rapport sur l'ebquete
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RAPPORT SUR L'EBQUETE
EBTOXOLOGIQUE et EPIDEKIOLOGIQUE
sur l'EPIDEXIE de FIEVRE JAUNE du KALI.
4 au 14 octobre 1987.
Roger CORDELLIER
Dr, es-Sclences
C'jnsu Han tOMS.
\:! ~l~ecteur ae Recherche de l 'GRSiGM, Chef du LaboratOIre d'EntomologIe médlcale i1 InstItut Pllt.ur d' Cote d IVOIre, 01, BP, V-51, ABIDJAN 01, RépublIque de Côte d'Ivoire,Mr~S5~ st tuel l»: C.E,l'\,V" o BP 2.597 SOUAKE 01, R.C.l.
La mission effectuée du 4 au 14 octobre 1987, à la demande
du Directeur du Bureau de la Sous-Région n °1 de l'Organisation
Mondiale de la Santé à Bamako, avait pour objets:
- d'établir le mode de transmission du virus amaril afin de
déterminer le type de l'épidémie,
de donner les indications relatives à l'évolution
potentielle de l'épidémie,
- de faire, en consequence, les recommandations techniques
appropriées.
Le 14 octobre, les derniers re su l tats de l'enquête étant
acquis, je pouvais remettre au Dr. D. BARAKAMFITIYE, Directeur du
Bureau de la Sous-Région O. M. S.. un résumé du Rapport défini tif
ainsi que les recommandations en decoulant.
Cette mission a e t e menee a bien grâce à JOt les Docteurs
Issa DEGOGA et Philippe DEMBELE qui ont r éa i i ee une partie des
enquêtes sur le terrain.
Les travaux au Laboratoire n'ont éte possible que grâce au
concours de tous les responsables de l'OCP / VCU de Bamako qui ont
mis a ma disposition local et équipement.
1. INFORMATIONS RELATIVES A L'EPIDEKIE.
Lorsque l'enquête a débuté, nous avions déjà la certitude d'être en
présence d'une épidemie de Îiévre jaune; en effet, le Laboratoire des
Arbovirus de l'Institut Pasteur de Côte d'Ivoire, grâce à la technique
d'identification rapide des IgM antiamariles en Chrom-Elisa, avait pu
annoncer dès le 1er octobre que, sur les 7 sérums parvenus à l'I.P.C. I. le
29 septembre, 5 s'étaient révélés positifs <dont 4 fortement>.
2-
Le lundi 5 octobre, le Dr. L. BARRY, Directrice de Cabinet du
Ministre de la Santé Publique et des Affaires Soclales de la Republique du
KALI, me donnait toutes les informations alors en sa possession.
1: en ressortai t Que: - les premiers cas ave i eat eté signalés le 21
septembre par un infirmier en poste à Neguela, al' ouest de Kati. Cinq
personnes seraient décedées entre le 13 et le 20 septembre, à la sui te
d'ictères fébriles, dans le village de Guintako (ou Guendako i , où deux
malades auraient également eté atteints sans issue fatale,
- le 23 septembre, le Medecin Chef de Kita, à
environ 150 Km à l'ouest de Kati, signalait trois cas mortels "d'une
maladie mystérieuse" survenus à Badenko,
- le 29 septembre, les Medecins Chefs de Kati
et de Kita, ainsi que le Dr. Dramane SAIGARE, Directeur de la Division de
l'Epidémiologie et de la Prévention (D.E.P.), envisageaient très
sérieusement l'hypothèse d'une épidémie de fièvre jaune; la veille 7 serums
étaient expédiés à Abidjan (I.P.C. I.),
- le 29 septembre, également, la décision de
vacciner, sans attendre les confirmations biologiques, était prise et
opérationnelle des le lendemain dans le Cercle de Kati.
A la veille de cette enquête, an dénombrait 69 cas dont 37 décès,
depuis le 21 septembre, survenus en 14 jours.
Il est important. de rappeler que la der m ere épidemie de fièvre
jaune declarèe par le Mali avait justement affecte la reglorl s i t uee d
l'Ouest de Kati, en 1969. Quelques cas isolés duraient également étés
rapportes de cette même zone en 1974 (sans trace dans les Relevés
Epidémiologiques Hebdomadaires de l'O.M.S.).
2. DONNEES SUR LA ZONE EPIDEKIQUE.
2.1. Localisation.
L'épidémie semble s'être déclarée simultanement sur le terri taire
des Cercles de Kati et de Kita, appartenant respectivement aux Régions de
Koulikoro et de Kayes.
La zone touchée se situe à l'ouest de Bamako, sur un front
d'environ 180 Km dont le point le plus proche de Bamako se trouve à mains
3-
de 30 Km de ses 900000 habitants. La Zone Epidémique prend place entre 8'04
et 9·40 de longitude Ouest, et entre 12·35 et 13·30 de latitude nord.
2.2. Peuplement.
Toute cette région est peuplée essentiellement par deux éthnies du
groupe Xanding, Bambara à l'ouest et au nord du Cercle de Kati, Xalinké
pour le reste de la zone concernée par l'épidémie.
Steppes Sahélo-Saharienne
o
Domaine Saharien
12 °m
Sahel
Echtllt: 1:10 000 000
Fig. 1 - Le Mali. Zones de végétation et situation des villes citées.ag.: aandiagara (Pays Dogon.Mosalque FIS. : Mosalque forlt - savanes.
4-
Les densités de population sont relativement faibles, de 7 H/Km2 pour les
arrondissements ruraux, à 25 H/KnQ pour les arrondissements de Kati et de
Kita. Hors de ces deux agglomérations, la population qui est groupée en de
tre~ nombreux villages petits ou moyens, se disperse en période de culture
en une multitude de campements saisonniers installés à proximité immédiate
des terres en culture, parfois fort éloignés du village d'origine.
2.3. Caractéristiques physiques.
La majeure partie de la zone se trouve sur le Plateau Xanding dont
l'altitude est comprise entre 350 et 750 m. A l'ouest de Kita, la vallée du
Bakoye, ainsi que celle du Bafing, se situe autour de 250 m d'altitude. Il
s'agit essentiellement d'un plateau de grès dur du Précambrien supérieur.
La végétation correspond au domaine soudanien méridional i savanes
arborées ou arbustives, avec des galeries forestières souvent largement
interrompues bilatéralement. Le domai ne soudano-guinéen, ou savanes semi
humides sub-soudaniennes, ne se trouve pas à plus de 30/40 Km au sud de la
zone épidémique.
Le cl i mat est de type tropical, caractér isé par une saison des
pluies de 6 mois, débutant fin avril et se terminant fin octobre, avec son
acmé en août, et un volume moyen de précipitations compris entre 1200 et
1000 mm par an. Sans être globalement excédentaire, l a saison des pluies
:987 s'est trouvée decalee vers l'arriere saison, l'aCIDe se situant au mois
de septembre.
Les variations saisonnières de l' hygrométrie sont importantes. L' humidi té
relative en janvier peut se situer autour de 20%, et être en moyenne de 75
à 80% en août/septembre. L'harmattan, vent sec soufflant du nord- est, peut
commencer à se faire sentir dés la fin du mois d' octobre, et se manifester
jusqu'à la fin du mois de mars.
2.4. Communications.
Cette zone est traversée d'Est en Ouest par la ligne de Chemin de
Fer Bamako - Dakar. Cet axe est la seule voie de circulation réellement
permanente dans cette partie du Kali. Le réseau routier, difficile à
parcourir en saison sèche, est dans une large mesure impraticable en saison
des pluies. On note cependant que Kati est relié à Ba.Jmko par une route
bitumée.
5-
~ Chemin de fer___ Pistes
~ Routes revétues
Légende
IS0N.-.-._ Savanes Sub-Sahéliennes ._.-.-.-'-'- ~.-·~I~._._.-.~~-'~·~·
Savanes Soudaniennes
Aire d'origine des casdéclarés a Faladjié .
Savanes Soudaniennes
Savanes Soudaniennes
Mosaïque Forêt - Savanes
.Fig. 2 - Zone épidémique
_.-.._ ....... - . .............. -. ...... ~ ....._~.. --._. ..... -.. ....... '-._. -._ Siby
go tœ .-._.~.
