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Direction de l’Environnement et de l’Aménagement Littoral Département des Polluants Chimiques Décembre 2004 R.INT-DEL/PC/2004.17 Stratégies pour la surveillance des produits phytosanitaires en milieu marin côtier Synthèse rédigée par : G. Arzul, G. Bocquené, D. Claisse, H. Grossel, M. Marchand, C. Munschy, C. Tissier, C. Tixier, J. Tronczynski Coordination : C. Munschy

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Direction de l’Environnement et de l’Aménagement Littoral Département des Polluants Chimiques

Décembre 2004 R.INT-DEL/PC/2004.17

Stratégies pour la surveillance

des produits phytosanitaires

en milieu marin côtier

Synthèse rédigée par :

G. Arzul, G. Bocquené, D. Claisse, H. Grossel, M. Marchand, C. Munschy, C. Tissier, C. Tixier, J. Tronczynski

Coordination : C. Munschy

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Stratégies pour la surveillance

des produits phytosanitaires

en milieu marin côtier (*)

Synthèse rédigée par :

G. Arzul, G. Bocquené, D. Claisse, H. Grossel, M. Marchand,

C. Munschy, C. Tissier, C. Tixier, J. Tronczynski

Coordination : C. Munschy

(*) Ce document a fait l’objet d’une présentation et d’une discussion à l’occasion de la

réunion du Conseil Scientifique et Technique de la Surveillance (CSTS) de l’Ifremer à St Malo, le 20 octobre 2004.

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RESUME : Ce rapport est le résultat d’une réflexion menée au sein d’un groupe de travail à la demande du Comité Scientifique et Technique de la Surveillance de l’Ifremer, pour fournir les informations nécessaires à la définition de stratégies de surveillance des produits phytosanitaires en milieu marin côtier. La question de la surveillance de ces composés est abordée aussi bien du point de vue de la contamination chimique que de celui des effets biologiques. La première partie du document porte sur une synthèse des études menées à l’Ifremer, puis sur un rappel des stratégies de surveillance suivies dans le cadre du Réseau National d’Observation de la qualité du milieu marin (RNO). Les critères en matière de suivi chimique et de suivi des effets biologiques sur lesquels la définition des stratégies de surveillance doit s’appuyer pour définir sont ensuite présentés. Enfin, des recommandations résultant de la réflexion menée sont proposées. Les études menées à l’Ifremer au cours des 15 dernières années ont porté sur la présence et le comportement des produits phytosanitaires en milieu estuarien et marin côtier, à l’échelle globale des grands bassins versants, ainsi qu’à une échelle plus régionale. Les résultats mettent en évidence une contamination des zones côtières par des herbicides appartenant essentiellement aux familles chimiques des triazines, acétanilides, et amides. Les recherches ont permis de quantifier les flux apportés par les grands fleuves vers les zones côtières. Le RNO a également permis de fournir des résultats de la contamination chimique dans les mollusques et les sédiments pour deux insecticides (lindane, DDT et métabolites) sur l’ensemble du littoral depuis près de 25 ans. Au niveau des effets biologiques, les recherches menées ont concerné principalement l’étude de l’impact des neurotoxiques (test Acétylcholine-estérase) sur les espèces animales, et des effets sur le phytoplancton. Les objectifs de la surveillance chimique des produits phytosanitaires en milieu marin visent le suivi de leurs apports en zones côtières pour apprécier les tendances et l’efficacité des mesures prises pour la réduction de ces apports, ainsi que la détermination de leur distribution spatiale et le suivi de son évolution. Quatre points importants pour la définition des stratégies sont discutés dans ce document : le choix des substances, le choix des matrices, les stratégies d’échantillonnage et les exigences analytiques. La surveillance des effets biologiques des produits phytosanitaires doit quant à elle être accompagnée des résultats fournis par le suivi chimique de la contamination. Un bioessai est proposé pour la surveillance des effets des herbicides sur le phytoplancton, ainsi que la mesure de l’activité des cholinestérases (AchE) chez des espèces cibles pour le suivi des effets sur les espèces animales. L’importance du choix des périodes d’étude est discutée.

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SOMMAIRE 1 INTRODUCTION.............................................................................................................4

2 SYNTHÈSE DES ÉTUDES RÉALISÉES À L’IFREMER...........................................5

2.1 PRÉSENCE ET COMPORTEMENT DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES EN MILIEU ESTUARIEN ET MARIN ..........................................................................................................................5

2.2 EVALUATION DES EFFETS ................................................................................................9 2.3 TRAVAUX RÉGIONAUX SPÉCIFIQUES..............................................................................10 2.4 QUALITÉ CHIMIQUE DU MILIEU MARIN: NORMES DE QUALITÉ ENVIRONNEMENTALE .....12

3 SURVEILLANCE ACTUELLE DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES DANS LE CADRE DU RNO............................................................................................................13

3.1 PRODUITS PHYTOSANITAIRES SUIVIS PAR LE RNO ........................................................13 3.2 STRATÉGIES D'ÉCHANTILLONNAGE ET PROTOCOLES .....................................................14 3.3 QUELQUES EXEMPLES DE RÉSULTATS............................................................................14

3.3.1 Suivi dans les mollusques.....................................................................................14 3.3.2 Suivi dans les sédiments.......................................................................................18

4 SURVEILLANCE DE LA CONTAMINATION CHIMIQUE...................................19

4.1 CHOIX DES SUBSTANCES ...............................................................................................20 4.1.1 Réglementations et listes prioritaires ..................................................................20 4.1.2 Données de terrain...............................................................................................22

4.2 CHOIX DES MATRICES....................................................................................................23 4.2.1 Matrices naturelles : eau, sédiment, biote ...........................................................23 4.2.2 Capteurs passifs...................................................................................................24

4.3 STRATÉGIES D’ÉCHANTILLONNAGE...............................................................................25 4.3.1 Choix des sites .....................................................................................................25 4.3.2 Stratégie d’échantillonnage .................................................................................28

4.4 EXIGENCES ANALYTIQUES.............................................................................................29

5 SURVEILLANCE DES EFFETS BIOLOGIQUES.....................................................30

5.1 EFFETS SUR LES ESPÈCES PHYTOPLANCTONIQUES .........................................................31 5.2 EFFETS SUR LES ESPÈCES ANIMALES..............................................................................33

5.2.1 Inhibition des cholinestérases..............................................................................33 5.2.2 Mesure de l’activité acétylcholinestérasique et le choix des espèces sentinelles.34 5.2.3 Couverture spatio-temporelle du suivi.................................................................34 5.2.4 Autres marqueurs potentiels ................................................................................35

6 CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS ...........................................................35

7 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES......................................................................39

8 ANNEXE : LISTE DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES DES LISTES PRIORITAIRES DCE ET OSPAR ...............................................................................45

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1 Introduction Les produits phytosanitaires ou produits phyto-pharmaceutiques, sont des pesticides qui sont utilisés spécifiquement pour la protection des végétaux. Ils regroupent essentiellement des substances aux propriétés herbicides, insecticides et fongicides. Avec plus de 50% du territoire national occupé par l'agriculture, cette activité regroupe à elle seule 95% des usages de produits phytosanitaires (source : Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche et des Affaires rurales). En 2002, 82500 tonnes de substances actives, dont 61000 tonnes de produits de synthèse, ont été utilisées en métropole, classant ainsi la France au premier rang des utilisateurs au niveau Européen (source : UIPP, Union des Industries de la Protection des Plantes). L’utilisation massive de ces produits, associée à leur mobilité élevée, conduit à la contamination de tous les compartiments du milieu aquatique (eaux de surface, eaux souterraines, eaux littorales) par les substances actives utilisées, ainsi que par leurs produits de dégradation. Le terme de « résidu » de produit phytosanitaire inclut la molécule active entrant dans la composition de la spécialité commerciale utilisée, ainsi que ses produits de dégradation et ses métabolites éventuels. La présence des produits phytosanitaires dans le milieu aquatique relève essentiellement d'une problématique de contamination diffuse, reconnue comme étant le problème majeur de la dégradation de la qualité des eaux superficielles et souterraines (Humenik 1987, Ifen 2002). Après leur application sur les sols ou les cultures, les produits phytosanitaires rejoignent les eaux de surface et les eaux souterraines par phénomènes de ruissellement et infiltration. Ils peuvent être transportés sous forme dissoute, ou associés aux particules. Les quantités de produits qui se retrouvent dans les cours d’eau correspondent le plus souvent à un faible pourcentage (< 1-5%) des quantités appliquées. Cette contamination diffuse dépend fortement des conditions environnementales (qualité du sol, mode d’application, conditions climatiques, délai entre épandage et événement pluvieux). Le respect ou non des bonnes pratiques agricoles influe également sur les quantités de pesticides retrouvées dans les eaux (Gerecke et al. 2002). Ces composés se retrouvent ensuite dans les estuaires, qui en tant que systèmes intégrateurs de leur bassin versant (Tronczyński et al. 1999b), représentent des sites de choix pour l'évaluation des apports en contaminants d'origine continentale en milieu marin. La surveillance des produits phytosanitaires en milieu marin côtier nécessite la mise en place de stratégies qui tiennent compte des spécificités de ce milieu, de la diversité des molécules dont les propriétés conditionnent leur comportement biogéochimique et leurs effets écotoxicologiques, et également des pratiques agricoles. Le présent document vise à fournir les informations nécessaires à la définition de ces stratégies. Les éléments développés dans ce rapport ont pour objectif de servir de guide d’aide à la décision pour la mise en œuvre opérationnelle de la surveillance. Les questions seront abordées du point de vue de la surveillance chimique de ces contaminants, et de la surveillance des effets biologiques.

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Avant tout, les stratégies d’étude dépendent des objectifs que l’on cible (objectif niveaux et tendances du RNO, contrôle du bon état chimique des eaux dans le cadre de la DCE, objectif plus ponctuel dans le temps ou l’espace. Les éléments présentés dans ce rapport devront par conséquent être modulés en fonction des objectifs poursuivis.

La surveillance des produits phytosanitaires en milieu marin et l’étude de leurs effets écotoxicologiques relèvent d’une problématique de continuité des transferts des contaminants chimiques depuis les bassins versants jusqu’aux zones côtières. La définition des stratégies de surveillance en milieu marin devrait se construire en partenariat avec d’autres organismes de recherche concernés par la même problématique au niveau des eaux continentales (Inra, Cemagref). Ce partenariat est cadré par le programme national n°4 « Gestion des milieux et des ressources » de la LOLF.

2 Synthèse des études réalisées à l’Ifremer La contamination du littoral métropolitain par des produits phytosanitaires a été mise en évidence puis confirmée par les résultats du RNO (cf. § 3 ci-dessous). A partir de 1979, les analyses de résidus de DDT et de lindane, dans les mollusques bivalves du littoral, ont montré des niveaux de contamination significatifs, variables dans l’espace et dans le temps. Les années 80 validèrent ce diagnostic, ce qui amena l’Ifremer à s’impliquer sur la problématique des produits phytosanitaires. Cette implication peut succinctement être déclinée selon quatre orientations :

1) recherches sur la présence et le comportement des produits phytosanitaires en milieu estuarien et marin ;

2) mise au point d’outils d’évaluation des effets en milieu marin (cf. § 5 ci-dessous) ;

3) réponses à des sollicitations régionales auprès des laboratoires côtiers ; 4) évaluation de la qualité chimique du milieu marin via l’utilisation de normes de

qualité environnementale définies pour les produits phytosanitaires notamment dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE).

