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Jean-Loïc Le Quellec L’ART RUPESTRE DU SAHARA Historique et répartition des découvertes L'un des tout premiers auteurs à avoir attiré l'attention du monde savant sur les gravures rupestres du nord de l’Afrique fut F. Jacquot, dans des articles consacrés aux stations de Tiout et de Moghrar et-Tahtâni en Algérie, l'année même où Jacques Boucher Crèvecœur de Perthes publiait le premier volume de ses Antiquités celtiques et antédiluviennes. Mais ces oeuvres n'éveillèrent qu'un écho discret, voire scandalisé, eu égard à leur caractère alors jugé immoral selon les canons de l'époque (Jacquot ne les dira-t-il pas « affreusement indécentes » ?), et les découvertes ne se multiplieront vraiment qu'au cours du XX e siècle. Il n'est pas possible de citer toutes les contributions de voyageurs et chercheurs, amateurs ou professionnels, qui ont fait connaître des documents rupestres provenant de l'ensemble du Sahara, car elles sont très nombreuses, et d'inégale importance. Cependant, il importe de rappeler que la découverte des peintures du Tassili-n-Ajjer revient au Capitaine Cortier qui les signala pour la première fois en 1909. Ces peintures furent ensuite documentées par le Lieutenant Brenans, dont les carnets de terrain ont été publiés par l’abbé Breuil en 1954, dans une volumineuse publication qui décida un jeune zoologiste, Henri Lhote, à consacrer sa vie à l’étude des arts rupestres du Sahara. En 1956 et 1957, celui-ci organisa donc ses premières expéditions au Tassili-n-Ajjer, et les résultats furent assez riches pour lui permettre de relever des fresques variées puis de présenter rapidement une exposition sur les « Peintures préhistoriques du Sahara », organisée dès 1957 au Musée des Arts Décoratifs. Cependant, au moment même où la mission Lhote était à pied d'oeuvre, paraissait le résultat de celles confiées de 1946 à 1949 à Yolande Tschudi par le Musée d'Ethnographie de Neuchâtel. En 1958, Lhote publiera un livre célèbre, À la découverte des Fresques du Tassili, bientôt traduit en plus de dix langues, et qui fera connaître une petite série de documents au grand public. Ce sera le début d'une longue carrière essentiellement consacrée à l'art rupestre saharien, avec la production de plusieurs centaines de publications. Cependant, les croquis de Lhote n’étaient pas toujours très fiable, ce qui a conduit Jean-Dominique Lajoux, l'un de ses anciens collaborateurs, à retourner sur le terrain pour y réaliser de remarquables photographies. Mais il importe de rappeler que les premières gravures rupestres sahariennes avaient été découvertes en 1850 à Tilizzâghen au Messak (Fezzan, Libye) par le grand explorateur Heinrich Barth, alors sur sa route vers Tombouctou. À son retour, le récit de son voyage n’en présenta que trois, qui ne soulevèrent guère d’intérêt avant 1932, date à laquelle l’anthropologue et préhistorien Leo Frobenius décida de consacrer une expédition à l’étude de ces œuvres. Un riche répertoire iconographique fut alors découvert, dont l’inventaire se poursuit encore de nos jours. En 1948, Roger Frison-Roche photographia les gravures de l'Adrâr Iktebîn, dans la même région, y trouvant

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Jean-Loïc Le Quellec

L’ART RUPESTRE DU SAHARA

Historique et répartition des découvertes

L'un des tout premiers auteurs à avoir attiré l'attention du monde savant sur les gravuresrupestres du nord de l’Afrique fut F. Jacquot, dans des articles consacrés aux stations de Tiout et deMoghrar et-Tahtâni en Algérie, l'année même où Jacques Boucher Crèvecœur de Perthes publiait lepremier volume de ses Antiquités celtiques et antédiluviennes. Mais ces oeuvres n'éveillèrent qu'unécho discret, voire scandalisé, eu égard à leur caractère alors jugé immoral selon les canons del'époque (Jacquot ne les dira-t-il pas « affreusement indécentes » ?), et les découvertes ne semultiplieront vraiment qu'au cours du XXe siècle.

Il n'est pas possible de citer toutes les contributions de voyageurs et chercheurs, amateurs ouprofessionnels, qui ont fait connaître des documents rupestres provenant de l'ensemble du Sahara,car elles sont très nombreuses, et d'inégale importance. Cependant, il importe de rappeler que ladécouverte des peintures du Tassili-n-Ajjer revient au Capitaine Cortier qui les signala pour lapremière fois en 1909. Ces peintures furent ensuite documentées par le Lieutenant Brenans, dont lescarnets de terrain ont été publiés par l’abbé  Breuil en 1954, dans une volumineuse publication quidécida un jeune zoologiste, Henri Lhote, à consacrer sa vie à l’étude des arts rupestres du Sahara.En 1956 et 1957, celui-ci organisa donc ses premières expéditions au Tassili-n-Ajjer, et les résultatsfurent assez riches pour lui permettre de relever des fresques variées puis de présenter rapidementune exposition sur les « Peintures préhistoriques du Sahara », organisée dès 1957 au Musée desArts Décoratifs.

Cependant, au moment même où la mission Lhote était à pied d'oeuvre, paraissait le résultatde celles confiées de 1946 à 1949 à Yolande Tschudi par le Musée d'Ethnographie de Neuchâtel. En1958, Lhote publiera un livre célèbre, À la découverte des Fresques du Tassili, bientôt traduit enplus de dix langues, et qui fera connaître une petite série de documents au grand public. Ce sera ledébut d'une longue carrière essentiellement consacrée à l'art rupestre saharien, avec la production deplusieurs centaines de publications. Cependant, les croquis de Lhote n’étaient pas toujours trèsfiable, ce qui a conduit Jean-Dominique Lajoux, l'un de ses anciens collaborateurs, à retourner sur leterrain pour y réaliser de remarquables photographies.

