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THÈSE Pour l’obtention du grade de DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ LOUIS PASTEUR STRASBOURG I Ecole Doctorale de Physique et Chimie Physique DISCIPLINE : CHIMIE PHYSIQUE Présentée par : Olivier BONDIL ---------- ÉTUDE DE L’ENDOMMAGEMENT EN SOMMET DE FISSURE DANS LES POLYMÈRES AMORPHES RENFORCÉS « CHOC » PAR NODULES D’ÉLASTOMÈRE ---------- Directeurs de thèse : C. FOND & R. SCHIRRER Unité de Recherche CNRS : UPR 022 Institut Charles Sadron Date de soutenance : 19 septembre 2006 - JURY - MM. J. BASCHNAGEL Professeur, Institut C. Sadron, Strasbourg Président J. C. GRANDIDIER Professeur, ENS de Mécanique et d’Aérotechnique, Poitiers Rapporteur N. BILLON Directrice de Recherches, Ecole des Mines de Paris, Sophia-Antipolis Rapporteur C. FOND Professeur, Institut C. Sadron, Strasbourg R. SCHIRRER Directeur de Recherches, Institut C. Sadron, Strasbourg P. GERARD Ingénieur de Recherche, ARKEMA, Lacq

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THÈSE

Pour l’obtention du grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ LOUIS PASTEUR STRASBOURG I

Ecole Doctorale de Physique et Chimie Physique

DISCIPLINE : CHIMIE PHYSIQUE

Présentée par :

Olivier BONDIL

----------

ÉTUDE DE L’ENDOMMAGEMENT EN SOMMET DE FISSURE DANS LES POLYMÈRES AMORPHES RENFORCÉS

« CHOC » PAR NODULES D’ÉLASTOMÈRE

----------

Directeurs de thèse : C. FOND & R. SCHIRRER

Unité de Recherche CNRS : UPR 022 Institut Charles Sadron

Date de soutenance : 19 septembre 2006

- JURY -

MM. J. BASCHNAGEL Professeur, Institut C. Sadron, Strasbourg Président J. C. GRANDIDIER Professeur, ENS de Mécanique et d’Aérotechnique, Poitiers Rapporteur

N. BILLON Directrice de Recherches, Ecole des Mines de Paris, Sophia-Antipolis Rapporteur C. FOND Professeur, Institut C. Sadron, Strasbourg R. SCHIRRER Directeur de Recherches, Institut C. Sadron, Strasbourg P. GERARD Ingénieur de Recherche, ARKEMA, Lacq

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Un professeur euphorique à ses élèves : « Vous verrez… La chimie mène à tout ! »

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REMERCIEMENTS

Mes premiers remerciements vont à J. C. Wittman et à J. F. Legrand, ainsi qu’à l’ensemble des personnels de l’institut Charles Sadron qui m’ont accueilli les trois années qu’auront duré ces travaux.

C’est ensuite aux membres de l’équipe de Mécanique Physique des Polymères que je souhaite adresser mes remerciements.

A C. Fond et R. Schirrer tout d’abord, pour leur encadrement, leurs conseils et leur aide, mais aussi pour avoir mis à ma disposition l’ensemble des outils nécessaires pour mener à bien cette étude. A C. Gauthier, pour ses remarques toujours judicieuses, sa gentillesse, ses « tuyaux », son humour, ses cerises… A S. Braymand, pour ses encouragements constants et son aide précieuse lors de la mise en œuvre de méthodes d’analyse des déformations par corrélation d’images. A D. Favier enfin, pour sa gentillesse rare, et son extraordinaire efficacité : ces deux qualités furent (trop) souvent mises à contribution…

Je tiens également à remercier J. Baschnagel d’avoir accepter de présider mon jury de thèse, ainsi que N. Billon et J. C. Grandidier, pour avoir rapporté avec minutie mon manuscrit (en dépit de mes nombreux retards et ajournements).

Par ailleurs, il est absolument nécessaire de souligner le rôle fondamental joué par la société Arkema, sans qui ces travaux n’auraient pu être réalisés.

Je remercie évidemment P. Gérard pour son implication dans le projet, et considère comme une chance le fait d’avoir pu collaborer avec lui durant ces trois années. Mes remerciements sont également adressés à N. Passade, à B. Pouchant-Lahorre et à l’ensemble des personnels Arkema qui ont, de près ou de loin, collaboré à cette étude.

Un grand merci à tous ceux et toutes celles avec qui j’ai pu discuter et échanger des

idées durant la réalisation de cette étude. Je pense tout particulièrement à R. Estevez pour ses conseils, mais aussi à G.

Rousselier. Je ne peux non plus oublier J. P. Couvercelle pour ses efforts dans notre tentative de réalisation de nodules « liquides », ni L. Lalande et C. Plummer, pour leurs travaux visant à valider nos modélisations.

C’est avec des camarades remarquables que j’ai eu la chance de partager, tout au long

de ces années, tant les fous rires que les galères, à l’ICS comme à l’ESPCI. A ceux-ci, devenus depuis des amis, j’adresse de profonds remerciements : Damien, Armelle, Diane, Marilyne, Vincent, Eric, Stéphanie, Carine…

Enfin, je pense à celle qui m’a apporté son soutien indéfectible tout au long de cette épreuve. Merci.

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RÉSUMÉ

Les matériaux constitués d’une matrice polymère amorphe renforcée « choc » par des nodules d’élastomère présentent une transition Ductile-Fragile : en fonction des conditions de sollicitation, ces matériaux peuvent adopter différents comportements, fragiles ou ductiles.

Par leurs interactions, trois phénomènes dissipatifs d’énergie dirigent cette transition et sont susceptibles de conférer aux matériaux des propriétés « choc » : craquelures et bandes de cisaillement développées dans la matrice, cavitation de l’élastomère des particules de renfort.

Une connaissance aussi précise que possible de la nature de ces phénomènes et de leurs interactions est nécessaire dès lors que l’on s’intéresse à la transition Ductile-Fragile de ces matériaux.

L’objectif de cette étude est de rendre compte de cette transition par la modélisation adéquate de l’évolution des divers phénomènes dissipatifs et de leurs interactions.

Une méthodologie reposant sur deux axes de travail est donc mise en œuvre pour étudier des matériaux modèles. Une attention toute particulière est portée au phénomène de cavitation du fait de son rôle capital de « générateur » de la transition.

Un premier axe de travail regroupe les efforts de modélisation menés en deux étapes dans le cadre d’une approche dite « Macro-Micro ».

La première étape (« Macro ») correspond à la modélisation d’un sommet de fissure à l’échelle macroscopique, à l’aide de la MEF et du modèle de Rousselier.

La seconde étape (« Micro ») se déroule à l’échelle de la microstructure, à l’aide de la Méthode d’Inclusion d’Eshelby et de la mise en œuvre de critères déterminés pour chacun des phénomènes dissipatifs considérés.

Un second axe de travail englobe l’ensemble des travaux expérimentaux réalisés lors de cette étude.

Nécessaires pour identifier les paramètres matériau de nos différents modèles, ces expérimentations nous permettent de vérifier nos prévisions numériques, mais aussi de nous confronter directement au problème de transition Ductile-Fragile, notamment à l’approche de la Tg de l’élastomère de renfort.

La méthodologie mise en œuvre se heurte, il est vrai, à certaines difficultés inhérentes au problème étudié : multiplicité des échelles considérées, diversité des comportements rencontrés, nature des champs de vitesses de déformations en sommet de fissure, etc.

Cependant cette étude permet de mieux appréhender le phénomène de transition Ductile-Fragile : une exploration approfondie des systèmes matrice PMMA/particules de renfort est réalisée. L’importance de la quantité d’élastomère introduit dans la matrice, ainsi que sa propension à caviter apparaissent alors intimement liés au processus de renforcement « choc », ainsi qu’à la transition Ductile-Fragile du matériau.

Une cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure et en limite de propagation est obtenue, prenant en compte l’effet du développement de cavités sur les deux autres phénomènes considérés. Enfin, le rôle de paramètres de la transition Ductile-Fragile joué par la température, la vitesse de sollicitation et le taux de renfort du matériau est démontré. Mots-clés : endommagement, cavitation, plasticité, craquelure, transition Ductile-Fragile.

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ABRÉVIATIONS DQP : Défauts Quasi Ponctuels (théorie des) BA : Butylacrylate CT : Compact Tension (éprouvette) EA : Ethylacrylate EWF : Essential Work of Fracture. HIPS : High Impact Polystyrene (Polystyrene « choc ») HPP : Hypothèse des Petites Perturbations MEF : Méthode des Eléments Finis MIE : Méthode de l’Inclusion Equivalente MELR : Mécanique Elastique Linéaire de la Rupture MMA : Méthylméthacrylate MNLR : Mécanique Non Linéaire de la Rupture MET : Microscope Electronique à Transmission MMC : Mécanique des Milieux Continus PA : Polyamide PMMA : Polyméthylméthacrylate PS : Polystyrène St : Styrène VER : Volume Elémentaire Représentatif Dmin : diamètre minimal de particule permettant la cavitation. dc : diamètre de particule critique associé à τc. ∆Ha : barrière de potentiel d’écoulement plastique ( )

0VV∆ : variation de volume de la particule.

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( )c0V

V∆ : variation de volume critique de la particule.

E : module d’Young du matériau. E0 : module d’Young initial du matériau avant endommagement. Ee : module d’Young de l’élastomère. ε1 : première déformation principale. εc : déformation critique.

•εy : vitesse de déformation plastique.

•ε0 : vitesse de déformation constante. φ : fraction volumique de particules de renfort. GI : taux de restitution d’énergie. GIc : taux de restitution d’énergie critique. γe : tension de surface de l’élastomère. Γsc : énergie par unité de surface de rupture des chaînes d’élastomère. Icirc : indice de circularité. k : constante géométrique associée à τc. Ke : module de compressibilité de l’élastomère. KI : facteur d’intensité des contraintes. KIc : facteur d’intensité des contraintes critique. λe max : taux maximum d’élongation des chaînes d’élastomère. µm : module de cisaillement de la matrice. µe : module de cisaillement de l’élastomère. ne : densité de réticulation de l’élastomère. νe : coefficient de poisson de l’élastomère. νm : coefficient de poisson de la matrice.

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R : constante des gaz parfaits. ry : rayon de la zone plastique de correction d’Irwin. Stotale : section totale de matériau supportant une contrainte. Seff : section effective de matériau endommagé supportant une contrainte. σy : contrainte seuil d’écoulement. σh : contrainte hydrostatique dans l’élastomère. σhc : contrainte hydrostatique critique de cavitation dans l’élastomère. σeff : contrainte effective supportée par le matériau endommagé. σTc : contrainte de traction critique d’apparition du phénomène de cavitation. T : température. τc : distance interparticulaire critique. Va : volume d’activation de la molécule. Vélast : fraction volumique d’élastomère dans une particule de renfort.

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TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS ------------------------------------------------------- 3

RÉSUMÉ --------------------------------------------------------------------- 5

ABRÉVIATIONS ----------------------------------------------------------- 7

TABLE DES MATIÈRES------------------------------------------------11

INTRODUCTION ---------------------------------------------------------17

I GÉNÉRALITÉS SUR LES POLYMÈRES AMORPHES RENFORCÉS « CHOC » PAR NODULES D’ÉLASTOMÈRE -19

I.A Introduction--------------------------------------------------------------------- 19 I.B Transition Ductile-Fragile dans les polymères amorphes renforcés « choc » ------------------------------------------------------------------------------- 20

I.B.1 Description macroscopique de la transition Ductile-Fragile ---------------------20 I.B.1.a Mode de rupture ductile --------------------------------------------------------------20 I.B.1.b Mode de rupture semiductile---------------------------------------------------------20 I.B.1.c Mode de rupture semifragile ---------------------------------------------------------21 I.B.1.d Mode de rupture fragile---------------------------------------------------------------21

I.B.2 État du matériau en sommet de fissure-----------------------------------------------22 I.B.3 Conclusion----------------------------------------------------------------------------------24

I.C Phénomènes dissipatifs dans les polymères amorphes renforcés « choc » ------------------------------------------------------------------------------- 25

I.C.1 Quelques définitions----------------------------------------------------------------------25 I.C.1.a Nomenclature des comportements mécaniques------------------------------------25 I.C.1.b Endommagement ----------------------------------------------------------------------26

I.C.2 Phénomènes dissipatifs liés à la matrice amorphe ---------------------------------27 I.C.2.a Bandes de cisaillement----------------------------------------------------------------27 I.C.2.b Craquelures-----------------------------------------------------------------------------28 I.C.2.c Bandes de cisaillement et craquelures : compétition et interactions ------------29

I.C.3 Phénomène dissipatif lié à la particule de renfort ----------------------------------30 I.C.3.a Phénomène de cavitation -------------------------------------------------------------30 I.C.3.b Champ de contraintes à l’intérieur d’une particule -------------------------------31 I.C.3.c Critère de cavitation-------------------------------------------------------------------31 I.C.3.d Influence des paramètres matériau de l’élastomère -------------------------------32

I.C.3.d.i Module d’Young et Coefficient de Poisson ------------------------------------32 I.C.3.d.ii Modules de Compressibilité et de Cisaillement------------------------------33 I.C.3.d.iii Autres paramètres---------------------------------------------------------------34

I.C.3.e Structure des nodules -----------------------------------------------------------------34 I.C.4 Conclusion----------------------------------------------------------------------------------35

I.D Effet des interactions entre phénomènes dissipatifs sur le renforcement « choc » ------------------------------------------------------------- 36

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I.D.1 Conséquences de l’introduction de particules d’élastomère dans une matrice polymère amorphe-------------------------------------------------------------------------------36 I.D.2 Cavitation et plasticité -------------------------------------------------------------------36

I.D.2.a Champ de contraintes autour d’une particule, effet de la cavitation et sensibilité à la sollicitation---------------------------------------------------------------------------------36 I.D.2.b Distance interparticulaire critique---------------------------------------------------37 I.D.2.c Bandes de cisaillement généralisées en sommet de fissure ----------------------38

I.D.3 Cavitation et craquelures----------------------------------------------------------------40 I.E Conclusion----------------------------------------------------------------------- 42 I.F Références ----------------------------------------------------------------------- 43

I.F.1 Références citées---------------------------------------------------------------------------43 I.F.2 Références non citées ---------------------------------------------------------------------46

II PRÉSENTATION DE L’ÉTUDE------------------------------------47

II.A Introduction-------------------------------------------------------------------- 47 II.B Modélisation numérique----------------------------------------------------- 48

II.B.1 Quelques généralités sur la modélisation de l’endommagement et de la rupture dans les matériaux polymères amorphes -----------------------------------------48

II.B.1.a Introduction ---------------------------------------------------------------------------48 II.B.1.b Approche globale---------------------------------------------------------------------48

II.B.1.b.i Plasticité confinée et plasticité étendue---------------------------------------48 II.B.1.b.ii MELR -----------------------------------------------------------------------------49 II.B.1.b.iii MNLR ----------------------------------------------------------------------------50

II.B.1.c Approche locale ----------------------------------------------------------------------51 II.B.1.c.i Mise en oeuvre--------------------------------------------------------------------51 II.B.1.c.ii Exemples de modèles micromécaniques couplés utilisés pour la modélisation de l’endommagement dans les polymères amorphes -------------------53

II.B.1.d Cas des polymères amorphes renforcés « choc »---------------------------------54 II.B.1.d.i Introduction-----------------------------------------------------------------------54 II.B.1.d.ii Modélisation de l’effet de la cavitation d’une particule de renfort-------54 II.B.1.d.iii Modélisation des interactions entre particules de renfort ----------------55

II.B.1.e Conclusion-----------------------------------------------------------------------------57 II.B.2 Méthode de modélisation « Macro-Micro » adoptée dans notre étude--------57

II.B.2.a Réflexion à l’origine de notre méthode de modélisation ------------------------57 II.B.2.b Étape de modélisation « Macro » --------------------------------------------------58

II.B.2.b.i Objectif de l’étape « Macro » --------------------------------------------------58 II.B.2.b.ii Choix d’un outil de modélisation ---------------------------------------------58 II.B.2.b.iii Modèle de Rousselier ----------------------------------------------------------59 II.B.2.b.iv Différences entre matériau de Rousselier et matériau réel ---------------61 II.B.2.b.v Modifications portées au modèle de Rousselier -----------------------------64 II.B.2.b.vi Considérations liées à la viscosité des matériaux étudiés-----------------66 II.B.2.b.vii Considérations liées à l’utilisation de la MEF-----------------------------66 II.B.2.b.viii Validation et résultats de l’étape « Macro » ------------------------------67

II.B.2.c Étape « Micro »-----------------------------------------------------------------------68 II.B.2.c.i Objectif de l’étape « Micro » ---------------------------------------------------68 II.B.2.c.ii Choix des outils de modélisation ----------------------------------------------68 II.B.2.c.iii Inclusion d’Eshelby et MIE ---------------------------------------------------68 II.B.2.c.iv Critères d’amorçage des phénomènes dissipatifs --------------------------69 II.B.2.c.v Considérations liées au phénomène de cavitation --------------------------71

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II.B.2.c.vi Considérations liées à la microstructure des matériaux étudiés ---------71 II.B.2.c.vii Validation de l’étape « Micro » ----------------------------------------------72

II.B.3 Conclusion---------------------------------------------------------------------------------72 II.C Travaux expérimentaux ----------------------------------------------------- 73

II.C.1 Méthodologie expérimentale ----------------------------------------------------------73 II.C.1.a Choix des conditions expérimentales ----------------------------------------------73 II.C.1.b Méthodes expérimentales et d’analyse mises en oeuvres -----------------------73

II.C.2 Tests de caractérisation thermomécanique-----------------------------------------74 II.C.3 Caractérisation de l’endommagement-----------------------------------------------75

II.C.3.a Intérêt d’une caractérisation de l’endommagement ------------------------------75 II.C.3.b Microtomie et observations au MET-----------------------------------------------75 II.C.3.c Traitement des images MET numérisées ------------------------------------------75 II.C.3.d Analyse morphologique -------------------------------------------------------------76

II.C.3.d.i Morphométrie des images binaires--------------------------------------------76 II.C.3.d.ii Stéréologie des images binaires-----------------------------------------------76 II.C.3.d.iii Représentativité des zones analysées ----------------------------------------77

II.C.4 Tests mécaniques uniaxiaux -----------------------------------------------------------77 II.C.4.a Test de traction------------------------------------------------------------------------77

II.C.4.a.i Intérêts de la mise en oeuvre du test de traction-----------------------------77 II.C.4.a.ii Test de traction classique ------------------------------------------------------78 II.C.4.a.iii Test de traction avec microdécharges partielles rapides -----------------79 II.C.4.a.iv Test de traction avec suivi de la transmission LASER---------------------80

II.C.4.b Test de compression -----------------------------------------------------------------81 II.C.4.b.i Intérêts de la mise en œuvre du test de compression------------------------81 II.C.4.b.ii Test de compression classique ------------------------------------------------81

II.C.4.c Test de cisaillement ------------------------------------------------------------------82 II.C.4.c.i Intérêts de la mise en œuvre du test de cisaillement-------------------------82 II.C.4.c.ii Test de cisaillement classique -------------------------------------------------82

II.C.5 Tests CT -----------------------------------------------------------------------------------83 II.C.5.a Intérêts de la réalisation de tests CT -----------------------------------------------83 II.C.5.b Test CT classique---------------------------------------------------------------------84 II.C.5.c Test CT avec profilomètrie de surface---------------------------------------------84 II.C.5.d Test CT avec corrélation d’images-------------------------------------------------85

II.C.6 Conclusion --------------------------------------------------------------------------------85 II.D Matériaux modèles ----------------------------------------------------------- 86

II.D.1 Choix des matériaux modèles ---------------------------------------------------------86 II.D.2 Présentation des matériaux modèles -------------------------------------------------86

II.D.2.a Matrice---------------------------------------------------------------------------------86 II.D.2.b Particules de renfort------------------------------------------------------------------87 II.D.2.c Liste des matériaux étudiés ---------------------------------------------------------88

II.D.3 Résultats des analyses de caractérisation thermomécanique -------------------88 II.D.3.a Introduction ---------------------------------------------------------------------------88 II.D.3.b ADM des matériaux EI0, EI25 MPD2, EI50 MPD2, EI60 MPD2 ------------89 II.D.3.c ADM des élastomères des renforts MPD1 et MPD2 ----------------------------90 II.D.3.d ADM du matériau obtenu par compaction de nodules de renfort MPD2 sous presse chauffante -------------------------------------------------------------------------------90 II.D.3.e Tests de traction en grandes déformations des élastomères des renforts MPD1 et MPD2 -----------------------------------------------------------------------------------------90 II.D.3.f Conclusions et détermination des conditions expérimentales de notre étude -91

II.E Synthèse et discussion -------------------------------------------------------- 92

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II.E.1 Synthèse de la méthodologie proposée-----------------------------------------------92 II.E.2 Modélisation numérique----------------------------------------------------------------93

II.E.2.a Etape de modélisation « Macro »---------------------------------------------------93 II.E.2.a.i Considérations liées aux modifications du modèle de Rousselier ---------93 II.E.2.a.ii Considérations liées à la nature du champ de vitesses de déformations en sommet de fissure----------------------------------------------------------------------------94

II.E.2.b Etape de modélisation « Micro » ---------------------------------------------------95 II.E.2.b.i Considérations liées à l’effet des interactions entre particules ------------95 II.E.2.b.ii Considérations liées aux critères d’amorçage de plasticité et de craquelures-----------------------------------------------------------------------------------95

II.E.3 Travaux expérimentaux ----------------------------------------------------------------95 II.E.3.a Considérations liées aux techniques permettant l’identification de f0 ---------95 II.E.3.b Considérations liées aux tests uniaxiaux mis en oeuvre -------------------------96 II.E.3.c Considérations liées aux tests CT---------------------------------------------------97

II.F Conclusion---------------------------------------------------------------------- 98 II.G Références---------------------------------------------------------------------- 99

II.G.1 Références citées -------------------------------------------------------------------------99 II.G.2 Références non citées ----------------------------------------------------------------- 102

III MISE EN ŒUVRE ET RÉSULTATS DE L’ÉTAPE DE MODÉLISATION « MACRO » -------------------------------------- 103

III.A Introduction ----------------------------------------------------------------- 103 III.B Identification des paramètres du modèle de Rousselier------------- 104

III.B.1 Analyse morphologique statistique d’images MET---------------------------- 104 III.B.1.a Généralités sur l’analyse morphologique statistique d’images MET ------- 104 III.B.1.b Coupes microtomes et observations au MET---------------------------------- 104 III.B.1.c Traitement des images MET numérisées --------------------------------------- 105 III.B.1.d Morphométrie et stéréologie des images binaires ----------------------------- 106 III.B.1.e Représentativité des zones analysées ------------------------------------------- 108 III.B.1.f Identification du paramètre f0 ---------------------------------------------------- 109

III.B.2 Tests en traction uniaxiale et modélisations associées ------------------------- 110 III.B.2.a Généralités sur les tests de traction uniaxiale réalisés ------------------------ 110 III.B.2.b Résultats expérimentaux---------------------------------------------------------- 110 III.B.2.c Identification des paramètres du modèle de Rousselier ---------------------- 113

III.B.3 Tests en compression uniaxiale et modélisations associées ------------------- 116 III.B.3.a Généralités sur les tests de compression uniaxiale réalisés ------------------ 116 III.B.3.b Résultats expérimentaux---------------------------------------------------------- 116 III.B.3.c Modélisation des essais de compression---------------------------------------- 117 III.B.3.d Déformations inhomogènes en « bourrelets » --------------------------------- 118 III.B.3.e Fissures et localisation des déformations aux extrémités des éprouvettes - 119

III.B.4 Tests en cisaillement uniaxial et modélisations associées --------------------- 120 III.B.4.a Généralités sur les tests de cisaillement uniaxial réalisés -------------------- 120 III.B.4.b Résultats expérimentaux---------------------------------------------------------- 120 III.B.4.c Modélisation des essais de cisaillement ---------------------------------------- 121 III.B.4.d Cavitation des particules de renfort --------------------------------------------- 122

III.B.4.d.i Cavitation des particules Cœur-Ecorce : approche macroscopique --- 122 III.B.4.d.ii Cavitation des particules Cœur-Ecorce : approche microscopique--- 124 III.B.4.d.iii Cavitation des particules Cœur Mou ------------------------------------- 127

III.B.5 Conclusion ----------------------------------------------------------------------------- 129

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III.C Validation de l’étape de modélisation « Macro »--------------------- 131 III.C.1 Généralités sur les travaux de validation ---------------------------------------- 131 III.C.2 Modélisation d’essais CT------------------------------------------------------------ 131

III.C.2.a Généralités sur la modélisation d’essais CT ----------------------------------- 131 III.C.2.b Résultats de modélisation -------------------------------------------------------- 131 III.C.2.c Détermination des conditions expérimentales associées aux tests CT------ 132

III.C.3 Tests CT classiques------------------------------------------------------------------- 133 III.C.3.a Généralités sur le test CT classique --------------------------------------------- 133 III.C.3.b Résultats expérimentaux---------------------------------------------------------- 133 III.C.3.c Comparaison aux résultats de modélisation------------------------------------ 136

III.C.4 Tests CT associés à la profilométrie de surface--------------------------------- 137 III.C.4.a Généralités sur les tests CT associés à la profilométrie de surface---------- 137 III.C.4.b Résultats expérimentaux---------------------------------------------------------- 137 III.C.4.c Comparaison aux résultats de modélisation------------------------------------ 138

III.C.5 Tests CT associés à la corrélation d’image -------------------------------------- 139 III.C.5.a Généralités sur les tests CT associés à la corrélation d’image--------------- 139 III.C.5.b Résultats expérimentaux et comparaison aux résultats de modélisation --- 139

III.C.6 Conclusion ----------------------------------------------------------------------------- 141 III.D Profils de plasticité et champs locaux----------------------------------- 142 III.E Conclusion-------------------------------------------------------------------- 143 III.F Références -------------------------------------------------------------------- 144

IV MISE EN ŒUVRE ET RÉSULTATS DE L’ÉTAPE DE MODÉLISATION « MICRO » --------------------------------------- 145

IV.A Introduction------------------------------------------------------------------ 145 IV.B Travaux d’homogénéisation ---------------------------------------------- 146 IV.C Identification des critères d’amorçage --------------------------------- 147 IV.D Cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure -- 149

IV.D.1 Mise en oeuvre de la méthode d’Eshelby et des critères d’amorçage ------ 149 IV.D.2 Effet de la cavitation sur les autres phénomènes dissipatifs------------------ 150 IV.D.3 Première approche pour l’établissement d’une cartographie --------------- 151 IV.D.4 Seconde approche pour l’établissement d’une cartographie (MELR) ----- 152

IV.D.4.a Méthodologie ---------------------------------------------------------------------- 152 IV.D.4.b Validation de l’approche par la MELR ---------------------------------------- 153 IV.D.4.c Nouvelle cartographie des phénomènes dissipatifs --------------------------- 154

IV.E Paramètres de la transition Ductile-Fragile --------------------------- 157 IV.E.1 Généralités ----------------------------------------------------------------------------- 157 IV.E.2 Effet de la température -------------------------------------------------------------- 157 IV.E.3 Effet de la vitesse de sollicitation--------------------------------------------------- 158 IV.E.4 Effet de la quantité d’élastomère introduit dans le matériau ---------------- 159

IV.F Conclusion-------------------------------------------------------------------- 160

V CONCLUSION ET PERSPECTIVES---------------------------- 161

VI ANNEXES------------------------------------------------------------- 163

VI.A Géométrie de l’éprouvette CT-------------------------------------------- 163 VI.B Hypothèse des Petites Perturbations ------------------------------------ 163 VI.C Modes d’ouverture d’une fissure ---------------------------------------- 164

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VI.D Mécanique Non Locale de la Rupture ---------------------------------- 164 VI.E Validité du modèle de Rousselier ---------------------------------------- 164 VI.F Etude de l’influence de certains paramètres du modèle de Rousselier----------------------------------------------------------------------------------------- 166 VI.G Maillage utilisé pour la modélisation des tests CT ------------------- 167 VI.H Sensibilité des résultats de modélisations CT aux paramètres du maillage ------------------------------------------------------------------------------ 168

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INTRODUCTION

Depuis maintenant plusieurs dizaines d’années, la recherche et le développement de nouvelles générations de polymères mènent à la création de matériaux présentant des propriétés toujours plus intéressantes.

D'une mise en oeuvre aisée, leur utilisation s’est logiquement généralisée à la plupart des secteurs de l’industrie : textile, optique, automobile, agroalimentaire, aéronautique, cosmétique, etc.

Une des multiples branches de la science des matériaux polymères concerne aujourd'hui l'étude de leurs propriétés mécaniques, en particulier leur renforcement « choc ».

Dans ce cadre, la société Arkema s’est efforcée depuis plusieurs années de conférer au Polyméthylméthacrylate (PMMA), connu pour ses exceptionnelles qualités optiques, une meilleure résistance aux chocs par adjonction de particules à base d’élastomère. La poursuite de ces efforts passe aujourd’hui par une meilleure compréhension du phénomène de transition Ductile-Fragile dans ce type de matériaux.

L’étude présente est le fruit de la collaboration entre l’équipe Mécanique Physique des Polymères de l’Institut C. Sadron (CNRS UPR 022) et la société Arkema.

Elle a pour objectif la mise au point d’une méthode de modélisation des phénomènes dissipatifs développés en sommet de fissure dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère. Nous souhaitons à la fois déterminer les paramètres micromécaniques de premier ordre du phénomène de transition Ductile-Fragile et développer un outil de modélisation pratique et fiable au niveau industriel.

Le premier chapitre de ce manuscrit est une synthèse des informations disponibles dans la littérature concernant le renforcement « choc » des matériaux étudiés. Le phénomène de transition Ductile-Fragile y est abordé, de même que les mécanismes dissipatifs développés en sommet de fissure.

Le second chapitre présente la méthodologie élaborée pour la réalisation de cette étude. Seront décrits successivement la stratégie de modélisation proposée, les travaux expérimentaux réalisés et les matériaux modèles étudiés. Quelques éléments bibliographiques complémentaires sont donnés par ailleurs.

Le troisième chapitre regroupe les résultats de l'ensemble des travaux expérimentaux et de modélisation menés à l’échelle du sommet de fissure. Le quatrième chapitre rassemble les résultats obtenus à l'échelle de la microstructure des matériaux. Les principaux paramètres influant sur la transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomères en sont déduits.

Le dernier chapitre se compose d’une discussion générale et de la conclusion finale de notre étude.

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I GÉNÉRALITÉS SUR LES POLYMÈRES AMORPHES RENFORCÉS « CHOC » PAR NODULES D’ÉLASTOMÈRE

I.A Introduction

Les matériaux constitués d’une matrice polymère amorphe renforcée « choc » par des nodules d’élastomère sont versatiles du point de vue de leur réponse à une sollicitation mécanique. Ainsi, selon les conditions expérimentales, on peut très bien observer une déformation lente et progressive ou au contraire une rupture rapide et catastrophique : ces différences dépendent de la position du matériau vis à vis de sa transition Ductile-Fragile.

Cette transition n’est pas une transition au sens thermodynamique du terme : elle ne correspond pas à une discontinuité de variation d’une fonction thermodynamique ou de ses dérivées première ou seconde. Il s’agit plutôt d’une transition « comportementale ». Déterminée par des essais mécaniques de traction, de choc, ou encore de propagation de fissure, elle marque la frontière entre deux domaines. Dans un premier domaine, le matériau se comporte comme un verre minéral, fragile, et ne présente pas de déformation plastique macroscopique. Dans un second domaine, le matériau adopte un comportement ductile, et présente un seuil de plasticité macroscopique.

A l’origine de cette transition, on trouve un ensemble de phénomènes dissipatifs

d’énergie : craquelures et bandes de cisaillement développées dans la matrice, cavitation dans l’élastomère des particules de renfort.

Plus que par leurs effets pris séparément, c’est par leurs interactions que ces trois phénomènes confèrent des propriétés « choc » à une matrice amorphe. Engendrant une déformation localement hétérogène et l’affaiblissement du matériau, ils permettent une accommodation aux contraintes, dissipent de l’énergie et retardent la rupture catastrophique.

Une connaissance aussi précise que possible de la nature de ces phénomènes et de leurs interactions est donc nécessaire dès lors que l’on s’intéresse à la transition Ductile-Fragile de matériaux de ce type.

Ce premier chapitre, à vocation bibliographique, est une synthèse des informations disponibles dans la littérature concernant la dissipation d’énergie dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par des nodules d’élastomère. Il est volontairement limité à certains aspects dans un souci d’allègement : nous nous sommes en effet focalisés uniquement sur l’étude de phénomènes ou l’influence de paramètres directement concernés par notre étude.

Dans un premier temps donc, nous ferons une description comportementale précise de la transition Ductile-Fragile afin de bien mettre en lumière le phénomène ; cette description sera suivie de celle du développement en sommet de fissure des mécanismes dissipatifs.

Par la suite, nous donnerons quelques définitions avant d’aborder l’étude de ces mécanismes : bandes de cisaillement et craquelures dans la matrice amorphe, cavitation dans les particules de renfort. Une attention toute particulière sera portée à ce dernier mécanisme.

Enfin nous verrons comment ces phénomènes, par leur nature, leur concomittance et leur efficacité, sont à l’origine des capacités de résistance aux chocs des particules de renfort et contribuent au retardement de la ruine du matériau par une très forte dissipation d’énergie.

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I.B Transition Ductile-Fragile dans les polymères amorphes renforcés « choc »

I.B.1 Description macroscopique de la transition Ductile-Fragile

Dans sa récente étude du PMMA renforcé « choc » par des particules d’élastomère de type Cœur Ecorce, Béguelin [1] s’intéresse à cette transition.

Utilisant des éprouvettes préfissurées de type Compact Tension1 (CT) [2] qui permettent la concentration des contraintes et la localisation des déformations en sommet de fissure, il obtient une description macroscopique fine de la transition Ductile-Fragile.

Ainsi il observe, lorsqu’il fait varier la vitesse de sollicitation à température ambiante, quatre modes de rupture différents, séparés par trois sous-transitions.

I.B.1.a Mode de rupture ductile

A basse vitesse de sollicitation le matériau se caractérise par une grande plasticité (Fig. I-1) : la courbe Force-Déplacement montre une charge qui décroît au-delà d’une force maximale à partir de laquelle il faut fournir de l’énergie pour que la fissure continue de se déplacer (propagation parfaitement stable).

Une grande « flamme » blanche caractéristique est observée sur l’éprouvette, ainsi qu’un ligament totalement blanchi, signes de la présence d’une « zone active » (au sens dissipation d’énergie) qui se développe en avant de la fissure et qui la précède lors de la propagation. Le mode de rupture est alors dit « ductile ».

Fig. I-1 Tests de rupture d’éprouvette CT en mode de rupture ductile. A gauche : courbe Force-Déplacement. A droite : propagation stable de la fissure.

I.B.1.b Mode de rupture semiductile

Lorsque la vitesse de sollicitation est augmentée, le matériau subit une première sous-

transition dite « ductile-semiductile » (Td-sd), et entre en mode de rupture semiductile (Fig. I-2) : le matériau développe une plasticité moindre.

La courbe Force-Déplacement ainsi que la « flamme » visible sur l’éprouvette montrent que la fissure se déplace d’abord de façon stable, puis instable : au cours de l’essai, la fissure se propage plus vite que la « zone active » qui la précède et parvient à la traverser.

1 Voir Annexe A

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Fig. I-2 Tests de rupture d’éprouvette CT en mode de rupture semiductile. A gauche : courbe

Force-Déplacement. A droite : propagation stable puis instable de la fissure.

I.B.1.c Mode de rupture semifragile

Quand la vitesse de sollicitation est encore augmentée, le matériau subit la sous-transition dite « semiductile-semifragile » (Tsd-sf), et entre en mode de rupture semifragile (Fig. I-3) : cette fois le matériau ne développe qu’une plasticité limitée en fond de préfissure, et la propagation est très rapidement instable.

La courbe Force-Déplacement montre une légère déviation à la linéarité juste avant la rupture, et on n’observe qu’une toute petite « flamme » aux abords de la préfissure.

Fig. I-3 Tests de rupture d’éprouvette CT en mode de rupture semifragile. A gauche : courbe

Force-Déplacement. A droite : propagation rapidement instable de la fissure.

I.B.1.d Mode de rupture fragile

Enfin, aux plus hautes vitesses de sollicitation, le matériau subit une dernière sous-transition, dite « semifragile-fragile » (Tsf-f), et entre en mode de rupture fragile (Fig. I-4) : la rupture intervient de façon soudaine pendant la montée en charge, et la propagation de la fissure est totalement instable.

La courbe Force-Déplacement montre une montée linéaire à déformation élastique : on n’observe pas de « flamme ».

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Fig. I-4 Tests de rupture d’éprouvette CT en mode de rupture fragile. A gauche : courbe Force-Déplacement. A droite : propagation instable de la fissure.

Cette description macroscopique de la transition Ductile-Fragile montre le lien qui

existe entre le comportement du matériau et sa capacité à développer une « zone active », caractérisée par une flamme blanche, en avant de la fissure.

C’est, comme nous allons le voir, dans cette zone que l’endommagement apparaît et que l’énergie est dissipée, ce qui a pour effet d’empêcher une propagation instable de la fissure.

I.B.2 État du matériau en sommet de fissure

Béguelin [1] a pu décrire l’état du matériau en sommet de fissure, peu avant le passage en propagation instable, grâce à diverses observations par Microscope Electronique à Transmission (MET) effectuées sur des coupes microtomes.

Ainsi, à partir d’une coupe faite perpendiculairement au plan de propagation de fissure en Fig. I-5, il détermine, par rapport au sommet de la fissure, la position et le niveau de développement de différents phénomènes dissipatifs :

(a) Vue d’ensemble de la coupe. (b) Les nodules ne cavitent pas et demeurent transparents ; on n’observe pas de

craquelure. (c) Les nodules cavitent, surtout si plusieurs d’entre eux sont orientés

favorablement selon un plan perpendiculaire à la direction principale de traction ; des craquelures apparaissent dans la matrice PMMA.

(d) Croissance des craquelures et bifurcation fréquente vers les autres particules. (e) Elargissement de la structure fibrillaire, coalescence des craquelures et

cisaillement de la matrice contribuent à dissiper l’énergie et à augmenter la ténacité du matériau.

(f) Propagation du sommet de fissure.

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Fig. I-5 Observations par microscope électronique à transmission des micromécanismes de déformation en tête de fissure dans du PMMA modifié « choc » (Béguelin [1]).

Béguelin déduit de ses observations une représentation schématique des phénomènes

dissipatifs développés lors de la propagation de la fissure (Fig. I-6).

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Fig. I-6 Représentation schématique des différents micromécanismes de déformation en tête

de fissure dans du PMMA modifié « choc » (Béguelin [1]).

I.B.3 Conclusion

L’effet du passage de la transition Ductile-Fragile est ici bien illustré : d’un matériau ductile dans lequel la propagation de fissure ne peut s’effectuer qu’en apportant en permanence de l’énergie au système, on passe à un matériau fragile dans lequel la propagation de fissure est tout à fait instable, ceci en augmentant seulement la vitesse de sollicitation de quelques décades (ou, de manière équivalente, en abaissant la température de quelques dizaines de degrés).

La description du développement dans le matériau des différents phénomènes

dissipatifs en sommet de fissure nous montre la complexité même des interactions entre les différents phénomènes et leur répartition spécifique par rapport au sommet de fissure, signe de l’influence du champ des vitesses de déformation. Nous allons donc, après avoir donné quelques définitions, aborder une description précise de ces phénomènes dissipatifs : origine, nature et paramètres les influençant.

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I.C Phénomènes dissipatifs dans les polymères amorphes renforcés « choc »

I.C.1 Quelques définitions

I.C.1.a Nomenclature des comportements mécaniques

Dans cette étude, nous appellerons « Plasticité » toute déformation homogène irréversible se produisant à volume constant.

Le terme « Viscosité » sera lui associé, de façon générale, à tout comportement mécanique présentant une dépendance au temps.

Par ailleurs, nous allons reprendre la classification des comportements mécaniques de Lemaitre et Chaboche [3], obtenue par leur méthode phénoménologique globale.

Les comportements rencontrés ici pourront donc être qualifiés de « viscoélastique », « viscoplastique », ou encore « viscoélastoplastique ». Cette différentiation sera effectuée selon que les matériaux étudiés présenteront ou non, après sollicitation mécanique, des déformations irréversibles, dépendantes ou non de la vitesse de sollicitation.

Dans ce cadre, on peut évoquer le modèle d’Eyring [4], qui concerne les déformations irréversibles, activées thermiquement et dépendantes de la vitesse de sollicitation.