2.1 Présence et comportement des produits phytosanitaires en milieu estuarien et marin

Ces recherches ont été menées au sein du département « Polluants Chimiques, Biogéochimie, Ecotoxicologie » (http://www.ifremer.fr/delpc/) du Centre Ifremer de Nantes. Elles se sont d’abord centrées sur les herbicides et ont eu comme premiers objectifs d’établir des méthodes analytiques adaptées et une stratégie d’étude permettant l’identification, la quantification de ces substances et de leurs produits de dégradation, ainsi qu’une meilleure compréhension de leur devenir en zones côtières (Tronczyński 1990). Ce type de question reste d’actualité, particulièrement au moment où l’adaptation des réseaux de surveillance à la Directive Cadre sur l’Eau nécessite d’ajuster le choix des substances, des matrices suivies, des stratégies d’échantillonnages induites, et de la mise sous assurance qualité (cf. § 4 ci-dessous). Les résultats ont mis en évidence la contamination des eaux côtières des trois façades maritimes par des herbicides de différentes familles : les triazines (atrazine, simazine,

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terbutylazine, et leurs produits de dégradation DEA-déthylatrazine, DIA- déisopropylatrazine), les amides (tébutam) et les acétanilides (alachlore, métolachlore) (Tronczyński et al. 1993 ; Readman et al. 1993 ; Readman et al. 1997 ; Munschy 1995 ; Tronczyński et al. 1995a, b ; Tronczyński et Moisan 1996 ; Munschy et al. 1997 ; Tronczyński et Moisan 1999 ; Tronczyński et al. 1999a, b). Dans les triazines, la simazine et l’atrazine sont les substances majoritaires. Certains de leurs produits de dégradation sont aussi identifiés, notamment la dééthylatrazine (DEA) pour l’atrazine). Ces substances, observées en estuaires et en milieu côtier, s’avèrent persistantes et mobiles dans l’environnement (Tronczyński et al. 1999b). Les études ont montré que les herbicides sont transportés essentiellement sous forme dissoute, la fraction adsorbée aux matières en suspension étant inférieure à 1% (Munschy 1995). Les sédiments ne sont donc pas un lieu de stockage. Leur persistance est avérée à l’échelle du transit estuarien. Les variations saisonnières en estuaire expriment les effets des utilisations sur les bassins versants. Ces propriétés géochimiques simplifient l’évaluation des bilans d’apports au milieu marin, et permettent la modélisation du transport et de la contamination des masses d’eau littorales (Tronczyński et al. 1999b).

0

40

80

120

160

200

Salinité

ng/L

ATRAZINE DEA

Herbicides dissous février 1995

0 10 20 30 40

Estuaire amont dePoses au Vieux Port

PK325

Vieux Port

Estuaire aval et baie

202Poses

Figure 1 : Gradient côte-large en estuaire de Seine de la contamination des eaux en atrazine et en dééthylatrazine, son produit de dégradation (Tronczyński et al. 1999b)

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Figure 2: exemple de la Seine en février 1995. Application du modèle SAM-3D à la dééthylatrazine (DEA) (Tronczyński et al. 1999b)

Appliquées aux substances de comportement analogue, on voit ici l’importance de telles observations mesurées et/ou modélisées pour le classement de l’état chimique des masses d’eau dans le cadre de la DCE. Les travaux réalisés à l’Ifremer ont ainsi permis une évaluation des flux journaliers bruts de certaines de ces substances par les principaux fleuves, qui atteste d’apports non négligeables au milieu marin (ex : environ 6 tonnes d’atrazine par an par le Rhône). Les observations faites montrent de plus des différences de potentiel de transfert vers la mer entre les bassins versants (surfaces agricoles) des fleuves, celui du Rhône est par exemple 6 fois supérieur à celui de la Seine et de la Loire (Tronczyński et Moisan 1996 ; Tronczyński et al. 1997 ; Tronczyński et Moisan 1999 ; Tronczyński et al. 1999b). Outre le constat de contamination permanente et ubiquiste des eaux estuariennes et littorales par les triazines, les amides et les acétanilides, d’autres substances phytosanitaires sont identifiées de manière plus limitée dans le temps et dans l’espace : dicloran, propanil (chloro-anilines), molinate, EPTC, carbofuran (carbamates), diméthoate, dianizon, malathion (organophosphorés) (Readman et al. 1993 ; Tronczyński et al. 1999a, b).

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A partir de ces résultats, se pose la question des effets chroniques potentiellement induits, même à de faibles concentrations (inférieurs aux seuils de toxicité aiguë) (Steen et al. 1999), sur la flore et la faune marines, question qui trouve son prolongement dans le § 5 ci-dessous. Par ailleurs, des participations à des instances spécifiques (CREPEPP Pays de la Loire- Cellule Régionale d’Etude des Pollutions des Eaux par les Produits Phytosanitaires, CORPEP Bretagne – Cellule d’Orientation Régionale pour la Protection des Eaux contre les Pesticides, …), ou des études particulières engagées avec des Agences de l’Eau (Rhône-Méditerranée-Corse, Loire-Bretagne et Seine-Normandie) ont permis à l’Ifremer de jouer son rôle d’expert, et de compléter l’acquisition de données de terrain. La question des flux des phytosanitaires d’origine tellurique ne concerne pas que la métropole, mais également les territoires d’Outre-Mer. Une étude réalisée en Martinique (Bocquené et al. 2002) établit un bilan préliminaire des pratiques utilisant ce type de substances dans l’île, avec évaluation qualitatives des apports à l’environnement, et un bilan quantitatif et qualitatif des principales substances bioaccumulées dans le milieu marin. Cette étude met en évidence la présence généralisée du chlordécone (organochloré) dans les matières en suspension, dans les sédiments et dans quelques espèces marines. Enfin, il importe de prendre en compte le fait que la présence de certaines substances actives en milieu marin ne résulte pas uniquement des apports des bassins versants. Ainsi, l’Ifremer a travaillé dans le cadre du programme ACE (« Assessment of Antifouling Agents in Coastal Environment », programme européen MAST III) de 1999 à 2002 sur la contamination du milieu littoral par des substances biocides anti-salissures alternatives au TBT (tributylétain), ainsi qu’à l’évaluation des risques induits (Tronczyński et al. 2001 ; Tronczyński et al. 2004). Ce projet dresse un inventaire de l’usage de ces substances en Europe, développe les techniques analytiques disponibles, étudie la présence dans l’environnement, et mène une évaluation des risques écotoxicologiques (http://www.pml.ac.uk/ace/). Pour la France, il établit la contamination des eaux des zones portuaires par des substances comme l’Irgarol 1051 (triazine), le chlorothalonil (dérivé phtalique), le dichlofluanid (sulfamide). Le diuron (phénylurée) a également été identifié de façon pérenne dans les eaux portuaires européennes. L’échantillonnage spatial réalisé dans les eaux portuaires et côtières en Manche, Atlantique et Méditerranée, atteste que pour l’Irgarol et le chlorothalonil, la contamination s’étend aux eaux côtières. Un maximum est observé en été dans les ports, pour ces deux molécules. Pour l’Irgarol dissous, la teneur est corrélée à la capacité d’accueil des ports. Enfin, les eaux portuaires échantillonnées ont révélé des effets oestrogéniques imputés à ces substances (Tronczyński et al. 2001 ; Tronczyński et al. 2004).

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2.2 Evaluation des effets Les travaux sont menés au sein du Département « Polluants Chimiques, Biogéochimie, Ecotoxicologie » qui, depuis 1990, mène pour le RNO des études de faisabilité des techniques de surveillance biologique. Concernant les produits phytosanitaires, les travaux ont été orientés sur la validation du test AChE (Acétylcholine-estérase), comme outil d’identification en milieu marin de l’impact des neurotoxiques (insecticides organophosphorés, carbamates). Ce test a été appliqué sur différents sites et a notamment montré une bonne concordance avec les niveaux d’exposition chez l’huître Crassostrea gigas en baie de Bourgneuf et en baie de l’Aiguillon (Tronczynski et al., 1999b) et chez le copépode Tigriopus brevicornis en baie de Vilaine (Forget et al., 2003). Le test AChE est aujourd’hui à sa phase de développement de la mise sous assurance qualité (dans le cadre du programme européen BEQUALM- Biological Effects Quality Assurance in Monitoring Programmes), étape nécessaire vers sa normalisation. En dehors du RNO « surveillance biologique », les principaux projets d’implication sont BIOMAR (Biomarkers in Marine Organisms), BEEP (Biological Effects of Environmental Pollution), Seine Aval, Martinique, MOREST (Mortalité Estivale de Mollusques), et l’action incitative Inra/Ifremer en cours sur la baie de Vilaine. Enfin, le projet IPEM (« Impact des pesticides sur le milieu marin »), projet de recherche régional (Bretagne) financé par le MEDD), complété par une étude menée en coopération avec l’Inra, étudie l’impact des pesticides sur le phytoplancton, de l’échelle intracellulaire à l’échelle de la communauté naturelle en milieu pollué et non pollué. Pour cela il s’appuie sur la culture de souches pures et de communautés en mésocosmes, sur l’analyse cellulaire et intracellulaire (protéome, pigments, ATP, microscopie) et sur les techniques d’analyses des communautés (empreinte génétique des populations, activité photosynthétique, cytométrie de flux). Ce projet développe un volet particulier sur les espèces tolérantes présentant un risque sanitaire et économique, , et contribue au développement de la connaissance dans le domaine de la biodiversité phytoplanctonique. Les pesticides ont été choisis, soit en raison de leur utilisation croissante au vu de l’interdiction de l’atrazine, soit parce qu’ils ont été retrouvés dans les eaux, soit à cause de leur toxicité et leur possible bioaccumulation. Ils ont été sélectionnés dans des familles différentes et parce qu’ils représentent un risque potentiel pour le phytoplancton : - quatre herbicides : le nicosulfuron (inhibe l’acétolase synthéase, utile pour les

acides aminés ramifiés : valine, leucine, isoleucine), la sulcotrione (inhibe la 4-hydroxyphénol pyruvate dioxygénase : synthèse des caroténoïdes), la diméthénamide (inhibe des élongases et des enzymes de cyclisation conduisant aux gibbérellines), la bentazone (inhibe la photosynthèse par blocage de la protéine D1 du photosystème II),

- un fongicide : l’époxiconazole (agit au niveau de la synthèse des stérols), - un insecticide : le chlorpyrifos-éthyl (agit au niveau de la transmission axonale par

ouverture du canal sodium, hautementy bioaccumulable).

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Ils seront analysés dans les milieux de culture pour vérifier la concentration exacte d’exposition du phytoplancton et sur les 4 sites choisis : un site de référence pour l’étude en mésocosme et trois sites pollués, dans la rivière de Penzé en Bretagne nord (rivière influencée par les apports agricoles du bassin versant), en Rade de Brest face à l’embouchure de l’Aulne, en estuaire du Bélon (rivière à forte dessalure) et dans les milieux de culture pour vérifier la concentration exacte d’exposition du phytoplancton. 2.3 Travaux régionaux spécifiques En fonction de la pression des activités sur les bassins versants et de la sensibilité des usages littoraux (surtout la conchyliculture), les laboratoires côtiers de l’Ifremer sont sollicités pour exprimer des avis, réaliser des expertises, promouvoir des études, toujours en développant des partenariats externes (Inra, Cemagref, Collectivités locales…). C’est le cas principalement des laboratoires côtiers d’Arcachon (Bassin d’Arcachon, Nord Médoc) et de La Tremblade (Bassin de Marennes Oléron) que nous citerons en exemple. La première démontrait les effets de douze pesticides sur le développement de larves d’huitre et la croissance de deux algues unicellulaires utilisées comme fourrage en écloserie (His and Seaman, 1993). Le Bassin d'Arcachon est le principal site de captage de l'huître creuse Crassostrea gigas. Cette activité représente une part non négligeable du chiffre d'affaires des ostréiculteurs arcachonnais. Depuis le début des années 1990, la reproduction et le recrutement des huîtres s'étaient déroulés normalement, aboutissant à un captage moyen ou excellent. En 1998, le captage s'est avéré très mauvais, rappelant aux ostréiculteurs l'absence de recrutement larvaire observée à la fin des années 1970, qui a pu être attribué à la pollution par le TBT. Pour cette raison et à leur demande, une étude sur les causes de la variabilité du captage (étude SURGIBA : Suivi de la Reproduction de Crassostrea Gigas dans le Bassin d'Arcachon) a été mise en place pour une durée de 5 ans (1999 – 2003), les effets de la contamination du milieu par les pesticides étant l'une des pistes étudiées. La liste de molécules recherchées (provenant de l'agriculture, de l'entretien des espaces verts, des traitements anti-insectes et des peintures antisalissure) dans les eaux des principales zones de captage, du port d’Arcachon et dans les 6 principaux cours d’eau débouchant dans la Baie ont été établies avec le concours du Service Régional de Protection des Végétaux (SRPV) et de l’Entente Interdépartementale de Démoustication et grâce à une enquête réalisée auprès des principaux fabricants de peintures antisalissure. Le GIRPA d'Angers a réalisé les analyses. Les résultats des analyses ont été publiés annuellement et interprétés dans des rapports internes Ifremer (Auby et Maurer , 2004). Les molécules dont la présence a été mise en évidence sont en majorité des herbicides, provenant à la fois de l'agriculture et du nautisme. Les concentrations mesurées dans les eaux de la Baie ne sont pas suffisantes pour influer directement sur les larves. Toutefois, elles s'avèrent parfois supérieures aux teneurs limitant le développement de certaines petites espèces phytoplanctoniques servant de nourriture aux larves, lorsque ces microalgues sont élevées dans des conditions nutritives pauvres correspondant à celles mesurées en été dans le Bassin d'Arcachon. Bien que l’on ne dispose pas de preuve avérée de l'impact de ces herbicides sur le phytoplancton dans le milieu