Mais il importe de rappeler que les premières gravures rupestres sahariennes avaient étédécouvertes en 1850 à Tilizzâghen au Messak (Fezzan, Libye) par le grand explorateur HeinrichBarth, alors sur sa route vers Tombouctou. À son retour, le récit de son voyage n’en présenta quetrois, qui ne soulevèrent guère d’intérêt avant 1932, date à laquelle l’anthropologue et préhistorienLeo Frobenius décida de consacrer une expédition à l’étude de ces œuvres. Un riche répertoireiconographique fut alors découvert, dont l’inventaire se poursuit encore de nos jours. En 1948,Roger Frison-Roche photographia les gravures de l'Adrâr Iktebîn, dans la même région, y trouvant

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l'inspiration d'un récit romancé : La Montagne aux écritures. Les recherches se développèrent à lafin des années soixante, quand deux missions italiennes conduites par Paolo Graziosi, permirent àce dernier de faire de nouvelles explorations au Messak. Dans cette zone, les découvertes étonnantesse sont multipliées ces dernières années, particulièrement grâce aux minutieuses prospections de JanJelínek, Gérard Jacquet, Rüdiger et Gabriele Lutz, ou Giancarlo Negro. Mais c'est surtout depuis1990, date à laquelle Axel et Anne-Michèle Van Albada ont commencé à faire connaître le résultat deleurs recherches, que les nouveaux documents présentés par ces chercheurs ont fait évoluer nosconnaissances de façon décisive, notamment par la publication de personnages masqués, decynocéphales mythiques, de scènes de sacrifice et de partage d'antilope, etc.

Autre province rupestre importante, l’Akâkûs, situé dans l’extrême sud-ouest de la Libyeentre le Messak et le Tassili, recèle des gravures et des peintures, mais ce sont ces dernières surtoutqui ont attiré l’attention des chercheurs. On y remarque en particulier quelques personnages des« Têtes Rondes » qui représentent vraisemblablement une extension locale assez tardive de cetteécole essentiellement tassilienne. Mais le massif de l’Akâkûs est connu avant tout pour sespeintures pastorales où l’on peut distinguer les productions d’une école particulière, celle de Wa-n-Amil, analogue à celle d’Iheren-Tahilahi qui est caractéristique du Bovidien final tassilien.

Le Tassili-n-Ajjer, lui aussi, est surtout connu pour ses peintures, les publications d’HenriLhote ayant popularisé celles de localités maintenant devenus célèbres, comme Séfar, Jabbaren ouIheren, mais de nombreux ensembles y restent encore à découvrir ou à publier. Parmi les étudesrécentes de peintures inédites en provenance de cette région, il convient de souligner surtout lestravaux de Ginette Aumassip sur le site de Ti-n-Hanakaten, et ceux d’Alfred Muzzolini, AldoBocazzi et Augustin Holl sur celui de Tikadiouine. C’est au Tassili que les peintures des TêtesRondes sont les plus nombreuses, mais il est bien difficile de préciser leur position chronologiquepar rapport à celles en aplat du Bovidien ancien, dites par Alfred Muzzolini « de l’école de Sefar-Ozanéaré ». Les peintures de l’école d’Abaniora comportent des personnages dont le profil évoquecelui des Peul actuels, ce qui a contribué à l’élaboration de théories interprétatives visant à expliquertrès imprudemment l’art rupestre saharien par les traditions culturelles de ce peuple. Enfin, l’écoled’Iheren-Tahilahi, affectionnant la peinture au trait, correspond à celle de Wa-n-Amil dansl’Akâkûs, et se prolonge insensiblement dans la Période du cheval qui verra bientôt l’apparition despremiers chars « au galop volant ». Ceux-ci furent vraisemblablement introduits par l’intermédiairede Cyrène, à partir du VIIe siècle av. J.-C. L’alphabet lybique, préfigurant les actuels caractèrestifinâgh utilisés par les Touareg pour graver leurs messages sur les rochers, apparaîtra au Saharacentral quelques siècles plus tard. Enfin, un nouveau venu, le chameau, fera son apparition dans ledernier quart du 1er millénare av. J.-C., et permettra la reconquête d’un Sahara que ses ancienshabitants, chassés par la péjoration climatique, avaient presque totalement abandonné.

Le Tassili est également riche en gravures, l'Oued Djerât constituant sous ce rapport un sitecapital, approchant un peu, par le nombre et la qualité des oeuvres, les vallées du Messak libyen. Cetensemble du Djerât, qui avait été découvert par le lieutenant Brenans en 1932, fut partiellementétudié dans les années trente, et un corpus non exhaustif en a été publié par Henri Lhote en 1976.

D'autres sites à gravures, numériquement moins importants, ont été ensuite signalés auSahara central puis partiellement publiés, et il convient de mentionner en particulier le livre queThéodore Monod a consacré à l'Ahnet, car sont intérêt dépasse largement celui des gravures qui ysont décrites, dans la mesure où les conceptions chronologiques qui y étaient développées dès 1932connurent une très longue postérité et, du reste, influent toujours sur les cadres de pensée deschercheurs actuels, dans l'ensemble du Sahara.

En Ahaggar, seules quelques gravures rupestres avaient été sporadiquement signalées avantla parution du livre rédigé en 1938 par F. de Chasseloup-Laubat et qui a fourni un recueil despeintures et gravures notées trois ans auparavant au cours de l'Expédition Alpine Française du Haut-Mertutek. D'autres sites, d'importance inégale, ont été signalés ensuite par divers auteurs, mais

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l'essentiel de nos connaissances est dû aux minutieuses prospections et aux magnifiquesmonographies de Franz Trost sur l'Ahaggar central, publiées en 1981 et 1997.

Après les découvertes de Marc Milburn dans le nord-ouest de l'Aïr en 1976-1977, de Jean-Pierre Roset dans l'Aïr septentrional en 1971, et de Gérard Quéchon et Jean-Pierre Roset dans lemassif de Termit en 1974, les figurations rupestres de la partie méridionale du Sahara sontmaintenant beaucoup mieux connues grâce aux importants corpus réalisés ces dernières années parChristian Dupuy pour l'Adrar des Ifoghas, et par Henri Lhote pour l'Aïr. Dans leur immensemajorité, elles appartiennent à l’école dite du « guerrier libyen », nom donné aux innombrablesreprésentations de personnages géométriques stéréotypés qui couvrent les rochers de ces régions. Ils’agit d’hommes dessinés en position frontale, qui arborent volontiers des lances aux armaturesexagérément agrandies, qui sont souvent munis d’un bouclier rond, et qui tiennent régulièrement deschevaux en longe. Ils sont à situer entre le 1er millénaire avant notre ère et le 1er millénaire après, etcorrespondent manifestement à la première occupation berbère du Sahara.

