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2012-2013 A la conquête des blogs beauté : enjeux et perspectives pour les marques Emilie TRAN A3P3 SKEMA BUSINESS SCHOOL

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2012-2013

A la conquête des blogs beauté : enjeux et perspectives pour les marques

Emilie TRAN A3P3 SKEMA BUSINESS SCHOOL

1

REMERCIEMENTS

En préambule à ce mémoire, je souhaitais adresser mes remerciements aux personnes qui m'ont

apporté leur aide dans la réalisation de ce mémoire.

En premier lieu, je remercie M. Laurent Volpi. En tant que tuteur d’école, il m'a notamment aidé à

trouver mon sujet de mémoire.

Je tiens à remercier sincèrement aussi M. Jean-Christophe Taupe. En tant que maître d’apprentissage,

il s’est toujours montré à l’écoute et s’est toujours rendu disponible pour tous les rendez-vous

pédagogiques avec l’école. De plus, à travers la confiance qu’il m’a accordée depuis le début, il m’a

permis d’évoluer dans mon parcours professionnel.

Mes remerciements s’adressent également à Olivia Rigault, chef de projet social media chez Yves

Rocher, qui m'a fait découvrir l’univers singulier des blogs beauté, ses codes et ses mécanismes.

Enfin, je remercie Anne Gigleux, chef de produit Sensibiafine, et en charge des relations blogueurs pour

Les Dermo-Cosmétiques de Biafine, qui a accepté de répondre à mes questions.

2

Introduction

Depuis quelques années, le phénomène des blogs a démocratisé l’accès au monde un peu « paillettes»

de la beauté, jusqu’ici réservé aux rédactrices de magazines féminins. Tester des produits, donner son

avis, ses conseils, ou juste parler de ce qui les rend belles au naturel : les blogueuses se sont emparées

du sujet et ont un atout qui fait la différence : la passion. Elles la font partager à des communautés de

lectrices actives tout aussi passionnées et très fidèles, qui égalent voire dépassent parfois l’audience

de grands magazines.

Hier ignorées par les marques, elles suscitent désormais de plus en plus d’intérêt. Elles ont ainsi poussé

les marques de cosmétique et de luxe à modifier leur stratégie de communication. Impossible

désormais de contourner la blogosphère.

C’est pourquoi j’ai décidé d’en faire mon sujet de mémoire. En effet, je voulais avant tout un thème

qui conjugue ma passion pour le secteur des cosmétiques et l’envie de faire découvrir un phénomène

peu traité jusqu’à présent. L’idée d’étudier la stratégie des marques avec les blogs beauté m’est venue

de mon expérience passée au service digital et social media d’Yves Rocher. Pour l’entreprise préférée

des Français1, les médias sociaux représentent un enjeu stratégique, permettant notamment d’établir

une relation privilégiée avec leurs clientes. La marque a ainsi flairé très tôt le fort potentiel commercial

des blogueurs beauté et en a fait son cheval de bataille. Mais elle n’est pas toute seule : Bourjois,

L’Oréal Paris, Dove, Lancôme,… Face à ce phénomène récent et pourtant de plus en plus

incontournable, les marques ont peu de repères, tâtonnent, tentent des approches parfois

maladroites, parfois réussies. Alors finalement, comment fonctionne la blogosphère beauté ?

Comment approcher et créer un partenariat avec des blogueurs ? Quel est le retour sur investissement

pour les marques ? C’est tout le sujet de ce mémoire.

Afin de répondre à ces questions que se posent nombre d’entreprises, nous allons dans un premier

temps revenir aux origines des blogs afin de comprendre leur utilité et ce qui fait leur succès. Ensuite,

après avoir étudié le poids du secteur des cosmétiques sur les réseaux sociaux, nous analyserons les

bénéfices des blogs beauté pour le business des marques. Enfin, s’agissant d’un phénomène récent,

nous tenterons de mettre en évidence des recommandations d’approches pour les marques, allant de

la prise de contact jusqu’à la mise en place d’un partenariat, le tout illustré d’exemples concrets de

réussite ou d’échec.

