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Les Échos de Saint-Maurice Nouvelles de l’Abbaye Numéro 10 • Décembre 2004

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Les Échos de Saint-MauriceNouvelles de l’Abbaye

Numéro 10 • Décembre 2004

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Comité de rédactionChanoinesOlivier RoduitJean-Bernard Simon-VermotM. Michel Galliker

ExpéditionFrère Serge Frésard

AdministrationChanoine Jean-Paul Amoos

AbonnementsA votre bon cœur !

CCP 19-192-7Échos de Saint-Maurice

ImpressionRhôneGraphic SA Saint-Maurice

Toute correspondance relativeaux Échos doit être adressée à :Les Échos de Saint-MauriceAbbaye Case postale 34CH-1890 Saint-Maurice

CouvertureL’Abbaye vue de l’Internat.

Crédit photographiqueAASM: 12. Abbaye de la Pierre-Qui-Vire: 22,23, 25, 26. Aumônerie du Collège: 46, 49.Les Béatitudes: 11, 31. A. Darbellay: 6.R. Jaquenoud: 28, 30, 32. A. Maillard: 14.M.-A. Rey: 35, 36, 38. O. Roduit: couv., 4, 5,8, 9, 13, 15, 16, 56. A. Schafer: 50, 51, 53.W. Stebler: 19.

Les Échos de Saint-MauriceNouvelles de l’Abbaye

Revue éditée parl’Abbaye de Saint-Maurice99e année.Quatrième sérieNuméro 10. Décembre 2004

Sommaire1. Soyons européens!

Mgr Joseph Roduit2. La route étoilée

Auguste Métral3. Chronique de l’Abbaye

Jean-Bernard Simon-Vermot17. Homélie de la Saint Maurice 2004

Mgr Amédée Grab20. Europe - Afrique : Fifty - fifty

Mgr Joseph Roduit22. Session du DIM à La Pelouse

Jean-Bernard Simon-Vermot27. La mission au Kazakhstan

Roland Jaquenoud33. Un enthousiasme au service de l’Evangile

Michel-Ambroise Rey40. Les Missions des Pères Blancs

Stéphanie Gay43. La Mission selon les Jésuites

Chantal Fellay46. Chronique du Collège

Michel Galliker50. Hommage aux professeurs retraités

Aloys Jordan, Philippe Maret,Max Hasler, Claude Hissette

Michel Galliker et Paul Mettan54. Chronique des Anciens55. Saint Hymnemode le magnanime

Germain Hausmann et Olivier Roduit

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ABBAYE DE SAINT-MAURICEAvenue d’Agaune 15Case postale 34CH-1890 Saint-Maurice

Tél.: [0041] (0)24 486 04 04Fax: [0041] (0)24 486 04 05Site internet: www.stmaurice.chE-mail: [email protected]

PORTERIE DE L’ABBAYE

La Porterie de l’Abbaye est ouverte tousles jours de 7h30 à 12h00,de 13h00 à 19h00 et de 19h45 à 21h00

MESSES ET OFFICES

Dimanche7h00 Messe8h30 Office du matin (Laudes)9h00 Messe conventuelle11h30 Office des Lectures18h00 Office du soir (Vêpres)19h15 Office des Complies19h30 Messe

En semaine6h30 Office du matin (Laudes)11h30 Office des Lectures18h05 Messe conventuelle et vêpres20h00 Office des Complies(Samedi: messe à 11h00)

Jours de fêteMesse pontificale à 10h00Fête-Dieu et Saint Maurice: messe à 9h30le reste comme le dimanche

TRÉSORET FOUILLES ARCHÉOLOGIQUES

Horaire des visites:

Janvier, février, mars, avril (jusqu’à Pâques):15h00.Après Pâques, avril, mai, juin:10h30, 15h00, 16h30.Juillet, août 2004: ouvert en continu (visites li-bres) 9h30-12h00, 14h00-18h00, visites guidéesà 10h30, 14h00, 15h15, 16h30.Septembre, octobre: 10h30, 15h00, 16h30.Novembre, décembre: 15h00.

Dimanches et des jours de fête: fermé le matinLundi: fermé toute la journée

Groupes : uniquement sur entente préalable,par écrit à l’adresse suivante:Chancellerie de l’AbbayeCase postale 124CH-1890 Saint-MauriceTél. [0041] (0)24 486 04 10ou par Fax: [0041] (0)24 486 04 05

Tarifs:Adultes CHF 6.- (4 euros)Enfants CHF 3.- (2 euros)Réduction pour les groupes.Conditions particulières pour les pèlerins.

PÈLERINAGES

Organisation et accueil:Chanoine Gaby Stucky, SacristeTél.: [0041] (0)24 486 04 04 ou 486 04 10Fax: [0041] (0)24 486 04 05

LES ÉCHOS DE SAINT-MAURICE. NOUVELLES DE L’ABBAYE

Revue éditée par l’Abbaye de Saint-Maurice à l’intention de ses amis

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Si vous désirez désormais recevoir régulièrement les Nouvelles de l’Abbaye,veuillez tout simplement nous communiquer votre adresse!

Les Échos de Saint-Maurice, Case postale 34, 1890 Saint-Maurice

Vous pouvez aider la Missionen envoyant vos timbres-poste à

Frère Serge Frésard, Case postale 34,CH-1890 Saint-Maurice

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ABBAYE DES CHANOINES RÉGULIERS DE SAINT-MAURICE

CASE POSTALE 34CH-1890 SAINT-MAURICE

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1LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

LA MISSION : AUTRES HORIZONS

Que restait-il de l’Église catholiqueen France après la Révolution française,après les guerres napoléoniennes? Or le 19e

et la première partie du 20e siècle ont été,par réaction, des plus grands siècles mis-sionnaires de l’histoire de l’Église. Pas undiocèse qui n’ait connu ses fondations decommunautés religieuses adonnées à l’en-seignement, aux soins médicaux, aux ac-tivités sociales. Le mouvement franchit lesmers pour relever les défis des missionnai-res des siècles précédents. Cet élan mission-naire a perduré jusque vers les années1970. Quel canton catholique suisse n’apas connu ses valeureux missionnaires par-

tis en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud ou dans les îles lointaines de l’Océanie?Mais depuis lors, il y a eu beaucoup moins de missionnaires prêtres, religieux,

religieuses ou laïcs. Par contre on a vu augmenter considérablement le nombre de voca-tions indigènes. A tel point que maintenant des pays dits de mission sont souvent mieuxdotés en personnes d’Église que les pays du vieux continent.

L’aide matérielle a aussi beaucoup changé. Nos paroisses, nos centres missionnairesont considérablement aidé nos missionnaires. Mais lorsque ceux-ci peu à peu ont vieilli,sont rentrés au pays ou sont décédés, l’aide s’est amenuisée. Dès lors, en ce qui concernel’Afrique par exemple, bien des évêques autochtones sont venus solliciter de l’aide auprèsdes organismes d’entraide européens. Souvent considérés comme des mendiants, ils de-mandent à être considérés d’abord comme des pasteurs, soucieux de l’évangélisation.

Dans ce sens le récent symposium qui a réuni à Rome évêques africains et euro-péens peut être considéré comme un tournant dans l’histoire de la Mission.

Il faut aussi citer le cas des pays de l’ex-Union soviétique. La chute du commu-nisme ouvre le champ de la mission et il est heureux que l’Église puisse redonner espoirà tant de personnes qui ont souffert dans l’Église du silence. Leur témoignage aujourd’huiest fort émouvant et nous interpelle sur notre tiédeur.

Avec le pape Jean Paul II, il importe d’être inventif et de permettre à «une nou-velle imagination de la charité» de s’exprimer.

+ Joseph Roduit, Abbé de Saint-Maurice d’Agaune.

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2 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

LA ROUTE ÉTOILÉE

On a présenté dans un précédent numéro des Échos (juin 2003, p. 42) unchoix de pensées d’un de nos anciens confrères, le chanoine Auguste Métral, morten 1979. Voici une autre gerbe de ses pensées, qui font penser aux apophtegmesdes pères du désert. Elles sont tirées de son manuscrit intitulé: La route étoilée.

On voit Dieu quand on sait qu’Il nous regarde.On fait oraison en se souvenant de sa Présence.Nous trouvons en Dieu toutes les richesses de ses créaturesLa petite action peut avoir une grande intentionLe seul apostolat sans limite est celui de la prière.Dieu a caché ses idées éternelles dans le tempsLa pauvreté des Saints est la richesse de l’Église.On gagne la guerre en perdant les batailles.Se tourmenter est le plus inutile des tourments.Les craintes s’envolent quand la charité s’installeLa patience est le passe-partout des sagesLa vraie pauvreté est dans la richesse du moment présentLa Charité a faim de Dieu pour les autresIl faut persuader autrui avec ses propres raisonsPour bien tendre la main, il faut présenter un cœur.Les défauts du prochain exercent nos vertusLes bons ordres doivent être enveloppés de bons exemplesLe Saint lutte en lui-même contre le mal de tousLa vie d’un Saint est son meilleur sermonUne goutte de lumière détruit un océan d’obscuritéLe sage n’exige la sagesse de personneLa direction vers la Sagesse est prise de partoutPour bien enseigner il suffit de beaucoup aimerLe silence garde celui qui le gardeQuand tout nous presse, il est bon de ralentirDieu nous attend partout et à chaque instant.

PENSÉES D’AUGUSTE MÉTRAL

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3LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

La dernière chronique s’achevait àPâques: si le mystère célébré en cette fêteest le sommet de l’année liturgique, ilse déploie ensuite tout au long des moisde l’été jusqu’à l’Avent. Le «Temps or-dinaire», loin de suggérer quelque chosede banal, nous rappelle au contraire quel’Esprit envoyé par le Christ ressuscitépoursuit au cours des âges son œuvrede rédemption et de sanctification, de«divinisation» de l’humanité. Si la Pen-tecôte n’est que l’éclatement initial decette œuvre de l’Esprit, il ne cesse toutau long des siècles, à travers les méan-dres si souvent obscurs de l’histoire, detravailler la pâte humaine pour achemi-ner les hommes vers le Royaume, versla plénitude du Corps mystique. À lapetite échelle de notre communauté,nous savons qu’il réalise invisiblementson dessein d’amour, en dépit du péchéet de ses suites, au cœur des événementsapparemment insignifiants, tantôt heu-reux tantôt attristants. Mais de ces pro-fondeurs où nous plonge notre regardde foi, remontons à la surface, suivonsle fil des faits quotidiens.

CHRONIQUE DE L’ABBAYE

Du 11 au 18 avril

La semaine de Pâques marque unrépit dans notre activité: les étudiantssont en vacances; un groupe de jeunesen profite pour faire un pèlerinage «Artet Foi» à Florence, accompagnés par leuraumônier Y.-M. Escher ainsi que le rec-teur Guy Luisier et Paul Mettan. Lechapitre général, fixé chaque année auvendredi de Pâques, se tient pour la pre-mière fois dans la nouvelle salle capitu-laire, ce qui crée une bonne ambiancecommunautaire. Le Père-Abbé bénitcette salle, ainsi que toute l’aile Saint-Théodule récemment restaurée, en par-courant les étages.

Une petite innovation liturgiqueaussi marque cette semaine: les compliessont célébrées non plus à la chapelle desreliques, mais à la basilique dans la nefNotre-Dame, et chantées habituelle-ment.

Dimanche 2 mai

La fête de saint Sigismond tombantle dimanche 2 mai, la messe de ce saintest anticipée au samedi soir pour la pa-

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4 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

roisse de ville; par solidarité avec elle, lacommunauté s’y associe, tandis quenous fêtons notre saint fondateur lelundi.

Vendredi 14 mai

Un chapitre claustral nous donnel’occasion de réfléchir à ce thème: «en-gagements personnels, vie communau-taire, office choral: comment les conci-lier?» Des questions très concrètes, quinourrissent les échanges.

Le lendemain, M. J.-P. Coutaz,avec sa verve coutumière et son senshistorique, nous offre une conférence«Au théâtre ce soir», qui montre toutel’évolution du théâtre à Saint-Maurice,grâce au collège, depuis 200 ans.

Dimanche 16 mai

La journée annuelle de prière pourles vocations rassemble une foule de jeu-nes venus à pied de divers côtés pourune Eucharistie célébrée par

Mgr Brunner, tandisque Mgr Roduit pré-side un rassemblementsemblable à Sion.

Dimanche 23 mai

Un camerounais,Pierre Heffe, présidentde l’association despharmaciens catholi-ques s’entretient avecnous des immensesproblèmes du sous-dé-veloppement et de lamaladie en Afrique;c’est également, nousdit-il, une grande pré-

occupation des évêques africains, cons-cients de l’importance de l’aide spiri-tuelle dans ce domaine, c’est là quel’Église a un grand rôle à jouer. Il faitpartie du comité d’organisation du con-grès mondial de la santé qui aura lieul’an prochain à Yaoundé.

Mardi 25 mai

En la fête de la dédicace de la basi-lique, tous les élèves internes participentà notre Eucharistie du soir, un petitgroupe d’entre eux servent la messe.

Du 24 au 27 mai

Pendant trois jours, la session pas-torale du diocèse de Sion se tient à LaPelouse, avec pour thème: «Un peupleen marche»; plusieurs confrères sontprésents à cette rencontre.

Du 28 au 30 mai

Une récollection nous prépare à laPentecôte. Des textes autour du thème:«Une communauté ouverte à l’Autre et

En ouverture du chapitre général du 16 avril qui se tenaitpour la première fois dans notre nouvelle salle capitulaire,

Mgr J. Roduit a béni cette pièce.

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5LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

aux autres» nourrissent notre réflexionet notre prière, ainsi que les échangeslibres du samedi après-midi.

Mardi 8 juin

Deux jours après son anniversaire,notre nouveau nonagénaire, M. MarcelMichellod vient se faire fêter à l’Abbaye.De beaux instants d’émotion pour ceconfrère si attaché à sa vallée natale.

Mercredi 9 juin

L’an dernier nous avions accueillinos confrères du Grand-Saint-Bernard,c’est à notre tour maintenant à leur ren-dre visite: nous nous rendons à Orsières,où nos sommes chaleureusement reçusà la salle paroissiale. Une très belle vi-

déo retraçant la vie et l’œuvre mission-naire du bienheureux Maurice Tornaynous est présentée. Elle nous prépare àmonter, après le repas de midi, au vil-lage natal du bienheureux, La Rosière;c’est une sorte de pèlerinage, que nousfaisons d’abord en voitures puis à piedpar un temps lumineux. Ces hauteursalpestres rocailleuses et ardentes sem-blent avoir marqué l’esprit du futur mis-sionnaire martyr, attisé en lui la soifd’absolu et de sainteté. Après une haltedans la maison de son enfance, nousentrons dans la chapelle du village, oùsa petite-nièce nous donne des détailssur sa vie, son caractère, son activité, samort. Un dernier contact en plein airavec nos confrères avant le retour à

Au jour où la communauté l’a fêté pour ses 90 ans, le chanoine Marcel Michelloda pris la parole pour lire un de ses poèmes.

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6 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Saint-Maurice achève cette journée trèsconviviale.

Jeudi 10 juin: Fête-Dieu

Belle fête traditionnelle; une di-zaine de jeunes servent la messe chan-tée par le Chœur Mixte de ville, suiviede la procession par un soleil déjà esti-val.

Deux jours après, le «chœur gré-gorien du samedi» dirigé parM. Pasquier anime la messe conven-tuelle par un chant intériorisé, aurythme léger et souple.

Dimanche 13 juin

A l’occasion du 750e anniversairede la mort de sainte Claire, de très nom-breux représentants des différentes fa-milles franciscaines ainsi que leurs amisse rassemblent à Saint-Maurice, où le

Foyer franciscain est un centre impor-tant de rencontres. L’abbaye les accueillepour de très belles manifestations auThéâtre du Martolet: le matin, avec«Sainte Claire, l’audace de la joie», lesSœurs Clarisses de La Grant Part(Jongny) et quelques laïcs présententune magnifique évocation de la vie deSaint François d’Assise, où textes, icô-nes, musique et chorégraphie se fondentpour créer un climat de fraîcheur, depauvreté intérieure et de joie. L’après-midi, deux acteurs de Paris miment lesfioretti du Pauvre d’Assise.

Dimanche 20 juin

Après la messe radiodiffusée, a lieula bénédiction du nouveau carillon, quine compte pas moins de 49 cloches,pour la construction duquel notre jeuneconfrère organiste François Roten a lon-

guement travaillé;la bénédiction alieu sur la place duparvis de la basili-que en présence desdonateurs, invitésensuite à partagernotre repas. Lemercredi suivant,les cloches sont his-sées dans le clocherau moyen d’unegrue, et l’inaugura-tion officielle sefera à la Saint Mau-rice.