Par sa thématique et son style, le monde des gravures du Sahara central est souvent prochede celui de l’Atlas Saharien, tout en présentant des formes expressives différenciées,particulièrement au Tassili et au Fezzân. Par contre, le Haut Atlas marocain, le Rio de Oro et l’Adrarmauritanien semblent appartenir à un autre monde, dominé numériquement par des représentationsappartenant au style dit de Tazina, du nom d’une station éponyme située dans les monts des Ksouren Algérie. Ce style est essentiellement caractérisé par des petites gravures de gazelles et de girafes,plus rarement d’autruches ou d’autres espèces, dont les extrémités sont exagérément prolongées, demanière parfois très fantaisiste. L’étude de ce type de représentations est actuellement en cours,mais sa très large répartition pose des problèmes difficiles à résoudre. Au Maroc et au Rio de Oro,on remarque aussi des représentations de poignards, de haches nervurées (dites « hallebardes ») etd’un type particulier de haches à manche coudé (dites haches peltes), qui ne se retrouvent nulle partailleurs au Sahara, et qui signalent une période récente, où le façonnage du métal était évidemmentacquis.

De l’Adrar de Mauritanie et de l’Aouker, on retiendra surtout la présence de nombreusesgravures de chars schématiques souvent attelés à des bœufs, ce qui reste rare dans les autresprovinces rupestres. On trouve aussi dans cette zone quelques inscriptions alphabétiques, ainsi quedes représentations de méharistes et de cavaliers libyco-berbères comparables aux « guerrierslibyens » stéréotypés qui se trouvent en grand nombre parmi les gravures récentes de l’Adrar desIfoghas et de l’Aïr, moins fréquemment en Ahaggar, mais tout à fait exceptionnellemnt au Fezzân,au Djado et au Tibesti.

Dans le désert libyque oriental, les gravures du Karkûr et-Talh ont d'abord été signalées en1923 par Hassanan Bey alors que, de 1924 à 1926, le prince Kémâl ed-Dîn poursuivait le relevé decelles d'Awenât. En 1933, L. di Caporiacco découvrait les peintures d'Aïn Dûwa alors que, la mêmeannée, Hans Rhotert entreprenait la première étude générale de l'art rupestre de l'ensemble de larégion ; mais sa monographie, encore utile de nos jours, ne fut éditée que dix-sept ans plus tard, en1952. De nombreuses peintures et gravures inédites du Karkûr et-Talh seront signalées en 1936 parle fameux aventurier hongrois Lazlo de Almazy (héros du film « le patient anglais »), et leurinventaire systématique sera entrepris par Hans Winkler deux ans plus tard. Enfin, l'expéditionbelge dirigée par le Professeur Léonard permettra à une équipe dirigée par Francis Van Noten derécolter de nombreuses peintures et gravures nouvelles dans les vallées de la région d'Awenât et duGilf Kebîr, moisson qui se concrétisera en 1978 par la publication d'une synthèse magnifiquementillustrée. Hormis un énigmatique panneau de peintures apparemment des Têtes Rondes à Bû Hlêgadans le Karkur Drîs, les figurations observables à Awenat sont surtout composées de bovins, dechèvres et de personnages souvent comparables aux peintures du massif de l’Ennedi, avec lequeldes relations devaient exister aux alentours du second millénaire av. J.-C.

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La plupart des sites anciennement signalés dans l’Ennedi par D’Alverny, Gérard Bailloudou Paul Huard ont été récemment revus par Adriana et Sergio Scarpa Falce, Jacques et BrigitteChoppy, Aldo et Donatella Bocazzi. À part quelques peintures dans le « style de Sivrè » qui, soustoute réserve, fait songer aux Têtes Rondes du Tassili, l’ensemble ne peut guère être antérieur ausecond millénaire av. J.C.

Le Djado a récemment fait l’objet de recherches approfondies de la part de Karl HeinzStriedter et Michel Tauveron, alors que le Tibesti est maintenant bien connu grâce à un bellepublication collective dirigée par Giancarlo Negro, Roberta Simonis et Adriana Ravenna. Dans cesdeux zones, il existe des gravures apparemment anciennes, qui pourraient correspondre à uneextension méridionale extrême du style bubalin. Quelques rares peintures du Tibesti sontcomparables à celles des Têtes Rondes, mais dans leur grande majorité, les peintures et gravures dumassif sont pastorales au sens large, leur phase la plus ancienne étant représentée par le style dit deKarnasahi.

Certaines découvertes numériquement peu importantes ont joué un grand rôle dans lesdiscussions concernant les oeuvres rupestres du Sahara central en général. Ainsi, en 1864, soitdouze ans après les découvertes de Tiout dans l’Atlas, l’explorateur et géographe Henri Duveyriersignalait l'existence, au col d'Anaï, de gravures de chars tirés par des boeufs, sur « la piste quesuivaient les Garamantes vers l'Aïr » , et donnait ainsi naissance au mythe de la « route deschars », qui eut la vie dure, et qui encombre encore parfois les publications. Douze ans plus tardencore, le médecin explorateur allemand Gerard Rohlfs découvrait le site à « femmes ouvertes » del'oued el-Khêl en sud-Tripolitaine, qui sera publié par Paolo Graziosi, dans une étude exemplairedatée de 1968. Cette même année, le libyen Fathallah Ezzedîn remarquait sur des dalles horizontalesde Sîdi Sharîb, près de Tarhûna en pleine Tripolitaine, des gravures qui seront toutes publiées parJan Jelínek en 1982, et qui sont parmi les plus septentrionales connues dans leur style. En 1979, leGénéral Huard David fera connaître la station de Timissit, au sud de Ghadamès, remarquable par sesnombreuses spirales et empreintes gravées. Une série de gravures découvertes à Gârat Umm el-Mançûr (près de Sinawen) par Umberto Paradisi en 1963, et en partie publiées à nouveau par JanJelínek est particulièrement intéressante pour l'étude de la répartition des ovins ornés, dont elle offreune extension méridionale inattendue.

Enfin, des sites à peintures ont été récemment découverts en Tunisie, notamment dans larégion de Ghoumrassen, et ont permis d’attirer l’attention sur toute une zone jusqu’alors absentedes cartes de répartition des arts rupestres sahariens.

Classification et datationLes premières « fresques » du Tassili à être publiées suscitèrent un important mouvement

d’intérêt de la part des préhistoriens et du grand public : enfin, pensait-on, se dévoilaient destémoignages de première main sur la vie quotidienne, les croyances et la culture matérielle depeintres et de graveurs ayant vécu « au temps où le Sahara verdoyait », et dont les œuvres allaientnous livrer d’irremplaçables informations sur leurs cultures à jamais disparues. De plus, la qualitégraphique de nombre de ces productions en faisait des œuvres de tout premier plan, capables detoucher notre propre sensibilité artistique, et dignes de figurer en bonne place dans toutes lesanthologies et histoires de l’art.

