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La Médiation, les Médiations Raport final

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La Médiation,

les Médiations

Raport final

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Ce projet est co-financé par le Fond Européen de Développement Régional (FEDER)

avec le soutien du Programme URBACT

Ville de Turin Secteur Politiques pour la Jeunesse Via delle Orfane 22 - 10122 Torino Tel. +39 011 4424923 Fax +39 011 4434821 e-mail: [email protected] Dirigeant Secteur Politiques pour la Jeunesse: Vittorio Sopetto Coordination du Projet: Giovanni Ghibaudi Rédaction: Daniele De Leonardis, Giusy Serra Texte: Sven Engel, Geoffrey François, Giovanni Ghibaudi, Aly Sassi, Riccardo Saraco, Paolo Schifano,

Hibat Tabib, Mathieu Verhagen. Il est permis se servir des données et des textes publiés, pourvu que soit indiquée clairement la source. Imprimé par : Pozzo Gros Monti Imprimé sur papier patiné ecologique

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Groupe de travail: Ville de Turin: Consolata Galleani d’Agliano, Enrica Baretta, Sara Caruso, Giovanni Ghibaudi, Danila Leonarduzzi, Michelina Nervo, Riccardo Saraco, Paolo Schifano; Ville d’Angers: Christophe Bechet, Michelle Moreau; Ville de Pierrefitte sur Seine: Hibat Tabib, Yamina Bendahmane, Catherine Le Fichant Jacquin; Ville de Bruxelles: Christel De Lutis, Nathalie De Smet, Aly Sassi, Mathieu Verhagen, Jan Willems; F.E.S.U. Forum Européen pour la Securité Urbaine: Sven Engel; S.U.D.C. Sécurité Urbaine et Diversité Culturelle, Ville de Liège: Paul Banack Biem, Geoffrey François.

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Pour des ultérieures informations sur EUROMEDIATION:

Ville de Turin

Secteur Politiques pour la Jeunesse Via delle Orfane 22 - 10122 Torino

Tél. +39 011 4424923 Fax +39 011 4434821 e-mail: [email protected]

http://europa.eu

http://urbact.eu

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Table des matieres

Introduction page 2

Chap. I Résumé des quatre séminaires page 3

Chap. II Glossaire page 11

Chap. III Analyse comparative et évaluation page 35

Chap. IV Interventions au séminaire final page 47

Conclusions et perspectives: d’un point d’arrivée à un point de départ page 77

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Introduction

Par ce recueil des actes des séminaires, nous souhaitons présenter le travail du groupe

“Euromédiation Secucité”, qui a vu la particiption d’un certain nombre de villes europèennes, à une réflexion sur le rôle de la médiation sociale et communautaire, dans le cadre de la sécurité urbaine dans les villes européennes. Euromédiation Secucité fait partie du Programme Urbact et parmi ses activités, il prévoit la mise en place de groupes de travail qui s’occupent de thèmes spécifiques, visant à améliorer la pertinence et l’efficacité des politiques de lutte contre la concentration des problèmes économiques, sociaux, environnementaux et alimentaires dans les villes et les réfléxions sur les futures politiques communautaires à développer, à partir d’expériences locales concrètes en faveur des villes.

Le goupe de travail “Euromédiation Secucité”, dont font partie les représentants des villes de Angers, de Bruxelles,de Liège, de Pierrefitte sur Seine et du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine a été coordonné, en sa qualité de chef de file du projet, par la ville deTurin, qui a constitué une équipe ad hoc, formée de fonctionnaires du Secteur des Politiques pour la Jeunesse, de la Police Municipale, du Secteur Banlieues et du Secteur Famille de l’Assistance Sociale ainsi que des deux partenaire du secteur social privé, Gruppo Abele et Associazione Progettarsi.

Le groupe européen, en partant de l’idée que la médiation peut représenter “une modalité spécifique de gestion d’une société complexe constituée d’une multiplicité de mondes et de citoyennetés”, a travaillé depuis le mois de septembre 2005 jusque au mois d’octobre 2006, en se confrontant sur les expériences, les projets, les politiques de sécurité et de résolution des conflits activés par chacune des villes partenaires.

La conférence finale a constitué la phase publique qui a rendu compte des résultats de l’activité du groupe de travail concernant les objectifs prévus: identifier des politiques intégrées de médiation, en ayant à l’esprit les différents domaines d’application (social, communautaire, scolaire, familial, interculturel). Des politiques axées sur l’interaction coordonnée d’opérateurs publics (éducateurs, animateurs, enseignants, agents de proximité, etc), et opérateurs privés; identifier des processus d’harmonisation des diverses approches de prévention qui ne s’exluent pas réciproquement, mais qui exigent, toutefois, une stratégie globale dans le domaine de la sécurité urbaine; stimuler, au cas où elles n’existeraient pas, la création d’activités de médiation et de gestion pacifique des conflits, en tant qu’interventions préalables à mettre en oeuvre, dans une optique visant à créer des liens sociaux, à l’intérieur de la communauté d’appartenance et d’accès au droit; encourager la connaissance et la comparaison des pratiques activées à l’échelon local, dans le contexte européen et dans les différents secteurs d’application (social, communautaire, scolaire, familial, interculturel); identifier une série de paramétres d’approche aux différentes formes de médiation dans des contextes urbains diversifiés; définir un cadre théorique de référence auquel se rapporter pour produire des techniques spécifiques et des outils s’avérant utiles à la gestion des conflits et aux pratiques de médiation dans les contextes locaux pouvant étre transférées dans d’autres réalitées urbaines européennes.

MICHELE DELL’UTRI

Adjoint préposé à la Jeunesse et à la

Coopération Internationale

BEPPE BORGOGNO

Adjoint préposé au Personnel,

à l’Organisation et à la Police Municipale

ILDA CURTI

Adjoint préposé aux Politiques

pour l’Intégration

MARCO BORGIONE

Adjoint préposé à la Famille,

à la Santé et aux Politiques Sociales

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Chap. I Résumé des quatre séminaires

(par Sven Engel – FESU) LE PROJET

Le sujet de la régulation des conflits, partant des expériences locales, a obtenu une connotation spécifique qui a attiré l’attention des politiques de sécurité urbaine au niveau européen. Les villes recherchent des actions qui permettent de développer accueil, confiance, soutien, solidarité et proximité auprès des habitants. Ceci est le point principal pour les quartiers de nos villes aujourd’hui. L’expérimentation des villes dans les politiques d’accès au droit et de régulation des conflits continue, mais il manque une généralisation de ces politiques d’attention et un accompagnement par des interventions intégrées. Néanmoins, on peut de mieux en mieux observer que la prolifération des projets ou interventions des expérimentateurs demande un cadre de référence qui soit commun, partageable au niveau européen.

C’est pour atteindre cet objectif principal que le projet EuroMédiation a travaillé pendant presque deux ans avec grand enthousiasme et une multitude d’expériences et compétences de terrain.

Les objectifs et actions de ce projet sont : (1) Promouvoir la connaissance et la comparaison des pratiques de médiation qui sont en place sur le plan local et ceci dans leurs différentes applications (social, locale, école, pénal, famille, et interculturels). (2) Déterminer les paramètres d’une approche commune aux différentes formes de médiation dans les différents contextes urbains qui soit partagé par le groupe. (3) Définir un cadre de référence théorique (par l’acquisition d’une terminologie commune) qui peut être lié à la production de techniques et instruments spécifiques et qui sont utiles dans la gestion de conflits et pratiques de médiation dans leurs contextes locaux et qui sont transférables vers d’autres situations urbaines en Europe.

Le projet EuroMédiation1, piloté par la ville de Turin dans les années 2005-2006, s’inscrit dans le cadre du programme URBACT2 de l’Union européenne. Utilisant une forme de travail en réseau avec plusieurs villes partenaires (Pierrefitte-sur-Seine et Angers en France, Bruxelles en Belgique), un groupe de travail invité (SUDC piloté par la Ville de Liège) et le Forum européen pour la sécurité urbaine3, le projet vise plusieurs objectifs de promotion de la médiation en Europe.

En outre, les participants aux projet ont produit et analysé des études des cas4 sur les différentes

activités de mediation dans les villes partenaires, avec le but d’avoir une compréhension partagée de ce qui se passe dans les villes qui participent au projet.

Un mécanisme d’évaluation a été appliqué au projet entier. Le but de l’évaluation était d’identifier

les aspects des expériences de médiation, menées au niveau local, qui peuvent devenir, dans le groupe de travail, des modèles d’intervention pour les autres partenaires et même pour autres villes en Europe. LA NOTION DE MEDIATION

Dans un premier temps, les participants ont discuté des différentes notions, existant dans leurs villes, du terme médiation, en faisant état des exemples de projets de médiation et en précisant leur analyse dans le contexte local. Cette discussion a permis de dresser une liste des problèmes typiques que l’on rencontre régulièrement dans le travail de médiation.

1 Voir tous les détails sur le projet sur le site web du FESU : http://www.urbansecurity.org/fesu/secutopic_art.aspx?id_sec=57&id_art=1776 2 Voir le site du programme http://www.urbact.org 3 Sur le FESU, voir http://www.urbansecurity.org 4 Mise à la disposition sur demande au chef du projet.

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Les défis identifiés sont: 1. La médiation doit être différenciée du travail social traditionnel (en poussant les individus à une

approche structurée). 2. Les activités de médiation sont souvent complexes et liées à plusieurs problèmes différents

comme la sécurité, la violence, le conflit, les problèmes sociaux, l’exclusion, les familles, etc. 3. Le problème de l’indépendance (au sein des institutions ou des administrations publiques) : Les

médiateurs devraient garder une certaine indépendance par rapport aux organisations et aux institutions et certainement être indépendants à l’intérieur de la structure du conflit où ils jouent le rôle de médiateurs; ils devraient garder une discrétion professionnelle qui exclut la chronique journalistique et certaines formes de coopération avec la police.

4. L’implication volontaire des gens en conflits (et non une obligation à participer au processus de médiation, la médiation pénale mise à part)

5. La confiance mutuelle et la compréhension entre médiateurs et utilisateurs des services 6. La neutralité dans les conflits pré-existants, intervention extérieure (cela ne s’applique pas à la

médiation judiciaire) 7. L’aspect informel de beaucoup d’interventions 8. La médiation devrait idéalement être un processus, basé sur les liens sociaux et organisé en

partenariat (la finalité est d’apaiser, avec le but de résoudre un conflit ou de se concentrer sur le processus à l’intérieur duquel un conflit peut se refléter et s’exprimer). Or, ce n’est pas toujours le cas.

9. Plusieurs activités de médiation dans les villes européennes se sont développées au départ d’un événement initial (comme une conférence ou un problème local spécifique), en prenant en considération la médiation comme une possible réponse pour faire face aux conflits dans les aires urbaines (comme les révoltes, les agitations, les attaques racistes, etc.) et elles ont été développées où les structures de l’état ont carrément échoué.

10. Les activités de médiation varient considérablement dans leur forme organisationnelle : elles peuvent avoir la forme publique, privée (associations non profit) ou mixte.

11. La formation et le recrutement de qualité restent des points cruciaux si l’on veut délivrer des services de haute qualité.

12. La médiation prend le plus souvent place dans les quartiers marginalisés. Ce fait risque de placer les activités de médiation dans un paradoxe: bien qu’elle soit mise en place pour alléger les problèmes de pauvreté, l’intervention de médiation peut contribuer à renforcer des images négatives et une perception négative de certains quartiers (risque d’une double stigmatisation).

On peut mettre en évidence différentes façons de caractériser la médiation et plusieurs critères pour

mesurer et comparer les formes que prend la médiation dans les différentes villes. Avant tout, il est possible de définir des typologies de médiation en considérant leur domaine d’intervention et en associant des différents groupes cibles (Figure 1).

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Figure 1 : Typologies de médiation

La médiation au niveau local peut être décrite avec différents termes qui sont en anglais local mediation, community mediation ou neighbourhood wardening et en français médiation locale, médiation communautaire, médiation de quartier, de proximité, de voisinage et similaire (le termes sont entre-eux synonymes).

Deuxièmement, on peut distinguer les pratiques de médiation en fonction des différents domaines

géographiques d’intervention . Ce qui permettrait de faciliter la comparaison entre ceux-ci. Par exemple, la pratique de médiation sociale dans les quartiers socialement marginalisés pourrait être assez similaires au niveau transnational au vu des similitudes en matière de situations sociales des communautés désavantagées dans les différentes villes plutôt. Elles pourraient par contre se différencier des services de médiation qui prennent place dans les villes, dans différents quartiers et parmi différentes classes sociales. Un autre exemple : Un médiateur familial qui travaille avec un couple de classe moyenne séparé pourrait faire un travail très différent par rapport au travail de ses collègues qui travaillent dans la même ville mais dans un quartier caractérisé par un taux élevé de chômage et par des tensions sociales.

Les différences à l’intérieur de la même ville pourraient par conséquent être plus grandes que les différences dans les activités de médiation de la même typologie (le même cercle externe du tableau) mais dans différentes villes.

En tout cas, un large consensus s’est créé sur les frontières de l’objet de notre étude, à savoir les formes de médiation dans les villes, les quartiers, les écoles, les familles, et parmi les groupes de résidents ou d’associations. Nous avons décidé de mettre de côté les formes de médiation judiciaire, parce que cette forme est souvent gérée par les organismes nationaux, pas entièrement volontaires et parce qu’elle suivent des mécanismes très précis, bien connus et déjà bien éprouvés.

Troisièmement, le projet EuroMédiation a identifié différents principes fondamentaux de la

médiation. Conformément aux discussions dans le groupe, la médiation devrait être (dans le cas idéal) : 1. accessible à tous 2. attentive à la neutralité (par rapport aux différentes positions à l’intérieur du conflit) 3. indépendante (en ayant confiance en l’administration publique) 4. Orientée sur le processus plutôt que sur le résultat 5. informelle

LOCALE: quartier,

immeubles, maison

INTERCULTURELLE:

Communautés ethniques et culturelle

INTER-PERSONNEL:

familles couples

JUDICIAIRE: cours,

mediateurs, délinquents

EDUCATION: élèves,enseignan

ts, assistants sociaux

SOCIALE: Les villes et

leurs services sociaux

PLUSIEURS TYPOLOGIES

DE MEDIATION

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6. confidentielle

Un bref échange a montré qu’on ne peut pas garantir la complète indépendance parce que tous les médiateurs dépendent d’institutions, que se soit l’administration publique ou l’association avec laquelle ils sont normalement bien identifiés. L’indépendance peut toutefois être améliorée afin que les médiateurs soient assurés de pouvoir travailler à l’abris d’instructions touchant au processus-même de médiation.

Les échanges entre les partenaires du groupe de travail ont permis de réunir les connaissances

émanant de tous les participants et de regrouper leurs connaissances en trois « modèles » de médiation, comme repris dans le tableau suivant. MODELES DE MEDIATION

PROCESSUS

ACTIONS

PUBLIC

ZONE

BUTS

NIVEAU

Médiation comme

intervention sociale

(„médiation traditionnelle“)

Processus de communication

Travail social Support individuel

Communauté organisée

socialement

Quartiers Ecoles

Changement de la situation individuelle

Personnel

Médiation comme conflit

ciblé

Processus de réconciliation

Modération de conflits dans les villes, les écoles,

les quartiers.

Individus en situations de

conflit

Villes Résolution de Conflit

Vie commune Sécurité

améliorée

Interpersonnel

Médiation comme projet

politique

Processus de Transformation

Plein pouvoir Participation

Cession de pouvoir

Citoyens et résidents

Villes Transformation sociale et politique

Social

Figure 2: Modèles de médiation

Une tentative de définition a été arrêtée par le groupe. La médiation peut être définie comme :

« un processus modéré par une troisième personne portant un regard sur l’implication émotive des partenaires en conflit,

renfermés dans leurs monologues, afin qu’ils se rencontrent les uns-les autres et qu’ils renouvellent leur communication.

La médiation n’est pas seulement un processus de prévention et de règlement du conflit, mais aussi un processus de création et de réparation des liens sociaux ».

Les travaux du groupe ont finalement permis d’identifier différents critères d’analyse de

comparaison et d’évaluation en vue de définir et de comparer les activités de médiation dans les villes partenaires (voir les autres chapitres de cette publication). Nous nous limiterons ici à les énumérer rapidement, les critères étant expliqués plus loin dans le présent rapport:

1. Les définitions de médiation (elles peuvent se baser sur la recherche d’une littérature académique ou sur la recherche des déclarations sur la mission des organismes de médiation)

2. Les types de conflits: individuel, interpersonnel, interne au groupe, culturel, social, etc. 3. Les objectifs de la médiation:

- dans la médiation reliée au conflit: résolution, expression ou simplement réflexion sur les conflits, questions sur la sûreté

- dans la médiation qui n’est pas reliée au conflit : construction des liens sociaux, amélioration des relations dans la communauté

4. Les buts des activités de médiation : amélioration sociale, culturelle et de la sécurité et autres 5. Les niveaux d’intervention: individuel – interpersonnel - collectif

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6. Les formes d’intervention: formelle – informelle, obligatoire– volontaire 7. La localisation: centralisée – décentralisée 8. Les demandes et les saisines pour la médiation des participants: individus, écoles, police,

associations et organisations (de bailleurs, communautés, etc.) 9. Les formes de saisine: directes – indirectes 10. Les groupes ciblés: citoyens, communautés culturelles, linguistiques ou géographiques, écoles,

familles, adolescents, prisonniers, etc. 11. Les zones/endroits ciblés: résidents d’un quartier ou d’une rue, résidents d’un immeuble,

bénéficiaires des services publics. 12. Les méthodes: orientées sur le processus- orientées sur le résultats 13. Le statut et la formation des médiateurs: professionnels – volontaires 14. Le mandat: mandat public (ville), privé (fondations, associations) ou partenariat public/privé

(contrats pour la sécurité de la communauté locale) 15. Les financements des activités de médiation: publics, privés, ou les deux 16. Les limites de la médiation: actes de grave criminalité, conflits très violents, etc.

POLITIQUE LOCALE ET MEDIATION

Une bonne partie des discussions de ce projet ont tourné autour des questions des relations avec les institutions publiques et de leurs politiques en général.

La relation avec les institutions publiques, et en particulier l’administration locale, est importante car

si cette relation est trop intime, les médiateurs prennent des risques sur leurs standards de neutralité et d’indépendance (cela s’accompagne d’une éventuelle solution de séparation des bureaux de médiation des autres services de l’administration sociale).

Il existe un consensus sur le fait qu’il est essentiel d’impliquer un grand nombre de participants,

comme les administrations des villes, le système judiciaire (cours, services légaux, systèmes spécialisés dans la justice des mineurs, etc.), les associations, les voisins et résidents d’un quartier, les services spécialisé de la ville etc. En ce qui concerne les institutions publiques et leurs représentants élus, on peut identifier trois facteurs clé :

- les relations personnelles avec des figures responsables à l’intérieur de ces institutions sont essentielles mais…

- les relations de pouvoir doivent être considérées à l’intérieur et à l’extérieur de ces institutions (compétences institutionnelles, compétition, parties politiques différentes, etc.).

- Il est primordial de travailler à un accord à propos des contenus et des objectifs de médiation (différents participants doivent se mettre d’accord sur ce qu’ils veulent faire).

Le dernier point pose une série de questions qui doivent être résolues : la culture institutionnelle

traditionnelle ne cadre pas à la culture de médiation, ce qui peut conduire à des contrastes contreproductifs à plusieurs niveaux :

- des horaires de travail ( la médiation dans les rues ayant souvent lieu la nuit) des médiateurs et des employés publics. Ceux-ci doivent être déterminés en fonction des rencontres,

- des questions légales, - des structures institutionnelles, - de la coordination, - du budget - et de l’évaluation des résultats.

Si les institutions publiques connaisent certaines résistances à s’impliquer dans les activités de médiation, l’insistance et la publicité, la plus étendue possible, peuvent aider à améliorer l’implication publique, tout comme la formalisation de la relation sous la forme d’une convention signée qui peut se poursuivre de nombreuses années dans les cas meilleurs. Dans certains pays, le changement des supérieurs à l’intérieur des forces de police (comme les agents de police qui sont délégués) posent le problème de la continuité et changent les protocoles de collaboration.

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En guise de résumé de cette analyse, nous dirons que, afin d’éviter les structures lourdes et bureaucratiques, il vaut mieux, en général, travailler à l’intérieur d’une association à but non-lucratif mais avec des liens qui soient le plus proche possible des administrations locales. A propos de ces liens, le soutien politique des élus est essentiel. Une « structure hybride », dans le sens d’une organisation indépendante et sans but lucratif mais avec un maximum de support financier et politique des administrations semble être la meilleure solution. Ainsi que la recherche d’un grand partenariat avec de nombreux participants (comme la police les propriétaires, associations des résidents, clubs culturels, etc.) afin d’éviter la domination.

L’importance de séparer clairement les rôles des avocats-médiateurs et des médiateurs a aussi été reconnue par tous les participants. A côté du fait que les avocats peuvent souvent être directement consultés et impliqués dans les procédures de médiation (qui concerne les questions légales), il est important de soutenir qu’un processus de médiation est essentiel et qu’on n’y doit pas obligatoirement faire face du point de vue du sens légal en laissant de côté le processus juridique. Au contraire, le système judiciaire est bien capable de régler certaines formes de conflits (par exemple les conflits avec peu ou pas de relation personnelles entre les partie en conflits, ou les cas d’agression grave, de criminalité, etc.). Dans certaines villes les deux pratiques diffèrent tellement qu’on a deux structures différentes, un service de médiation et un service pour la médiation pénale qui suit ces propres règles de gestion de conflits sous la tutelle des courts.

Une autre importante distinction apparaît en relation avec les aspects de la sécurité urbaine. Si

certaines pratiques de médiation, qui participent à la prévention de la criminalité locale en plus de la démarche de partenariat (comme à Bruxelles, Liège, Angers) et inclut donc un aspect de sécurité et un objectif affirmé de prévention et de dépassement des conflits, d’autres approches, par exemple celui de la ville de Pierrefitte, considèrent que la médiation est une valeur humaine et souligne l’aspect politique de la médiation comme un droit du citoyen. On a cependant abouti à un consensus lorsque on a interprété les problèmes de la sécurité comme les symptômes des tensions sociales qui peuvent être trop facilement manipulées par la politique.

Est-ce que les aspects de la sécurité doivent apparaître parmi les buts de la médiation ? : à cette question nous n’avons pas encore répondu, mais le débat a présenté une grande diversité d’approches de la part des villes partenaires. Pour Liège et Angers, la réduction de l’insécurité constitue un but à court terme, la réduction d’une insécurité subjective le but à moyen terme, et la réparation et l’amélioration du tissu social le but à long terme. Alors que Pierrefitte aspire dès le début à améliorer les façons de vivre ensemble (ce qui n’est pas nécessairement une contradiction). La médiation est par conséquent souvent inscrite dans une structure de sécurité mais elle va aussi au-delà des aspects concernant la sécurité en établissant une politique locale efficace pour faire face à la violence et à la criminalité comme symptômes sociaux et économiques de dimensions multiples profondément enracinés dans la société. La médiation est dans ce sens simplement un coût parmi d’autres coûts pour améliorer la vie de tous. Ce débat a mis en évidence par la suite d’importantes restrictions dans la médiation : les actions criminelles déterminent une claire frontière pour les activités de médiation (voir plus haut).

Le groupe EuroMédiation a fondé ses analyses sur la nécessité d’une « politique publique de

tranquillité » et sur la nécessité de mieux vivre ensemble. La médiation est vue ici comme une intervention dans plusieurs champs politiques différents dans le sens où elle met en relation le maire et toutes les activités de la ville avec le grand public. Les buts politiques sont transmis au public et les nécessités publiques sont transmises aux responsables des décisions politiques et des services de la ville. Le rôle de la médiation dans ce processus est de mettre l’accent sur l’aspect humain. Chaque aspect de la sécurité était plutôt vu comme problématique, du moment que la politique de la sécurité répondait souvent aux sensations individuelles, plutôt qu’aux réalités objectives. Ce groupe de travail a donc senti que la nécessité ne devrait être fondée ni sur la politique sociale ni sur la politique culturelle mais devrait aspirer à poursuivre une approche créative, qui développe constamment de nouveaux projets culturels pour se connaître et se rencontrer les uns et les autres. La médiation est dans ce sens un facteur d’échange plutôt qu’un facteur qui produit la conformité sour la forme de normes définies.

En outre, on s’est demandé à quel niveau les activités des politiques de la médiation devraient

intervenir. Considérée comme un instrument dans les mains de plusieurs personnes, la médiation est vue comme une façon de produire de la « gouvernance » au niveau de la ville, comme support des associations au niveau des citoyens, et comme support social au niveau individuel. A ces différents niveaux de pouvoir, la médiation dépend dans le premier cas de la politique nationale, régionale et locale, au deuxième niveau des

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financements de la ville et des quartiers et au troisième niveau du style individuel, personnel et des capacités des médiateurs. Les niveaux de décisions concernant le développement et les financements sont souvent différents de sorte que les différents participants déterminent la politique de la médiation dans une certaine ville ou dans une certaine région. En terme généraux, on devrait dire que les activités de médiation, entreprises par les pouvoirs publics, aspirent à la réduction de la violence et de la criminalité et qu’elles améliorent la sensation de sécurité personnelle, alors que les efforts des fondations et des associations promeuvent la médiation comme une activité qui devrait être administrée par plusieurs politiques locales. Le groupe de travail a proposé par conséquent la formalisation des activités de médiation sous différents horizons :

1. à court terme: amélioration du contexte de la sécurité objective (avec la résolution du conflit) 2. à moyen terme: amélioration des sentiments de sécurité personnelle (avec des activités qui réduisent

la peur et l’anxiété) 3. à long terme: renforcement de la cohésion sociale et amélioration de la vie et de la convivialité dans

la ville (avec la promotion de la participation locale et des contacts entre les résidents). Les membres de ce groupe n’ont cependant pas tous souhaité classer la médiation selon ces

paramètres. Ils ont préféré considérer la médiation comme un instrument répondant à la situation sociale qui est, dans les villes connaissant de grands problèmes sociaux et conflictuels, constamment plus complexe. MEDIATION ET SECURITE

Ce groupe de travail a enfin différencié les différentes formes d’intervention entre la police et les médiateurs. A Turin, il existe une coopération directe d’équipes mixtes alors que, dans un deuxième cas, il n’existe qu’une communication unilatérale de la part de la police vers les médiateurs avec le but d’éviter les actions légales là où d’autres types d’intervention semblent être plus efficaces (par exemple à Liège). Un troisième type serait l’absence totale de coopération avec un soucis de la défense de la réputation des médiateurs et de la crédibilité envers les minorités ou parmi les communautés socialement marginalisées. Un quatrième type peut être vu, grâce à de nouvelles approches, comme une médiation entre la police et les représentants de la communauté.

La discussion sur les relations entre médiation et sécurité qui a commencé au séminaire de Bruxelles,

s’est poursuivie à Angers. Premièrement, il existe une différence entre la situation réelle de sécurité et les sentiments ou

impression conséquante à cette situation ; c’est la différence entre une perspective subjective et la réalité objective. Ensuite, il existe une différence (quelquefois très importante) entre les chiffres de police et les études de victimisation, qui indiquent plus largement le contexte socio-économique de la criminalité et prennent plus en compte les victimes et leurs besoins particuliers.

Un exemple de référence pourrait être la médiation au sein du commissariat de police (Pierrefitte), où des policiers et médiateurs ne travaillent pas ensemble mais côte à côte. Il est donc possible de s’occuper de certaines situations par des policiers, et assurer un soutien aux victimes par des médiateurs formés. En même temps, cette coopération permet de sensibiliser les policiers aux besoins plus larges que la sécurité des citoyens.

Deuxièmement, le concept de sécurité devrait être considéré dans son sens large, donc incluant la

sécurité sociale, émotionnelle, psychologique et familiale des citoyens, et de tous les citoyens. Si la médiation intervient pour prévenir et/ou gérer des conflits, les objectifs entre dispositifs de médiation et dispositifs plus sécuritaires restent les mêmes : réparation et construction du lien social, participation des citoyens dans les affaires par lesquelles ils sont concernés etc. Dans cette perspective, la médiation apparaît comme un des outils importants pour vivre en sécurité, sans être menacé par des réalités ou le sentiment d’insécurité. Par contre, il est vrai qu’il existe des zones de non-droit dans l’espace public et à l’intérieur des foyers (violence domestique), et malheureusement la médiation n’est pas une baguette magique. En conclusion, la médiation peut réduire une réalité ou un sentiment d’insécurité, et elle est dans ce sens à la base de toute sécurité. Ce n’est donc pas par hasard que le but d’améliorer la sécurité est clairement inscrit dans le cadre des dispositifs de médiation de beaucoup de villes européennes (par exemple dans les CLS). Ce qui reste difficile dans cette relation est de bien faire l’articulation entre répression et prévention.

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Troisièmement, il faut considérer un risque de stigmatisation qui se produit par le fait qu’on ne met

en général des dispositifs de médiation que dans des quartiers considérés «en difficulté». Cette logique peut promouvoir involontairement une territorialisation et une ghettoïsation, et si la médiation n’est plus appliquée que dans cette perspective sécuritaire elle ne sert à plus rien.

Quatrièmement, les intérêts sécuritaires dans l’administration d’une ville par exemple ne sont pas

toujours congruents avec les intérêts préventifs présents dans un quartier. Il se pose donc la question de satisfaire ceux qui financent la médiation mais de développer, en même temps, la pratique dans le quartier basé sur les principes d’émancipation, d’autonomisation et de responsabilisation. Le problème est parfois de trouver le bon équilibre entre les deux. S’exprime ici la crainte que la médiation soit détournée par un discours et un projet politique ultra-répressif. ANALYSE COMPARATIVE

Une grande partie du séminaire a été dédiée à l’analyse comparative des services de médiation des villes partenaires. Toute la richesse des projets et approches mise en place dans les villes à travers l’Europe est documentée dans les études de cas et les description des projets qui ont été collectionées par le groupe EuroMédiation (voir les chapitres concernés).

Ces études des situations locales ont formée la base de l’analyse comparative des approches, et a permis de développer tout un glossaire de médiation qui reprend le consensus large réalisé entre les participants au projet EuroMédiation (voir glossaire).

Finalement, ces études peuvent s’avérer extrêmement utiles et pratiques pour chaque ville ou administration qui souhaiterait installer un service de médiation dans le cadre de sa politique locale.

Le Glossaire et les études de cas reprennent les choix pratiques et d’instruments utilisés dans les

villes européennes. Une confrontation des activités à travers un certain nombre de mots clés (établis pendant le séminaire) a permis de reconnaître les pratiques que les partenaires considèrent les plus adéquates et les mieux développées.

L’objectif fut d’obtenir une «carte » des choix pratiques des acteurs impliqués dans le groupe de

travail qui permette aux autres médiateurs d’avoir une vision synthétique et d’ensemble afin de pouvoir ainsi choisir parmi les différentes possibilités.

Cette démarche a abouti sur un tableau où les mots clés se croisent avec des exemples concrets de médiation (voir le tableau dans le chapitre sur l’analyse comparative).

CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Grâce au grandes compétences et à l’engagement immense des participants venus de toutes les villes partenaires, le projet EuroMédiation se termine avec un grand succès en soumettant aux personnes intéressées une analyse comparative des approches à la médiation dans différentes villes européens, et fait le point sur le travail très riche de médiation comme il est réalisé au quotidien dans les quartiers de nos villes. Cette analyse permet de voir les point forts et les défis de projets si différents en fonction des contextes locaux qui changent avec les quartiers et les situations spécifiques rencontrées ici et là.

En outre, le groupe a permis de se mettre d’accord sur un grand nombre d’aspects importants dans le travail de tout projet de médiation et souhaite proposer des recommandations aux villes qui pensent établir un service propre de médiation. Le glossaire reflète ce consensus et peut servir de fil rouge et de point de références pour de nouveaux projet.

Il reste à espérer qu’un travail en réseau pourra continuer à travers l’Europe pour promouvoir la médiation comme une des meilleures innovations dans la politique de la ville.

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Chap. II Le Glossaire

(par Giovanni Ghibaudi, Aly Sassi, Mathieu Verhagen, Paolo Schifano, Geoffrey François)

Préface

Faire travailler ensemble des experts venant habitant à plusieurs de kilomètres les uns des autres semble une gageure. Toutefois, le groupe de travail Euromédiation Sécucité y est parvenu grâce à l’adoption d’une méthodologie progressive s’attachant à partager les responsabilités entre ses différents membres et partenaires.

Le glossaire dont la réalisation a été approuvée d’un commun acord, par tous les partenaires

souhaite offrir une interprétation des principaux éléments auxquels on doit se référer, pour mettre en place des politiques de soutien à la sécurité urbaine, par le biais de la médiation, en tant qu’outil visant à maintenir ou à reconstruire des liens sociaux

A partir des thèmes qui ont été approfondis pendant les séminaires locaux et les expériences

concrète, auxquelles nous nous sommes confrontés au fur et à mesure que notre travail progressait, nous avons décidé de confier à chaque partenaire, la tâche de rédiger un ou plusieurs paragraphes du glossaire. Le contenu final est le résultat d’une contribution partagée et s’est enrichi d'ultérieures précisions et suggestions, par rapport au texte original.

Néanmoins, nous sommes conscients d’être confrontés à un thème qui, à l’heure actuelle, est encore

dans une phase d’exploration. En effet, si nous analysons ses capacités en matière de transformation en politiques participées et partageables- comme nous le montre les débats au niveau mondial- nous constatons une grande diversité de projets qui oscillent entre des projets axés sur celle que l’on appelle “tolérance zéro”, et des projets axés sur la sauvegarde des liens sociaux.

Le travail qui suit veut être, à la fois, une contribution au débat en cours et une stimulation à d’ultérieurs approfondissements, entre les opérateurs des villes qui, à l’échelon européen, - ont choisi de transformer la culture de la médiation en choix spécifiques de politique locale visant, comme l’affirme le Manifeste de Saragosse1 “, à “rejeter toutes stratégies qui se posent pour but, d’exploiter la peur, au lieu de prévoir des interventions, aptes à favoriser une citoyenneté active, la prise de conscience de l’appartenance au territoire urbain et le développement de la vie collective”. INTRODUCTION: De l’évolution de la dynamique conflictuelle dans nos centres urbains

Il est un fait de mieux en mieux connu et accepté que le conflit, en tant que rencontre d’éléments contraires ou divergents, est un processus de plus en plus présent dans nos contextes urbains contemporains.

Les conflits qui naissent aujourd’hui dans nos villes sont aussi le fruit de mutations que vit notre

monde : la mondialisation, l’élargissement urbain, l’évolution des technologies, l’étalement de la palette intergénérationnelle ainsi que la rencontre de modes de vie et d’expression de plus en plus diversifiés. Tous ces indicateurs de changement social ont une répercussion sur la vie quotidienne et peuvent constituer, dans un certain sens, des éléments générateurs de conflits.

Les mouvements croisés de migrations et de précarisation ont, entre autres variables, entraînés la création de lieux de vie très densément peuplés et caractérisés par une grande diversité culturelle des habitants qui les composent 2. Les populations de nos centres urbains semblent, par ce fait, de moins en moins homogènes et uniformes.

1 Tiré du Manifeste de Saragosse sur la sécurité urbaine et la démocratie – 2,3 et 4 novembre 2006

2 La composante culturelle doit être, ici, considérée dans son acception la plus large. Par « culture », on entend, certes, les aspects intellectuels ou rituels propres à une civilisation ou une nation déterminée. Mais, l’on entend également l’ensemble des formes d’attitudes sociales, de mœurs et d’habitus (au sens de P. Bourdieu) que l’on acquièrent par l’éducation (à ces différents stades) et par l’apprentissage social (les expériences).

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D’autres problématiques, telles que le chômage, le logement, la mobilité, l’usage de l’espace public, les relations entre les citoyens et celles entre le citoyen et l’administration, viennent se greffer et constituer , parmi tant d’autres, des causes et des expressions du conflit dans la vie de tous les jours.

Il s’agit également de souligner que ces changements ont également contribué à l’effacement, pour

ne pas dire à la disparition, des figures traditionnelles de pacification. La population, surtout citadine et culturellement diversifiée, ne voyant plus dans les figures du curé et de l’instituteur une quelconque représentation de conciliateur.

