cette structure, la Convention et le

    Protocole de 1967

    , sont largement reconnuscomme des instruments durables qui reprsentent la cheville ouvrire du rgimede protection internationale des rfugis comme lont dclar les tats parties laConvention et/ou au Protocole en dcembre 2001.

    Daucuns ont toutefois parfois tir des conclusions tendant remettre en ques-tion la pertinence actuelle de la Convention, ou recommandant de la rformer tota-lement, voire de labandonner. Ces conclusions sont errones et mme dangereuses.Elles contribuent roder la qualit de lasile, car lengagement des tats assurerune protection en vertu des instruments existants commence faiblir. Le HCRreconnat bien sr que les dfis actuels sont nombreux et varis et quil y a des lacu-nes dans le cadre de protection, mme si, en son sein, les principes fondamentaux durgime de la Convention sont plus que jamais valables et ncessaires.

    Les Consultations mondiales sur la protection internationale manifestent lavolont du HCR didentifier les dfis modernes auxquels la protection des rfugisest confronte, de consolider les soutiens en faveur du cadre international des princi-pes de protection, et dexplorer les possibilits de renforcer la protection au moyende nouvelles approches, qui respectent nanmoins les proccupations et les con-traintes des tats et des autres acteurs. Ce processus avait pour objectif de promou-voir une meilleure comprhension des dilemmes actuels en matire de protection,dans la perspective tant des prestataires que des bnficiaires de la protection inter-nationale. Il nest pas toujours facile de concilier les intrts des tats et les besoinsdes rfugis, mais il est vident que le premier pas dans cette direction ne peut trefait quaprs en avoir correctement mesur les possibilits et les limites.

    Les Consultations ont galement t conues pour favoriser une meilleurecoopration entre tous les acteurs concerns. Lidentification des meilleures prati-ques, ou au moins de leurs principes de base, pour faire fonctionner les systmesdasile de manire plus quitable et plus efficace, paralllement un raffermisse-ment de la volont politique damliorer la protection, non pas sur une base

    ad hoc

    etdiscrtionnaire, mais de faon prvisible et cohrente dans le cadre de critresaccepts au plan international, constituaient galement des objectifs. Il en tait de

  • La protection des rfugis en droit international

    14

    LARCIER

    mme concernant une approche plus sense du partage des responsabilits, afindallouer les responsabilits de manire plus rationnelle et dquilibrer les chargesde manire plus quitable. Enfin, les Consultations mondiales avaient pour but decontribuer amliorer la mise en uvre des principes de base importants, notam-ment en clarifiant leur signification dans le contexte actuel.

    Les diffrentes questions souleves au cours des Consultations mondiales ontt rparties en trois volets . Le premier sest achev par une runion sans prc-dent des ministres des tats parties la

    Convention de 1951

    et/ou au

    Protocole de1967

    , qui a eu lieu Genve en dcembre 2001. La Dclaration qui en est issue lapremire adopte par tous les tats parties est reproduite au chapitre 1.3 de cettepublication. Cette Dclaration constitue une mesure importante de lengagementpolitique pour amliorer la protection des rfugis dans un cadre conventionnel ren-forc. Le deuxime volet des Consultations sest traduit par une srie de tablesrondes dexperts qui se sont tenues au cours de lanne 2001 sur certaines questionsdinterprtation de la

    Convention de 1951

    ncessitant dtre clarifies (cf. tableau p.xxi). Il en rsultera, nous lesprons, une harmonisation dans la manire dappliquerla Convention dans le monde daujourdhui. Le troisime volet a rassembl destats et dautres acteurs dans le cadre du Comit excutif du Programme du HautCommissaire pour discuter de diffrentes questions spcifiques ou thmatiques enmatire de protection des rfugis, qui ne sont pas directement, ou pas adquate-ment, couvertes par la Convention et le Protocole.

    Dans lensemble, le processus des Consultations mondiales a favoris unesprit de coopration pour aborder les questions de rfugis. Il a suscit un intrtpour un dialogue multilatral visant trouver des solutions un ensemble de pro-blmes de plus en plus internationaliss. Le processus a confirm la volont de met-tre en commun les proccupations et de rechercher ensemble des solutions durables des problmes dont le rglement ne peut venir que dune action collective. Le HCRet les tats ont labor ensemble un Agenda pour la protection, qui devrait contri-buer tant alimenter et orienter le dbat qu mettre en place des politiques.LAgenda comprend un programme tendu daction pour aborder les diffrentesquestions relatives la protection des rfugis dans le contexte complexe actuel.

    Ce livre constitue une production majeure des tables rondes du deuximevolet et des relevs de conclusions qui en ont rsult. Il analyse en dtail diffren-tes questions juridiques dinterprtation de la

    Convention de 1951

    et rassemble lesdocuments de travail rdigs par les experts, prsents aux participants des runionsdes tables rondes, et leurs conclusions. Il avait t demand aux auteurs de faire despropositions pour parvenir un consensus sur des questions cls dinterprtation dela Convention, afin de favoriser une plus grande cohrence dans lapplication de laConvention par les diffrentes juridictions dans le monde. Il leur avait galement tdemand dintgrer leur analyse les dveloppements rcents du droit internationalapplicable aux dplacements forcs.

  • Prface

    LARCIER

    15

    Ce livre dbute par une prsentation gnrale de la protection des rfugis endroit international, suivie par un document portant sur les dimensions de lge et dugenre dans linterprtation de la

    Convention de 1951

    et par le texte de la

    Dclarationde 2001 de la Runion ministrielle des tats parties la Convention de 1951 et/au Proto-cole de 1967

    . La publication contient ensuite neuf chapitres, chacun comprenant undocument, rdig par diffrents experts reconnus en matire de protection interna-tionale des rfugis, sur des questions essentielles dinterprtation de la

    Conventionde 1951

    . Celles-ci concernent le non-refoulement, lentre irrgulire, lappartenance un certain groupe social, la perscution lie au genre, les possibilits de refuge/rinstallation/protection interne, lexclusion, la cessation, lunit et la runificationfamiliales et la responsabilit de surveillance du HCR en vertu de son Statut. Cha-cune de ces questions a t dbattue au cours de la runion dune table rondedexperts en 2001 et les relevs des conclusions de ces runions sont prsents lasuite des documents pertinents.

    Je suis convaincue que cette publication va fournir un outil important pour lesjuges, les agents chargs de linstruction, les praticiens du droit, les fonctionnaires,les travailleurs humanitaires, les dfenseurs non gouvernementaux de la cause desrfugis et les milieux universitaires dans leurs diffrents efforts pour parvenir lobjectif commun du renforcement de la protection des rfugis travers le monde.Pour sa part, le HCR va sinspirer de ces diffrentes contributions pour actualiser ses

    Principes directeurs,

    labors conformment la responsabilit que lui confrent leparagraphe 8 de son Statut et larticle 35 de la

    Convention de 1951

    elle-mme.

    Erika FellerDirectrice de la protection internationale (2003)

    Haut Commissaire assistant pour la protection (2007),Haut Commissariat des Nations Unies pour les rfugis

  • REMERCIEMENTS

    Le HCR souhaiterait remercier les co-organisateurs des tables rondesdexperts, organises dans le cadre du deuxime volet des Consultations mondia-les sur la protection internationale, pour leurs importantes contributions tant sur lefond quen termes financiers, sans lesquelles ces vnements nauraient pas pu avoirlieu. Les coorganisateurs taient lInternational Migration Policy Institute de la Fon-dation Carnegie pour la paix internationale, New York (tats-Unis) ; la Fondationluso-amricaine pour le dveloppement, Lisbonne (Portugal) ; le Centre Lauterpachtde recherche en droit international, Universit de Cambridge (Royaume-Uni) ; lIns-titut international de droit humanitaire, San Remo (Italie) et lInstitut Universitairedes Hautes tudes Internationales, Genve (Suisse). Les autres importants contribu-teurs financiers au processus des Consultations mondiales, qui ont de ce fait gale-ment rendu ces tables rondes possibles, ont t lAustralie, le Canada, la Commissioneuropenne, le Japon, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvge, la Sude, la Suisse, leRoyaume-Uni et les tats-Unis. En outre, les gouvernements du Canada, de la Chine,du Costa Rica, de lEgypte, de la France, de la Hongrie, de la Norvge et de lAfriquedu Sud ont chacun accueilli des runions rgionales dans le cadre du troisimevolet des Consultations, qui ont galement reprsent une contribution importanteau processus.