Début de juillet

Mgr JosephRoduit se rend auLuxembourg, avec

La journée de rencontre entre les chanoines du Grand-Saint-Bernardet notre communauté a été l'occasion d'une visite de la maison nataledu bienheureux Maurice Tornay à La Rosière (Orsières). La Fonda-tion du Bienheureux Maurice Tornay a pris en charge la restauration

de cette bâtisse dont nous voyons ici la chambre à coucher.

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7LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

notre confrère J.-C. Crivelli, directeurdu Centre romand de pastorale liturgi-que à La Pelouse; ils y resteront troisjours, participant aux travaux de la com-mission chargée par la Conférence épis-copale francophone européenne d’ache-ver la révision des textes liturgiques; ilsy retourneront au cours de l’automne.

Du 5 au 9 juillet se tient àChâteauneuf de Galaure et à Champa-gne le congrès de la confédération desChanoines Réguliers de Saint Augustin,regroupant 150 participants, dont quel-ques-uns de Saint-Maurice. Ces jour-nées ont permis à tous ces confrères deresserrer les liens fraternels qui relientles membres des neuf congrégations etde les unir dans l’idéal canonial de no-

tre bienheureux Père. Un thème dontl’importance actuelle est évidente dansnotre monde plein de contradictions,de divisions, de laideurs, de violences aété développé par plusieurs interve-

nants: «La Beauté chez Saint Augustin».Nos confrères ont aussi découvert, dansce Foyer de Charité, la figure spirituellede Marthe Robin. Et c’est lors de ce con-grès qu’a été élu le nouvel Abbé-Primat,Mgr Maurice Bitz, Abbé général de laCongrégation de Saint-Victor: savoirqu’un confrère venu de notre abbaye aété nommé à la tête de la Confédéra-tion canoniale nous réjouit, et nous luisouhaitons un fructueux ministère entant qu’Abbé-Primat.

Du 19 au 24 juillet

La pause de l’été est aussi un tempsfavorable pour prendre en Dieu reposet ressourcement: la retraite annuelleréunit les confrères du 19 au 24 juillet,

prêchée par le Père Gas-ton Garatea Yori, de lacongrégation des Pèresdes Sacrés-Cœurs de Jésuset Marie. Péruvien, pro-fesseur de théologie àLima et engagé dans lalutte contre la pauvreté, ilest encore directeur del’Institut de pastorale an-dine à Cusco. C’est direqu’il est un peu pour nousla voix de l’Amérique la-tine. Il nous parle d’abon-dance du cœur de son op-tion préférentielle pour lespauvres, dans la perspec-tive du Royaume qui n’estpas de ce monde. Message

inhabituel peut-être, mais pourtant bienévangélique. Cela nous fait ouvrir lesyeux bien au-delà des horizons de l’Oc-cident, trop facilement replié sur sespropres problèmes et aveugle sur ceux

Les 49 cloches du nouveau carillon de l’Abbaye ont étébénites le dimanche 20 juin avant d’être montées dans le

clocher les jours suivants.

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8 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

de la majoritédes hommesde la planète,ignorant ceque les autrespeuples pour-raient nous ap-porter. Mes-sage tout dejoie pourtant,la joie des en-fants de Dieuqui cherchentavant tout le

Royaume de Dieu et sa justice, et trou-vent en Lui un bonheur que rien ne peutravir. Samedi 24, en fin de retraite, nous

sommes heureux d’entourer quatre con-frères jubilaires: Hubert Ruckstuhl quifête ses 60 ans de sacerdoce, GrégoireRouiller et André Bruttin (50 ans d’or-dination) et Frère Paul (60 ans de pro-fession religieuse).

Les visites du Trésor

Depuis le début de juillet, un chan-gement important survient dans les vi-sites de la Basilique et du Trésor: ellesne se font plus comme jusqu’ici à cer-taines heures déterminées et commen-tées, mais les lieux sont ouverts de fa-çon continue de 9 heures à midi et de14 heures à 17 heures, de sorte que vi-siteurs et pèlerins peuvent circuler libre-

Le père péruvien GastonGaratea Yori a prêché la

retraite abbatiale.

Au dernier jour de la retraite communautaire, il est coutume de fêter nos jubilaires. VoiciMM. Justin Froidevaux (chanoine de la collégiale Saint-Léodegard de Lucerne, 60 ans

d’ordination), André Bruttin et Grégoire Rouiller (50 ans d’ordination) et HubertRuckstuhl (60 ans d’ordination) entourant Mgr J. Roduit...

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9LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

ment dans l’église, le cloître, le Trésor,le Martolet. Des personnes de la ville serelayent pour assurer une surveillanceet en outre il y a quelques visites gui-dées. Un tarif d’entrée remplace les of-frandes libres. L’idée de cette réorgani-sation est née à la suite d’un voyage faità l’abbaye de Conques par des déléguésde la commune de Saint-Maurice etnotre responsable de la pastorale tou-ristique M.-A. Rey: il leur est apparuque le trésor de notre monastère est unbien patrimonial abbatial en mêmetemps qu’agaunois dont il serait très sou-haitable d’assurer un plus grand rayon-nement; pour le développement touris-tique de la ville sans doute, mais plusencore en vue d’apporter un message re-ligieux à ceux qui passent chez nous; laville aussi en est consciente et collaboreactivement en secondant le sacriste Ga-briel Stucky. C’est tout au long de l’an-née que celui-ci s’investit généreusementtant pour les visites régulières que pourles fréquents pèlerinages, en dépit d’unesanté par moments chancelante, maisdont a raison son dynamisme confiant.

En été

Pendant les semaines d’été, bonnombre de confrères prennent des va-cances hors de l’abbaye, laissant un «pe-tit troupeau» maintenir la permanencede la prière chorale. Le Prieur a été troissemaines au Togo et au Burkina Faso,en visite chez les Sœurs de Saint-Augus-tin. D’autres quittent pour un temps lamaison pour raison de santé:MM. Heimo, Cuzon, Bérard, Henry etRuckstuhl ainsi que Frère Paul ont étéhospitalisés ou opérés, de même quequelques confrères vivant en paroisses

ou ailleurs: Mgr Henri Salina, MM.Michellod, Schubiger, Neuhaus etHofstetter, tandis que MM. Gross etAllimann sont toujours dans le homeSaint-Jacques. Quant à M. Jean-PaulAmoos, de retour après une longue hos-pitalisation durant laquelle il a subi unegreffe de la moelle osseuse, il est en ex-cellente voie de guérison et a la joie depouvoir reprendre quelques cours et duministère. M. Édouard Gressot est ren-tré lui aussi à l’abbaye après 8 ans dansla paroisse de Bagnes et 48 ans dans lamission du Sikkim; il s’intègre bien ànotre vie communautaire et liturgiqueet garde l’esprit d’ouverture et de zèlemissionnaire, apportant son soutien àdes familles pauvres grâce à l’œuvre«Namasté».

Par contre un départ nous attristebeaucoup: celui de quatre jeunes qui

… et frère Paul Québatte qui célèbre 60 ans de profession.

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10 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

tour à tour quittent l’abbaye: SébastienBauer, Jean-Baptiste Farquet, AurélienFourcault qui avaient, sauf ce dernier,fait leurs vœux simples, et le diacreCédric Chanez. Nous prions pour quechacun d’eux, après un trajet de viebousculé, trouve la voie dans laquelle leSeigneur l’appelle.

Des visites

Durant la saison d’été il y a natu-rellement le va-et-vient d’hôtes plusnombreux, que nous sommes heureuxd’accueillir certains pour la premièrefois, d’autres comme de vieilles amitiés.Il y a des visites passagères: ainsi le sa-medi 7 août, une cinquantaine d’évê-ques, liés au mouvement Focolari, s’ar-rêtent à Saint-Maurice, et avant de visi-ter les lieux, chantent les vêpres avecnous, en latin pour la circonstance. Les

stalles sont à peine suffisantes pour lesaccueillir! Il y aussi des séjours de quel-ques jours ou davantage, mais il seraittrop long de tout mentionner.

Une visite pourtant mérite d’êtresoulignée: désirant vénérer les reliquesdes Martyrs thébains originairesd’Égypte, Sa Sainteté Shénouda III,Pape des Coptes orthodoxes, avait an-noncé sa venue à Saint-Maurice pour le12 juillet; dans l’après-midi de ce jour,bien avant son arrivée déjà, de nom-breux Coptes l’attendent dans la basili-que. Vers 17 heures, il entre à l’église,accompagné d’une dizaine d’évêques etde prêtres-moines; nous les accueillonsd’abord par le chant des vêpres, puis lePère-Abbé lui adresse la bienvenue enanglais. Tous restent ensuite longue-ment devant les trois châsses des Mar-tyrs exposées devant l’autel, tandis que

Sa Sainteté Shénouda III, Pape des Coptes orthodoxes,est venu en pèlerinage sur le tombeau des Martyrs thébains.

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11LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

le peuple prie et chante des hymnes cop-tes, suivies de motets chantés par desmembres de la Semaine romande demusique et de liturgie qui vient de com-mencer. Avant de nous quitter, S.S.Shénouda donne sa bénédiction. Puissecette nouvelle rencontre œcuménique,qui tisse un lien entre l’Église copte etcelle d’Agaune, être un petit pas versl’unité des chrétiens.

Depuis la fin juin déjà, M. RolandJaquenoud est au Kazakhstan, où il aété appelé par l’évêque de l’Église lo-cale pour donner des cours de forma-tion théologique à des laïcs catéchisteset à des séminaristes. Il ac-complit dans cette ancienneprovince de l’URSS un beauministère, dans la languerusse qu’il maîtrise bien pouravoir fait plusieurs séjours enRussie ces dernières années.Le 8 août, Mgr J. Roduit lerejoint pour participer à unfestival de jeunes à Astana,durant lequel sont vénéréesles reliques des martyrsthébains apportées récem-ment. Il en revient enthou-siasmé le 17 juillet, accompa-gné de notre confrère, qui re-partira bientôt. Depuis, voici ce quenous écrit ce dernier: «Après les deuxsemaines passées à Astana, je suis partipour Kokshetav, petite ville au nord…Le plus extraordinaire fut le dimanche.Une demi-heure avant la messe, je m’as-sois au confessionnal. À ma grande sur-prise, je vois des gens arriver en courantprendre place au banc des confessionset faire la queue… Tout cela a fait quela messe a commencé avec une bonne

demi-heure de retard, sans d’ailleurs quepersonne ne s’en offusque. Dès que l’ona su qu’était arrivé un prêtre parlant lerusse, les demandes de confessions etd’entretien n’ont plus cessé. À chaquepose entre les cours, à chaque momentlibre, les gens affluaient.»

Du 12 au 18 juillet

La Semaine romande de musiqueet de liturgie (SRML) rassemble envi-ron 180 personnes venues de tous lescantons romands. Avec enthousiasme,elles s’initient ou se perfectionnent dansles différentes branches de cet ensem-

ble complexe qu’est la prière liturgique:formation liturgique, solfège choral,technique vocale individuelle, chantgrégorien, orgue, musique et spiritua-lité, etc.: il y a des ateliers pour tous lesbesoins et tous les goûts. Samedi soirles participants, dans une Heure musi-cale, chantent une suite de pièces lati-nes choisies parmi celles en usage àl’église Notre-Dame de Paris duXIIe siècle à notre époque, cela grâce à

Les participants au festival des jeunes catholiques à Astanaau Kazakhstan ont fait un chemin de croix sur une des

seules collines du pays.

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12 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

la venue de l’ancien maître de chapellede cette église, Jean-Michel Dieuaide.

Cette Semaine liturgique et musi-cale est bien dans la ligne de notre ab-baye, et si elle se renouvelle chaque été,c’est tout au long de l’année que cetteactivité religieuse et culturelle se pour-suit non seulement par la communauté,mais encore par de nombreux laïcs bienconscients d’accomplir une tâched’Église; ils l’ont très à cœur et la rem-plissent avec enthousiasme, compétenceet fidélité: l’Ensemble Vocal sous la di-rection de Pascal Crittin, le ChœurMixte de Saint-Maurice dirigé parMme Michèle Olivier, le Grand Chœurde la basilique animé conjointement parMme Olivier et Michel Roulin qui di-rige en outre le chœur du collège. Il fau-drait bien sûr mentionner également,dans le domaine plus directement cul-turel, l’Orchestre des Jeunesses musica-les et du Collège et la fanfare des étu-diants, dirigés le premier par ErnstSchelle, la seconde par DarioMaldonado. Notre communauté peutêtre reconnaissante de voir ces nom-breux laïcs prendre la relève de toute unelignée de chanoines qui au cours desdécennies passées se sont dévoués dansce domaine, entre autres Louis Broquet,Marius Pasquier, Jean-Marie Theurillat.

Mercredi 11 août

La montée annuelle des confrèresau chalet des Giettes est une boufféed’air de montagne bienvenue, même s’iln’y a pas de novices pour leur offrir laraclette… Un peu plus tard, les «jeu-nes» confrères y monteront encore pourune fructueuse journée de réflexion etd’échanges.

Samedi 14 août

Comme chaque année, la fête del’Assomption est préparée par uneveillée de prière: d’abord à la basilique,où l’hymne acathiste ouvre le chant desvigiles, suivi d’un enseignement sur«Marie, Mère de l’Église» et d’une mé-ditation des mystères lumineux du ro-saire. Ensuite les plus vaillants montentà la chapelle de Notre-Dame du Scexpour une nuit de prière qui s’achève parla messe à 4 heures le matin.

Lundi 23 août

Peu après cette fête mariale, l’an-née scolaire reprend. Le 23, au coursd’une célébration religieuse à l’églisepour tous les étudiants répartis en troisgroupes successifs, le recteur Guy Luisierles invite, après s’être reposés en vacan-

A la chapelle du Scex, un ex-voto de 1751témoigne d’une guérison dans une famille

grâce à l’intercession de la Vierge.

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13LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

ces, à se «re-poser» les questions essen-tielles pour construire la maison de leurvie sur des bases solides. Une maison,insiste-t-il, qui doit être construite «aveccœur», et cette note cordialedont la source est la vie inté-rieure devrait dans le milieu es-tudiantin pénétrer toutes les re-lations et les activités.

Samedi 28 août

Avec le début de la classe,la vie abbatiale reprend elle aussison rythme habituel. Noussommes heureux cette année depouvoir vénérer notre bienheu-reux Père saint Augustin au jourde sa fête liturgique le 28 août,et non à une date reportée enraison du programme scolaire.

Mercredi 1er septembre

De nombreuses personnesâgées de la clinique Saint-Améet des homes de la région fontdéjà maintenant leur pèlerinageannuel à Saint Maurice.L’Eucharistie est célébrée à labasilique; dans son homélie, lePère-Abbé cite ces mots encou-rageants et stimulants que Pi-casso a dits à 92 ans: «il fautbeaucoup de temps pour deve-nir jeune».

Vendredi 10 septembre

La Fondation des archives histori-ques de l’Abbaye de Saint-Maurice inau-gure son nouvel atelier de restaurationde documents anciens dans les murs del’Hospice Saint-Jacques. Elle offre aupublic une soirée «portes ouvertes» et à

18 heures dans le hall du collège se dé-roule une cérémonie officielle en pré-sence des donateurs de la Fondation, quise voient gratifiés de précieuses «clefs».

Du 6 au 11 septembre

Une session du «Dialogueinterreligieux monastique» (DIM) setient à La Pelouse, destinée aux moineset moniales francophones d’Europe, quivisitent un soir l’abbaye et participent ànotre messe conventuelle (voir articlep. 22).

Mgr Henri Salina, président du conseil de laFondation des archives historiques de l’Abbaye,

remet une grande clef d’argent au syndic d’Ollon,M. Michel Dätwyler.

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14 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Samedi 18 septembre

L’Abbaye accueille la journée delancement officiel du «Forum 4 5 6»,une démarche de réflexion diocésaineproposée à tous les fidèles; elle est pré-sentée ainsi par Mgr N. Brunner etMgr J. Roduit: «le but est de convoquerles chrétiens du diocèse de Sion et duTerritoire abbatial de Saint-Maurice àune prise de conscience de la nécessitéd’une nouvelle évangélisation. C’est toutun peuple qui veut se mettre en marchepour donner des avis, raviver la prati-que de l’évangile et célébrer avec plusde ferveur».

La Saint Maurice

En la veille de la Saint Maurice, lesSœurs s’associent comme de coutumeà notre communauté pour chanter lespremières vêpres et les vigiles de la fêteà la chapelle de Vérolliez. Le lendemain,la messe est présidée par Mgr AmédéeGrab, président de la Conférence épis-copale suisse, qui nous donne une belleet substantielle homélie (voir p. 17).Après la procession dans les ruesd’Agaune, une innovation donne unecouleur populaire à la fête: pour répon-dre à la demande répétée des autoritéscommunales, il a été décidé de partager

Les participants à la journée de lancement du Forum 456 ont célébré une messe d’envoi dans l’église Saint-Sigismond en présence de Mgr N. Brunner et de Mgr J. Roduit.