6-
3. EBQUETES.
3.1. Observations.
Compte teüu des difficu~~es de circulation, de l'étendue et de la
di ver s i t e des secteurs où une enquête me semblait absolument nécessaire,
<Zones rurales de Kati et de Kita, et agglomération de Bamako), je n'aurais
pas ete en mesure de mener cette enquête à bien sans le précieux concours
de lOt les Docteurs Philippe DEIBELE et Issa DEGOGA, formés récemment à
l'Entomologie médicale au C.E.M.V .• de BDUAKE. Envoyés sur le terrain dès
le 1er octobre par la D.E.P., ils avaient pu, avant mon arrivée à
Bamako,proceder à la récolte de matériel entomologique dont l'examen nous a
été fort utile, en dépit de l'absence de normalisation de leur technique
d'échantillonnage.
Grâce aux moyens mis à ma disposition par le Dr. Dramane SAIGARE,
Directeur de la D,E.P., j'ai pu me rendre personnellement dans la région de
Kati, notamment à Faladjé et dans les villages et campements des environs.
Avec le Dr. Dégoga, nous avons pu proceder à un échanti llonnage
dans differents quartiers de la capitale, cependant que le Dr. Dembélé se
rendait dans le Cercle de lita pour effectuer, selon la méthodologie
appropr iee, une enquête entomo-èpidémi ologique prolongeant le travai l déj a
réalisé dans le Cercle de Kati.
3.2. Xéthodologie.
3.2.1. Principe et Difficultés.
Dan::; son principe la méthodologie de ce type d'enquête est simple
et immuable; il convient:
- 1. de savoir s'il existe un "elevage" d'A. aegypti dans les villages ou
les villes, et si oui de le quantifier,
- 2. de connai tre les espèces de moust iques qui piquent l' homme, entre 16
et 20 heures, dans les villages, à l'extérieur comme dans les habitations,
-3. de rechercher les moustiques au repos dans les habitations .
• Centre Unlversltalre de Formation en EntomologIe Médicale et ~étérinalre,
01 BP 2597, BOUAKE 01, République de COte d'Ivoire,
7-
L'experience a montré que, en matière de prospection des gi tes
prèimaginaux en milieu rural ou urbain, l'évaluation du risque amaril se
heur t a i t immanquablement au problème de l'appréciation de la notion de
"maison", concept dif f icile à normal iser en Afrique en raison de l'extrême
diversite de l'habitat et de la notion de "foyer".
En outre, les Indices traditionnels, même lorsqu'ils sont relativement
indépendants de la notion de maison, ne rendent pas compte de la notion de
productivité et restent difficilement interprétables au niveau des "seuils"
à partir desquels une épidémie pourrait ou ne pourrait pas se développer.
Les "seuils", pour l'Indice de Breteau, varient selon les auteurs.
Pour remédier à ces inconvénients, et tenter d'obtenir une image
plus proche de la réalité, nous préconisons le décompte séparé des
di f f e r ent e types de gi tes rencontrés (domestiques intérieurs, domestiques
extérieurs, péri-domestiques, et para-domestiques),l'emploi des Indices
nymphaux préconisés d' HERVY, ainsi que la prise en compte du nombre de
pièces et du nombre d'habitants dans les concessions prospectées.
3.2.1. Recherche des gites préi.aginaux
et des moustiques au repos dans les habitations.
On réalise un inventaire aussi exhaustif que possible de toutes les
pe t Ltes collections d'eau existant dans un secteur détermine des vi llages
ou villes choisies.
Toutes les informations relatives à ces gites potentiels sont notées <type,
usa8~. si"tuatlon, etc ... >, e"t des prelevements de larves et de nymphes sont
effectués, pour identification ulterieure, chaque fois qu'il s'en présente.
On releve également les caractéristiques de l'habitat <nombre et usage des
pieces, type de construvtion, etc ... ), et le nombre des occupants de chaque
"maison".
On s'informe également du comportement et des coutûmes en matière de
ge:~: ion . '.ne .1. eau.
Compte tenu des difficultés de circulation et de la nécessité de
diversifier les informations dans un court laps de temps, nous avons limité
nos investigations à 10 concessions par village (ou par quartier à Bamako).
La recolte des adultes de moustiques au repos jans les habitations
est effectuée dans le périmètre d'investigation préimaginale, de manière à
comparer les résultats de ces deux méthodes d'évaluation des populations de
moustiques.
8-
Lors de cette enquête, les premiers résultats obtenus ont permis de
réduire ces récoltes d'adultes au strict minimum.
3.2.2. Captures crépusculaires.
Classiquement les captures de moustiques sont effectuées dans les
villages, à l'intérieur comme à l'extérieur des habitations, entre 16 et 20
heures; ce sont des captures dites "crépusculaires", avec l'homme agissant
à la fois comme appât et comme captureur.
Pour cette enquête, après l'examen des premières récoltes effectuées avant
mon arrivée par MM. Dégoga et Dembélé, nous avons décidé d'étendre le champ
d'action de ces captures aux environs des villages ou des campements, et
notamment prés des points d'approvisionnement en eau.
Le choix des villages prospectés a été essentiellement dicté par le
fait que des cas de fièvre jaune y avaient été signalés, et les captures de
moustiques ont été effectuees de préférence dans des maisons ayant hébergé
des malades, même si, comme c'était le cas pour cette épidémie, ce facteur
devait se révéler sans aucune importance.
A BaDlflko, nous avons effectué un échantillonnage dans six
quartiers, en tenant compte de leur fonction socio-économique (résidentiel,
commercial, industriel, etc ... ), de leur degré d'urbanisation, et de
l'origine èthnique de leurs habitants.
4. RESULTATS.
4.1. Enquêtes préimaginales.
4.1.1. Dans les villages de la Zone épidémique.
Cinq villages ou campements ont été prospectés du 7 au 11 octobre,
trois dans le Cercle de Kati, autour de Faladjé <Koumala, lIalIaribougou,
Sana nko >, et deux dans le Cercle de lita, <Bendougouba, Traorela>.
Les résultats de ces prospections figurent dans le Tableau 1.
Pour les 5 villages concernés, soit 50 concessions, nous avons
recherché les gîtes potentiels d'A.aegypti dans 360 pièces et leur
environnement.
9-
iableau l, Prospectlon prélMaglnale dans lesCe rcles de Ka t i (A, B, C) et de Ki ta (D, E),
IKoumala ISananKo1
1
iMaman1 o'Jugou
iBenIdougouba1
ITraorela 1 TOTAUX1
1
Nb, de Concesslon 10 10 10 10 10 50
Nb, de Gîtes en eau 53 48 83 77 60 321InUrieurt:
- Canaris 23 30 39 39 8 139- Pots à médicaments 3 9 14 26- Divers 4 6 10
Extérieurs:- Canaris 20 7 27 47 102- Fûts l 1 2
Péri-dolestiques:- Abreuvoirs à poulets 2 2 7 5 2 18- Débns, déchets 6 10 6 2 24---------------------------------------------------------------------------------------------------------
iNb, de gîtes avec larves 3 6 4 1 9 6 28
,1
Gîtes avec A,a~gyptJ 0 0 0 1 01
Nb, de plèces
Nb, d'habitants
Nb, de cas de F,Jaune *Nb, de décès *
55
165
21
4
60
132
i6
54
152
8
o
114
2.04
73
184
21
o
i 360
897
67
6
*Sous toutes réserves, Renselgnements fournis par les vlliageois,
- 10-
321 gîtes potentiels (récipients contenant
6 récipients par concession (maximum 8,3;
Les renseignements obtenus des villageois permettent d'estimer à 900 le
nombre de personnes vivant dans ces 50 concessions, à 67 le nombre de cas
sans issue fatale, et à 6 le nombre de décès.
On a recensé au total,
de l'eau), soit en moyenne
mi ni mu m 4, 8) .
Pour 79%, il s'agit de récipients de stockage d'eau à usage
domestique, les plus fréquents <95%) étant des "canaris" d'une contenance
maximum d'environ 50 litres. Ces canaris sont des poteries cuites, ici de
forme sphérique dans la plupart des cas. On trouve ce type de récipients en
majorité à l'intérieur des habitations dans le Cercle de Kati <Ethnie
Bambara), et à l'extérieur dans le Cercle de Kita <Ethnie Kalinké).
