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1 Un Peuple - Un But - Une Foi --------- MINISTERE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES --------- CENTRE D’ETUDES DE POLITIQUES POUR LE DEVELOPPEMENT- CEPOD RAPPORT DE STAGE Le TCER : UN INDICATEUR SYNTHETIQUE DE COMPÉTITIVITÉ AU SÉNÉGAL Sous la Direction de M. Aliou FAYE Présenté par Henriette FAYE Directeur du CEPOD

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1

Un Peuple - Un But - Une Foi

---------

MINISTERE DE L’ECONOMIE

ET DES FINANCES

---------

CENTRE D’ETUDES DE POLITIQUES

POUR LE DEVELOPPEMENT- CEPOD

RAPPORT DE STAGE

Le TCER : UN INDICATEUR SYNTHETIQUE

DE COMPÉTITIVITÉ AU SÉNÉGAL

Sous la Direction de M. Aliou FAYE Présenté par Henriette FAYE

Directeur du CEPOD

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SOMMAIRE

Bibliographie ---------------------------------------------------------------------------------3

Cigles et abréviations -----------------------------------------------------------------------5

Introduction ----------------------------------------------------------------------------------7

Section I : Les notions de compétitivité et de TCER ---------------------------------9

I-1 La notion de compétitivité -------------------------------------------------------------13

a- La compétitivité prix ------------------------------------------------------------------------------------16

b- La compétitivité structurelle ----------------------------------------------------------------------------16

I-2 Le TCER ---------------------------------------------------------------------------------18

a- Les différent types de taux de change -----------------------------------------------------------------19

b- La parité du pouvoir d’achat ----------------------------------------------------------------------------26

Section II : Les performances et les limites du TCER comme indicateur de

compétitivité au Sénégal -----------------------------------------------------------------29

II-1 L’évolution de la Compétitivité au Sénégal ----------------------------------------30

a- L’évolution de la compétitivité prix -------------------------------------------------------------------30

b- L’évolution de la compétitivité structurelle ----------------------------------------------------------37

c- L’Application économétrique -------------------------------------------------------------------------41

II-2 La pertinence de d’autres indicateurs de compétitivité ---------------------------46

a- La part de marché ----------------------------------------------------------------------------------------46

b- La vulnérabilité économique----------------------------------------------------------------------------47

c- L’indicateur synthétique de compétitivité du Luxembourg ----------------------------------------48

Recommandation --------------------------------------------------------------------------50

Conclusion ----------------------------------------------------------------------------------53

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Bibliographie :

◘ Didier BOROWSKI, Cécile COUHARDE et Florence THIBAULT :

Sensibilités des taux de change d’équilibre aux outputs gaps et aux cibles de la balance courante.

Méthodologie et estimation pour les grands pays industrialisés

◘ Xavier SALA-I-MARTIN, Jennifer BLANKE, Margarita Drzeniek HANOUZ, Thierry

GEIGER, Irène MIA FIONA PAUA The Global Competitiveness Index : Measuring the

Productive Potential of Nations.

◘ Le Commerce extérieur du Sénégal en 2005 une fiche de synthèse de Missions Economiques.

◘ Mireille Linjouom. Eurisco Université Paris-Dauphine : L’impact du taux de change réel sur la

politique de change du Cameroun.

◘ Le taux de change réel d’équilibre : une introduction d’Hervé JOLY, Céline PRIGENT,

Nicolas SOBCZAK

◘ Laurent BLEY, Guy SCHULLER (STATEC) : Les indicateurs synthétiques de compétitivité

1995-2005.

◘ Benjamin Carton, Karine Hervé et Nadia Terfous (Document de travail de la DGTPE)

Méthode d’estimation des taux de change d’équilibre fondamentaux dans un modèle de

commerce bouclé.

◘ Amina Lahrèche-Revil : Les régimes de change

◘ Beiling Yan : Parité de pouvoir d’achat : Le cas du Canada et des États-Unis.

◘ Abdoulaye DIAGNE (CREA) François Joseph CABRAL (CREA) Ben Omar NDIAYE

(CREA) Mamadou DANSOKHO (CREA) Ndioba DIENE (DAPS) Malick SANE (CREA)

Reformes commerciales, réponse de le l’offre agricole et sécurité alimentaire au Sénégal.

◘ Les déterminants de la compétitivité internationale du secteur manufacturier tunisien : un

modèle de CHAKROUN Mohamed

◘ MAIH BAHOYA II Junior : Taux de change et performance des économies africaines de la

zone franc. Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme

d'Etudes Approfondies (D.E.A.) en Sciences Economiques Option : Macro-économie.

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◘ Martine Durand et Claude Giorno : Les indicateurs de compétitivité internationale : aspects

conceptuels et évaluation.

◘ Donald G. Mc Fetridge : La compétitivité : notions et mesures. Département d'économique,

Université Carleton Document hors-série no 5 Avril 1995

◘ Hélène Djoufelkit : Rapport thématique Jumbo : Evolution des TCER de la zone franc : 1993-

2008 avril 2007.

◘ Fonds monétaire international Washington, DC Octobre 1997 : Série des études économiques

et financières. Perspectives de l’économie mondiale Chapitre IV : Régimes de change et résultats

économiques des pays en développement

◘ Thèses : Compétitivité de l’économie sénégalaise de Adama DIEYE, Etude de la compétitivité

du Mali de Dramane LASSANA et Le commerce extérieur de Lamine SAGNA.

◘ Autres documents du FMI :

- Compétitivité et ouverture internationale : un survol de la question de Sven Michal et

Chantal Moser

- Competitiveness in the CFA Franc Zone de Gustavo Ramirez et Charalambos G.

Tsangarides

- Rapport du FMI N° 08/221 de juillet 2008 :

- Taux de change et données fondamentales de l’économie Un cadre d’analyse Peter

Clark, Leonardo Bartolini, Tamim Bayoumi et Steven Symanski “La mondialisation :

faut-il s'en réjouir ou la redouter ? Préparé par les services du FMI”

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Cigles et abréviations

APE : Accords de Partenariat Economique

APIX : Agence pour la Promotion des Investissements

ASPEX : Agence Sénégalaise de Promotion des Exportations

BCI : Business Competitiveness Index

CREA : Centre de Recherches Economiques Appliquées

CSU : Coût Salarial Unitaire

DPEE : Direction de la Prévision et des Etudes Economiques

DSRP : Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

FEER: Fundamental Equilibrium Exchange Rate

FMI : Fond Monétaire International

GCI : Global Competitiveness Index

IDE : Investissement Direct à l’Etranger

IPC : Indice des Prix à la Consommation

OCDE : Organisation de Coopération et de Développent Economique

PIB : Produit Intérieur Brut

PME : Petites et Moyennes Entreprises

PPA : Parité du Pouvoir d’Achat

PTE : Pays Pauvres très Endettés

SCA : Stratégie de la Croissance Accélérée

SFI : Société financière Internationale

TCER : Taux de Change Effectif Réel

TCR : Taux de Change Réel

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africain

USA: United States of America

USD: Dollar United States (Dollar américains)

WEF : World Economic Forum

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Abstract

Competitiveness is a complex concept that depends on many factors and is difficult to measure.

Indeed, there is no perfect and/or unique measure of competitiveness. Indicators of

competitiveness are very numerous: the market share, the margin rate, the real effective exchange

rate, productivity, product image and so on. But increasingly, we tend to understand the

competitiveness and attractiveness from socio-economic variables and to rise by successive

aggregations to a composite indicator. In the case of Senegal, to assess competitiveness,

practitioners often use the Real Effective Exchange Rate (REER). The DPEE publishes a

monthly series on the REER as a synthetic indicator of competitiveness. However, the magnitude

of the devaluation of the CFA franc in 1994, the maintain the structural deficit of trade balance,

from independence to nowadays, enhance the debate on the relevance of the REER as a tool for

assessing competitiveness. The REER does not give guidance on the structural nature of

competitiveness as it appears, as an element of appreciation very decisive.

The main objective of this study is to assess the strengths and weaknesses of the REER as a

synthetic indicator of competitiveness in Senegal, but we also want to see the relevance of other

indicators, taking into account the availability and reliability of statistical data.

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Introduction

Avec la mondialisation et les APE, le débat sur l’ouverture complète des frontières a gagné en

intensité au Sénégal et dans la plupart des autres pays africains. Ces derniers sont en effet de plus

en plus une cible pour les produits des économies émergentes, surtout asiatiques. Cependant,

dans le cas du Sénégal, il faudra plus d’efforts pour que cette intégration ou ouverture à

l’économie mondiale soit réussie. L’économie sénégalaise a par conséquent besoin d’apprécier

ses performances vis-à-vis de tous ses concurrents ou partenaires.

La mesure de la compétitivité est d’actualité dans plusieurs pays. On note plusieurs indicateurs de

compétitivité : la part de marché, le taux de marge, le taux de change effectif réel, la productivité,

l’image des produits etc. Plus récemment, on a tendance à appréhender la compétitivité et

l’attractivité à partir de variables socioéconomiques et à remonter par agrégations successives

vers un indicateur composite. Les observatoires de la compétitivité ainsi mis en place s’appuient,

dans une grande mesure, sur le cadre d’analyse proposé par Michel Portir, Professeur à

l’université Harward de Cambridge, Etats-Unis.

Dans le cas du Sénégal, pour apprécier la compétitivité1, les praticiens utilisent souvent le Taux

de Change Effectif Réel (TCER). La DPEE publie une série mensuelle sur le TCER comme

indicateur synthétique de compétitivité. Mais, face à la remise en cause de plus en plus de sa

pertinence comme indicateur synthétique de compétitivité, on assiste à la prise en compte

d’autres indicateurs composites ou de séries d’indicateurs dont l’IDE, la part de marché, le taux

de marge, etc. Par ailleurs, cette dernière décennie, les critiques faites sur cette fonction du TCER

se sont multipliées. Des études telles que : Cushman (1993), Sekkat et Varoudakis (1998), se sont

intéressées au TCER et à ses méthodes de détermination pour mieux apprécier son véritable rôle

dans l’économie des pays.

Au Sénégal, vu l’ampleur de la dévaluation du FCFA de 1994, le maintient du déficit structurel

du solde commercial, des indépendances à nos jours, renforce ce débat sur la pertinence du TCER

comme outil d’évaluation de la compétitivité. En outre, du fait de la vulnérabilité de l’économie

sénégalaise aux chocs externes, les possibilités de maîtrise d’une croissance durable de l’offre et

1 Dans la pratique la notion de « compétitivité » fait référence à la compétitivité prix.

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du coût de la vie sont très réduites. La compétitivité structurelle apparaît, dès lors, comme un

élément d’appréciation plus déterminante que le TCER qui ne donne pas d’indications sur la

nature structurelle de la compétitivité.

C’est ainsi que, dans le souci d’une meilleure appréciation de la compétitivité, des pays tel que le

Maroc et le Luxembourg, ont trouvé nécessaire de mettre sur pied un observatoire de suivi de la

compétitivité. La création d’une telle structure au Sénégal, pourrait permettre une connaissance

plus précise de la compétitivité et une bonne maîtrise des jeux du marché en vue de déterminer de

nouvelles orientations et favoriser la réalisation de performances de l’économie nationale.