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naturel, on observe que durant l’année 2000, ces herbicides étaient un peu plus concentrés dans le Bassin qu'au cours des étés précédents, que les phytoplanctontes servant de nourriture aux larves étaient moins abondants et que la survie larvaire a été plus faible que le modèle de régression linéaire établi en fonction de la température, ne le laissait attendre. Cette étude a également permis de mettre en évidence dans les eaux du Bassin la présence d'un insecticide principalement utilisé dans le cadre de la lutte anti-termites, le chlopyrifos-éthyl (insecticide organophosphoré), à des concentrations sporadiquement très élevées. Une étude consacrée à l'impact de ces traitements sur les eaux du Bassin est en cours de définition. Le Nord-Médoc héberge depuis une quinzaine d'années des sites d'élevage de Crevettes impériales Penaeus japonicus (six fermes, d'une superficie totale de 180 hectares, dont 95 ha en eau). En 2001, la survie des post larves a été particulièrement faible par rapport aux années précédentes. Pour expliquer cette chute brutale de production, les aquaculteurs ont mis en cause une pollution de l'eau alimentant leurs marais, suspectant particulièrement l'emploi récent de certains insecticides liés à l'exploitation forestière (traitement des chablis) et à la viticulture (lutte contre la cicadelle de la flavescence dorée). Leur demande, relayée par le Conseil Général de la Gironde, a abouti à la mise en place d'une étude au cours de la saison de reproduction des crevettes (printemps – été) 2002. L'étude entreprise a consisté à établir la liste des principales molécules utilisées dans ces traitements, liste établie en collaboration avec le SRPV, le Département de Santé des forêts et le Cemagref : alphaméthrine, bifenthrine, deltaméthrine, la lambda cyhalothrine (pyréthrénoïdes) et quinalphos (organophosphoré) puis à les rechercher, d'une part à proximité des zones d'épandage, d'autre part dans l'eau alimentant les marais. Les analyses ont été réalisées par le Laboratoire Municipal de Rouen. Les résultats obtenus indiquent que le produit utilisé pour le traitement des chablis (alphaméthrine), en raison des précautions prises lors des épandages (pas de traitement près de fossés en eau, pas de traitement par temps de pluie), ne se retrouve pas dans les eaux environnantes. A l'inverse, les molécules pulvérisées sur les vignes sont quelquefois mises en évidence dans les fossés alentour (probablement une contamination par dérive aérienne). Ces produits n'ont toutefois jamais été mis en évidence dans les eaux parvenant aux marais, sans doute en raison de la forte dilution de ces apports ponctuels dans les eaux de la Gironde qui alimentent les marais. Les seuils analytiques étaient de 10 ng/l pour les pyréthrénoides et de 20 ng/l pour les organophosphorés. Cette étude a conclu négativement quant à l'impact de ces deux types de traitement utilisant des pesticides sur la qualité des eaux parvenant aux marais. A la Tremblade, la mise en culture intensive de nombreux marais littoraux dans les années quatre vingt a suscité l’inquiétude du secteur conchylicole charentais. Les questions portent sur l’impossibilité de maintenir les huîtres en stockage dans certains chenaux, sur un arrêt de la croissance des huîtres en claires et sur des mortalités suspectes. Diverses études ont été engagées sur ce thème, qui établissent la présence des produits phytosanitaires dans le marais (herbicides dont l’atrazine et ses produits de dégradation, urées substituées dont le chlortoluron, insecticides dont des

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carbamates, fongicides, molluscicides dont le mercaptodimethur, hormones de croissance) (Anras, 1997 ) et les niveaux d’apports en mer (Munaron, 2004). Elles posent la question des effets potentiels sur l’environnement (tests sur larves d’huîtres positifs, et concentrations parfois élevées de certaines substances dans le milieu). De 2004 à 2006, une étude sur trois ans rassemble l’Ifremer (Laboratoire de la Tremblade) et le Cémagref, avec un Comité de Pilotage comprenant le SRPV, la Chambre d’Agriculture, l’Inra, la Section Régionale Conchylicole et le Conseil Général. Les objectifs de l’étude visent à évaluer les rejets des produits phytosanitaires et leurs effets écotoxicologiques dans le marais, au moment de l’évacuation des eaux vers la mer, lors des périodes de traitement des cultures et de l’affinage des huîtres en claires. Les tests d’effets portent sur l’embryotoxicité sur larves d’huîtres, l’activité enzymatique sur crustacés et la croissance de populations phytoplanctoniques. L’objectif final de ces travaux est de fournir un appui aux décideurs et aux gestionnaires de ces sites pour améliorer les pratiques présentant des risques avérés pour l’environnement. Cette problématique concernant l’impact des produits phytosanitaires sur le milieu marin côtier amène à solliciter l’intervention d’autres laboratoires côtiers. Citons le laboratoire côtier de Nantes avec une action sur le secteur du Croisic, et des réflexions concernant d’autres sites sensibles comme la baie des Veys en Normandie (laboratoire de Port-en-Bessin) et la lagune de Thau en Méditerranée (laboratoire de Sète). On voit là que les études sur le comportement biogéochimique des produits phytosanitaires et leur transfert via les grands bassins versants par les fleuves majeurs, rejoignent celles réalisées à partir de sollicitations à un échelon plus local, venant souvent de conflit d’usages potentiels, en réponse à une demande sociale. 2.4 Qualité chimique du milieu marin: normes de qualité

environnementales Dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE), des normes de qualité environnementales sont définies pour l’ensemble des 33 substances ou groupe de substances prioritaires dont les substances phytosanitaires. La méthodologie de détermination des PNEC (Concentrations prédites sans effet sur le compartiment environnemental considéré), utilisée dans la procédure d’évaluation des risques des substances chimiques (EC 2003), a été utilisée. Cette approche part des données d’écotoxicologie (principalement des résultats de bioessais) pour les substances considérées. Ces normes de qualité doivent être représentatives de la sensibilité des écosystèmes concernés et leur pertinence écologique expertisée. Cette démarche revêt un caractère de priorité pour les 10 produits phytosanitaires inclus dans la liste des 33 substances prioritaires de la DCE. Ces 10 substances sont classées pour le moment, au nombre de deux comme substances prioritaires (endosulfan et lindane) et de huit comme substances prioritaires dangereuses éventuelles (atrazine, chlorpyrifos, diuron, chlorfenvinphos, isoproturon, simazine, trifluraline, alachlor). De la pertinence de ces normes de qualité dépend celle des choix de protection qui pourront être mis en œuvre. La cellule ARC, structure mixte Ifremer/Ineris a été mise en place pour répondre à ces exigences.

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3 Surveillance actuelle des produits phytosanitaires dans le

cadre du RNO

Le Réseau National d'Observation de la qualité du milieu marin (RNO) a pour objectif l'évaluation des niveaux et tendances de la contamination chimique du littoral. Créé en 1974 par le Ministère chargé de l'Environnement, il est coordonné par l'Ifremer pour le compte du Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable (MEDD). La création du RNO avait également pour but de doter la France d'un outil capable de répondre à ses engagements internationaux, en particulier dans le cadre des Conventions OSPAR (Atlantique nord-est) et de Barcelone (Méditerranée).

Jusqu'en 1979, le suivi a uniquement porté sur les paramètres généraux de qualité et les nutriments, mesurés dans les masses d'eau. En 1979, la surveillance a été étendue aux contaminants chimiques. Compte tenu des difficultés de collecte d'échantillons valides pour des analyses de traces dans l'eau et de la faible représentativité spatiale et temporelle de ceux-ci, le RNO utilise pour ce suivi des matrices intégrant la contamination sur une période plus longue. Deux "compartiments" du milieu marin sont utilisés : les mollusques bivalves (moules et huîtres) qui sont des indicateurs quantitatifs de la contamination du fait de leur capacité de bio-accumulation de certains contaminants chimiques, et le sédiment qui intègre dans ses couches successives plusieurs années d'apports. De très nombreux programmes de surveillance basés sur l'utilisation d'organismes indicateurs ont été développés dans le monde depuis 25 ans. La moule étant l'animal le plus utilisé, ces programmes sont connus sous le terme générique de "Mussel Watch". 3.1 Produits phytosanitaires suivis par le RNO Parmi les contaminants chimiques suivis par le RNO, les produits phytosanitaires sont peu représentés. Seuls deux insecticides sont concernés : le lindane (γ-HCH) et le DDT et ses métabolites (p,p'-DDD, p,p'-DDE), qui a d'ailleurs été peu utilisé en tant que produit phytosanitaire. A noter que l'α-HCH, sous-produit de fabrication du γ-HCH, est aussi suivi. Pour avoir droit à l'appellation "lindane", les produits commerciaux devaient contenir au moins 99 % de γ-HCH. Les résultats du RNO montrent que dans certaines régions, des produits techniques à forte proportion d'α-HCH ont été utilisés.

Le choix de ces produits en 1979 tient en premier lieu à la demande OSPAR, basée sur une liste prioritaire établie à partir de critères tels que la toxicité et la rémanence. D'autre part, leur faculté de bio-accumulation (forte pour le DDT, plus faible pour le lindane) permettait de les inclure dans un suivi basé sur les organismes marins. Enfin, l'état de l'art de l'époque n'autorisait qu'un panel réduit de molécules. Par la suite, la liste des contaminants suivis par le RNO a évolué constamment, mais sans que de nouveaux produits phytosanitaires y soient introduits. Les raisons en sont principalement la non bio-accumulation de nombreuses molécules et les limites budgétaires.

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3.2 Stratégies d'échantillonnage et protocoles Le suivi RNO des produits phytosanitaires dans les mollusques est basé sur 80 points de prélèvement en métropole et, depuis 2002, une dizaine en Martinique et Guadeloupe. L’échantillonnage qui était trimestriel (février, mai, août et novembre) de 1979 à 2001, est devenu annuel (novembre) à partir de 2002. Les coquillages vivants sont épurés pendant 24 heures dans de l'eau de mer décantée provenant de la région de prélèvement afin d'éliminer les fèces et pseudo fèces. Pour une intégration à plus long terme, les produits phytosanitaires sont aussi mesurés tous les dix ans dans les sédiments dont le premier centimètre superficiel peut intégrer plusieurs années de contamination. Sur quelques points sélectionnés, des carottes profondes sont prélevées et découpées en horizons dont l'analyse et la datation permet de retracer l'historique de la contamination sur plusieurs dizaines d'années. Du point de vue logistique, la surveillance dans le sédiment demande des moyens lourds (navire doté d'un portique arrière pour la manœuvre d'un carottier). Il est important d'utiliser un carottier qui préserve la stratification des échantillons. 3.3 Quelques exemples de résultats 3.3.1. Suivi dans les mollusques

♦ Variations saisonnières . Pendant la longue période où les prélèvements étaient trimestriels les résultats ont mis en évidence (pour tous les contaminants) de fortes variations saisonnières, principalement dues aux cycles de reproduction des mollusques. Ces variations peuvent induire des différences de concentration de 1 à 3 entre les maxima d'hiver et les minima d'été. Elles sont donc à considérer en fonction de l'objectif de la surveillance (sanitaire ou environnemental). Dans le cas du RNO, cette variabilité intra-annuelle systématique a été prise en compte dans le contexte de l’étude de la réduction de fréquence d'échantillonnage. Celle-ci a été réduite de quatre à un prélèvement annuel, sous contrainte d’une tendance minimale annuelle à détecter.