- Les "pots à médicament" représentent 8% des gîtes potentiels
d'A.aegypti. Ce type de gîte n'a pas été trouvé en pays Kalinké.
- Les 13% restants sont des gî tes du type péri -domestiques, soit
des abreuvoirs à poulet, soit des débris ou des récipients abandonnés
autour des habitations.
Parmi les 321 gîtes potentiels, on n'a pu trouver que 28 récipients
(9%1 hébergeant des stades préimaginaux de Culicidés.
Lorsqu'on a procédé à l'identification des larves, il s'est avéré qu'un
seul récipient, un abreuvoir à poulet, hébergeait quelques larves
d'A. aegypti. On n'a pas trouvé de nymphes de cette espéce dans ce gi te ni
dans aucun autre.
L'Indice de Breteau, globalement établi pour ces 5 villages, est
donc egal à 2. Il est nul pour 4 villages sur 5.
L'Indice récipient est globalement égal à 0,3.
Il est clair que, aussi bien en pays Malinké qu'en pays Bambara, le
stockage de l'eau est aussi systématique que traditionnel, mais il ne
s'accompagne pas d'un élevage intensif d'A.aegypti. Ces observations sont
en parfaite conformite avec celles que rapporte PICHOI et coll.
L'absence d'A.aegypti, notamment dans les canaris, s'explique aisément
lorsqu'on sait que l'eau y est souvent renouvelée, et qu'avant le
remplissage les femmes procèdent, le plus souvent, à un nettoyage du
récipient.
- 11-
Les gi tes péri -domestiques, sur lesquels l' homme n'exerce aucun contrôle,
ne se sont pas révélés positifs. Ceci n'est pas surprenant, en l'absence
de souches domestiques locales du vecteur susceptibles de les coloniser. La
relative rareté de ces gîtes ainsi que la brièveté de la saison des pluies
jouent, en outre, en faveur de l'absence quasi totale d'A.aegypti en leur
sein.
C'est cependant dans un gite péri-domestique que l'unique
prelèvement positif a été effectué. On peut se demander, compte tenu de la
situation du gite, seul positif parmi 76 autres dont 66 canaris en principe
plus favorables à la présence d'A.aegypti, si ces quelques larves ne
pr ove na t en t pas d' une ponte de femelle sel vatique "égarée".
4.1.2. A Bamako.
Les prospections ont été effectuées dans 5 quartiers: Bankonl,
Laflabougou, Djikoroni <secteur non loti, habitat traditionnel>, Bazola, et
Ouolofobougou.
<Voir plan succinct de Bamako>.
Dans les 50 concessions et leur environnement, on n'a trouvé qu'un
nombre très restreint de gites préimaginaux hébergeant A.aegypti.
- A Bankoni, aucun gîte n'a pu être mis en évidence.
- Ouolofobougou semble être le quartier le plus "dangereux" avec 8
gîi;es positifs.
D'une maniere génerale, comme il fallait s'y attendre, ce sont les
gites péri-domestiques qui dominent (65%), mais les bonnes habitudes
relatives au nettoyage des récipients utilisés pour le stockage de l'eau
semblent se perdre dans le milieu urbain, 3 gîtes positifs sur 14 étant des
canaris.
Dans la très grande maj ori té des cas, chaque concession dispose
d'un puits, ce qui n'empêche pas le stockage de l'eau dans des canaris. Le
rafraichissement de l'eau est invoqué par les habitants pour expliquer la
persistance de ce comportement.
Il faut noter que la population installée à Djlkoronl, dans le
secteur non loti, vivant par conséquent sur le mode traditionnel, pratique
le stockage de l'eau sans élevage d'A.aegypti, et ne laisse pas s'accumuler
les "déchets" de civilisation, comme dans les quartiers urbanisés depuis
plus longtemps, surtout lorsqu'ils ont une activité industrielle ou com
merciale.
- 12-
Fig. 3 - Plan Succinct de Bamako.
Bankoni80z01aOjikoronila fi ahougOU
Duo10fobougou
Zone Industrielle
Sikasso
- 13-
4.2. Captures crépusculaires.
4.2.1. Dans les villages de la Zone épidémique.
Deux séries de captures crépusculaires, la première conduite avant
mon arrivée par Ph. Dembélé et 1. Dégoga dans le Cercle de Kati, et la
seconde à partir du 7.10.87 ,selon la procédure normalisée, ont été
conduites dans les villages des Cercles de Kati et de lita. Au cours de
cette seconde période, des sondages ont également été effectués dans divers
quartiers de Bamako, en tenant compte de leur structure socio-économique et
de leur degré d'urbanisation.
Pour l'ensemble de ces captures, il a eté récolté 501 femelles de
moustiques, parmi lesquelles on compte 335 femelles de vecteurs potentiels
de fièvre jaune, soit 67% des récoltes. <Voir Tableau Il.)
Six espèces de vecteurs de fièvre j aune ont été capturées; il
s'agit de: - Aedes (Stegomyia) aegypti
- A. (St ,» opok
- A. (St.) luteocephalus
- A. (St.) metal1icus
- A. (AediJ11Orphus) vittatus
- A. (Dl ceromyi si furcifer
A.furcifer est, de très loin, l'espèce la plus abondante avec 92%
du total des vecteurs de fièvre jaune, alors qu'A.aegypti représente moins
de 2% de cet ensemble.
L'agressivité moyenne/homme/soirée d'A.furcifer est de 6,7 piqûres,
alors que celle d'A.aegypti n'est que de 0,13.
En ce qui concerne la première serie de captures, effectuée dans
les villages de la région de Kati, hors des habitations, on note une agres
sivité moyenne d'A.furcifer égale à 6 piqûres/homme/soirée. Le maximum est
enregistre a BankOUDa, avec 10,5 piqûres/homme/soirée.
Pour les captures effectuées dans le Cercle de Kati au titre de la
2éme série, on ne peut malheureusement pas tenir compte des résul tats
obtenus à KouJlala en raison d'une forte plu ie survenue au moment de la
période critique de capture. A Sananko la série de captures effectuée dans
le village, à l'intérieur et à l'extérieur des habitations, ainsi que sur
le site du point d'approvisionnement en eau proche, lIIOntre qu'A. furclfer
pénètre dans le village jusqu'à l'intérieur des habitations.
- 14-
Tableau II, Captures crépusculaires dans les villagesde la Zone Epidémlque (Cercles de Kati et de Kita),
1 1 1 3 1 4 1 S 1 6 1 16 1 VPF J 1 D1V 1 T,G,
1ère série,Kati,
Koumala 33 36 22 58
Djibouroula 5 11 16 2 18
Ntéguédo 19 21 19 40
Bankouilla 21 21 21 42
6uendako 10 Il
2è1le séne,
Kati,
Kou~ala - Int,lalson
- Ext,uison
- POint d'eau
Sananko - Int,.alson
- Ext,llalSOn
- POint d'eau
Ki ta,
Bendougouba - Int,~alson
- Ext, luison
- POlnt d'eau
Traoreia - Int,~alson
- Ext,lIIison
- POint d'eau
2
55
37
4
9
18
6
26
24
2 1
56
41
4S
4
11
, '.. 1
9
26
24
2
3
2
4
2
3
6
14
23
13
28
27
TOTAUX 6 6 4 1 10 1 308 335 1 166 1 501
l:IJ,d~grpti; 3:IJ,opok; 4:IJ,JlJt~oc~phd1lJl; 5:IJ,lIitt4tlll; 6:1J,lIltd1JiclJl; 16:1J,flJrcif«,V,P,F,J, :Vecteurs Potentiels de Fi.vre Jaune; Div, :Autres esp.ces; T.6. :Total capturé.
- 15-
Le nombre de piqûres/homme/soirée atteint 22 au point d'eau. Il est de 18,5
dans le village à l'extérieur, et encore très élevédans les maisons, avec
une valeur de 13,8.
BieD que très atténue, probablement eD raison d'une moins grande abondance
de l'espèce, ce fait a également pu être observé dans le Cercle de Kita.
