l_economie mondiale de demain

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l'économie mondiale du demain

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  • L es puissantes forces de changement quiconvergent en cette fin de XXe sicle pourraientjeter les bases d'un essor conomique durablepour les dcennies venir. La transition vers unesocit fonde sur le savoir pourrait gnrer deprodigieux gains de productivit. L'intgration desmarchs mondiaux des biens, des services, ducapi tal e t de la technologie s 'approfondi tconstamment. Et l'affirmation croissante d'unevritable conscience environnementale pourraitacclrer le passage des modes de productionet de consommation mnageant davantage lesressources. I l pourrai t en rsul ter plusieursdcennies de croissance conomique plussoutenue, des gains substantiels de revenus et derichesse, ainsi qu'une amlioration significative dubien-tre travers le monde.

    Mais comment librer toute la dynamique de cesforces ? Toute une srie d'initiatives sera ncessairepour tablir les rgles et les cadres permettant depasser une conomie du savoir mondiale etdurable. Mais, par dessus tout, les dcideurs, quece soi t au niveau des gouvernements, desentreprises ou de la socit en gnral, devrontfaire des efforts extraordinaires pour encouragerl'innovation permanente, la crativit et desniveaux levs d'investissement, tout en donnantl ' impulsion des approches novatrices quiaccroissent la coopration internationale etfavorisent la mise en place d'institutions efficaces.Mme s'il est invitable que les bnfices diffrentselon les pays, les capacits de cration derichesses libres par ce nouvel essor conomiqueoffrent une occasion unique d'inverser la tendance l'accroissement des ingalits et de l'exclusionqui a marqu les dernires dcennies.

    Ce l ivre s 'appuie sur l 'analyse des forcesconomiques et sociales l'uvre dans le monded'aujourd'hui, pour valuer la probabilit d'unnouvel essor conomique dans les premiresdcennies du XXIe sicle et mettre en lumire lespolitiques stratgiques indispensables pour en faireune ralit. Pour en savoir plus Les technologies du XXIe sicle : Promesses et prilsdun futur dynamique.

    (03 1999 02 2 P) FF 140ISBN 92-64-27029-9

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    L'conomiemondiale deDEMAIN

    Vers un essor durable ?

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    OCDE, 1999 Logiciel, 1987-1996, Acrobat, marque deposee dADOBE.Tous droits du producteur et du proprietaire de ce produit sont reserves. LOCDE autorise la reproductiondun seul exemplaire de ce programme pour usage personnel et non commercial uniquement. Sauf autorisation,la duplication, la location, le pret, lutilisation de ce produit pour execution publique sont interdits.Ce programme, les donnees y afferantes et dautres elements doivent donc etre traites comme toute autredocumentation sur laquelle sexerce la protection par le droit dauteur.

    Les demandes sont a` adresser au :

    Chef du Service des Publications,Service des Publications de lOCDE,2, rue Andre-Pascal,75775 Paris Cedex 16, France.

  • LCONOMIE MONDIALE DE DEMAIN

    Vers un essor durable ?ORGANISATION DE COOPRATION ET DE DVELOPPEMENT CONOMIQUES

  • ORGANISATION DE COOPRATION ET DE DVELOPPEMENT CONOMIQUES En vertu de larticle 1er de la Convention signe le 14 dcembre 1960, Paris,et entre en vigueur le 30 septembre 1961, lOrganisation de Coopration et deDveloppement conomiques (OCDE) a pour objectif de promouvoir des politiquesvisant :

    raliser la plus forte expansion de lconomie et de lemploi et uneprogression du niveau de vie dans les pays Membres, tout en maintenantla stabilit financire, et contribuer ainsi au dveloppement de lconomiemondiale ;

    contribuer une saine expansion conomique dans les pays Membres,ainsi que les pays non membres, en voie de dveloppement conomique ;

    contribuer lexpansion du commerce mondial sur une base multilatraleet non discriminatoire conformment aux obligations internationales.

    Les pays Membres originaires de lOCDE sont : lAllemagne, lAutriche, laBelgique, le Canada, le Danemark, lEspagne, les tats-Unis, la France, la Grce,lIrlande, lIslande, lItalie, le Luxembourg, la Norvge, les Pays-Bas, le Portugal,le Royaume-Uni, la Sude, la Suisse et la Turquie. Les pays suivants sontultrieurement devenus Membres par adhsion aux dates indiques ci-aprs : leJapon (28 avril 1964), la Finlande (28 janvier 1969), lAustralie (7 juin 1971), laNouvelle-Zlande (29 mai 1973), le Mexique (18 mai 1994), la Rpublique tchque(21 dcembre 1995), la Hongrie (7 mai 1996), la Pologne (22 novembre 1996) et laCore (12 dcembre 1996). La Commission des Communauts europennesparticipe aux travaux de lOCDE (article 13 de la Convention de lOCDE).

    Also available in English under the title:THE FUTURE OF THE GLOBAL ECONOMY:

    Towards a Long Boom?

    OCDE 1999Les permissions de reproduction partielle usage non commercial ou destine uneformation doivent tre adresses au Centre franais dexploitation du droit de copie (CFC),20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris, France, Tl. (33-1) 44 07 47 70, Fax (33-1) 46 34 67 19,pour tous les pays lexception des tats-Unis. Aux tats-Unis, lautorisation doit treobtenue du Copyright Clearance Center, Service Client, (508)750-8400, 222 Rosewood Drive,Danvers, MA 01923 USA, ou CCC Online : http://www.copyright.com/. Toute autre demandedautorisation de reproduction ou de traduction totale ou partielle de cette publication doittre adresse aux ditions de lOCDE, 2, rue Andr-Pascal, 75775 Paris Cedex 16, France.

  • Avant-propos

    Dans le cadre des prparatifs dEXPO 2000 lexposition universelle qui sedroulera Hanovre en Allemagne, le Forum de lOCDE sur lavenir organiseune srie de quatre confrences sur le thme Lhomme, la nature et la tech-nologie : des socits durables au XXIe sicle . Ces confrences aborderonttour tour les aspects essentiels de l'activit humaine que sont la technologie,l'conomie, la socit et le gouvernement. L'objectif est d'tudier le comporte-ment possible des variables cls et d'analyser diffrentes hypothses d'volu-tion afin de mettre en vidence les principales consquences et les moyensd'action envisageables. Chaque confrence offrira une analyse des tendanceset des lignes d'action sous-jacentes. Toutefois, l'ambition de cette srie estplus large : elle entend jeter les fondations ncessaires l'valuation des choixcruciaux auxquels seront vraisemblablement confronts les citoyens et les dci-deurs au sicle prochain.

    L'ensemble de ces confrences est spcialement parrain par EXPO 2000 etquatre banques allemandes : Bankgesellschaft Berlin, DG BANK DeutscheGenossenschaftsbank AG, NORD/LB Norddeutsche Landesbank et WestdeutscheLandesbank Girozentrale (WestLB). Des contributions financires supplmentairesseront apportes par de nombreux partenaires asiatiques, europens et nord-amricains du Forum de l'OCDE sur l'avenir.

    Cette confrence, accueillie par la DG BANK Deutsche GenossenschaftsbankAG, a t la deuxime de la srie. Elle s'est tenue les 2 et 3 dcembre 1998 Francfort (Allemagne) sur le thme Le dynamisme conomique du XXIe sicle :Anatomie dune longue priode dexpansion .

    Aprs une journe et demie de discussions, les participants la confrenceont conclu que le monde se trouvait face une perspective sduisante, savoir la 3

    OCDE 1999

    possibilit dune longue priode dexpansion durable au cours des premiresdcennies du prochain millnaire. Une convergence de forces en particulier latransition vers une socit du savoir, la naissance dune conomie mondiale et larecherche d'un environnement durable pourrait considrablement accrotrenotre capacit de cration de richesse et notre bien-tre l'chelle mondiale. Cela

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    4exige toutefois des progrs majeurs sur deux fronts de laction des pouvoirspublics. Premirement, des efforts exceptionnels, tant sur le plan national que surle plan international, en vue d'encourager linnovation permanente et un hautniveau dinvestissement. Deuximement, un vritable bond en avant dans leniveau de la coopration internationale sur des sujets comme la diffusion du savoir,lintgration des marchs et la transformation de lenvironnement. La confrenceavait pour but dvaluer les perspectives dune longue priode dexpansion aucours des vingt prochaines annes et dtudier les grandes orientations stratgi-ques qui pourraient contribuer sa concrtisation.

    La confrence comprenait trois sessions. La premire a examin les facteursgnriques susceptibles de dterminer si le dynamisme conomique long termerestera ou non de mise lavenir. La deuxime session sest intresse aux forcesspcifiques qui accompagneront sans doute le dynamisme conomique au sicleprochain et qui peuvent tre lorigine des taux de croissance levs dune longuepriode dexpansion au cours des vingt ou trente annes venir. Enfin, la troisimesession a analys linfluence probable des choix politiques sur le droulement desdiffrents scnarios dune longue priode dexpansion au XXIe sicle.

    Cet ouvrage runit lensemble des contributions prsentes lors de la conf-rence, ainsi quune introduction et une synthse des principaux points soulevs aucours des dbats rdiges par le Secrtariat. Ce livre est publi sous la responsa-bilit du Secrtaire gnral de lOCDE.OCDE 1999

  • Table des matires

    Chapitre 1 : Anatomie d'une longue priode d'expansionpar Wolfgang Michalski, Riel Miller et Barrie Stevens................................................ 7

    Chapitre 2 : Les sources dun dynamisme conomique permanent long terme au XXIe siclepar Richard G. Lipsey .............................................................................................. 37

    Chapitre 3 : Lavnement de lconomie mondiale du savoirpar Peter Schwartz, Eamonn Kelly et Nicole Boyer ................................................... 87

    Chapitre 4 : Mondialisation de la concurrence : catalyseurs et contraintespar Horst Siebert et Henning Klodt .......................................................................... 129

    Chapitre 5 : uvrer pour la viabilit cologique mondiale :vers une nouvelle grande transformation par Alain Lipietz....................................................................................................... 155

    Chapitre 6 : Politiques susceptibles de favoriser une longue priode dexpansionpar DeAnne Julius .................................................................................................... 183

    Annexe : Liste des participants............................................................................ 217 5

    OCDE 1999

  • 11Anatomie d'une longue priode d'expansion1par

    1Wolfgang Michalski, Riel Miller et Barrie StevensSecrtariat de l'OCDE,

    Unit consultative auprs du Secrtaire gnral

    1. Introduction

    L'une des perspectives les plus prometteuses et les plus couramment vo-ques tient au potentiel considrable qu'offrent les nouvelles technologies. De cepoint de vue, bon nombre des graves problmes actuels tels que le chmage, lamalnutrition, les maladies et le rchauffement de la plante pourraient tre rsolusgrce une application intelligente des dcouvertes ralises dans les domainesde l'informatique, du gnie gntique, de la nano-technologie et de la cration denouveaux matriaux. Ces espoirs ne sont pas sans rappeler ceux suscits il y a unsicle par le dveloppement et la diffusion de technologies comme l'lectricit, laradio et le moteur explosion qui annonaient une nouvelle re de bien-tre pourl'homme.