♦ Niveaux. De par la stratégie spatio-temporelle du RNO, l’objectif de détermination des niveaux est continûment atteint, à savoir une bonne connaissance de la répartition géographique de la présence des contaminants dans les eaux littorales françaises (RNO, 1995). On observe que les composés de la famille du DDT et du lindane sont encore présents dans le milieu marin malgré les mesures d'interdiction d'usage prises en France en 1972 pour le DDT et 1998 pour le lindane. Quelques "hot spots" ont été mis en évidence (Charente Maritime pour le lindane, Arcachon pour le DDT…). La figure 3 représente les moyennes de toutes les observations pour chaque point de prélèvement, classés en ordre géographique de Dunkerque à la Corse. L'information brute tirée de cette figure doit être nuancée par l'étude des tendances temporelles.

♦ Tendances temporelles. Le deuxième objectif du RNO est d'apprécier l'évolution temporelle des niveaux de contamination (tendances). Les résultats acquis depuis 1979 constituent un ensemble de séries à long terme permettant cette évaluation. Les figures 4 et 5 montrent en première approche deux exemples de séries pour le lindane et le

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DDT. Une étude statistique prenant en compte explicitement les variations saisonnières a permis une étude fine des tendances temporelles (RNO, 2000).

L'étude exhaustive menée par le RNO en 2000 présentait les tendances observées pour chaque contaminant et pour chaque point de prélèvement. Elle peut être résumée dans le tableau 1 ci-dessous pour les composés qui nous intéressent ici. On observe l'absence de tendance croissante, ce qui semble normal puisque les produits concernés sont interdits d'usage depuis de nombreuses années. De fait, les niveaux actuels se rapprochent des limites de détection analytiques, y compris sur les sites les plus contaminés dans les années 1980-90. Enfin, les études de l’évolution temporelle des niveaux de contaminants chez les mollusques sont également menées en utilisant des échantillons archivés dans le cadre de RNO. Cette approche est actuellement développée dans le cadre du développement des nouvelles stratégies de la surveillance (CSTS, 2002). Cette véritable banque d’échantillons permet en effet des analyses rétrospectives (Johansson et al. 2004 ; Tronczyński et al. 2004). Cette approche est d’autant plus intéressante que les analyses sont généralement effectuées dans les meilleures conditions analytiques (ex. plus faible variabilité analytique, un seul laboratoire…) et normalement reflètent mieux les tendances de la contamination. De plus, les nouvelles méthodes analytiques plus précises et/ou plus modernes permettent aujourd’hui les analyses des contaminants qui n’ont pas pu être analysés avant sont aussi possibles en utilisant des échantillons archivés.

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Stratégies pour la surveillance des produits phytosanitaires

Seine

Baie de Roscanvel

Loire

Charente Maritime

Bassin d'Arcachon

Rhône

Corse

_

_

_

_

___

_ _

_

__

__

Lindane Σ DDT 0 5 10 15 20 25

huîtres

moules

0 50 100 150 200 250 300

huîtres

moules

Figure 3 : Teneurs moyennes (µg/kg, p.s.) en Lindane et en DDT (DDT+DDD+DDE), par point de prélèvement entre 1979 et 1993. Les niveaux représentés ici sont fortement influencés par les fortes concentrations observées pendant les dix premières années du RNO. Les tendances décroissantes observées depuis rapprochent les niveaux actuels des limites de détection analytiques.

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MANCHE ATLANTIQUE MEDITERRANEE ENSEMBLE du LITTORAL

Contaminant N.S. N.S. N.S. N.S.

Σ DDT 0 28 12 0 34 5 0 16 7 0 78 24

γ HCH 0 18 22 0 25 14 0 13 10 0 56 46

α HCH 0 19 21 0 33 6 0 16 7 0 68 34

Tableau 1 : Dénombrement des tendances observées par contaminant, pour chaque façade et pour l'ensemble du littoral. N.S. = absence de tendance significative.

Evolution du DDT, DDD, DDE (µg/kg, p.s.) entre 1979 et 2001dans le bassin d'Arcachon

0

100

200

300

400

500

600

700

800

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

DDTDDDDDE

Figure 4 : Evolution des concentrations en DDT observées dans les huîtres du bassin d'Arcachon (données brutes).

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Evolution du lindane et de l'a-HCH (µg/kg, p.s.) entre 1982 et 2001dans le Pertuis Breton

0

20

40

60

80

100

12019

81

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

a-HCHg-HCH

Figure 5 : Evolution des concentrations en lindane observées dans les huîtres du Pertuis Breton (données brutes).

3.3.2. Suivi dans les sédiments

Le suivi RNO dans le sédiment permet également d'apprécier la répartition spatiale des niveaux de contamination, avec l'avantage de s'affranchir de la présence de mollusques et donc d'étendre la surveillance vers le large. Le prélèvement de carottes profondes permet quant à lui de retracer a posteriori l'évolution des concentrations sur plusieurs dizaines d'années.

A titre d'exemple, la figure 6 présente les concentrations des résidus de DDT (Σ DDT) dans une carotte de 34 cm prélevée en 1995 en Méditerranée dans le Golfe d'Aigues-Mortes. L'étude géochronologique des horizons a été réalisée en utilisant le plomb 210 et le césium 137. Cette carotte montre bien l'arrivée massive de DDT dans le milieu à partir des années 1940. La partie supérieure, plus perturbée, correspond aux couches encore bioturbées et mal stabilisées au moment du prélèvement.

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Dat

atio

n ap

prox

imat

ive

(210 Pb

et 13

7 Cs)

186

0

188

0

190

0

192

0

194

0

196

0

198

0

200

0

[DDT+DDD+DDE], µg/kg, p.s.

0

5

10

15

20

25

30

35

0.0 1.0 2.0 3.0 4.0 5.0

Hor

izon

(cm

)

Figure 6 : Concentrations en Σ DDT dans une carotte de 34 cm prélevée en 1995 dans le Golfe d'Aigues-Mortes. La limite de détection est de 0.3 µg/kg p.s.

4 Surveillance de la contamination chimique En France, il n’existe pas actuellement de réseau de surveillance de la contamination chimique des eaux côtières par les produits phytosanitaires. Dans cette partie du document, il s’agit d’exposer les grandes lignes de la stratégie d’une surveillance chimique des produits phytosanitaires en zones côtières qui pourront servir, le cas échéant, de guide pour la mise en œuvre opérationnelle de cette surveillance. D’une manière plus générale, un tel réseau de surveillance devrait permettre de : - Inscrire dans la durée l’observation et l’acquisition des données sur la

contamination chimique du littoral national par les pesticides ; - Comparer les niveaux et établir la chronologie de la contamination chimique des

écosystèmes marins et en suivre les tendances ; - Fournir un référentiel nécessaire à l’évaluation de la qualité de l’environnement

marin.

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L’initiative de la mise en œuvre d’un réseau de surveillance chimique des produits phytosanitaires s’appuie dans un premier temps sur les recommandations nationales (MEDD, CSTS), les engagements internationaux (OSPAR) et les obligations réglementaires (DCE). La définition des moyens indispensables à la réalisation des objectifs fixés pour cette surveillance sera ensuite nécessaire. Concernant l’élaboration de la stratégie de la surveillance chimique des pesticides en zones côtières, nous proposons d’élaborer cette réflexion autour de quatre points : i) choix des substances ; ii) choix des matrices ; iii) stratégies d’échantillonnage ; iv) exigences analytiques. Les principaux objectifs de la surveillance chimique proposée sont les suivants : - la surveillance des apports chimiques des pesticides en zones côtières : apprécier

les tendances et l’efficacité des mesures prises pour la réduction des apports en contaminants,

- la surveillance de la distribution spatiale : évaluer le niveau actuel de la contamination et suivre son évolution, et mettre en évidence les grandes différences régionales dans la contamination.

Par ailleurs, on peut rappeler qu’un autre schéma pour la surveillance des substances prioritaires, dont certains pesticides dans l’eau, est formulé dans le cadre de la DCE. Cette surveillance ne vise pas spécifiquement les produits phytosanitaires, et son objectif principal est seulement le contrôle de la qualité des masses d’eau, en référence à des normes de qualité environnementale. Elle fournit une faible valeur informationnelle quant à la surveillance de la contamination chimique des zones côtières par les pesticides. 4.1 Choix des substances Les produits phytosanitaires regroupent plus de 900 molécules actives. Pour définir des stratégies de surveillance, il apparaît donc nécessaire de cibler les molécules susceptibles de se retrouver dans le milieu marin côtier, en fonction de différents critères qui seront développés ci-dessous. 4.4.1. Réglementations et listes prioritaires

Des listes de substances prioritaires sont établies pour répondre à diverses exigences ou réglementations, nationales ou internationales. Ces listes doivent par conséquent guider le choix des molécules à rechercher et surveiller en milieu marin puisqu’il s’agit parfois d’une obligation réglementaire (c’est le cas de la liste des substances prioritaires de la DCE). La mise sur le marché et l’utilisation des pesticides sont par ailleurs réglementées au niveau européen par la Directive 91/414/CEE qui établit des listes de substances autorisées. Différentes méthodologies plus ou moins complexes et lourdes sont utilisées pour sélectionner et identifier les substances prioritaires. Ces méthodologies reposent entre autres sur des connaissances scientifiques. Par exemple, la procédure COMMPS (« COmbined Monitoring-based and Modelling-based Priority Setting ») a été adoptée par la Commission européenne en tant qu’outil pour la sélection des substances

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prioritaires de la DCE. Elle permet d'appliquer une procédure simplifiée pour la sélection des substances prioritaires qui repose sur des principes scientifiques et tient plus particulièrement compte:

• des données concernant le danger intrinsèque de la substance en cause et, en particulier, son écotoxicité aquatique et sa toxicité pour l'homme via les voies aquatiques d'exposition ;

• des données de la surveillance attestant une contamination étendue de l'environnement ;

• d'autres facteurs éprouvés pouvant indiquer la possibilité d'une contamination étendue de l'environnement, tels que le volume de production ou le volume utilisé de la substance en cause, et les modes d'utilisation.