    Les directeurs de la publication souhaiteraient remercier tout particulire-ment Kate Jastram et Alice Edwards, qui ont apport une contribution prcieuse surle fond et en termes logistiques, en tant que points de contact pour le deuximevolet des Consultations mondiales, ainsi quEve Lester, officier de liaison avec lesorganisations non gouvernementales (ONG) pour les Consultations.

    En outre, ils souhaitent adresser leurs plus sincres remerciements leurs col-lgues pour leurs contributions et leurs commentaires, en particulier NicholasArons, Alexander Beck, Walter Brill, Walpurga Englbrecht, Diane Goodman, Natha-lie Karsenty, Irene Khan, Janice Marshall, Hugh Massey, Sophie Muller, ShahrzadTadjbakhsh, Mignon van der Liet et Wilbert van Hvell. Merci galement FinolaOSullivan, Treena Hall, Jennie Rubio, Caro Drake et Martin Gleeson de CambridgeUniversity Press, ainsi qu Lesley Dingle de la Squire Law Library de Cambridge,pour leur aimable soutien dans la ralisation de cette publication en anglais.

    Lditeur a fait son possible pour garantir que les adresses des sites Internetmentionnes dans cet ouvrage soient correctes et oprationnelles au moment de lamise sous presse. Lditeur nest toutefois pas responsable des sites Internet et nepeut pas garantir quun site donn continuera de fonctionner et que son contenu

  • La protection des rfugis en droit international

    18

    LARCIER

    restera appropri. Les adresses des sites Internet donns dans ldition franaise res-tent pour la plupart identiques ldition originale. Il faut nanmoins signaler queladresse du HCR est http://www.unhcr.org.

    Les directeurs de la publication remercient galement toutes les personnesqui se sont charges de la traduction franaise et de sa vrification, notamment Jean-Paul Cavalieri, Angle Dikongue-Atangana, Walpurga Englbrecht, Philippe Leclerc,Sophie Muller, Marie-Sophie Peyre, Vronique Plans-Boissac, Yasser Saad, Fran-oise Stichelbaut et Batrice Ureche. Nous remercions galement Cordelia Hamiltonde Cambridge University Press et la maison ddition Larcier davoir soutenu lapublication de ce livre en franais.

  • TABLES RONDES DEXPERTSET SUJETS ABORDS

    AU COURS DU DEUXIME VOLET DES CONSULTATIONS MONDIALES

    Tables rondes Sujets

    1

    re

    table ronde

    Date : 3-4 mai 2001Lieu : LisbonneCo-organisateur : Fondation Carnegie pour la paix internationale, Washington DCAccueilli par : Fondation luso-amricaine pour le dveloppement, Lisbonne, Portugal

    Cessation (article 1 C) Exclusion (article 1 F)

    2

    e

    table ronde

    Date : 9-10 juillet 2001Lieu : CambridgeCo-organisateur : Centre Lauterpacht de recherche en droit international, Cambridge, Royaume-Uni

    Principe de non-refoulement (article 33) Responsabilit de surveillance (article 35)

    3

    e

    table ronde

    Date : 6-8 septembre 2001Lieu : San RemoCo-organisateur : Institut international pour le droit humanitaire, San Remo, Italie

    Appartenance un certain groupe social(article 1 A 2)

    Perscution lie au genre (article 1 A 2) Possibilit de protection interne /

    rinstallation interne/fuite interne

    4

    e

    table ronde

    Date : 8-9 novembre 2001Lieu : GenveCo-organisateur : Institut Universitaire des Hautes tudes Internationales, Genve, Suisse

    Entre irrgulire (article 31) Unit de famille (Acte final

    de la Confrence des Nations Unies de 1951)

  • ABRVIATIONS

    All ER

    All England Law Reports

    (Royaume-Uni)

    ALR

    Australian Law Reports

    (Australie)

    BIA

    Board of Immigration Appeals

    (Commission des recours en matire dimmigration, tats-Unis)

    BIT Bureau International du Travail

    BverwG

    Bundesverwaltungsgericht

    (Cour administrative fdrale, Allemagne)

    BVG

    Bundesverfassungsgericht

    (Cour constitutionnelle fdrale, Allemagne)

    CA Cour dappel

    CADH Convention amricaine des Droits de lHomme, 1969

    CADHP Charte africaine des droits de lhomme et des peuples (Charte de Banjul), 1981

    CAHAR Comit

    ad hoc

    dexperts sur les aspects juridiques de lasile territorial, des rfugis et des apatrides (Conseil de lEurope)

    CASWANAME Bureau pour lAsie centrale, lAsie du Sud-Ouest, lAfrique du Nord et le Moyen-Orient (HCR)

    CCT Convention contre la torture, 1984

    CDE Convention relative aux droits de lenfant, 1989

    CDH Comit des droits de lhomme

    CDI Commission du droit international

    CDR Centre de documentation et de recherche (HCR)

    CEDEF Convention sur llimination de toutes les formes de discrimination lgard des femmes, 1979

    CEDH Convention europenne de sauvegarde des Droits de lHomme et des Liberts fondamentales, 1950

    CEDR Convention sur llimination de toutes les formes de discrimination raciale, 1965

    CERE Conseil europen sur les rfugis et les exils

    CFR

    Code of Federal Regulations

    (Code de la rglementation fdrale,USA)

    Charte de Banjul Charte africaine des droits de lhomme et des peuples, 1981

    CICR Comit international de la Croix-Rouge

    CIJ Cour internationale de Justice

    CIREFCA Confrence internationale sur les rfugis dAmrique centrale

  • La protection des rfugis en droit international

    22

    LARCIER

    CISR Commission de limmigration et du statut de rfugi (Canada)

    CJ

    Chief Justice

    CLR

    Commonwealth Law Reports

    Comit excutif Comit excutif du Programme du Haut Commissaire

    Convention de lOUA Convention de lOUA rgissant les aspects propres aux problmesdes rfugis en Afrique

    CPI Cour pnale internationale

    CPJI Cour permanente de justice internationale

    CRR Commission des recours des rfugis (France)

    DAC Comit daide au dveloppement (OCDE)

    Dclaration de Carthagne Dclaration de Carthagne sur les rfugis, 1984

    Dclaration universelle Dclaration universelle des droits de lhomme, 1948

    DIP Division de la protection internationale (HCR) jusquen 1999 ;Dpartement de la protection internationale depuis 1999

    DLR

    Dominion Law Reports

    DUDH Dclaration universelle des droits de lhomme, 1948

    ECOSOC Conseil conomique et social des Nations Unies

    EHRR

    European Human Rights Reports

    ELENA

    European Legal Network on Asylum

    (Rseau des avocats europens sur lasile, CERE)

    EPAU Unit dvaluation et danalyse politique (HCR)

    FCA

    Federal Court of Australia

    (Cour fdrale dAustralie)

    FGM

    Female genital mutilation

    (mutilations gnitales fminines)

    FISCRCR Fdration internationale des Socits de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge

    HCA

    High Court of Australia

    (Haute Cour dAustralie)

    HCDH Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de lHomme

    HCR Haut Commissariat des Nations Unies pour les rfugis

    IAA

    Immigration Appellate Authority

    (Instance dappel en matire dimmigration, Royaume-Uni)

    IARLJ Association internationale des juges du droit des rfugis

    IAT

    Immigration Appeal Tribunal

    (Cour dappel en matire dimmigration, Royaume-Uni)

    ICVA Conseil international des Agences Bnvoles

    IFA

    internal flight alternative

    (possibilit de fuite interne)

    ILM

    International Legal Materials

    ILR

    International Law Reports

    Imm AR

    Immigration Appeal Reports

    (Royaume-Uni)

    INA

    Immigration and Nationality Act

    (Loi sur limmigration et la nationalit, tats-Unis)

  • Abrviations

    LARCIER

    23

    INLA

    Irish National Liberation Army

    (Arme de libration nationaleirlandaise)

    INLR

    Immigration and Nationality Law Reports

    INS

    Immigration and Naturalization Service

    (Service dimmigration et de naturalisation, tats-Unis)

    IPA

    internal protection alternative

    (possibilit de protection interne)

    IRA

    internal relocation alternative

    (possibilit de rinstallation interne)

    J

    Justice

    JO Journal officiel de lUnion europenne

    LCHR

    Lawyers Committee for Human Rights

    (Comit des avocats pour les droits de lHomme)