    A cette diffrence, on le voit clairement avec le recul, que la ralisation dupotentiel des technologies nouvelles de la fin du XIXe sicle a exig des transfor-mations conomiques et sociales beaucoup plus importantes. Les processusncessaires la diffusion des dcouvertes au-del des laboratoires des inventeurs, la conception de nouvelles applications, la vulgarisation de technologies initia-lement peu connues et la ralisation d'une intgration en profondeur des techni-ques de pointe, ont tous t des processus longs et difficiles. Tous impliquaient denouveaux points de repre, qu'il s'agisse du lieu ou du mode de vie des popula-tions ou encore des biens fournis par les entreprises et de leurs procds de pro-duction. Les anciens schmas, les attentes immuables et les notions de bon 7

    OCDE 1999

    sens gnralement acceptes, ont t leur tour bouleverss, sans parler desthories de gestion bien tablies et des ralits politiques figes.

    Il est frappant de remarquer que des transformations non moins radicales, l'chelle de l'conomie et de la socit tout entires, semblent cette fois encore

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    8constituer une perspective raliste. Bien qu'il ne fasse pas de doute qu'il y ait djeu dans le pass rcent des priodes riches en perspectives pour l'humanit, laconjoncture actuelle constitue l'un de ces rares moments o une convergenced'volutions nombreuses et diverses engendre des opportunits nouvelles detransformation radicale. Ce n'est pas un rsultat acquis d'avance, loin s'en faut, carles politiques ncessaires sont trs ambitieuses et ne sont pas encore la portedes dcideurs. Il n'en reste pas moins que l'humanit pourrait rcolter d'normesavantages si elle est prte entreprendre des changements tout aussi significatifs.

    Deux facteurs, l'un mthodologique et l'autre conjoncturel, peuvent expliquerune conclusion aussi premptoire. Premirement, la mthode adopte dans cetouvrage pour explorer les perspectives long terme n'est pas fragmentaire nilinaire comme le sont habituellement et juste titre celles utilises pour les pr-visions court terme. C'est grce une approche systmique et interdisciplinaireque l'on peut identifier les possibilits de transformations plus radicales, qu'ellessoient voulues ou non. Deuximement, l'application de cette mthodologie faitapparatre que la conjoncture historique actuelle avec ses volutions technologi-ques, conomiques et sociales porte en elle la promesse d'une re de croissanceau-dessus de la moyenne. D'aucuns pourraient attribuer ce sentiment d'une oppor-tunit exceptionnelle l'excitation suscite par cette fin de sicle et l'optimismede mise de la part des gouvernements au seuil du nouveau millnaire. Ces rser-ves sont toutes naturelles. L'valuation prsente dans les pages qui suiventconfirme cependant la conviction que les portes de l'histoire semblent aujourd'huis'ouvrir la fois sur une formidable dynamique sociale et technique et sur lerythme rapide de dveloppement qui caractrise une longue priode d'expansion.

    L'histoire ne nous fournit pas de cause unique capable d'expliquer ces longspisodes de dynamisme conomique pas plus que les phases spcifiques decroissance plus rapide ou plus lente lies certaines priodes. Un ensemble defacteurs a largement contribu linstauration dune priode prolonge de dyna-misme comme lalternance de phases dexpansion et de rcession. Les innova-tions technologiques de la machine vapeur au microprocesseur ontcertainement jou un rle primordial dans la mesure o elles ont amlior la pro-ductivit, donn naissance des produits jamais imagins auparavant et ouvert ungrand nombre de nouveaux secteurs dactivit conomique et sociale. Outre lacontribution des facteurs dmographiques, le dynamisme de lconomie a gale-ment fortement bnfici de lexpansion et de la libralisation des flux nationauxet internationaux de biens, de services, de capitaux et dides. Ces tendances ontt confortes par la diminution progressive du cot des transactions facilite parune plus grande efficience des rgles de march, des systmes de transport et destechnologies de la communication, qui a son tour favoris les gains dus aux chan-ges et la spcialisation conomique internationale. Le dynamisme conomique long terme a t aliment par dautres lments moteurs essentiels tenant auxOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    9amliorations significatives sur les plans social, ducatif et sanitaire, ainsi que,dans de nombreux pays mais non dans tous, lvolution des institutions politi-ques vers une plus grande responsabilit dmocratique et une plus grande effica-cit de ladministration.

    On s'accorde gnralement sur le rle de ces facteurs dans linstauration desconditions qui favorisent la croissance de la productivit long terme et la crationde richesse. Il est moins vident de dterminer les recettes qui garantiront que cedynamisme non seulement se poursuivra au cours des dcennies venir maissaccompagnera galement dune phase dexpansion au-dessus de la moyenne une longue priode au cours de laquelle la croissance mondiale du PIB pourraittre de lordre de 4 % par an et amener les taux de croissance mondiaux du PIB parhabitant au-dessus de la barre des 3 %. La question reste par ailleurs entire quant savoir dans quelle mesure le dynamisme conomique global, et la longuepriode dexpansion qui pourrait aller de pair avec elle correspondent rellementaux aspirations des individus.

    En effet, laube dun nouveau millnaire, on se proccupe de savoir non seu-lement si cette voie est viable mais aussi si elle est souhaitable. Pour certains elleest trop accidente et incertaine, apportant trop de changements trop rapidement.Pour dautres, le problme est le changement lui-mme, le bouleversement desmodles, des valeurs et des structures sociales existants tant peru soit commeinutile soit comme nfaste au bien-tre de lhumanit. Certes, le dynamisme co-nomique long terme a, au travers de ses diffrentes phases, produit une richesseconsidrable mais il a galement impos des cots levs. Ces deux derniers si-cles ont connu de nombreux bouleversements dans les modles du travail (de laferme lusine, par exemple) et de la vie quotidienne (du milieu rural au milieuurbain, par exemple). Lcosystme de la plante a t soumis rude preuve.Lingalit entre les pays et en leur sein sest, bien des gards, accrue. Mme lesvaleurs et les normes culturelles profondment ancres ont t remises en cause.Il nest pas tonnant que certains voient dans le dynamisme pass un prcdent ne pas reproduire lavenir.

    Ces questions sont traites dans les diffrents chapitres du livre. Celui-ci, lepremier, donne un aperu des perspectives de dynamisme conomique longterme et de longue expansion (section 2) et un rsum des mesures ncessaires leur ralisation (section 3). Dans le chapitre 2, Richard Lipsey examine les facteursgnriques qui dtermineront probablement si le dynamisme long terme sepoursuivra dans l'avenir. Les trois chapitres suivants sont consacrs aux forces quisont susceptibles de stimuler le dynamisme conomique au cours du prochain si-cle et de crer les taux de croissance levs d'une longue expansion pendant lesvingt ou trente annes venir. Chacun tudie un ensemble particulier de cataly-seurs et de contraintes : dans le chapitre 3, dont les auteurs sont Peter Schwarz,Eamonn Kelly et Nicole Boyer, c'est la transition vers une conomie et une socitOCDE 1999

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    10du savoir ; dans le chapitre 4, Horst Siebert et Henning Klodt s'intresse l'mer-gence d'une conomie plantaire pour les biens, les services, les capitaux et latechnologie ; dans le chapitre 5, Alain Lipietz tudie le dfi pos par la viabilit del'environnement. Enfin, DeAnne Julius value dans le chapitre 6 les diverses mesu-res envisageables sur la base de trois scnarios plausibles pour une longue expan-sion au XXIe sicle.

    2. Qu'entend-on par une longue priode d'expansion ?

    Les longues priodes d'expansion sont des vnements exceptionnels. Ellesont t relativement rares dans l'histoire du dveloppement conomique del'humanit. Par exemple, les deux priodes de croissance rapide enregistres aucours des 130 dernires annes l'une au cours des dernires dcennies duXIXe sicle et l'autre aprs la deuxime guerre mondiale ont largement contribu relever le niveau moyen enregistr sur longue priode. L'anatomie de ces prio-des d'expansion rvle deux caractristiques essentielles. Premirement, unrythme d'volution suprieur la moyenne en priode d'expansion s'inscrit dansun courant plus long, l'chelle du sicle. Ce flux puissant aliment par un dyna-misme conomique long terme est un phnomne distinct qui ne doit pas treconfondu avec les phases d'expansion et de contraction cycliques de plus courtedure qui fluctuent autour de la tendance historique. Deuximement, il existe unemultitude de facteurs divers et interdpendants qui contribuent ensemble, dansune conjoncture historique spcifique, dclencher les rythmes exceptionnelle-ment rapides de changement socio-conomique et de croissance de la producti-vit qui caractrisent une longue priode d'expansion. Les deux caractristiquesessentielles d'une longue priode d'expansion sont prsentes dans le contexteactuel.

    Le dynamisme conomique : fondements d'une longue priode d'expansion

    Avant 1820, les douze pays qui forment le cur de lEurope de louest ontconnu quatre sicles o la croissance moyenne annuelle du revenu par habitanttait seulement de 0.2 %. De 1820 1870, le rythme de croissance sest considra-blement acclr pour atteindre 0.6 % par an sur une base mondiale puis grimperpar paliers deux fois son taux antrieur soit 1.3 % entre 1870 et 1913. La poussesuivante de croissance mondiale du revenu par habitant sest produite de 1950 1973, au rythme de 2.9 % par an, savoir trois fois celui enregistr au cours de lapriode de conflit. Depuis, la moyenne mondiale est plus proche de 1.2 %. Consi-drs sur tout lespace de temps qui spare les annes 1820 et 1996, ces taux decroissance moyens du revenu par habitant, eu gard aux trs fortes poussesdmographiques, tmoignent de la considrable capacit de cration de richesseslibre par le dynamisme de lconomie. Il sagit dune transformation conomiqueOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    11et sociale qui gale les progressions les plus marques, mais beaucoup plus len-tes, de la civilisation.