En effet, les rôles sociaux, de chaque acteur de notre réalité urbaine moderne, se sont fort diversifiés et se sont, par la même occasion, complexifiés en se spécialisant à l’extrême. Ainsi, par exemple, le chauffeur de bus n’est plus la personne à qui l’on paie le montant de son trajet, avec qui on entame une conversation cordiale ou encore celui qui intervient (et même réprimande) en cas de trouble. Chacune de ces missions étant désormais dévolue à une variété d’acteurs (principe durkheimien): le guichetier, l’agent d’ambiance, le contrôleur, le chauffeur, etc. Dès lors, cette complexification croissante (ou émiettement) fera perdre ce côté «reliance» que représentaient auparavant ces acteurs du contrôle social informel3.

Enfin, les organes classiques (police, justice) de régulation des conflits se sont révélés insuffisants, et

parfois même inadaptés, pour répondre adéquatement à cette conflictualité croissante. Le système judiciaire se trouve, ainsi, submergé par l’accroissement quantitatif et qualitatif des conflits et contentieux. Ces derniers devenant de plus nombreux et surtout de plus en plus complexes.

Et même si la régulation étatique des conflits par la « règle de droit », et dont le système judiciaire est garant, reste incontournable pour la gestion et l’équilibre sociétal, force est de constater qu’elle ne parvient plus à satisfaire l’ensemble des demandes de régulation et résolution des conflits.

Le conflit fait, donc, partie de la vie quotidienne, dans la sphère privée comme dans l’espace public.

Or, le conflit peut être représenter le pire comme le meilleur. Le pire quand un conflit est minimisé, voire occulté. De cette façon, il peut inciter les différentes

parties en jeu à se replier sur eux-mêmes. Repli qui mène, tôt ou tard, à une altération importante du lien social, à un individualisme entretenu et, dans certains cas, à un vrai isolement social. Ce constat peut devenir plus inquiétant si cette minimisation ou cette non-reconnaissance du conflit tiendrait lieu de politique sociale.

Par contre si le conflit est bien géré, c’est-à-dire si les personnes en conflit peuvent disposer d’un

cadre qui leur permette de traverser le conflit et d’en apprendre des éléments importants pour « continuer le chemin », alors ils peuvent saisir cette opportunité pour le dépasser, avec en prime le ressentiment d’être tous gagnants.

Cette philosophie se base, en effet, sur une vision positive du conflit. Une vision qui voit dans le conflit une énergie à exploiter, une nécessité à traverser et une chance de provoquer le changement. Dès lors, le conflit devient «moteur» et non «handicap». La médiation vise, par son action, à rendre les personnes «actrices» de leurs vécus et de leurs conflits, et par conséquent «protagonistes» de leur gestion et de leur résolution.

C’est à partir de cette approche du conflit, qu’il convient de soutenir les processus qui, comme la

médiation, épousent le caractère évolutif de la dynamique conflictuelle moderne. Dans ce contexte, la médiation, comme mode civil et alternatif de résolution des conflits, visera à induire des lectures positives du conflit et des relations sociales.

Toutefois cette approche, et cette vision, ne peut se concrétiser que lorsque la «Gouvernance»4

reconnaît la médiation comme un mode de régulation officiel et public, consolide les structures associatives œuvrant à la médiation et renforce leurs assises. Dans ce cas, l’expérience vécue du conflit devient un formidable vecteur d’innovation sociale.

3 Notons parallèlement à cela, une tendance toujours croissante de territorialisation de l’action sociale . Voir à ce propos E. FLORENCE., «La médiation interculturelle en débat». Les cahiers du CIW, 1/2004, p. 11 et suivantes. 4 Tout organisme, institution ayant dans ses compétences la vie de la communauté locale.

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Pour toutes ces raisons, les membres du présent groupe de travail ainsi que les partenaires de travail considèrent que la médiation constitue une nouvelle voie nécessaire et efficace dans le champ de la régulation des conflits interindividuels et collectifs. La société évolue et ses modes de fonctionnement se doivent d’accompagner ce mouvement. I. Définitions et champs de la médiation 1. Préalables et précisions terminologiques concernant le terme « médiation ».

D’emblée, lorsque l’on parle de médiation, il convient de se mettre d’accord sur ce que ce concept recouvre exactement. En effet, il n’est pas rare d’observer nombre de désaccords entre praticiens, professionnels et même experts du fait qu’ils n’ont pas la même représentation de ce terme.

Pour expliquer cette difficulté d’arriver à une vision unifiée de la pratique de la médiation, Riomet

avance que : «Les contours d’une politique publique en matière de médiation n’ont pas préexistés à l’expérimentation des dispositifs de médiation… Il s’agit d’avantage d’une construction a posteriori qui reste subordonnée à des financements souvent épars et à des préoccupations politiques locales différentes »5.

Nous avons donc souhaité mettre en évidence les différentes acceptions que peut recouvrir ce terme. Selon nous, le terme de «médiation» peut être employé pour qualifier des réalités bien différentes.

Ainsi, on use indifféremment du mot médiation pour évoquer :

• la dénomination administrative d’un type de service offert au public : médiation de quartiers, médiation scolaire, médiation de dettes, etc. Ce type de service est généralement associé à un métier de « médiateur » dont le contenu reste, également, à être précisé. Donc, on peut dire qu’ici le terme de « médiation » relève plus d’une dénomination de service, relativement indépendante des activités qui y sont menés par ses membres .

• une technique spécifique de résolution de conflits répondant à des principes plus ou moins stricts

d’application. Cette technique ou cet outil peut tout aussi bien être déployée par des « médiateurs » que des « non-médiateurs » : enseignants, éducateurs, policiers, etc.

• un projet global de société de culture du dialogue dans lequel tous les membres sont amenés à

prendre conscience des responsabilités qui sont les leurs à chaque fois qu’ils exercent au quotidien un rôle de tiers. Exemple : chauffeur de bus, caissière, vendeur, etc. Le terme peut même parfois être employé pour dépeindre une idéologie vantant les vertus du dialogue. Quelques exemples d’emploi du terme de médiation dans ce cadre : « faire médiation », « diffuser la culture de la médiation », etc.

Par ailleurs, une autre distinction d’importance mérite d’être soulignée. Il existe une distinction entre

les pratiques de médiation centrées uniquement sur la résolution du problème qui se focalisent uniquement sur le symptôme (médiation pénale,…) et la médiation transformatrice qui tente de travailler sur les causes du conflit en aidant les personnes à donner du sens à leurs difficultés.

Enfin, il convient encore de préciser que la médiation peut s’exercer :

• soit comme une fonction spécifique : on parlera alors de médiateurs comme sujets de l’action, • soit comme une compétence transversale, commune à plusieurs fonctions : ici les sujets de l’action

de médiation peuvent être très divers : un chauffeur de bus, un assistant social, un éducateur, un professeur, etc.

5 N. RIOMET., «Accès au droit et médiation: Un projet politique pour les territoires ». Actes du colloque, ASMAJ, Marseille, 2004, p. 22.

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2. Définition de la « médiation » Selon notre approche, le mot « médiation » tourne principalement, pour ne pas dire exclusivement,

autour du « processus interelationnel », qu’il se donne pour objectif de « travailler ». Adolfo Ceretti définira, ainsi, la médiation comme “un processus visant à faire développer dynamiquement une situation problématique et à faire ouvrir des canaux de communication qui étaient bloqués (ou qui n’existaient pas)”

6. Donc, la médiation, et par son action, se donne pour objectif de créer un contexte qui permette aux

« acteurs » de percevoir différemment leur conflit. La « médiation » est potentiellement une scène de « reconstruction du sens d’un événement »7.

Fondée sur une logique partenariale, la médiation travaille, en effet, avec les parties à l’acceptation par chacune d’elle que l’autre a, comme elle, la volonté d’être reconnu comme acteur « responsable » de la résolution du conflit. C’est donc potentiellement un lieu d’expérimentation des compétences pragmatiques des protagonistes à gérer un conflit. En œuvrant à éviter la cristallisation des positions et des représentations respectives des parties, la médiation vise à favoriser la créativité et à amener les intéressés à essayer une autre manière d’être en relation. Cette nouvelle formule d’intervention offre de réelles ouvertures au changement.

Pour résumer, nous dirons que la « médiation » est un processus mis en place avec l’objectif d’établir, ou rétablir, l’interconnexion entre les « droits subjectifs de chaque partie » et « l’intérêt de toutes les parties ».

Pour assurer ce « processus » Michèle Guillaume-Hoffnung présuppose que les conditions

suivantes soient remplies 8: � présence d’un tiers � indépendance � neutralité � confidentialité � absence de pouvoir institutionnel. À partir du moment où le processus de médiation satisfait à ces conditions, il se donne pour objectif

de remplir les principales fonctions suivantes 9: � création de lien social � réparation de lien social � prévention des conflits � règlement des conflits. À partir de ces premiers indicateurs, Sonia Miguel ( chercheuse à l’Université Ramon Lul de

Barcelone) divise les pratiques de « médiation » en trois groupes 10:

• Les pratiques de Médiation au sens strict : pratiques respectant littéralement les principes théoriques de la médiation.

• Les pratiques de Médiation au sens large : travail de médiation indirecte (diplomatie de la navette)

qui garde en point de mire l’idéal théorique de médiation.

6 Adolfo Ceretti –Professeur de Criminologie à l’ Université de Milan Bicocca - médiateur et formateur chez la Médiation de l’Association Dike de Milan – membre de la Commission Nationale d’ étude sur la Médiation et la Justice de réparation, auprès du Département Secteur Pénitentiaire du Ministère de la Justice. 7 Formalisation du service de médiation locale. Asbl BRAVVO. Bruxelles, 2005. 8 M. Guillaume-Hofnung., M. (2000). « La médiation », Presses Universitaires de France, Paris, 2000, pp. 110. 9 Idem 10 S. Miguel., Equipe de recherche Grundtvig 2, « Formation et intervention en médiation communautaire ». Journée d’étude : Médiation et communauté locale, Namur, 16/3/2005.

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• Inter-médiation : travail de différents intervenants sociaux, qui en tant qu’intermédiaires, accompagnent et aident les personnes à dépasser leurs conflits, mais sans pour autant avoir la maîtrise totale des fondements théoriques de la médiation.

3. Les champs de la médiation

La « médiation » peut couvrir différentes acceptions, et différentes réalités, selon le contexte dans

lequel elle est développée. Donc, il s’agit de bien distinguer entre le « sens » du mot médiation et le « champ » dans lequel elle est activée, et cela pour permettre une meilleure définition aux fins de la formulation du glossaire.

Préalablement, nous avons défini la médiation comme étant, en soi et pour soi, un « processus » qui

vise à débloquer ( ou à « faire développer dynamiquement ») une situation problématique ou conflictuelle. Il convient, dès lors, de compléter le tableau, en soulignant que la « médiation » ne se limite pas au seul champ des conflit entre les personnes. La médiation investit, également, différents champs de la relation entre habitants et administrations, institutions et services11. De là naissent les possibilités d’utiliser la « médiation » dans différents champs : social, scolaire, familial, pénal, etc.

À partir de ce premier préalable, il s’agit, pour nous, de clarifier que le groupe de travail

« Euromediation » n’envisage pas d’embrasser tous les champs de « médiation ». Il s’attachera volontairement à n’étudier que les « médiations » qui trouvent leur place au sein d’une communauté locale de vie, d’un territoire (urbain en ce qui nous concerne) et dans des systèmes déterminés (école, entreprise, etc.)

Le principal critère, pour notre approche, réside dans la prédisposition de ces différents types de médiation à développer « un processus de création et de réparation du lien social et de règlement des conflits de la vie quotidienne, dans lequel un tiers impartial et indépendant tente à travers l’organisation d’échanges entre les personnes ou les institutions de les aider à améliorer une relation ou de régler un conflit qui les oppose » 12.

Une précision importante s’impose: les critères choisis excluent de notre champ l’étude de la

médiation pénale. Pour nous, il est utile de faire la distinction entre la médiation pénale et médiation dans la ville (médiation sociale, locale, familiale, scolaire, etc.).

En effet, selon nous, et outre les différences qui résultent des différents principes déontologiques et normes éthiques propres à chacune de ces « médiations », la médiation pénale répondrait essentiellement à une logique économique : elle vise à compléter un système judiciaire toujours plus saturé. La médiation dans la ville, à caractère civile vise elle à instaurer une nouvelle culture et un nouveau mode de gestion des conflits. À partir de là nous ne nous attacherons pas à étudier ce champ pan de la médiation pénale.

Ainsi, nous trouverons dans ce champ d’étude visé de nombreuses appellations qui désignent

différentes pratiques (ou services) de médiation : � médiation de quartiers � médiation de proximité � médiation sociale � médiation locale � médiation territoriale � médiation communautaire � médiation scolaire � etc. Notons, ici, quelques caractères communs à ces différentes médiations :

11 Actes du Colloque « De l’accès au droit à la médiation: un projet politique ?» . 12 Délégation Interministérielle de la Ville. Séminaire « Médiation sociale et nouvelles régulation des conflits de la vie quotidienne », éditions DIV, Créteil, 21/9/2000.

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� la détermination préalable d’une entité géographique ou humaine : une ville, un quartier, une école, une communauté, etc.

� le caractère de « proximité » du service rendu � l’emploi de la médiation comme « outil », « technique » ou comme « culture de dialogue »

II. Les niveaux d’intervention et les publics cibles Comme nous l’avons exposé, la médiation peut recouvrir différentes champs. Aussi, pouvons-nous parler de médiation à différents niveaux, qui va de la sphère la plus privée (couple ou famille) à la plus large (relations internationales). Ces différents contextes, ou niveaux d’intervention, vont determiner, également, le type de « public» que l’on rencontrera en médiation. 1. Niveaux d’intervention

À partir de ces premiers énoncés il s’agit, pour nous, et par souci de modélisation, de définir (sans

vouloir être réducteur) les niveaux sur lesquels un service de médiation, en milieu urbain, pourrait porter son attention :

• Le niveau personnel et/ou interpersonnel

Le travail de la médiation, au niveau individuel et/ou interpersonnel, portera principalement sur

l’aspect relationnel et communicationnel entre les parties en conflit. L’objectif de l’intervention étant d’amener les protagonistes à se repositionner dans leur conflit. Cela

sous entend que le médiateur essayera, en compagnie des « médiés », de redéfinir le sens du conflit. En effet, par ce mécanisme de « re-définition », la médiation visera à développer des habilités d’intercompréhension réciproques et propices à une logique partenariale, et non plus une logique d’opposition. Pour ce faire, le médiateur s’attellera à travailler sur les compétences pragmatiques des personnes comme des leviers dans le processus de médiation. L’objectif étant de remettre les personnes au centre du jeu en tant qu’acteurs de leurs propres vies (et de leurs conflits par conséquent).

• Le niveau collectif

On entend, ici, les pratiques d’intervention qui visent à permettre aux individus de se ré-approprier

leur capacité à agir et à résoudre par eux-mêmes les conflits qu’ils rencontrent, et ainsi rétablir les relations dans leur communauté. L’enjeu de ce type de médiation est nettement collectif, puisqu’il vise à favoriser la participation de la population à la gestion des conflits et à l’organisation (rétablissement) d’une cohésion sociale. Elle va au-delà de l’apaisement interpersonnel en œuvrant dans des actions d’innovation sociale qui participent à la recherche d’une « société meilleure ». Ce modèle dépasse la seule logique intégrative de groupes minoritaires. Il s’agit d’un projet global et collectif d’autogestion des dynamiques conflictuelles orienté vers le concept de « Mieux vivre ensemble ». Selon certains, à ce niveau il s’agirait de parler de « médiation communautaire »13.

2. Les groupes ciblés par un service de médiation

Outre cette modélisation au niveau de l’intervention, un service de médiation peut également

cibler son public, et cela en fonction du type d’actions ou de pratiques qu’il entend développer. Mais avant de nous atteler à déterminer les caractéristiques des groupes ciblés, encore faut-il nous mettre d’accord sur les critères d’analyse et de sélection.

Ainsi lorsque un service de médiation détermine un groupe-cible pour son action, on peut s’interroger sur l’amplitude de ce groupe. Le service de médiation focalise-t-il son attention sur la totalité d’une communauté citadine ou seulement sur une partie de celle-ci ? Et si le service de médiation focalise son action sur une partie bien déterminée de la population, quelles variables retient-il pour sa sélection?

13 Poitras

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Pour cela, nous reprenons la modélisation des « pratiques » de médiation énoncé auparavant 14:

� Dans les pratiques de « médiation au sens strict », c’est à dire la médiation entendue comme une

technique stricte de gestion de conflit , les médiateurs cibleront essentiellement toutes les « personnes vivant une situation conflictuelle d’ordre relationnel, communicationnel et/ou interpersonnel », indépendamment de tout autre critère (âge, origine, niveau social, etc.)

� Pour ce qui concerne les pratiques de « intermédiation », c’est à dire la médiation entendue comme

l’action sociale d’aide et d’accompagnement, les intervenants sociaux cibleront certains groupes de populations évoluant sur leur territoire d’action, principalement à des fins de les sensibiliser à une certaine culture de la médiation.

� Enfin, pour les pratiques de « médiation au sens large », c’est à dire la médiation entendue comme

un projet de participation citoyenne, les médiateurs viseront bien évidemment les citoyens, reconnus comme disposant d’une expertise citoyenne, mais impliqueront aussi les décideurs publics, sans quoi il ne servirait à rien de promouvoir l’expression des premiers. Par ailleurs, certaines « médiations » vont aller plus loin dans ce « ciblage », en définissant, d’une

façon multi-modale, les groupes concernés par leur action. Ainsi, ils distinguent principalement plusieurs variables pour tenter d’appréhender certaines caractéristiques des groupes ciblés (l’âge, l’origine, le niveau socio-économique, le niveau d’instruction, etc.) 15

Dans d’autres cas, les groupes ciblés dépendront directement de la volonté politique sous-tendant le

projet de médiation, que ce soit en termes de localisation et en termes de buts et/ou d’objectifs poursuivis.

III. Finalités. Objectifs. Déclinaisons dans les projets de médiation

1. Les finalités

La mise en place d’un dispositif de médiation dans la ville n’est pas un geste neutre. Il marque une

volonté politique des décideurs locaux d’inscrire la « régulation des conflits » comme un élément essentiel de leur bonne gouvernance. Dans ce cadre, les autorités locales assument leur responsabilité dans la recherche d’un mode de régulation moderne et complémentaire au système judiciaire traditionnel.

Cet effort consenti par les villes, que ce soit en termes humains ou budgétaires, doit par ailleurs viser

à obtenir un retour sur investissement sur différents points : � Répondre aux besoins locaux en matière de sécurité et de protection des citoyens. � Lutter contre le sentiment d’insécurité. � Instaurer une politique locale de sécurité intégrale et intégrée. � Renforcer le tissu social dans la commune. � Contribuer à l’amélioration de la qualité de la vie. � Mettre un frein à la surconsommation judiciaire, en éveillant le citoyen à un mode alternatif de

gestion des conflits et en répondant plus adéquatement a leurs demandes.

14 S. Miguel., Equipe de recherche Grundtvig 2, « Formation et intervention en médiation communautaire ». Journée d’étude : Médiation et communauté locale, op cit. 15 Il n’était pas question d’être exhaustif dans la définition des caractéristiques des médiés. Aussi, le présent chapitre peut-il encore être enrichi : par une vision sociologique : rôle, rapport au pouvoir, prise de décision, expression des intérêts et des buts, etc. par une vision systémique : ponctuation des faits, type de système, type de communication privilégié, intérêts à entrer en conflit, mécanismes de défense, etc.

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Voici à titre d’exemple, le cas de Bruxelles-Ville où la volonté politique d’inclure dans la gouvernance de la cité la médiation et la régulation des conflits comme technique et culture, s’est concrétisée dans la création des services de Médiation de BRAVVO (association à but non lucratif).

Structurellement, le cadre, dans lequel opèrent les médiateurs de l’association paracommunale

BRAVVO, est tributaire des « contrats de sécurité et de prévention » (CSP). Ces contrats (CSP), qui fournissent ces postes de médiateurs, présentent les principales caractéristiques suivantes :

• L’implantation locale et le rôle central joué par l’autorité communale (en particulier le rôle important du bourgmestre) dans le développement de la politique de sécurité et de prévention.

• Le principe de prévention intégrée, qui associe l’ensemble des acteurs locaux et supra locaux dans un partenariat, selon l’approche la plus large (« la chaîne de la prévention »).

• La contractualisation de ce partenariat (convention annuelle entre les partenaires : la Ville et les bailleurs de fonds : Etat fédéral (Intérieur) et Région).

2. Les objectifs d’un service de médiation

Un service de médiation dans la ville répond, tout d’abord, aux objectifs que les décideurs publics lui

prescrivent, moyennant bien sûr l’accord des opérateurs (médiateurs), qui restent chargés de le développer en concordance avec leur cadre de travail (déontologie, types d’action, publics, etc.) Ainsi, les projets de médiation mis en œuvre au niveau de BRAVVO reprennent, en substance, les différents objectifs déterminés par la politique locale de sécurité et de prévention.

Le groupe de travail « Euromediation » a souhaité, néanmoins, mettre en évidence quelques objectifs

importants qu’un dispositif de médiation peut satisfaire. Ces objectifs peuvent aider les décideurs désireux de mettre en place ce type de service au profit de leurs populations locales.

• Restaurer le lien social

Par la mise en place des processus d’intervention pacificatrice, dans une situation conflictuelle ou

pré-conflictuelle, les services de médiation cherchent à gérer les conflits en amont, afin de prévenir la rupture de lien social.

La confrontation à l’altérité met en difficulté des publics qui sont précaires et/ou inscrit dans un lien social distendu ou rompu. L’objet du conflit ne peut être pris en compte si un travail en profondeur sur la relation n’est pas entrepris avec les protagonistes. Cette démarche a donc pour objectif de rétablir une cohabitation harmonieuse, tant au niveau interpersonnel, qu’au niveau des groupes de personnes, voire entre les différentes populations de la Ville.

La médiation se positionne ainsi dans le champ du travail relationnel et du lien social, en alternative. Ce faisant, l’action privilégie plutôt la médiation interpersonnelle, mais certaines formes de conciliation, de négociation ou de réparation directe du préjudice peuvent également être utilisées.

• Favoriser la communication et le relais entre les protagonistes

Le médiateur intervient comme un tiers intermédiaire et extérieur au conflit. Sa vision extérieure

peut aider les protagonistes à faire émerger une solution, parfois inexistante au départ. L’intervention de la médiation vise à prendre de la distance par rapport au fait, afin de favoriser l’émergence des conditions d’une communication. Pour se faire, le médiateur cherche à créer toutes les conditions favorables à la résolution du conflit : efficacité de l’intervention, écoute, recul, communication, équidistance, cohérence, etc.

Pour ce faire, la médiation doit se dégager de toute contrainte (urgence, attente irréalisable, chantage, etc.) et clarifier, dès le départ, les enjeux du processus.

• Mettre en place un espace de confiance, de changement et d’émancipation

Pour travailler dans le sens d’un règlement durable et vivable de la situation-problème, il s’agit de :

« rendre les protagonistes acteurs de leurs vies et de leurs changements ». Ainsi, après un travail sur la

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demande et l’objectif de la médiation, les compétences et les ressources propres des protagonistes sont stimulées et véhiculées afin que ces derniers se conçoivent comme acteurs responsables et producteurs de la résolution du conflit. La médiation garantit, à cet effet, un espace neutre et de confiance, propice à l’émergence des conditions favorables au changement.

En travaillant sur l’autonomisation, la médiation contient potentiellement la promesse d’émanciper les personnes afin de les sortir de leur repli et de leur assistanat.

Issue du mouvement de déformalisation du droit, la médiation vise également à éveiller le citoyen à un mode alternatif aux modes traditionnels de règlement des conflits (administration, police, justice). Cette démarche, tournée vers le futur, œuvre dans le sens du développement dune nouvelle citoyenneté.

3. Les déclinaisons entre les objectifs « opérationnels » et les objectifs « stratégiques »

Il est important de souligner que les projets de médiation développés dans les différentes villes d’Europe dépendent, en grande partie, de leur contexte local respectif. Ces différents contextes ont une certaine influence sur la détermination, la sélection et la hiérarchisation des différents objectifs à poursuivre. Généralement, cela dépendra de plusieurs caractéristiques tels que :

o La taille de la ville. o La situation socio-économique ( structure de la population, taux de chômage, etc.) o La culture locale et la perception, qui peut en découler, de ce que pourrait apporter la

médiation. o Le niveau de formation des médiateurs. o Le type de soutien du politique (financement, reconnaissance, législation, etc.)

En vue d’illustrer notre propos, voici, à titre d’exemple, un tableau qui reprend les expériences de

médiation déployées par la ville de Bruxelles analysées au regard des trois variables : la finalité, les objectifs stratégiques et opérationnels. Médiation locale Médiation sociale16 Médiation scolaire Médiation de dettes Finalité

⌂ Eviter que les

conflits interpersonnels, sortant du champ judiciaire et/ou pour lesquels « l’offre » judiciaire est estimée comme une réponse inappropriée, ne dégénèrent ».

⌂ Assurer du

lien social entre la population, les associations et la Ville, à l’échelle des quartiers ».

⌂ Favoriser les

conditions de l’accrochage scolaire du jeune et participer à la construction de son projet de vie.

⌂ Diminuer les situations de décrochage scolaire et de violence. »

⌂ Eviter

l’exclusion sociale et la marginalisation et permettre aux personnes victimes de surendettement de vivre décemment en tenant compte de leur obligation à l’égard des créanciers ».

16 La médiation sociale n’est pas articulée en objectifs opérationnels et stratégiques, le projet étant régional tandis que les trois autres sont d’origine fédérale. Ces objectifs se déclinent dès lors en fonction des directives régionales et de manière différente.

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Objectif stratégique du projet

⌂ Offrir aux

personnes, vivant une situation conflictuelle, une alternative novatrice en matière de résolution de conflits interpersonnels, et cela de manière préventive et en dehors de la sphère judiciaire.

⌂ Travailler pour un

règlement durable de la situation conflictuelle .

⌂ Travailler à

autonomiser les parties et à passer, dans le cadre du conflit, d’une logique judiciaire à une logique sociale restauratrice.

⌂ Résoudre des

conflits et/ou améliorer les relations entre les personnes et/ou les institutions.

⌂ Assurer le lien

entre les différents acteurs de terrain.

⌂ Observer les

besoins et les problèmes spécifiques au quartier, et par là, proposer et établir des recommandations au pouvoir local.

⌂ Développer l’écoute et favoriser les relais entre l’école, les parents et les partenaires extérieurs susceptibles d’apporter une aide au jeune en situation (ou risque) de décrochage.

⌂ Développer le volet « agent de changement » de la médiation scolaire dans le but d’agir sur les phénomènes de décrochage et de violence en amont.

⌂ Professionnaliser la fonction de médiateur scolaire dans les relations internes et externes afin d’optimaliser la mise en œuvre des différents objectifs du service.

⌂ Equilibrer la

situation économique d’un ménage et permettre le remboursement des créanciers.

⌂ Eviter la

dégradation du conflit financier et le passage de la problématique vers les instances judiciaires.

Objectifs opérationnel du projet

⌂ Créer un

espace et mobiliser un temps de réflexion permettant aux protagonistes de sortir du dilemme victime/agresseur pour se positionner dans le conflit et devenir acteur de sa résolution .

⌂ Animer le

processus de résolution de conflit .

⌂ Créer un espace de

concertation entre professionnels afin d’assurer une cohérence dans les interventions.

⌂ Prise en charge

individuelle des élèves en difficultés d’accrochage scolaire.

⌂ Participation à

l’analyse des modalités d'accrochage scolaire du jeune et des différentes formes de violence et, en accord avec les partenaires concernés et la direction de l’école, contribuer à la recherche et à la construction de solutions nouvelles.

⌂ Viser la prise en

charge de la problématique de surendettement de la personne, et ses répercussions sur son entourage et une remise en ordre de la situation.

⌂ Susciter le

développement de pratiques permettant d’éviter la répétition des situations de surendettement.

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4. Temporalité d’action d’un service de médiation

La temporalité des actions menées par un service de médiation peut être étudiée en fonction du

moment de l’intervention du médiateur par rapport au moment d’occurrence des conflits. Pour cela, on s’aidera du schéma théorisé par Qultung 17:

Conflits Prévention Provention Contention

• Prévention : Actions menées avant l’apparition de tout conflit et menées dans le but d’en éviter

l’apparition.

• Provention : Actions menées pendant l’éclatement du conflit, dans un contexte de tension entre deux (ou plusieurs) parties en conflit. Il s’agit ici d’une plus-value de choix apportée par la médiation au travail social puisque le médiateur devient un expert du conflit.

• Contention : Accompagnement des parties après la survenue d’un conflit, par le biais de certaines

techniques de la médiation (écoute active, reformulation, recadrage positif, etc. IV. Les méthodes de la médiation

Il ne suffit pas d’analyser le contexte local ou encore de se doter d’objectifs de travail pour prétendre mettre en place un service de médiation dans une ville donnée. En effet, il s’agit également de se doter des « méthodes appropriées » pour opérationnaliser les « volontés d’action ».

Mais tout d’abord, qu’entendons- nous par « méthodes » ? Quels « outils » ou « techniques »

pourrons-nous utiliser pour atteindre les finalités et les objectifs de la médiation (le lien social, la communication, le changement et l’émancipation) ?

Pour répondre ces questionnement, le groupe de travail « Euromediation » a mis en place un atelier

de réflexion. La méthode employée par cet atelier s’est articulée autour de 4 étapes :

1. Brainstorming sur les méthodes de la médiation 2. Classification selon différents « items » 3. Recherche des items communs (mixte) 4. Détermination des items spécifiques (interpersonnel >< collectif)

Les questions suivantes furent posées à tous les experts :

• « Quelles techniques seraient-elles propres à la médiation ? » • « Les techniques citées sont-elles différentes des techniques traditionnelles du travail

psychosocial ? »

Remarque méthodologique : pour commencer les experts ont tenu à mieux différencier ce que l’on entendait par « méthodes » et par « techniques ».

17 GILLET, op. cit. point 8.

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La «méthode», est une approche initiale assez généraliste, spécifique à une discipline et constituée

par un ensemble de principes méthodologiques généraux. Pour la médiation, cela revient à parler de tous les principes de base ( cadre de la médiation, processus, communication, neutralité, confidentialité, non contrainte, déontologie, etc).

Par contre, par « technique » on vise toute compétence, procédé et ensemble de savoir et de savoir-

faire spécifiques à une pratique. Par exemple, l’écoute, en médiation, est une technique, alors que l’ouïe, en elle-même, n’est pas une technique.

Les résultats de l’atelier sont synthétisés sous forme d’un tableau, qui reprend (sans être exhaustif)

les différents outils pouvant être employés par les dispositifs de médiation. Items génériques Exemples

A. Le cadre de la médiation

⌂ Cadrage : Travail de mise en place des préalables par le médiateur afin de garantir le bon déroulement de son processus de médiation (présentation, explication du cadre, des objectifs du service, les préalables tel que la confidentialité, etc.)

⌂ Clarification de la demande : travail qui vise à déterminer les objectifs de la médiation à partir la demande des parties.

⌂ Secret professionnel : garantie pour le médiateurs et les usagers contre toute utilisation abusive du contenu de la médiation.

⌂ Secret professionnel partagé : cadre formel ou informel qui permet le partage des informations entre les différents intervenants dans le respect des règles déontologiques.

⌂ Limites/règles/normes : Les limites sont établies par des règles qui organisent le cadre dans lequel s’effectueront les interaction entre les différents parties de la médiation (usagers, médiateurs, autres intervenants). Les limites doivent être claires pour toutes les parties. Ce sont également des bornes qui permettent au travailleur de limiter son intervention quand il estime que ce n’est plus de son ressort. Les limites sont autant des « garde-fou » pour l’intervenant que pour l’usager. Cfr chapitre sur les limites.

⌂ Déontologie : Cfr chapitre déontologie

B. Le processus de médiation

⌂ Attitude/ démarche active:

« le médiateur est garant des moyens et non des résultats ». Partant de ce principe, le médiateur se doit de se donner tous les moyens possibles et disponibles pour garantir la bonne tenue de son processus de médiation. C’est une attitude proactive dirigée vers des objectifs bien déterminés (communication, changement, etc.)

⌂ Neutralité/impartialité/équidistance: c’est tout l’art de l’intervenant de ne pas se faire prendre dans la toile d’araignée que représentent les situations conflictuelles sur lesquelles il intervient. La neutralité et l’impartialité ne sont pas des caractéristiques intrinsèques ou innées au médiateur. Ce sont des attitudes travaillées par le médiateur afin de pouvoir éviter certains écueils, qu’ils soient propres à l’intervention (urgences, conflit, émotivité, etc.), aux parties

⌂ Le non pouvoir : Malgré une

position de leadership, le médiateur ne peut prétendre à déterminer le sens vers lequel pourrait évoluer le processus de médiation. Le médiateur ne peut faire preuve de violence dans son intervention.

⌂ Sans jugement : Le médiateur n’est pas un juge. Pour cela il veillera à garder sa crédibilité par le respect des valeurs, croyances, habitudes de chacune des parties.

⌂ Egalité de personnes : le principe égalitaire est mieux exprimé par le concept d’équidistance dans le cadre de la médiation.

⌂ Implication : démarche qui vise à rendre chaque les parties « protagonistes » et « acteurs » de

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(résistances, manque de disponibilité, tentative de coalition, manipulations, etc.) ou propres au médiateur lui même (subjectivité, résonances, alliance avec l’une des parties, jugement, etc.)

la médiation.

C. La communication18

⌂ Relation/altérité/interactivité :

Principe de base de la médiation, l’individu ne peut être artificiellement isolé de son contexte. Le médiateur tendra à saisir les personnes en interaction avec leurs milieux (les effets des comportements des uns sur les autres, les réactions suscitées, et le contexte à l'intérieur duquel tout ceci a lieu). Le véhicule de ces relations, c'est la communication. Pour le médiateur il est important de pouvoir travailler à démêler les différents niveaux et les différentes logiques de la communication.

⌂ Communication : Tout comportement en situation d'interaction a une valeur de message, donc de communication. Que l'on soit actif ou passif, que l'on parle ou que l'on se taise, chaque comportement a une valeur de message: il influence les autres. À leur tour, les autres ne peuvent pas ne pas réagir et communiquent donc aussi.

⌂ Message : un message contient toujours un aspect de fonction et un aspect de relation. La fonction désigne le message verbal (ce qui est dit). Par contre, le contexte dans lequel le message est émis, le ton sur lequel on parle, et toute la communication non-verbale donnent une définition de la relation (symétrique, asymétrique, autoritaire, hiérarchique, de confiance, utilitaire , une demande de protection, une manifestation de sollicitude, une provocation...)

⌂ Méta-communication : Lorsque la communication n'est plus utilisée pour communiquer, mais pour communiquer sur la communication, nous utilisons des concepts qui n'appartiennent pas à la communication, mais traitent de la communication. C'est cela que nous appelons la métacommunication. C'est communiquer sur la communication. Nous faisons cela dès que nous commençons à parler du sens de ce que quelqu'un dit : la métacommunication est un commentaire sur la communication :

⌂ Ecoute active : attitude

adoptée par le médiateur afin de saisir d’une façon globale les messages et les différentes formes d’expression d’une personne (verbale, non verbale, etc.)

⌂ Communication non violente : technique qui permet d’entrer en relation en utilisant l’intelligence émotionnelle et relationnelle.

⌂ Reformulation : rejoint la métacommunication dans le sens où c’est une procédé qui consiste à redire ce qui a été dit de façon à lui donner une formule qui soit acceptée par toutes les parties. Cette démarche permet, tant au médiateur qu’aux médiés de bien se mettre d’accord sur les enjeux de la médiation. « quand vous dites cela, est-ce que vous entendez ça »

⌂ Mise en perspective : capacité de recul, de reformulation et de recadrage.

⌂ Navettes (médiation indirecte) : type de médiation où les parties ne se rencontrent pas directement.

⌂ Négociation : mécanisme où les parties participent conjointement à la définition de la résolution du problème.

⌂ Vulgarisation : processus pédagogique dont le but est de permettre à chaque partie de comprendre clairement les enjeux de la médiation.