D’autres procédures, telles que par exemple la procédure DYNAMEC utilisée par la convention OSPAR, identifient aussi les substances chimiques prioritaires (dont de nombreux pesticides) sur la base de leur Persistance, Bioaccumulation et Toxicité (PBT), et prenant en compte également les volumes de production et d’usage des substances, ainsi que les données de la surrveillance quand elles sont disponibles. Il convient aussi de mentionner que d’autres listes nationales et régionales devraient aussi être utilisées pour le choix des produits phytosanitaires à surveiller en milieu marin. Ces listes sont établies en utilisant les résultats d’enquêtes visant à estimer (au plan régional et national) les quantités des produits phytosanitaires appliqués et une méthode de calcul de rangs (SIRIS – Système d’Intégration des Risques par Interaction de Scores) pour le classement des substances actives prioritaires (CORPEN – Comité d’Orientation pour les Pratiques agricoles respectueuses de l’Environnement). Par ailleurs, relativement nombreux sont les modèles mathématiques développés afin d’évaluer par exemple les potentiels de pertes de produits phytosanitaires vers les eaux continentales et vers les nappes phréatiques (Leite 1986). Cette démarche scientifique permet d’intégrer les variables environnementales clés (ex. conditions climatiques, géomorphologie du terrain, type de sols, couverture végétale, propriétés physico-chimiques des molécules, etc.) ainsi que les pratiques agricoles pour véritablement simuler les comportements et les risques de la contamination des eaux par les produits phytosanitaires. Les modèles mathématiques peuvent être utilisés pour identifier les pesticides représentant un risque pour l’environnement. Cependant, l’utilisation et la validation de ces modèles requièrent un grand nombre de données et restent généralement relativement complexes. Cependant, on remarque souvent que, malgré un degré de sophistication élevé de certaines de ces procédures, leurs résultats dépendent largement de la disponibilité de données pertinentes (par exemple des données de la surveillance chimique). De plus, si le classement des substances dangereuses peut être fait en leur fixant un rang de priorité, il est aussi important que ces classements soient systématiquement révisés en prenant en compte de nouvelles connaissances. En d’autres termes, la sélection des substances prioritaires devrait être un processus relativement souple permettant la

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modification de ces listes. C’est le cas pour les substances prioritaires de la DCE dont la liste doit être révisée tous les 4 ans. Ce devrait également être un processus interactif entre la surveillance (données de terrain) et la modélisation. Les listes de composés prioritaires à surveiller ne sont cependant que rarement établies pour le milieu marin, et une adaptation doit être faite pour tenir compte des particularités de ce milieu. Ainsi par exemple, la liste des 33 substances prioritaires de la Directive Cadre sur l’Eau compte 10 pesticides (cf. Annexe). Une analyse de la pertinence pour le milieu marin des substances prioritaires de la DCE a été réalisée par l’Ifremer (Marchand et al., 2004). Parmi la liste des pesticides de la DCE, seul le lindane fait d’ores et déjà partie de la surveillance mise en œuvre dans le cadre du RNO. 4.1.2. Données de terrain

Pour dresser des listes de pesticides prioritaires à surveiller en milieu marin, l’obtention de données de terrain doit aussi être préconisée. Les études menées par l’Ifremer dans les eaux côtières des baies de Bourgneuf et de l’Aiguillon ainsi que dans l’estuaire de la Loire illustrent bien cette démarche (Tronczyński et Moisan 1999 ; Tronczyński et al., 1999a). Pour identifier les pesticides dans ces échantillons, deux démarches ont été adoptées, d’une part une recherche systématique des composés chimiques ciblés (selon une liste régionale des Pays de la Loire), d’autre part le dépistage des produits phytosanitaires dans les eaux côtières. Il est intéressant de comparer les résultats de dépistage des matières actives aux exutoires de bassins versants avec les listes régionales, lorsqu’elles sont disponibles. La surveillance des produits phytosanitaires dans les eaux côtières devrait donc comprendre le dépistage analytique des pesticides. En effet, dans les exemples des études citées, la présence de composés chimiques dissous dans les eaux côtières qui ne figurent pas sur les listes régionales a été mise en évidence. Par ailleurs, il est important de souligner que la détection de nombreux composés chimiques dissous dans les eaux de la frange côtière et aux exutoires de leurs bassins versants indique a priori une contamination importante à l’amont par ces substances. Les pesticides détectés dans les eaux côtières peuvent généralement être considérés comme persistants et mobiles dans l’environnement (Tronczyński 1992 ; Munschy 1995). Les listes prioritaires n’incluent pas les produits de dégradation des molécules parentes. Cependant, ces produits sont présents parfois en quantités non négligeables dans les eaux continentales, et sont également identifiés en milieu marin (Munschy 1995 ; Tronczyński et al. 1999b). Ils doivent donc être intégrés aux programmes de suivi. On constate finalement que l’identification formelle des composés chimiques à l’état de traces dans l’environnement nécessite le croisement de différentes conditions et techniques analytiques. Ces analyses sont réalisées en plusieurs étapes et exigent un équipement sophistiqué. Le développement de nouvelles pratiques au sein des laboratoires d’analyse, l’utilisation de la spectrométrie de masse pour l’identification

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des composés, ainsi que l’élaboration de nouveaux protocoles et de schémas analytiques devront être encouragés. Par ailleurs, L’Ifen publie chaque année un bilan relatif aux pesticides dans les eaux (Ifen, 2004), qui fait état des principales substances retrouvées dans les eaux de surface continentales et souterraines, et les eaux distribuées. Ces informations permettent également d’orienter le choix des substances à rechercher en milieu marin côtier. Ce bilan fait ainsi apparaître la présence dans les eaux continentales de surface de certains herbicides qui ne figurent pas dans les listes des substances prioritaires DCE ou OSPAR (exemple : glyphosate, aminotriazole). 4.2 Choix des matrices 4.2.1. Matrices naturelles : eau, sédiment, biote

Trois matrices naturelles peuvent être considérées pour la surveillance des produits phytosanitaires en milieu marin côtier : l’eau, les matières solides naturelles (matière en suspension, sédiment) et le biote (organismes vivants). Le terme « eau » désigne l’eau filtrée : il est en effet important d’analyser séparément l’eau et la matière en suspension. La biodisponibilité des contaminants dans l’eau dépend de leur état dissous ou particulaire (lié à la matière en suspension -MES). L’analyse de l’eau totale conduit donc à une description erronée de l’exposition. D’après les recommandations OSPAR (OSPAR 1999), les espèces de choix pour la surveillance en milieu côtier sont la limande (Limanda limanda), le cabillaud (Gadus morhua) et la moule (Mytilus edulis et Mytilus galloprovincialis). L’expérience du Réseau National d’Observation (RNO) de l’Ifremer a démontré que, parmi ces organismes vivants, les mollusques bivalves (moule, huître) constituent de bons indicateurs de l'état chronique de la contamination du milieu littoral. Le choix de la matrice est principalement dicté par l’affinité du contaminant considéré pour cette matrice et donc par les propriétés physico-chimiques du contaminant considéré. La répartition entre l’eau, les matière solides naturelles et le biote peut être vue comme la répartition entre la phase aqueuse et les phases organiques naturelles présentes dans les matrices « solides » (matière en suspension, sédiments ou biote). Un des paramètres déterminant est alors le caractère hydrophobe du contaminant, ordinairement décrit par le coefficient de partage octanol-eau (Kow). Ce coefficient correspond au rapport entre la concentration en contaminant dans la phase octanolique et la concentration en contaminant dans la phase aqueuse (en équilibre avec l’octanol). Kow est un bon indicateur du coefficient de partage du contaminant avec la matière organique du sédiment (Koc) et du facteur de bioconcentration (BCF) de ce contaminant (Schwarzenbach et al. 2003). Une manière très simplifiée de choisir, pour un contaminant donné, la matrice devant faire l’objet d’une surveillance, est de considérer que les contaminants présentant un log Kow < 3 seront préférentiellement mesurés dans la phase aqueuse, alors que ceux présentant un log Kow > 5 seront préférentiellement mesurés dans les sédiments (ou matière en suspension) ou le biote. Ainsi par exemple, l’atrazine (log Kow = 2.6) sera mesurée dans l’eau, alors que le DDT (log Kow = 6.11) sera mesuré dans les sédiments ou le biote. Pour un log Kow

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compris entre 3 et 5, toutes les matrices doivent être considérées. A noter que sur les 10 produits phytosanitaires de la liste DCE, 8 devraient être suivis dans l’eau (Cf. Annexe). D’une façon générale, le choix d’une matrice intégratrice sera préférable à l’eau. Une détermination plus fine de la distribution d’un contaminant entre ces différentes matrices naturelles pourra être effectuée à partir d’informations plus détaillées sur le site considéré (concentration en MES de l’eau considérée, teneur en carbone organique de MES…) et sur le contaminant (coefficient de partage matière organique/eau…) (Squillace and Thurman 1992 ; Mackay et al. 2000). Exemple pour l’atrazine : Considérons un coefficient de partage de l’atrazine avec la matière organique égal à Koc = 160 mL/goc.. Pour une matière en suspension (MES) contenant 2% de carbone organique, le coefficient de partage avec la matière en suspension sera : Kd = 0.02 * 160 = 3.2 mL/g. Kd est égal au rapport entre la concentration en atrazine dans la MES et la concentration dans l’eau. Si l’on a une concentration en atrazine dans l’eau de 10 ng/L (10 pg/mL), la concentration sur la MES sera alors de 32 pg/g. Si l’on considère maintenant que la concentration en MES dans l’eau est de 100 mg/L, il apparaît que 10 ng d’atrazine sont présents dans la phase dissoute et 3.2 pg dans la MES. Ceci signifie que 0.03% de la quantité totale d’atrazine sont dans la matière en suspension. Une étude réalisée sur les canaux des marais de Charente Maritime, fortement contaminés en atrazine (2-8 µg/L), a ainsi montré que malgré une concentration en MES assez élevée (20-80 mg/L), la part d’atrazine associée à la MES reste toujours inférieure à 1% (Munschy 1995). Le choix de la matrice peut donc être imposé par les caractéristiques de la substance considérée. Cependant selon que l'on utilise l'une ou l'autre, le renseignement acquis sera différent. Par exemple, le phénomène de bioaccumulation rend les concentrations mesurées dans les mollusques représentatives de l’état chronique de contamination du milieu sur les quelques mois qui précédent le prélèvement. Quant à l’analyse des sédiments, elle permet une évaluation à plus long terme de la contamination, le premier centimètre superficiel pouvant intégrer plusieurs années de contamination. Quand elles sont utilisables, on voit donc l'avantage des matrices dites "intégratrices" par rapport à l'eau dont les fluctuations rapides du milieu littoral compliquent la représentativité spatiale et temporelle. 4.2.2. Capteurs passifs

Une autre approche pour la surveillance des produits phytosanitaires en milieu côtier peut être l’utilisation de capteurs passifs. Un capteur passif est un dispositif qui présente un milieu adsorbant vers lequel les contaminants d’un milieu donné (eau, sédiments) vont diffuser librement par simple différence de potentiel chimique. Ces capteurs sont placés dans la colonne d’eau (ou les sédiments) pendant une période de temps définie. Ils sont ensuite collectés et les contaminants retenus dans le capteur peuvent être analysés. A partir de relations mathématiques prédéfinies, il est alors possible de relier la concentration en contaminant dans le capteur avec celle du milieu

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environnant. Ce type de dispositif permet d’obtenir une concentration en contaminant intégrée sur une période de temps et donc de s’affranchir des variations rapides de concentration en contaminant parfois observées dans le milieu marin côtier. Différents types de capteur ont été mis au point selon le caractère hydrophile ou hydrophobe des contaminants recherchés (Kot et al. 2000). Les membranes semi-perméables SPMDs (« Semi Permeable Membrane Devices ») (tube plat de polyéthylène rempli avec une phase lipidique, trioléine) sont parmi les capteurs passifs les mieux décrits et donc les plus utilisés dans différentes matrices (colonne d’eau, sédiments). Ces capteurs permettent de déterminer la concentration des contaminants organiques hydrophobes. D’après une expérience récente à l’Ifremer (Tronczyński et al. 2003), ces capteurs, placés in situ dans la colonne d’eau, se sont révélés comme de bons indicateurs de la contamination du milieu marin par les pesticides organochlorés. Des expérimentations en conditions contrôlées de laboratoire ont démontré que de tels capteurs pouvaient également être utilisés pour le suivi de contaminants hydrophobes dans les sédiments (Tixier et al. 2004). Quant aux contaminants hydrophiles, un capteur passif, POCIS (« Polar Organic Chemical Integrative Sampler »), a récemment été mis au point et testé pour le suivi in situ d’herbicides en milieu aquatique (Alvarez et al., 2004). Ce capteur permet la concentration des contaminants présentant un log Kow inférieur à 4. Toutefois, l’utilisation en routine des capteurs passifs pour la surveillance nécessite encore des développements et validations. 4.3 Stratégies d’échantillonnage Le choix des stratégies d’observation et de surveillance de la contamination chimique des zones côtières et estuariennes par les produits phytosanitaires dépend des objectifs visés par ces réseaux d’observation. La stratégie d’échantillonnage proposée dans le présent document intègre deux approches :