    Chimie systmique

    Il est indniable qu'une forte croissance des investissements, des capacitsde la population active et des changes est indispensable la ralisation d'unetrs longue priode de dveloppement conomique durable. Toutefois, l'lmentdynamique qui favorise le changement est la raction systmique, qui soit acclrele processus, soit l'touffe. Les vnements rcents ont jet une lumire crue surle rle du bon fonctionnement ou du dysfonctionnement des systmes. Les cons-quences nfastes de la dfaillance des systmes apparaissent clairement, parexemple, avec l'abandon de la planification centralise sovitique ou le cas denombreux pays frapps par la crise de la dette qui ont t plongs dans unepauvret encore plus grande aprs les annes 70. Les bienfaits considrablesrsultant du bon fonctionnement des systmes sont quant eux illustrs par laconvergence, aprs la Seconde Guerre mondiale, de l'Europe et du Japon vers lesniveaux de revenus amricains et par le dcollage conomique significatif de nom-breux pays d'Asie au cours de ces vingt dernires annes.

    L'histoire dmontre le caractre harmonique du dynamisme conomique long terme. Tout comme les diffrentes notes et les diffrents accords d'une mlo-die finissent par se fondre en une polyphonie, une conomie dynamique est lersultat d'une multitude de facteurs qui crent ensemble un systme symphoni-que. Et, comme pour les multiples composantes de la musique polyphonique, ilpeut y avoir harmonie ou dissonance suivant que les diffrentes mlodies varient,s'interpntrent, se rattrapent ou prennent du retard. Ainsi, la crise asiatique actuelle, avec ses accords dissonants, confirme plutt qu'elle ne dment l'affirma-tion selon laquelle le dynamisme conomique nat de la combinaison de nom-breux lments technologiques, institutionnels et culturels distincts et divers pourformer un systme qui fonctionne. En ralit, le processus de dveloppementd'une conomie et d'une socit tires par l'innovation est fonction d'une suite dephases de retard et de rattrapage, une sorte de dsquilibre interagissant au seinmme des dcouvertes scientifiques, des structures sociales, des modles organi-sationnels et des systmes de valeurs.

    L'adoption de ce point de vue systmique permet galement de mettre envidence les facteurs spcifiques qui se sont avrs essentiels pour soutenir ledynamisme conomique durant presque deux sicles, malgr de nombreuses cri-ses court et moyen terme, et le resteront dans l'avenir. Les caractristiques fon-damentales qui tendent viter la stagnation et renouveler la capacit et le dsirde changement dans le temps peuvent tre regroupes en trois catgories : pre-mirement, les aspirations et les impratifs rsultant de l'volution concomitanteOCDE 1999

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    12de la dmocratie et d'un march concurrentiel ; deuximement, les capacitsd'innovation et d'adaptation qui peuvent tre mises en uvre lorsqu'existent lepluralisme, la transparence et l'ouverture ; enfin la palette de valeurs culturelles,telles que le respect des liberts civiles ou les devoirs envers la socit, qui facili-tent la recherche permanente de moyens d'quilibrer coopration et concurrence,scurit et prise de risques. Schmatiquement, le dynamisme conomique longterme repose sur une combinaison entre capacit d'adaptation et innovation,assortie d'une bonne information elle-mme fonde sur des incitations et dessignaux clairs et efficaces. Toutes ces caractristiques sont leur tour influencespar la multitude d'institutions, de lgislations explicites et de rgles tacites quifixent les critres du comportement de tous les jours.

    Naturellement, les systmes qui sont hirarchiques, ferms et marqus parl'intolrance sont capables de courtes flambes de dveloppement, en particuliersi les structures technologiques, organisationnelles et sociales sont imposes d'enhaut en priode de conflit et/ou d'industrialisation force. Toutefois, comme ledmontre l'histoire de ce sicle, il ne s'agit pas de systmes dynamiques enmesure de soutenir un dveloppement conomique long terme. Il devient enoutre de plus en plus vident que les formules uniformes et hirarchiques dupass sont non seulement moins souhaitables mais galement susceptibles d'trebeaucoup moins efficaces l'avenir. La ncessit de satisfaire une demande trsvarie suscite une offre encore plus varie qui est son tour fonction de l'encoura-gement donn l'initiative, la production la demande et l'assouplissementdes contrles centraliss. En fait, bien que les caractristiques qui soutiennent ledynamisme conomique long terme restent relativement constantes, les moyensncessaires la ralisation de ces conditions voluent dans le temps. Ainsi, ladmocratie et les institutions commerciales du XIXe sicle ont offert de larges pos-sibilits dans ce domaine, tout comme les organisations de production, deconsommation et de gouvernement de masse qui ont domin le XXe sicle. Ces for-mes d'institutions et d'organisations ne sont toutefois pas du tout adaptes auxconditions et aux tches du XXIe sicle. Quelles sont donc les perspectives d'unepoursuite du dynamisme conomique long terme?

    Dterminants gnraux du dynamisme conomique long terme

    Dans une perspective globale, les sources du dynamisme conomique duXXIe sicle ne peuvent que prsenter bon nombre de points en commun avec cel-les qui ont caractris le sicle qui se termine. Laccroissement continu de la popu-lation mondiale, en mme temps que la pression incessante des besoins et desdsirs humains ne peuvent que stimuler lactivit conomique. Toutefois, sous lasurface de ces besoins fondamentaux, il existe des dterminants gnraux dudynamisme conomique long terme que l'on peut diviser en cinq catgories. Lapremire, qui nest toutefois pas la plus importante, tient aux outils ou aux techno-OCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    13logies vocation universelle utiliss par les hommes pour amliorer leur capacitde crer de la valeur. La deuxime srie de dterminants est rechercher dans lescadres institutionnels conomique (lentreprise), social (les mnages) et collectif(l'tat) qui permettent de grer le risque, de rduire lincertitude et damliorerla flexibilit et la transparence. Le troisime pilier du dynamisme conomique long terme rside dans les facteurs quantitatifs (comme les ressources naturellesou le capital fixe et humain) qui fournissent les ingrdients de la production. Lesquatrime et cinquime piliers sont les forces concurrentielles qui amliorent laproductivit, et les aspirations de la population qui incitent linnovation et laraffectation de l'ensemble des ressources. Dans les prochaines dcennies, ce sontles volutions long terme de chacun de ces facteurs qui dtermineront le coursdu dynamisme conomique.

    La technologie

    Le prcdent ouvrage de cette srie, Les technologies au XXIe sicle : promesses etprils d'un avenir dynamique (OCDE, Paris, 1998), a clairement montr l'existence d'unebase technologique qui permettra dans l'avenir une vague d'innovations favora-bles la productivit touchant la nature de la valeur conomique produite, lesmodes et les lieux de cette production. Le gnie technique de lhumanit a, laube du nouveau millnaire, ouvert de nouveaux territoires dans les domainesfondamentaux que sont les technologies de linformation, le gnie gntique et latechnologie des matriaux ce qui occasionne de puissants effets dentranementsur dautres domaines tels que la production dnergie, les transports, la mde-cine, lagriculture, etc. Les possibilits sont tout bonnement normes dans presquetoute la gamme des activits humaines. Des horizons nouveaux apparaissent pourles communications, le partage du savoir, la coordination de la production, l'excu-tion des transactions et la stimulation de l'imagination par la mise en commun dela culture et de la rflexion. La biologie aborde des domaines passionnants et ris-qus mesure que la dcouverte des codes et des composantes de la nature nousenseigne comment se crent les organismes vivants et comment on peut les rpa-rer. La matire inanime nous livre aussi ses mystres : la thorie des quanta et lesnano-techniques nous mnent vers des substances et des mthodes nouvellespour manipuler les composants atomiques de l'univers.

    Pour le XXIe sicle, les possibilits technologiques seront semble-t-il lahauteur des grandes inventions du pass comme la machine vapeur, le cheminde fer, l'lectricit, le tlphone et le moteur explosion. Toutefois, comme lesoutils du pass, ceux du futur ne pourront servir que si les capacits de l'cono-mie et de la socit suivent le mouvement. Ce sont les hommes qui choisissentd'utiliser les outils pour crer et innover. L'emploi qu'ils feront des technologiesde demain dpendra donc de leur dsir et de leur capacit d'adhrer au dyna-misme socio-technique. Ici, les facteurs institutionnels joueront un rle dcisif.Comme de nombreuses thories de la croissance l'ont montr, le dcollage co-OCDE 1999

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    14nomique est subordonn la mise en place d'une srie d'innovations institution-nelles, depuis le systme judiciaire et la gestion taylorienne jusqu' l'ducationobligatoire pour tous en passant par les normes comptables applicables l'ensemble de l'conomie. Dans le pass, les cadres institutionnels qui rgis-saient la rpartition du pouvoir de dcision ont t constamment restructurs,que ce soit par l'avnement du suffrage universel ou par le transfert de la respon-sabilit de l'entreprise du propritaire au gestionnaire professionnel. Les boule-versements de ce type n'ont pas disparu de la scne mondiale ; certains signesmontrent mme que le dbut du prochain sicle sera marqu par une nouvellevague de changements institutionnels.