À mesure que se multipliaient les découvertes, il devenait urgent d’introduire un ordre dansla masse grandissante des documents – bientôt connus par dizaines de milliers sur l’ensemble del’hémi-continent – et l’on convint de les classer par périodes. Mais si les œuvres tassiliennes sontgénéralement les plus connues, et si leur étude a bien permis l’établissement de plusieurs systèmes

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chronologiques, il faut rappeler que la toute première classification des gravures fut proposée aumilieu du siècle dernier par Heinrich Barth, qui distingait les figurations « à grands animaux » desgravures « très mal et très négligemment tracées », selon une dichotomie ultérieurement reprise parle géographe Émile-Félix Gautier, lequel écrira dans la première décennie du XXe siècle : « Tout cequi n’est pas belle gravure ancienne [...] est immonde graffiti libyco-berbère ». Ainsi, dès lespremières tentatives de classification, se constatait la regrettable intrusion de critères artistiquesimputables au goût des classificateurs, et dont la discipline n’a pas encore réussi à se dégagertotalement.

Bien sûr, on avait très tôt remarqué que plusieurs époques étaient concernées, puisquecertains desdits « graffiti » représentaient des dromadaires – d’introduction récente au Sahara –tandis que d’autres montraient des espèces maintenant disparues de la région (commel’hippopotame, l’éléphant, la girafe ou le rhinocéros) voire définitivement éteintes (comme le grandbuffle antique). Assez tôt s’imposa donc l’habitude de classer les gravures rupestres en fonctiondes espèces animales représentées, en considérant celles-ci comme des sortes de fossiles directeurs.Les périodes les plus récentes, caractérisées par la présence de dromadaires et de chevaux, furentdites « cameline » et « caballine », tandis que les images présentant des bœufs domestiques étaientdites « pastorales » ou « bovidiennes », et que la catégorie du « bubalin », considérée comme la plusancienne, était créée sur la base des figurations d’une espèce disparue de buffle géant, dite « grandbubale ».

Les premiers spécialistes de l’art rupestre, formés à l’école des anthropologues du XIXe

siècle et du début du XXe, crurent alors découvrir, dans les œuvres qu’ils étudiaient, les témoignagesdu passage d’une culture de chasseurs à une civilisation de pasteurs. Aux premiers furent attribuéesles gravures du « bubalin », et aux seconds les œuvres dites « pastorales », notamment lesinnombrables peintures de bovins domestiques.

Ainsi, les premières observations de Lhote au Djerât lui firent-elles « admettre l’existence,au Sahara central, d’un groupe archaïque néolithique où la faune est exclusivement éthiopienne ».À l’occasion de l’exposition parisienne des relevés qu’il avait effectués au cours de ses missions auTassili-n-Ajjer, il affirma que les gravures de la période dite par lui « des chasseurs » ou « dububale » devaient être placées « entre 6000 à 8000 ans avant J.-C. », alors que celles des« Pasteurs à Bovidés » auraient débuté au Ve millénaire. Dans son livre À la recherche des fresquesdu Tassili, il subdivisa les peintures des Têtes Rondes, auxquelles il attribuait « huit mille ansd’âge », en « stade ancien », « subschématiques », « stade évolué », « styles particuliers » et « styledécadent ». Quant aux seize étages du Bovidien, ils étaient supposer s’échelonner « entre 4000 et2000 av. J.-C. », ces dates étant déduites d’une série de datations 14  C obtenues à proximité desparois ornées – ce qui n’est pas sans poser de sérieux problèmes méthodologiques. Mais, reprenantle dossier du Djerât plusieurs années après ses premiers séjours au Tassili, Henri Lhote admit enfinqu’il y avait lieu « de revenir sur la conception qui n’admettait pas le bœuf (domestique ?) dans legroupe des gravures de style naturaliste, défini parfois sous le nom de groupe des chasseurs ou dububale ou du bubalin ».

Au départ, la périodisation des figurations anciennes en productions « bubalines » ou « desChasseurs » puis « pastorales », n’était donc qu’une simple hypothèse construite à partir dequelques cas jugés exemplaires, et choisis sur une poignée de sites de l’Atlas, du Tassili et duFezzân. Mais cette proposition fut progressivement réifiée en une théorie abusivement élargie àl’ensemble du Sahara, du Sud Marocain et du Rio de Oro à l’Algérois et au Constantinois, del’Ahaggar et du Tassili au Fezzân, voire jusque dans la vallée du Nil. Partout, les voyageurstrouvaient de nouveaux sites rupestres dont les productions graphiques étaient aussitôt attribuées,selon leur sujet, soit aux « Chasseurs », soit aux « Pasteurs ». Mais caractériser une « Période desChasseurs » par l’absence totale de représentations d’animaux domestiques, ainsi qu’on le faisaitalors (et ainsi qu’on le fait encore trop souvent), expose au risque d’effectuer le raisonnementcirculaire suivant :

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1. L’art des « Chasseurs » (ou du « Bubalin ») est défini comme figurant essentiellementdes animaux sauvages, et celui des « Pasteurs » comme figurant surtout des animaux domestiques ;

2. Lors de l’étude des sites, faune sauvage et animaux d’apparence domestique sont traitésséparément, de façon à constituer deux ensembles thématiques ;

3. Sans autre argument, ces deux ensembles sont alors considérés comme appartenant bien àdeux entités culturelles différentes et successives, alors qu’ils ont simplement été construits dès ledébut par les chercheurs.

Pourtant, en extrapolant les rares datations obtenues lors de fouilles conduites à proximitésdes dispositifs rupestres, Henri Lhote a estimé que les peintures et gravures « pastorales » et« bovidiennes » devaient remonter au IVe millénaire avant notre ère. Il en a aussi déduit que que lesgravures « bubalines » pouvaient être beaucoup plus anciennes, de même qu’une catégorieparticulière de peintures, celle dite des « Têtes Rondes » ou des « Martiens », sortes de personnagesà grosse tête arrondie sans indication des traits du visage. Quelques chercheurs, prolongeant cettefaçon de voir, ne craignirent pas de repousser au-delà du Néolithique l’âge des gravures« bubalines », supposées appartenir à un monde de « Chasseurs » paléolithiques. De nos joursencore, mais sans plus de preuves, certains leur attribuent volontiers 10 000 ans d’ancienneté, voire20 000 ou plus.