• Le choix des grands estuaires en tant que sites de la surveillance ; • Le choix de l’estimation des apports chimiques des pesticides en zones

côtières en tant qu’objectif de la surveillance. •

Les commentaires et la discussion concernant le choix de cette stratégie sont présentés ci-après. A cette occasion, les notions relatives à d’autres stratégies de surveillance sont aussi évoquées. 4.3.1. Choix des sites

♦ Grands estuaires en tant que sites de choix pour la surveillance des pesticides. Les estuaires constituent un environnement transitoire et une interface entre les milieux terrestre et marin et des lieux privilégiés de transport vers les zones côtières notamment des contaminants d’origine agricole. Les estuaires sont considérés aussi comme des systèmes intégrateurs des bassins versants des fleuves et représentent pour cette raison des sites d'études de choix pour identifier et estimer les apports en contaminants d'origine continentale vers le milieu marin. Une surveillance menée aux interfaces estuariennes permet d’apprécier l'importance de la contamination des zones côtières par les pesticides. Les estuaires s’avèrent aussi être les lieux modèles pour

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suivre des tendances de cette contamination, ainsi que pour l’appréciation de l’efficacité des dispositions prises pour diminuer les rejets et la contamination des eaux par les pesticides sur l’ensemble des bassins versants. En France, les apports des pesticides en zone littorale dépendent surtout du transport de ces produits dans les bassins versants des grands fleuves (Seine, Loire, Garonne/Dordogne et Rhône). Les bassins versants de ces fleuves couvrent 65 % de la surface du territoire et leurs apports correspondent à 80 % des eaux douces déversées en zones côtières. Il est proposé de mettre en place un réseau de surveillance de la contamination chimique des eaux par les produits phytosanitaires pour chacun des grands bassins versants en France (Figure 7). Avec seulement quatre stations de prélèvement, ce réseau établi aux exutoires des grands bassins versants fournira des données de grande représentativité à l’échelle nationale. Ce choix des sites est réalisé pour répondre aux objectifs de la surveillance proposée, c’est-à-dire pour pouvoir estimer les apports chimiques des pesticides à l’échelle des zones côtières en France. Les flux bruts qui arrivent en zones estuariennes sont établis à une intersection située le plus en aval d’un fleuve, mais en amont de l’influence chimique de la mer et de sa marée dynamique. La fréquence de l’échantillonnage nécessaire sera abordée dans le paragraphe suivant. Il convient de préciser qu’on considère ici les produits phytosanitaires en tant que composés chimiques relativement solubles dans l’eau (logKow < 3)et présents dans l’environnement marin surtout à l’état dissous (Munschy 1995). Cependant, la stratégie décrite est aussi valable pour l’estimation des apports en pesticides associés aux matières en suspension mais la méthodologie de calcul est différente (Walling et Webb 1985 ; Meybeck 1992 ; Cossa et al. 1994 ; Tronczyński et Moisan 1996). Il est à noter que cette stratégie permet de faire le lien entre les bassins versants et la contamination des zones côtières par les pesticides. Cette stratégie répond à l’exigence de fournir des données de grande représentativité et à un fort contenu informatif. De plus, la mise en œuvre des dispositifs de suivi des apports des pesticides en zones côtières est relativement simple et ses coûts proportionnellement restreints. Enfin, l'estimation des flux bruts chimiques de contaminants au niveau des interfaces océaniques s’inscrit actuellement dans le contexte réglementaire international (ex. OSPAR, DCE) répondant aux engagements pris par la communauté internationale de la réduction des apports des substances prioritaires en milieu marin côtier

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Figure 7 : Schéma d’une stratégie d’échantillonnage pour la surveillance des apports chimiques des produits phytosanitaires en zones côtières en France ; les points rouges indiquent les stations de prélèvement des quatre grands bassins versants couvrant 65 % du territoire national et correspondant à 80% des eaux douces déversées en zones côtières. Ceci représente 96 échantillons par an (prélèvements deux fois par mois).

♦ Autres fleuves. La surveillance de la contamination chimique par des produits phytosanitaires du littoral français peut également être menée sur d’autres fleuves ainsi que sur des zones côtières. La surveillance régionale des fleuves et rivières qui se déversent directement en mer des six régions côtières (Nord, Normandie/Bretagne, Poitou/Charente, Aquitaine, Languedoc/Roussillon, Provence) devrait être menée localement. Le choix des sites et la répartition spatiale des points de prélèvements devront être faits en fonction de leur importance écologique, économique et des spécificités agricoles de leur bassin versant (ex. baies / pertuis / calanques marines sous une forte influence des apports locaux ou zones de production conchylicole…). L’évaluation des apports chimiques des pesticides à la mer par ces fleuves peut être menée selon la même stratégie d’échantillonnage que pour les grands fleuves (Tronczyński et al. 1995a) ♦ Zones côtières. En zone franchement côtière, le choix la répartition spatiale des points de prélèvements devrait être effectué selon la typologie des masses d’eau concernées et la représentativité environnementale recherchée. Cependant, considérant l’étendue et la dynamique des masses d’eau côtière, cette surveillance soulève la question de la représentativité de l’échantillonnage. Il s’agit d’une difficulté intrinsèque à la surveillance de la contamination chimique des eaux côtières. La modélisation du transport hydrodynamique des pesticides fournit un outil prédictif de la contamination des masses d’eau littorales, pouvant être utilisé pour identifier les

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masses d’eau à surveiller. De plus, cette surveillance pose le problème de sa faisabilité et des coûts rattachés (ex. besoin de méthodes analytiques sensibles pour la détection de concentrations très faibles des pesticides en milieu marin, besoin de navires océanographiques et d’autres embarcations pour les prélèvements, déploiement des dispositifs de mouillage, difficulté liée à la nécessité d’une fréquence élevée de l’observation,…). Malgré ces difficultés, une stratégie d’échantillonnage raisonnée consiste à mener des prélèvements systématiques dans les masses d’eaux côtières le long d’un gradient de salinité élevée, entre 30 et 35 PSU. Ces masses d’eaux caractérisent en effet les conditions limites des zones côtières et elles connaissent une plus grande stabilité (physique et chimique). Cette stratégie permet donc à priori une estimation des apports nets des pesticides en zones côtières (Tronczyński et al 1999b ; Pempkowiak et al. 2000). Par ailleurs, tel qu’indiqué précédemment, le développement de capteurs/échantillonneurs passifs déployés in situ pourrait à terme constituer une alternative efficace et opérationnelle pour mener la surveillance de la contamination chimique des masses d’eau côtière par les pesticides. 4.3.2. Stratégie d’échantillonnage

Les flux bruts des produits phytosanitaires exportés aux estuaires des grands fleuves sont quantifiés à partir de la détermination de leurs concentrations dans l’eau et dans les MES, et de l’enregistrement des débits hydrique et solide (Walling et Webb 1985 ; Cossa et al. 1994). Ces apports sont quantifiés pendant un an, en prenant plutôt en compte « l’année hydrologique » d’un bassin versant. Les débits (hydrique, solide) peuvent normalement être enregistrés en continu, alors que le dosage des contaminants chimiques est effectué seulement de façon discontinue à une fréquence relativement faible. C’est pourquoi il est préférable d’adopter, en règle générale, un échantillonnage représentatif des masses d’eau et des MES déversées dans l’estuaire pour que la détermination des apports annuels en pesticides dissous et particulaires en zones côtières soit précise. De plus, la répartition d’échantillonnage doit prendre en compte les variations des régimes hydriques des fleuves et de la concordance entre les traitements de cultures et la pluviosité sur leurs bassins versants. Enfin, de nombreuses méthodes d'estimation de flux fluviatiles ont été formulées justement du fait de la grande variabilité des relations existantes entre les flux des constituants étudiés et les régimes hydrologiques dominants ou hydrosédimentaires pour les composés associés aux matières en suspensions. Il ressort de cette discussion que la surveillance des charges polluantes fluviatiles apportées en zones côtières, une fois son objectif défini, est un problème d'optimisation de la stratégie d'échantillonnage et du choix d'une estimation statistique (Preston et al. 1989). L’examen des résultats d’études ponctuelles des apports annuels des pesticides des trois grands fleuves français du Rhône, de la Seine et de la Loire (Tronczyński et Moisan 1996, Tronczyński et al. 1999b ; Tronczyński et Moisan 1999) peuvent servir pour définir la stratégie d’échantillonnage pour la surveillance pérenne. Ces résultats montrent que le régime hydrique joue généralement un rôle prépondérant dans les flux des constituants chimiques dissous. Il apparaît aussi que ces flux sont proportionnels

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aux débits moyens des fleuves. Ces études démontrent ainsi que généralement, un échantillonnage bi-mensuel (24 échantillons par an) est suffisant pour une très bonne couverture du débit hydrique et de toutes les masses d’eau déversées en mer par ces fleuves. Par ailleurs, à titre de comparaison, les résultats de plusieurs méthodes de calcul des apports en herbicides dissous à la Méditerranée ont été testés (Tronczyński et Moisan 1996). Il ressort de cette comparaison que les résultats obtenus par les différentes méthodes de calcul des flux sont comparables à ± 20%. La situation est différente concernant la stratégie d’échantillonnage pour l’estimation des charges solides. Le classement des apports solides en fonction du débit liquide dans le Rhône (Tronczyński et Moisan 1996) montre que ce sont les fortes crues qui contribuent pour presque 80 % de l’apport annuel en MES. On remarque dans ce classement qu’un seul pic de crue peut apporter une charge solide très importante représentant 35 % du débit solide annuel. Ceci confirme l’importance d’un échantillonnage beaucoup plus fréquent pendant les fortes crues pour l’évaluation des charges solides annuelles en contaminants associés aux MES. Ce type d’échantillonnage des MES devrait vraisemblablement être automatisé pour pouvoir saisir les pics des crues. 4.4 Exigences analytiques La détection et la quantification des produits phytosanitaires dans les divers compartiments de l’environnement marin côtier relèvent de l’analyse de traces dans des matrices complexes, et nécessitent par conséquent la mise en oeuvre de méthodes et techniques sophistiquées. Les niveaux de présence de ces contaminants étant généralement faibles, il est en effet nécessaire de se prémunir des risques de contamination des échantillons, d’assurer la récupération quantitative des molécules recherchées, et de les quantifier précisément à l’aide de systèmes performants. Des précautions analytiques doivent être prises depuis le prélèvement jusqu’au dosage final. Il existe de nombreuses méthodes d'analyse des pesticides dans les différentes matrices de l'environnement. La chromatographie en phase gazeuse (CPG) sur colonne capillaire est l'une des techniques de détection de ces molécules classiquement utilisée, en association avec des détecteurs de sélectivités diverses. Certains pesticides thermolabiles, comme les herbicides phénylurées, nécessitent l’utilisation de la chromatographie en phase liquide (CPL). Enfin, la spectrométrie de masse (SM), couplée avec la CPG ou la CPL, est en outre utilisée en tant qu'outil puissant de détection des composés (recherche d'identification, confirmations qualitative et quantitative). Actuellement, les techniques encore plus élaborées telles que la CPL/SM/SM sont plus faciles à mettre en oeuvre et font partie des techniques de plus en plus utilisées. Pour plus de détails, on se reportera notamment à la synthèse de Sherma (2001), aux « Handbook of residue analytical methods for agrochemicals » ( Lee, 2003, deux volumes), ainsi qu’aux documents de la Commission Européenne (SANCO 2000, 2004).

