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    Olivier OLLIVIER

    LE SOUFFLE DES

    ANGES

    - Collection Esotrisme / Spiritualit -

    Retrouvez cette oeuvre et beaucoup d'autres surhttp://www.inlibroveritas.net

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    Table des matiresLE SOUFFLE DES ANGES......................................................................1

    AUX BALCONS DU CIEL................................................................2Prologue........................................... ...............................................4Un billet pour le Ciel.......................................................................7Petit moineau rentre au nid...........................................................24Un ascenseur pour le Paradis........................................................29Angla for Ever.............................................................................40Au cur de lessentiel...................................................................67Agapes clestes.............................................................................87

    Quand le Soleil rencontre la Lune...............................................105

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    LE SOUFFLE DES ANGES

    Auteur : Olivier OLLIVIERCatgorie : Esotrisme / Spiritualit

    C'est une merveilleuse histoire d'amour. Une histoire d'amour entre laTerre et le Ciel, une histoire d'amour avec des Anges. Des balcons du Ciel,ils regardent l'humanit apprendre s'aimer, et de leur ternit, rvent de se

    joindre l'blouissante distribution d'une pice se jouant sur le plancherdes vaches.Sur la terre, il y a une gniale couturire dpressive, une petitefille qui fait apparatre des fleurs, un milliardaire amoureux qui dteste lesbisons, une grand-mre accoucheuse d'me, une mannequin noire laplastique fabuleuse, et un trappeur solitaire au cur pur. Dans le Ciel, il ya un gros ange myope, un oiseau rouge qui devient blanc, une jeune femmequi promne son tigre, un pizzaiolo qui lvite et une femme ! une femme sibelle qu'elle s'en appelle Syble. . .Dans cette histoire, on mdite et on prie,

    et comme il y a de la posie, alors on pleure et on rit. Certains enfants n'ensont pas et les anges n'ont pas d'ailes. De petites gens grandissent, despauvres deviennent riches, et tous cherchent faire rimer amour et pardon.Pourtant, il y aura des arbres calcins, de vieux escarpins uss, desfontaines qui se tarissent, des curs qui saignent, des bosses et denombreux coups de foudre. Mais heureusement aussi, un photographemaladroit, deux anges qui prparent d'tonnants vtements, un bb quinat dans les toiles, et une geisha qui adore le strip-tease.

    En lisant ce livre, l'me se rappellera que le ciel et la terre ne font qu'un, etchacun rvera d'en faire autant pour lui-mme.

    Licence : Licence Creative Commons (by-nc-nd)http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr/

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    AUX BALCONS DU CIEL

    E:LIVRE OLIVIERAnge & Angecouverture livre olivier2Diapositive1.JPG

    Novembre 2010Quatrime de couverture.

    Cest une merveilleuse histoire damour. Une histoire damour entre laTerre et le Ciel, une histoire damour avec des Anges. Des balcons du Ciel,ils regardent lhumanit apprendre saimer, et de leur ternit, rvent dese joindre lblouissante distribution dune pice se jouant sur le plancherdes vaches. Sur la terre, il y a une gniale couturire dpressive, une petitefille qui fait apparatre des fleurs, un milliardaire amoureux qui dteste les

    bisons, une grand-mre accoucheuse dme, une mannequin noire laplastique fabuleuse, et un trappeur solitaire au cur pur. Dans le Ciel, il ya un gros ange myope, un oiseau rouge qui devient blanc, une jeune femmequi promne son tigre, un pizzaiolo qui lvite et une femme ! une femme sibelle quelle sen appelle Syble. . .

    Dans cette histoire, on mdite et on prie, et comme il y a de la posie, alorson pleure et on rit. Certains enfants nen sont pas et les anges nont pas

    dailes. De petites gens grandissent, des pauvres deviennent riches, et touscherchent faire rimer amour et pardon. Pourtant, il y a aussi des arbrescalcins, de vieux escarpins uss, des fontaines qui se tarissent, des cursqui saignent, des bosses et de nombreux coups de foudre. Maisheureusement aussi, un photographe maladroit, deux anges qui fabriquentdtonnants vtements, un bb qui nat dans les toiles, et une geisha quiadore le strip-tease.

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    En lisant ce livre, lme se rappellera que le ciel et la terre ne font quun, etchacun rvera den faire autant pour lui-mme.

    Synopsys.

    Alex et Angla dcdent le mme jour la mme heure et sont emmensau Ciel, ou plutt vers un autre plan vibratoire, par un Ange seprnommant Gus. Celui-ci deviendra un guide, un ami et bien plus encore.Nos deux hros vont se dcouvrir, se rvler et, quoi de plus naturel,saimer. Mais sont-ils en train dapprendre ou de se rappeler ? Sont-ils entrain de vivre ou de rver ?

    En dcouvrant un monde o la ralit nest souvent quune illusion, o toutsobtient dun claquement de doigts, o chaque acte, chaque aventure estune clef vers soi-mme, ils vont ressusciter les secrets de lexistence, deleur vie et de leur Amour. En vivant une initiation cleste qui lesemmnera au plus profond deux-mmes, l o lme reflte celle dunDieu, ils vont se souvenir, ils vont grandir, ils vont saimer, et peut-tremme oser devenir ce quils sont ?

    Suggestion daccompagnement musical :Bande originale du film BABYLON. AD, Atli rvarssonBande originale du film KINGDOM OF HEAVEN, Harry

    Gregson-Williams

    Le messager nest quun messager.

    Seul importe le message. . .

    En ce temps de changement, lintention de ce livre est prcieuse.

    Apporter de lEspoir, de la Lumire et de lAmour. . .

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    Chaque fois quil le ferme, il mdite et se souvient.

    Chaque fois quil louvre, il se retrouve. . .

    Quil en soit ainsi. . .

    La plupart des Sages ont enseign que, de toute ternit,le Monde tait dessin dans son (propre) Archtype.

    Mais cet Archtype, qui est toute lumire, repli sur lui-mme comme unlivre

    avant la cration de lUnivers, ne brillait que pour soi.Il sest ouvert et dvelopp, dans la production du Monde comme sil

    accouchait.

    Il a rendu manifeste son ouvrage, auparavant cach en esprit comme dansune matrice, par une extension de son essence, et il a ainsi produit le

    Monde idal,puis comme daprs une image (dj) redouble de la divinit le

    Monde actuel et matriel.Cest ce quindique le Trismgiste lorsquil dit que Dieu changea de

    forme,et que toutes choses furent soudain rvles et converties en lumire.

    Enchiridion Physicae Restitutae (La Philosophie Naturelle Restitue)DESPAGNET

    Prologue

    Vis ta vie comme si ctait ton dernier jour, et rve la comme si tu avaislternit.

    Vous avez sans doute lhabitude de rver, et parfois mme de voussouvenir de vos rves une fois rveill. moins que vous ne prfriez,comme moi, rver de faon lucide, et dans ce cas, songer en touteconscience ? Parfois, certains rves semblent si rels pour notre esprit quecelui-ci se prte immdiatement au jeu, confondant avec bonheur le rve etla ralit. Un sentiment ou peut-tre une ide vous a sans doute effleurdans lune ou lautre de ces situations. Et si les rves nen taient pas.

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    Que sont nos rves ? De pures crations de lesprit ? Les souvenirs dunailleurs ou dune autre ralit ? Dphmres fragments de vies dont noussommes le hros ? Ceux dun tre secret et sans limite qui veille en nous ?

    Qui rve, et de quoi ? Qui a-t-il de rel ? Quest-ce qui ne lest pas ?

    Jaime rver, cest mme mon plus grand talent. Quand parfois, en touteConscience, jautorise librement mon esprit se laisser chevaucher par lalumire dore, je pars la recherche dun possible nouvel absolu, jinsuffledans la permanence dun prsent sans frontires mon plaisir et monintention de participer la cration de la ralit. Je favorise ainsi unesublime exprience de moi-mme travers un songe, celui de dmontrer

    de manire blouissante ce que je suis. Pour celui dont le regard nest portni derrire ni devant, ni autre part que maintenant, celui-l sort dusommeil, il comprend le rve et sa raison dtre. la lumire de la ralit,la vrit lui apparat enfin, il ne croit plus, il sait, il est en paix.

    Avant le rve, jtais parfait et lumineux, limage de la Conscience dontjtais le germe et lespoir. En moi avaient t sems dinestimablestrsors, la capacit de rver et lenvie de concevoir ma propre vie, de fairelexprience de moi-mme. Mon unique raison dtre tait de me connatreet de devenir, et mme si invitablement je mgarerais en chemin, tacherde fa i re de mon mieux. force de pa t ience e t de conf iance ,progressivement le rve sest clair, il est devenu plus vrai, plus tangible,et plus je devenais lucide, plus jexistais et plus jtais heureux de maprodigieuse existence. Une ralit apparaissait et se dployait autour demoi, je vivais dintenses motions, pleurais et riais chaudes larmes, et

    parfois mme je souffrais. Mais il y avait les autres moments, mesprfrs, ceux qui remplissent dallgresse, de mille sensations dlicieuseset surtout dintarissables sentiments. Lillusion tait parfaite, chaqueinstant tait pure magie, la vie rve semblait bien plus relle que dansmon rve.

    Jai longtemps appris avant de finalement russir discipliner le fabuleuxtalent qui mhabitait. Au dbut sans savoir quil tait l, et ensuite sans

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    trop savoir comment my prendre. Un seul dsir maccompagnait alors,celui de connatre le grand Amour et de rencontrer mon me sur, carjtais certains den avoir une, cela me semblait une vidence puisque je nefaisais que de rver damour, mais il ny avait personne pour partager mon

    rve. Ce fut le temps de lerrance, de lgarement et de la peur. Cependant,je sais maintenant que le propre du rve est de nous duquer.

    un moment, jai cess de penser ou dimaginer les choses, de toute faoncela me poussait vouloir toujours plus, toujours mieux et finalementnuisait ma raison dtre. Larrt du dsir a fait cesser la peur, sa placemaintenant, il y a La Lumire. Elle brille dun feu lointain pourtant siproche, je sens sa prsence et sa chaleur toujours plus troublante, toujours

    plus exaltante, elle sapproche, moins que ce ne soit moi qui avance, elleest l, elle est partout ! Jai parfois la sensation quelle se nourrit de lafertilit de mon esprit, de sa novation, mais en ralit je me nourris delle,et lapptit de Conscience et de flamboyance qui sest anim en moi nestpas encore satisfait, loin dtre totalement rassasi. Bientt la boucle seraboucle, nous serons runis, et alors je saurai qui de nous deux fait le rve.