Ce document porte notamment sur la notion de la compétitivité, son évolution mais également

sur comment l’améliorer dans le cas du Sénégal. L’objectif principal de cette étude est

d’apprécier les forces et les faiblesses du TCER comme indicateur synthétique de compétitivité

au Sénégal ; mais, nous voulons également de voir la pertinence d’autres indicateurs tout en

tenant compte de la disponibilité et de la fiabilité des données statistiques.

La première section du document est consacrée à la présentation du concept de compétitivité et à

son évolution au Sénégal (et compétitivité structurelle). Dans le souci de mieux apprécier et

d’améliorer la compétitivité, la seconde section montre la pertinence d’autres indicateurs et de

recommandations.

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SECTION I : LES NOTIONS DE COMPETITIVITE ET DE TCER

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Depuis plus d’une décennie, le Sénégal présente des atouts assez remarquables dans le continent

africain tels que la stabilité politique, la visibilité démocratique, la réduction de l’endettement

avec l'initiative pour les pays pauvres très endettés (PTE), le respect des grands équilibres

(inflation annuelle comprise entre 0 et 2%), (déficit budgétaire contenu de 1 à 2% du PIB) etc.

Le taux de croissance en termes atteint 5,9% en 2004 et 5,6% en 2005. On note également que le

PIB atteint désormais 7,6 Milliards de Dollars, soit plus de 700 USD par habitant. Les secteurs de

la pêche, du tourisme, de l’agriculture… sont très dynamiques dans l’économie sénégalaise et

s’ils ne sont pas compétitifs, ils pourraient l’être si les réformes appropriées étaient prises.

Graphique 1 :

Situation du Sénégal comparée à d'autres pays

africains

0

20

40

60

80

100

120

140

Condition de base

Institutio

ns

Infrastru

ctures

Stabilité m

acroéconomique

Santé et é

ducation prim

aire

Atouts d’effi

cience

Aptitude te

chnologique

Modernité

de l’entre

prise

Innovation

Bénin Sénégal Afrique du Sud Kenya Nigéria

Sources : Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD)

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Graphique 2 : Evolution du PIB du Sénégal de 1965 à 2006

Evolution du PIB de 1965 à 2006

0

1000

2000

3000

4000

5000

6000

1965

1967

1969

1971

1973

1975

1977

1979

1981

1983

1985

1987

1989

1991

1993

1995

1997

1999

2001

2003

2005

PIB ( milliards de fcfa)

Sources : Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD)

Tableau 1 : PIB réel, total et par habitant ; taux annuels moyens de croissance (En pourcentage)

PIB réel en dollars de 2006 PIB réel par habitant

Pays 1980

-

1990

1990

-

2000

2000

-

2006

2003 2004 2005 2006 1980

-

1990

1990

-

2000

2000

-

2006

2003 2004 2005 2006

Bénin 3,3 4,6 3,9 3,9 3,1 2,9 3,6 -0,1 1,2 0,6 0,5 -0,2 -0,4 0,4

Burkina

Faso

2,5 5,4 6,3 7,9 6,6 5,9 5,9 -0,1 2,4 2,9 4,5 3,2 2,6 2,7

Guinée

Bissau

4,3 1,1 0,4 0,6 2,2 3,5 4,6 1,8 -1,9 -2,6 -2,5 -0,9 0,4 1,5

Mali 3,8 4,7 5,7 7,6 2,3 6,1 4,6 1,4 2 2,6 4,4 -0,8 3 1,5

Niger -0,1 2,9 4 3,8 -0,6 7,1 3,5 -3,1 -0,7 0,5 0,2 -4 3,4 0

Sénégal 3,1 3,6 4,6 6,7 5,6 5,5 4 0,1 0,9 1,9 3,9 2,9 2,8 1,4

Togo 1,8 1,4 2,4 1,9 3 0,8 4,2 -1,8 -1,7 -0,5 -0,9 0,2 -1,9 1,4

Source : Rapport 2008 sur Les Pays les Moins Avancés (PMA), CNUCED

Le PIB réel du Sénégal connaît une évolution assez régulière dans la période de 1980 à 2005

contrairement au pays. Cependant, on note une baisse pour les années 2005 et 2006. L’évolution

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du PIB réel par habitant est aussi régulière jusqu’en 2003. À partir de on note une tendance

baissière jusqu’en 2006.

Graphique 3 : Evolution du PIB/Tête au Sénégal de 1965 à 2006

Evolution du du PIB/tête de 1965 à 2006

0

50000

100000

150000

200000

250000

300000

350000

400000

1965

1967

1969

1971

1973

1975

1977

1979

1981

1983

1985

1987

1989

1991

1993

1995

1997

1999

2001

2003

2005

PIB ( milliards de fcfa) PIB par tête (milliards de fcfa)

Sources : Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD)

Graphique 4 : Evolution et Prévision du ratio et du service de la dette au Sénégal

Evolution et prévision du ratio et du service de la dette

0

10

20

30

40

50

60

70

80

1997 1998 1999 2000 2005 2010 2017 1997-

2006

2007-

2017

Debt-GDP ratio (in percent) Debt service ratio (in percent)

Sources : Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD)

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En 2006, on a une régression du taux de croissance (2.3%) du fait de plusieurs contre-

performances. Les produits sénégalaise subissent la concurrence étrangère au niveau national et

s’imposent difficilement à l’extérieur. La question est de voir le niveau de compétitivité du

Sénégal vis-à-vis des autres pays de l’UEMOA, des pays en développement ou des pays

industriels. Dans le cas présent, on parle de gains de compétitivité pour définir une relance des

activités économiques nationales, des exportations. Mais, la définition de la compétitivité est une

notion assez complexe.

I-1 La notion de compétitivité :

Il n’est pas très aisé de définir le concept de compétitivité surtout lorsqu’il s’applique à

l’économie d’une nation. En fait, la notion a d’abord été utilisée au niveau microéconomique de

l’entreprise. Son application à une économie, à un pays donné, a soulevé plusieurs controverses

dans la littérature économique. Des économistes tels que l’américain P. Krugman trouvent qu’il

n’y a pas analogie entre entreprise et pays dans ce domaine. Il distingue ainsi la compétitivité

d’une entreprise de celle d’un pays, d’une économie. Dans le cadre de notre analyse, nous nous

intéressons à cette dernière. La DPEE qui lui consacre un chapitre dans sa revue trimestrielle de

la situation économique, l’appréhende à travers l’évolution du TCER.

Rattachée aux échanges extérieurs, la compétitivité se détermine par la capacité du pays à

conquérir des parts de marché important surtout sur le plan international. Dans ce cas, elle fait

référence à l’importance des exportations en déterminant l’agressivité des produits nationaux sur

le marché international. On parle alors de compétitivité à l’exportation. Les pays en

développement comme le Sénégal, ont d’énormes difficultés pour développer ce type

compétitivité du fait des exigences internationales notamment sur la qualité, la quantité, les délais

de livraison, etc. La compétitivité peut être également appréciée en considérant les importations.

En effet, la limitation de celles-ci (pour avoir un excédent commercial) réduit la dépendance vis-

à-vis de l’extérieur. Les pays en développement devraient plus s’intéresser à cette compétitivité

puisqu’ils sont des « price taker » et qu’ils intègrent difficilement le marché international. Mais,

ces pays n’ont pas le choix comme le montre CHAKROUN dans une étude du cas spécifique de

la Tunisie (Les déterminants de la compétitivité internationale du secteur manufacturier

Tunisien : un modèle). Toujours en quête de dispositifs et de politiques pour remédier à leur

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14

déséquilibre macroéconomique structurel, ils doivent plutôt ouvrir leurs économies aux firmes

multinationales. Ils pourront ainsi s’approprier les nouvelles technologies indispensables pour

assurer la compétitivité des secteurs exportateurs et placer leur économie sur les sentiers d’une

croissance durable. Toutefois, cette ouverture sur le reste du monde expose l’économie aux aléas

et chocs extérieurs.

On parle également de compétitivité ex-post ou ex-ante lorsqu’elle est appréciée en termes de

résultats, de performances ou de stratégie. Et si on considère un horizon temporel, la

compétitivité pourrait se résumer à la capacité à soutenir la concurrence tout en relevant de façon

continue les niveaux de vie des populations. Dans un sens courant, la concurrence s'apparente à

une compétition voire à une confrontation. Economiquement, elle désigne une structure de

marché où vendeurs et acheteurs sont suffisamment nombreux pour qu'aucun d'eux ne puisse

exercer une influence sur les prix, seuls les mécanismes du marché « la main invisible du marché,

très à la mode pendant les années 90 » déterminent l'équilibre qui s'impose à tous. D’après les

économistes libéraux, on parle de concurrence pure et parfaite pour certaines conditions. On a les

hypothèses suivantes :

* atomicité : acheteurs et vendeurs nombreux au point de ne pas pouvoir influencer les prix ;

* homogénéité : les produits échangés sont identiques et substituables ;

* Accès libre au marché est parfaite ;

* transparence : l'information des agents économiques est totale ;

* Mobilité des facteurs de production : le travail comme le capital doivent pouvoir s'orienter vers

la meilleure rémunération.

Ricardo en prolongeant les travaux de Smith, parle plutôt comparatifs. Un pays possède un

avantage comparatif dans la production d’un bien s’il possède les meilleures capacités de

production sur le produit donné. Dans un contexte de libre échange, ce pays gagnerait plus à se

spécialiser dans la production et l’exportation de ce produit. Cependant, Ricardo trouve que cet

avantage est comme le résultat d’une différence technologique qui se traduit en général par des

écarts de productivité du travail ou, par des différences de dotations en facteurs de production.

Cet écart technologique se justifierait alors par la détention de la nation d’avantages naturels et

artificiels. Mais, Ricardo considère aussi la technologie comme une variable exogène au système

économique et par conséquent, elle s’impose au pays et celui-ci n’a aucun moyen d’agir sur elle.

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15

Krugman, (« competitiveness : A dangerous obsession » Foreign Affairs, mars/avril 1994) définit

le concept comme la notion poétique pour exprimer la productivité d’un pays. La productivité

serait un vecteur de croissance, en même temps un déterminant de la compétitivité. Par

conséquent, il en déduit qu’à long terme, l’indicateur idéal de compétitivité serait l’évolution de

la productivité globale des facteurs. Il avance, par ailleurs, que penser et parler de compétitivité

d’une nation c’est prendre trois risques dont le plus grave serait : les conflits au niveau du

commerce international que pourrait entrainer une obsession de la compétitivité. Krugman met

ainsi en garde contre l’obsession de la compétitivité qui peut détériorer les relations

internationales et affecter de façon subtile ou indirecte la qualité des débats économiques ou les

décisions de politiques économiques.

Pour parler de la compétitivité, Tyson, Dans « who’s bashing whom : trade conflict in high

technology industries » (1992), s’intéresse au bien être des populations des différentes économies

qui se livre à un libre échange. Elle définit la compétitivité comme étant la capacité à produire

des biens et services qui passent le test de la compétition internationale pendant que les citoyens

jouissent d’un niveau de vie qui est à la fois en progression et durable. Cette définition lie sans

détours la compétitivité au bien être des populations. Elle impose ainsi aux pays en

développement la nécessité d’être productifs dans les activités à forte valeur ajoutée sur le

marché international. Ce qui n’est pas sans difficultés pour les pays en développement et pour le

Sénégal en particulier.