18 P. Watzlawick., J. Beavin., D. Jackson., Une logique de la communication, Seuil, Paris, 1972.

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« qu’est-ce que vous voulez dire par ça ? ».

D. L’aspect

émotionnel

⌂ Gestion des émotions : aptitude du

médiateur à travailler dans un cadre chargé d’émotions, tout en restant ancré dans sa stature (impartialité, équidistance, etc). Cela implique un travail du médiateur sur lui-même.

⌂ Empathie : faculté de saisir les émotions et le ressentiments des personnes (généralement en difficultés).

⌂ Résonance : concept qui désigne les sentiments provoqués chez le médiateur par le vécu du médié(s). Il s’agit de savoir utiliser cet aspect émotionnel comme levier dans le processus de médiation

⌂ Transfert/contre-transfert : transfert d’émotions (positives ou négatives) entre le médiateur et le médié.

⌂ Traduction émotionnelle: aider

chaque partie à décoder ses propres émotions et les émotions de l ‘autre.

⌂ Soutien: médiateur vu comme personne-ressource pour les usagers.

⌂ Intuition : compréhension spontanée qui est à l’opposé de la réflexion. Pratiquement, il s’agit d’utiliser ses propres ressources.

⌂ Effet miroir : technique permettant de renvoyer aux «médiés» par effet miroir «ce qui se joue entre eux». Le but étant de restituer une dimension affective en utilisant la reformulation.

E. Analyse

Diagnostic/ Stratégie

⌂ Systémique : L’approche systémique

met en avant l’idée que tout groupe social (famille, couple, etc.) s’organise, fonctionne et se régule grâce aux règles qu’il se crée. Les dysfonctionnements doivent alors se lire comme des effets de ces régulations. En médiation, la systémique sert à approcher la «réalité» des difficultés socio-psychologiques que vivent les personnes, en considérant l’individu dans son en interaction avec son environnement familial et institutionnel.

⌂ Thérapie: la médiation n’est pas une thérapie mais elle peut avoir une visée thérapeutique. Pour cette raison, elle peut emprunter certaines techniques thérapeutiques et les adapter à son processus médiatif.

⌂ Stratégie de mise en échecs: méthode qui permet au médiateur de déceler les éventuels blocages des parties et de les prévenir de leurs propres « résistances » afin de garantir la continuité du processus.

⌂ Prescription des symptômes:

méthode systémique qui consiste à demander à une personne de reproduire tel comportement problématique

⌂ L’injonction paradoxale (ou comment travailler la prochaine crise) � diagnostic � réflexion � culture/connaissance de

l’autre � conceptualisation � accès au droit

F. Créativité

⌂ Jeux de mise en scène: exercices qui

visent à permettre, tant au médiateur qu’aux médiés, de mieux percevoir la scène émotionnelle «ce qui se joue». Ces techniques (psychodrame, jeux de rôle, théatralisation, sculpture) peuvent permettre de lever certains blocages, de dépasser certaines résistances, d’aborder

� sculpture /musique/ dessin/

théâtre � humour � projets � animation � rencontres � fêtes � convivialité

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des passages de vie difficiles, de dédramatiser des moments de vie traumatisants. Le médiateur utilisera ces techniques avec des personnes qui ont du mal à exprimer leurs émotions «mettre des mots sur les maux».

� alternatives � métaphores � mythes � contes

G. Travail de/en

réseau(x)

⌂ Partenariat: travail de collaboration

entre différents intervenants concernés par une même problématique ou un même projet.

⌂ L’information: (diffusion, circulation, etc.): mise en place de canaux de communication entre les partenaires.

⌂ Ressources: utilisation des compétences des services du réseau en fonction de leur spécificité.

⌂ Participation : processus de

collaboration qui partager les tâches.

⌂ Capitalisation: augmentation du savoir-faire par la mise en commun des différentes expertises afin de capitaliser les bonnes pratiques.

⌂ Sensibilisation: travail sur la visibilité et actions qui permettent aux différents membres du réseau de d’être clairement identifiés par le public.

H. Formation

⌂ Formations: apprentissage permettant

l’acquisition de nouvelles technique ⌂ Supervisions: intervention d’une

personne extérieure au service qui a pour but de travailler sur la prise de recul et la résolution des problèmes rencontrés sur le terrain par les médiateurs. Il existe des supervisions individuelles et collectives.

⌂ Intervision : partage de

connaissances et échange d’expériences entre médiateurs.

V. La (les) formation(s) à la médiation

1. Constat et propositions

De manière générale, nous avons constaté que le profil des médiateurs, opérant au sein des dispositifs mis en place par les villes partenaires « Euromediation », étaient très variés. Cela venait du fait qu’il n’existe pas actuellement d’uniformisation, au niveau européen, relative à :

• la formation des médiateurs (contenu, durée, niveau, etc.) • l’agrément des médiateurs (conditions, critères, etc.)

Cette défaillance doit être comblée le plus tôt possible car la question de la formation des médiateurs

constitue un volet important dans la mise en place d’un service de médiation compétent. Pour cette raison, nous avons sélectionnés quelques aspects auxquels il faudra tenir compte dans la

formation des : • le type de formation ( universitaire ou non, généraliste ou plus spécifique); • le profil des médiateurs (universitaires, gradués, bacheliers) ; • le statut des médiateurs (professionnels, bénévoles) ; • le cadre légal en rapport avec la mission de médiation. (textes de lois, agrément, etc) ; • le profil de fonction et le type de mission: coordination, travail de médiation stricte,

travail de veille préventive, travail de cohésion social, etc. ;

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• si la formation s’opère avant ou après l’engagement ; • le budget (temps/argent) pouvant être investi dans la formation des médiateurs; • la possibilité de bénéficier d’une formation continue pour consolider les compétences ;

Ainsi, les médiateurs « professionnels » œuvrant dans des dispositifs de médiation présentent le plus souvent un cursus de formation dans le champs des sciences humaines et sociales : psychologues, sociologues, criminologues, assistants sociaux, etc. Les médiateurs « bénévoles », quant à eux, viennent souvent d’horizons différents.

Il ne nous revient pas, en l’état actuel des choses, de nous prononcer sur l’ensemble des

connaissances, compétences et attitudes qu’il convient d’enseigner aux médiateurs. Toutefois, nous pouvons déjà exprimer que les apprentissages doivent porter sur trois domaines principaux :

• Le Savoir: les connaissances du médiateur (notions sur le conflit, en psychologie, en

psychothérapie, en droit, etc.) • Le Savoir faire: les techniques du médiateur (l’écoute active, empathie, temporisation,

capacité d’analyse, … • Le Savoir être: les aptitudes du médiateur (bien se connaître, connaître sa manière de réagir

face aux conflits, travailler ses résonances, etc.) et les attitudes du médiateur (neutralité, capacité de laisser ses opinions et valeurs de côté, optimisme, patience, etc.)19

Enfin, il nous semble utile d’œuvrer à une uniformisation au niveau européen des formations à

destination des futurs médiateurs qui tiendrait compte :

• du niveau escompté: technicien, praticien, coordinateur, évaluateur, etc. • du champ d’action : famille, quartier, école, entreprise, etc.

2. Illustration de cas

Par ailleurs, le groupe de travail «Euromediation» a souhaité illustrer cette partie consacrée à la

formation par l’exemple du plan de formation de l’A.F.P.A.D. (Association pour la Formation, la Prévention et l’Accès au Droit) de la ville de Pierrefitte-sur-Seine et qui se structure sur trois grands axes :

• Assurer une formation de qualité à ceux et celles qui souhaitaient accéder à une fonction de médiateur(trice). Cette formation nécessite des rencontres régulières ; elle s’inscrit sur du long terme et inclut des ouvertures sur la diversité des pratiques professionnelles.

• Sensibiliser à la médiation et à la gestion des conflits. L’exemple de la ensibilisation faite au niveau de l’école aux élèves délégués de classe.

• Sensibiliser à la médiation un certain nombre de professionnels et partenaires (institutionnels ou associatifs) de Pierrefitte-sur-Seine, plus particulièrement les services recevant du public (police, mairie, bailleurs sociaux, etc.)

Volet 1. Formation des médiateurs

La formation des médiateurs a été assurée par plusieurs organismes : le CETEC A 2F, le Centre de Médiation et de Formation à la Médiation (C.M.F.M.) situés à Paris, et par une formatrice québécoise du C.I.R.C.M. (Centre International de Résolution de Conflits et de Médiation). Les formateurs ont accompagné le groupe de stagiaires à expérimenter une nouvelle démarche : accueillir le conflit et travailler sur les émotions qu’il engendre, afin d’amener les personnes à retisser des liens.

Des rencontres régulières avec un certain nombre d’intervenants (psychosociologue, universitaires, chercheur au C.N.R.S. , experts) ont permis de compléter et d’approfondir cette formation.

19 FRANCOIS Geoffrey. « Missions, profils et formations des médiateurs du volet Prévention intégrée dans les quartiers de la Ville de Liège », Colloque « Résolution des conflits et médiation dans les villes européennes », Angers, 6 et 7 mai 2004.

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La participation à des réunions de travail et à des colloques ( Angers, Béziers, Lyon et Marseille ) et à des séminaires organisés dans le cadre du réseau européen (Bruxelles, Turin) représentaient également des possibilités pour le groupe de médiateurs de s’ouvrir à d’autres pratiques professionnelles.

L’entrée dans la pratique de la médiation nécessite aussi de suivre une formation continue afin d’améliorer ses propres capacités d’écoute, de repérer les difficultés qu’on peut rencontrer face à un conflit difficile ou douloureux et de garder sans cesse vivante une réflexion apportée par chaque nouvelle situation. Cette formation continue, appelée « analyse des pratiques » permet au groupe de médiateurs de se rencontrer et d’échanger, en présence des formateurs, sur les difficultés rencontrées et de les analyser d’une façon plus approfondie.

Des réunions mensuelles permettent aussi au groupe de médiateurs de mettre en commun des interrogations, des informations, et réflexions sur cette nouvelle professionnalisation.

Volet 2. Sensibilisation à la médiation et à la gestion des conflits des élèves délégués de classe Une sensibilisation à la médiation et à la gestion des conflits a été mise en place par l’A.F.P.A.D.

auprès de collégiens. Ce travail a été mené sur deux collèges de Pierrefitte-sur-Seine avec l’ensemble des délégués de

classe. Il s’agissait de travailler avec eux sur différents thèmes : écouter et être écouté ; écouter, reformuler

et argumenter ; le respect de la parole de chacun ; apprendre à mieux comprendre l’autre ; le rôle du délégué de classe et sa perception par les autres délégués.

Volet 3. Sensibilisation à la médiation des partenaires de la ville de Pierrefitte-sur-Seine La volonté de l’A.F.P.A.D. était de former à la médiation les salariés de l’Association et d’impliquer

également la société civile : des habitants de différents quartiers de la ville et des professionnels de Pierrefitte-sur-Seine qui, en plus de leur activité salariée, pouvaient bénévolement consacrer du temps à la médiation. Ainsi s’est constitué un groupe de médiateurs «professionnels», certains ayant un statut de «salarié» et d’autres un statut de «bénévole» de l’A.F.P.A.D.

Dans la mesure où l’A.F.P.A.D. était devenu un lieu de médiation repérable par les professionnels de la ville de Pierrefitte-sur-Seine, il devenait nécessaire de faire connaître aux partenaires de l’A.F.P.A.D. ce que recouvrait le terme de médiation.

Aussi l’A.F.P.A.D. proposa à différents partenaires de la ville et plus particulièrement aux services recevant du public de suivre des journées de sensibilisation à la médiation organisées par le C.M.F.M. L’accueil de la mairie et autres services municipaux, l’Education nationale, le Service Social Départemental, la Police nationale, et les bailleurs sociaux suivirent cette formation. Cette démarche leur permettait d’approcher la médiation d’une façon plus authentique et de l’expérimenter par l’intermédiaire de jeux de rôle. Au cours de ces journées de sensibilisation ces professionnels, souvent confrontés à des situations très difficiles parmi les personnes qu’ils reçoivent, ont pu acquérir des techniques de médiation non pour devenir eux-mêmes médiateurs, mais pour accueillir leur public avec une attitude intérieure de médiateur, c’est-à-dire sans jugement, plus à l’écoute des affects de la personne en demande d’aide.

Cette ouverture sur la médiation permettait à ces mêmes professionnels de repérer les difficultés relevant d’une possible médiation et d’orienter certaines personnes plus facilement vers l’A.F.P.A.D.

• Impact de la formation Ainsi grâce à la formation d’un groupe des médiateurs en capacité d’accueillir des demandes de

médiation et à la sensibilisation à la médiation d’un certain nombre de partenaires sur la ville de Pierrefitte-sur-Seine, un véritable partenariat s’est constitué autour de la médiation. La formation est donc au cœur de cette dynamique de réflexion et de progression.

En participant à ce projet collectif de formation à la médiation, les partenaires sont devenus, au

même titre que les médiateurs de l’A.F.P.A.D, les acteurs de construction et de développement de cette culture de médiation.

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Ainsi ce rapprochement de professionnels, qui a pu se faire dans une dynamique commune liée elle-même à la dynamique de la médiation, contribue à développer de façon permanente la culture de médiation sur la ville, ce qui donne à Pierrefitte-sur-Seine tout son sens de ville-médiation.

VI. Les limites de l’action d’un service de médiation

La méthodologie utilisée pour la partie « méthodes » a été redeployée pour travailler sur cette thématique centrale pour les médiateurs : « les limites ».

Un brainstorming a permis, ainsi, de lister certaines limites rencontrées par les médiateurs. Ces

limites se déclinent selon un continuum, allant des limites personnelles du médiateur aux limites imposées par le contexte sociétal. Entre les deux, nous avons exploré celles liées aux usagers, aux équipes, partenaires et quartiers dans lesquels le médiateur travaille, mais aussi au cadre institutionnel. Certaines de ces limites traversent les différentes catégories.

Ces limites ne signifient pas toujours l’impossibilité d’effectuer un travail de médiation, mais elles

constituent néanmoins des frontières qu’il s’agit parfois de contourner ou repousser et parfois de délimiter davantage. Le constat étant qu’il existe encore des freins par rapport au contexte « idéal » d’une médiation.

Veuillez remarquer que l’énumération qui suit ne se veut en aucun cas exhaustive.

1. Limites personnelles

• Certaines réfèrent à des attitudes personnelles indispensables au médiateur : capacité de rester neutre et impartial (recul par rapport à son vécu et à sa propre subjectivité.)

• D’autres soulignent l’importance de la prise en compte des propres limites (fatigue, stress, disponibilité, motivation, etc.)

• D’autres sont davantage liées à notre contexte de travail particulier : l’isolement du travailleur qui requiert la capacité à savoir travailler seul, situations propices à l’émergence de conflits de loyauté20.

• Etc.

2. Limites liées aux usagers

• Manque de confiance, (re)connaissance du médiateur , etc. • Liberté de choix : attentes diverses, shopping social, assistanat, partenariat, égalité dans des

relations entre médiés, etc • Appartenances culturelles : philosophique, linguistique, us et coutumes, etc. • Absence des usagers au rendez-vous. • Etc.

3. Limites liées aux partenaires et quartiers

• Confusion des rôles, rythmes particuliers, liens avec les institutions dans lesquelles travaille le médiateur.

• Partenariat/réseau (missions floues, cadre déontologique non unifié, collaborations occasionnelles, étiquette « contrat de sécurité » stigmatisante, difficultés de rencontre, cloisonnement, etc.)

• Modes de communication défaillants et non fonctionnels (absence ou distorsion de l’information)

• Etendue du territoire et/ ou importance du groupe cible. • Etc.

20 Le travail «isolé» des médiateurs n’est pas caractéristique à toutes les villes. A Bruxelles, les médiateurs travaillent de manière «isolée» selon le quartier ou l’école (médiation sociale et scolaire). Par contre à Pierrefitte-sur-Seine, les médiateurs interviennent toujours en tandem.

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4. Limites liées au cadre institutionnel

• Distance entre les injonctions de l’institution, du politique et les missions et réalités du terrain. Caractère flou de certaines missions, qui mettent le médiateur en position inconfortable.

• Contradiction entre la volonté de décloisonnement affiché et le cloisonnement réel. • Obstacles liés aux enjeux de pouvoir, aux compétences partagées et aux territoires étendues. • Positions ambiguës dans certains rôles et fonctions, à différents niveaux de la hiérarchie. • Limites du pouvoir d’action du médiateur et de l’étendue de la volonté politique à

promouvoir le changement. • Caractère relatif de la « neutralité », lorsque le médiateur est associé à une institution ou à

un pouvoir local. • Sentiment du médiateur de tenir un rôle de « soupape » ou de « pansement » par rapport à

des situations « problématiques » endémiques et structurelles. • Messages de l’institution vécus comme paradoxaux par le médiateur: sentiments

d’infantilisation, d’isolement et d’impuissance. • Logistique, lieux et équipement de travail absents ou inadéquats. • Etc.

5. Limites transversales

Certaines limites ne peuvent être classées dans les catégories précitées car elles recouvrent simultanément plusieurs de ces aspects.

En effet, la médiation est un métier émergeant. Aussi, les médiateurs ont des diverses formations de

base qui influencent immanquablement leur regard sur les divers processus. Pour ce faire, nous proposons qu’un temps soit dévolu à l’immersion (à partir de ces différences et

ces expériences diverses) et à la construction de références communes sur:

• Les enjeux cachés derrière l’émergence de la « médiation » : béquille ou vraie solution innovatrice ?

• Les préjugés et clichés véhiculés sur la médiation. • Les difficultés (individuelles ou sociales) qui alimentent cette résistance au changement. • La relative méconnaissance de la fonction de médiateur, définition des différents types de

médiation, problèmes liés à la visibilité (trop/trop peu ?). • Le cadre de travail et le profil de fonction : missions très larges (flou, polyvalence,

« concurrence » avec d’autres partenaires sociaux, incohérence des intervention, etc.) • La vision de la temporalité de l’action : fait de la médiation dans l’urgence ou pas ? Est-ce

un service de 1ère ligne ou 2ème ligne ? • La représentation sur les priorités dans le travail. • L’équilibre entre le travail de terrain et le besoin de réflexion sur les actions menées. • La difficulté d’évaluer le travail effectué: obligation de moyens ou de résultats ? En effet, le

travail sur l’humain difficilement quantifiable. • L’implication des usagers et du médiateur : motivation/clarification de la demande

(contrainte ou volontaire)/ légitimité du médiateur • L’idéologie de la médiation employée : décalage entre la théorie et la pratique (sentiment

d’impuissance, résistance au changement, frustration, etc.) Exemple : la médiation comme solution magique, philosophie de vie ou technique ?

• La possible instrumentalisation du processus de médiation (détournement ou alibi). • Contexte global/sociétal : rôle des médias, déresponsabilisation, problèmes liés à

l’interculturalité (« vivre ensemble »). • Mise en danger (violences, agressivité). • Moyens financiers et humains.

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• Cadre déontologique VII. Le statut des médiateurs. Les financements. La déontologie 1. Statut de médiateurs

Il y a deux types de statut envisageables pour les médiateurs : professionnel ou bénévole.

Les services de médiation déploient l’une ou l’autre formule en fonction de la variable :

• financière : le service ne dispose pas d’un budget suffisant pour l’engagement de professionnels.

• théorique : l’emploi de médiateurs bénévoles va dans le sens de la responsabilisation des habitants d’un quartier dans la gestion des conflits de ce quartier et base son efficacité sur le renforcement d’une certaine expertise citoyenne.

• politique : certaines villes ne désirent pas confier la gestion de conflits à des personnes non professionnelles.

Nous allons essayer d’illustrer cette question au regard de l’expérience de Pierrefitte-sur-Seine.

Le statut des médiateurs au sein d’associations qui organisent des médiations est différent d’une

structure à l’autre. Certaines favorisent une implication bénévole des médiateurs et d’autres font le choix d’un statut de salarié.

Le choix de l’un de ces statuts n’est pas neutre et doit être mis en rapport avec l’esprit du projet et

son développement au niveau local. A l’AFPAD, l’équipe des médiateurs est composée de bénévoles et des membres salariés de

l’association. Pour expliquer ce choix de l’AFPAD, il est important de le resituer dans le contexte du projet global. L’AFPAD est à la fois un Point d’Accès au Droit et un espace de médiation. L’articulation entre

accès au droit et médiation est étroitement liée. Les activités de médiation ont pour objectif de prévenir et d’apaiser les tensions liées aux

comportements des personnes, à répondre à une attente de résolution de problèmes de la part des habitants et des institutions, elles ont une fonction de réparation et de création de lien social. Le projet vise à développer une culture de médiation sur tout le territoire de la ville.

Dans cet objectif, un important travail de sensibilisation, de formation des professionnels de la ville et des habitants est mis en place, de façon à ce que chacun intègre le sens de la médiation, qu’il puisse éventuellement orienter des personnes vers l’AFPAD ou utiliser lui-même les outils de la médiation.

La mise en place du projet médiation à l’AFPAD dépasse ainsi largement l’offre d’une prestation qui permet à deux personnes en conflit de se rencontrer et de tenter de trouver un accord. Il s’agit de développer dans les situations quotidiennes un « esprit ou une culture de médiation ».

C’est ainsi que l’AFPAD cherche à favoriser l’implication de tous les acteurs de la ville de Pierrefitte dans ce projet partenarial en développant une démarche active et citoyenne.

Le statut de bénévole des médiateurs participe de cette démarche. Il est un engagement de la part des médiateurs à un projet qu’ils partagent, une implication individuelle et collective qui vise au renforcement des liens entre des personnes vivant ensemble.

En contrepartie, les médiateurs trouvent à l’AFPAD un lieu de formation, d’échanges et de réflexion,

un enrichissement individuel par l’apport de cette démarche, un apport dans leur vie personnelle et professionnelle.

Pour l’AFPAD, être bénévole ne s’oppose pas au caractère professionnel de l’activité des

médiateurs. En effet, ces médiateurs sont des professionnels formés, qui effectuent régulièrement une analyse de leurs pratiques, supervisés par une formatrice. Ils sont professionnels à part entière et reconnus comme tels dans leurs activités de médiation.

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Cette conception nécessite de veiller au maintien d’une bonne cohésion de l’équipe entre les

bénévoles et les salariés. Les médiateurs bénévoles doivent se sentir totalement intégrés à la dynamique du projet. Il est

nécessaire d’être vigilant pour qu’ils puissent participer à des rencontres, donner leur avis sur de nouvelles orientations, qu’ils aient leur place lors de manifestations nationales voir internationales…

Par ailleurs, les bénévoles doivent respecter leurs engagements vis-à-vis de l’association dans le cadre du « contrat moral » qu’ils ont accepté en s’intégrant dans le projet.

Il est important de souligner que l’investissement des médiateurs bénévoles dans un projet participe au changement de regard des médiateurs salariés. C’est un véritable changement culturel.

Une question reste posée sur la reconnaissance des compétences des médiateurs sur le marché du travail. Cette question n’est pas directement en lien avec leur statut de bénévole mais plutôt avec l’absence d’un diplôme reconnu (excepté en matière de médiation familiale). 2. Les financements

Un service de médiation dans la ville est susceptible de financer son action de différentes manières : • Par une dotation publique émanant des différents niveaux de pouvoir (Europe, Etat, Région,

Département, Municipalité,etc.) • Par une dotation privée : fondations, sociétés ayant un intérêt dans le développement du

service de médiation,etc. • Par un financement propre : participation financière demandée aux médiés.

Voici une illustration apportée par le partenaire de Pierrefitte concernant cet aspect du financement

d’un service de médiation Les associations peuvent bénéficier des financements suivants :

• les crédits du contrat de ville accordés par l’Etat, le Conseil Régional, le Conseil Général dans le cadre de la politique de la ville. Ces crédits concernent des territoires et des thèmes bien précis sur une durée définie.

• Le droit commun. Ce sont des financements accordés par l’Etat, le Conseil Régional, le Conseil Général et les municipalités.

• Les financements européens notamment les subventions dans le cadre du Fse Objectif 3. • Les fondations privées. • Les ressources internes de l’association autorisées par la loi : cotisations, recettes de fêtes,

etc. 3. Déontologie

La pratique d’une médiation éthique et de qualité passe par l’adoption d’une déontologie commune aux médiateurs.

Les codes de déontologie de médiateurs s’attachent le plus souvent à réguler l’action de ceux-ci en fonction de trois questions21 :

• Le rôle du médiateur : (mode d’action, domaine d’intervention, mode de saisine, etc.) • Les droits et devoirs du médiateur de quartier (Compétence, Indépendance et impartialité,

Confidentialité et secret professionnel, Incompatibilités éventuelles, Clause de conscience, etc.)

• Les obligations du médiateur à l’égard des parties et des tiers. S’ajoutent à ces grandes catégories de règles, d’autres propres aux réalités concrètes des différents

services de médiation : les résultats attendus, le recrutement, etc. En guise d’illustration, voici un exemple de charte de médiation telle qu’elle est active à l’AFPAD.

21 Voir le code de déontologie des médiateurs de quartiers du SMQ de Charleroi (Belgique).

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PREAMBULE Cette charte de médiation fixe un ensemble de règles garantissant l'éthique et les conditions

professionnelles nécessaires à l'exercice de la médiation. Les médiateurs s'engagent à respecter cette charte et à la faire respecter. I - Définition de la médiation

La médiation est un projet qui conduit à une nouvelle approche des relations humaines. La médiation est une technique mais aussi une culture. Nous pouvons la définir comme l'intervention d'un tiers qualifié, indépendant, neutre et impartial afin d'améliorer la relation entre deux ou plusieurs individus et de faciliter la résolution constructive des différends. Le médiateur n'est ni juge, ni arbitre, ni conseiller mais favorise la compréhension mutuelle et la recherche de solutions par les parties elles-mêmes, au cours d'une ou plusieurs rencontres. L'action du médiateur privilégie le dialogue dans le but de parvenir à un accord satisfaisant pour les parties. II - Ethique et règles déontologiques du médiateur

Dans son rôle le médiateur doit respecter des règles de déontologie afin d'accomplir sa mission de façon éthique. 1 - L'exigence de la formation

Le médiateur a le devoir de se former en permanence. Cette formation est du ressort de l'AFPAD tant

pour les nouveaux médiateurs que pour les médiateurs déjà en exercice. 2 - Obligation d'indépendance

Le médiateur doit être indépendant par rapport aux personnes.

3 - Obligation d'impartialité

Le médiateur ne privilégie ni l'une ni l'autre partie. 4 - Obligation de neutralité

Le médiateur est neutre par rapport au conflit et aux intérêts en jeu. Le médiateur est tenu de refuser une médiation s'il estime que son indépendance, son impartialité ou

sa neutralité ne sont pas assurés. 5 - La clause de conscience

Le médiateur pourra refuser une médiation en invoquant la clause de conscience pour les motifs qui relèvent de son propre jugement. 6 - Obligation de confidentialité

Le médiateur est tenu à une obligation rigoureuse de confidentialité tant en ce qui concerne les informations communiquées par les partenaires, que celles recueillies auprès des parties.

Cette confidentialité s'entend à la fois vis à vis des personnes extérieures à la médiation et des médiateurs.

Toutefois cette obligation peut être levée dans les cas prévus par la loi. Si le médiateur a pris connaissance de faits particulièrement graves, il doit en informer le président ou le directeur de l'AFPAD.

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III - Le recrutement des médiateurs bénévoles

La personne souhaitant devenir médiateur bénévole doit adresser une lettre de motivation à l'AFPAD.

Ensuite, elle sera convoquée à un entretien avec des médiateurs. Enfin, une fois admise dans l'équipe des médiateurs, elle participe au cycle de formation de base et à

l'analyse des pratiques. IV - Obligation de moyens

Dans la mise en oeuvre des actes de médiation, l'AFPAD mettra à la disposition des médiateurs tous les moyens matériels nécessaires au bon déroulement de leur mission, notamment: des locaux, des moyens techniques et le secrétariat. Conclusions

Le médiateur une figure post-moderne22

Le médiateur a été défini le tiers instruit,23 du fait qu’il est porteur d’un savoir nouveau. En mesure d’associer des connaissances techniques très raffinées, à un bagage de valeurs éthiques conçu, à son tour, comme un bagage de connaissances dont l’époque moderne a perdu la mémoire La recomposition de la culture humaniste et scientifique qui devrait orienter la formation du médiateur idéal, associée à une série de qualités personnelles, donnent lieu à une méthodologie entièrement nouvelle pour une figure professionnelle. -Pour cette raison, le médiateur, conçu comme figure qui existe “depuis toujours” dans les cultures traditionnelles, * dotée, à la fois d’expérience et de sagesse, se brise,une fois de plus,contre l’écueil de la complexité culturelle contemporaine.

L’autorité du médiateur

Le médiateur, qui existe et opère à l’heure actuelle dans la foulée de ,la tradition jouit, dans de nombreuses sociétés (…), d’une autorité que lui assigne la communauté toute entière, du fait qu’il est, à la fois, porteur et interprète de la tradition (…), se résumant dans une représentation participée de la réalité et des règles de la vie en commun24. Ce modèle se fonde sur le rapport entre ”égaux”. Mais puisque le règlement d’un différend et l’accord, ,tout comme le langage de la médiation, s’inscrivent dans une trame de valeurs acceptées et partagées par les parties en cause, c’est à dire des valeurs de la société à la quelle elles appartiennent, voilà que vient à manquer, l’un des éléments saillants de la médiation qui la caractérise profondément: la reconnaissance de la différence de l’autre, qui est différent, dans la mesure où il est le véhicule de croyances et de principes divers.L’autorité que doit posséder le médiateur contemporain n’est pas inscrite dans un contexte institutionnel: il l’acquiert petit à petit, dans la mesure où il fait état d’un professionnalisme clair et sérieux que les parties concernées lui reconnaissent, mais qu’il peut perdre dans n’importe quel moment de la médiation. La crédibilité du médiateur contemporain, lui dérive donc exclusivement de sa capacité de mener à bien son travail, comme tout autre brave professionnel. Mais c’est justement dans la définition de cette capacité, dans le bagage des outils du médiateur, que réside la nouveauté et la difficulté de son rôle. Dans notre monde, le médiateur et sa fiabilité lui viennent du fait d’être un brave médiateur, et non pas un brave médecin, avocat ou un brave prêtre; dans les lieux de la mémoires où la médiation survit on devient médiateurs parce que dans d’autres rôles et dans d’autres domaines, on a manifesté une certaine sagesse, une certaine prudence, une certaine modération, La figure 22 Le paragraphe est tiré d’un article de Maria Antonietta Foddai «Médiation :au delà de l’ancien et du moderne», Diritto&Storia, 2003. 23 L’expression est de M. Serres, Le tiers-instruit, Paris, Ed. Bourin, 1991, cit. en S. Castelli, La mediazione, cit.( La médiation) page. 95. 24 A. Pigliaru, La vendetta barbaricina come ordinamento giuridico,(La vengeance de la Barbagia comme règòlement juridique) en Id. Il banditismo in Sardegna,(Le banditisme en Sardigne) Milan, Giuffrè, 1975.

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professionnelle du médiateur n’existe pas, elle est plutôt liée à une éthique publique où faire de la médiation est un honneur et un devoir. Les règles de cette ancienne pratique ne dérivent pas d’un entraînement technique, mais d’un bagage culturel acquis naturellement, à partir de la formation communautaire qu’on a reçue , d’une bonne dose de bon sens et d’une remarquable disponibilité à l’écoute. Il n’en est pas ainsi pour le’ nouveau ’ médiateur qui doit avoir un bon équipage technique et un bagage de connaissances approprié, allant au delà du simple bon sens, un mot qui, dans notre contexte culturel, a désormais perdu la signification qu’il conserve dans le contexte traditionnel.

La formation du médiateur

“ On reconnaît de plus en plus – souligne Lisa Parkinson- que la capacité de gérer un conflit, exige

bien plus que de la bonne volonté, du bon sens auquel s’ajoute, ci et là, quelques mots apaisants(…) Le règlement des conflits doit développer une base théorique spécifique : il ne devrait pas seulement s’agir d’une salade de service social d’où puiser des idées et des méthodes pêle-mêle.25. Parkinson met l’accent sur le problème le plus saillant de la médiation: la mise au point d’un corps cohérent de théories et de principes qui parvienne à coordonner une pluralité de grilles théoriques dont de façon un peu désordonnée, le domaine des parcours de formation à la médiation est bondé(…)

Bien que de nombreux auteurs tracent une ligne de démarcation très nette entre l’approche psychothérapeutique et celle de la médiation26, en apportant des arguments valables relatifs à l’objectif des deux pratiques, à la méthode et au sujets,il existe toutefois certains types de médiation qui dérivent directement des écoles psychanalytiques, avec un setting de règles qui naissent du contexte épistémologique de la psychothérapie. Néanmoins, aussi les modèles qui prennent nettement les distances de la psychothérapie et de la psychologie puisent largement à leur savoir qui fait désormais partie du bagage de connaissances de chaque professionnel en relations humaines. Et c’est pour cette raison que la frontière qui sépare la médiation et la psychothérapie demeure souvent nébuleuse et ressemble plus qu’à une ligne, à un espace dans l’ombre, la contamination entre des disciplines connues,donne naissance à de nouveaux savoirs.

Castelli, l’un des supporters les plus convaincus des différences entre médiation et psychothérapie, après les avoir séparées, par une nette distinction27, les rapproche et admet qu’il existe des “ressemblances entre les techniques utilisées”, et que la médiation, tout en n’ayant pas un objectif explicite en matière de soins, peut avoir des “aspects thérapeutiques”. De même, le modèle Morineau revendique avec force. l’originalité de la médiation, comme construction d’un espace d’accueil protégé, du désordre et de la souffrance des personnes, sans utiliser aucun outil emprunté à la psychothérapie: “Pour faire face au désordre, les médiateurs ne disposent ni du divan du psychanalyste ni des forces du système judiciaire”28, affirme Morineau. Nous tenons néanmoins à ajouter qu’ils doivent puiser ò leurs énergies morales et affectives les plus profondes, – à part un robuste bagage de techniques et de connaissances- pour se caler, en manière efficace, dans la trame de la conflictualité d ’autrui sans en être phagocyté.

En réalité, le bagage du médiateur consiste en une série d’outils hétérogènes qui témoignent de la complexité irréductible de la médiation, une profession en équilibre instable entre vertu, technique et profit.

25 L. Parkinson, Separazione, divorzio e médiation familiare, (Séparation,divrce et médiation familiale ) Trento, Erickson, 1995, p. 94. 26 D. Antonucci,Mediazione e intervento psicologico, (Médiation et intervention psychoilogique) en G. Pisapia e D. Antonucci, La sfida dell mediazionw Le défi de la médiation) Padova, Cedam, 1999. 27 «Mais aucun médiateur qui souhaite être digne de foi, ne songerait jamais - même dans les pires situations - de chercher à modifier la personnalité de ses clients, S. Castelli, La mediazione, (La médiation) Milan, R. Cortina, 1996, pp. 21 – 23. 28 J. Morineau, Lo spirito della mediazione médiation, Milan, F. Angeli, 2000, p. 57.

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Chap. III Analyse comparative et évaluation (par Riccardo Saraco) La recherche d’un benchmark pour les projets de médiation du Groupe de Travail Euromediation Préalable

Ce chapitre décrit les résultats de l’activité d’évaluation réalisée au cours du projet. Cette activité d’évaluation s’est caractérisée par une élaboration “on going” conçue, comme support méthodologique et analytique, tout au long des travaux du projet (juin 2005- décembre 2006).

Lors de la rédaction du texte du projet, ont été définies pour l’activité d’évaluation les étapes suivantes:

1. Cerner le terrain de benchmarking (étalonnage fixant les éléments de l’analyse comparative) 2. Sélectionner les indicateurs d’analyse, pour l’analyse comparative (Tableau des projets de médiation

locaux) 3. Systématiser l’analyse comparative, moyennant une méthode de travail (Tableau d’analyse

comparative). Faire ressortir, en tant que possible, des bonnes pratiques et des modèles d’intervention.

Le but de l’activité d’évaluation, consistait à aboutir- en partant des expériences locales de

médiation – à la définition de modèles ou de typologies d’intervention répétables, aussi bien dans le contexte territorial du groupe de travail qu’à l’intention de ceux qui souhaiteraient lancer des projets de médiation.