    En attendant, lorsque je me hisse sur les paules de ma conscience, jeretourne la lumire dore o je suis n, et du haut de cette lumineuseternit, je regarde ce qui a t accompli et le relate au temps pass,puisque ce nest plus quun reflet qui sert rendre compte des silences etdes passions dune existence o jai tellement reu. Il a suffi de quelquesmots. Alors maintenant je me rappelle avant de dcider doublier unenouvelle fois pour tout recommencer. . .

    Sceptique, lhomme a besoin darguments secs, prcis et appuys sur des

    faits.Mais pour vous, mres, pouses, surs qui pleurez un cher disparu,

    cette argumentation est inutile. Votre intuition suffit.Gardiennes des forces les plus subtiles de la Nature, quelque chose rside

    en vous,

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    qui parle plus clairement et plus haut que tous les raisonnementscompliqus des hommes.

    Vous sentez et vous savez que les chers morts sont l autour de vous.Ils viennent en un songe trop peu souvent renouvel embrasser la mre ou

    lpouse aimeLe petit enfant que les forces terrestres nont pas encore accapar tout fait,

    vit aussi sur deux plans et il aperoit ltat de veille le papasoldat

    que la mre pleure en cachette !Hallucinations, troubles nerveux, folies, dit le savant

    Mais la femme sait bien que ce sont l des ralits plus hautes que les

    ralits terrestres.

    Ce Que Deviennent Nos MortsPAPUS (Dr Encausse)

    Un billet pour le Ciel.

    Ne sais-tu pas que la source de toutes les misres de lhomme, ce nest

    pas la mort,mais la crainte de la mort ? pictte.

    Dans le rve, je me nommais Alex, mais ctait un nom parmi dautres. Jeme souviens davoir eu fort peur, bien qualors je dise le contraire. Jentais pas trs heureux, ma vie manquait de tendresse et dAmour, jtaispourtant persuad de linverse. Un rve en somme, comme beaucoupdautres rves. Le plus curieux aujourdhui, est de ne plus vraiment me

    souvenir des dtails, cest devenu une ambiance, une couleur, cependant, jeme souviens trs bien du moment de ma mort, forcment, cest celui ou jeme suis rveill. Aussi bizarre que cela puisse paratre, linstant demourir je suis sorti du rve et depuis je me rappelle de tout et surtoutpourquoi.

    Dans le rve, je suis mort le trente et un octobre deux mille neuf, vingtdeux heures trente trois. Cette prcision na aucun intrt au demeurant, si

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    ce nest de concider prcisment avec un autre vnement fondamentalpostrieur ma mort. Ce jour devait tre marqu dune pierre blanche dansma ligne de vie car, au-del dtre celui de ma mort et de concorder avecune autre existence, titre plus lger, javais rendez-vous avec la plus belle

    fille du canton.

    Si vous aviez demand lavis de mes camarades, ils vous auraient sansdoute rpondu quelle tait jolie, alors quen ralit ils la trouvaient pluttquelconque. Cependant, pour moi dans le rve, elle apparaissait tout faitadorable. Durant trois longs mois, javais valu discrtement Flicityavant de laborder et de finalement linviter. Peut-tre voulais-je ainsi mefaire une ide avant de mengager plus loin, mais il est plus vraisemblable

    de parler dun terrible manque de confiance, ou pour tre gentil, detimidit. Elle tait athltique, grande, blonde avec des yeux bleus et desdents parfaitement blanches et alignes par des annes et des milliers dedollars de dentisterie. Elle en tait sortie embellie dun sourire impossible rendre naturel, et malgr ce dtail qui magaait, cette fille ne me laissaitpas indiffrent, sans doute parce quelle tait la seule avoir accept unrendez-vous avec moi cette anne-l. Alors, javais tout fait pour ne pasavoir trop lair dtre moi-mme. Sil avait t l, Gus aurait certainementdit un truc dans le genre : Cest absurde ! autant tout faire pour tresoi-mme. Ou encore : Cest dj pas facile dtre soi-mme, alors sien plus il faut jouer la comdie ! Il a bien videmment raison, maismaintenant cela na plus dimportance, Flicity et mon rendez-vous sontbien loin.

    Dans le rve, je navais pas de pre ou en tout cas je ne lavais pas connu,

    nous nen parlerons donc pas. Par contre javais une mre pour qui le motdpression avait d tre invent, car je ne lai jamais vue sans son sac demdicaments porte de main. Autant dire que je me tapais sur le ventrequand, dans un de ses rares moments de lucidit, elle me faisait la moralesur la drogue et ses dangers. Aucun risque, on ne pouvait avoir envie de aquand on voyait sa tte, son teint blme, ses yeux chavirs, son chignon detravers et cet air triste quelle semblait cultiver uniquement pour faire piti.Toujours absente ou presque, tellement loin delle-mme, javais parfois

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    limpression de vivre avec son fantme. Ma grand-mre assurait pourtantque, dans mon enfance, elle avait vraiment t heureuse. Je conservaisquelques souvenirs fugitifs de ce temps rvolu, un chant cristallin, unsourire, un parfum, limage fugace dune belle jeune femme rieuse, des

    souvenirs qui prenaient avec le temps laspect dune vitre se recouvrantinexorablement de poussire.

    Sil y avait une chose dans laquelle ma mre excellait et faisait preuvedune relle inspiration, ctait bien la couture. Elle excutait tout un tas devtements extraordinaires quelle ne mettait videmment jamais, prfrantsenlaidir dune horrible robe de chambre en pilou. Pourtant, sesralisations taient toutes plus magnifiques les unes que les autres ? Sur le

    mannequin de couturire qui hantait notre salon, jai vu se btir de puresmerveilles, assez lgantes et chic pour combler nimporte quel homme oufemme de got. Si ma mre avait t un peu plus elle-mme, je suispersuad que les meilleures maisons de couture se seraient arrach sescrations, mais elle ncoutait pas et restait gare dans le vague,nesprant rien de la vie, part sa livraison hebdomadaire de mdicaments.

    La seule dans ma famille tre vraiment bien dans sa peau est sansconteste ma grand-mre, je vous parlerai delle en dtail plus tard.

    Je ne me suis pas dcrit, il faut comprendre qu un certain niveau laspectdevient un dtail de moindre importance. Dans la mort, lapparence est trsincertaine. Un esprit sans corps peut sinventer tous les corps, et il ne senprive pas. Notre allure se transforme donc au gr de nos humeurs ou de nosenvies, et surtout de nos motions. Pour un esprit libr de la matire, cest

    trs facile, car une fois mort le corps se transforme et retourne enpoussire, la seule chose qui reste de nous, est un esprit dsincarn quivirtualise un corps, en gnral celui dun jeune trentenaire. Cette formerevt alors nos diffrentes personnalits comme un vtement.

    Au dbut, on garde son corps de mmoire, le corps de ses derniers instants,jusqu tre dbarrass du pass et du dernier rve de notre vie. Pourrapidement me dcrire, jutiliserai donc la physionomie de ma dernire

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    heure sur Terre, de toute faon cette apparence est reste quasiment lamme jusquau moment de mon total rveil.

    Dans le rve, je mappelle Alex, Alex Church. Jai dix-neuf ans, un mtre

    quatre-vingt-cinq, quatre-vingt-trois kilos, on me trouve plutt beaugaron, mais en ralit je suis semblable des millions de gars de mon ge.Visage long, naturellement bronz, de longs cils effils comme ceux dunefemme, et de grands yeux doux couleur bleu outremer paillet dor, magrand-mre appelle cette couleur lapis-lazuli. Je suis surtout un jeunehomme pargn par lacn, sportif et plutt bien dans sa peau, du moinscest ce que je disais ! Ah oui, jai tout de mme une petite spcificit, mescheveux. Ils sont mi-longs, bruns aux reflets noirs agrments dune large

    mche blanche, sorte de virgule immacule au milieu du front. Quand jailes cheveux courts, on dirait un peu la crte dun Mohican. Autant vous ledire tout de suite, le genre dcolor est srement trs la mode dans lesmilieux citadins branchs, mais pour moi, humble rsidant dun patelinretir du Canada, cette marque de naissance fut parfois pnible vivre.

    cause delle, mon enfance a t maille de quolibets de tout poil, mescamarades sen sont donn cur joie, mais ce ntait rien compar lattitude des adultes parfois pires que leur progniture devant ladiffrence. Ce nest pas dans les mots quune grande personne affiche sondgot, elle vous regarde avec un air pinc comme si vous tiez unepomme en train de pourrir et de gter le reste du panier, pathtique !

    Oui, je sais, juger, cest devenir ce que lon juge. Gus me le rpte souventlorsquil joue au rabat-joie. Pour ma part, je me suis mis aimer cette

    mche blanche vers ladolescence, elle ma permis dtre dans le camp desautres, les diffrents, un peu rebelle mais pas trop. a collait parfaitementavec mon caractre dsinvolte qui masquait sans y parvenir certainementde nombreuses peurs. Cette mche, ctait un peu ma diffrence, avec elleje me sentais unique, je ne pouvais imaginer mon erreur. Se tromper, cest faire triompher lerreur , dit parfois Gus, qui a souventun curieux point de vue sur les choses.

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    Mon rve tait assez calme. Si je fais abstraction des quelques frasques quilont enjoliv, en ralit il tait insipide. Jattendais quelque chose qui nevenait pas, mais je ne savais pas quoi. Depuis mon rveil par contre, dumoins depuis ma mort, mon existence a pris une tout autre tournure. Ma

    vie continue comme si elle ne stait jamais interrompue et je doiscertainement tre maintenant au Paradis. De dormeur, je suis devenuacteur, et cest tout bonnement stupfiant. Difficile de prciser depuiscombien de temps, car o je suis, il ny a pas de montres ni dhorloges, letemps est relatif, il ne va pas la mme vitesse pour tous, et parfois mmeil nexiste pas ! Cependant une chose est certaine, la vie est ternelle, etquand on a lternit, inutile de se mettre compter. Dixit Gus,videmment.

    Vous devez srement vous demander qui est ce Gus dont je parle ? Eh bienje vais immdiatement vous clairer sur son compte. Gus est mon passeur,une sorte de faucheur dmes venu me chercher ma mort. Il est charg demaider me rveiller compltement. Cest un Essentiel, lquivalent dunAnge pour la plupart dentre vous. Il ma permis daccder un nouveauplan de Conscience, disons pour simplifier le Ciel, mais rassurez-vous, jevais vous expliquer. Gus est devenu un ami, un de ceux avec qui je passele plus de temps. Vous allez trs vite vous en apercevoir, si lespersonnages qui peuplent nos rves cachent bien leur jeu, une fois rveill,vous comprenez non seulement la raison du rve mais aussi que nosproccupations terre terre sont bien loignes de la ralit cleste. Je vaiscommencer par le dbut. Pour moi cest linstant de ma mort, le momento je me suis rveill du rve, alors puisque jai dcid de me rappeler,autant dbuter par l.