Au niveau de l’OCDE, la compétitivité est définie par la capacité d’une entreprise, d’une

industrie, d’une nation ou d’un ensemble supranational à générer des revenus réels croissants et

durables tout en restant exposé à la concurrence au niveau interne. En se référent au Word

Economic Forum (WEF), la compétitivité est la richesse du pays en termes de PIB par habitant,

c’est sa croissance. Cette définition met en évidence la nécessité pour un pays de savoir produire

et de pouvoir faire face à la concurrence au niveau national et international.

Dans le cadre théorique, on distingue deux types de compétitivité :

- la compétitivité prix

- la compétitivité structurelle (hors prix)

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a- La compétitivité prix

La consiste pour un pays à maintenir un avantage de coût par rapport aux produits étrangers.

C'est-à-dire, les prix auxquels il propose ses produits sur le marché doivent être inférieurs à ceux

de ses concurrents. La compétitivité prix explique l’évolution des parts de marché.

On distingue :

• La à l’exportation mesurée par le rapport entre l’indice des prix à l’exportation des

principaux concurrents et l’indice des prix à l’exportation du pays ;

• La à l’importation sur le marché domestique qui est le rapport entre l’indice des prix à

l’importation d’un produit et l’indice des prix à la production du même produit.

Trois principaux éléments déterminent la compétitivité prix : les coûts de production, le taux de

change et le comportement de marge des entreprises. La marge est un pourcentage de bénéfice

sur le prix de vente. Elle est un élément déterminant de la des entreprises qui en tiennent compte

pour définir leur prix. On parle de prix majoré respectivement minoré, lorsque, ce pourcentage

augmente ou respectivement diminue. Les coûts de production et le comportement de marge

influent directement sur la compétitivité des entreprises. Les coûts de production sont fonctions

des coûts salariaux, des prix des consommations intermédiaires, de la productivité des facteurs et

des économies d’échelle.

b- La compétitivité structurelle

Alors que la compétitivité prix est de l'ordre du court terme, la compétitivité hors prix

(structurelle) se joue sur le long terme. Elle peut se résumer par le savoir-faire d’un pays pour

imposer ses produits sur le marché indépendamment de leur prix. C’est à dire, en exploitant les

critères tels que : la qualité des produits, la capacité d’adaptation suivant les revenus, les goûts, le

niveau de la technologie, etc.

Certains pays développés, l’Allemagne par exemple, ont développé ce type de compétitivité pour

faire face à la concurrence étrangère notamment celle des pays en développement ou des pays

émergents, (les pays asiatiques la Chine surtout) qui sont très compétitifs en qualité de prix.

Malgré le niveau élevé des prix, les produits de ces pays assurent de bonnes parts de marché.

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Plusieurs facteurs déterminent la compétitivité structurelle. On peut citer :

- le savoir faire : organisation du travail et de la production pour une bonne adaptation à la

demande ;

- l’investissement en termes d’équipement, de formation, de logiciels, de recherche… ;

- l’innovation et le progrès technique ;

- le cadre réglementaire et juridique ;

- les politiques économiques appliquées : une politique entraînant la détérioration de la

obligerait les entreprises à développer la compétitivité hors prix.

Depuis quelques années, le Sénégal essaie de développer sa compétitivité structurelle à travers

ses programmes de mise à niveau des entreprises, de promotion des investissements et autres.

Cependant, quelques efforts restent encore à faire.

Le concept de compétitivité s’éloigne ainsi, pour plusieurs définitions de l’orientation

étymologique du mot (cum petere) qui signifie : rechercher ensemble. Mais quelle que soit la

définition que l’on retient, la notion de compétitivité prend toujours en compte le triptyque

qualité, coût et produit permettant d’apprécier le commerce extérieur du pays considéré. C'est-à-

dire, sa capacité à mieux produire (avantage comparatif et parts de marché) et son savoir à mieux

commercer avec ses différents concurrents (marges commerciales). Cette vision se résume dans

la capacité à faire face à la concurrence étrangère au niveau national comme international.

Quelle que soit la définition retenue, les pays en développement, notamment africains, doivent

chercher à mieux améliorer leur compétitivité pour être de véritables acteurs de la mondialisation.

Pour cela, il faut un bon suivi de celle-ci pour mettre en évidence les capacités et performances

du pays est nécessaire et il permettrait aussi de déceler les faiblisses de l’économie et les

initiatives à entreprendre pour voir comment y remédier. Mais, comme déjà souligné, ce suivi de

la compétitivité d’un pays n’est pas une chose aisée et toute sa difficulté repose sur la complexité

de définition qui lui est attribuée.

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I-2 Le TCER : un indicateur synthétique de la compétitivité au Sénégal

La compétitivité est généralement définie selon un contexte prédéfini et les indicateurs

qui permettent de l’apprécier sont en fonction de la définition retenue. En général, les indicateurs

pris pour mesurer la compétitivité dépendent des faits mis en évidence dans la définition retenue.

Par ailleurs, cette mesure prend toujours en compte des facteurs qualitatifs et quantitatifs dont le

suivi est assez difficile, nécessitant une vraie maîtrise de l’information acquise. Parmi ceux-ci, on

a principalement : la productivité, les coûts de production, la qualité ou marque des produits,

TCER, les parts de marché, les marges commerciales, la capacité d’innovation et de technologie à

mettre en œuvres pour produire les biens, etc. L’évolution des termes de l’échange est aussi un

facteur non négligeable.

La comparaison internationale de la mesure de la compétitivité nécessite souvent la conversion

dans une monnaie de référence commune, généralement le dollar américain. La compétitivité

ainsi représentée peut être mesurée par le taux de change effectif réel à condition que la

productivité globale reste inchangée. Cependant, pour certaines études, le TCER est un indicateur

synthétique de compétitivité alors que pour d’autres, la liaison n’est qu’apparente ; il n’existe pas

de véritable relation de causalité entre TCER et Compétitivité. Par conséquent, celui-ci ne saurait

être un bon indicateur. En plus, c’est un indicateur ex-post, qui ne permet pas de comprendre les

déterminants de la compétitivité (productivité, institutions, etc.). Aujourd’hui, on assiste de plus

en plus au développement d’études qui remettent en cause cette fonction du TCER.

Néanmoins, le TCER est beaucoup utilisé comme indicateur synthétique de compétitivité. C’est

aussi un important instrument de politiques économiques qui intervient dans les échanges avec

l'extérieur en permettant de tirer profit du commerce international et des flux de capitaux. Il est

également un biais de transmission des chocs externes sur l’économie nationale. Le TCER

combine les taux de change nominaux bilatéraux et les indices de prix et constitue une moyenne

pondérée des taux de change réels avec les principaux pays partenaires.

On a aussi le taux de change réel (TCR) interne qui est une indicateur de compétitivité interne

jugé plus approprié que celle du TCR externe pour les pays en développement. Le TCR externe

met en évidence la capacité de produire des biens échangeables plutôt que des biens non

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échangeables. Cependant, sa mesure pose problème parce que les statistiques nécessaires à son

calcul ne sont pas disponibles. Son utilisation dans ces pays reste alors théorique. On utilise plus

le TCR externe qui un indicateur de compétitivité externe.

Après un bref rappel de quelques définitions, nous verrons les limites et les performances du

TCER avant de réaliser tests économétriques pour justifier sa pertinence.

a- Les différent types de taux de change

On rencontre beaucoup d’expressions avec le terme taux de change au point que pourrait s’y

perdre et confondre les définitions. En effet, la simple expression « taux de change » ou « cours

du change » peut être définie de façon élémentaire comme le prix de la monnaie nationale par

rapport à une monnaie étrangère. Il joue un rôle principal dans les règlements internationaux liés

au commerce international.

- TAUX DE CHANGE BILATÉRAL ET TAUX DE CHANGE EFFECTIF

Lorsque l’on considère le prix entre deux monnaies seulement, on parle de « taux de change

bilatéral ». Dans un régime de changes fixes, la banque centrale s’engage à défendre le taux de

change officiel. Le taux de change effectif est la moyenne des taux bilatéraux pondérable par le

poids relatif de chaque pays étranger dans le commerce extérieur du pays. On a aussi le concept

de taux de change réel qui consiste à appliquer aux unités de devises un déflateur obtenu à partir

du niveau général. Le taux de change effectif réel (TCER) combine les taux de change réel

bilatéraux, les indices de prix et constitue une moyenne pondérée des taux de change réels des

partenaires commerciaux du pays. En dernière analyse, la variation du TCER reflète la variation

du niveau des prix du pays considéré par rapport à celui des prix de ses partenaires ou

concurrents commerciaux. Il est ainsi un instrument de suivi des politiques macroéconomiques

dans une stratégie de compétitivité par la question du différentiel d’inflation avec ses partenaires

commerciaux

- TAUX DE CHANGE AU COMPTANT ET TAUX DE CHANGE À TERME

On a un « taux de change au comptant ou spot ou taux de change courant» pour effectuer

des opérations de change au comptant. Sur le long terme, on a un « taux de change à terme »

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entre deux devises quand deux partenaires décident de fixer T0 le taux de change qui sera utilisé

dans leurs transactions ultérieurement (à un temps T1 proche de T0).

Par ailleurs, il ne faut surtout pas confondre le taux de change nominal et le taux de change

théorique ou taux de change PPA qui repose sur la loi du prix unique (les biens identiques sont

censés se vendre au seul et même prix partout). Ce taux ne donne ainsi aucun avantage monétaire

aux pays.

Par exemple : si un panier de bien vaut 102 euros (€) en France et il faut 1000 dollars aux USA

pour avoir le même panier, le taux de change PPA ou théorique est le taux Euro/USD qui est

égale à 102/100 c'est-à-dire 1.02. Ce taux de change théorique est différent du taux de change

nominal entre les deux pays qui était de 1.05 à l’époque.

- TAUX DE CHANGE NOMINAL ET TAUX DE CHANGE RÉEL

Pour prendre en compte cet écart, on calcule le « taux de change réel » qui calcule le prix relatif

de deux paniers de biens, des produits nationaux par rapport aux produits étrangers en monnaie

nationale. C’est le rapport des pouvoirs d’achat entre les deux pays. Ce qui permet donc de dire

que le taux de change réel mesure le pouvoir d’achat externe de la monnaie

- TAUX DE CHANGE AU CERTAIN ET TAUX DE CHANGE A L'INCERTAIN

Il ne faut pas aussi perdre de vue le système de cotation sur le marché des changes où on a la

cotation au certain et celle à l’incertain.

Taux de change au certain : nombres d’unités de monnaie étrangère que l’on peut obtenir avec

une unité de monnaie nationale. Exemple : 1 FCFA = 0.001522 dollar.