    Les institutions

    Les institutions, ainsi que les rgles et attitudes qu'elles garantissent, sont enpleine mutation dans le monde entier. Que ce soit l'chelle mondiale, rgionale,nationale ou locale, dans les pays dvelopps, en dveloppement ou les ancien-nes conomies planification centralise, les institutions publiques et privesvoluent, souvent de faon radicale. Dans le secteur priv, des pratiques de ges-tion bien tablies comme les structures hirarchiques de commandement et decontrle sont actuellement dcentralises, avec d'normes consquences pour lesentreprises, de New York Vladivostok, depuis le crateur de savoir travaillantdans un domaine de pointe jusqu'au petit artisan traditionnel. A l'chelle interna-tionale les gouvernements ngocient des accords relatifs au commerce lectroni-que et au changement climatique. Les entreprises multinationales restructurentleurs rseaux d'approvisionnement, leurs chanes de valeur et leur organisation auniveau mondial. Les firmes locales se mondialisent pour conqurir des marchs mesure que baissent tous les cots lis la recherche de fournisseurs et d'ache-teurs, l'expdition de marchandises et la collecte de l'information. Les impor-tants efforts d'intgration rgionale stimulent l'accroissement de la flexibilit et laredistribution des activits et des facteurs de production par les entreprisescomme les gouvernements. A l'chelon national la politique en matire de secteurpublic abandonne, dans la plupart des pays, la prestation directe et souvent uni-forme de services pour adopter des mthodes plus dcentralises, rgulatrices etindividualises. Sur le plan local on voit rapparatre l'activisme et les rseaux rela-tionnels du fait que les personnes assument des responsabilits plus grandes dansleur travail et leur foyer.

    Globalement, les dernires annes du XXe sicle connaissent ce que daucunsont appel un changement de paradigme une remise en cause radicale de ladivision hirarchique sens unique du travail et de ses relations de pouvoir. Dansla mesure o elle offre la possibilit de mettre en uvre de nouvelles technologieset de donner libre cours linnovation, cette volution sur le plan institutionnelpourrait constituer un puissant stimulant pour la poursuite du dynamisme cono-mique. La capacit de faire les bons choix de politiques jouera de toute videnceOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    15un rle dterminant. Il en ira de mme pour la disponibilit et la distribution desfacteurs cls tels que le capital fixe et le capital humain. Il y a sur ce point tout lieude sattendre une continuit par rapport aux tendances du pass.

    Les facteurs

    Il est peu probable que le problme de la disponibilit de facteurs quantita-tifs, allant des ressources tangibles comme lnergie et les matires premires auxlments incorporels comme le capital financier et intellectuel, constitue unsrieux frein la poursuite du dynamisme conomique long terme. Lassouplis-sement de certaines contraintes importantes du pass en matire de ressourcespourrait tre favoris par lvolution constate, en particulier dans les pays delOCDE, vers l'accroissement de la part des biens incorporels dans la productiontotale et vers la mise en place de technologies, de mthodes de production et desschmas de consommation utilisant moins de ressources. Ce qui est plus difficile anticiper en gnral, cest dans quelle mesure les forces cycliques et les problmesde rpartition pourraient crer des goulets dtranglement et donc des rcessionsou au contraire ouvrir l'accs de nouvelles sources dapprovisionnement etdclencher des phases dexpansion conomique. Par le pass, les migrations mas-sives ont entran une redistribution de la main-d'uvre disponible, des tauxdpargne inadapts ont provoqu des crises de crdit et la reconstruction daprs-guerre a suscit des renversements brutaux de tendance. A lavenir, il est probableque ces dsquilibres locaux et/ou gnraux seront nombreux, du fait de politi-ques mal orientes ou dlibres ou encore cause dvnements fortuits. Djpointe lhorizon une srie de problmes tels que laugmentation importante dela proportion des personnes ges dans la population totale dans la plupart despays de lOCDE et en Chine, la distribution gographique ingale de loffre de capi-tal (pargne) et de la demande (possibilits dinvestissement haut rendement),et la diffrence de niveaux de revenus entre ceux qui contribuent de manireimportante ou faiblement aux changements climatiques.

    La concurrence

    Bien que ces dsquilibres entranent des souffrances et des ajustements quipourraient ne pas exister dans un monde o linformation sur les marchs seraientparfaite, dans le monde rel, les signaux et les rponses qu'ils dclenchent engen-drent des tendances et des flux de redistribution qui permettent damliorerconstamment lutilisation efficiente des ressources, mais aussi les institutions et lespolitiques. Au niveau micro-conomique, o les dcisions sont prises en matiredallocation des ressources, ces dsquilibres sont frquemment provoqus parune confrontation avec la contrainte des forces de la concurrence. Dans le secteurpriv, le fait que les entreprises dcouvrent des mthodes leur permettant dtreplus productives et de battre en brche leurs concurrents sur la base du prix, de laqualit ou de ces deux facteurs la fois, constitue gnralement un motif dtermi-OCDE 1999

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    16nant pour modifier lallocation des ressources. Dans le secteur public, lincapacitde rpondre aux attentes des citoyens conduit souvent un changement de poli-tique ou de gouvernement, parfois aux deux la fois.

    Comme les deux derniers sicles le montrent assez clairement, les forces de laconcurrence ont considrablement largi leur champ dintervention. La transpa-rence et louverture se sont amliores dans la mesure o les citoyens ont acquisle droit de savoir et o les consommateurs ont rcolt les fruits dune plus grandelibert des changes tant intra-nationaux quinternationaux, ainsi que de ladop-tion de lgislations sur la protection de la concurrence et du consommateur. A lave-nir, rptons-le, il y a tout lieu de penser que les forces de la concurrence, qui sontporteuses de changement, continueront de jouer et mme gagneront du terraindans un plus grand nombre de secteurs dactivit. Soutenue par les volutionstechnologiques et institutionnelles qui facilitent la diffusion de linformation, lva-luation comparative semble amene se dvelopper. Par exemple, des volutionstelles que lintroduction de leuro et le dveloppement du commerce lectroniquefavoriseront les achats comparatifs, tandis que les efforts entrepris au niveau inter-national pour liminer la corruption devraient mettre fin au culte du secret quecette pratique exige.

    Les aspirations

    Les progrs en matire de transparence sur lesquels reposent la confrontationdes ides ou la concurrence entre les produits mis sur le march promettent ga-lement de susciter les aspirations qui par le pass ont t source de changementsconsidrables. De laspiration la plus fondamentale une existence qui soit labride la famine et de loppression la recherche dune plus grande conscience de soiet dun sentiment daccomplissement, les dsirs de lhumanit continuent de fairepression en faveur du changement. Il apparat peu vraisemblable que le dyna-misme conomique long terme se heurte aux limites de la demande tenant lasaturation du march et la surabondance matrielle. Premirement, parce queparmi les plus aiss une volution se dessine en faveur de la recherche dintrtset de plaisirs qualitatifs et immatriels. Deuximement, parce que dans sa majoritlhumanit a encore beaucoup de chemin parcourir pour satisfaire aux critres,mme minimaux, de bien-tre matriel. Troisimement, parce quil semble proba-ble que le rapport entre les aspirations des individus et lenvironnement connatraune telle volution quil conviendra de reconsidrer ce qui devra tre produit etconsomm, de quelle manire et en quel lieu. Dans l'avenir prvisible ces proces-sus devraient constituer le moteur du changement en gnral et de l'volution versdes formes plus dmocratiques d'expression politique en particulier.

    Considrs dans leur ensemble, les perspectives de diffusion de nouvellestechnologies vocation universelle, les changements institutionnels susceptiblesdamliorer lefficience, la disponibilit permanente de facteurs de production, leOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    17dveloppement des forces de la concurrence, et la pression constante des aspira-tions permettent de penser que la poursuite du dynamisme conomique longterme est ralisable. Cela nimplique pas ncessairement que la croissance ou lechangement seront plus rapides ou plus profonds que par le pass. Il n'existe pasde lien troit entre les forces gnrales qui dterminent le dynamisme conomi-que et le rythme spcifique auquel augmente la capacit de cration de richesse.Cette relation ambigu n'a pas empch certains commentateurs, emports parl'atmosphre de fin de sicle et par le climat rcent d'euphorie d la croissanceconomique amricaine, de proclamer le triomphe d'un modle unique de dyna-misme conomique qui l'emporterait sur tous les autres. Ce point de vue fait abs-traction de la grande diversit des modles conomiques et confond lescaractristiques normalement attribues au dynamisme long terme et les diff-rentes mthodes pour y parvenir. Une erreur couramment commise cet gard estde supposer qu'une conomie dynamique donnera ncessairement naissance auxtaux de croissance suprieurs la moyenne qui caractrisent une longue prioded'expansion ; ce sont les catalyseurs et les contraintes spcifiques qui dtermine-ront les rsultats effectifs.

    L'espoir solide selon lequel le dynamisme conomique de ce sicle conti-nuera pendant les premires dcennies du XXIe sicle laisse ouverte la questionde savoir si l'hypothse d'une nouvelle expansion longue est plausible. La rali-sation de cette perspective pour demain sera largement fonction de la maniredont lhumanit se comportera face trois occasions exceptionnelles examinesci-aprs.

    Les forces spcifiques qui conditionnent la prochaine expansion longue : catalyseurs et contraintes au niveau mondial

    Il est indispensable que se produise une convergence de facteurs technologi-ques, conomiques et sociaux propres l'poque considre, de telle sorte quel'on puisse amener le taux moyen de croissance du revenu par habitant au-dessusde 3 % pendant les prochaines dcennies. En considrant ce dernier quart de si-cle, on peut dgager trois lments essentiels trois sries de catalyseurs et decontraintes capables de dclencher une longue priode d'expansion : l'tablisse-ment dune conomie et dune socit du savoir lchelle mondiale ; la naissancedune conomie mondiale fonde sur les flux internationaux dchanges, dinves-tissements et de technologies ; et la recherche de la viabilit cologique au niveauplantaire.

    Chacune de ces volutions pourrait apporter une contribution majeure nonseulement au soutien dune conomie dynamique mais aussi lamorce dunepriode de croissance suprieure la moyenne, une longue priode dexpansiond'une vingtaine d'annes qui marquerait le dbut du sicle nouveau. De mme,OCDE 1999

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    18lchec des efforts accomplis dans les domaines de la diffusion des ides, delouverture des marchs et de la viabilit cologique pourrait srieusement nuireaux perspectives conomiques globales et rduire nant les espoirs dune longuepriode dexpansion. Si l'on s'accorde en gnral sur les rpercussions positives aucas o les catalyseurs lemporteraient, ou sur les rpercussions ngatives au cas oles contraintes seraient les plus fortes, les principales diffrences au niveau delanalyse et de la politique mener concernent la manire de soutenir les premiersplutt que les dernires. Compte tenu de ces remarques, chacune des sous-sections qui suivent aborde tout dabord les lments qui relient les perspectivesdune longue priode dexpansion une srie donne de catalyseurs et decontraintes, puis les divergences de vues assez marques en ce qui concerne lesactions entreprendre.