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Les procédures d’assurance qualité des résultats obtenus comprennent notamment la réalisation de blancs sur l’ensemble du protocole de traitement de l’échantillon, l’utilisation d’étalons de contrôle du rendement de récupération, l’évaluation de la répétabilité, de la reproductibilité et de la précision, l’évaluation de la justesse (utilisation de matériaux certifiés, lorsqu’ils existent), et la calibration (exemple : étalonnage dans le domaine de linéarité du détecteur). Les limites de détermination et de quantification doivent être compatibles avec les niveaux de présence des molécules dans le milieu et la matrice considérés et déterminées (Directive 96/46/EC). Les performances à atteindre seront également fonction des objectifs recherchés. Différents critères de validation d’une méthode peuvent ainsi être énoncés (SANCO 2004)

- La calibration doit être réalisée dans un domaine couvrant les concentrations extrêmes devant être déterminées, et étendu au moins à ± 20% ;

- La répétabilité (écart-type relatif) doit être déterminée sur un nombre de réplicats

donné, et doit être inférieure à 20% ; - Les pourcentages moyens de rendement sur des échantillons fortifiés doivent être

compris entre 70% et 110% ; - Les blancs doivent être déterminés et inférieurs à 30% de la limite de

quantification ; - Des méthodes de confirmation doivent être utilisées pour démontrer la spécificité

de la méthode, parmi lesquelles on peut citer la CPG/SM, CPL/SM, l’utilisation de colonnes à différentes phases stationnaires ou mobiles, ou l’utilisation de différents détecteurs.

La participation à des exercices d’intercomparaison (exemple : programme européen QUASIMEME) choisis pour les matrices, les molécules, et les niveaux de contamination adéquats est également recommandée.

5 La surveillance des effets biologiques En complément des informations apportées par l’analyse chimique des contaminants, il est utile de développer des marqueurs biologiques permettant de mettre en évidence de potentiels désordres moléculaires, cellulaires ou physiologiques liés à l’exposition aux contaminants chimiques. Ce concept de biosurveillance repose sur l'étude de la réponse biologique des organismes aux contaminants. Les biomarqueurs utilisés sont aujourd’hui largement discutés notamment à propos de leur signification écologique et de leur spécificité vis-à-vis des différentes classes de contaminants chimiques. Leur variabilité naturelle est trop souvent un facteur limitant à la mise en évidence avérée d’une relation exclusive entre contaminants et effets toxiques. D’autre part, compte

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tenu de la pluralité de la contamination, la réponse biologique à l’exposition est rarement spécifique d’une famille de contaminants. C’est essentiellement pour ces deux raisons qu’il y a nécessité de coupler les données de l’analyse chimique avec celles des effets; en d’autres termes, le rapprochement des deux informations doit se faire à partir de cette question: les concentrations en contaminants identifiés dans un milieu donné sont-elles susceptibles d’induire des effets précoces mesurables avec les outils d’aujourd’hui ? Une relative exception à ces incertitudes concerne la mesure des effets des pesticides puisque celle-ci repose pour certains biomarqueurs sur les modes d’action de ces molécules. Par leur finalité, les pesticides sont des perturbateurs efficaces des processus du vivant et les cibles biologiques de ces molécules sont bien identifiées Deux familles de pesticides posent des problèmes environnementaux particuliers notamment par leur ubiquité (herbicides) et/ou leur toxicité (insecticides). Les herbicides sont pour la plupart des inhibiteurs de la synthèse d’acides aminés (imidazolinones, sulfonylurées, sulfonanilides, glyphosate), des inhibiteurs de biosynthèse des caroténoïdes (triazoles) et des inhibiteurs de la photosynthèse (triazines, urées substituées). Les insecticides organophosphorés, carbamates et pyrèthrénoïdes sont des neurotoxiques puissants (Fukuto 1990 ; Mineau 1991). Ces spécificités dans le mode d’action des herbicides et des insecticides ont inspiré le choix du développement de certains marqueurs directement fondé sur leur action (Day et Scott 1990). L’inhibition de la croissance cellulaire et la chute des populations phytoplanctoniques peuvent être utilisés comme marqueurs potentiels des effets des herbicides et la perturbation de la transmission cholinergique est un indicateur pertinent des effets des insecticides neurotoxiques. Dans le contexte d’une surveillance des effets potentiels des pesticides dans les eaux côtières, ces outils viennent en complément des données acquises de manière concomitante par l’analyse chimique des niveaux de présence. 5.1 Effets sur les espèces phytoplanctoniques L’inhibition de la croissance cellulaire par les contaminants chimiques est utilisée dans les tests de toxicité standards. Ceux-ci permettent de déterminer la toxicité d’un produit apporté dans les cultures réalisées en conditions où sont définis :

- la cible, ici l’espèce phytoplanctonique en culture monospécifique, - les paramètres physico-chimiques : lumière, température, enrichissement nutritif, - le mode de suivi de la croissance.

Les caractéristiques décrivant la croissance cellulaire en milieu marin sont précisées dans la norme ISO 10253 (AFNOR, 1998), elles utilisent la concentration cellulaire à des intervalles de temps réguliers jusqu’à 72h. La toxicité du contaminant testé à différentes concentrations est définie par la concentration entraînant 50% d’atténuation du taux de croissance, ou de biomasse par rapport au témoin sans contaminant (CE50). La concentration du contaminant ne produisant pas d’effet observé (CSEO, alias NOEC ou « No Observed Effect Concentration ») constitue en théorie la dose maximale tolérable pour l’espèce algale testée. Ces deux

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concentrations (CE50 et CSEO) servent en autres à la classification et à l’autorisation de mise sur le marché des substances chimiques et à l’évaluation des risques pour l’environnement selon le manuel européen d’évaluation du risque chimique, le « Technical Guidance Document » - TGD (EC 2003). La comparaison des CE50 permet de classer les produits selon leur degré de toxicité. De façon complémentaire, l’application de la méthode à plusieurs espèces phytoplanctoniques cultivées individuellement en présence d’un même contaminant permet de classer les espèces selon leur degré de sensibilité vis-à-vis de ce produit (Arzul et Durand 1999). Cependant, ces expériences réalisées en présence d’enrichissements nutritifs simulant le début de printemps ou l’été, ont montré que la composition nutritive du milieu joue également un rôle dans la sensibilité des microalgues vis-à-vis des toxiques. De plus la diminution de la croissance cellulaire n’est pas la seule modification causée par les produits toxiques, et la croissance excessive (hormèse), les changements morphologiques, la surproduction d’ATP, des perturbations dans la photosynthèse et la respiration sont également observés (Hourmant et al., 2004 ; Laisné et al., 2004a,b ; Lassus et al., 2004). L’application de la méthode standardisée (AFNOR, 2004) convient pour mettre en évidence différents degrés de toxicité chez les produits phytosanitaires et leurs diverses formulations, ou encore leurs associations. Mais cette méthode n’est pas réellement adaptée pour connaître les effets des contaminants présents dans les eaux côtières, dont la composition chimique varie selon les sites et les saisons. Un bioessai révèle les effets de substances toxiques dans l’eau. Il est basé sur la culture monospécifique d’une algue unicellulaire en milieu naturel perturbé par des apports d’origines diverses, et réalisé en conditions définies par la ligne directive ISO 14442 (AFNOR, 2004). La croissance algale est comparée à une culture témoin de composition nutritive standard et suivie selon le test normalisé ISO 10253 (AFNOR, 1998). La seule différence entre les milieux de culture est due à la présence de molécules autres que les nutriments. Cette méthode nécessite :

- la maintenance d’une culture mère de phytoplancton d’espèce définie par la méthode standardisée,

- l’ajustement de la salinité du prélèvement à celui de la culture mère, - la réalisation de la culture dans plusieurs dilutions du prélèvement à tester, afin de

le caractériser par une CE50 (facultatif : mentionné par EPA). Le test présente l’avantage de prendre en compte l’ensemble des substances présentes simultanément dans le milieu. Cette méthode est applicable pour la biosurveillance de la qualité de l’eau en routine. Le suivi de la biomasse algale dans les tests par comptage cellulaire au microscope, peut être remplacé par la mesure de fluorescence chlorophyllienne. Dans ce dernier cas, il est nécessaire de distinguer l’élévation de la fluorescence chlorophyllienne due à la présence :

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- des acides humiques (couleur jaune de l’eau) stimulateurs naturels de croissance cellulaire,

- des inhibiteurs de photosynthèse qui agissent sur le photosystème II et produisent jusqu’à une certaine dose, un rendement de fluorescence plus élevé que le témoin pour une même concentration en chlorophylle.

Parmi les indicateurs d’effet des contaminants sur le phytoplancton, il convient de mentionner les modifications de biodiversité. Les espèces répondent différemment lorsqu’elles sont soumises à la pression de contaminants en continu, sous forme d’apports ponctuels répétés ou d’une manière ponctuelle brutale et forte comme dans le cas d’un rejet accidentel. Les plus sensibles disparaissent au bénéfice des plus tolérantes. Hormis les analyses spécifiques dans les prélèvements des zones à étudier, le degré de tolérance aux contaminants chez les populations algales est un indice de perturbation chronique du milieu. L’activité physiologique prise en compte est la production primaire, dans le test basé sur le concept du PICT (« Pollution Induced Contamination Tolerance ») (Bérard et al. 1998). Ce test, qui nécessite l’emploi de molécules marquées, est délicat dans sa réalisation et l’interprétation des résultats (Blanck 2002). Il est justifié dans le cadre de bilans ponctuels, et ne constitue pas un test applicable en biosurveillance. 5.2 Effets sur les espèces animales 5.2.1. Inhibition des cholinestérases

La plupart des effets neurotoxiques des insecticides résultent de l’inhibition des cholinestérases, et plus particulièrement de l’acétylcholinestérase (AChE) chargée de réguler la transmission nerveuse. Les composés organophosphorés et les carbamates utilisés comme matière active dans la préparation d'insecticides, sont les plus puissants des inhibiteurs de cholinestérases. D’autres molécules neurotoxiques, parmi lesquelles figurent d’autres insecticides (pyréthrines), certains herbicides (triazines) et des métaux (arsenic, cuivre) ont été identifiées dans des phénomènes d’inhibition (Bocquené et Galgani 2004). Les organophosphorés et les carbamates sont des inhibiteurs directs de ce système enzymatique et toutes les espèces animales disposant d’une transmission cholinergique sont les cibles potentielles de ces molécules. Les activités cholinestérasiques ont été détectées chez la plupart des espèces littorales, du zooplancton aux poissons. L’activité AChE est la plus élevée dans le muscle et le cerveau de poisson, avec des amplitudes importantes en fonction des espèces. Les crustacés, dont l’affiliation phylogénique avec les insectes est forte, montrent une grande sensiblité aux insecticides (Coppage et al. 1974 ; Bocquené et al. 1997 ; Bocquené et Galgani 1998). Les activités mesurées chez les mollusques bivalves et gastéropodes sont en revanche assez faibles. L’étude des variations naturelles de l’activité AchE a montré que la température du milieu est la variable environnementale la plus influente chez les espèces poïkilothermes (poissons, crustacés et mollusques) et que les activités les plus fortes sont observées en période estivale (Hogan, 1970). De manière générale, le niveau d’activité est inversement

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proportionné à l’âge de l’organisme, les activités les plus fortes sont mesurées chez les plus jeunes individus (Bocquéné et al., 1990). 5.2.2. La mesure de l’activité acétylcholinestérasique et le choix des espèces

sentinelles

D’un point de vue analytique, la technique de mesure de l’activité de l’acétylcholinestérase se réfère presque exclusivement à la méthode d’Ellman et al., (1961). Le choix de l’espèce sentinelle sur laquelle les marqueurs biologiques sont mesurés est un compromis entre les exigences scientifiques, la finalité du suivi et les critères de faisabilité sur le terrain. Une espèce bioindicatrice doit avant tout être disponible, sensible, plutôt sessile pour refléter son environnement et facile à prélever. En milieu marin la plupart des suivis concerne les copépodes, les bivalves et les poissons benthiques. Les copépodes (Tigriopus brevicornis, Tisbe battagliae, Eurytemora affinis) ont montré une très forte sensibilité aux insecticides notamment Tigriopus qui vit dans les mares de la zone rocheuse intertidale et Eurytemora affinis, espèce dominante en zone estuarienne (Forget et al. 1999 ; Forget et al. 2003). Les vertébrés benthiques, particulièrement la sole (Solea solea), le flet (Platichthys flesus) et la limande (Limanda limanda) en Atlantique/Mer du Nord et le rouget barbet (Mullus barbatus) en Méditerrannée ont aussi été largement exploités parce qu’ils présentent une plus grande sensibilité que les mollusques aux inhibiteurs (bien que le coût d’échantillonnage des poissons soit souvent prohibitif). La moule commune (Mytilus edulis et Mytilus galloprovincialis) a fait l’objet de nombreuses études essentiellement pour son coût d’échantillonnage faible. Dans la plupart des configurations, il y a possibilité d’exposer des organismes placés dans des cages (technique du caging). 5.2.3. Couverture spatio-temporelle du suivi

Ces informations sont forcément liées à la nature chaque fois particulière de la zone à surveiller. La stratégie d’échantillonnage, en terme de fréquence et de sites, est fonction de la forte mobilité des apports agricoles aux milieux estuarien et côtier. En dehors de rejets accidentels, les apports sont échelonnés de la fin de l’hiver au début de l’été, de mars à juillet. Il y a donc intérêt à focaliser les efforts de surveillance sur cette période en privilégiant les périodes consécutives à des évènements pluvieux susceptibles d’amplifier les transferts à partir des zones traitées. Compte-tenu de la réversibilité relative des effets neurotoxiques, la fréquence de prélèvement ne devrait pas être supérieure à 7 jours. La situation la plus favorable pour un suivi efficace est celle de l’existence d’un gradient de contamination à partir d’une source identifiée, c’est le cas typique du transfert au milieu par une rivière. La localisation des sites sur ce gradient est facilitée par la localisation d’une station de référence abritée des apports. Les prélèvements se feront de manière simultanée sur l’ensemble des sites.