    MINBYUN Avocats pour une socit dmocratique (Rpublique de Core)

    NVwZ

    Neue Zeitschrift fr Verwaltungsrecht

    NZLR

    New Zealand Law Reports

    OCDE Organisation de coopration et de dveloppement conomiques

    OEA Organisation des tats amricains

    OGH Oberster Gerichtshof (Cour suprme, Autriche)

    OIM Organisation internationale pour les migrations

    OIR Organisation internationale pour les rfugis

    ONG Organisation non gouvernementale

    ONU Organisation des Nations Unies

    OUA Organisation de lUnit Africaine (dnomme Union africainedepuis 2002)

    PIDCP Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966

    PIDESC Pacte international relatif aux droits conomiques, sociaux et culturels, 1966

    Principes afro-asiatiques Principes relatifs au traitement des rfugis adopts relatifs aux rfugis par le Comit juridique consultatif Afrique/Asie, 1966

    QBD Queens Bench Division

    RBAC Bureau rgional pour les Amriques et les Carabes (HCR)

    RDDE Revue du droit des trangers

    RfLex Base de donnes contenant des condenss de dcisions rcentesen droit canadien de limmigration et de la protection des rfugis rendues par la CISR, la SSR, la Section dappel de limmigration (SAI), la Section darbitrage (SA) et par la Courfdrale du Canada, disponible sur http://www.irb-cisr.gc.ca/fr/decisions/reflex/index_f.htm

    Refworld Base de donnes sous forme de CD-Rom du HCR contenant des informations relatives aux rfugis notamment de la juris-prudence et des traits, disponible sur http://www.unhcr.org/cgi-bin/texis/vtx/refworld/rwmain

  • La protection des rfugis en droit international

    24 LARCIER

    REK Rechtseenheidskamer (Chambre dharmonisation du droit, Pays-Bas)

    RRT Refugee Review Tribunal (Tribunal de contrle en matire de rfugis, Australie)

    RSAA Refugee Status Appeals Authority (Instance dappel des rfugis,Nouvelle-Zlande)

    RWLG Refugee Womens Legal Group (Groupe juridique des femmes rfugis, Royaume-Uni)

    SCPI Sous-Comit plnier sur la protection internationale (Comit excutif)

    SCR Supreme Court Reports (Canada)

    SOPEMI Rapport annuel sur les tendances des migrations internationales (OCDE)

    SSR Section du statut de rfugi (Canada)

    STE Srie des Traits Europens (Conseil de lEurope)

    STSN Srie des traits de la Socit des Nations

    TNP Trait sur la non-prolifration des armes nuclaires

    TPIR Tribunal pnal international pour le Rwanda

    TPIY Tribunal pnal international pour lex-Yougoslavie

    TPS temporary protected status (statut de protection temporaire, tats-Unis)

    UKTS United Kingdom Treaty Series

    UNESCO Organisation des Nations Unies pour lducation, la science et la culture

    UNFPA Fonds des Nations Unies pour la population

    UNGA United Nations General Assembly (Assemble gnrale des Nations Unies)

    UNGAOR United Nations General Assembly Official Records

    UNICEF Fonds des Nations Unies pour lenfance

    UNITA Union nationale pour lindpendance totale de lAngola

    UNREF Fonds des Nations Unies pour les rfugis

    UNSC United Nations Security Council (Conseil de scurit des Nations Unies)

    UNTS United Nations Treaty Series (Recueil des Traits des Nations Unies)

    USC United States Code (Code des tats-Unis)

    WARIPNET ONG dAfrique de lOuest pour les rfugis et les dplacs internes (Sngal)

    WLK Weekly Law Reports (Royaume-Uni)

    ZaRV Zeitschrift fr auslndisches ffentliches Recht und Vlkerrecht

  • Premire partieIntroduction

    Sommaire

    1.1La protection des rfugis en droit international : perspective globale 27

    1.2Les dimensions de lge et du genre en droit international des rfugis 73

    1.3Dclaration des tats parties la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatifs au statut des rfugis 113

  • 1.1LA PROTECTION DES RFUGIS

    EN DROIT INTERNATIONAL :PERSPECTIVE GLOBALE

    Volker TRK et Frances NICHOLSON *

    Table des matires

    I. Contexte 28

    II. Structure de louvrage et objectif de cette prsentation gnrale 31

    III. Les neuf thmes abords dans les documents de travail et dans les Relevs des conclusions des tables rondes 34A. La porte et le contenu du principe du non-refoulement 34

    B. Larticle 31 de la Convention de 1951 relative au statut des rfugis : lentre irrgulire 39

    C. Lappartenance un certain groupe social 42

    D. La perscution lie au genre 45

    E. La possibilit de fuite, de rinstallation ou de protection internes 49

    F. Lexclusion 55

    G. La cessation 58

    H. Lunit de la famille et la protection des rfugis 60

    I. La responsabilit de surveillance du HCR 62

    IV.La protection contre la perscution au XXIe sicle 64V. Conclusion 70

    * Les opinions exprimes sont les opinions personnelles des auteurs et ne sont pas ncessairementcelles des Nations Unies ou du HCR.

  • Premire partie Introduction

    28 LARCIER

    I. Contexte

    La Convention de 1951 et le Protocole de 1967 relatifs au statut des rfugis 1 sontlincarnation juridique moderne de la tradition ancienne et universelle consistant offrir un sanctuaire aux personnes risque et en danger. Ces deux instruments refl-tent une valeur humaine fondamentale faisant lobjet dun consensus gnral, et ilsconstituent les premiers et les seuls instruments au niveau global qui rgissent spci-fiquement le traitement des personnes contraintes de quitter leur foyer en raisondune rupture avec leur pays dorigine. Depuis un demi-sicle, ces textes ont montrclairement leur capacit dadaptation aux changements de situation. Bnficiantdabord aux rfugis europens de la Deuxime Guerre mondiale, la Convention estparvenue offrir un cadre de protection aux rfugis fuyant les perscutions de rgi-mes rpressifs, les troubles causs par les guerres dindpendance ou les nombreuxconflits ethniques ayant succd la priode de guerre froide 2.

    La protection internationale des rfugis savre aussi ncessaire aujourdhuiquelle ltait lors de ladoption de la Convention de 1951 il y a plus de cinquante ans.Depuis la fin de la guerre froide, des tensions interethniques latentes, souventexploites par des politiciens populistes, ont clat en conflits et en troubles. Descommunauts qui cohabitaient depuis des gnrations ont t spares et des mil-lions de personnes ont t dplaces, que ce soit en ex-Yougoslavie, dans la rgiondes Grands Lacs, dans le Caucase ou en Afghanistan. Le fait de prendre dlibr-ment pour cible des civils et de provoquer leur fuite ne reprsente pas seulementune mthode de guerre mais est devenu lobjectif mme du conflit. Trs clairement,ces dplacements forcs sont motivs par des raisons qui relvent sans conteste de ladfinition du rfugi telle que stipule dans la Convention. Pourtant, dans certainesrgions, les tats ont souvent eu des difficults ladmettre ds le dbut de la crise etont prfr laborer des rponses ad hoc et discrtionnaires.

    Il existe galement de nombreuses situations de rfugis qui perdurent, carelles rsultent de conflits qui nont pas t rgls par la fin de la guerre froide et quiont perdur de manire autonome, souvent financs par le pillage de ressourcesnaturelles prcieuses et/ou par le commerce illicite des armes lgres 3. Linstabilitet linscurit endmiques forment souvent le terreau des dplacements lintrieuret lextrieur dtats en crise ou dtats dont le gouvernement central ne contrle

    1. Nations Unies, Recueil des Traits, vol. 189, n 150 ; Nations Unies, Recueil des Traits, vol. 606, n 267.2. Voir, en gnral, HCR, Les rfugis dans le monde (ditions Autrement, 2000).3. Voir, par exemple, la rsolution de lAssemble gnrale des Nations Unies sur le rle des dia-mants dans les conflits, UN doc. A/RES/55/56, 1 dcembre 2000 ; voir galement en gnral http://www.un.org/peace/africa/Diamond.html. Au sujet de la confrence des Nations Unies sur le com-merce illicite des armes lgres sous tous ses aspects, New York, 9-20 juillet 2001, voir UN doc. A/CONF.192/15 et http://disarmament.un.org/cab/smallarms/.