Les valeurs de l' agressi vité re levées au poi nt d'eau, dans le vi llage à
l'extérieur, et dans les naisons, pour les deux villages prospectés, sont
respectivement egaIes à 10,5; 8,75; et 1,25.
Les vecteurs de fièvre jaune selvatiques autres qu'A. furcifer ne
pOSSèdent pas ses facultés de sortie massive du biotope naturel. Leur
discréte présence dans les captures réalisées dans les villages ne peut
donc nous surprendre. On pouvait par contre s'attendre à récolter
d'importantes quantités d'A.luteocephalus sur les sites d'approvisionnement
en eau, ce qui n'a pas été le cas.
4.2.2. A BaJllalro.
Les captures crépusculaires ont été effectuées dans les 5 quartiers
ayant fait l'objet d'une recherche des gîtes préimaginaux, auxquels on a pu
ajouter la Zone Industrielle, au sud-est de la ville.
Les résultats sont consignés dans le Tableau III.
On a a i nsf pu capturer 388 femelles et 84 mâles de moustiques,
entre 16 et 20 heures, les 10, 11 et 12 octobre.
Les femelles d'A.aegypti sont au nombre de 214 (551. du t otal i , le
reste étant presque totalement des Culex (Culex) quinquefasciatus.
l' agressi vi té moyenne/homme/soirée <16-20h), est de 32,3 femelles
pour la totalite des especes, et de 17,8 pour A.aegypti.
Cette évaluation globale recouvre une réalité très hétérogène.
- Deux quartiers; <Djikoroni et Bozola) n'ont permis la capture d'aucun
A. aegypti.
Trois étaient infestés par cette espèce en moyenne à raison de
12,5piqûres/homme/soirée.
- La (Zone industrielle) pouvait être classé comme zone à haut risque de
contamination amarile, avec 69 piqûres/homme/soirée.
- 16-
Tableau III, - Captures crépusculaire,dans six quartiers de la ville de Bamako
Fellelles102 1 Div, 1 Total
l'lales1 102
1 T,G,1 Total 1
Bankoni 27 28 55 12 13 68
Zone Industrlelle 138 3 14 i 22 22 163
DJikoroni 82 82 9 9 91
La f iaboul~ou 25 10 35 3 3 38
Bozola 38 38 16 16 54
Quolofobougou 24 13 37 12 9 21 58
TOTAUX 214 171 3 388 38 46 84 1 472
1:t1,tlegyptJ; 102: C,qlJinqlJeftlscitltlJs; Div, :Autres espèces
Ces résultats appellent deux remarques:
- Le risque journalier de piqûre est probablement supérieur au nombre moyen
de femelles d'A. aegypti capturées entre 16 h et 20 h, car le rythme
journalier d' agressi vi te. surtout dans les quartiers à très forte densité
stégomyienne, n'est pas limitée à la période de référence choisie. Cette
sous-évaluation est sans conséquence sur l'appréciation du risque.
- Le fait de n'avoir capturé que 3 femelles d'Anopheles est uniquement dû a
l'horaire choisi pour les captures. La période choisie correspond au
maximum d'agressivité d'A.aegypti; il est très vraissemblable que le nombre
de femelles de C. quinquefasciatus capturées s'en soit également trouvé
diminué.
4.3. Récoltes de moustiques dans les habitations.
Compte tenu des résultats préliminaires obtenus avant IOCln arrivée
au :lali, il ne m'a pas semblé utile de pratiquer ce type d'investigations
de manière intensive dans les villages de la Zone épidémique.
- 17-
A BaDako, c'est le temps et le personnel qui nous ont manqué pour
effectuer ces investigations, toujours plus délicates en milieu urbain,
compte tenu de la méfiance, bien naturelle, des occupants à l'égard des
enquêteurs ..
Les deux vi llages prospectés avant le 6 octobre, <Itéguédo, le
3.10, et Guendako, le 5.10) ont permis de récol ter 46 femelles et 6 mAles
appartenant tous au genre Anopheles.
Une prospection effectuée, pour confirmation, le 7 octobre A Koumala n'a
fourni que 2 femelles de Culex et 2 femelles d'Anopheles.
Comme on peut le constater, aucun A. aegypti, mâle ou femelle, n'a
pu ë t r e mis en évidence dans les habitations des vi llages de la Zone
épidémique.
4.4. Exploitation virologique du matériel récolté.
Les moustiques adultes récoltés au cours de cette enquête ont été,
pour la plus grande part des femelles et pour les mAles de certaines
espèces, groupés en lots et placés en azote liquide pour une exploitation
ulterieure au Laboratoire des Arbovirus de l'Institut Pasteur de Côte
d'Ivoire.
Il a été constitué:
• 88 lots groupant 910 femelles, répartis de la manière suivante:
- A. aegypti, 5 lots, 6 femelles Zone épidémique
.. 12 .. 214 .. Bamako
- A. furcifer, 26 .. 308 .. Zone épidémique
- Autres VPFJ, 15 .. 21 .. Zone épidémique
- Aedes divers, 11 .. 128 .. Zone épidémique
- Culex, 8 " 171 .. Bamako
- Anophèles, 10 " 61 " Zone épidémique
" 1 .. 1 .. Bamako
• 10 lots groupant 90 mâles, repartis comme suit:
4 lots, 38 mâles- A. aegypti,
- Culex,
- Anopheles,
4
2
..
..46
6
Il
•
Bamako
Bamako
Zone épidémique
- 18-
La recherche de souches virales sur ce matériel a été effectué à la
fois par inoculation des broyats de lots de moustiques sur souriceaux
nouveau-nés, et sur cul tures cellulaires (C6/36).
A ce jour, 9 souches de virus amaril ont pu être isolées à partir
des cultures cellulaires (identification en immuno-fluorescence),
Huit de ces souches proviennent de lots de femelles d'A. furei fer (Zone
épidémique), la neuvième est issue d'un lot de femelles d'A.aegypti
capturées dans la Zone Industrielle de BaBako (Sud-Est de la ville).
Les isolements tentés par inoculation des broyats de moustiques aux
souriceaux nouveau-nés sont en cours. Cette technique est plus longue à
donner ses résultats, mais elle a l'avantage de ne pas être sélective et
orientée vers le seul virus amaril, permettant ainsi l'isolement et
l'identification de virus autres que celui de la fièvre jaune.
5. DISCUSSIOJr ET COJOŒJrTAIRES.
Les données entomologiques recueillies au cours de cette enqête,
bien que constituant la clé du puzzle épidémiologique, doivent être
confrontées aux informations relatives à l'évolution journalière de
l'épidémie et à la distri bution des cas (fournies par la D. E. P. ) 1 aux
résultats des analyses virologiques, et aux données d'archives, pour
conduire à une analyse correcte de la situation permettant de dégager les
solutions les plus appropriées pour:
- l, juguler l'épidémie,
- 2, prévenir toute résurgence ultérieure sur place,
- 3, éviter de nouvelles flambée9 épidémiques ailleurs
dans ce pays.
5.1. L'homme,l'eau, et A.aegypti.
Le nombre extrèmement réduit de gîtes préimaginaux trouvés dans les
villages, que ce soit en pays Malinké ou Bambara, les rares femelles
capturées dans les maisons ou à proximité immédiate, et l'absence d'adultes
au repos dans les habitations, font que de toute évidence, A. aegypti,
vecteur domestique assurant la transmission inter-humaine de la fièvre
jaune de type urbain, ne peut être incriminé dans cet épisode.
- 19-
On peut même penser à une origine selvatique des specimens
récoltés, même si leur développement s'est occasionnellement effectué dans
le village, compte tenu du fait que les gîtes utilisés pour le stockage de
l'eau à usage domestique sont très fréquemment vidés et souvent nettoyés,
et que les villages relativement bien entretenus ne recèlent que peu de
gî tes péri-domestiques saisonniers. L'entretien de colonies de la forme
domestique d'A.aegypti semble, dans ces conditions, bien aléatoire.
La situation à Bamako est extrêmement différente.