    Cest a, cela me revient maintenant. Chacun de mes sens se souvientencore du rve et se replace dans la sensation de linstant. Ctait enoctobre, je gagnais la ville moto sous un soleil radieux, et filais sur unchemin bord de vnrables rables. Il y avait longtemps que nousnavions pas eu une de ces journes dt indien si agrable. Le temps taitsplendide, suffisamment chaud pour ne porter quun blouson lger danslequel sengouffrait le souffle de lair tide. Mon casque au guidon, ma

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    mche flottant tel un panache blanc, je roulais le nez au vent, le corps,lesprit et lme unis par ce dlicieux moment divresse et de libert. Jerevois, je ressens ce pur instant de plnitude, cest comme si jtais denouveau entre les bras de Dame Nature.

    Les feuilles carlates pares dor, de cuivre et dairain scintillaient dans lalumire. Elles saluaient mon passage en se laissant tomber des arbres pourtapisser le sol dun somptueux tapis aux couleurs darrire-saison. Jelaissais sur la route un profond sillon que dautres feuilles viendraientbientt recouvrir pour effacer ainsi lphmre trace de mon passage surTerre. Le soleil bas offrait une lumire transparente qui intensifiait lanettet de chaque lment du tableau dans lequel jvoluais. Le ciel

    limpide dispensait une puret absolue. Des effluves de terre chargsdodeurs vgtales embaumaient mon chemin. Je recevais la vie en pleineface et elle mblouissait encore et encore. La chaleur des rayons du soleilpntrait jusquau plus profond de ma chair, mes mains, ma peau et chaquecellule de mon corps soffraient aux attentions de lastre. Lair caressaitmes cheveux qui rsistaient un instant pour finalement sabandonner ladouce impertinence des lments.

    Je filais vite, javais rendez-vous avec une fille de rve, du moins de monrve, tout tait donc permis. Je devais la retrouver lEscale, un pub o setrouvaient les trois seuls flippers des miles la ronde. Des jeux vidoantdiluviens, un billard fatigu et un Wurlitzer sans ge composaient untrsor dans ce repaire de la jeunesse locale. Le nom lEscale ,anachronique dans ce lieu sans voies navigables notables ni pirates, venaitdun cabaret de la cte du Labrador dont les lments avaient t achets

    aux enchres. On lavait dmont pour faire place un nime centrecommercial, futur unique endroit de plaisir du monde moderne. Pourbeaucoup dentre nous, au fin fond de rien, si loin de tout, ctaiteffectivement devenu une escale. Je comptais bien arriver en avance afinde chasser mes angoisses et la moiteur de mes mains avec quelques bonnesparties de flipper. Javais lme amoureuse, lesprit en bullition et la ttepleine des mots, et sans men douter un instant, je roulais implacablementvers mon destin.

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    Mon casque se dtacha brusquement et rebondit sur la route. Ma rouearrire lcrasa avec un bruit sinistre et lenvoya terminer sa course dansun talus loin derrire. Tout se passa ensuite trs vite, je neus rien faire de

    particulier pour mourir ! le choc me fit perdre le contrle. Les freins serrs mort (cest le cas de le dire) conjugus lembarde de la machine, je fuspropuls en avant. Mon regard ne voyait plus quun arbre emplissant maralit toute vitesse. Il y eut un grand craquement et plus rien. Je mesouviens juste davoir rouvert les yeux les quatre fers en lair dans unchamp voisin.

    Immdiatement relev, je me palpai, vrifiai mes blessures, mais rien, pas

    de douleur, pas mme un accroc aux vtements que javais mis tant de soin choisir. Cest dingue la mmoire, les dtails dont on se souvient malgrle temps, je me rappelle de mtre dit alors :

    - La vache, mme pas mal !

    Aprs une seconde de soulagement, je fus pris dun doute quant ltat dema moto, et fis volte-face pour me trouver nez nez avec le tronc dunnorme rable plusieurs fois centenaire. Il culminait au moins trentemtres de haut et sa circonfrence bouchait totalement la vue. Pas debcane lhorizon.

    Lodeur boise, presque poudreuse de lcorce, et celle du cur de larbre,plus tendre, humide, me fit prendre conscience de milliers dautres odeursperues de faon inhabituelle, ctait enivrant. Il y avait celles de la terrelourde, acre, gorge de la pluie des dernires semaines, les feuilles,

    lhumus, les vers de terre, des dizaines dinsectes diffrents et tout un tasde senteurs insolites. Les fourmis sur le tronc avaient des fragrances decarapace, dantennes, et dune autre odeur plus forte, acide, dominantlensemble. Je pouvais distinguer de faon ahurissante, chacune des odeurssparment ou toutes ensemble dans un festival de mystrieusesexhalaisons de la nature.

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    Quel grand prodige, lair, lair lui-mme embaumait ! Il y avait une sortede brume diaphane parfume autour des choses que je navais jamaisremarque auparavant. Mes papilles taient littralement la fte, ellessalivaient pour me rjouir des saveurs que jaspirais grands traits. Une

    simple chute mavait ouvert les sens car, depuis mon accident, jentendaisaussi une profusion de sons avec la limpidit de loreille absolue. Monesprit tait ouvert comme jamais, totalement rceptif, uni aux lments. Jeme sentais bien, formidablement bien, aussi bien quaprs avoirlonguement pleur. Je restai un instant admiratif ce chamboulementsensoriel, contemplant une ralit qui brusquement venait de prendre untout autre relief.

    Jeus soudain une pense pour Flicity et mon rendez-vous. Un coup dil ma montre me fit dire :

    - Mince !Aucun doute, en voyant les vilains clats de verre et sa forme tordue, elletait foutue. Je lenlevai, stupfait de ne pas tre bless lendroit de lacassure, quand une voix sleva derrire moi :

    - De toute faon, tu nen auras plus besoin maintenant.

    Un jeune homme de mon ge vtu dune faon improbable me regardait. Iltait plus que balourd et rondouillard, il tait norme. Il portait ununiforme scolaire anglais. Un blazer vert bouteille distendu par sonembonpoint et orn dun cusson dor. Un bermuda gris bien trop petit luimoulait le derrire et les cuisses comme un de ces vtements pour maigrir.Une casquette de criquet, une fine cravate verte, une chemise blanche quibaillait si fort que lon avait envie de lenvoyer faire un somme, lunettes

    rondes en acier aux verres pais, cheveux gras dvoilant un pi disgracieuxqui lempcherait tout jamais dtre bien coiff, ce physique discutable,ctait Gus !

    Il souriait et mobservait silencieusement avec lair satisfait de celui quisait et pas vous. Il me faisait penser au guitariste dun vieux groupe derock des annes quatre-vingt que la bire aurait transform en barrique.

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    - Vous avez vu cette gamelle et pas une gratignure avec a. Incroyablenon. Affirmai-je tout en guettant un signe de sa part. Je nai pas encore vuma moto, mais pour le reste, a va, part ma montre.Le jeune homme me regardait avec un sourire la l imite de la

    consternation, presque triste.- Pourquoi me regardez-vous avec cet air bizarre, vous tes du coin ?Il nen avait pas lair, je connaissais pratiquement tout le monde sur vingtmiles la ronde.

    - Qui tes-vous ?- Je mappelle Gustave, mais tu peux dire Gus, tous le monde mappelle

    Gus.Intrieurement, je me dis quavec un patronyme et un style pareil, je ne

    risquais rien de ce type.- Cest marrant ce nom, disons quil va bien avec votre apparence, dis-je

    tout en me foutant de lui dans ma tte. Moi, je mappelle . . .Coupant la fin de ma phrase, il me sortit dun trait :

    - Alex Church n le trente un octobre mille neuf cent quatre-vingt dix trois heures trente trois du matin, dans la ville de LAnge Gardien sur LaCte de Beaupr, province de Qubec, Canada.Interloqu par lexactitude des lments, je rpliquai vivement :

    - Comment savez-vous tout a ? Jai perdu connaissance et vous mavezfait les poches ! En le disant, je ralisai que rien sur moi naurait pu luidonner autant de dtails si prcis. Il laissa tomber abruptement :

    - Non ! Ce nest pas de cela dont il sagit, je le sais car cest toi que jeviens chercher, tu es mort et je temmne au Ciel. . .

    Inutile de dire quil me fallut un certain temps pour intgrer et comprendre

    ce que je venais dentendre. Jhsitai longuement sur la rponse donner,si tant est quil y en ait une meilleure quune autre dans un tel contexte.Joptai pour :

    - Vous navez pas tellement un physique dAnge ?- Tu sais, les apparences et les tiquettes sont trompeuses. . . Et puis je

    ne suis pas un Ange, du moins pas au sens o tu lentends. Je suis tonpasseur, celui qui va temmener vers ta nouvelle vie, je te proposedailleurs que nous y allions maintenant si tu veux bien. . .

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    - H, attends, je ne peux pas partir comme a, il y a mon rendez-vous,ma mre, ma bcane. Dailleurs, o est-elle ?Il se renfrogna, et comme sil drogeait une rgle quil stait fixe,lcha contrecur :

    - Derrire larbre, lendroit de ton accident. Il est dsormais inutile detinquiter pour tout a, allons vers un lieu plus clment.En disant cela, il avait un air dgot, comme sil tait seul voir autourde nous des choses peux ragotantes.

    Ayant une pense pour ma machine, je la vis trs nettement au travers delarbre devenu subitement transparent. Elle tait lamentablement renversesur la route. Prs delle, il y avait un corps curieusement recroquevill dans

    les racines. Mince, me dis-je, mais cest le mien ! Je le distinguaisparfaitement au travers de la masse compacte et odorante du bois. Me voirainsi fut un choc, jeus immdiatement envie dtre au plus prs pouressayer quelque chose, bouche--bouche, un massage cardiaque ou je nesais quoi. Le seul fait den avoir eu lintention me transporta ou pluttmemporta auprs de mon corps en un battement de cils.

    Jentendis la pense de Gus presque aussi nettement que sil avait parl haute voix :

    - a y est, a commence ! Le ton employ tait agac et teintdinquitude. Nous ne pouvons pas rester Alex, tu ne peux plus rien, dumonde va arriver, on soccupera de ton corps et de ta moto.Revenant une ralit plus terre terre, je clamai dans un sursaut deresponsabilit filiale :

    - Et ma mre, qui va soccuper delle ? Que va-t-elle devenir sans moi ?

    Elle a dj tant de mal vivre, a va lachever.Dun ton fataliste, il me rpondit :

    - Eh bien elle changera, ou bien elle te retrouvera trs vite l-haut.Prenant cette simplification inhumaine en pleine face, mon sang ne fitquun tour, chauffant mon visage et mon corps dun incontrlablebouillonnement intrieur. Mes poings se refermrent sur le vide, mon cursemballa et je fus pris dune intense vibration qui, mon insu, me fit

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    dcoller du sol dune vingtaine de centimtres. Dans un cri de rageinhumaine, ma colre brute se libra, me retourna comme un gant et rejetamon enveloppe virtuelle comme si ce ntait quun vieux vtement inutile.Une chose ignoble se manifestait en moi, instinctive, bestiale, elle hurla :

    - Comment peux-tu dire a, passeur ! Rugit-elle mchamment, tu nasdonc pas de cur !