Une barrière de potentiel ∆Ha doit être franchie par les molécules du matériau pour que l’écoulement plastique des chaînes se produise et que l’on observe un seuil de plasticité. Cette barrière, trop élevée pour être franchie lorsque le matériau n’est pas mécaniquement sollicité, est abaissée lorsque une contrainte est appliquée. Le système peut alors atteindre un état d’énergie plus faible. On a alors :

(1) ⎥⎥⎥

⎢⎢⎢

⎟⎟⎟

⎜⎜⎜

⎛+⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛= •

0

ya

a

y

ε

ε2.3Rlog

T∆H

V2

avec : σy : contrainte seuil d’écoulement. T : température. Va : volume d’activation de la molécule. R : constante des gaz parfaits.

εy : vitesse de déformation plastique.

ε0 : constante.

Ce modèle, basé sur un unique processus moléculaire, a été enrichi par la suite par Ree et Eyring [5] par la prise en compte de mouvements moléculaires supplémentaires, tels ceux associés aux transitions α et β du matériau.

Une modélisation convenable de l’évolution des seuils de plasticité en fonction de la température et de la vitesse de déformation est possible, bien que ne reflétant pas les modifications structurales du polymère.

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I.C.1.b Endommagement

Nous associerons au terme « Endommagement » la notion développée par Lemaitre et Chaboche [3], dans le cadre de la thermodynamique des processus irréversibles pour les matériaux isotropes, concernant l’endommagement volumique.

L’endommagement D du matériau, pour lequel on applique une contrainte σ sur une section Stotale, est défini à partir de la section effective Seff de matériau supportant la contrainte effective σeff qui s’y rapporte (voir Fig. I-7). Il s’agit d’une grandeur scalaire (on pourrait toutefois envisager une expression tensorielle).

Fig. I-7 Définition de la section effective Seff dans un matériau isotrope endommagé soumis à

une contrainte σ (Lemaitre et Chaboche [3]).

On a alors :

(2) D1σ

SSσσ

eff

totaleeff −

==

En supposant que le comportement du matériau endommagé puisse être décrit par le

comportement du matériau sain auquel on applique σeff en lieu et place de σ, on peut écrire, dans le cadre de l’élasticité linéaire :

(3) ( )ED1σ

Eσε eff

−==

On obtient ainsi l’expression finale de D :

(4) 0E

E1D −=

Avec : E0 : le module d’Young du matériau non endommagé. E : le module d’Young du matériau endommagé.

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L’endommagement, tel que nous l’avons défini, est donc lié à la variation du module d’élasticité du matériau même. Indicateur variant entre 0 et 1, il est représentatif de l’état général du matériau, la rupture ayant obligatoirement lieu lorsque la valeur 1 est atteinte, mais se produisant généralement pour une valeur critique bien inférieure.

Cavités, fissures et autres vides susceptibles d’apparaître au sein du matériau sont donc, par définition, des phénomènes d’endommagement.

I.C.2 Phénomènes dissipatifs liés à la matrice amorphe

I.C.2.a Bandes de cisaillement

La localisation de la plasticité, telle que nous l’avons définie, entraîne couramment l’apparition de bandes de cisaillement qui s’amorcent sur des défauts à l’origine d’une concentration des contraintes : zone de déformation plastique localisée causée par une impureté, fluctuation locale de densité, etc.

Ces défauts sont évoqués dans la théorie des Défauts Quasi Ponctuels (DQP) de Perez [6] à [8], qui permet la description, par des paramètres ayant un sens physique, de l’évolution de la microstructure et de la mobilité des chaînes dans les matériaux amorphes de part et d’autre de la Tg.

Les bandes de cisaillement peuvent être de deux types : fines (cisaillement diffus) ou larges (cisaillement localisé).

Bowden [9] a suggéré que leur nature était liée à leur vitesse de propagation. Wu et Li [10] à [12] ont mis en évidence un phénomène de glissement proche des

mécanismes de dislocation et de plans de glissement rencontrés dans les structures métalliques. Ils ont également montré que les bandes larges étaient favorisées par une vitesse d'essai élevée.

Les causes de l’existence de ces deux types de bandes restent toutefois floues.

Kramer [13] et [14], qui a observé les bandes fines lors de tests de compression uniaxiale sur du Polystyrène (PS), en donne les caractéristiques principales :

Cisaillement diffus dans une juxtaposition de bandes fines (50 nm) et courtes, atteignant individuellement des taux de déformation relativement faibles.

Contribution à la déformation plastique globale élevée. Intersection des bandes à environ 90° en sollicitation uniaxiale. Propagation des bandes à environ 45° par rapport à la direction de compression,

c’est à dire dans la direction de cisaillement maximal. Propagation des bandes à une vitesse relativement faible.

Whitney [15] donne celles des bandes larges (toujours après la réalisation de tests de

compression uniaxiale sur du PS) : Cisaillement localisé dans une bande de 0,5 à 1 µm de largeur, dans laquelle un

taux de déformation très élevé est atteint. Intersection des bandes à environ 80° en sollicitation uniaxiale. Propagation des bandes à un angle inférieur à 45° par rapport à la direction de

cisaillement maximal (38-40°) : Bowden et Jukes [16] ont suggéré que cela était dû à une variation de volume au sein de la bande, mais Kramer [14] n’est pas de cet avis ; une piézodépendance du critère est envisageable.

Contribution à la déformation plastique globale faible. Vitesse de propagation cinq fois supérieure à celle des bandes fines.

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De nombreux critères de plasticité ont été développés pour les polymères, notamment les critères de Tresca [17] ou de von Mises modifié Sternstein [18]. Nous avons utilisé ce dernier dans notre étude : il sera décrit en II.B.2.c.iv.

I.C.2.b Craquelures

Constituées d'une succession de fibrilles et de microvides (Fig. I-8), l’amorçage, la propagation et la structure même des craquelures ont été largement étudiés, notamment par Kambour [19], Kramer [20] à [22], Schirrer [23], Schirrer et Fond [24].

Fig. I-8 Craquelure dans une matrice polymère amorphe (Schirrer et Fond [24]).

Les dimensions caractéristiques d’une craquelure sont reportées sur la représentation schématique donnée par Schirrer [24] en Fig. I-9.

Fig. I-9 Structure schématisée d’une craquelure et dimensions caractéristiques (Schirrer et Fond [24]).

L’amorçage d’une craquelure au sein d’une matrice amorphe nécessite une

composante dilatationnelle et s’effectue, comme pour les bandes de cisaillement, sur un défaut concentrateur de contraintes (le cas des homopolymères reste toutefois particulier, les craquelures s’amorçant à partir des imperfections de surface).

La croissance de la craquelure, liée au développement de vides et à l’allongement des fibrilles, aboutit à une structure spongieuse. La croissance des fibrilles elle-même a lieu par un mécanisme de plasticité (extraction de matière autour de la craquelure), et par extension

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des chaînes macromoléculaires ; elle s’accompagne d’une baisse du taux d’enchevêtrements par rupture de chaînes ou encore glissement des chaînes les unes par rapport au autres.

La propagation de la craquelure à lieu perpendiculairement à la plus grande contrainte principale : le front de craquelure avance par instabilité de ménisque (Fig. I-10), et les fibrilles les plus étirées rompent.

Fig. I-10 Mécanisme d’instabilité de ménisque (Kramer [22]).

Contrairement à une fissure, la craquelure peut continuer à transmettre les contraintes entre ses deux faces par l’intermédiaire des fibrilles qui subissent une déformation plastique importante et un fort durcissement, résultat d’une orientation moléculaire prononcée.

Cependant, bien que les craquelures soient localement à l’origine d’une forte dissipation d’énergie (dissipation confinée au faible volume de la craquelure), elles sont généralement trop peu nombreuses pour induire un effet « choc » notable. Pire, après rupture des fibrilles pendant leur processus de propagation, elles se transforment en fissures, ce qui confère un comportement fragile au matériau.

Plusieurs critères d’amorçage ont été suggérés, reliant la température, la vitesse de sollicitation, l’état des contraintes ou des déformations à l’apparition du phénomène de craquelure dans les polymères amorphes : Sternstein et Myers [25], Argon et Hannoosh [26], ou encore Bowden et Oxborough [27], dont nous décrirons le critère en détail en II.B.2.c.iv.

I.C.2.c Bandes de cisaillement et craquelures : compétition et interactions

Dans les polymères amorphes non renforcés « choc » ce sont ces deux phénomènes qui gèrent la transition Ductile-Fragile.

A basse vitesse de déformation et haute température, le comportement est plutôt ductile et la plasticité prédomine ; à haute vitesse de déformation et basse température, le comportement est plutôt fragile et les craquelures sont prépondérantes.

Dans tous les cas selon Kramer [21] un faible taux d’enchevêtrements favorise l’apparition de craquelures et un comportement fragile.

De plus, selon Kambour [28], craquelures et bandes de cisaillement peuvent interagir

dans certains états de contrainte : arrêt d’une craquelure au croisement de deux bandes de cisaillement ou amorçage d’une bande de cisaillement sur une craquelure sont possibles par exemple (Fig. I-11).

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Fig. I-11 Interactions entre craquelures et bandes de cisaillement (Kramer [21]).

I.C.3 Phénomène dissipatif lié à la particule de renfort

I.C.3.a Phénomène de cavitation

L’introduction de particules à base d'élastomère dans une matrice polymère amorphe a pour but l’obtention d’un matériau aux propriétés de résistance à la rupture et à l'impact supérieures à celles de la matrice pure.

La caractéristique principale de ces particules est leur capacité, sous certaines conditions d’état de contraintes, de température, de vitesse de sollicitation, à caviter au niveau de la phase élastomère.

Ce phénomène de cavitation de l’élastomère apparaît dès le début, parfois même avant l’écoulement plastique macroscopique. Il s’accompagne pour les polymères transparents d’un blanchiment caractéristique (Fig. I-12). Les travaux de Schirrer et al. [29], ainsi que ceux de Géhant et Schirrer [30], montrent que ce blanchiment est lié à la diffusion multiple de la lumière sur les cavités.

Fig. I-12 A gauche : cavitation dans une particule Cœur Ecorce (image P. Gérard ARKEMA). A droite : propagation de fissure et blanchiment dans du PMMA renforcé « choc » (Fond et

Schirrer [31]).

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I.C.3.b Champ de contraintes à l’intérieur d’une particule

A température ambiante, une grande différence de module de cisaillement existe entre l’élastomère et la matrice : le module de cisaillement µm de la matrice est en effet supérieur de plusieurs décades à celui de l’élastomère µe. Cet écart de propriétés mécaniques confère à l’élastomère un comportement comparable à celui d'un fluide compressible, par rapport à la matrice.

En élasticité linéaire et dans le cadre de l’Hypothèse des Petites Perturbations2 (HPP), Eshelby [32] et [33] montre que le tenseur des contraintes est uniforme dans la particule.

Fond et al. [34] et [36] montrent alors, dans le cas de la traction uniaxiale, qu’une sollicitation mécanique du matériau renforcé entraîne le développement d’une dépression hydrostatique quasiment pure et d’un déviateur du tenseur des contraintes quasiment nul dans les particules.

Il est crucial de ne pas perdre de vue qu’il est nécessaire que l’élastomère soit éloigné de sa transition vitreuse pour que son comportement soit comparable à celui d’un fluide compressible. C’est à cette condition que le contraste de propriétés mécaniques entre matrice et élastomère existe.

I.C.3.c Critère de cavitation

De nombreuses approches énergétiques du phénomène ont été entreprises pour déterminer un critère de cavitation ; la plupart concernent une particule élastomère homogène isolée dans une matrice élastique (il n’y a donc pas de prise en compte d’éventuelles interactions avec les particules voisines).

Ainsi, pour Dompas et Groeninckx [35], l’énergie de dilatation stockée par l’élastomère est à l’origine de la cavitation, ce qui les amène à définir un diamètre de particule minimal Dmin nécessaire à la cavitation :

(5) ( ) 34

c0e

escmin V

∆VK

γΓ12D ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛+=

avec : Γsc : énergie par unité de surface de rupture des chaînes d’élastomère. γe : tension de surface de l’élastomère. Ke : module de compressibilité de l’élastomère.

c

VV

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛ ∆

0

: variation de volume critique de la particule.

Dans le même cadre, Fond et al. [34], [36] et [37], montrent qu’une contrainte

hydrostatique critique σhc dans l’élastomère marque la limite de sollicitation au-delà de laquelle la cavitation peut se produire.

2 Voir Annexe B

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De façon approximative, l’énergie nécessaire à la cavitation dépend de la surface de la cavité créée alors que l’énergie disponible dépend de σh

2 et du volume de la particule. Un critère de cavitation est alors établi, en fonction de la taille de particule (Fig. I-13).

Concernant les particules les plus grandes, pour une contrainte donnée, l’énergie disponible est suffisante pour permettre la cavitation du fait du volume important de la particule : on a donc un critère en contrainte.

Concernant les particules plus petites, pour la même contrainte donnée, l’énergie disponible est insuffisante car le volume de la particule est trop faible. L’énergie requise peut être atteinte seulement si σh augmente : on a alors un critère en énergie.

Fig. I-13 σhc en fonction du rayon de la particule d’élastomère (Fond et Schirrer [36]).

Géhant et al. [38] étendent les approches énergétiques aux matrices à comportement élastique plastique parfait : il apparaît alors que les critères définis précédemment dans les cas d’une matrice élastique restent valables.

Il faut cependant remarquer que ces études aboutissent à la détermination de critères de cavitation sans identifier le ou les mécanismes d’amorçage responsables du phénomène.

I.C.3.d Influence des paramètres matériau de l’élastomère

I.C.3.d.i Module d’Young et Coefficient de Poisson

L’étude de Gent et Lindley [39] a pour but de déterminer σhc dans le cas d’un élastomère massif à l’aide de cylindres plats d’élastomère collés entre deux plateaux métalliques et soumis à une traction. Un défaut est supposé préexistant au centre de l'échantillon, et le coefficient de Poisson de l’élastomère νe est supposé égal à 0,5.

En se basant sur les résultats de calculs de Green et Zerna [40] concernant la pression hydrostatique dans une sphère creuse pour un matériau hyperélastique, ils expriment σhc directement en fonction du module d’Young de l’élastomère Ee :

(6) 6

5Eσ ehc =

Une faible valeur de Ee semble donc être favorable à la cavitation de l’élastomère.

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Il faut cependant noter que l’état de l’élastomère dans cette étude pourrait ne pas être représentatif de celui de nos matériaux. L’élastomère étant confiné au sein des nodules, ses propriétés mécaniques pourrait être modifiées.

De plus, du fait des processus de synthèse, il est souvent difficile d’avoir accès aux véritables propriétés du matériau, celui-ci étant fréquemment formé in situ.

Il est possible d’estimer très approximativement l’effet de νe sur la capacité du matériau à caviter. Le niveau de contrainte hydrostatique σh dans l’élastomère est directement lié à la variation de volume de la particule ( )

0VV∆ par Ke, dont les travaux de Dompas et

Groeninckx [35] ont aussi montré les faibles variations d’un élastomère à l’autre et que nous considérons donc constant :

(7) ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛−=

0eh V∆VKσ

Exprimons alors de manière très grossière ( )

0VV∆ en fonction de la déformation

imposée au matériau ε et de l’écart séparant νe du coefficient de Poisson de la matrice νm :

(8) ( )ενν2V∆V

me0

−=⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

Cette approche, bien que très approximative, pourrait toutefois amener à penser qu’un

νe élevé favorise la cavitation : une forte différence entre νe et νm augmenterait en effet la valeur de la dépression atteinte dans la particule, qui caviterait alors plus facilement.

I.C.3.d.ii Modules de Compressibilité et de Cisaillement

Si le module d’Young et le coefficient de Poisson sont très utilisés pour définir le comportement mécanique d’un matériau (car liés à l’essai de traction uniaxial pratique à réaliser), ce sont en fait les raideurs en compressibilité et en cisaillement qui constituent le choix le plus pertinent dans le cadre de l’estimation des propriétés mécaniques des matériaux.

On a vu que Ke était quasi constant et νe proche de 0,5 dans le cas des élastomères ; l’expression de Ke est la suivante :

(9) ( )e

ee 2ν13

EK−

=

On remarque ainsi qu’une très faible variation de νe entraîne de grandes variations de

Ee, ce qui rend difficile alors l’établissement d’un lien quelconque entre Ee et l’aptitude de l’élastomère à caviter.

Contrairement à Ke, µe semble bien jouer un rôle dans le phénomène de cavitation :

(10) ( )e

ee ν12

Eµ+

=

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En effet, une augmentation de la rigidité du matériau (donc de µe) entraîne l’apparition d’un terme d’énergie supplémentaire dans l’équation (5) donnée par Dompas et Groeninckx [35], ce qui entraîne donc l’augmentation de Dmin : la cavitation est plus difficile.

I.C.3.d.iii Autres paramètres

D’autres paramètres matériau de l’élastomère ont une influence sur sa capacité à caviter : Γsc, γe, ainsi que le taux maximum d’élongation des chaînes d’élastomère λe max.

On a vu dans [35] le rôle de Γsc et γe dans le critère de cavitation ; λe max et Γsc étant respectivement proportionnels à la densité de réticulation de l’élastomère ne et à sa racine carrée, il semblerait donc qu’une forte réticulation défavorise la cavitation.

Là encore, il est difficile d’analyser ces influences. Ces paramètres sont en effet délicats à estimer dans le matériau en masse ; la situation confinée de l’élastomère dans des particules de renfort souvent synthétisées in situ aggrave encore la situation et empêche leur détermination précise.

I.C.3.e Structure des nodules

L’amélioration des propriétés « choc » par l’introduction de nodules d’élastomère dans une matrice amorphe s’accompagne de certains inconvénients.

Ainsi observe-t-on, du fait des propriétés mécaniques intrinsèques des élastomères, une diminution de la raideur du système, ce qui limite les possibilités d’applications et n’est donc pas souhaité.

On constate également que le jaunissement du matériau est favorisé, les élastomères classiques résistant mal aux rayonnements UV. Ceci pose également un problème car la tenue de la couleur au cours du temps est le plus souvent recherchée pour ces matériaux.

Enfin, l’introduction d’élastomère dans une matrice polymère amorphe nécessite des procédés coûteux afin de rendre compatibles deux phases très dissemblables et maintenir la transparence du système.

La gravité de ces problèmes augmentant avec le taux d’élastomère introduit, des

particules à structure complexe comportant des parties raides ont été crées afin d’y remédier, comme par exemple les particules de type Cœur-Ecorce (Fig. I-14).

Fig. I-14 Principaux types de particules de renfort : a - Cœur Mou, b - Cœur Ecorce, c - Multicouche, d - Salami (phase élastomère en gris et phase raide en noir).

Par des calculs utilisant la Méthode des Eléments Finis (MEF), Fond et Schirrer [36]

ont montré que, du point de vue de la capacité à caviter, les particules de type Cœur-Ecorce se comportent comme des particules à Cœur Mou (donc comme des fluides compressibles), même dans le cas où l’épaisseur de la couche d’élastomère ne représente que 5 % du diamètre de la particule.

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La Fig. I-15 illustre, d’après les travaux de Géhant et Schirrer [30], les différences observées lors de la cavitation entre une particule à Cœur Mou (cavitation simple au centre de la particule) et une particule à Cœur-Ecorce (écoulement de l’élastomère de l’équateur vers les pôles, et cavitation au niveau des pôles).

Fig. I-15 Cavitation d’une particule de renfort : Cœur Mou à gauche et Cœur Ecorce à droite

(phase élastomère en gris et phase raide en noir, Géhant et Schirrer [30]).

I.C.4 Conclusion

Les trois phénomènes dissipatifs évoqués ici sont, au premier abord, différents dans la nature même de leur manifestation. Ainsi, la plasticité est liée au franchissement d’une barrière de potentiel qui permet l’écoulement des chaînes de polymère, les craquelures sont à l’origine des fissures et causent la rupture du matériau et la cavitation dans l’élastomère correspond à la destruction de nodules soumis à une trop grande contrainte hydrostatique.

Toutefois, même si les mécanismes mis en jeu sont différents, ils ont en commun

l’influence de certains paramètres. Leur effet est par ailleurs identique, puisqu’ils permettent d’affaiblir localement le matériau afin d’accommoder les contraintes et les déformations. Enfin, comme nous allons le voir maintenant, plasticité, craquelures et cavitation sont susceptibles d’interagir fortement et d’engendrer une grande dissipation d’énergie dans le matériau, lui conférant un comportement ductile.

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I.D Effet des interactions entre phénomènes dissipatifs sur le renforcement « choc »

I.D.1 Conséquences de l’introduction de particules d’élastomère dans une matrice polymère amorphe

L’ajout, dans une matrice polymère amorphe, de particules de renfort a pour

conséquence la création d’un système mécanique complexe. En effet, les propriétés mécaniques des inclusions contrastent fortement avec celles de

la phase principale. Le matériau se voit ainsi conféré une aptitude à développer rapidement et facilement un grand volume de vide par cavitation de la phase élastomère.

La répartition des contraintes dans le matériau est donc modifiée. Ceci influe sur les

phénomènes dissipatifs présents naturellement dans la matrice non renforcée - craquelures et bandes de cisaillement -, mais introduit aussi de nouvelles interactions avec le phénomène de cavitation.

Par ailleurs, les trois phénomènes dissipatifs considérés ici dépendent des mêmes paramètres : vitesse de sollicitation, température et état des contraintes. Une compétition s’établit logiquement entre eux, comme l’observe par exemple par Béguelin [41].

De ces interactions et de cette compétition vont résulter deux grands mécanismes de renforcement « choc » que nous allons décrire ici : le phénomène de bandes de cisaillement généralisées et le phénomène de craquelures multiples.

I.D.2 Cavitation et plasticité

I.D.2.a Champ de contraintes autour d’une particule, effet de la cavitation et sensibilité à la sollicitation

La complexité des champs de contraintes en présence des particules de renfort les rend

d’accès difficile. Si des modèles analytiques peuvent parfois être utilisés, la plupart des travaux réalisés concernant ces champs sont basées sur la MEF.

Ainsi Guild et Young [42] ont modélisé l’état de contrainte autour d’une particule soumise à une traction uniaxiale, et retrouvent le fait que l’inclusion élastomère est soumise à une contrainte hydrostatique uniforme.

Ils constatent également une concentration des contraintes et un maximum pour la contrainte de von Mises à l’interface, dans le plan équatorial de la particule : cet endroit est donc le lieu le plus favorable à l’apparition de bandes de cisaillement.

Enfin, au niveau de l’interface, ils notent, du fait de la sollicitation choisie (absence de cisaillement), que la décohésion de la particule n’est pas favorisée et que la transmission des contraintes entre la matrice et la particule est faible.

Toutefois ces calculs réalisés dans le cas de la traction uniaxiale sont éloignés des

conditions de forte triaxialité caractéristique d’un sommet de fissure. Dijkstra [43] montre que si la cavitation n'est pas nécessaire au développement de

bandes de cisaillement lors d'une sollicitation uniaxiale, elle induit sous sollicitation biaxiale (plus proche de l’état de contrainte d’un fond de fissure) une augmentation franche de la contrainte de von Mises, dont le niveau est faible avant la cavitation (Fig. I-16).

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Fig. I-16 Contraintes relatives à σy en traction uniaxiale à gauche et en traction biaxiale à

droite (Dijkstra [43]). a rayon de la particule et r distance à la particule.

et : contrainte de von Mises avant et après cavitation. et : contrainte hydrostatique avant et après cavitation.

Géhant et al. [38] et [44] montrent eux aussi par diverses approches le faible impact de

la cavitation sur la dissipation d’énergie en sollicitation uniaxiale. Une de ces approches consiste notamment à « remplacer » par des trous les nodules cavités dans une matrice de type élastique plastique parfait (le seuil de cavitation est fixé pour une déformation critique arbitraire) : le seuil d’écoulement macroscopique ne diminue alors que faiblement.

Enfin, il faut noter qu’un facteur majeur influençant l’efficacité de la cavitation en tant que générateur de cisaillement semble être le module de compressibilité de l’élastomère Ke. Dijkstra [43] ainsi que Guild et Kinloch [45] montrent en effet que lorsque Ke est faible, la contrainte de von Mises varie peu lors de la cavitation ; a contrario, elle augmente fortement lors de la cavitation lorsque Ke est élevé.

I.D.2.b Distance interparticulaire critique

Lors de la réalisation d’essais mécaniques sur des matériaux contenant une fraction volumique de particules de renfort φ et une taille de particules variables, Wu [46] et [47] met en évidence une transition de type Ductile-Fragile et introduit une notion de distance interparticulaire critique τc, reliée à φ et à un diamètre de particule critique dc.

τc correspond à la distance moyenne maximale séparant deux particules de renfort pour laquelle les champs de contraintes des particules se recouvrent suffisamment pour interagir et est définie ainsi :

(11) ⎟⎟⎟

⎜⎜⎜

⎛−⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛= 1

6φπkdτ

31

cc

avec k une constante géométrique dépendant de l'arrangement des particules.

Borggreve et al. [48] et [49] vont préciser les travaux de Wu, d’abord en introduisant

la notion de distance relative (distance entre particules normée par leur taille), paramètre

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adimensionnel plus en adéquation avec la Mécanique des Milieux Continus (MMC), puis en montrant que τc varie avec la nature de l'élastomère et n’est pas un paramètre intrinsèque à la matrice (comme l’avait conclu Wu).

Enfin, Dijkstra et al. [50] ainsi Borggreve et al. [51] s’intéressent au cas où les interactions entre particules de renfort sont modérées et réalisent une étude basée sur des matériaux de φ variable mais faible, avec une taille de particules fixée.

Ils montrent, dans le cas de particules suffisamment espacées pour que les champs de contraintes n’interagissent pas, l’unicité de l’état de contrainte local permettant la cavitation d’une particule dont la taille et la nature (y compris la nature de l’élastomère) sont définies.

Il est cependant nécessaire de faire plusieurs remarques sur ces travaux. D’une part distance interparticulaire, taille des inclusions et fraction volumique de

renfort sont intrinsèquement liées : il est donc délicat de séparer les influences de ses trois paramètres sur les propriétés mécaniques du matériau.

D’autre part, les procédés de synthèse des matériaux imposent certaines contraintes : il est en effet souvent difficile, si ce n’est impossible, de maintenir exactement toutes les propriétés du système si l’on modifie l’un de ces paramètres. Ainsi modifier la taille de particule peut causer une modification de la longueur des chaînes d’élastomère ; varier le taux de renfort peut rendre nécessaire une modification de la viscosité de la matrice pour éviter la formation d’agrégats d’inclusions et assurer une bonne dispersion. Ce genre de modification entraîne bien entendu une modification des propriétés mécaniques du système.

I.D.2.c Bandes de cisaillement généralisées en sommet de fissure

Un des principaux mécanismes utilisés dans le renfort des matrices amorphes est le phénomène de bandes de cisaillement généralisées, qui découle des différentes considérations que nous venons de faire. Il se produit lorsqu’un état de contraintes triaxial (en sommet de fissure par exemple) permet d’atteindre σhc dans la phase élastomère de particules de renfort dont les champs de contraintes interagissent (Fig. I-17).

Fig. I-17 Illustration très simplifiée du phénomène de bandes de cisaillement généralisées.

La cavitation engendre tout d’abord une forte plasticité dans la matrice en multipliant les sites d’écoulement, et entraîne l’émoussement du sommet de fissure.

Une redistribution des contraintes a lieu vers un état plan : la variation de volume due à l’endommagement réduit les contraintes de traction en sommet de fissure, ce qui diminue la composante hydrostatique des contraintes et favorise le cisaillement.

Des bandes de cisaillement apparaissent alors entre les particules, se multiplient et se propagent ensuite dans toute la matrice.

Enfin la rupture a lieu lorsque les bandes de matrice fortement écrouies se rompent.

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En sommet de fissure, ce phénomène permet donc d’accommoder la grande variation de volume imposée au matériau, de développer une vaste zone endommagée et permet une propagation stable de fissure du fait de la grande quantité d’énergie dissipée.

Concernant le comportement global du matériau, un adoucissement lié au phénomène de cavitation peut être observé, suivi d’un rhéodurcissement engendré par l’alignement des chaînes de polymère au sein des bandes de cisaillement.

Un maximum d’efficacité de renfort est atteint lorsque le phénomène de bandes de cisaillement généralisées est amorcé au moment même où la matrice atteint son seuil d’écoulement « naturel ».

En effet, si la cavitation des nodules a lieu trop tôt, la matrice, toujours en phase de déformation élastique ne plastifiera que très localement autour des nodules (par concentration des contraintes) ; si elle a lieu trop tard le matériau subit une rupture fragile.

Les meilleures propriétés « choc » sont donc obtenues lorsque la contrainte de cavitation est proche du seuil de plasticité de la matrice, ce qui assure une grande dissipation d’énergie par le développement de bandes de cisaillement dans toute la matrice.

Par diffusion de rayons X aux petits angles effectuée pendant des essais de traction, Bubeck et al. [52] ont montré que dans les systèmes de ce type les craquelures n’étaient que minoritairement responsables de la déformation plastique totale.

La cavitation des particules de renfort est bien entendu la source du reste de cette déformation, ce qui souligne l’importance du phénomène, qui, par lui même, est pourtant faiblement dissipateur d’énergie – environ 10 % selon les travaux de Li et al. [53] concernant les résines époxyde renforcées « choc ».

A noter enfin l’exemple intéressant d’interaction entre phénomènes dissipatifs que constituent les bandes « dilatationnelles » observées par Lazzeri et Bucknall [54] et [55].

Caractérisées par des alignements de particules cavitées dans des bandes orientées formant un angle de 55 à 65° par rapport à la direction de sollicitation, elles résultent de l’interaction d’une bande de cisaillement avec une extension cavitationelle perpendiculaire à cette bande (Fig. I-18).

Fig. I-18 Exemple de bandes « dilatationnelle » (Lazzeri et Bucknall [54] et [55]).

Les fortes contraintes et déformations présentes au sein de la bande de cisaillement favorisent la cavitation de proche en proche des particules présentes dans son plan, ce qui entraîne la propagation de la bande elle même.

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I.D.3 Cavitation et craquelures

La concentration de contraintes située à l’interface et dans le plan équatorial des particules, que Guild et Young [42] ont identifiée par leurs calculs, constitue un endroit idéal pour l’amorçage de craquelures.

Les travaux de Bubeck et al. [52] précédemment cités, ainsi que ceux de Yang et Bucknall [56], basés sur l’étude par prédéformation et recuit de l’influence de l’endommagement de la phase élastomère, ont montré que la cavitation des particules était un précurseur du développement de craquelures. L’introduction de particules d’élastomère est donc une source importante de craquelures dans la matrice amorphe.

Toutefois Bucknall [57] et [58] a montré que l’introduction dans la matrice amorphe d’une phase de nature élastomèrique correspondait aussi à l’introduction d’obstacles à la propagation des craquelures (Fig. I-19) : l’amorçage massif et la multiplication de craquelures n’est donc pas synonyme de fragilisation du matériau.

Fig. I-19 Phénomène de craquelures multiples dans du HIPS (Bucknall [57]).

Le résultat de ce double effet des particules, qui, à la fois amorcent un grand nombre de craquelures, et font également obstacle à leur propagation, est le phénomène de craquelures multiples, second grand mécanisme de renfort par nodules d’élastomère (Fig. I-20).

Fig. I-20 Illustration très simplifiée du phénomène de craquelures multiples.

Ce phénomène très dissipateur d’énergie est proche par certains aspects de celui de bandes de cisaillement généralisées.

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De manière similaire, c’est le phénomène de cavitation qui entraîne l’amorçage des craquelures, préférentiellement au niveau de l’équateur des particules, point de concentration des contraintes triaxiales.

Sous certaines conditions de taille et de nature de particules étudiées par Donald et Kramer [59] et [60], les craquelures se propagent et créent de véritables ponts entre les nodules, engendrant une très grande dissipation d’énergie.

Enfin la rupture a lieu tardivement lorsque localement les craquelures se transforment en fissure.

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I.E Conclusion

Les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » constituent des systèmes complexes, capables sous certaines conditions de température, vitesse de sollicitation, état de contrainte, nature de l’élastomère, de dissiper par bandes de cisaillement généralisées ou craquelures multiples de grandes quantités d’énergie.

Le phénomène de cavitation de la phase élastomère apparaît comme étant le phénomène clé, en traction multiaxiale, dans le déclenchement de cette dissipation massive d’énergie à l’origine du comportement ductile de ces matériaux. C’est donc ce phénomène qui est à l’origine de la transition Ductile-Fragile.

On a vu que le phénomène de cavitation des particules était lié de manière intrinsèque au contraste des propriétés mécaniques existant entre la matrice et l’élastomère, contraste dû à l’utilisation de l’élastomère au delà de la Tg.

Nous avons donc décidé, lors de nos travaux sur l’endommagement en sommet de fissure dans les polymères amorphes renforcés « choc » par des nodules d’élastomère, d’étudier la transition Ductile-Fragile en plaçant, tant expérimentalement que par la modélisation, l’élastomère plus ou moins loin de sa transition vitreuse.

Nous allons à présent aborder la description de notre étude : définir nos objectifs, décrire notre méthode de travail et présenter les matériaux modèles sur lesquels nous nous sommes appuyés.

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I.F Références

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[36] C. Fond, R. Schirrer, A mechanical model for the onset of damage in rubber modified amorphous polymers, Journal de Physique IV, Supplement au Journal de Physique III, Vol. 6, 1996. [37] C. Fond, Cavitation criterion for rubber materials: A review of void growth models, Journal of Polymer Science Part B : Polymer Physics, Vol. 39, 2001 [38] S. Géhant, C. Fond, R. Schirrer, Criteria for cavitation of rubber particles : influence of plastic yielding in the matrix, International Journal of Fracture, Vol. 122, 2003 [39] A.N. Gent, P.B. Lindley, Internal rupture of bonded rubber cylinders in tension, Proceedings of the Royal Society of London, Vol. 249, 1959 [40] A.E. Green, W. Zerna, Theoretical elasticity, Clarendon Press, Oxford, 1968 [41] P. Béguelin, Approche Expérimentale du Comportement Mécanique des Polymères en Sollicitation Rapide, Thèse de doctorat, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, 1996 [42] F.J. Guild, R.J. Young, Journal of Material Science, Vol. 24, 1989 [43] K. Dijkstra, Thèse de Doctorat, Université de Twente, 1993 [44] S. Géhant, Endommagement mécanique par cavitation dans les polymères amorphes à deux phases : mesure par diffusion multiple de la lumière et analyse micromécanique, Thèse de Doctorat, Université Louis Pasteur, Strasbourg, 2001 [45] F.J. Guild, A.J. Kinloch, Journal of Material Science, Vol. 30, 1995 [46] S. Wu, Polymer Journal, Vol. 26, 1985 [47] S. Wu, Journal of Applied Polymer Science, Vol. 35, 1988 [48] R.J.M. Borggreve, R.J. Gaymans, A.R. Luttmer, Influence of the structure on the impact behaviour of nylon rubber blends, Makromolekulare Chemistry, Makromolekulare Symposia, Vol. 16, 1988 [49] R.J.M. Borggreve, R.J. Gaymans, J. Shuijer, Impact behaviour of nylon-rubber blends : the influence of the mechanical properties of the elastomer, Polymer Journal, Vol. 30, 1989 [50] K. Dijkstra, A. Van der Val, R.J. Gaymans, Nylon 6-rubber blends : cavitation and yield in nylon-rubber blends, Journal of Material Science, Vol. 29, 1994 [51] R.J.M. Borggreve, R.J. Gaymans, H.M. Eichenwald, Impact behaviour of nylon-rubber blends : the influence of structure on voiding process ; toughening mechanism, Polymer Journal, Vol. 30, 1989 [52] R.A. Bubeck, D.J. Buckley, E.J. Kramer, H.R. Brown, Modes of deformation in rubber modified thermoplastics during tensile impact, Journal of Material Science, Vol. 26, 1991

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[53] D. Li, X. Li, A.F. Yee, The role of cavitation in rubber particles in the deformation of rubber toughened epoxy under constrained conditions, Proceedings of ACS Polymeric Material Science Engineering, Vol. 63, 1990 [54] A. Lazzeri, C.B. Bucknall, Dilatational bands in rubber-toughened polymers, Journal of Material Science, Vol. 28, 1993 [55] A. Lazzeri, C.B. Bucknall, Polymer Journal, Vol. 36, 1995 [56] H.H. Yang, C.B. Bucknall, 10th International conference on deformation yield and fracture of Polymers, Cambridge, 1997 [57] C.B. Bucknall, Toughened plastics, Applies Science Publishers Ltd., London, 1977 [58] C.B. Bucknall, Advances in Polymer Science, Vol. 27, 1978 [59] A.M. Donald, E.J. Kramer, Journal of Applied Polymer Science, 1982 [60] A.M. Donald, E.J. Kramer, Journal of Material Science, Vol. 17, 1982

I.F.2 Références non citées H. H. Kausch, N. Heymans, C. J. Plummer, P. Decroly, Traité des matériaux, Vol. 14 : Matériaux polymères : propriétés mécaniques et physiques, principes de mise en œuvre, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2001 R. W. Cahn, P. Haasen, E. J. Kramer, Materials science and technology a comprehensive treatment, E. L. Thomas, Vol. 12 : Structure and properties of polymers, VCH Publishers, 1993 A.J. Kinloch, R.J. Young, Fracture Behaviour of polymers, Applied Science Publishers, 1983 J.M. Gloaguen, C. Fond, Structure et comportement des mélanges de polymères et des polymères chargés, Structure et comportement des mélanges de polymères et des polymères chargés, Nancy, 2002 P. Béguelin, C. Fond, H. H. Kausch, The influence of inertial effects on the fracture of rapidly loaded compact tension specimens part A : loading and fracture initiation, International Journal of Fracture, Vol. 89, 1998 C. Fond, R. Schirrer, Dynamic fracture surface energy values and branching instabilities during rapid crack propagation in rubber toughened PMMA, Compte rendu de l’Académie des Sciences, Vol. 329, 2001 C. Fond, R. Schirrer, Fracture surface energy measurement at high crack speed using a strip specimen : application to rubber toughened PMMA, Journal de Physique IV, Vol. 7, 1997 D. François, L. Joly, La rupture des matériaux, Ecole d’été de la Colle sur loup, Masson et Cie. Editeurs, 1970

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II PRÉSENTATION DE L’ÉTUDE

II.A Introduction

L’étendue et la variété des divers champs d’utilisation des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère, ainsi que l’importance des enjeux financiers liés à la production et à la commercialisation de ces matériaux, ont rendu nécessaire une meilleure compréhension du phénomène de transition Ductile-Fragile.

L’objectif de cette étude est de rendre compte de cette transition par la modélisation adéquate de l’évolution des divers phénomènes dissipatifs et de leurs interactions.

A ces fins, une méthode de travail reposant sur deux axes complémentaires a été mise en place et appliquée à l’étude de matériaux modèles. Une attention toute particulière a été par ailleurs portée au phénomène de cavitation, dont le rôle capital de « générateur » de la transition a été souligné dans le chapitre précédent.

Le premier axe de notre étude regroupe les efforts de modélisation menés dans le

cadre d’une approche dite « Macro-Micro ». Mettant en oeuvre différentes méthodes analytiques et numériques, elle permet la

détermination en deux étapes des paramètres micromécaniques de premier ordre dans la transition Ductile-Fragile. La première étape (étape « Macro ») correspond à une modélisation à l’échelle macroscopique d’un sommet de fissure à l’aide de la MEF. La seconde étape (étape « Micro ») a lieu à l’échelle de la microstructure à l’aide de la Méthode d’Inclusion d’Eshelby et nécessite la définition de critères pour chacun des phénomènes dissipatifs.

Le second axe de travail englobe l’ensemble des travaux expérimentaux réalisés. Nécessaires pour l’identification des paramètres matériau de nos modèles, ces

expérimentations nous permettent également de vérifier nos prévisions numériques. Divers essais mécaniques instrumentés et couplés à différentes méthodes d’analyse ont donc été réalisés, ce qui nous a permis de nous confronter directement au problème de la transition Ductile-Fragile, notamment à l’approche de la Tg de l’élastomère de renfort.

Enfin, l’ensemble de notre étude s’appuie sur des matériaux renforcés « choc » modèles présentant le phénomène de bandes de cisaillement généralisées décrit dans le chapitre précédent. Ces matériaux sont constitués d’une matrice PMMA invariante renforcée par des particules d’élastomère de natures et structures différentes, en quantités variables.

Le premier point que nous aborderons dans ce chapitre concerne les travaux de modélisation réalisés : nous donnerons quelques éléments bibliographiques et décrirons précisément nos choix méthodologiques.

Nous ferons ensuite une description des travaux expérimentaux réalisés en parallèle à ces efforts de modélisation.