    La transition vers une conomie et une socit du savoir l'chelle mondiale

    L'apparition d'une socit et d'une conomie du savoir, d'abord dans un cer-tain nombre de pays de l'OCDE, annonce labandon de lomniprsente unifor-mit qui caractrisait lre de la production, de la consommation et dugouvernement de masse, au profit du kalidoscope de la cration individuelle l're Internet. Cette transition vers la prdominance du savoir en tant que facteurde production, produit et lment structurant de lconomie et de la socit estengage depuis un certain temps, en particulier depuis que lessor des servicesa suscit un contact plus troit entre les consommateurs et les producteurs. Cettetransformation s'articule autour de la capacit croissante d'ajouter l'lmentconceptuel, incorporel et prcieux que constitue une cration personnelle, unmodle unique ou une forme individualise. Rien ne symbolise mieux ce dcol-lage que l'explosion d'Internet en tant que force conomique et sociale. Demme que lautomobile, produit industriel tangible, a pu incarner les synergiesde lre de la production et de la consommation de masse, lInternet avec ses ser-vices numriques incorporels pourrait bien se voir confrer lavenir le statut desymbole de lconomie du savoir. C'est en effet linstrument d'un systme beau-coup plus vaste qui couvre toutes les informations numriques, de la biotechno-logie la nano-technologie et tous les secteurs, de lagriculture lart. Commel'automobile avant lui, ce rseau des rseaux pourrait devenir le moteur d'unelongue priode d'expansion. On peut s'attendre un saut comparable aux chan-gements spectaculaires survenus dans les conditions de vie et de travail delindividu moyen entre le XIXe et le XXe sicles.

    Toutefois, la perspective de ces profonds changements ne garantit pas que lepassage une conomie et une socit du savoir engendrera les taux de croissancesuprieurs la moyenne qui caractrisent une longue priode d'expansion. En fait,la question qui se pose est de savoir si les catalyseurs seront assez puissants nonseulement pour triompher des contraintes mais aussi pour amener un changementOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    19suffisamment rapide et vaste. Rien ne nous assure que les dcouvertes de labora-toire et les innovations en matire de produits seront largement diffuses, niqu'elles entraneront une profonde rorganisation des modes de travail et de vie.En outre, on le sait fort bien, l'extension des technologies de l'information n'a pasjusqu' prsent engendr un dcollage indiscutable de la productivit. Commepour les transformations antrieures, telles que le passage de l'artisanat la pro-duction industrielle, la transition connatra des phases trs heurtes, car la mise enplace des institutions, habitudes et aspirations culturelles ncessaires procderapar ttonnements. Les changements profonds dans les modes et les lieux de vie etde travail des individus ainsi que dans ce quils produisent et consomment ne sefont pas facilement. De nombreuses habitudes et de nombreux comportementssont remis en cause sans que soient proposes des solutions de remplacementvidentes pour faciliter linteraction entre les individus et les rassurer par desnotions familires. Il faudra beaucoup d'efforts et d'expriences pour introduire leslments de rfrence et le langage commun qui permettront la ralit virtuelledapparatre une chose aussi normale que le fait de garer sa voiture ou de soignerson cheval. Comme les pionniers du commerce lectronique et de la biotechnolo-gie commencent le reconnatre, la confiance qui va de soi lorsque lon effectue enbas de chez soi lachat dun produit prouv, non gntiquement modifi, est loindtre aussi systmatique sagissant de commander un produit nouveau par le biaisdun moyen nouveau.

    Il reste encore beaucoup faire pour crer linfrastructure qui, en ralisant lespossibilits de transactions faible cot fondes sur le savoir, crera une conomieet une socit capables dassurer une production et une consommation exception-nelles. Nous nen sommes quaux premiers pas du processus de dcision qui abou-tira ladoption des conventions ou rgles de base, un moment comparable celuiqui a prcd lattribution qui nous est maintenant si familire du rouge et du vertpour les feux de circulation. Sur lInternet, par exemple, il nexiste toujours pas demoyen efficace, ais et largement accessible pour garantir la confidentialit, lex-cution des contrats, la protection du consommateur, le versement des droits deproprit intellectuelle, pas plus quun rgime fiscal prvisible ou un accs univer-sel ce qui est en train de devenir rapidement un service essentiel. On ne s'estgure intress aux rpercussions sociales et conomiques de cette redistributionradicale des rles, o les gagnants sont ceux qui sont raccords au rseau et lesperdants tous les autres.

    Certes, en ce qui concerne laccs, la bonne nouvelle est que les progrs tech-nologiques rduisent le cot de la connexion et diminuent progressivement la naturecomplexe et litiste des technologies de linformation. La mauvaise nouvelle est quela majorit de la population mondiale est encore en grande partie exclue des servi-ces de la tlphonie de base. Pour que lconomie du savoir ralise pleinement sonpotentiel, dautres infrastructures moins directement en rapport avec l'informatiqueOCDE 1999

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    20devront galement voir le jour. La multiplication des producteurs et des consomma-teurs de savoir indpendants appelle une adaptation importante des codes du tra-vail aux nouvelles formes dorganisation du travail ; des garanties rglementairespour grer les nouveaux matriels, les combinaisons gntiques et la prolifration deproduits spcifiques ; des enseignants et responsables de la validation des tudes lacquisition des connaissances tout au long de lexistence ; des systmes dassis-tance et de prvoyance sociales aux diffrentes manires de gagner sa vie la jour-ne, lanne et pendant toute une vie.

    La manire dont ces difficults seront surmontes dterminera largement dansquelle mesure lapparition de l'conomie du savoir fera fonction de catalyseur ou decontrainte lgard dune longue priode dexpansion. En cas de diffusion rapide,tendue et profonde de la nouvelle conomie fonde sur le numrique, il existe defortes chances pour que son potentiel crateur se ralise par le biais dnormesinvestissements dans certains domaines : des technologies de linformation plus effi-caces et intuitivement accessibles ; une vaste gamme de nouvelles mutationsgntiques ; les premires inventions issues de la technologie quantique ; uneinfrastructure du savoir renouvele allant au-del du systme scolaire de masse ; unelarge gamme de traitements et services mdicaux diagnostiques, prventifs et non-invasifs ; une conversion gnralise des technologies de production et de conserva-tion de l'nergie ; un vaste renouvellement du parc de logements, dans la mesure oles gens changeront la fois le lieu et larchitecture de leur foyer. Une priodedexpansion dune vingtaine dannes rsultant de cette pousse dinvestissementet de productivit semble plausible. La transition vers une conomie du savoir pour-rait au contraire se faire lentement et ne pas connatre une large diffusion. Dans cecas, lcart entre ceux qui dtiennent linformation et les autres pourrait se creuserencore davantage, ce qui aurait pour effet daccrotre les cots sociaux de la mutation.Cela conduirait selon toute vraisemblance des investissements non rentables enraison du manque de dbouchs et de labsence des effets multiplicateursqu'entrane un changement de porte gnrale et simultan.

    En dfinitive, les consquences dune transition vers lconomie du savoirpourraient se rvler ngatives pour la croissance. Une occasion pourrait tre man-que et le dbut du sicle venir pourrait bien tre qualifi de longue stagnation.Le contraste marqu entre ces deux volutions est en partie ce qui alimente ledbat entre ceux qui prnent une approche volontariste pour la mise en place delinfrastructure dune conomie mondiale du savoir et ceux qui pensent quelle ferason apparition sans effort particulier. La position volontariste et celle du laisser-faire se diffrencient galement par leur valuation de lchelle des changementsquimplique le passage un monde domin par la production du savoir. Un autrefoss spare les deux camps, savoir leurs positions en ce qui concerne linterd-pendance de la transition vers lconomie du savoir dune part et de la mondialisa-tion des marchs et de la viabilit cologique au niveau plantaire dautre part. IciOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    21encore, nous le verrons dans chacune des deux sous-sections suivantes, il existeune nette sparation entre partisans et adversaires dune intervention concertevisant garantir que ce seront les catalyseurs et non les contraintes qui lemporte-ront pour favoriser demain une longue priode dexpansion.

    La naissance d'une conomie mondiale des biens, des services, des capitaux et de la technologie

    Le rythme auquel lconomie de la plante voluera en direction ou aucontraire sloignera de louverture et de la transparence des marchs mondiauxde biens, de services, de capitaux et de technologie sera un facteur dterminant dudynamisme conomique long terme. Dans le meilleur des cas, lobjectif ambi-tieux de la cration de marchs totalement mondialiss devrait permettre auxconsommateurs, aux producteurs, aux pargnants et aux investisseurs dtre plusefficients et innovants. Les bnfices engendrs par lamlioration considrable delefficience dallocation pourraient alors tre employs non seulement pour satis-faire les besoins dinvestissement lis au changement structurel mais aussi pourremdier aux ingalits rgionales et indemniser ceux dont le capital humain et/oufinancier a t dvalu ou dtruit au cours du processus.

    En revanche, les facteurs ngatifs tels que le risque potentiel de nouvelles for-mes ou de nouvelles vagues dententes, de protectionnisme et de volatilit finan-cire pourraient finir par compromettre lefficience, par imposer des primes derisque plus leves et freiner lvolution micro-conomique. Dans ce cas le risque craindre serait la stagnation, une moindre transparence et une diminution de laconcurrence qui freineraient le dveloppement et la diffusion de lconomie dusavoir, la mise en place de nouveaux cadres institutionnels et le redploiement desressources vers des emplois plus productifs (et plus viables du point de vue delenvironnement). La capacit de crer des richesses, qui est le fondement detoute longue priode dexpansion, sen trouverait affaiblie. Quelles sont donc,sachant qu'il est plus probable que la premire option l'emporte, les forces sus-ceptibles dencourager ou de dcourager la mise en place de marchs mondiauxdes biens, des services et des capitaux qui soient efficients et fonctionnentparfaitement ?