    Malgr mon courroux, jentendis de nouveau clairement la pense de Gusronchonner dans mon esprit : Javais bien dit que ce ntait pas un jobpour moi. Il se redressa lair absent, les yeux regardant une choseinvisible par-del la ralit, et dit :

    - Madame. . . Venez-moi en aide.

    Aussitt, je fus pris daffreux remords, une bouffe de compassion pour cetype venant de dire des horreurs sur ma mre menvahit et me submergea.Ctait si fort et si inattendu, que a me fit presque. . . mal ! Brusquementje pris Conscience davoir repris ma place devant Gus comme par magie.

    Jtais hors de moi, prs de mon corps, et la seconde daprs, dune simpleinjonction, forc de rintgrer avec vigueur mon tui spirituel. Jtais denouveau plante devant Gus qui avait lair bien moins surpris que moi.Une lgre inquitude dans la voix devant la puissance du phnomne, jelui demandai prudemment :

    - Cest toi qui as fait a ?Gus, radouci et satisfait, me dit :

    - Les rponses sont l-haut, elles viendront quand ce sera le moment,allons-y maintenant, tu es prt ?

    - Tu rponds toujours aux gens qui te posent une question par une

    pirouette. Tu es quoi ? Un bonze tibtain ou un guru indien qui se seraitnipp King Road ?- Je te lai dit, ne te fis pas aux apparences, nous pouvons prendre

    laspect de notre choix. Jai simplement pens que, vu ton ge, ce costumedtudiant te mettrait en confiance et faciliterait notre rencontre. Meserais-je tromp ?

    - Non, rien de grave, Gus. Cest juste quil y a des annes que lon neporte plus ce genre daccoutrement. Les jeunes daujourdhui mettent des

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    jeans, des tee-shirts et des baskets, ou des trucs dans le genre. Ton look estjuste un poil dcal de . . . trente ans, a craint !

    - Ah ! Dit-il lair satisfait, absolument pas gn par ma remarque faisantde lui un has been, trente ans dj depuis ma dernire visite,

    marmonna-t-il dans sa barbe. De toute faon, je lui avais dit que venir surterre ntait pas une mission pour moi, je ne sais pas ce qui lui a prisdinsister, on ne manque pourtant pas de passeurs.Faisant fi de ses considrations domestiques, je lui demandai, lairintress :

    - Comment mas-tu dplac tout lheure ? Comment as-tu fait ? Vas-y,explique.

    - Cest moi sans tre moi. Il va maintenant falloir que tu ouvres ton

    esprit et jongles avec de nombreux paradoxes tels que celui-ci. Disons poursimplifier que ctait juste une intention de ma part. Je voulais que tuviennes pour que nous puissions partir, et tu es venu. Je sais, ce nest pastrs poli, mais il est inutile de retarder linvitable, il nous reste denombreuses choses faire, nous pourrions continuer cette conversation enmarchant ?Je lobservai incrdule, Gus tait dconcertant. Malgr ses proccupationsdu moment, il avait lair serein et trouvait mme le moyen desquiver larponse. En fait, je sentais bien au fond de moi que tout cela lamusait.Jprouvais une sensation bizarre. Malgr nos diffrences, je me sentaisproche de lui, incroyablement proche, un peu comme dun frre perdu quejaurais retrouv.

    - Nous nous connaissons, nest-ce pas ? Lui demandai-je sans en avoirrellement eu lintention. Il sourit et rpondit dune voix douce.

    - Non, mais dune certaine manire oui !

    - Encore un de ces paradoxes ?- Exactement. Nous ne nous sommes jamais rencontrs au sens o tulentends et en mme temps nous avons toujours t trs proches lun delautre, extrmement proches. Nous sommes issus dune mme source etun lien subtil nous relie. Maintenant que tu es mort, tu ressens cetattachement, et cest comme une divine appartenance.

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    Mon esprit faisait un effort pour comprendre matriellement quelque chosequi ne ltait pas. Il parlait avec des nigmes comme un sage et faisait toutpour faire croire quil avait des rponses mes questions, ctait trsdsagrable.

    - Tu comprendras quand tu en auras fait lexprience, Alex. Ce nest pasune chose quun esprit sur le point de sveiller peut accepter facilement.Pour le moment, il te suffit dentendre, le moment venu, ce sera uneralit.

    - Tu me parles de Dieu ? Lui demandai-je, inquiet, me souvenant que lareligion ne mavait jamais attir. Elle mapparaissait juste comme uneopportunit pour quelques bigotes de se runir et de boire du th plusquune relle planche de salut.

    - Je te rassure, dit-il en riant largement, la ralit est trs loigne decelle de ton imagination. Je vais mme te dire, cest tellement inimaginableque nous nen parlons jamais, il nous suffit de savoir. . .

    - De quoi ne parlez-vous jamais, de Dieu ou de religion ?- Des deux ! Et maintenant, si nous allions ensemble au Ciel en

    marchant tranquillement dans ce paysage paradisiaque.- Pourquoi ? On va au Ciel en marchant !

    Il dut sentir que je me dsintressais de mes soucis terrestres et se mit avancer, il ajouta par-dessus son paule :

    - Tu sais, le Ciel commence ici sur Terre. Lair que tu respires, cest djle Ciel. Si tu fermes les yeux, quelle diffrence fais-tu entre les deux ?Pour ton me, cest bien la mme chose.Le soleil illuminait son visage, il avanait en embrassant la vue gnreuseet sen dlectait. Il scrutait chaque dtail de la perspective avec curiosit, latoisait dun ascendant magistral et se remplissait de ce quelle offrait. Son

    sourire bat de gros bb dispensait des ondes de joie communicative, jecommenais moi-mme me sentir aux Anges.- Il y a tant de destinations. . . Dit-il avec une navet denfant alors que

    son regard saventurait sur mille chemins la fois.Il inspira une grande bouffe dair, gonflant sa poitrine dmesurment, sibien que sa veste trique expulsa un bouton qui reprit sa libert endcrivant une arabesque majestueuse qui parut durer une ternit. Lhabiten profita pour souvrir et laisser apparatre un ventre rebondi. Sans prter

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    attention cette dfection vestimentaire, il me dit avec lemphase dunartiste :

    - Tu sais, l o nous allons, cest seulement plus vaste, sans limites, sansmatrialit au sens o tu lentends, cest plus subtil, plus thr. La Terre

    nest quun bac sable rugueux pour apprendre vivre, un lieu o vousfaites lexprience de vos croyances individuelles et collectives, un lieu ouvous apprenez que lEgo nest quune toute petite personne compare votre relle magnificence.Je lcoutais, pris entre lenvie de lui demander darrter de se moquer demoi, et en mme temps fascin par ce quil disait. a avait lair dingue,mais un je-ne-sais-quoi me disait que ses paroles taient vraies.

    - Tu continueras vivre de la mme manire que sur terre, il ny a gure

    de diffrences. Grce ton esprit, tu continueras de crer ta vie. Le vraichangement sera dans la matrialisation de tes penses, ce sera plus rapide,comme si tu passais ton jeu vido prfr du mode dbutant confirm.Fan de jeux depuis lenfance, je lui demandai :

    - Il y a des niveaux pour experts ?- Certainement. Dans ceux-l, un mot suffit te donner des ailes ou

    transformer ce que tu aimes en cauchemar.Imaginant la chose, jen frmis intrieurement.

    - Rassure-toi, tu nen es pas encore l, il y a du chemin faire avant dedevenir chemin soi-mme. . .Je ne comprenais pas tout ce quil disait. De ses mains, il matrialisait sesphrases dans lespace, dplaait des objets invisibles quils agrandissaient,rapetissaient ou cartaient avec beaucoup dlgance et de lgret pour ungaron de sa stature. Je le suivais avec une certitude grandissante, une sortedintuition que martelait mon esprit pour se faire entendre : Gus tait un

    vritable Ange, ou ce que jen imaginais. De toute son existence il navaitcertainement jamais profr aucun mensonge, savait-il mme ce quectait ?

    Laissant mes doutes derrire moi, je lescortai dun pas plus assur que lesien. Il se dplaait en effet en zigzaguant prcieusement entre des picesde tracteur ronges de rouille et de vieux sacs plastique moiti enterrsjonchant les abords du champ. Il ponctuait ses sautillements de : Ola,

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    pesticides ! ou de : O.G.M ! mais pour qui se prennent-ils ? Ilparaissait sincrement outr par ce quil dcouvrait et prenait un air devieille dame effarouche par une turbulente jeunesse. Il continuananmoins de me parler en se faufilant entre les dbris, faisant des

    entrechats lair dgot.- Le Ciel, cest une expression humaine, nous prfrons vibration,champ ou plan vibratoire, ou encore de Conscience. En ralit, notredestination nest qu un jet de pierre dici, quelques notes plus haut dansloctave ou sur la gamme vibratoire.

    - Dans une autre dimension ?- Si tu veux, ce serait plutt une porte musicale, la terre serait le Do et

    nous allons vers le R, Mi, Fa. . . Tu saisis ?

    - Oui, je crois.- Dabord entendre, faire ensuite lexprience pour comprendre, dit-il

    nigmatiquement, jaugeant de mon entendement avec ses sourcils pais.- Alors tous les livres, les films, les personnes qui parlent de vie aprs la

    mort, tout a, cest donc vrai, je suis mort ?- Bien sr que cest vrai.- Quoi ?- Les deux ! Dun certain point de vue tu es mort. Et tu sais, Alex, ce

    que tu crois vrai lest, ou le devient trs vite.- Mme la vie aprs la mort ?- Il ny a aucune limite aux crations de lesprit. Sur terre, les vibrations

    ne sont pas aussi dynamiques que dans les hautes sphres o nous allons,mais si tu ajoutes un peu de persvrance et de Foi, tu feras trs vitelexprience de tes croyances, bonnes ou mauvaises, tu peux me croire.

    En disant cela, il jubilait comme sil le voyait dj, comme si ses motscraient une ralit bien lui. Un foisonnement contenu se mit briller enlui, comme lintrieur dune opale ou dun girasol.* (*Pierre prcieuse,varit dopale dont la teinte change en fonction de la lumire) Pour lesyeux de mon esprit, une force invisible tentait de schapper, comme sicette enveloppe temporaire dhomme ne pouvait contenir plus longtempsson dsir dexprimer ce quil tait. La seule manifestation physique de cebouillonnement intrieur fut une larme qui roula au coin de son il droit.