Nous présenterons enfin les matériaux modèles sur lesquels est basée cette étude. Avant de conclure, une synthèse générale de la méthodologie mise en œuvre sera

donnée, qui servira de base à une discussion globale sur notre approche du problème du renforcement « choc » des polymères amorphes.

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II.B Modélisation numérique

II.B.1 Quelques généralités sur la modélisation de l’endommagement et de la rupture dans les matériaux polymères amorphes

II.B.1.a Introduction

A ce jour, deux grandes familles de méthodes permettant de déterminer la durabilité

d’une structure pour une sollicitation donnée. La bibliographie concise et non exhaustive présentée ici est volontairement orientée vers l’étude des matériaux polymères amorphes. Nous nous pencherons tout d’abord sur la première grande école de modélisation de la rupture et de l’endommagement, l’approche dite « globale », avant de nous intéresser à l’autre grande école, l’approche dite « locale ». Nous aborderons pour finir le cas particulier de la modélisation des matériaux polymères amorphes renforcés « choc ».

II.B.1.b Approche globale

II.B.1.b.i Plasticité confinée et plasticité étendue

Cette approche a d’abord été développée dans le cadre de l’étude des métaux dès la fin des années 50. Lorsqu'elle est valide, elle permet de déterminer, en fonction des conditions de la sollicitation, l’évolution de paramètres globaux d’amorçage de fissures, pour différentes géométries, et sans porter d’attention aux micromécanismes d’endommagement.

Deux situations se distinguent selon la valeur du rapport de la taille de la zone éventuellement déformée plastiquement à celle de l’éprouvette ou de la structure considérée.

Si le matériau a un comportement purement élastique, ou s’il ne présente qu’une plasticité confinée en sommet de fissure (Fig. II-1-a), la Mécanique Elastique Linéaire de la Rupture (MELR) est utilisée pour déterminer sa capacité à supporter une sollicitation.

Lorsque le matériau présente au contraire une plasticité étendue en sommet de fissure (Fig. II-1-b), c’est la Mécanique Non Linéaire de la Rupture (MNLR) qui est mise en oeuvre.

Fig. II-1 Courbe Force – Déplacement : plasticité confinée (a) et étendue (b). La zone déformée plastiquement est représentée en gris (Besson [61]).

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II.B.1.b.ii MELR

Dans le cadre d’une réponse linéaire de la structure, appliquer la MELR revient à considérer que l’ensemble de l’énergie emmagasinée dans le matériau est restituée et sert à faire propager la fissure.

Dans le cas d’une ouverture en mode I3, on peut définir un taux de restitution d’énergie GI qui, lorsqu’il atteint la valeur critique GIc (équivalente à deux fois l’énergie de création de surface libre du matériau), correspond à la propagation de la fissure.

Toujours pour une ouverture en mode I, on peut aussi définir un facteur d’intensité des contraintes KI. Calculé à l’aide d’abaques pour les géométries classiques, il permet de décrire la singularité spatiale du champ des contraintes σij en sommet de fissure (Fig. II-2) :

Fig. II-2 Système de coordonnées locales en sommet de fissure.

(12) ( )θf2rπKσ ij

Iij =

Lors de l’amorçage d’une fissure, KI atteint la valeur critique KIc, ténacité du matériau

étudié. Ce facteur d’intensité des contraintes critique permet de juger de la nocivité d’un défaut dans une structure, et de déterminer la limite au delà de laquelle un matériau va rompre.

GIc et KIc (ainsi que GI et KI) sont reliés par les équations suivantes en déformations planes et contraintes planes (13) :

(13) 2Ic

Ic υ1EGK−

= et IcIc EGK =

Les travaux d’Irwin [62] ont permis d’étendre le champ de validité de la MELR aux

matériaux présentant une plasticité limitée, confinée en sommet de fissure. Une zone plastique de correction est introduite en avant de la fissure ; son rayon ry s’exprime en contraintes planes et en déformations planes :

(14) 2

y

Iy σ

K2π1r ⎟

⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛= et

2

y

Iy σ

K6π1r ⎟

⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛=

avec σy le seuil de plasticité du matériau.

3 Voir Annexe C

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On peut alors continuer d’appliquer les équations de la MELR si l’on considère une fissure effective dont la longueur est égale à la longueur de la fissure vraie, rallongée par la zone plastique de d’Irwin.

II.B.1.b.iii MNLR

Lorsque l’hypothèse de plasticité confinée n’est plus réaliste, il est possible de rendre compte du comportement élastoplastique du matériau. Pour ce faire, on attribue à celui-ci un comportement élastique non linéaire tel que ses courbes Contrainte - Déformation demeurent inchangées. Dans le cadre de l’élasticité, il existe alors un potentiel élastique dérivant des contraintes tel que :

(15) ij

ij εWσ

∂∂

=

avec W la densité d’énergie élastique.

Rice [63] introduit une intégrale de contour J (Fig. II-3), dont la valeur est égale à la

variation d’énergie nécessaire à la propagation de la fissure, et est équivalente au taux de restitution d’énergie G dans le cas de la plasticité confinée (Budiansky et Rice [64]).

Fig. II-3 Contour d’intégration pour l’intégrale J en sommet de fissure.

Indépendante du contour choisi, cette intégrale a pour expression :

(16) ∫ ⎟⎠⎞

⎜⎝⎛

∂∂

−=Γ

dsxuTWdyJrr

avec : Γ : contour arbitraire autour du sommet de fissure. n

r: vecteur unitaire normal à Γ.

Tr

: vecteur contrainte agissant sur Γ. ur : vecteur déplacement sur Γ.

L’intégrale J joue également le rôle d’un facteur d’intensité de contrainte : une valeur

critique JIc correspond à l’amorçage de la fissure.

Les travaux de Hutchison [65] et Rice et Rosengren [66] permettent de décrirent, pour un matériau présentant une loi d’écrouissage en puissance, la singularité des champs des contraintes et des déformations en sommet de fissure (champs H. R. R.) :

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(17) n

00 σσα

εε

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛=

avec : σ0 et ε0 : limites élastiques du matériau. α : constante caractéristique du matériau. N : coefficient d’écrouissage.

Le rapport J/σ0 est alors relié au « Crack Tip Opening Displacement » (CTOD) par

une fonction de n. D’un point de vue expérimental, l’accès à la valeur de l’intégrale J se fait à partir de l’aire sous la courbe Contrainte – Déplacement, des dimensions de l’éprouvette, et de la distance de propagation de la fissure.

Cependant, l’utilisation de l’intégrale J pour caractériser la résistance à la rupture des polymères est souvent délicate : plusieurs problèmes peuvent être rencontrés.

La simple détermination de l’avancée de la fissure peut être difficile : l’émoussement du fond de fissure avant amorçage peut être mis en cause, de même que les effets de bord qui courbent le fond de fissure.

D’autre part, le cadre de validité de cette théorie est en définitive assez restrictif : le respect de certaines conditions de validité peut être problématique, comme par exemple le maintien de la nature stationnaire de la fissure lors du test.

Par ailleurs, les méthodes expérimentales de mise en œuvre conseillées sont parfois mal adaptées. C’est le cas de la méthode standard de détermination de JIc consistant à établir la courbe de résistance du matériau (courbe R, ASTM-E813 [67]). Cette méthode peut en effet présenter une dépendance à la géométrie de l’éprouvette lorsqu’un écoulement plastique conséquent se produit avant la propagation de la fissure.

Enfin, la viscosité, indissociable des matériaux polymères, n’est à aucun moment prise en compte dans la théorie de l’intégrale J…

Il faut également noter que des approches complémentaires à l’intégrale J ont été développées, visant à étendre la palette des possibilités de la MNLR.

L’approche J-Q introduit un second paramètre Q afin d’étudier l’influence du taux de triaxialité sur la résistance à la rupture, triaxialité qui trouve son origine dans la géométrie de l’éprouvette, les conditions de contraintes ou déformations planes, ou encore la nature du chargement (O’Dowd et Shih [68] et [69]).

L’approche « Essential Work of Fracture » (EWF) a elle été développée dans le cadre de l’étude de polymères présentant une forte striction avant propagation (Mai et Cotterel [70]). Le principe est ici de dissocier d’une part le travail majoritaire d’écoulement plastique en volume non directement associé à la propagation de la fissure, et d’autre part le travail véritablement dissipé en surface dans le processus de rupture.

II.B.1.c Approche locale

II.B.1.c.i Mise en oeuvre

Cette seconde approche est plus récente (sa méthodologie est appliquée par Ritchie et al. [71] pour la première fois en 1973 pour l’étude d’aciers férritiques), et repose sur deux points. La mise en oeuvre de modèles basés sur les micromécanismes d’endommagement du matériau d’une part. L’introduction, d’autre part, de variables d’état estimées « localement »,

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à l’endroit où le processus de ruine du matériau se déroule (c'est-à-dire généralement aux lieux de concentration des contraintes et de localisation des déformations).

La mise en œuvre de l’approche locale comporte quatre étapes-clés (Fig. II-4) :

Fig. II-4 Méthodologie de l’approche locale (Besson [61]).

Travail expérimental : il est nécessaire de caractériser le matériau et d’étudier son comportement à la rupture. Les tests mécaniques appropriés sont réalisés ; le matériau est observé avant et après rupture, afin de déterminer la nature de l’endommagement et de le quantifier précisément.

Etablissement du modèle : un modèle ainsi qu’un critère de rupture doivent être établis. Il faut ici tenir compte des phénomènes physiques micromécaniques observés (cavitation, craquelures, etc.) et refléter le mieux possible les résultats expérimentaux obtenus.

Identification des paramètres : les paramètres du modèle sont identifiés à partir des résultats des expérimentations réalisées.

Modélisation numérique : une fois le modèle implanté dans un code de calcul, la simulation d’essais expérimentaux est réalisée ; après validation, des structures peuvent être calculées.

Si cette approche est aujourd’hui très appréciée, notamment pour l’indépendance de

ses résultats à la géométrie de l’échantillon, son utilisation pour traiter un problème d’endommagement ou de rupture peut cependant s’avérer problématique.

Tout d’abord, une évaluation précise des chargements locaux auxquels est soumis le matériau est nécessaire. Il est néanmoins vrai que le développement de solutions analytiques et numériques (en particulier de la MEF), couplé à l’augmentation de la puissance des ordinateurs et à l’amélioration des performances des codes de calculs a permis de résoudre en partie ce problème.

D’autre part, l’établissement d’un modèle micromécanique « couplé » (c'est-à-dire prenant en compte l’effet de l’endommagement créé lors de la déformation du matériau), ou même seulement d’un critère de rupture peut être ardu. D’un emploi largement généralisé aujourd’hui, quelques-uns de ces modèles sont présentés ci-après.

Enfin, le formalisme mathématique associé à l’approche locale impose l’utilisation d’une « longueur caractéristique » du système à modéliser. Souvent difficile à déterminer, elle dirige les phénomènes de localisation et de propagation de l’endommagement lors des modélisations ; elle est également à l’origine d’une sensibilité des résultats au maillage employé. Les récents travaux de développement d’une mécanique « non locale » de la rupture4 tendent à éliminer cet obstacle (de Borst [72] et [73], Forest et al. [74]). 4 Voir Annexe D

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II.B.1.c.ii Exemples de modèles micromécaniques couplés utilisés pour la modélisation de l’endommagement dans les polymères amorphes

Un premier ensemble de modèles micromécaniques couplés regroupe les modèles dits

« de zone cohésive », modèles dont les origines remontent aux travaux de Barenblatt [75] sur la modélisation de la propagation de fissures et de la rupture.

Permettant notamment de rendre compte de l’influence de la triaxialité sur l’énergie nécessaire à la propagation d’une fissure (Siegmund et Brocks [76]), ils peuvent être utilisés dans le cadre plus spécifique de l’étude des matériaux polymères afin de décrire la formation et la propagation de craquelures (Tijssens et al. [77]).

La méthodologie associée à leur utilisation repose sur une discrétisation du matériau en éléments finis, avec une reproduction des micromécanismes d’endommagement à l’aide d’une surface dite « cohésive ». Les éléments qui la composent se voient attribuer un comportement non linéaire déterminé à l’aide de tests mécaniques de propagation de fissure. Lorsque des critères de décohésion sont atteints, les éléments de cette surface se séparent, permettant à la craquelure de se propager.

Les récents travaux d’Estevez et al. [78] dans ce domaine ont permis la modélisation des interactions existant entre craquelures et de bandes de cisaillement dans divers matériaux polymères amorphes.

L’autre grande approche utilisée pour le développement de ces modèles consiste à ramener l’endommagement à un problème de croissance de cavités au sein du matériau.

Les premières études dans cette voie concernent les métaux et ont été réalisées par McClintock [79] (cavité cylindrique) puis Rice et Tracey [80] (cavité sphérique) : il est démontré que la croissance d’une cavité dans une matrice infinie parfaitement plastique présente une forte sensibilité à la contrainte hydrostatique.

En se basant sur ces travaux, Gurson [81] établi un modèle micromécanique de la rupture ductile pour une matrice isotrope rigide parfaitement plastique et comportant un taux faible de cavités. Ce modèle, qui voit l’introduction d’une variable d’endommagement f correspondant à la fraction volumique de vide dans le matériau, est le premier à présenter un fort couplage entre endommagement et déformation.

De nombreuses modifications ont été apportées par la suite au modèle de Gurson : prise en compte des interactions entre cavités, introduction de l’écrouissage, de la coalescence et de la germination de cavités, mais aussi adaptation à la modélisation des polymères (sensibilité à la pression hydrostatique, grandes déformations, etc.). Les travaux de Lafarge [82] sur la modélisation du comportement du PVDF donnent un excellent aperçu des possibilités de ce modèle.

D’autres modèles existent bien entendu pour la modélisation de la cavitation, tant dans les métaux (modèle de Rousselier [83] à [85]), que dans les polymères amorphes (modèle de Boyce et al. [86], repris par Steenbrink et al. [87]). N. B. : le cas des modèles couplés de nature phénoménologique (modèle de Lemaitre par exemple) n’est volontairement pas abordé.

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II.B.1.d Cas des polymères amorphes renforcés « choc »

II.B.1.d.i Introduction

On a vu dans le premier chapitre que la méthode de renforcement « choc » des polymères amorphes consistait en l’adjonction de particules d’élastomère : en multipliant les sites de cavitation, on augmente l’énergie consommée par la propagation d’une fissure.

Evidemment, ceci a pour conséquence une complexification importante du système. Lors de la modélisation de ces matériaux, il est alors nécessaire de prendre en compte tant l’effet du phénomène de cavitation, que celui des interactions entre les particules.

Nous allons évoquer ici quelques-unes des démarches qui peuvent être entreprises en ce sens, et rappeler également quelques résultats utiles.

II.B.1.d.ii Modélisation de l’effet de la cavitation d’une particule de renfort

Depuis les travaux de Riccò et al. [88] et [89], l’outil le plus couramment utilisé pour ce type de modélisation est le calcul de cellule à l’aide de la MEF.

Une telle cellule est généralement obtenue en attribuant une morphologie périodique au matériau : un découpage en cellules de matrice hexagonales est réalisé, chacune contenant une particule de renfort en son centre. Par approximation, on aboutit à une cellule cylindrique, ce qui confère une géométrie axisymétrique au problème. La résolution en est évidemment simplifiée, puisque l’on peut alors réaliser un calcul en deux dimensions (Fig. II-5).

Fig. II-5 Méthode d’obtention d’une cellule de calcul.

Il est toutefois nécessaire de prendre certaines précautions lors du calcul. Tout d’abord, la périodicité du milieu doit être assurée. Ceci est possible en imposant

des conditions aux limites qui permettent de préserver la forme cylindrique de la cellule lors de la déformation. On simule en fait ainsi la présence des particules voisines par effet miroir.

Il est également nécessaire d’apporter une attention particulière au traitement numérique de la quasi-incompressibilité de l’élastomère (un écart de plusieurs décades sépare les valeurs de µe et Ke). Des éléments hybrides sont donc utilisés, qui comportent un degré de liberté supplémentaire attribué à la pression hydrostatique dans l'élément.

Enfin, comme lors de toutes utilisations de la MEF, il convient de s’assurer de l’insensibilité des résultats au maillage (nature des éléments utilisés, ou finesse du maillage).

On rappelle ici les résultats de Géhant et al. [38] et [44], ainsi que ceux de Dijkstra [43], déjà cités en I.D.2.a, et obtenus par cette méthode.

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II.B.1.d.iii Modélisation des interactions entre particules de renfort

Les conditions du calcul nécessaire à la résolution d’un tel problème rendent une solution analytique inenvisageable. En effet, les lois de comportement non linéaires, ainsi que les conditions aux limites difficiles à formaliser empêchent l’utilisation d’une telle solution.

Cependant d’autres méthodes peuvent être envisagées, le choix de leur nature étant en fait déterminé par le nombre d’inclusions à faire interagir.

Lorsque le nombre d’inclusions à modéliser est limité, on peut généralement opter pour une méthode numérique comme la MEF. On s’affranchit ainsi des problèmes liés à un comportement non linéaire, à des calculs en grandes déformations ou en grands déplacements, ou encore à la présence d’effets inertiels transitoires.

Les travaux de Fond et al. [90] et [91] illustrent cette méthode (Fig. II-6). Une cellule de calcul similaire à celle décrite précédemment est utilisée, mais comportant cependant deux particules d’élastomère ou deux cavités, de diamètre a, séparées d’une distance d variable. Les calculs sont réalisés dans des conditions de sollicitation quasi triaxiales, proches de celles observées en sommet de fissure. Aucune variation dans les contraintes calculées n’est observée lorsque le rapport d/a varie, ce qui tendrait à démontrer que les effets des interactions entre particules voisines sont négligeables. On note bien sûr également que la cavitation induit une relaxation sensible des contraintes, alors même que le volume d’élastomère dans la cellule est limité (2.5 % ici).

Fig. II-6 Evolution des contraintes normées pour une cellule cylindrique contenant deux

particules ou deux cavités sphériques en interaction, en fonction de la déformation normée (déformations planes, ε11 = ε22, ε33 = 0, σ11 = σ33, 2.5 % d’élastomère).

Lorsqu’il faut considérer un grand nombre d’inclusions, une telle approche n’est plus

envisageable : la discrétisation du domaine à modéliser n’est tout simplement plus possible, le nombre d’éléments nécessaires devenant trop élevé.

Il reste néanmoins possible, si les calculs sont réalisés dans le cadre de l’HPP, de traiter le problème par une méthode semi-analytique développée par Moschovidis et Mura [92]. Cette méthode, appelée Méthode de l’Inclusion Equivalente (MIE), fournit des résultats numériques approchés en combinant des solutions analytiques dont la plus simple est la solution d’Eshelby pour une inclusion isolée en milieu infini ([32] et [33]).

Des travaux de Fond et al. [91] et [93] peuvent là encore être cités pour illustrer ce type de modélisation (Fig. II-7). Un des calculs réalisés à l’aide la MIE donne par exemple le

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niveau de dépression hydrostatique σh atteint au sein des particules pour une sollicitation en traction équitriaxiale donnée. Les valeurs, obtenues pour différentes fractions volumiques de particules dans le polymère « choc », sont normées par σh0, contrainte hydrostatique obtenue pour une particule isolée dans une matrice infinie (cas de la solution d’Eshelby). Il apparaît que les particules interagissent peu, le rapport σh/σh0 restant toujours très proche de 1.

Fig. II-7 Distribution des dépressions dans les particules de renfort, pour différentes fractions

volumiques de particules dans la matrice, en traction équitriaxiale.

Enfin, indépendamment de la méthode choisie, il faut garder en mémoire que la description précise du comportement élastoviscoplastique des polymères est toujours longue et difficile (Lafarge [82]). Il est donc bon de procéder, si possible, à des simplifications du problème posé.

On peut part exemple simplifier le comportement du polymère étudié, et le considérer élastoplastique, avec une dépendance à la vitesse de déformation, à la température.

De plus, dans certains cas comme pour le PMMA, le seuil d’écoulement plastique en déformation εy change faiblement avec la température ou la vitesse de déformation. On peut alors envisager une simplification du comportement et relier directement le module d’Young au seuil de plasticité (Fig. II-8).

Fig. II-8 Comportement élastoplastique simplifié : εy est considéré constant vis-à-vis de la vitesse de déformation et de la température.

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II.B.1.e Conclusion

Si de nombreuses méthodes de modélisation existent concernant l’endommagement et la rupture, on constate néanmoins que les matériaux polymères constituent un « cas difficile » nécessitant un traitement particulier, tout spécialement dans le cas de matériaux renforcés « choc ».

D’une part, l’utilisation et l’application des méthodes de l’approche globale sont des plus délicates pour ces matériaux ; d’autre part, l’approche locale, bien que semblant appropriée à notre étude de microphénomènes dissipatifs, est particulièrement compliquée à mettre en œuvre.

Confrontés à un difficile problème de choix méthodologique, nous avons établi la stratégie de modélisation « Macro-Micro » décrite ci-après.

II.B.2 Méthode de modélisation « Macro-Micro » adoptée dans notre étude

II.B.2.a Réflexion à l’origine de notre méthode de modélisation

On a vu dans le premier chapitre que les divers phénomènes dissipatifs développés en sommet de fissure que nous nous proposons d’étudier sont d’échelle microstructurale.

De par sa nature, une approche globale ne permet pas de prendre en compte les phénomènes se déroulant à cette échelle. Il nous a donc semblé qu’une telle approche n’était pas adéquate pour notre étude de la transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère.

C’est donc parmi les méthodes de l’approche locale que nous avons choisi les outils de modélisation utilisés dans nos travaux.

La solution la plus simple, consistant en un calcul « direct » par la MEF et un modèle micromécanique couplé, n’était pas envisageable dans cette étude. En effet, aucun modèle n’existe à ce jour pour les matériaux renforcés « choc » ; en établir un, sans même évoquer son implantation dans un code de calcul, n’était pas envisageable étant donné le temps que cela aurait demandé.

Deux possibilités s’offraient donc encore à nous : le calcul de cellule d’une part et la MIE d’autre part. Présentant un intérêt et un à-propos équivalents pour la modélisation à l’échelle de la microstructure, l’utilisation de ces deux méthodes avait été envisagée à l’origine de l’étude. Malheureusement, faute de temps, seule la MIE a pu être mise en œuvre : elle est donc la seule à être considérée par la suite dans ce manuscrit.

Une description précise de la répartition des phénomènes dissipatifs développés autour

d’un sommet de fissure nécessite, cela va de soi, la réalisation de nombreuses modélisations à l’échelle de la microstructure autour de ce même sommet.

Cela implique une connaissance à l’échelle macroscopique des champs de contraintes et de déformations autour du sommet que nous ne n’avons pas a priori. En effet, la nature de ces champs n’est pas triviale, aucune méthode expérimentale ne permet leur détermination précise et, comme cela a déjà été signalé, aucun modèle micromécanique d’endommagement couplé n’existe pour les matériaux concernés.

Pour surmonter cette difficulté, la solution envisagée ici consiste en une étape de calcul supplémentaire, précédant la modélisation à l’échelle de la microstructure par la MIE. Cette étape préalable se base sur l’utilisation circonstanciée d’un modèle micromécanique d’endommagement « classique », pour une modélisation macroscopique du sommet de

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fissure. Associé à la MEF, c’est le modèle de Rousselier qui nous permet une détermination aussi approchée que possible des champs macroscopiques recherchés.

Une fois ces champs obtenus, appliquer la MIE en divers points autour du sommet de

fissure est réalisable. Toutefois, la MIE seule ne permet pas de prédire l’apparition de cavitation dans l’élastomère, de plasticité et de craquelures dans la matrice. L’utilisation judicieuse de critères d’amorçage pour chacun des phénomènes s’impose alors, toujours au niveau de la microstructure.

Ce raisonnement, présenté ici de manière simplifiée, est à l’origine de la méthode utilisée dans cette étude pour modéliser les phénomènes dissipatifs en sommet de fissure dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc ». Comportant deux étapes de calcul à deux échelles structurelles différentes, cette méthode est logiquement dite « Macro-Micro ».

Nous allons maintenant traiter de manière plus approfondie chacune des deux étapes de modélisation : d’abord celle réalisée à l’échelle macroscopique, l’étape « Macro », puis ensuite celle réalisée à l’échelle de la microstructure, l’étape « Micro ».

II.B.2.b Étape de modélisation « Macro »

II.B.2.b.i Objectif de l’étape « Macro »

Cette première étape de modélisation, réalisée à l’échelle macroscopique, a pour but l’estimation approchée des champs de contraintes et de déformations autour d’un sommet de fissure dans un matériau polymère amorphe renforcé « choc » par nodules d’élastomères.

II.B.2.b.ii Choix d’un outil de modélisation En l’absence de toute méthode expérimentale ou calculatoire éprouvée permettant de

déterminer précisément les champs recherchés, la solution envisagée ici est leur obtention approchée à l’aide d’un calcul par éléments finis et du modèle de Rousselier. Plusieurs critères ont été pris en compte lors du choix de ce modèle.

Le premier de ces critères concerne la nature du modèle à mettre en œuvre. On sait que le phénomène de cavitation dans les particules d’élastomère joue le rôle

capital de « générateur » de la transition Ductile-Fragile (I.D.2.a). De plus, on va le voir plus loin en III.B.1.b, les matériaux étudiés ici présentent extrêmement peu de craquelures en sommet de fissure. Il s’avère donc que la plus grande partie de l’endommagement développé dans nos matériaux est lié à la cavitation de l’élastomère des particules de renfort.

De ce fait, il nous est apparu capital de rendre compte, lors de cette étape de modélisation, des diverses conséquences de l’apparition de cavités au sein du matériau. Le choix d’un modèle micromécanique d’endommagement par croissance de cavités s’est donc imposé comme étant celui permettant le calcul de champs le moins erroné.

Notre second critère concerne la « souplesse d’utilisation » du modèle. Quelque soit le modèle micromécanique choisi, il ne peut être que partiellement adapté

à l’usage auquel nous le destinons. Par conséquent, il peut être utile d’envisager certaines modifications, afin de rendre son utilisation plus adaptée au cas étudié.

Nous avons donc orienté notre choix vers un modèle simple à mettre en œuvre, pouvant se prêter à des modifications de nature plus phénoménologique que conceptuelle ;

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notre objectif ici n’est pas d’établir un véritable modèle micromécanique des matériaux « choc », mais d’obtenir une estimation raisonnablement approchée des champs recherchés.

Notre dernier critère de choix est de nature purement pratique, le modèle choisi devant

être disponible dans le code de calcul utilisé par notre équipe, à savoir CAST3M® [94]. Le modèle de Rousselier satisfaisant l’ensemble de ces critères, nous l’avons choisi

pour l’étape de modélisation à l’échelle macroscopique.

II.B.2.b.iii Modèle de Rousselier Nous allons donner ici une description rapide de ce modèle tel qu’il a été mis en œuvre

dans CAST3M®, ainsi que la méthodologie préconisée dans le cadre d’une utilisation conventionnelle. La formulation complète du modèle, ainsi qu’une étude illustrant l’influence de certains de ses paramètres sont disponibles en annexe5. De plus amples informations peuvent par ailleurs être trouvées dans la littérature ([61] ; [83] à [85]).

Le système de notation défini ci-dessous est adopté pour la description du modèle : Les tenseurs sont indiqués par un soulignement : double pour les tenseurs d’ordre

2 ; quadruple pour les tenseurs d’ordre 4. Les exposants e ou p indiquent la nature élastique ou plastique (au sens non

réversible) de la quantité considérée. Les indices m ou d indiquent la nature hydrostatique ou déviatorique de la quantité

considérée. Un point au-dessus d’une quantité indique une dérivée du potentiel plastique. D’une façon générale, les contraintes sont notées σ et les déformations ε.

Le modèle de Rousselier a été développé au début des années 1980 dans le cadre de la

mécanique de l’endommagement des milieux continus. Basé sur la thermodynamique des processus irréversibles, il est néanmoins très proche, du point de vue de la formulation, des modèles micromécaniques de type Gurson et dérivés (II.B.1.c.ii). Dans le cadre de l’approche locale de la rupture, il est utilisé pour modéliser la plasticité et la rupture ductile des métaux poreux.

Sa formulation se caractérise par l’introduction, en sus de la déformation plastique cumulée p et du tenseur des déformations plastiques εp, d’une troisième variable d’état f, correspondant à la fraction volumique de vide dans le matériau. Le respect des règles de normalité permet de dériver les lois d’évolution du potentiel plastique ; les déformations élastiques volumiques du matériau étant négligeables, la matrice est considérée incompressible.

Bien que théoriquement limité à l’endommagement et au durcissement isotropes, ce modèle peut en pratique être mis en œuvre pour modéliser un endommagement ductile anisotrope sous chargement proportionnel.

Les équations constitutives du modèle sont les suivantes ((18) à (21)) :

(18) ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛+−=

c

mcR

eq

ρσσ

ExpfσDR(p)ρσ

Φ

5 Voir Annexe E et F

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(19) ( )pεε:Eρσ

−=

(20) eq

dpd 2σ

σ3pε && = et ⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛=

c

mR

pm ρσ

σfExpDp31ε &&

(21) ( )⎩⎨⎧

=⇒>=⇒<

−=3Bff1Bff

εf13Bfc

cpm&

&

avec : Φ : potentiel plastique. σeq : contrainte équivalente de von Mises. ( ) ( ) ( )f1f1/f1ρ 0 −≈−−= : densité relative du matériau (f0 très faible). f0 : fraction volumique initiale de vide dans le matériau. R(p) : courbe contrainte vraie / déformation plastique vraie du matériau. DR : endommagement (DR ≠ D). σc : contrainte critique. E : tenseur d’élasticité.

I : tenseur identité. fc : porosité critique.

Le premier paramètre du modèle est la fraction volumique initiale de vide dans le

matériau f0 qui correspond à l’ensemencement initial en cavités. Cette fraction volumique peut être déterminée par observation directe de la microstructure du matériau ou, dans le cas des aciers par exemple, par estimation à partir de la composition chimique. Elle varie généralement alors entre 10-4 et 10-2 %.

Le second paramètre du modèle est l’endommagement DR (différent de celui défini en I.C.1.b) qui est lié au phénomène de croissance des cavités. Des considérations théoriques ainsi que des mesures de croissance de cavités ont mené à la conclusion que sa valeur, indépendamment du métal considéré, est proche de 2.

Le troisième paramètre du modèle est la contrainte critique σc, contrainte reliée à une déformation plastique seuil en terme d’endommagement du matériau. Son identification est réalisée à l’aide de tests de traction sur éprouvettes cylindriques entaillées, couplés à des mesures de diminution de diamètre de l’échantillon. Pour les aciers, elle est de l’ordre de quelques centaines de MPa.

La loi de comportement à introduire dans le modèle est la courbe R(p) du matériau, c’est-à-dire la courbe Contrainte vraie-Déformation plastique vraie du matériau (courbe d’écrouissage). Elle est déterminée à partir des tests de traction réalisés pour l’identification de σc. Les déformations élastiques de l’acier étant le plus souvent négligeables, la courbe Contrainte vraie-Déformation vraie est fréquemment utilisée.

La porosité critique fc (qui n’est pas véritablement un paramètre du modèle) permet de rendre compte de la rupture du matériau par coalescence des cavités. Ainsi, comme on peut le voir dans l’équation (21), au-delà de cette porosité critique, le taux de croissance des cavités f& est fortement revu à la hausse. fc a typiquement une valeur de 0,2.

Enfin, lorsque le modèle est mis en œuvre dans un calcul par éléments finis, notamment pour étudier l’amorçage ou la propagation de fissure, de nombreuses précautions

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doivent être prises concernant le maillage employé. Un paramètre supplémentaire lc doit en particulier être défini : il s’agit de la taille des éléments utilisés dans le calcul. Identifié à l’aide des courbes expérimentales qui doivent être parfaitement reproduites, ce paramètre est lié à la distance interparticulaire (de 0,4 à 0,5 mm pour les aciers).

II.B.2.b.iv Différences entre matériau de Rousselier et matériau réel

La description faite dans le paragraphe précédent permet de mieux appréhender le modèle de Rousselier. Ainsi, on peut dire de façon synthétique en associant mots-clés et éléments du modèle, qu’un matériau (R(p)) subit un endommagement (f) par croissance (DR et σc), puis coalescence (fc) de cavités préexistantes (f0). On remarque également que le modèle impose implicitement la croissance des cavités sans permettre leur germination.

Il est alors intéressant de comparer cette version conceptualisée du phénomène de cavitation au phénomène se déroulant réellement dans un matériau polymère amorphe renforcé « choc » par nodules d’élastomère.

Nous allons décrire ici de façon schématique et volontairement simplifiée le déroulement de ce phénomène. Il va de soi qu’une telle description, bien que basée sur les éléments bibliographiques évoqués dans le premier chapitre, reste du domaine de l’hypothèse.

Pour un matériau polymère amorphe comportant des particules d’élastomère d’un diamètre de quelques centaines de nanomètres, et qui serait soumis à une sollicitation triaxiale croissante, cette description comporterait trois étapes.

La première étape (Fig. II-9) correspondrait à la germination des cavités dans l’élastomère pendant la phase de réponse élastique du matériau (ε = εe). Les précavités seraient générées à partir de défauts ponctuels ou d’impuretés et resteraient closes ( 0f =& ) durant la montée progressive de la contrainte hydrostatique σh dans l’élastomère.

Fig. II-9 Description du phénomène de cavitation : germination des cavités.

La seconde étape (Fig. II-10) correspondrait à une expansion rapide ( 0f >>& ) des cavités qui permettrait à f d’atteindre une valeur de l’ordre de quelques pourcents. Cette expansion, déclenchée par l’atteinte d’une contrainte hydrostatique critique de cavitation σhc, s’accompagnerait de la chute de σh dans l’élastomère. Par continuité des contraintes à l’interface particule/matrice, la part déviatorique des contraintes dans la matrice autour des particules augmenterait également. La matrice pourrait alors franchir son seuil d’écoulement, entraînant l’apparition de déformations plastiques dans le matériau (εp ≠ 0).

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Fig. II-10 Description du phénomène de cavitation : expansion des cavités.

La troisième et dernière étape (Fig. II-11) serait une étape de croissance des cavités en plasticité dans la matrice ( 0f ≠ , 0f >& ). L’élastomère semblerait alors, dans certaines limites (taux de déformation inférieurs à 20%), pouvoir confiner les cavités en réduisant les possibilités de coalescence entre cavités de particules différentes.

Fig. II-11 Description du phénomène de cavitation : croissance confinée des cavités. N. B. : de nombreux détails de cette description sont sujets à discussion, notamment l’idée de simultanéité de l’expansion des cavités et d’apparition des déformations plastiques au sein de la matrice. Cependant nous rappelons que l’objectif est ici une approche descriptive simple du phénomène de cavitation dans le cadre de l’étude du modèle de Rousselier.

A la lumière de cette description, certaines interrogations apparaissent sur le bien-fondé du choix du modèle de Rousselier pour notre étude.

La non prise en compte de la microstructure des matériaux étudiés - les particules de renfort - par le modèle constitue un premier sujet de réflexion.

Effectivement, le modèle concerne la croissance de cavités au sein d’une matrice uniforme. Aucune considération particulière ne peut donc être accordée aux particules de renfort qui sont pourtant le siège du phénomène de cavitation.

Ceci peut sembler contradictoire au premier abord : une analyse du double rôle de la microstructure permet cependant d’aboutir à une conclusion différente.

Le premier rôle des particules est clairement celui de précurseur du phénomène de cavitation. Tout comme les inclusions de sulfures et d’oxydes de manganèse sont à l’origine des cavités présentes dans les aciers, les particules d’élastomère sont à l’origine des cavités développées dans les matériaux étudiés. La formulation initiale du modèle de Rousselier devrait donc permettre de prendre en compte sans modification aucune ce premier effet de la microstructure.

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Un second rôle semble être joué par les particules : il s’agit du confinement des cavités. On a vu que cela aurait pour conséquence la limitation de la coalescence des cavités entre elles. Ce second effet de la microstructure pourrait donc être facilement reproduit par l’intermédiaire du paramètre fc.

Il apparaîtrait donc, de façon étonnante, que le modèle soit capable de restituer de manière artificielle les effets de microstructure dans les matériaux étudiés.

Un second axe de réflexion concerne la gestion de la croissance des cavités par le

modèle de Rousselier. On a vu, à ce sujet, que le modèle reposait essentiellement sur deux éléments : une

porosité initiale f0 d’une part, une cinétique de croissance f& appliquée à cette même porosité initiale d’autre part. La nature des matériaux étudiés semble mettre ces deux éléments en défaut.

Tout d’abord, les matériaux semblent ne présenter aucune porosité dans leur état originel, en particulier au niveau de l’élastomère des particules de renfort. Le paramètre f0 perd donc ici sa signification, et son identification lors de la mise en œuvre du modèle devient délicate.

Par ailleurs, lorsque l’on se penche sur l’équation (21) donnant la cinétique de croissance du modèle, on constate l’absence d’un terme de germination. Pourtant une phase de germination se produirait dans l’élastomère et serait à l’origine du phénomène de cavitation. On remarque également que la pression hydrostatique semble être le paramètre clé de ce phénomène, alors que la cinétique mise en oeuvre est fonction du taux de variation des déformations plastiques p

mε& . En l’état, il est donc peu probable que cette cinétique fournisse des résultats convenables pour les matériaux étudiés.

A titre d’illustration, une évolution schématique de la porosité en fonction des déformations plastiques cumulées est donnée (Fig. II-12) pour deux matériaux différents subissant une même contrainte triaxiale croissante. La courbe de gauche correspondrait à un matériau de Rousselier « classique », de type acier poreux ; celle de droite à un matériau polymère renforcé « choc ».

Fig. II-12 Evolution schématique de la porosité pour une contrainte triaxiale croissante : matériau de Rousselier à gauche ; matériau polymère renforcé « choc » à droite.

Le matériau de Rousselier verrait une porosité initiale f0 faible se développer en

fonction de σc et DR, jusqu’à atteindre le seuil fc. Le taux de croissance des cavités augmenterait alors, restituant l’effet de la coalescence des vides. Pour le matériau polymère, l’expansion rapide des précavités aurait lieu simultanément avec l’apparition des déformations plastiques. La porosité atteindrait alors rapidement une valeur de plusieurs

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pourcents, avant d’adopter une vitesse de croissance plus lente avec l’augmentation de la contrainte, mais sans coalescence.

Comme on peut le constater, des ajustements sont nécessaires au niveau du modèle afin d’obtenir une gestion de la croissance des cavités plus appropriée aux matériaux étudiés.

Un dernier axe de réflexion concerne les difficultés du modèle de Rousselier à prendre en compte les différences importantes qui existent au niveau de l’écrouissage entre métaux et polymères.

Les métaux présentent souvent un écrouissage durcissant après l’écoulement, au contraire des polymères qui peuvent présenter un adoucissement puis un rhéodurcissement. Le phénomène de cavitation est à l’origine de ce durcissement du matériau, causé par l’alignement sous la contrainte des multiples bandes de cisaillement qui apparaissent dans la matrice lorsque celle-ci atteint son seuil de plasticité.

Les polymères offrent généralement par ailleurs une plage de réponse élastique bien plus étendue que les métaux.

La gestion de l’écrouissage nécessite donc visiblement elle aussi des modifications lors de la mise en œuvre dans notre étude du modèle de Rousselier.

II.B.2.b.v Modifications portées au modèle de Rousselier

La présence d’une microstructure dans les matériaux étudiés ne semble pas constituer un problème au sein de notre démarche de modélisation macroscopique. En revanche, les possibilités de gestion de l’écrouissage et de la croissance de cavités qu’offre le modèle de Rousselier ne sont que très partiellement adaptées à la modélisation de l’endommagement des matériaux polymères amorphes renforcés « choc ».

On trouve dans la littérature des propositions permettant de résoudre en partie ces problèmes. Besson [61] par exemple suggère d’ajouter à la loi de croissance des cavités un terme de germination contrôlée en contrainte hydrostatique, voire en triaxialité. Pijnenburg et van der Giessen [95] proposent, dans leur version modifiée du modèle de Gurson, une approche permettant de mieux prendre en compte l’écrouissage de la matrice dans de tels matériaux.

Cependant, comme nous l’avons déjà dit en II.B.2.a, nous ne disposons pas du temps nécessaire à l’élaboration, la validation et la mise en œuvre dans un code de calcul d’un nouveau modèle ou d’une version modifiée d’un modèle préexistant. Nous avons donc choisi d’utiliser le modèle de Rousselier de façon circonstanciée : une approche phénoménologique a été adoptée pour l’adapter aux matériaux étudiés.

Concernant les paramètres f0 et fc, les descriptions comparées du développement de la porosité dans un matériau de Rousselier et dans un polymère renforcé « choc » données précédemment (Fig. II-12) nous ont servi de base de réflexion.

