steatose hepatique aigue gravidique avec sequelles neurologiques

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R166 XXX ° CONGRI~S DE LA SFAR STEATOSE HEPATIQUE AIGUE GRAVIDIQUE AVEC SEQUELLES NEUROLOGIQUES E. Charpy, J.M. Farnos, T. Poirier, E. Bonnieux, G. Meyer, M. Ruel, M. Martignon C.H.G. SENLIS, rue du Faubourg Saint Martin, 60300 SENLIS La stdatose h~patique aigu~ gravidique ou maladie de Sheehan, cause rare d'ict~re du troisi~me trimestre de la grossesse, r~alise une atteinte polyviscdrale, h~patique, neurologique, pancr~atique et r~nale en rapport avec une infiltration graisseuse des organes atteints (4). Elle met en jeu le pronostic vital maternel et foetal. L'dvolution, lorsqu'elle est favorable pour la m~re, se fait habituellement sans s6quelle (i). Nous rapportons un cas o~ nous avons observ~ une atteinte neurologique r~siduelle de plusieurs paires cr~niennes : VIII, IX et XII. Madame M..., 34 ans, primipare est hospitalis~e le ii Avril 1985 ~ la 34~me semaine d'am6norrhde pour des douleurs de l'hypochondre gauche, des vomissements, une asth~nie intense, des frissona et des mdtrorragies. L'h~modynamique est pr~caire. Une conscience fluctuan- te et une hypotonie globale sont les seules anomalies neurologiques initiales. Le toucher vaginal retrouve une dilatation du col ~ 5 cm. Biologiquement, il existe : une hypoglyc~mie profonde (I mmol/l), d'im- portants troubles de l'h~mostase (TP = 37 %, facteur V = 50 ~, facteur II = 35 %) et une hyperbilirubin6mie 94/48 ~mols/l. Sous recharge glucidigue et vol~mique, le travail continue ~ progreaser sans signe de souffrance foetale. Brutalement, alors que la malade est ~ dilatation com- pl~te, survient un arr~t des bruits du coeur foetaux et on extrait par forceps un enfant mort de morphologie normale. L'aggravation rapide de l'~tat de conscience conduit l'intubation et A la ventilation assistde. Bien gue pratiqu~e ~ J 16, la ponction biopsie h~patique paralt com2atible avec le diagnostic de st6atose h~patique aigu~ gravidique. L'dvolution est lentement favorable grace ~ la correction difficile et progressive des diff~rentes at~eintes visc~ralss : insuffisance rdnale aigu~, syndrome h~morragigue diffus avec h~matome du plancher de la bouche. Une ponction lombaire pratiqu6e ~ J 2 est normale. Alors que la patiente sort de son coma, se d~masque l'atteinte des paires cr~niennes : elle associe une surdit~ bilat6rale presque compl~te, une destruction partielle des vestibules, une paralysie bilat~rale de la langue rendant impossible la ddglu- tition, une paralysie du voile. Le scanner cdr6bral montre l'absence de prise de contraste anormale, une discrete ~ilatation des recessus du 4~me ventricule associ~e ~ une augmentation minime du diam~tre du tronc c~r~bral sans anomalie des parties molles, du cavum et de la r~gion des trous d~chirds post~rieurs. Le i0 Juin, soit trois mois apr~s le d~but, la langue est atrophique, le voile se contracte faiblement, au repos, il est hypotonique ~ gauche. La sonde d'alimentation ent~rale ne peut ~tre retiree qu'au septi~me mois. A cette date, Madame M... garde une surdit~ tr~s invali- dante. Ii s'agit d'une atteinte p~riph~rique des derniers nerfs cr~niens dont on ne peut prdciser nile niveau (nucl~aire ou tronculaire), nile m~canisme exacts. Diverses hypotheses peuvent ~tre 4voqu~es : une infil- tration graisseuse des noyaux semblable ~ celle des autres organes, ou un saignement localis6 ~ la face inf~rieure du tronc cdr~bral ~ l'~mergence des derniers nerfs cr~niena. Depuis la description de la maladie par Sheehan en 1940, 150 cas environ ont ~t~ publics dont un tiers depuis 1980 (3). Le taux de survie maternelle et foe- tale est pass~ de 15 ~ 80 % en quelques armies (2). La meilleure connaissance de la maladie, le diagnostic plus prEcoce, l'extraction rapide et les progr~s de la r~animation seront peut-~tre susceptibles, par le plus grand nombre de survivants, d'infirmer l'absence de s~quelles. REFERENCES i. BERARDI J.C., FRAYSSE B., BERNAU J., DESCOUT F., AKLI J., BERARDI-GRASSIAS L. La st6atose h6patique aigu~ gravidique : mise au point ~ propos d'une nouvelle observation. J. Gyn. Obs. Biol. Repr., 12 : 263-268, 1983. 2. CASTIEL J., ADAM J.F., MARPEAU L., GRANGE J.D., LIENHART A. St~atose h~patigue aigu~ gravidigue. Ann. Ft. Anesth. R~anim., 5 : 524-526, 1986. 3. KAPLAN M.M. Current concepts : acute fatty liver of pregnancy. N. Engl. J. Med., 313 : 367-370, 1985. 4. SHERLOCK S. Acute fatty liver of pregnancy and the microvesicular fat diseases. Gut., 24 : 265-269, 1983.