L’activité de benchmarking apparaît appropriée, pour atteindre les objectifs décrits plus haut, du fait aussi, qu’elle prévoit la déconstruction des expériences locales en éléments d’analyse susceptibles d’être extrapolés et, le cas échéant, répétés en tenant compte des spécificités du contexte où l’on opère.

En plus, l’activité d’évaluation s’est concentrée sur les projets locaux qui, dans le cadre de leurs contextes opérationnels, prévoient aussi des parcours d’évaluation. Comme nous le verrons ensuite, l’évaluation des médiations est encore, à l’heure actuelle, une activité sporadique et, dans un certain sens, expérimentale: les expériences d’évaluation des interventions de médiation, dans le cadre des réalités qui font partie du groupe de travail Euromediation sont rares et limitées.

Le parcours de travail

A l’occasion du premier séminaire du groupe de travail (Bruxelles 21-22 octobre 2005) ont été présentés l’approche générale aux activités d’évaluation/analyse comparative et le parcours de travail que l’on souhaitait emprunter.

Le tableau qui suit regroupe les outils de travail et les résultats préconisés, pour chaque phase de travail:

OUTILS RESULTATS Glossaire (voir chapitre afférent) Identifier une terminologie commune Mots-clé et variables Identifier les éléments de l’analyse

comparative Cas d’étude (voir www.urbact.eu) Identifier les bonnes pratiques et les criticités

La présentation de la méthodologie des activités d’évaluation est disponible sur le site www.urbact.eu. Mots-clée et variables

Les expériences locales de médiation ont été subdivisées, en adoptant un schéma établi par Urbact. Ce schéma dont on peut trouver la structure sur le site www.urbact.eu, nous a mis en condition de rassembler des informations homogènes, pour ce qui concerne les typologies des différentes interventions.

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En plus, le séminaire de Bruxelles a permis d’identifier un certain nombre de mots-clé à utiliser pour l’analyse comparative

1. Définitions (la définition de ce que veut dire faire de la médiation, quelle est la signification attribuée au mot médiation, compte tenu de l’approche du projet )

2. Types de conflit: (quels sont les conflits qu’abordent les projets de médiation: individuelle interpersonnelle, entre groupes, culturelle, sociale etc …..)

3. Objectifs: (et buts liés aux interventions de médiation) 4. Niveaux d’intervention : (individuel, interpersonnel, entre groupes) 5. Formes d’intervention : (centrale/décentralisée; directe/indirecte) 6. Demandes de médiation par les différents acteurs: (établissements scolaires, communautés) 7. Types d’accès: (formel/informel; obligatoire/volontaire ) 8. Groupes ciblés (citoyens, communautés linguistiques ou culturelles, établissements scolaires,

familles, jeunes) 9. Sujets ciblés: (résidents d’un quartier, utilisateurs de services publics) 10. Méthodes : (orientation vers le procédé /vers les résultats) 11. Statut du médiateur (professionnel/volontaire) 12. Mandat: (mandat public – municipalité, privé – fondations, associations ou partenariats publics-

privés (contrats locaux de sécurité) 13. Financements: (publics, privés, mixtes) 14. Limites de la médiation: (actes criminels, conflits très violents)

Ces mots-clé ont été élaborés au cours du projet, par les membres du Groupe de Travail, après le

séminaire de Bruxelles. Les Groupes de Travail locaux, prévus pour chaque ville, ont contribué à établir une liste de mots-clé dont chacun est conjugué en différents indicateurs,qui explicite le sens qui leur a été attribué et en définissent les diverses acceptions, de la façon la plus exhaustive possible. Cette démarche a abouti à la définition d’une matrice synoptique, pour la comparaison des différents cas d’étude (projets locaux).

Lors du séminaire d’Angers (31 mars-1er avril 2006) on a donc proposé aux membres du Groupe de Travail deux tableaux pour l’analyse comparative: l’une pour la comparaison des activités d’évaluation et l’autre, de caractère plus général, susceptible de faciliter - à partir des indicateurs identifiés – la comparaison entre les projets de médiation locale. Tableau 1. Les critères et les mots-clé identifiés Critères Mots- clé 1. CONCEPTS 1.1

Type de service 1.2 Perception spécifique de la médiation (médiation comme...)

1.3 Type de conflits traités, terrain d’action

1.4 Méthode

2. BUT 2.1 Objectifs 2.2 Attitudes de base à promouvoir 3. MODALITES D’ORGANISATION

3.1 modalités d’organisation 3.2. Accès au service

4. IMPLICATION DES ACTEURS POLITIQUES

4.1 Implication des acteurs politiques

4.2 Compétences spécifiques concernées

5. LIGNES DIRECTRICES DISPONIBLES 6. DIFFERENCIATION DES MEDIATEURS 7. FORMATION 8. NIVEAU D’INTERVENTION

8.1 Niveau d’intervention

8.2 Sujets impliqués dans l’action

8.4 Terrain d’action

9. FINANCEMENT 10. MOYENS ET TECHNIQUES DE TRAVAIL

Le Tableau 1 regroupe les critères et les mots-clé relatifs à chaque élément utilisé pour définir le terrain du benchmark et qui constituent les éléments de réflexion pour l’analyse comparative.

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Les résultats

Le séminaire et la conférence de Turin (18-21 novembre 2006) ont permis de procéder à une première comparaison des expériences de médiation réalisée au niveau local.

Le tableau à la fin de cette publication résume et apporte des exemples concernant un certain nombre de thèmes spécifiques sur lesquels a été entamée une comparaison entre les membres du Groupe de Travail. Le Tableau figure en forme intégrale et complète sur le site www.urbact.eu .

On trouvera, ci–de suite, quelques réflexions sur chaque point, issues de la confrontation entre les membres du Groupe de Travail. Types d’action

Quels sont les concepts à la base des cas d’étude examinés et comment est conçue l’action menée par les différents projets? Des expériences du Groupe de Travail ressort un scénario très diversifié de significations attribuées à leur activité. La donnée qui apparaît peut être la plus significative est que seulement quelques cas d’étude affirment faire de la médiation, dans le sens le plus strict du mot. Dans cette optique, la variété des réponses renvoie à une conception de la médiation qui, tout en connaissant très bien les instruments et les finalités, doit se confronter à d’autres types d’activités sociales, éducatives ou pédagogiques et aux activités concernant la collectivité (tout particulièrement, celles relatives à la population ciblée par les interventions de médiation) dans son ensemble - les politiques de sécurité, les politiques territoriales et urbanistiques, les aspects législatifs, etc. Les expériences activées soulignent l’importance du travail en réseau et de la coopération avec d’autres services. La connaissance du contexte local (social, légal, etc.) joue un rôle d’importance vitale en augmentant l’efficacité de la médiation, dans des situations de proximité, où les rapports personnels (entre voisins, dans des contextes fermés ou ouverts) exercent un poids considérable soit pour ce qui concerne la création du conflit, soit pour ce qui concerne sa solution. Enfin, dans un cas, on précise que l’activité de médiation est également conçue comme un instrument pour légitimer les institutions à s’occuper de certains problèmes sociaux. Perception spécifique de la médiation (médiation comme...)

Qu’est-ce que la médiation? Dans la quasi-totalité des cas d’étude, la médiation est, d’abord, une approche spécifique au conflit. Les activités proposées amènent les parties en cause à surmonter une logique d’opposition inconditionnelle, à arriver à accepter le dialogue, à reconnaître le point de vue de l’autre, et à prendre en charge des responsabilités, en manifestant ainsi la volonté de résoudre le conflit. La médiation est donc une possibilité de choix qui est offerte, de se rencontrer pour entamer un dialogue, pour tâcher de régler les différends, sans avoir forcément recours aux canaux habituels de la justice. En interprétant, au sens large, la signification des réponses, la médiation apparaît comme une action innovante, de type culturel qui vise à instaurer à nouveau, des liens sociaux et à améliorer le climat relationnel, au sein de la communauté.La médiation traite les problèmes dans leur ensemble et non pas dans l’optique d’une lecture linéaire (cause et effet). Accès, accueil, écoute sont autant de mots-clé parmi les plus significatifs, qui caractérisent un espace, un service qui souhaite exercer une action - ne fut-ce qu’au niveau de prévention - sur les comportements, les perceptions, les émotions. Un espace qui se distingue par des caractéristiques spécifiques (neutre, informel et avec la présence d’un personnel qualifié) et par un temps réservé à l’écoute, au dialogue et à l’accès aux droits. Presque toutes les expériences locales soulignent l’importance de la médiation comme culture et donc l’engagement qui s’avère nécessaire, pour parvenir à affirmer et à consolider les valeurs sur lesquels elle se fonde. Type de conflits traités, terrain d’action

Les conflits abordés par les projets qui ont été analysés, sont souvent des conflits liés aux rapports de proximité de la vie quotidienne (dans le quartier, dans les immeubles en copropriété, à l’école, dans la rue, en famille). Il s’ensuit que les premiers sujets ciblés par les interventions sont les citoyens, suivis des groupes de personnes assimilables, en fonction d’une caractéristique donnée, telle que les jeunes, les immigrés, les étudiants etc…. Les conflits traités – aussi bien de nature individuelle que collective - concernent les rapports, l’acceptation de l’autre, la vie en commun des citoyens ou la vie en famille, à l’école ou dans d’autres contextes. De ce qui précède découle que le domaine d’application de la médiation peut être très étendu, à partir des services visant à résoudre des conflits de caractère particulier, jusqu’à certains aspects

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culturels de grande haleine. La perspective partagée est celle qui voit la médiation comme un outil et comme une technique, pour la solution de conflits spécifiques, pour faire en sorte que le dialogue puisse acquérir une signification importante, dans la perception des citoyens, et pour construire une véritable culture de la médiation. La médiation est donc conçue bien plus comme un outil de changement social que comme technique objective l’objectif consistant à passer d’une logique de compétition à une logique de coopération. Méthode

Seuls certains cas affirment adopter la médiation directe, la rencontre, le face-à-face où la communication entre les personnes en conflit se font en présence d’un ou de plusieurs médiateurs. Dans d’autres cas, le médiateur joue un rôle d’“intermédiation” entre les parties en cause, afin de parvenir à concilier les personnes en conflit qui refusent de dialoguer directement, ou bien elle se pose pour but d’écouter ce que racontent les gens qui souhaitent partager avec quelqu’un leur malaise dont un tiers est responsable. Dans bon nombre de cas d’étude, a été employée aussi bien la médiation directe que la médiation indirecte. Objectifs

Conformément à ce qui a été dit plus haut, au sujet de la signification de ce terme, la médiation est en premier lieu une activité visant à reconstruire des liens sociaux entre les citoyens. Dans les cas où l’action de médiation porte sur un quartier ou sur un contexte spécifique, on peut parler de soutien à la réappropriation du sens d’appartenance à une collectivité. En effet seulement quelques projets ont comme objet primaire de leur activité la conciliation des parties en conflit, ce que l’on peut appeler médiation directe. Les autres interventions peuvent présenter les finalités suivantes: diffuser la culture de la médiation, favoriser la communication et le dialogue entre les citoyens, favoriser une vie en commun pacifique et intégrer l’action des citoyens. Et dans cette dernière acception, une attention particulière est réservée à la sécurité des citoyens et aux conflits (sans exclure ceux violents) qui se produisent et se développent dans nos villes. Mais l’objectif de la médiation réside également dans la recherche de solutions alternatives à la justice ordinaire, c’est à dire qu’il consiste aussi à orienter vers les institutions appropriées, les personnes qui souffrent d’un malaise. Le point de départ est la prise de conscience que pour les conflits qui naissent dans le milieu urbain (les villes où la «sécurité» fait défaut), les réponses traditionnelles de la justice ordinaire, souvent, ne parviennent pas à résoudre de façon efficace les conflits, à leur origine. La médiation offre une réponse et se pose un objectif: favoriser et encourager la communication entre les habitants en difficulté, instaurer un dialogue et responsabiliser les citoyens aussi bien pour ce qui concerne leur vie personnelle que leur vie collective. Elle entend, par là, faire ressortir la créativité des individus, pour pouvoir proposer des solutions à leurs conflits, augmenter, à la fois, la tolérance et l’accès aux droits, en mettant directement en cause les habitants. D’autre part, elle vise à construire ou à reconstruire les liens sociaux, en évitant l’anonymat, la marginalisation et les discriminations, et à vivre mieux ensemble.

Attitudes de base à promouvoir

Les projets que l’on a appelé projets de médiation directe, tendent à partager toutes ou presque toutes les attitudes et les comportements liés à la notion de médiation. Dans les cas où les interventions se distinguent par une présence territoriale importante ou par un service s’adressant directement aux citoyens, on souligne la nécessité et l’importance de créer un lieu ayant certaines caractéristiques (neutre, ouvert, informel etc.) et l’issue du parcours de la médiation qui doit réussir à assurer un résultat, susceptible de satisfaire les deux parties en cause. Dans un certain sens, cette dernière condition que l’on pourrait définir «efficacité» et liée et, en même temps, est la suite de la réalisation d’autres objectifs: réussir à créer un espace neutre (mental et physique) de collaboration, d’émancipation à gérer les émotions des personnes en conflit, favoriser un processus de responsabilisation et un dialogue positif entre les parties; orienter les personnes en conflit vers une solution non judiciaire du conflit (de droit partagé); responsabiliser les acteurs du conflit et les amener à reconnaître l’autre. Modalités d’organisation et accès au service

Bien que les services qui ont été examinés soient essentiellement gérés par le secteur social privé (sans but lucratif) et le plus souvent gratuits, en général, il existe toujours une composante publique (le point

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financement sera traité à la suite). Dans certains cas, ont été établies des modalités pour la recherche de fonds et les institutions ou les organisations deviennent alors partenaires du projet. Participation des acteurs politiques

Les liens les plus fréquents avec les acteurs politiques sont ceux qui s’instaurent avec les référents des politiques de sécurité, essentiellement par le biais de collaborations opérationnelles et/ou avec le soutien financier de la police locale. Seulement dans certains cas d’étude, on enregistre un appui politique explicite et la connexion avec les politiques sociales. Les formes de médiation les plus structurées prévoient aussi des normes spécifiques de référence.

Compétences politiques concernées

Tout comme pour le mot-clé précédent, bon nombre de projets ont des connexions avec les politiques locales de sécurité. Pour les médiations qui visent une population spécifique il existe presque toujours une collaboration avec les sujets politiques et institutionnels qui s’occupent, en premier lieu, du même sujet (par exemple si on exerce une activité de médiation dans les écoles, il s’agira de l’Education Publique, du secteur des politiques pour les jeunes, de l’administration). Lignes directrices disponibles

L’élaboration de documents (accords, lignes directrices, programmes, codes déontologiques) parut s’avérer une aide considérable aussi bien pour structurer la signification et les finalités d’un projet que pour organiser de façon concrète, l’activité opérationnelle d’un service. Certains cas d’étude ont élaboré des documents très intéressants qui définissent le cadre de référence et le programme des activités. Toutefois, beaucoup de projets manquent de ces documents très utiles. En tenant compte que, dans certains cas, l’activité de médiation est encore au stade expérimental et vu sa nature hautement relationnelle (les caractéristiques et les modalités de dialogue sont très importantes), le fait de disposer de certains outils de travail qui en définissent les contours et parfois aussi des méthodologies semble-t-être très utile à notre activité.

Différentes actions des médiateurs

Dans les cas qui ont été examinés, ce ne sont pas toujours des médiateurs professionnels qui interviennent, mais des opérateurs (sociaux, de la police, volontaires) formés ad hoc et dans différents domaines (animateurs, médiateurs interculturels, éducateurs). Il serait intéressant de chercher à comprendre, par un approfondissement ultérieur, quels types de formation ont reçu les opérateurs en question (durée, contenus, méthodologies) et les différences entre les parcours de formation prévus par les différents projets. Formation

Les parcours de formation offerts aux médiateurs diffèrent de manière substantielle des cours universitaires ou du master pour l’introduction des techniques de médiation dans le contexte d’un parcours de formation de plus grande ampleur. Les modalités d’accompagnement du travail des médiateurs (réunions d’équipe, supervision, formation permanente, accompagnement) sont, elles aussi, différentes. Certains services ont opportunément prévu des cours de formation ad hoc et des cours préliminaires, au début des activités. Certains d’entre eux organisent des réunions d’information, de confrontation et d’échange avec d’autres services.

Si donc, d’une part, la formation des médiateurs dépend du type de conflits locaux que l’on doit aborder, d’autre part on a reconnu unanimement l’importance d’une formation spécifique et d’une formation de base, à la gestion des conflits.

Niveau d’intervention

Si les projets qui affirment réaliser une activité de médiation au sens stricte du mot préfèrent, le plus souvent, adopter un niveau d’intervention intrapersonnel, en agissant, de ce fait, sur les espaces et sur les rapports entre les personnes, dans les autres cas d’étude, on agit aussi sur les groupes de personnes en

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abordant, en tous cas, des problèmes de caractère collectif. Parfois, l’entretien individuel précède toutes autres formes d’intervention. Normalement, les médiations se caractérisent par le caractère informel des rencontres et par leur spécificité, qui est fonction de la typologie de conflit que l’on est appelé à aborder. Sujets participant à l’action

Il nous semble important de signaler les cas d’étude des nombreux acteurs qui ont été impliqués dans le projet. Comme nous l’avons souligné pour les activités d’évaluation, l’approche multi-stakeholders (multi-dépositaires) est une référence méthodologique importante. Le caractère “social” des services de médiation et des usagers, aux profils très diversifiés (les citoyens), implique la possibilité et la nécessité d’avoir recours à la participation de différents acteurs qui opérent dans le même contexte et qui, en même temps, sont porteurs de perceptions, d’intérêts et de finalités de natures diverses. Même si la confrontation entre les différents sujets, les institutions, et les organisations (qui parfois sans être véritablement en conflit, ne sont pas coordonnées), peut rendre la coordination des activités du projet complexe et articulée, elle semble être presque une condition sine qua non pour réussir à atteindre effectivement les objectifs dont on a parlé plus haut.

Est–ce donc important de s’interroger sur le rôle des institutions et sur celui de la société civile? Les institutions doivent rendre visible leur soutien à la médiation (comme à Pierrefitte) ainsi que par le financement des projets sur ce thème (Bruxelles). D’autres éléments apparaissent importants pour le travail de médiation: la territorialité, travailler et vivre en contact très étroit avec les citoyens et le travail en réseau aussi bien de façon informelle qu’en formalisant les coopération entre les institutions. Dans cette optique il est important d’établir une connexion avec le système judiciaire, avec les institutions qui s’occupent de prévention et de sécurité et avec d’autres services territoriaux, de sorte que la médiation soit complémentaire et intégrée dans les politiques urbaines. Localisation et terrain d’action

La localisation du service de médiation est étroitement liée à l’objectif visé. Il peut s’agir d’un système fermé (par exemple, l’école ), mais le plus souvent, le projet concerne la ville toute entière ou le quartier. Dans certains cas, que l’on définit extrêmes, la médiation se déroule chez les usagers, D’une manière analogue, le terrain d’action peut être un espace expressément choisi . en fonction des exigences du cadre ou bien, la rue, le quartier. Financement

Le financement des projets examinés est, en général, public et octroyé par l’administration de la ville. Outils et techniques de travail

Toutes les techniques de travail, qui ont été brièvement résumées constituent une partie des méthodologies adoptées dans les expériences de médiation et se présentent sous forme d’outils opérationnels des activités. L’EVALUATION DE LA MEDIATION

Il nous semble important souligner que, la bibliographie et les expériences d’évaluation de la médiation dont témoigne une recherche – à vrai dire, assez brève - sont très peu nombreuses et limitées, ce qui prouve qu’il s’agit d’une pratique en cours d’évolution, qui n’a pas encore été totalement élaborée et définie. On peut donc affirmer qu’aussi bien l’élaboration que les pratiques d’évaluation dans un domaine articulé et innovant comme l’est celui de la médiation, exigent une plus grande attention et une réflexion plus approfondie. Ce compte-rendu souhaite apporter une contribution dans cette direction et offrir des occasions de réflexion sur des théories et des pratiques d’évaluation de la médiation. Des expériences qui ont été présentées ressort également le large éventail d’activités qui - à différents titres - peuvent être ramenées à des pratiques d’évaluation liées aux expériences concrètes de médiation du contexte local turinois.

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L’analyse des activités d’évaluation des projets de médiation a été réalisée en adoptant la méthodologie illustrée plus haut: à partir de la déconstruction des cas d’étude, on a sélectionné, par le biais de l’identification des mots-clé et des indicateurs, la zone du benchmark (étalon). De la comparaison des indicateurs sont ressorties quelques idées qui peuvent nous permettre de disposer de points de repère, pour mettre en place des activités d’évaluation ultérieures, dans le cadre des projets de médiation. Tableau 2. Les mots-clé et les indicateurs identifiés pour l’évaluation

MOTS-CLÉ INDICATEURS

1. QUI EST IMPLIQUE

Médiateurs Institutions La zone locale

Bénéficiaires

2. MOTIVATIONS Visibilité Communication Réflexion Vérification des résultats

Réalisation d’objectifs prévus

Nouvelle conception

3. A QUI ELLE S’ADRESSE

Aux structures de financement

Aux partenaires concernés

A la zone locale

A l’équipe Aux institutions

4. QUI LA REALISE

Professionnels Membres de groupes locaux de travail

Structures de financement-institutions

5. CE QUI EST EVALUE

La satisfaction des usagers

Le nombre de cas traités et résolus

La perception des acteurs concernés

L’aptitude au conflit

Retombée sur le territoire

LES RESULTATS Les expériences d’évaluation relatives aux projets de médiation qui ont été analysés sont, dans certains cas, de véritables expériences-pilote, du fait qu’elles constituent les premières tentatives de rationalisation d’un exercice de réflexion dans un secteur – celui de la médiation, qui n’a pas encore développé des modèles d’évaluation consolidés. La recherche d’une littérature appropriée n’a pas abouti aux résultats préconisés, dans la mesure où l’on n’a pas trouvé des pratiques ou des méthodologies consolidées pouvant servir de référence pour l’analyse proposée. Il s’ensuit qu’en appliquant les critères établis lors de l’élaboration du projet, avant sa mise en œuvre, l’analyse proposée se concentre sur ce qui a été décrit à travers la matrice des mots-clé/indicateurs et des cas d’étude. Dans cette optique on a donc procédé à une lecture verticale, pour chaque critère d’analyse, dans le but d’identifier l’expérience locale dont le parcours d’évaluation s'avérait être le plus complet et le plus significatif, et une lecture horizontale, pour comprendre de quelle façon et quels mots-clé avaient été utilisés pour la rédaction de la matrice. Nous estimons devoir signaler que les remarques qui suivent ont été presque entièrement élaborées à partir des informations contenues dans la matrice et que l’interprétation de ce qui a été écrit est conditionnée par le nombre limité des informations que nos avons reçues. Vous trouverez ci-dessous, le commentaire, pour chacun des critères retenus.

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Tableau 3. L’analyse comparative selon les mots-clé, pour les activités d’évaluation

QUI EST IMPLIQUE Tous les projets ont impliqué dans les activités d’évaluation les bénéficiaires du projet. Dans cette optique, le premier et le plus simple benchmark est celui relatif à l’importance d’impliquer les usagers du service, dans une activité qui n’est pas une véritable médiation, mais une activité supplémentaire par rapport au parcours de travail offert au bénéficiaire. Les modalités de cette implication ne sont pas les mêmes pour tous les cas néanmoins, les expériences mentionnées montrent qu’il y a eu une implication des bénéficiaires à la fin de l’intervention (ex post) ou quelques années après sa conclusion (enquête de follow up). Si tous les projets affirment avoir impliqué les bénéficiaires de la médiation, aucun d’entre eux ne signalent d’avoir impliqué dans les activités d’évaluation des sujets extérieurs au projet (associations, représentants du territoire). Un cas affirme avoir impliqué les citoyens résidants, sans toutefois en préciser les modalités. Parmi les cas d’étude, nous estimons intéressant de signaler le projet qui, en dehors des usagers/bénéficiaires, a impliqué, dans cette activité d’évaluation, plusieurs sujets: les médiateurs, les institutions. Comme nous le verrons ensuite, l’importance d’impliquer les médiateurs, ceux qui développent, en concret, le projet et se confrontent avec les bénéficiaires, les acteurs fondamentaux, vise à proposer, par le biais d’activités spécifiques, un moment supplémentaire de réflexion sur ce qui a été fait au cours du travail. On estime que l’importance de l’implication de ces acteurs fondamentaux dans les activités de médiation mérite d’être soulignée. Quant à la participation des institutions, elle peut être aussi motivée par la volonté de restituer aux sujets qui ont octroyé le financement ou aux sujets de référence du projet ce qui a été réalisé. Dans cette optique, la participation des institutions aux activités d’évaluation semble être très appropriée. Pour conclure, la perspective multistakeholders, la participation de tous ceux qui sont intéressés à l’activité spécifique de médiation exercée sur un territoire apparaît comme la méthodologie la plus appropriée.

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CE QUI EST EVALUE

Aussi dans ce cas, tous les projets ont analysé une variable spécifique: la satisfaction des usagers. La dimension relationnelle et la nature encore expérimentale de nombreuses activités de médiation sociale indiquent jusqu’à quel point il est important comprendre comment les bénéficiaires évaluent les services qui leur sont offerts. La satisfaction des usagers est conçue comme comparaison entre ce qu’on s’attend de la solution d’un conflit et ce qui est perçu après l’intervention. On compare donc les attentes des bénéficiaires et leurs perceptions de ce qui s’est réellement passé. La satisfaction est également évaluée à partir de l’amélioration des rapports interpersonnels qui réduit, en mesure considérable, la conflictualité. Dans ce dernier cas, l’évaluation a également servi à motiver et à justifier la continuation des activités. La satisfaction des usagers est également analysée au niveau d’un certain nombre de composantes émotionnelles, cognitives, comportementales et en rapport à des aspects particuliers du service: la courtoisie, les compétences, la ponctualité, l’accès aux informations concernant le cas de médiation en question, de la part des usagers. Dans une optique de plus grande envergure, certains projets ont analysé la perception des acteurs impliqués (donc non seulement les bénéficiaires) dans le service de médiation offert. Dans ce sens, on parle également de l’image d’un service (souvent public et toujours territorial et visible) et de la retombée sur le territoire des services offerts (le cas échéant, pendant des périodes “critiques” spécifiques). L’objet de l’évaluation, la signification totale, c’est à dire, une activité qui envisage d’analyser, de façon approfondie, ce qui a été fait, peut être très différent, même si, dans les cas examinés, on a remarqué une préférence très nette pour des activités qui analysent la perception et le degré de satisfaction des usagers. Il semble donc intéressant d’envisager la possibilité d’évaluer le service offert, non seulement pour ce qui concerne la perception des acteurs, mais également, au niveau de l’ identification des différents cas traités et résolus et de la retombée territoriale du service, en vérifiant également ses effets, non seulement sur la population, mais aussi sur tout le domaine de référence du projet/service. Si, par contre, l’intérêt se concentre sur une variable donnée - par exemple, la satisfaction des usagers - il convient de signaler le cas d’étude qui utilise une méthodologie déjà définie et rodée, la customer satisfaction (satisfaction du client), qui au cas où elle serait réalisée, en adoptant les mêmes critères utilisés pour des expériences analogues, pourrait aboutir à des résultats comparables et à des procédures de saisie répétables dans le temps. La simplicité de l’étude de customer satisfaction permet, en effet, de pouvoir répéter ensuite l’analyse et d’en comparer les résultats.

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A QUI ELLE S’ADRESSE ET QUI LA REALISE

Aussi bien pour l’un que pour l’autre mot-clé on peut identifier deux indicateurs qui sont utilisés par la quasi totalité des cas d’étude: l’évaluation est destinée à l’équipe, aux opérateurs, comme moyen ultérieur de réflexion. Les activités d’évaluation sont réalisées par des experts qui, en général, ont la fonction de support méthodologique. Dans certains cas, le produit des activités d’évaluation s’adresse à ceux qui ont octroyé un financement, aux institutions, aux partenaires du service ou aussi aux citoyens. Mais si on tient compte des motivations dont on a parlé plus haut, qui amènent à réaliser des activités d’évaluation dans le cadre des projets analysés, on peut comprendre pourquoi les véritables, principaux destinataires de ces typologies d’activités sont les médiateurs. Pour les mêmes raisons, dans les activités d’évaluation ont été impliqués les opérateurs (autoévaluation) avec l’aide des médiateurs professionnels intérieurs et extérieurs à l’organisation qui réalise le service de médiation en question. Même si dans beaucoup de cas d’étude, la nature des activités d’évaluation s’adresse à plusieurs sujets, il convient de réfléchir – comme le fait un cas - sur les utilisations (objectifs) et les destinataires (à qui s’adresse le produit de cette activité) d’un parcours d’évaluation. En plus, si la possibilité qu’offre l’évaluation, de procéder à une vérification sur soi même et sur ce qui a été réalisé au cours d’une période donnée apparaît particulièrement intéressante, alors l’importance d’impliquer activement plusieurs sujets dans cette activité est cohérente avec l’approche multistakeholder dont on a parlé. Et dans cette optique, on suggère d’impliquer au moins, tous les partenaires du projet/service, afin de pouvoir comparer les perceptions des différents sujets sur ce qui a été réalisé. Ainsi, on pourra définir les points de force et les aspects susceptibles d’être améliorés, à travers des avis et des choix participatifs. Le recours à des experts médiateurs représente assurément une valeur ajoutée, pour une activité qui peut tirer profit de la contribution extérieure d’un expert. Il faut néanmoins se demander comment inscrire la figure de l’expert dans le contexte d’une équipe dont les membres se connaissent et qui ont déjà travaillé ensemble. Vu la nature hautement rationnelle des activités de médiation et l’importance de la construction d’un dialogue entre médiateur et usager, la reconstruction du processus de médiation et des raisons qui en ont produit l’échec ou le succès est une activité complexe qui exige la contribution de nombreuses compétences et capacités.

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MOTIVATIONS

Pourquoi procède-t-on à l’évaluation d’un service/projet? Des cas étudiés ressortent plusieurs typologies de motivations qui peuvent être également interprétées, comme la définition progressive de certaines variables qui représentent, vis-à-vis du projet, sa validation ou une motivation pour procéder à une nouvelle formulation ou poursuivre sur la voie qui a été empruntée. Voilà donc pourquoi on réalise une activité de communication à l’intention des citoyens. Dans un cas, l’activité d’évaluation a été conçue comme un moment de formation et de confrontation. Mais la logique qui sous-tend la quasi totalité des cas d’étude consiste à vérifier les résultats et la réalisation des objectifs prévus lors de l’établissement du projet pour pouvoir ainsi passer à une phase de réflexion sur les thèmes principaux du projet, permettant - si besoin en est - de concevoir à nouveau le projèts et d’apporter - le cas échéant - des corrections au service offert. Etant donné que - comme nous l’avons vu plus haut - les projets et les services analysés sont très différents les uns des autres, il nous semble opportun de signaler d’emblée quelques remarques qui nous ont été présentées comme des motivations qui ont amené à procéder à l ’activité d’évaluation. Objectifs et résultats

1. Fidéliser les citoyens qui nous ont signalé certaines situations. 2. Offrir aux différents participants au projet, une formation permettant d’améliorer les

dynamiques relationnelles. 3. Vérifier les changements des relations qu’ont apportées les activités du projet.

Les objets de la réflexion 1. Complexité des situations familiales, lors de la réorganisation qui suit les séparations. 2. Cohérence entre les résultats attendus et les résultats obtenus. 3. Perception des difficultés des rapports intergénérationnels, entre enseignants/élèves et

parents /enfants. 4. Réflexions sur les points de force et sur les améliorations pouvant être apportées au niveau

de la gestion et des modalités de contact avec les bénéficiaires. Les finalités d’une nouvelle conception du service

1. Identifier les marges d’amélioration des critères qui ont été observées lors de la conception d’actions de correction.

2. Faire ressortir les aspects qui exigent une amélioration et mettre en place les actions de correction les plus appropriées.

3. S’interroger, par le biais d’un outil d’évaluation commun, sur les dimensions pour lesquelles la médiation a fonctionné et les dimensions où on estime que la médiation ne peut pas être appliquée, affiner les modalités susceptibles de rendre l’intervention, plus efficace, plus adaptable et plus flexible.

4. Promouvoir un espace de confrontation entre les parents qui ont terminé la médiation familiale.

Conclusions

La nature expérimentale de nombreuses activités d’évaluation qui figurent dans ce compte-rendu, ne permet pas d’identifier et de présenter des éléments de projets ou des éléments susceptibles d’être proposés comme des modèles consolidés. De ce fait, la possibilité d’identifier des points fermes de benchmark est limitée à une approche qui retient les points de vue de tous les acteurs porteurs d’un intérêt spécifique en relation aux activités du service/projet (approche multistakeholders). En ce qui concerne les cas d’étude examinés, certaines considérations qui se répètent, nous amènent à synthétiser, comme suit, une activité d’évaluation possible (en gras, les mots-clé que l’on estime être les plus significatifs).

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Tableau 4. Le mots-clé identifiés pour l’ évaluation

QUI EST IMPLIQUE

� Les bénéficiaires

� Les citoyens résidants � Tous les dépositaires

CE QUI EST EVALUE

� La satisfaction des usagers

� Les attentes et les perceptions des bénéficiaires � L’amélioration des rapports interpersonnels � L’identification des différents cas traités et résolus � La retombée territoriale

MOTIVATIONS

� Activités de caractère formatif

� Moment de confrontation � Vérifier les résultats et la réalisation des objectifs � Lancer une activité de réflexion � Concevoir à nouveau et corriger le service offert

A QUI ELLE S’ADRESSE

� A l’équipe � Aux institutions-à qui assure le financement � Aux citoyens

QUI LA REALISE � L’équipe

� Experts médiateurs

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Chap. IV Interventions à la conférence de Turin les 20-21 octobre 2006

M ICHELE DELL ’UTRI 1

La ville de Turin souhaite la plus cordiale bienvenue à cet important congrès sur la sécurité urbaine et sur le rôle de la médiation dans la résolution des conflits.

Comme vous le savez, la ville de Turin est chef de file du projet européen“Euromédiation Secucité”, auquel participent quatre autres villes européennes. L’une des raisons pour lesquelles Turin joue le rôle de chef de file dérive du fait que notre ville a une longue histoire d’étude et d’application concrète de la médiation qui date désormais depuis 15 ans.

Ce que nous sommes est le résultat de notre passé, et si aujourd’hui nous vivons un événement important pour nos villes et pour nos citoyens, nous le devons aux efforts qui ont été déployés par chacun d’entre nous au cours de ces années. Etant donné que je représente la Ville de Turin, je voudrais reparcourir brièvement avec vous, les étapes qui ont amené Turin à être aujourd’hui active en la matière.

1992 est l'année de son adhésion au FESU - le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, grâce à laquelle, la ville a commencé à réfléchir sur la notion de médiation, non seulement comme outil de réparation pénale, mais aussi et surtout, comme outil susceptible de produire de la sécurité urbaine. Comme je le souhaite toujours, dans ce cas aussi, aux paroles et aux concepts ont fait suite les faits: nous avons activé, parmi les initiatives du Secteur Jeunesse, dans le cadre du Protocole d’Entente entre la Ville et la Région Piémont, le Centre Justice Mineurs du Piémont et de la Vallée d’Aoste et le Tribunal des Mineurs de Turin, le Centre de Médiation pénale des mineurs.

Ce Centre est un défi permanent et fort intéressant, du fait qu’il allège le système judiciaire et nous aide concrètement à surmonter, sur le plan humain et sur le plan psychologique, le délit.

Le Centre de Médiation pénale existe désormais depuis plus de 10 ans et son activité consiste à faire se rencontrer les mineurs, coupables de petits délits, avec leurs victimes. La rencontre permet d’aller au-delà des catégories “victime” et “coupable” et d’observer le délit avec des yeux différents, en se concentrant sur les personnes que l’on a devant soi et non pas sur la “vengeance”.

Ce qui précède peut être prouvé du fait que la compréhension du crime est une forme d’empathie réciproque qui se développe entre les deux parties en cause. Le retrait des dénonciations atteint un pourcentage véritablement appréciable.

Les conséquences sont faciles à comprendre: un allégement opérationnel pour toutes les instances judiciaires concernées, une économie de temps et de finances publiques, mais surtout pour les citoyens, une plus grande tranquillité et une perception accrue de sécurité.