Compte tenu tout d’abord des observations faites sur la capacité des cavités à coalescer, l’idée d’attribuer une valeur élevée à fc s’est imposée à nos yeux. Nos calculs étant par ailleurs réalisés dans le cadre de l’HPP (voir ci-dessous en II.B.2.b.vii), nous avons décidé de négliger totalement le phénomène de coalescence des cavités. fc a donc reçu la valeur 1 dans l’ensemble de nos modélisations.

Pour ce qui est de la notion de porosité initiale, l’approche considérée consiste à relier le paramètre f0 à la porosité générée lors de la phase d’expansion des précavités. Comme cela est illustré sur la figure suivante (Fig. II-13), croissance des cavités ainsi générées est contrôlée par le modèle de Rousselier, via ses paramètres DR et σc. L’identification directe de f0 par caractérisation de l’endommagement au niveau de la microstructure en envisagée.

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Fig. II-13 Evolution schématique de la porosité pour une contrainte triaxiale croissante dans

un matériau polymère « choc » : approche proposée pour la redéfinition du paramètre f0.

Un remaniement des paramètres de croissance des cavités est également nécessaire. La description originelle du modèle, donnée pour les aciers poreux, attribue à DR une

valeur fixe égale à 2. La détermination d’une nouvelle valeur, plus appropriée au cas des matériaux polymères nous a semblée nécessaire. Afin de respecter le lien existant entre ce paramètre et la croissance des cavités, nous proposons de déterminer cette valeur à partir de courbes expérimentales de variation de volume obtenues lors de tests de traction.

D’autre part, ne pouvant disposer des éprouvettes cylindriques entaillées permettant la réalisation du test mécanique préconisé, nous avons dû également modifier la méthode d’identification de σc. Ce paramètre est lié à une déformation plastique seuil en terme d’endommagement du matériau. Or, nous avons fait en II.B.2.b.iv l’hypothèse simplificatrice de la simultanéité de la cavitation des particules (donc de l’apparition d’endommagement) et de l’apparition de plasticité dans la matrice. En conséquent, nous avons associé à σc la valeur du seuil d’écoulement plastique des matériaux étudiés.

La question de la détermination de la loi de comportement à introduire dans le modèle et la gestion de l’écrouissage qui en résulte doit également être abordée.

L’utilisation du modèle de Rousselier pour la modélisation des matériaux polymères renforcés « choc » se heurte au moins à trois différences intrinsèques existant entre métaux et polymères. Premièrement, les taux de porosité initiale rencontrés (au sens de f0) peuvent présenter plusieurs décades d’écart. Ensuite, les écrouissages observés sont de nature très différentes (on note en particulier le rhéodurcissement des polymères causé par l’alignement des bandes de cisaillement). Enfin, contrairement au cas des métaux, les déformations élastiques ne sont pas négligeables dans le cas des polymères : la courbe R(p) ne peut être assimilée à la courbe Contrainte vraie - Déformation vraie.

Nous proposons d’utiliser comme courbe de comportement la courbe Contrainte vraie - Déformation vraie du matériau corrigée par un jeu de deux nouveaux paramètres (Fig. II-14). Identifiés lors de tests de traction, ils permettent de modifier la gestion de l’écrouissage et de palier simultanément les trois inconvénients précédemment cités : (22) ( )B.A.εσσ expcor +=

avec : A (MPa) : module du durcissement linéaire additionnel σA attribué au matériau. B (sans unité) : coefficient multiplicateur des contraintes dans le matériau modifié

préalablement par σA.

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0

10

20

30

40

50

60

70

0 5 10 15 20Déformation vraie (%)

Con

train

te v

raie

(MPa

)

Fig. II-14 Introduction des paramètres de correction de gestion de l’écrouissage : σexp=f(ε), σA=A.ε, σexp+σA, σcor=(σexp+σA).B

Enfin, pour ce qui est dû choix de la longueur caractéristique de maillage lc, nous

avons été confrontés à un problème de temps de calcul. Les ressources informatiques disponibles étaient en effet trop limitées pour mettre en œuvre un maillage présentant une finesse de l’ordre de la taille de la microstructure. Nous avons donc utilisé ici l’alternative généralement admise, consistant d’abord à fixer la finesse du maillage une fois pour toutes en fonction du temps de calcul, puis à ajuster les paramètres du modèle en conséquence.

II.B.2.b.vi Considérations liées à la viscosité des matériaux étudiés

Un comportement viscoélastoplastique tel que nous l’avons décrit en I.C.1.a est caractéristique des polymères, dans lesquels le déploiement et l'alignement des chaînes se produisent de façon visqueuse. Nous ne pouvons donc ignorer complètement cet aspect du comportement des matériaux modélisés.

Plusieurs solutions peuvent ici être envisagées : Rousselier par exemple suggère une extension de son modèle à la viscoplasticité [83], et préconise l’introduction du taux de variation des déformations plastiques cumulées p& dans la loi de comportement du matériau.

Toutefois, étant donné la complexité des comportements étudiés, ainsi que la multiplicité des échelles de modélisation, nous avons préféré adopter, en continuité avec la démarche décrite en II.B.2.a, l’hypothèse simplificatrice donnée en II.B.1.d.iii (Fig. II-8). Nous avons donc pris en compte la viscosité de manière très approchée, en considérant la déformation seuil de plasticité constante et en reliant la contrainte seuil de plasticité à la vitesse de sollicitation ainsi qu’à la température.

II.B.2.b.vii Considérations liées à l’utilisation de la MEF

Si le choix de la MEF pour résoudre un problème de MMC est aujourd’hui largement généralisé, son utilisation n’en reste pas moins délicate. En effet, deux difficultés inhérentes à cette méthode doivent être surmontées ici lors de sa mise en œuvre.

La première difficulté concerne la présence d’un point singulier au sommet de la fissure modélisée. L’impossibilité d’étendre analytiquement en ce point les fonctions

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d’interpolation entraîne la génération de fortes concentrations des contraintes et localisations des déformations. Ceci, conjugué à notre utilisation non conventionnelle du modèle de Rousselier, ne peut qu’être à l’origine de lourdes erreurs d’estimation des champs à l’approche du sommet de fissure.

A défaut de pouvoir résoudre ce problème, nous l’avons minimisé en adaptant notre méthodologie :

Les calculs sont réalisés dans le cadre de l’HPP, et nous nous efforçons de ne pas atteindre de déformations supérieures à 20 % dans les zones considérées. Nous espérons ainsi diminuer les erreurs d’estimation des champs. Nous évitons également d’avoir à utiliser le formalisme plus compliqué nécessaire au traitement des grandes déformations.

Seuls les résultats moins faussés obtenus en avant et sur les côtés du sommet de fissure sont pris en compte (généralement à 2 ou 3 éléments de distance).

Une seconde difficulté naît de l’absence de longueur caractéristique dans la

formulation du modèle de Rousselier. Sans cette longueur, les résultats obtenus peuvent être fortement dépendants des caractéristiques du maillage (taille, géométrie, type d’élément) : les calculs peuvent aboutir à des localisations excessives des déformations, ainsi que des propagations erronées de l’endommagement. Evidemment, l’impossibilité de relier lc à la microstructure du matériau (II.B.2.b.v) aggrave l’effet de ce phénomène.

Ici aussi nous avons fait en sorte de minimiser le problème, sans toutefois pouvoir le résoudre :

Les calculs des champs en sommet de fissure sont réalisés juste avant le départ en propagation. Nous espérons ainsi limiter les phénomènes de localisation, et éviter les difficultés liées à la modélisation de la propagation d’une fissure.

Une étude de l’influence des caractéristiques du maillage sur les résultats de modélisation est réalisée lors de la validation de l’étape « Macro ».

II.B.2.b.viii Validation et résultats de l’étape « Macro »

La démarche de modélisation que nous venons de décrire a pour objectif l’estimation

des champs de contraintes et de déformations autour d’un sommet de fissure. En dépit des difficultés techniques inhérentes à la nature de cet objectif, nous avons

tenu à valider expérimentalement notre approche. A ces fins, notre choix s’est porté sur la réalisation de tests de traction sur éprouvettes préfissurées de type CT6 [2].

Plusieurs de ces tests ont été à la fois réalisés expérimentalement, et modélisés en appliquant notre démarche, dans le but de comparer résultats expérimentaux et numériques. Par ailleurs, afin d’accroître l’intérêt de telles comparaisons, nous proposons d’enrichir les tests de traction CT à l’aide de méthodes expérimentales complémentaires :

Profilométrie de surface en sommet de fissure : des tests CT sont interrompus avant la propagation de la fissure et les éprouvette bloquées. Leur surface en sommet de fissure est observée au microscope topographique. On mesure ainsi les variations d’épaisseur des éprouvettes dues au passage en contraintes planes.

Essais de corrélation d’image en sommet de fissure : une estimation des champs de déformations en surface d’éprouvette est réalisée par corrélation d’images obtenus durant des tests CT filmés.

6 Voir Annexe A

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Enfin, une fois l’étape « Macro » validée, nous proposons d’extraire les champs de contraintes et de déformations locaux sur plusieurs courbes d’isovaleurs de la déformation plastique équivalente p

eqε autour du sommet de fissure :

(23) ( ) ( ) ( )[ ]⎟⎠⎞

⎜⎝⎛ −+−+−=

2p1

p3

2p3

p2

2p2

p1

peq εεεεεε

92ε

avec les p

iε représentant les déformations plastiques dans le repère principal.

Lors de l’application des calculs de l’étape « Micro », le choix de ces courbes d’isovaleurs de p

eqε , ou profils de plasticité, permet de situer aisément le VER considéré du point de vue de la sévérité de la sollicitation mécanique subie.

II.B.2.c Étape « Micro »

II.B.2.c.i Objectif de l’étape « Micro »

L’objectif de cette étape est l’établissement d’une cartographie précise des divers phénomènes dissipatifs apparaissant en sommet de fissure. C’est à partir de cette cartographie, obtenue en fonction de diverses conditions expérimentales (vitesse de sollicitation, température, matériau étudié), que nous espérons obtenir une meilleure compréhension de la transition Ductile-Fragile.

II.B.2.c.ii Choix des outils de modélisation

On a vu en II.B.2.a que notre choix s’était porté sur l’utilisation de la MIE, complétée par la mise en place de critères d’amorçage associés à chacun des phénomènes dissipatifs.

La mise en œuvre de ces outils est réalisée par codage en Fortran de l’algorithme de calcul développé par Fond [90] pour la MIE, ainsi que de routines permettant d’appliquer les critères d’amorçage choisis. Des calculs sont ainsi menés pour un grand nombre de VER situés le long des profils d’isoplasticité obtenus à l’échelle « Macro ».

II.B.2.c.iii Inclusion d’Eshelby et MIE

Les travaux d'Eshelby [32] et [33] fournissent de manière analytique la solution exacte au problème d’une hétérogénéité ellipsoïdale élastique linéaire, incluse dans une matrice infinie, également élastique linéaire.

Eshelby considère une inclusion ellipsoïdale au sein d’une matrice infinie, homogène, linéaire élastique, libre de toute contrainte et non déformée. Hors de la matrice, et sous une sollicitation de nature thermique par exemple, une telle inclusion peut subir une déformation dite « libre de contrainte ». Lorsqu’elle est considérée au cœur de la matrice, ce n’est plus le cas : matrice et inclusion sont déformées, des contraintes apparaissent. L'étendue de l'inclusion étant négligeable devant celle de la matrice, à l’infini celle-ci reste dans son état initial de contraintes et déformations nulles : il est alors possible de résoudre le problème.

La solution obtenue pour une inclusion peut être adaptée au cas d’une hétérogénéité : l’inclusion considérée possède alors des caractéristiques mécaniques différentes de celles de la matrice. On peut par ailleurs superposer ces résultats avec des champs de déformations

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et/ou de contraintes homogènes en tous points, afin de résoudre le problème d'un chargement homogène appliqué à la matrice à l’infini.

La MIE fournit une solution au problème d’hétérogénéités ellipsoïdales élastiques linéaires multiples en interaction dans une matrice infinie élastique linéaire.

Cette solution n’est exacte que dans le cas d’une hétérogénéité unique. Dans tout autre cas les hétérogénéités sont baignées dans les perturbations de leurs voisines, ce qui empêche l’obtention d’une solution statiquement admissible (i.e. qui respecte les conditions d’équilibre des forces à l’interface particule/matrice).

L’approche proposée par Moschovidis et Mura [92], qui consiste à exprimer les déformations « libres de contraintes » des inclusions sous forme de séries de Taylor, permet d’aboutir à une solution du problème analytiquement connue. Il faut cependant signaler qu’il n’existe pas de preuve formelle de la convergence vers la solution exacte lorsque l’on augmente l’ordre des séries.

Les travaux de Fond et al. [90] montrent qu’un calcul raisonnablement précis peut être mené en considérant des séries de Taylor d’ordre 0, c'est-à-dire en émettant l’hypothèse que les déformations « libres de contrainte » sont uniformes dans les inclusions. Cette hypothèse est tout à fait vraisemblable dans le cas d’hétérogénéités souples, comme par exemple des particules d’élastomère incluses dans une matrice polymère amorphe. En effet, l’élastomère adopte alors un comportement proche du fluide compressible, ce qui implique une contrainte hydrostatique uniforme dans les particules (Fond et al. [34] et [36]).

L’utilisation de séries d’ordre 0 permet de réduire considérablement le nombre des variables. Il est alors possible de procéder à des simulations numériques où plusieurs centaines de particules réparties aléatoirement dans un VER interagissent.

On peut par ailleurs considérer des particules saines ou endommagées : ces dernières sont modélisée par des cavités au module de compressibilité nul.

Il est enfin possible d’estimer l’importance des interactions mécaniques entre les particules, ainsi que les fluctuations de contraintes qui en découlent, autour des valeurs moyennes déterminées avec la MEF par exemple (Fond et al. [93]).

Bien que la MIE dans son ensemble ait été mise en place dans notre étude, nous n’avons pu, faute de temps, qu’effectuer les calculs concernant une particule isolée, sans interaction (cas d’Eshelby).

De nombreux VER comportant une particule unique ont donc été considérés le long des profils d’isoplasticité : pour chacun, des calculs ont été menés à l’aide des champs locaux calculés à l’étape « Macro ».

Nous avons ainsi pu déterminer notamment les champs de contraintes et de déformations aux interfaces particule/matrice, ainsi qu’au centre des particules, de manière à pouvoir appliquer les critères d’amorçage choisis, que nous allons décrire à présent.

II.B.2.c.iv Critères d’amorçage des phénomènes dissipatifs

Un premier critère a été choisi, afin d’estimer localement le niveau de plasticité développé dans la matrice sous l’influence des phénomènes dissipatifs. Notre choix s’est porté sur le classique critère de plasticité de von Mises modifié Sternstein [18], et le comportement élastique de la matrice est donc assumé lorsque :

(24) ( ) ( ) ( )[ ] yh2

132

322

21eq σασσσσσσσ21σ <+−+−+−=

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avec : σeq : contrainte équivalente de von Mises. σi : contraintes principales dans la matrice. σh : contrainte hydrostatique dans la matrice. σy : contrainte seuil d’écoulement de la matrice. α : coefficient intrinsèque au matériau.

Ce critère prend aussi bien en compte l’influence de la part déviatorique du tenseur des

contraintes que celle de la pression hydrostatique sur la plasticité. Toutefois, bien que la pression hydrostatique soit pour le PMMA à l’origine d’un écart notable entre seuils de plasticité en compression et en traction, nous ne tenons pas compte de cet effet dans une première approximation. Le coefficient α est donc nul dans notre étude.

Les éléments bibliographiques du premier chapitre soulignent l’apparition initiale de la plasticité au niveau de l’interface particule/matrice. Une routine de recherche du maximum de la contrainte équivalente et de la position de ce maximum est donc appliquée au niveau de l’interface. La valeur ainsi obtenue est comparée au seuil de plasticité du matériau, déterminé expérimentalement en traction.

Le second critère choisi concerne l’amorçage de craquelures dans la matrice. L’importance du rôle joué dans notre étude par la pression hydrostatique dans les phénomènes impliquant l’apparition de vides au sein du matériau a orienté notre choix vers le critère de Bowden et Oxborough [27]. Exprimé en déformation, et prenant en compte l’influence de la pression hydrostatique, ce critère assume l’absence de craquelure dans la matrice tant que :

(25) 1h

c εBσAε >+=

avec : εc : déformation critique. A et B : paramètres fonction de la vitesse de sollicitation et de la température. σh : contrainte hydrostatique dans la matrice. ε1 : première déformation principale dans la matrice.

Là encore, les éléments bibliographiques évoqués au premier chapitre indiquent un

amorçage préférentiel des craquelures à l’interface particule/matrice. La position du maximum de la première déformation principale est donc recherchée sur l’interface, de même que sa valeur et celle de la pression hydrostatique en ce point. L’identification des paramètres A et B à partir des récents travaux de Gearing et Anand [96] permet de déterminer si l’amorçage de craquelures à lieu.

Le dernier critère concerne le phénomène de cavitation au sein de l’élastomère. En accord avec les éléments bibliographiques du premier chapitre, nous considérons que le phénomène de cavitation se produit au centre de la particule une fois une contrainte hydrostatique critique σhc atteinte. La valeur de la pression hydrostatique est donc calculée au centre de la particule, puis comparée à une valeur de σhc identifiée expérimentalement.

Dans ce but, un test de traction couplé à un essai de transmission d’intensité LASER mettant en évidence l’apparition du phénomène de cavitation est réalisé. La valeur de σhc est alors déduite à l’aide de la formule donnant la valeur de la contrainte hydrostatique au cœur de la particule obtenue par Fond et al. [34] et [36] à partir des travaux d’Eshelby [32] :

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(26) ( )( )

( )( )em

e

m

mh 3K4µ

σTr3Kυ1υ1σ

++−

= ∞

avec : σh : contrainte hydrostatique au cœur de la particule. υm : coefficient de Poisson de la matrice. µm : module de cisaillement de la matrice. Ke : module de compressibilité de l’élastomère. σ∞ : chargement imposé à l’infini.

II.B.2.c.v Considérations liées au phénomène de cavitation

Les travaux de Fond et al [34] montrent que les contraintes résiduelles à l’interface

pour une particule élastomère endommagée d’un diamètre de plus de 100 nm sont typiquement négligeables. Il est donc possible de refléter l’état d’endommagement des particules dans la matrice en considérant une particule endommagée équivalente à un trou : pour ce faire, on lui attribue un très faible module de compressibilité.

Une répétition des calculs à l’échelle de la microstructure est proposée. Un premier calcul est réalisé en considérant toutes les particules saines, afin de

déterminer les zones de développement de chacun des phénomènes dissipatifs autour du sommet de fissure.

Un second calcul est ensuite mené, où l’on remplace par des trous les particules situées dans la zone où le processus de cavitation a lieu. Cela modifie évidemment le contour des zones d’amorçage pour les craquelures et la plasticité.

Nous espérons ainsi refléter l’effet de la cavitation des particules sur le développement des autres phénomènes dissipatifs considérés.

II.B.2.c.vi Considérations liées à la microstructure des matériaux étudiés

Que l’on aborde le problème de l’inclusion unique, ou celui d’inclusions multiples en

interaction, la méthode de calcul proposée repose toujours sur l’hypothèse de l’homogénéité de la matrice, ainsi que de la ou des inclusions considérée(s).

Or, on le verra en II.D, la plupart des matériaux étudiés comportent un grand nombre de particules de renfort structurées, de type Cœur-Ecorce, dispersées au sein de leur matrice.

La mise en oeuvre de la méthode d’Eshelby implique donc un recours préalable aux méthodes d’homogénéisation.

En ce qui concerne les particules Cœur-Ecorce, il est possible, en accord avec Fond et al. ([34] et [36]), de les assimiler à des particules Cœur Mou, au comportement de fluide compressible. L’expression du module de compressibilité de la particule équivalente Kpart est :

(27) écorcecoeurécorceécorce

écorcecoeurpart vK)v(1K

KKK+−

=

avec : Kécorce : module de compressibilité de l’écorce. Kcoeur : module de compressibilité du cœur. vécorce : fraction volumique de l’écorce.

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Plusieurs méthodes sont également proposées pour déterminer, à partir des propriétés mécaniques des matériaux réels mesurées expérimentalement, celles de la matrice équivalente baignant l’unique inclusion considérée dans le VER.

Des calculs en élasticité de cellules 2D axisymétriques et 3D peuvent d’une part être réalisés dans l’esprit des travaux présentés en II.B.1.d. Le modèle autocohérent proposé par Hashin [97] peut d’autre part être mis en œuvre.

II.B.2.c.vii Validation de l’étape « Micro »

On peut trouver dans les différents éléments bibliographiques donnés ici plusieurs résultats permettant de valider, indépendamment les unes des autres, chacune des étapes qui composent notre méthode de modélisation à l’échelle de la microstructure.

Toutefois, il apparaît clairement que seule une exploration expérimentale appropriée de la microstructure en sommet de fissure après endommagement est à même de valider notre étape de modélisation « Micro » dans sa globalité.

Une telle validation est prévue en collaboration avec L. Lalande, actuellement en thèse à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (Laboratoire de Technologie des Composites & Polymères), dans son étude des mécanismes de microdéformation des PMMA « choc » et des copolymères à base de PMMA [98].

II.B.3 Conclusion

Proposer une méthodologie de modélisation destinée à l’étude de l’endommagement des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère s’avère de toute évidence délicat. Trois obstacles majeurs semblent être à l’origine des difficultés rencontrées ici.

La multiplicité des échelles considérées constitue la première difficulté, chacune d’elles nécessitant la mise en œuvre de nombreuses méthodes de modélisation. Il en résulte une multiplication du nombre des hypothèses à émettre et des approximations à réaliser.

Le second obstacle est lié à la nature même du problème étudié : le champ de vitesses de déformations en sommet de fissure présente de forts gradients. Ceci entraîne des difficultés de mise en œuvre des outils de modélisation choisis.

Enfin, la complexité et la diversité des comportements étudiés constituent le dernier problème. De nombreuses hypothèses simplificatrices supplémentaires doivent être émises, notamment en ce qui concerne les lois de comportement des matériaux (tant au niveau de la matrice, qu’au niveau des particules de renfort).

L’ensemble de ces hypothèses et approximations sera discuté en II.E, afin de conclure quant à la validité de la méthode de modélisation proposée.

Nous allons poursuivre auparavant la description de la méthodologie globale appliquée dans cette étude, et détailler les méthodes expérimentales mises en œuvres en parallèle des travaux de modélisation.

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II.C Travaux expérimentaux

II.C.1 Méthodologie expérimentale

II.C.1.a Choix des conditions expérimentales

Afin de mieux comprendre le phénomène de transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes « choc », nous proposons de modéliser les divers phénomènes dissipatifs s’y développant en sommet de fissure. La réalisation de travaux expérimentaux en parallèle avec les calculs de modélisation s’avère alors indispensable.

Les éléments bibliographiques du premier chapitre montrent que le phénomène de cavitation est directement relié à la différence de module de cisaillement existant entre l’élastomère des particules de renfort et la matrice amorphe.

A l’approche de la Tg de l’élastomère, lorsque la vitesse de sollicitation augmente ou que la température baisse, cette différence s’estompe : la transition Ductile-Fragile du matériau se produit alors.

C’est pourquoi, pour étudier cette transition, les travaux expérimentaux et les calculs de modélisation doivent être réalisés dans des conditions propices à la mise en évidence l’effet de l’approche de la Tg de l’élastomère sur le comportement du matériau.

Le choix des conditions expérimentales à considérer est toutefois délicat. De par sa nature confinée, tout d’abord, l’élastomère des particules présente des

propriétés thermomécaniques différentes de celles de l’élastomère massif, difficiles à déterminer.

Des conditions situant le matériau très au-delà de la Tg de l’élastomère sont à éviter. D’une part en effet, elles favorisent fortement un comportement visqueux du matériau ; d’autre part, l’intensité du phénomène de cavitation risque d’être réduite du fait de la baisse naturelle du seuil de plasticité de la matrice.

A l’inverse, descendre trop loin sous la Tg de l’élastomère s’avère être sans intérêt. Le comportement global du matériau est alors élastique fragile, et le phénomène de cavitation n’est pas observable.

Une caractérisation thermomécanique de nos matériaux, et tout particulièrement des phases élastomères, s’avère donc indispensable. C’est à partir des résultats obtenus que sont déterminées les conditions expérimentales les plus appropriées à la réalisation de notre étude.

II.C.1.b Méthodes expérimentales et d’analyse mises en oeuvres

Les techniques expérimentales et les méthodes d’analyse mises en œuvre et associées aux différentes étapes de modélisation montrent une certaine diversité. Nous allons les présenter ici, après les avoir regroupées en quatre ensembles, en fonction de leur nature ou de la raison de leur utilisation.

Un premier groupe englobe les tests thermomécaniques réalisés pour déterminer les

conditions expérimentales les plus judicieuses pour notre étude : Analyse Dynamique Mécanique (ADM). Traction en grande déformation.

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Un second ensemble regroupe les différentes méthodes utilisées afin de caractériser l’endommagement des matériaux à l’échelle de la microstructure en sommet de fissure. L’objectif de leur mise en œuvre est l’identification du paramètre f0 du modèle de Rousselier :

Imagerie par MET sur coupes microtomes de matériaux endommagés. Traitement et analyse statistique des images MET numérisées.

La troisième famille englobe tous les tests uniaxiaux réalisés dans notre étude. A

l’étape de modélisation « Macro », il s’agit de compléter l’identification des paramètres du modèle de Rousselier. A l’étape de modélisation « Micro », il s’agit d’obtenir les données nécessaires aux calculs d’homogénéisation, et de déterminer les critères de cavitation et de plasticité :

Test de traction avec transmission LASER et décharges partielles rapides. Test de compression. Test de cisaillement.

Un quatrième ensemble regroupe les divers tests réalisés sur des éprouvettes CT, afin

de valider les résultats de modélisation de l’étape « Macro » : Tests CT classique. Tests CT avec profilométrie de surface. Tests CT avec corrélation d’images.

II.C.2 Tests de caractérisation thermomécanique

L’objectif est ici l’obtention des conditions expérimentales les plus intéressantes à

explorer par rapport à la position de la transition Ductile-Fragile des matériaux étudiés. A ces fins, nous proposons de caractériser les comportements thermomécaniques de nos matériaux, et en particulier de déterminer la Tg des différents élastomères utilisés dans les particules de renfort.

Une partie des travaux évoqués dans ce paragraphe est réalisée au sein des locaux d’Arkema GRL par N. Passade.

La principale technique utilisée est l’ADM, pour étudier les matériaux renforcés

« choc », les élastomères utilisés au sein des particules de renfort, et les matériaux obtenus par assemblage sous presse chauffante de particules de renfort.

L’ADM repose sur une sollicitation dynamique de l’échantillon, de manière à caractériser des phénomènes de relaxation associés à différentes transitions. Elle est réalisée sur des plages de températures et de fréquences variables, dans différents modes de sollicitation.

A fréquence donnée, les composantes élastique (en phase avec la contrainte) et anélastique (en quadrature de phase avec la contrainte) sont mesurées en fonction de la température. On obtient alors les modules mécaniques de conservation et de perte, ainsi que la valeur de l’angle de perte (la tangente de l’angle de perte est égale au rapport du premier module sur le second).

Les modes de relaxation mécanique se manifestent par un maximum de l’angle de perte. A température variable, les polymères amorphes présentent au moins deux modes de relaxation :

le mode principal α correspond à la manifestation viscoélastique de la transition vitreuse Tg (ou Tα).

le mode secondaire β correspond à des mouvements plus localisés de la phase amorphe (Tβ).

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Des tests de traction en grande déformation sont également réalisés, pour comparer les propriétés des différents élastomères utilisés dans les particules de renfort.

Pour ce faire, nous avons utilisé un rhéomètre élongationnel comme une machine de traction à vitesse de déformation constante, possédant un capteur de force très sensible.

Les résultats des différentes expérimentations évoquées ici sont donnés en II.D.3, lors de la présentation des matériaux modèles utilisés durant notre étude.

II.C.3 Caractérisation de l’endommagement

II.C.3.a Intérêt d’une caractérisation de l’endommagement

Nous avons proposé en II.B.2.b.v de relier le paramètre f0 du modèle de Rousselier à la porosité développée durant la courte phase d’expansion se déroulant dans l’élastomère lorsque la contrainte hydrostatique critique de cavitation σhc est atteinte.

Différentes méthodes expérimentales et d’analyse sont donc mises en œuvre afin de caractériser l’endommagement de nos matériaux autour de sommets de fissures.

Des coupes microtomes du matériau sont observées au MET, les images obtenues sont numérisées et traitées, puis une analyse morphologique est réalisée afin de déterminer, entre autres, la valeur de la porosité recherchée.

II.C.3.b Microtomie et observations au MET

L’ensemble des travaux évoqués dans ce paragraphe est réalisé au sein des locaux d’Arkema GRL par B. Pouchan-Lahorre.

La première étape consiste à réaliser le contrastage des différentes phases du matériau

par l’introduction d’atomes lourds au niveau de la phase élastomère. Des échantillons de matériaux fissurés sont immergés pendant douze heures dans une solution de tétraoxyde de ruthénium RuO4. De cette manière, lors de l’étude au MET, la phase élastomère apparaît bien définie en noir, tandis que le PMMA et les cavités, qui laissent passer le faisceau d’électron, apparaissent en blanc

On procède ensuite à la réalisation de coupes microtomes. A température ambiante, des tranches de l’ordre de 100 nm d’épaisseur sont découpées perpendiculairement au plan de fissuration.

Enfin, des observations au MET sont effectuées en plusieurs points autour du sommet de fissure ; les clichés réalisés sont ensuite numérisés en 256 niveaux de gris.

II.C.3.c Traitement des images MET numérisées

Le logiciel de traitement d’image ImageJ [99] est utilisé pour la réalisation de ces travaux, qui sont menés suivant les conseils de E. Maire, [61] et [100], et diverses informations tirées de la littérature, [101], [102] et [103].

L’objectif de cette étape de traitement est la transformation des images obtenues précédemment, de manière à pouvoir y définir des grandeurs mesurables. Nous allons décrire ici le déroulement du traitement appliqué à nos clichés.

L’amélioration de l’histogramme de la répartition des niveaux de gris par modification

du contraste et de la luminosité de l’image constitue une étape préalable à la réalisation.

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Le seuillage, première transformation véritable de l’image, est ensuite effectué. Passage obligatoire pour toute analyse morphologique ultérieure, il nous permet de séparer les différentes phases du matériau pour obtenir des images binaires. Nous nous sommes ici efforcés de séparer les phases suivantes :

Noyaux dur dans le cas des particules Cœur-Ecorce. Phase élastomère. Cavités dans la phase élastomère. Matrice.

Plusieurs outils mathématiques sont par la suite utilisés pour traiter et simplifier les

images binaires : érosions et dilatations, ouvertures et fermetures, applications de filtres (passe-haut et/ou passe-bas), etc.

II.C.3.d Analyse morphologique

II.C.3.d.i Morphométrie des images binaires

Cette étape consiste à étudier quantitativement la géométrie des objets présents sur les images obtenues après traitement.

Une première opération consiste à compter les pixels compris dans chaque phase. On

détermine ainsi les fractions volumiques pour chacune d’elles (le théorème de Cavalieri stipule en effet que les fractions volumiques et surfaciques sont ici égales).

On s’efforce ensuite de caractériser la forme des différents objets observés ; ceux qui coupent la fenêtre d’analyse ne sont alors plus pris en compte.

Les contours des cavités, des noyaux, et des nodules sont approximés dans nos calculs par des ellipses. Une analyse statistique permet de déterminer des formes moyennes, ainsi que les variations autour de celles-ci.

Par ailleurs, l’indice de circularité Icirc est utilisé pour caractériser la nature des formes des différentes phases (la valeur maximale de Icirc est de 1 dans le cas du cercle) :

(28) 2circ PS4πI =

avec : S : la surface de l’objet. P : le périmètre de l’objet.

Enfin, en utilisant les échelles fournies sur les clichés, nous obtenons les grandeurs

suivantes : Rayon apparent moyen des nodules. Rayon apparent moyen des noyaux. Rayon apparent moyen des cavités.

II.C.3.d.ii Stéréologie des images binaires

L’analyse d’image ne nous a permis d’accéder jusqu’à présent qu’à des paramètres en

deux dimensions. Nous nous efforçons ici de passer d’une analyse bidimensionnelle sur coupe à une analyse tridimensionnelle du matériau.

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L’image de la coupe ne donnant accès qu’à des paramètres concernant la coupe analysée, nous devons faire l’hypothèse de l’homogénéité de l’échantillon pour pouvoir remonter à des paramètres de l’échantillon entier.

Enfin, pour déterminer la porosité du matériau, la connaissance du rayon vrai moyen

des cavités est nécessaire. Une hypothèse supplémentaire est ici indispensable : nous devons assumer une géométrie sphérique des phases étudiées. Nous pouvons alors calculer les rayons moyens vrais des cavités, mais aussi des noyaux et des nodules, à partir des rayons apparents déterminés précédemment :

(29) π

4rr appvrai =

Il est par ailleurs possible de valider l’ensemble des travaux réalisés ici en comparant

les valeurs calculées aux informations fournies par Arkema.

II.C.3.d.iii Représentativité des zones analysées

Il peut être intéressant de nous assurer que les zones analysées sont suffisamment grandes pour être représentatives de la microstructure étudiée.

Pour une phase donnée, la taille de la zone minimale à observer est estimée à l’aide de la covariance statistique à deux points qui donne la probabilité que deux points appartiennent à la même phase.

Elle est calculée notamment en réalisant la transformée de Fourrier inverse du carré du spectre de puissance de l’image binaire analysée.

II.C.4 Tests mécaniques uniaxiaux

II.C.4.a Test de traction

II.C.4.a.i Intérêts de la mise en oeuvre du test de traction

Dans le cadre de notre étude, ce type de test permet d’obtenir de nombreux résultats nécessaires aux calculs de modélisation.

Le test de traction classique permet bien sûr de mesurer des grandeurs caractéristiques comme le seuil de plasticité ou le module d’Young. Il permet également d’identifier les paramètres A, B et σc du modèle de Rousselier, et de déterminer les lois de comportement à fournir à ce même modèle.

Une première méthode complémentaire enrichit les résultats obtenus lors d’un test de traction classique. Elle consiste à appliquer des microdécharges partielles rapides durant le chargement, tout en utilisant un double jeu de capteurs. Il est alors possible de déterminer les évolutions du module d’Young, du coefficient de Poisson, et surtout du volume lié à l’apparition de cavités dans l’éprouvette. Ce dernier résultat permet d’identifier le paramètre D du modèle de Rousselier.

Une seconde méthode complémentaire repose sur le suivi du développement des cavités dans le matériau durant le test. Ceci est réalisé par mesure de la transmission de l’intensité d’un faisceau LASER à travers l’éprouvette : on peut alors déterminer la valeur de la contrainte hydrostatique critique de cavitation dans l’élastomère.

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II.C.4.a.ii Test de traction classique

L’attrait principal de ce test est sa relative simplicité. Un champ de contraintes macroscopiquement homogène est généré (hors phénomène de striction, ce qui est le cas pour les matériaux étudiés), afin de mesurer un champ macroscopique de déformations.

La géométrie des éprouvettes utilisées est donnée ci-après (Fig. II-15). Lors de

l’usinage, des microfissures peuvent être créées aux arrêtes de l’éprouvette, susceptibles de concentrer les contraintes et donc de fragiliser anormalement le matériau. Un usinage précautionneux est donc réalisé et les arrêtes sont émoussées avec du papier abrasif très fin.

Fig. II-15 Géométrie des éprouvettes de traction utilisées, avec εx et εy les déformations nominales longitudinales et transversales.

Deux extensomètres identiques mesurent les déformations nominales longitudinales et

transversales εx et εy, ce qui permet d’obtenir la courbe Contrainte vraie-Déformation vraie du matériau étudié dans le sens de traction :

(30) ( )xvraiex ε1lnε += et ( )2y

xvraiex ε1

σσ+

=

avec : εx = ∆Lx/Lx : déformation nominale calculée à partir des déplacements des

branches de l’extensomètre Lx. σx = Fx/S0 : contrainte nominale dans le sens de traction, avec Fx la force appliquée

et S0 la section initiale de l’éprouvette.

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Les tests de traction sont réalisés avec un pilotage en vitesse de déplacement de la traverse, dont la valeur est prise constante durant chaque essai. S’il en va donc de même pour la vitesse de déformation nominale ; ce n’est toutefois pas le cas de la vitesse de déformation vraie qui ralentit au cours de l’essai.

Cette vitesse de déformation vraie s’avère être, pour raisons pratiques, un des paramètres expérimentaux de notre étude. Nous considérons alors, par convention, que pour chaque test, la valeur de la vitesse de déformation vraie est celle qui peut être calculée au tout début de l’essai (déformations inférieures à 5 %).

II.C.4.a.iii Test de traction avec microdécharges partielles rapides

Lors du test, lorsque la contrainte uniaxiale est suffisamment élevée, la contrainte hydrostatique critique est susceptible d’être franchie dans l’élastomère. Le phénomène de cavitation qui se déroule alors est à l’origine d’une augmentation du volume de l’éprouvette.

La variation totale de volume du matériau peut alors se décomposer en la somme de trois composantes. La première est liée à l’apparition des cavités, tandis que la seconde est due aux propriétés élastiques du matériau. La dernière correspond à l’écoulement plastique engendré par la cavitation, et est négligeable dans les matériaux polymères :

(31) plast0élast0cavit0total0 V

∆VV∆V

V∆V

V∆V

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛+⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛+⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛=⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

Par ailleurs, dans le cadre de l’hypothèse de l’isotropie des déformations dans les

directions perpendiculaires à la traction, la variation totale de volume du matériau peut s’exprimer en fonction des déformations longitudinales et transversales :

(32) ( )( ) 1ε1ε1V∆V 2

yxtotal0

−++=⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

Pour estimer la variation de volume liée au phénomène de cavitation, Schirrer et al.

[29], [30] et [104], proposent une méthode qui consiste à superposer périodiquement à la sollicitation principale linéaire des microdécharges partielles. Afin de pouvoir négliger l’effet de recouvrance dû à la viscosité du matériau, les décharges sont réalisées à une vitesse supérieure d’au moins une décade à la vitesse de l’essai de traction. La figure ci-après illustre le cas où une seule décharge est réalisée (Fig. II-16).

On détermine tout d’abord la déformation inélastique résultant d’une décharge complète du matériau. Elle est obtenue par extrapolation, à partir de la pente de décharge, de la déformation vraie à contrainte vraie nulle .

La valeur est alors reportée sur la courbe de variation de volume total . En extrapolant la valeur de la variation de volume à partir de la pente de décharge , on obtient la valeur de la variation de volume inélastique .

La variation totale de volume étant calculée à partir des mesures des deux extensomètres, la variation de volume élastique est déduite par différence.

Il est important de noter que la fermeture des cavités a bien lieu lors de la décharge. Par conséquent, cette méthode fournit un accès au volume occupé par les cavités lorsque le matériau est hors contrainte.

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Fig. II-16 Détermination de la variation de volume associée au phénomène de cavitation (Géhant et Schirrer [30]). Une seule décharge est considérée.

La mise en œuvre de cette méthode permet par ailleurs l’obtention d’autres résultats

intéressants. L’évolution du module d’Young au cours de l’essai est déduite de la mesure des

pentes de chacune des microdécharges ; l’équation (4) permet alors d’obtenir celle de l’endommagement du matériau.

L’évolution du coefficient de Poisson est obtenue par ailleurs à partir des mesures des variations de volume, de la contrainte de traction et du module d’Young du matériau, puisque :

(33) ( )cavit0total0

x

élast0 V∆V

V∆V

E2υ1σ

V∆V

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛−⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛=

−=⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

Il convient enfin de souligner que les valeurs obtenues ici sont des moyennes sur la

zone analysée, c'est-à-dire la zone comprise entre les lames de l’extensomètre longitudinal. Il est donc absolument nécessaire de s’assurer que l’endommagement est homogène à l’échelle macroscopique dans cette zone.

II.C.4.a.iv Test de traction avec suivi de la transmission LASER

Lorsque le phénomène de cavitation se produit dans l’élastomère, la différence d’indice de réfraction entre le polymère (n ≈ 1.5) et les cavités (n ≈ 1) est tel que ces dernières jouent le rôle de diffuseur pour la lumière. Ceci est à l’origine du blanchissement des matériaux « choc » transparents endommagés.

Plusieurs études de ce phénomène ont été réalisées par mesure de la transmission

d’intensité d’un faisceau LASER traversant une éprouvette durant un test de traction ([29], [30] et [44]).