D'une manière générale, le risque de transmission inter-humaine du virus
amaril par A.aegypti est élevé si l'on se réfère au nombre moyen de piqûres
07,8) qu'un homme peut recevoir au cours d'une soirée. Dans un quartier,
la Zone Industrielle, où le nombre de gî tes péri -domestiques est
particulièrement important, nous avons relevé près de 70 piqûres
d'A.aegypti/homme/soirée. Il existe des quartiers où ce risque était nul au
moment de l'enquête. Ceci ne signifie pas qu'il en aille toujours ainsi,
notamment au début et au coeur de la saison des pluies.
Le nombre de gîtes potentiels relevé au cours des enquêtes a
toujours été faible, même dans le quartier de Ouolofobougou, et sans
commune mesure avec le nombre de piqûres/homme/soirée.
Cette absence de cohérence entre la production d'adultes et l'agressivité,
telles que nous avons pu les observer, provient probablement d'une
détection incomplète des gîtes potentiels d'A. aegypti. On peut admettre,
compte tenu des difficultés de la prospection en milieu urbain, que
quelques gîtes domestiques ou péri-domestiques aient pu échapper à
l'attention des enquêteurs, mais l'essentiel de cette distorsion est sans
doute le résultat de l'absence d'investigations dans les gîtes para
domestiques, en d'autres termes les gî tes naturels en situation urbaine
tels que les creux d'arbres, les aisselles de feuilles engainantes, et les
creux de rocher. Les arbres sont, heureusement, très abondants à Bamako
mais, dans lors d' une enquête d'urgence, il est impossible d'inventorier
les gîtes qu'ils recèlent, faute de temps et des moyens techniques d'accès
necessaires. Comme il ne saurait être question de supprimer les arbres, il
convient de vérifier cette hypothèse, et d'intégrer ce paramètre dans la
mise au point d'un protocole de campagne de lutte anti-moustique.
5.2. Les vecteurs selvatiques.
Les captures crépusculaires ont montré que plus de 98% des vecteurs
potentiels de fièvre jaune piquant l'homme dans la Zone Epidémique avaient
- 20-
une origine selvatique, et qu'A. Iurc i t er était la plus abondante d'entre
elles (93, 6~).
On note que, conformement à ce que l'on sait de son comportement,
A.furcifer pe nè tr-e , et pique l'homme, non seulement dans l'espace
villageois, mais également dans les habi taUons. Ce phénomène peut
atteindre une intensité très forte puisqu'à Sananko on a relevé près de 14
piqûres/homme/soirée à l'intérieur des maisons, contre 18,5 à l'extérieur,
et 22 dans le biotope d'origine (point d'eau sous formation boisée). Des
variations importantes du degré de pénétration dans les maisons peuvent
être observées; la densité de population de l'espèce et la situation de la
maison (en periphérie ou au coeur du village) sont les plus importantes et
les mieux connues, mais les caracteristiques de l' habi tat et du compor
tement humain doivent certainement jouer un rôle non négligeable.
On a relevé une agressivité moyenne d'A.furcifer égale à 5,4 dans
les maisons, et à 12 à l'extérieur, entre 16 et 20 heures.
Lors de l'épidémie du type urbain survenue en Côte d'Ivoire, dans
la région de X'Bahiakro, en 1982, l'agressivité d'A.aegypti n'à pas dépassé
6 piqûres/homme/soirée. C'est dire qu'A. t urci i er est ici largement assez
abondant pour assurer une transmission efficace du virus amaril à l'homme.
C'est donc cette espèce que nous avons mise en cause 1 en toute priori té,
comme vecteur majeur, sans exclure pour autant l'intervention possible des
autres espèces selvatiques.
Les premiers résultats fournis par le Laboratoire des Arbovirus de
l'I.P.C. I. ,- 8 souches de virus amaril isolées à partir de lots de femelles
d'A.furcifer, montrent le bien-fondé de cette estimation.
5.3. Les caractéristiques de l'épidémie.
Voir le Tableau IV.
Les cas mortels sont relevés, à quelques rares exceptions près,
dans la population jeune ( tranches des moins de 16 ans).
Rappelons que dans la région de Kati, une épidémie de fièvre jaune survenue
à la fin de 1969 avait entraîné en 1970 la vaccination de la population.
On a déja noté que les premiers cas ont été signalés, sensiblement
au même moment dans le Cercle de Kati et dans celui de I.1Ul, de villages
distants de plus de 100 Km.
- 21-
Pour diverses raisons et notamment:
- la situ~tion par rapport à BaDako,
- les plus grandes difficultés d'accès sur le terrain dans
la région de Kita,
- et la disparité des informations reçues,
l'évolution de la situation dans ces deux Cercles ne peut être, dans un
premier temps, analysée globalement.
Tableau IV, Evolution hebdomadaire du nOlbre de caset de décès dans les Cercles de Kati, Kita, et Kolokani
21,09 1 22127,09 , 28,09/4,10 1 5113,10
CAS hebdomadaires:
KATI
KITA
KOLOKANI
Totaux,
~:
KATI
KITA
KOLOKANI
Totaux,
i1
1 71
1
1
1
1
1 7I-I1
1 7,
1
1
1
1
1 7
5
5
5
5
1
1
1 71
1 61
1
1
1 131- -1
1
1 141
1 61
1
1
1 20
4
4
8
4
13
1
/
1 35 1511 14 91
1
1
1 49 241- - - - - -1
1
1 49 241
1 20 131
1
1
1 69 37
25 12
3 2
121 45
142 55
45 2,5
3 2
190 82
Dans chaque colonne, le preMier chlffre se rapporte au nombre de cas,et le second au nOMbre de lorts,En caractère gras, cas initiaux,*y comprls les deux malaces évacués sur Bamako, décédés au Pt Get au Lazaret,
Pour le Cercle de Kati, le taux de létalité pour la déclaration des
cas initiaux était de 71~, Les taux hebdomadaires tombent ensuite à 57%
pour la période du 22 au 27 septembre, puis à 43% pour la semaine du 28
septembre au 4 octobre, et enfin à 33% pour la période du 5 au Il octobre ..
- 22-
Pour le Cercle de lita, après un taux initial de 67%, on observe
également une décroissance, mais moins marquée, et du 5 au 10 octobre, il
est encore de 48%.
Le taux initial pour le Cercle de lolokani, touché par l'Epidémie à
partir du 12 octobre, est égal à 67%.
Les taux initiaux se situent toujours autour de 70%.
On observe que, parallèlement à la baisse des taux de létalité, le
nombre de cas déclarés augmente. Cette augmentation est forte pour le
Cercle de Kati et correspond à une chute importante du taux de létalité.
Plus faible dans le Cercle de lita, elle correspond à une moins forte
baisse du taux de létalité.
Ceci signif ie, très probablement, que l'épidémie ne croi t
pas, au cours de ces trois semaines, au rythme de l'augmentation du
nombre de cas déclarés, (le nombre réel de cas étant comme toujours
très supérieur au nombre de cas déclarés). Cette augmentation
reflète en grande partie une plus grande sensibilisation aux mani
festations amariles, non seulement des médecins et infirmiers, mais
également de la population.
De la même manière, les différences observées entre Kati et lita ne
peuvent être entièrement imputées à l'importance de la
transmission. Ici, c'est la facilité d'accès à un Centre de Santé
qui joue un rôle important.
La d i s t r i out rcn de= cas déclarés se révèle également t r e s
instructive,
Dans le Cercle de lita, 54 cas ont été déclarés en provenance de 21
villages, soit en moyenne 2,6 cas par localité.
Dans le Cercle de Kati, 142 cas proviennent de 16 localités, soit
B,9 cas par village.
Les 3 cas signalés le 12 octobre du Cercle de lolokani proviennent
de 3 villages.
Il y a donc, en première analyse, une différence de distribution
entre lita et lolokani d'une part, et Kati d'autre part. En réalité, il
n'en est rien. On note en effet que 92 cas sur 142 ont été signalés sous la
rubrique -Faladjé-, Dans cette localité, que nous avons visitée au cours de
l'enquête, existe un dispensaire très actif où se rendent les malades de
tous les villages sitUés dans un rayon de 25 à 30 Km. Ce dispensaire avait
déja déclaré 70 cas <dont 20 cas IOOrtels) le 7 octobre, et nous avons
appris sur place que ces cas provenaient de 21 villages ou campements
différents,
- 23-
Les cas mentionnés sous la rubrique ·Siby"' proviendraient d'au moins 3
localités différentes situées dans une zone d'accès difficile sur le
Plateau Kandi ng,
C'est donc de 37 localités, au moins, que proviennent les 142 cas du Cercle
de Kati, soit en moyenne 3,8 cas par village.
