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DE MÉMOIRE DE MÉDECIN 1966 LA REVUE DU PRATICIEN / 2004 : 54 Pour les anciens égyptiens, la maladie était la conséquence d’un désordre lié aux divinités, mais cette conception « magique » n’empêcha pas l’émergence d’un savoir plus rationnel et la constitution d’un corps médical bien organisé et réputé, qui créa les premiers médecins spécialistes. par Bernard Ziskind, Bruno Halioua L a médecine égyptienne est née il y a plus de 5000 ans, sur les bords du Nil, dans un contexte religieux et fortement impré- gné de magie. La religion, la magie et la médecine étaient à l’origine étroitement intriquées, car elles reposaient sur les mêmes croyances. Toute maladie, toute souffrance était pour les Égyptiens la manifestation néfaste d’une divinité ou d’un démon. Les médecins ont donc d’abord combattu ce qu’ils considéraient comme les causes de la maladie, à l’aide d’incantations et de formules magiques progressivement associées à des remèdes. L’aspect rationnel de la médecine est apparu au fur et à mesure que leur expérience confirmait l’efficacité des recettes médicales sur certaines maladies. 1 Pharaon, incarnation d’Horus sur terre, chargé de maintenir l’ordre du monde et de combattre tous les maux, était aidé dans cette tâche par un ensemble de médecins et d’érudits, dont un « grand des médecins du palais », véritable ministre de la Santé, assimilable à Thot. L’organisation du corps médical égyptien est connue depuis l’Antiquité grâce aux relations de voyage des auteurs classiques comme Hérodote, Diodore de Sicile ou Pline l’Ancien. Ce n’est qu’à partir du début du XIX e siècle que les fouilles archéologiques, et surtout le décryptage des hié- roglyphes par Champollion, ont permis aux égyp- tologues de répertorier les noms de près de 150 médecins, grâce à leurs statues, à leurs stèles funé- raires, aux murs des tombes et des temples, aux papyrus médicaux, aux ostraca, et aux archives diplomatiques. À la lumière des récentes découvertes égypto- logiques et de l’affinement de la lecture des textes égyptiens, la structure du corps médical de l’Égypte pharaonique est aujourd’hui mieux cernée. TROIS CATÉGORIES DE SOIGNANTS Le papyrus d’Ebers précise les corps de métier qui avaient en charge la santé des Égyptiens : «… Tout sounou, tout prêtre-ouâb de Sekhmet, tout conju- rateur de Serket qui examine (met les doigts sur)… » Le sounou Le hiéroglyphe « sounou » désigne celui qui exer- çait des fonctions de médecin, littéralement « celui de ceux qui sont malades » (fig. 1). Le sounou désignait le médecin laïc par excellence, dans une conception semblable à celle d’aujourd’hui. Organisation et structure du corps médical dans l’Égypte ancienne TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN

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Doctors in Ancient Egypt

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D E M É M O I R E D E M É D E C I N

1966 L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4

Pour les anciens égyptiens, la maladie était la conséquence d’un désordre lié aux divinités,mais cette conception « magique » n’empêcha pas l’émergence d’un savoir plus rationnelet la constitution d’un corps médical bien organisé et réputé, qui créa les premiersmédecins spécialistes.

par Bernard Ziskind, Bruno Halioua

La médecine égyptienne est née il y a plusde 5000 ans, sur les bords du Nil, dansun contexte religieux et fortement impré-gné de magie. La religion, la magie et lamédecine étaient à l’origine étroitement

intriquées, car elles reposaient sur les mêmescroyances. Toute maladie, toute souffrance étaitpour les Égyptiens la manifestation néfaste d’unedivinité ou d’un démon. Les médecins ont doncd’abord combattu ce qu’ils considéraient commeles causes de la maladie, à l’aide d’incantations etde formules magiques progressivement associéesà des remèdes. L’aspect rationnel de la médecineest apparu au fur et à mesure que leur expérienceconfirmait l’efficacité des recettes médicales surcertaines maladies.1Pharaon, incarnation d’Horus sur terre, chargé

de maintenir l’ordre du monde et de combattretous les maux, était aidé dans cette tâche par unensemble demédecins et d’érudits, dont un « granddes médecins du palais », véritable ministre de laSanté, assimilable à Thot.L’organisation du corps médical égyptien est