1 Selon le baromètre Posternak/Ifop (2012)

3

Concernant la méthodologie, j’ai d’abord cherché les revues et autres travaux de recherche qui se

rapportaient au sujet. Etant donné que le sujet est très récent, il existe très peu de travaux de

recherche dessus. Je me suis donc appuyée sur des articles de presse, des ouvrages spécialisés et de

nombreux sites internet. J’ai également effectué une veille constante sur la blogosphère beauté et un

travail d’investigation auprès de marques.

4

SOMMAIRE

I. LE PHENOMENE DES BLOGS ................................................................................................ 5

A) CONTEXTE...................................................................................................................................... 5

B) POURQUOI UN TEL ENGOUEMENT ? ................................................................................................. 6

II. LA PUISSANCE DES BLOGS BEAUTE ..................................................................................... 9

A) L’UNIVERS DE LA BEAUTE DANS LES RESEAUX SOCIAUX ...................................................................... 9

B) L’ESSOR DES BLOGS BEAUTE ............................................................................................................ 9

C) L’AUDIENCE ET L’INFLUENCE DES BLOGS BEAUTE ............................................................................. 11

III. LA GESTION DE LA RELATION BLOGUEURS................................................................... 13

A) VICHY : UN CAS D’ECOLE ............................................................................................................... 13

B) SAVOIR REPERER LES INFLUENCEURS .............................................................................................. 16

C) LA PRISE DE CONTACT ............................................................................................................. 19

D) DE LA RELATION VIRTUELLE AU PARTENARIAT IRL (IN REAL LIFE) ...................................................... 20

E) LA REMUNERATION ...................................................................................................................... 23

F) MESURES D’EFFICACITE ................................................................................................................. 25

CONCLUSION ................................................................................................................................... 26

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................... 28

ANNEXE .............................................................................................................................................. 30

5

I. Le phe nome ne des blogs

a) CONTEXTE

Sur Internet, dans les magazines comme dans nos conversations au quotidien, impossible de passer à

côté des blogs. Mais avant d’aller plus loin, il est important de définir ce terme clef du sujet.

C’est le 17 décembre 1997 que Jorn Barger utilise pour la première fois le terme weblog (contraction

des mots « web » et « log ») dans son journal en ligne Robot Wisdom. Le mot « blog » est ensuite

devenu une contraction de weblog, qui peut se traduire par « journal en ligne » ou « cahier de bord

sur Internet ».

Les premiers blogs sont nés aux Etats-Unis dans les années 1990. A l’origine, ils se composaient

principalement de listes de liens pointant vers des sites, parfois classés par date, parfois complétés de

commentaires succincts de l’auteur du blog.

Mais la tendance est allée de plus en plus vers des « journaux personnels » dans lesquels les auteurs

racontaient leur vie privée et se livraient à des réflexions sur leur vie quotidienne (découverte de

nouveaux sites, réflexions sur l’actualité, coups de gueule et coups de cœur,…).

En parallèle, le blog a également été adopté à des fins plus professionnelles, soit par les hommes

politiques qui trouvaient là une tribune d’un nouveau genre, soit par les entreprises, ou encore par les

médias.

Ainsi, le site PointBlog.com a été un des premiers à avoir défini de façon simple et consensuelle ce

qu’est un blog : un « site web (…) composé essentiellement d’actualités, publiées au fil de l’eau et

apparaissant selon un ordre ante chronologique, le plus souvent enrichies de liens externes et de

commentaires.».

Cependant, au-delà de cette définition minimale et essentiellement centrée sur la dimension

technique, il n’existe pas deux blogs identiques. En effet, dans la blogosphère, les blogs d’adolescents

côtoient les blogs de chercheurs ou encore d’hommes politiques. Le blog varie ainsi selon les situations

et les usages.