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    Les mains leves pour apprcier le poids de son verbe, rythmant sesmots comme un chef dorchestre, il continua :

    - Les humains manquent heureusement de foi ! sinon la Terre seraitrecouverte dobjets inutiles sur plusieurs kilomtres de haut. . . Vous seriez

    en guerre permanente et dtruiriez certainement la plante plusieurs foispar semaine. . . Cest pour cela que votre pouvoir est amoindri, cest aussipourquoi vous apprenez ici. . . Au moins, il vous est impossible dy fairedu mal.

    - Gus, tas pas du bien suivre le match la tl ! Le monde souffre et laterre se meurt par la faute dune minorit dont la folie de pouvoir et decupidit nous tuera tous.

    - Vraiment ! Pourquoi les laisser vous faire ? Cest irrationnel. Bah,

    rassure-toi, de toute faon a na aucune importance. Je te laffirme,impossible de vous faire mal sur terre puisque vous tes tous immortels, dumoins, quasiment.

    - Comment a quasiment ! Lchai-je, soudain moins rassur.- Tous pareils. Il vient de passer du statut de mortel celui de quasiment

    immortel et le voil dj qui chipote. Je vous adore, vous me faites rireavec vos peurs, vos certitudes et votre amnsie slective.

    Je men voulais davoir bien involontairement rvl mes craintes Gus. Ilme rpondit comme sil avait entendu ma pense.

    - Tout va bien Alex. Cest tout fait logique davoir peur de mourir, afait mme partie de la vie et des choses apprendre. Rien ne dure. . .

    - Tiens, cest drle, cest ce que dit souvent ma grand-mre.- Constance, oui, cest bien son style. . .- Quoi, tu la connais ! ! !

    - Oui, bien sr, elle est trs apprcie l o nous allons. Cest une artisteestime qui chante comme un Ange et nous manque beaucoup depuis sondpart sur terre.

    Incroyable ! Jen restai bouche be. Ma grand-mre, grande spcialiste despierres et des cristaux dont elle faisait commerce dans le monde entier,chantait effectivement comme une diva. Ctait un vritable enchantementde lentendre lEscale, o elle se produisait parfois le samedi soir. On

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    venait de tous les cantons avoisinants pour lcouter vous bercer de seslongues ballades langoureuses.

    Son portrait safficha dans mon esprit sous les traits dune belle jeune

    femme dune vingtaine dannes en train de menvoyer des baisers quisenvolaient comme des oiseaux blancs.- Laisse-la partir Alex, libre-la, lche. Dit Gus sur un ton tranchant.

    Un fil invisible mais curieusement tangible qui me liait elle se coupaschement. Elle senvola comme si javais laiss filer un ballon debaudruche qui entrana dans sa libert retrouve mon attachement pourgrand-mre. Limage finit par disparatre comme celle des anciennes tlsqui steignaient en contractant la lumire pour finir par ne laisser quun

    point brillant au centre de lcran.

    Une partie de ma vie vient de disparatre, pensai-je intrieurement.- Tu viens de faire de la place pour permettre une nouvelle ralit

    dapparatre, me dit Gus en simmisant dans mon esprit sans que jenprenne vritablement conscience. Tu es mort, une nouvelle vie commence,inutile de tencombrer de lancienne.Cette rplique me fit leffet dun coup de fouet, brusquement ma situationapparut dans toute sa froideur. Je mis crment des mots sur un fait :

    - Mince, ce nest pas un rve, je suis bien mort !

    En mentendant le dire, je chancelai et basculai dans un monde totalementboulevers. Les fondations de ma vie se trouvaient branles, lensemblede mes croyances volaient en clats, jtais dans un dsert de ruines et jevacillais, effray de ne rien trouver quoi me raccrocher. Gus

    susurra silencieusement dune voix mlodieuse :- Le mieux est daccepter et de compltement cesser de penser. . .

    Celui que lesprit seul peut percevoir, qui chappe aux organes des sens,qui est sans parties visibles, ternel, lme de tous les tres,que nul ne peut comprendre, dploya sa propre splendeur.

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    Ayant rsolu, dans sa pense, de faire maner de sa substanceles diverses cratures, il produisit dabord les eaux

    dans lesquelles il dposa un germe. Ce germe devint un uf brillant comme lor, aussi clatant que lastre

    aux mille rayons,et dans lequel ltre suprme naquit lui-mme sous la forme de Brahm,laeul de tous les tres.

    La loi de ManouDaprs la traduction de A. Loiseleur Deslonchamps,

    Les Livres Sacrs de lOrient, 1840

    Petit moineau rentre au nid

    Votre vie quotidienne est votre temple et votre religion . Khalil Gibran

    Le fracas des explosions ne leffrayait pas, elle tait debout au milieu de larue sans autre protection que la puret de son innocence. Jamais personnede son village naurait eu le cran den faire autant. Elle fredonnait comme son habitude une chanson gaie, ce quelle faisait jour aprs jour pour le

    plus grand plaisir de ses compagnons dinfortune. Elle venait de se laisserprendre dans un tir de rue, nourris du bruit et de la fureur des belligrants.Les cris et les hurlements auguraient un malheur, quelque chose de gravevenait darriver. Dans un curieux tat dabsence, Ishtar regardait un corpsdchiquet ses pieds, une partie de son esprit lui dictait de se mettre labri, mais elle nen prouvait plus aucun besoin.

    Ishtar tait une fillette de douze ans aussi petite quun moineau et qui

    gazouillait comme un pinson. Ses cheveux noirs parfaitement brosssscintillaient sous le soleil comme les ailes dun corbeau. Ses yeux noirs etprofonds, aussi insondables que des billes donyx, brillaient pareilles deslarmes dobsidienne. Elle ntait pas vraiment timide, mais son existencene lui avait jusqualors fait connatre que mort, violence et privation. Ellestait dtache delle-mme, stait place en spectateur dune vie quiparaissait tre la sienne. Ishtar ne souffrait jamais malgr les horreurs quise perptraient autour delle. Observant la vie comme un mauvais film, elle

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    ny attachait que peu dattention, car par-del la ralit trique de sesyeux, elle voyait des choses bien plus rjouissantes.

    Orpheline depuis la mort de ses parents dix ans plus tt, elle avait survcu

    presque miraculeusement dans cet enfer. La vie ntait pas facile, surtoutmaintenant. Les affrontements avaient ravag la ville et les dj faiblesressources samenuisaient un peu plus chaque jour. Pour les petits commeelle, il ny avait gure de changement, si ce nest davantage de rien.

    Elle avait t recueillie au cours de sa brve existence par de nombreusesfamilles faisant preuve dun lan spontan de solidarit et de gnrosit.Ctait bien l le dernier refuge des peuples en souffrance, se souvenir de

    rester des tres humains. Dommage davoir la mmoire si courte une foisla paix retrouve.

    Les alas lavaient pousse de chez les uns vers chez dautres pouvantmieux subvenir ses maigres besoins. Ctait toujours avec regret que sesprotecteurs la laissaient partir, conscients de perdre ainsi la joie etlillumination de sa prsence. Chaque dpart laissait une famille danslaffliction, dpossde dune si belle me qui embellissait la vie etrchauffait les curs de ses chansons. Cependant, peu dentre euxcomprenaient lexemple donn et encore moins lappliquaient. Ellesaccommodait de sa nouvelle famille aussi facilement quelle enfilait sesminuscules mules dont les talons uss offraient une seconde vie desmorceaux de bois patiemment taills et assembls le soir la veille. Cestdonc juche sur des mules transformes en escarpins quelle arpentait lavie. Munie dchasses, son esprit surfait continuellement au-dessus des

    nuages. . .Malgr les circonstances, elle restait coquette et trouvait vital davoir entoute occasion des cheveux et des habits propres et parfaitemententretenus. Mme sils ntaient bien souvent que de la rcupration, ellerecousait et amliorait avec bonheur le moindre chiffon qui passait entreses mains. Elle se voulait un modle de respect de soi-mme et des autres.Le plus incroyable, cest que dans ce pays devenu un fantastique terrain de

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    jeux pour des hommes envieux et colriques, elle y parvenait merveille.

    De rares infrastructures taient prserves pour continuer de se faire laguerre. En effet, difficile de se battre dans une ville sans abris ni repres

    visuels, et puis, a naurait srement pas t si drle pour ces hommesayant fait de leurs stupides jeux denfant une ralit. Sans pour autantfaciliter la vie aux assigs dans la tourmente, cela maintenait cependantun semblant dhumanit cette cit nagure remarquable et dsormaisventre par aveuglement. Des choses aussi essentielles que lhygine oula propret devenaient des gageures que chacun relevait avec dignit.Leau, le savon, la lessive taient aussi rares que la subsistance, etpourtant, malgr les innombrables possibilits de se salir, Ishtar paraissait

    chaque jour comme au sortir de son bain, parfume, les cheveuxparfaitement brosss et ses petits habits propres et impeccablementrepasss.

    Dans les familles o elle vivait, on chuchotait le mot Miracle . Uncouple racontait quaprs un attentat au march, dun simple revers demain, elle avait fait disparatre des taches de sang qui maculaient sa robe.On murmurait aussi que, malgr son extrme pauvret, son panier taitpourtant toujours bien rempli, de pain, de lgumes et de gros bouquets defleurs multicolores. Comment faisait-elle ? Ou trouvait-elle tout cela ?Disparaissant des journes entires, semant langoisse chez sescompagnons, elle rapparaissait chaque soir miraculeusement, les braschargs de victuailles et de senteurs. Autant dire que lon parlait dellecomme dune sainte !

    Tout cela tait vrai. Sans bien comprendre comment, elle accomplissait deschoses aussi incroyables que deffacer le sang de sa robe ou faireapparatre la subsistance de sa famille provisoire. Le plus inexplicable taitquelle avait limpression dtre uniquement l pour a ? Ishtar restaitmuette sur ses prodiges, refusant mme de se lexpliquer elle-mme.Pour les fleurs, elle ne faisait que les cueillir loccasion de ses longuespromenades dans le champ de bataille qutait devenu son pays, o, malgrles dcombres et les terres dvastes, le miracle de la vie faisait renatre

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    mme les cendres.

    Pour le pain et la nourriture, ctait tout autre chose. Elle partait le matinun panier vide au bras, et le soir il tait plein sans quelle ait eu se soucier

    de le remplir. Elle ne cherchait pas dexplication ce phnomne, elle nefaisait quy croire et dire merci CE qui donnait, entretenant la certitudeque le lendemain tout recommencerait. Comment dire, comment avouercela ? De toute manire, elle ne savait pas comment a marchait, ctaitcomme a. Elle ne voyait rien de magique l-dedans et stonnait mmeque les autres ne sachent en faire autant. Tout cela entretenait son airtimide et rserv, mais, bien y regarder, ce ntait quune apparence. Ence temps de fer et de feu, un petit moineau se prservait, une grande et

    belle me se faisait petite et donnait beaucoup, sachant quelle recevraitbien plus dans les Cieux. . .