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 29

    quune partie du territoire, offrant difficilement les conditions propices un retourdans la scurit.

    Les dplacements rsultant de telles situations peuvent poser des problmesspcifiques aux pays daccueil, en particulier sils accordent lasile dimportantescommunauts de rfugis, et ceci parfois pendant des dcennies. Cest pourquoi lepartage des responsabilits, afin dallger le fardeau pesant sur un tat donnlorsquil est incapable de lassumer compltement, reprsente un rel dfi. Il est ga-lement ncessaire de mettre en place des mcanismes de partage, et non de trans-fert, de ce fardeau, afin dtablir, le moment venu, un partage des responsabilitsdans une situation donne.

    La xnophobie et lintolrance envers les trangers, et en particulier enversles rfugis et les demandeurs dasile, se sont galement dveloppes au cours desdernires annes et cela constitue un problme majeur. Certains mdias et politi-ciens semblent tre de plus en plus enclins tirer profit de cette situation dans leurpropre intrt.

    En outre, depuis les attaques du 11 septembre 2001 aux tats-Unis, les ques-tions de scurit dominent le dbat, y compris en matire de migration, et ont par-fois occult les intrts lgitimes des personnes en qute de protection. Un certainnombre dtats ont, par exemple, rform leur dispositif dasile sous un angle scuri-taire et ont, cette occasion, durci les procdures et introduit des modificationssignificatives, en largissant notamment les motifs de dtention ou en rexaminantles demandes dans le but de dtecter des menaces potentielles la scurit. Danscertains cas, le contexte de laprs 11 septembre a t utilis pour largir le champdes mesures prvues dans la Convention de 1951 concernant la possibilit dexcluredes rfugis du statut de rfugi et/ou de les expulser. Le degr de collaborationentre les autorits responsables de limmigration et de lasile et les services de ren-seignements et de lutte contre la criminalit sest galement intensifi.

    Laugmentation des migrations illgales, y compris le trafic et la traite destres humains, reprsente un dfi supplmentaire. Ces volutions sont en partie uneconsquence de la mondialisation, qui a favoris et renforc les rseaux de transportet de communication et a suscit des attentes. Laugmentation des migrations illga-les peut aussi tre vue comme tant, en partie, le rsultat des politiques restrictivesen matire dimmigration menes par de nombreux tats industrialiss, qui pous-sent les migrants conomiques comme les rfugis emprunter des voies illgales,quils soient la recherche dune vie meilleure ou, plus fondamentalement, duneprotection contre la perscution. Les exigences de visa, les sanctions imposes auxtransporteurs, les accords de radmission, les officiers dimmigration posts ltran-ger et dautres mesures similaires sont des outils de contrle migratoire qui doiventprvoir des garanties de protection et des procdures adquates afin que les rfugispuissent atteindre des lieux srs.

    Plus spcifiquement, en ce qui concerne linterprtation de la Convention de1951 elle-mme, certains tats emploient diverses formes complmentaires de pro-

  • Premire partie Introduction

    30 LARCIER

    tection qui ont eu, dans certains cas, pour effet de dtourner des rfugis convention-nels vers des formes de protection moindre. Lorsque la protection fournie par lesinstruments internationaux en matire de droits de lHomme est prise en compte, ilen rsulte que de nombreux tats disposent dsormais de plusieurs procdures pourdterminer les besoins de protection internationale. Cette volution conduit sinterroger sur les relations entre dune part, le droit international des rfugis etdautre part, le droit international humanitaire et des droits de lHomme.

    Au sein de la procdure dasile, les systmes de nombreux tats font face audfi important dassurer un quilibre satisfaisant entre les besoins dquit et deffi-cacit. Les dilemmes sont innombrables. Comment des notions telles que celles depays tiers sr et de pays dorigine sr ou encore de procdures acclres pour lesdemandes manifestement infondes, qui ont t introduites dans de nombreusesjuridictions, peuvent-elles tre mises en uvre de manire la fois efficace et demanire attentive aux principes de protection ? Les victimes de violences et de per-scutions manant dagents non tatiques, cest--dire des milices, des groupes para-militaires, des rebelles sparatistes, des bandits, de la mafia, des poux violents, ont-elles le droit la protection du statut de rfugi dans un autre tat ? Dans quellemesure la notion de perscution et le motif de lappartenance un certaingroupe social noncs dans la dfinition du rfugi de la Convention de 1951, peu-vent-ils tre raisonnablement interprts de faon protger les femmes victimes deviolences lies au genre, bien entendu pour le viol en priode de conflit mais aussipeut tre vis--vis de pratiques traditionnelles dangereuses, de la traite ou de la vio-lence domestique ? Si seule une partie de ltat dorigine est affecte par un conflit,dans quelle mesure les personnes sont-elles en mesure de se rinstaller dansdautres zones lintrieur de cet tat et quel impact cela a-t-il sur leur demande deprotection en tant que rfugi ? Quelle influence dautres conventions telles que laConvention de 1989 sur les droits de lenfant 4 ont-elles sur les procdures dasile et letraitement des enfants rfugis ?

    Des approches divergentes au sein de certaines rgions ont galement con-duit des tats laborer des cadres juridiques spcifiques communs leur rgionpour traiter les demandes dasile. Ces efforts peuvent renforcer la protection desrfugis, mais doivent en mme temps garantir la cohrence avec le rgime de laConvention de 1951 et donc promouvoir son application intgrale et globale 5. Desconcepts tels que les notions de pays dorigine sr ou de pays tiers sr labors danscertaines rgions sont parfois galement exports vers dautres rgions du mondequi reoivent beaucoup moins de demandeurs dasile ou qui ont des capacits deprotection moins dveloppes.

    4. Rsolution 44/25 de lAssemble gnrale des Nations Unies, 20 dcembre 1989.5. Voir, par exemple, Conseil europen, Conclusions de la prsidence , Tampere, Finlande, 16-17 octobre 1999, paragraphe 13.

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 31

    Enfin, la mise en uvre complte du rgime de protection internationale,avec la Convention de 1951 pour noyau central, dpend de la capacit de la commu-naut internationale trouver des solutions durables aux situations de dplace-ments forcs, que ce soit par le rapatriement librement consenti, la rinstallationdans un pays tiers, lintgration sur place ou une combinaison de ces lments. Ledfi consiste trouver des solutions pour les individus, comme pour les groupes derfugis, qui soient la fois durables et fondes sur la protection.

    En rsum, la Convention de 1951 et le Protocole de 1967 constituent les instru-ments mondiaux qui tablissent les principes fondamentaux sur lesquels reposetoute la protection internationale des rfugis. Leur signification juridique, politiqueet thique va bien au-del de leurs termes mmes. Le renforcement de la Conventionen tant que pierre angulaire du rgime de protection des rfugis reprsente uneproccupation commune. Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les rfugis(HCR), en tant que gardien de la Convention, a un rle particulier jouer, mais cettetche ncessite lengagement de tous les acteurs concerns 6.

    II. Structure de louvrage et objectif de cette prsentation gnrale

    Les diffrentes parties de cet ouvrage portent sur neuf thmes juridiques per-tinents aujourdhui pour le rgime international de protection des rfugis et, enparticulier, pour linterprtation de la Convention de 1951. Ces neuf thmes ont tabords au cours du deuxime volet des Consultations mondiales sur la protectioninternationale, lances par le HCR en 2000, et sont prsents dans le tableau figurant la page xxi du prsent ouvrage 7. Cet ouvrage est par consquent un rsultat con-cret du deuxime volet et figure expressment dans lAgenda pour la protection 8. Lesdfis plus larges poss par le rgime de protection des rfugis au plan politique,oprationnel et autres, abords au cours du dernier des trois volets des Consulta-

    6. Voir, en gnral, E. Feller, International Refugee Protection 50 Years On : The Protection Chal-lenges of the Past, Present and Future , 83 International Review of the Red Cross, septembre 2001,pp. 581-605 ; parmi les autres ditions spciales parues loccasion des cinquantimes anniversairesde la Convention de 1951 et du HCR, on trouve le 14 (1) Revue Qubcoise de droit international, 2001,10 Forced Migration Review, avril 2001 et 35 International Migration Review, printemps 2001.Voir ga-lement, HCR, The State of the Worlds Refugees, supra note 2 ; G. Loescher, The UNHCR and WorldPolitics : A Perilous Path (Oxford University Press, 2001) ; I.C. Jackson, The Refugee Concept in GroupSituations (Kluwer Law International, La Haye, 1999).7. Pour plus de dtails, voir galement la prface rdige par le Directeur de la protection interna-tionale, E. Feller, dans cette publication ; Consultations mondiales du HCR sur la protection interna-tionale, Mise jour , aot 2002.8. HCR, Agenda pour la protection , UN doc. A/AC.96/965/Add.1, 26 juin 2002.