Taux de change à l’incertain : il exprime le nombre d’unités de monnaie nationale pour avoir

une unité de monnaie étrangère. 1 Euro = 656.9896 FCFA

- TAUX DE CHANGE D’EQUILIBRE :

Le taux de change d’équilibre est le prix relatif des biens échangeables par rapport à celui des

biens non échangeables qui, toutes choses égale par ailleurs, assure simultanément l’équilibre

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interne et l’équilibre externe de l’économie. Il réalise ainsi l'égalité entre offre et demande de

devises et place l’économie sur son sentier de croissance potentielle et non inflationniste.

Plusieurs facteurs affectent son évolution, parmi lesquels on a : les termes de l'échange, les taux

d'intérêts réels, etc. Ils sont appelés les « fondamentaux ». Williamson (1983), dans le calcul de

la situation de « mésalignement » des parités définit la notion de Fundamental Equilibrium

Exchange Rate (FEER).

On a un déséquilibre structurel du taux de change lorsque sa valeur varie par rapport au taux de

change d’équilibre. Lorsque la valeur du TCER est différente de celle du TCRE, on parle de

désalignement. Ainsi, on a une sous évaluation lorsque TCER > à sa valeur d’équilibre et une

surévaluation lorsqu’elle lui est inférieur. Ce qui peut entraîner une perte ou un gain de

compétitivité. Pour l’évaluer, on peut régresser le TCER suivant les fondamentaux.

Graphique 5 : Mésalignement Sénégal

Source : Mésalignement du taux de change, facteur explicatif de la structure des exportations des économies

africaines au sud du Sahara ? Oscar KUIKEU

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Graphique 5 : Mésalignement Côte d’Ivoire

Source : Mésalignement du taux de change, facteur explicatif de la structure des exportations des économies

africaines au sud du Sahara ? Oscar KUIKEU

Une petite analyse de l’évolution du change au Sénégal et en Côte d’Ivoire (membres de la Zone

Franc), met en évidence deux principales sous – périodes : une première avant la dévaluation de

50% du Fcfa par rapport au Franc Français en janvier 1994 et une seconde après 1994. Le

Sénégal et la Côte – d’ivoire affichent une surévaluation marquée de leur taux de change réel par

rapport à leur taux de change d’équilibre entre la période moyenne avant la dévaluation. Après la

dévaluation, le taux de change réel présente une tendance persistante à la surévaluation par

rapport au taux de change d’équilibre pour la Côte d’Ivoire et à une assez bonne gestion pour le

Sénégal.

On distingue deux types de déséquilibres du taux de change :

- le déséquilibre macro-économique lorsque le régime du taux de change officiel et la

politique macro-économique à travers notamment les mesures monétaires écartent le taux de

change effectif réel (TCER) de sa valeur d'équilibre ;

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- le déséquilibre structurel qui s'observe lorsque des variations de facteurs déterminants

fondamentaux du taux de change réel d'équilibre ne se traduisent pas à court terme par des

variations effectives du taux de change réel.

- REGIME DE CHANGE FIXE OU FLEXIBLE

On a en principe deux régimes de change qui présentent chacun des avantages. Mais devant les

limites ou les contraintes qu’imposent ces régimes, certains pays ont adopté les régimes de

change intermédiaires qui sont soit mi- fixes, soit mi-flexibles.

- les régimes de change fixe : on a une parité de référence entre la monnaie du pays

considéré et une devise (ou un panier de devises), à laquelle la banque centrale s'engage à

échanger sa monnaie. Pour le respect de cet engagement, elle intervient sur le marché des

changes, s’il est libéralisé, pour rétablir la parité préétablie du taux de change. Ainsi, elle achète

de la monnaie nationale lorsque celle-ci se déprécie sur le marché des changes, et la vend dans le

cas contraire. Lorsque le marché des changes est contrôlé, la monnaie est inconvertible, la parité

est définie arbitrairement et soutenue artificiellement. Dans ce type de régime, la politique

budgétaire est efficace contrairement à la politique monétaire. Ce régime favorise également la

stabilité et il est anti-inflationniste. Cependant, comme principale inconvénient, il expose

l’économie aux chocs exogènes.

- Par contre, dans un régime de change flexible, il n’y aucun engagement de la banque

centrale. Elle ne contrôle plus le taux de change nominal. Celui-ci flotte librement en fonction de

l'offre et de la demande sur le marché des changes où il est déterminé. Avec ce régime, la

politique monétaire devient efficace contrairement à celle budgétaire. Mais, ce régime expose

l’économie à une forte inflation.

- Les régimes de change fixe comme flexible ont montré leurs preuves mais, leurs limites

sont telles que, on a un troisième type de régime dit intermédiaire. Ces derniers sont soit mi-

fixes, soit mi-flexibles. Un exemple de régime intermédiaire est la parité glissant qui est un

régime de change fixe mais dont la parité est régulièrement pour compenser les écarts avec le

pays d’ancrage. Ce régime autorise l’inflation mais fait preuve d’une meilleure croissance.

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Le choix du régime de change approprié est très important pour les pays en développement

surtout ceux parmi eux qui recherchent sans cesse un environnement économique favorable pour

améliorer leur situation. Il est fonction de la nature et de l’origine des chocs que subis le pays, de

la préférence des autorités publiques et des caractéristiques structurelles de l’économie du pays.

Par conséquent, un mauvais choix pourrait entraîner soit une surévaluation qui relève par

exemple artificiellement le niveau de vie, soit une sous-évaluation de la monnaie nationale qui se

manifeste par des surplus du compte courant ou par un affaiblissement de la consommation des

biens domestiques. En d’autres termes, si le rapport des prix du pays considéré et ceux de ses

partenaires commerciaux varie, le TCER tend à être différent du taux de change officiel en

régime de changes fixes.

Par ailleurs, ce choix expose au respect de certaines contraintes que met en évidence le triangle

d’incompatibilité de Mundell. Il définit trois objectifs visés avec trois contraintes à subir. Un

pays doit renoncer à un objectif pour que les deux autres soient réalisables.

Les objectifs sont situés aux sommets du triangle et sont :

- Autarcie financière ; il est possible de concilier changes fixes et objectifs économiques

internes, si les réserves de change sont suffisantes ;

- Union monétaire ; mobilité parfaite des capitaux et changes fixes interdisent toute

autonomie à la politique monétaire ;

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- Changes flottants ; la mobilité parfaite des capitaux et la flexibilité des taux de change

permettent l'indépendance de la politique économique

Le FMI propose un tableau récapitulatif sur le choix de la flexibilité des taux de change.

Tableau 2 Déterminants du choix d’un régime de change

Caractéristiques de l’économie

Implication pour la flexibilité souhaitée du taux de change

Dimension de l’économie

Plus l’économie est grande, plus un taux flexible se justifie.

Ouverture Plus l’économie est ouverte, moins un taux flexible est attrayant.

Diversification de la production et des

exportations

Plus l’économie est diversifiée, plus un taux flexible est pratique.

Concentration géographique des échanges

Plus la proportion des échanges d’une économie avec un grand pays est forte, plus il est intéressant

de déterminer le taux de change par rapport à la monnaie de ce pays.

Écart entre l’inflation intérieure et de

l’inflation mondiale

Plus l’écart entre l’inflation d’un pays et celle de ses principaux partenaires commerciaux est élevé,

plus il est nécessaire d’ajuster fréquemment le taux de change. (Mais en cas d’inflation

extrêmement élevée, un taux de change fixe peut conduire à une plus grande rigueur économique et

renforcer la crédibilité d’un programme de stabilisation.)

Développement économique et financier

Plus le degré de développement économique et financier est élevé, plus il est pratique

d’appliquer un régime de taux flexible.

Mobilité de la main-d’œuvre

Plus la main-d’œuvre est mobile, lorsque les salaires et les prix sont rigides à la baisse,

moins il est difficile (et coûteux) de s’ajuster à des chocs extérieurs à l’aide d’un taux fixe.

Mobilité du capital

Plus le capital est mobile, plus il est difficile de maintenir un régime de taux fixe mais ajustable.

Chocs nominaux extérieurs

Plus les chocs nominaux extérieurs sont fréquents, plus il est souhaitable d’appliquer un taux

flexible.

Chocs nominaux intérieurs

Plus les chocs nominaux intérieurs sont fréquents, plus il est intéressant d’appliquer un taux fixe.

Chocs réels Plus une économie est vulnérable aux chocs réels, extérieurs ou intérieurs, plus un taux flexible est

avantageux.

Crédibilité des autorités Moins la politique anti-inflationniste des autorités est crédible, plus il est intéressant

d’utiliser un taux fixe comme point d’ancrage nominal.

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Le Sénégal membre de la zone franc maintient un régime de change fixe avec un ancrage du

FCFA d’abord au franc français et maintenant à l’euro. Cet ancrage lui assure la convertibilité du

FCFA en euro mais l’oblige à maintenir le niveau général de ses prix dans un rapport fixe avec

celui de l’Europe en particulier. Cependant, la question du maintient de ce régime est bien en

vigueur dans la zone FCFA.

b- La parité du pouvoir d’achat

Le TCER est un concept théorique pour lequel, on prend en compte deux grandes définitions : la

parité du pouvoir d’achat et la théorie du commerce international ((Edwards, 1988, 1989) ;

Hinkle et Montiel, 1999).

Le principe de parité du pouvoir d’achat a été proposé pour la première fois en 1916 par le

suédois G. CASSEL. Celui-ci souhaitait répondre à la question de savoir le taux sur quel

stabiliser une monnaie fortement touchée par l’inflation. Avec comme hypothèse de départ : sur

le long terme, la valeur d’une monnaie est déterminée par le montant de biens et services qu’elle

permet d’acquérir. C’est une référence pour apprécier le niveau adéquat du taux de change.

Depuis lors, la PPA est utilisée fréquemment dans les modèles théoriques en économie

internationale ou dans le cadre d’applications pratiques.

La PPA peut être absolue ou relative. Lorsqu’elle est absolue, la PPA tend à se confondre à la loi

du prix unique qui défend que les prix des produits (hors taxes et coût de transport) tendent à

s’égaliser partout à travers le monde. En fait, selon la loi du prix unique, le prix d’un bien

échangeable doit être le même partout, une fois converti dans une monnaie commune. Cette

égalité reflète elle-même l’hypothèse d’une concurrence parfaite sur les marchés des biens

échangeables. Quand P est la valeur du bien donné en monnaie domestique et P* la valeur de ce

même bien en monnaie étrangère, la PPA absolue donne :

e P*/P = 1

La PPA stipule qu’en cas de grandes divergences, les agents iront acheter les produits où c’est

moins coûteux pour les revendre ailleurs ; ce qui à long terme ramène l’équilibre. Malgré

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l’ouverture croissante des économies au commerce mondial qui se manifeste par une réduction

continue des barrières protectionnistes, la PPA absolue parait encore utopique. Il est difficile de

satisfaire les conditions de sa vérification pour plusieurs raisons :

i- l’existence des coûts de transport et d’assurance ne peut être négligée, ils doivent être

pris en considération car ils ont des effets directs sur le prix des biens sur le marché

international ;

ii- Les prix des biens à eux seuls ne suffisent pas pour une comparaison au niveau

internationale : les biens n’ont pas partout les mêmes taux de substitution.

Dans les pays en développement, le niveau des prix est très faible par rapport à l’extérieur, la

PPA est jugée indélicate à moins qu’elle soit corrigée par l’effet dit « Balassa ».