Depuis une dizaine d’années, les prises de position se sont succédé à propos des différents« étages » d’art rupestre du Sahara et de leur âge, mais les chronologies qui en ont résulté sontfragilisées par nombre de défauts méthodologiques, dont les plus fréquents sont : l’attribution degravures à des groupes stylistiques définis sur des peintures (ou l’inverse), la confusion style-époque-ethnie, l’absence de définition précise des styles, l’attribution a priori d’un animal parétage, l’interprétation des différences de patine en termes de « quelques millénaires » supposéss’écouler entre chaque phase, ou encore l’attribution systématique et non argumentée de tout« Bubale » à une « période bubaline ».

Comme des estimations chronologiques très différentes coexistent actuellement dans lespublications spécialisées, le prodigieux imagier rupestre saharien semble avoir perdu beaucoup deson intérêt pour les préhistoriens, car ceux-ci ne peuvent travailler sans disposer d’une chronologie,fût-elle imprécise ou relative. Plusieurs tentatives ont donc vu le jour, qui visaient à ancrer l’artrupestre dans un cadre chronologique acceptable. À cet effet, pour dater les gravures, on a d’abordcru pouvoir utiliser l’étude des patines, puisque la roche fraîchement incisée ou percutée est d’abordde teinte très claire, avant de foncer avec le temps jusqu’à reprendre la couleur sombre qui était lasienne au départ. L’intensité des teintes devrait donc être proportionnelle à l’ancienneté des œuvres,rendant presque immédiate la lecture de leur position chronologique relative. Malheureusement, ilest maintenant certain que le processus de « patinisation » ne s’effectue pas selon une fonctionlinéaire du temps et qu’une patine extrêmement foncée peut parfois survenir très rapidement. Toutespoir de datation par les patines s’est donc révélé illusoire. Pourtant, des recherches récemmentconduites au Messak ont montré qu’en ce qui concerne la patine noire qui recouvre généralementles gravures les plus anciennes, la patinisation, liée à l’activité de bactéries fixant le manganèse,s’était déroulée durant l’Holocène moyen, vers le IVe millénaire avant notre ère, et que ce processusfut interrompu ou considérablement ralenti à partir du IIe millénaire, par suite de la péjorationclimatique générale au Sahara à cette époque.

Dernièrement, des observations conduites dans l’oued Tidunaj (Tadrart algérienne) ontpermis de découvrir des gravures rupestres partiellement recouvertes par des sédiments holocènes,ce qui a permis d’intéressantes tentatives de datation, qui méritent d’être détaillées. En effet, deuxniveaux de terrasses ont été reconnus dans cette vallée : c’est le plus ancien qui se trouve au contactdes gravures, alors que le plus récent résulte d’écoulements ayant entamé des dépôts antérieurs, dontune partie du matériel fut alors emprunté et déplacé. L’intensité des écoulements reconnus dans le

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niveau récent permet de supposer que sa formation précéda l’Aride généralisé dans l’ensemble duSahara à partir de 4000-3500 BP (before present, c’est-à-dire, par convention, avant 1950). L’autreniveau est donc plus ancien, mais toute la question est de savoir de combien. On a proposé de lemettre en relation avec la rupture liée à la phase aride mi-holocène, ce qui supposerait uneaccumulation de matériels détritiques antérieure à 7500 BP. Si cette estimation était confirmée, il enrésulterait que les gravures de bovinés en partie sous-jacentes à cette terrasse auraient forcément étéréalisées avant cette date. Comme, de plus, le trait incisé des pattes de ces bovins fut repris parpiquetage à une époque inconnue, mais également antérieure au dépôt de terrasse, il a été supposéque le trait original aurait été exécuté avant le premier Humide holocène, c’est-à-dire au Pléistocènefinal. Mais même si la date de 7500 BP était confirmée pour la formation de la terrasse ancienne, ilresterait à mesurer l’intervalle entre la date de la reprise piquetée et celle des œuvres inciséesoriginales. Et même en supposant que la reprise s’expliquerait du fait que l’œuvre originale était enpartie effacée, on resterait dans l’incapacité de délimiter avec certitude le laps de temps nécessaire àcet effacement. Comme l’intervalle séparant deux gravures de patine différente, il pourrait semesurer en millénaires, mais tout aussi bien en siècles ou en décennies, car il n’est aucunementprouvé que l’effacement des gravures nécessite toujours l’action de deux, trois ou quatremillénaires, et encore moins de périodes entières de la sériation en grands « Arides » et« Humides ». En fonction de la localisation des œuvres, très peu de temps pourrait y suffire, lorsd’un court épisode de corrasion intense, et il importe de répéter qu’il n’existe actuellement aucunmoyen de reconnaître la durée d’un processus d’érosion à partir de son action sur un trait gravé,une action importante ne correspondant pas forcément à une longue durée du processus. Nonseulement il n’y a donc aucune raison objective pour placer les gravures de Tidunaj au Pléistocènefinal, mais il apparaît même qu’elles ne peuvent être que de très peu antérieures à la date de 7500 BPproposée pour la terrasse du niveau 2, puisque l’un des bovinés en partie recouverts porte un colliertrès nettement dessiné. Accepter une attribution remontant à la fin du Pléistocène reviendrait en toutcas à admettre la présence d’un bovin domestique au Sahara central à cette époque, ce qui cadreraitsi peu avec ce que l’on sait de la domestication en Afrique, qu’en l’attente d’arguments plus solides,il convient d’abandonner cette thèse.

Quant aux techniques de datation utilisant la spectométrie de masse par accélérateur pourdater des peintures en n’utilisant qu’une très petite quantité de matière, elle ne peut être utilisée quesi l’on dispose d’échantillons contenant des matières organiques, ce qui, au Sahara, pose desproblèmes. Une date de 6145 ± 70 ans BP vient cependant d’être obtenue sur une peinture peut-êtrebovidienne de l’abri Lancusi dans l’Akâkûs (sud-ouest du Sahara Libyen), et l’on peut supposerque de nouveaux résultats seront bientôt disponibles sur d’autres sites.