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15LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

cette année le repas avec tous les habi-tants de la ville qui le désiraient, auCentre sportif de Saint-Maurice; c’estpour tous une rencontre fort sympathi-que. Dans l’après-midi, beaucoup se dé-placent à la basilique pour participer auxdeuxièmes vêpres qui s’achèvent, avecles châsses exposées devant l’autel, parl’émouvante proclamation de la Passiondes Martyrs. Puis les notes joyeuses ducarillon inauguré ce jour mettent unpoint d’orgue final à notre fête patro-nale.

Ce carillon, il fera encore entendresa voix — ou plutôt la cascade de ses

fines notes qui s’égrènent comme unecomposition musicale — le dimanchesuivant, en une sorte de concert retrans-mis en direct sur Espace 2, concertdonné par M. Arie Abbenes, carillon-neur du beffroi d’Utrecht. Par la suite,il apportera une note festive à toutes lesgrandes fêtes.

Jeudi 23 septembre

Les étudiants s’associent à notrefête patronale par une messe pour ceuxqui le désirent, les autres écoutent uneconférence sur van Gogh. Cette messea lieu en l’église Saint-Sigismond, car

Mgr Amédée Grab, évêque de Coire, a présidé les célébrations de la Saint Maurice.

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16 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

en ce jour commencent les travaux derestauration de la basilique. Des travauxde longue haleine qui devraient durerjusqu’à Noël… en principe, car on pré-voit déjà un retard. Pendant cette pé-riode, tous nos offices liturgiques se fontà la salle capitulaire aménagée en cha-pelle; le dimanche par contre, seuls les

confrères âgés ou infirmes ont une messedans cette salle, les autres chantant leslaudes et la messe à l’église de ville. Lesouvriers se sont donc mis à l’ouvrage:une toile protégeant le mobilier contrela poussière, ils ont démonté tous les re-vêtements du chancel et le dallage duchœur; jour après jour ils poursuiventces travaux, qui concernent pour lemoment le chœur et l’avant-chœur ainsique l’éclairage et le chauffage de toutel’église. Des panneaux explicatifs instal-lés au premier étage permettent à cha-cun de comprendre les objectifs de larestauration et de suivre son évolution.

Ainsi un travail important, conçuavec compétence et organisé efficace-ment est en cours pour cette restaura-tion qui, nous l’espérons, donnera une

belle allure à notre basilique et fera d’elleun sanctuaire mieux adapté aux besoinsactuels de la liturgie.

Renouveau spirituel

Puissent ces réalisations d’ordrematériel être accompagnées d’un sem-blable renouveau au plan spirituel: vontnous y aider une récollection de deuxjours au début d’octobre, puis le chapi-tre général du 22 octobre, où sont en-visagés des problèmes concernant nosactivités et nos grandes orientations,enfin surtout la visite canonique quecommence à faire Dom Mauro Lepori,Abbé d’Hauterive. Dieu veuille qu’ellesoit une bénédiction pour notre com-munauté. En un temps où la rareté desvocations, le vieillissement, toutes sor-tes d’adversités pèsent sur l’avenir desfamilles religieuses, il est bon de médi-ter ces lignes de Robert de Langeac:«Aux origines des familles religieuses, ontrouve toujours une âme vivant sur lessommets, près de Dieu. Les difficultésfondent sur elle, pour l’ordinaire, detoutes parts, nombreuses comme lesgouttes d’une pluie d’orage ou les flo-cons d’une tourmente de neige. Maisl’amour qu’elle porte au cœur est plusfort que tout. Ce qui devait l’abattre larelève; ce qui devait éteindre sa flammela ravive. L’obstacle devient moyen. Laruine est le commencement de la pros-périté. Elle prend alors son élan et vason chemin tout droit, attirant et en-traînant tout après elle». Ces parolesnous invitent tous à un surcroît de fi-délité et de confiance en la Providence.

Chne Jean-Bernard Simon-Vermot

Pendant les travaux à la Basiliquele corridor du premier étage a été

transformé en sacristie.

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17LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Le rayonnement des martyrsd’Agaune n’est pas près de s’éteindre.Leur combat glorieux attire les pèlerinsdepuis dix-sept siècles. Comme un ré-cent congrès de savants, rassemblés àSaint-Maurice et à Fribourg, l’a con-firmé, les perplexités soulevées par lapassio rédigée vers 430 par saint Eucherde Lyon n’entament pas l’essentiel de latradition. Parmi les foules de martyrsqui furent tourmentées dans la plupartdes provinces de l’Empire romain sousMaximien, empereur de 286 à 305, il yeut la Légion thébéenne. Ours et Vic-tor sont vénérés à Soleure, Maurice,Exupère et Candide avec beaucoupd’autres dont les noms ne sont pas con-nus sont morts pour la foi à Vérolliez.Après tant d’autres pèlerins, depuisquelques années les Africains vivant enSuisse, le pape Shenouda III, chef spiri-tuel des chrétiens coptes, s’est recueillià Saint-Maurice au début de l’été.D’autres viendront, qui découvriront ouapprofondiront, à travers le témoignagedes martyrs d’Agaune le sens de la viechrétienne.

Un des moments les plus mar-quants du dernier Grand Jubilé a été, le7 mai 2000, au Colisée, la Commémo-ration œcuménique des témoins de lafoi du XXe siècle, préparée par la Com-mission «Nouveaux Martyrs» du Co-mité du Jubilé, qui a dressé une liste deprès de 13’000 témoins de la foi. Plu-sieurs ont été cités au cours de la soirée,

en particulier les sept trappistes deTibhirine et Mgr Oscar Romero. Enprésence de très nombreux délégués desautres Églises chrétiennes, le pape JeanPaul Il a dit entre autre: «L’expériencedes martyrs et des témoins de la foi n’estpas une caractéristique propre aux pre-miers temps de l’Église, mais elle est lamarque de chaque période de son his-toire». Le XXe siècle en a donné lapreuve éclatante. «Là où la haine, pour-suivait le pape, semblait contaminertoute la vie sans possibilité d’échapperà sa logique, ils ont montré que l’amourest plus fort que la mort. Dans les terri-bles systèmes d’oppression qui défigu-raient l’homme, dans les lieux de souf-france, au milieu de privations très du-res, au long de marches épuisantes, ex-posés au froid, à la faim, aux tortures…s’est élevée leur ferme adhésion auChrist mort et ressuscité… Beaucoupont refusé de se plier au culte des idolesdu vingtième siècle et ont été sacrifiéspar le communisme, par le nazisme, parl’idolâtrie de l’État ou de la race. Beau-coup d’autres sont tombés, au cours deguerres ethniques ou tribales, parcequ’ils avaient refusé une logique étran-gère à l’Évangile du Christ. Certainssont morts parce que, suivant le modèledu Bon Pasteur, ils ont voulu rester avecleurs fidèles, en dépit des menaces».Comment ne pas penser au millionpeut-être de victimes, il y a dix ans, dugénocide perpétré au Rwanda? Nous en

HOMÉLIE POUR LA FÊTE DE LA SAINT MAURICE 2004

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18 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

parlerons en novembre lors de la granderencontre, à Rome, d’évêques d’Afriqueet d’Europe à laquelle Mgr Roduit re-présentera la Conférence des évêquessuisses. Et les évêques d’Europe de l’estnous adjurent, lors des rencontres du

Conseil des Conférences épiscopalesd’Europe, de ne pas oublier le témoi-gnage rendu pendant 50 ou 70 ans parleurs Églises, coupées en grande partiedu renouveau ecclésial et théologique dû

au Concile Vatican II, mais ancrées dansla fidélité au Christ et à Pierre.

J’ai cité longuement l’homélie deJean Paul II au Colisée. Les chrétiens,hommes, femmes, enfants, vieillards,prêtres et évêques, religieux et religieu-ses auxquels il rendait hommage ontsemblé mourir, selon les termes de lapremière lecture de cette eucharistie, auxyeux des insensés — persécuteurs oubaptisés peu sensibilisés de nos pays pré-servés, mais eux sont en paix. «Dieu lesa trouvés dignes de lui». Frères et sœurs,avons-nous le souci d’être trouvés di-gnes de Dieu? La question n’a pas grandsens si nous vivons comme si Dieun’existait pas, ou si Dieu n’est que laprojection abstraite d’un rêve new aged’harmonie universelle dans laquellenous fondre sans responsabilité person-nelle, ou s’il n’est qu’un mythique papagâteau, père noël ou figurantd’halloween. Mais si nous vivons encréatures nouvelles, baptisés dans lamort du Christ et dans sa résurrection,alors tout change. Nous avons une mis-sion, nous avons une responsabilité.Nous nous soucions alors d’être trou-vés dignes de Dieu. Ce n’est pas là uneprétention orgueilleuse, c’est une exi-gence. Elle est authentifiée par le Christlui-même. Vous êtes au Christ, dit saintPaul, et le Christ est à Dieu. C’est lui,le Christ, qui est la clé du mystère dusalut selon le chapitre premier de l’Épî-tre aux Ephésiens. «Dieu nous a grati-fiés dans le Bien-Aimé du bon plaisirde sa volonté. Il nous a fait connaître ledessein bienveillant qu’il avait formé enlui par avance, pour le réaliser quandles temps seraient accomplis: (à savoir)ramener toutes choses sous un seul

Mgr Amédée Grab, évêque de Coire etprésident de la Conférence des évêques suisses

et du Conseil des Conférences épiscopaleseuropéennes, a présidé la procession de la

Saint Maurice et a prononcé l’homélie de lamesse pontificale.

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19LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Chef, le Christ». C’est pourquoi leChrist peut nous dire dans l’évangile dece jour:» Celui qui m’aura renié devantles hommes, je le renierai à mon tourdevant mon Père qui est dans les cieux».C’est le revers de la médaille étincelantedont la face porte écrit:» Quiconque sedéclarera pour moi devant les hommes,moi aussi je me déclarerai pour lui de-vant mon Père qui est dans les cieux»(Mt 10,32).

Saint Maurice et ses compagnonsse sont déclarés pour Dieu. Cela incluaitpour eux la fidélité à leurs engagementsterrestres. Soldats, ils étaient prêts à sebattre pour l’empereur, mais pas à mas-sacrer leurs frères croyants innocents.Leur serment même les obligeait à cettedouble fidélité, tant que les termes enétaient compatibles; mais il comportaitune objection de conscience aux consé-quences dramatiques.

La fête de ce jour nous presse,comme la charité du Christ. Elle nousredit l’appel de l’évangile: N’ayez paspeur de mourir. Mais j’ajouterai:N’ayons pas peur de vivre. Un évêqueallemand rappelait il y a quelque tempsà ses diocésains: Nous autres, chrétiens,vivons en dessous de nos moyens. C’est-à-dire: nous ne voyons ni assez loin niassez grand. Et si, en un moment de

grâce, nous concevons l’ampleur denotre vocation, ce qu’elle comporte dejoies comme d’exigences, nous hésitonsà nous engager dans la voie royale parceque nous sous-estimons les moyens quinous sont donnés: la prière, les sacre-ments, le mystère surtout de l’Eucha-ristie, que le Pape nous demande decontempler et de vivre avec une ardeurparticulière jusqu’au prochain Synodedes évêques, la communion ecclésiale,la proximité des saints comme la ri-chesse des liens de foi, d’espérance etde charité dans nos familles, nos com-munautés, nos paroisses. Plus généreuxdans la défense de la vie, de la famille,de la justice. Plus présents dans lemonde de la culture, des médias, del’économie, de la politique. Plus assoif-fés d’unité des chrétiens, plus ouvertsau partage concret de tout ce qui nousest donné, matériellement et spirituel-lement. Et prêts à mourir comme legrain qui tombe en terre et ne porte defruit que s’il meurt. Comme le Christqui est notre vie et notre avenir, commeil est la couronne de Maurice, Candide,Exupère, Victor et de ceux qui furentfrères dans l’épreuve et rayonnent en-semble là où tout est sauvé. Amen.

+ Mgr Amédée Grab

François Vouga, Une société en chantier. Chrétiens au cœur de la mondialisationselon l’épître aux Éphésiens. Poliez-le-Grand, Éditions du Moulin, 2004, 89 p.

Patrick Hala osb, La spiritualité de l’Avent à travers les collectes. Solesmes, Édi-tions de Solesmes, 2004, 168 p.

CHRONIQUE DES LIVRES

REÇU À LA RÉDACTION

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20 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Du 10 au 14 novembre 2004, s’esttenu à Rome un Symposium annonçantun tournant dans l’histoire de la Mis-sion. Lassés d’être considérés comme desmendiants plutôt qu’en tant que pas-teurs, des évêques africains ont suscitéune rencontre avec les évêques euro-péens. Répondant à cet appel, la Con-férence des Évêques Européens a pro-posé de faire moitié-moi-tié, fifty-fifty; plus précisé-ment de convoquer 50évêques européens et 50évêques africains pour undialogue pastoral.

Ce symposium a per-mis aux évêques des deuxcontinents de parler d’égalà égal et non plus d’assis-tants à assistés. La Missionest universelle et concerneautant le Nord que le Suddans la réciprocité dudonner et du recevoir.

En trois jours, unevingtaine d’exposés ontmontré la nécessité derevisiter le passé pour pu-rifier la mémoire de l’es-clavagisme et du colonialisme, sans né-gliger une réflexion sur lenéocolonialisme actuel du pillage desressources.

«Si l’Union européenne se fixaitpour les prochaines décennies l’objectifde contribuer à éradiquer la faim dansle monde… les jeunes en particulier ad-

héreraient à ce projet» a déclaréMgr Grab, président de la CEE etcoprésident du Symposium.

Mgr John Onaiyekan (Nigeria),autre coprésident et président du Sym-posium des Conférences des Évêquesd’Afrique et de Madagascar (SCEAM),rappelait de son côté que «le Pape lui-même a mis l’accent sur le fait que la

mondialisation sans soli-darité ne peut qu’entraî-ner la marginalisationd’une partie de l’huma-nité.»

L’exposé sur la pen-sée européenne parMgr Bruno Forte, évêquede Chieti-Vasto (I) a saisil’auditoire: «La crise de laconscience européenneau seuil de troisième mil-lénaire se situe entre uto-pie et désenchantement.Ce n’est pas par hasard sitoutes les aventures del’idéologie moderne, dedroite et de gauche, bour-geoise et révolutionnaire,aboutissent à des formes

totalitaires et violentes. Dans le climatde décadence et de la pensée faible de lapostmodernité tout conspire à induireles hommes à ne plus penser, à fuir l’ef-fort et la passion pour la vérité.» A cetableau sombre, Mgr Forte apporte deslumières éclairantes en appelant à «la re-cherche du sens perdu, à la redécouverte

EUROPE – AFRIQUE : FIFTY – FIFTY

A chaque visite dans son diocèsesoudanais, Mgr Macram Max

Gassis baptise des centainesd’enfants.

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21LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

de l’autre, à la nostalgie du Tout-Autre.Même en théologie, il est temps de pas-ser de l’amour de la sagesse à la sagessede l’amour. Face à la foule des solitudeson demande aux chrétiens de témoi-gner, de manière chorale, qu’il est pos-sible et beau d’être ensemble. Vouloirl’Église, aimer l’Église, c’est faire del’Église une communauté habitable,accueillante, attrayante où l’on se sentaccepté, respecté, personnellement ré-concilié dans la charité.»

Mgr Pasinya, évêque de Kisangani(Congo), nous dit qu’«il est des réalitésqu’on ne voit bien qu’avec des yeux quiont pleuré». Il est temps de passer del’Afrique de la mort à l’Afrique de la vie.Et de relever la vision spirituelle de lavie chez l’Africain: «Il est difficile de ren-contrer un Africain athée». «L’espritcommunautaire veut que la propriétésoit privée, mais l’usufruit communau-taire.» Pour les Africains, l’Église est unefamille et «le nouvel ordre économiquemondial doit promouvoir le développe-ment intégral, solidaire et pacifique del’humanité».

Le Cardinal Backis de Vilniusmontra comment, à la chute du com-munisme, la Lituanie n’était pas prête àrecevoir les idées occidentales prônant«l’exaltation de l’individu, la rechercheexacerbée de la réalisation personnelle,la satisfaction des désirs et des intérêtspersonnels: pouvoir, argent et sexe». Lespays postcommunistes ont besoin d’uneévangélisation de la personne en pro-posant des guides, des maîtres spirituels.

Parlant des agents pastoraux pourl’évangélisation, Mgr Osei-Bonsu, duGhana parla d’abord des laïcs, des caté-chistes, de la famille, de la jeunesse, et

en fin seulement des religieux, religieu-ses et prêtres. «L’évangélisation a apportéchez nous l’occidentalisation, d’où l’im-portance de redécouvrir le sens del’inculturation». Il est nécessaire dès lorsd’avoir un autre regard sur les religionstraditionnelles, la polygamie,l’œcuménisme, pour échapper à l’attrac-tion des sectes.