    Cette question complexe peut tre envisage sous langle des cots et desavantages, ainsi que sous celui des ngociations souvent confuses qui ont prcdlintgration et louverture des marchs au sein dune mme nation ou dune mmergion. Les mutations qu'ont connues de nombreux pays de lOCDE au XIXe sicleoffrent un condens de prcdents sur ce quil conviendrait de faire pour que desprogrs vritables soient raliss en direction d'une vritable mondialisation desmarchs. Premirement, comme chacun le sait, lintgration de marchs distinctsou auparavant ferms est un processus lent qui exige tnacit et comptence poursurmonter une myriade dobstacles, apparents ou cachs, dordre organisationnelOCDE 1999

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    22et politique, la transparence et louverture des changes. Mme aprs la miseen place d'une charte commune et de dispositions rglementaires harmonises, desubtiles complications apparaissent, s'agissant par exemple de la mise en uvreeffective des lgislations sur la concurrence et de la suppression des ingalitsrgionales (taille suffisante pour faire face aux concurrents, par exemple) suscepti-bles de faire obstacle la concurrence au niveau local. Deuximement, laccord sefait rarement sur la rduction des barrires mises en vidence sans que soientintroduits des mcanismes dajustement et de compensation pour les perdants.Enfin, lorsque louverture des marchs dbouche galement sur une instabilit etune crise srieuses, il est important davoir la capacit dintervenir afin de rtablirla stabilit et dviter les cots encore plus importants dun effondrement total.

    Il convient donc de se montrer modeste quant aux rsultats obtenus jusquicien matire de cration de marchs mondiaux oprationnels. De mme il est trsclair que pour tre pleinement couronns de succs, les efforts qui seront accom-plis lavenir pour intgrer les marchs lchelle mondiale devront satisfaire auxmmes critres que ceux qui ont prsid des projets prcdents, moins ambi-tieux du point de vue gographique. Une telle initiative sappuiera certainementsur les ralisations passes et les progrs importants accomplis dans les changesde biens et de services, les flux de capitaux et la diffusion des technologies. Toute-fois, ces ralisations devront tre relativises en fonction du contexte, tant il estvrai quune grande partie des changes s'effectue au niveau intra-rgional et entresocits d'un mme groupe. Les flux dinvestissement de capitaux ont essentielle-ment pris la forme de participations directes, fortement concentres dans un nom-bre limit de pays. Quant aux investissements indirects de portefeuille, leurvolume a t moins important jusqu une priode trs rcente et ils demeurenttrs volatils. La matrise technologique demeure fortement concentre dans unpetit nombre de pays et de rgions au sein de ces pays. La diffusion des technolo-gies est trs ingale et ce, pour diverses raisons qui vont du faible niveau des mar-chs locaux linsuffisance de la base de comptences et de l'infrastructure detransport. Pour dire les choses simplement, nous sommes encore bien loin d'uneconomie totalement mondialise.

    On pourrait toutefois avancer que ce dveloppement insuffisant est promet-teur car il implique galement quune large fraction des gains qui s'attachent lamise en place dune conomie mondialise reste encore raliser. Il est moinsrjouissant de penser quil demeure de nombreux obstacles importants surmon-ter. Lun de ces obstacles qui se dressent dj sur la voie du progrs est le fait quela manire d'valuer les problmes susceptibles de se poser et les solutions yapporter relve d'arguments radicalement opposs. Il y a dune part ceux quivoient dans lexprience rcente des rductions tarifaires le prcdent le plusappropri. De leur point de vue, le problme consiste essentiellement surmonterla rsistance des pays au dmantlement des barrires, tarifs et droits compensa-OCDE 1999

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    23teurs, des contrles rglementaires et des diffrentes manires de protger lesentreprises nationales contre la concurrence extrieure. Selon cette cole de pen-se, la solution est rechercher principalement dans lexercice de pressions soit auniveau des ngociations multilatrales/bilatrales, soit par le biais des sanctionsimposes au niveau international, telles que le rejet de ladhsion lOMC.Constatant que les avantages lemportent sur les cots, affirment-ils, les pays ten-ts de rsister finiront par rejoindre la cohorte des marchs mondiaux.

    L'autre position s'intresse principalement aux forces qui suscitent lopposi-tion de lopinion la cration des marchs mondiaux. Lun des principaux pointsqui proccupent les tenants de cette approche est la manire diffrente d'envisa-ger les rpercussions de lintgration du march sur la distribution selon qu'on seplace au niveau national ou mondial. Dans ce contexte, les dispositifs conomiqueset sociaux mis en place pour intgrer les marchs devraient galement servir crer des conditions homognes au niveau mondial. Comme le soulignent lestenants de cette approche, il serait absurde dans un contexte national de penserquune rgion en difficult puisse tre laisse labandon parce que sa populationet ses entreprises sont les grands perdants du processus douverture de lcono-mie du pays. Dans ces circonstances, il est courant que les gagnants indemnisentles perdants, mme si les programmes mis en uvre ne russissent pas toujours remettre rapidement sur la bonne voie la catgorie sociale, le domaine ou le sec-teur concern. Cette indemnisation partielle est en gnral perue comme un prixacceptable payer pour les avantages nets de lintgration et de la transparencedes marchs nationaux. De mme, les tenants de cette approche soutiennent queles bnfices considrables qui dcoulent de la mise en place dune conomiemondiale intgre justifient amplement l'tablissement de rgles permettant deprendre en compte les cots et avantages qu'entranent lajustement, la concur-rence de localisation, lingalit entre rgions, la volatilit excessive des marchset les dangers de l'alignement de la rglementation par le bas.

    Il convient dtre raliste et de reconnatre, comme le concdent les deux co-les, que la contribution une longue priode dexpansion que permettront les pro-grs majeurs accomplis dans le domaine de lintgration de lconomie mondialedevra venir dun monde encore essentiellement caractris par des dispositifsconus au niveau national en vue d'liminer les pratiques anticoncurrentielles, derglementer les flux financiers et les investissements et de rgler les diffrends com-merciaux, sociaux et environnementaux. On peut difficilement contester que lint-gration des marchs mondiaux est susceptible de gnrer, lchelle de la plante,les mmes types de cots et les mmes avantages spectaculaires que celle des mar-chs nationaux ou rgionaux. Ce consensus sur les avantages se solde toutefois parun dsaccord patent quant la manire de parvenir lobjectif vis. Comme pourlconomie du savoir, deux camps sopposent : d'une part, ceux qui voient dans denouvelles et ambitieuses initiatives le moyen le plus efficace pour tirer les avantagesOCDE 1999

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    24des marchs mondiaux et alimenter le dynamisme conomique ncessaire unelongue priode dexpansion et, d'autre part, ceux pour lesquels lespoir dtablir desinstitutions et des accords plus globaux au niveau mondial relve de lutopie, ou quinarrivent pas du tout en voir lutilit. Un nouvel lment a rcemment t introduitdans ce dbat, ouvrant de nouvelles perspectives pour un programme daction plusambitieux. Il est possible, nous le verrons, que les efforts accomplis en vue de par-venir la viabilit cologique de la plante contribuent finalement beaucoup langociation et la cration de marchs plus intgrs au niveau mondial ainsi que del'infrastructure rglementaire et institutionnelle qu'ils ncessitent.

    uvrer pour la viabilit cologique au niveau mondial

    Ces dernires annes ont vu la manifestation d'une prise de conscience radi-cale du fait que la plante ne pouvait continuer de fonctionner selon les modlesde production et de consommation intensives en ressources naturelles et en ner-gie adopts dans le pass par la plupart des pays de lOCDE. Le systme nerg-tique actuel au niveau mondial, fond essentiellement sur les combustiblesfossiles, est foncirement li laccroissement des concentrations de CO2 danslatmosphre et donc lacclration des changements climatiques lchelle dela plante. Lindustrialisation et lurbanisation semparant des pays en dveloppe-ment et les modes de vie, de consommation et dutilisation massive de lnergiedes conomies industrialises s'tendant au monde entier, le risque dun accrois-sement des besoins en nergie dans la proportion de 1 4 dans les pays en dve-loppement pendant les cinquante annes venir se fait encore plus menaant. Leschangements marginaux et progressifs, bien quimportants, apparaissent de plusen plus comme insuffisants pour que se ralise le scnario de viabilit cologiqueau cours de la premire moiti du sicle prochain. Les changements devront trebeaucoup plus fondamentaux et intervenir dans un avenir trs proche si lon veutque lobjectif de viabilit ait des chances dtre atteint. En effet, il faudra peut-treplusieurs dcennies pour que des changements soient apports dans les quipe-ments nergtiques, l'urbanisation, la construction de logements, les systmes detransport, la nature des quipements industriels, les technologies, valeurs et com-portements en matire de consommation autant d'lments qui tendent enfer-mer les socits dans des schmas immuables de production et de consommationintensives en ressources nergtiques.

    Il est indniable quil existe un potentiel pour la ralisation de ce changementqui devrait engager lconomie mondiale sur un chemin de croissance plus soute-nable du point de vue de lenvironnement. Un ensemble dvolutions va dans cesens : la mutation progressive, dans les structures conomiques, de la productionmanufacturire vers les services ; le potentiel technologique considrable pourl'introduction d'amliorations majeures en matire defficience nergtique, parexemple dans les transports et la construction ; lapparition de la socit de linfor-OCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    25mation, avec les perspectives de tltravail, de commerce lectronique et unerorganisation plus efficiente du travail et de la production du point de vue desressources nergtiques ; et enfin, la promesse que laccroissement de la richesse lchelle mondiale augmentera la demande en matire de qualit de lenviron-nement (et la volont d'en payer le prix). Au niveau institutionnel mondial, une suc-cession daccords internationaux, de Rio Kyoto, ont cr des conditions de baserelativement favorables pour un nouveau dpart.

    Il devient tout aussi vident cependant que le rsultat des efforts accomplispour rduire les cots fixes de lactivit humaine pour la plante dpendra troite-ment des mthodes employes. Certaines politiques pourraient acclrer leschangements qui amnent une longue expansion ; d'autres risqueraient de paraly-ser le mouvement dynamique de cration de richesse. Par exemple, une politiquedes prix susceptible d'entraner des transformations profondes et durables danslutilisation intensive de lnergie par les infrastructures de base de lconomie(transports, quipements urbains, etc.) pourrait susciter des mouvements dinno-vation et de crativit trs bnfiques dans le cadre d'approches cologiques dela production, de la consommation et du mode de vie en gnral, ce qui son tourpourrait stimuler considrablement lefficience et la croissance de la productivit long terme et entraner des performances conomiques leves et soutenues. Enrevanche, en imposant des critres supplmentaires pour les choix conomiques,les objectifs environnementaux pourraient faire obstacle aux volutions technolo-giques prometteuses, rendre plus coteux les changements ncessaires pour am-liorer lefficience, et touffer linnovation. La question qui se pose donc est nonplus celle de savoir si le monde peut prendre en compte les cots croissants deschangements environnementaux au niveau plantaire afin de sorienter vers unmodle dactivit plus viable, mais de quelle manire il peut le faire.