La PPA relative quant à elle, pose la question de l'évolution du change nominal et reflète

l'évolution des prix relatifs. Elle n’est plus directement fondée sur la loi du prix unique car les

taux d’inflation sont généralement calculés à partir d’indices de prix nationaux ; autrement dit, les

paniers de référence ne sont plus nécessairement identiques. Ce qui fait que même si la loi du

prix unique est vérifiée pour chaque bien, c’est possible qu’elle ne le soit plus au niveau agrégé

du fait de la pondération des biens dans les deux paniers comme le montre l’effet « Baumol-

Bowen » (voir Froot-Rogoff, 1994).

Ainsi, la PPA relative n’impose plus une proportionnalité entre taux de change et rapport des prix

mais plutôt entre variation du taux de change nominal et variation du différentiel d'inflation. Elle

cherche ainsi à prendre en compte l’existence de coûts de transport, de coûts d’obtention de

l’information et d’obstacles aux échanges et autres qui empêchent l’égalisation stricte des prix

exprimés en monnaie commune. Elle s’écrit de la façon suivante :

La PPA est très souvent interprétée en taux de croissance et donne :

e’ = Inf.−Inf. *

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Où e’ désigne le taux de croissance du taux de change

Inf. (respectivement Inf.*) le taux d’inflation domestique (respectivement étranger).

De ce fait, le taux de change nominal doit évoluer de façon à effacer les écarts d’inflation.

Cette théorie permet de comprendre pourquoi les fluctuations des taux de change réels sont de

faible ampleur ou sont temporaires. Elle permet également de comprendre que les grands

mouvements de taux de change nominaux reflètent surtout les évolutions des prix domestiques et

étrangers. Cependant, pour différentes raisons, elle est souvent remise en cause.

Les limites de la parité du pouvoir d’achat (PPA)

En plus de l’extension de la loi du prix unique, plusieurs autres éléments mettent en évidence les

limites de la PPA. Elle présente plusieurs controverses au point qu’à la fin des années 70, elle fut

catégoriquement rejetée, pour le cours terme, par des études empiriques.2

On peut par exemple retenir deux principales raisons pour lesquelles cette théorie n’est pas

toujours vérifiée. D’abord, tous les biens et les services ne sont pas négociables (ex. : coiffeurs à

Dakar et à Paris) et ensuite, certaines marchandises facilement négociables ne sont pas

parfaitement substituables (ex. : une bière allemande et une américaine).

Le concept théorique même de la PPA est considéré comme étant assez pauvre du fait des

difficultés de validation empirique, et du faible attrait de la PPA. En effet, sa version relative qui

est la plus utilisée ne repose pas directement sur la loi du prix unique qui seule peut être

considérée comme fondée sur un mécanisme d’équilibre. Par ailleurs, pour cette théorie, le

change réel de « référence » est constant et indépendant de tout paramètre technologique, de la

préférence des consommateurs, etc. L’effet Balassa (Balassa, 1964) montre que le problème des

biens non échangeables est aussi une limite à la PPA. A la question de savoir si le régime de taux

de change affecte la performance économique une étude économétrique est réalisée à la deuxième

section.

2 Exemple: “The law of price is flagrantly and systematically violated by empirical data… moreover, these relative

price effects seem to persist for at least several years and cannot be shrugged out as transitory”. Issard (1997, P 942).

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SECTION II

EVOLUTION DE LA COMPETITIVITE AU SENEGAL : LES

PERFORMANCES ET LES LIMITES DU TCER COMME INDICATEUR

SYNTHETIQUE DE COMPETITIVITE

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II-1 L’évolution de la Compétitivité au Sénégal

Pour analyser l’évolution de la compétitivité au Sénégal, nous allons d’abord considérer la

compétitivité prix mesuré par le TCER avant de voir dans un sens plus large la compétitivité

structurelle à travers un lot d’indicateurs. Cette analyse permettra également de comparer

l’économie sénégalaise à celle d’autres pays notamment africains mettant ainsi en exergue ses

atouts mais aussi ses faiblesses.

a- L’évolution de la (mesurée par le TCER)

On peut apprécier la sénégalaise à travers l’évolution du TCER (calculé à partir des prix à la

consommation). En effet, au Sénégal, il est considérée comme un élément clé de l’évaluation de

la compétitivité quelle que soit la définition retenue.

Mais on peut également voir l’évolution du TCER basé sur les coûts unitaires de la main-

d’œuvre. Celui-ci affiche une appréciation très forte, supérieure à 20 % depuis 2001, en raison

certainement de la hausse rapide des coûts de la main-d’œuvre au Sénégal. Par ailleurs, la portée

véritable de l'appréciation du TCER se situe probablement entre le TCER basé sur l'IPC et le

TCER basé sur les coûts unitaires de la main-d’œuvre. Le premier peut sous estimer le coût

croissant des exportations sénégalaises parce que l’IPC comprend en plus du prix des produits

locaux celui de biens finaux importés et le contrôle de certains prix de services publics et de

transports inclus dans l’IPC sous-estime le coût de production au Sénégal. Par contre, le second

peut surestimer l’appréciation du TCER puisque les coûts de la main-d’œuvre ne sont pas les

seuls coûts de production.

D’une part, une appréciation du TCER est traduite comme une perte de compétitivité des produits

sénégalais sur le marché international et, d’autre part, une dépréciation de celui-ci traduit un gain

de compétitivité.

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31

Graphique 5 : Evolution du TCEN et du TCER

60

80

100

120

140

160

180

1980 1985 1990 1995 2000 2005

TCEN TCER

Sources : Données Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD)

Le graphique 1 établit l’évolution du TCER (basé sur l’IPC) et du TCEN sur la période de 1980 à

2005 qui met en évidence deux principales périodes séparées par le creux de la dévaluation en

1994. Nous nous intéressons davantage à la seconde période : de 1994 à 2005.

Si on considère l’évolution du TCER, on remarque qu’il a été globalement stable depuis la

dévaluation de 1994. Mais, il y a une légère appréciation vers les années 2000 qui entraîne

relativement le renchérissement des exportations sénégalaises sur les marchés mondiaux. Cette

appréciation est surtout favorisée par celle de l'euro (monnaie d’ancrage du franc CFA), par la

hausse des prix surtout alimentaires et énergétiques et par le niveau des coûts de production au

Sénégal.

Une analyse plus complète de ce graphique met en évidence une forte réduction de l’écart ente le

TCER et le TCEN suite à la dévaluation du FCFA en 1994 qui a aussi freiné leur appréciation.

Cependant, il convient de remarquer que ce rythme de dépréciation enregistré au lendemain de la

dévaluation ne s’est pas maintenu sur le long terme. Après une période globalement stable de

1995 à 1998, on a une légère appréciation des deux taux. En fin de période, précisément à partir

de 2003, on a un fait nouveau : le TCEN devient supérieur au TCER. Ce fait est surtout notable

parce qu’il a failli se produire en 1993 veille de la dévaluation. Cette supériorité du TCEN

pourrait s’expliquée par l’évolution des indices des prix au niveau national par rapport à

l’extérieur.

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32

Effectivement, l’analyse de l’évolution des IPC (graphique 2) révèle une égalité entre le Sénégal

et les pays partenaires aux mêmes périodes (en 1993, en 2000, en 2004). Et, en fin de période,

l’indice des prix sénégalais devient supérieur à celui des pays partenaires.

Graphique 6 : Evolution des IPC du Sénégal et des IPC des pays partenaire

Sources ANSD

Source : Données de l’Agence Nationale de Statistique et de la Démographie (ANSD)

En considérant les calculs (pour la détermination du TCER) de la DPEE ou du FMI, les résultats

traduisent la même idée : l’amélioration de la compétitivité sénégalaise suite à la dévaluation a

été de courte durée. En effet, l’économie sénégalaise maintient difficilement ces gains de

compétitivité. Ainsi, avec la mise à jour de l’année de base 2000, l’économie sénégalaise a

enregistré 35% comme gains de compétitivité globale au lendemain de la dévaluation. Les pertes

de compétitivité enregistrées par la suite s’établissent au total à 3.1% d’après les calculs de la

DPEE et à 5% d’après ceux du FMI pour la période de 1994 à 2005. En 2006, elles sont estimées

globalement à 3.6%.

Ces résultats sont sensibles au choix de l’année de base. Mais, ils sont convergents pour les

années de base 2000 et 2005. Si on considère l’année de base 2005, les gains de compétitivité

suite à la dévaluation sont évalués à 31.9% et les pertes sur la période 1994-2006 à 1.7%. Ces

pertes de compétitivité sont moindres comparées à d’autres pays de la zone franc.

Par exemple, la compétitivité de l’économie ivoirienne, suite à la dévaluation, a connu une

évolution similaire à celle du Sénégal. Elle enregistré des gains de compétitivité de 38.5% par an

au lendemain de la dévaluation. Mais, les pertes de compétitivité qu’elle a enregistrées dans la

-5,0%

0,0%

5,0%

10,0%

15,0%

20,0%

25,0%

30,0%

35,0%

1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Evolut ion IPC SENEGAL Evolut ion IPC PAYS PARTENAIRES

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33

période de 1995 à 2005, sont énormes contrairement à celles du Sénégal (13.8% en moyenne

contre 3.1% pour le Sénégal). Par ailleurs, le TCER et l’inflation sont plus bas au Sénégal (2.1%

contre 4.1% en Côte d’Ivoire). Au total, l’économie sénégalaise préserve 30.7% des gains en

2006 et la Côte d’Ivoire environ 19.5%.

Résultat du Sénégal en matière d’exportations

La dévaluation du franc CFA en 1994 n'a pas eu un impact durable sur la promotion des

exportations sénégalaises (figure 7 : les exportations de biens et services en % du PIB). Même si

la dévaluation a initialement propulsé les exportations de plus de 10 % du PIB, près de la moitié

de cette hausse s'est dissipée au cours des années suivantes. Actuellement, elles ne dépassent que

de 5 % du PIB leur niveau de 1993, avant la dévaluation.

Graphique 7 : Exportations de biens et services, 1983-2007 (en % du PIB)

On peut ainsi dire qu’au cours des deux dernières décennies, le secteur des exportations

sénégalaises a eu très peu de performances (figure 7). La part du Sénégal dans les exportations

mondiales ne cesse de se désagréger en valeur et en volume. La dévaluation du franc CFA

survenue en 1994 n'a interrompu le processus que brièvement. En termes de volume, la part du

Sénégal dans les exportations mondiales était d'environ 80 points de pourcentage inférieure en

2007 par rapport à 1995.

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34

Graphique 8: Part de marché, 1983-2007

Ceci met en évidence l'effet limité d'un ajustement du taux de change sur la promotion des

exportations, si les obstacles structurels sous-jacents continuent d'entraver l'activité commerciale.

On trouve plusieurs explications à ces pertes de performances de l’économie sénégalaise

notamment les problèmes liés à l’offre qui sont heureusement sont en cours de résolution, la

détérioration des termes de l’échange, la chute des cours des produits de base qui constituent en

grandes les exportations sénégalaises, etc.