D'une manière générale, la dispersion et le nombre élevé de
locali tés touchées par l'épidémie, ainsi que le faible nombre de
cas dans chacune d'elles, sont des caractéristiques d'une
épidemisation excluant les vecteurs domestiques, comme les enquêtes
l'ont montré.
La différence entre le nombre moyen de cas observés a Kati <3,8) et
Kita <2,6) est suffisament importante pour que l'on puisse dire que
l'intensité de la transmission a été plus forte dans la région de
Kati. Le nombre plus élevé de cas déclarés dans ce Cercle, ne peut
que confirmer cette assertion. Cette transmission de moindre
intensité peut être attribuée à une densité vectorielle plus
faible, comme en témoigne le petit nombre <par rapport aux
observations faites à Kati) de femelles d'A. furcifer piquant dans
les villages autour de Kita.
L'extension de l'épidemie dans le sud du Cercle de Kolokani, sitUé
au nord du Cercle de Kati, ne s'est manifestée que le 12 octobre, avec une
faible intensité.
Les cas signales a Siby, du 9 au Il octobre, dans le sud du Cercle
de Kati, dans une zone physiquement "isolée", peuvent être également
considèrés comme une extension de l'aire épidémique initiale.
Ceci signifie que les populations de vecteurs de cette région se
sont trouvées au contact du virus amaril quinze à vingt jours plus
tôt, compte tenu de la duree du cycle d'amplification virale qui
intervient chez le moustique.
On voit que l'extension de l'aire épidémique se produit en taches
proches de l'aire initiale
5.4. Origine de l'épidémie.
Si l'on se réfère au schéma épidémiologique de la fièvre jaune en
Afrique de l'Ouest, on constate que les cas humains sont apparus à
l'extrème nord de l'aire d' endémici té, où le virus amaril ne circule que
- 24-
1o:-sq ue les c o nc ; t ions ecoiogiques lui sont e xc e pt i crine l Le merrt f avor a ol e s .
:..~ foyer na t ure l pe:":r.anellt du virus amar i l (epizootique ou e nz.oot i que ,
selon Les au t e urs : r e su Lte n t du pas'sage de slnge a singe, se situe dans
.les zones forestieres, la Ou les populations de moustiques peuvent assurer
.: anr.ee . ,,'etend vers Le nord
donnant l'image d'une
au cours de la saison des piuies, cette transmission selvatique est source
d'un nombre croissant de contaminations humaines. Ceci est dû, à la fois
a un accroissement du contact homme - vecteurs selvatiques, et a une baisse
du taux d'immunité naturelle chez l'homme. Cette zone d'extension du foyer
naturel a ete qualifiée de "Zone d'émergence".
En 1987,la zone d'émergence s'est étendue jusqu'à atteindre une
région Où se développent massivement des populations d'A. furcifer, une
espece de moustique par t i cu l ièrement eff iciente en mat ière de passage du
virus amaril de La circulation selvatique à l' homme. Les cas "d'émergence"
se sont alors produits en très grand nombre,
epi démie.
i l est probable que les conditions climatiques (abondance des precipi-
tations avec decalage vers l'arrière saison), qui ont permis au virus
amaril d'at:eindre une aire aussi septentrionale, ont egalement favorise la
pullulation d'A.furcifer.
On voit donc que cette "épidémie" repose sur l'existence, locale et
s.ai s.onru e r e , d' L::J.e t r e nsmi se i on i nte r r s i mie nne dont l'origine se
situe incontestablement dans les regions forestières ou pré
forestières, en Guinée.
5.5. Risques d'extension.
Le problème pose est d'une extrême importance puisque, en
effet, de cette évaluation découle l'etendue de la zone à protéger.
=r,~epeniaJ::l:!ent du tauzi' immunisation I,nature.lle ou vacc i na ï e : de
la population humaine, et du taux de sensibilite des populations de singes,
deux éléments sont a considérer:
Le virus amaril peut être transporté par ses trois hôtes
possibles; le moustique, le singe, l'homme.
- 25-
Les déplacements dûs aux moustiques sont faibles; par contre ils peuvent
atteindre 50 Km avec les singes de savane, et beaucoup plus avec l'homme.
- La dissemination du virus n'aura aucune suite épidémique dans la
zone d'arrivée si aucun vecteur, domestique ou selvatique, n'est en mesure
d'y assurer une transmission inter-humaine.
-- Bamako constitue la première aire d'extension possible.
L'homme est en effet en mesure d'y introduire le virus amaril avec d'autant
plus de facilité que la capitale, très proche de la zone épidémique,
constitue toujours un important pôle d'attraction, et que les axes de
communications (rail et route) y convergent. D'autre part, les populations
d'A.aegypti y sont largement suffisantes pour assurer la transmission
inter-humaine.
Compte tenu du comportement des divers groupes éthniques du Mali en
matière de stockage de l'eau, une épidémisation de type urbain, par
A.aegypti, n'est envisageable que dans les villages Dogon. Il convient en
outre de surve iller les centres urbai ns importants où les gi tes péri
domestiques peuvent éventuellement devenir assez nombreux pour qu'une telle
transmission soit possible.
Dans ces deux cas, le risque est considérablement attenué par l'éloignement
et les difficultés de communication.
-- L'extension peut également se produire dans les zones
limitrophes (d'extension variable) de la zone épidémique, sous réserve que
des vecteurs selvatiques y soient présents, et "efficaces".
Deux situations peuvent se présenter:
- 1. Les singes assurent la disséaination.
Tous les vecteurs selvatiques présents auront la possibilité de
s'infecter. Cette possibilité sera d'autant plus grande que le nombre de
singes virémiques sera plus élevé.
L'amplification virale sera importante, mais le risque d'epidemisation
dépendra essentiellement de la présence et de l'importance des populations
d'A.furcifer, seules capables d'aller piquer en assez grand nombre dans les
villages.
L'extension ne peut dépasser, au grand maximum, 50 Km en un seul mouvement,
compte tenu des dimensions du territoire d'une bande de Patas.
- 2. L'hOmE est responsable de la dissémination.
Seul, ou presque, A.furcifer aura la possibilité de piquer cet individu
virémique.
,.., ,-- L,O-
Le nombre de mousti ques suscepti bles de s' i nfecter sera re lati vement pl us
faible que dans le cas précédent, mais l'aire d'extension sera en théorie
sans limite.
Dans ces deux cas, il s'écoulera obligatoirement 15 à 20
jours \selon la température reoyenne) entre la contamination des moustiques
et la survenue de nouveaux cas humains.
On peut noter, à ce propos, que les cas signalés dans la zone de Siby et
dans le Cercle de Kolokani, l'ont été respectivement 18 et 21 jours après
la déclaration des cas initiaux, à moins de 50 Km des 1imi tes de l'aire
épidémique initiale.
La dynamique des populations de vecteurs sauvages, contrairement à
celle d'A. aegypt i , est sous l' é t r o i te dépendance des variations saison
nières de la pluviométrie. On sai t, d'une manière générale, qu'un mois
environ après l'acmé de la saison des pluies, ces populations sont à leur
maximum; elles décroissent ensuite rapidement pour s'éteindre vers la fin
du premier mois de la saison sèche. On sait également que plus on va vers
le nord, plus la saison des pluies est brève et se termine tôt. On sait
enfin que les différents vecteurs selvatiques de fièvre jaune ont une aire
de distribution en étroite relation avec les facteurs phyto-climatiques.
Les premiers cas ont été signales le
hauteur du 13éme degré (± 15 minutes) de latitude nord,
soudaniennes méridionales, la saison des pluies étant
s'achever.
21 septembre, à
dans les savanes
sur le point de
à plus forte raison à cette période de
de vecteurs selvatiques pour assurer la
On peut estimer que le 15 novembre, soit 8 semaines plus tard, le
maximum d'extension possible, notamment vers le nord, résultant du
déplacement de singes virémiques, pourrait atteindre 14·30 de latitude
nord.