    Un jeune homme terriblement mal habill son got et curieusement vtudun improbable costume occidental dix fois trop petit pour lui, bravait lestirs et les dtonations pour sapprocher delle. Toujours au pied de ce corpsensanglant dont elle venait de remarquer les escarpins identique auxsiens, elle sinquita de la bravade du jeune homme. Elle avait envie de luicrier de se protger, de ne pas chercher laider, mais il apparaissaitdtendu et parfaitement son aise au milieu du fracas et des flammes. Ilsouriait et avanait sur la terre brle mle de dbris comme sil marchaitsur un coussin dair. Il traversa un cran de feu dun pas alerte sansprouver aucune gne et, ntant plus qu deux pas delle, il lui dit :

    - Bonjour, Ishtar, je mappelle Gus.Il parlait dans une langue trangre inconnue delle, mais bizarrement elle

    le comprenait parfaitement.- Je suis morte, nest-ce pas, et cest moi qui suis l ? Demanda-t-elle enmontrant du doigt lamas de chair mconnaissable.

    - Morte ! Oui, dans un sens, dit-il en souriant largement. Je dirais pluttque ton enveloppe terrestre commence retourner en poussire. Le resteme semble parfaitement fonctionnel.Une balle le traversa en claquant comme un fouet, sans quil ne senmeuve.

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    - Je me sens bien, dit-elle en levant les bras au ciel le sourire auxlvres, je me sens lgre comme une plume.Lide quelle venait dexprimer la fit dcoller du sol et rire avec Gus decette farce aux lois bien tablies de la physique.

    - Nous navons plus rien faire ici, Ishtar, je te ramne la maison.Il tendit une grosse main pataude dont elle se saisit sans poser plus dequestion, dcidant daccorder pleinement sa confiance cet trangeinconnu. De toute faon, cest ce quelle faisait de la vie tout entire,certaine quil ne pouvait rien lui arriver quelle net vraiment souhait.

    Au contact de Gus, un voile se souleva dans son esprit pour dcouvrir uneralit quelle eut du mal comprendre. Elle voyait un lieu paisible

    couvert dune vgtation luxuriante. Celle-ci stendait perte de vue etdes animaux de toutes sortes attendaient patiemment. Il y avait aussi unelumire incandescente lintrieur dune goutte deau transparente, unminuscule soleil dans une bille de verre. La goutte lumineuse se mit briller si fort que son clat inonda le paysage et la faune de ses rayonstranscendants. Une manation diaphane se superposa sa vision, animantle panorama dune vie propre, dune Conscience. Elle reconnueimmdiatement cette sensation, et se dit que bientt elle serait dans sonfabuleux jardin.

    Alors, au milieu de ce puisant dbat intrieur que je menais contre monme

    dans cette chambre secrte quest notre cur,

    je me jette, avec un visage aussi troubl que mon esprit, sur Alypius enmcriant :- Quattendons-nous ? Quest-ce donc ? As-tu entendu ?

    Des ignorants se lvent et prennent le Ciel de force, et nous, avec notrescience sans cur,

    voici que nous nous roulons dans la chair et le sang !Est-ce parce quils nous ont devancs que nous rougissons de les suivre ?

    Ou plutt que nous navons pas honte de ne mme pas les suivre ?

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    Les confessions, Livre huitime, chapitre VIIISAINT AUGUSTIN

    Un ascenseur pour le Paradis

    Le destin trace la route, il conduit celui qui consent et trane celui quirsiste.

    Principe Stocien

    Le soleil avait presque termin son patient travail dvaporation commencdepuis le matin, constellant le ciel dautomne de petits nuages laiteux. Lesoiseaux, toujours en qute dune graine pour les uns, dun moucheron ou

    dun vermisseau pour les autres, scandaient lhymne la vie en sepropulsant dans les airs comme des patineurs sur la glace. Un livre auxoreilles moiti noires, ignorant notre prsence malgr les quelques pasnous qui nous sparaient, regagnait tranquillement son gte doschappait le glapissement de ses petits qui guettaient son retour. Safemelle fila entre mes jambes de faon tmraire me faisant sursauter etjurer de surprise. Elle me dpassa rapidement pour rejoindre sa petite

    famille sans prter attention mon rire nerveux.- Ils ne peuvent nous percevoir, dit Gus.

    Son sourire largement tir dune oreille lautre me faisait penser unetranche de pastque. Lide den finir avec cette mission qui semblait siinhabituelle pour lui le transportait de joie. Il marquait la cadence enfredonnant le grand air de Carmen, un opra franais. Nous approchionsdune vaste zone lumineuse apparaissant sur lhorizon comme une

    nouvelle aube. clatante, presque blanche, elle se mettait poindremajestueusement, claboussant maintenant le paysage de son auraaveuglante. chaque pas, elle semblait doubler de volume. Ellegrandissait et se densifiait, magnifiant notre champ de vision duneineffable brume laiteuse et lumineuse. Le spectacle tait si impressionnantque javais remis mes questions plus tard. Gus lui-mme semblait toutaussi mu que moi, il avait cess de chanter et effac la satisfaction de sonvisage pour la remplacer par une solennit silencieuse.

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    Devant nous, lentre dune sorte de vortex ou tunnel lumineux suspendudans les airs se matrialisait progressivement, comme projet sur un craninvisible. Lintrieur semblait solide, habill de lumire, ou plutt habit,

    tant limpression de vie tait perceptible. Cela me faisait penser unefractale en trois dimensions de matire thre qui se densifiait et spuraitpour ensuite mieux se transformer et se dployer dans un vaste mouvementconditionn par un modle cleste. Cette permanente rvolution entresolide et fragile transcendait limmatrialit de lensemble en unesurprenante ralit. La vgtation alentour se soulevait, pointant verslentre comme aimante par une vibrante attraction. Le tunnel stiraittelle une tornade immacule et slevait dans le ciel, perant un des

    derniers nuages pour ressortir et continuer son envole vers linconnu. Lepaysage aux alentours, sublim par cette torche fascinante, avait des teintesdune nettet absolue, scintillant de milliards de paillettes de feu.

    Je percevais la chaleur et la vibration des couleurs dans une gammedpassant considrablement celle dont javais lhabitude, chacune dellesreprsentait une note dans la palette ou le nuancier de la vie. Un halo deminuscules flammches de pure nergie aurolait tous les objets, projetantdes feux follets lectriques qui scintillaient trangement. Feuilles, arbres,pierres, herbe, animaux, tous semblaient anims dune forme de vietendue par cette aura lumineuse. Mon esprit, indpendamment de mavolont, se focalisait sur chacune de ces formes de vie et rvlait en leursein une fabuleuse intelligence. Tout ce qui mentourait, quelle que soit sanature, exprimait une forme de Conscience semblable des ensembles etsous-ensembles immatriels simbriquant et stirant les uns dans les

    autres. Tout tait li dune faon si subtile et si magique que cela dpassaitmon entendement. Chaque chose pensait, respirait la vie individuellement,et en mme temps tait connect ses semblables pour former alors un trecomplet dot dune Conscience tendue et collective, une conscienceempreinte damour. Bien que dconcert, je mmerveillais nanmoins decette vision dnique que moffrait ma nouvelle perception de la vie.

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    Plus prs de lentre, le paysage entraperu au travers de la trombednergie tait semblable un mirage ou cette curieuse altration visuelleles jours de grande chaleur. Lair quant lui paraissait se figer notreapproche, il stait paissi, devenu presque palpable. Mon corps noffrait

    plus aucune rsistance, lair et la lumire me pntraient comme si jenexistais plus que dans mon esprit. De minuscules boules de lumire aussiblouissantes que des flashs dansaient aux abords et semblaientmencourager avancer vers le seuil de cette porte vers lau-del.

    Maintenant, une palpitation montait et grandissait, semblable auxpulsations dun cur herculen qui battait de passion ou dereconnaissance. Son rythme puissant emplissait mon tre, dnouant mes

    entraves terrestres et restituant la Terre mes derniers regrets. Je sentaisslever de moi les manations spirituelles de ma vie, lensemble de demes anciennes penses qui retournaient lIndiffrenci, littralementaspires par la puissante colonne. Le passage vrombissait comme si toutntait plus que peau de tambour battu par des gants invisibles, noustions conduits par un appel ardent de la lumire.

    quelques pas lair frmissait et pressait nos esprits vers lintrieur. Siprs il nous aurait t impossible de faire marche arrire. Pour la premirefois de ma vie, je navais dautres choix que de mabandonner lattractiondu ciel. En moi, une voix intrieure imprieuse semblait trs bien savoir onous allions et sen rjouissait dj. Elle me dit : Rassure-toi . Je dcidaisans trop savoir pourquoi de me laisser aller cette sagesse avec confiance.

    La matire se rarfiait, je voyais travers le corps de Gus. Levant ma

    main, mes os, mes veines, mes tendons taient pareils de leau colore.Au fur et mesure de notre approche, le rythme des battements sacclraitet nous devenions de plus en plus transparents.

    - Cest impressionnant ! Je me sens tout petit. Glissai-je Gus pour merassurer dentendre encore ma propre voix.

    - Pas si petit que a. Rassure-toi, tout va bien se passer, cest commedescendre un toboggan lenvers.

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    - Cest bien ce qui minquite. Tas vu la taille du toboggan ! Ne pus-jemempcher de penser avec une voix pince.

    - Personne nen est jamais mort. Me renvoya-t-il mentalement, faisantclater dans mon esprit un rire qui samplifia avec le mien.

    Je ne pus contenir lnergie produite qui dferla en moi comme uneavalanche et me fit hoqueter sous sa puissance. Ctait la premire fois queje riais une simple blague avec autant dclat et ctait une vritablelibration. Depuis que je navais plus de corps, tout semblait tonnammentplus motionnel, plus vivant. Reprenant son calme, Gus ajouta :

    - Continue de marcher normalement et laisse-toi aller, laisse-toi porter,nous allons remonter les berges clestes. Tu vas voir, cest divin. ces mots, un carillon tinta au-dessus de moi en me vrillant les tympans,

    comme le son du mange de chevaux de bois qui se met en marche. a ytait. Javais quitt la terre ferme pour me retrouver suspendu dans le vide.La surprise me fit tenter un rtablissement, mais rien ne se passa, je navaisplus de corps, je ntais plus quune pense, un esprit, une vibrationparfaitement en harmonie avec lnergie qui lentourait. Progressivementje mlevais, littralement aval. La vitesse sacclra sensiblement, mefaisant lcher prise avec lnergie Terrestre. Fix dans une indiciblepesanteur, je montais au ciel, absorb par une formidable toute puissancedont lpicentre semblait partout la fois. Cette trombe fulgurante taitvivante et pensait, je lentendais ! Elle communiquait avec moi au traversde messages mentaux, de requtes silencieuses, de sensations etdattentions. Tout cela tait si fort que jen avais les larmes aux yeux,faon de parler. . .