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Deux hypothèses préalables sont nécessaires à la réalisation de ces études. D’une part la taille des cavités générées est supposée petite par rapport à la longueur d’onde du faisceau. D’autre part, les diffuseurs sont supposés être de géométrie sphérique.

Une fois ces hypothèses faites, il est possible d’exprimer un libre parcours moyen de diffusion L représentant la distance moyenne parcourue par un photon à partir de laquelle sa direction de propagation n’est plus sa direction incidente initiale. Un matériau fortement diffusant se caractérise donc par une valeur de L faible, tandis que pour un matériau transparent, L est infini.

La formule suivante permet de déterminer L à partir de la mesure de l’extinction d’un faisceau LASER en transmission :

(34) ⎟⎠⎞

⎜⎝⎛ −

=LeexpII 0

avec : e : épaisseur de l’échantillon. I0 : intensité du faisceau LASER incident. I : intensité du faisceau LASER transmis.

Cette technique est généralement limitée aux premiers stades de l’endommagement

(L > e/10) : au-delà, le matériau diffuse trop et aucune intensité n’est transmise. Elle permet cependant de déterminer parfaitement une contrainte ou une déformation seuil de cavitation en traction.

II.C.4.b Test de compression

II.C.4.b.i Intérêts de la mise en œuvre du test de compression

Notre but ici est l’exploration du comportement des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » en compression à l’approche de la Tg de l’élastomère de renfort : modules, seuils de plasticité et lois de comportement sont déterminés.

Nous proposons également de vérifier la validité des paramètres A, B, σc et DR du modèle de Rousselier déterminés en traction : les tests de compression expérimentaux sont modélisés, et les résultats comparés.

II.C.4.b.ii Test de compression classique

Il consiste à soumettre une éprouvette de forme cylindrique à deux forces coaxiales opposées sur chacune de ses faces.

Là encore, deux extensomètres identiques sont utilisés. Ils mesurent les déformations nominales longitudinales et diamétrales εx et εd (Fig. II-17), ce qui permet d’obtenir la courbe Contrainte vraie-Déformation vraie du matériau étudié dans le sens de la compression.

La réalisation de ce test comporte deux difficultés majeures : Si l'éprouvette est trop haute par rapport à son diamètre, il y a risque d'apparition

d'une instabilité élastique, le flambage. Les dimensions choisies lors de l’usinage nous ont permis d’éviter ce problème ; elles sont indiquées ci-dessous.

Du fait du frottement qui s'exerce entre les faces de l'éprouvette et les plateaux de la machine, des déformations hétérogènes confèrent à l'éprouvette une forme de tonneau. Il est alors préférable de placer l’extensomètre diamétral à mi-hauteur de l’éprouvette : c’est à ce niveau que les déformations sont le moins inhomogènes.

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Fig. II-17 Géométrie des éprouvettes de compression utilisées.

Les essais sont ici aussi réalisés avec un pilotage en vitesse de déplacement constante de la traverse. La vitesse de déformation vraie demeure un de nos paramètres expérimentaux, et la convention concernant sa valeur pour un essai donné est toujours valable.

II.C.4.c Test de cisaillement

II.C.4.c.i Intérêts de la mise en œuvre du test de cisaillement

Comme pour le test de compression, notre objectif ici est d’explorer le comportement

des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » à l’approche de la Tg de l’élastomère de renfort. Cette fois, ce sont les modules, seuils de plasticité et lois de comportement en cisaillement qui sont déterminés.

Nous proposons ici aussi de vérifier la validité des paramètres A, B, σc et DR du modèle de Rousselier déterminés auparavant en modélisant les tests de cisaillement.

II.C.4.c.ii Test de cisaillement classique

La géométrie de l’éprouvette de cisaillement est donnée ci-après (Fig. II-18). Ce test consiste à appliquer de part et d’autre de l’éprouvette deux forces opposées parallèles à son grand axe. Deux systèmes de mors, fixés chacun par cinq vis à un côté de l’éprouvette, sont utilisés pour appliquer la contrainte.

Contrairement aux tests de traction et de compression, un seul extensomètre est utilisé du fait de la complexité du montage mis en œuvre. Il permet évidemment la mesure de la déformation nominale de cisaillement εxy, et l’accès à la courbe Contrainte nominale - Déformation vraie du matériau étudié.

La réalisation de ce test comporte lui aussi deux difficultés majeures : La géométrie utilisée ne permet pas d’attendre des déformations de cisaillement

très élevées : un déchirement se produit en effet très tôt au niveau des extrémités libres de l’éprouvette. Cette difficulté est toutefois partiellement surmontée par l’usinage de deux arcs de cercles de rayon 8 mm qui permettent de diminuer quelque peu l’intensité des sollicitations hors de la zone centrale de mesure.

Le maintien en position durant le test de l’extensomètre, les extrémités « piquées » à la surface de l’éprouvette, est délicat, malgré un système de support, de câbles et de ressorts.

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Fig. II-18 Géométrie des éprouvettes de cisaillement utilisées.

Le pilotage des essais en vitesse de déplacement constante de la traverse est également utilisé lors de ces tests. Des considérations identiques à celles décrites en traction et en compression concernent par ailleurs la vitesse de déformation.

II.C.5 Tests CT

II.C.5.a Intérêts de la réalisation de tests CT

Les tests CT permettent d’étudier nos matériaux sous sollicitation triaxiale, et nous donnent accès à plusieurs résultats nécessaires pour la validation des calculs de l’étape de modélisation « Macro ».

Dans le cas des tests CT classiques, l’évolution de la force mesurée en fonction du déplacement de la traverse (également ouverture ici) est comparée à celle calculée à l’aide du modèle de Rousselier. Par ailleurs, l’ouverture critique d’amorçage de la propagation de la fissure est déterminée expérimentalement. Par contre, pour des raisons qui seront présentées plus loin dans ce chapitre, la MELR et les calculs de KIc sont peu mis en œuvre.

La palette de résultats obtenus par les tests classiques peut être enrichie par une première méthode complémentaire. Des tests CT sont interrompus lorsque l’ouverture critique d’amorçage de la propagation est atteinte. Les éprouvettes sont récupérées de manière à analyser leur surface aux pourtours de la fissure à l’aide d’un microscope topographique. Les variations d’épaisseur de l’éprouvette, liées à l’endommagement du matériau, sont alors comparées à celle modélisée par la MEF et Rousselier à la limite de la propagation.

Une méthode expérimentale supplémentaire basée sur des techniques de corrélation d’image est également mise en œuvre. Le dépôt d’un mouchetis à la surface des éprouvettes et la réalisation de tests filmés permettent de déterminer les champs de déformation à la surface des éprouvettes au court du test. Ces champs sont bien entendu comparés à ceux obtenus par la modélisation.

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II.C.5.b Test CT classique

Le test CT classique est un test sévère de propagation de fissure avec ouverture en mode I7. Un tel essai, capital pour la compréhension de la fragilisation de structures par des fissures, est cependant souvent difficile à exploiter du fait de la complexité des champs de contraintes et de déformations développés en sommet de fissure.

Dans le cas des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère, l’état fortement triaxial des contraintes permet de mettre en évidence le rôle capital du phénomène de cavitation. Le développement de plasticité et la variation de volume qui résultent de l’apparition de cavités permettent de réduire notablement la singularité du champ de contraintes.

Ce test est par ailleurs souvent associé à la mise en œuvre de la MELR, présentée en II.B.1.b.ii. Il est alors possible de caractériser la ténacité des matériaux étudiés en déterminant des valeurs de KIc.

La géométrie des éprouvettes utilisées est donnée ci-dessous (Fig. II-19). Il est nécessaire de signaler qu’une attention toute particulière doit être portée à la préparation de la préfissure pour garantir la réussite du test. Dans notre cas l’amorçage est réalisé par « tapping » d’une lame de rasoir au fond de l’encoche située entre les trous destinés à recevoir les goupilles. La préfissure est ensuite propagée en fatigue jusqu’à la longueur désirée, à froid (0 °C), par sollicitation cyclique à 5 Hz d’amplitude croissante.

Fig. II-19 Géométrie des éprouvettes CT utilisées.

II.C.5.c Test CT avec profilomètrie de surface

La méthode proposée consiste tout d’abord à interrompre le déplacement de la traverse lorsque, lors du test CT, l’ouverture critique d’amorçage de la propagation est atteinte.

Une colle époxyde à deux composants fortement chargée en poudre d’acier et à haut module de compressibilité est alors utilisée pour bloquer l’ouverture de l’éprouvette. Une fois la colle polymérisée (quelques heures), l’éprouvette est retirée du montage.

La surface autour du sommet de fissure est alors balayée à l’aide d’un profilomètre : les variations d’épaisseurs de l’éprouvette sont ainsi déterminées en limite de propagation.

7 Voir annexe C.

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II.C.5.d Test CT avec corrélation d’images

L’ensemble des travaux évoqués dans ce paragraphe est réalisé en collaboration avec S. Braymand à l’Institut C. Sadron.

Nous proposons ici d’adapter à notre étude la méthode d’analyse de la localisation des déformations dans les polymères multiphasés développée par Braymand et al. [105] et [106]. Cette méthode, basée sur la technique de corrélation directe d’images numériques développée par Morestin [107], permet, en grandes déformations, d’obtenir des champs de déplacements à la surface de corps solides.

Un mouchetis de peinture noir et blanc est appliqué à la surface des éprouvettes CT avant la réalisation des tests qui sont filmés.

L’image initiale est découpée en cellules et la reconnaissance entre l’image initiale et les suivantes, déformées, est possible par l’intermédiaire du mouchetis. Les champs de déformations sont obtenus par le calcul des déformations des cellules, avec l’hypothèse que la déformation est constante au sein de chaque cellule.

Le logiciel SaRoSoft développé par Braymand et Schirrer permet enfin de visualiser les diverses déformations en surface de l’éprouvette.

II.C.6 Conclusion

La diversité des techniques expérimentales présentées est liée au nombre de méthodes de modélisation utilisées dans notre étude de la transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère.

Par ailleurs, comme lors des travaux de modélisation, nous sommes confrontés à des problèmes liés à la nature des matériaux étudiés. Certaines hypothèses doivent être là aussi inévitablement faites.

L’à-propos et la validité des différentes méthodes expérimentales que nous proposons de mettre en oeuvre seront discutés en II.E, afin de conclure quant à la légitimité de la méthodologie expérimentale de notre étude.

Avant d’aborder cette discussion, nous proposons toutefois de donner la description des matériaux modèles utilisés, ainsi que les résultats expérimentaux obtenus lors des tests de caractérisation thermomécaniques réalisés.

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II.D Matériaux modèles

II.D.1 Choix des matériaux modèles

L’étude de la transition Ductile-Fragile des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère nécessite un contrôle total des paramètres expérimentaux. La détermination de l’influence d’un paramètre donné sur cette transition ne peut se faire précisément que si les autres paramètres sont égaux par ailleurs. Ceci implique notamment un choix judicieux des matériaux étudiés.

Les matériaux modèles synthétisés par Arkema et utilisés tout au long de notre étude nous permettent de répondre autant que faire se peut à une telle exigence. Une unique matrice de polymère amorphe est ici utilisée, renforcée par diverses quantités de deux types de particules de renfort différentes.

Il est toutefois nécessaire de rappeler la remarque faite en I.D.2.b concernant les difficultés à faire varier un paramètre de synthèse unique lors de la production de matériaux polymères renforcés « choc ».

II.D.2 Présentation des matériaux modèles

II.D.2.a Matrice

Le matériau amorphe choisi pour la matrice est le PMMA, dont la molécule est représentée ci-dessous (Fig. II-20) :

Fig. II-20 Molécule du PMMA.

Connu pour ses exceptionnelles qualités optiques, le PMMA est particulièrement transparent et son indice de réfraction est de 1.491 pour λ = 587.6 nm. C’est donc un matériau de choix en optique.

Il est par contre relativement fragile à température ambiante et gagne à être renforcé par incorporation d’élastomère, d’autant que ses qualités optiques sont conservées, même en cas d’adjonction de grandes quantités de renfort.

La matrice PMMA utilisée dans la plus grande partie de cette étude présente une masse moléculaire en poids Mw = 120 kg/mol et contient 4 % en poids d'Ethylacrylate (EA) en tant que comonomère.

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II.D.2.b Particules de renfort

Deux renforts différents sont principalement utilisés dans notre étude : de type Cœur-Ecorce, ils sont dénommés MPD1 et MPD2. Un troisième renfort est également mis en œuvre, mais de façon plus limitée : dénommé ici d’après sa structure, il s’agit du renfort Cœur Mou.

La figure ci-dessous (Fig. II-21) indique les dimensions respectives de ces particules, ainsi que leur structure. Le tableau qui suit (Tab. II-1) précise la nature et l’importance relative de chacune des couches des nodules MPD1 et MPD2 :

Fig. II-21 Dimensions et structures des particules de renfort étudiées.

Répartition (% mas.) Composants

principaux MPD1 MPD2 Noyau A

(MPD1 et MPD2) MMA 35.0 38.0

Couche B (MPD1) St et BA 45.0

Couche B1 (MPD2) St et BA 36.0

Couche B2 (MPD2) MMA et BA 18.8

Couche C (MPD1 et MPD2) MMA 20.0 7.2

Tab. II-1 Compositions et importances relatives des couches des particules MPD1 et MPD2.

MMA = Méthylméthacrylate, BA = Butylacrylate, St =Styrène.

Il est nécessaire de signaler que ce qui est communément appelé MPD1 ou MPD2 est en fait un mélange de 85 % mas. de véritable renfort (les nodules) et 15 % mas. d’un copolymère PMMA servant de « processing aid » (il se disperse ensuite dans la matrice).

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II.D.2.c Liste des matériaux étudiés

P. Gérard, Arkema GRL, nous fournit divers matériaux modèles, sous forme de plaques de 3 mm d’épaisseur obtenues par extrusion et calandrage, à partir de la matrice et des nodules présentés précédemment.

Le tableau suivant (Tab. II-2) indique la dénomination de chaque matériau modèle, son ratio massique et volumique en nodule de renfort, ainsi que son ratio volumique en élastomère (une densité de 1,1 a été retenue pour chaque phase).

Dénomination du matériau modèle

Particules (% mas.)

Particules (% vol.)

Elastomère (% vol.)

EI0 0.0 0.0 0.0 EI25 MPD2 25.0 21.3 7.7 EI50 MPD1 35.0 29.8 13.4 EI50 MPD2 35.0 29.8 10.7 EI60 MPD1 45.0 38.3 17.2 EI60 MPD2 45.0 38.3 13.8

PMMA Cœur Mou 45.0 38.3 38.3

Tab. II-2 Composition des différents matériaux modèles étudiés.

Les matériaux suivants sont par ailleurs à notre disposition pour la réalisation d’analyses thermomécaniques :

Elastomère des particules MPD1. Elastomère des particules MPD2. Matériau obtenu en « compactant » des particules MPD2 sous presse chauffante.

Pour finir, le cas du matériau PMMA Cœur Mou doit être abordé. Ce matériau n’est

pas à proprement parler un matériau modèle, mais son introduction est nécessaire en III.B.4 lors de la réalisation d’une étude complémentaire sur le cisaillement.

Sa matrice s’avère proche mais différente de la matrice PMMA utilisée pour les autres matériaux, tandis que la nature de son élastomère est complètement différente de celle des élastomères des nodules MPD1 et MPD2. Toutefois, dans le cadre spécifique de cette étude, ces différences ne remettent pas en question les résultats obtenus.

II.D.3 Résultats des analyses de caractérisation thermomécanique

II.D.3.a Introduction

Nous allons présenter ici quelques résultats significatifs obtenus lors des divers essais thermomécaniques décrits en II.C.2, destinés à nous guider dans le choix des conditions expérimentales de notre étude.

Ces travaux sont réalisés en partie au sein des locaux d’Arkema par N. Passade, sur

des gammes de températures et de fréquences variables, dans divers modes de sollicitation.

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II.D.3.b ADM des matériaux EI0, EI25 MPD2, EI50 MPD2, EI60 MPD2

Deux études sont réalisées dans les conditions différentes suivantes : Première étude :

o Instrument de mesure : DMTA 2980 de TA Instruments. o Gamme de température : -120 °C à +200 °C (montée à 2 °C/min). o Fréquence : 1 Hz. o Mode de sollicitation : poutre en flexion.

Seconde étude : o Instrument de mesure : Instron 4500 pilotée par ordinateur. o Gamme de température : -60 °C à 80 °C. o Fréquences : 0,05 Hz, 0,5 Hz et 5 Hz. o Mode de sollicitation : barre de traction.

La Tg du PMMA est située à environ 115 °C, tandis que la valeur de sa Tβ varie en

fonction de la fréquence d’étude : elle se décale vers les températures élevées d’environ 20 °C/décade lorsque la fréquence augmente, pour atteindre 20 °C à 5 Hz.

La Tg de l’élastomère est difficilement estimée à environ -20 °C. En effet, Tg de l’élastomère et Tβ du PMMA se chevauchent sur la gamme de fréquences balayée. Un exemple de déconvolution des pics de transition est présenté ci-dessous (Fig. II-22) :

EI50 MPD2 ADM (géométrie barre de traction) 0.05 Hz

0,00

0,02

0,04

0,06

0,08

0,10

-80 -60 -40 -20 0 20 40 60 80T (°C)

Tan

d

ADMTa élastTa PMMATb PMMA

Fig. II-22 Détermination des différentes transitions α et β dans le EI50 MPD2 par ADM.

On constate par ailleurs que les propriétés des matériaux EI50 MPD2 et EI60 MPD2 sont très proches, ce qui semble normal étant donné le faible écart de composition présenté.

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II.D.3.c ADM des élastomères des renforts MPD1 et MPD2

Les conditions de l’étude sont les suivantes : Instrument de mesure : DMTA 2980 de TA Instruments. Gamme de température : –140 °C à 140 °C. Gamme de fréquence : 0.1 Hz à 10 Hz. Mode de sollicitation : torsion rectangulaire.

Les éprouvettes sont obtenues selon la procédure suivante : Un film est formé par évaporation du latex d’élastomère dans un moule en téflon. Un séchage est réalisé sous vide à 80°C pendant deux heures. Des plaques sont pressées dans des moules à température peu élevée : les

éprouvettes sont par la suite découpées dans ces plaques.

Les différentes transitions, ainsi que divers modules sont déterminés à 1 Hz : on retient essentiellement la différence d’environ 7 °C mesurée entre les Tg des élastomères du MPD1 (Tg = -11.8 °C) et du MPD2 (Tg = -18.3 °C).

L’analyse multifréquence permet par ailleurs de calculer des courbes maîtresses en fréquence à une température donnée par application du principe de superposition temps-température WLF. On note qu’à même écart à la Tg, les courbes des deux élastomères sont rigoureusement identiques.

II.D.3.d ADM du matériau obtenu par compaction de nodules de renfort MPD2 sous presse chauffante

Les conditions de l’étude sont les suivantes : Instrument de mesure : Rhéomètre RDA II Rheometrics Scientific. Gamme de température : -120 °C à +200 °C, montée à 2 °C/min. Fréquence : 1 Hz. Mode de sollicitation : torsion rectangulaire (mesure des modules G' et G'').

En étudiant ce matériau nous espérons déterminer plus précisément la Tg de

l’élastomère confiné. Le signal obtenu ici est en effet simplifié par rapport à celui obtenu lors des essais sur matériaux modèles, puisque le PMMA de la matrice est éliminé. Par ailleurs, l’essai précédent nous fournit les propriétés de la phase élastomère en masse, non représentatives de celle confinée dans les particules.

La Tg mesurée ici s’avère proche de celle mesurée sur les matériaux renforcés « choc » (- 22 °C).

II.D.3.e Tests de traction en grandes déformations des élastomères des renforts MPD1 et MPD2

Conditions de l’étude de traction en grandes déformations : Instrument de mesure : Rhéomètre Elongationnel RME. Température : ambiante. Vitesse de déformation : 0,1 s-1.

Le rhéomètre élongationnel permet de tester les élastomères des renforts MPD1 et

MPD2 et de comparer leurs propriétés aux grandes déformations.

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Aux faibles déformations (ε < 10 %) et à l'incertitude de mesure près, les deux élastomères possèdent un module d’Young proche.

Au-delà, l’élastomère du renfort MPD2 montre une contrainte de déformation nettement plus faible que l’autre élastomère (60% plus faible à 50% de déformation). Sa déformation à la rupture est de loin supérieure (154 % contre 83.2 %).

II.D.3.f Conclusions et détermination des conditions expérimentales de notre étude

Ces travaux nous ont permis de mieux appréhender le comportement des matériaux

modèles utilisés par la suite dans notre étude. Nous avons également pu approfondir notre connaissance des phases élastomères en présence.

Ainsi, l’élastomère utilisé dans le renfort MPD2 présente une Tg inférieure de 7 °C à celle de l’élastomère du MPD1. Ceci confère certainement de meilleures propriétés de résistance aux chocs aux matériaux renforcés MPD2, puisque la perte de la capacité de l’élastomère à caviter est repoussée. D’autre part, si l’élastomère du MPD1 présente un module d’Young supérieur à celui de MPD2, les conséquences sur la capacité de renforcement « choc » semblent limitées. On peut tout au plus envisager ici une légère augmentation de la contrainte hydrostatique critique de cavitation de l’élastomère.

Une palette étendue de matériaux renforcés MPD2, susceptibles de présenter les meilleures propriétés « choc », se trouvant à notre disposition, nous avons décidé de focaliser notre étude sur ce type de matériaux modèle.

Le choix des conditions expérimentales a alors été réalisé en relation avec la Tg de l’élastomère des nodules MPD2.

Les paramètres expérimentaux suivants sont donc proposés pour la suite de notre étude de la transition Ductile-Fragile des polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère :

Vitesses de déformation : 10-4, 10-3 et 4.10-3 s-1. Températures : -30, -10, +10 et +30 °C. Quantités de renfort MPD2 dans la matrice : 0, 25, 35 et 45 % mas. (soit 0, 7.7,

10.7 et 13.8 % vol. d’élastomère dans le matériau).

Nous proposons à présent de discuter de l’ensemble de la méthodologie adoptée dans cette étude, tant au niveau de la modélisation, qu’au niveau des techniques expérimentales mises en oeuvre.

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II.E Synthèse et discussion

II.E.1 Synthèse de la méthodologie proposée

Le tableau ci-dessous (Tab. II-3) est une synthèse de la méthodologie initialement proposée dans le cadre de nos travaux. Elle est destinée à être appliquée, dans les conditions expérimentales données en II.D.3.f, à l’étude des différents matériaux modèles présentés en II.D.2. Comme on le verra dans les chapitres suivants, elle sera modifiée en quelques occasions lorsque cela s’avèrera nécessaire.

f0 Microtomie, imagerie MET et analyse morphologique de l’endommagement Test de traction avec microdécharges

Test de compression

Identification des paramètres du modèle de

Rousselier L.d.C., A, B,

σc, DR Test de cisaillement Calcul des champs en

sommet de fissure Modélisation en limite de propagation de fissure d’éprouvette CT avec le modèle de Rousselier

Etude de l’influence du maillage utilisé Test classique

Test avec profilomètrie de surface Validation de l’étape de modélisation « Macro » Test CT

Test avec corrélation d’images

Eta

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e m

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« M

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Sélection des profils d’isoplasticité en sommet de fissure et extraction des champs nécessaires à la réalisation de l’étape de modélisation « Micro »

Calcul des propriétés mécaniques de la matrice Homogénéisation des VERs considérés Calcul des propriétés mécaniques de la particule

Cavitation : test de traction avec transmission LASER Craquelure : littérature

Détermination des critères d’amorçage des

phénomènes dissipatifs Plasticité : test de traction Critère de craquelure au point de maximum de la première

déformation principale sur l’interface particule/matrice Critère de plasticité au point de maximum de la contrainte équivalente de von Mises sur l’interface particule/matrice

Mise en œuvre de la méthode d’Eshelby couplée aux critères

d’amorçage le long des profils d’isoplasticité Critère de cavitation au cœur de la particule

Cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure sans prise en compte de l’effet de la cavitation sur les autres phénomènes dissipatifs

Effet de la cavitation sur plasticité et craquelures

Remplacement des particules de renfort par des trous dans la zone de cavitation, et répétition du calcul. E

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Cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure avec prise en compte de l’effet de la cavitation sur les autres phénomènes dissipatifs

Détermination des paramètres micromécaniques de premier ordre dans la transition Ductile-Fragile des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère

Tab. II-3 Synthèse de la méthodologie proposée initialement dans notre étude.

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A chacune des étapes de cette méthodologie ont été associées des hypothèses et des approximations simplificatrices.

Nous proposons de discuter ici des choix les plus sensibles qui ont été faits en ce domaine, mais aussi de mener une réflexion sur les conséquences de ces choix. Nous nous efforcerons également de répondre aux interrogations les plus évidentes qui ont pu être soulevées lors de l’établissement de cette méthodologie.

Nous aborderons d’abord divers points concernant notre stratégie de modélisation « Macro-Micro », avant de nous pencher sur les méthodes expérimentales mises en oeuvre.

II.E.2 Modélisation numérique

II.E.2.a Etape de modélisation « Macro »

II.E.2.a.i Considérations liées aux modifications du modèle de Rousselier

La mise en œuvre très circonstanciée du modèle de Rousselier présentée en II.B.2.b.v est faite au prix de nombreuses hypothèses et approximations.

L’approche choisie concernant le paramètre de porosité initiale f0 et, par suite, la gestion de la croissance de cavités, est de toute évidence des plus discutables.

La modification la plus appropriée du modèle aurait ici consisté à éliminer la porosité initiale f0 tout en ajoutant à la cinétique de croissance des cavités f& un terme de germination dirigé par la pression hydrostatique σh. Pour éviter une telle modification en profondeur du modèle, la cinétique est conservée, et la porosité initiale f0 associée au volume de vide créé lors de l’expansion des cavités.

Cette approximation particulièrement grossière aboutit à des valeurs de f0 supérieures de plusieurs décades aux valeurs généralement impliquées dans le cadre d’une utilisation normale du modèle (1 à 10 % contre 10-4 à 10-2 %). Cet écart peut être à l’origine de difficultés au niveau de la gestion de la variation de volume du matériau et engendrer des problèmes de convergence des calculs.

Une autre conséquence de cette approche semble être l’indépendance, dans notre étude et en première approximation, de f0 aux conditions de sollicitation. Faisons l’hypothèse vraisemblable d’une faible variation des propriétés de l’élastomère au dessus de Tg dans les gammes de température et de vitesses de sollicitation explorées ici. En cas de cavitation, ces deux paramètres s’avèrent alors sans influence sur le comportement de fluide compressible adopté par l’élastomère et donc sur le volume de vide créé lors de la phase d’expansion de cavités.

La méthode choisie pour identifier la loi de comportement du matériau est également sujette à discussion, notamment dans le cas de la modélisation d’éprouvettes CT.

Le modèle de Rousselier est destiné à la modélisation de propagation de fissure et de rupture ductile dans les métaux poreux. Sous sollicitations triaxiales, le phénomène de cavitation joue alors un rôle prépondérant de générateur d’écoulement plastique dans la matrice. C’est pourquoi la courbe R(p) du matériau est originellement identifiée à partir de tests présentant de forts taux de triaxialité (traction sur éprouvette cylindrique entamée).

Faute de pouvoir pratiquer ces tests lors de notre étude, les lois de comportement utilisées pour la modélisation d’éprouvettes CT sont celles déterminées en traction uniaxiale. Ces lois (et donc les paramètres qui y sont rattachés : A, B, σc) reflètent évidemment mal le comportement du matériau en conditions de contraintes triaxiales. D’importantes surestimations des contraintes sont donc attendues lors de la modélisation d’éprouvettes CT.

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Un dernier point concerne le choix de la longueur caractéristique lc correspondant à la taille des éléments du maillage utilisé en sommet de fissure.

Cette longueur est définie en fonction du temps de calcul et non par rapport à une longueur caractéristique du matériau. Les résultats obtenus par la modélisation ne sont par conséquent valables que pour des géométries réelles proches de celles modélisées.

II.E.2.a.ii Considérations liées à la nature du champ de vitesses de déformations en sommet de fissure

Les champs étudiés en sommet de fissure ne sont évidemment pas uniformes : c’est le

cas notamment du champ de vitesses de déformations qui présente de forts gradients.

La mise en relation des tests uniaxiaux avec les tests CT constitue une première difficulté en rapport avec la nature de ce champ.

Au début de l’étape de modélisation « Macro », l’identification des paramètres du modèle de Rousselier est réalisée en sollicitation uniaxiale pour différentes conditions expérimentales. Pour un matériau donné, plusieurs jeux de paramètres sont donc déterminés en fonction des conditions de température et de vitesse de déformation.

Lors de la modélisation d’éprouvettes CT, le choix du jeu de paramètres devrait permettre d’associer des conditions expérimentales précises au calcul réalisé, en particulier en ce qui concerne la vitesse d’ouverture d’éprouvette. Le champ de vitesses de déformation n’étant pas homogène dans une éprouvette CT, cela s’avère particulièrement difficile.

La nécessité de ne pas prendre en compte les résultats fournis par la MEF au plus près du sommet de fissure est soulignée dans la description de notre méthodologie de modélisation donnée en II.B.2.b. C’est donc en excluant cette zone que sont déterminées lors de chaque modélisation les déformations moyennes observées en sommet de fissure. Les vitesses expérimentales d’ouverture d’éprouvettes à appliquer lors des tests de validation des calculs sont déterminées à partir de ces déformations moyennes et des vitesses de sollicitation associées aux divers jeux de paramètres utilisés.

Cette approche, basée sur l’estimation de la déformation moyenne observée en sommet de fissure, a l’avantage de la simplicité. Elle mène cependant à une estimation très grossière des vitesses expérimentales d’ouverture d’éprouvettes CT à appliquer lors des tests mécaniques de validation des calculs.

Les forts gradients du champ de vitesses de déformations en sommet de fissure sont également à l’origine d’une gestion difficile de la viscosité des matériaux étudiés.

L’approximation faite en II.B.1.d.iii a pour but la prise en compte de manière simplifiée de la viscosité des matériaux. Toutefois, pour qu’une telle approche soit valable dans une région plastique donnée, les vitesses de déformations doivent toutes se situer dans une même gamme de valeurs.

La validité de cette approximation est donc compromise par la nature même du champ de vitesses de déformations considéré. Nous nous attendons par conséquent à une mauvaise estimation des contraintes et des déformations en sommet de fissure.

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II.E.2.b Etape de modélisation « Micro »

II.E.2.b.i Considérations liées à l’effet des interactions entre particules

Aucune méthode permettant de prendre en compte l’effet des interactions entre particules sur le phénomène de cavitation n’a pu être mise en œuvre intégralement dans cette étude.

Toutefois, un certain nombre de travaux ont récemment été menés à l’aide de la MIE sur des matériaux semblables à ceux étudiés ici (Fond et al. [90], [93] ; Scodellaro [108]). Il semblerait que dans le cas de sollicitations triaxiales, les interactions auraient peu d’influence sur le niveau de pression hydrostatique atteint au sein des particules (variations de quelques pourcents seulement).

Les résultats obtenus ici s’avèreraient donc être relativement exacts en ce qui concerne l’effet des interactions entre particules.

II.E.2.b.ii Considérations liées aux critères d’amorçage de plasticité et de craquelures

La signification des critères d’amorçage de plasticité et de craquelures mis en œuvre

lors des modélisations à l’échelle de la microstructure peut ne pas sembler évidente au premier abord.

Concernant le critère de plasticité, son application est faite au sein d’un VER situé, d’après le calcul « Macro », dans une région déformée plastiquement : l’intérêt d’un tel calcul semble donc limité.

Il est toutefois indispensable de se rappeler que notre étude porte à cette échelle sur les relations existant entre microstructure et phénomènes dissipatifs. Le critère appliqué ici permet donc d’estimer la plasticité engendrée localement du fait de la microstructure du matériau étudié.

Par ailleurs, l’introduction d’un critère d’amorçage de craquelures dans le matériau, alors même que le phénomène est totalement négligé lors des calculs à l’échelle « Macro », semble contradictoire.

Là encore, l’objectif est d’étudier l’influence de la microstructure sur le développement des phénomènes dissipatifs. C’est pourquoi le critère de craquelure est appliqué sur l’interface particule/matrice. De plus, bien que ce phénomène ne se manifeste ici que de façon limitée, l’estimation de la capacité du matériau à développer des craquelures est néanmoins indispensable. En effet de part leur caractère fragilisant, le rôle des craquelures dans la transition Ductile-Fragile est prépondérant.

II.E.3 Travaux expérimentaux

II.E.3.a Considérations liées aux techniques permettant l’identification de f0

La réalisation à température ambiante de coupes microtomes sur certains de nos matériaux ayant subi une propagation de fissure semble à priori problématique.

Tout d’abord ces matériaux sont fragiles. Comportant de grandes quantités de vide, ils sont susceptibles d’être déchirés lors de la coupe ; les cavités pourraient par ailleurs subir des déformations irréversibles.

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De plus, le passage du matériau d’un état « en masse » à un état de « couche mince » induit une relaxation des contraintes non contrôlée d’un état triaxial vers un état plan. Une modification de la porosité de l’échantillon pourrait en résulter.

Il est nécessaire toutefois de signaler l’effet rigidifiant du marqueur RuO4 sur la phase élastomère (réaction chimique du ruthénium sur l’élastomère, Plummer [109]). Cela permet de limiter quelque peu les désagréments qui viennent d’être évoqués, et de diminuer les erreurs d’estimation faites lors de la détermination de f0.

Par ailleurs, deux hypothèses émises lors de la réalisation de l’étude morphologique des images obtenues par MET doivent être vérifiées.

La première concerne l’isotropie du matériau étudié et peut être faite sans problème : la dispersion des nodules de renfort dans notre matrice amorphe s’avère en effet excellente.

La seconde hypothèse est liée à la sphéricité des particules de renfort et doit être vérifiée à l’aide des indices de circularité obtenus lors de cette même étude. La possibilité demeure par ailleurs de comparer les résultats obtenus aux données fournies par Arkema.

II.E.3.b Considérations liées aux tests uniaxiaux mis en oeuvre

En ce qui concerne les tests de traction avec microdécharges partielles, l’hypothèse de déformations transverses isotropes perpendiculairement à l’effort de traction doit impérativement être respectée pour assurer la validité des mesures. Une déformation homogène du matériau est donc indispensable dans la zone étudiée pour toute la durée du test.

Par ailleurs, on a vu qu’un écart d’au moins une décade était nécessaire entre la vitesse de réalisation du test et la vitesse des microdécharges. S’assurer de cet écart permet d’obtenir des mesures non perturbées par la relaxation des contraintes lors des microdécharges. Cela induit toutefois en contrepartie une surestimation légère de la valeur du module mesuré : cette surestimation se répercute par la suite sur les divers résultats obtenus à partir de cette mesure.

La mise en œuvre de tests de traction couplés à des mesures d’intensité LASER

transmise repose sur deux hypothèses qui doivent être validées. D’une part, la taille des cavités générées diffusant la lumière doit être petite par

rapport à la longueur d’onde du faisceau. Ceci peut être vérifié à partir des résultats obtenus lors de l’étape de détermination de f0.

D’autre part, les diffuseurs sont supposés être de géométrie sphérique. Cette hypothèse est très proche de celle faite sur la sphéricité des particules de renfort lors de l’analyse morphologique des images obtenues par MET. Nous proposons de les valider simultanément.

Il convient par ailleurs de signaler que les craquelures éventuellement présentes dans la matrice ne sont pas prises en compte lors de la mesure d’intensité transmise. Ceci est essentiellement dû à leur faible volume, ainsi qu’à leur densité de matière relativement élevée.

Pour finir, il va de soi que la réalisation de tests de compression s’avère délicate, étant donné d’une part la géométrie des éprouvettes à utiliser (II.C.4.b.ii) et d’autre part la forme sous laquelle nous sont fournis les matériaux modèles étudiés (plaques de 3 mm d’épaisseur).

La solution proposée pour palier à ce problème consiste à utiliser une colle spéciale PMMA pour assembler des blocs de matériau dans lesquels sont usinées les éprouvettes. Cette approche est présentée avec les résultats obtenus lors des tests de compression en III.B.3.

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II.E.3.c Considérations liées aux tests CT

Lors de la mise en œuvre de tests CT classiques, la détermination de l’ouverture critique de propagation de fissure est délicate.

Tout d’abord, du fait de l'état de contraintes, le centre de l’éprouvette se trouve être le point de départ de la propagation. Ce point s’avère particulièrement difficile à observer, en raison du blanchiment du matériau. A cela s’ajoute la difficulté de distinguer l’émoussement du fond de la fissure du véritable départ en propagation. Il faut par ailleurs rappeler que l’ouverture critique ne correspond pas à un point particulier de la courbe Force-Ouverture.

Nous avons donc été contraints d’effectuer nos observations en surface d’éprouvette, avec, par conséquent, une surestimation certaine de l’ouverture critique de propagation.

En ce qui concerne le cas des tests CT couplés à des mesures de profilométrie, le temps nécessaire à la polymérisation de la colle époxyde utilisée constitue certainement le principal inconvénient de cette méthode.

Nous nous attendons alors, du fait des relaxations et fluages possibles du matériau, à mesurer des déformations inférieures à celles attendues.

Enfin, un dernier problème touche l’ensemble des tests CT effectués dans cette étude. Les éprouvettes utilisées sont en effet usinées dans les plaques de 3 mm d’épaisseur fournies par Arkema, et leur géométrie (voir Fig. II-19) ne respecte pas les dimensions préconisées8 par la norme ASTM-E1820 [2].

L’état des contraintes en sommet de fissure au centre de ces éprouvettes n’est donc certainement pas purement triaxial, de même que les déformations n’y sont certainement pas purement planes.

Les résultats obtenus par l’éventuelle mise en œuvre de la MELR seraient donc à considérer avec précaution.

8 Voir annexe A.

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II.F Conclusion

La volonté de mieux comprendre la transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère a guidé nos choix tout au long de l’élaboration de la méthodologie de travail présentée dans ce chapitre.

Cette élaboration a été délicate pour plusieurs raisons. La multiplicité des échelles considérées en a été la première : notre étude doit en effet être menée à la fois à l’échelle du sommet de fissure, mais aussi à l’échelle de la microstructure du matériau. La diversité des comportements rencontrés a également généré quelques obstacles à la synthèse de notre approche. Enfin, la nature des champs de vitesses de déformations en sommet de fissure complique la mise en œuvre de certaines des méthodes de modélisation choisies.

De fait, l’utilisation d’une grande variété de techniques, tant expérimentales que de modélisation, s’est imposée, le nombre d’hypothèses à émettre et d’approximations à faire augmentant par la même occasion.

Une détermination en deux étapes des paramètres micromécaniques de premier ordre dans la transition Ductile-Fragile est proposée suivant une stratégie de modélisation dite « Macro-Micro ». Le phénomène de cavitation, en tant que précurseur de la transition, est alors particulièrement considéré.

Une méthode de détermination des champs de contraintes et de déformations à l’échelle du sommet de fissure est proposée, basée sur la MEF et l’utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier. Cette utilisation évite d’avoir à porter de profonds remaniements au modèle. Elle implique cependant des hypothèses lourdes, notamment en ce qui concerne le paramètre f0 ainsi que la gestion de la croissance des cavités par le modèle.

Une méthode de modélisation des phénomènes dissipatifs est élaborée à l’échelle de la microstructure, qui s’articule autour de la méthode l’inclusion d’Eshelby et de critères associés à chacun des phénomènes. Si cette méthode ne permet pas de tenir compte des interactions entre particules de renfort, elle permet toutefois de restituer l’effet de l’endommagement par cavitation sur les autres phénomènes dissipatifs.

La nature et la variété des travaux expérimentaux envisagés sont en adéquation avec

les travaux de modélisation proposés. Plusieurs types de sollicitations mécaniques, uniaxiales ou triaxiales, sont par exemple envisagés pour tester les matériaux modèles utilisés.

Par ailleurs, de par son rôle dans le phénomène de cavitation des particules de renfort, la Tg de l’élastomère guide le choix des conditions expérimentales que l’on propose d’explorer dans cette étude.

Les résultats obtenus lors de la mise en oeuvre de cette méthodologie pour étudier nos matériaux modèles vont maintenant être présentés.

Les résultats (numériques comme expérimentaux) concernant l’étape de modélisation « Macro » seront donnés dans le chapitre III ; ceux concernant l’étape de modélisation « Micro » seront donnés dans le chapitre IV.