Mais dans l’attente de l’utilisation généralisée d’un ou plusieurs procédés fiables dedatation absolue des images rupestres, les seuls arguments généralement utilisables pour l’instantsont d’ordre stylistique et culturel. Du point de vue stylistique, la plupart des auteurs ont affirméjusqu’à présent que les gravures « bubalines » ou « des Chasseurs » seraient d’un autre style queles œuvres proprement pastorales, mais des recherches précises, portant sur plusieurs milliers defigurations, ont permis d’établir que cette proposition est fausse, et qu’elle résulte d’un a priorirenouant avec les théories des évolutionnistes du XIXe siècle, qui prétendaient rendre compte d’unetrajectoire historique unique valable pour l’ensemble de l’humanité.

En réalité, si l’on s’en tient à l’étude des seuls témoignages graphiques que nous ont laissésles anciens habitants du Sahara, il est impossible d’en déduire (et non simplement affirmer)l’existence successive d’une « culture des Chasseurs » qui aurait laissé place à des pasteurs. Maislorsque cette succession de « cultures » est posée à priori, il est bien évident que tout site rupestrenouvellement découvert est susceptible de livrer des œuvres imputables à chacune d’elle. Parexemple, on rangera systématiquement les figurations d’animaux sauvages et d’archers dans unprétendu « étage » des chasseurs, et tous les bœufs domestiques seront évidemment placés danscelui des pasteurs. Ainsi, toute étude menée selon ces prémisses apportera son lot de nouveaux

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exemples d’application de la théorie (mais jamais de preuves de sa validité), tout en renforçant lacircularité d’un pseudo-raisonnement qui partait en réalité d’un postulat non prouvé.

Bien que depuis plus d’un siècle, de nombreux auteurs aient réfuté la doctrine évolutionnistevoulant faire partout passer l’humanité de l’étage des « Chasseurs » à celui des « Pasteurs » et bienque cette théorie obsolète soit par conséquent abandonnée de la plupart des anthropologues, il estcurieux de constater que la vulgate correspondante est toujours admise par la majorité deschercheurs en art rupestre saharien. Cette situation a été dénoncée, depuis une dizaine d’années, parAlfred Muzzolini, lequel conteste vigoureusement « ce paradigme qui revient à attribuer tous leschasseurs, par principe, à une phase “ancienne” ». La critique de ce type d’attribution n’amalheureusement guère été entendue, puisqu’elle ne s’appuie pas sur un raisonnement qu’il seraitpossible de démontrer ou d’invalider, mais sur l’un des fondements imaginaires de notre propreculture associant, dans les profondeurs de notre esprit, la chasse à l’archaïsme.

Le schéma général des chronologies traditionnelles des arts rupestres sahariens constitue eneffet une application particulière de l’idée selon laquelle des « Pasteurs » ou « Chasseurs-Pasteurs »succéderaient partout à des « Chasseurs », opinion qui représente un état ancien des étudesanthropologiques. Tout en risquant d’illustrer l’idée simpliste selon laquelle la domestication auraitéliminé la chasse, cette position prolonge la thèse évolutionniste déjà explicite chez Condorcet à lafin du XVIIIe siècle, et selon laquelle l’homme quitterait l’état de nature en passant nécessairementpar les stades de l’élevage et de l’agriculture. Ce présupposé d’un progrès linéaire de l’humanité etd’une complexification progressive des cultures implique l’existence d’un ordre immanent dans lasuccession des phénomènes économiques et culturels. Il fut surtout popularisé par le livre de LewisH. Morgan Ancient Society or researches on the line of Human Progress from savagery throughbarbarism and civilisation, paru en1877, et qui inspira Marx et Engels. Lewis Morgan y présentaiten effet l’humanité comme évoluant de l’état « sauvage » (précédant l’invention de la poterie) à celuide « civilisation » (commençant avec l’écriture), tout en passant par le stade obligé de l’état« barbare », chacune de ces phases étant elle-même subdivisée en trois. En particulier, l’auteurconsidérait dans le premier état trois stades, parmi lesquels la « sauvagerie moyenne » et la« sauvagerie récente » étaient respectivement caractérisées par l’acquisition de la lance puis de l’arc,selon une hypothèse qui prévaut encore dans certaines études sur les prétendus « Chasseurs » duSahara.

Ces idées auront la vie longue et en 1926, le père Wilhelm Schmidt affirmera, dans DerUrsprung der Gottesidee, qu’il convient de distinguer Urkultur (culture des chasseurs nomades) etPrimärkultur (culture des pasteurs), la seconde succédant nécessairement à la première. Et c’estbien de cela dont il s’agit pour les chronologies qui se plaisent à reconnaître dans les gravuresrupestres sahariennes des témoins de la succession : « Chasseurs », puis « Pasteurs ». Le postulatévolutionniste sous-jacent transparaît clairement dans le vocabulaire utilisé pour élaborer cesthéories. En effet, des chasseurs tardifs (« Late Hunters ») y succèdent régulièrement à leurshomologues précoces (« Early Hunters »), on y évoque volontiers la « diminution de la qualitéartistique », ou bien l’on y commente l’évolution d’un « Style des Chasseurs » allant du« décoratif » au « simplifié » en passant par le « classique », quand certaines œuvres ou périodesn’y sont pas qualifiées de « décadentes », voire « grossières » et « primitives », tandis que le« subnaturalisme » y succède forcément au « naturalisme ». Pourtant, l’hypothèse d’uneconcaténation nécessaire des trois niveaux économiques (chasse, élevage, agriculture) avait déjà étémise en doute par Alexandrer von Humboldt, avant d’être réfutée par Eduard Hahn en 1896, lequelfaisait remarquer (dans Die Haustiere und ihre Beziehungen zur Wirtschaft des Menschen) quecertains Indiens pré-colombiens pratiquaient l’agriculture sans posséder de bétail. Contre le préjugéd’un évolutionnisme culturel linéaire et universel, se sont aussi élevées les voix de Franz Boas et deson élève Robert Lowie, puis celles de Bronislav Malinowski, Wilhelms Koppers et Alfred-ReginaldRadcliffe-Brown, pour ne citer que les auteurs les plus connus. De nos jours, les anthropologuesont donc très généralement abandonné la théorie selon laquelle les sociétés passeraientnécessairement par des phases historiques liées aux ressources alimentaires, techniques et