Dans cette region, et
l'année, on ne trouvera plus
t raneniss i on du virus amaril.
L'introduction du virus par l'homme, au nord de cette latitude,
n'offrirait, en l'absence de populations domestiques d'A.aegyptl, qu'une
très infime possibilité de voir se développer un cycle épidémique. En
effet, A.furcifer n'y est, normalement, plus assez abondant pour assurer
une transmission inter-humaine, même à l'acmé de son développement.
On revient au cas de l'introduction par des singes virémiques si
l'on envisage une introduction plus précoce par l'homme dans la zone située
au sud des 14·30.
- 27-
On peut esti:Er avec une bonne -.rge de sécurité, en fonction des
contraintes écologiques évoquées, que l'extension naturelle de
l'aire épidéllique ne dépassera pas, vers le nord, le 15èDe degré
de latitude.
Les possibilités d'extension naturelle vers l'Est et l'Ouest
doivent également être examinées.
Le déplacement des bandes de singes se faisant de manière erratique
sans axe préférentiel, il n' est pas a priori impossible d'observer ce type
d t extens i on . La limitation de la circulation virale ne peut donc résulter
que ':'e celle qui affecte les mouvements des singes et des vecteurs. Il
semble, d'après les observations faites depuis dix ans en Côte d'Ivoire,
qu'un cours d'eau important constitue une barrière suffisante pour les uns
comme pour les autres.
On peut dire que: - le Iiger à l'Est, - et le Bafiog à l'Ouest,
vont constituer les liDites géographiques naturelles de l'épizootie
et donc de l'aire où se E.nifestent les cas hum.ins de fièvre jaune
du présent épisode.
Vers le sud, on ne peut véritablement pas parler Il d'extension".
Si la circulation virale inter-simienne n' y a pas été à l'origine d'une
manifestation de type épidémique, c'est très probablement que la densité de
population d'A.furcifer y est plus faible.
- Il n'est pas exclu que des cas humains isolés s'y soient produits sans
avoir été déclarés; on sait que la fièvre jaune, dont la symptomatologie
est souvent atypique, n'attire l'attention que lorsqu'elle se généralise.
- Compte tenu des modalités de déplacement du virus et du relatif isolement
géographique de certains secteurs du plateau Kanding, on peut également
s'attendre a voir apparaître plus ou moins tardivement des micro-foyers,
comme ce fût le cas autour de Siby, mais il est bien évident que, vers le
sud, il n'y a plus de risque majeur.
5.6. L'avenir de la Fièvre jaune au Aali.
Dix huit années se sont écoulées depuis la dernière épidémie sur
venue au Kali, justement dans la région de Kati, en 1969.
Peut-on alors dire que le même risque ne se reproduira pas avant
l'an 2005 ? ou qu'avant cette date aucune épidémie ne surviendra dans une
autre région?
- 28-
Malgré les progrès réalisés dans la connaissance de l'épidémiologie
de la fièvre j aune, il est encore bien difficile de faire des prévisions
rigoureuses en cette matière.
On peut toutefois tenter de cerner le risque dans le temps et dans
l'espace.
Dans cette région.
En 1959, on ne connaissait pas encore le rôle majeur que pouvait
jouer A.furcifer, mais il ne fait aucun doute qu'il ait été, comme en 1987,
le vecteur majeur de l'épidémisation.
Aucune population domestique d'A.aegypti n'ayant été mise en évidence, en
1987 comme en 1969, c'est bien le contact homme - vecteurs selvatiques qui
déterminera le risque d'apparition d'une nouvelle épidémie.
En l'absence d'une protection vaccinale régulièrement poursuivie,
on peut affirmer que d'autres épidémies du même type éclateront dans cette
région, lorsque les conditions écologiques favorables seront à nouveau
réunies.
La proximité d'une telle éventualité dépend: de l'existence, dans la
région, d'un nombre suffisant de singes sensibles capables d'amplifier la
circulation virale, et par conséquent de la densité simienne locale, - d'un
développement particulièrement massif des populations d'A. furclfer, lequel
dépend de la distribution et de l'abondance des précipitations, - aussi et
surtout de la circulation du virus "en aval", dans ce cas en Guinée, qui
est fonction de ces mêmes facteurs écologiques
CL 3dmet qu'une période de 5 ans (en moyenne> pourrait permettre la
reconsti tut 10n d'un stocit de singes sensi bles suf f isant pour assurer une
nouvelle circulation virale. Si une pluviométrie favorable (régulièrement
croissante et décalée vers l'arrière saison) survient alors, il conviendra
d'être particulièrement vigilant.
Si les singes sont très abondants, un risque supplémentaire et
illllllédiat existe, dû à l'existence d'une transmission verticale du virus
chez le moustique par la voie transovarienne. Ce mode de transmission a
pour effet de remettre du virus en circulation dès le début de la saison
des pluies, sur les lieux même où s'est éteinte l'épizootie, faute de
vecteurs. Le risque de voir se développer sur place un nouvel épisode aussi
meurtrier est faible, mais la progression précoce de l'épizootie vers les
zones périphériques, particulièrement vers le nord, est à redouter, pour
autant que les "bons" vecteurs y soient présents en quanti té suffisante.
En 1988, c'est donc surtout le pourtour de l'aire épidémique actuelle qu'il
conviendra de surveiller, et cela dès le mois de juillet.
- 29-
Dans les autres régions
Le fait que, dans le passé, aucune épidémie de fièvre jaune n'ait
été signalée dans d'autres régions du Kali, constitue un élément rassurant.
Le Pays Dogon, seule région présentant véritablement un risque
d'épidémisation du type urbain, est très éloigné de la zone d'émergence, et
d'un accès relativement difficile. Les moyens modernes de déplacement sont
toutefois un facteur d'aggravation du risque; il convient donc pour ne pas
le négliger, de procéder à une enquête de prévalence d'A.aegypti dans les
villages.
Les agglomérations importantes, notamment Sikasso ou Kayes, doivent
également faire l'objet d'une évaluation de ce type. L'urbanisation,
souvent incontrôlée, conduit souvent à l'oubli des "bonnes manières" en
matière de stockage de l'eau, et favorise la pullulation des gîtes péri
domestiques.
Il n'est pas interdit de penser que des épidémies ayant le
caractère de celles qui se sont développées dans la région de lati, en 1969
et 1987, surviennent dans le sud du Pays, au nord de la Côte d'Ivoire.
Pourtant ce rique semble faible, comme en témoigne l'absence d'épidémies
dans le passé, sans doute en raison de l'absence d'importantes populations
d'A. furcifer, et probablement aussi à cause d'une absence notable
d' importantes circulations sel vatiques de virus amaril dans l'Ouest de la
Côte d'Ivoire.
6. CONCLUSIONS.
Les observations que nous avons pu faire au cours de cette
enqête ont confirmé l'absence d'A. aegypti dans les villages de la zone
épidemique,à peuplement Bambara et Malinké.
La transmission du virus amaril ne pouvait alors être assurée que
par des vecteurs selvatiques et parmi ceux-ci, en priorité par A.furcifer.
Cette espèce, très anthropophile, peut franchir les espaces découverts qui
séparent les villages des faciès boisés où elle se développe naturellement.
Parvenues dans les village, les femelles piquent jusque à l'intérieur des
habitations. Toutes les tranches d'âge de la population sont exposées à ces
piqûres, notamment les plus jeunes, ce qui n'est pas le cas lorsque les
vecteurs sauvages piquent l'homme dans leur biotope.
- 30-
On a relevé de très forts taux d'agressivité d'A.furcifer, surtout
dans les villages du Cercle de Kati, et 8 souches de virus amaril ont été
isolées de lots de cette espèce provenant des Cercles de Kati et de Kita.
Chaque femelle, après avoir piqué, retourne dans son biotope selvatique
d'origine. Etant primatophile, donc apte à se nourrir aussi bien sur singe
que sur homme, elle ne reviendra pas nécessairement piquer dans un village
lors de ses repas suivants. Il en résulte que la transmission du virus A
l'homme ne s'effectue pas strictement sur un mode inter-humain.