Mgr Bakyenga remercia les Euro-péens d’avoir envoyé des missionnairesannoncer la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, en particulier son enseignementsur ce qu’on aura fait aux plus petitsd’entre ses frères, car il avait faim…Mais l’évêque ougandais d’en appeler àun partage d’une vision pastorale com-mune: «L’Afrique peut partager sesagents pastoraux avec l’Europe». Pourcela il faut que les prêtres africains soientenvoyés par leurs évêques et que ce nesoit pas ceux qu’on a envoyés se formerqui ne rentrent plus au pays! «Nousn’avons pas encore essayé toutes les for-mes de partenariat» conclut-il.

On pourrait citer encore bien desparoles prononcées à Rome, mais cequ’il faut retenir c’est que nous sommesappelés à un autre regard sur la Mission,la voyant beaucoup plus comme unpartenariat de diocèse à diocèse.

Le symposium s’est conclu sur uneproposition concrète de poursuite de laréflexion. La CEE et le SCEAM doi-vent fournir chacun trois évêques et unsecrétaire dans les six mois pour analy-ser la rencontre et faire des propositionspour l’avenir du partenariat Afrique –Europe.

+ Joseph Roduit, Abbé de Saint-Maurice, Délégué de la CES à ce

Symposium missionnaire.

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22 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

La mission de l’Église, à laquellel’Abbaye de Saint-Maurice prend part,se réalise en priorité par l’annonce di-recte de l’Évangile, mais elle comporteaussi, outre la collaboration des chré-tiens avec tous les hommes pour la pro-motion humaine et pour la paix, le dia-logue interreligieux. L’abbaye est enga-gée dans ce dialogue également, notam-ment dans le «Dialogue interreligieuxmonastique» (DIM) auquel elle colla-bore. Les moines et moniales de France,de Belgique et de Suisse romande fai-sant partie de ce mouvement se réunis-sent régulièrement tous les deux anspour une session de formation. Cettesession eut lieu cette année du 6 au11 septembre chez les Sœurs de SaintMaurice à La Pelouse, organisée par le

groupe DIM suisse. Grâce à une prépa-ration soignée, grâce au doigté du Mo-dérateur, le pasteur Yves Brandt (legroupe est œcuménique), grâce toutparticulièrement à l’accueil généreux età la disponibilité des Sœurs de SaintMaurice, cette session, suivie par 40 à45 personnes, s’est déroulée dans un cli-mat d’amitié fraternelle et de joie, desérieux et de prière aussi: tous partici-paient, en plus des méditations entrenous, aux offices liturgiques de la com-munauté. Et la beauté de ces lieux parun temps ensoleillé toute la semaineacheva de faire de cette rencontre untemps fort pour ceux et celles engagésdans le dialogue interreligieux.

Le thème de la session, «richesses,exigences et limites du dialogue» a été

LE DIALOGUE INTERRELIGIEUX MONASTIQUE (DIM)SESSION DU DIM FRANCOPHONE À LA PELOUSE

Les participants à la session du DIM dans les jardins de l’Institut La Pelouse.

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23LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

développé par plusieurs intervenants. Lepremier jour, le Père Benoît Standaert,osb, affirme que dans les relations avecles autres croyants, il faut commencerpar écarter les préjugés négatifs sur leurreligion; ce qui ne va pas de soi: desexemples à proposdu judaïsme et del’islam prouvent àquel point de fauxclichés sont ancrésdepuis des sièclesdans les mémoireschrétiennes, et laréciproque estvraie. Il y a doncune conversion desesprits, une auto-critique à faire, etelle est d’autantplus délicate quetrop souventd’authentiques dé-ficiences sont àl’origine des préjugés négatifs. Les autresreligions doivent être regardées dans unelumière objective, et plus encore avecempathie.

Dans l’exposé de l’après-midi, lesoussigné montre que la clé d’un dialo-gue authentique avec les autres croyants,c’est l’approfondissement de notre pro-pre vie spirituelle. Elle doit tendre à de-venir expérience contemplative de Dieu:alors on communie vraiment avec lesfidèles des autres religions, dans le si-lence du mystère de Dieu. Ce qui nouspresse de revenir à la source de l’Évan-gile, en particulier à la mystique de saintJean et de saint Paul, que toute la tradi-tion chrétienne a prolongée et appro-fondie. Mais il ne suffit pas de revenir

au passé: tous les peuples aujourd’huise rencontrent, entremêlant leurs tradi-tions culturelles et religieuses: l’Espritest présent en elles, il nous apporte parelles des valeurs que nous devons rece-voir dans la fidélité au Christ. C’est ainsi

que nous témoignerons de notre foi àtous, et que tous, quelle que soit leurreligion, seront des pèlerins qui s’entrai-dent mutuellement dans leur chemine-ment vers le Royaume. En fin de jour-née, une visite à l’Abbaye de Saint-Mau-rice fait découvrir à tous un monastèrevivant quinze siècles de prière ininter-rompue. Les pierres muettes de ces lieuxen parlent éloquemment et l’accueilchaleureux du Père-Abbé prépare lessessionnistes à partager l’eucharistie dela communauté.

Les réflexions du premier jour ontporté sur les conditions, les présuppo-sés du dialogue interreligieux: les deuxjours suivants seront consacrés, le pre-mier au dialogue avec les musulmans,

Dans le temple du Mont-Pèlerin, un moine bouddhiste d’origineautrichienne s’entretient avec le groupe DIM avant l’office liturgique.

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24 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

le second avec les bouddhistes. «Peut-on dialoguer avec l’islam?» s’interrogele pasteur Jean-Claude Basset mercredimatin. Il n’y a pas de doute que de gros-ses difficultés risquent de décourager cedialogue: sans parler du terrorisme, il ya entre chrétiens et musulmans unegrave méconnaissance réciproque, ag-gravée par un passé chargé d’hostilité,par des incompatibilités doctrinales sou-vent durcies par les fondamentalistes,etc. Le dialogue n’en est pas moins pos-sible, il est même tout à fait nécessaire.Dialoguer ne veut d’ailleurs pas dire êtred’accord sur tout, mais se connaîtreauthentiquement et se respecter. Mal-heureusement on se côtoie un peu par-tout dans l’ignorance mutuelle, obéis-sant souvent à des réactions xénopho-bes. Pourtant chrétiens et musulmansont beaucoup en commun, religieuse-ment et culturellement, c’est un grandmotif pour intensifier le dialogue. Et letémoignage que le pasteur donne de salongue expérience personnelle, l’exem-ple de Massignon et de nombreux autrespionniers encouragent fortement à per-sévérer dans le dialogue en dépit des dif-ficultés.

Dans l’après-midi, MarounTarabay, prêtre maronite de l’Église or-thodoxe rattachée à Rome et délégué parles évêques suisses pour le dialogueinterreligieux, nous plonge dans la viede la communauté maronite, minori-taire en pays musulman. Dans un ex-posé plein d’intérêt, il retrace l’histoirepeu connue de cette communauté for-tement marquée par l’idéal monastique.Longtemps, bien que peu nombreuse,elle sut vivre en convivialité avec les mu-sulmans, comme avec les autres com-

munautés chrétiennes, devenant un élé-ment unificateur et pacificateur pour leLiban. Mais lorsque le piège du pou-voir l’amena à trahir cet esprit, il en ré-sulta une crise qui aboutit à la guerrecivile. L’espoir n’en demeure pas moins,maintenant que depuis 1989 la paix estrevenue, de retrouver l’esprit évangéli-que originel, en sorte que l’Église ma-ronite pourra devenir un pont entre lechristianisme et l’islam. Arabes de cul-ture et chrétiens de religion, les maro-nites ont un message spécifique à don-ner, un rôle important à jouer dans ledialogue islamo-chrétien.

Le jeudi est consacré au boudd-hisme. A 9 heures arrivent les moinestibétains du Mont-Pèlerin. GuéshéTubten Trinley introduit sa conférencepar une prière psalmodiée en tibétain.Dans la pratique du bouddhisme, ex-plique-t-il, le moment capital est lamotivation initiale: la bonté aimante,la compassion. C’est elle qu’il fautéveiller fortement en soi, tout le resteen découle. On sera donc attentif à écar-ter toute forme d’égoïsme, grossier ousubtil, obstacle radical à la compassion.Par là on s’achemine vers la libérationde la souffrance, au bonheur vrai, lenirvana, auquel aspirent tous les êtres:dans cette quête du bonheur, tous sontégaux et solidaires. Les bodhisattva pra-tiquent cette attitude à un degré héroï-que, renonçant à entrer dans le nirvanatant que tous les êtres ne sont pas libé-rés. Un tel enseignement si proche del’Évangile, même s’il ne faut pas cacherles différences, a de quoi faire réfléchiret il prépare bien la rencontre avec lacommunauté tibétaine du Mont-Pèle-rin. Un car y mène le groupe, non sans

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25LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

faire une halte au monastère des Ber-nardines de Collombey: les Sœurs ac-cueillent les moines les bras et le cœurouverts, leur font visiter, après l’officede sexte, les bâtiments rénovés, leur of-frent un repas. C’est alors l’arrivée auMont-Pèlerin où les bouddhistes

attendent les sessionnistes et leur offrentgénéreusement thé et pâtisseries; il estvrai que l’ignorance réciproque de lalangue fait que les regards et les souri-res parlent plus que les paroles… Maisla visite au temple laisse une forte im-pression: après un long entretien avecun lama autrichien, l’office religieux ac-compagné de gestes symboliques, duson des trompes et des cors qui va crois-sant jusqu’à la fin tient chacun en ha-leine pendant près de deux heures. La

psalmodie en tibétain est bien entenduinintelligible pour des francophones,mais les explications préalables donnéespar le lama ont suffi pour créer un ac-cord au-delà des mots: «Pensez que leplus important à travers tout cela, a-t-ildit, c’est le sentiment de compassion et

d’impermanenceuniverselle qui ins-pire tout».

Vendredi, lePère JejBoeckmans, osb, endes vues d’unegrande profondeur,nous fait aller plusavant dans notre ré-flexion sur le dialo-gue. Le cœur hu-main a soif d’infini:toutes les religionsont pour but de ré-pondre à ce désir del’homme, de l’aiderà surmonter l’égo-ïsme toujours re-naissant du moi sé-paré. Tout en con-fortant d’abord cequi est sain dans ce

moi, elles lui apprennent à le dépasser,à l’ouvrir à la Transcendance: c’est à ceniveau, qui est celui de la mystique, quedoit se faire avant tout le dialogueinterreligieux. Pour nous chrétiens, laquestion est de voir comment se situele rôle central du Christ.

Puis Daniel Pont, prieur de l’ab-baye d’En-Calcat, parle des chrétiens«convertis» à d’autres religions. Nousdevons les regarder sereinement et dansun esprit de compréhension et de cha-

En signe d’accueil, Gonsar Rimpoché du Mont-Pèlerin remet lakhata au chanoine J.-B. Simon-Vermot.

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26 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

rité: ils suivent leur conscience, et leurexpérience peut nous être précieuse àplusieurs égards; ne met-elle pas le doigtsur certaines carences dans notre prati-que chrétienne? Par ailleurs, recevant lestraditions orientales en occidentaux, ilsnous montrent comment nous pou-vons, dans la fidélité à la révélation chré-tienne, assimiler ces valeurs orientales,ce qui fait d’eux en quelque sorte des«passeurs».

Après ces interventions denses etriches, une méditation silencieuse enplein air, faite en marchant dans les col-lines avoisinantes, est bienvenue. Puis,après le repas de midi, le moment estvenu de dégager des conclusions de lasession: Sœur Bruno-Marie Colin, res-ponsable du DIM à l’échelle euro-péenne, le fait dans «Synthèse et pers-

Gonsar Rimpoché a remis la khata honorifique à Allaoui Abdellaoui,musulman soufi, et celui-ci lui offre un chapelet musulman avant sondépart pour le Tibet, qu’il n’a pas revu depuis son exil il y a 40 ans.

pectives d’avenir». La journée s’achèvepar une soirée festive fort sympathiqueet haute en couleurs, animée par fr. Jean-Pierre de Tamié et fr. Yves-Marie de So-lesmes. Ils ont l’art de détendre etd’amuser et rivalisent d’imaginationpour présenter agréablement toute l’his-toire du DIM, des origines àaujourd’hui. Sont successivement évo-quées l’ère des pionniers, puis celle del’organisation progressive du DIM sur

tous lescontinents:des nomsa p p a r a i s -sent tour àtour sur unt a b l e a unoir, et c’estl’occasionpour beau-coup, pré-sents, der a p p e l e rleurs souve-nirs. Dansla joie,l’amitié, laso l idar i t éfraternelle,moines etm o n i a l e s

pourront se quitter le lendemain, aprèsun arrêt au Centre œcuménique desÉglises de Genève, et poursuivre avecun élan renouvelé leur activitéinterreligieuse dans leurs communautésrespectives. Dieu veuille faire porter àcette belle session des fruits durables.

Chne J.-B. Simon-Vermot

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27LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Le Kazakhstan est un vaste pays desteppes en Asie centrale, aux frontièresde la Russie, de la Chine, du Kirguizstanet de l’Ouzbekistan. Autrefois républi-que soviétique, il s’est retrouvé indépen-dant par la force des choses en 1991,lors de la dissolution de l’URSS. Paysgrand comme cinq fois la France, leKazakhstan est un véritable bouillon decultures diverses, (on y recense plus decent dix nationalités) et le théâtre d’ex-périences religieuses originales. LesKazakhes, population d’origine de pays,sont en principe musulmans, pourtant,le jour de congé officiel est le diman-che. Le gouvernement est essentielle-ment composé de Kazakhes musul-mans, et pourtant il soutient avec vi-gueur une politique de dialogueinterreligieux et veille avec soin au res-pect de la liberté de conscience. Pays decontrastes, le Kazakhstan est le seul,dans la région, à n’avoir pas connu pourle moment de conflit interethnique, etcela malgré l’immense diversité des po-pulations qui le composent: le dialogueinterreligieux, érigé en politique d’état,est considéré comme l’une des clefsmajeures de cette entente entre les na-tionalités.

Le Kazakhstan au XXe siècle

Depuis au moins deux millénaires,la grande steppe kazakhe est peuplée de

tribus nomades parlant une langue dela grande famille des langues turques.Immense territoire vide (au début duXXe siècle, les Kazakhes ne sont pas plusde quatre millions), il est petit à petitoccupé par la Russie. Le grand empireporte son intérêt sur les villes du Sud,qui se trouvent sur la route de la soie.Les intérêts des russes étant essentielle-ment économiques, leur arrivée ne dé-range guère le mode de vie desKazakhes, qui continuent à nomadiserdans les vastes régions vides du pays.Tout change avec la révolution bolche-vique de 1917. Dans l’Union Soviéti-que qui se constitue, le mode de vie desnomades est systématiquement liquidé.Le nomadisme, avec sa liberté de mou-vement et sa connaissance des grandsespaces inhabités, est par essence anti-totalitaire et incontrôlable par un gou-vernement soviétique aux visées centra-lisatrices. L’éducation idéologique estpratiquement impossible à donner à destribus qui apparaissent et disparaissentdans la steppe, selon un rythme de vieancestral parfaitement incompréhensi-ble pour des fonctionnaires soviétiquesqui cherchent à unifier le pays sous labannière marxiste-léniniste. LesKazakhes sont sédentarisés de force, avecle cortège de répressions et de massa-cres qui accompagne toujours l’impo-sition rapide et autoritaire d’un nouveau

LA MISSION AU KAZAKHSTAN

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28 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

mode de vie. Pour fuir la situation,beaucoup de Kazakhes émigrent enMongolie, où ils peuvent continuer àpratiquer leur mode de vie ancestral. Dequatre millions qu’ils étaient au débutdu siècle, les Kazakhes ne sont plusqu’un million à habiter leur pays d’ori-gine au début des années trente: encoreun génocide inconnu dont le XXe sièclea été tragiquement riche.

De terre peu peuplée, le Kazakhs-tan devient pratiquement terre vide audébut de l’ère stalinienne. Qu’à cela netienne, on la repeuplera à l’aide de gensd’autres nationalités. Et justement, audébut des années trente commence enURSS l’ère de plomb, marquée par laterreur, la répression et la déportation.Dans toute l’Union soviétique, on semet à déporter des populations entiè-res, pour les arracher à leur milieu devie habituel et pouvoir ainsi mieux lescontrôler. Le Kazakhstan vidé de sa po-

pulation d’origine est un endroit par-fait pour y installer de force des gensvenant des quatre coins de l’URSS, enparticulier des régions de l’Ouest dupays, où les populations, souvent de lamême nationalité que les peuples despays voisins, pourraient avoir la mau-vaise idée de regarder au-delà de la fron-tière soviétique. Pour couper ces gens-là de tous liens avec leurs compatriotesinstallés hors de l’Union Soviétique, leKazakhstan est un pays rêvé: vastes es-paces désertiques, à l’intérieur des ter-res et loin de toute frontière. Ainsi dèsle début des années trente, commencela déportation massive des Polonais del’Ouest de l’URSS, des Ukrainiens, quiavaient manifesté des tendances indé-pendantistes au début des années vingt,puis des Allemands, installés sur la Volgadepuis le XVIIe siècle, et soupçonnéesd’entretenir des liens occultes avec l’Al-lemagne nazie. Les populations de vil-

Astana, la nouvelle capitale.