  • Premire partie Introduction

    32 LARCIER

    tions mondiales, ne relvent pas de cette publication, qui est axe sur certainsaspects de la protection juridique des rfugis 9.

    Lobjectif de cette prsentation gnrale est de complter les discussions aucours desquelles les neuf thmes juridiques exposs dans cet ouvrage ont t dve-lopps, surtout dans le contexte du deuxime volet des Consultations mondia-les, mais galement au-del. Cette prsentation a pour objet de mettre en lumireles principaux principes abords dans les documents de travail et pendant lesdbats des quatre tables rondes dexpert(e)s organises sur ces sujets en 2001.Paralllement, elle tente de faire la synthse des avances possibles sur certainesquestions, tout en gardant lesprit la complexit de nombreux aspects du dbat.Nous esprons que cette prsentation pourra servir de guide aux lectrices et auxlecteurs et apportera une contribution supplmentaire aux rflexions actuelles surces questions.

    Outre cette prsentation gnrale, la premire partie contient une tude surlinterprtation de la Convention de 1951 tenant compte des paramtres de lge et dugenre. Cette tude fournit des indications sur la manire dont lgalit entre lessexes et la sensibilit lge sont ou pourraient tre prises en compte pour garantirla mise en uvre du droit international des rfugis. La premire partie comprendgalement le texte de la Dclaration adopte lors de la premire Runion minist-rielle des tats parties la Convention de 1951 et/ou au Protocole de 1967 co-organisepar le HCR et le gouvernement suisse Genve les 12 et 13 dcembre 2001 dans lecadre du premier volet des Consultations mondiales.

    Les neuf parties qui suivent traitent chacune dune question juridique essen-tielle, savoir : le non-refoulement, lentre irrgulire, lappartenance un certaingroupe social, la perscution lie au genre, la possibilit de fuite, de rinstallation ou

    9. Les documents de travail rdigs pour le troisime volet des Consultations mondiales aveclobjectif daborder ces thmes sont les suivants : HCR, Protection des rfugis lors dafflux massifs :cadre gnral de la protection , UN doc. EC/GC/01/4, 19 fvrier 2001 ; HCR, Le caractre civil delasile : sparer les lments arms des rfugis , UN doc. EC/GC/01/5, 19 fvrier 2001 ; HCR, Aspects pratiques de la protection physique et juridique eu gard lenregistrement , Un doc. EC/GC/01/06, 19 fvrier 2001 ; HCR, Mcanismes de coopration internationale afin de partager lesresponsabilits et le fardeau lors dafflux massifs , UN doc. EC/GC/01/7, 19 fvrier 2001 ; HCR etOIM, Protection des rfugis et contrle des migrations : positions du HCR et de lOIM , UN doc.EC/GC/01/11, 31 mai 2001 ; HCR, Processus dasile (procdures dasile justes et efficaces) , UNdoc. EC/GC/01/12, 31 mai 2001 ; HCR, Accueil des demandeurs dasile, y compris les normes detraitement dans le contexte des diffrents systmes dasile , UN doc. EC/GC/01/17, 4 septembre2001 ; HCR, Formes complmentaires de protection , UN doc. EC/GC/01/18, 4 septembre 2001 ;HCR, Renforcement des capacits de protection dans les pays htes , UN doc. EC/GC/01/19,19 avril 2002 ; HCR, Rapatriement librement consenti , UN doc. EC/GC/02/5, 25 avril 2002 ; HCR, Intgration sur place , UN doc. EC/GC/02/6, 25 avril 2002 ; HCR, Renforcer et largir la rinstal-lation aujourdhui : dilemmes, dfis et possibilits , UN doc. EC/GC/02/7, 25 avril 2002 ; HCR, Femmes rfugies , UN doc. EC/GC/02/8, 25 avril 2002 ; HCR, Enfants rfugis , UN doc. EC/GC/02/9, 25 avril 2002. Ces documents sont disponibles sur le site Internet du HCR, www.unhcr.org.

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 33

    de protection interne, lexclusion, la cessation, lunit et la runifications familialeset la responsabilit de surveillance du HCR.

    Chacune des parties contient, en premier lieu, le document de travail ayantservi de base de discussion lors de la table ronde dexpert(e)s concerne. Ce docu-ment expose la position personnelle de lexpert(e) en droit des rfugis qui la rdig.Dans certains cas, le document dfend une interprtation donne plutt que lagamme des approches existantes. Ces documents ne sont donc pas censs reprsen-ter une position dfinitive mais font plutt partie dun processus visant faire avan-cer le dbat sur des questions essentielles dinterprtation sur lesquelles la doctrineet la jurisprudence continuent de faire lobjet de divergences. Chaque document at actualis la lumire des discussions et des volutions importantes intervenuesdepuis les tables rondes et est donc plus exhaustif que les versions antrieures quifiguraient sur le site Internet du HCR (www.unhcr.org) au moment du secondvolet des Consultations mondiales.

    En second lieu, chaque partie contient le Relev des conclusions de la tableronde dexperts concerne, qui reflte la teneur des discussions. Ces Conclusionsne reprsentent pas les opinions individuelles de chaque participant, ni ncessai-rement celles du HCR, mais elles refltent en grande partie le consensus qui sestdgag des discussions sur le thme abord. Enfin, chaque partie inclut une listedes participants la table ronde. En vue de garantir une discussion approfondie etfructueuse sur les diffrents thmes et compte tenu des contraintes financires etdespace, le HCR a t oblig de limiter le nombre de participants ces tables ron-des. Les participants ont t slectionns par le HCR sur la base de leur exprienceet de leur expertise. En tablissant les listes pour les quatre tables rondes, leDpartement de la protection internationale du HCR a examin les travaux univer-sitaires sur les thmes concerns, a pris en considration les noms suggrs par lesgouvernements et par les organisations non gouvernementales (ONG) et a consultles bureaux du HCR sur le terrain. Le HCR a veill garantir une diversit depoints de vue en incluant des experts issus des gouvernements, ainsi que des ONG,des universits, des instances judiciaires et des praticiens du droit. Lquilibreentre les provenances gographiques et entre les hommes et les femmes a gale-ment t pris en considration. Afin dlargir le dbat et dattirer un nombreencore plus important dexperts, les documents ont t diffuss sur le site Internetdu HCR pour susciter des commentaires, ce quont fait des tats, des ONG et denombreuses personnes.

    Les consultations menes dans le cadre du deuxime volet , notammentles Relevs des conclusions, alimentent dj le processus dlaboration des politi-ques au niveau international. Sappuyant sur ce processus, le HCR entreprendactuellement la rvision, la mise jour et la publication de ses Principes direc-teurs sur de nombreux thmes abords au cours des tables rondes. Ces documentssont publis comme un ensemble de Principes directeurs du HCR sur la protec-tion inter-nationale , dont les deux premiers ont t publis en mai 2002, suivis

  • Premire partie Introduction

    34 LARCIER

    par un troisime en fvrier 2003 10. Ces Principes directeurs sont publis confor-mment au rle de surveillance du HCR que lui confrent son Statut 11 ainsi quelarticle 35 de la Convention de 1951 et larticle II du Protocole de 1967. Leur objec-tif est de fournir des conseils dinterprtation juridique lattention des gouverne-ments, des juristes, des instances dcisionnelles et des autorits judiciaires ainsique du personnel du HCR charg de la dtermination du statut de rfugi sur leterrain. Au niveau rgional, les Relevs des conclusions des runions des tablesrondes du deuxime volet ont galement commenc alimenter les discus-sions au sein dautres forums. Cest le cas, par exemple, du Comit ad hoc dexpertssur les aspects juridiques de lasile territorial, des rfugis et des apatrides du Conseilde lEurope (CAHAR), comme cela est dcrit avec plus de dtails dans lapartie III.C ci-dessous relative lappartenance un certain groupe social.