On peut toutefois remarquer trois caractéristiques essentielles et communes qui permettent de les

ranger dans cette même catégorie.

Tout d’abord, au niveau du contenu, les blogs présentent une information vivante. Il s’agit

généralement des pensées de son auteur au jour le jour. La vivacité de cette information est renforcée

6

par l’interactivité, puisque les lecteurs sont invités à commenter les articles publiés afin de les enrichir,

donner leur avis ou de relancer un débat. Il s’agit d’un réel échange, une conversation. En ce sens, les

commentaires générés ont souvent autant d’importance que l’article de l’auteur lui-même. Sur les

blogs à forte audience, il est d’ailleurs frappant de constater que le nombre de commentaires ainsi que

leur audience peut être quatre à cinq fois plus important que celui du billet en lui-même.

Ensuite, le deuxième critère porte sur la présentation. Une fois publiée, les articles sont classés dans

des catégories ou « tagués ». De plus, tous les blogs comportent des liens. Les articles contiennent

chacun des « liens permanents » (ou permaliens) permettant de faire un lien dessus. Même les images

d’un blog ont des liens permanents.

Enfin, les « vrais » blogs ont un fil de syndication de contenu RSS pour que les lecteurs puissent s’y

abonner et recevoir le contenu par e-mail, sans faire la démarche active de visiter le blog.

Aujourd’hui, le blog sert à diffuser de l’information, des opinions, des actualités, des analyses. C’est

donc un véritable outil de communication mais il reste aussi souvent un journal en ligne.

Au niveau de la forme, le blogueur peut mélanger textes, hypertextes et éléments multimédias (image,

son, vidéo, …) dans ses billets. On parle ainsi de « Vidéo-blogs », « Photo-blogs » ou encore « Audio-

blogs ».

Et si la majorité des blogs ne comptent qu’un seul auteur, il existe également un grand nombre de

blogs multi-auteurs, notamment sur des sites de presse ou dans un contexte associatif.

b) POURQUOI UN TEL ENGOUEMENT ?

Au cours de ces dernières années, les blogs ont pris une ampleur considérable, amenant les spécialistes

à considérer qu’il s’agissait bien d’un phénomène de masse et non d’un simple effet de mode passager.

Ainsi, on estime à 200 millions le nombre de blogs dans le monde2 dont 15 millions en France, avec

plus de 3 millions de nouveaux blogs par mois.

En France, 18 millions d’internautes visitent des blogs de manière régulière.

A la vue de ces chiffres, on est en droit de se demander pourquoi un tel engouement. En apparence,

rien de plus simple qu’un blog. Il faut quelques minutes pour le créer, moins d’une heure par jour pour

l’alimenter et quelques minutes encore pour répondre aux commentaires des lecteurs lorsqu’on

commence à avoir un peu d’audience dans la blogosphère.

2 Chiffres Technorati 2013

7

Les blogs n’inventent finalement pas grand-chose. Le format assez court des billets par exemple, n’a

pas été créé par les blogs. En effet, il est né progressivement lors de l’utilisation d’Usenet3.

Pourtant, cet outil est devenu un des plus grands succès du web et du social media ces dernières

années. Pour mieux le comprendre, il faut se replacer dans le contexte. En effet, le développement des

blogs n’a été rendu possible que depuis la démocratisation d’Internet. Grâce à cette nouvelle

population d’internautes, les blogs ont pu puiser à la fois des créateurs de contenu et des lecteurs. De

plus, les blogs se sont développés grâce aux hyperliens, qui encouragent le lecteur d’un blog à

découvrir et lire d’autres blogs. Ces rebonds de blogs en blogs ont ainsi contribué à leur expansion

exponentielle.

Par ailleurs, avant l’apparition des blogs, les possibilités pour disposer d’un site Web étaient très

réduites. Créer un site web personnel demandait la maitrise d’un code informatique (le langage HTLM).