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intellectuelles mises en œuvre pour répondre aux pressions de l’environnement. Il est maintenantadmis qu’il s’agissait d’une idée reçue, largement controuvée par les observations ethnologiques etqui, sur le terrain, a souvent conduit à ne prendre en compte que les singularités culturelles jugéessusceptibles d’indiquer des écarts historiques. C’est ainsi que, dans l’étude des arts rupestres duSahara, ce présupposé conduit à ne s’intéresser aux figurations de bovinés que dans la mesure oùelles pourraient être l’indice d’une domestication ou d’une « domestication incipiente », ou bien àne relever les scènes cynégétiques (ou supposées telles) et les représentations de la grande faunesauvage qu’en tant qu’elles seraient symptomatiques de la présence de « Chasseurs ». Nonobstant,une utilisation prolongée de cette doctrine évolutionniste se remarque au sein des recherches sur lesarts rupestres sahariens, où elle survit avec d’autres prénotions obsolètes également abandonnéespar les ethnologues, telle que l’association systématique « un style = une ethnie ». Ceci se rattacheau fait que dans notre culture, les chasseurs forment une métaphore commune du Primitif et duSauvage, et sont couramment associés, consciemment ou non, à une prétendue « mentalitéarchaïque ». Au point que, dans le vocabulaire des chronologies sahariennes, une expression comme« Période des Chasseurs archaïques » sonne presque comme un pléonasme.

Pourtant, l’examen de la documentation disponible permet de constater que lesreprésentations de la « grande faune sauvage » (éléphants, rhinocéros, hippopotame, girafe) sontd’autant moins spécifiques d’un étage « Bubalin » très ancien que ces animaux ont disparubeaucoup plus tard qu’on ne le pensait il y a une vingtaine d’années (des ossementsd’hippopotames abondent par exemple dans les restes de cuisine du Ténéréen, vers 3 500-2 000avant notre ère). Le grand buffle antique traditionnellement dénommé « bubale » n’est pas non pluscaractéristique du non moins traditionnel « Bubalin », puisqu’il est maintenant certain qu’enplusieurs points du Sahara, il a lui aussi vécu très tardivement, au moins jusque vers 4000 BP. S’ilest parfaitement exact qu’il fut chassé et consommé par certains Néolithiques du Sahara, on constateque l’appellation de « bubalin » a été finalement donnée à un « étage » de gravures où cet animaln’est pas toujours présent, et que cette espèce a disparu longtemps après la fin de la « phase »qu’elle est dite caractériser. Ce terme de « bubalin » ne saurait donc être conservé qu’au titre de larègle d’antériorité, comme une étiquette commode pour désigner le style des gravures sur lesquellesle grand buffle antique apparaît le plus souvent, mais en aucun cas pour qualifier un étageparticulier.

Deux des plus importants critères d’identification du « Bubalin » comme période étantdésormais caducs, il y a d’autant moins de raison de regrouper dans une classe chronologiqueparticulière les gravures traditionnellement dénommées « bubalines » ou « des Chasseurs », que laprésence de bovins et d’ovins domestiques y est bien attestée. On peut en effet y observer destroupeaux accompagnés de personnages, et surtout des bœufs porteurs, décorés, sellés, tenus enlonge, et accompagnés de chiens.

Des bovins richement parés, tenus en longe par des femmes en robe longue, ornés dependeloques à décor géométrique maintenues par un collier, et portant des selles décorées muniesd’un pommeau en « V » sculpté, sont particulièrement bien attestés dans l’art « bubalin » duMessak libyen, pourtant considéré comme un des « foyers » de la « culture des Chasseurs ». Àmoins de supposer l’existence, en plein Sahara central, d’une zone de primo-domesticationincroyablement ancienne, on voit mal comment les gravures sahariennes où figurent ces bêtespourraient être antérieures aux dates actuellement retenues pour l’apparition du bétail en Afrique. Oraucune datation d’animal incontestablement domestique n’étant connue au Sahara antérieurement auVe millénaire avant J.-C., on comprend mal comment les peintures ou gravures qui les représententpourraient être beaucoup anciennes. Du reste, placer ces œuvres dans le Ve millénaire avant J.-C. lesferait concorder parfaitement avec les estimations signalées plus haut à partir de l’étude des états depatine.

Comme aucun des critères de superpositions, style ou technique ne permet de dissocierobjectivement les images d’animaux domestiques et les représentations de la grande faune sauvage,

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il faut bien admettre que l’art gravé de style (et non d’âge) « bubalin », ne correspond pas à laproduction artistique de prétendus « Chasseurs », mais constitue bien l’œuvre gravé d’un seul etunique groupe culturel qui, il y a environ 6 500 ans, avait élaboré une haute civilisation pastorale. Enfin de compte, le fait d’inclure, au sein d’un même ensemble pleinement pastoral, les œuvreshabituellement considérées comme « bubalines » ou « des Chasseurs », ne devrait pas réellementsurprendre. Henri Lhote et Paolo Graziosi avaient déjà suggéré un tel regroupement, et cela ne faitque confirmer une remarquable intuition de Théodore Monod qui, dès 1932, posait la question desavoir si certains groupes de gravures de son ensemble « préhistorique bovin » ne seraient pas àintégrer au « bubalin », dont ils auraient été « plus ou moins contemporains ».

La recherche du sensLes premiers découvreurs s’interrogèrent sur le sens des représentations qu’ils

rencontraient et, très tôt, plusieurs interprétations et « clés de lecture » de l’art rupestre furentproposées, s’appuyant sur des rapprochements concernant d’abord des données grecques, puiségyptiennes et africaines.

De nos jours, on admet que les anciens chercheurs qui, sur les dispositifs rupestressahariens, crurent reconnaître ici les taureaux du temple d’Assos, là Hécate dans la pause de Baubo,ailleurs le vol du bétail par Hermès, ne faisaient que projeter leur propre culture sur les images desparois ornées. Mais, pour être plus développées, nombre de comparaisons plus récentes, étayées parune connaissance parfois approfondie des mythologies égyptienne et africaine, n’en sont pas moinsarbitraires pour autant.

C’est ainsi qu’en suivant la lecture de trois fresques tassiliennes proposée par HamadouHampâté Bâ à la lumière des traditions ésotériques peules, on a un temps espéré découvrir une cléde lecture susceptible de conduire aux significations profondes des images non descriptives,fréquentes sur nombre de sites. Mais là encore, il s’agissait d’une projection sans lendemainpuisque, après cette intéressante tentative, aucune autre fresque n’a jamais pu être « lue » de cettefaçon. Il n’en est pas moins resté la thèse éminemment discutable et pourtant toujours citée, selonlaquelle les auteurs des fresques tassiliennes auraient été des « proto-Peul ».