Il s’ensuit que le Centre Médiation pénale peut être présenté, dans ce contexte, comme une expérience concrète et résolutive des conflits.

D'ailleurs, si vous y réfléchissez, la médiation est, depuis toujours, l’outil constituant toute réalité humaine. A ce propos, je voudrais reprendre un ancien philosophe qui est à la base de notre pensée: Aristote. D’après Aristote, l’homme devait être un “zoon politicon, un homme politique”. “Politique” en sens dialogique relationnel, qui dans son interaction avec les autres êtres humains, trouve l’expression de sa potentialité.

Evidemment, la rencontre avec d’autres êtres humains comporte des coûts d’adaptation et des coûts de médiation ( en italien, médiation, media azione = action se situant au milieu), Entre deux extrèmes vicieux – affirme encore Aristote-.la route du centre est celle vertueuse. La médiation est donc à la base de toute société civile et de toute dynamique humaine.

Il est vrai que nos civilisations modernes fortement articulées et technologiques semblent avoir perdu tout contact avec leur arké, avec leurs origines, mais elles semblent enfin commencer à se souvenir que la médiation entre individus peut s’avérer un outil précieux.

Conceptuel et opérationnel. Un outil grâce auquel – je le répète- on gagne du temps, on économise de l’argent et on évite des procès bureaucratiques qui alourdissent notre système.

Evidemment, dans cette salle, c’est vous les experts, moi je ne représente que la ville de Turin, et je ne fais donc qu’exprimer le souhait d’un administratif: ce qui importe pour moi et pour ma ville c’est qu’aux paroles suivent des faits. Puisque la médiation est utile – et ce projet européen le prouve- nous devons nous

1 Adjoint préposé à la Jeunesse et à la Coopération Internationale.

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activer afin que les centres opérationnels dans le domaine de la médiation, qui existent sur les différents territoires, soient d’avantage connus et utilisés.

Donc, très simplement: oui à la médiation comme principe général, mais surtout oui à la diffusion du concept de médiation, comme outil de résolution.

Et que ce congrès soit la base théorique pour une évolution pratique ultérieure. Je voudrais seulement ajouter qu’en Italie, dans le code civil ne figure pas encore une véritable

reconnaissance législative de la médiation, comme outil de réparation d’un dommage. Toutefois, nous sommes tous conscients, qu’en réalité, elle est en train de le devenir, et je crois qu’à

courte échéance, on arrivera à avoir aussi en Italie, une législation dans ce domaine. Nous pourrions nous inspirer du droit anglo-saxon, où l’on trouve déjà des indications dans cette

direction: les tribunaux confient en grande partie aux médiateurs, la solution des différends les plus simples, en évitant ainsi d’alourdir le système. La Communauté Européenne, en premier lieu, semble avoir saisi l’importance que constitue le développement de cette réflexion dont nous pouvons tous tirer profit. Nous souhaitons donc que soient prévues de nouvelles lignes d’orientation et de nouveaux postes de financement à ce titre.

Pour conclure, je voudrais vous souhaiter à nouveau la bienvenue dans notre Ville et vous remercier pour votre présence.

Bon travail et…. bonne médiation! GIOVANNI GHIBAUDI 2

Il est peut-être important de re-parcourir quelques étapes qui - comme vient de le dire Monsieur

l’Adjoint Dell’Utri - font partie de l’histoire de Turin. Turin a commencé à réfléchir sur le thème de la médiation en 1993, sous l’effet de certaines

stimulations culturelles provenant, déjà à l’époque, de contacts de son administration avec d’autres villes et d’autres réalités européennes.

Au niveau local, la réflexion, s’est développée entre collègues, opérateurs sociaux, magistrats, fonctionnaires, d’autres administrations, enseignants etc., des personnes qui ont crû dans la médiation aussi bien pour ce qui concerne les retombées que son application peut avoir sur les politiques actives de la sécurité, que pour ce qui a trait à la reconstruction des liens sociaux qui trop souvent se brisent, à cause des conflits que nous rencontrons chaque jour.

En 2004, s‘est tenu à Angers, un congrès organisé en collaboration avec le FESU, et où est née l’idée du groupe de travail “Euromediation Secucité”, dont la coordination a èté proposée à la Ville de Turin qui, grâce au secrétaire de URBACT, en a financé l’activité à partir de 2005.

Depuis septembre 2005 jusqu’ici, nous avons travaillé en partenariat avec les villes d’Angers, de Bruxelles et de Pierrefitte Sur-Seine; mais aussi avec un autre groupe de travail URBACT, “SUDC”, dont la Ville de Liège fut le chef de file, qui a développé des réflexions et des confrontations sur des thèmes qui s’entrecroisent avec certains objectifs de Euromédiation Secucité.

Les membres du groupe de travail qui ont assuré une présence constante à tous les séminaires locaux, ont développé, au fil des mois, des réflexions, des idées, des connaissances, ils ont cherché à élaborer des stratégies, dans le but d’identifier, à l’échelon européen, de possibles lignes politiques d’intervention qui, dans une optique de prévention, placent au centre de leurs actions la sécurité urbaine, et la médiation.

Au cours de notre premier séminaire de Bruxelles, nous avons choisi de nous occuper de la médiation et de ses retombées opérationnelles, dans une optique de développement de la communauté, à travers des projets spécifiques, susceptibles de favoriser la réappropriation de la gestion des conflits, par les acteurs sociaux concernés.

Nous sommes conscients que les thèmes que nous avons approfondis au cours des séminaires locaux, exigent des réflexions ultérieures - surtout dans le contexte des politiques de sécurité - sur les connexions entre les politiques de contrôle et de répression de la part des forces de police et les actions de médiation possibles dans le domaine social, scolaire, communautaire, familial.

En effet, de nos jours, nous devons aborder de multiples problématiques de conflits qui naissent et se développent dans le cadre de situations de plus en plus complexes qui exigent des réponses diversifiées

2 Coordinateur du Centre Médiation Pénale pour les Mineurs de Turin et chef de file du groupe de travail “Euromédiation secucité” du programme URBACT.

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où s’enchevêtrent le formel et l’informel, la réponse institutionnelle et celle non institutionnelle. Celui qui a eu la chance de connaître la médiation axée sur une culture qui se rattache à sa

signification étymologique et philosophique y a trouvé un potentiel créateur qui s’enracine dans les relations entre les êtres humains, un aspect que la planification sociale sous-évalue trop souvent.

Par le biais de ces relations, on parvient à restituer l’espace qui leur revient, au dialogue, à la parole, qui sont les éléments sur lesquels se fonde la médiation et à travers lesquels on peut réussir à concevoir les solutions aux problèmes auxquels nous sommes confrontés. On ne délègue pas à des tiers, la solution du conflit entre plusieurs acteurs sociaux, mais on le prend personnellement en charge et, en profitant de l’aide de quelqu’un qui s’est spécialisé dans ce type d’activité on essaye à le gérer et à le surmonter. Grâce à la médiation, on parvient à débloquer le temps du conflit.dans lequel les personnes se figent, n’ont pas la force de sortir et d’adresser leur regard personnel et interpersonnel vers l’avenir. Gérer le conflit autorise les parties en cause à gérer leur avenir.

C’est à partir de ces préalables que nous avons essayé de développer une réflexion et une confrontation approfondie en cherchant, en même temps, à identifier de possibles indications opérationnelles à l’intention des politiques locales, dans le but de donner de nouvelles réponses aux anciennes et nouvelles conflictualités de nos territoires et de nos communautés.

Je tiens à remercier tous ceux qui pendant tous ces mois, ont partagé avec moi cette expérience. Je les remercie pour l’enthousiasme avec lequel ils ont abordé des temps de travail épuisants, et pour les tours de forces que je leur ai parfois imposés. Hier, par exemple, nous avons commencé notre séminaire local à 9 heures du matin et nous avons terminé à 19 heures! La journée a été très riche et enrichissante, mais aussi très fatigante. Toutefois c’est vraiment ce mix de richesse et de fatigue qui nous a permis de mener à bien le travail que nous avons commencé à construire et que nous espérons bien pouvoir continuer, parce qu’il nous reste encore beaucoup de choses à faire.

Ces deux journées de conférence sont un espace dans lequel nous allons illustrer le travail qui a été fait et les résultats partagés que nous avons atteints et qui seront présentés au cours de la table ronde. RICCARDO SARACO3

Le travail d’évaluation et d’analyse comparative a accompagné constamment l’évolution du projet,

au cours d’un an et demi d’activité. Nous nous sommes occupés de comparer entre elles les différentes expériences locales de médiation, l’objectif étant d’identifier les éléments pouvant être choisis comme points de repère pour d’autres expériences futures. Nous nous proposions de parvenir à construire un modèle qui, sans prétendre être un modèle de médiation européen, puisse au moins constituer un ‘’ fil rouge’’ entre toutes les médiations impliquées dans le projet Euromédiation.

Ainsi, au début, nous avons utilisé le schéma mis en place par URBACT pour l’analyse des cas d’étude, un schéma nous permettant d’analyser les différentes expériences locales, à l’aide d’une grille homogène de variables. A partir de ces fiches, nous avons sélectionné un certain nombre de variables que les membres du groupe de travail estimaient être les plus importantes, les plus significatives. Ensuite, elles ont été définies, en tenant compte de la contribution que chacune des expériences locales pouvait apporter à la définition de ces variables (qui ont été appelées mots- clé).

Au début, nous avons comparé, les concepts de base d’une activité de médiation et nous avons constaté que beaucoup de projets ne déclarent pas faire de la médiation dans le sens strict du mot, mais plutôt des interventions à caractère social de grande envergure (à partir de programmes de revitalisation urbaine jusqu’à des projets de prévention et de sécurité des citoyens.en passant par des politiques gérées par les services sociaux) Un élément nous a fait comprendre, en premier lieu, à quel point il est important que la médiation- en tant qu’activité sociale- soit liée aux autres activités du territoire (éducatives, pédagogiques, de sécurité, etc.) Il est également important que la médiation soit complémentaire avec les autres activités de caractère social, produites sur le même territoire. Ce qui s'avère particulièrement intéressant est le fait que l’une des activités du projet consiste à orienter la personne en conflit vers le type de service dont elle a besoin.

La médiation peut être perçue comme un type de service ou bien comme une technique spécifique d’intervention sociale, toutefois l’élément commun à tous les opérateurs concernés est leur approche spécifique et innovante au conflit et à sa résolution.

3 Expert en évaluation du groupe Euromédiation Secucité.

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Un autre élément très répandu réside dans le fait de pouvoir offrir une alternative aux canaux ordinaires de la justice et d’assurer une solution positive du conflit, positive, dans la mesure où elle est partagée par les parties en cause.

Je voudrais ajouter encore une remarque sur ce point. La médiation semble être vue non seulement comme un problème, dans une logique linéaire de cause

et effet, mais dans sa globalité et donc il y a lieu de réaffirmer l’importance de concevoir les problèmes des citoyens, dans toutes les dimensions d’analyse et d’activité proposables, pour aborder ces problèmes.

Le plus souvent, les conflits traités sont des conflits qui concernent les relations entre les personnes et, donc ils ont affaire à la vie de nous tous, de tous les citoyens.

Et voilà que se manifeste à nouveau, l’importance d’une approche intégrée à ce type de problèmes sociaux.

Voyons donc quels sont les principaux objectifs des projets de médiation qui ont été examinés au cours du projet Euromediation. L’activité de médiation vise souvent à réinstaurer les liens sociaux, à encourager le dialogue, et à reconstruire des relations que le conflit avait interrompues. Ces conflits sont également l’opportunité de faire en sorte que le citoyen, l’habitant du quartier, puisse retrouver le sens d’appartenance a sa communauté, mais l’activité de médiation a aussi souvent comme objectif la prévention de possibles situations de conflit (à l’intérieur de contextes fermés, comme l’école ou les rues du quartier). D’une manière analogue, nous nous sommes efforcés de comprendre quels sont les comportements, les attitudes que l’on souhaite encourager à travers la médiation: dans un grand nombre de projets, on tend à responsabiliser les parties en conflit et surtout à obtenir la compréhension pour le point de vue de l’autre.

Un autre élément qui me semble intéressant est celui qui consiste à réussir à assurer un résultat satisfaisant pour dépasser le conflit. Ce résultat est très important, car l’intervention de médiation doit être efficace, dans le sens qu’elle doit aboutir à une solution positive pour sortir du conflit. Parmi les cas traités, on a remarqué que, presque toujours, le projet de médiation est géré par une association de non-profit ou grâce à une contribution publique, dont l’octroi néanmoins, n’est pas toujours certain. En effet, on parle toujours du médiateur comme d’un agent neutre, et un financement public pourrait, dans un certain sens, avoir des répercussions sur cette caractéristique d’autonomie. Toutefois, en général, le service public participe à la médiation, pour ce qui est du financement. L’autre caractéristique du service, commune à tous les projets examinés est son caractère gratuit, ce qui fait que les activités de médiation sont toujours gratuites pour les parties en conflit.

Un autre thème dont l’analyse nous a paru très intéressante est celui qui consiste à savoir comment les auteurs politiques et les politiques qui diffèrent de la médiation sont impliquées dans les projets de médiation. Le plus souvent, les activités de médiation sont liées aux politiques de sécurité urbaine, tandis que dans quelques cas seulement, les politiques de médiation sont liées aux politiques sociales. Un élément qui nous semble important mais qui n’est retenu que dans quelques projets est la possibilité, qu’ont ceux qui gèrent les activités de médiation, de disposer d’outils méthodologiques qui permettent d’avoir une vue d’ensemble institutionnelle et des normes assurant un support à ce que l’on souhaite faire. Nous avons pu remarquer que dans certains projets figurent d’importants accords institutionnels ou des normes déontologiques, mais qu’on n’y trouve pas toujours des plans annuels d’activité.

Nous nous sommes également interrogés sur le type de formation que possèdent les médiateurs, pour assurer leur tâche. D’abord, il existe deux grandes catégories: les médiateurs professionnels et les médiateurs bénévoles; Nous avons aussi remarqué que les médiateurs ne sont pas toujours des professionnels de la médiation et que, très souvent, la formation qu’ils reçoivent est une formation de caractère général, une formation parfois seulement préliminaire, au début du service. Il y a surtout des exemples qui montrent que les formations diffèrent d’un projet à l’autre. On parle de formation générale et de formation spécifique, mais il faudrait en identifier les domaines et approfondir l’analyse des tranches de formation qui sont proposées aux médiateurs.

Une autre activité très importante est la supervision et l’accompagnement à l’activité du médiateur. Il arrive souvent que d’autres acteurs participent au projet de médiation et prêtent leur collaboration.

Ce sont des associations locales ou des groupes spécifiques de personnes, tels que les jeunes, les immigrés et d’autres types de sujets et parfois directement les citoyens qui sont, en général, les premiers destinataires de l’activité de médiation. En ce qui concerne les conflits et les problèmes de caractère relationnel, le niveau d’action le plus partagé est celui interpersonnel c’est à dire celui relatif au relations entre les personnes.

Le travail d’analyse qui a été fait au cours du projet est assurément un travail in progress, la première contribution à la définition de certains éléments qui peuvent devenir des points de repère pour exercer une activité de médiation à différents titres. Dans ce sens, à partir de l’analyse des différents cas d’étude, on a

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élaboré une ‘‘matrice de variables et d’expériences’’, en comparant les expériences locales des villes partenaires avec des indicateurs construits ensemble et utilisés comme éléments d’analyse et d’approfondissement. Face à face d’expériences ANNA SIRONI 4

Aujourd’hui, la tâche m’incombe aussi de vous faire les honneurs de la maison, dans le sens où je vous souhaite la bienvenue à la “Fabrique des E”; un nom qui évoque aussi les contenus de la médiation. En effet, la “Fabrique des E” indique qu’ici on cherche à travailler sur une pluralité de points de vue, d’appartenances, d’optiques d’observation, lorsqu’on a affaire à plusieurs points de vue, on a du mal à travailler – disait Giovanni Ghibaudi- on met à l’épreuve notre capacité négative, c’est à dire la capacité d’être dans l’incertitude, d’aboutir à des solutions qui, en réalité, ne sont que des réponses et, en plus, qui sont parfois incomplètes. Aujourd’ hui, j’ouvrirai nos travaux en donnant la parole à quatre personnes qui, au fil des ans, ont accumulé une longue expérience et qui, par une méthode inductive issue de journées entières de réflexion en commun, tâcheront de faire une synthèse de ces expériences. L’objectif ne consiste pas tellement à arriver à formuler une théorie parfaite de la médiation, mais plutôt à réintégrer les pratiques, afin qu’après être rentrés chez nous, dans nos villes, nous puissions promouvoir des orientations de nos actions, de plus en plus compatibles avec les nouvelles demandes que les conflictualités anciennes et nouvelles, nous posent sur nos territoires. Je commencerai en posant à Hibat Tabib, de Pierrefite Sur-Seine, une question concernant les lignes de développement qu’il prévoit pour son travail et les aspects critiques afférents.” HIBAT TABIB 5

Chers amis, vous connaissez l'AFPAD dans ses trois dimensions: l'accès au droit, la médiation et l'éducation à la citoyenneté. Madame Catherine HANRIOT va vous présenter en détail sur ces trois axes.

C'est pourquoi je vais essayer de vous présenter quelques éléments complémentaires. Le projet de l'AFPAD s'est construit à partir d'une politique sociale innovante menée pendant

quelques années au quartier des poètes de Pierrefitte et d'un constat concernant les situations de violence, et aussi les rapports des habitants aux institutions. 1 – Point d'accès au droit

L'AFPAD est un point d'accès au droit avec des permanences juridiques, avocats, juristes, écrivain public, notaire, etc... Concernant ce point d'accès au droit nous pouvons citer quatre particularités :

� le premier accueil, un élément qui joue énormément dans des situations conflictuelles. C'est un élément qui manifeste une culture d'hospitalité et avoir envie d'accueillir l'autre.

� Il existe une liaison entre des problèmes sociaux et juridiques et une articulation forte et réfléchie entre l'accès au droit et la médiation.

� La légitimité du projet auprès des institutions et ses liens avec l'ensemble des partenaires institutionnels et associatifs.

� Une place importante pour implication des habitants (bénévoles) dans le projet. 2 – Un espace de médiation et de règlement des conflits

La médiation sociale considérée comme un concept lié à non adaptation des institutions notamment la justice et la police par rapport à l'évolution profonde de la société. La médiation comme une technique avec l'ensemble des règles de déontologie pour l'AFPAD porte trois dimensions :

� Des difficultés de communication entre les habitants et les institutions et souvent avec des malentendus... dans ces situations l'AFPAD joue le rôle d'intermédiaire sans être partisan des habitants ou des institutions. Dans ce sens, l'AFPAD c'est un lieu de non pouvoir qui favorise la communication entre les habitants, entre eux et les institutions. Dans ces cas l'AFPAD se situe dans

4 Formatrice et médiatrice de la Casa dei Conflitti de l’Association Gruppo Abele de Turin modératrice de la Table Ronde. 5 Directeur Association AFPAD Pierrefitte-sur-Seine

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une démarche de médiation et c'est l'esprit de médiation qui prédomine. � Médiation formelle : avec les entretiens préalables afin d'expliquer le sens de médiation (la

pédagogie) et préparer les deux parties à se rencontrer et pour qu'elles acceptent leurs responsabilités dans la recherche des solutions partagées. Si les deux parties envisagent un règlement amiable mais qu'ils ne souhaitent pas se rencontrer, une médiation navette peut être envisageable.

� Troisième dimension concerne l'espace public, le bien commun, les médiations collectives concernant la vie commune, les situations dans lesquelles souvent il y a plusieurs parties. Exemples : les problèmes entre des habitants d'une zone pavillonnaire avec un collège, un groupe d'habitants et la police, des locataires avec leurs bailleurs, des adultes avec les jeunes, etc... Pour que la médiation dans cette dimension soit efficace, nécessite beaucoup de concertation, de préparation, du temps, etc... C'est bien evident que la médiation n'est pas une baguette magique avec laquelle on peut tout régler. La médation avant tout c'est un outil nécessaire pour la gestion des villes en complémentarité avec la justice parce que les médiants se trouvent dans un droit négocié, partagé et pas imposé. C'est dans ce sens que la ville de Pierrefitte s'est déclarée « Ville-Médiation. » Dans la ville médiation, l'accès à la médiation devient un droit pour les citoyens. C'est pour cela que l'AFPAD a mené une campagne de sensibilisation et de formation en direction des acteurs de la ville et aussi des habitants pour que la médiation comme culture trouve sa place à Pierrefitte.

Les objectifs que nous cherchons à travers la médiation sont les suivants : � Prévenir la violence, � Apaiser les conflits, � Construire et reconstruire du lien social.

Tout cela pour que les habitants puissent mieux vivre ensemble. ALI SASSI 6

Je ne vais pas être très innovant par rapport aux précédentes interventions, je pense autant que Hibat

et Christophe, qui ont un peu expliqué toute la philosophie de la médiation, sa démarche et comment elle s’inscrit dans un cadre de prévention dans n’importe quelle ville européenne. Peut-être alors, dans ce cas là, que je vais un peu plus m’attarder sur l’association que je présente aujourd’hui et la ville que je représente, qui est Bruxelles : qu’est-ce qu’elle a proprement de spécifique.

Je représente une association qui s’appelle « Bravvo », c’est un jeu de mots entre le français et le néerlandais, Bruxelles étant une ville bilingue, et qui veut dire « Bruxelles avance ». Elle avance vers quoi me dirait-on ? Elle avance justement vers un modèle de ville qui soit sûr et agréable à vivre. C’est un peu l’objectif de cette association. C’est quelque part une œuvre qui traduit une certaine volonté politique et aussi un principe de gouvernance locale. Je ne vais pas m’attarder à expliquer tout le modèle belge et sa structure politique locale, mais je pense qu’il y ait pour quelque chose.

Partons donc du slogan de « Bruxelles avance » pour essayer de comprendre comment approche-t-on les problématiques de sécurité et d’insécurité à Bruxelles. Intégrale et intégrée, voilà l’approche adoptée : « intégrale » veut dire aborder ces problématiques de par leurs différentes composantes (socio-économique, psychologique, sécurité) sans se dire cet aspect est important, par contre l’autre ne l’est pas. Par « intégrée » on entend l’intervention concertée à tous les niveaux et entre les différents professionnels. Il s’agit, en effet, d’une démarche qui a pour visée d’associer tous les acteurs du terrain dans la recherche du même objectif. Auparavant, ces différents intervenants essayaient tous de travailler sur le sentiment d’insécurité mais en menant des actions isolées : chaque acteur travaillait quelque part sur un terrain bien particulier, sans regarder autour de lui, sans évaluer son action par rapport à une autre, sans se mettre dans une optique plus généraliste, et le but était, justement, d’accorder toutes ces actions, c’est un principe de capitalisation.

Dans ce cadre, je vais essayer d’expliquer les spécificités de la médiation qui se pratique au sein de Bravvo. La médiation à Bruxelles préexistait à Bravvo, cette dernière est venue pour donner une forme et une méthodologie de travail, principalement.

La médiation à Bravvo, que vous pouvez retrouver dans les documents du séminaire, s’est principalement organisée dans un axe qui s’appelle « axe de gestion des conflits ». Cet axe se subdivise en différents services qui s’occupent de problématiques bien particulières. Le champ de la médiation étant un vaste champ, où se croisent plusieurs populations et plusieurs problématiques, il devient donc nécessaire

6 Médiateur Association Bravvo, Bruxelles.

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d’affiner les prises en charge et les traitements spécifiques. Il s’agit de bien approfondir le traitement par rapport à chaque thématique. A Bravvo, il existe trois services de médiation : sociale, locale et scolaire.

Tout d’abord, on a le service de médiation sociale qui est plus tourné vers le quartier, vers le territoire et qui travaille essentiellement à créer, ou à recréer, ou à restaurer le lien social. C’est là son principal objectif. Le lien social, la cohésion sociale au niveau d’un quartier, comment faire participer les citoyens, comment les englober dans leur cité, comment faire pour qu’ils redeviennent quelque part propriétaires de leur territoire tout en ayant cette sensation d’être libres, participatifs et en sécurité. Par la suite, et mon exposé n’a pas d’ordre hiérarchique, on a un deuxième service de médiation qui est le service de médiation locale : c’est un service qui travaille principalement sur la gestion des conflits interpersonnels. C’est-à-dire tout conflit qui naîtrait lors d’une relation, plus ou moins durable, entre deux ou plusieurs individus, et qui serait de nature à perturber leurs vies. Principalement, il s’agit de conflits qui naissent dans la sphère familiale, dans large sens (différends entre conjoints, conflits parents/enfants, conflits dans la fratrie, violences conjugales, séparations et divorces, etc.) Les conflits de voisinage sont également pris en charge, surtout lorsqu’il s’agit de comportements déviants ou atypiques (alcoolisme, violence, etc.) qui ont tendance à troubler le voisinage et à entraîner des conflits autour de ces nuisances occasionnées. Dans un type de cas comme dans l’autre, l’aspect relationnel est fort prépondérant. La proximité affective et physique entre les personnes concernées, ne manque pas, entre autres, pas de poser des problèmes de communication. Le médiateur travaillera ici, et comme disait Hibat, non pas à se présenter comme un « solutionneur miraculeux », mais plutôt comme de outilleur. C’est à dire que le médiateur local va travailler à être l’outil propre de la médiation. Comment cette personne peut-elle m’utiliser pour résoudre son conflit ? Comment pourrais-je déclencher chez elle une envie de devenir actrice ou acteur de sa problématique ? C’est un travail qui est tourné vers les compétences pragmatiques des personnes, et lorsqu’on dit compétences pragmatiques, c’est vraiment un principe de responsabilisation, un principe de participation et un principe d’émancipation : c’est à la personne de participer activement à la résolution de son conflit, il s’agit donc de sortir quelque part de cette stature de « citoyen consommateur » pour aller vers un vers un « citoyen actif ».

Enfin, je présenterai le service de médiation scolaire qui lui travaille, comme son nom l’indique, dans l’école. Je ne vais pas aborder ce service dans toutes ses spécificités mais je vais insister sur le travail qui se développe au niveau l’école, dans le sens où c’est un microsystème bien particulier qui a ses propres logiques, ses propres problématiques. Toutefois, ces problématiques débordent généralement ses frontières et viennent se poser comme problèmes sociaux. Je pense notamment à la problématique du décrochage scolaire des jeunes, les problématiques de bandes, etc. La médiation scolaire essaye d’articuler son travail de façon qu’il soit tourné autant vers les élèves, que vers les enseignants, la direction et les parents. L’objectif étant de faire en sorte que l’école redevienne quelque part un centre d’intérêt pour tout le monde et quelque chose de participatif et non pas d’imposé. Ce n’est pas parce qu’on est obligé d’aller à l’école qu’on y va, mais on va à l’école parce qu’on aime bien y aller. Certes c’est un objectif qu’on peux qualifier de valeureux, d’ailleurs comme tous les autres objectifs, mais c’est aussi un travail de longue haleine.

Pourquoi je vous parle de tous ces services de médiation ? Particulièrement, parce qu’ils révolutionnent la chaîne de prévention, qui va de la prévention

primaire à la prévention tertiaire, et qu’ils essayent de combler les lacunes existantes dans l’articulation prévention-répression. La médiation en ayant pour objectif la pacification sociale dans une optique d’amélioration de la qualité de vie, se propose comme une alternative concrète aux modes traditionnels de règlement des conflits (justice, police). En effet, on s’est rendu compte de l’insuffisance de la réponse institutionnelle traditionnelle et on a essayé d’innover, d’apporter des réponses neuves et riches. Ces réponses vont principalement s’atteler à impliquer les personnes concernées pour les rendre actrices et parties d’une dynamique de développement, de leur ville, de leur quartier, de leur environnement et, tout simplement, de leur vie.

Voilà, je ne vais pas être plus long, si vous avez des questions n’hésitez pas à me les poser, merci. CHRISTOPHE BECHET 7

La ville d’Angers est une ville située dans l’ouest de la France qui fait environ 160.000 habitants, et dont l’agglomération qui fait à peu près 250.000 habitants, est traversée par la Loire. Je vais donc vous

7 Responsable Mission Prévention Tranquillité Publique de la Ville d’Angers.

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présenter l’origine des dispositifs de médiation sociale à Angers. Riccardo a abordé le lien entre médiation et sécurité, comment les politiques publiques de sécurité ont été à l’origine de politiques de médiation sociale. A Angers ça a été le cas : un quartier de la ville qui fait environ 20.000 habitants, donc un gros quartier, composé d’immeubles d’habitat social, a connu à la fin des années 90 des tensions assez sérieuses entre la police et des jeunes du quartier. Une réflexion est née à cette occasion qui a aboutit à la création d’un dispositif appelé « correspondants de nuit » (CDN) : ce sont des médiateurs qui interviennent la nuit sur l’espace public en régulation des conflits de personnes, des conflits de voisinage, sur les problèmes de rassemblement en bas de tours, sur des problèmes de confiscations d’espaces publics (sur les places, dans les cages d’escaliers) et aussi en soutien aux personnes en détresse morale. Donc, au départ une problématique de tranquillité publique, on va dire de sécurité : l’idée c’était d’avoir une présence, une présence sur le quartier, la nuit, quand il n’y a plus aucun professionnel présent pour réguler ou gérer les conflits. L’idée qui s’est développée ensuite, avec ce service, ça a été de pouvoir traiter ces problèmes d’insécurité et de tranquillité publique, mais d’une manière autre qu’une manière sécuritaire, c’est-à-dire que le service est intervenue par la médiation sur des problèmes qui ne relevaient pas forcément de la police (les petits conflits de voisinage, les problèmes intra familiaux, les problèmes de relation entre des jeunes et des adultes) Ces problèmes qui pour nous peuvent apparaître assez simples, ne sont pas gérés facilement, cela ne va pas de soi, dans des quartiers ou la pauvreté ou les tensions sociales sont fortes. Il faut aider à la résolution, sans confisquer le conflit, pour que les personnes soient en capacité de réguler elles-mêmes le conflit, mais il faut une personne tierce qui puisse intervenir. Donc, les CDN interviennent sur les conflits, mais vont également intervenir en prévention des conflits. L’enjeu, c’est de faire du lien entre les problèmes identifiés la nuit et les services en capacité d’intervenir le jour, que ça soit les services de médiation, par exemple les éducateurs canins, mais aussi les services éducatifs et sociaux qui dépendent du Conseil Général, les services de la ville, les services de police éventuellement, dans le cadre d’un protocole de relation entre les services de médiation et de police prévoyant les modalités de collaboration sur le terrain la nuit sur les quartiers. Le service des CDN a été évalué en 2003 et étendu à deux autres quartiers de la ville.

Les éducateurs canins interviennent de jour sur les conflits liés à la détention des chiens (déjections, aboiements, chiens dangereux …) Ils sensibilisent les maîtres à la gestion de leur animal et éventuellement les encouragent à s’en débarrasser quand le chien est trop dangereux, posent trop de problèmes sur l’espace public, ou si le logement connaît une surpopulation canine.

Des habitants bénévoles, présents dans les associations locataires, interviennent également sur des conflits de voisinage, dans leur quartier (essentiellement dans un quartier de la ville non couvert par les CDN), dans un contexte qu’ils connaissent bien et qui leur permettent ainsi désamorcer des conflits qui ne sont pas forcément très graves, mais qui peuvent générer du conflit, et éventuellement du sentiment d’insécurité.

Il existe aussi à Angers des lieux où vont s’exprimer les conflits mais qui sont avant tout des lieux de lien social (par exemple le restaurant social ou les laveries collectives de quartier). Ce sont des lieux de rencontres, d’échanges, de dialogue où peuvent le cas échéant s’exprimer et se gérer des conflits, en présence de professionnels ou de bénévoles qui vont permettre de parler, de discuter autour de ce conflit et permettre aux habitants de le gérer.

Il est important que toutes ces démarches soient réellement inscrites dans le territoire, c’est-à-dire qu’elles soient en lien avec l’ensemble des services présents dans le territoire. Ce qui est important, c’est la cohérence d’intervention que vont renvoyer tous les services du quartier et les médiateurs doivent s’inscrire dans cette cohérence. C’est ça qui va réellement renvoyer un sentiment de sécurité et engendrer un réinvestissement des habitants dans des espaces qu’ils avaient plus ou moins abandonnés. Dans le cas inverse, c’est un sentiment d’abandon qui se développera, avec des services qui interviennent de manière trop cloisonnée sans aucun lien les uns avec les autres.

Dans cet objectif, les CDN interviennent dans les réunions de veilles de quartiers, qui sont des instances de diagnostic partagé où l’on organise des interventions en fonction de la complexité et de la nature du problème identifié et où vont se créer éventuellement des dynamiques collectives de résolution de conflit qui vont associer à la fois des médiateurs, mais aussi d’autres services.

Voilà rapidement comment s’organise la médiation sur les quartiers d’Angers.

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GIOVANNI GHIBAUDI 8 Je réprendrai la question posée au début: quelles sont le lignes de développement et quels sont les

points critiques dans ce travail? Je me reporte à un passage de la dernière allocution: comment capitaliser les efforts consentis jusque là. Au fond, nous avons ecouté trois tèmoignages concernant trois villes; ils nous ont fait relation d’un énorme travail, realisé durant des années. Aujourd’hui nous nous retrouvons ici non seulement pour en discuter et pour en faire une synthèse, mais aussi pour nous poser la question de comment capitaliser tous ces efforts dans une optique de développement de nouveux projets. Tout ce travail prend en considération le conflit et essaye de soutenir la demande qui se cache derrière ce conflit et qui est posé par le conflit lui-même. Comment peut-on jouer ce rôle?

J’aimerais faire un préambule strictement lié à la signification de l’utopie. Lorsque nous avons imaginé ce projet, dans ma tête de citoyen ainsi que de fonctionnaire de la Municipalité de Turin demeurait l’idée utopique de réunir toutes les experiences de mediation existantes dans cette ville très active (dont une partie de vous à pu en voir une petite partie, hier), afin qu’elle puissent travailler ensemble. La visite à quelques une de ces realités vous à permis de constater la richesse d’experience existant dans cette ville qui pourtant a du mal à la rendre visible, à cause du caractère reservé des turinois. Ici on n’aime pas les apparences, on prefère s’en tenir à l’essence des choses. Mais, pour révenir à l’idée utopique, je suis persuadé que - dans les conditions présentes - cette action de coordination locale entre les centres de mediation pourra être realisé. Elle peut être developpée dans une optique d’accès au droit et aux droits de citoyenneté, tout en demeurant persuadé que l’histoire humaine compte des nombreuses petites utopies que la fatigante gestion de la quotidienneté a rendu bien réelles.

La mediation, philosophie et instrument pour la géstion créative des conflits, nous place face à un nouveeau défi utopique: la capacité d’interagir, grâce à l’aide des professions diverses, pour offrir des solutions créatives à des problèmes complexes. Cette interaction relève uniquement de notre capacité de sortir de l’enceinte de nos savoirs professionnels pour rentrer dans un fleuve de réflections, de raisonnements et de confrontations qui nous rendra capable, petit à petit, de trouver des solutions partagées. Personne ne garde la solution dans ses propres mains. Tous ensemble, nous pourrons trouver la/les solution/s des problèmes et des états conflictuels complexes. C’est fondamental.

Pendant ces derniers mois, suite à un travail de comparaison et d’analyse des experiences de plusieurs villes européennes ainsi qu’à l’experience developpée à l’interieur du group de travail turinois, nous avons essayé de traduire en action l’intuition que nous avions eue il y a un an et demi, c’est à dire l’idée de regrouper nos efforts dans l’élaboration thèorique et pratique d’un projet spécifique, ayant de possibles rétombées operationelles au niveau local ainsi qu’européen.