Les blogs sont alors propulsés au rang d’ « applications grand public » : ils permettent aux plus novices

d’entre nous de publier leurs idées très facilement et sont généralement gratuits. Ainsi, ils permettent

aux internautes qui n’auraient peut-être jamais osé se lancer, de s’exprimer facilement et de créer leur

propre contenu d’information.

Selon Benoît Desavoye4, le « besoin de pouvoir diffuser ses idées et d’échanger avec d’autres

internautes est une attente légitime puisqu’elle est un des mythes fondateurs de la démocratisation

de l’Internet dans le courant des années 90. Les blogs ont su répondre à ce besoin, ce qui explique

qu’ils aient connu une adoption et un succès si rapide ».

Les blogs ont également connu un essor médiatique « grâce » à des moments forts de l’actualité

comme les attentats du 11 septembre 2001. En effet, suite à cet événement tragique, la quasi-totalité

des médias américains se sont alignés aux côtés de l’administration Bush, dans une volonté d’unité

nationale face au terrorisme. Mais le web et particulièrement la blogosphère, a été le seul endroit où

les avis divergents ont pu s’exprimer. « Après avoir atteint le ground zero, les Américains ont eu le

désir de savoir ce que leurs collègues, leurs voisins et le monde entier pensaient et ressentaient. Les

weblogs fournissaient le moyen idéal de transmettre ces impressions »5.

D’autres événements majeurs ont également participé à l’expansion des blogs. En 2004, l’élection

présidentielle américaine a tout changé. Les blogs ont commencé à attirer l’attention du grand public,

les blogueurs présentaient notamment les petits secrets des candidats. Des leaders d’opinions ont

commencé à bloguer et ont pris conscience du pouvoir de l’outil. Par exemple Guy Kawasaki, expert

3 Système en réseau de forums, inventé en 1979 4 Fondateur d'une des premières solutions de blogs française avec la plateforme de blogging Haut Et Fort en 2003, il a partagé son expérience de cet outil dans son livre «Les blogs» paru en 2005. 5 Selon Virginia Postrel, ex-éditrice du magazine américain d’opinion Reason.

8

en entreprise, puis des magazines spécialisés comme Fortune et des agences de marketing se sont

adaptés et ont commencé à bloguer. Enfin, ce sont les entreprises de toutes tailles, qui ont lancé leur

blog. De 5 millions de blogueurs en 2004, ils sont passés à 50 millions en 20056.

6 http://www.jeffbullas.com/2012/08/02/blogging-statistics-facts-and-figures-in-2012-infographic/

9

II. La puissance des blogs beaute

a) L’UNIVERS DE LA BEAUTE DANS LES RESEAUX SOCIAUX

Avant d’étudier les forces des blogs beauté, intéressons-nous à la présence du secteur des cosmétiques

dans les réseaux sociaux en général.

D’après le baromètre « L’écho des marques » réalisé par Performics, en partenariat avec Synthesio

(décembre 2011), la beauté est un secteur fortement présent dans les médias sociaux, dans lesquels

on trouve 91% des publications (versus sites de presse, sites corporate, …). Comme dans d’autres

secteurs, les échanges portent essentiellement sur les tests des produits. Ces produits étant par nature

très «personnels», les internautes se les approprient avant tout pour le produit en lui-même (textures,

odeurs, couleurs…) et non pour la marque et l’image qu’elle véhicule.

De plus, l'univers de la cosmétique est un univers qui prête à discussion. Derrière chaque internaute

se cache en effet un consommateur qui aime donner son avis sur l'efficacité et les qualités des produits

qu'il utilise. Ainsi, 76% des publications ayant trait à l'univers de la cosmétique proviennent des forums.

Un internaute satisfait se transforme alors indirectement en ambassadeur, ce qui constitue une réelle

opportunité pour les marques.