Graphique 8 :

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

2000 2001 2002 2003 2004 2005

Evolution de la part des grands produits dans

les exportations sénégalaises; 2000-2005

Produits arachidiers Produits de la Pêche

Produits pétroliers Produits minéraux et chimiques

Coton et tissu en coton Autres produits

Source : Le Commerce extérieur du Sénégal en 2005 une fiche de synthèse de Missions Economiques.

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35

Tableau 3 : Part des exportations de biens et service dans la sous région (2003-2005)

Pays Spécialité dans

les exportations

Agriculture Minéraux Combustibles Produits Manufacturés services

Bénin A 5.1 1.1 0.2 6.5 40.4

Burkina Faso A 74.4 0.8 1.2 8.3 13.9

Gambie S 6.8 0.1 0 3.7 89.3

Guinée MN 4.3 71.8 2 10.8 10.8

Guinée Bissau A 70.2 0.6 7.4 14.2 7.2

Mali MN 32.2 42.7 0.4 5.2 19.1

Mauritanie MN 25.6 56.3 0 1.5 10.8

Niger MN 24.1 44.7 1.2 7.1 22.2

Sénégal MX : A, MN, S 23.9 2.3 13.4 26.6 33.8

Source : Rapport 2008 sur les Pays les Moins Avancés

Note: A: exportateur de produits agricoles, MF: exportateur de produits manufacturés, MN: exportateur de

minéraux, MX: exportateur mixte,

P: exportateur de pétrole, S: exportateur de services.

Ce manque de performance s’explique également par l’appréciation de la monnaie nationale

(FCFA). D’une part, la production de carburant raffiné, qui est une exportation du Sénégal vers

des marchés à forte demande, a pratiquement cessé en 2006-07 à cause des difficultés de la

société pétrolière publique (la SAR). Aujourd’hui, elle a repris et les perspectives de la SAR

s'améliorent. D’autre part, les Industries Chimiques du Sénégal (ICS) ont connu de graves

difficultés financières en 2005-07 et font actuellement l'objet d'un processus de recapitalisation et

de restructuration. La production, qui a chuté au tiers de sa capacité en 2006-07, devrait se

redresser au deuxième semestre de 2008 et atteindre sa capacité en 2010. Ces pertes sont

préoccupantes dans la mesure où elles affectent les secteurs tels que l’agriculture, la pêche et

l’énergie, qui constituent près 40% des exportations qui sont de plus en plus orientées vers les

pays africains.

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36

Tableau 3 : Répartition des principaux partenaires du Sénégal

Principaux clients % des exportations Principaux fournisseurs % des importations

Mali 19.2% France 20.9%

Inde 12.9% Niger 10.4%

France 9.1% Royaume Uni 5.1%

Espagne 5.3% Thaïlande 5%

Brésil 4.5%

Source : Banque Mondiale- World Development Indicators

On note que les exportations sénégalaises sont de plus en plus orientées vers l’Afrique au

détriment de l’Europe qui demeure le principal client. Les graphiques suivant donnent une

répartition de ces exportations sénégalaises vers les zones UEMOA et CEDEAO.

Graphique 9 :

Taux de croissance des exportations vers les pays de

l'UEMOA

30,6

66,6

137,7

19,3

10,19,2

32,9

Mali Burkina Faso Niger Guinée Bissau Côte d'Ivoire Togo Bénin

Source : Le Commerce extérieur du Sénégal en 2005 une fiche de synthèse de Missions Economiques.

Cette analyse de la compétitivité est loin d’être complète et il faudrait prendre en compte les

données structurelles.

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37

b- L’évolution de la compétitivité structurelle

En effet, pour une analyse plus exhaustive de la compétitivité, il est nécessaire de prendre en

compte l’ensemble de ses déterminants structurels. Un pareil suivi de la compétitivité permet une

véritable comparaison entre l’économie sénégalaise et celle de ses partenaires ou concurrents. Ce

qui met en évidence les défaillances de l’économie et les secteurs ou produits à promouvoir. Ceci

peut être d’un grand apport pour les autorités publiques comme outil d’aide aux prises de

décisions et pour l’adoption de mesures de développement appropriées ou efficaces.

A cet effet, des structures telles que le « Wold Economic Forum » (WEF) propose des indices

composites. Par exemple, le Global Competitiveness Index (GCI) affiné à la lumière de tests et de

feed-back d'experts. Cet indice prend en compte plus d’une centaine d’indicateurs regroupés en

différents piliers permettant d’évaluer les conditions économiques des pays quelque soit leur

stade de développement. Ils sont considérés comme des moteurs essentiels de la productivité et

de la compétitivité. Pour compléter le GCI, le WEF étudie également un autre indicateur

comprenant le Business Competitiveness Index (BCI). Ce dernier (BCI) met en évidence les

aspects micro-économiques de la compétitivité des pays contrairement au GCI qui est considéré

pour le niveau macroéconomique. Ainsi, pour l’année 2007-2008, le WEF classe 131 pays

suivant leur degré de compétitivité. Le tableau suivant donne le classement de quelques pays

(2007/2008) et la comparaison par rapport au classement de 2006/2007.

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38

Table 3 : Comparaison du Global Competitiveness Index rankings pour les périodes de 2007-2008 et 2006–2007

pays rang score Rang GCI (2006-2007)

Etat Unis d’Amérique 1 5.67 1

France 18 5.18 15

Tunisie 32 4.59 33

Maroc 64 4.08 65

Egypte 77 3.96 71

Algérie 81 3.91 77

Nigeria 95 3.69 95

Kenya 99 3.61 88

Sénégal 100 3.61 n/a

Gambie 102 3.59 103

Tanzanie 104 3.56 97

Bénin 108 3.49 114

Burkina Faso 112 3.43 114

Mali 115 3.37 115

Source : Wold Economic Forum

Suivant ce classement, le Sénégal occupe le 100ème rang sur les 131 pays considérés. Ce

classement est meilleur comparé aux autres pays de l’UEMOA. Mais, contrairement à ces pays,

on note que le Sénégal était absent au classement de 2006/2007. Comparé à la Tunisie, à

l’Afrique du Sud, à l’Ile Maurice, à l’Egypte, au Nigéria, et au Kenya, les performances de

l’économie sénégalaises sont faibles. En effet, ces pays sont classés respectivement 32ème,

44ème, 60ème, 77ème, 95ème, et 99ème. Comparé

Le Sénégal dispose en fait d’assez bonnes performances dans le cadre de la stabilité

macroéconomique et de conditions de base favorable dans l’ensemble. Mais, pour une meilleure

efficacité, il faut améliorer les secteurs tels que : les institutions, l’infrastructure, la santé,

l’éducation, l’efficience du marché du travail et les marchés financiers etc. Le manque de

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39

performances est plus pesant pour ces deux derniers secteurs. Il faut également beaucoup

d’efforts pour les facteurs d’innovation et de modernité. Comparé à l’Afrique du Sud ou à la

Tunisie, le Sénégal doit en fait améliorer l’ensemble de ces secteurs ; même la stabilité

macroéconomique.

Tableau 4 : Indice de compétitivité mondial (GCI) 2007-08

Bénin Sénégal Afrique du

Sud

Kenya Nigeria

Classement GCI global 108 100 44 99 95

Condition de base 106 103 61 117 108

Institutions 90 97 39 101 103

Infrastructures 112 98 43 93 119

Stabilité macroéconomique 80 58 50 122 28

Santé et éducation primaire 111 113 117 110 124

Atouts d’efficience 122 104 36 79 77

Formation et enseignement supérieur 114 105 56 88 109

Efficience des marchés des biens 99 78 32 79 65

Efficience du marché du travail 110 119 78 60 75

Complexité des marchés financiers 97 111 25 48 56

Aptitude technologique 112 82 46 92 97

Taille du marché 121 100 21 78 52

Facteurs d’innovation et de

modernité

92 80 33 56 69

Modernité de l’entreprise 97 82 36 70 74

Innovation 86 73 32 46 66

Source : Wold Economic Forum

Dans le cadre de la détermination du Business Competitiveness Index, la SFI (un groupe de la

Banque Mondiale) réalise également un classement suivant l’indice « Doing Business » où le

Sénégal est 162ème sur 178 pays. Il est situé loin derrière le Ghana et l’Afrique du Sud. Cet indice

classe les économies en fonction de la facilité de faire des affaires.

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40

Graphique 10 : Indicateur du climat des affaires (Doing Business) 2007-08

Il permet de voir ainsi la problématique de l’environnement structurel. Il met ainsi en évidence

l’aptitude des pays contenant le coût de faire les affaires à travers la maîtrise des coûts de création

d’entreprise, des échanges commerciaux, de l’enregistrement des droits de propriété et de

l’obtention de crédits, etc. Le Sénégal a perdu du terrain dans la plupart de ces catégories surtout

au niveau de la création d’entreprise, du commerce transfrontalier, des transferts de propriété et

de l’obtention de crédit. Toutefois, on note quelques améliorations au niveau de la fermeture

d’entreprise et de l’embauche et une certaine stabilité en matière de protection des investisseurs

et de fiscalité.

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41

Graphique 11 : Variation des indicateurs de climat 2008 par rapport à 2007

(- =amélioration ; + = détérioration)

Variation des indicateurs de 2008/2007 - =

amélioration; + = détérioration

-60

-50

-40

-30

-20

-10

0

10

20

Classe

ment g

lobal

Créati

on d’

entre

prise

Octroi

de li

cenc

es

Embauch

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Commer

ce tr

ansfr

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ierExé

cutio

n des co

ntrats

Fermetu

re d’en

trepris

e

Bénin Sénégal Afr. du Sud Ghana Nigéria

Source : Wold Economic Forum

c- Application économétrique.

L’évolution de la compétitivité structurelle montre ainsi le nombre de paramètres non pris en

compte par les variations du TCER. Par ailleurs, en considérant le commerce extérieur, on

constate quelques limites de l’effet de l’évolution du TCER sur la balance commerciale. En plus,

la dépréciation du TCER a eu un effet de relance du commerce extérieur sénégalais, mais surtout

des importations.

Si bien que, les gains de compétitivité

enregistrés avec la dévaluation en 1994

n’ont pas permis de résoudre le

problème du déficit de la balance

commerciale comme on l’espérait. Le

graphique 3 montre au contraire que le

déficit commercial qui était plus stable

avant la dévaluation de 1994 s’est

fortement accentué dans la période de

1994 à 2005.

Graphique 12 : Le déficit commercial sénégalais

0

200000

400000

600000

800000

1000000

1200000

1980 1985 1990 1995 2000 2005

DEFICITCOM

Source : ANSD

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42

Les exportations ont en fait connu une croissance assez faible et la production intérieure ne s’est

pas substituée aux importations qui croissent rapidement. La part des exportations sénégalaises

dans les exportations mondiales n’est plus que de 0.014% en 2006 contre 0.022 en 1990. Le

Sénégal perd ainsi ses parts de marchés.