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102

[106] S. Braymand, R. Schirrer, C. Fond, Quelques éléments concernant l’accommodation des grandes déformations dans les élastomères chargés, colloque DEPOS XIX, 2004 [107] S. Mguil-Touchal, F. Morestin, M. Brunet, Mesure de champs de déplacements et de déformations par corrélation d’images numériques, Mécamat 96, 1996 [108] L. Scodellaro, Endommagement par cavitation du polypropylène renforcé au choc par des particules d’élastomère, Thèse de Doctorat, 2001 [109] C. J. G. Plummer, Caractérisation des polymères par microscopie électronique, Techniques de l’Ingénieur, AM 3 282

II.G.2 Références non citées H. H. Kausch, Polymer fracture, Springer Verlag 2nde édition étendue et révisée, 1987 D. Broek, The practical use of fracture mechanics, Kluwer academic publishers, 1988 D. Miannay, Mécanique de la rupture, Les éditions de physique, 1995 D. Broek, Elementary engineering fracture mechanics, Sijthoff & Noordhoff, 1978 D. François, A. Pineau, A. Zaoui, Comportement mécanique des matériaux, Hermès, 1993 J. Lemaitre, Handbook of materials behaviour models, Academic Press, 2001 J.P. Trotignon, J. Verdu, A. Dobraczynski, M. Piperaud, Matières plastiques : structures-propriétés, mise en œuvre, normalisation, Nathan, Paris, 1996 C. Fond, Influence of voids on the stress distribution and deformation behaviour of epoxies under uniaxial deformation, Journal of Materials Science, Vol. 33, 1998 J. B. Ferrer, C. Fond, K. Arakawa, K. Takahashi, P. Béguelin, H. H. Kausch, The influence of crack acceleration on the dynamic stress intensity factor during rapid crack propagation, International Journal of Fracture, Vol. 87, 1997 D. Durban, P. Papanastasiou, Singular crack-tip fields for pressure sensitive plastic polymers, International Journal of Fracture, Vol. 119, 2003 C. Grein, Relation entre la structure et les propriétés mécaniques de polypropylènes modifiés choc, Thèse de Doctorat, 2001 C. Fond, Endommagement des polymères « choc » : modélisations micromécaniques et comportements à la rupture, Mémoire de HDR, 2000 G. Teyssedre, C. Lacabanne, Caractérisation des polymères par analyse thermique, Techniques de l’Ingénieur, PE 3 770

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103

III MISE EN ŒUVRE ET RÉSULTATS DE L’ÉTAPE DE MODÉLISATION « MACRO »

III.A Introduction

La mise en œuvre de l’étape de modélisation « Macro » est réalisée conformément à la méthodologie présentée dans le chapitre précédent. Les divers résultats obtenus alors, tant expérimentaux que calculatoires, sont réunis ici. Par ailleurs, des études additionnelles se sont avérées indispensables après la rencontre de certains phénomènes inattendus. Les détails relatifs à ces études, ainsi que leurs résultats, sont également donnés dans ce chapitre.

La première série de travaux présentée ici a pour but l’identification des paramètres du modèle de Rousselier modifié (f0, R(p), A, B, σc, DR), ainsi que l’exploration des propriétés mécaniques des matériaux étudiés.

Une analyse morphologique statistique de l’endommagement en sommet de fissure est réalisée à partir de clichés MET, et divers tests mécaniques en traction, compression et cisaillement sont menés. Plusieurs modélisations numériques accompagnent ces travaux.

Un second ensemble regroupe les travaux, dont la vocation est la validation de notre approche à l’échelle du sommet de fissure.

Des tests sur éprouvettes CT, alliés ou non à des techniques de topographie de surface ou de corrélation d’images sont alors couplés à des modélisations numériques du sommet de fissure à l’aide du modèle de Rousselier.

Enfin, une fois l’approche « Macro » validée, divers profils d’isoplasticité sont retenus : les champs de contraintes et de déformations, nécessaires à la poursuite de l’étude à l’échelle de la microstructure, sont alors extraits.

Les travaux d’identification des paramètres du modèle de Rousselier seront tout d’abord présentés et leurs résultats commentés.

Nous décrirons et commenterons ensuite les résultats des travaux de validation de notre approche à l’échelle du sommet de fissure.

Enfin, les divers profils d’isoplasticité retenus pour l’application de l’étape de modélisation « Micro » seront donnés.

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104

III.B Identification des paramètres du modèle de Rousselier

III.B.1 Analyse morphologique statistique d’images MET

III.B.1.a Généralités sur l’analyse morphologique statistique d’images MET

L’objectif de ces travaux est la caractérisation de l’endommagement de nos matériaux en sommet de fissure afin d’estimer la porosité engendrée lors de la phase d’expansion des cavités.

Obtenue en suivant le protocole présenté en II.C.3, cette valeur est alors associée au paramètre f0 du modèle de Rousselier.

III.B.1.b Coupes microtomes et observations au MET

Des coupes microtomes d’environ 100 nm d’épaisseur sont réalisées à température ambiante sur des éprouvettes fissurées de EI50 MPD1 et EI50 MPD2 par B. Pouchan-Lahorre, Arkema GRL.

Des clichés en 256 niveaux de gris sont réalisés au MET en divers points autour du sommet de fissure après contrastage au RuO4. Le PMMA et les cavités y apparaissent en blanc, tandis que la phase élastomère et les craquelures dans la matrice se distinguent en noir.

Le cliché ci-dessous (Fig. III-1) illustre le développement limité, dans les matériaux étudiés, de la structure fibrillaire habituellement observée en sommet de fissure. La matrice ne présente qu’un nombre restreint de cavités (flèches blanches) et de fibrilles (flèches noires), ce qui souligne sa forte capacité à s’écouler plastiquement.

Fig. III-1 Sommet de fissure (EI50 MPD1) : structure fibrillaire en fond de fissure (les flèches

noires indiquent les fibrilles ; les blanches les cavités dans la matrice).

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105

Le cliché ci-dessous (Fig. III-2) est un détail du précédent, pris en avant du sommet de fissure : on peut y observer deux craquelures dans la matrice (flèches blanches).

Fig. III-2 Sommet de fissure (EI50 MPD1) : détail de la microstructure en avant du sommet de fissure (les flèches blanches indiquent les craquelures dans la matrice).

D’une façon générale, la matrice présente un très faible nombre de craquelures, tandis

que le phénomène de cavitation dans l’élastomère se produit de manière particulièrement intense. Par ailleurs, les craquelures observées sont le plus souvent « bloquées » aux extrémités par les particules de renfort. On retrouve ici le double rôle d’amorceur et d’obstacle à la propagation des craquelures joué par les particules de renfort.

Ces observations semblent donc corroborer nos hypothèses concernant l’importance relative des divers phénomènes dissipatifs en sommet de fissures.

III.B.1.c Traitement des images MET numérisées

Réalisé à l’aide du logiciel ImageJ, le traitement a pour but de séparer les différentes phases de la microstructure observée.

La qualité de la numérisation et la nature même des clichés rendent impossible ce travail dans le cas du EI50 MPD2 (définition des images trop faible). L’étude est donc poursuivie uniquement à partir des clichés obtenus sur les éprouvettes de EI50 MPD1.

L’exemple présenté ci-après (Fig. III-3) illustre le travail réalisé sur une de ces éprouvettes. Les quatre phases suivantes sont distinguées :

Noyaux PMMA des particules : contours en bleu. Phase élastomère des particules : contours en rouge. Cavités dans la phase élastomère des particules : contours en jaune. Matrice PMMA (incluant la couche C des particules en PMMA) : contours en vert,

dont la réalisation du seuillage s’avère particulièrement délicate.

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106

Fig. III-3 Séparation des phases sur cliché MET numérisé : noyaux PMMA en bleu, cavités dans la phase élastomère en jaune, phase élastomère en rouge, matrice PMMA en vert.

III.B.1.d Morphométrie et stéréologie des images binaires

La figure ci-dessous (Fig. III-4) donne deux exemples d’images binaires obtenues à

partir du cliché précédent (Fig. III-3) :

Fig. III-4 Images binaires obtenues après traitement de cliché MET. A gauche : cavités dans la phase élastomère. A droite : noyaux PMMA des particules. Le décompte des pixels compris dans chaque phase permet de caractériser les fractions

volumiques pour chacune d’elles (Tab. III-1).

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Analyse statistique morphométrique Ratios visés à la

synthèse (% vol.) Ratios avec cavitation (% vol.)

Ratios hors cavitation (% vol.)

Matrice PMMA 76.2 64.9 68 Noyaux PMMA 10.4 9.9 10.4

Elastomère 13.4 20.6 21.6 Cavités 0.0 4.6 0.0

Tab. III-1 Analyse morphométrique : résultats de caractérisation des fractions surfaciques. La couche C des particules, en PMMA, est considérée comme faisant partie de la matrice.

Les fractions volumiques des diverses phases sont correctement retrouvées, à

l’exception de l’élastomère. La surestimation constatée (21.6 % contre 13.4 %) est probablement liée aux difficultés rencontrées lors de la réalisation du seuillage. On mesure par ailleurs une porosité conséquente, de l’ordre de quelques pourcents.

Une caractérisation de la forme des différentes phases observées est ensuite réalisée. Les objets coupant la fenêtre d’observation sont éliminés afin de ne pas fausser les résultats de l’analyse, tandis que les contours des objets restants sont approximés par des ellipses (Fig. III-5). L’indice de circularité Icirc est utilisé pour caractériser la nature des formes obtenues.

Fig. III-5 Approximation des contours des phases des images binaires par des ellipses. A gauche : cavités dans la phase élastomère. A droite : noyaux PMMA des particules.

Une analyse statistique est menée : couplée à l’échelle fournie sur les clichés, elle

permet de déterminer les rayons apparents moyens donnés ci-dessous (Tab. III-2).

Analyse statistique morphométrique Rayon apparent

moyen (nm) Icirc moyen

Noyaux PMMA 80 0.76 Elastomère 115 0.77

Cavités 18 0.72

Tab. III-2 Analyse morphométrique : résultats de caractérisation de la forme des phases.

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108

Il apparaît possible ici d’émettre les deux hypothèses permettant le passage vers une analyse stéréologique du matériau étudié.

D’une part, l’homogénéité du matériau est vérifiée sur les nombreux clichés pris autour du sommet de fissure. D’autre part, du fait des indices de circularité moyens mesurés, il semble possible de considérer en première approximation que la géométrie des phases étudiées est sphérique.

Des estimations approchées des divers rayons vrais moyens (Tab. III-3) peuvent donc être calculées à partir des rayons apparents moyens et de l’équation (29).

Rayon vrai moyen mesuré (nm)

Noyaux PMMA 102 Elastomère 146

Cavités 23

Tab. III-3 Analyse stéréologique : rayons vrais moyens mesurés.

Un excellent accord est obtenu sur l’estimation du rayon des noyaux des particules et l’épaisseur de la couche d’élastomère semble bien évaluée.

Par ailleurs, le diamètre moyen des cavités mesuré (46 nm) est très proche de cette épaisseur (44 nm) : ceci semble en accord avec l’idée d’un effet de confinement au moins partiel des cavités dans la couche d’élastomère.

III.B.1.e Représentativité des zones analysées

L’objectif est ici de vérifier que la taille des clichés analysés est suffisante pour pouvoir les considérer, indépendamment les uns des autres, comme représentatifs de la microstructure observée.

A ces fins, nous étudions, pour tous les clichés, la covariance statistique à deux points de chacune des phases (voir II.C.3.c).

Le spectre de puissance de chaque image binaire est d’abord calculé par transformée de Fourrier, puis est élevé au carré. La transformée inverse de Fourrier est ensuite appliquée : on aboutit ainsi à l’image de la covariance. On extrait pour finir le covariogramme le long du profil horizontal allant du centre au bord de cette image (courbe Niveau de Gris – Distance).

Pour un cliché suffisamment étendu pour être représentatif de la microstructure, le covariogramme converge, lorsque la distance au centre de l’image augmente, vers le carré de la fraction surfacique de la phase considérée.

La figure ci-après (Fig. III-6) montre l’image de la covariance et le covariogramme calculés pour l’image binaire associée aux noyaux PMMA donnée précédemment (Fig. III-4 à droite). On y observe clairement, comme pour tous les autres clichés, la non convergence du covariogramme aux grandes distances.

Indépendamment les uns des autres, les clichés analysés s’avèrent par conséquent non représentatifs de la microstructure étudiée. Toutefois, les résultats présentés jusqu’ici - des moyennes pondérées obtenues à partir de l’ensemble des clichés - restent valables et sont en bon accord avec les données de synthèse.

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109

Fig. III-6 Détermination du covariogramme de l’image binaire donnée en Fig. III-4 à droite.

A gauche : image de la covariance. A droite : covariogramme le long du profil (en blanc).

III.B.1.f Identification du paramètre f0

Deux hypothèses s’avèrent nécessaires pour permettre l’identification du paramètre f0. La première permet d’étendre les modélisations à des matériaux comportant des taux

de renfort différents de celui étudié ici. Elle consiste à assumer, en première approximation, que le volume de porosité développé est relié proportionnellement au volume d’élastomère introduit dans la matrice.

La seconde est rendue nécessaire par le choix fait en II.D.3.f de focaliser notre étude sur les matériaux renforcés par des particules MPD2, alors que seul le traitement du EI50 MPD1 est possible ici. On considère alors que les élastomères des particules MPD1 et MPD2 disposent de la même capacité à développer un volume poreux, tout autre paramètre étant égal par ailleurs.

Dans le cas du EI50 MPD1, la porosité développée correspond approximativement au

quart du volume d’élastomère. En se basant sur cette proportion, ainsi que sur les deux hypothèses précédentes, on aboutit aux valeurs de f0 rassemblées ci-dessous (Tab. III-4) :

EI25 MPD2 EI50 MPD2 EI60 MPD2 f0 (%) 1.93 2.68 3.45

Tab. III-4 Valeurs de f0 calculées pour les différents matériaux renforcés MPD2.

Ces deux hypothèses constituent des approximations grossières, et sont donc sources

inévitables d’erreurs de modélisation. Seule une étude morphologique complète des matériaux renforcés MPD2 serait susceptible de remédier à ce problème.

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III.B.2 Tests en traction uniaxiale et modélisations associées

III.B.2.a Généralités sur les tests de traction uniaxiale réalisés

L’objectif de ces tests, réalisés sur une machine Instron 4500 pilotée par ordinateur, est triple. Ils nous permettent d’explorer les propriétés mécaniques des matériaux étudiés, d’identifier les paramètres du modèle de Rousselier et de déterminer la contrainte hydrostatique critique de cavitation σhc de l’élastomère des particules de renfort (les résultats relatifs à cette détermination sont donnés plus loin en IV.C).

Les essais sont réalisés selon le protocole présenté en II.C.4.a, dans les conditions de

vitesse de déformation vraie et de température imposées déterminées en II.D.3.f. Les matériaux testés sont le EI0 (matrice pure), ainsi que les trois matériaux renforcés MPD2 (des températures supplémentaires ont été ajoutées pour affiner notre analyse dans le cas du EI60).

III.B.2.b Résultats expérimentaux

La transition Ductile-Fragile en traction de nos matériaux est clairement identifiée : la figure ci-dessous (Fig. III-7) illustre le cas du EI60 MPD2 en traction à 10-3 s-1.

Le seuil plastique, encore clairement visible à - 10 °C, disparaît totalement à -20 °C lorsque la Tg de l’élastomère est atteinte. On comprend ici l’importance du choix, parmi deux élastomères de renfort, de celui dont la Tg est la plus basse, même si l’écart à ce niveau n’est que de quelques degrés (cas des élastomères MPD1 et MPD2).

EI60 MPD2 10-3 s-1

0

20

40

60

80

100

0 5 10 15 20Déformation vraie (%)

Con

train

te v

raie

(MPa

)

0

2

4

6

8

10En

ergi

e (M

J/m

3 ) 30 °C20 °C10 °C0 °C-10 °C-20 °C-30 °C- 40 °C

Fig. III-7 Tests de traction uniaxiale (EI60 MPD2 10-3 s-1) : contrainte vraie en traits continus, énergie dissipée en pointillés.

Les effets de l’introduction de quantités variables de particules de renfort dans la

matrice amorphe sont illustrés ci-après (Fig. III-8) à 30 °C et 10-3 s-1.

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La raideur du matériau diminue fortement avec l’augmentation de la quantité d’élastomère introduite. On observe jusqu’à 40 % de perte de module dans le cas du EI60 MPD2 (13.8 % vol. d’élastomère) par rapport à la matrice PMMA pure.

En contrepartie de cette chute de module, une ductilité du matériau va croissante : le seuil de plasticité en contrainte diminue et le développement du phénomène de cavitation est plus progressif. D’une façon plus générale, la transition Ductile-Fragile du matériau est repoussée vers les basses températures et vitesses de sollicitation élevées lorsque la quantité de nodules mise en jeu augmente.

30°C 10-3 s-1

0

20

40

60

80

100

0 5 10 15 20

Déformation vraie (%)

Cont

rain

te v

raie

(MP

a)

-5

-4

-3

-2

-1

0

Inte

nsité

LA

SER

EI0EI25 MPD2EI50 MPD2EI60 MPD2

Fig. III-8 Tests de traction uniaxiale (30 °C 10-3 s-1) : contrainte vraie en traits continus, intensité LASER transmise en pointillés.

Les variations de volume observées grâce à la méthode des microdécharges partielles

rapides peuvent atteindre des valeurs de l’ordre de 10 % dans certains cas. La figure ci-après (Fig. III-9) donne les variations du volume total et inélastique du EI50 MPD2 à 30 °C en fonction de la vitesse de sollicitation.

L’allure des courbes obtenues varie de manière similaire aux courbes de transmission d’intensité LASER en fonction de la température, de la vitesse de sollicitation et de la quantité de renfort. Plus le comportement du matériau renforcé est ductile, plus le développement des cavités et l’augmentation de volume se font progressivement au cours de la déformation.

On observe généralement trois phases durant la variation de volume de l’échantillon : Première phase : augmentation élastique du volume tant que le seuil de plasticité

du matériau n’est pas atteint. Seconde phase : apparition progressive du phénomène de cavitation à volume

constant (à la précision de mesure près). Phase plus ou moins étendue en fonction du matériau et des conditions expérimentales.

Troisième phase : augmentation de volume liée à la croissance plastique des cavités.

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EI50 MPD2 30°C

-1

0

1

2

3

4

5

0 5 10 15 20Déformation vraie (%)

Var

iatio

n de

vol

ume

(%)

4.10-3 s-11.10-3 s-11.10-4 s-1

Fig. III-9 Tests de traction uniaxiale (EI50 MPD2 30 °C) : volume total en traits continus, volume inélastique en pointillés.

Les évolutions du module d’Young et de l’endommagement peuvent également être

obtenues au cours des essais par la méthode des microdécharges partielles rapides. La figure ci-après (Fig. III-10), qui illustre le cas du EI25 MPD2 à 10-4 s-1, est

représentative des résultats obtenus, et appelle quelques commentaires. Nous rappelons tout d’abord la remarque faite en II.E.3.b soulignant les conséquences

de l’écart de vitesse existant entre le test de traction à proprement parler et les microdécharges permettant la mesure de module.

La chute de module d’Young et l’augmentation de l’endommagement mesurées lors de la phase de réponse élastique du matériau peuvent, au premier abord, paraître surprenantes. On peut envisager ici un effet du coefficient de Poisson. Celui étant en effet différent de 0.5 pour les matériaux étudiés, il serait à l’origine de cette chute du module apparent mesuré. Cet effet pourrait par ailleurs être conjugué à un rajeunissement du matériau sous la contrainte.

Les résultats obtenus au-delà du seuil de plasticité sont également sujets à réflexion. En effet, alors que sont attendues la chute du module et l’augmentation de l’endommagement, ce sont des tendances opposées qui sont mesurées. L’explication est alors probablement liée à un rhéodurcissement du matériau par alignement des bandes de cisaillement engendrées dans la matrice après cavitation.

Pour finir, les valeurs de coefficient de Poisson déterminées par l’équation (33) à partir des résultats précédents montrent de faibles variations en fonction des matériaux et des conditions expérimentales (de 0.28 à 0.36).

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EI25 MPD2 10-4 s-1

0

1

2

3

4

5

6

7

8

0 5 10 15 20Déformation vraie (%)

E (G

pa)

0,00

0,05

0,10

0,15

0,20

Endo

mm

agem

ent D

30 °C10 °C-10 °C-30 °C

Fig. III-10 Tests de traction uniaxiale (EI25 MPD2 10-4 s-1) : module d’Young en traits continus, endommagement D en pointillés.

III.B.2.c Identification des paramètres du modèle de Rousselier

La MEF et le modèle de Rousselier sont mis en oeuvre suivant l’approche « Macro »

présentée en II.B.2.b pour modéliser les tests de traction réalisés et identifier les paramètres du modèle de Rousselier R(p), A, B, σc et DR.

Divers champs sont calculés (déformations, contraintes, variations de volumes, etc.) puis intégrés sur le volume de l’éprouvette. Les évolutions de la contrainte vraie, de la déformation vraie, et des variations de volume total et inélastique sont alors obtenues.

La courbe R(p) est déterminée par correction de la courbe expérimentale Contrainte vraie–Déformation vraie à l’aide des paramètres A et B. Ceux-ci sont identifiés de manière à obtenir une courbe Contrainte vraie-Déformation vraie modélisée la plus proche possible de la courbe expérimentale. σc étant considérée égale au seuil de plasticité de la courbe R(p), elle est donc identifiée simultanément.

Le paramètre DR est lui identifié, en fonction des matériaux et des conditions expérimentales, à partir des courbes expérimentales de variation de volumes total et inélastique.

On rappelle que pour chaque matériau, la valeur du paramètre f0 a été déterminée en III.B.1.f. Selon l’hypothèse émise en II.E.2.a.i, nous considérons ce paramètre indépendant de la vitesse de sollicitation et de la température dans notre étude.

Enfin, la taille caractéristique des éléments lc est ici de l’ordre de 750 µm. Les propriétés de symétrie des éprouvettes nous permettent par ailleurs de réduire les maillages utilisés à un huitième de la géométrie : les temps de calcul sont ainsi diminués.

Comme cela a été prévu en II.E.2.a.i, de graves problèmes de convergence des calculs émaillent ces modélisations, en particulier lorsqu’une apparition conséquente et rapide de porosité est favorisée dans le matériau. On observe très probablement ici les conséquences des

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choix méthodologiques faits durant la mise en œuvre circonstanciée du modèle de Rousselier : hypothèses grossières et approximations concernant f0 ; gestion inappropriée de la croissance des cavités.

Le nombre restreint de modélisations menées à terme implique que seul un nombre limité de jeux de paramètres peut être identifié. Ceci constitue évidemment un lourd handicap pour la poursuite de étude.

La figure ci-dessous (Fig. III-11), qui regroupe quelques résultats obtenus pour le EI60 MPD2 à 30 °C et 4.10-3 s-1, est représentative des modélisations abouties.

EI60 MPD2 30°C 4.10-3 s-1

0

10

20

30

40

50

0 5 10 15 20Déformation vraie (%)

Con

trai

nte

vrai

e (M

Pa)

0

1

2

3

4

5

Volu

me

(%)

Contrainte vraie Volume total Volume inélastique

Contrainte équivalente de

von Mises à 20 % de déformation

100 MPa

0 MPa

Fig. III-11 Modélisation des tests de traction (EI60 MPD2 30 °C 4.10-3 s-1) : résultats expérimentaux en traits continus, résultats numériques en pointillés.

La face avant du maillage correspond au plan central de l’éprouvette.

Si un excellent accord est obtenu au niveau de la courbe Contrainte vraie-Déformation vraie, les résultats sont toutefois moins bons du point de vue de la variation de volume, tout particulièrement en ce qui concerne la variation de volume inélastique.

Celle-ci est d’une part surestimée globalement dans l’éprouvette, d’environ 0.25 %. De plus, la progressivité du développement du phénomène de cavitation dans le matériau réel semble mal restituée. Ainsi, dans les conditions les plus propices à cette progressivité (vitesse de déformation faible, température élevée, matrice fortement renforcée), on peut observer un très fort écart entre les variations inélastiques mesurées et calculées (jusqu’à 0.5 %).

Les effets d’une gestion mal adaptée de la porosité et de sa croissance sont ici clairement visibles, avec, en particulier, une croissance immédiate des cavités dès le début de la sollicitation.

Le tableau ci-après (Tab. III-5) regroupe les différents jeux de paramètres identifiés en fonction du matériau, de la vitesse de déformation et de la température.

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T (°C) Vitesse de

déformation (s-1)

σc (MPa) f0 DR fc

A (MPa) B

EI25 MPD2 30 1.10-4 51,74 0,0193 2,40 10 1,12 1.10-4 42,66 1,85 0 1,13 EI50 MPD2 30 1.10-3 51,27

0,02683,30 30 1,11

1.10-4 34,91 0,20 0 1,00 1.10-3 47,38 1,40 0 1,13 30 4.10-3 48,65 2,85 35 1,12

EI60 MPD2

10 1.10-4 56,19

0,0345

2,55

1,0

30 1,13

Tab. III-5 Jeux de paramètres identifiés du modèle de Rousselier.

Afin d’augmenter le nombre de jeux de paramètres à notre disposition pour la suite de l’étude, des efforts sont faits pour s’affranchir du problème de convergence des calculs.

Des tentatives d’extrapolation des valeurs des paramètres sont réalisées, mais se révèlent peu fructueuses, du fait du nombre limité de valeurs identifiées à notre disposition.

Les seuls résultats notables, présentés ci-dessous (Fig. III-12), concerne les paramètres DR et σc. En effet, ces paramètres, liés à la croissance des cavités, semblent présenter une croissance logarithmique avec la vitesse de déformation. Une telle évolution est généralement caractéristique des matériaux polymères.

EI60 MPD2 30°C

0

20

40

60

80

100

1,E-04 1,E-03 1,E-02 1,E-01 1,E+00Vitesse de déformation (s-1)

σc (

MP

a)

0

2

4

6

8

10

D R

σc

DR

Fig. III-12 Extrapolation des paramètres DR et σc aux hautes vitesses de sollicitation (EI60 MPD2 30 °C).

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116

III.B.3 Tests en compression uniaxiale et modélisations associées

III.B.3.a Généralités sur les tests de compression uniaxiale réalisés

L’objectif de ces tests, réalisés sur une machine Instron 4500 pilotée par ordinateur, est double. Ils nous permettent d’explorer d’une part les propriétés mécaniques des matériaux étudiés ; ils nous donnent également l’occasion de vérifier que notre utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier est valable en compression.

Les essais sont réalisés selon le protocole présenté en II.C.4.b, dans les conditions de vitesse de déformation vraie et de température imposées déterminées en II.D.3.f. Les matériaux testés sont le EI0 (matrice pure), ainsi que les trois matériaux renforcés MPD2.

Ces matériaux nous étant fournis sous forme de plaques de 3 mm d’épaisseur, l’obtention d’éprouvettes aux dimensions requises (hauteur : 12.5 mm, diamètre : 5 mm) s’avère problématique.

La solution mise en œuvre consiste à assembler des blocs de PMMA par collage, puis à usiner les éprouvettes dans leur masse (les plans d’encollage étant perpendiculaires à la hauteur de l’éprouvette). Notre choix s’est porté, après divers essais, sur une colle PMMA bicomposante, plus proche des matériaux étudiés.

L’épaisseur de colle entre deux plaques étant estimée à 100 µm, et chaque éprouvette présentant quatre couches d’encollage, le volume de colle appliquée reste limité (environ 3 % du volume total de l’éprouvette). Nous supposons donc, dans un premier temps, que la présence de la colle ne modifie pas outre mesure la réponse en compression du matériau.

III.B.3.b Résultats expérimentaux

Lors de la plupart des essais, la géométrie en « tonneau », liée aux effets de frottement au niveau des mors et évoquée en II.C.4.b.ii, est observée (Fig. III-13).

Fig. III-13 Eprouvette de compression (EI50 MPD2 30 °C 10-3 s-1) : déformation en tonneau caractéristique.

Les courbes Contrainte vraie-Déformation vraie obtenues permettent de compléter les

diagrammes déterminés en traction, comme l’illustre la figure ci-après (Fig. III-14).

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30°C 10-4 s-1

-100

-50

0

50

100

-20 -15 -10 -5 0 5 10 15 20

Déformation vraie (%)

Cont

rain

te v

raie

(MP

a)

EI0EI25 MPD2EI50 MPD2EI60 MPD2

Fig. III-14 Tests de traction et compression uniaxiale (30 °C 10-4 s-1).

Les chutes du module et du seuil de plasticité avec l’augmentation de la quantité de nodules introduits dans la matrice sont à nouveau observées.

Par ailleurs, le rapport du seuil de plasticité en compression au seuil de plasticité en traction semble varier entre 1.15 et 1.5 en fonction des conditions expérimentales. Ce rapport, qui traduit la sensibilité de l’écoulement plastique à la pression hydrostatique, semblerait croître lorsque la température de l’essai diminue. Toutefois, aucune sensibilité à la vitesse de sollicitation n’est observée.

Le phénomène de cavitation ne se manifeste pas durant ces essais : la nature même de la contrainte appliquée empêche effectivement l’élastomère de caviter ; la déformation de l’éprouvette se fait en plasticité à volume constant.

Cette incapacité de l’élastomère à caviter implique de facto l’absence de tout renforcement « choc » en compression. C’est pourquoi aucune transition comportementale n’est observée au passage de la Tg de l’élastomère.

Toutefois, certains résultats inattendus sont observés : ils nécessitent quelques travaux d’éclaircissement, dont les résultats seront présentés plus loin. Il s’agit d’une part de quelques cas d’observations de déformations inhomogènes en « bourrelets », et d’autres part de rares cas d’apparitions de fissures et de déformations localisées aux extrémités des éprouvettes.

III.B.3.c Modélisation des essais de compression

La MEF et le modèle de Rousselier sont mis en oeuvre suivant l’approche « Macro » présentée en II.B.2.b pour modéliser les tests de compression réalisés.

Les paramètres du modèle utilisés sont ceux déterminés par analyse morphologique de l’endommagement et tests de traction. La taille caractéristique des éléments lc est ici de l’ordre de 400 µm. Les maillages utilisés correspondent à un huitième de la géométrie afin de diminuer les temps de calcul.

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Lors de ces modélisations, divers champs et évolutions sont calculés ; les courbes Contrainte vraie-Déformation vraie obtenues sont comparées aux courbes expérimentales afin de vérifier que notre utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier fonctionne pour ce type de sollicitation.

La figure ci-dessous (Fig. III-15), qui regroupe quelques résultats obtenus pour le EI60 MPD2 à 30 °C et 10-4 s-1, est représentative de ces modélisations.

EI60 MPD2 30°C 10-4 s-1

-50

-40

-30

-20

-10

0

-20 -15 -10 -5 0Déformation vraie (%)

Con

train

te v

raie

(MPa

)

Contrainte équivalente

de von Mises à 20 % de

déformation

350 MPa

0 MPa

Fig. III-15 Modélisation des tests de compression (EI60 MPD2 30 °C 10-4 s-1) : courbe expérimentale en trait continu, courbe calculée en pointillés.

Les accords obtenus entre calculs numériques et expérimentations sont excellents.

D’une part les courbes de contraintes vraies sont parfaitement modélisées. D’autre part on retrouve la localisation de plus en plus prononcée des déformations au centre des éprouvettes lorsque le seuil d’écoulement du matériau augmente.

III.B.3.d Déformations inhomogènes en « bourrelets » L’utilisation d’une colle pour assembler les plaques en blocs nous permet de réaliser

les éprouvettes de compression. Lors de quelques essais (vitesses de déformation basses et températures élevées), des

déformations inhomogènes en forme de « bourrelets » apparaissent au niveau des plans d’encollage : le cas observé le plus conséquent est présenté ci-après (Fig. III-16 à gauche). De telles déformations sont vraisemblablement dues à une modification du matériau par la colle (plastification) sur une zone plus importante que celle envisagée initialement.

Il est alors nécessaire de vérifier que les mesures expérimentales ne sont pas faussées outre mesure par ce phénomène. Les profils des éprouvettes incriminées sont tout d’abord étudiés au microscope : une estimation de la section des « bourrelets » est faite par un découpage en triangles (Fig. III-16 à droite). Après calcul de la circonférence des éprouvettes, les volumes mis en cause sont déterminés, afin d’estimer les erreurs de mesure engendrées.

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Les faibles valeurs obtenues (erreur de 4 % au plus sur la déformation longitudinale) permettent de conclure quand à la validité des mesures effectuées.

Fig. III-16 Déformations inhomogènes en compression au niveau des plans d’encollage : A gauche : « bourrelets ». A droite : estimation de la section des « bourrelets ».

III.B.3.e Fissures et localisation des déformations aux extrémités des éprouvettes

Les éprouvettes utilisées sont usinées à la fraiseuse numérique, afin de nous assurer de

leur parfaite géométrie. Lors des essais correspondant, du point de vue comportemental, aux matériaux étudiés

les plus « fragiles » (EI0, -30 °C, 10-3 et 4.10-3 s-1), la localisation des déformations ainsi que des fissures sont observées aux extrémités des éprouvettes (Fig. III-17 à gauche).

Fig. III-17 Fissures et localisation des déformations aux extrémités des éprouvettes : A gauche : fissures. A droite : détail de l’usinage (chanfrein à la base de l’éprouvette).

Ces phénomènes semblent trouver leur origine dans la finition de l’usinage des

éprouvettes, notamment au niveau du léger chanfrein parfois réalisé afin d’éliminer des barbelures résiduelles (Fig. III-17 à droite).

Des modélisations prenant en compte ce chanfrein aboutissent d’une part aux fortes localisations des déformations observées aux extrémités des éprouvettes, et d’autre part à une contrainte hydrostatique positive élevée au niveau de l’arrête du chanfrein.

Une telle association pourrait être à l’origine de l’apparition de craquelures dans cette matrice non renforcée (on rappelle ici l’expression du paramètre d’amorçage de craquelures de Bowden et Oxborough donné en II.B.2.c.iv). De telles craquelures, inenvisageables en compression pure, seraient ici génératrices des fissures observées.

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III.B.4 Tests en cisaillement uniaxial et modélisations associées

III.B.4.a Généralités sur les tests de cisaillement uniaxial réalisés

L’objectif de ces tests, réalisés sur une machine Instron 4500 pilotée par ordinateur, est double. Ils nous permettent d’explorer les propriétés mécaniques des matériaux étudiés et nous donnent également l’occasion de vérifier que notre utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier est valable en cisaillement.

Les essais sont réalisés selon le protocole présenté en II.C.4.c, dans les conditions de vitesse de déformation vraie et de température imposées déterminées en II.D.3.f. Les matériaux testés sont le EI0 (matrice pure), ainsi que les trois matériaux renforcés MPD2.

L’éprouvette étant maintenue verticalement dans la machine par un système de mors volumineux, la mise en place ainsi que le maintien en position du capteur de déplacement durant le test sont délicats.

Une fenêtre aménagée dans les mors permet de « piquer » les pointes du capteur à la surface de l’éprouvette. Par ailleurs, un support suspendu par câble au niveau de l’éprouvette permet de plaquer le capteur contre celle-ci par un système de ressorts.

Le capteur mesure le différentiel de déplacement entre deux points situés de part et d’autre d’une bande centrale de largeur 5 mm (on rappelle le schéma de l’éprouvette donné en II.C.4.c.ii). En première approximation les déformations en cisaillement sont supposées homogènes sur la largeur de cette bande.

III.B.4.b Résultats expérimentaux

Comme on peut le voir ci-dessous (Fig. III-18), les essais réalisés mettent en évidence de façon inattendue le phénomène de cavitation en cisaillement.

L’écart de près de trois décades qui sépare le module de cisaillement de la matrice de celui de l’élastomère devrait rendre celui-ci insensible à une telle sollicitation. Pourtant, le blanchiment du matériau est observé au dessus de la Tg de l’élastomère, lorsque les conditions expérimentales et les quantités de renfort permettent à la matrice d’atteindre un seuil de plasticité suffisamment élevé.

Fig. III-18 tests de cisaillement (EI60 MPD2 10-3 s-1) : apparition du phénomène de cavitation en fonction de la température.

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Les courbes Contrainte-Déformation vraie témoignent d’un véritable effet de renfort « choc », ainsi que d’une transition Ductile-Fragile marquée à l’approche de la Tg de l’élastomère : la figure ci-dessous illustre le cas du EI60 MPD2 à 4.10-3 s-1 (Fig. III-19).

EI60 MPD2 4.10-3 s-1

0

10

20

30

40

50

60

0 5 10 15 20

Déformation vraie (%)

Cont

rain

te (M

Pa)

30 °C10 °C-10 °C-30 °C

Fig. III-19 Tests de cisaillement uniaxial (EI60 MPD2 4.10-3 s-1).

On observe par ailleurs, comme en traction et en compression, une diminution du seuil de plasticité et du module du matériau avec l’introduction d’élastomère dans la matrice.

III.B.4.c Modélisation des essais de cisaillement

La MEF et le modèle de Rousselier sont mis en oeuvre suivant l’approche « Macro » présentée en II.B.2.b pour modéliser les tests de cisaillement réalisés.

Les paramètres du modèle utilisés sont ceux déterminés par analyse morphologique de l’endommagement et tests de traction.

Seule la bande centrale de l’éprouvette est modélisée ici. La taille caractéristique des éléments lc est de l’ordre de 625 µm et la moitié de la géométrie est maillée.

Lors de ces modélisations, divers champs et évolutions sont calculés. Les courbes Contrainte vraie-Déformation vraie obtenues sont comparées aux courbes expérimentales afin de vérifier que notre utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier fonctionne en cisaillement.

La figure ci-après (Fig. III-20), qui regroupe quelques résultats obtenus pour le EI50 MPD2 à 30 °C et 10-4 s-1, est représentative de ces modélisations.

Un bon accord est obtenu en ce qui concerne les courbes Contrainte-Déformation vraie. Cependant, les champs de variation de volume inélastique et de contrainte hydrostatique calculés sont nuls. Aucune croissance de cavités ne semble prédite.

Ceci ne correspondant pas à la réalité des essais effectués, nous nous sommes interrogés sur les origines du phénomène de cavitation observé ici.

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EI50 MPD2 30°C 10-4 s-1

0

5

10

15

20

25

30

0 5 10 15 20Déformation vraie (%)

Cont

rain

te (M

Pa)

Contrainte équivalente

de von Mises à 20 % de

déformation

100 MPa

0 MPa

Fig. III-20 Modélisation des tests de cisaillement (EI50 MPD2 30 °C 10-4 s-1) : courbe expérimentale en trait continu, courbe calculée en pointillés.

La face avant du maillage correspond au plan central de l’éprouvette.

III.B.4.d Cavitation des particules de renfort

III.B.4.d.i Cavitation des particules Cœur-Ecorce : approche macroscopique

L’explication envisagée initialement est l’introduction de contraintes parasites dans le

chargement, au niveau du système de fixation de l’éprouvette. La géométrie des zones blanchies observées n’est en effet pas celle attendue pour une

application homogène des efforts par les deux bandes de matériau prises dans les mors (Fig. III-18). Au contraire, une application localisée au niveau des trous, avec les vis de fixation jouant le rôle de goupilles, semble se produire au moins partiellement.

La modélisation des tests de cisaillement est tout d’abord réitérée avec un maillage plus élaboré, prenant cette fois en compte un système de chargement par trous et goupilles (pas de serrage). Seule une moitié d’éprouvette est maillée, avec une taille caractéristique des éléments lc de l’ordre de 1 mm.

La figure suivante (Fig. III-21), représentative des divers résultats obtenus, illustre le cas du EI60 MPD2 à 30 °C 10-3 s-1 pour un déplacement différentiel imposé de 4 mm. D’une façon générale, des localisations des déformations sont observées. Importantes entres trous d’un même côté d’éprouvette, elles sont plus faibles, mais non négligeables, entre trous situés de part et d’autre de l’éprouvette. Par ailleurs, dans la bande centrale où est observé le blanchiment, le volume du matériau semble n’augmenter que faiblement de manière inélastique, et la contrainte hydrostatique calculée est nulle.

Ces résultats semblent donc indiquer que le phénomène de cavitation observé dans notre étude ne trouve pas son origine dans un problème de fixation de l’éprouvette.

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Fig. III-21 Modélisation étendue des tests de cisaillement (EI60 MPD2 30 °C 10-3 s-1 déplacement différentiel 4 mm).

La face avant du maillage correspond au plan central de l’éprouvette.

De nouveaux travaux expérimentaux sont alors mis en œuvre, avec pour objectif la réalisation de tests de cisaillement affranchis de tout phénomène éventuel de localisation au niveau des trous de fixation.

Pour ce faire, des éprouvettes spéciales sont usinées dans des blocs assemblés, comme lors des tests de compression, par encollage de plaques de matériau (Fig. III-22).

Fig. III-22 Géométrie des éprouvettes de cisaillement permettant de s’affranchir des phénomènes de localisation au niveau des trous de fixation.