connue depuis l’Antiquité grâce aux relations devoyage des auteurs classiques comme Hérodote,Diodore de Sicile ou Pline l’Ancien. Ce n’est qu’à

partir du début du XIXe siècle que les fouillesarchéologiques, et surtout le décryptage des hié-roglyphes par Champollion, ont permis aux égyp-tologues de répertorier les noms de près de 150médecins, grâce à leurs statues, à leurs stèles funé-raires, aux murs des tombes et des temples, auxpapyrus médicaux, aux ostraca, et aux archivesdiplomatiques.À la lumière des récentes découvertes égypto-

logiques et de l’affinement de la lecture des texteségyptiens, la structure du corpsmédical de l’Égyptepharaonique est aujourd’hui mieux cernée.

T R O I S C AT É G O R I E S D E S O I G N A N T S

Le papyrus d’Ebers précise les corps de métierqui avaient en charge la santé des Égyptiens :«…Tout sounou, tout prêtre-ouâbdeSekhmet, tout conju-rateur de Serket qui examine (met les doigts sur)… »

Le sounouLehiéroglyphe « sounou » désigne celui qui exer-

çait des fonctions demédecin, littéralement « celuide ceux qui sont malades » (fig. 1). Le sounoudésignait le médecin laïc par excellence, dans uneconception semblable à celle d’aujourd’hui.

Organisation et structuredu corps médical dans

l’Égypte ancienne

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D E M É M O I R E D E M É D E C I N / LE CORPS MÉDICAL DANS L’ÉGYPTE ANCIENNE

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Le prêtre-ouâb de Sekhmet

Le prêtre de Sekhmet avait l’aptitude de contrô-ler les débordements de la redoutable déesselionne, responsable des pandémies, et ainsi d’ai-der à guérir les malades. Cette intervention quise déroulait au cours d’un cérémonial religieuxayant un effet médical permet de l’assimiler à unmédecin. Les soins vétérinaires faisaient égalementpartie de leurs compétences.

Les conjurateurs de Serket

Les conjurateurs de Serket étaient des magi-ciens dévoués à la redoutée déesse scorpion. Onleur attribuait le pouvoir de prévenir, mais ausside guérir, les morsures et piqûres des animauxvenimeux grâce à des remèdes et surtout à des for-mules magiques.Cependant, il n’est pas toujours évident de dis-

tinguer le sounoudes autres soignants, d’autant quecertains notables cumulaient les fonctions.Ainsi, deux importants personnages de la

VIedynastie, Khoui et Irenakhti II, furent à la foissounou et conjurateur de Serket du palais. Sous laXIIe dynastie, Herychefnakht fut directeur des prê-tres de Sekhmet, directeur des magiciens et granddes médecins du roi.Sur une stèle funéraire datée du règnedeThout-

mosis Ier, on peut lire : « Le prêtre-ouâb [de Sekh-met], Nefer dit : je suis un médecin véritable, habilede ses doigts… auscultant les maladies du corps. »Une autre datant d’Amenemhat III, comporte lenom de Nedjemou-Seneb « directeur des prêtres-ouâb de Sekhmet et grand des médecins ».

U N E O R G A N I S AT I O N D E T Y P E P Y R A M I D A L

Le corps médical était régi par une bureaucra-tie dans laquelle le médecin fonctionnaire pre-nait souvent le pas sur le médecin soignant.La hiérarchie du corpsmédical, à l’instar de l’or-

ganisation administrative de l’État pharaonique,comportait plusieurs échelons. Les simples sou-nou étaient les médecins de base. Ils appartenaientà la classe moyenne, et sont restés pour la plupartanonymes. Ils avaient en grande majorité le sta-tut de fonctionnaire. Ils exerçaient en ville oudans les villages d’ouvriers, dans les grands domai-nes agricoles, royaux, sacerdotaux ou funéraires,sous l’autorité d’un « maître médecin ». Ils accom-pagnaient les armées en campagne et les expédi-tions minières lointaines comme en témoignentstèles et graffiti. Aux échelons supérieurs, les « direc-teurs des médecins » et les « grands des méde-cins », nommés par le roi, disposaient d’un pou-voir administratif sur un groupe de médecins oudans une zone géographique déterminée.2