Une explication de cet impact limité du TCER sur la balance commerciale serait le faible niveau

des élasticités prix des importations et des exportations. En effet, la condition de Marshall-

Lerner-Robinson (MLR) appelée aussi théorème des élasticités critiques, stipule :

- qu’à partir d’une situation d’équilibre initial de la balance commerciale, une dévaluation

exerce un effet favorable sur le solde commerciale si la somme des élasticité-prix (en

valeurs absolues) de l’offre d’exportation et de la demande d’importation est supérieure à

l’unité :

- qu’en situation de déséquilibre initial de la balance commerciale, la condition d’une

amélioration de la balance commerciale est plus restrictive. Plus le déficit initial est

important, plus les valeurs des élasticités doivent être élevées.

Donc, le TCER n’est un bon indicateur de que lorsque la somme des élasticités des demandes est

au moins égale à un. Cela revient en fait, à affirmer que l’effet volume positif engendré par une

dépréciation doit être suffisamment intense pour compenser l’effet prix négatif.

Mais, les conditions requises peuvent être plus faibles. Par exemple, si la détérioration des termes

de l’échange est de 20%, il suffit que la somme des élasticités prix excède 0,20 pour avoir une

amélioration du solde commerciale suite à une dévaluation. En l’absence d’une détérioration des

termes de l’échange, ce qui n’est pas le cas du Sénégal, il suffit que la somme des élasticités soit

positive pour que le solde commercial s’améliore après une dévaluation.

X M ≥1

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43

Tableau 5 : Fonction de demande d’importation et d’exportation

M = importations sénégalaises ; X = exportations sénégalaises ; PIB = Produit Intérieur Brut ;

YD le revenu disponible ; PM est le prix des importations ; PX est le prix des exportations

sénégalaises.

R2 permet de voir l’efficacité du modèle. Ici, R2 = 0.68 signifie que 68% des fluctuations des

importations sont expliqués par le modèle (par le revenu disponible et le prix des importations).

La force de rappel vers l’équilibre ou coefficient de correction d’erreur (-0.22) pour la fonction

d’importation et (-0.6) pour la fonction d’exportation représente la vitesse de résorbassions entre

le niveau désiré et le niveau effectif dans l’année qui suit tout choc. Un choc sur les exportations

au cours d’une année est entièrement résorbé au moins bout d’un an.

L’estimation des fonctions de demande d’importation et d’offre d’exportation du Sénégal montre

ainsi que, les conditions de Marshall-Lerner-Robinson pour que le TCER soit un bon indicateur

de compétitivité ne sont pas réunies. Les élasticités sont très faibles aussi bien pour le long terme

que le court terme. Dans une pareille situation, on dit qu’une dévaluation exerce un effet

Estimation de la fonction de demande

d’importations :

Variable dépendante log (M)

Période d’estimation 1980 – 2005

Estimation de la fonction d’offre d’exportations :

Variable dépendante log (X)

Période d’estimation 1980 – 2005

Variables

explicatives

Elasticité de

Long Terme

Elasticité de

Court Terme

Variables

explicatives

Elasticité de

Long Terme

Elasticité de

Court Terme

Log (PM) -0,28

(-1,76)

-0,17

(-1,38) Log (PX/P)

0,47

(1.72)

0.15

(0.48)

Log (YD) 1,13

(12,45)

0,34

(2,21) Log (PIB)

0,42

(3.04)

0.14

(0.38)

Force de Rappel -0,22

(-1,61) Force de Rappel

-0.60

(-5.44)

R2 - ajusté 0,68 0,22 R2 - ajusté 0,81 0,61

Note : Les chiffres entre parenthèse représentent les statistiques de student

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44

pervers c'est-à-dire qu’elle creuse le déficit courant. Ce qui n’est pas totalement exclu pour le cas

du Sénégal.

Une étude des fonctions d’importations et d’exportations avec le logiciel Eviews nous permet de

mieux voir les limites du TCER sur le commerce extérieur. Ici les importations sont observées en

fonction de l’absorption (C + I +G) et du TCER et les exportations en fonction du PIB constant,

et du TCER.

LOG (M) = C (1)*LOG(ABSOR) + C (2)*LOG(TCER) + C (3)*DUM94 + AR (1)

LOG(X) = C (1)*LOG(PIBCO) + C (2)*LOG(TCER) + C (3)*DUM94 + AR (1)

ABSOR = C + I + G; PIBCO = PIB constant; la variable DUM94 permis d’amortir le choc de la

dévaluation du FCFA de 1994.

1°) Normalité

D’après le test de normalité de jarque-bera, les séries étudiées : EPARNAT (épargne nationale),

EXPORT (exportations), IMPORT (importations), INVESPRIV (investissement privé),

INVESPUB (investissement public) PIBCO (produit intérieur brut constant), TOTALINVES

(total des investissements), TCEN (taux de change effectif nominale), TCER (taux de change

effectif réel), terme de l’échange sont normales et log normales sur la période de 1980 à 2007.

2°) Estimations des fonctions par les moindres carrés ordinaires (MCO).

L’estimation par le test de Durbin-Watson montre qu’il ya une auto-corrélation des erreurs.

Après correction par la méthode de Cochrane-Orcutt, on a :

LOG(IMPORT) = 1.919962853*LOG(ABSOR) - 0.5457336701*LOG(TCER) -

0.1772839988*DUM94 + AR (1)

LOG(EXPORT) = 1.976801192*LOG(PIBCO) - 0.6208464275*LOG(TCER) +

0.1614392502*DUM94 + AR (1)

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45

Le coefficient de détermination est :

- pour la fonction d’importation, R2 = 0.98. Ce qui montre que 98% des fluctuations des

importations sont expliqués par le modèle, c’est à dire par les variables Absor et TCER ;

- pour la fonction d’exportation, R2 = 0.945771, c'est-à-dire, 94.5% des fluctuations des

exportations sénégalaises sont expliqués par le PIB constant et le TCER.

Les élasticités que nous observons sont un peu élevées contrairement aux résultats ci-dessus.

Mais, ceci peut être du au choix des variables considérées (PM et Yd) ou du fait de leur non

stationnarité. Par ailleurs le signe négatif de la variable TCER dans la fonction d’importation,

cause problème. En effet, une appréciation du TCER entraîne une réduction des exportations

mais augmente au contraire les importations.

Les variables limport, lexport, lpibco, et TCER ne sont pas stationnaires. Mais, elles sont

intégrées d’ordre1 et l’estimation par les MCO du modèle à correction d’erreur donne les

résultats suivants :

DLOG (IMPORT) = 1.642301123*DLOG (ABSOR) - 0.608093456*DLOG (TCER) -

0.1611260884*D (DUM94) - 0.04222623033*RESIDIMPORT (-1)

DLOG (EXPORT) = 1.147641749*DLOG (PIBCO) - 0.003755669342*DLOG (TCER) +

0.2595480948*D (DUM94) - 0.6748914907*RESIDEXPORT (-1) + MA (1)

Ainsi, il ne suffit pas seulement de suivre les variations du TCER pour apprécier de façon

exhaustive l’évolution de la compétitivité de l’économie sénégalaise. A l’exception de

SUNUEOR pour l’huile brute d’arachide, les entreprises sénégalaises ne disposent pas de

beaucoup de moyens pour stimuler leur compétitivité prix mis à part la réduction des coûts de

production à travers une diminution des coûts des facteurs et des coûts des matières premières.

Ces dernières sont en grande partie importées.

Nous allons dans nos travaux ultérieurs revoir ce modèle dans son ensemble pour tirer de

meilleures conclusions.

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46

II-2 La pertinence d’autres indicateurs de compétitivité

On peut également utiliser d’autres indicateurs de compétitivité. Cependant, comme le TCER, ils

ne sont pas à l’abri de critiques quant à leur pertinence.

a- La part de marché

La part de marché au niveau international permet particulièrement de comparer les performances

à l’exportation d’un pays donné. Les gains ou pertes de part de marché peuvent bien être une

conséquence de gains ou de pertes de compétitivité. Cette part de marché est déterminée par le

rapport des exportations à la demande mondiale (MUCCHIELI, 2002). Pour déterminer la

demande mondiale, on considère l’ensemble des importations des principaux pays de l’OCDE,

soit 75% du commerce mondial. La part de marché est également déterminée par le rapport entre

les exportations du pays considéré aux exportations de ses pays concurrents. Cependant, il faut

bien prendre en compte qu’une mauvaise orientation géographique des exportations peut

entraîner une perte de part de marché. Pour plus de précision, la part de marché est ciblée sur un

marché précis (marché de l’automobile, marché des produits manufacturés etc.).

On distingue une part de marché à l’exportation et une à l’importation sur le marché national.

Pour déterminer la part de marché à l’importation, on peut utiliser le taux de pénétration

étrangère.

- Le taux de pénétration étrangère

Si on considère par exemple, la part de marché des entreprises étrangère de cars (transport public)

au Sénégal est égale au rapport entre les importations de cars au Sénégal sur le total des achats de

cars de transport public pour une année donnée au Sénégal. Ce rapport est exprimé en

pourcentage. S’il est égal par exemple à 95%, on pourra dire que, pour cette année, sur 100 cars

neufs achetés au Sénégal, 95 sont d’origine étrangère. Le taux de pénétration étrangère met ainsi

en évidence la capacité des produits nationaux à faire face à la concurrence étrangère sur le

marché local. Autrement dit, il détermine la capacité du pays à résister à la pénétration des

produits étrangers. Plus il est très élevé, plus le pays est dépendant de l’extérieur.

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b- La vulnérabilité économique

Ce concept est notamment utilisé par les Nations Unies pour définir si les pays en développement

ont le statut de Pays Moins Avancés (PMA) ou non. Il renseigne ainsi sur la compétitivité du

pays en définissant sa capacité à absorber les chocs externes, sa dépendance des exportations et

leur diversification. Il prend en compte également la vulnérabilité face aux désastres naturels.

C’est ainsi que Patkins et Mazi (1999) ont mis au point une méthode de mesure de la

vulnérabilité des pays en développement et des pays émergents (voir annexe A pour la méthode

de calcul).

Tableau 6 : Indice composite de vulnérabilité

Pays Indice composite de

vulnérabilité

Bénin 5.060

Burkina Faso 4.923

Côte d’Ivoire 5.626

Mali 5.083

Niger 4.957

Sénégal 5.026

Togo 5.248 Source: Patkins et Mazzi, 1999.

On remarque ainsi que la vulnérabilité des économies des pays de l’UEMOA est plus élevée que

celle des pays émergents. Mais le Burkina (4.923) et le Niger (4.957) enregistre les taux de

vulnérabilité les moins élevés de la zone suivi du Sénégal (5.026).

Les importations du Sénégal sont en grande partie constituées de biens d’équipement, de biens

manufacturés, de biens alimentaires, du pétrole, des produits pharmaceutiques, … (pourcentage à

mettre). Alors que si on considère les exportations, une majeure partie est constituée de matières

premières : les produits halieutiques, le phosphate, l’arachide bien qu’étant en baisse, les dérivés

du pétrole.