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29LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

lages entiers sont déplacées vers l’Est,dans des conditions souvent très dures,puis abandonnées avec un gardien aumilieu de la steppe. A charge pour euxde construire leurs maisons, de com-mencer à cultiver la terre et de tenter desurvivre. Tous alors connaissent la fa-mine, les hivers rigoureux sans maisonsolide (il y a des pointes à – 40°), lesétés torrides pendant lesquels il est dif-ficile de trouver de l’eau. La mortalitédes premières années est épouvantable.Petit à petit, la steppe se peuple aussi depaysans russes, arrachés à leur milieud’origine pour être collectivisés de force,de Caucasiens déplacés, de Coréens, dé-portés en masse dans les années 40. LeKazakhstan est aussi terre de Goulag,véritable constellation de camps de con-centrations à travers tout le territoire (lecamp de Spask, au centre du pays, re-couvrait, dit-on, une superficie grandecomme la France). Le travail des pri-sonniers est la source de la première in-dustrialisation du pays, et bien des pri-sonniers, à la sortie du camp, restent auKazakhstan, formant ainsi de nouvellescouches de population. La mosaïque ac-tuelle des nationalités tire son originede l’histoire tragique de l’URSS.

Les débuts de la mission

La déportation est liée à une per-sécution religieuse, notamment pour lescatholiques. Les populations d’originecatholiques (Polonais, Allemands,Ukrainiens occidentaux) avaient tantbien que mal réussi à conserver leur pra-tique religieuse tant qu’ils demeuraientdans leurs régions d’origine. Au mo-ment de la déportation, les prêtres sontsystématiquement exécutés ou envoyés

au Goulag, les livres religieux détruits.La prière du chapelet jouera un rôle es-sentiel dans la perpétuation de la foi ca-tholique. Privés de prêtres, d’églises, detout lien avec les structures de l’Églisecatholique, les gens continuent à prierle chapelet, souvent en communauté aucours de réunions secrètes. Et lorsqueles premiers prêtres sortent du camp,après plusieurs années d’internement etde travaux forcés, ils exercent discrète-ment leur ministère dans le pays, bapti-sant, confessant et célébrant la Messedans des maisons privées, à leurs risqueset périls. La plupart d’entre eux sont ar-rêtés à nouveau pour propagande reli-gieuse, et repartent pour de nombreu-ses années au Goulag. Bien de ces prê-tres ont vécu plus longtemps derrièreles barreaux qu’en liberté, et la mort deStaline, qui met fin à la terreur, ne sup-prime pas la persécution religieuse. Lesprêtres ont fait du camp non seulementde vivant de Staline, mais aussi pendanttoute la période de «dégel» qui a suc-cédé à la terreur.

C’est donc une église des catacom-bes que découvrent les premiers prêtresofficiellement admis à exercer leur mi-nistère au Kazakhstan. Les premièreséglises catholiques font leur apparitiondès les années 70, mais on peut alors lescompter sur les doigts d’une main. Etc’est à la fin des années 80, à la faveurde la Perestroïka, que les premiers prê-tres étrangers (en grande partie polo-nais) arrivent au Kazakhstan. À leur ar-rivée, ils ne savent pas ce qu’ils vonttrouver. Et quelle n’est pas leur surprisede découvrir des communautés entiè-res, restées catholiques envers et contretout, qui prient depuis des années pour

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avoir la joie de pouvoir recevoir les sa-crements et qui les accueillent les brasouverts. Le travail des premiers mission-naires consiste essentiellement à recher-cher ces communautés catholiques, àleur donner la possibilité de recevoir lessacrements et à fonder les premièresparoisses.

La mission aujourd’hui

La mission au Kazakhstan consiste,à ses débuts, à assurer le service descroyants souvent éprouvés par des an-nées de persécution. Ce service passeessentiellement par le don des sacre-ments et la catéchisation de populationsqui se disent catholiques sans pourautant avoir bien conscience de ce quecela signifie. Au Kazakhstan, la diffé-

rence de confession ou de religion secomprend exclusivement sur la base desdifférences nationales. Un Polonais,même non baptisé, se considère commecatholique, un Russe comme ortho-doxe, un Kazakh comme musulman. Ledanger de cette conception, c’est quel’Église catholique est souvent perçue,tant par les non-catholiques que par lescatholiques eux-mêmes, comme uneéglise polonaise ou allemande.D’ailleurs, jusqu’à la fin des années 80,dans les quelques églises du pays où l’onpouvait se réunir, on célébrait la messeen polonais ou en allemand, alors queces langues n’étaient plus guère parléespar les jeunes générations. Très vite, lorsde la libéralisation du pays, l’Église com-prit qu’elle devait s’inculturer. Mais

Église catholique de Lisakorsk, entièrement construite par les Allemands.

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31LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

comment s’inculturer dans un pays auxcultures si diverses? On choisit de pren-dre comme langue habituelle de l’Églisele russe, qui est parlé pratiquement partous les habitants du pays, et l’Église ca-tholique du Kazakhstan participa à l’im-mense effort de traduction auquel sesont attelées toutes les communautés ca-tholiques de langue russe depuis la findes années 80. Depuis lors, l’Église ca-tholique sort petit à petit de ses parti-cularismes nationaux, et la création en2003 par le Pape d’une métropole duKazakhstan, sous l’autorité de l’Arche-vêque d’Astana (actuelle capitale dupays) a souligné la volonté de créer uneÉglise catholique pour tout le pays.

L’une des clefs de l’inculturation estla formation d’un clergé local. Actuel-lement, le 98% des prêtres du pays vientde l’étranger. Comprenant cela, l’égliselocale a déployé de grands efforts pourla création d’un séminaire dans la villede Karaganda, au centre du Kazakhs-tan. Actuellement, une vingtaine de sé-minaristes étudient et vivent dans l’ins-titution. La plupart d’entre eux arriventtrès jeunes au séminaire (vers 17 ans),souvent peu après le baptême ou la pre-mière communion. Ainsi le tempsd’étude est plus long que chez nous (auminimum 7 ans), et il commence pardeux années de catéchèse, afin d’affer-mir chez les candidats les fondementsde la foi catholique.

Maintenant que la formation desfuturs prêtres est assurée, l’Église localese tourne vers la formation des laïcs, enparticulier des catéchistes. Vu le man-que de prêtres (une septantaine pourtout le pays), bien des communautés nepeuvent célébrer la messe tous les di-

manches. Un curé doit souvent parcou-rir des distances énormes pour se ren-dre d’une église à l’autre. Là où cela estpossible, les prêtres se font aider par lesreligieuses, qui jouent un rôle impor-tant, notamment dans la catéchisationdes jeunes et l’animation des paroisses.Il n’empêche qu’une aide de laïcs dupays pourrait être précieuse pour for-mation aux sacrements, le catéchismeet l’organisation des célébrations litur-giques. Dans toutes les communautéscatholiques, il y a chez les fidèles unegrande soif d’apprendre, et la petitequantité du personnel ecclésiastique nesuffit pas à étancher cette soif. Il fautdonc donner une instruction religieuseà des laïcs qui accepteraient d’assumercette mission d’enseignement dans lesparoisses. Quelques projets de ce typese mettent en place actuellement. De-puis une année, l’Abbaye de Saint-Mau-rice participe activement à la créationd’un système de cours donnés aux laïcsdans les quatre décanats de l’archidio-cèse d’Astana, au nord du pays. Il s’agitd’une formation en cours d’emploi. Lesgens se réunissent un samedi par moisdans chaque décanat: pendant cette

Le chanoine Jaquenoud préside une messelors du festival des jeunes catholiques

d’Astana.

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journée, ils reçoivent des cours et dumatériel pour étudier pendant le moissuivant. Le parcours de formation doitdurer deux ans, et chaque année estsanctionnée par un examen. Les thèmesétudiés sont la Bible, la dogmatique etla liturgie. Cet été s’est terminée la pre-mière année du parcours, avec environ50 participants. Ils continuent leur for-mation en 2004-05, et une nouvellevolée les a rejoints pour commencer leparcours.

Le Kazakhstan est une terre de pro-messe, et en même temps d’incertitude.Il y a beaucoup de ferveurs chez lescroyants, mais en même temps la basede l’église catholique, constituée d’Al-lemands et de Polonais, a tendance àquitter le pays pour rentrer dans les pa-tries de ses ancêtres, où la vie est nette-ment plus facile. Petit à petit, des fidè-les d’autres nationalités rejoignentl’Église, mais en même temps, l’Églisea de grandes difficultés à s’inculturer:apprendre le russe, pour un prêtre étran-

ger, n’est déjà pas une mince affaire. Etpourtant, il faudrait aussi apprendre lekazakhe, langue absolument différentedu russe. Actuellement, les sectes ontpris de vitesse les églises traditionnelles(catholique, orthodoxe et luthérienne)dans la mission auprès des Kazakhes,dans la mesure où elles ont tout de suitemis en avant des pasteurs kazakhs etqu’elles ont très vite célébré et prêchéen kazakhe. Sans doute qu’au Kazakhs-tan, l’inculturation est l’un des défis ma-

jeurs de la mission, dans un pays auxcultures très diverses, et en même tempstrès conscientes de leur valeur. L’Église,si elle ne veut pas rester la religion deminorités ethniques, devra petit à petitréussir à rejoindre des cultures fort dif-férentes les unes des autres. C’est un déficertes difficile à relever, mais pas impos-sible pour une Église qui par essence estcatholique, c’est-à-dire répandue danstoutes les nations.

Chne Roland Jaquenoud

Place centrale et mosquée de Kostanaj.

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Le 16 août 2004, le président vé-nézuélien Hugo Chavez a été confirmédans sa charge, malgré tous les effortsdéployés par les esprits conservateurs etles Etats-Unis d’Amérique pour le dé-bouter. Hugo Chavez a remporté la vic-toire lors du référendum révocatoire dudimanche 15 août dernier. L’ancien pré-sident étasunien Jimmy Carter et leConseil national électoral du vénézué-lien l’ont annoncé simultanément.

Ce qui s’est passé dans ce payslatino-américain au début du 21e sièclereflète tout ce qui est arrivé dans le sous-continent au cours du 20e siècle et queles théologiens catholiques, surtout, ontsu dénoncer avec perspicacité et téna-cité: la mainmise des privilégiés «natio-naux» et des investisseurs étrangers surles pouvoirs locaux et l’étouffement detoute velléité de changement.

Cette conjugaison de partenairesde circonstance a provoqué la créationd’une injustice institutionnalisée fabri-cant à tire-larigot des pauvres à profu-sion.

Historique: L’irruption des pauvresdans l’Église.

Le Concile Vatican II libère desénergies nouvelles dans l’Église. La 2e

conférence latino-américaine des évê-ques à Medellín en 1968 parle haut etclair: nous vivons dans une situationd’injustice institutionnalisée. L’Améri-que Latine se réveille et les chrétiens quila peuplent s’expriment à travers lescommunautés de base et les théologiens.

Pour les capitalistes, ces pays latinsétaient un puits inépuisable de revenusintarissables puisqu’y investir un dollaren rapportait 10 annuellement; pour lesamateurs de drogue, ils étaient des pa-radis où l’on pouvait s’en procurer faci-lement; pour les militaires, des terrainsde prédilection para los golpes, c’est-à-dire pour les coups d’état, orchestrés parla CIA ou les grands financiers du globe.

Et là-dedans firent tout d’un coupirruption les pauvres, comme sujets etacteurs de leur histoire. Sur cette terrebénie, multicolore, multiraciale, catho-lique va naître un courant théologiquesurprenant, fruit de l’Esprit Saint, unethéologie nécessaire, comme le diraJean-Paul II lors de son voyage au Pé-rou en 1986.

Il s’agit de la théologie de la libéra-tion.

Quel a été le creuset de ce mouve-ment? Cuba… Eh oui! Cuba est le pre-mier territoire libéré du continent. En

UN ENTHOUSIASME AU SERVICE DE L’ÉVANGILE

LA THÉOLOGIE DE LA LIBÉRATION.

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34 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

1959, Fidel Castro, qui à cette époquen’est pas communiste pour deux sous,libère l’île de son dictateur Battista eton assiste à une immense espérance delibération dans tout le sous-continent.

Les militaires, des chrétiens de nais-sance, deviennent des humanistes et desnationalistes. Ils découvrent grâce à detrès nombreux prêtres un Évangile li-bérateur, différent.

Ils découvrent un autre vi-sage du Christ. Par exemple, auPérou, le général Juan Velascoa été formé au CAEM, à Lima,dans lequel des prêtres donnentdes cours de théologie dans l’es-prit du Concile Vatican II et deMedellín.

Il est sensible à l’injusticeinstitutionnalisée dont parle ledocument des évêques.

Il propose alors aux forces arméesun pacte avec les forces ouvrières pourune révolution humaniste et chrétienne.Le 3 octobre 1968, il renverse le prési-dent constitutionnel du Pérou Fer-nando Belaunde.

Dans le bouillonnement des révo-lutions bolivariennes et péruviennes,grâce à l’immense espérance des pau-vres de voir un changement radical seprofiler, naît la théologie de la libéra-tion qui trouve son porte-parole dansle Père Gustavo Gutierrez. Il publie en1971 son premier livre intitulé: La théo-logie de la libération.

Aussitôt surgissent des interroga-tions, des peurs, des atermoiementsdans les bureaux de l’Église officielle eton juge saugrenue cette démarche quipermet aux pauvres de faire irruptiondans les célébrations liturgiques, d’ap-

porter leurs points de vue et de faire dela théologie pratique. Ils prennent laparole dans les assemblées; ils interprè-tent l’Évangile et le premier testament.

Les communautés de base se mul-tiplient. Partout le chapitre 3 de l’Exode,de même que le livre du prophète Isaïeet le Magnificat de Marie deviennentdes sources de réflexion et des leviers

qui mettent en marche la fouleinnombrable des croyants op-primés.

La troisième conférence del’épiscopat latino-américain àPuebla, conférence à laquelle aparticipé Mgr Henri Salina,ancien abbé-évêque de Saint-Maurice, proclame avec luci-dité: «Les pauvres, aussi encou-ragés par l’Église, ont com-mencé à s’organiser pour vivre

d’une manière intégrale leur foi et parconséquent pour réclamer leurs droits(1137)».

Ils poursuivent: «La dénonciationprophétique de l’Église et ses engage-ments concrets avec le pauvre lui ontamené souvent des persécutions et desvexations en tous genres: les mêmes pau-vres ont été les premières victimes deces affronts et vexations (1138)».

«Tout cela a produit des tensionset des conflits à l’intérieur et à l’exté-rieur de l’Église. Avec fréquence, elle aété accusée d’être soit avec les pouvoirssociopolitiques et économiques, soit deconnaître une dangereuse déviationidéologique-marxiste (1139)».

Là nous arrivons au point capital:la rencontre du christianisme avec lemarxisme. Le Père Camillo Torres enColombie, les frères Cardenal et Miguel

Le Père GustavoGutierrez

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35LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

d’Escoto (prêtres-ministres d’État) auNicaragua, le Père Rutilio Grande et sesconfrères jésuites au Salvador; un nom-bre important de religieuses et unequantité de laïcs catéchistes dans tousles pays latino-américains aiment leChrist, vivent de son Esprit et utilisentl’analyse marxiste de la société. Les in-compréhensions surgissent entre les pro-gressistes et les conservateurs et malgréle soutien de Mgr Oscar Romero auSalvador, Mgr Angelleli en Argentine,Mgr Larrain au Chili, du cardinal Arnsde Sao-Paolo au Brésil et du cardinalLandazurri-Riketts au Pérou la théolo-gie de la libération subit des revers im-portants.

L’osmose entre la religiosité popu-laire et la vie de tous les jours n’arrivepas à se concrétiser. L’espérance de con-naître la résurrection de la vraie Église,qui permette le passage du chrétien pau-vre et croyant de la situation identique

à celui du Christ flagellé et douloureuxà celle d’un Christ glorieux est étouf-fée.

L’Esprit Saint demeure à l’œuvremalgré la panique des autorités religieu-ses devant les exigences de justice desopprimés. Il suscitera comme démarchefinale ce texte incroyable de Puebla, quiest un apport très particulier de la con-férence épiscopale du Pérou: «Pour cetteseule raison (car le Christ de riche s’estfait pauvre), les pauvres méritent uneattention préférentielle quelle que soitla situation morale ou personnelle danslaquelle ils se trouvent. Créés à l’imagede Dieu pour être ses enfants, cetteimage est assombrie et déshumanisée.Pour cette raison, Dieu prend leur dé-fense et les aime. C’est ainsi que commepauvres, ils sont les premiers destinatai-res de la mission et leur évangélisationest par excellence un signe et une preuvede la mission de Jésus (114)».