    III. Les neuf thmes abords dans les documents de travail et dans les Relevs des conclusions des tables rondes

    Cette section donne un aperu rapide de chacun des neuf thmes abordsdans les documents de travail et lors des tables rondes dexperts. Elle met en avantles nouvelles problmatiques et les ides importantes qui ont rsult du processusdanalyse, de discussion et de synthse men au cours du deuxime volet des Con-sultations mondiales. Le cas chant, elle attire lattention sur les domaines o desinterprtations ou des mthodes danalyse divergentes subsistent.

    A. La porte et le contenu du principe du non-refoulement

    La 2e partie de cette publication contient un avis juridique rdig par SirElihu Lauterpacht QC et Daniel Bethlehem sur la porte et le contenu du principedu non-refoulement. Il procde une tude dtaille des normes et instrumentsinternationaux et rgionaux en matire de droits de lHomme et des rfugis se rap-portant au principe du non-refoulement, tant sous langle de larticle 33 de la Conven-

    10. HCR, Principes directeurs sur la protection internationale : Appartenance un certain groupe socialdans le cadre de larticle 1 A 2 de la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatifs au statut desrfugis , HCR/GIP/02/02, 7 mai 2002 ; HCR, Principes directeurs sur la protection internationale : Per-scution lies au genre dans le cadre de larticle 1 A 2 de la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967relatifs au statut des rfugis , HCR/GIP/02/01, 7 mai 2002 ; HCR, Cessation du statut de rfugi dans lecontexte de larticle 1 C 5 et 6 de la Convention de 1951 relative au statut des rfugis (clauses sur les cir-constances ayant cess dexister) , HCR/GIP/03/03, 10 fvrier 2003, disponibles sur www.unhcr.org.11. Statut du Haut Commissariat des Nations Unies pour les rfugis, A/RES/428 (V), 14 dcembre 1950.

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 35

    tion de 1951 que du droit international des droits de lHomme, ainsi que de leurapplication par les tribunaux internationaux et de leur transposition dans la lgisla-tion interne. De notre point de vue, cela constitue une illustration tangible et largespectre de la pratique des tats ainsi que de lopinio juris.

    Lavis et le Relev des conclusions de la table ronde qui a eu lieu Cambridge(Royaume-Uni) en juillet 2001 affirment tous deux que le non-refoulement est unprincipe de droit international coutumier 12. La Dclaration de la Runion minist-rielle de dcembre 2001, mentionne plus haut, affirme galement que le principedu non-refoulement est consacr dans le droit international coutumier 13.

    Lavis montre que, conformment au droit de la responsabilit de ltat, la res-ponsabilit des tats du fait de leurs actes englobe toute mesure conduisant aurefoulement, y compris certaines pratiques dinterception, de refus dadmission lafrontire, ou de refoulement indirect. Sur ce point, lavis analyse les projets darticlessur la responsabilit de ltat adopts par la Commission du droit international desNations Unies le 31 mai 2001 14 et approuvs par lAssemble gnrale la fin de lamme anne 15, et montre en quoi ils affectent laction des tats. Ces actes peuventavoir lieu au-del des frontires de ltat ou tre effectus par des personnes ou desorganes agissant au nom de ltat ou dans lexercice des prrogatives de puissancepublique de celui-ci, dans le cadre des postes dembarquement, de transit, dans leszones internationales, etc. Ils ont souvent lieu la frontire, loin du regard du public,au-del des frontires dans dautres pays ou en haute mer : linterdiction du refoule-ment sapplique dans toutes ces situations.

    Dans leur analyse dtaille, Sir Elihu et Bethlehem font galement la distinc-tion entre le refus dadmission, le renvoi ou lexpulsion de quelque manire que ce

    12. Voir aussi, par exemple, Comit excutif, Conclusion No. 25 (XXXIII), 1982, paragraphe b). Unarticle rcent va jusqu affirmer que le principe du non-refoulement a acquis le statut de jus cogens.Voir J. Allain, The Jus Cogens Nature of Non-Refoulement , 13(4) International Journal of RefugeeLaw, 2001, pp. 533-58.13. La Dclaration prend acte :de la pertinence et de la capacit dadaptation constantes de ce corps international de droits et deprincipes [comprenant la Convention de 1951, son Protocole de 1967, dautres instruments internatio-naux et rgionaux de protection des droits de lHomme et des rfugis], y compris sa base, le prin-cipe de non-refoulement dont lapplicabilit est consacre dans le droit coutumier international.Pour le texte complet de la Dclaration, voir la partie 3.1 de cette publication.14. Commission du droit international, Articles sur la responsabilit de ltat pour fait internatio-nalement illicite , UN doc. A/CN.4/L.602, 31 mai 2001. Voir aussi J. Crawford, The International LawCommissions Articles on State Responsibility : Introduction, Text and Commentaries (Cambridge Uni-versity Press, 2002), ch. 2.15. Dans une rsolution du 12 dcembre 2001, lAssemble gnrale des Nations Unies a renduhommage la Commission du droit international pour [] avoir termin llaboration du projetdarticles . Voir Assemble gnrale des Nations Unies, Rapport de la Commission du droit inter-national sur les travaux de sa cinquante-troisime session , UN doc. A/RES/56/82, 18 janvier 2002,paragraphe 2.

  • Premire partie Introduction

    36 LARCIER

    soit vers la torture ou les peines ou traitements cruels, inhumains ou dgradants etles mesures qui aboutissent au renvoi vers une menace de perscution pour un motifde la Convention. Le premier cas sinscrit dans le cadre des principes du droit inter-national des droits de lHomme et nautorise aucune limite ou exception. Dans le casdu renvoi vers une menace de perscution, une drogation nest permise quelorsquil existe des raisons imprieuses de scurit nationale ou de suret publiqueet lorsque la menace de perscution nquivaut pas et ne serait pas considrecomme assimilable un risque de torture ou de peines ou traitements cruels, inhu-mains ou dgradants et ne relverait pas du champ dapplication dautres principescoutumiers de droits de lHomme auxquels il ne peut tre drog. Lapplication deces exceptions est conditionne au respect strict des principes de garantie de proc-dure rgulire et lexigence que toutes les mesures raisonnables soient dabord pri-ses en vue de faire admettre lintress dans un pays tiers.

    Depuis la rdaction de cet avis, les attaques du 11 septembre 2001 aux tats-Unis et leurs consquences ont conduit les gouvernements envisager et/ou instau-rer une gamme de mesures de scurit 16. Il est bien sr lgitime que les tats soientsoucieux de veiller ce que personne nutilise les moyens dentrer ou de rsider surleur territoire des fins de terrorisme. Il est toutefois essentiel que les contrles plusstricts aux frontires, les mesures renforces dinterception, en particulier envers lesimmigrants illgaux, et toutes les autres mesures de ce genre, incluent galementdes mcanismes garantissant lidentification des personnes ayant besoin dune pro-tection internationale en tant que rfugis. Par consquent, il est important, parexemple, que les procdures de recevabilit ne remplacent pas lexamen de lademande sur le fond, ce qui pourrait conduire labsence didentification par ltatdune personne risquant dtre renvoye vers la perscution 17.

    Dans le contexte actuel, il est important de rappeler que le principe du non-refoulement sapplique galement en matire dextradition 18. La Convention de 1951ne soppose en principe pas lextradition et aux poursuites engages dans des paystiers lencontre des rfugis reconnus, dans la mesure o le statut de rfugi delintress est respect par ltat tiers, comme lnonce larticle 32 2. Dans ce cas,les obligations de ltat envers le rfugi seraient en fait transfres ltat ayant

    16. Voir, en gnral, HCR, Addressing Security Concerns Without Undermining RefugeeProtection , novembre 2001.17. Ibid., paragraphes 5-9. Voir aussi HCR, Regional Workshops in Ottawa, Ontario (Canada) and inMacau , UN doc. EC/GC/01/13, 31 mai 2001 ; HCR, Protection des rfugis et contrle desmigrations : positions du HCR et de lOIM , UN doc. EC/GC/01/11, 31 mai 2001 ; HCR, Interception de demandeurs dasile et de rfugis : le cadre international et les recommandationsen vue dune approche globale , UN doc. EC/50/SC/CRP.17, 9 juin 2000 ; HCR, Processus dasile(procdures dasile justes et efficaces) , supra note 9.18. Voir, en gnral, Comit excutif, Conclusion No. 17 (XXXI), 1980. Cette question est galementaborde dans le document rdig par G. Gilbert sur les clauses dexclusion, dans la partie 7.1 de cettepublication.