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c- L’indicateur synthétique de compétitivité du Luxembourg

Le Luxembourg est un petit pays (2 586 km²) européen et est doté d’un réseau ferroviaire très

développé du fait de l’importance de son industrie métallurgique. Son économie, contrairement

au Sénégal, occupe la deuxième place mondiale sur le marché de l’investissement après la City

de Londres. Une autre caractéristique très importante de l’économie luxembourgeoise est la forte

présence de journaliers étrangers (près de 130 000 frontaliers rejoignent le Grand-Duché par jour

pour y travailler avec environ 52% de Français, 27% de Belges et 21% d'Allemands3. Pour

analyser le degré de dépendance face au prix étrangers d’un secteur exportateur (l’industrie),

Carine KRECKE et Patrice PIERETTI de la Cellule de Recherche en Economie Appliquée

(CREA) à l’Université du Luxembourg développent4 une méthodologie relative à indicateur de

compétitivité considéré comme synthétique. Cet indicateur permet de mesurer la compétitivité de

l’économie luxembourgeoise à travers une comparaison des prix étrangers des biens exportés en

monnaie nationale (e ⋅P*) au coût salarial unitaire domestique (CSU). On a : e le taux de change,

P* les prix étrangers, P les prix domestiques.

On a :

I = e P*/CSU ;

Où, CSU = W/π ; avec W est le taux de salaire nominal, π la productivité apparente du travail.

L’indicateur I s’améliore lorsque les prix étranger haussent, ou le CSU augmente.

Par ailleurs, on a :

I = e P*/CSU = (e P*/P)* (e P/CSU) = M * R

- M = P/CSU est l’indicateur de marge qui exprime la rentabilité par unité de valeur produite

d’une branche d’activité après déduction de la masse salariale.

- R = e P*/P le taux de change effectif réel. Il permet de mesurer les prix des biens et services

domestiques par rapport à ceux des principaux pays concurrents.

Cette décomposition de l’indicateur I prend en compte la synthèse entre les notions de

compétitivité coût (ou marge) et compétitivité prix. Cependant, la pertinence relative de ces deux

3 Ces estimations remontent au 31-12-2006 4 Dans le cahier Economique N°89 du Statec et dans la revue scientifique « Economie Appliquée »

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composantes dépend de la plus ou moins grande capacité des exportateurs à fixer leurs prix c'est-

à-dire à être « Price-setter » et imposer son prix sur le marché international. En situation de

« Price taker » comme dans le cas du Sénégal, lorsque la concurrence devient plus forte, on ne

peut agir sur les marges en les baissant puisque les prix sont exogènes. Ainsi, l’indicateur

pourrait être réduit au CSU ou au M l’indicateur de marge. Mais au Sénégal, le coût élevé de la

main d’œuvre et la rigidité de la législation sociale sont considérés comme un obstacle au

développement des exportations sénégalaises surtout en ce qui concerne les catégories des

techniciens et des ouvriers spécialisés. La plupart des exportateurs trouvent qu’ils ne font pas le

nombre. Toutefois, l’indicateur synthétique de compétitivité I n’est adéquat qu’à l’économie du

Luxembourg. Pour l’adapter au cas Sénégal, il faut d’abord établir économétriquement

l’hypothèse qui consiste à assimiler petit pays à « Price taker ».

Nous avons proposé ces deux indicateurs pour mesurer dans un premier la dépendance du

Sénégal vis-à-vis de l’extérieur (taux de pénétration étrangère) et dans un second temps pour

pouvoir effectuer une comparaison de l’économie sénégalaise par rapport à d’autres économies

(indicateur du Luxembourg). Le chapitre suivant met en évidence les principales caractéristiques

de cette économie sénégalaise et permet de proposer quelques solutions aux problèmes soulevés.

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Recommandations : comment améliorer la compétitivité sénégalaise

Selon une étude de l’Organisation de Coopération et de Développent Economique (OCDE)5 (les

principales contraintes qui pèsent sur la compétitivité sénégalaise sont beaucoup plus du côté de

l’offre plus que des difficultés d’accès aux marches. Le coût des facteurs de production et leur

disponibilité (par exemple, s’agissant de l’eau, de l’électricité de la main-d’œuvre, etc.) sont des

obstacles majeurs au développement des entreprises sénégalaises. L’accès au financement est

également un grand obstacle souvent cité par les dirigeants des PME du fait des garanties

exigées.

Les autorités sénégalaises ne sont pas restées de marbre face à cette situation. Elles se sont

engagées à booster les exportations pour résoudre les problèmes d’offre. De ce fait, l’Agence

Sénégalaise de Promotion des Exportations (ASPEX) a été crée pour la promotion des

exportations et l’APIX pour l’amélioration de l’environnement des affaires au Sénégal et la

Promotion de l’investissement. Ainsi, le Sénégal montre sa détermination à valoriser son

commerce et poursuit progressivement le vaste processus de réformes entamé depuis 1996.

Au niveau de l’agriculture, le Sénégal pourrait être plus compétitif en modernisant le secteur.

C'est-à-dire, développer des systèmes d’irrigation pour que l’agriculture soit moins dépendante de

la pluviométrie. Il faut aussi faire de sorte qu’elle dépasse le cadre familial pour être un peu plus

industrielle. Cette modernisation concerne également le matériel de travail qui en général est très

vétuste et traditionnel. De même, il faut mettre à la disposition des paysans les inputs avec des

prix bien accessibles. L’Etat doit en fin mettre en place de bonnes politiques d’accompagnement

pour une nouvelle orientation vers les cultures industrielles qui ne doivent, toutefois, pas être

prioritaire par rapport à celles vivrières. La conjugaison de tous ces facteurs pourrait rendre

l’agriculture sénégalaise plus rentable. Déjà, elle permet d’élargir le temps de travail des paysans

sénégalais sur toute l’année contrairement à moins de 3 mois d’hivernage. Ce qui favoriserait une

réduction de la dépendance alimentaire. La préoccupation de la sécurité alimentaire est devenue

plus forte aussi bien pour les décideurs des pays en développement que pour les analystes du fait

5 OCDE, Direction de la Coopération pour le développement comité d’aide au développement (CAD), Atelier du

CAD- vers l’élaboration de bonnes pratiques pour le renforcement des capacités dans le domaine des échanges, étude

de cas sur le Sénégal, mai 2001, DCD(2000)10/ANN3

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de la hausse généralisé des denrées alimentaires. Une redynamisation du secteur agricole

contribue à la lutte contre la pauvreté surtout dans le monde rural. Ainsi, en plus de l’arachide, du

sésame, du coton, il faut promouvoir le maïs, la patate douce, etc.

Pour pêche, la demande internationale est encore forte et il est facile d’évacuer les produits

maritimes mais la raréfaction progressive pose problème. Pour que la situation ne soit pas

irrémédiable, le pouvoir public doit convaincre les partenaires occidentaux, asiatiques et autres de

la nécessité de reconstituer les stocks en observant un repos biologique sur une période suffisante.

Cependant, ces mesures ne doivent pas être entreprises individuellement par un seul pays. Les

unions et coopérations entre pays africains ou pays en développement doivent non seulement

soutenir cette politique mais aussi la faire appliquer par l’ensemble des pays signataires. Ainsi,

tout pays qui adopte ces politiques ne sera pas isolé sur le plan international. Ils doivent aussi

réduire la durée des contrats à des termes plus courts avec au maximum un an. Bref, renoncer à

ces accords au profit d’un développement de la pêche locale. Il faut ensuite mettre sur pied un

système de gestion pour que la pêche soit une grande ressource naturelle à l’instar du pétrole.

On peut également :

- favoriser la création d’un cadre approprié pour le développement des entreprises

L’objectif est de favoriser la création d’entreprise en améliorant les procédures de financement,

l’accès au terrain, les procédures administratives et douanières, et autres. Pour les entreprises en

activité, il faut une assistance de l’Etat pour éviter qu’elles tombent en faillite suite aux difficultés

sur le marché. Il faut également mettre en disposition des formations adéquates par rapport aux

attendes des entrepreneurs.

- faciliter l’accès aux marchés

L’accès aux marchés est très important pour les entreprises. Il constitue une augmentation de la

demande. Sur le plan national, les produits sénégalais sont fortement concurrencés par les

produits extérieurs notamment chinois de sorte que pour certaines branches comme l’artisanat, les

entreprises nationales ne feront pas le poids. Elles sont en réalité confrontées à de grandes

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difficultés qui empêchent leur développement. Sur le plan international, les produits sénégalais

sont défavorisés du fait des normes et règles à respecter.

- Favoriser l’attraction de l’IDE et des investissements nationaux

Conscient de l’importance de l’investissement pour développer le commerce, le Sénégal

s’investit dans la création d’un cadre approprié pour une meilleure attractivité du pays. L’APIX

créée à cet effet essaie d’améliorer l’environnement des affaires. Il faut également initier des

partenariats entre les investisseurs nationaux et internationaux pour qu’ils puissent travailler en

étroite collaboration. Comme le dit un chef d’entreprise sénégalais : au moment où on déroule le

tapis rouge pour les investisseurs étrangers, les nationaux ont besoin d’un tapis roulant. Pour

celui-ci, l’investissement local serait un miroir pour l’investissement étranger.

- renforcer la bonne gouvernance

La bonne gouvernance renforce l’attraction. Elle encourage les investisseurs de par le cadre

sécuritaire qu’il offre.

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Conclusion

La compétitivité est un concept bien complexe qui dépend de plusieurs facteurs et qui est

difficilement mesurable. C’est une source de croissance, un moyen de desserrement de la

contrainte extérieure et un défi que devraient se lancer les pays en développement pour assurer le

processus d’intégration dans l’économie mondiale. On note que l’économie sénégalaise a besoin

de plus performances au niveau du savoir faire, de l’investissement, de l’innovation, du progrès

technique, des infrastructures, de l’éducation, de la santé, du caractère institutionnel (réformes

structurelles, corruption, système judiciaire fiable, etc.). Il faut également mettre à profit les

atouts climatiques et environnementaux majeurs pour augmenter la productivité et résoudre les

problèmes d’offre dans le but de diversifier les exportations et les adapter aux normes

internationales.

Il n'existe pas de mesure parfaite et/ou unique de la compétitivité. Les indicateurs de

compétitivité sont très nombreux et leur élaboration est fonction de la définition retenue.

Cependant, pour plus de commodité, on recherche toujours un indicateur synthétique comme le

TCER, la part de marché et autres. Faute de disponibilité de données statistiques, le TCER

demeure un indicateur synthétique de compétitivité très utilisé. Mais, au Sénégal, il possède

quelques limites comme le montrent les tests économétriques réalisés, ci-dessus. La compétitivité

structurelle paraît, en fait, plus déterminante dans l’évolution de l’économie sénégalaise

contrairement à la compétitivité prix, appréciée par l’évolution du TCER.. En plus, le TCER est

un indicateur ex-post, qui ne permet pas de comprendre les déterminants de la compétitivité

(productivité, institutions, etc.). Pour une meilleure comparaison de l’économie sénégalaise par

rapport à celles de nos partenaires et concurrents, il faudrait en plus du TCER retenir

conventionnellement d’autres indicateurs de compétitivité appropriés.

Par ailleurs, l’appréciation de la compétitivité n’est pas une fin en soie : les pays africains,

notamment le Sénégal, doivent mettre en œuvre de bonnes et efficaces stratégies pour

redynamiser leur économie ou stimuler leur compétitivité à travers une bonne mise en œuvre des

politiques adoptées telles que : le Document de la Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP)

et la Stratégie de la Croissance Accélérée (SCA).