Saint Jérôme, à Cuzco. Paroisse rurale du premier diocèse de l’Amérique centrale.

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36 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Les sources de la théologie de la libé-ration.

La vie des peuples opprimés ducontinent latino-américain entièrementchrétien; la vie de ces pays fascinants,aux paysages différents et enchanteurs,chacun avec son caractère propre et sonrythme de vie; chacun aussi avec sonrégime dictatorial, ses caudillos, ses hé-ros de la libération, ses poètes engagés,ses chantres de la culture populaire; cha-cun aussi avec cette capacité de survie

incroyable dans des situations de jus-tice institutionnalisée devient le creu-set d’une réflexion basée sur l’expériencedu peuple hébreu.

C’est dans ce milieu multicolore etmultiracial, que des chrétiens se met-tent en marche et que surgissent desouvriers, des paysans, des employés quivivaient de l’Esprit de Dieu. Ils décou-vraient dans leur vie la présence agis-sante du Seigneur et du Sauveur. Ils semettaient en route avec des prêtres, des

religieuses et des reli-gieux pour réfléchir àleur situation d’oppri-més, d’anawim.

Il faut souligneravec fermeté et unetrès grande reconnais-sance l’immense ap-port des religieusesdans ce domaine. Enconstantes relationsavec les milieux lesplus défavorisés dansles favelas, dans lespueblos jovenes (trad.:«peuples nouveaux»,euphémisme pourparler des bidonvil-les), dans les prisons,dans les ports et lesusines, elles apportentla bonne nouvelle auxpauvres. Elles réunis-sent les chrétiennes etchrétiens pour des cé-lébrations liturgiqueset elles leur permet-tent d’écouter la Pa-role de Dieu résonnerdans leurs cœurs.

L’église d’Andahuaylillas dans la région de Cuzco est connuecomme la Chapelle Sixtine de l’Amérique du Sud, expressionde la religion populaire, base de la théologie de la libération!

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37LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

De très nombreuses initiatives desolidarité surgissent alors grâce à la prisede conscience des mamans encouragéespar les religieuses pour venir en aide auxaffamés, aux déshérités, aux veuves, auxorphelins, aux prisonniers, aux enfants.Nous assistons à un mouvement de basequi donnera naissance à des crèches, àdes réfectoires populaires afin qu’il y aitau moins un repas par jour pour les pau-vres, à des ateliers en tous genres pourgagner quelques sous, à des rencontresqui deviennent des «communautés ec-clésiales de base».

Les prêtres s’engagent aussi dans cesdémarches et des théologiens réfléchis-sent sur tout ce qui se vit et bouillonneà l’intérieur de ces peuples et ils créentce que nous appelons la théologie de lalibération.

La conférence épiscopale de Pue-bla en 1979 rédigera un texte superbeau sujet de ces communautés ecclésia-les de base (CEB): «l’engagement avecles pauvres et les opprimés; la naissanceet la croissance des communautés ec-clésiales de base ont aidé l’Église à dé-couvrir le pouvoir évangélisateur despauvres, en tant qu’elles interpellentconstamment l’Église, l’appelant à laconversion; car beaucoup de pauvresréalisent dans leur vie des valeurs évan-géliques de solidarité, service, simplicitéet disponibilité pour accueillir le donde Dieu (1147).»

Nous assistons ainsi à un déplace-ment des lieux de travail des évangéli-sateurs. Appelés constamment à la con-version par la présence de tous ces op-primés croyants, les évêques quittentleurs palais épiscopaux, donnent les ter-res des évêchés aux paysans; les prêtres

et religieuses n’iront plus travailler chezles pauvres, ils s’incarneront comme Jé-sus en allant demeurer chez eux, parmieux et avec eux. Ils auront les mêmespréoccupations: l’eau potable, l’électri-fication, les transports en commun, lesroutes, les constructions de logements,les constructions de lieux de culte, d’in-firmeries, la création d’écoles, de dispen-saires et d’hôpitaux.

L’incarnation des prêtres, des évê-ques, des religieuses dans les milieuxpopulaires provoque le retour de la Pa-role de Dieu dans son vrai milieu. Lespauvres récupèrent la Parole qui leurétait destinée. Elle est partagée, man-gée, digérée par chacune et chacun d’en-tre eux et elle dynamise les communau-tés de fidèles.

Les conséquences de cette réflexionthéologique.

Les membres des communautésecclésiales de base se nourrissant de cetteParole de Dieu, revendiquent soudainleurs places dans l’Église comme dans

Le couvent des sœurs de Sainte Catherine:un lieu propice à la méditation depuis

1600 à Arequipa.

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38 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

la société. Ils deviennent exigeants. Ilssouhaitent un retour aux sources évan-géliques; ils dénoncent la collusion del’Église avec les gouvernements et pou-voirs locaux. Ils provoquent un séismedans l’Église institutionnelle et de trèsnombreux prêtres, des évêques, des re-ligieuses et des laïcs paieront le prix fortpour leur engagement aux côtés des pluspauvres et des plus démunis.

Lorsque le président Somoza, en1979, est renversé au Nicaragua, l’en-thousiasme des communautés ecclésia-les de base connaîtra son paroxysme.L’appui de toutes les forces vives et chré-tiennes de l’Amérique Latine à la révo-lution sandiniste favorise le développe-ment social, économique, religieux,politique de ce pays. «Tout le monde»veut apporter sa contribution à l’avè-nement d’une nouvelle société au Ni-caragua.

Au Salvador, Mgr Oscar ArnulfoRomero est nommé archevêque de SanMiguel de San Salvador, au début del’année 1977 et peu après sa nomina-tion, le 12 mars 1977, son ami, le pèreRutilio Grande, est assassiné par les «pe-lotons de la mort» chargés d’éliminerles opposants au régime. Plus que ja-mais conscient de la corruption du pou-voir en place, Romero refuse désormaisd’apparaître dans les cérémonies publi-ques en présence de l’armée ou du gou-vernement jusqu’à ce que la lumière soitfaite sur le meurtre du père Grande etqu’un véritable changement social ait vule jour. Plus que jamais, Romero consi-dère l’Église comme moyen de défierl’oppresseur et de protéger les persécu-tés. «Une Église qui ne s’unit pas aux

pauvres et, à partir d’eux, ne dénoncepas les injustices commises contre eux,déclare-t-il, n’est pas la véritable Églisede Jésus-Christ».

Dès lors, chaque dimanche, danssa cathédrale ainsi qu’à des stations deradio, il dénonce les exactions commi-ses par la junte militaire au pouvoir,massacres, assassinats et autres atteintesaux droits de l’Homme, proclamant

haut et fort que «les torturés et les as-sassinés sont de nouveaux Christs mis àmort par le péché». Et, bien que la presseet la bourgeoisie soupçonnent l’alliancede son Église avec les révolutionnaires,

Cette femme de Puno est une «théologiennede la rue»!

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39LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Romero revendique au contraire un rôlede réconciliateur prêchant la réformepaisible et combattant l’esprit de haineet de vengeance.

Soutenu par des dizaines de mil-liers de croyants mais isolé parmi l’épis-copat conservateur de son pays et, dé-sormais, incompris du Vatican qui luiconseille la prudence, Romero trouveen lui-même la force de poursuivre soncombat pour la Paix et acquiert peu àpeu une notoriété et une audience in-ternationales. Mais, conscient de lamenace qui planait sur lui, il avait prissoin de rassurer ses fidèles réaffirmantainsi sa foi en la résurrection: «s’ils metuent, disait-il, je ressusciterai dans lepeuple Salvadorien». Et de rajouter:«nous accomplissons dans notre vieseulement une fraction minuscule del’entreprise magnifique qu’est le travailde Dieu… nous plantons les graines qui,un jour, croîtront».

Et ce qu’il prévoyait arriva: alorsqu’il venait de lire la parabole du grainde blé qui doit mourir afin de porterses fruits, Oscar Romero est assassinéen pleine messe le 24 mars 1980. Uneimmense foule assista aux obsèques del’archevêque martyr et des milliers depersonnes de tous horizons viennent,aujourd’hui, se recueillir sur sa tombepour trouver l’envie et la force de pour-suivre leur combat pour la Paix. «Notrefoi chrétienne exige que nous nous im-pliquions en ce monde», disait OscarRomero, donnant une orientation nou-velle à l’Évangile: la promotion et la

défense des droits humains…En Bolivie, le pays plus engagé

syndicalement de l’Amérique du Sud,la torture et la mort en martyr du PèreLuis Espinal le 22 mars 1980 convain-cra l’archevêque de La Paz,Mgr Manrique, que j’ai bien connupersonnellement, du caractèreantichrétien du gouvernement du pré-sident Luis Garcia Meza.

Au Pérou, l’Église trouvera dans lecardinal «rouge», son éminence JuanLandazuri Ricketts, ofm cap., un ardentdéfenseur et un soutien inconditionneldu Père Gustavo Gutierrez. Les cinqprélats du Sud Andin proclament avecleur clergé, les religieuses et laïcs la fa-meuse lettre pastorale de 1977 en dé-fense du «runa creyente y explotado»(trad.: l’andin croyant et exploité).

Au Brésil, le cardinal Arns, les frè-res capucins Leonardo et Clodovis Boff,Mgr Pierre Casaldiga, Mgr TomasBalduino, sans parler de l’archevêque deRecife, Don Helder Camara susciterontla naissance d’une nouvelle Église.

En Équateur, c’est Mgr Proaño quiva promouvoir tout cet élan théologi-que et viendra nous parler à San Juandel Oro, prélature d’Ayaviri, en 1977.

Dans ce contexte rempli d’espé-rance les communautés ecclésiales debase et leur théologie militante engen-drent des fruits bénis pour l’évangélisa-tion populaire des masses chrétiennesdu continent latino-américain.

Chne Michel-Ambroise Rey

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40 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Chaque collégien, durant son cur-sus gymnasial est amené à élaborer avecl’aide d’un professeur, une étude con-cernant un domaine choisi qui, par lasuite, est jugé et évalué pour l’obten-tion de la maturité. Ainsi, voulant trai-ter dès le départ d’un sujet historique,je me suis penchée sur le thème des mis-sions, non par passion, mais non pluspar hasard. En effet, deux de mesgrands-oncles, le Père Jean Perraudin etMgr André Perraudin ont été mission-naires au Burundi et au Rwanda au siè-cle passé. Ainsi, en me plongeant de plusprès dans leur univers par le biais descorrespondances de leurs prédécesseurs,je tenais par curiosité à mieux compren-dre leurs parcours de vie, mais surtoutla profession de foi, la volonté et lesmotivations d’un missionnaire.

Par conséquent, pour mon travail,j’ai dans un premier temps effectué unerecherche assidue en bibliothèque à dé-pouiller les correspondances et récits desmissionnaires de la congrégation des Pè-res Blancs publiés dans la revue hebdo-madaire Les Missions Catholiques éditéede 1868 à 1964. Ensuite, j’ai retracéleurs itinéraires de voyage et découvertla mise en place des premières stations.Je me suis intéressée à une mission enparticulier, celle du Tanganika, et celadès l’arrivée des premiers Pères Blancsen 1878.

LES MISSIONS DES PÈRES BLANCS DANS LA RÉGION DES

GRANDS LACS ENTRE 1879 ET 1900D’APRÈS LEURS CORRESPONDANCES PARUES DANS LA REVUE

LES MISSIONS CATHOLIQUES

Voici donc un condensé de cetteétude:

A la fin du XIXe siècle foisonnè-rent dans le monde entier les missionscatholiques. Ainsi, les grandes puissan-ces de l’Europe entreprirent de nom-breuses expéditions en vue d’une colo-nisation massive de la planète, puisquel’Afrique fut l’un des continents viergesles plus convoités pour son étendue etses richesses. En 1884-(5) au Congrèsde Berlin, on le partagea donc politi-quement du nord au sud et chaque payseuropéen implanta progressivement sescolonies et son pouvoir.

Cependant, la religion fut égale-ment une des composantes de cette ex-pansion européenne grâce aux missions.Notons que la plupart des terres afri-caines étaient encore inexplorées et queles missionnaires endossaient ainsi lerôle de véritables explorateurs. SelonLéon XIII, les missions apportaient «lesupplément d’âme aux ambitions civi-lisatrices de l’Europe»(1), puisque co-lonisation et évangélisation reflétaientdes actions complémentaires, toutesdeux voulant implanter les idées et lapatrie originelle européennes par unesuprématie globale.

Parmi la multitude de congréga-tions présentes, l’Association catholiquedes Pères Blancs, fondée par le Cardi-nal Lavigerie en 1869, se démarqua par

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41LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

un apostolat établi en Afrique du Nord,puis en Afrique équatoriale. Cet ordrede prêtres séculiers visait vivement àévangéliser «l’Afrique par les Africains».Ainsi, le Père Blanc s’immisçait dans cescontrées hostiles après une rigoureuseformation intellectuelle, manuelle etanimé des sentiments de foi et de cha-rité.

En 1878, une première caravane dedix missionnaires s’introduisit en Afri-que équatoriale par le Zanzibar. Dèslors, les voyageurs rencontrèrent denombreuses embûches, notamment delongues négociations pour les droits depassage face aux armées musulmanes,ainsi que les maladies dues au climatéquatorial. Beaucoup succombèrent.Après une année de péripéties, les pre-miers missionnaires catholiques s’instal-

lèrent aux abords du lac Tanganika. Dèslors, leur apostolat se mit progressive-ment en place, notamment grâce auxrenforts envoyés chaque année. Les sta-tions proliféraient autour du lac jusqu’àl’établissement d’un vicariat solide, puisenfin jusqu’à la première consécrationépiscopale de Mgr Charbonnier enaoût 1887. Mais quelles étaient leursméthodes d’évangélisation?

Afin d’ériger leur apostolat, les Pè-res rachetaient des enfants orphelins auxcaravanes musulmanes d’esclaves, lessoignaient et les instruisaient à la reli-gion catholique. En revanche, la con-version des adultes fut bien plus ardue,puisque les coutumes et croyances in-digènes rythmaient encore le cœur destribus. Seulement, en suivant des coursde catéchèse et en priant, les néophytes

Page de titre des Missions catholiques, tome XV, Lyon 1883

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42 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

eurent petit à petit confiance en leursprécepteurs. En effet, les Pères apparais-saient en tant qu’amis et sauveurs faceaux marchands d’esclaves. Ils dévelop-pèrent également les méthodes d’agri-culture et soignaient les malades et in-firmes. Par conséquent, la vie des indi-gènes se voyant facilitée, le nombre dechrétiens passa de cinquante mille àvingt millions en moins d’un siècle.

Toutefois, l’esprit occidental con-tribuant au développement religieux,économique, social et politique des tri-bus africaines de cette région donnanaissance à des mouvements indépen-dantistes. Une grande partie de ces peu-ples africains, dès lors imprégnés d’uneâme catholique, ressentirent naturelle-ment le besoin d’affirmer leurs originesdès le début du XXe siècle. De nos jours,les missions ont survécu, puisqu’on dé-nombre encore de nombreuses congré-

gations en Afrique, mais le clivage en-tre une Europe riche et une Afriquepauvre persiste. Aussi, les missionnai-res d’aujourd’hui se démarquent davan-tage par une vocation socio-médicale,mais que seraient devenus les peuplesafricains sans l’Église catholique et sonaide?

Enfin, il demeure utile de préciserque mon étude se fonde sur des témoi-gnages et des lettres parus dans une re-vue catholique au XIXe siècle. Ainsi, iln’existe aucune analyse objective desactions missionnaires, mais plutôt uneimportante mise en exergue des valeurscatholiques. Toutefois, j’ai tenu à trai-ter ces correspondances comme ellesm’apparaissaient, sans les critiquer, ententant ainsi d’imaginer au mieux lespensées, les objectifs, les actions et lesdifficultés des Pères dans leurs voyages.Néanmoins, je suis consciente que les

Une rue du village de Kibanga (Tanganyka). Le Père Guillet, de la Société des Pères Blancs,avec deux enfants nouvellement baptisés (Les Missions catholiques 1885, p. 367).

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43LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

avis divergent concernant la méthodeet l’implantation de l’apostolat catholi-que en Afrique, puisque le choc des cul-tures n’a évidemment pu être évité. Seu-lement, d’un avis personnel, je penseque bon nombre de Pères se sont enga-gés dans les missions avec un réel al-

truisme, remplis d’intentions louables,tout simplement dans le but d’aider.