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Page 1: Steatose hepatique aigue gravidique avec sequelles neurologiques

R166 XXX ° CONGRI~S DE LA SFAR

STEATOSE HEPATIQUE AIGUE GRAVIDIQUE AVEC SEQUELLES NEUROLOGIQUES

E. Charpy, J.M. Farnos, T. Poirier, E. Bonnieux, G. Meyer, M. Ruel, M. Martignon

C.H.G. SENLIS, rue du Faubourg Saint Martin, 60300 SENLIS

La stdatose h~patique aigu~ gravidique ou maladie de Sheehan, cause rare d'ict~re du troisi~me trimestre de la grossesse, r~alise une atteinte polyviscdrale, h~patique, neurologique, pancr~atique et r~nale en rapport avec une infiltration graisseuse des organes atteints (4).

Elle met en jeu le pronostic vital maternel et foetal. L'dvolution, lorsqu'elle est favorable pour la m~re, se fait habituellement sans s6quelle (i).

Nous rapportons un cas o~ nous avons observ~ une atteinte neurologique r~siduelle de plusieurs paires cr~niennes : VIII, IX et XII.

Madame M..., 34 ans, primipare est hospitalis~e le ii Avril 1985 ~ la 34~me semaine d'am6norrhde pour des douleurs de l'hypochondre gauche, des vomissements, une asth~nie intense, des frissona et des mdtrorragies. L'h~modynamique est pr~caire. Une conscience fluctuan- te et une hypotonie globale sont les seules anomalies neurologiques initiales. Le toucher vaginal retrouve une dilatation du col ~ 5 cm. Biologiquement, il existe : une hypoglyc~mie profonde (I mmol/l), d'im- portants troubles de l'h~mostase (TP = 37 %, facteur V = 50 ~, facteur II = 35 %) et une hyperbilirubin6mie

94/48 ~mols/l.

Sous recharge glucidigue et vol~mique, le travail continue ~ progreaser sans signe de souffrance foetale. Brutalement, alors que la malade est ~ dilatation com- pl~te, survient un arr~t des bruits du coeur foetaux et on extrait par forceps un enfant mort de morphologie

normale.

L'aggravation rapide de l'~tat de conscience conduit l'intubation et A la ventilation assistde. Bien gue

pratiqu~e ~ J 16, la ponction biopsie h~patique paralt com2atible avec le diagnostic de st6atose h~patique aigu~ gravidique.

L'dvolution est lentement favorable grace ~ la correction difficile et progressive des diff~rentes at~eintes visc~ralss : insuffisance rdnale aigu~, syndrome h~morragigue diffus avec h~matome du plancher de la bouche. Une ponction lombaire pratiqu6e ~ J 2 est normale. Alors que la patiente sort de son coma, se d~masque l'atteinte des paires cr~niennes : elle associe une surdit~ bilat6rale presque compl~te, une destruction partielle des vestibules, une paralysie bilat~rale de la langue rendant impossible la ddglu- tition, une paralysie du voile. Le scanner cdr6bral montre l'absence de prise de contraste anormale, une discrete ~ilatation des recessus du 4~me ventricule associ~e ~ une augmentation minime du diam~tre du tronc c~r~bral sans anomalie des parties molles, du cavum et de la r~gion des trous d~chirds post~rieurs. Le i0 Juin, soit trois mois apr~s le d~but, la langue est atrophique, le voile se contracte faiblement, au repos, il est hypotonique ~ gauche. La sonde d'alimentation ent~rale ne peut ~tre retiree qu'au septi~me mois. A cette date, Madame M... garde une surdit~ tr~s invali-

dante.

Ii s'agit d'une atteinte p~riph~rique des derniers nerfs cr~niens dont on ne peut prdciser nile niveau (nucl~aire ou tronculaire), nile m~canisme exacts. Diverses hypotheses peuvent ~tre 4voqu~es : une infil- tration graisseuse des noyaux semblable ~ celle des autres organes, ou un saignement localis6 ~ la face inf~rieure du tronc cdr~bral ~ l'~mergence des derniers nerfs cr~niena.

Depuis la description de la maladie par Sheehan en 1940, 150 cas environ ont ~t~ publics dont un tiers depuis 1980 (3). Le taux de survie maternelle et foe- tale est pass~ de 15 ~ 80 % en quelques armies (2). La meilleure connaissance de la maladie, le diagnostic plus prEcoce, l'extraction rapide et les progr~s de la r~animation seront peut-~tre susceptibles, par le plus grand nombre de survivants, d'infirmer l'absence de s~quelles.

REFERENCES

i. BERARDI J.C., FRAYSSE B., BERNAU J., DESCOUT F., AKLI J., BERARDI-GRASSIAS L.

La st6atose h6patique aigu~ gravidique : mise au point ~ propos d'une nouvelle observation.

J. Gyn. Obs. Biol. Repr., 12 : 263-268, 1983.

2. CASTIEL J., ADAM J.F., MARPEAU L., GRANGE J.D.,

LIENHART A.

St~atose h~patigue aigu~ gravidigue.

Ann. Ft. Anesth. R~anim., 5 : 524-526, 1986.

3. KAPLAN M.M.

Current concepts : acute fatty liver of pregnancy.

N. Engl. J. Med., 313 : 367-370, 1985.

4. SHERLOCK S.

Acute fatty liver of pregnancy and the microvesicular

fat diseases.

Gut., 24 : 265-269, 1983.