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 37

    demand lextradition. Il serait alors ncessaire de se mettre daccord pour que lint-ress revienne la fin des poursuites judiciaires et/ou aprs avoir purg sa peine(sauf bien entendu si une exclusion, un retrait ou une cessation interviennent), afindviter tout risque de refoulement indirect. Les demandes dextradition mises parle pays dorigine peuvent toutefois tre faites dans lintention de perscuter et ellesdoivent donc tre examines avec une attention particulire. Si, dans un cas donn,lextradition conduisait au retour vers le lieu de perscution, la rponse approprieconsisterait engager les poursuites dans le pays dasile 19.

    Tandis que lextradition est une rponse aux crimes commis ailleurs, lexcep-tion au principe du non-refoulement prvu larticle 33 2 de la Convention de 1951pourrait galement entrer en jeu dans des circonstances exceptionnelles en cas decrimes commis dans le pays daccueil. La Convention prvoit que les rfugis ont desobligations ou des devoirs lgard du pays daccueil. Cela reflte la ncessit que lesrfugis ne soient pas considrs, et quils ne se peroivent pas non plus eux-mmes,comme une catgorie situe en-dehors ou au-del du droit. Bien quils reprsententune catgorie particulire de non-nationaux, ils doivent respecter les lois de leurpays daccueil de la mme manire que les autres personnes prsentes sur le terri-toire. Sils transgressent la loi ou sils troublent lordre public dans leur pays dasile,ils sont totalement responsables en vertu de la lgislation nationale applicable. Alorsque les mesures dapplication du droit pnal naffectent en principe pas leur statutde rfugi, larticle 33 2 prvoit une exception au principe du non-refoulement.Cela signifie en substance que les rfugis peuvent exceptionnellement tre ren-voys pour deux motifs : 1) dans les cas de menace grave pour la scurit nationaledu pays daccueil ; 2) dans les cas o leurs antcdents criminels, graves et tablis,constituent une menace continue pour la communaut de ce pays. Les diffrents l-ments de ces circonstances extrmes et exceptionnelles doivent toutefois tre inter-prts de manire restrictive. Toute mesure dfinitive prise par ltat devra en outreprendre en compte les autres obligations dcoulant du droit international des droitsde lHomme 20.

    19. Lorsquun crime grave a t commis, les conventions multilatrales, notamment dans le contextede la lutte contre le terrorisme, ont rcemment prvu une obligation dextrader ou de poursuivre.Dans le contexte de laprs-11 septembre 2001, il existe un risque que la tendance accrue dpoliti-ser les infractions dans le contexte de lextradition conduise relguer les considrations relatives la perscution au second plan dans le cadre de lexamen global des cas.20. Pour plus dinformations, voir Comit des droits de lHomme, Observation gnrale No. 15 :situation des trangers au regard du Pacte , 1986, UN doc. HRI/GEN/1/Rev/5, pp. 127-9,paragraphes 9-10 ; Commission des migrations, des rfugis et de la population de lAssemble par-lementaire du Conseil de lEurope, Procdures dexpulsion conformes aux droits de lHomme etmises en uvre dans le respect de la scurit et de la dignit , 10 septembre 2001 ; Commissaire auxdroits de lHomme du Conseil de lEurope, Recommandation relative aux droits des trangers sou-haitant entrer sur le territoire des tats membres du Conseil de lEurope et lexcution des dcisionsdexpulsion , CommDH/Rec(2001), 19 septembre 2001, disponible sur http://www.commissio-ner.coe.int/new/dyn/docs.asp ?L=2&S=3.

  • Premire partie Introduction

    38 LARCIER

    Larticle 33 2 prvoit que les rfugis reprsentant une telle menace peuventtre expulss en excution dune dcision rendue conformment la procdure pr-vue par la loi. Dans ces cas, le danger pour le pays daccueil doit tre trs important.En outre, il doit exister un lien rationnel entre le renvoi du rfugi et lliminationdu danger, le refoulement doit constituer le dernier recours possible pour liminerle danger, et le danger pour le pays daccueil doit lemporter sur le risque auquel estexpos le rfugi aprs son refoulement. Dans ces cas, les garanties procdurales delarticle 32 sappliquent, y compris lobligation pour les tats daccorder au rfugi undlai raisonnable pour chercher se faire admettre dans un autre pays. Compte tenude ces garanties, il nest pas appropri davoir recours cette exception au principedu non-refoulement pour contourner ou court-circuiter les procdures dextradition.

    Ces questions ont t examines dans la dcision de la Cour suprme duCanada de janvier 2002 dans laffaire Suresh 21. La Cour a accept largument du HCR,dvelopp dans ses observations, selon lequel larticle 33 de la Convention de 1951 nedoit pas tre utilis pour nier des droits que dautres instruments juridiques recon-naissent chacun sans exception. Elle a conclu que le droit international, en gnral,sopposait lexpulsion risquant daboutir la torture, mme lorsque des intrts descurit nationale taient en jeu. Dans un passage essentiel, la Cour dclare ensubstance :

    notre avis, la prohibition de lexpulsion dun rfugi dans un pays o il risque la torture queprvoient le Pacte [Pacte international relatif aux droits civils et politiques] et la CCT [Conventioncontre la torture] reflte la norme internationale gnralement admise. Larticle 33 de la Con-vention relative au statut des rfugis protge de faon limite les rfugis contre les menacespour leur vie et leur scurit, quelle quen soit la source. Par contraste, la CCT protge chacun,sans drogation, contre la torture sanctionne par ltat. En outre, la Convention relative au sta-tut des rfugis est lexpression dune profonde sollicitude [...] pour les rfugis et son objectifprincipal est d assurer ceux-ci lexercice le plus large possible des droits de lhomme et desliberts fondamentales (prambule). Ce fait rfute largument voulant que les dispositions dela Convention relative au statut des rfugis puissent tre invoques pour nier des droits quedautres instruments juridiques reconnaissent universellement chacun 22.

    La Cour a reconnu que la prvalence de la Convention contre la torture endroit international tait compatible avec la position adopte par le Comit contre latorture 23. Elle estime que le rejet de la prise par ltat de mesures gnrales sus-ceptibles daboutir la torture, et en particulier de mesures dexpulsion susceptiblesdavoir cet effet, est virtuellement catgorique et soutient que lexamen de lajurisprudence, tant nationale quinternationale, tend indiquer que la torture est

    21. Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyennet et de lImmigration), Cour suprme du Canada, [2002]SCC 1, 11 janvier 2002, disponible sur http://www.lexum.umontreal.ca/csc-scc/en/rec/html/sureshenhtml.22. Ibid., paragraphe 72. Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques, Nations Unies,Recueil des Traits, vol. 999, n 171 ; Convention de 1984 contre la torture et autres peines ou traitementscruels, inhumains ou dgradants, UN doc. A/RES/39/46.23. Suresh, supra note 21, paragraphe 73.

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 39

    une pratique si rpugnante quelle supplantera dans pratiquement tous les cas lesautres considrations qui sont mises en balance, mme les considrations descurit 24. Cette valuation pourrait apparatre comme une position moins fermeque linterdiction absolue de la torture telle qunonce dans la Convention contre latorture et dans dautres instruments de droits de lHomme. Reste voir si les tribu-naux nationaux, rgionaux ou internationaux vont identifier des cas o le dangerpour ltat lemporte sur la menace de torture en cas de retour et comment cetteposition pourrait tre concilie avec linterdiction absolue de renvoyer quiconquevers un lieu o il risquerait dtre tortur comme cela est nonc dans de nombreuxinstruments internationaux en matire de droits de lHomme (via une interprtationcohrente, pour certains instruments, de leurs organes de surveillance).

    Trs rcemment, en mai 2002, le Conseil de lEurope a ouvert la signature leProtocole No. 13 la Convention Europenne de 1950 de sauvegarde des Droits delHomme et des Liberts fondamentales relatif labolition de la peine de mort en toutescirconstances 25. Ce nouveau Protocole la Convention, en interdisant la peine demort mme en temps de guerre ou de menace imminente de guerre (circonstan-ces qui taient exclues de lapplication de labolition de la peine de mort nonce parle Protocole No. 6 26) peut renforcer encore linterprtation jurisprudentielle de laporte du non-refoulement. La jurisprudence issue de la Convention europenne desDroits de lHomme traite gnralement de linterdiction du renvoi vers la torture ouautre peine ou traitement inhumain ou dgradant en vertu de larticle 3 de la Con-vention plutt que du renvoi vers la peine de mort. De son ct, la Commission euro-penne des Droits de lHomme a jug que lextradition ou lexpulsion dune personnevers un autre tat o existait un risque rel que la peine de mort soit impose pou-vait constituer une violation du Protocole No. 6 27. Lentre en vigueur prochaine duProtocole No. 13 peut, et selon nous devrait, avoir pour effet dinterdire de manireabsolue le retour de personnes en provenance dtats parties ces Protocoles versdes situations o elles pourraient tre exposes la peine de mort.