(1) Les Missions Contemporaines(1800-1917), Tome III, Histoire Uni-verselle des Missions Catholiques, Li-brairie Gründ, Paris, p. 91

Stéphanie Gay

À la fin du XVIe siècle,les Jésuites partent à la con-quête du monde en suivant lestraces de François-Xavier auJapon. Ils ont appris, grâce àla Renaissance et à l’huma-nisme l’accompagnant, lagrandeur de la culture hu-maine; même si elle estpaïenne, elle porte en elle dessemences de vérité. Forts de ceconstat, les missionnaires jé-suites et, en particulier,Matteo Ricci, vont essayer depréparer l’annonce de l’Évan-gile, non seulement en ame-nant la philosophie euro-péenne, mais aussi en cher-chant dans le pays qu’ils dé-couvrent des signes annoncia-teurs de l’Évangile. La foi enJésus-Christ et la culture euro-péenne se sont mêlées pourformer le catholicisme ro-main, pour l’évangélisation depersonnes d’une autre culture,il faut essayer de mieux les dis-

LA MISSION SELON LES JÉSUITES

Matthieu RICCIPortrait gravé in Père Jean-Baptiste du Halde (S.J.),Description géographique, historique, chronologique,politique et physique de l’Empire de la Chine et de la

Tartarie Chinoise, Tome 3, 1735

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44 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

tinguer pour que le message reste lemême tout en respectant l’identité del’autre.

Matteo Ricci, né en Italie en 1552,écrivit durant toutes ses années de mis-sion (1582–1610) un journal qui serapublié par un de ses confrères, le pèreNicolas Trigault sous le titre d’Histoirede l’expédition chrétienne au Royaume deChine qui raconte les actes qu’il a poséspour l’avancée de sa mission. Entré chez

les Jésuites en 1571, il désire vivementpartir en mission en Extrême-Orient.Son vœu sera exaucé et on le retrouveen 1579 dans le port de Macao(1) ap-prenant le chinois avec un confrère. Laconnaissance de la langue était obliga-toire pour pouvoir rester en Chine, maisleur adaptation à ce pays ne s’arrêterapas là. Les deux jésuites s’installeront là-bas avec un habit de bonze bouddhistepour qu’on reconnaisse en eux des reli-

Sur les accusations contre les Jésuites au sujet de Confucius et des autres cérémonies de laChine permises par ces religieux aux Chrétiens de cet Empire.

Mémoires de Nicolas Louis Le Dran, 1735Dans ce document Nicolas Le Dran présente l’histoire du Christianisme en Chine depuis François –

Xavier jusqu’à l’épisode de la Querelle des Rites. En 1705, Charles Maillard de Tournon (1668-1710)arriva en Chine avec un décret du Pape Grégoire XI relatif aux rites chinois. Cet acte pontifical interdit

entre autres le culte des ancêtres. Une vingtaine d’années plus tard, le Christianisme sera interdit enChine et les chrétiens subiront une violente persécution.

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45LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

gieux. Pourtant, même après avoir puentrer dans le pays, leur situation res-tera précaire et la nouveauté de ce qu’ilsétaient venus annoncer leur faisait crain-dre l’expulsion. Leurs comportementset leurs paroles furent donc souvent dic-tés par la prudence. «Nous avons concluentre nous deux choses pour en avoir dessignes manifestes: l’une est que, si l’on avaitlicence libre en ces contrées pour prêcherle saint Évangile, en peu de temps se fe-raient des millions de chrétiens; l’autre estque, sans une telle permission, aussitôtnous aurions à perdre le peu que nousavons, si nous nous mettons délibérémentà vouloir faire des chrétiens.»(2) Mais ilsétaient tout de même en Chine pour yannoncer l’Évangile et le charme qu’ilstrouvent à ce pays et à sa culture ne leleur fait pas oublier. S’ils ne peuventfaire des conversions de foules sans quel’Empire ne s’inquiète, ils essaient d’in-téresser les dirigeants de la classe des let-trés à leurs activités. Ricci, grâce à cequ’il sait, en sciences notamment, at-tire des savants. En gagnant de l’estimeen tant que scientifique et lettré, (il écritaussi de petits traités philosophiques),il donne plus de crédit à ce qu’il prêcheen tant que missionnaire. Pour devenirl’égal de ces intellectuels et pouvoir leurparler comme à des frères, Ricci devradevenir un des leurs, ce qu’il fera enchangeant de province et en prenantl’habit de lettré à la place de celui debonze. Il apprend à connaître les livresde sagesse confucéenne qui sont au cen-tre de toute l’éducation chinoise depuisle début de notre ère et essaie de mon-trer les rapprochements possibles avecle catholicisme, disant: «qu’ils (chrétiens)n’abolissaient pas la loi des anciens doc-

teurs de la Chine, mais l’accomplissaient,ajoutant ce qui y manquait, qu’ils avaientappris étant illuminés de la lumière sur-naturelle et enseignés de Dieu même s’étantfait homme.» (3)

Il veut surtout que la religion qu’ilannonce ne soit pas perçue comme unedoctrine étrangère, mais au contrairecomme la religion la plus proche del’homme quelles que soit ses origines.Il s’appuiera ainsi beaucoup sur ce quirapproche un Chinois et un Européen,comme une conception commune del’amitié ou de vertus, et surtout sur laraison naturelle commune à tous leshommes. Il cherchera durant toute savie à préparer un cadre à l’annonce duchristianisme, travail au combien diffi-cile lorsqu’il faut inventer des mots etdes concepts nouveaux pour exprimerles mystères de la religion chrétienne.Le grand mérite de Matteo Ricci et deses confrères est d’avoir cherché à poserles bases d’une foi solide, et non d’unefoi imposée de l’extérieur, sans fonde-ment dans l’expérience des hommesqu’ils sont allés rencontrer.

Chantal Fellay

(1) Territoire portugais à la frontièrede la Chine où les bateaux se dirigeant ourevenant des îles japonaises pouvaient faireescale.

(2) Tacchi Venturi, Opere Storiche delP. Matteo Ricci, II, p. 225

(3) Matteo Ricci, Nicolas Trigault, His-toire de l’expédition chrétienne au royaumede la Chine, p. 229.

Illustrations tirées de: Le Paris del’Orient. Présence française à Shanghai, 1849-1946. Catalogue de l’exposition présentée parle musée Albert-Kahn du 19 février au 16 juin2002.

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46 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Les mois défilent… Une nouvelleannée scolaire succède à la précédente.La vie du Collège continue avec ses dif-ficultés et ses moments heureux.Comme dans les Annales des monastè-res du Moyen Age, nous voulons rete-nir quelques moments qui ont marquécette période.

Voyages en Italie

L’Italie envoûte… Le voyage en Ita-lie est une nécessaire initiation à labeauté. C’est ce qu’ont recherché 25

élèves. Conduits par les chanoines PaulMettan, Roland Jaquenoud et Yannick-Marie Escher, ils découvraient, lors desvacances de Pâques, les merveilles deFlorence.

Il peutêtre aussi unmoment defranche dé-tente. Lors dulong week-end de l’As-cension, lesétudiants dela classe de 5e

OC arts vi-suels et quel-ques autres,qui avaienttravaillé à la création de la BD En at-tendant Don Camillo, visitaient dans labonne humeur Brescello (Reggiod’Emilie) avec leur professeur Domini-que Formaz. Le village, où a sévi ce curéirascible, a gardé son cachet, tel qu’ilapparaissait dans tous les films de la sé-rie tournés dans les années cinquante etsoixante. Le petit musée de DonCamillo et Peppone retrace intelligem-ment la rivalité amicale des deux adver-saires. Quant au «Crucifix parlant»,œuvre du sculpteur véronais BrunoAvesani, déposé dans une chapelle laté-

CHRONIQUE DU COLLÈGE

PÂQUES - TOUSSAINT 2004

Le groupe des étudiants du pèlerinageArt et Foi à Florence.

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47LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

rale de l’église paroissiale Sainte-Marie-Majeure, il a peut-être parlé à un de cesjeunes!

Non-Stop annulée

Au début du mois de mai, le cou-peret tombe… Le Conseil rectoral dé-cide d’interdire Non-Stop prévue pourle 17 mai. Le collectif des étudiants quiavait préparé cette journée des élèves,les animations du matin et le spectaclepour l’après-midi, se voit désavoué. Leprojet estudiantin était jugé inabouti;de plus, les organisateurs avaient faitpreuve de légèreté dans la programma-tion de certains thèmes. La pilule étaitévidemment amère pour les jeunes quiavaient consacré beau-coup d’énergie à cette en-treprise. Ils obtinrent dela direction un droit deréponse pour présenterleurs arguments, ce quipermit de faire cesser unepolémique naissante.

Il est, malgré tout,resté une œuvre quiaurait dû être présentéece 17 mai: Tournament,un brillant court-mé-trage réalisé par DavidGenetti et GianSchellenbaum (4e scien-tifique). Ces jeunes amateurs réalisèrentun petit film de qualité, faisant preuved’un remarquable savoir-faire, tant pourles effets spéciaux que pour le montage.Le collège servait de cadre à une lutte àmort, inspirée de la série des Matrix,aboutissant à une conflagration apoca-lyptique. Jonathan, Sébastien, Vincent,

Yannick et un professeur se montraientconvaincants dans leurs rôles de justi-ciers et tueurs implacables! Ce film futprojeté aux étudiants juste avant les va-cances.

Un échec est matière à leçon. Ilaurait été inimaginable que le flambeaun’ait pas été repris cette année. Depuisnovembre, une équipe dynamique s’estconstituée pour préparer la prochaineNon-Stop du printemps 2005.

Réussites scolaires

Le Chef du Département de l’Ins-truction publique, M. Claude Roch,honore de sa présence chaque remise dediplômes de Maturité. Ce moment de

joie et de fierté collectiveest toujours vécu intensé-ment, surtout quant lesrésultats sont bons. Enjuin dernier, 142 jeunesachèvent avec succès leursétudes gymnasiales. Parmieux, 17 élèves sont priméspour leurs résultats scolai-res, 5 pour leur actiondans la vie du collège.

Notre championsaxonin de patinageStéphane Lambiel (matu-rité Biologie-chimie) re-çoit le Grand prix spécial

du collège et le prix du Mérite sportifde Stadelhofen en reconnaissance de sabrillante carrière sportive, menée paral-lèlement avec ses études.

Renouvellement du corps professoral

Au terme de l’année 2003-2004,plusieurs professeurs ont quitté le col-

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48 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

lège. Après des décennies d’enseigne-ments, MM. Claude Hissette (CO),Max Hasler (allemand), Aloys Jordan(français, géographie, sport) et PhilippeMaret (mathématiques) font valoir leurdroit à la retraite (cf. portraits p. 50).Quant à Mme Anne Bussard-Meunier,professeure d’arts visuels, elle a choiside changer d’établissement dans le cou-rant du printemps.

Les départs annoncent de nou-veaux enseignants. À la dernière rentréescolaire, plusieurs maîtres ont été enga-gés:

M m e s S o n i aCorbaz, de Fully, enanglais; SandraPoncioni, de Marti-gny, en allemand;Dorothée Seppey, deVal-d’Illiez, pour lescours de français etd’économie.

M M . D a n i e lErspamer, de Sion, et Hans-Peter Sch-midt, d’Arbaz, pour les mathématiqueset l’allemand.

La maladie touche plusieurs pro-fesseurs les obligeant à diminuer leursheures de cours.

Le jeune universitaire sédunois,Fabian Arnold collabore avecMme Chemineau en allemand;M. Damien Luy, du Châble, prend unepartie des cours de musique attribués àM. Michel Roulin; Mme Valérie Gobe-let, de Sion, remplace M. René Jordan.

Comme le chanoine RolandJaquenoud s’est vu confier la missiontemporaire de venir en aide à l’Églisecatholique du Kazakhstan,Mlle Sandrine Huber, du village des

Évouettes, a été engagée pour donnerdes cours de grec et de latin.

Le collège dans la presse romande

A plusieurs reprises, le Collège deSaint-Maurice est le sujet d’articles depresse.

Dans un interview paru dans LaLiberté de Fribourg, le recteur GuyLuisier rappelle des points forts du rè-glement du collège et l’inquiétude desresponsables. M. Luisier cite un articledu règlement sur la tenue vestimentaire

«L’habillement nedoit pas être provo-cant ni excentri-que». On veille à cequ’il en soit ainsi.Le recteur insistesur la vigilance quetout le corps pro-fessoral doit avoirdevant le fléau duplaisir artificiel

qu’apporte l’usage de «l’herbe».Deux articles parus en août dans

Le Nouvelliste et Le Matin jettent la sus-picion sur une question éthique. Selonles journalistes, la direction du collègese serait montrée trop rigoriste en refu-sant que soit diffusée aux élèves une bro-chure préparée par l’Association desparents d’élèves de Collombey, donnantaux jeunes des informations sur la sexua-lité et des adresses de services régionaux.

M. Luisier rappelle avec justesse lamission particulière du collège de Saint-Maurice. Les valeurs chrétiennes nedoivent pas être passées sous le silence.Tout débat sur cette question doit lesprendre en considération.

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49LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Débuts de l’année 2005

Dans les dernières chaleurs d’août,la vie reprend à l’intérieur des murs. Lesélèvent arrivent, les uns enthousiastes,d’autres plus résignés mais tous soucieuxde réussir… Quelques heures suffisentpour créer un climat favorable à l’étude.La joie de retrouver les camarades faitvite oublier les vacances et les réflexesdu travail s’impriment à nouveau dansles esprits.

Internat

Le préfet de l’internat, M. le cha-noine Antoine Salina, a eu une initia-tive heureuse l’année dernière. Afin dele seconder dans sa charge, il a pris à sescôtés un ancien du Collège (maturité2003), M. David Ramel. La parfaireadaptation de ce jeune universitaire àce poste de responsabilité ne peut êtreque bénéfique. Proche des étudiants etde leurs problèmes, M. Ramel apporteun regard neuf sur ce mode d’éduca-tion.

Ciné-Club 2004 – 2005

On continue d’y croire malgré lafaible assistance. Le programme est al-léchant… mais le public ne semble passuivre. Pourtant combien de grandsfilms projetés jusqu’au mois d’avril. Ex-cusez du peu…

08.10.04: Soirée Julien Duvivier,France. Pépé le Moko, 1937; Le petitMonde de Don Camillo, 1952.

02.11.04: Lola rennt, de TomTykwer, 1998, Allemagne.

26.11.04: Les sept samouraïs,d’Akira Kurosawa, 1954, Japon; Les septmercenaires, de John Sturges, 1960,USA.

16.12.04: Elephant Man, de DavidLynch, 1980, Grande-Bretagne.

18.01.05: Chat noir, chat blanc, deE. Kusturica, 1998, Yougoslavie.

25.02.05: Roméo et Juliette, deFranco Zefirelli, 1968, Italie; West SideStory, de Robert Wise, 1961, USA.

10.03.05: Les Olvidados, de LuisBunuel, 1950, Mexique.

22.04.05: Nuit des Pal-mes d’or de Cannes: Le salairede la peur, de Henri-GeorgesClouzot, 1953, France; TaxiDriver, de Martin Scorcese,1976, USA; La leçon de piano,de Jane Campion, 1993, Aus-tralie – Nouvelle-Zélande.

Heureusement la con-fiance d’Hormoz Kechavarz,l’âme du Ciné-Club est iné-branlable…

Michel Galliker

Le dernier numéro de StandUp, le journal du collègeédité par l’aumônerie, a interviewé David Ramel.

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50 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Pendant des années, à chaque re-pas que Marcel Biselx, Jean-LucVuadens et moi-même, nous partagionsavec Aloys Jordan en surveillant lesdemi-pensionnaires, nous débattionssur les sujets les plus divers qu’ils soientpolitiques, sociaux, éthi-ques ou d’ordre spirituel.Ce furent des momentstrès forts où nous nousenrichissions mutuelle-ment. Par son témoi-gnage et ses idées, AloysJordan donnait à ces dis-cussions une hauteur devue assez rare.

Habité par une foisolide, Aloys ne mettaitjamais sous le boisseauses idéaux religieux. Chezlui, l’homme spirituel esten parfaite symbiose avecl’homme d’action. Son épouse Sabineet lui-même trouvent dans la prière cetteénergie qui leur permettent de s’enga-ger avec beaucoup d’altruisme. Les re-traites nombreuses, auxquelles le cou-ple participe, en particulier à Paray-le-Monial en France, nourrissent leur ré-flexion et leur vécu.

Jeune professeur, il arrive au Col-lège en 1966 en possession d’une licenceen sciences commerciales et du Diplômefédéral de Maître de Gymnastique.Mais, dès l’année suivante, il quitte l’Eu-rope. Pendant deux ans, avec son

épouse, il travaille comme coopérant àla mission catholique des Pères du Sa-cré-Cœur d’Issoudun à Kaolack au Sé-négal. Cette expérience africaine l’a con-firmé dans sa vision tiers-mondiste. Sescours de géographie humaine et politi-

que, qu’il reprend àSaint-Maurice dès1969, seront toujoursimprégnés de générositésociale. Selon lui, la jus-tice doit commander lesrelations entre pays ri-ches et pays pauvres se-lon les principes défen-dus par le Pape Paul VIdans l’EncycliquePopulorum progressio.