En plus de consulter des forums et des blogs spécialisés, les internautes s’intéressent également aux

plateformes d’avis spécialisés dont le très connu Beauté-test.com, qui recueille chaque jour plusieurs

centaines d’avis d’internautes sur les derniers produits cosmétiques distribués par les marques. Les

consommateurs ont ainsi directement accès aux avis sincères et non motivés par la volonté de vendre

voulu par les marques et peuvent comparer leurs intentions d’achat. Ce type de plateforme représente

également un bon baromètre pour les marques qui peuvent ainsi observer les avis des internautes sur

leurs produits.

b) L’ESSOR DES BLOGS BEAUTE

Comme nous venons de le voir, aujourd’hui, les consommateurs se sentent investis d’une mission de

partage. Auparavant quand un consommateur essayait un produit, il en parlait à son entourage

immédiat (famille, amis, collègues) alors qu’aujourd’hui, cette expérience est de plus en plus partagée

sur Internet via les blogs ou les réseaux sociaux.

10

Ainsi, même s’il s’avère difficile de les recenser avec précision, il y aurait aujourd’hui vingt millions de

blogs dans le secteur de la mode, la beauté et l’art de vivre, qui occupent activement la Toile. Il s’agit

donc d’une communauté très puissante. Composés en grande majorité de jeunes femmes

passionnées, les blogs beauté représentent une communauté plus confidentielle que celle consacrée

à la mode. Au sein de cette communauté, on trouve différentes typologies de blogs : les blogs DIY (do

it yourself), c’est-à-dire les blogs de passionnées de cosmétique « home made » proposant leurs

recettes, les blogs de passionnées de nail art qui partagent leurs créations, les blogs de passionnées

absolues de make-up (très actives sur YouTube via des tutoriels) et enfin les blog-tests, plus

généralistes, qui passent en revue les tendances et nouveautés produits accompagnées de conseils.

Étonnamment, bien que la France soit le marché du parfum et du luxe, il existe très peu de blogs beauté

personnels spécialisés dans ce segment.

Ce succès des blogs beauté s’explique notamment par la mise en scène des produits dans la « vraie »

vie et sans artifices. En effet, dans une société où on assiste de plus en plus à l’uniformisation de

l’information, les blogueurs parlent avant tout de leur expérience du produit, le tout sur un ton très

franc et spontanée. Leur regard de consommateur-expert leur confère une forte légitimité. De plus, ils

sont très souvent à la pointe des innovations. Ils sont ainsi suivis non seulement par leurs lecteurs mais

également par des marques, qui lisent leurs billets pour faire de la veille concurrentielle et être au fait

de toutes les avancées du marché.

Par ailleurs, le statut particulier du blogueur contribue également à son succès. En effet, il peut être à

la fois une star (comme Capucine Piot du blog Babillages), et une personne accessible « the girl

nextdoor ». Dans tous les cas, une relation basée sur l’émotion et la crédibilité se tisse entre le blogueur

et ses lecteurs.

Selon une enquête effectuée auprès de 171 internautes7, la découverte de nouvelles marques est la

motivation première des lecteurs de blogs beauté, suivie de près par la qualité des avis et l’impartialité,

l’honnêteté, le ton plus ouvert qu’on peut y trouver. De plus, 1 internaute sur 3 achète un produit sur

la base d’informations trouvées sur des blogs, ce qui représente 13 millions de Français. Et 1 internaute

sur 4 recommande des produits découverts sur des blogs8.

7 Pour lire les résultats complets de l’enquête : http://votreconcentredebeaute.com/2011/09/06/enquete-blogs-communication/ 8 http://technorati.com/business/article/technorati-medias-2013-digital-influence-report/

11

c) L’AUDIENCE ET L’INFLUENCE DES BLOGS BEAUTE

A n’en plus douter, la blogosphère beauté prend de plus en plus de place. Jour après jour, de nouveaux

blogs sont créés et le public répond de plus en plus présent à ces nouveaux médias. En termes

d’audience, certains blogueurs (Alix Bancourt avec The cherry blossom girl, Magalie Bertin avec Beauté

Blog, Mathilde Lacombe avec La vie en blonde) ont même réussi à internationaliser leur audience en

traduisant leurs contenus en anglais, en portugais, en espagnol ou encore en italien. Un trafic qui peut

parfois égaliser voire dépasser l’audience de certains groupes de presse installés sur Internet avec

plusieurs magazines en ligne. Elles atteignent ainsi un trafic vertigineux qui leur offre des revenus

potentiels non négligeables.