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La conjugaison des deux bandes latérales épaisses (9 mm) avec l’étroite et fine bande centrale (5 mm par 1 mm) permet d’éliminer les concentrations de contraintes non voulues. Une attention toute particulière est portée lors de l’usinage de la bande centrale, afin de s’assurer que le matériau qui la constitue n’est pas modifié par la colle.

Les courbes Contrainte-Déformation vraie obtenues à l’aide de ces éprouvettes sont en tous points semblables à celles obtenues précédemment. De plus, comme on peut le voir ci-dessous dans le cas du EI60 MPD2 à 30°C et 10-3 s-1 (Fig. III-23), le phénomène de cavitation se produit nettement, indépendamment de toute concentration de contraintes parasite.

Fig. III-23 Cavitation en cisaillement (EI60 MPD2 30°C 10-3 s-1) en dehors de tout phénomène de localisation indésirable.

Résultats expérimentaux et modélisations numériques sont donc en accord ici. Les éventuelles concentrations de contraintes engendrées par le système de fixation

des éprouvettes semblent ne pas être à l’origine du phénomène de cavitation des particules Cœur-Ecorce en cisaillement.

D’autre part, une approche macroscopique du problème ne semble pas pouvoir aboutir à une solution. Des travaux sont alors menés pour aborder le problème du point de vue de la microstructure.

III.B.4.d.ii Cavitation des particules Cœur-Ecorce : approche microscopique

La totalité des travaux évoqués ici sont menés en collaboration avec C. Fond, R.

Schirrer et P. Gérard, et font l’objet d’un article en cours de rédaction (Fond et al. [110]).

L’éventualité d’une mise en cause de la microstructure des particules Cœur-Ecorce dans le phénomène de cavitation en cisaillement est explorée dans l’esprit des éléments bibliographiques présentés en II.B.1.d.

Le principal outil mis en œuvre est le calcul de cellules 2D axisymétriques, dont une représentation est donnée ci-après (Fig. III-24).

Les conditions aux limites de la cellule sont telles que la continuité du milieu est assurée par périodicité et les calculs sont réalisés dans le cadre de l’HPP.

Par ailleurs, le taux de renfort considéré est suffisamment faible (2.5 % vol.) pour pouvoir écarter tout effet éventuel des interactions entre particules.

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Matrice

Noyau

σ11σ22

σ33

Equateur

Pôle

Fig. III-24 Cellule de calcul utilisée en 2D axisymétrique. Le repère des contraintes principales est indiqué, ainsi que les positions considérées

du pôle et de l’équateur de la particule par rapport à la traction σ33.

Le cas d’une matrice élastique est traité puis étendu à un comportement élastique plastique parfait, tandis qu’une attention particulière est portée au traitement de la quasi-incompressibilité de l’élastomère.

Les propriétés mécaniques attribuées à la matrice et à l’élastomère sont regroupées dans le tableau suivant (Tab. III-6). Les propriétés du noyau sont considérées identiques à celles de la matrice.

Matrice Elastomère Module d’Young (MPa) 2000 1 Coefficient de Poisson 0.37 0.4999167

Module de compressibilité (MPa) 2560 2000 Module de cisaillement (MPa) 730 0.333

Contrainte seuil de plasticité (MPa) 50 Déformation seuil de plasticité (%) 2.5

Tab. III-6 Propriétés mécaniques attribuées à la matrice et à l’élastomère.

La fraction volumique d’élastomère dans la particule Vélast est le paramètre utilisé pour

étudier l’influence de la microstructure. Cette fraction vaut 1 dans le cas d’une particule Cœur Mou, mais peut atteindre de faibles valeurs dans le cas de particules Cœur-Ecorce.

Deux types de sollicitation sont étudiés : Traction uniaxiale : σ11 = σ22 = 0. Cisaillement axisymétrique : σ11 = σ22 = -σ33/2

Les résultats obtenus, illustrés ci-après (Fig. III-25), montrent d’une façon générale

qu’une concentration de la contrainte hydrostatique se produit en cisaillement au niveau du pôle des particules Cœur-Ecorce (pôle situé dans l’alignement de σ33, voir Fig. III-24).

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0.00 0.25 0.50 0.75 1.00-1

0

1

2

Pôles

Equateur

σh/<

σ33>

vélast

0 1 2 3 4-2

-1

0

1

2

3

4 Pôles

Equateur

ε33/εy

σh/<

σ33>

Fig. III-25 A gauche : contrainte hydrostatique dans l’élastomère en fonction de Vélast. A droite : contrainte hydrostatique dans l’élastomère en fonction de ε33 pour Vélast = 0.2.

Sollicitation en traction uniaxiale (σ11 = σ22 = 0) en traits continus, sollicitation en cisaillement axisymétrique (σ11 = σ22 = - σ33/2) en pointillés.

La figure de gauche représente l’évolution de la contrainte hydrostatique dans

l’élastomère au pôle et à l’équateur de la particule de renfort lorsque celle-ci évolue vers une structure Cœur-Ecorce comportant une couche d’élastomère de plus en plus mince. La valeur de la contrainte hydrostatique est ici normée par la contrainte σ33 moyenne sur la cellule <σ33> par souci de cohérence des résultats.

Le comportement attendu pour une particule Cœur Mou (Vélast = 1) est retrouvé en traction (σh = σ33/3), comme en cisaillement (σh = 0). Dans le cas d’une particule Cœur-Ecorce (Vélast << 1), la concentration de la contrainte hydrostatique qui se produit au pôle en cisaillement est plus intense que celle prévue en traction uniaxiale.

La figure de droite donne l’évolution de la contrainte hydrostatique dans l’élastomère au pôle et à l’équateur de la particule de renfort en fonction de la déformation ε33 de la cellule pour Vélast = 0.2. Comme σh, cette déformation est normée (par la déformation seuil de la matrice), afin de rendre les différents résultats cohérents entre eux.

Une augmentation du niveau de la contrainte hydrostatique est observée au pôle de la particule, en traction comme en cisaillement, lorsque le seuil de plasticité de la matrice est atteint.

A la lumière de ces résultats, il apparaîtrait que les observations expérimentales faites en cisaillement seraient dues à un effet de la microstructure des particules de renfort.

Plus spécifiquement, on peut envisager que le confinement de l’élastomère au sein d’une couche mince pourrait être la cause d’une non uniformité du champ de contraintes régnant dans cette couche. Il en résulterait alors une sensibilité locale du niveau de la contrainte hydrostatique à la part déviatorique du tenseur des contraintes imposées à l’infini.

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III.B.4.d.iii Cavitation des particules Cœur Mou

Afin de compléter les précédents travaux, le matériau PMMA Cœur Mou, présenté en II.D.2.c, est introduit dans notre étude. L’objectif est ici de vérifier que le phénomène de cavitation ne se produit pas en cisaillement pour de telles particules de renfort, y compris dans le cas des grandes déformations.

Une pré-étude en traction permet d’explorer les propriétés mécaniques du matériau. Un phénomène de renforcement « choc » du matériau est observé, avec cavitation des

particules ; une transition Ductile-Fragile se produit au passage de la Tg de l’élastomère. Les seuils de plasticité et modules d’Young mesurés sont, du fait de la forte quantité

d’élastomère introduit (45 %), bien moindre que ceux mesurés pour les matériaux renforcés MPD2. A titre de comparaison, pour une vitesse de sollicitation donnée, la courbe Contrainte vraie-Déformation vraie du PMMA Cœur Mou à une température T correspond approximativement à celle du EI60 MPD2 à une température T + 20 °C (hors transition vitreuse).

L’étude ensuite menée en cisaillement est quelque peu différente de celles réalisées sur les matériaux renforcés MPD2.

Tout d’abord, la plage de conditions expérimentales balayée est volontairement restreinte : dans tous les cas étudiés l’élastomère se situe au-delà de sa Tg.

De plus, la géométrie des éprouvettes est celle donnée en III.B.4.d.i. Celle-ci permet en effet de localiser toute la déformation de cisaillement dans l’étroite bande centrale de l’éprouvette (Fig. III-22). Pour un déplacement différentiel donné, les déformations atteintes peuvent donc être bien plus importantes qu’avec une éprouvette classique (jusqu’à 70 %).

Enfin, le maintien du capteur de mesure est délicat aux grandes déformations. Les essais sont donc filmés, afin de permettre leur dépouillement partiel après la chute du capteur.

Le principal résultat de cette étude est la mise en évidence d’un phénomène de

cavitation des particules Cœur Mou aux grandes déformations en cisaillement. Le cas du PMMA Cœur Mou à 10 °C et 5.10-3 s-1 est illustré ci-dessous (Fig. III-26) : le fort blanchiment est observé tardivement, au-delà de 35 % de déformation en cisaillement.

Fig. III-26 Cavitation aux grandes déformations en cisaillement (PMMA Cœur Mou 10°C 5.10-3 s-1).

Les précédents résultats numériques concernant ce type de particules sont obtenus lors

de modélisations en petites déformations (moins de 20 %). Ils ne sont donc pas remis en cause

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par ce phénomène associé aux grandes déformations. Toutefois, l’origine du blanchiment observé est indéterminée : plusieurs directions de recherche sont alors sommairement explorées en collaboration avec C. Fond et R. Schirrer.

Tout d’abord les modélisations par calcul de cellule présentées dans le paragraphe précédent sont étendues aux grandes déformations.

Il est bien évident que le formalisme mathématique associé à ces modélisations n’est pas approprié pour de tels calculs : l’HPP n’est plus vérifiée. Les résultats éventuellement obtenus ici ne sont donc, au plus, que des indices et ne doivent en aucun cas être considérés comme des résultats valables. En l’occurrence, aucun phénomène de cavitation ne semblerait être prédit alors.

L’hypothèse d’un effet des interactions entre particules est ensuite explorée : la MIE est mise en œuvre en cisaillement dans l’esprit des travaux de Fond et al. [34], [90], et [93].

Comme dans le cas des calculs de cellule précédents, et pour les même raisons, les résultats obtenus ne peuvent être considérés comme valables. Le fait que les interactions entre particules ne sembleraient pas être à l’origine du phénomène observé doit donc être considéré avec la plus grande prudence.

Une dernière hypothèse émise concerne d’éventuels phénomènes de plasticité non linéaire, à l’exemple de ceux observés par Bouton-Rochelle [111].

Afin de vérifier cette dernière éventualité, des images MET de la microstructure du matériau endommagé sont réalisées au sein des locaux d’Arkema GRL par B. Pouchan-Lahorre. Suivant le mode opératoire donné en II.C.3.b, les coupes microtomes sont effectuées perpendiculairement au grand axe des éprouvettes.

Le cliché ci-dessous (Fig. III-27) illustre d’une part l’absence des phénomènes pressentis, mais aussi le nombre limité de cavités développées par le matériau.

Fig. III-27 Cavitation dans le PMMA Cœur Mou en cisaillement aux grandes déformations.

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Cette dernière observation semblant incompatible avec le fort blanchiment constaté, une analyse morphologique statistique des clichés est menée comme en III.B.1.

D’une part le caractère sporadique du phénomène de cavitation est confirmé, puisque le pourcentage de particules cavitées s’élève seulement à 7 %. D’autre part, bien que les particules étudiées ici soient environ trois fois plus petites que les particules MPD2, le rayon vrai moyen des cavités est estimé à 36 nm.

L’expression du libre parcours moyen de diffusion L (voir II.C.4.a.iv), fournie par la théorie de la diffusion de la lumière de Rayleigh [112], permet alors de comprendre ce qui semble constituer un paradoxe :

(35) 2

20

22

20

24

0

0

6

2nn1

nn

λπn2

38πN

rL −

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛+⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛−⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛=

avec :

r : rayon de l’élément diffusant. N : densité d’éléments diffusants. n0 : indice optique du milieu. n : indice optique de l’élément diffusant. λ0 : longueur d’onde de la lumière diffusée.

Le libre parcours moyen, qui traduit la capacité du matériau à diffuser la lumière,

s’avère donc bien plus sensible à une augmentation du rayon des éléments diffusants qu’à une diminution de leur densité. Le rayon supérieur des cavités développées dans le PMMA Cœur Mou explique donc, malgré leur très faible densité, le fort blanchiment constaté.

L’ampleur limitée du phénomène de cavitation dans les particules Cœur Mou aux grandes déformations en cisaillement est donc démontrée. Toutefois, aucune hypothèse sérieuse ne semble pouvoir être avancée pour en expliquer les origines.

III.B.5 Conclusion

Le rôle du phénomène de cavitation de l’élastomère apparaît de manière prépondérante tout au long des travaux expérimentaux mis en œuvre ici.

La transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère est minutieusement étudiée. Les influences de divers paramètres expérimentaux sur cette transition sont par ailleurs bien appréhendées : vitesse de sollicitation, température, quantité de renfort mise en jeu.

Les différentes facettes du processus de renforcement au choc sont également explorées : la subtilité du compromis entre perte de module et gain de ductilité est illustrée tout au long de l’étude. L’importance capitale de la valeur de la Tg de l’élastomère comme paramètre de l’efficacité du renfort est par ailleurs mise en évidence.

Concernant les travaux de modélisation, l’utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier préconisée montre ses limites, en dépit de certains bons résultats obtenus, tant en traction, qu’en compression ou en cisaillement.

Les nombreuses hypothèses et approximations faites concernant la porosité et la gestion de la croissance des cavités sont de lourdes conséquences : du fait de problèmes de convergence des calculs, notre étude se trouve considérablement réduite.

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Enfin, à l’occasion de l’étude des matériaux modèles en cisaillement, le rôle non négligeable de la microstructure des particules de renfort est souligné.

D’une part, une capacité inattendue de cavitation en cisaillement des particules Cœur-Ecorce serait mise à jour, liée à un effet de confinement de l’élastomère. D’autre part, une légère aptitude à caviter en cisaillement aux grandes déformations serait décelée pour les particules Cour Mou, sans qu’il soit toutefois possible d’émettre une hypothèse quant aux origines du phénomène.

C’est en tenant compte de l’ensemble de ces conclusions que sont alors effectués les travaux de validation de l’approche « Macro », que nous allons à présent aborder.

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III.C Validation de l’étape de modélisation « Macro »

III.C.1 Généralités sur les travaux de validation

L’objectif des travaux expérimentaux et numériques mis en œuvre ici est de valider en sommet de fissure l’utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier que nous proposons.

Pour ce faire, les données suivantes sont obtenues à la fois par modélisation et par expérimentations, puis comparées entre elles :

Courbes Force-Ouverture. Champ de variation de l’épaisseur de l’éprouvette en sommet de fissure en limite

de la propagation. Champ de déformation à la surface de l’éprouvette en sommet de fissure en limite

de la propagation.

III.C.2 Modélisation d’essais CT

III.C.2.a Généralités sur la modélisation d’essais CT

La MEF et le modèle de Rousselier sont mis en oeuvre suivant l’approche « Macro » présentée en II.B.2.b. Des modélisations des tests CT, décrits en II.C.5, sont réalisées, à raison d’une modélisation par jeu de paramètres identifiés en III.B.2.c.

Notre étude des phénomènes d’endommagement s’effectue en limite de propagation de fissure (II.B.2.b.vii). Afin de déterminer les champs correspondants, les chargements appliqués aux éprouvettes lors des modélisations (i.e. les ouvertures imposées) doivent correspondre à cette limite.

Comme on va le voir en III.C.3.b lorsque les résultats expérimentaux seront donnés, les ouvertures critiques de départ en propagation mesurées dans la gamme de température et de vitesse d’ouverture considérées sont toutes proches de 1 mm.

C’est pourquoi une telle ouverture est imposée lors de toutes les modélisations. En première approximation, les champs obtenus alors sont supposés correspondre à ceux développés dans le matériau en limite de propagation de fissure.

La géométrie considérée pour la réalisation du maillage inclus le système de trous et

de goupilles permettant le chargement. Du fait des propriétés de symétrie, seul un quart de cette géométrie est maillé9 : ceci permet de réaliser de substantiels gains de temps de calcul.

La taille caractéristique des éléments lc en sommet de fissure a été prise la plus petite possible en regard de ces mêmes temps de calcul : elle est de l’ordre de 170 µm.

III.C.2.b Résultats de modélisation

La figure après (Fig. III-28) regroupe quelques résultats obtenus dans le cas d’une modélisation s’appuyant sur les paramètres du modèle de Rousselier associés au EI50 MPD2 à 30 °C et 10-4 s-1 (l’ouverture imposée est de 1 mm).

9 Voir Annexe G.

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Paramètres du EI50 MPD2 30 °C 10-4 s-1

0

50

100

150

200

250

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1Ouverture (mm)

Forc

e (N

)

Déformation verticale en sommet de

fissure à 1mm d'ouverture

30 %

0 %

Fig. III-28 Modélisation des tests CT (paramètres du EI50 MPD2 30 °C 10-4 s-1). A gauche : courbe Force-Ouverture. A droite : détail du champ de déformation

verticale en sommet de fissure et en limite de propagation (lc = 170 µm).

D’une façon générale, diverses évolutions sont calculées en fonction de l’ouverture imposée ; plusieurs champs sont déterminés en sommet de fissure au cœur de l’éprouvette.

Les problèmes évoqués en II.B.2.b.vii liés à la présence d’une singularité sont rencontrés dans cette étude. La figure précédente (Fig. III-28) illustre parfaitement un cas de localisation de la déformation verticale dans le premier élément en tête de fissure.

Enfin, l’insensibilité des résultats aux paramètres de maillage suivants est vérifiée10 : Densité de maillage dans le plan central de l’éprouvette. Densité de maillage dans l’épaisseur de l’éprouvette. Type d’éléments utilisés (cubes à 20 nœuds et cubes à 8 nœuds).

III.C.2.c Détermination des conditions expérimentales associées aux tests CT

Ces travaux de validation reposent sur la comparaison de résultats obtenus par

modélisation à des valeurs expérimentales.

Pour chaque modélisation effectuée, des tests CT réels doivent donc être menés dans les conditions correspondant aux paramètres introduits dans le modèle. Le problème que constitue la détermination de ces conditions, ainsi que la solution mise en œuvre pour le résoudre, sont évoqués en II.E.2.a.ii.

Chaque jeu de paramètres déterminé en III.B.2.c est associé à un triplet [quantité de renfort MPD2, température, vitesse de déformation]. Pour une modélisation donnée, le jeu de

10 Voir Annexe H.

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paramètres utilisé indique donc le matériau à tester et la température de l’essai de validation à effectuer.

Une difficulté survient lors du choix de la vitesse d’ouverture d’éprouvette à imposer. En effet, le champ de vitesse de déformation calculé en sommet de fissure n’est pas uniforme. Il n’est donc pas possible de relier, a priori, la vitesse de déformation caractéristique du jeu de paramètres utilisé, à une vitesse d’ouverture d’éprouvette expérimentale précise.

La solution envisagée ici repose sur l’estimation des déformations moyennes calculées autour du sommet de fissure lorsque la limite de propagation est atteinte. Cette estimation permet de relier la vitesse de déformation associée au jeu de paramètres utilisé à la vitesse d’ouverture d’éprouvette à imposer.

Il s’avère préférable ici de ne pas prendre en compte les effets de localisation illustrés précédemment. C’est pourquoi les éléments mis en cause, proches de la singularité, sont exclus du calcul d’estimation.

Cette approche simpliste mène bien entendu à une estimation peu précise des vitesses d’ouverture à appliquer lors des tests.

Le tableau ci-dessous (Tab. III-7) indique les correspondances obtenues entre vitesses de déformation homogènes (tests de traction) et vitesses d’ouverture (tests CT) :

Vitesse de déformation en traction (s-1) 4.10-3 10-3 10-4 Vitesse d’ouverture CT (µm.s-1) 20 5 0.5

Tab. III-7 Relation entre vitesses de déformation et vitesses d’ouverture.

III.C.3 Tests CT classiques

III.C.3.a Généralités sur le test CT classique

L’objectif de ces tests, réalisés sur une machine Instron 4500 pilotée par ordinateur, est

double. Ils nous permettent d’explorer les propriétés mécaniques des matériaux étudiés sous sollicitation triaxiale, mais aussi de valider notre méthode de modélisation « Macro ».

Les essais, filmés, sont réalisés selon le protocole présenté en II.C.5.b, pour les vitesses d’ouverture définies en III.C.2.c et les températures déterminées en II.D.3.f. Les matériaux testés sont le EI0 (matrice pure), ainsi que les trois matériaux renforcés MPD2.

III.C.3.b Résultats expérimentaux

Les images ci-après (Fig. III-29) illustrent le blanchiment caractéristique en forme de flamme, ainsi que la propagation ductile de fissure observé lors de l’étude des matériaux renforcés MPD2.

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Fig. III-29 Tests CT (EI60 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1). A gauche : éprouvette CT après le test. A droite : détail de la flamme en sommet de fissure.

La transition Ductile-Fragile, telle qu’elle a été décrite en I.B.1 n’est que partiellement

observée, du fait de l’étroitesse de la gamme de conditions expérimentales explorée. Toutefois, comme on peut le voir ci-dessous (Fig. III-30), un comportement plus fragile est clairement adopté aux basses températures et hautes vitesses d’ouverture.

EI60 MPD2 5 µm.s-1

0

50

100

150

200

250

0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0Ouverture (mm)

Forc

e (N

) 30 °C10 °C-10 °C-30 °C

Fig. III-30 Tests CT (EI60 MPD2 5 µm.s-1).

La figure suivante (Fig. III-31) illustre aussi bien l’effet de renfort « choc » que l’influence de la quantité d’élastomère introduit dans le matériau.

On constate que loin de la transition Ductile-Fragile, le matériau le moins fragile s’avère être le EI25 MPD2. Peu renforcé, celui-ci bénéficie néanmoins de l’effet « choc » des particules, tout en maintenant une raideur élevée.

A contrario, aux vitesses d’ouverture élevées et aux basses températures, le matériau le plus chargé est le plus éloigné de sa transition Ductile Fragile. Le EI60 MPD2 affiche donc alors le comportement le plus ductile.

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Bien évidemment, la matrice PMMA pure s’avère bien plus fragile que les matériaux renforcés.

20 µm.s-1

0

50

100

150

200

250

0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0Ouverture (mm)

Forc

e (N

) EI0EI25 MPD2EI60 MPD2

Fig. III-31 Tests CT (20 µm.s-1) : à 30 °C en traits continus, à -10 °C en pointillés.

Les ouvertures critiques d’amorçage de propagation observées évoluent en fonction de ce subtil équilibre entre raideur du matériau et efficacité du renforcement « choc ».

Les valeurs mesurées les plus basses sont de l’ordre de quelques dixièmes de millimètres lorsque les matériaux étudiés adoptent un comportement particulièrement fragile. Loin de la transition Ductile-Fragile (tests à 10 et 30 °C), les valeurs mesurées se situent entre 0.9 et 1.1 mm pour les matériaux renforcés. On rappelle par ailleurs la remarque faite en II.E.3.c concernant les difficultés d’estimation de cette ouverture critique.

Enfin, pour chaque essai, la MELR, présentée en II.B.1.b.ii, est mise en œuvre afin d’estimer le facteur d’intensité de contrainte critique.

Pour la géométrie d’éprouvette utilisée, le facteur d’intensité de contrainte KI s’exprime sous la forme suivante (Anderson [113]) :

(36) 1.5

432

I

Wa1WB

Wa5.6

Wa14.72

Wa13.32

Wa4.640.886

Wa2F

K

⎟⎠⎞

⎜⎝⎛ −

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛⎟⎠⎞

⎜⎝⎛−⎟

⎠⎞

⎜⎝⎛+⎟

⎠⎞

⎜⎝⎛−+⎟

⎠⎞

⎜⎝⎛ +

=

avec : a : longueur de la fissure. W : longueur de l’éprouvette. B : épaisseur de l’éprouvette. F : force correspondante sur la courbe Force-Ouverture.

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Par ailleurs, dans le cadre de l’hypothèse d’une plasticité confinée en sommet de fissure (Irwin [62]), la longueur de la fissure a est rallongée par le rayon de la zone plastique d’Irwin, dont l’expression (14) est connue selon la nature du champ de contraintes (état de contraintes triaxiales ou planes). Les valeurs de KIc obtenues varient en fonction des conditions expérimentales entre 0.6 et 1.1 MPa.m-0.5 pour la matrice non renforcée ; les matériaux renforcés « choc » atteignent eux des valeurs allant de 2 à 2.9 MPa.m-0.5.

Là encore, une mise en garde nécessaire, déjà formulée en II.E.3.c, concerne la validité de ces calculs. En effet, afin de pouvoir mettre en œuvre la MELR, il est nécessaire de s’assurer de l’état triaxial des contraintes en sommet de fissure. Selon la norme ASTM-E1820 [2], ceci implique notamment le respect du critère suivant en ce qui concerne l’épaisseur B de l’éprouvette :

(37) 2

y

Ic

σK2.5B ⎟

⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛≥

Il s’avère alors que pour la plupart des essais ce critère n’est pas respecté. Les valeurs

obtenues ici doivent donc être considérées avec la plus grande circonspection.

III.C.3.c Comparaison aux résultats de modélisation

La figure ci-dessous (Fig. III-32) est caractéristique des résultats obtenus lors de la comparaison entre modélisations numériques et résultats expérimentaux.

EI60 MPD2 30°C 0,5 µm.s-1

0

50

100

150

200

250

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0

Ouverture (mm)

Forc

e (N

)

Fig. III-32 Comparaison des courbes Force-Ouverture (EI60 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1) : résultat expérimental en trait continu et modélisation numérique en pointillés.

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D’une façon générale, les calculs aboutissent à une surestimation importante de la force limite de départ en propagation (jusqu’à 50 %), et par conséquent du champ de contraintes en sommet de fissure.

Au moins trois explications peuvent être avancées pour expliquer un tel écart, toutes plus ou moins évoquées précédemment :

La méthode de détermination des vitesses d’ouverture à pratiquer durant les tests CT est approximative et laisse place à l’erreur.

Les courbes d’écrouissage R(p) des matériaux sont identifiées à partir de tests en contraintes uniaxiales. La sensibilité du phénomène de renfort « choc » à la triaxialité des contraintes est donc mal prise en compte dans la modélisation.

Notre approche concernant la viscosité des matériaux est très grossière : la viscoplasticité est ici probablement à l’origine de relaxations des contraintes en sommet de fissure.

III.C.4 Tests CT associés à la profilométrie de surface

III.C.4.a Généralités sur les tests CT associés à la profilométrie de surface

Ces tests CT sont réalisés sur une machine Instron 4500 pilotée par ordinateur, puis

une analyse de surface est menée à l’aide d’un microscope topographique (profilomètre). Ils nous permettent d’enrichir la palette de résultats obtenus lors de tests CT classiques afin de valider notre méthode de modélisation « Macro ».

Les essais sont réalisés selon le protocole présenté en II.C.5.c, pour les vitesses d’ouverture définies en III.C.2.c et les températures déterminées en II.D.3.f. Le matériau principalement testé est le EI60 MPD2.

III.C.4.b Résultats expérimentaux

La figure ci-dessous (Fig. III-33) illustre la méthode de préparation des éprouvettes pour la réalisation de la profilométrie.

Les tests CT sont interrompus lorsque l’ouverture critique de propagation de fissure est atteinte et les éprouvettes bloquées par de la colle époxyde chargée de poudre métallique. Les profilométries de surface en sommet de fissure sont réalisées une fois la résine époxyde polymérisée (environ 12 heures).

Fig. III-33 Test CT associé à la profilométrie de surface : éprouvette CT bloquée en limite de propagation.

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Le cas du EI60 MPD2 à 30 °C et 0.5 µm.s-1 illustré ci-dessous (Fig. III-34) est caractéristique des résultats obtenus dans cette étude.

01000

20003000

40005000

60007000

0

1000 20

00 3000 40

00 5000 60

00 7000 80

00 9000

-100-90-80-70

-60

-50

-40

-30

-20

-10

0

-10-0-20--10-30--20-40--30-50--40-60--50-70--60-80--70-90--80-100--90

Fig. III-34 Test CT associé à la profilométrie de surface (EI60 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1) : profil en sommet de fissure (distances en µm).

Une déformation en forme de cône (au centre) est observée en sommet de fissure (à

droite), d’une profondeur variant de 50 à 70 µm en fonction des conditions expérimentales. Cette déformation résulte des phénomènes d’endommagement du matériau au cœur de l’éprouvette.

III.C.4.c Comparaison aux résultats de modélisation

Les profils de surface mesurés sont comparés à ceux modélisés par la MEF et le modèle de Rousselier.

Comme on peut le constater ci après (Fig. III-35), l’accord obtenu est plutôt bon, en terme de largeur de la zone concernée, comme en terme de profondeur atteinte.

Cet accord entre modélisation et expérimentation est ici surprenant, puisque une surestimation des champs des contraintes par la modélisation a été constatée. On envisage à nouveau ici un effet de la viscosité du matériau, d’autant que la mesure n’est effectuée qu’après plusieurs heures de maintien de l’éprouvette sous contrainte (temps nécessaire à la polymérisation de la résine époxyde).

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0 à -10-10 à -20-20 à -30-30 à -40-40 à -50-50 à -60-60 à -70Pr

ofon

deur

(µm

)

1 mm

ExpérimentalModélisation

Fig. III-35 Comparaison des profils de surface (EI60 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1). A gauche : résultat de modélisation. A droite : résultat expérimental.

III.C.5 Tests CT associés à la corrélation d’image

III.C.5.a Généralités sur les tests CT associés à la corrélation d’image

L’objectif de ces tests, réalisés sur une machine Instron 4500 pilotée par ordinateur est

d’enrichir la palette de résultats obtenus lors de tests CT classiques afin de valider notre méthode de modélisation « Macro ».

Les essais, filmés, sont réalisés selon le protocole présenté en II.C.5.d, pour les vitesses d’ouverture définies en III.C.2.c et les températures déterminées en II.D.3.f. Le matériau principalement testé est le EI60 MPD2.

III.C.5.b Résultats expérimentaux et comparaison aux résultats de modélisation

Les travaux évoqués ici sont menés en collaboration avec S. Braymand (ICS).

Un exemple de mouchetis déposé sur les éprouvettes CT est présenté ci-dessous (Fig. III-36). C’est par la corrélation des déplacements, durant le test, des différents points qui constituent ce mouchetis, qu’est déduit l’ensemble des déformations dans le plan de surface de l’éprouvette.

Fig. III-36 Test CT associé à la corrélation d’image : mouchetis déposé sur l’éprouvette CT.

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Plusieurs difficultés expérimentales sont rencontrées durant le déroulement de cette étude, rendant parfois difficile l’obtention d’une image « corrélable ».

Les capacités de réflexion et d’absorption de la lumière varient à la surface de l’éprouvette selon les différentes zones qui composent le mouchetis appliqué. Toute variation de l’incidence ou de l’intensité de l’éclairage durant le test est donc à l’origine d’une modification de l’image, interprétée de façon erronée comme une déformation de la surface étudiée.

La réduction de l’épaisseur de l’éprouvette, qui survient en sommet de fissure, est logiquement responsable d’une modification de l’incidence de l’éclairage à cet endroit. Ce phénomène rend la corrélation délicate et cause une mauvaise estimation du champ de déformation à cet endroit.

Un autre phénomène entraîne une modification non voulue du mouchetis en sommet de fissure. Il s’agit du blanchiment, qui accompagne le phénomène de cavitation des particules. Même les mouchetis les plus opaques sont alors modifiés localement, ce qui engendre des erreurs de corrélation en sommet de fissure.

Par ailleurs, la forte localisation des déformations en sommet de fissure peut constituer une origine « naturelle » à des difficultés de corrélation.

La figure ci-dessous (Fig. III-37), représentative des résultats obtenus dans cette étude, donne le champ de déformation verticale εy mesuré en limite de propagation pour le EI60 MPD2 à 30 °C et 0.5 µm.s-1. A titre de comparaison, le contour en rouge indique la limite, calculée par la MEF et le modèle de Rousselier, de la zone présentant des déformations verticales εy comprises entre 0 et 3 %.

3 %

2 %

1 %

0%

-1 %

Déformation verticale à 1 mm d'ouverture

3,55 mm

ε x

ε y

Fig. III-37 Comparaison des champs de déformation verticale (EI60 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1).

Le contour en rouge est celui de la zone calculée des déformations verticales comprises entre 0 et 3 %.

De toute évidence peu adaptée à l’estimation des champs en sommet de fissure, cette

méthode semble pouvoir être mise en oeuvre loin de la singularité. Comme on peut le constater, les résultats obtenus sont encourageants, puisque la taille

et la forme des champs semblent correctement estimées. On note toutefois un manque certain de précision, qui rend nécessaire des travaux plus

poussés au niveau du choix des paramètres de corrélation, plus particulièrement en ce qui concerne l’étendue de la zone analysée et la taille des cellules de corrélation utilisées.

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III.C.6 Conclusion

La prépondérance du rôle du phénomène de cavitation de l’élastomère observée au cours des campagnes d’essais mécaniques uniaxiaux est à nouveau constatée dans le cadre de cette étude en contraintes triaxiales.

La sensibilité de la transition Ductile-Fragile des matériaux étudiés aux divers paramètres expérimentaux est clairement identifiée. La subtilité de l’équilibre régnant entre renforcement « choc » et perte de raideur est par ailleurs parfaitement appréhendée.

L’établissement d’un lien entre les vitesses de déformations des essais uniaxiaux et les vitesses d’ouverture des essais CT est nécessaire aux travaux de validation des modélisations.

L’approche adoptée pour établir ce lien s’avère imprécise ; seule une identification des paramètres du modèle de Rousselier à partir de tests sur éprouvettes entaillées semblerait permettre l’élimination de cette difficulté.

Des méthodologies expérimentales originales sont alors mises en œuvre pour étoffer le panel de résultats qu’offrent les essais CT classiques.

L’utilisation d’un microscope topographique permet une étude fine de la déformation atteinte en surface et en sommet de fissure lorsque la limite de propagation est atteinte. Cette approche souffre toutefois d’effets dus à la viscosité des matériaux étudiés, ainsi que de la longue durée nécessaire à la préparation de l’éprouvette.

La technique de mesure de champs de déformations par corrélation d’images s’avère prometteuse, en dépit d’un manque certain de précision.

La comparaison des résultats expérimentaux et numériques permet de conclure à une surestimation conséquente des contraintes en sommet de fissure par notre utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier.

L’identification des courbes R(p) sur essais uniaxiaux, l’approche simplifiée vis-à-vis de la viscosité des matériaux et la détermination peu précise des conditions expérimentales des essais expérimentaux de validation, semblent être à l’origine de cette surestimation.

Quoiqu’il en soit, la mise en œuvre de l’étape de modélisation « Macro » semble atteindre l’objectif fixé. Une estimation approchée des champs en sommet de fissure dans les PMMA renforcés par nodules d’élastomère est faite, avec une attention particulière portée au phénomène de cavitation.

C’est donc en tenant compte de l’ensemble des résultats obtenus et des réflexions menées jusqu’ici, que sont extraits, le long de plusieurs profils d’isoplasticité, les champs locaux destinés à la réalisation de l’étape de modélisation « Micro ».

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III.D Profils de plasticité et champs locaux

L’utilisation de la méthode de modélisation « Macro » proposée étant validée, la dernière étape avant le début des calculs à l’échelle de la microstructure est abordée, suivant la méthodologie proposée en II.B.2.b.viii.

Plusieurs isovaleurs de la déformation plastique équivalente peqε sont considérées

autour du sommet de fissure : des profils d’isoplasticité sont obtenus. Les champs de contraintes et de déformations sont extraits en chaque point de ces

profils des résultats obtenus par la mise en œuvre circonstanciée du modèle de Rousselier en III.C.2.

L’étape de modélisation « Micro » peut alors être appliquée à des VER pris le long de ces profils.

Les isovaleurs choisies sont 0.1, 0.3, 1, 2, 3 et 5 % de déformation plastique équivalente. On espère ainsi balayer une région suffisamment étendue en sommet de fissure pour établir une cartographie complète des phénomènes dissipatifs en limite de propagation, pour les différentes vitesses d’ouverture et températures considérées.

La figure ci-dessous illustre le cas du EI25 MPD2 à 30 °C et 0.5 µm.s-1.

EI25 MPD2 30°C 10-4 s-1

0,0E+00

1,0E-03

2,0E-03

3,0E-03

4,0E-03

-2,0E-03 -1,0E-03 0,0E+00 1,0E-03 2,0E-03 3,0E-03 4,0E-03

Distance en m

0,1 % plasticité

0,3 % plasticité

1 % plasticité

2 % plasticité

3 % plasticité

5 % plasticité

Sommet defissure

Fig. III-38 Profils de plasticité sélectionnés pour la mise en œuvre de l’étape de modélisation « Micro » (EI25 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1).

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143

III.E Conclusion

Du point de vue expérimental, une étude complète du système particule de renfort à base élastomère / matrice PMMA est réalisée.

Des techniques expérimentales classiques sont mises en œuvre : imagerie MET, essais mécaniques uniaxiaux (traction, compression, cisaillement), tests CT. D’autres expérimentations plus « exotiques » complètent les résultats obtenus : essais de cisaillement en grandes déformations, tests CT associés à de la microscopie topographique et de la corrélation d’images.

Les influences de plusieurs paramètres (température, vitesse et type de sollicitation, quantité et type de renfort) sur les comportements mécaniques et micromécaniques des matériaux modèles sont étudiées.

La quantité d’élastomère introduit dans la matrice, ainsi que sa capacité à caviter, apparaissent comme les paramètres majeurs en ce qui concerne l’attribution d’un comportement ductile et de propriétés « choc » au matériau. Le phénomène de transition Ductile-Fragile est mieux appréhendé.

Certains résultats originaux sont obtenus lors de l’étude des matériaux modèles en cisaillement. Une capacité des particules Cœur-Ecorce à caviter (et donc à conférer un renforcement « choc ») serait notamment mise à jour, liée à un effet microstructurel.

Concernant les travaux de modélisation, la méthodologie et l’utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier préconisée montrent certaines limitations.

D’une part l’approche délibérément simplifiée de la gestion de porosité et de la croissance des cavités est à l’origine de problèmes de convergence des calculs lorsque l’augmentation de porosité est rapide. Notre étude se trouve alors considérablement réduite du point de vue de la gamme de conditions expérimentales explorée.

D’autre part, une surestimation conséquente des contraintes en sommet de fissure est constatée. La viscosité des matériaux, prise en compte de manière simpliste, ainsi que la méthodologie d’identification des paramètres et conditions expérimentales sont ici probablement à mettre en cause.

La méthode de modélisation proposée à l’échelle du sommet de fissure permet néanmoins d’estimer les champs locaux nécessaires à la mise en œuvre de l’étape de modélisation « Micro », en prenant en compte les effets du phénomène de cavitation.

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III.F Références [110] C. Fond, R. Schirrer, O. Bondil, P. Gérard, Spherical rubber inhomogeneities and spherical rubber shells in glassy polymer matrix : some factors related to cavitation and plasticity, en cours de rédaction [111] C. Bouton-Rochelle, Etude des mécanismes de déformation plastique dans des mélanges de poly(méthacrylate de méthyle), Thèse de Doctorat, Institut National Polytechnique de Lorraine, 1991 [112] H. C. van de Hulst, Lihgt scattering by small particles, Dover Publications, 1957 [113] T.L. Anderson, Fracture mechanics, fundamentals and applications, CRC press, 1991

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145

IV MISE EN ŒUVRE ET RÉSULTATS DE L’ÉTAPE DE MODÉLISATION « MICRO »

IV.A Introduction

La mise en œuvre de l’étape de modélisation « Micro » est réalisée conformément à la méthodologie présentée dans le second chapitre. Les divers résultats obtenus alors, tant expérimentaux que calculatoires, sont réunis ici. Par ailleurs, une étape de modélisation additionnelle s’est avérée indispensable à l’établissement de la cartographie complète des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure. Les détails relatifs à cette étape, ainsi que les résultats obtenus sont donc également donnés dans ce chapitre.

Nous présenterons tout d’abord les résultats des divers travaux d’homogénéisation réalisés. Les propriétés mécaniques des particules et des matrices homogénes obtenues sont nécessaires à la mise en œuvre de la méthode d’Eshelby.

Les travaux d’identification des critères d’amorçage des différents phénomènes dissipatifs considérés en sommet de fissure seront ensuite abordés. Les identifications sont réalisées à partir des résultats obtenus lors des tests en traction uniaxiale, ainsi qu’à partir de données de la littérature.

L’ensemble des travaux relatifs à la détermination de cartes des effets dissipatifs, en sommet de fissure et en limite de propagation, en fonction des divers paramètres considérés, sont alors présentés. Enfin, les paramètres micromécaniques de premier ordre de la transition Ductile-Fragile dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère sont identifiés.