Pendant très long-temps, il seconda leChanoine Henry au ser-vice de la MIVA (œuvre

catholique d’entraide en vue d’aider aufinancement des moyens de transportdans les pays de mission). Les dernièresannées, il collabora à la réussite des jour-nées Nord-Sud organisées au Collège deSaint-Maurice. Sa vie privée apporteune preuve supplémentaire de cet en-gagement. Trois de ses cinq enfants sontadoptés, venant tous de l’Inde.

Maître de sport, il s’est dépenséavec le plus grand enthousiasme auprèsdes étudiants. Il est pour beaucoup dansle succès des disciplines sportives (foot,ski) au sein du Collège. Avec le Cha-

HOMMAGE AUX PROFESSEURS RETRAITÉS

ALOYS JORDAN

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51LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

noine Bernasconi, il a souvent conduitl’équipe de foot de Saint-Maurice auxportes du succès lors des championnatsinter-collèges, organisés depuis plusd’un demi-siècle.

Sa conception de la citoyenneté l’aconduit à assurer des responsabilitéspolitiques. Il fut conseiller communalPDC d’Évionnaz, sa commune d’ori-gine. Depuis quelques années, il milite

PHILIPPE MARET

«Salut, gamin!» un jeune collèguem’évoquait récemment l’apostrophe quele professeur Philippe Maret lui adres-sait au temps de ses études gymnasiales.Ce souvenir, beaucoup d’anciens collé-giens pourraient le reprendre à leurcompte. Son empathiepour les étudiants étaitréelle. Homme de rigu-eur dans son enseigne-ment comme professeurde mathématiques,M. Maret était soucieuxde la réussite des élèvesdont il avait la charge.

Entré dans le corpsprofessoral du Collège del’Abbaye en septembre1965, titulaire d’une li-cence en mathématiquesobtenue à l’Université deLausanne, Philippe Maret s’est consa-cré pendant plusieurs décennies à incul-quer les fondements de cette disciplineà des générations d’élèves, en particu-lier dans les sections Économie et Mo-derne. Spécialiste de géométrie descrip-tive, il a mis ses compétences au service

d’une meilleure formation gymnasialedans cette matière.

Pendant plusieurs années, il fut,avant 1990, membre de la Commissioncantonale de mathématique. Avec no-tre ancien collègue Laurent Fuchs, il pu-

blia un cours pour lespremières années duCollège. Riches d’unelongue expérience pro-fessorale, ces deux pro-fesseurs exposaient avecclarté les fondements desmathématiques.

Quelqu’aient puêtre ses soucis, PhilippeMaret n’en montrait ja-mais rien. Au contraireson égalité d’humeur etsa jovialité étaient com-municatives. Avec sa

force de caractère, il redonnait le moralà certains de ses collègues en proie audoute face aux difficultés. Ces qualitéshumaines sont précieuses dans la pro-fession d’enseignant. Porté par une con-ception altruiste du service professoral,il n’a jamais failli à sa mission.

au sein du Parti chrétien-social du Va-lais Romand, acquis aux valeurs réfor-mistes de ce parti.

Avec simplicité et constance, Aloysn’a jamais hésité à défendre les causesqui lui semblent justes. Son humanismesocial a toujours suscité le respect de sescollègues.

Michel Galliker

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52 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Sa tranquillité d’âme lui vient deplusieurs sources. Membre d’une cho-rale masculine, il aime le chant pour lapaix intérieure qu’il procure. La quié-tude du Valais convient à sa personna-lité… peu lui importe de partir à la dé-couverte d’autres lieux. Le goût pour

Ces lignes, le chanoine Max Haslerdevra les accepter. Sa discrétion natu-relle, cultivée à grand soin, refuse quesoit mise en avant sa personne. Passeroutre nous culpabilise un peu, maisnous le faisons en toute amitié, sûr d’êtrepardonné…

Originaire de Wil (canton de Saint-Gall), Max Hasler faisait partie de cesétudiants d’Outre-Sarine venus au Col-lège de Saint-Maurice poursuivre leursétudes gymnasiales. Maturiste 1960 enclasse de Littérature, il choisit d’entrerdans la Congrégation des ChanoinesRéguliers de Saint Maurice. Il prononceses vœux perpétuels en 1966; une an-née plus tard il reçoit le sacrement del’ordre. Titulaire d’une licence en théo-logie obtenue à l’Université de Fribourgen 1968, il obtint quelques années plustard un diplôme au Conservatoire demusique de Genève.

Sa vie est désormais consacrée àl’Abbaye et au Collège. Aux postes quilui sont confiés, il fait preuve de com-pétence et d’esprit de service, montrantune disponibilité jamais prise en défaut.

À l’Abbaye, il occupa la charged’économe entre 1981 et 1988. Inté-

LE CHANOINE MAX HASLER

ressé par la technique, il fut de très bonconseil lors de la mise en place des nou-veaux moyens de sonorisation à la Basilique.

Après un passage au Collège Saint-Charles à Porrentruy dans les années 70,il commence à la rentrée 1980 son pro-fessorat d’allemand à Saint-Maurice. Seméfiant des innovations pédagogiquesà la mode, il cherchait à donner aux étu-diants les bases nécessaires, particuliè-rement en grammaire, pour s’initier àcette langue magnifique, mais difficile.

Préfet à l’internat jusqu’en 1997,il avait su créer pour les jeunes adoles-cents un climat apaisant.

Max Hasler est riche de talents.Professeur de piano, exigeant dans lamaîtrise de cet instrument, il a formébeaucoup de jeunes pianistes.Aujourd’hui encore, il donne un ensei-gnement musical aux moniales domi-nicaines d’Estavayer-le-Lac.

Fasciné par l’informatique dès l’ap-parition des ordinateurs, il a initié nom-bre de ses confrères aux arcanes d’unsystème (que l’auteur de ces lignes peineà saisir malgré les cours reçus…)

Habité d’une délicatesse non osten-tatoire, le Chanoine Hasler a pour les

l’équitation, que son fils Christophe luia communiqué, répond parfaitement aubesoin de maîtrise de soi-même.

Chez de nombreux peuples, lesAnciens sont respectés pour leur sagesse.C’est ce sentiment que ses plus jeunesconfrères ressentaient en sa compagnie.

Michel Galliker

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53LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

personnes âgées une patience et uneécoute remarquables. Plusieurs confrè-res décédés, en particulier le frère Char-les Rouiller, ont bénéficié de ses gestesd’attention. Depuis 1997, les maladesde la Clinique Saint-Amé (hospice pourles personnes du 3e âge) peuvent comp-

Quinze années de collaboration àla Demi-pension avec Claude Hissette(dans la suite du texte désigné par le si-gle I7, comme il se plai-sait lui-même à le faire),quinze ans de collabora-tion, ça laisse des traces.

Il faut en repérerquelques-unes pourvous les révéler, Ami lec-teur, en évitant que cedévoilement ne prennepar trop l’allure d’un ar-ticle nécrologique. Caril est bien vivant notrejeune collègue retraité,tout juste sexagénairedepuis le 11 octobre2004, en train de con-sacrer son temps et ses talents à sa fa-mille, à ses nombreux amis et à toutessortes d’activité au service du prochain.

I7, tu es, en effet, un homme en-gagé et généreux, digne de confiance,comme en témoigne, par exemple, tonséjour de coopérant en Algérie avec lesPères Blancs de 1967 à 1970, après l’ob-tention de ton Diplôme d’éducateur enBelgique. Parlons-en de la Belgique, tonpays natal et bien-aimé, riche de souve-

CLAUDE HISSETTE

nirs où tu as atteint ta stature d’hommeau contact de nombreux travailleurs etartisans (bouchers, transporteurs, etc…)

qui t’ont initié à la va-leur du travail, du tra-vail bien fait, exécutédans les règles de l’art.

De retour d’Algé-rie, I7 se marie un1er août 1970, jour de laFête Nationale des Suis-ses; une date pas du toutinnocente mais révéla-trice d’un désir d’inté-gration positive pourmieux servir. Il ne pou-vait plus échapper à sadestinée: il embrasse lanationalité suisse en

étant accueilli à bras ouverts par la No-ble Bourgeoisie de Sion. Après quelquesannées d’enseignement à l’InstitutSainte-Agnès (1970-1977) et le Di-plôme de Maître des travaux manuelsen poche, I7, le Sédunois, entre dans lecorps professoral du Collège de l’Abbayeen septembre 1978.

Le soussigné est heureux, CherClaude I7, de rappeler ta conscienceprofessionnelle se manifestant par le

ter sur son dévouement inlassable entant qu’aumônier.

Sans s’immiscer dans le secret desa personne, il faut trouver cette grâcedu service dans sa haute idée de la viereligieuse.

Michel Galliker

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54 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

soin apporté à la préparation des cours,par une ponctualité sans faille et unefidélité à toute épreuve; ton taux d’ab-sentéisme frisant le 0,5 pour mille,(déjà).

En quinze ans de travail en com-mun à la Demi-pension, j’ai pu appré-cier ta disponibilité et ton dévouementpour œuvrer, pas seulement en salariéappliqué, non! mais comme un ami:jamais en retard pour donner un coupde main dans les domaines les plus va-riés (de la surveillance en ville à la pré-paration du carnotzet en passant par destuyaux sur l’enseignement ou sur l’édu-cation), toujours prêt à ramener mon

attention sur des classes en ballade oudes manifestations extrascolaires ayantune incidence sur la fréquentation desétudes ou des repas, enfin, prompt àrépondre présent lors de mes absences.Merci, cordial et chaleureux merci à toiClaude I7, mon ami.

Un mot pour conclure. Claude I7demeure un homme patient et généreuxsur qui l’on peut compter, qui déploieaujourd’hui bénévolement une belle ac-tivité en diverses œuvres d’entraidecomme il s’était déjà dévoué à la paroisseet dans les sociétés sportives, sans oublierles contemporains! Claude, merci etbravo.

Chne Paul Mettan

CHRONIQUE DES ANCIENS

MM. Joseph Ackermann, deBoncourt (volée 1934), BernardBenvenutti, de Massongex (volée1966), André Berchtold, de Sion, Fran-çois Brunelli, de Sion (volée 1948),Paul-Albert Cuttat, de Porrentruy, JeanEbi, Porrentruy (volée 1952), HansjorgFlueler, de Pfäffikon (ZH) (volée 1947),Germain Girardin, de Lajoux (volée1951), Raymond Griesser, de Fribourg(volée 1947), Charles-Louis Gross, deSaint-Maurice (volée 1941), Henri-PaulHuber, de La Tour-de-Peilz (volée1970), Michel Jourdan, de Liddes, Gé-rard Kessler, de Montricher (volée

1958), Roger Mabillard, de Saint-Légier, Catello Manzacca, de Fully (vo-lée 1978), Gaston Métrailler, de Lon-dres (volée 1960), Alain Papilloud, deVétroz (volée 1977), Yves C. Perreten,de Genève (volée 1984), Jean-LouisPerrier, de Neuchâtel (volée 1946),Pierre Pitteloud, de Montreux (volée1954), Maurice Ramoni, de Cossonay-Ville, Arnaud Rausis, d’Orsières, Ed-mond Rey-Bellet, de Chêne-Bougeries(volée 1942), Georges Vairoli, de Mar-tigny (volée 1942), Jean Widmer, deLucens (volée 1949).

La Chronique de ce numéro se résume pour une fois à la liste de nos anciensdécédés. La rédaction publie toujours volontiers les contributions des anciens.

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55LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

Un ami de l’Abbaye a bien voulunous envoyer un article dans lequel ilest question du premier abbé de notremonastère, Imnémode.

Les renseignements concernant cepersonnage sont connus par sa Vita etson épitaphe. Il est natione quidembarbarus, soit d’origine burgonde. Pen-dant quelque temps, il a vécu à la courroyale et a suivi l’hérésie arienne. Puis,il se convertit au catholicisme, se retireau couvent de Grigny près de Vienne,où il entre finalementcomme moine. Bientôtdevenu abbé, il dirigependant longtemps cemonastère avec succès.

Lorsque saint Sigis-mond veut fonder unmonastère à Agaune, ilcherche à créer un monastère nationalà la Burgondie et à faciliter la conver-sion de ses compatriotes ariens. Le choixdu premier abbé de Saint-Maurice n’estdonc pas innocent, car il montre bienle dessein poursuivi. En effet, c’est à no-tre connaissance le seul ecclésiastique dehaut rang ayant appartenu au peupleburgonde. Les hautes autorités religieu-ses de l’époque sont exclusivement is-sues de l’aristocratie gallo-romaine, alorsque le nouvel abbé est né arien et sa con-version au catholicisme ne peut que ser-vir d’exemple aux Burgondes hérétiques.

Son abbatiat est trop court pourpouvoir influencer de façon profondele devenir du monastère dont il vient

SAINT HYMNEMODE LE MAGNANIME

de prendre la tête. Il n’en a pas moinsorganisé la vie monastique et en parti-culier la laus perennis. Il meurt le 3 jan-vier 516 après un abbatiat de sept mois,dans sa soixantième année (ce qui faitsupposer qu’il est né vers 450, année dela rédaction par saint Eucher de sa let-tre traitant du martyre de la légionthébaine).

La destinée de ce personnage estdonc relativement bien connue, mais ilnous manquait une explication à pro-

pos de son nom: Voilà lesujet de l’article que nousvenons de recevoir.Comme cela est habitueldans les noms d’originegermanique, celui-ci se dé-compose en deux parties:*Imn(e)-modaz, la pre-

mière provient du germanique*im(m)in-, forme contractée du germa-nique *irmina- «grand, élevé, sublime»,la seconde dépend toujours du germa-nique *moda- «sens, cœur, courage». Cenom signifie donc à peu près «GrandCœur» et correspond au latin magnaanima, magnanimus, le magnanime.

Il est évident que ses contempo-rains ne comprenaient ainsi cetanthroponyme. Ils l’ont latinisé et l’ontanalysé au moyen de ce qu’on appelleune étymologie populaire. On a rajoutéun «h» au début du mot, le «I» est de-venu «Y» (Imnemoda devientHymnemodus) et voici notre nom rap-pelant les hymnes que tout moine se

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56 LES ECHOS DE SAINT-MAURICE

doit de chanter. Voilà un bel exempled’adaptation d’un patronyme au rôletenu par son détenteur.

L’épitaphe de notre premier abbéa été placée dans le hall d’entrée de l’Ab-baye avec le n° 40. Rappelons briève-ment l’histoire de cette inscription. Unfragment de calcaire du Jura avait ététrouvé vers 1896 lors de travaux dansun jardin situé derrière la MaisonPanisset. En 1903, le prieur Bourbanremarque ce caillou sur la table de tra-vail du curé de Vérossaz où il servait depresse-papiers. Il réussit à faire le lienentre ces quelques lettres et l’épitaphede l’abbé Hymnemode citée dans la Vitaabbatum acaunensium qui venait alorsd’être éditée par B. Krusch. L’inscrip-tion du hall d’entrée est donc une resti-tution moderne d’une épitaphe de prèsde quinze siècles. En voici la traduction:

Fuyant le monde, le saint prêtreHymnemode, Abbé, suivit les exemplesdes saints. Par sa vie assidue à la psal-modie, il entraînait tous les moines à lalouange divine et, avec le secours deDieu et par son exemple, il secondaitles prières des choristes. Après une vie

de soixante années, il mourut enAgaune, mais son âme a rejoint les saintsdans le céleste royaume. Il trépassa le 3des nones de janvier sous le consulat dePierre.

Germain Hausmannet Olivier Roduit

Ces notes de lectures sont issues de l’arti-cle de Wolfgang Haubrichs,Akkulturationsvorgänge in Namen und dieTraditionsgesellschaften des frühen Mittelalters,dans Forschungen zur Geschichte des Mittelalters,vol. 8: Die Suche nach den Ursprüngen von derBedeutung des frühes Mittelalters, publ. sous ladirection de Walter Pohl, Wien 2004, p. 85-105,en particulier p. 101 (Österreichische Akademieder Wissenschaften, philophisch-historischeKlasse, Denkschriften, 133). Cet article nous aété aimablement communiqué par M. WulfMüller, à Boudry. Sur l’abbé Hymnemode, con-sulter Les chanoines réguliers de Saint-Augustinen Valais, Helvetia Sacra, IV/1: Le Grand-Saint-Bernard, Saint-Maurice d’Agaune, Les prieurésvalaisans d’Abondance, Bâle, Francfort-sur-le-Main, 1997, pp. 406-407. Pour l’étude scienti-fique de l’inscription, lire Corpus inscriptionummedii aevi Helvetiae. Die frühchristlichen undmittelalterlichen Inschriften der Schweiz, Vol. 1:Die Inschriften des Kantons Wallis bis 1300, éd.Ch. Jörg, Freiburg 1977 (Scrinium Friburgense,sonderband 1), pp. 41-43 et Pl. 3, fig. 6.

Hymnemode, le premier abbé d’Agaune nous est connu par sa Vita et par son épitaphe(photo). Il s’appelait en fait Imnemode, nom qui signifie: le magnanime.