Au-delà de l’audience, les blogs beauté sont une des communautés les plus puissantes en termes de

prescription, c’est-à-dire d’impact de l’audience, de pouvoir de prescription auprès des lectrices, de

fidélité et d’engagement de la communauté de lectrices.

En effet, selon une étude conduite par l’agence de relations publiques DeVries et le réseau participatif

d’information en ligne BlogHer9 sur l’influence des médias sur les comportements d’achats des femmes

en matière de produits cosmétiques, les blogs sont deux fois plus susceptibles (63%) que les magazines

(26%) d’avoir inspiré un achat de produits de beauté au cours des six derniers mois (Graphique 1). En

fait, en matière de produits de beauté, les femmes apparaissent tout aussi susceptibles de faire

confiance aux recommandations d’un blog de conseils parentaux (43%), de santé (42%), de style de vie

(37%), ou d’un blog de beauté et de mode (43%) (Graphique 2). Par ailleurs, lorsqu’il s’agit d’obtenir

des recommandations au sujet de produits de beauté, les femmes se tournent d’abord vers des

blogueurs « proches » et leur font davantage confiance que vers les magazines, les réseaux sociaux ou

les chats en ligne (Graphique 3).

9 L’étude complète : http://www.blogher.com/beauty-eye-blog-holder-0

Graphique 1 Graphique 1

12

Graphique 3

Graphique 2

13

III. La gestion de la relation blogueurs

a) VICHY : UN CAS D’ECOLE

Comme vu précédemment, les blogueurs beauté sont notamment appréciés pour leur authenticité et

leur franc-parler. Et c’est ce dernier point qui peut faire peur aux marques. Dans cette logique,

certaines peuvent être tentées de minimiser ce risque, en ouvrant des fake blogs, autrement dit des

blogs « amateur » crées de toutes pièces par des marques (souvent leur service marketing), et qui font

croire qu’ils sont animés par des particuliers, de manière totalement désintéressée.

Un des premiers exemples français de fake blogs est celui de Vichy. En avril 2005, Claire ouvre le blog

« Journal de ma peau ». Elle y décrit jour après jour son expérience d’un nouveau produit cosmétique

de la marque Vichy… La supercherie ne dure pas bien longtemps, jusqu’à ce que les blogueurs

découvrent que ce personnage est en fait fictif. Ce qui leur a mis la puce à l’oreille : les réponses

souvent vagues de Claire à leurs commentaires, le ton trop laudatif de ses billets sur les produits qu’elle

testait… Résultat : l’information a fait le tour des blogs et le service marketing de Vichy, à l’origine du

blog, a dû faire son mea culpa en ligne.

Il est vrai qu’en lançant son fake blog, Vichy a accumulé l’ensemble des erreurs pouvant être commises

sur la blogosphère et a ainsi vécu une véritable crise mais nous allons également voir comment elle a

réussi à s’en sortir.

D’abord, il y a Claire, un personnage inventé de toutes pièces, qui est censée commenter son

14

expérience avec le produit mais manque totalement d’authenticité. Les textes sont écrits par un

concepteur-rédacteur et la photo qui se trouve sur le blog est clairement professionnelle. De plus, le

blog n’est pas un « vrai » blog : les commentaires sont trop modérés (les critiques n’apparaissent pas

en ligne au début), des caractéristiques essentielles manquent. Il suffira ainsi de quelques heures à

peine pour que les blogueurs critiquent parfois violemment l’initiative comme du pur marketing.