    En moi a parlait, a pensait, des concepts se chevauchaient tels que :

    Amour, Vrit, Joie, mais aussi Force et Douceur ; Masculin, Fminin ;Immobilit et Mouvement, Fluidit et Concentration, et bien dautresencore. Tout cela tait en parfait accord, un parfait quilibre de polaritsmagnifiques. Aucune ntait ni ceci ni cela, ni bien ni mal, simplement,ctait ! En tant exactement entre les deux, au lieu de navoir que lun oulautre, je recevais lnergie du produit des deux comme une sublimercompense. Dans lpaisseur mentale dune infime feuille de papier desoie, souvrait un monde dabsolu o soudain tout prenait sens, rien ne

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    semblait pouvoir marrter dans mon envole dernire, et pourtant !

    Jtais arrt ou avais la sensation de ne plus mlever. Je sentais encoreGus dans mon esprit sans le voir, avec la curieuse sensation de ne pas tre

    pas encore arriv destination. Soudain je fus submerg par une vague detendresse et de lumire qui me ravit littralement moi-mme. Une forcesuprieure mavait saisi et mlevait jusqu elle. Les sensations taientextraordinaires, inconcevables, impossibles imaginer. Mon espritsemblait soutenu par deux mains chaudes et lumineuses. Elles me portrentaux nues dun visage souverain qui me souriait.

    Lapparition tait aurole de longs cheveux ondulant lentement au rythme

    dun flux flamboyant. Ctait un parfait compromis entre la beaut delhomme et de la femme, mais je ne voyais en lui quun symbole dAmour.Cet tre dextraction divine, dont la lumire exaltait toute ralit, imposaitpar sa prsence un unique modle auquel jeus immdiatement envie deressembler.

    Des yeux apparurent, des milliards dyeux mentouraient et me fixaientintensment, et dans ces regards remplis damnit, il ny avait quecompassion. Ils formaient un fond la perspective infinie de mon champde vision et je les voyais de faon priphrique comme autant demoi-mme accueillant le retour du fils prodigue.

    La chaleur qui se dgageait de ltre lumineux me donna limpressiondtre assis beaucoup trop prs de lunique pole avec lequel grand-mrechauffait son chalet. Dcelant ma gne, une barrire glace invisible se

    plaa entre nous, me coupant des excs de ce pur esprit. Il mobservaitavec intrt et tendresse, javais limpression quil soupesait mon esprit oumon me et je restai transi devant ce spectacle terrifiant et en mme tempssi merveilleux. Mon intellect se remit en marche, mergeant de cette maredAmour qui me submergeait. Je mapprtai mettre des hypothses, desquestionnements quand une voix venant de partout la fois,devana spontanment ce que je navais eu le temps de formuler.

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    - Je ne suis pas Dieu, simplement un de ses reflets. Je suis ton pur espritsur un plan plus lev, un peu plus prs de la source que tu ne les en cemoment.Pensant que ctait lheure de mon jugement, je demandai :

    - Je vais tre jug ?- Non, personne ne te juge, car tu es seul pouvoir le faire.- Ah ! Dis-je, sans bien comprendre ce que cela impliquait.- Il ny a rien comprendre pour linstant, Alex, simplement faire.

    Raconte-moi donc ta vie sur terre, a-t-elle t profitable ?- Un peu courte mon got, dis-je timidement.- Courte ! Allons bon, ce nest pas le temps qui compte, limportant est

    ce que tu en fais. Comment as-tu aim dans cette vie si courte ?

    - Aimer. Je nen ai mme pas eu le temps ! Pourtant, ce nest pas lenviequi ma manqu, mais personne nest venu. . .

    - Et toi, es-tu all vers eux, as-tu t gnreux, as-tu t aimant ?- Non. . .

    Il sourit tristement, et devant cet tre merveilleux que je venaisdassombrir, que je pensais avoir du pas mon manquement, il me futimpossible de retenir mes larmes.

    - Tu vois bien quil est inutile de te juger, tu le fais trs bien. . .Plein de remords, jajoutai comme une excuse :

    - Jai aid ma mre. . .- Aider. Que voil un joli mot, cest presque comme Aimer. Y as-tu pris

    du plaisir au moins ?- Ben heu, oui. . . Disons que jaurais prfr quelle se dbrouille seule.- En effet, mais si tu navais pas t l, elle aurait sans doute connu les

    flammes de lenfer.

    - Lenfer ! Dis-je en frissonnant, il y a un donc un enfer.- Oui, bien sr. Tu sais fort bien crer les tourments qui taccablent et lesflammes qui te consument, nest-ce pas ?

    - Oui, je suis assez bon ce jeu-l et ma mre doit en tre la championnedu monde.

    - Oui, Suzanne est trs crative. En ce moment elle retourne, elleretourne, mais rassure-toi, tt ou tard elle usera de son pouvoir pourretourner le Monde. . .

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    - Si a pouvait tre vrai. . .- Ais confiance, nest-ce pas dj crit. Maintenant fils de lumire, vis

    pour toi et btis une vision grandiose de toi-mme, fais de notre vie unenchantement. Il me fixa avec bienveillance et ajouta : Rappelle-toi. . .

    - Je ferai de mon mieux, Monsieur.- Jen suis certain, fils de lumire.Il effaa son sourire, prit un air inspir et dit dune voix que nul nauraitcontredit :

    - Reois ton pouvoir, fils de lumire, va et agis dans la paix et lamour.

    Il me souffla un air frais et vivifiant en plein visage. Cela me fit leffetdune porte qui souvre, crant brusquement en moi un violent courant

    dair. Une ahurissante sensation de puissance sengouffra, brisant aupassage danciennes chanes, effaant de vielles croyances et soudainjtais plus vivant, plus heureux, jtais rendu moi-mme, encoreimparfait certes, mais fier de ltre.

    Le visage de lumire souriait largement, son plaisir de me voir ainsi librsouleva autour de lui de bouillantes ruptions qui me balayrent. Jauraispu manantir dans ce feu brlant, mais je fus rendu mon ascenseurcleste en gmissant dextase. Je me sentais apais comme aprs avoirlonguement sanglot et me laissai submerger par le bien-tre. Je neressentais aucune peur, aucune haine, colre ou envie, ni jalousie ou unquelconque autre sentiment de cette nature. Mon nergie entirementtourne vers le positif, je sentais en moi la plnitude et une vivacit, untotal engagement de mon esprit vivre avec srnit, jtais complet,entier. . . croyais-je !

    De nouveau Gus fut prs de moi et notre ascension reprit, quoique bien yregarder, malgr ma rencontre avec cet autre moi-mme, elle ne semblaitpas rellement stre interrompue. Reprenant doucement pied dans monesprit, je dis Gus tout excit :

    - Tu as vu ce truc, du moins, ce gars, enfin. . .Comment nommer, comment verbaliser ce que je venais de vivre ?

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    - Le mieux est de ne rien dire, ce niveau de Conscience les motsmanquent aux motions. Jouis de lexprience et tires-en le meilleur, leplus utile pour toi. Cette rencontre ntait destine qu librer tes derniersliens avec la Terre et te rendre ton pouvoir.

    - Mon pouvoir, comment a, quel pouvoir ?- Celui de crer, celui dinventer la vie, un talent amoindri par tescroyances. Maintenant tes penses bonnes ou mauvaises vont devenirralits encore plus vite.

    - Et cest gnial a ?- Oui, videmment. Toutefois, tu te rendras trs vite compte que les

    grands pouvoirs imposent de grandes responsabilits ainsi quune immensesagesse pour en user. Alors garde ton cur et veille sur tes penses comme

    si ctait du lait sur le feu.

    Je pris une nouvelle foi conscience de ma mort et du grand changementquelle exigeait. Mon corps rest sur terre simposa en moi. Malgr sonabsence, je ressentais le passage de lair dans mes cheveux, la vitesse, lefrottement sur mes vtements et, chose nouvelle, le rayonnement dun astredans ma poitrine que mon enveloppe spirituelle ne pouvait contenir. Je nervais pas, tout tait merveilleusement vrai, ma vie terrestre sestompait,laissant place de nouvelles perspectives, de nouvelles opportunitsencore caches, mais dont je pressentais les promesses. Le vortex svasapour nous laisser dboucher dans un ciel clatant.

    Nous progressions maintenant vers ce qui paraissait tre une ville deprovince sans constructions de plus dun tage. Des hameaux stendaient perte de vue, ensemencs par un gnial semeur qui aurait dessin des

    formes et des symboles comme des cercles de cultures.* (*Agroglyphes,crop circles) Ceux-ci se croisaient et se recouvraient, formant uneconstellation de villages, de jardins, de forts et de plans deau auxcouleurs inattendues et dune beaut stupfiante. Aucune ligne droite,aucune route, fils lectriques ou mme fume ntait dcelable, pourtantdes humains vivaient l, je les sentais en moi ! Les diffrents lments dece monde jardin semblaient avoir t jets du haut du ciel avec un planprcis. Tout simbriquait et sexprimait dans une fresque aux formes

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    parfaites respirant la suprme flicit. Mon me susurrait que dplacer ousupprimer le moindre lment de ce tableau vivant aurait rompu sonharmonie. Une phrase de ma grand-mre me revint en mmoire : Crer etgarder lquilibre dans le mouvement. Javais sous les yeux un parfait

    exemple de toute la verticalit ncessaire raliser ce prodige. Destincelles de lumire se dplaaient vive allure dans un ciel anim parune agrable brise, tout bougeait, voluait dans une illusion dimmobilittrompeuse.De la hauteur o je me trouvais, je pouvais apercevoir la grandeur dupanorama et la puissante harmonie pleine de simplicit qui y rgnait.Nanmoins, une vaste forme nuageuse accrochait lil. De la grosseurdun gros cumulus dt aplati sur le dessus, sa taille avoisinait celle des

    plus grands stades de la terre, elle trnait majestueusement au-dessus dupaysage. Ce gros paquet de coton blanc, fluide et dense la fois, auxcontours bien dlimits, semblait anim dune vie propre. Il voluait dansun perptuel mouvement, transformant au gr de linstant ses volutesinlassablement recomposes.