    B. Larticle 31 de la Convention de 1951 relative au statut des rfugis : lentre irrgulire

    La 3e partie de cette publication porte sur la question de linterprtation delarticle 31 de la Convention de 1951 qui consacre le principe de limmunit de sanc-tions pnales pour les rfugis qui arrivent directement dun territoire o leur vie ou

    24. Ibid., paragraphe 76.25. Srie des Traits Europens (STE) No. 187 et, pour la Convention, STE No. 5.26. 28 avril 1983, STE No. 114.27. Y. c. Pays-Bas, Requte No. 22742/93, 76 Dcisions et Rapports 164, 1994 ; Aylor Davis c. France,Requte No. 22742/93, 76 Dcisions et Rapports 164, 1994 ; Leong Chong Meng c. Portugal, Requte No.25862/95, 1995 ; Alla Raidl c. Autriche, Requte No. 25342/94, 1995. Voir aussi N. Mole, Asylum and theEuropean Convention on Human Rights (Dossiers Droits de lHomme No. 9 (rviss) du Conseil delEurope, Strasbourg, 2000), p. 24.

  • Premire partie Introduction

    40 LARCIER

    leur libert est menace et qui entrent ou se trouvent dans un pays sans autorisation,ds lors quils se prsentent aux autorits sans dlai et leur exposent des raisonsreconnues valables de leur entre ou prsence irrgulire. Le document de travailrdig par Guy Goodwin-Gill analyse les origines des dispositions de larticle 31, satransposition en droit interne, la jurisprudence pertinente, la pratique des tats, lesConclusions du Comit excutif du Programme du Haut Commissaire pour les rfu-gis ainsi que les normes internationales pertinentes pour une bonne interprtationde cet article.

    Le document rdig par Goodwin-Gill et les discussions de la table rondedexperts de novembre 2001 Genve analysent la porte et la dfinition des termesde larticle 31 1, y compris, en particulier, les expressions arrivant directement , sans dlai , raisons reconnues valables et sanctions pnales . Ils concluentquil est gnralement reconnu que les rfugis nont pas besoin darriver directe-ment, au sens littral, de territoires o leur vie ou leur libert est menace.Larticle 31 1 tait plutt destin sappliquer aux personnes qui ont brivementtransit par dautres pays ou qui nont pas t en mesure de trouver une protectioneffective dans le(s) premier(s) pays vers le(s)quel(s) elles ont fui et il a t interprtde cette manire. Il est galement gnralement admis que les demandeurs dasilesont prsums avoir le droit de bnficier de larticle 31 jusqu ce quil ait t tabli, par une dcision dfinitive et lissue dune procdure quitable, quils nontpas besoin dune protection internationale 28 .

    Quant larticle 31 2, il recommande aux tats de ne pas appliquer auxdplacements des rfugis relevant du paragraphe 1 dautres restrictions que cellesqui sont ncessaires et uniquement dans lattente que leur statut soit rgularisdans le pays daccueil ou quils aient russi se faire admettre dans un autre pays.Afin de garantir quils adhrent aux normes nonces larticle 31 2, les tats doi-vent galement prvoir des dispositions appropries [] au niveau national pourgarantir que seules les restrictions ncessaires chaque cas sont appliques, quellessatisfont aux autres exigences de cet article et que les normes applicables, en parti-culier en matire de droits de lHomme, sont prises en compte 29 . Les dveloppe-ments du droit international des droits de lHomme signifient que toute restrictionpeut tre impose sur la base dune dcision administrative, quasi-judiciaire ou judi-ciaire, ds lors quun recours est possible auprs dun organe judiciaire. Les partici-pants la table ronde sont galement convenus que le pouvoir des tats dimposerune restriction doit tre li un objet ou un but reconnu et il doit y avoir une rela-tion de proportionnalit raisonnable entre la fin et les moyens. Les restrictions audplacement ne doivent pas tre imposes de manire illgale et arbitraire 30 .

    28. Consultations mondiales sur la protection internationale, Relev des conclusions : article 31 dela Convention de 1951 , table ronde dexperts, Genve, novembre 2001, paragraphe 10.g).29. Ibid., paragraphes 5 et 8.30. Ibid., paragraphe 11.a).

  • La protection des rfugis en droit international : perspective globale

    LARCIER 41

    Dans ce contexte, la dtention des demandeurs dasile et des rfugis repr-sente une mesure exceptionnelle appliquer dans des cas individuels, lorsque lauto-rit approprie a estim que cette mesure tait ncessaire, la lumire descirconstances de lespce. Cette apprciation doit tre mene sur la base de critresprvus par la loi conformment au droit international des rfugis et des droits delHomme. Cette mesure ne doit donc pas tre applique de manire illgale et arbi-traire mais seulement lorsque cest ncessaire pour les raisons numres dans laConclusion No. 44 du Comit excutif, par exemple pour la protection de la scuritnationale ou de lordre public (notamment quand il y a un risque rel que la per-sonne ne senfuit). Les Principes directeurs du HCR de 1999 sur les critres et les normesapplicables quant la dtention des demandeurs dasile fournissent des orientationssupplmentaires et actualises 31. Les Principes directeurs et le Relev des conclu-sions raffirment les principes gnralement reconnus concernant les familles et lesenfants, y compris le fait que les enfants de moins de dix-huit ans ne doivent en prin-cipe pas tre dtenus et que, quand des familles sont exceptionnellement dtenues,

    31. HCR, Principes directeurs sur la dtention des demandeurs dasile : Rvision , 26 fvrier 1999.Voir aussi, HCR, Dtention des demandeurs dasile et des rfugis : le cadre, le problme et la pra-tique recommande , UN doc. EC/49/SC/CRP.13, 4 juin 1999 ; HCR, Detention of Asylum-Seekersin Europe , vol. 1 (4), European Series, octobre 1995. En plus des droits qui figurent dans les traitsgnraux de droits de lHomme, les normes applicables comprennent les UN Standard MinimumRules for the Treatment of Prisoners de 1955, Rsolutions 663 C (XXIV), 31 juillet 1957 et 2076(LXII), 13 mai 1977 du Conseil conomique et social ; UN Body of Principles for the Protection ofAll Persons under Any Form of Detention or Imprisonment de 1988 ; Commission des droits delHomme, Rapport du Groupe de travail sur la dtention arbitraire : Dlibration No. 5 sur la situa-tion des immigrants et des demandeurs dasile du Groupe de travail sur la dtention arbitraire , UNdoc. E/CN.4/2000/4, Annexe II, 28 dcembre 1999 ; Sous-Commission de la promotion et de la pro-tection des droits de lHomme, Rsolution sur la dtention de demandeurs dasile , UN doc. E/CN.4/Sub.2/2000/46, 18 aot 2000, pp. 66-7. Les dispositions rgionales incluent larticle 5 1 de laConvention europenne des Droits de lHomme ; larticle 7 2 de la Convention amricaine desDroits de lHomme, OEA Treaty Series No. 35 ; larticle 5 de la Charte africaine des Droits delHomme et des Peuples, 21 ILM, 58, 1982 ; Conseil de lEurope, Commissaire aux droits de lHomme, Recommandation relative aux droits des trangers souhaitant entrer sur le territoire des tatsmembres du Conseil de lEurope et lexcution des dcisions dexpulsion , CommDH/Rec(2001),19 septembre 2001. Pour les lignes directrices publies au niveau national, voir le Service dImmigra-tion et de Naturalisation (INS) des tats-Unis, Detention Operations Manual (comprenant unensemble complet de normes relatives la dtention), disponible sur http://www.ins.gov/graphics/lawsregs/guidance.htm ; Commission de limmigration et du statut de rfugi du Canada, Lignedirectrice 4 : lignes directrices relatives la dtention , 12 ma