Dès les premières dynasties, le palais royal a cen-tralisé les activités médicales. Un corps de méde-cins lui était directement attaché, pour veiller nonseulement à la santé du pharaon et de sa famille,mais aussi à celle de ses courtisans et de leursserviteurs. Ces médecins palatins étaient recrutésparmi les plus brillants du royaume. Les titresportés successivement par Nesemnaou etNiankhkhnoum-Memi qui furent d’abord « maî-tres médecins » (titre extrapalatin) puis « méde-cins du palais » confirment leur promotion.La hiérarchie du corps médical palatin com-

portait, au premier échelon, le «médecindupalais »,sous l’autorité directe des « maîtres médecins dupalais », qui devait obéissance aux « directeursdes médecins du palais ». Les « grands des méde-cins du palais » représentaient l’aboutissementd’une carrière ; l’un d’entre eux assurait les soinsde Pharaon, comme Ni-ânkh-Sekhmet, médecinde Sahourê vers 2400 av. J.-C., ou Khoui sous lesrègnes de Téti, puis de Pépi Ier, vers 2300 av. J.-C.Le titre de « grand des médecins du Nord et duSud » leur était parfois attribué, et leur donnaitautorité sur l’ensemble des médecins d’Égypte.Les divers monuments funéraires des notables

du corpsmédical comportent des informations inté-ressantes sur l’évolution de leur progression dansla hiérarchie médicale, mais surtout au sein dupalais royal. Ainsi Iry, Niankhrê etKhnoumankhouont été successivement « médecins du palais »puis « maîtres médecins du palais ». Nesemnaoua été nommé successivement « maître médecin »puis « médecin du palais » puis « maître médecindu palais » et enfin « médecin du roi ».La hiérarchie médicale s’est simplifiée au cours

du Moyen Empire. Les sounou ont été désormaisdirigés par des « directeurs des médecins » et des« grands des médecins ». Parmi les « grands desmédecins du palais », un certain Herychefnakht aété un haut fonctionnaire de la XIIe dynastie. AuNouvel Empire, les « médecins du palais » étaientdirigés par le « grand des médecins du maîtredes deux terres » comme le fut Iouti. À la Basse

Le hiéroglyphe« sounou » est composédu trilitère swn (soun)la flèche et du bilitère nw(nou) le petit pot,le déterminatif, un hommeaccroupi ne se prononcepas mais confirme qu’ils’agit d’un homme enl’occurrence un médecin.

Figure 1

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1968 L A R E V U E D U P R A T I C I E N / 2 0 0 4 : 5 4

D E M É M O I R E D E M É D E C I N

Époque, les titres palatins réapparaissent dansleur diversité. Bakenkhonson « grand des méde-cins du maître des deux terres » vécut à Thèbesà la troisième Période Intermédiaire.Peseshet fut sounouette (féminin de sounou) et

« directrice des femmes médecins » (fig. 2).3 Sonnom et ses titres figurent sur une stèle fausseporte dans une tombe de la IVe dynastie, à Gui-zèh. Elle a dirigé des femmes habilitées à soignerles dames de la cour et en particulier celles de lafamille royale. Une femme médecin n’a riend’étonnant quand on connaît le statut privilégié dela femme égyptienne dans l’Antiquité. L’existencede deux autres femmes médecins a pu être confir-mée à l’époque ptolémaïque.4

U N E M É D E C I N E S P É C I A L I S É E

Le médecin spécialiste est une création égyp-tienne si l’on en croit Hérodote, qui a visitél’Égypte vers 530 av. J.-C.« La Médecine est, chez eux, divisée en spécialités :

chaquemédecin soigne unemaladie et une seule…Aussile pays est-il plein de médecins, spécialistes des yeux,de la tête, des dents, du ventre, ou encore des maladiesd’origines incertaines. »On peut penser qu’il a géné-ralisé à l’ensemble des médecins ce qui était habi-tuel au sein du palais royal, car aucun spécialisteextrapalatin ne nous est connu. La spécialisationdes médecins égyptiens se retrouve bien aprèsl’époque pharaonique. «… Il vint alors d’Égypte,mère d’affections semblables, desmédecins qui n’avaientque cette spécialité… » (Pline).

Un certain nombre de spécialistes égyptiensnous sont connus grâce à leurs monumentsfunéraires.