    Il tait recouvert dune sorte de couvercle qui miroitait dans la lumire,couronn de constructions lances comme des flches de cathdrale. Rienne tenait ou ne supportait cet tonnant amalgame, il paraissait simplementpos dans le Ciel. Les difices qui le surplombaient semblaient sansconsistance, des sortes dhologrammes restituant la perfection le modledun autre plan. Ils arboraient des couleurs irises et transparentes commedes bulles de savon prises dans un rayon de soleil. Des nuances vif argentrehauss dor soulignaient les artes de cet ensemble do se dgageaientde sublimes clarts et une effarante lgret malgr dimposantes

    dimensions.Je sais aujourdhui que cette structure se dplace et quelle estpratiquement indcelable du sol. Sa base se confond avec le ciel et sacouleur volue en fonction de lambiance et de la journe. loccasion, saforme sert de support des projections dimages que lon peut voir deskilomtres la ronde, comme une sorte dcran de cinma gant.

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    Tout ce qui nous entourait tait presque aussi lumineux que lintrieur dutunnel qui nous avait amens, sans que lon puisse voir un quelconqueclairage ou soleil dans le ciel. Des dizaines de minuscules luciolesbrillaient comme des toiles une nuit sans lune et traaient comme des

    comtes. Elles nous accompagnaient ou escortaient des couples tels quecelui que je formais avec Gus. Notre ascenseur vibratoire avait fini pardisparatre ou plutt se dsagrger pour retourner une nergieIndiffrencie presque palpable autour de nous. Cette substance invisible etpourtant vibrante semblait pouvoir samalgamer pour devenir la guise,nourriture, vtements, logements et bien dautres choses encore. Nousapprochions maintenant rapidement de ce qui apparaissait comme notredestination.

    Sur la large plate-forme composant le sommet du nuage sgaillaient descentaines de personnes qui mapparaissaient du Ciel comme des fourmissur un miroir. Toutes convergeaient vers ce lieu o rgnait uneeffervescence dplace compare au calme reposant de la ville et de sesenvirons.

    - Quest-ce que cest, Gus ? Et ces lucioles, quest-ce quelles brillent.- Cest le centre daccueil, l o nous allons. Les lucioles, comme tu les

    appelles, ce sont des tres de lumire, des Anges comme nous.- Quoi. Ces petites lucioles, elles ne ressemblent pas du tout aux anges

    de la terre !- Ah, cest vrai, joublie que vous tes les grands spcialistes des Anges

    sur Terre. Dit-il sur un ton sarcastique.- Oui, tu as raison.

    - Peu dentre vous les voient, pourtant il suffit simplement douvrir saConscience. Je ne comprends pas que lon ne vous apprenne pas a dsvotre plus jeune ge. Dcidment, je dtesterais mincarner sur terre.

    - Gus, et toi, est-ce que tu brilles ?- Eh bien oui, comme toi.- Mais je ne brille pas ?- Vraiment ! Le soleil voit-il son clat ? Le but de la lumire nest

    peut-tre que de faire briller ce qui lentoure ? Il ajouta nigmatiquement :

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    Bientt tu la verras toi aussi et alors tu sauras ce que tu es.

    Nous avions amorc un large virage pour venir nous placer quelquesmtres au dessus de ce quil convenait dappeler une piste datterrissage,

    dont la taille avoisinait plusieurs terrains de football mis bout bout. Sateinte et sa consistance ressemblaient une flaque de mercure o serefltaient les curieux btiments qui la flanquaient. Lensemble faisaitpenser une gigantesque gare de verre et de lgret, do schappait unegrande agitation. Celle-ci me submergea au moment mme o nousretrouvions une surface solide sous nos pieds.

    Mon premier contact imprima la surface miroitante une subtile

    ondulation qui stendit comme une onde stirant paresseusementjusquaux limites de ce lieu magique. Jentendis de nouveau le carillonperant du mange qui me vrilla les tympans. Je me promis den parler Gus plus tard, car pour le moment il y avait tant de choses stupfiantes queje rservais mes questions pour ce qui serait le plus incomprhensible mon esprit curieux.

    Sil est vrai que Dieu ait uni en lhomme, sa crature et son image.Toutes les natures, lintellectuelle, la Cleste et llmentaire, comme il

    nen faut pas douter.Ne doit-on pas avouer que lhomme est la plus parfaite de toutes les

    cratures,

    et que si les anges, les cieux, les luminaires et toutes les cratureslmentaires ont des perfections, quelles sont toutes runies danslhomme essentiel, mme durant cette vie ;

    puisquil est un petit monde et labrg de toutes les cratures.

    La philosophie Cleste.Louis GRASSOT.

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    Angla for Ever

    Aucune grce extrieure nest complte si la beaut intrieure ne la vivifie.La beaut de lme se rpand comme une lumire mystrieuse sur la

    beaut du corps.Victor Hugo - Post-scriptum de ma vie.

    Angla est une jeune Anglaise de dix-neuf ans qui a toujours vcu seuleavec son pre dans la banlieue de Londres, sa mre tant morte en couches.Ce jour tragique de sa naissance tait une croix, un fardeau qui avaitananti son pre. Pensez donc, perdre ltre quil chrissait le plus aumonde. Il tait rest prostr, refusant daccepter et daimer celle quil tenait

    pour responsable de son malheur. Pourtant, la petite tait mignonne avecses cheveux blonds blancs et ce toupet noir qui lui ornait le front. Lors delaccouchement, les sages-femmes avaient murmur, que ctait la mort desa mre qui lavait ainsi marque dun sceau indlbile.

    Rapidement, le pre dAngla stait retrouv devant un choix odieux,celui de har ou daimer sa fille. Un cruel dilemme que son mental

    entretenait et sacharnait rsoudre alors que son cur, quant lui,lignorait. Malgr ses tats dme, il soccupait matriellement dAngla merveille, la nourrissant, la soignant et lhabillant comme sil sagissait delenfant dun autre. Cependant, silencieusement, il la maudissait dtre ne.Sil savait produire un relatif confort matriel, il tait incapable deprodiguer la moindre once dAmour. En dix-neuf ans de paternit, il nelavait jamais embrasse, serre contre lui, ou avait simplement pens luidire quil laimait.

    En grandissant, Angla avait terriblement souffert de la culpabilit. Sonpre ne manquait jamais de lui rappeler sur un ton sentencieux le sacrificesuprme de celle qui elle devait la vie. Elle avait fini par accepter sonsort, se forgeant une terrible image delle-mme entirement due sasituation et lducation donne par son pauvre pre.

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    Vers lge de douze ans, un veilleur stait pench sur elle et soudain toutavait chang. La vision quelle portait sur sa vie stait mystrieusementtransforme, bien que celle-ci soit reste dans lensemble strictementidentique. Son pre lignorait toujours, tel qu laccoutum, et sa chambre

    dont une petite fentre donnait sur un minuscule jardin encombr par unarbre noirci et calcin par la foudre, restait abandonne par lAmour.Cependant, tout avait chang puisque maintenant ctait termin, plus rienne latteignait, elle avait appris accepter et pardonner, se librant ainside fardeaux quaucun enfant ne devrait jamais porter. Depuis cettervlation, sa vie ntait plus une fatalit. Allge et dlivre, elle avaitpris de lampleur et de la hauteur, maintenant, ctait elle qui lcrivait. . .

    Son veilleur lui avait enseign une forme dautohypnose trs simple etrapide, et lavait invite une pratique rgulire pour en savoir plus surelle-mme.

    - Ma chre enfant, tu nas pas besoin de livre ni de professeur, car toutest en toi. Avant de le comprendre, il te faudra chercher et fouiller sansrelche. Ne tarrte pas ce que tu croiras tre la vrit, car ce nen seraquune parmi dautres, coute plutt celle qui brille en toi, il ny a rien croire, juste tre.

    Rapidement Angla tait devenue une adepte de lhypnose sous toutes sesformes, dvorant tous les ouvrages quelle pouvait dnicher sur le sujetchez les libraires et les bouquinistes. Elle avait mme fait leffort de seperfectionner en franais afin daccder aux crits et aux enseignementsdes fondateurs de cette cole dvolution personnelle. En France, dans ce

    pays berceau dune pratique ancestrale, elle avait dcouvert une formesupra consciente dvolution : LHypnose Humaniste.* (*Note de bas depage : Olivier Lockert : Hypnose Humaniste, IFHE ditions). Cettediscipline pure, absente de tout dcorum, permettait son utilisateurdouvrir rapidement sa Conscience et dentrer en contact avec sa sourceintrieure. La pratique lavait amene dcouvrir toujours plus depuissance et de hauteur sa Conscience, et cela semblait sans limite. Leplus heureux dans cette recherche, dans cette fusion avec linvisible, fut

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    certainement sa rencontre avec son tincelle intrieure, un joyau quelleappelait affectueusement, ma Merveille , sans doute parcequinconsciemment elle entendait ma mre veille . Cet clat intrieurincandescent lui semblait tre la source de sa vie, de sa conscience et peut

    tre mme de lamour et de la sagesse quelle prouvait chaque instant deson existence.

    Son travail intrieur lavait progressivement amene terminer sa gurisonet finalement ouvrir les yeux sur elle-mme, sur une possible raison dtre,et sur une vie qui se dployait au-del des apparences. Elle stait veille ses vritables envies et avait dcid de prendre fermement en main labarre de son existence, de choisir les ports o elle voulait faire relche, et

    enfin de choisir dtre heureuse ou malheureuse. Elle ne serait pour sa partni un bourreau ni une victime, elle serait ce quelle tait, rien de moins. . .

    Malgr son jeune ge, Angla tait rapidement devenue une experte,dmontrant ainsi labsence de limite pour commencer se connatre. Pourelle, le plus tt semblait le mieux. Peu importait la personne ou le degrdinstruction, lauto hypnose tait un acte totalement naturel et chacunlutilisait dj sans trop sen rendre compte. Grce son exprience, ellesavait que les hypnotiseurs navaient pas rellement de pouvoir, ilsutilisaient simplement des mcanismes physiologiques permettant deraliser ce que chacun pouvait matriser pour lui-mme en quelques jours.Maintenant gurie des blessures de son enfance, elle utilisait cet outilprivilgi pour son dveloppement spirituel et devenait en grandissantlartisan dune vie o le doute et la peur nexistaient pas.

    Angla percevait bien laura sulfureuse qui entourait sa pratique et limagedplorable inscrite dans linconscient collectif. Celle-ci tait due auxmdias, aux spectateurs avides de sensationnel et surtout lignorance.Lhypnose de spectacle en particulier o lon pouvait voir des gens aboyer,se dbrailler, faire le singe ou simaginer dans un dsert, accabls dechaleur. Elle avait bien compris que si certains en faisaient un instrumentde pouvoir, ne pas utiliser lhypnose revenait ne pas se servir duncouteau parce que lon sait quil coupe ! Pourtant, il est facile de sparer

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    les bouchers du virtuose qui vous ouvrira lme et les portes de votreparadis en quelques mots. Le plus simple pour elle tait videmmentdapprendre le faire soi-mme.

    Son veilleur lui avait expliqu que la peur de lhypnose ntait souventquune excuse vitant davoir se plonger en soi-mme, peur de seregarder dan