Le terme d'-EpidéDie intermédiaire- est actuellement préconisé pour
de:oigner ce type de tra.nsmission; je lui préfère peraonne Li eme rrt celui de
-pseudo-épidémie-, cer il s'agit en réalité d'une série lIassive d'émer
gences. On a vu, d'ailleurs, que la zone concernée était située aux confins
septentrionaux de l'aire d'endéDdcité telle que la définit GerDBin.
Ces émergences se produisent à partir d'une circulation virale inter
simienne, et sont en conséquence caractérisées, comme nous avons pu
l'observer, - par une forte dispersion des villages atteints,
- par un nombre relativement faible de cas dans chacun d'eux,
- et par des déplacements constants et de faible amplitude des
lieux d'émergence.
Le nombre de cas signalés à l'ouest de la zone touchée <Kita) est
nettement plus faible qu'à l'Est <Kati), or nous avons observé des densités
de population d'A. furcifer beaucoup plus faibles et mo i r.s infectees à
l'uuest qu'a l'Est. Ces observations sont a rapprocher du fait qu'en 1969,
l'épidémie n'avait touché que la région de Kati.
Pratiquement, aucune intervention anti-vectorielle ne peut
être entreprise contres des moustiques selvatiques. La vaccination
est la seule arme efficace. Elle doit concerner l'ensemble de la
population de la zone épidémique et y être réalisée rapidement,
puis être étendue à la périphérie de cette zone, surtout vers le
nord, sans qu'il soit nécessaire de dépasser les liIites précisées
dans le § 1. 1 des -Reco..ndat Iona"
La situation de Bamako, à proximité de la zone épidémique,
et point de convergence des axes de communication la parcourant, imposait
qu'on y évalue les densités de population d'A.ae8J'ptl. Cette enquête a
montré que le risque d'épidéDde urbaine était élevé, bien qu'inégal pour
les différents quartiers de la ville.
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L'isolement, par le Laboratoire des Arbovirus de l'I.P.C.I., d'une souche
de virus amaril à partir d'un lot de femelles d'A.aegypti provenant de la
Zone Industrielle (69 piqûres/homme/soirée) est venu confirmer la réalité
de ce risque.
Théoriquement, on devrait donc procéder à une campagne de
démoustication dans la ville de Bamako et dans ses quartiers
périphériques. En pratique, l'urgence de la situation ne permettant
pas de rassembler tous les éléments d'information nécessaires à la
réussite d'une opération très onéreuse et toujours délicate à
:"'1..:331l eè', milieu urbain, il pe r a i t pr e r e r e oI.e de conce nt r e r les
moyens disponibles pour vacciner immédiatement la totalité des
habitants de l'agglOmération.
De l'examen des risques futurs, il ressort trois éléments:
1. Bon nombre d'informations nécessaires à une évaluation rigoureuse de ces
risques doivent être recherchées. Il s'agit au Xau, d'une part d'inven
torier, en saison sèche et en saison des pluies, les villes susceptibles
d'être le siège d'une épidéJlie urbaine, et d'autre part de réaliser, au
cours de la saison des pluies, des enquêtes visant à déterminer la nature
et l'importance des vecteurs potentiels sel vatiques de fièvre jaune dans
les régions méridionales du pays.
2. La connaissance des éléments du cycle épidémiologiques qui précèdent la
sur',crllJe de-::; e p i de mies est egalement ind::'spensable si l'on veut parvenir a
cette évaluation avec de faibles marges d'erreur. C'est donc en Guinée et
dans le Nord-Est de la Côte d'Ivoire qu'il faut aller chercher ces
informations.
3. Sans attendre ces renseignements, on peut considérer que l'introduction
et le maintien régulier de la vaccination amarile dans le Programme Elargi
de Vaccination (P.E.V), sur l'ensemble du territoire, et en priorité dans
les villes, le Pays Dogon et les régions méridionales du Kali, permettrait
de contrôler le risque amaril.
Le 15 novembre 1987
- 32-
RECOJOlAIIDATIOIlS.
Les Recommandations résultant des travaux effectués au
cours de cette mission ont été remises au Directeur de la
Sous-Région l de l'Organisation Mondiale de la Santé, avant
mon départ de Bamako, dès le mercredi 14 octobre 1987.
1. Dans l'immédiat.
1. 1. Vacciner l'ensemble de la population sous menace amarile, à savoir:
- la région actuellement touchée, dans les Cercles de Kati et de
Kita,
- toute la périphérie de cette région, depuis la frontière avec la
République de Guinée, au Sud, jusqu'au quinzième parallèle, au
Nord, et du liger à l'Est, jusqu'au Bafing et une ligne joignant
Bafoulabé à Sandaré à l'Ouest.
- la ville de Bamako, sur les deux ri 'les du liger, et pour une
sécurité maximale. la zone de 50 Km de rayon centrée sur Bamako, à
l'Est et au Sud-Est.
1.2. Opérer id demoust ication systématique de toutes les formations
sani taires sous menace amarile 1 y compris et surtout celles de
Bamako.
1. 3. Mettre à la disposition de ces formations sanitaires un nombre
suffisant de moustiquaires pour y placer tous les malades suspects.
1. 4. Sensibiliser et Informer tous les personnels de ces formations
sanitaires en ce qui concerne la symptomatologie, souvent atypique,
de la fièvre jaune.
1. 5. Recommander que, sous aucun prétexte, il ne soit procédé à
l'évacuation sanitaire des suspects, et de tout ictère fébrile en
général i ceci devant être particulièrement strict pour les
évacuations à destination de Bamako.
- 33-
1.6. Eviter de procéder à la lutte anti-vectorielle (hors des formations
sani taires), aussi bien dans la zone épidémique, où elle serait
inadéquate, que dans la ville de Bamako, où eile serait inefficace
faute de pouvoir être exécutée sur des bases s~ffisantes de
connaissances des peuplements culicidiens et de leur sensibilité
aux insecticides.
2. A terme.
2.1. Introduire la vaccination contre la fièvre jaune dans le Programme
Elargi de Vaccination, en priori té absolue dans les régions
frontalières, au sud du 14ème parallèle, - et dans la mesure des
moyens disponibles, sur toute l'étendue du territoire.
2.2. Surveiller attentivement la Zone Epidémique, du Sénégal jusqu'au
Burkina Faso, dès le début de la saison des pluies 1988, afin de
détecter très précocément d'éventuels cas isolés de fièvre jaune.
2.3. Constituer, et diffuser auprès de taus les médecins et infirmiers,
sur toute l'étendue du territoire, un dossier simple mais complet
relatif à tous les aspects de la fièvre jaune, en insistant sur la
var i ab i l i t é de :3. symptomatologie de cette ma:a-iie, et en y
incluant les données épidémiologiques modernes notamment en ce qui
concerne les zones et les périodes à risque.
2.4. S'informer auprès des spécialistes de l'Institut Pasteur de Dakar,
par le canal de la Représentation de l'O. X. S. au Sénégal, sur
l'existence d'une quelconque activité amarile en 1987 dans la
région de Kédougou, au Sénégal Oriental.
2.5. Informer les Autorités Guinéennes du risque amaril potentiel
existant sur leur frontière Nord avec le Kali. Ce risque pourait se
manifester ou s'être déja concrétisé par un certain nombre de cas
isolés et dispersés.
2.6. Conseiller à ces mêmes Autorités la vaccination de la zone lord du
Pays, au moins pour la tranche de population à haut risque (moins
de 20 ans).
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2.7. Réal iser en République de Guinée une Etude Epidémiologique
approfondie.
A cet effet, l'O.K.S. pourrait proposer le déplacement d'un
Consultant pour: - 1. Discuter avec les Responsables Guinéens de la
Santé des modalités d'action pouvant éclairer puis résoudre le
problème de la fièvre jaune en Guinée, compte tenu de ses
implications probables sur la situation amarile des Etats situés au
nord,
- 2. Effectuer, lors du début de la prochaine
saison des pluies, une enquête entomo-épidémiologique et
virologique, selon un transect allant de la zone pré-forestière
jusqu'à la frontière avec le Kali, en tenant compte de la
composante "montagnarde" susceptible de modifier l'écologie des
vecteurs potentiels de fièvre jaune dans cette région.
Roger CORDELLIER
le 14 octobre 1987.
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