Le groupe de travail turinois était composé par: i) deux répresentants de la Police Municipale, qui est en train de consolider l’expérience de la Police de Proximitè; ii) une éducatrice de la Division des Services Sociaux – Secteur Famille, qui était en train de développer un projet de soutien aux familles, avec un regard orienté sur la médiation dans le cadre familial; iii) un animateur du Secteur Banlieues, qui avait mis en place un projet participatif, fondé sur le développement de communauté ainsi que sur la médiation sociale; iv) des répresentants du Secteur des Politiques pour la Jeunesse qui (l’adjoint Dell’Utri nous l’a dit dans son allocution), depuis le début des annèes ’90, élabore des strategies d’intervention dans la ligne des Politiques de Securité Urbaine recueillies et diffusées aux niveau européen par le Forum Européen sur la Securité Urbaine (FESU), dont Turin fut la première ville italienne à faire partie et grâce à l’aide duquel le Forum Italien sur la Securité Urbaine fut crée. Le groupe de travail local a ainsi profité de la collaboration de quelques organisations turinoises particulières, actives dans le domaine social: l’association Gruppo Abele, avec la participation des médiateurs de Spazi d’Intese, l’association Progettarsi, avec la participation d’un professeur retraité, l’Agence pour le Développement de Rue Arquata, avec la participation de l’un des ses membres.

La confrontation avec les experiences européennes nous a fait comprendre que l’habilité à developper des projets systémiques est essentielle, dans une optique de prévention et de gestion des conflits parce que – les évenéments de l’année en cours nous le montre – les coûts de l’action préventive sont toujours inférieurs aux coûts du contrôle, de la répression et du dédommagement.

Mais la prevention implique l’effort de mettre sur le tapis des idées, des habilités, des intuitions, des professionalités diverses; l’effort de réserver de la place à l’écoute active aux parties en conflit; l’effort de se

8 Coordonnateur du “Centro Mediazione di Torino” et chef de file du groupe de travail “Euromédiation secucité” du programme URBACT

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confronter avec les associations ainsi qu’avec le réseau social privé, dans une perspective de développement democratique ainsi que de participation à la vie de la communauté.

La confontation et l’élaboration théorique faite par Euromédiation Securité répresentent – dans le cadre de la médiation – le dernier pas de l’histoire récente des nos villes, mais en même temps ils répresentent un premier pas vers un avenir caracterisé par des politiques précises et partagées, fondées sur la médiation et la gestion pacifique des conflits qui se développent dans le terroir des nos villes. Au niveau local, le premier but est celui de donner continuité et substance à ce que nous avons commencé à definir dans un cadre de co-élaboration des projets entre différents secteurs de l’administration publique et des organisations du secteur privé actives dans le domaine social et engagées à déffendre et pratiquer la médiation. Au niveau européen, le premier but est celui de permettre au Groupe Euromédiation Securité de poursuivre son travail d’analyse et d’approfondissement théorique actuellement en cours, si possible en unifiant les groupes de travail et les réseaux qui – au sein de URBACT – ont déjà developpé des réflections et des approfondissements dans ce même domaine, bien que avec des approches operationnelles différentes. À ce sujet, j’espère que Roberto Segre - fonctionnaire de la Commission Européenne, Direction Générale Justice, Liberté, Securité - puisse nous offrir demain des suggestions operationnelles visant à permettre une non dispersion ce qui à été réalisé jusqu’ici.

Au niveau local, on a l’impression très nette que la ville commence à profiter de la palette de solutions diversifiées proposées pour les problèmes générateurs de conflits sociaux; on perçoit une nouvelle conscience dans le fait que la réponse ne peut pas être uniquement de nature judiciaire, car elle est insuffisante; elle ne peut pas non plus se borner à la politique de “Tolerance zero” laquelle, dans l’immédiat, semble offrir des solutions aux problèmes mais – au fil du temps - se revèle inadéquate pour résoudre des situations qui, la plupart du temps, sont caracterisées par des problèmatiques complexes et multiples.

Aux anciens et aux nouveaux conflits qui caractérisent aujourd’hui la vie des nos territoires urbains, il faut répondre avec créativité et innovation. Par exemple, ces jours-ci j’ai été très touché par le temoignage du directeur du Collège Pablo Neruda de Pierrefitte-sur-Seine au sujet de la décision (prise par toutes les composantes du collège - professeurs, parents, élèves et personnel auxiliaire) d’abolir le Conseil de Discipline et de donner de la place à la mediation pour la gestion de tout action transgressive ou/et conflictuelle. L’abolition du Conseil de Discipline implique la nécessité d’introduire des réponses différentes par rapport aux sanctions, aux punitions; je suis en train d’évaluer la possibilité d’introduire des politiques semblables auprès de quelque établissement scolaires turinois. Cela répresente un passage obligé si l’on veut affronter les problèmes relatifs aux épisodes de violence dans le milieu scolaire avec un regard novateur, car cela demande aux adultes l’effort d’inventer des réponses adéquates aux questions posées par les adolescents, bien plus que par une attitude violente. La plupart des fois, il s’agit de véritables appels à l’aide qui s’expriment de façon extrême justement parce que ils n’ont pas reçu de réponses appropriées de notre part. Ces réponses ne peuvent et ne doivent jamais humilier ceux qui les reçoivent, selon ce que le philosophe juif contemporain Margalit affirme, lorsqu’il dit que “une société est décente lorsque elle n’humilie pas ses propres citoyens”. N’importe quelle institution doit s’inspirer de ce principe, qui nous impose de nous rapprocher du citoyen et de ses droits tout en respectant son accès au droit.

C’est à partir de cette conviction que je partage avec ce que Hibat vient d’affirmer, c’est à dire que le chemin de médiation est lié à l’accès au droit, lequel doit être garanti à chaque partie en conflit, même en présence de conflits dévastateurs pour les liens sociaux de leur communité d’origine.." La contribution des réseaux internationaux i Urbact aux thèmes de la sécurité et de la médiation ILDA CURTI 9

La ville de Turin fait partie du réseau Citiz@Move, ce qui nous a déjà offert des occasions

d’échanges et de discussions. Tous les participants présents aujourd’hui dans cette salle, appartiennent à une génération qui, au cours de ces dernières années, a beaucoup enrichi ses connaissances, dans le cadre des politiques d’échanges et de partenariat communautaire. La fonction fondamentale des réseaux, à l’échelon européen, consiste à augmenter la capacité d’apprendre à tous les niveaux concernés, non seulement à celui

9 Adjoint aux Politiques pour l’intégration de la Ville de Turin, modératrice de la Table Ronde.

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des citoyens, des habitants, mais aussi à celui des administrations publiques auxquelles est offerte une grande chance d’apprendre et de mettre en discussion leurs modalités de travail.- Je me pose donc une question : en quelle mesure sommes-nous capables de valoriser la dimension de l'échange ?

A Turin, lorsque nous avons fait voyager les habitants et les citoyens, nous avons remarqué qu’à leur rentrée, tous étaient pleins d’entrain et d’énergie. Nous qui nous occupons de tenir unis les acteurs, nous avons toujours su combien il est important ne pas disperser cette énergie, ne pas la frustrer c’est à dire, ne pas se réfugier dans son coin, en pensant qu’ailleurs, les autres font les choses mieux que nous, qu’ils font des choses plus intéressantes et que chez nous, tout est trop difficile, trop compliqué. Donc, cette énergie doit être conservée et je crois qu’à l’échelon local, on doit être capable d‘assurer toujours un niveau très élevé d’apprentissage et d’énergie.

Mais, lorsque nous parlons de participation, est-ce que nous parlons aussi de recherche de solution? Le temps de la participation est décliné en termes d’acquisition d’outils permettant d’exprimer le fait d’être des citoyens, de faire rencontrer des administrations publiques, des associations, des réseaux locaux. A mon avis, la participation doit être un outil – et non seulement un objectif – pour mieux concevoir la ville et pour trouver des solutions participatives: nous devons trouver des solutions qui donnent des réponses à l’insécurité de nos citoyens. La stimulation à la participation et à l’action locale comportent donc un objectif très important : trouver des solutions participatives permettant, en tous cas, d’améliorer la qualité de la vie des personnes soit que ces dernières souhaitent ou qu’elles ne souhaitent pas être des citoyens actifs. Aussi, les citoyens passifs ont le droit d’avoir une bonne qualité de vie dans les villes, indépendamment de leur volonté d’être des citoyens actifs.. Je demande à Paul de nous livrer sa contribution. PAUL BANACK BIEM 10

Mesdames et Messieurs, chers partenaires, bonsoir. Je vais à mon tour tenter de montrer brièvement

le lien entre le travail accompli par le groupe Euromédiation-Torino et celui de SUDC de Liège dont je suis le coordinateur. SUDC (« sécurité urbaine et diversité culturelle »),est le projet URBACT sur lequel la Ville de Liège travaille en collaboration avec les villes partenaires de Lyon, Roubaix, Gênes,Luton(experte invitée),le Forum Européen pour la sécurité urbaine, ainsi que les réseaux thématiques de Rotterdam, Malmö et de Lille (communauté urbaine).

Description du projet: Le groupe de travail « Droit à la sécurité pour tous et diversité culturelle : quels défis pour les politiques urbaines » S.U.D.C., étudie principalement le phénomène de la stigmatisation de certaines catégories de population des zones urbaines par rapport à l’insécurité ainsi que les réponses apportées en termes d’adaptation des politiques locales à cette diversité culturelle.

Il vise, à partir d’un bilan actualisé des pratiques des villes membres des réseaux et de groupes de travail thématiques d’Urbact en termes d’adaptation des politiques locales à la diversité culturelle, à formuler des recommandations à trois destinations : les villes bénéficiaires des programmes URBAN1, URBAN 2 et P.P.U, les 300 collectivités territoriales membres du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine et l’Union européenne.

Méthodologie: Les membres du groupe ont décidé de travailler sur quatre axes et pour des raisons tout à fait spéciales :

1. facilitation de l’accès au Droit et à la Justice pour des catégories de population identifiées en raison de leur différence culturelle: les mouvements migratoires provoquent au sein de nos sociétés européennes des questions juridiques multiples, un accroissement des difficultés administratives et juridictionnelles, la mise au point de dispositifs normatifs complexes et posent la question de la lisibilité pour les migrants et les autres citoyens "autochtones”.

2. régulation des conflits par la médiation interculturelle: la montée croissante du racisme et de la xénophobie, l’hétérogénéité croissante des populations urbaines ont pour conséquence la multiplication de conflits de tous les jours qui doivent être régulés.

3. prévention de la criminalité et de l’insécurité urbaine dans le contexte d’une société multiculturelle: Aujourd’hui tout le monde veut participer à la ville au niveau social, culturel, politique, économique. Les événements des banlieues Françaises en 2005 ne visaient pas la destruction de la structure de la société Française; Il s’agissait d’une manifestation (violente) de la volonté des jeunes à participer dans la vie de leur société. L’inclusion est donc importante pour assurer la sécurité.

10 Chef de Projet Contrat de Sécurité et de prévention-Ville de Liège – Chef de file groupe de travail SUDC

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4. adaptation des services publics en charge de la prévention des insécurités urbaines: Il y a pas mal de demandes et d’exigences sociales de la part des citoyens. On se rend compte que les structures publiques ne répondent pas aussi rapidement à ces demandes-là. Il y a un besoin pressant pour qu’il y ait une adéquation entre les structures publiques et les demandes des sociétés.

Comme vous pouvez le remarquer, le lien entre nos travaux réside dans la recherche de la sécurité, du mieux vivre ensemble et la cohésion sociale dans nos grandes villes. Un des moyens/instruments de recherche de la sécurité proposé par nos deux groupes c’est la MEDIATION. Le rapport final d’Euromédiation-Torino vous présentera en détail ce que c’est que le champ de la médiation, qui fait quoi, quand et comment. Pour le groupe SUDC-Liège, la médiation a quatre fonctions principales. D’abord créer le lien social, réparer les liens sociaux, prévenir les insécurités.

Le groupe SUDC a fait des recommandations sur chacun des quatre axes dont je viens de vous entretenir. Une liste de bonnes pratiques que nous considérons transférables/réplicables et un lexique commun complète le travail du groupe. Je vous engage à consulter le site www.urbact.org/SUDC où notre rapport final de synthèse sera publié vers la fin de cette année. Je suis à votre disposition pour répondre à quelques questions si vous le souhaitez. Je vous remercie. ILDA CURTI 11

A mon avis, les thèmes que cette présentation a soulevé sont les thèmes auxquels sont confrontées

toutes les grandes villes. . Aussi Turin, s’interroge et cherche des solutions. Je voudrais d’abord lancer un thème: l'insertion sociale est adaptée. Non seulement elle est juste, non seulement elle implique une adhésion éthique, non seulement les sociétés où elle se produit sont plus justes, mais elle est adaptée dans tous les cas. Nous disons souvent, dans nos banlieues, sur nos territoires, qu’investir dans l’insertion sociale et dans les processus de citoyenneté convient aussi à ceux qui craignent la diversité culturelle, c’est à dire qu’elle s’avère avantageuse non seulement pour celui à qui doit être donnée une chance d’insertion, mais aussi pour ceux qui, étant déjà intégrés, craignent ceux qui sont dehors. Ce thème est, à mon avis, un thème qui peut être expliqué et compris aussi par celui qui n’en comprend pas nécessairement les contours éthiques et de justice, en général. MATHIEU VERHAGEN 12

Je vais tenter de vous faire un lien entre l’apport d’un réseau URBACT, qui est «Citiz@move», la

médiation et la sécurité urbaine. Donc, le réseau «Citiz@move» représente vingt villes en Europe et se décline selon trois

thématiques : les minorités ethniques, la participation citoyenne et la gouvernance locale et le lien entre administration et informatique. Le sous-groupe dans lequel j’ai collaboré, s’intéresse plus particulièrement à la participation citoyenne et à la bonne gouvernance locale.

La participation citoyenne, d’abord la méthode employée la façon est un petit peu la même que dans tous les autres réseaux URBACT : un échange de bonnes pratiques, des visites de terrain et un travail qui se mettait en place entre les différents colloques pour appréhender la thématique de notre sous groupe avec des habitants, des associations locales et des structures publiques. Et donc ce travail, et au niveau de la méthode ça c’est peut-être quelque chose qui est intéressant, ce qu’on a essayé de mettre en place c’est ce que l’on a appelé une « cellule de production », et dans la cellule de production on retrouvait aussi bien des personnes issues de l’associatif, donc de la société civile, que des personnes issues du pouvoir public, que des habitants en eux-mêmes. Ce qui a été privilégié aussi dans ce réseau c’était de pouvoir faire voyager les habitants, donc moi, par exemple, dans le réseau « Citiz@move», en tant que représentant ville de Bruxelles, je n’ai pas voyagé, on travaillait vraiment au niveau des cellules de production. Alors, les grandes thématiques qui sont sorties, bon maintenant je ne peux pas évidemment commencer avec les conclusions, puisque la semaine prochaine il va y avoir à Séville les grandes conclusions de tout le réseau « Citiz@move », ce que je vais essayer de faire ici, c’est de dégager quelques axes qui permettent finalement de faire le lien

11 Adjoint aux Politiques pour l’intégration de la Ville de Turin, modératrice de la Table Ronde. 12 Médiateur Association Bravvo, Bruxelles – représentant du réseau Urbact Citiz@move

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avec la médiation, de faire le lien avec le travail qui a été fait dans Euromediation et d’essayer de vous apporter quelque chose par rapport à ça.

Les deux grandes questions qui ont émergé au niveau de la participation : participer avec qui et participer sur quoi. Donc, participer avec qui, quand on met en place des modules de participation comme, par exemple, dans un contrat de quartier ou dans des projets comme on a vu ici à Turin aussi, c’était évidemment dans l’idée de faire participer le plus grand nombre, de faire participer les habitants pour qu’ils deviennent acteurs de leur ville et qu’ils puissent eux aussi avoir leur mot à dire sur l’ aménagement du territoire, l’accès à la culture… Donc, quand on se pose la question, quand on dit participer, qui doit participer, évidemment on arrive directement à une confrontation qui ne devrait pas être une confrontation, mais entre, ce qu’on pourrait appeler la démocratie représentative et la démocratie participative, puisque la démocratie représentative, c’est ce qu’on connaît tous, ce sont nos hommes et femmes politiques qui ont été élus et qui sont donc en place pour mettre des politiques qui permettent de gérer la gestion du bien commun, dans la notion donc de politique de la gestion du bien commun. Par contre, les habitants ne sont pas des personnes élues, ce sont des personnes qui viennent soit de comités de quartier soit qui se rendent compte d’un moment à autre d’un problème et qui veulent, quand même, participer. Donc, la question du « qui faire participer » se transforme très vite en une question du type « participer sur quels enjeux ». Est-ce qu’on veut faire participer les gens, par exemple, sur l’aménagement d’une rue, on va commencer par exemple à mettre en place des groupes de parole. Est-ce qu’on veut faire participer les gens sur un budget communal ? Est-ce qu’on veut faire participer les gens sur le mieux vivre ensemble ? Je pense, enfin, une des notions qui est assez vite sortie de là aussi, c’était de ce dire, si on veut faire participer les gens, ce qui est important, c’est un petit peu ce que moi j’appellerais la notion du secret professionnel inversé, c’est-à-dire qu’au niveau de la médiation, quand on travaille sur l’axe individuel on travaille évidemment dans le secret professionnel, c'est-à-dire qu’on va jamais divulguer ce qui ce sera dit, qu’on travaille vraiment en adéquation avec notre code de déontologie.

Par contre, quand on travaille sur la participation citoyenne, l’idée c’est d’ imaginer un carré formé à chaque coin par les habitants, l’administration, le politique et l’associatif de mettre l’information réellement au milieu, c’est-à-dire que chaque personne connaît l’information et sait exactement sur quoi elle veut participer. En effet, souvent ce qui arrive, on a vu ça dans les contrats de quartier, on a vu ça dans d’autres programmes, il y a soit l’administration, soit le politique, soit d’autres intervenants qui connaissent plus les enjeux. Au bout du compte, les personnes qu’on veut amener à participer d’une manière ou d’une autre sont biaisé dans le processus parce qu’elles ont l’impression qu’elle vont pouvoir participer et puis ça va se détricoter au fur et à mesure et donc là, à ce niveau-là, il faut vraiment trouver une méthode efficace pour permettre aux citoyens de continuer à participer à la vie de la Cité sans se décourager.

Alors, vous allez me dire, mais pourquoi faire participer les gens aussi, quel serait le but et où se situe la médiation, où se situe la sécurité urbaine par rapport à ça ? Tout d’abord, l’implication des acteurs dans la ville, représente un certain décloisonnement aussi et une certaine vision des élus, une certaine vision de l’administration, qui n’est plus une vision purement technocratique, mais qui est réellement une vision de partenariat et d’échange, et le rôle de la médiation à ce niveau-là ce serait justement un rôle de vulgarisation, d’éducation à la citoyenneté, d’émancipation et de faire réellement comprendre aux gens qu’ils sont moteur de leur vie, de leur communauté, de leur ville et ainsi de suite. En impliquant systématiquement les habitants dans une certaine cogestion de leur Cité, on leur permettra de retrouver un certain sens à leur vie et on tiendra réellement compte des capacités et des apports de chacun pour la communauté. Je pense que Giovanni l’a dit aussi tantôt, on a parfois de temps en temps l’impression qu’on a à faire avec des gens qui sont dans une situation qu’ils ne comprennent plus réellement, si on parvient réellement à leur donner les outils et qu’ils savent exactement dans quels enjeux on se trouve et qu’on leur donne ce pouvoir-là, à ce moment-là on commence à travailler l’autonomisation. Je pense que la sécurité urbaine, à ce moment-là aussi, dans une optique de politique intégrée se passe mieux pour tout le monde, les gens ne se sentent plus perdus et tout à fait isolés les uns des autres. BENOIT STIEVENART 13

13 Fonctionnaire de la Ville d'Anderlecht, chef de file du réseau Urbact “Urbanitas”.

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Bonsoir, je vais vous présenter le réseau Urbanitas. Notre Réseau Urbanitas a une spécificité unique dans le programme urbact. En effet, il est constitué de onze partenaires répartis sur onze pays différents. Sur ces onze pays différents, nous comptons trois nouveaux membres de l’Union Européenne, Kosice en Slovaquie, Cracovie en Pologne, le 18ème district de Budapest en Hongrie et deux pays candidats représentés par la ville de Sliven en Bulgarie et Brasov en Roumanie. Enfin, le reste du réseau est composé de la ville d’Albacete en Espagne, de Cosenza en Italie, de Kirklees au Royaume-uni, du district de Berlin Mitte en Allemagne, de la ville de Grenoble en France et enfin du porteur du projet, la commune d’Anderlecht en Belgique

Il faut bien comprendre que le réseau Urbanitas a vraiment des situations extrêmement différentes entre les partenaires, qui sont des villes de la vieille Europe et des villes de la nouvelle Europe.

Le réseau Urbanitas a comme thème central les ruptures urbaines, répartie sur six axes de travail. Les deux premiers axes sont les ruptures physiques, une dite rupture physique continue, ce sont par

exemple des routes ou des canaux qui traversent nos villes et qui créent une rupture réelle dans des quartiers ; l’autre dite rupture physique discontinue, c'est-à-dire les no man’s lands, les quartiers de bureau ou des quartiers d’affaires, qui une fois que le travail est terminé, deviennent des zones désertes et par conséquent souvent problématiques.

Le troisième axe, ce sont les ruptures sociales c’est-à-dire les ruptures comportementales, identitaires, économiques, qui provoquent l’exclusion sociale.

Le quatrième axe, ce sont les ruptures liées au droit au logement et à l’habitat, nous avons plus spécifiquement étudié les moyens de lutter contre la spéculation immobilière.

Le cinquiéme axe sur les remèdes et solutions à apporter sur la problématique des ruptures urbaines. Synthèse et réflexion sur les précédents séminaires.

Le sixième axe qui est sur les principes de diffusion auprès de la population, participation, éducation et lutte contre l’incivisme. Ce travail étant malheureusement le sujet du prochain séminaire qui aura lieu à Kirklees en fin novembre.

Notre réseau « Urbanitas » se pose d’abord au niveau des causes des ruptures urbaines et ensuite de leurs conséquences. Les conséquences et leurs solutions, nous les étudions, nous les répertorions afin d’en faire des échanges de bonnes pratiques, mais nous essayons également de trouver les causes profondes pour pouvoir y remédier.

Le lien avec la participation, est primordial dans l’ étude des rupture urbaine. Il est évident que notre réseau ne pourra jamais égaler tout le travail que vous avez fourni sur ce sujet lors de vos séminaires ou groupes de travail. Notre but est d’aller au-delà de votre problématique et d’étudier comment nous pouvons lier le processus participatif à l’éducation parce que nous partons du principe qu’il est très important aussi d’éduquer à la ville, car nombre de problèmes naissent du fait que le citoyen ne respecte pas l’environnement dans lequel il vit.

Nous allons étudier comment, au niveau de la participation, on pourrait impliquer les travailleurs sociaux, avec les écoles pour mener une réflexion en amont, avant les problèmes.

D’autre part, nous nous sommes retrouvé fréquemment confrontés à travers le réseau à une autre problématique : celle d’une ville perpétuellement en mouvement, en évolution. Elle l’est au niveau historique, mais elle l’est aussi au niveau du temps sur une journée de 24 heures. Il peut y avoir des quartiers ou des rues, qui ne sont pas problématiques en journée et qui le deviennent le soir et inversément. Nous allons également faire le lien entre les différents moyens de lutte contre les ruptures urbaines que nous avons étudiées afin de trouver des solutions qui rendent ces lieux fréquentables sur une journée de 24 heures.

La Commune d’Anderlecht a crée en 2002, le service Information-Participation. Ce service a pour vocation de travailler pour l’ensemble des membres du Collège et des services communaux.

Il est chargé de gérer l’ensemble des missions d’information et de participation développées au sein de la commune et articule ses missions autour des axes suivants : information et communication et participation. En ce qui concerne l’axe Information et communication, les missions avaient été définies comme suit: la rédaction du journal d’information, la communication avec la presse, la gestion du site Internet, la rédaction et mise en page des publications communales (toutes-boîtes, brochures, guides et répertoires), l’accueil, information et orientation des habitants développement de la communication interne (journal interne ou réseau Intranet)

En ce qui concerne l’axe Participation : mise en place de projets à portée réellement participative.

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Je voudrais également revenir sur l’exemple de mon collègue de Bruxelles ville. A Anderlecht puisque c’est la Commune que je représente, la cellule participation a beaucoup réfléchi sur cette problématique et comme à la ville de Bruxelles, nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il faut créer un lieu concret de rencontre.

La commune a décidé de créer la maison de la participation qui sera un lieu de rencontre dynamique et créatif afin offrir aux habitants des bureaux équipés et des salles dans lesquels peuvent être organisés : des réunions, des conférences, des ateliers, des expositions, …, toujours en lien avec la participation. Bien entendu, les services communaux peuvent également disposer de ces facilités pour toute initiative en lien avec la participation citoyenne. Ce sera également un centre d’information (lien direct avec la démarcherie) et de documentation (p. ex. historique des contrats de quartier, différentes cartes géographiques, …)

C’est une étape importante dans le processus participatif car en général, la problématique de la participation est que la communication est toujours une communication du haut vers le bas, c’est-à-dire du décideur politique vers le citoyen. Ici, avec un lieu concret, il y a un endroit où le citoyen peut faire une communication du bas vers le haut.

C’est un peu la chose à laquelle on est aussi confrontés dans le réseau puisqu’on a deux visions, qui ne sont pas diamétralement opposées mais plutôt complémentaires, tout en restant assez difficiles à gérer. Il existe une vision anglo-saxonne qui répond aux problèmes du bas vers le haut et la vision, plus latine, qui part du haut vers le bas. Notre idée c’est de trouver le juste milieu pour pouvoir justement appliquer cette méthode d’approche intégrée.

La Commune d’anderlecht à travers la cellule participation implique les habitants et usagers de la commune aux projets communaux. Les objectifs sont informer (objectif minimum),demander leur avis, délibérer avant de décider, développer ensemble un projet (objectif maximum). Les acteurs concernés sont en interne: l’échevin compétent, le chef de service et en externe, les autres autorités (p.ex. la Région), les groupes d’intérêts, les habitants, …

Comme exemple: le Plan Communal de la Mobilité, l’ménagement d’un espace public, les projets européens et internationaux (comme projet E-participation), …

Le second objectif est de soutenir les initiatives d’habitants et usagers de la Commune pour l’amélioration de la qualité de la vie

La participation organise des réunions de tous les partenaires intéressés autour d’un projet commun et accompagne les groupes de travail dans le cadre de projets spécifiques Exemple: Colonnes de participation, Commune à livres ouverts, …

Les autres missions de la cellule Participation sont: • aider à comprendre le fonctionnement de l’administration, • communiquer et expliciter les décisions du conseil communal, • centraliser l’ensemble de l’information disponible, la diffuser et la rendre accessible à tous (p.ex.

dans la MdP : infos sur tous les comités de quartier + leurs projets, infos sur contrat de quartier en cours + historique de tous les contrats de quartier, …)

• conseiller : informer à propos de différents canaux de subvention, comment rentrer un appel à projet, …

• fournir un soutien logistique: mise à disposition de salles de réunion, photocopieuses, accès internet,

• donner un soutien financier: enveloppes de quartier,etc • former: inviter des interlocuteurs disposant d’une expertise dans différents domaines (p.ex.

exposé Pierre Blaise sur élections communales) • créer un réseau: établir des liens avec d’autres démarches de participation Je terminerai par un petit exemple mais qui je crois est important aussi au niveau de la

communication de la Commune ou municipalité vers le citoyen. Il existe un service qui s’appelle la démarcherie, ce service a pour but d’aiguiller le public recherchant une information concernant directement ou indirectement la Commune ; d’assurer un accueil efficace destiné à une population fragilisée mais également fournir une information globale pour l’ensemble des habitants anderlechtois .

Lors d’événements extérieurs type marché de Noël, marché Annuel, Journée de l’Emploi, Journée des Familles…, la Démarcherie tient un stand d’information communal. Le personnel communal peut retirer toutes les informations concernant les autres services (Ecoles de devoir, logements, stages,… ). Ce service

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réalise et met à jour des outils d’information. Enfin, la démarcherie met à disposition des brochures communales, régionales et fédérales.

La démarcherie est un endroit où chaque citoyen peut se rendre quelle que soit sa question, il sera orienté. C’est un relais entre les citoyens et l’administration. SVEN ENGEL 14

I will try to lay out a few ideas of what is a European forum for urban safety and why we do what we

do, and then hopefully we can discuss the development of a European mediation practice and policy. The European forum for urban safety is a cities’ network in the true sense of the term. It was started

about 20 years ago by European mayors working on urban safety on a local level. Things have to be addressed on the local level, if we like it or not. A very good example about this it’s actually terrorism and other transnational security problems which might have reasons in very distant societies, but the repercussion actually concern citizens on the local level. This is why we have to find ways to cooperate internationally on local problems. From our point of view this is not really a contradiction, the local and European levels are intrinsically linked.

Today, safety concerns are very high on the political agenda, sometimes even more important to people than questions of unemployment, social security, housing, etc. Mayors play a crucial role in this, because the mayors and all elected officials are, in a way, the first citizens of their communities. This is a true part of representative democracy, because citizens have charged them in election to take care of their problems. Therefore, elected officials have to react to this kind of demands and they not only have to invent things, they also have to work with people to invent things. This might be difficult on a local level, but there can be very interesting experiences learned from each other. Therefore, the whole Forum is based on the fundamental idea that cities help cities in finding local responses to local, national and global problems. What the Forum tries to do is not just an exchange of experiences and a collection of best practices like this is often done in a very technical sense, but it engages in a discussion on policies, in debate and opposing arguments so that a European effort is built.

I think it’s very important to cooperate across countries and different opinions, to propose something that we would want to realise, a better way of living together and a better way of organising our lives on all levels. Let me give you a little example of a project that we have been running on immigration and integration matters. Talking about immigration and prevention policies in a seminar in Lithuania, partners from Western Europe talked about immigrants coming to our cities and how can we integrate them, how do we fight discrimination, how to make sure that successful integration is not put into question by racism or by social exclusion, xenophobia etc. In short, we have to find ways on how to accommodate and how to integrate people that arrive in Europe today. After a little while, our partners from Lithuania said: we have a very different problem. 10% of our population has actually left the country in ten years, they’re now in London, in Paris, on construction sites in Portugal, and while this might be very interesting to you, but what can we actually do to replace this labour shortage and how can we find new people who will help us sustain our health networks and our educational networks. This provoked an interesting discussion about what Western European countries did in the 1960s when they went to their former colonies, the Balkans or to Turkey and started to bring people into European labour markets and cities. Then of course people settled down, they started jobs, they sent their kids to schools so they stayed on. And today, this is the key point, we can already imagine that in ten years the situation of Western Europe will be what is the situation of Eastern Europe today. Cities in England, France or Italy can learn from what’s going on in Lithuania now to prepare better for what will be the situation here maybe in 2015.

I hope this example illustrates a bit the importance of working together, bringing in local experiences, without limiting ourselves. Of course we know our neighbourhoods, our schools, our jobs, our colleagues, we have learned a profession, we know how to interact according to certain rules, cultural norms etc. But we really need to reach further and understand that Europe actually becomes a smaller and smaller place over time. I hope we can all mobilise from our own resources and from our own knowledge and skills the necessary forms of cooperation and, in this sense, I think the Euromediation project has been a very great success. Hopefully we can take the remaining time to discuss how these efforts can actually continue. Thank you very much.

14 Expert du Forum Européen pour la Sécurité Urbaine (FESU)

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ILDA CURTI 15

Je crois que la question provoquante posée par Monsieur Drubigny "Si cela est utile et important,

pourquoi vous ne prenez pas vous-même en charge ces frais?", ne peut pas être traduite autrement. Je crois que la politique a l’obligation de rendre ordinaires les politiques ainsi que les expériences, les tentatives, le laboratoire d’idées qui – quelque part – sont en train de se réaliser en Europe depuis ces dernières années. Soit nous serons capables de les faire évoluer et de les transformer en politiques les plus répandues (en exploitant les instruments et les ressources disponibles dans les adiministrations locales), soit on risque de disperser les énormes patrimoine et richesse de ce commerce et marché d’idées auquel vous faisiez référence; et je crois que, finalement, le problème autour duquel nous sommes tous en train de réfléchir et pour lequel on cherche des solutions soit le fait que l’Europe est un continent de plus en plus petit, pour lequel les processus de globalisation rend évident un tas de contradictions; mais la valeur la plus importante de l’Europe est le bien-être, le système de protection sociale et de respect de droits et des diversitès que l’Europe a été capable de construire pendant ce dernier siècle, malgré beaucoup de contradicteurs. Ce modèle de bien-être est aujourd’hui en crise. Il ne répond plus aux demandes et aux besoins exprimés par nos societés. Le risque est alors celui de perdre un finalité ainsi qu’une identité éuropéenne qui a été conquise et dessinée par des processus d’émancipation, d’universalisation et de reconnaissance des droits. C’est ça, l'Europe. On risque de perdre ce modèle de bien-être à cause de problèmes économiques; on risque de perdre les aspects les plus importants de ce modèle pour la construction d’une identité collective.

Alors, je crois que ce défi nous appartient à nous tous, à differents titres, pour les vingt prochaines années, car on risque vraiment de continuer avec les mêmes languages et les mêmes modalités jusqu’au moment – d’ici cinq ou dix ans - où nous réaliserons que le darwinisme social l’aura importé, qu’il n’y aura plus de ressources, que les plus forts surviveront et les plus faibles succomberont comme dans le milieu naturel le plus impitoyable. Alors, soit nous sommes capables – à partir de ces expériences, de ces échanges et ce commerce d’idées - de changer nos codes mentaux, notre habilité politique à lire ce qui se passe dans nos villes, dans nos banlieues, ce qui se passe au moment où nos concitoyens nous demandent d’intervenir; soit nous sommes capables de changer même les alphabets, l’alphabet de la politique, pour réinterpreter les besoins des nos villes, soit on risque de mettre en place des superbes expériences à l’intérieur de quelques laboratoires particulièrement inspirés, pendant que le monde s’en ira voguer ailleurs. Un problème crucial consiste en celui des indicateurs, des critères, des conditions requises, ainsi que la difficulté de définir les profils professionnels utiles pour affronter ce défi. Tout en poursuivant la métaphore darwinienne: nous sommes comme des tribus dispersées dans la savane, qui se retrouvent, qui ont besoin du feu et qui essayent de l’allumer par des stratégies diverses. Quelqu’un frotte des pierres, quelqu’un d’autre essaye de générer des étincelles et d’allumer le feu de façon differente. Parfois les étincelles jaillissent et allument le feu, parfois non, parfois le terrain est trop humide et rien ne se passe. Je comprends: il est très difficile de trouver des indicateurs, de comprendre s’il y a des modalités efficaces pour réaliser cet objectif ou pas. Je sais bien que la politique demande des indicateurs et des chiffres, car la politique nécessite des résultats et un temps d’intervention très court, des lectures immédiates, très rapides. Je crois pourtant qu’il faut être conscient et dire ouvertement qu’il n’y a pas de réponse rapide. Les résultats quantitatifs sont toujours un peu faux, soyons sincères, car on ne peut pas mesurer le bien-être d’une communauté, mis à part sur des temps très longs et avec une forte capacité d’être au milieu des choses, d’être à l’intérieur des choses. Notre approche ne peut pas être celle du "customer satisfaction" (satisfaction du client). On a pas des consommateurs à satisfaire, on a des citoyens à accompagner. Et cela, aussi dans le but de réagir à ce que madame évoquait: la solitude avec laquelle des nombreuses personnes cohabitent dans nos quartiers et nos territoires au beau milieu des différences, tout en étant dépourvus des instruments nécessaires pour le faire, sans savoir pourquoi il sont en train de le faire. Alors, je suis persuadée qu’il faut arrêter de parler de modèles. Il n’y a pas de modèle: il y a des tentatives, des expériences, il y a des bonnes pratiques, mais il y a aussi des mauvaises pratiques.