Le « médecin des deux yeux »

Les ophtalmologues portaient le titre de « sou-nou-irty ». Un certain nombre de ces spécialistesont marqué leur époque : Ouaï Ier, Irenakhti etNeferthes dans l’Ancien Empire; Houy, intendantet grand des médecins des yeux du palais au Nou-vel Empire; Ouaï II et Padihor à la Basse Époque.Cyrus, roi de Perse, s’était attaché un ophtalmo-logue égyptien pour traiter ses ophtalmies.

Le « médecin du ventre »

C’est le « sounou- shet ». Il disposait d’une dou-ble spécialité puisque shet signifie le ventre maisaussi l’utérus en langage populaire. Deux méde-cins portaient le titre de « sounou shet » dans l’An-cien Empire : Irenakhti II et d’Ouaï II, déjà citéscommemédecins des yeux. Le papyrus Ebers (nos4à 19) traite « desmaux qui sont à l’intérieur du corps ».

Le « berger de l’anus »

Ce spécialiste possédait des connaissances par-ticulières dans la prescription et l’administrationdes remèdes par voie rectale. Pour Hérodote, lesÉgyptiens « s’appliquent à s’assurer la santé à l’aidede vomitifs et de lavements »; selonDiodore de Sicile:« pour prévenir les maladies, les Égyptiens traitent lecorps par lavements… ». Khoui et Irenakhti I ontexercé, pendant la VIe dynastie, la fonction de « ber-ger de l’anus ». L’intérêt des médecins égyptienspour les maladies ano-rectales est confirmé par lepapyrus Chester Beatty VI entièrement consacréà cette pathologie.

Le « médecin des maladiesincertaines »

Hérodote dénomme ainsi une sorte d’interniste.C’est un spécialiste particulier nommé aussi « celuiqui connaît les organes du corps humain cachésaux yeux », c’est-à-dire les organes internes. Nousconnaissons deux médecins spécialisés dans cemode d’exercice : Khoui portant le titre de « celuiqui connaît les organes du corps humain cachésaux yeux » et Iry « celui qui connaît les liquidesdissous dans les humeurs ».

« Celui qui traite les dents »

Le dentiste est « celui qui s’occupe des dents »(ibhy) ou « celui qui traite les dents » (iry ibh). Ladifférence entre ces deux intitulés n’a pas été éta-blie: Menkaouré-Ankh et Neferites sont deux iryibh de l’Ancien Empire. Deux autres dentistes ontporté le titre émérite de « grand des dentistes ».Il s’agit deHésy-Ré qui fut aussi « grand desméde-

Imhotep: de la réalité au mytheNé vers —2800 d’un père architecte, il devint

un haut dignitaire de Djoser, premier roi de laIIIe dynastie, comme le mentionne sa titulature:supérieur des prêtres ritualistes, astrologue,magicien, scribe, architecte et surtout grand vizirde son pharaon. Il a imaginé et bâti à son intention,à Saqqarah, un remarquable complexe funéraireavec la célèbre pyramide à degrés, premier édificeen pierre de l’humanité, qu’il a signé de son titre de« charpentier de Nekhen ».

Bien que n’ayant jamais porté le titre de médecin,il a bénéficié après sa mort d’un culte en tant queguérisseur dont la mémoire s’est pérennisée puisamplifiée à l’époque saïte (vers —600) pour devenirun véritable dieu sous les Lagides (vers —170).Des temples lui furent dédiés comme l’Asklépiéionde Saqqarah, ainsi nommé par les Grecs qui l’ontassimilé à leur dieu de la médecine, Asclépios.

Imhotep :« La fusionde la médecinemythologique,sacerdotaleet praticienne »(Bariéti et Coury).

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Peseshet,la « directrice desfemmes médecins ».

Figure 2

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D E M É M O I R E D E M É D E C I N / LE CORPS MÉDICAL DANS L’ÉGYPTE ANCIENNE

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cins » (fig. 3). Cehaut fonctionnaire deDjoser (der-nier pharaon de la IIIe dynastie), contemporain dumythique Imhotep, est le plus ancien porteur dutitre de sounou et le premier dentiste connude l’his-toire.Khoui, autre « granddesdentistes » était aussi,nous l’avons vu « berger de l’anus »!Deux dentistes attachés au palais royal portaient

le titre de « grand des dentistes du palais ». Ils’agit de Ny-Ankh-Sekhmet, « grand des méde-cins du palais » sous la Ve dynastie, et de Psam-metique-Seneb « grand des médecins » sous laXXVIe dynastie.