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146

IV.B Travaux d’homogénéisation

Les calculs d’homogénéisation des particules et des matrices des VERs, nécessaires à la mise en œuvre de la méthode d’Eshelby, sont réalisés suivant la méthodologie présentée en II.B.2.c.vi.

Les propriétés mécaniques de l’élastomère MPD2, ainsi que celles des particules homogènes équivalentes sont considérées, en première approximation, constantes sur les gammes de vitesses de déformations et températures explorées (III.B.2.c). Par ailleurs, les propriétés des noyaux des particules MPD2 sont supposées identiques à celles de la matrice.

Les essais thermomécaniques présentés en II.D.3.e permettent d’évaluer les caractéristiques de l’élastomère MPD2, tandis que celles de la matrice PMMA (EI0) le sont lors des essais de traction uniaxiale présentés en III.B.2.b. Les compositions et données structurales des matériaux et particules de renfort sont fournies en II.D.2.

Les résultats de Fond et al. ([34] et [36]) permettent alors de calculer les propriétés mécaniques des nodules homogènes équivalents (Tab. IV-1).

E (GPa) ν K (GPa) µ (GPa) Elastomère MPD2 3.5.10-4 0.4999708 2.00 7.78.10-5

Noyau PMMA 4.17 0.29 3.31 1.62 Particule équivalente 6.76.10-4 0.4999583 2.70 2.25.10-4

Tab. IV-1 Données d’homogénéisation des particules de renfort.

Les propriétés mécaniques des matrices homogènes équivalentes aux divers matériaux

étudiés sont ensuite calculées pour les conditions expérimentales correspondant à chacun des jeux de paramètres du modèle de Rousselier identifiés en III.B.2.c.

Les résultats, obtenus par calcul de cellules 3D en élasticité, sont regroupés ci-dessous (Tab. IV-2).

Matériau T (°C) Vitesse de déformation (s-1) E (GPa) ν K (GPa) µ (GPa)

1.10-4 2.21 0.36 2.63 0.81 1.10-3 2.41 0.36 2.87 0.89 30 4.10-3 2.44 0.35 2.71 0.90 EI60 MPD2

10 1.10-4 2.53 0.35 2.81 0.94 1.10-4 2.42 0.35 2.69 0.90 EI50 MPD2 30 1.10-3 2.64 0.34 2.75 0.99

EI25 MPD2 30 1.10-4 2.59 0.34 2.70 0.97

Tab. IV-2 Propriétés mécaniques des matrices homogènes équivalentes des VER.

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IV.C Identification des critères d’amorçage

Les travaux d’identification des différents critères d’amorçage, nécessaires à la détermination de la cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure, sont réalisés suivant les diverses méthodologies présentées en II.B.2.c.iv.

Ces critères sont déterminés pour les conditions expérimentales correspondant à chacun des jeux de paramètres du modèle de Rousselier identifiés en III.B.2.c.

Concernant le critère de plasticité (critère de von Mises), différentes valeurs de la contrainte seuil d’écoulement σy sont mesurées lors des essais de traction uniaxiale présentés en III.B.2 (Tab. IV-3).

Matériau T (°C) Vitesse de déformation (s-1) σy (MPa)

1.10-4 34.90 1.10-3 41.95 30 4.10-3 42.70 EI60 MPD2

10 1.10-4 49.00 1.10-4 35.75 EI50 MPD2 30 1.10-3 45.50

EI25 MPD2 30 1.10-4 46.00

Tab. IV-3 Valeurs du critère d’apparition de plasticité.

Plusieurs valeurs de la contrainte hydrostatique critique de cavitation σhc au cœur des particules sont ensuite évaluées pour constituer le critère de cavitation.

Durant les essais de traction uniaxiale, une mesure de la transmission de l’intensité d’un faisceau LASER à travers l’éprouvette est réalisée (II.C.4.a.iv). Cette technique permet de détecter précisément la contrainte de traction critique σTc d’apparition du phénomène de cavitation qui entraîne le blanchiment du matériau (Fig. IV-1).

Fig. IV-1 Test de traction uniaxiale (EI50 MPD2 10 °C 10-3 s-1) : blanchiment du matériau après cavitation des particules de renfort.

L’expression de la contrainte hydrostatique au cœur de la particule (26) permet de

calculer les différentes valeurs de σhc à partir des caractéristiques mécaniques des nodules et matrices homogènes obtenues en IV.B et des valeurs de σTc mesurées (Tab. IV-4).

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Matériau T (°C) Vitesse de déformation (s-1) σTc (MPa) σhc (MPa)

1.10-4 36.4 12.2 1.10-3 40.2 13.1 30 4.10-3 41.0 13.7 EI60 MPD2

10 1.10-4 47.0 15.5 1.10-4 33.3 11.1 EI50 MPD2 30 1.10-3 37.9 12.5

EI25 MPD2 30 1.10-4 44.5 14.8

Tab. IV-4 Valeurs du critère d’apparition de cavitation.

Enfin, les paramètres du critère d’amorçage de craquelures de Bowden et Oxborough [27] sont identifiés à partir des récents travaux de Gearing et Anand [96] sur le PMMA (Tab. IV-5).

Matériau T (°C) Vitesse de déformation (s-1) A (MPa) B

1.10-4 0.322 0.0206 1.10-3 0.326 0.0189 30 4.10-3 0.355 0.0187 EI60 MPD2

10 1.10-4 0.310 0.0180 1.10-4 0.325 0.0188 EI50 MPD2 30 1.10-3 0.298 0.0173

EI25 MPD2 30 1.10-4 0.303 0.0176

Tab. IV-5 Valeurs des paramètres du critère d’apparition de craquelures.

La détermination complète du critère, dont l’expression est donnée par l’équation (25), nécessite une estimation locale de la contrainte hydrostatique. Celle-ci est effectuée lors de la mise en œuvre de la méthode d’Eshelby le long des profils d’isoplasticité sélectionnés.

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IV.D Cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure

IV.D.1 Mise en oeuvre de la méthode d’Eshelby et des critères d’amorçage

La méthode d’Eshelby et les différents critères d’amorçage sont mis en œuvre suivant l’approche « Micro » présentée en II.B.2.c.

Un angle θ est introduit pour repérer les positions des VER considérés le long des profils d’isoplasticité. La méthode d’Eshelby est appliquée de 10 ° en 10 ° le long de ces mêmes profils, comme l’illustre la figure suivante (Fig. IV-2).

EI60 MPD2 10°C 10-4 s-1

0,0E+00

1,0E-03

2,0E-03

3,0E-03

4,0E-03

-2,0E-03 -1,0E-03 0,0E+00 1,0E-03 2,0E-03 3,0E-03 4,0E-03

0,1 % plasticité

Sommet deFissure

Distances en m

θ = 40 °

Fig. IV-2 Positions des VER considérés pour la mise en œuvre de l’étape « Micro » (EI60 MPD2 10 °C 10-4 s-1 0.1 % de plasticité).

Lors de chaque calcul, les propriétés mécaniques de la particule et de la matrice

homogènes du VER considéré sont celles déterminées en IV.B, tandis que les champs de contraintes et de déformations locaux appliqués sont ceux extraits en III.D. Les champs obtenus en tous points de chaque VER sont donc fonction des paramètres suivants :

Position par rapport au sommet de fissure. Quantité de renfort MPD2. Vitesse de sollicitation. Température.

L’identification des critères d’amorçage choisis est réalisée en IV.C en fonction de ces

trois derniers paramètres. Leur application est donc possible au sein de chaque VER, afin de déterminer si l’un ou l’autre des phénomènes de dissipation se produit à l’échelle de la microstructure.

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Cette application est réalisée pour chaque critère au point le plus indiqué de la microstructure (II.B.2.c.iv) :

Critère de plasticité : le maximum de la contrainte équivalente de von Mises σeq est recherché à l’interface particule/matrice et comparé à la contrainte seuil d’écoulement σy mesurée.

Critère de cavitation : la contrainte hydrostatique σh au cœur de la particule est comparée à la contrainte hydrostatique critique de cavitation σhc mesurée.

Critère de craquelures : la position et le maximum de la déformation principale ε1 sont recherchés à l’interface particule/matrice. La valeur de la contrainte hydrostatique σh est d’abord calculée en ce point, puis celle du critère, qui est alors comparée à ε1.

La figure ci-dessous (Fig. IV-3) illustre la mise en œuvre de la méthode d’Eshelby,

suivie de l’application du critère de cavitation pour le EI60 MPD2 à 10 °C et 0.5 µm.s-1, le long du profil d’isoplasticité à 0.1%. Le critère de cavitation est franchi le long de ce profil pour les valeurs de θ comprises entre 0 et 90 °.

Critère de cavitation EI60 MPD20,5µm/s 10°C 0,1% plasticité

0

5

10

15

20

25

0 30 60 90 120 150 180θ (°)

σh

(MPa

)

Fig. IV-3 Critère de Cavitation (EI60 MPD210 °C 0.5 µm.s-1 0.1 % de plasticité) : Valeur du critère σhc en trait gras, valeur de σh en trait fin.

IV.D.2 Effet de la cavitation sur les autres phénomènes dissipatifs

Suivant la proposition faite en II.B.2.c.v, l’effet de l’apparition de cavités dans le

matériau sur le développement des autres phénomènes dissipatifs est pris en compte ici.

Pour les VER dans lesquels le critère de cavitation est atteint, les propriétés des particules homogénéisées sont remplacées par celles d’un trou (modules nuls). La méthode d’Eshelby est ensuite à nouveau mise en œuvre, et les critères d’amorçage de plasticité et de craquelures réappliqués.

Cette modification n’est pas sans répercution sur les champs de contraintes et de déformations développés dans les VER. De fait, on constate généralement les augmentations

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des maxima à l’interface particule/matrice de la contrainte équivalente σeq (jusqu’à quelques dizaines de MPa) ainsi que de la déformation principale ε1 (jusqu’à 0.5 %). Les critères de plasticité et de craquelure sont par conséquent franchis plus aisément.

La figure ci-après (Fig. IV-4), en relation directe avec la précédente, illustre les effets de la prise en compte du phénomène de cavitation le long du même profil entre 0 et 90 °.

Critère de plasticité EI60 MPD20,5 µm/s 10°C 0,1 % plasticité

0

20

40

60

80

100

0 30 60 90 120 150 180 θ (°)

σ (M

Pa)

Critère de craquelures EI60 MPD20,5 µm/s 10°C 0,1 % plasticité

0

1

2

3

4

5

0 30 60 90 120 150 180θ (°)

ε (%

)

Fig. IV-4 Effets de la cavitation (EI60 MPD210 °C 0.5 µm.s-1 0.1 % de plasticité). A gauche, critère de plasticité. A droite critère de craquelures.

Valeurs des critères σy et εc en traits gras. Valeurs de σeq et ε1 en traits fins :

avant cavitation en pointillés, après cavitation en traits continus.

On retrouve bien ici le double rôle du phénomène de cavitation, fortement promoteur de plasticité autour de la particule, mais aussi précurseur de craquelures à l’interface de particule/matrice.

IV.D.3 Première approche pour l’établissement d’une cartographie

On propose ici de relier, pour un matériau, une vitesse de sollicitation et une température donnés, les points des profils pour lesquels les critères d’amorçage des différents phénomènes dissipatifs sont atteints.

On espère ainsi déterminer les différentes cartographies des phénomènes dissipatifs considérés en sommet de fissure et en limite de propagation.

La figure ci-après (Fig. IV-5) illustre cette approche dans le cas de l’établissement de la carte du phénomène de cavitation dans le EI25 MPD2 à 30 °C et 0.5 µm.s-1.

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Cavitation EI25 MPD2 30°C 0,5µm.s-1

0,0E+00

1,0E-03

2,0E-03

3,0E-03

4,0E-03

-2,0E-03 -1,0E-03 0,0E+00 1,0E-03 2,0E-03 3,0E-03 4,0E-03

Cavitation

0.1% plasticité

0.3% plasticité

1% plasticité

2% plasticité

3% plasticité

5% plasticité

Sommet deFissure

Distances en m

Fig. IV-5 Première approche pour l’établissement de la carte du phénomène de cavitation (EI25 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1).

Cette carte, représentative des résultats fournis par cette approche, s’avère imprécise et

incomplète. Le nombre de profils considérés est trop faible. En effet, les profils sont trop espacés

pour pouvoir offrir une précision raisonnable lors du « saut » d’un profil de plasticité à un autre (passage du profil à 0.3 % de plasticité à celui à 0.1 % ici par exemple).

De plus, dans la majorité des cas, les phénomènes dissipatifs considérés se produisent en un certain nombre de points du profil le plus éloigné du sommet de fissure (ici de 0 à 30 ° le long du profil à 0.1 % de plasticité). Il n’est alors pas possible d’estimer la position de la limite de la zone d’occurrence des phénomènes concernés.

Pour palier ces inconvénients, il a donc été nécessaire de développer une seconde approche, non prévue initialement, basée sur l’utilisation de la MELR.

IV.D.4 Seconde approche pour l’établissement d’une cartographie (MELR)

IV.D.4.a Méthodologie

Le choix de la MELR apparaît, cela a été signalé plus haut, mal adapté pour résoudre les problèmes auxquels nous sommes confronté ici.

D’une part la prise en compte de la microstructure des matériaux étudiés semble impossible, en dépit de son rôle dans le développement des phénomènes considérés (II.B.2.a). D’autre part, des mises en gardes contre une utilisation étendue de la MELR ont été émises en raison de la géométrie des éprouvettes CT considérés (II.E.3.c).

Toutefois, la mise en œuvre limitée de cet outil nous permettrait de déterminer précisément, grâce aux expressions simples des champs associés, les limites d’occurrence des différents phénomènes dissipatifs.

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Ces limites apparaissent fortement éloignées (plusieurs millimètres) du sommet de fissure où sont localisés endommagement et plasticité. Il semble donc possible d’envisager que les champs de contraintes et de déformations diffèrent peu, dans ces régions, de ceux donnés par la MELR.

Nous proposons donc, dans un premier temps, de nous assurer de la validité de la mise en œuvre de la MELR dans les zones concernées. Cette validation est réalisée à l’aide des champs locaux extraits sur les profils de plasticité les plus éloignés de la singularité.

Les cartographies exactes des phénomènes dissipatifs considérés sont ensuite obtenues par la MELR, à partir des résultats fournis par la double application de la méthode d’Eshelby et des critères d’amorçage sur le profil le plus éloigné du sommet de fissure.

IV.D.4.b Validation de l’approche par la MELR

L’objectif ici est de vérifier que les champs locaux extraits en III.D sur les profils à 0.1, 0.3 et 1 % de plasticité sont semblables à ceux fournis par la MELR, présentée en II.B.1.b.ii, dont on reprend ici les notations et références.

L’expression des champs de contraintes, donnée par l’équation (12), indique une dépendance en r-0.5. Nous nous efforçons de vérifier cette dépendance pour les champs de contraintes extraits le long des profils de plasticité considérés.

La figure suivante (Fig. IV-6), représentative des résultats obtenus, illustre l’évolution de diverses contraintes, le long des profils à 0.1, 0.3 et 1 % de plasticité, multipliées par r0.5.

EI60 MPD2 10°C 0,5µm.s-1

-1,0

-0,5

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

0 30 60 90 120 150 180θ (°)

σ.r

0,5 (M

Pa.m

0,5 )

σxx.r0,5

σy y .r0,5

σxy .r0,5

Fig. IV-6 Validation de l’utilisation de la MELR (EI60 MPD2 10 °C 0.5 µm.s-1). Une bonne superposition des évolutions est constatée, semblant indiquer la

dépendance en r-0.5 recherchée. L’utilisation de la MELR nous est donc apparue possible le long des profils de plasticité les plus éloignés du sommet de fissure.

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IV.D.4.c Nouvelle cartographie des phénomènes dissipatifs

La méthodologie proposée en IV.D.4.a est appliquée pour établir une nouvelle cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure et en limite de propagation.

La double application de la méthode d’Eshelby et des critères d’amorçage le long des profils à 0.1 % de plasticité est réalisée comme en IV.D.1 et IV.D.2.

Les limites des différentes zones d’occurrences sont ensuite déterminées en assumant une forme des champs de contrainte et déformation identiques à ceux de la MELR.

La cartographie ainsi obtenue est fonction de la vitesse de sollicitation, de la température et de la quantité de renfort dans le matériau.

La figure ci-dessous (Fig. IV-7) illustre le cas du EI25 MPD2 à 30 °C et 0.5 µm.s-1. La forme de l’éprouvette CT est donnée à titre indicatif.

EI25 MPD2 30°C 0,5µm.s-1

-2,0E-02

-1,0E-02

0,0E+00

1,0E-02

2,0E-02

-2,0E-02 -1,0E-02 0,0E+00 1,0E-02 2,0E-02

CavitationPlasticitéCraqueluresCT

Distances en m

Fig. IV-7 Cartographie des phénomènes dissipatifs (EI25 MPD2 30 °C 0.5 µm.s-1).

Une première remarque peut être faite concernant l’étendue des zones déterminées, qui s’avèrent de toute évidence surestimée.

Le cas le plus évident ici est celui de la cavitation : une zone de plus d’un demi centimètre de diamètre est prévue, qui est loin d’être observée expérimentalement. On peut envisager ici une conséquence de la surestimation des champs de contraintes en sommet de fissure qui se produit lors des calculs à l’échelle « Macro » (III.C.3.c).

La forme des zones associées à l’amorçage des phénomènes de craquelures et de plasticité s’avère par ailleurs surprenante, notamment en ce qui concerne les « oreilles » s’étirant vers l’arrière de la fissure.

Plusieurs hypothèses peuvent être émises à ce sujet, dont un effet indésirable du système de chargement par trous et goupilles, ou encore une manifestation de l’état de contrainte non parfaitement triaxial en sommet de fissure dans nos éprouvettes (II.E.3.c).

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155

Les trois figures ci-après (Fig. IV-8 à Fig. IV-10) illustrent diverses évolutions des phénomènes dissipatifs en fonction des paramètres de l’étude. La forme de l’éprouvette CT est également indiquée.

Cavitation EI60 MPD2 30°C

-2,0E-02

-1,0E-02

0,0E+00

1,0E-02

2,0E-02

-2,0E-02 -1,0E-02 0,0E+00 1,0E-02 2,0E-02

0.5 µm.s-15 µm.s-120 µm.s-1CT

Distances en m

Fig. IV-8 Cartographie de la cavitation (EI60 MPD2 30 °C).

Plasticité EI60 MPD2 30°C

-2,0E-02

-1,0E-02

0,0E+00

1,0E-02

2,0E-02

-2,0E-02 -1,0E-02 0,0E+00 1,0E-02 2,0E-02

0.5 µm.s-15 µm.s-120 µm.s-1CT

Distances en m

Fig. IV-9 Cartographie de la plasticité (EI60 MPD2 30 °C).

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156

Craquelures 30°C 0,5 µm.s-1

-2,0E-02

-1,0E-02

0,0E+00

1,0E-02

2,0E-02

-2,0E-02 -1,0E-02 0,0E+00 1,0E-02 2,0E-02

EI60 MPD2EI50 MPD2EI25 MPD2CT

Distances en m

Fig. IV-10 Cartographie des craquelures (30 °C 0.5 µm.s-1)

On note une tendance globale au développement des phénomènes de cavitation et de plasticité sur des zones plus étendues lorsque la température augmente, la vitesse de sollicitation diminue, ou la quantité de renfort dans le matériau augmente.

L’évolution est moins nette en ce qui concerne l’amorçage des craquelures, même si une température élevée semble limiter le phénomène.

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157

IV.E Paramètres de la transition Ductile-Fragile

IV.E.1 Généralités

L’objectif est ici de mettre en évidence les paramètres micromécaniques de premier ordre de la transition Ductile-Fragile dans les matériaux étudiés.

Les surfaces issues de la cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure et en limite de propagation sont normées et comparées en fonction de la température, de la vitesse de sollicitation et de la quantité d’élastomère introduit dans la matrice PMMA.

IV.E.2 Effet de la température

La figure ci-dessous (Fig. IV-11) illustre l’influence de la température sur l’amorçage des phénomènes de plasticité, cavitation et craquelures.

13,8% Vol. élastomère 0,5 µm.s-1

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

-40 -30 -20 -10 0 10 20 30 40 50 60

Température (°C)

Surf

ace

norm

ée

Plasticité Cavitation Craquelures

?

Fig. IV-11 Influence de la température sur la transition Ductile-Fragile (extrapolations en pointillés).

Une première constatation est liée avant tout au lourd handicap que constitue pour

notre étude la réduction de la gamme de conditions expérimentales explorée. Cette réduction, due aux problèmes de convergence des calculs à l’étape « Macro »

(III.B.2.c), fait que la plus grande partie des courbes présentées ci-dessus s’avère être obtenue par extrapolation.

Il est toutefois possible de compléter ce diagramme par le point de Tg de l’élastomère : situé aux alentours de -20 °C (II.D.3), le phénomène de cavitation ne peut se produire en deçà de ce point (perte du contraste de propriétés mécaniques entre matrice et élastomère).

Etant donné le rôle de générateur de plasticité de la cavitation, et le comportement élastique fragile du PMMA non renforcé, on peut considérer qu’aucune plasticité ne se développe en sommet de fissure en dessous de cette température. Le matériau adopterait alors un comportement fragile dont la MELR serait par exemple susceptible de rendre compte.

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158

Le point de transition de craquelure de la matrice PMMA (Schirrer [24]) est également donné, à titre indicatif (-20 °C) : ce point marque un changement de régime dans la capacité d’amorçage de craquelures du matériau.

Dans le cas présenté ici, la disparition du phénomène de craquelures est prédite pour une température de 50 °C, tandis qu’une zone plastique toujours plus étendue en sommet de fissure est prévue lorsque la température augmente. Le comportement du matériau semble alors fortement évoluer vers la ductilité.

On note enfin la présence d’un maximum sur la courbe associée au phénomène de cavitation. Il est possible de voir ici l’effet de l’augmentation de la ductilité de la matrice avec la température. Atteindre le critère de cavitation σhc dans les particules de renfort s’avèrerait de plus en plus difficile avec la baisse progressive du seuil d’écoulement σy du PMMA.

IV.E.3 Effet de la vitesse de sollicitation

La figure ci-après (Fig. IV-12) illustre la sensibilité des phénomènes dissipatifs à la vitesse de sollicitation.

13,8% Vol. élastomère 30°C

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

0,1 1 10 100 1000

Vitesse d'ouverture (µm.s-1)

Surf

ace

norm

ée

Plasticité Cavitation Craquelures

Fig. IV-12 Influence de la vitesse de sollicitation sur la transition Ductile-Fragile

(extrapolations en pointillés).

Il semble que l’on puisse ici extrapoler de deux manières différentes l’évolution de la courbe de plasticité.

Un raisonnement similaire à celui tenu lors de l’analyse précédente (absence totale de plasticité hors cavitation) aboutit à la prévision de l’adoption d’un comportement élastique fragile par le matériau pour une vitesse d’ouverture de l’ordre de 0.15 mm.s-1.

Une telle vitesse, à 30 °C, paraît pourtant insuffisante pour entraîner une perte totale de ductilité de la matrice en sommet de fissure, même en absence de cavitation. D’autant que l’on peut envisager localement ici des états de contraintes très favorables au développement de plasticité (part déviatorique du tenseur des contraintes forte et contrainte hydrostatique faible). On aboutirait alors à une vitesse d’ouverture limite de l’ordre de 0.5 mm.s-1.

Il semble des plus probables que la vitesse de transition se situe entre ces bornes.

Par ailleurs, il apparaît que l’évolution de la propension du matériau à amorcer des craquelures est ici difficilement déterminable.

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159

IV.E.4 Effet de la quantité d’élastomère introduit dans le matériau

Cette dernière figure (Fig. IV-13) illustre l’influence de la quantité d’élastomère introduite dans le matériau sur les phénomènes dissipatifs considérés.

30°C 0,5µm.s-1

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

0 5 10 15 20

Charge élastomère (%Vol.)

Surf

ace

norm

ée

Plasticité Cavitation Craquelures

Fig. IV-13 Influence de la quantité d’élastomère sur la transition Ductile-Fragile

(extrapolations en pointillés).

Une perte de l’effet de renfort « choc » et du comportement ductile du matériau est extrapolée pour une quantité d’élastomère introduit dans la matrice proche de 0 : ce résultat semble des plus cohérents.

D’autre part, l’arrêt de l’amorçage de craquelures serait prévu au-delà d’une quantité seuil d’élastomère introduit dans la matrice (de l’ordre de 25 %).

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160

IV.F Conclusion

La mise en œuvre de l’étape de modélisation « Micro » nous permet d’étudier les

phénomènes dissipatifs considérés à l’échelle de la microstructure des matériaux. Les travaux d’homogénéisation fournissent tout d’abord les propriétés mécaniques des

phases des VER considérés, pour les conditions de température et de vitesse sollicitation dans lesquelles sont calculés les champs locaux. Les valeurs des critères d’amorçage des différents phénomènes dissipatifs sont déterminées ensuite pour ces mêmes conditions.

C’est cette concordance qui nous permet de mettre en œuvre par deux fois la méthode d’Eshelby ainsi que les différents critères d’amorçage, en accord avec la méthodologie de modélisation « Micro » proposée.

L’obtention d’une cartographie satisfaisante des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure, au cœur de l’éprouvette et en limite de propagation, nécessite toutefois la mise en œuvre d’une approche initialement non prévue.

Cette approche, basée sur la MELR, implique la réalisation de travaux de validation. Une fois le confinement de la plasticité et l’endommagement en sommet de fissure confirmé, une cartographie complète et précise peut alors être établie en fonction des paramètres de l’étude.

Deux constatations s’imposent alors. Tout d’abord, la restriction de la gamme de conditions expérimentales explorée, en

raison des problèmes de mise en œuvre de l’étape « Macro », limite sérieusement cette étude. De plus, la surestimation des contraintes lors du calcul des champs locaux s’avère très

probablement à l’origine d’une surévaluation de la surface des zones associées à chacun des phénomènes dissipatifs.

Quoiqu’il en soit, une évolution globale du matériau vers un comportement ductile est observée lorsque la température et le taux de renfort augmentent, ou la vitesse de sollicitation diminue. Cavitation et plasticité se développent alors préférentiellement, au détriment des craquelures.

L’étude des évolutions des différentes surfaces normées permet par ailleurs d’établir clairement le rôle de paramètres de la transition Ductile-Fragile joué par la température, la vitesse de sollicitation et le taux de renfort pour les matériaux considérés.

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V CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Cette étude du développement des divers phénomènes dissipatifs en sommet de fissure dans les matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère permet de mieux appréhender le phénomène de transition Ductile-Fragile.

La méthodologie développée puis mise en œuvre se heurte, il est vrai, à certaines difficultés inhérentes au problème étudié : multiplicité des échelles considérées, diversité des comportements rencontrés, nature des champs de vitesses de déformations en sommet de fissure, etc.

Certains résultats sont néanmoins obtenus, que ce soit lors de la réalisation de travaux expérimentaux, ou lors de la mise en œuvre de la stratégie de modélisation « Macro-Micro ».

Une exploration approfondie des systèmes matrice PMMA/particules de renfort est

réalisée lors des nombreux et divers essais expérimentaux. L’importance de la quantité d’élastomère introduit dans la matrice, ainsi que sa

propension à caviter apparaissent alors intimement liés au processus de renforcement « choc », ainsi qu’à la transition Ductile-Fragile du matériau.

On retiendra la mise en évidence d’une capacité des particules Cœur-Ecorce à caviter sous une sollicitation en déformation de cisaillement. L’origine de cette capacité semblerait se trouver dans un effet de la microstructure des particules de renfort. Des particules de ce type seraient donc susceptibles de conférer des propriétés « choc » pour des sollicitations de cette nature.

Par ailleurs, l’association d’essais sur éprouvettes CT aux techniques de corrélation d’image semble des plus prometteuses. Si les résultats obtenus ici sont d’une précision limitée, un travail plus poussé au niveau des paramètres de corrélation devrait aboutir à de biens meilleurs résultats.

L’utilisation circonstanciée du modèle de Rousselier permet de déterminer les champs de contraintes et déformations macroscopiques autour du sommet de fissure.

Une telle mise en œuvre nous évite d’avoir à remanier en profondeur le modèle. Toutefois de lourdes hypothèses concernant la gestion de la porosité et la croissance des cavités doivent être émises et les méthodes d’identification des paramètres modifiées.

Cette approche, associée à une prise en compte simpliste de la viscosité et conjuguée à la nature complexe des champs en sommet de fissure, s’avère être à l’origine des principales limitations de notre étude.

La non convergence fréquente des calculs nous impose une réduction considérable de la gamme de conditions expérimentales explorée. De plus les contraintes en sommet de fissure s’avèrent être largement surestimées.

L’approche la plus simple que l’on puisse envisager ici pour palier ces difficultés consiste évidemment en une utilisation plus « respectueuse » du modèle. Une identification des paramètres à partir d’essais sur éprouvettes entaillées, tels que préconisés, permettrait de simplifier la démarche de modélisation. Certaines étapes sources d’approximations (passage d’un champ de vitesses de déformations uniforme à une vitesse d’ouverture d’éprouvette CT par exemple) seraient de plus éliminées.

Une meilleure prise en compte du caractère visqueux des matériaux étudiés constitue une seconde voie d’amélioration possible de l’approche « Macro ». On pourrait, dans un premier temps, envisager un simple partitionnement du sommet de fissure lors de la modélisation. Il serait alors possible, à l’aide d’un certain nombre de sous-domaines aux

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propriétés mécaniques différentes, de mieux prendre en compte la nature inhomogène du champ de vitesses de déformations en sommet de fissure. Bien entendu, une prise en compte stricte du phénomène de viscosité reste possible, comme le suggère Rousselier lui-même [83].

Enfin, une gestion mieux adaptée de la croissance des cavités pourrait amener à de meilleurs résultats. On a par exemple vu auparavant que l’on pouvait envisager une cinétique de croissance des cavités comportant un terme de germination contrôlée en contrainte hydrostatique (Besson [61]). A moins, bien sûr, d’utiliser un modèle plus adapté, de type Gurson modifié ([82], [95], etc.).

L’étude des phénomènes dissipatifs à l’échelle de la microstructure s’articule elle autour de l’utilisation de la méthode d’Eshelby couplée à des critères d’amorçage associés aux différents phénomènes dissipatifs considérés.

Une mise en œuvre de la MELR, justifiée au regard du confinement de la plasticité et de l’endommagement en sommet de fissure, est réalisée. Elle permet l’obtention d’une cartographie des phénomènes dissipatifs en sommet de fissure et en limite de propagation. Cette cartographie prend par ailleurs en compte l’effet du développement de cavités sur les autres phénomènes dissipatifs.

En dépit des surestimations liées aux problèmes rencontrés à l’étape de modélisation « Macro », le rôle de paramètres de la transition Ductile-Fragile joué par la température, la vitesse de sollicitation et le taux de renfort du matériau est démontré.

Certaines prévisions peuvent de plus être faites par extrapolation, mais une utilisation généralisée de cette méthode semble inenvisageable tant que les problèmes de convergence rencontrés à l’étape « Macro » ne sont pas résolus.

Afin de compléter cette étude, on pourrait envisager la mise en œuvre de la MIE en lieu et place de la méthode d’Eshelby. On obtiendrait alors l’estimation de l’effet des interactions entre particules, ce qui n’a pu être fait ici.

Au final, un schéma se dégage concernant l’optimisation des matériaux polymères amorphes renforcés « choc » par nodules d’élastomère.

Il est préférable, en fonction des sollicitations mécaniques prévues (vitesse de déformation et température), d’introduire la quantité d’élastomère minimale permettant de conférer le renfort « choc » et la ductilité voulue, afin de diminuer le moins possible la raideur du matériau.

Il est également préférable d’orienter son choix vers l’élastomère présentant la Tg la plus basse, afin de s’assurer du meilleur renfort « choc » possible.

Enfin, les particules de renfort structurées, telles les particules Cœur-Ecorce, sont à privilégier, puisqu’elles permettent de conférer au matériau un renfort « choc » efficace pour une perte de module réduite.

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VI ANNEXES

VI.A Géométrie de l’éprouvette CT

Fig. VI-1 Dimensions préconisées pour les éprouvettes CT par la norme ASTM-E1820 [2].

D’après la norme ASTM-E1820 [2], on a, avec B l’épaisseur de l’éprouvette : W = 2B h = 0.45W D = 0.25W e ≤W/16 Wt = 1.25W Lt = 1.2W Wt = 1.25W S = 0.325W L = 0.55W

VI.B Hypothèse des Petites Perturbations

L’Hypothèse des Petites Perturbations (HPP) suppose de petites déformations et de petits déplacements.

Si le comportement mécanique du matériau peut être linéarisé au voisinage des déformations nulles, alors on traite le problème en élasticité linéaire, en absence de viscosité.

Les mouvements des points d’application des efforts sont négligeables, de sorte que l’on peut assimiler la géométrie de l’état actuel à celle de l’état initial.

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VI.C Modes d’ouverture d’une fissure

Fig. VI-2 Différents modes d’ouverture d’une fissure.

VI.D Mécanique Non Locale de la Rupture

La terminologie « non locale » ne fait pas référence ici à une approche « globale ». Elle signifie que le comportement d’un matériau en un point donné ne dépend pas

seulement des variables d’état du matériau en ce point. En effet, il est également influencé par les variables d’état du matériau autour de ce point, dans un volume défini à partir de la longueur caractéristique du matériau (Besson [61]).

VI.E Validité du modèle de Rousselier

On reprend ici les notations adoptées en II.B.2.b.iii. Dans le cadre de la mécanique de l’endommagement des milieux continus, une

variable d’état f est introduite en plus de la déformation plastique cumulée p et du tenseur des déformations plastiques εp (les variables p et f sont des scalaires).

La thermodynamique des processus irréversibles définit les forces thermodynamiques (P, F) telles que l’énergie interne spécifique dissipée soit :

(38) 0fFpPε:ρσ p ≥−− &&&

avec ρ la densité (ρ = ρ0 dans l’état de référence non endommagé). Les variables σ/ρ, P et F associées aux variables internes εp, p et f dérivent de

l’énergie libre spécifique ( )fp,,εeΨ . Comme pe εεε += , on peut écrire :

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165

(39) ep εερσ

∂Ψ∂

=∂

Ψ∂−=

pP

∂Ψ∂

= f

F∂Ψ∂

=

On suppose alors que ψ est une fonction additive :

(40) ( ) ( )fpε:E:ε21

fpee Ψ+Ψ+=Ψ

Il existe donc la fonction R, telle que P = R(p), courbe d’écrouissage du matériau, et la

fonction h, telle que F = h-1(f) et f = h(F). L’existence d’un potentiel plastique est postulée, dépendant à la fois de la contrainte

hydrostatique σh (couplée à F) et de la contrainte équivalente de von Mises σeq (couplée à P) :

(41) ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛+⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛=⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛ F,ρσΦP,

ρσ

ΦFP,,ρσ

Φ hm

eqvM

Le premier terme de cette expression Pρσ

Φ eqvM += correspond au potentiel plastique

de von Mises (critère de plasticité pour ΦvM = 0), avec :

( )ddeq σ:σ23σ =

Iσσσ hd −=

( )σTr31σh =

La forme non triviale la plus simple est attribuée au second terme de cette expression :

(42) ( )FhρσgΦ h

m ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛=

Avec λ le multiplicateur plastique, les règles de normalisation donnent alors :

(43) ( ) eq

dvMpd σ

σ23p

/ρσΦλε && =

∂∂

=

(44) ( ) ( )Fhρσg'p

31

/ρσΦλ

31ε h

h

mpm ⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛=

∂∂

= &&

(45) ( ) λPΦλp =

∂∂

−=&

(46) ( ) ( )Fh'ρσgp-

FΦ-λf h

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛=

∂∂

= &&

La variable f est définie comme étant la fraction volumique de vide, et l’on considère

la matrice comme étant incompressible (la déformation élastique volumique emε est négligée) :

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166

(47) ( ) ( )0f1/f1ρ −−= et ( ) pmεf13f && −=

avec f0 constante, paramètre du modèle (porosité initiale). Il est ensuite démontré que :

(48) ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛=⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

c

hcR

h

ρσσExpσD

ρσg et ⎟

⎠⎞

⎜⎝⎛

−−=

f1flnσConst.F c

avec DR et σc deux autres paramètres du modèle.

On rappelle par ailleurs les expressions suivantes :

( )pd

pd ε:ε

32p &&& =

Iεεε pm

pd

p &&& +=

( )ppm εTr

31ε && =

Enfin, concernant l’introduction de la porosité critique fc, le lecteur est renvoyé à la

formulation du modèle donnée en II.B.2.b.iii.

VI.F Etude de l’influence de certains paramètres du modèle de Rousselier

Influence de DR (0, 0.1, 0.5, 1)

0

10

20

30

40

50

0 5 10 15 20

Déformation vraie (%)

Con

train

te v

raie

(MPa

)

0

0,3

0,6

0,9

1,2

1,5V

aria

tion

de v

olum

e in

élas

tique

(%)

Fig. VI-3 Influence du paramètre DR : DR augmente de 0 à 1, f0 = 0.1, fc = 0.5, σc = σy = 45 MPa.

Contrainte vraie en traits continus, variation de volume inélastique en pointillés.

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Influence de f0 (0.001, 0.1, 0.5)

0

10

20

30

40

50

0 5 10 15 20

Déformation vraie (%)

Cont

rain

te v

raie

(MP

a)

0

1

2

3

4

5

Var

iatio

n de

vol

ume

inél

astiq

ue (%

)

Fig. VI-4 Influence du paramètre f0 : f0 augmente de 0.001 à 0.5, DR = 0.5, fc = 0.9, σc = σy = 45 MPa.

Contrainte vraie en traits continus, variation de volume inélastique en pointillés.

VI.G Maillage utilisé pour la modélisation des tests CT

Fig. VI-5 Maillage : la face avant correspond au plan central de l’éprouvette CT.

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VI.H Sensibilité des résultats de modélisations CT aux paramètres du maillage

Influence du maillage

0,0E+00

2,0E-03

4,0E-03

6,0E-03

-4,0E-03 -2,0E-03 0,0E+00 2,0E-03 4,0E-03 6,0E-03

n = 1, d = 4d0

n = 3, d = 4d0

n = 1, d = 9d0

Distances en m

Fig. VI-6 Influence, sur un profil type (0.1 % de plasticité), du nombre n de couches d’éléments dans la demi-épaisseur de l’éprouvette et de la densité d des éléments en surface.

Le maillage obtenu pour n =1 et d = 9d0 a été donné ci-avant en annexe G.

Influence de la nature des Eléments Finis

0,0E+00

1,0E-03

2,0E-03

3,0E-03

4,0E-03

-2,0E-03 -1,0E-03 0,0E+00 1,0E-03 2,0E-03 3,0E-03 4,0E-03

Cubes 8 noeuds

Cubes 20 noeuds

Distances en m

Fig. VI-7 Influence, sur un profil type (1 % de plasticité), de la nature des Eléments Finis.

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Une matrice polymère amorphe renforcée de nodules en élastomère peut dissiper l’énergie de trois façons différentes lorsqu’elle est soumise à une contrainte : par craquelage de la matrice, par déformation plastique de la matrice, par développement de cavités dans l’élastomère.

L’étude de la zone de progression qui précède le sommet de fissure implique à la fois des travaux expérimentaux (essais à champs uniformes et essais de rupture), ainsi que des travaux de modélisation aux échelles microscopiques et macroscopiques (méthodes numériques et méthodes analytiques).

Notre objectif est d’améliorer la connaissance de la compétition qui se déroule entre ces trois phénomènes et de mieux comprendre la transition Ductile-Fragile de ces matériaux, en vue d’une réduction de leur domaine de fragilité.

L’aspect expérimental de notre étude nous permet, au moyen de matériaux modèles, de nous confronter directement au problème de transition Ductile-Fragile, et de vérifier des prévisions. La modélisation numérique nous permet de déterminer les paramètres micromécaniques de premier ordre des différents phénomènes de dissipation d’énergie et de la transition Ductile-Fragile.

Under stress, rubber toughened amorphous polymers have three ways to dissipate energy: crazes in the matrix, plasticity in the matrix, and cavitation in the rubber particles.

The study of the processing zone ahead the crack tip implies both practical work (homogeneous fields tests and crack tests) and numerical treatment at microscopic and macroscopic scales (numerical and analytical methods).

Our goal is to achieve a better knowledge of the nature, interactions and efficiency of the dissipating phenomena and of the Ductile-Brittle transition of those materials, and then reduce their brittle zone.

Practical works on model materials allow the study of the Ductile-Brittle transition and the verification of the numerical predictions. Numerical treatments allow the determination of the first order micromechanical parameters of the different dissipative phenomena and Ductile-Brittle transition.