Il n’y a pas que les bonnes pratiques, il y en a aussi des mauvaises, dont ne on parle pas très souvent, car on n’aime pas en parler. Il n’y a pas de modèle d’intégration, mais sans doute il nous faut une politique et une gouvernance capables de renforcer les relations entre personnes, justement parce que le thème des identités et des différences culturelles risque d’être une large couverture qui recouvre toutes les

15 Adjoint préposé aux Politiques pour l’Intégrtion et modératrice de la table ronde.

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contradictions et tous les conflits. La différence culturelle est le drap qu’on agite lorsque les contradictions présentes sur nos territoires nous renseignent un malaise, de l’exclusion sociale, de la precarité, du chômage, la mauvaise qualité des habitations et encore et encore.... Tout cela devient un accrochage entre différences, comme si la diversité culturelle, en fait, était le seul élément qui empèche les personnes de cohabiter. Souvent, la cohabitation est difficile pour d’autres raisons. Je ne veux pas déplacer le problème, mais je suis persuadée que - lorsqu’on se connait par son nom - il devient beaucoup plus difficile de se percevoir différents. Lorsque des relations entre personnes existent, lorsqu’on se connait, lorsque l’autre n’est pas simplement “un tel qui vient du Maroc”, mais il est Mohammed, alors on donne à son identité une valeur différente de celle d’être simplement un tel que l’on ne connait pas. Donc, c’est à nous de soutenir et d’accompagner les modélisations, la recherche de relations entre personnes et territoires, même en cherchant à modifier les mots avec lesquels on s’exprime, les mots de la politique, les mots par lesquels on décrit les difficultés. Presque chaque jour je vois des journalistes qui me demandent si Turin est comparable aux banlieues françaises. Les banlieues françaises sont devenues pour nous comme des spectres qu’on agite à chaque fois qu’il se passe des choses. Il y a donc cette stigmatisation “des banlieues françaises”; et nous, qui avons visité les banlieues françaises, on sait bien qu’il n’y a pas de modèle de “banlieues françaises » terrorisant car les situations sont toujours plus floues et complexes que ce que l’on en dépeint. En fait, dans nos banlieues ainsi que dans celles de toute l’Europe, il y a beaucoup plus de cohabitation et de capacité de cohabiter que ce qu’il y paraît. Il y a beaucoup plus de relations entres personnes que ce que l’on raconte.

Mais alors c’est la politique qui doit changer ses codes ainsi que la façon dont on raconte les choses. C’est aussi les medias, la représentation faite par les medias qui doit commencer à changer le lexique par lequel on décrit ces réalités.

Pour conclure et laisser place à la reflection, je rappellerai une phrase d’Edgar Morin qui remonte au début des années ’90; il disait "Europe, qu’est-ce que tu peux nous dire, à nous enfants perdus de la Terre?" Je crois qu’on peux dire que l’Europe est en train de nous aider à prendre nos pierres à feu et à allumer des lumières sur le fait que chacun d’entre nous, dans son petit coin, essaye d’affronter la complexité; mais en absence d’un soutien fort en terme d’élaboration d’idées, de capacité de voir et de mettre en relation des choses qu’on realise, toutes les expériences risquent d’être isolées. Nous ne sommes pas des chimistes, des scientifiques qui disposent d’une «Nature», c’est à dire d’une revue specialisée sur laquelle on peux publier des manips en disant qu’elle peuvent être répetées par d’autres. Nous n’avons pas des instruments de validation tels que ceux des sciences exactes. Nous tous faisons des tentatives et notre seul instrument de validation est le commerce d’idées auquel M. Drubigny faisait référence. Voici ce que l’on peut faire, justement parce que nous n’avons pas la possibilité d’écrire des chiffres, mais plutôt des processus et – lorsqu’on parvient à le faire - on risque aussi de tricher un petit peu. MARCO BORGIONE 16

Ce n’est pas seulement une bienvenue formelle que je souhaite vous adresser car d’autres collègues

du Conseil ont participé et participeront aussi aujourd’hui aux travaux de votre séminaire. Ce n’est pas seulement une bienvenue formelle, parce que ce que j’ai lu dans la documentation renforce ma conviction dans les choix que – comme Département- nous sommes en train de faire, en matière de politiques en faveur des personnes. Mon Département s’occupe de services sociaux, mais à partir d’une réflexion que nous avons faite avec les opérateurs, nous nous sommes rendus compte que nous ne devons pas nous arrêter au point où nous en sommes. Quant à moi, une phrase qui figure dans votre matériel et qui se réfère à Bauman, m’a particulièrement frappé : l’exhortation aux administrations à adapter leurs politiques à l’évolution très dynamique des réalités sociales. Ici s’inscrit aussi la médiation, qui est le thème que vous avez abordé, car elle représente l’élément collant et, en quelque sorte, la mise en scène de tous les systèmes du territoire.

En tant que Ville de Turin nous avons lancé un programme, après un an environ de travail, parce que l’administration a été renouvelée au mois de juin de cette année, Nous nous sommes donnés comme objectif pour les cinq prochaines années de réaliser un outil régulateur des politiques sociales conçues comme politiques de service aux personnes. La notion de santé que nous aimerions reproposer n’est pas tellement l’absence de pathologie qui est un problème du ressort du secteur sanitaire et non administratif, mais nous voudrions plutôt relancer la notion de santé comme perception d’une sensation de bien-être à l’intérieur de notre structure sociale, de notre ville. Plus le système administratif d’une ville est efficient – y

16 Adjoint préposé à la Famille, à la Santé et aux Politiques Sociales de la Ville de Turin.

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compris le système de la médiation sociale- plus grande est la sensation de bien-être que ressent un citoyen de n’importe quelle ville du monde. A partir de cette réflexion de base, nous avons décidé d’adopter un outil qui est celui du plan social qui devra jouer exactement le rôle que vous indiquez comme résultat de votre réflexion, du parcours de votre séminaire, c'est à dire réunir tous les sujets des services publics institutionnels, du bénévolat, du secteur associatif, de la coopération qui opèrent sur le territoire, afin de mettre en place un projet de ville partagé, largement participatif, dans le cadre duquel seront identifiés des objectifs vers lesquels s’orienter.

J’estime que cette clarté de fond, surtout en ce qui concerne les objectifs- facilite en grande mesure le travail des médiateurs sociaux, parce que l’identification des besoins, l’enregistrement des exigences d’un territoire, permettent aussi d’orienter les travaux sociaux, de complémentarité sociale. De nos jours, la ville se transforme, se développe, s’organise sur des parcours qui sont essentiellement de caractère urbain. Demain, nous aimerions que notre ville réserve une plus grande attention aux personnes, Cette attention ne peut, en aucun cas, faire l’abstraction d’un travail important comme l’est celui de la médiation que nous faisons vivre à Turin, non seulement entre générations différentes, mais aussi entre des réalités sociales et ethniques différentes.

C’est, en quelque sorte le défi que nous nous préparons à relever au cours des prochaines années. Je vous souhaite un bon travail et une bonne conclusion pour votre séminaire, mais je souhaite surtout vous avoir comme compagnons de voyage, dans cette aventure. ADELE BUCCELLA 17

Today I’ve been asked to give a short overview, of some of the urban security mediation issues that are covered in the URBACT projects. I’ve also been asked to consider how we can look to the future and how this project and this theme, can be taken forward in a new URBACT project or in other ways.

A total of 34 projects have been financed by URBACT, the majority of which are exchanges in the form that you have here with on average 10 or 12 partners. Of the projects that we’ve supported, there are approximately 8 that cover this theme directly or indirectly. The three projects that directly relate are: the project called “SecurCity”, which is led by the city of Rotterdam, questions of improving the effectiveness of policies to combat insecurity, the SUDC project which looks specifically at questions of safety and cultural diversity, and then this Euromediation project. In addition we have a number of projects, that deal with the theme of urban security indirectly. There are projects looking at social inclusion and citizens’ participation, which are linked to the questions of mediation.

We have a project led by the city of Venice, which has considered questions of security as an obstacle to economic development, questions addressing domestic violence using technology for the information society network led by the city of Manchester, Anderlecht Urbanitas project looking at quality of life, security issues in public spaces, then the project led by Great Lyon, which is a very broad theme of general urban regeneration and they had one seminar focusing on security issues and looking at the integrated approach of security and urban regeneration.

Taking “SecurCity”, first of all, which is the project led by Rotterdam, they dealt with the theme of urban security very broadly, covering five working groups which basically covered every aspect, from youth education issues, commercial and economic development questions, drugs, insecurity, anti-social behaviours, citizens’ participation, fear of crime and the general environment. The SUDC project is very focused on questions of cultural diversity, focusing on target groups, looking at definitions of what are considered to be minorities, but not in a very restrictive way, in a very inclusive way, looking not only at ethnic groups, but also questions of gender, age, social and economic groups. The focus and the cases that have been produced through this project are quite interesting, because they are very territorial-based and they show how the approach to questions of security and even mediation have to be adapted to the different circumstances and to the different target groups.

I think what’s important is to demonstrate that the three projects that are looking at this theme are very different. All three have a very different approach, have different methods of looking at the subject and a different way of addressing the subject.

The Prague seminar on Urban Security brought together representatives from all of these projects, the aim of that seminar was, at URBACT programme level, to take the discussion to a higher level.

17 Chargée de Mission Projet - URBACT Secretariat

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The first element of the meeting in Prague was to try to find some sort of a definition, to find a common definition was extremely difficult. The second workshop specifically looked at the stakeholders involved. Questions of partnership seem to be extremely important, the use of bringing a multi-agency approach to questions of insecurity. But the status and the make-up of those partnerships varied in the different groups. The penultimate workshop covered questions of mainstreaming security into urban regeneration. It wasn’t easy to define the universal factors of success, because every project felt that they had an idea of what the factors of success were. But there were some common points: questions of empowerment, questions of involving social and economic communities in the decision-making. Partnership questions, the active role of local authorities came across as being extremely important and the role of elected representatives, in pushing forward policy questions. Communication with the local population, citizens’ participation. A long-term approach is needed, not simply a reactive approach, but more proactive, like mediation is more a proactive approach to prevention rather than reaction.

For the future, the issue of target groups, young people, women, ethnic minorities is important and could form the basis of a new project. So, I think it would be very interesting if you, as a group, are keen to continue to work together, for you to expand your partnership, to consider looking particularly to the new member states where mediation approaches are quite new and interesting.

It is important to remember what you have already achieved and to inform external organisations about it. We need to try to find an appropriate way of feeding this information to them. We have several ways of doing that, we have a website, you have a mini site within the URBACT website. Looking ahead a little bit to the future and how to keep alive the discussion that you’ve been having, is to potentially look at how we can use some of the specialist thematic networks that already exist, and you’ve done that very well in this project obviously with the FESU. So, in conclusion, I think overall this has been a successful working group. It’s a very small working group and there have been very few meetings compared to some other projects. But is some ways I think that has perhaps been the key of that success. We have to congratulate you, as partners, and the experts that have been used for the quality of the reports that have been produced. MAURIZIO AZZOLINI 18

Durant le mois d’août dernier, Milan était sur les premières pages de tous les journaux à cause de problèmes de sécurité urbaine. Plusieurs épisodes de viol ont déclenché des signaux d’alarme, relayés principalement par les médias. D’ailleurs ce sont ces mêmes médias qui en tirant l’alarme parviennent à (pré)déterminer les politiques de sécurité urbaine. Pas plus tard que cette semaine, une émission télé très connue a montré un reportage illustrant une nuit à Milan où une jeune femme, très jolie, a traversé toute la ville de nuit, en sortant à minuit et en rentrant à six heures du matin, sans que rien ne lui arrive. Dans ce contexte, une gestion cohérente des politiques de sécurité urbaine devient de plus en plus complexe pour les administrations locales. J’ai essayé de mettre en évidence les politiques de sécurité mises en place par l’administration comunale de Milan, tout en me référant au plan général de développement 2006/2010, récemment approuvé. J’ai ainsi decouvert que la presque totalité des initiatives prévues sont conçues selon une logique répressive et de contrôle militaire du territoire.

Mais lorsqu’on essaye de comprendre la véritable signification de la demande de sécurité qui vient de la collectivité, on réalise que l’on pourrait formuler des réponses différentes par rapport à celles de la loi et de l’ordre; on pourrait formuler des réponses qui ne débouchent pas uniquement sur une augmentation de la pénalisation ou, encore pire, sur des « instances de vengeance ». Le terme “sécurité” renvoie à une condition subjective de calme et d’absence de danger. Dans le langage courant, ce terme peut recouvrir diffèrentes significations. Un premier sens fait allusion à une condition objective d’absence de risque ou de danger pour les personnes et les choses. Par conséquent, un lieu est dangereux lorsqu’il présente une concentration élevée de risques et de dangers. Le terme de sécurité peut aussi faire allusion à l’organisation des moyens et des ressources utilisées pour garantir les conditions de sécurité, l’appareil de sécurité publique. Depuis peu, le terme sécurité peut aussi faire référence à l’état d’âme de l’individu, c’est à dire à la façon selon laquelle l’individu perçoit le monde autour de lui et se met en relation avec lui. Dans ce sens là, on parle souvent de peur de la criminalité et c’est probablement l’aspect central de l’action politique de sécurité, au niveau de l’administration locale. En realité, plusieurs études et recherches mettent en évidence

18 Directeur Service educatif adolescents en difficulté et responsable du Bureau de Médiation pénale Minorile de la Ville de Milan.

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le fait que la perception de la sécurité par les individus ne concorde pas avec celle de l’ensemble de la société. Les résultats de nombreuses recherches, à propos de ce sujet, peuvent être résumés en deux aspects: i) les personnes vivant dans un territoire caractérisé par un faible taux de criminalité ne sont et ne se sentent pas forcement plus sûres, ou plus en sécurité; ii) les personnes qui ont été victimes d’un crime, ou d’une agression, ne se sentent pas forcement moins en sécurité par rapport à ceux qui n’ont jamais été victimes de crimes ou d’agressions. Cela peut donner une indication très importante aux politiques de sécurité: la réduction du taux de criminalité dans un territoire déterminé n’est pas suffisant pour faire que les personnes qui y habitent se sentent plus en sécurité. Pour cette raison, il s’agit d’élargir le rayon d’action à toutes les situations qui, tout en n’ayant aucun lien direct avec le phenomène criminel, amènent les gens à se perçevoir plus en sécurité.

Sans avoir la prétension de brosser un tableau exhaustif des problèmes connexes au thème de l’insecurité urbaine, je ferai référence au travail de Roberto Cornelli, chercheur à la Faculté de Droit de l’Université de Milano Bicocca, qui dit que l’on peut utiliser comme exemples deux noeuds thématiques qui émergent de l’observation de la realité et qui tournent autour des sujets de la cohabitation et de la réponse institutionnelle. Le premier noeud est relatif à la sécurité et aux états conflictuels urbains: la cohabitation entre différents sujets peut être génératrice d’insecurité. Cette recherche a analysé cet indicateur précis dans les banlieues de Milan et a relevé des exemples de conflits portants sur la déstabilisation et l’utilisation commune des espaces publiques et collectifs, ces experiences sont désormais connues par plusieurs administrations locales. Ainsi, les parcs publiques, généralement occupés par des groupes de jeunes, deviennent des «secteurs restreints», en terme d’utilisation et de jouissance, et cela plus particulièrement le soir. En effet, beaucoup de personnes se sentent menacés par la presence de ces groupes de jeunes et par leur comportement. D’autre part, la présence de chiens, souvent non tenus en laisse, dans ces parcs gêne considérablement la pleine utilisation de l’espace vert, surtout par les enfants. Plus encore, la rue et les trottoirs - perçus par les piétons et les riverains comme des lieux de sociabilité – deviennent des espaces de conflit, disputés avec les automobilistes (riverains ou non) qui n’ont font pas le même usage (vitesse, stationnement sur les trottoirs, etc). Mais les conflits ne concernent pas uniquement l’utilisation des espaces, le paramètre temps intervient également : le soir, par exemple, représente pour cetaines personnes le temps consacré au repos contrairement à d’autres, pour qui il représente le temps du loisir ( principalement les populations jeunes qui remplissent le lieux publiques, les cafés, les brasseries, les rues, les places). De là peuvent naître des conflits à cause que les exigences des uns n’est pas respectée par les autres. Les conflits qui naissent à partir de cette utilisation des espaces publiques peuvent déboucher sur un double-risque : d’une part, la tendance à «privatiser» un espace publique, qui deviendra de moins en moins accessible à la collectivité dans son ensemble et de plus en plus reservé à certaines categories spécifiques de personnes; d’autre part une fortification des espaces particuliers, afin d’éviter que d’autres y accèdent.

Ces deux phénomènes contribuent à radicaliser le sens d’insécurité des gens. Renoncer à la cohabitation implique de renoncer à se confronter sur l’organisation des espaces et des relations entre les individus; finalement cela implique de renoncer à un projet de vie sociale. Dans une telle dimension, la présence des diversités devient sans cesse une menace et une raison d’inquiètude, contre laquelle il faut se protéger. Le conflit perd sa fonction de division et paradoxalment il fait rencontrer des individus hétérogènes qui expriment des intérêts particuliers; il perd aussi sa fonction positive de moteur du changement social pour se radicaliser et devenir violent.

Le deuxième noeud est lié à la sécurité ainsi qu’à la réponse des institutions car ces dernières jouent un rôle fondamental dans le processus de création de l’assurance sociale. Cela est d’ailleurs confirmé par présence des coordinations des agences de contrôle et de repression dans le débat sur les problèmes de sécurité urbaine. Je voudrais me réfèrer aux questions liées aux services de surveillance de la police municipale, aux difficultés d’organiser des services s’adressant à la population et entretenant avec elle une relation plus en adéquation avec le processus de changement sociétal, et cela dans le but d’améliorer la qualité de la réponse institutionnelle aux problèmes du citoyen. Tout cela montre clairement que l’insécurité des individus dépend aussi de la façon dont les institutions agissent, de la qualité des relations avec les citoyens ainsi que de leur capacité d’intervenir convenablement par rapport aux demandes du public. L’exposé rapide et synthétique, des ces noeuds, entend offrir une occasion de reflexion pour saisir l’ampleur du phénomène «sécurité/insécurité» dans notre societé, ainsi que de son extrême actualité et quotidienneté.

La peur de la criminalité étant devenue le critère de référence pour réfléchir, projeter et organiser la vie en société, cela a produit une nouvelle façon de penser les relations sociales. J’estime donc qu’il est intéréssant de m’arrêter brièvement sur deux traits caracteristiques des politiques de sécurité: l’investissement dans la pénalité et l’emphase sur la dimension locale.

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Tout d’abord, les taux élévés de criminalité et la perception diffuse d’insécurité sont les nouveaux problèmes auxquels les gouvernements et les agences de la justice pénale se doivent de faire face. Mais jusqu’ici la seule réponse apportée fut l’accroissement de la réaction pénale ainsi que l’investissement dans les forces de sécurité publique. L’Italie, un pays qui avait traditionnellement un faible taux d’emprisonnement, a vu suite à cet accroisssement de l’usage du mode répressif une croissance énorme de la population carcérale et dans ces mêmes prisons, on retrouvait de plus en plus de marginaux, des étrangers et des toxicomanes. Le taux d’incarcération en Italie a dépassé celui de la France et l’Allemagne pour s’approcher des taux de la Grande Bretagne.

D’autre part, il exsiste une tendance à exagérer le rôle de l’administration locale dans la gestion de l’insécurité, tout en comptant sur les missions des services sociaux, des projets urbanistiques, des politiques de l’emploi ainsi que de l’action de la police locale. Cette implication du niveau local résulte très certainement d’une demande de la part des citoyens qui, à une époque de crise de légitimité des Etats nationaux et de délégitimisation du système politique étatique, cherchent en leur «Maire» un interlocuteur suffisamment proche, qui puisse écouter leurs demandes et doléances et qui sache y apporter une réponse. Par ailleurs, une volonté provenant d’en haut, c’est à dire des institutions nationales, est en train de converger avec celle venant du bas. En effet, en cette époque de crise du welfare, de tassement de la croissance économique et de la hausse des insécurités sociales (dûes à la précarité du marché de l’emploi, les crises liées aux régimes de retraite, la réduction des niveaux d’assistance sociale), les instances gouvernementales ont de plus en plus tendance à mettre en avant le rôle de l’administration locale dans les politiques de sécurité, en lui transférant des nouvelles compétences, mais sans lui en fournir pour autant les ressources appropriées. Ce mécanisme permettant de réduire l’espace d’intervention étatique et sans générer, du moins formellement, des carences administratives. L’idée est à renforcer le rôle du Maire, qui doit trouver une solution à ce qui ne marche pas au niveau de l’assistance ainsi que du contrôle de son territoire.

La doctrine du droit pénal et de la criminologie signalent vaillamment que la sécurité ne s’établit pas en prescrivant des peines, d’autant plus des peines sévéres; mais plutôt en agissant d’abord sur les facteurs générateurs de l’insécurité, et cela par des politiques sociales appropriées, en suite par des parcours motivationnels significatifs portants sur le respect des lois. Le principe selon lequel une bonne politique sociale est la meilleur politique criminelle reste toujours valable et d’actualité. De même, une réponse capable de valoriser le rôle de l’administration locale dans la construction d’une réelle perception de la sécurité sur le territoire peut être réperée dans la logique de la justice réparatrice ainsi que dans les experiences de médiation qui commencent à trouver un espace qui leur permette d’être appliquées même dans notre pays. Ce sont les seules actions juridiques mises en éxécution dans notre système juridique, des actions reconductibles à des formes de victim support. Les premières évaluations de ces programmes de médiation commencent à donner de hauts niveaux de satisfaction de la part des victimes.

Pour conclure, j’aimerais vous montrer une partie des résultats de la recherche réalisée par le Bureau de Mediation Pénale des Mineurs de Milan. Ces résultats pouvant permettre de mieux évaluer l’éfficacité de l’action de la médiation à travers l’analyse de la satisfaction et de la qualité perçues par les bénéficiares. Je vais me limiter à quelques résultats que j’estime les plus significatifs par rapport au thème discuté. Le premier indicateur est lié à l’image de la médiation: on a demandé aux victimes, ainsi qu’aux auteurs, de donner une définition de la médiation. L’élaboration de leurs réponses ouvertes, codifiée selon des mots-clé, a mis en évidence que la médiation était surtout conçue comme un lieu de résolution de conflit ou bien comme un lieu où l’on pouvait tout simplement communiquer. Un deuxième indicateur, plus spécifique aux auteurs du crime, désigne la médiation comme un lieu pour mettre les choses en clair. Par contre, ls victimes, elle le voient comme un lieu de reconciliation avec l’autre.

Les réponses ouvertes élaborées par les différents sujets sont très significatives, surtout en ce qui concerne l’idée de la médiation comme une modalité de résolution des conflits. Ainsi, la médiation a été jugée très utile par 45% des victimes interviewées et relativement utile par 42% par les autres. A la question particulièrement délicate si la médiation était capable de répondre adéquatement à une demande individuelle de justice (et cela grâce à l’utilisation de la justice réparatrice comme nouvelle modalité d’intervention vis-à-vis du crime commis) on a enregistré des réponses différentes entre les victimes et les auteurs du crime. Les auteurs du crime sont moins convaincus, il répondent “beaucoup” dans 26% des cas et “assez” dans 45% des cas, c’est à dire 70% de réponses positives. Par contre, les victimes semblent être beaucoup plus satisfaites à ce sujet car 45% répondent “beaucoup” et 36% optent pour “assez” à cette même question. En ce qui concerne leurs jugements sur l’experience, la médiation a été jugée positive ou très positive par la majorité des interviewés, environ 67%, aussi bien parmi les auteurs des crimes que parmi le victimes, alors que seulement une victime et trois auteurs se sont exprimés de façon négative. Aussi dans ce cas là, l’analyse des

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réponses ouvertes est assez significative: ceux qui ont jugé très positif l’entretien de médiation soulignent, dans la plupart des cas, que la mediation a contribué à établir un rapport positif avec la partie adverse. Voici quelque réponse: “très positif car j’ai pû parler avec l’autre personne et je me suis réconcilié avec elle” (une victime); “très positif bien que assez traumatique”; “très positif , j’ai été impliqué en tant que partie en conflit et comme personne”. Beaucoup de contributions font référence à une «experience importante» parfois «traumatique» mais «utile». D’ailleurs, ceux qui définissent la rencontre en termes positifs, soulignent surtout la possibilité de comprendre ce qui s’est passé et de connaître la partie adverse. La dernière partie concernant «les sentiments éprouvées pour la partie adverse», et là je crois que les résultats sont particulièrement significatifs. En effet, on a demandé aux interviewés d’indiquer la mesure de jugement de certains sentiments qu’ils éprouvaient avant et aprés la médiation. Je vous ai ammené trois exemples: le premier indicateur concernait «l’anxiété». Les résultats sont rassurants: avant la médiation, les personnes disent ressentir beaucoup cet état d’âme (61% des victimes, 58% des coupables). Après la médiation, seulement 2 victimes et 4 auteurs sur le total des personnes interrogées ont déclaré ressentir encore ce sentiment. Le deuxième sentiment est «la peur». Avant la médiation, 44% des parties offensées affirment avoir ressenti beaucoup ou assez ce sentiment; après l’entretien de médiation aucun interviwé n’a exprimé de peur. De manière analogue, 32% des auteurs de crime soutiennent avoir eu peur avant la rencontre, mais deux seulement l’ont ressenti encore après la rencontre. Troisième exemple: «la colère». Encore une fois, les données soulignent les effets positifs de l’entretien de médiation. Avant, 86% des victimes soutenaient avoir été beaucoup ou assez en colère; après la médiation cette portion baisse à 22%. En ce qui concerne les auteurs du crime, les données sont moins significatives, bien que toujours positives car 90% affirme avoir été en colère avant la médiation, alors que seulement 29% ressentent encore ce sentiment après l’entretien de médiation et 29% le ressentent “assez”. Le données relatives à ce monitorage sont très intéressants, pour ceux qui jugent le chemin de la justice réparatrice comme une possibilité réelle, dans un contexte tel que celui de l’administration pénale, où le conflit est au sommet de son expression. On peut réellement penser que les potentialités des experiences de médiation sociale, scolaire et à l’interieur des conflits familiaux, réservent un vrai rôle pour l’administration locale et cela dans le cadre d’une politique active dans le domaine de la sécurité urbaine.

Municipalités et nouveaux conflits urbains: quelle politique de prévention entre sécurité et médiation? ROBERTO SEGRE19 La Direction Générale «Justice, Liberté, Sécurité» (JLS) auprès de la Commission Européenne de Bruxelles, dirigée par l’anglais Jonathan Faull, poursuit, entre autres objectifs, le but de la prévention de la criminalité générale.

Cette direction générale est pilotée par le vice-président Franco Frattini qui, grâce à sa connaissance des thématiques traitées, a su activer de nombreuses intiatives et rencontres avec les autorités locales, à l’instar des réseaux d’échanges URBACT et FESU.

La JLS agit en présentant des propositions législatives dans le cadre des traités, en favorisant l’action des États membres en cette matière et en gérant les programmes de financement des différents projets.

Le traité d’Amsterdam prévoit une compétence communautaire en matière de prévention de la criminalité. On parle ici de prévention dans un sens très large. Car la tendance fait que la prévention couvre de plus en plus de thèmes, très actuels, se rapportant à la prévention du terrorisme et de la criminalité organisée. Dès lors, il ne reste plus qu’un espace assez limité, en termes de “volume crime”, pour la prévention de la criminalité dite commune. En effet, cette prevention est de plus en plus limitée à certains aspects, à certaines catégories de crimes, tel que la criminalité des jeunes, la criminalité urbaine, en incluant les violences domestiques et la criminalité liée à la drogue. Ces thèmes sont traités dans une optique de prévention, mais les inquiètudes au niveau européen, et non seulement national, sont plus focalisées sur la sécurité et son architecture interieure.

19 Fonctionnaire de la Commission Européenne, Direction Générale Justice, Liberté et Securité.

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Comment pouvons-nous, nous qui travaillons dans le domaine de la prévention, arriver à nous insérer dans cette optique qui privilégie l’aspect répressif et qui se focalise sur la coordination législative des mesures contre le térrorisme et la criminalité organisée?

Tout d’abord, il s’agit de dire que pour l’instant il y a très peu d’instruments au niveau européen. Par exemple, il n’existe pas de loi européenne en matière de prévention de la criminalité, mais il y a de nombreuses lois nationales.

D’ailleurs, la Commission européenne a publié deux communications au sujet de la prévention de la criminalité en 2000 et en 2004, dans lesquelles elle insistait sur la nécéssité de travailler sur le rapport étroit entre les différents niveaux d’action en matière de prévention de la criminalité générale : le rôle des autorités locales, les autorités nationales et enfin le niveau européen.

La Commission propose d’utiliser la définition de prévention de la criminalité présentée par la décision du conseil du 28 mai 2001, qui établi le réseau européen de prévention de la criminalité (EUCPN : European Crime Prevention Network). Selon cette definition : ''la prévention de la criminalité concerne toutes les mesures aptes à contraster la criminalité et à réduire le sentiment d'insecuritè des citoyens, autant sur le plan quantitatif que qualitatif, en décourageant directement les activitès criminelles ou en faisant recours à des politiques et des actions visant à réduire le potentiel de criminalité et à en limiter les causes. Cela se sert des actions des gouvernements, des autorités compétentes, des autorités judiciaires en matière pénale, des autorités locales, des associations spécialisées, du secteur privé et du bénévolat, des chercheurs et des citoyens, avec le soutien des médias''.

L'EUCPN est actif dans tout les Etats. Par exemple pour l’Italie, la Belgique et la France, c’est les ministères de l’Interieur et de la Justice (des autorités nationales) qui le mettent en oeuvre en collaboration avec les autorités locales et régionales. Ce reseau européen rassemble les résultats des projets, des bonnes pratiques, d’information et anime, à son tour, des projets dans le domaine de la prévention afin de trouver des réponses qui puissent être disseminées et traduites en dispositions législatives.

La Commission dispose de beaucoup de matériel en matière de prévention de la criminalité générale, tel qu’une centaine de projets transnationaux réalisés et présentés par des promoteurs nationaux. Ces projets, dont les résultats vont être évalués, ont pour but de capitaliser les bonnes pratiques mises en place par les autorités compétentes dans le domaine de la prévention.

L’échange d’informations entre les differentes autorités (locales, nationales et européennes) doit être encouragé et récompensé, de façon à créer et à maintenir une coopération stable pour l’élaboration d’une stratégie de prévention valable au niveau européen

En août dernier, la Commission a publié une communication concernant « une strategie générale de l’Union Européenne pour mesurer le crime et la justice criminelle ». Le but de cette communication étant de présenter une structure cohérente dans laquelle les informations statistiques concernants le crime et la justice pénale puissent être développées au niveau de l’Union Européenne par des actions de la Commission Européenne, avec le soutien des représentants des États membres.

La comunication comprend un plan d’action qui précise la structure et les actions principales à mener sur une période de 5 ans. Ainsi plusieurs programmes de financement de la Commission Européenne sont prévus. Á partir de 2007 et jusqu’à 2013, et dans le cadre des nouvelles perspectives budgetaires, un important flux de fonds va être débloqué en faveur de ces projets. Projets nationaux, trans-nationaux, actions visées, financements, études, recherches-actions pourront ainsi être co-financés par l’intermediaire de promoteurs capables de lancer des projets, de les faire avancer et de proposer des résultats valables au niveau européeen.

En plus de cette série de programmes visés par notre Direction Générale, il y aura également des programmes de recherche dans le domaine de la criminalité, ainsi que des programmes au niveau régional, dans le cadre des fonds structurels, et pour lesquels on vise une complementarité et une continuité. Autrement dit, il s’agira de coordonner les actions et les résultats, car il s’agira également d’évaluer ces derniers, pour en estimer l’impact sur les systèmes de prévention actuels.

L’évaluation permet tout d’abord de connaître ce que l’on fait et à quoi cela sert, ensuite savoir comment capitaliser les meilleurs résultats afin de les exploiter au niveu politique et législatif pour éventuellement en faire une loi européenne, tout en respectant le principe de subsidiarité.

Il ne s’agit pas forcement de matière de droit communautaire mais certaines actions inter-gouvernementales dans le domaine pénal (plus particulièrement dans le domaine de la coopération judiciaire et policière) nécéssite la majorité absolue et l’unanimité de la part de tous les États (25, auxquels il faudra rajouter Bulgarie et Roumanie à compter du 1er Janvier 2007). Il n’est pas difficile de deviner comment cela

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peut être compliqué d’obtenir l’unanimité sur certaines des ces mesures surtout dans un domaine aussi sensible!

En ce qui concerne l’activité des autorités locales en matière de médiation et prévention de la criminalité, nous écouterons votre experience, qui vient du terrain et qui tire ses enseignements de la confrontation directe avec les problèmes et les conflits.

Pour finir, je voudrais poser une question aux protagonistes de cette table ronde: dans votre activité d’aministrateurs au niveau local et d’experts dans les projets de médiation, pourriez-vous citer un exemple de bonne pratique à diffuser ainsi qu’un exemple de problème ou d’obstacle que vous avez rencontré et qui vous a mis en difficulté, tout en stimulant votre réflexion? CATHERINE HANRIOT 20

Mesdames, Messieurs, J’ai toujours considéré ce type de réunion comme une chance. Chance de partager la réflexion qui est engagée autour des questions de la médiation, chance aussi

d’échanger nos expériences entre partenaires internationaux, afin, je ne vous en cache pas l’ambition, d’écrire une nouvelle page dans l’affirmation des droits du citoyen à travers ces questions. La ville a engagé un travail sur le droit des citoyens et leur implication dans la vie locale, mis tous deux en cohérence avec l’intervention des pouvoirs publics. Cela nous a amené à mettre sur pied, en 2001, un projet multidimensionnel collectif qui rassemble, dans une même dynamique, des acteurs sociaux, des représentants de l’Etat, des habitants, des chercheurs universitaires, des juristes, et des élus. Ce projet est intitulé AFPAD : Association pour la Formation, la Prévention et l’Accès au Droit.

L’AFPAD développe ses activités dans trois directions : • 1) Favoriser l’accès au droit de nos concitoyens, avec une information de proximité sur les droits

et les devoirs, des permanences de juristes, d’avocats, de notaires, avec l’accueil des parents, la présence d’un écrivain public, d’associations de solidarité.

• 2) Eduquer les enfants et les jeunes à la citoyenneté, avec la sensibilisation, dès le plus jeune âge, au respect des lois et des règles de vie en collectivité. Y contribuent, ici aussi, des avocats, juristes, élus, pompiers, policiers.

• 3) Offrir, à l’ensemble de la population et des institutions, un espace de médiation, de gestion et de résolution des conflits. L’AFPAD permet chaque année à 3 000 habitants et acteurs de la vie locale d’être aidés dans leurs

démarches juridiques. Le projet d’éducation à la citoyenneté a concerné plus de 3 000 enfants de 9 à 16 ans, des écoles et

des collèges de notre ville. Un projet qui a d’ailleurs donné lieu à un livre. Le projet de médiation a permis de former 170 acteurs, à la gestion des conflits, et ceux-ci

interviennent sur le terrain de manière très efficace. Deux colloques de dimension internationale sur le thème de la médiation se sont tenus dans notre

ville. Suite à cela, la ville de Pierrefitte s’est déclarée « Ville-Médiation favorisant la constitution d’un réseau national et d’un européen Euro-Médiation permettant ainsi de travailler, d’échanger et de partager nos expériences.

Entreprendre une telle démarche ne doit pas être considérée comme un effet de mode C’est la réponse concrète, c’est l’affirmation de la volonté politique affichée par notre collectivité, de

considérer l’accès à la médiation comme un droit fondamental du citoyen. Il y a quasiment un an jour pour jour, le 26 octobre 2005, débutaient en France des violences

urbaines qui ont surpris les observateurs par leur nombre et leur durée. Elles ont traduit la désespérance et la violence sociale que subissent les habitants des quartiers les

plus populaires. Face à cette situation, il ne peut être question de baisser les bras. Ni non plus d’enfoncer la société

dans des politiques ultra répressives.

20 Maire Pierrefitte

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Partout où le lien social s’effrite, partout où les solidarités s’étiolent, partout où les relations entre les hommes se dégradent, l’intervention publique est nécessaire pour, patiemment, reconstruire du lien, renouer les relations, faire que les gens à nouveau se parlent et s’écoutent.

C’est tout cela que recouvre le travail de médiation. La médiation peut donc concerner des conflits naissant dans les différents lieux de vie : la famille, la

ville, le quartier, l’entreprise. M ICHELLE MOREAU21

Avant de répondre à vos questions, permettez-moi de vous présenter la ville : Angers, 157 000

habitants, 16e ville de France, 42 % de la population ont moins de 30 ans, taux de chômage élevé, 30 000 étudiants, 5 000 personnes bénéficiant du revenu minimum d’insertion, 34 % de logements sociaux, revenus moyens par habitant faibles ; ces chiffres entraînent une politique d’action sociale forte et une politique basée sur le développement durable. Nous faisons d’importants efforts pour la prévention, la démocratie locale, formons des habitants-relais, mettons en place des relais de solidarité dans les quartiers. Notre politique est basée sur la proximité, l’écoute des habitants, l’éducation par la culture et le sport.