« L’interprète des urines »

Irenakhti portait le titre d’« interprète desliquides », terme qui apparaît dans la Netnetet etpeut être traduit par la « vessie ». Ce médecin dupalais de Pépi Ier serait ainsi l’« interprète des uri-nes dans la vessie », donc un des pionniers del’urologie ! Le papyrus Ebers comporte un traitédes affections urinaires (nos 261 à 283).

La « meilleure main du palais »

Ce titre de « er djeret per Âa » a été porté parKhoui, médecin des rois Téti et Pépi Ier. Il sembletémoigner de sa grande habileté manuelle pourreconnaître les maux dont souffrent ses patients.Cette qualité de bon clinicien est une référencedont se targuent Nefer « médecin habile de sesdoigts » et Herychefnakht « expert en l’art d’exa-miner avec la main ».

« L’homme au cautère »

Si le titre de chirurgien n’est pas confirmé, ilest rapporté l’existence du « sa hemen » traduitpar « l’homme au cautère » dans une partie dupapyrus Ebers traitant des tumeurs: « Traite-le dela même façon qu’un patient de l’homme au cautère ».Est-ce l’ancêtre du chirurgien?

Les sages-femmes

Les sages-femmes géraient la plupart des accou-chements, qui se déroulaient en position accrou-pie, sur un siège obstétrical, le « meskhenet »,simplement composé de deux briques dès laVIedynastie, avant d’être plus élaboré. Des méde-cins obstétriciens ne sont nulle part attestés maisplusieurs papyrusmédicauxmentionnent des pro-nostics de naissance et des recettes en cas de dys-tocie (papyrus de Kahun).

Certains praticiens cumulaient les spécialités,ainsi Iry était ophtalmologue du palais et méde-cin royal du ventre. Irenakhti (fig. 4) fut sans doutel’undes plus titrés: en plus de «médecin des yeux »,de «médecin du ventre », il était « berger de l’anus »,et « urologue ».

C O N C L U S I O N

Les médecins égyptiens peuvent être considé-rés comme les précurseurs de la médecine occi-dentale, bien avant Hippocrate qui est venu seperfectionner dans son art à Memphis auprès desscribesdu templed’Imhotepau IVe siècle av. J.-C.Onleurdoit d’avoir sudégager précocement une visionrationnelle de la médecine à partir de la magieoriginelle. Leur réputation dépassait les frontièresde l’Égypte comme le suggèrent plusieurs témoi-gnages faisant état de la demande de médecinségyptiens par les cours royales du Proche-Orient.Appréciés des autres civilisations contemporainesdu bassin méditerranéen, ils ont influencé les autresmédecinesde l’Antiquité commecellesdesHébreux,des Mésopotamiens, des Grecs et des Romains.

Bernard Ziskind*, Bruno Halioua*** 20, avenue du Petit-Lac, 95210 Saint-Gratien.

Courriel : [email protected]** Service de dermatologie, institut Alfred Fournier,

75680 Paris Cedex 14.

1. Halioua B, Ziskind B. Lamédecine au temps despharaons. Paris : Liana Lévi,2001.

2. Jonkheere F. Le cadreprofessionnel et administratifdes médecins égyptiens.

Chronique d’Égypte 1951 ;52 : 237-68.

3. Christine Desroches-Noblecourt. La femme autemps des pharaons. Paris :Livre de Poche, 1986 : 259.

4. Ghalioungui P. Les plusanciennes femmesmédecins de l’histoire.Bulletin de l’institutfrançais d’archéologieorientale 1975 ; 75 : 159-1641.

R É F É R E N C E S

Hésy-Ré « granddes médecins » dupharaon Djoser ; le plusancien médecin connu.Il est contemporaind’Imhotep, l’architectede la 1re pyramide.

Figure 3

La longue titulature d’Irenakhti II(fausse porte de Guizèh). « Grand desmédecins » de Pépi Ier (Ve dynastie) :« médecin des yeux, médecin du ventre,urologue et berger de l’anus ».

Figure 4

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