Quant aux nombreux rapprochements effectués depuis un siècle entre quelques images del’art peint ou gravé du Sahara et des homologues formels de l’Égypte ancienne, ils sont tousextrêmement fragiles et, à l’exception de l’énigmatique dossier des béliers à disque ou sphéroïde, nes’appuient le plus souvent que sur des dossiers égyptologiques très élémentaires.

De même, les tentatives d’explications de l’art rupestre par de prétendus universauxsymboliques, se soldent régulièrement par l’oubli des contextes locaux et par la dislocation desensembles graphiques hors desquels chaque symbolisme perd toute cohérence. Par exemple, il nesemble guère intéressant d’extraire, à partir des dispositifs rupestres sahariens, toutes les figurationsde spirales, de mains ou de pieds, afin de les comparer à des exemples empruntés au monde entier,mais tout aussi décontextualisés. Il est bien plus productif de revenir à une analyse interne des sites,où l’on a trop longtemps négligé les interrelations des figures entre elles. On a aussi prêté trop peud’attention au rapport que les figures entretiennent avec les parois rocheuses, car le choix d’unsupport faisait partie intrinsèque de la réalisation des œuvres, qui ne peuvent en être extraites. Desrecherches de ce type, actuellement en cours au Messak libyen, ont permis à quelques auteurs, nonpas de révéler la signification profonde de l’ensemble des œuvres, ce que plus personne ne songe àfaire, mais de lister les connotations probables de plusieurs d’entre elles. Des résultatsencourageants ont été obtenus de cette manière pour certains signes chiromorphes, dont Axel etAnne-Michèle Van Albada ont bien montré qu’elles étaient des schématisations du corps féminin.

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Mais si cette approche du sens des œuvres est forcément limitée, il n’en est pas de même dela perception du rapport entretenu ou non par l’art avec le sacré. En effet, lorsqu’on prend assez derecul, il devient évident qu’existe une grande différence à ce sujet entre figurations anciennes (avant4000 BP) et récentes. Parmi les gravures bubalines, nombre d’images ne visent évidemment pas àreprésenter des scènes de la vie quotidienne, puisqu’on y voit par exemple des êtres géants, à tête delycaon, capables de tirer un rhinocéros d’une seule main, ou de marcher à grands pas tout enportant, sans effort apparent, un aurochs sur les épaules ou un rhinocéros sous le bras. De tellesimages, illustrant les exploits de héros ou de divinités tenant autant de l’homme que de l’animal,correspondent évidemment à des récits mythiques à jamais disparus, mais dont certains épisodespeuvent être en partie retrouvés par ces illustrations. D’autres scènes présentent un caractère rituelqui transparaît au travers de nombreux détails, notamment par la représentation de danses et depersonnages portant des masques animaux, surtout d’âne, de bovidés, de rhinocéros et d’éléphant.

Mais parmi les ensembles bubalins actuellement inventoriés, figure aussi une grandequantité d’images dans lesquelles nous ne pouvons reconnaître que de simples représentationsanimalières. Qu’au sein de la société des artistes préhistoriques, elles aient été ou non le supportd’un symbolisme particulier, c’est une autre question, à laquelle il est actuellement impossible derépondre. Toujours est-il que la liste des espèces représentées sur les parois ne correspondaucunement à un reflet fidèle de la faune de l’époque, et encore moins de l’ensemble du milieunaturel environnant (par exemple, plantes et insectes sont pratiquement absents du répertoiregraphique). L’essentiel de l’art bubalin correspond donc à un immense bestiaire imagé, où certainesespèces ont été favorisées au détriment d’autres pour des raisons qui nous échappent, tout entémoignant de l’existence des puissants filtres culturels qui présidèrent à l’élaboration desdispositifs.

Le fonctionnement de tels filtres est encore plus net dans le monde des peintures dites des« Têtes Rondes », où l’on serait bien en peine de rien reconnaître de ce qui pourrait ressembler àune scène de la vie quotidienne. Tout n’est que personnages étrangement étirés ou paraisant flotterhorizontalement dans les airs, « martiens » géants munis d’excroissances non anatomiques,« orantes » aux têtes circulaires couvertes de motifs géométriques, animaux à longues patteslinéaires, ou motifs circulaires abstraits que, faute de mieux, on a baptisés « méduses » et« verseaux ». Presque tout dans cet art demeure absolument opaque à nos yeux et, pour expliquerl’atmosphère d’étrangeté qui s’en dégage, on a parfois supposé l’influence de substancespsychotropes tirées de certaines convolvulacées sahariennes (Ipomaea purpuera, Turbinacorymbosa).

Aucune école de gravure ne rappelle l’atmosphère mystérieuse des peintures des « TêtesRondes » dans leur ensemble, mais plusieurs analogies notables se retrouvent par contre entregravures et peintures pastorales. Dans ces deux groupes en effet, on connaît – au Tassili et en Libye– des représentations de femmes se déplaçant montées sur des bovins, ou des scènes montrant la viepaisible d’un campement de pasteurs. Mais cela n’empêche pas la présence de figures énigmatiquesqui devaient se référer à des conceptions symboliques ou religieuses désormais perdues.

Ainsi, les arts peints et gravés des périodes anciennes sont toujours emprunts de religiosité,bien qu’à des degrés divers selon les écoles. Le contraste est alors total avec les périodes plusrécentes, celles dites « cameline » et « caballine », où prédominent les représentations de guerriersen pied, munis de leur armement, et régulièrement montrés en action de chasse ou de combat.L’apparition du métal et du bouclier, l’exaltation des armes et la représentation magnifiéed’individus stéréotypés témoignent d’un autre monde, qui n’a plus grand chose en commun aveccelui que présentent les images anciennes. Certes, il est possible que ces représentations aient étéinvesties d’une symbolique particulière, et l’on sait que des armes comme les poignards, parexemple, sont souvent riches de connotations cosmogoniques chez les populations qui lesemploient. Mais, sur les ensembles rupestres, on ne trouve aucun indice de religiosité. Surtout, lecontraste est si net entre la richesse imaginaire ou la liberté graphique des œuvres anciennes d’une

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part, et le caractère statique ou la monotonie des productions récentes de l’autre, que cette oppositiondoit bien correspondre à quelque chose comme une sorte de « laïcisation » de l’art. Ou à tout lemoins, à des modifications consécutives à l’arrivée des premières populations méditerranéennes,porteuses d’une idéologie en rupture avec le fonds de croyance des anciennes populationssahariennes.

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