La médiation s’est mise en place dans notre ville, un peu par hasard, au début, puis par conviction. Au début, nous avons encouragé le recrutement de « correspondants de nuit » (médiateurs) par une association, Régie de quartier, pour faire face à une crise dans un quartier qui se sentait « orphelin », surtout la nuit et les fins de semaine. Compte tenu du résultat positif des contacts la nuit, sur un premier quartier, l’expérience a été étendue à deux autres quartiers. Ces professionnels qui se déplacent à pieds, ou en voiture, rencontrent les commerçants à la fermeture de leur magasin, les personnes qui attendent le bus, répondent aux appels téléphoniques pour conflits de voisinage, vont voir la personne isolée. Ils sont le lien entre les services de sociaux et les bailleurs, tous les professionnels qui travaillent le jour. Ils assurent une «veille technique» pour les dysfonctionnements liés aux services municipaux.

La médiation s’est ensuite développée, par la formation des agents en contact avec le public pour éviter le conflit, le gérer, ou le supprimer. Puis les lieux d’accueil que constituent les « laveries collectives », lieux de service gérés par des associations, sont des lieux de rencontre où on peut discuter, essayer de régler des conflits de proximité.

La mise en place d’une «Maison de Justice et du Droit» a conforté nos ambitions, il s’agit d’un lieu où on trouve des professionnels pour l’accès au droit, les délégués du Procureur pour le règlement de litiges par la médiation, des médiateurs familiaux, des médiateurs pour le droit des femmes.

Aujourd’hui nous finançons des formations pour des habitants-relais pour leur permettre, dans leur cage d’escalier d’essayer de « renouer » les contacts avec des habitants en difficulté et servir ainsi de relais vers les services compétents.

Notre volonté de médiation est inscrite dans « l’agenda 21 » afin, que quels que soient les élus en place, cette politique puisse perdurer. La médiation facilite les relations inter-générations, la tolérance entre cultures différentes.

Permettez-moi de conclure sur un proverbe des Indiens hurons du Canada « la grandeur d’une nation se mesure à sa capacité d’intégrer ses diversités ». Donnons-nous, par la médiation, cette capacité. Merci de votre attention ILDA CURTI 22

Chacune de nos villes est faite de petites villes, de petits territoires qui ont de multiples spécificités et

dimensions. Je voudrais rappeler qu’à Turin, depuis au moins 20 ans, les politiques de sécurité sont des politiques intégrées. Ce ne pas un hazard que l’Adjoint préposé à la Sécurité et moi-même sommes ensemble dans cette salle. Le travail de l’un et de l’autre s’entrelacent continuellement, nous avons des rapports permanents et nous abordons ensemble continuellement les problèmes et leur complexité.

Turin partage avec les autres villes européennes de grande et de moyenne taille, le thème de la complexité urbaine, et les nouveaux conflits qui se manifestent, et surlesquels nous avons dû et nous devons

21 Premier Maire-Adjoint d’Agers. 22 Adjoint préposé aux Politiques pour l’Intégrtion et modératrice de la table ronde.

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agir en termes de politiques et d’identification d’objectifs et de stratégies Dans cette ville, qui peut-être représente le modèle italien des villes et des municipalités, et par rapport à d’autres villes européennes, nous avons du mal à parler de banlieues comme lieux géographiquement définis, parce que en réalité la naissance de nos villes est une naissance qui a eu des retombées différentes sur les territoires. Et si la ségrégation en termes d’espace est limitée, il y a dans nos villes, d’invisibles villes transversales et souterraines qui traversent tous leurs territoires. Surtout parce que la naissance de nouveaux conflits est aussi liée au fait que l’Italie est devenue, récemment, un pays de migration. En Italie, la migration est un phénomène récent qui remonte à 15-20 ans maximum et la deuxième génération est encore très jeune. Le fait qu’il s’agit d’un problème récent a aussi exercé son influence sur l’aménagement de la ville, car nous n’avons pas eu la possibilité de construire des banlieues et des HLM en mesure d’accueillir les immigrés. Les nouveaux citoyens se sont donc installés dans les quartiers de la cité historique et ensuite, au fur et à mesure que les projets de migration sont devenus des projets permanents de vie ils se sont installés un peu partout, sans qu’il y ait toutefois des espaces qui leur soient expressément réservés.

Mais je crois que nous devons être fiers de ce modèle: il n’y a pas d’espaces réservés. C’est assurément sous différents aspects, une limite, celle de ne pas disposer d’un patrimoine important d’habitations à loyer modéré, car cela a souvent donné lieu à une situation de dégradation et de spéculation du marché privé. Si nous songeons à l’avenir et nous cherchons à imaginer ce que sera la ville dans dix ans, la mixité sociale et la possibilité d’avoir des territoires qui ne seront pas uniquement caractérisés par la présence de nouveaux citoyens nous aidera sans doute- comme ils le font à l’heure actuelle- à travailler sur le terrain, à travailler sur les relations, sur les modalités des rapports entre les personnes et les groupes sociaux. Toutefois, celle que nous vivons chaque jour est une demande de sécurité qui vient de nos territoires. Une demande de sécurité, sommes toutes, très simple. Les citoyens qui demandent la sécurité nous disent simplement : nous voulons être plus sûrs, nous voulons pouvoir sortir le soir. Mais nous, de notre part, nous devons être conscients et responsables et savoir que les réponses ne doivent et ne peuvent pas être simples, dans le sens qu’une question qui en soi est simple implique des réponses complexes, en termes de politiques, d’actions sur le territoire, de capacités d’intervenir «ici et maintenant», parce qu’on ne peut pas affirmer que les choses vont changer demain. Certes, la demande de sécurité est une demande qui implique une intervention immédiate et concrète, mais nous nous devons de savoir que le «ici et maintenant» ne peut pas occulter le moyen et long terme et que d’autre part nous ne pouvons mystifier les gens par des promesses. C’est un luxe que nous ne pouvons pas nous payer, du fait aussi que les conflits – qu’ils soient nouveaux ou anciens – doivent être lus, d’abord, en termes politiques, mais aussi en termes de politiques et d’actions administratives et publiques. Il arrive souvent que la perception de la sécurité dans nos territoires n’a rien à faire avec ce que l’on appelle la perte d’identité en général chez la population la plus âgée, qui ne dispose pas d’outils appropriés pour interpréter le changement et qui craint de perdre son identité. Elle craint d’être envahie par les autres qu’elle ne connaît et ne comprend pas. La nature précaire des processus de la vie individuelle et collective qui ne dépend pas nécéssairement et uniquement d’actions micro-locales, la crainte d’être envahi par l’autre découle souvent d’un travail précaire, du sens de la vie, des perspectives et des attentes. Et voilà que devient difficile d’avoir une vision correcte de l’avenir, soutenir des coalitions et des réseaux locaux. Dans les territoires, dans les quartiers, les réseaux de citoyens, les réseaux des associations sont de plus en plus fragiles parce qu’ils éprouvent des difficultés à vivre ensemble, à s’unir, à partager des objectifs, ainsi que l’usage du territoire et des espaces de ce territoire de façon complémentaire et participative. Parmi les éléments dont on a besoin pour donner des réponses complexes, figure l’investissement destiné à soutenir et à maintenir des réseaux sociaux d’un territoire que l’on ne doit pas uniquement promouvoir, mais qu’il faut aussi soutenir.

Des conflits à l'échelon territorial ressort une sorte de morcellement des intérêts. De plus en plus, on entend dire “ devant ma porte, mon problème est devant ma porte, nous voulons plus de flics, nous voulons plus de policiers, nous voulons des réponses plus visibles, mais nous les voulons devant la porte de notre maison”. Un sociologue urbain définit ce phénomène d’ « égoïsme métropolitain », où le morcellement des intérêts s’heurte à la nécessité de partager des points de vue collectifs. Ce qui arrive un peu plus loin ne nous intéresse pas: c’est ici que nous avons un problème. Le thème de la participation, de l’implication des citoyens joue un rôle fondamenta parce qu’il est lié à la politique, à la démocratie, à la confiance dans les institutions. Mais ce que disait Madame Moreau est tout aussi vrai: nous devons éduquer à la participation, ce qu il nous faut, est une pédagogie de la participation. Parce que ce n’est pas vrai que les instances individuelles doivent nécessairement trouver des réponses dans les politiques publiques, il faut avoir le courage de faire de ce point de vue l’objet d’une médiation et concilier des intérêts différents qui, souvent, ont peu à faire avec les diversités culturelles : ce sont des diversités générationnelles entre les jeunes et les

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personnes âgées, pour des questions d’utilisation des espaces. Et alors, qui devons- nous écouter? celui qui est plus actif, qui participe davantage, celui qui sait mieux s’organiser celui qui crie plus fort ou celui qui est plus en colère?

Et comment pouvons-nous répondre en soutenant que bon nombre des acteurs qui occupent un territoire et qui l’utilisent, ne savent pas souvent s’organiser, qu'ils n’ont rien à dire, qu’ils ne sont pas capables d’expliquer le problème et leur manière d’occuper ce territoire?

Il s’agit souvent de jeunes immigrés, de nouveaux arrivés qui ne sont pas organisés pour présenter et expliquer leurs exigences. A mon avis maintenir, travailler et soutenir un territoire veut aussi dire accompagner ceux qui ne sont pas en mesure de s’asseoir autour d’une table et de discuter avec les autres sur un problème particulier. L’utilisation incivile du territoire, le comportement « déprédateur », la sensation qu’un territoire est abandonné, sont autant d’éléments qui font que les citoyens demandent plus de sécurité. Nous savons que ce ne sont pas les flics qui rendent une ville propre, c’est le sens de la légalité qu’ont les citoyens, c’est leur éducation à ne pas salir. Derrière le thème de l’utilisation incivile du territoire, il y a des éléments très complexes qui ont affaire à l’éducation civique, au fait de se sentir des citoyens au sens d’appartenance et de respect pour un lieu. Il y a le thème de la cohabitation forcée, dans des espaces privés et publics limités. Je partage entièrement ce que disait Madame Moreau à propos des entraves. Le déterminisme des aménageurs qui dessinent des sites, en pensant que la forme du dessin en détermine l’usage et la fonction. Les espaces que l’on dessine et planifie sans réussir à créer une culture sur leur utilisation produit un écart entre , d’une part, l’imagination de l’aménageur et la force de régulation du plan et, d ’autre part, les modalités effectives d’utilisation par les usagers C'est alors que s’activent les mécanismes, les réponses aptes à protéger ces lieux qui sont mal utilisés. Les caméras, les cloisons, l’élimination des bancs, parce que ce ne sont pas les personnes âgées qui les utilisent, ce sont les clochards. Probablement nous devons avoir le courage de reconnaître que c’est au niveau de la conception de l’espace de la ville qu’il faut songer aux fonctions et non pas intervenir à posteriori, pour protéger ces espaces. Intervenir et donner des réponses est une tâche qui engage tous et chacun d’entre nous, parce que le droit à la sécurité est un droit fondamental des citoyens, toutefois nous devons savoir que notre tâche consiste à réduire l’insécurité, non pas à garantir la sécurité absolue. Poursuivre le mythe de la sécurité absolue veut dire créer des attentes qui seront frustrées. Aucune société n’est sûre, il n’y a jamais eu dans l’histoire, des villes sûres.

Nous devons aussi opérer pour offrir des outils, pour apprendre à vivre avec l'insécurité, avec la peur, mais nous voulons aussi lancer un message pour l’avenir en espérant qu’il soit reçu et perçu. BEPPE BORGOGNO23

Ilda a déjà tout dit. Je vous demande seulement deux minutes d’attention, pour ajouter une brève

remarque à propos des entraves. Culture de la prévention, culture de la médiation, culture de la proximité sont des notions, à mon avis, très importantes lorsqu’on doit concevoir des politiques de sécurité sérieuses et intégrées. Ce sont des notions fortement présentes dans notre action, à Turin, et je crois pouvoir affirmer que, dans ce sens, nous sommes à l’avant- garde en Italie.

Mais il s’agit de conquêtes, et à part le fait d’être des conquêtes, ce sont, dirais-je, des pratiques positives et, en tant que telles, elles doivent être défendues, car la demande des citoyens, pour ce qui concerne la sécurité est malheureusement beaucoup plus simple, beaucoup moins complexe qu’un phénomène qui a besoin de réponses complexes.

Alors, s’il s’agit de conquêtes que l'on doit défendre, nous devons être vigilants et faire en sorte qu’en cas de difficultés financières, les administrations locales ne considèrent pas la culture de la médiation, de la proximité et de la prévention comme un luxe dont on peut se passer, car elles représentent un élément structurel des politiques de sécurité et, en tant que tel, nous devons les défendre. A un moment où la demande de sécurité porte sur des aspects plus simples qui exigent des actions de répréssion immédiates, nous devons éviter que l’emporte l’idée, d’après laquelle, la prévention, la proximité, la médiation sont une sorte de déclinaison de ce qu’on appelle le « buonismo » (l’angelisme en français), appliqué aux politiques de sécurité, c’est à dire des outils et des méthodes qui ne saisissent pas l’essentiel du problème.

Je suis convaincu que notre tâche consiste à réduire l’insécurité car la sécurité absolue et totale n’existe pas, tout comme, malheureusement, n’existe pas un fonctionnement impeccable des administrations publiques. Ce sont des structures en évolution permanente qui cherchent à devenir de plus en plus efficaces

23 Adjoint au Personnel, à l’Organisation, à la Police Municipale de Turin.

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et efficientes, mais le top n’existe pas. Mais il y a un lien entre ces deux aspects parce que ceux qui sont appelés à élaborer des politiques de sécurité ce sont les administrations publiques et si la sécurité absolue n’existe pas, il y a quand même la possibilité de réduire l’insécurité.

Nous devons donc veiller afin que soient maintenues ces politiques intégrées de sécurité car, autrement, nous risquons de devoir faire face à une demande de simplicité à laquelle nous ne pouvons donner ( à vrai dire, quelqu’un est de cet avis) qu’une réponse de caractère répressif. Il s’agit d’ une bataille culturelle très importante dans laquelle nous devons nous sentir constamment engagés, une bataille qui s’adresse à tous les citoyens: une bataille d’éducation.

Il faut comprendre que la sécurité est un sujet complexe et que certains outils qui peuvent sembler non cohérents avec l’exigence d’une réponse immédiate, à courte échéance (alors qu’il s’agit de construire des parcours structuraux de longue haleine) a un sens, une importance une efficacité.

Nous devons nous efforcer à mener cette bataille culturelle en faisant aussi d’importants investissements dans le domaine de la communication, nous devons tâcher de parler de ces arguments à l’extérieur, de faire parler les citoyens, de les faire connaître. Construire sur tout cela une croissance culturelle totale est une action très compliquée, qui exige des ressources et des techniques spécifiques. Mais j’estime que la recherche dans ce domaine a une valeur stratégique et qu’il s’agit d’une priorité. Autrement, nous ne ferions que discuter. Comme vient de le dire M. Azzollini à propos de Milan, c’est un argument d’actualité: il paraît que la police municipale de Milan a décidé s’acheter des matraques. Evidemment, nous aussi nous discutons sur les matraques. Toutefois, un décret du ministère règle l’armement de la police municipale italienne ( d’après notre Code, la matraque est une arme ) et précise dans une liste les armes en dotation admises pour la police municipale. Donc, nous, nous n’achèterons pas des matraques.

Peut-être que Milan les a achetées et qu’ils seront mis dans un tiroir comme l’ont fait avant d’autres villes et qu’ils ne seront jamais utilisés. Donc, il ne s’agit pas de ciorconscrire le débat sur la sécurité urbaine à la question: «matraque, pour ou contre!», sur la question qui consiste à se demander si la matraque est un moyen de défense pour l’agent, ou bien un outil qui peut changer les règes de comportement de la police municipale.

Il s’agit non seulement d’une discussion déprimante, mais, en plus, elle n’a rien à faire avec le véritable cœur du problème, c’est à dire avec une demande en sécurité à laquelle on doit avoir la force et le courage de donner une réponse sérieuse, durable, bien structurée et à propos de laquelle je reviens à mon concept initial: une bataille culturelle s’avère nécessaire.

Une bataille culturelle à mener aussi à l’intérieur des administrations, ce qui représente une autre entrave. En effet, investir dans des projets intégrés de sécurité ou dans des politiques et des projets liés à la sécurité intégrée, lorsque l’argent fait défaut, pourrait sembler un luxe, ce qui n’est pas vrai. Il s’agit d’un investissement constructif, productif, utile, projeté vers l'avenir. Malheureusement, à l'heure actuelle, la situation des finances locales et des communes est plutôt complexe, néanmoins pour l’histoire italienne qui est celle des 8.300 clochers, les communes, les autorités locales sont des points repère fondamentaux auxquels il faut allouer des ressources appropriées qui toutefois doivent être utilisées de façon intelligente, en partant de la sélection des priorités les plus importantes.

Et je conclus: la bataille est nécessaire, les communautés locales sont les garnisons, les maires jouent un rôle fondamental, mais les maires ne sont pas des shérifs. Et dans notre pays, c’est à ce niveau qu’une autre bataille doit être livrée, pour lutter contre l’idée, d’après laquelle c’est au maire, qui a pour mission de régir la communauté locale et l’autorité légale (tout en étant élus, depuis quelques années directement par les citoyens) que revient une grande responsabilité dans ce domaine. Il arrive souvent qu’aux maires soient assignées des tâches et des pouvoirs spéciaux dans certains secteurs: par exemple, dans notre ville, on parle ces jours-ci, de pouvoirs spéciaux en matière de trafic et de trafic soutenable.

Mais, même si un jour quelqu’un décidait (et, à mon avis, ce ne serait pas une bonne idée) d’attribuer aux maires italiens des pouvoirs spéciaux en matière de sécurité - ne consistant pas à commander les forces de l’ordre, mais des pouvoirs spéciaux dans le domaine des politiques de sécurité - il ne faudrait pas oublier que les maires ne sont pas des shérifs et que la police municipale n’opère pas comme support de la police.

Elle s’occupe directement de la mise en oeuvre de politiques intégrées de sécurité et je crois pouvoir affirmer, que la police municipale de Turin est à l’avant-garde dans ce domaine. Elle s’occupe de proximité, de prévention de médiation et de contrôle du territoire. La réalité a changé et agir dans nos villes devient de plus en plus difficile, parce que souvent, faire face à des phénomènes de criminalité devient une tâche qui appartient à d’autres organes de la police.

Mais il faut ajouter qu’aux polices municipales sont assignées des tâches institutionnelles qui concernent aussi la cohésion sociale. A ce propos, j’estime qu’il n’est pas inutile de souligner que, dans notre

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pays, la loi qui règle les tâches de la police municipale date désormais d’au moins vingt ans. Entretemps, la réalité a changé et son travail est devenu plus complexe, mais aussi plus créatif, si bien que de nouveaux éléments se sont ajoutés, tels que la culture de la proximité, de la prévention, de la médiation (à part les amendes, la protection du territoire, etc).

Alors il est important que dans notre pays soit élaborée au plus tôt, une nouvelle loi pour les polices municipale définissant avec plus de précision ses tâches dans un contexte qui a changé mais que leur soient, en même temps, reconnues de nouvelles qualités, de nouveaux status et des mesures de protection appropriées.

A mon avis, si nous lancions, tous ensemble, une action de défense et, en même temps une offensive politique et culturelle sur ces thèmes nous aurions non seulement déblayé le terrain de bon nombre d’entraves, mais nous aurions fait un bon travail.

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Conclusions et perspectives: d’un point d’arrivée a un point de départ

(par Giovanni Ghibaudi)

Ce qui nous frappe toujours est constater que l’espace des idées va au-delà des limites que nous avons l’habitude de considérer d’un point de vue gèographique, et permettre par là, d’arriver à des positions pouvant être partagées dans plusieurs séminaires internationaux et se transformer en lignes politiques participées et/ou partageables. Lorsque nous sommes arrivés à la fin du parcours d’approfondissement du thème de la connexion entre médiation et la sécurité des villes, d’où prend son dénomination notre groupe de travail Euromédiation Secucité, nous nous sommes aperçus que quelques unes de nos conclusions ont repris le manifeste approuvé par la conférence de Saragosse, organisée aux soins de FESU à novembre 20061. En effet, le texte du manifeste met en relief que «Les villes sont aujourd’hui confrontées à des nombreux phénomènes de violence, d’insécurité réelle ou subjective et d’autres situations conflictuelles. Ces situations sont souvent à la source de malentendus, des peurs, de violences, de replis sur soi mais aussi de perte de confiance dans les institutions et dans leur capacité à apporter des réponses. Les villes sont sans cesse à la recherche de mécanismes favorisant l’accueil, la confiance, le soutien et le rapprochement des habitants....La médiation dans la gestion des conflits est l’une des réponses. Prémice de relations nouvelles entre Loi, institutions et citoyens, la médiation est une politique de prévention mais aussi de réparation du lien social et de responsabilisation des habitants”2.

Aussi le séminaire sur le thème «Les réponses des villes à l’insécurité», qui a eu lieu à Prague au mois de mai, a mis en évidence que «la sécurité est une des priorités et une préoccupation quotidienne pour les citoyens» 3 à un tel point que «la plupart des villes considère la lutte contre l’insécurité comme une priorité dans les agendas politiques» 4. Mais «il n’y a aucune définition simple de la sécurité parce qu’il s’agit d’un concept complexe»5 qui évite d’un côté l’absence d’actions criminelles, de violence active et/ou passive, d’actes d’incivilité, de la crainte du crime et se réfère de l’autre au sens d’appartenance à la communauté, au désir d’être écoutés et impliqués directement, en tant que partie active de la ville, dans la re-construction et/ou co-construction es liens sociaux.

Dans les dernières années, la conviction que la participation active des citoyens, même en ce qui concerne les politiques locales de sécurités, doit et peut être considérée un objectif primaire, s’est très fortement consolidée.

Il apparaît de plus en plus évident comme la coopération entre les citoyens et les villes doit consister en une «relation fondée sur le respect et le soutien réciproque»6 qui «ne réprime pas les initiatives des citoyens et ne supprime pas la responsabilité d’une politique compétente»7. Cela implique bien sûr la nécessité d’un changement des références culturelles auxquelles chaque partie est aujourd’hui strictement liée: «la police doit passer» de plus en plus «d’une culture essentiellement interne à une culture participative»; les autorités locales doivent arrêter de considérer qu’ils ont une réponse à tout: elles doivent par contre adopter une culture fondée sur l’écoute; les hommes politiques doivent s’engager dans les processus en définissant espaces et lieux d’écoute et de soutien; les citoyens et les communautés doivent se charger du défi du passage d’une culture passive à une culture active, en ayant la responsabilité du développement de l’environnement et en façonnant l’identité locale»8. Une réflexion ciblée a montré qu’une approche interdisciplinaire fondée sur un processus de déterritorialisation des connaissances professionnelles spécifiques afin de co-construire un processus systèmique qui, par le biais d’un programme à longue échéance visant à développer une dynamique

1 Forum Européen pour la Sécurité Urbaine – Conférence de Saragosse 2,3,4 novembre 2006 2 Manifeste de Saragosse sur la sécurité urbaine et la democratie, novembre 2006, pag. 43 3 Rapport préliminaire du séminaire thématique “Les réponses des villes à l’insécurité - Prague, mai 2006 4 Rapport préliminaire du séminaire thématique “Les réponses des villes à l’insécurité - Prague, mai 2006 5 Rapport préliminaire du séminaire thématique “Les réponses des villes à l’insécurité - Prague, mai 2006 6 Rapport préliminaire du séminaire thématique “Les réponses des villes à l’insécurité - Prague, mai 2006 7 Rapport préliminaire du séminaire thématique “Les réponses des villes à l’insécurité - Prague, mai 2006 8 Rapport préliminaire du séminaire thématique “Les réponses des villes à l’insécurité - Prague, mai 2006

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permanente entre la conception de projets et des stratégies opérationnelles différenciées peut offrir des réponses différentes à un quotidien caractérisé par la complexité et par la multiplicité.

En relation à ce qui vient d’être expliqué, il est possible d’affirmer qu’une prévention valable, qui vise à offrir une réponse adéquate au sens de sécurité/insécurité de la population, est un défi pour le niveau local qui doit répondre prioritairement sur la base du principe de subventionnement. Défi, que, en soi et pour soi, elle ne peut pas que favoriser et soutenir consciemment:

• la valorisation d’une approche interdisciplinaire fondée sur un processus de déterritorialisation des connaissances professionnelles spécifiques afin de co-construire un processus systèmique qui offre des réponses différentes à un quotidien caractérisé par la complexité et par la multiplicité;

• l’articulation de politiques de sécurité et de politiques d’accompagnement (surtout relationnelles, éducatives, sociales, interculturelles, inclusives, etc…), interconnectées aux politiques de renouvellement urbain et aux plans architectoniques;

• le développement d’un partenariat permanant et «systémique» entre les acteurs de la prévention qui peut être efficace seulement s’il s’appuie sur toutes les membres de la société;

• le développement d’approches qui privilégient la proximité avec les citoyens (médiation des conflits interpersonnels/scolaires/sociaux, police de proximité, développement de communautés, agences de développement local, etc…);

• une attention spécifique aux victimes parce que le fait de trouver des «réponses» à leurs demandes de justice et offrir un soutien à leur vécu émotionnel et à leur besoin matériaux peut produire des bénéfices pour la collectivité entière, et en même temps consolider les liens sociaux et le sens d’appartenance de chaque citoyen;

• l’encouragement d’une culture fondée sur la légalité, d’une gestion des conflits fondée en dehors des catégories morales de la culpabilité et de la sanction, d’une justice enracinée dans les principes de la réparation et de la responsabilisation individuelle e/ou collective;

• le choix d’une politique de la sécurité «considérée et gérée comme un bien public à travers la production d’une plus grande sécurité des droits pour tous, avant tout pour ces personnes dont les droits ne sont pas toujours protégés»9.

Le groupe de travail «Euromédiation Sécurité» a mis au centre de l’analyse, de la confrontation et de l’évaluation des projets turinois et européens, le thème de la cohésion sociale, considérée l’objectif principal à atteindre dans le développement des politiques spécifiques de médiation à un niveau de sécurité urbaine.

Même si plusieurs experts confirment que la demande sociale (pour laquelle on s’adresse dans la plupart des cas aux forces de l’ordre) concerne des phénomènes d’importance limitée qui contribuent cependant à augmenter la perception d’illégalité, le groupe Euromédiation Sécurité croit que les villes doivent mettre ensemble la prévention sociale, la régénération urbaine et la prévention des situations.

Trois différentes approches qui constituent un «processus systémique» qui vise à l’individuation d’un «programme à long terme», capable de développer une dynamique permanente entre projet et stratégies opératives différenciées. Trois différentes approches qui peuvent contribuer à l’individuation de nouveaux scénarios opératifs possibles qui visent à gérer les conflits dans une optique complémentaire aux politiques de répression et de «tolérance zéro», qui, comme M.me Mazzucato nous montre «paraissent paradoxalement faibles sous le profil politique-criminel qui voudrait en être le point de force… On fait face à la maladroite tentative de donner une réponse immédiate et simple à un problème difficile…. Il s’agit à vrai dire d’une non-réponse qui montre beaucoup et fait peu ou rien» 10.

Un des nouveaux scénarios opératifs est constitué sûrement par la médiation, de plus en plus utilisée pour régler les conflits collectifs ou interpersonnels parce que les lois et les institutions publiques, malgré leur rôle unificateur et réguleteur, elles démontrent eux limites et elles difficultés à se adapter aux profonds changements des nos sociétés»11. Selon Faget «le succès de la médiation montre probablement que la société cherche une nouvelle manière de se gérer et de produire cohésion sociale…, et constitue une manière spécifique de gérer les sociétés complexes, ou ipercomplexes… composées par une multiplicité de mondes et de citoyennetés» 12. 9 Massimo Pavarini “L’administration local de la peur” – Carocci,2006, pag. 58 10 Claudia Mazzucato “La peine ‘en punition’.Une analyse critiquea sur règle et sanctions” - V&P,2006, pagg.31-32 11 Manifeste de Saragosse sur la sécurité urbaine et la democratie, novembre 2006, pag. 43 12 Jacques Faget “ Médiation et action publique: la dynamique du fluide”, en “Processi di mediazione e legami sociali”, a cura di Donatella Bramanti – Franco Angeli, 2006, pag. 9

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D’ici la nécessité d’une approche d’interaction, validée par les lignes de la politique de la citoyenneté, s’adressant surtout à une politique de proximité qui s’innerve dans le territoire, à la recherche de nouvelles modalités de réponse aux comportements anti-sociaux qui augmentent de plus en plus, à un modèle de réparation pour répondre à la micro criminalité et finalisée à l’amélioration de la communication et du lien des ressources pour rétablir la cohésion sociale et le changement social.

Même si on a la tendance à l’insérer dans une structure de sécurité, la médiation va au-delà des aspects qui la concernent parce que:

• elle rend concrètement possible une politique locale; si, d’un côté, elle répond à la violence et à la micro criminalité, symptômes socio-économiques variés, elle peut de l’autre accueillir le sentiment d’insécurité répandu, à travers une nouvelle élaboration du vécu émotionnel;

• un de rôles principaux qu’elle a, c’est de mettre l’accent sur l’aspect humanistique d’où peut venir une approche créative qui développe constamment de nouvelles réponses dont le but culturel est de «connaître et se reconnaître les uns les autres»

• elle contribue, en tant qu’instrument qui sauvegarde l’accès au droit, à garantir à tous «le droit à la sécurité» et la «sécurité des droits de la citoyenneté», indispensables pour construire des formes de vie en commun capables de limiter les problèmes de relation et les phénomènes de déviance, répandus et menaçants» 13 C’est ainsi que naît la conscience que l’activité de médiation peut se développer sous de différents

horizons: 1. à court terme: l’amélioration du contexte de la sécurité perçue à travers la résolution du/des

conflit/s interpersonnels et/ou sociaux; 2. à moyen terme: l’amélioration des sentiments de sécurité personnelle à travers des lieux d’écoute

pour réduire la peur et l’anxiété subjectives; 3. à long terme: le renforcement des liens sociaux et du sens d’appartenance à la communauté, à

travers l’encouragement de la participation active des citoyens. Ces horizons ne s’excluent pas; ils sont au contraire intrinsèquement connectés en partant d’un

espace qui est surtout subjectif pour arriver à un espace intersubjectif, dans une recherche et une confrontation quotidiennes à l’intérieur de ce que Baumann14 appelle avec une métaphore la «modernité liquide» qui a besoin de créer des politiques locales sur des processus de plus en plus dynamiques parce qu’ils dépendent d’une société qui est de plus en plus en mouvement à l’intérieur de confrontations dialectiques entre la logique de l’ordre et la logique du désordre.

Cette conscience nous accompagne dans la prévision que «comme le travail social traditionnel…, qui se fonde sur une dimension de vocation et sur le principe de la relation individuelle, l’évolution politique, économique et sociale aussi a besoin d’actions plus équipées du point de vue technique et plus décentrées du point de vue du territoire; des actions qui nécessitent des pratiques de partenariat et privilégient le travail avec les groupes. La déqualification du travail social «classique» sera de plus en plus évidente à cause de la gravité des situations d’exclusion qui rendent inefficaces les interventions classiques pour contraster la marginalité. Le fait que les tensions avec les jeunes, en particulier les jeunes d’origine étrangère, se multiplient, donne l’impression que les institutions éducatives soient inefficaces et pousse la recherche vers de nouvelles modalités d’intervention.»15. Les analyses et les hypothèse relatives au projet que sont ressorties au cours des travaux affrontés de groupe Euromédiation Secucité, elles ne peuvent pas etre quel point d’arrivée que nous nous aurions proposés d’atteindre quand nous nous rencontrames la première fois tous ensemble; mais elles peuvent et doivent (pensée partagé de tous les partners) devenir le point de départ pour l’approfondissement:

• des quelques lignes opérationnelles, ressorties de comparaison permanent, que n’est été pas possible approfondir parce que pas compris entre les objectifs déterminés pendant la programmation du travail de groupe;

13 Franco Prina “Le rôle des victimes dans les représentations et dans les politiques sur la sécurité urbaine a Turin”, en « L’administration local de la peur ”, a cura di Massimo Pavarini; Carocci,2006, pag. 298 14 Zygmunt Bauman “Modernité liquide”; Roma-Bari, Laterza, 2000 15 Jacques Faget “Mediazione e azione pubblica : la dinamica del fluido”, en “Processi di mediazione e legami sociali”, a cura di Donatella Bramanti – Franco Angeli, 2006, pag. 18.

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• des aspects à peine effleuré parce que ils sont ressortis de l’approfondissement du pensée et des savoirs acquis de la pratique quotidienne et comparés entre les opérateurs de référence de chaque ville partner;

• de comme renouveler la signification du terme «prévention» au dedans des politiques qu’elles garantissent le droit à le soin des liens sociaux;

• de comme transformer la médiation de culture et tecnique par la gestion des conflits en spécifiques lignes politiques.

Du point de vue du travail fait en partenariat avec les villes européennes d’Anger, Brussels, Liège et

Pierrefitte sur Seine, il serait opportun de: • continuer le travail de réflexion et d’élaboration du projet entamé au mois d’octobre dernier, sur la

base des indications politiques qui pourront découler des représentants institutionnels des villes partenaires qui participeront à la table ronde;

• garantir la présentation du travail entamé par le groupe Euromédiation Sécurité à la conférence de Saragosse organisée par le Forum Européen pour la Sécurité Urbaine, sur le thème «Sécurité, démocratie et ville » ;

• évaluer l’opportunité de proposer dans le domaine du programme URBACT II, la création d’un réseau européen autour du thème « les différents groupes de travail et les différents réseaux qui ont permis de réfléchir à propos de ce sujet, même si en partent d’horizon techniques/culturels différenciés (Securcity, Urbanitas, SUDC, ISN, etc…)

Du point de vue local, pour permettre de capitaliser ce qui a été approfondit et comparé au cours des mois précédents, le travail réalisé par le groupe de Turin propose:

• la création d’une coordination inter- divisionnaire permanente composée par les référents du Secteur des Politiques Juvéniles, de la Police de la Ville, du Secteur des Banlieues, du Secteur de la Famille de l’Assistance Sociale, de la Coordination Citoyenne Femme Victimes de Violence de l’Assessorat des Paires Opportunités, du Secteur Système éducatif et de certains représentants du privé social ; La coordination, à travers l’harmonisation des interactions opératives des seuls acteurs, institutionnels et non- institutionnels, devrait avoir le but de :

� harmoniser les politiques spécifiques pour la sécurité urbaine (prévues en ce qui concerne le prévention), pour une formation spécifique à la légalité construite « principalement à travers la relation interpersonnelle », pour une nouvelle réponse dans la gestion des conflits intergénérationnels, interculturels, communautaires, familiaux et pour une diffusion minutieuse de la culture de la médiation dans les écoles, les lieux d’agrégation, sur le territoire, etc... ;

� déterminer des parcours finalisés à l’harmonisation des différentes approches de prévention qui ne s’excluent pas mais qui ont besoin, au contraire, d’une stratégie globale en matière de sécurité urbaine ;

� vérifier la faisabilité d’une stratégie qui pourrait être appliquée à travers un organisme polyvalent plutôt que par des agences isolées;

• l’activation d’une coordination citoyenne des centres de médiation présents sur le territoire citoyen (Centro Mediazione de Turin; Spazi d’Intesa du Gruppo Abele; Centre de Médiation Familiale “Genitori Ancora”; l’Association Me.Dia.Re), afin de co-construire des politiques intégrées de médiation qui tiennent compte des différents domaines applicatifs (social, scolaire, familial, interculturel, pénal). Des politiques fondées sur l’interaction coordonnée des opérateurs publics (éducateurs, animateurs, enseignants, police de proximité, etc.…) et des opérateurs privés;

• le co-projet d’un Centre polyvalent de médiation (sociale, familiale, scolaire, pénale) qui aille au-delà de la sectorisation des expériences actuelles présentes sur le territoire turinois et qui respecte en même temps la particularité des différentes typologies de citoyens qui pourront y accéder (mineurs, jeunes, adultes, femmes, victimes, coupables…).