    Pour commencer par les domaines o un accord sest fait, la plupart des solu-tions envisagent la ncessit de mettre en uvre des mesures dincitation auniveau conomique pour modifier les choix micro-conomiques faits par les diri-geants dentreprises, les investisseurs, les techniciens et les consommateurs dans le secteur public comme dans le secteur priv. La confiance dans les signauxdu march rsulte de lexprience de la plupart des pays de lOCDE qui ont t enmesure de corriger de faon assez spectaculaire l'volution du taux de croissancede leurs ratios globaux nergie/production aprs les deux chocs ptroliers. L'opti-misme est gnralement de mise quant savoir si, la cration des structures inci-tatives appropries, correspondra un processus dinnovation suffisamment diffuset une redistribution des ressources susceptible damliorer lefficience afin dvi-ter une diminution de la croissance de la productivit. Un dsaccord se fait jourtoutefois sur ce que recouvre lexpression structures incitatives appropries .

    On constate des divergences fondamentales dans trois domaines. Premire-ment, la question du degr dengagement social influences incitatives ou dissua-OCDE 1999

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    26sives de la pression des pairs ou des normes culturelles qui est jug ncessairepour atteindre les objectifs de viabilit. Certains soutiennent que les signaux dumarch suffisent eux seuls ; d'autres pensent quune approche plus large impli-quant une reformulation des valeurs et une volont d'adhrer des objectifs col-lectivement dtermins en matire denvironnement joueront un rle essentiel. Ilsera difficile de rconcilier les deux camps car cette divergence est lexpression dedeux philosophies politiques bien distinctes. Cette opposition conduit undeuxime motif de division, savoir dans quelle mesure les droits universels fon-damentaux la capacit cologique de la plante doivent tre pris comme base dela bonne gestion collective des structures incitatives appropries . Enfin, ilexiste de nombreuses dissensions quant la manire de partager les bnfices etles charges lis aux taxes, permis et quotas qui seront utiliss pour internaliser lesexternalits. Ici ce sont les questions de dtail qui posent problme, et aussi larpartition des pouvoirs en vue de les rsoudre.

    Toutes ces divergences sont fondamentales dans la perspective de l'obtentiond'une longue priode dexpansion dans la mesure o elles pourraient faire obstacleau ncessaire processus d'innovation et de croissance de la productivit. En outre,tant donn l'ampleur des enjeux si les tentatives de pallier les risques pour l'envi-ronnement mondial devaient chouer, il ne parat gure raisonnable de sous-estimerles types de ressources et le pouvoir de les utiliser qu'il faudra redistribuer pour par-venir la viabilit. Il y a fort parier que toute hsitation prendre des dcisions et indiquer une direction claire, dans un sens ou dans un autre, pourrait compromettreles chances de russir la transition vers une forme plus viable de dynamisme cono-mique. Les raisons en sont rechercher dans la nature mme de ce dynamisme, dansla synergie complexe qui le caractrise entre les conditions lies aux technologies,aux institutions, aux ressources, la concurrence et aux aspirations. Mme si ce tissua t remani en maintes occasions, lconomie mondiale ayant travers bien desphases successives, cela ne sest jamais fait sans des cots trs levs. Il pourraitparatre trs tentant de simaginer que cette fois il en ira autrement ; toutefois lexp-rience nous incite la prudence et une action concerte pour la ralisation d'unobjectif si difficile. Les choix de politiques seront dterminants.

    3. Politiques susceptibles de dclencher une longue priode d'expansion

    L'anatomie d'une longue priode d'expansion montre que ses perspectivessont d'abord fonction de la nature des systmes moteurs sur lesquels ellerepose et ensuite des possibilits spcifiques la priode considre. Sous cesdeux aspects, les perspectives de longue priode d'expansion seraient nette-ment meilleures en prsence d'une harmonie et d'une convergence entre les sys-tmes. Non que l'harmonie l'emporte toujours sur la dissonance lorsqu'il s'agit defaire avancer les systmes ou que la convergence soit possible sans divergencepralable, mais compte tenu de l'importance toute particulire que revtent laOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    27diffusion du savoir, les institutions nouvelles et les objectifs communs au niveaumondial pour que se mette en place une longue priode d'expansion. La possi-bilit de la provoquer sera fonction de politiques qui devront d'abord entranerune priode exceptionnellement durable d'harmonie et de convergence des sys-tmes et ensuite russir, au niveau mondial, susciter simultanment un progrstechnologique rapide, une profonde intgration des marchs et une rorientationdes choix macro-conomiques vers un environnement viable en vue d'amliorerla productivit.

    Certes rien n'est gagn d'avance. On ne peut exclure une stagnation des l-ments moteurs que constituent les facteurs technologiques, institutionnels, mat-riels et concurrentiels, ainsi que les aspirations, censs amliorer lefficience et lacapacit de cration de richesse. On ne peut exclure non plus lventualit que latransition vers lconomie du savoir marque le pas, que lconomie mondiale seretrouve fragmente et que lvolution vers la viabilit cologique au niveau mon-dial ne se produise pas. Lun des cinq dterminants gnraux du dynamisme co-nomique, voire la totalit dentre eux, pourrait ne pas russir se dvelopperindividuellement ou s'unir aux autres. Dans chacune des trois sries de facteurssusceptibles, dans la perspective d'une longue priode dexpansion, de jouer lerle de catalyseurs ou de contraintes, ces derniers lments pourraient lemportersur les premiers. Les forces expansionnistes pourrait tre ananties par des ten-dances rcessionnistes dans un autre domaine : le succs de la mondialisationpourrait par exemple tre rduit nant par des cots levs si l'on n'atteignait paslobjectif de viabilit, ou encore l'effet d'une large diffusion des connaissances parle biais de lInternet pourrait tre neutralis par la fragmentation des marchs mon-diaux en raison de svres conflits intra-rgionaux. Inventer des politiques quipuissent rsoudre ces problmes varis et complexes sera un dfi majeur pour lesgouvernements l'aube du prochain millnaire.

    Critres gnraux pour l'orientation des politiques

    Un bon point de dpart consiste identifier les diffrents types de politiquesqui correspondent le mieux aux conditions gnrales et du dynamisme conomi-que et de la priode de longue expansion. Au niveau gnral, la meilleure manirede progresser dans cette voie serait l'adoption de deux types de politiques, lunequi favorise la crativit et facilite le changement, et lautre qui ne se contente pasd'attnuer les conflits au niveau mondial mais suscite une coopration d'un typenouveau, bien plus troite.

    Favoriser la crativit et le changement

    La premire catgorie de politiques recouvre les initiatives susceptibles defavoriser la capacit des individus exprimenter, innover et prendre des ris-OCDE 1999

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    28ques, tant au niveau local quau niveau mondial. Traditionnellement, cest ltat-nation qui a constitu le terrain des politiques susceptibles damliorer les incita-tions, linformation et les garanties pour les particuliers et les entreprises. Sur leterritoire national, les gouvernements ont introduit tout un dispositif de lois, demonnaie commune, de rglementations, denseignement universel, de languecommune et de rgimes de protection sociale des pensions de retraite et desallocations de chmage aux subventions lies la restructuration. Nombre de cespolitiques ont, un moment ou un autre, jou un rle dans la rduction des incer-titudes, la diminution des cots de transaction, lacceptation dune redistributionsouvent douloureuse des ressources, lencouragement de linnovation et de laprise de risques.

    A lavenir, trois domaines pourraient se rvler propices de nouvelles initia-tives, tant dans le secteur public que dans le secteur priv. Premirement, de nom-breux rglements, rgles, programmes et produits sont rests figs dans une re deproduction et de consommation de masse. Il y a encore beaucoup faire pour chan-ger des comportements bien ancrs s'agissant par exemple des produits tailleunique , des structures lies une organisation hirarchique passive et delabsence de prise en compte des besoins des consommateurs ou des citoyens.Deuximement, divers systmes dincitation obsoltes allant des dispositifs rigi-des de rmunration et davancement lanciennet aux rgimes de couverturesociale, dimposition et de rglementation dcourageant la prise de risques, sontautant de facteurs qui vont contre linnovation et lexprimentation. Troisimementenfin, il existe des initiatives exprimentales plus positives crant de nouveauxespaces o lesprit dentreprise et la responsabilit individuelle trouvent un cadrepropice la prise de risques. A lavenir, comme il la dj t voqu dans le livreLes technologies du XXIe sicle : promesses et prils d'un futur dynamique, les bnfices despolitiques nationales favorables la crativit seront probablement trs significa-tifs, les individus tirant parti de la constitution de capacits technologiques etintellectuelles pour mettre en place au niveau local les fondements dune cono-mie mondiale du savoir viable.

    Par rapport aux mesures nationales destines favoriser le changement, lespolitiques adoptes au niveau international prsentent un handicap et un avan-tage. Le handicap est que jusquici lintensit de lactivit conomique au niveaumondial est beaucoup moins forte quau niveau local. En consquence, les possi-bilits sont beaucoup plus limites pour mettre en uvre les types dexprimen-tation, dinnovation, la conception de dispositifs permettant de rduire les risques,de codes communs et de lubrifiants socio-conomiques, qui caractrisent les tran-sactions quotidiennes. L'avantage est la relative absence au niveau internationaldinfrastructures institutionnelles et rglementaires hrites du pass et suscepti-bles de constituer une entrave pour lavenir. Dans la plupart des domaines delconomie mondiale, l'exclusion des changes classiques de biens, le processusOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    29de cration des structures institutionnelles capables doffrir la confiance, la trans-parence et lintgration qui caractrisent lespace national, en est encore au pre-mier stade. A lavenir, des actions concertes seront ncessaires pour mettre enplace au niveau mondial les dispositifs susceptibles doffrir la fluidit et laconfiance qui s'attachent normalement lespace national dans des domaines telsque les droits de proprit intellectuelle, le commerce lectronique, linvestisse-ment direct tranger, les marchs des capitaux et la diffusion des technologies.