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5.2.4. Autres marqueurs potentiels

La plupart des insecticides sont des substrats des systèmes de métabolisation liés au cytochrome P450. L’induction de l’activité EROD, dépendante du CYP450 chez les espèces vertébrées, est mesurable dans le foie de poisson mais la coexistence d’une contamination avec d’autres inducteurs de type HAP et/ou PCB, peut limiter localement la spécificité de ce bio marqueur vis-à-vis des seuls insecticides. Les marqueurs de stress oxydant, de type catalases, superoxyde dismutase (SOD) ou le taux de malondialdehyde (MDA) (Livingstone et al., 1990, Fitzpatrick et al., 1997) sont utilisables mais leur production n’est pas exclusive d’une exposition aux insecticides.

6 Conclusions et recommandations La présence des produits phytosanitaires dans le milieu aquatique relève essentiellement d’une problématique d’une contamination diffuse et est reconnue comme étant l’un des problèmes majeurs de la dégradation de la qualité des eaux continentales et littorales. Le programme de surveillance RNO utilise les mollusques bivalves et le sédiment comme indicateurs quantitatifs de la contamination chimique, programme dans lequel les produits phytosanitaires sont peu représentés, exceptés les résidus du DDT et le lindane, du fait de la non bioaccumulation et la non adsorption de nombreuses molécules actives.

La surveillance des produits phytosanitaires en milieu marin côtier nécessite la mise en place de stratégies qui tiennent compte des spécificités du milieu, des pratiques agricoles et autres usages amont et de la diversité des molécules utilisées, dont les propriétés conditionnent le comportement biogéochimique et leurs effets écotoxicologiques.

6.1. Surveillance de la contamination chimique

Un réseau de surveillance doit permettre de :

- inscrire dans la durée l’observation et l’acquisition des données,

- comparer les niveaux et les tendances,

- fournir un référentiel nécessaire à l’évaluation de la qualité de l’environnement.

La stratégie de la surveillance chimique des pesticides en zones côtières qui est proposée vise deux objectifs :

- la surveillance des apports en zones côtières afin d’apprécier les tendances et l’efficacité des mesures prises pour la réduction des apports contaminants ;

- la surveillance de la distribution spatiale, afin de mettre en évidence les différences régionales dans la contamination et d’en suivre l’évolution ;

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Il n’est pas proposé une surveillance capable de répondre spécifiquement aux obligations réglementaires de la DCE, c’est à dire la conformité ou non au bon état chimique des eaux par rapport au référentiel constitué par la norme de qualité environnementale. Par contre, plusieurs éléments de recommandations peuvent répondre aux attentes pour la mise en œuvre du programme de contrôle de l’état chimique des masses d’eau constitutif à la DCE.

Les recommandations qui sont exprimées sont élaborées autour de quatre points : le choix des substances, le choix des matrices, les stratégies d’échantillonnage et les exigences analytiques.

Choix des substances

- Les listes de substances prioritaires de la DCE et de la Convention OSPAR

doivent guider le choix des substances à rechercher et surveiller en milieu marin. Ces listes doivent être comparées avec la liste prioritaire des substances phytosanitaires établie par le CORPEN pour prendre en compte la dimension nationale, sachant que la France se situe au premier rang des utilisateurs des produits phytosanitaires au niveau européen.

- Plus localement, au niveau de petits bassins versants, les enquêtes d’utilisation

des produits et des pratiques agricoles peuvent apporter des éléments d’information sur le choix des substances à suivre.

- Les données de terrain et de la surveillance doivent être utilisées. La recherche

des composés à l’aide de méthodes multi-résidus et de techniques de détection à large spectre doit être menée pour détecter les composés non répertoriés sur les listes prioritaires.

- Les produits phytosanitaires interdits mais très rémanents, et reconnus comme

étant des substances dont la répartition de la contamination est globale (exemple : liste des POPs) doivent être surveillées. C’est le cas par exemple du DDT et de ses métabolites, de l’aldrine et de la dieldrine.

- Les substances interdites plus récemment doivent également faire l’objet d’une

surveillance, permettant ainsi de fournir les informations sur l’efficacité des mesures. Par exemple, bien que l’atrazine ait été interdite à la vente et l’utilisation en France en septembre 2002, sa présence ubiquiste et sa persistance dans l’environnement justifient que cette molécule fasse toujours partie des substances à suivre.

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Choix des matrices

- Le choix des matrices naturelles (eau, matière en suspension, sédiment, biote) est dicté par l’affinité du contaminant pour la matrice envisagée et par conséquent par les propriétés physico-chimiques du contaminant considéré. Le coefficient de partage octanol-eau (Kow) est un bon indicateur de partage du contaminant avec la matière organique du sédiment ou de la matière en suspension, et du facteur de bioconcentration (BCF). Les contaminants présentant un log Kow <3 seront préférentiellement mesurées dans la phase aqueuse, ceux présentant un log Kow >5 seront préférentiellement mesurés dans les sédiments, matière en suspension ou biote. Les contaminants présentant un log Kow intermédiaire entre 3 et 5 pourront être surveillés dans toutes les matrices naturelles.

- Sur les 10 produits phytosanitaires considérés comme substances prioritaires de

la DCE (6 herbicides et 4 insecticides), seul un herbicide (trifluraline) présentent un log Kow >5. Les quatre insecticides ont un log Kow compris entre 3 et 5, et les cinq herbicides restants ont un log Kow <3 (Cf. Annexe).

- L’autre approche qui est préconisée pour la surveillance des produits

phytosanitaires est l’utilisation des capteurs passifs, soit ceux dédiés plus spécifiquement aux substances hydrophobes (système SPMD), soit ceux adaptés aux substances hydrophiles (ex. système POCIS). L’utilisation des capteurs passifs nécessite des développements méthodologiques et leur validation.

Stratégies d’échantillonnage

- Il est proposé une surveillance au débouché des quatre grands estuaires qui déversent 80% des eaux douces en zones côtières, afin de faire le lien entre les grands bassins versants à l’échelle nationale et la contamination des zones côtières par les pesticides, d’apprécier les tendances et l’efficacité des mesures prises pour la réduction des apports contaminants. Le dosage des contaminants chimiques est effectué de façon discontinue, à une fréquence relativement faible. Il convient d’adopter par conséquent un échantillonnage représentatif des masses d’eau et des matières en suspension déversées dans l’estuaire pour l’estimation des apports dissous et particulaires. Les expériences passées ont montré qu’un échantillonnage bi-mensuel est suffisant pour l’estimation des apports dissous. La situation est plus complexe pour définir la stratégie d’échantillonnage pour l’estimation des apports particulaires, sachant que les fortes crues peuvent contribuer à près de 80% de l’apport annuel en matières en suspension.

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- La même stratégie peut être adoptée à une échelle plus locale pour suivre la contamination des eaux côtières au niveau des estuaires situés sur les bassins littoraux Nord/Pas de Calais/Somme, Normandie/Bretagne, Poitou/Charentes, Aquitaine, Languedoc/Roussillon et Provence.

- La surveillance des produits phytosanitaires en zones côtières nécessite de

définir une représentativité environnementale en fonction de la typologie des masses d’eau concernées. Il est préconisé de mener des prélèvements dans les masses d’eaux côtières le long d’un gradient de salinité élevée, entre 30 et 35 PSU.

Exigences analytiques

- La détection et la quantification des produits phytosanitaires relèvent de l’analyse de traces dans des matrices complexes, nécessitant l’utilisation des techniques chromatographiques, soit la chromatographie en phase gazeuse, soit la chromatographie en phase liquide pour les molécules thermolabiles (ex. phénylurées). Le couplage avec la spectrométrie de masse, simple (SM) ou plus élaboré (SM/SM) permet de constituer des outils adaptés pour de telles analyses, au niveau de l’identification et de la quantification des molécules actives.

- Les procédures d’assurance qualité relatives à l’analyse de traces dans des

matrices complexes doivent être suivies.

6.2. Surveillance des effets :

- La décision d’une surveillance biologique des effets des pesticides doit être prise en fonction des données d’identification et de quantification fournies par l’analyse chimique.

- Pour ce qui concerne les effets des herbicides, la qualité de l’eau en terme de

compatibilité avec le développement de producteurs primaires peut être estimée à partir d’un bioessai basé sur la culture monospécifique d’une diatomée (Chaetoceros gracilis) dans le prélèvement à tester. La croissance de l’algue est comparée à celle dans un milieu témoin, les deux cultures étant réalisées simultanément dans les mêmes conditions de salinité, d’éclairement et d’enrichissement nutritif. Les prélèvements sont à réaliser en périodes sensibles, en raison de la coïncidence entre la présence de contaminants et le développement du phytoplancton. Ces périodes s’étendent depuis le début de mars (efflorescences printanières de diatomées) jusqu’en juillet (efflorescences estivales potentiellement nuisibles). L'avant-projet de normalisation de la Directive ISO 14442 (AFNOR 2004), actuellement au stade d'enquête probatoire, souligne l’intérêt potentiel de ce test dans le cadre d’un réseau de surveillance.

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- Dans le milieu naturel, les effets d’une majorité des insecticides sont

ponctuellement mesurables par le niveau d’activité des cholinestérases de quelques espèces cibles. Il est recommandé que les prélèvements soient réalisés durant la période d’épandage et de diffusion de ces produits, de mars à juillet, avec un pas d’échantillonnage inférieur ou égal à 7 jours. Le choix des espèces se fera prioritairement sur les crustacés (copépodes, crevettes), les espèces de poissons benthiques (poissons plats, rougets) ou par défaut sur les bivalves (moules). L’interprétation des données biologiques sera renforcée par l’existence de données apportées par l’analyse chimique.

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8 ANNEXE : Liste des produits phytosanitaires des listes prioritaires DCE et OSPAR

Liste prioritaire DCE Liste prioritaire OSPAR Herbicides Amide Triazine Triazine Urée substituée Urée substituée Dinitroaniline

Alachlore (log Kow 2,8) Atrazine (log Kow 2,6) Simazine (log Kow 2,2) Diuron (log Kow 2,7) Isoproturon (log Kow 2,5) Trifluraline (log Kow 5,3)

Trifluraline

Insecticides Organophosphoré Organophosphoré Organochloré Organochloré Organochloré Organochloré

Chlorfenvinphos (log Kow 3,8)Chlorpyrifos (log Kow 4,7) Endosulfan (log Kow 4,7) Lindane (log Kow 3,7)

Endosulfan Lindane Méthoxychlor (log Kow 4,68 - 5,08) Dicofol (log Kow 4,3)

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