    Favoriser la coopration mondiale

    La recherche de ces dispositifs conduit au second groupe de politiques quiseront probablement essentielles la ralisation dune longue priode dexpan-sion, savoir les initiatives susceptibles damliorer la capacit de rsoudre lesconflits au niveau mondial. L'importance de ces actions tient deux raisons.Dabord, comme le montre lexprience, des conflits pourraient bien se dvelop-per entre des politiques censes favoriser linnovation et faciliter lacceptation dela pleine concurrence au niveau national et celles qui visent lintgration de lco-nomie mondiale. Pour que des progrs soient raliss lchelle de la plante, ilsera primordial de rsoudre ce type de situation dans laquelle la protection etlencouragement des intrts locaux entre en conflit avec lintroduction de critreset de codes communs et avec les conditions de non-discrimination lies une co-nomie mondiale du savoir viable. Jusqu prsent, ces contradictions nont t trai-tes un niveau approfondi que dans un contexte rgional ou fdral comme celuide lUnion europenne o lintgration dpend, en partie, de la capacit coor-donner et mettre en place les infrastructures institutionnelles et rglementairesqui permettront dliminer la distinction entre la prise de risques l'intrieur et l'extrieur des frontires.

    La seconde raison pour laquelle les actions visant amliorer la capacit dersoudre les conflits seront primordiales pour crer les conditions dune longuepriode dexpansion est le rle majeur que jouent les efforts accomplis au niveauinternational. Dans la mesure o elles dboucheront sur une conomie mondialedu savoir, lintgration des marchs internationaux et la viabilit cologique exige-ront un plus haut niveau dorganisation et de prise de dcision effective au niveaude la plante. Le prcdent qui est probablement le plus positif, savoir lesdcennies de ngociations fructueuses dans le domaine de la libralisation deschanges, dmontre en fait combien il est difficile de trouver la fois les mcanis-mes institutionnels et les systmes de compromis susceptibles de rconcilier desintrts conflictuels.

    En fait, comme le dmontrent de nombreuses impasses constates lheureactuelle au niveau international, les capacits institutionnelles existantes ne sonttoujours pas adaptes la tche d'laborer les cadres de rduction des risquesOCDE 1999

  • Lconomie mondiale de demain : vers un essor durable ?

    30et les dispositifs plus larges de compromis mutuellement avantageux, ncessai-res la mise en place dune conomie mondiale intgre. L'laboration au niveaumondial de mcanismes efficaces permettant de prendre des dcisions quiaillent au-del des jeux somme nulle pour organiser des actions rellementintgres, telles que la mise en uvre d'un commerce lectronique concurrentielet fiable, sera primordiale pour instaurer la souplesse et linventivit qui gnre-ront une priode de longue expansion. Ici, la recherche de la viabilit cologiquepourrait ouvrir la voie de nouvelles possibilits sur le plan institutionnel, tellesque celles que laisse entrevoir lintroduction de quotas de CO2 changeables auniveau international.

    Politiques fondes sur des scnarios

    Il existe une mthode pour dgager les lments de l'ambitieux programmed'action ncessaire l'tablissement d'une longue priode d'expansion et pourtester sa faisabilit. Elle consiste examiner un certain nombre de scnarios otous les lments pourraient, avec des dosages de mesures lgrement diffrents,trouver leur place. Ainsi, les trois trajectoires possibles (analyses en dtail dansle dernier chapitre) donnent lieu des options bien distinctes quant l'action mener : le scnario Croissance de type locomotive (growth leader), dans lequelles tats-Unis en pleine expansion font avancer le monde ; le scnario Croissancede type recentrage (growth shift), dans lequel la diffusion l'chelle mondiale dudynamisme conomique promet une rapide convergence de bon nombre des paysen dveloppement vers le niveau des pays dvelopps et le scnario Croissancede type multipolaire (growth clusters), dans lequel un rseau de mtropoles etde rgions innovantes forte densit de connexions provoque un changementradical l'chelle de la plante. Ces scnarios ont tous en commun le fait qu'ilss'loignent peu des politiques macro-conomiques, budgtaires et d'ajustementstructurel prudentes qui sont essentielles l'instauration d'un contexte prvisibleet souple. Les scnarios diffrent en revanche sur les lments moteurs et les poli-tiques correspondantes au niveau national et international qui suscitent unelongue priode d'expansion.

    Croissance de type locomotive

    Dans le premier scnario, une hgmonie amricaine inconteste et renforcerepousse les limites technologiques un rythme soutenu au niveau mondial. Il estdonn libre cours l'innovation dans un contexte de concurrence extrme et dedestruction cratrice rapide lie une flexibilit conomique sans contrainte. Dupoint de vue des politiques, l'accent est mis essentiellement sur les initiativesnationales permettant un changement radical de l'organisation conomique etsociale la recherche de la productivit et du profit fonds sur l'innovation, mmeOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    31si les systmes mondiaux de protection des droits de proprit intellectuelle etl'investissement tranger direct jouent un rle important. Le succs de ces initiati-ves ne ncessite pas de nouveaux accords institutionnels internationaux, ce qui faitque la ngociation de mesures visant amliorer la viabilit cologique progresseau ralenti. La tendance actuelle des politiques budgtaires et montaires visant la stabilisation macro-conomique ainsi qu' une plus grande libralisation deschanges de biens, de services et de capitaux devrait toutefois se poursuivre. Lecouperet des impratifs conomiques et de l'ingalit sociale pourrait se faireencore plus tranchant qu'aujourd'hui.

    Croissance de type recentrage

    Dans le deuxime scnario, les pays mergents d'Asie, d'Amrique latine, etventuellement la Russie, s'engagent dans un processus de convergence rapidevers les niveaux de productivit et de revenus des pays de l'OCDE. Ici l'intgrationdes marchs mondiaux concide avec la possibilit pour les pays en dveloppe-ment d'adopter les pratiques exemplaires mondiales. Cela ouvre son tour la voie une division internationale du travail hautement productive. La plupart des paysde l'OCDE prosprent en concentrant leurs activits sur les biens incorporels et surl'ajustement au vieillissement de la population, alors que le reste du mondeavance grands pas sur la voie du dveloppement industriel pour rattraper lesniveaux de productivit les plus avancs. La cl des politiques se situe au niveauinternational, o la libre circulation des biens, des services, des capitaux, des tech-nologies et des comptences permet de raliser les investissements et les trans-ferts de savoir ncessaires au dcollage du monde en dveloppement. Dans lemme temps, compte tenu d'une profonde interpntration des intrts, il pour-rait devenir beaucoup plus facile d'obtenir la coopration ncessaire pour chercherrellement tablir une stabilit financire mondiale et un environnement dura-ble et pour tenter d'amliorer le sort des pauvres et des exclus du monde entier.

    Croissance de type multipolaire

    Le troisime scnario prvoit une longue priode d'expansion favorise par ledynamisme de rseaux multipolaires, composs de ples urbains et rgionauxd'innovation et de communication couvrant toute la plante. Les entreprises et lescollectivits locales se rapprochent pour dvelopper l'infrastructure et lesconnexions ncessaires la constitution de ples forte croissance. Dans ce scna-rio, la productivit connat une croissance extrmement rapide, l'effet des technolo-gies de l'information sur l'amlioration de l'efficience finissant par se faire sentir. Lesavantages gographiques lis la proximit, comme dans la Silicon Valley, se conju-guent avec ceux des communauts virtuelles qui font leur apparition sur l'Internet. Laconcurrence et l'innovation sont acharnes, le partage du savoir et l'accs des tech-OCDE 1999

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    32nologies peu coteuses abaissant les cots de dmarrage de l'activit en ce quiconcerne l'offre et contribuant informer le consommateur en ce qui concerne lademande. L'encouragement du commerce lectronique visant abaisser la fois lescots de l'accs et des transactions suppose l'adoption de politiques nouvelles derglementation et de rpression au niveau mondial, dans les domaines de la politi-que de la concurrence, du respect de la vie prive, de la protection de la propritintellectuelle et de la rglementation des paiements. L'orientation rapide vers desactivits conomiques moins consommatrices de ressources pourrait favoriser lesobjectifs de viabilit, mais le peu d'exigences manifest par ce scnario au regard dela coopration internationale pourrait bien limiter les avances sur des questionstelles que le changement climatique et l'ingalit dans le monde.

    De toute vidence, amener la croissance aux niveaux suprieurs la moyennecaractristiques d'une longue priode d'expansion impose des exigences plusstrictes et suppose un degr d'initiative en matire de politiques qui va bien au-del de la rflexion courante. Initialement, le besoin d'harmonie et de convergencedes systmes mondiaux renforce la difficult de la tche des responsables politi-ques qui consiste dfinir des objectifs communs et mettre en place des cadresanalogues. Cette tche deviendra encore plus dlicate du fait qu'une longuepriode d'expansion implique des niveaux trs levs d'exprimentation et dediversit qui gnreront invitablement des carts entre les projets, suivant qu'ilsrencontrent le succs ou l'chec. Combler ce foss exigera trs probablement desapproches tendant favoriser la prise de risques et des changements allant bienau-del des cadres traditionnels des politiques conomiques et sociales de l'rede la production, de la consommation et du gouvernement de masse.

    Continuit et changement Politiques de nature susciter une longue priode d'expansion

    Les politiques innovantes sont essentielles aux niveaux local, national etmondial pour encourager la crativit dans tous les domaines, des marchs nais-sants de l'conomie du savoir aux entreprises et aux communauts virtuelles d'unmonde entirement en rseau. Toutefois, la diffrence du processus trs longde mise en place des lois sur la proprit et le travail qui a accompagnl'industrialisation, le lancement d'une longue priode d'expansion ncessiteral'adoption rapide de lgislations appropries couvrant tous les domaines, del'adaptation des mesures de protection pour des formes de plus en plus diversesde proprit intellectuelle aux incitations conomiques visant introduire dessystmes nergtiques moins dommageables pour l'environnement. Lespolitiques prioritaires du programme d'action visant encourager une longuepriode d'expansion devront tirer parti des opportunits les plus prometteusesqui s'offrent, au fur et mesure que l'volution du monde rel intgrera des l-ments des scnarios Croissance de type locomotive, Croissance de typeOCDE 1999

  • Anatomie d'une longue priode d'expansion

    33recentrage et Croissance de type multipolaire . Pour affronter le vaste cha