Pour se replacer dans le contexte, il faut savoir que la marque a été parmi les toutes premières à avoir

eu le courage de s’aventurer sur ce terrain glissant que représentent les blogs. L’équipe marketing de

Vichy aidée de son agence a simplement reproduit sur un blog, les recettes de la communication

traditionnelle et inventé une jolie histoire. Pourtant dans la blogosphère, cela ne fonctionne pas. Les

lecteurs des blogs et les clients de Vichy veulent de l’authenticité. Le cas Vichy a alors rapidement été

repris dans les médias (CB news, Stratégies et Le monde quelques jours plus tard), transformant

l’affaire en vraie crise pour la marque.

Mais ce qu’il faut surtout retenir, c’est comment la marque a réussi à sortir de cette crise.

Tout d’abord, elle a reconnu avoir entendu la critique principale des blogueurs à propos de l’invention

de Claire. La vraie équipe produits Vichy s’est ensuite présentée, photo à l’appui. Les dizaines de

blogueurs qui avaient critiqué la première version ont rapidement salué le courage de l’équipe et lui

ont fait des suggestions, tandis que Vichy se mettait à l’écoute. Principale suggestion des blogueurs :

impliquer de vraies femmes intéressées par le test du produit (en l’occurrence un produit rajeunissant

pour la peau, Peel MicroAbrasion), ce que Vichy s’est empressé de faire en réunissant une dizaine de

blogueurs. Celles-ci ont testé le produit en postant librement des commentaires sur le blog de Vichy

et parfois sur le leur, qu’ils fussent positifs ou négatifs. Le blog a aussi été animé pendant le test par

une blogueuse qui avait eu beaucoup de commentaires sur sa note sur le blog de vichy, Sophie Kune

(http://jesuisunique.blogs.com/).

Le produit étant de qualité, les commentaires ont été globalement très positifs, transformant au final

l’expérience en bon buzz pour la marque, autant sur les blogs que dans la presse. En effet, Les Echos a

été le premier titre à saluer la réaction de Vichy.

Ainsi, utilisé correctement et de façon assumée, le blog de marque est une autre manière intéressante

de se rapprocher de ses clients. Surtout si la marque ouvre ses billets aux commentaires et critiques

des consommateurs-clients. Les éventuels avis négatifs sur les produits sont l’occasion d’humaniser la

marque, d’établir un dialogue avec ses clients, d’échanger avec eux pour construire une relation, créer

une communauté et attirer les internautes ciblés autour de l’actualité de la marque.

15

C’est d’ailleurs un choix qu’ont déjà adopté avec succès plusieurs marques.

Yves Rocher s’exprime par la voix de ses employées expertes pour offrir des conseils beauté aux

internautes mais aussi des analyses de tendances et de l’actualité mode/beauté. Le Blogzine sert

l’image de la marque en apportant un contenu vivant et sans cesse actualisé à ses clientes, avec en

moyenne 4 billets publiés par jour et un jeu-concours par mois.

Lancôme lance également son blog dédié au maquillage en 2006, publiant des vidéos tutoriels de

make-up, des astuces beautés et des informations sur leurs nouveautés produits. Les lecteurs peuvent

également discuter avec des maquilleurs professionnels.

Finalement, l’avantage du blog de marque pour l’entreprise c’est de pouvoir créer son propre contenu

et d’avoir un certain contrôle dessus, tout en laissant la parole aux clientes à travers les commentaires.

16

De plus, il s’agit d’un cercle vertueux. Car plus la marque va créer du contenu pertinent, plus elle

remontera dans les recherches Google (versus les articles négatifs ou avis sur les marques

concurrentes) et mieux le blog sera positionné.

b) SAVOIR REPERER LES INFLUENCEURS

Le blog de marque peut être une alternative ou un premier pas dans la blogosphère pour une

entreprise. Mais ce que l’on souhaite étudier à travers ce mémoire, c’est surtout comment une marque

peut bénéficier des forces des blogs beauté : leur authenticité, leur audience, leur influence et leur

pouvoir de recommandation.

Jusqu’à l’explosion d’Internet et des blogs, le nombre d’influenceurs était très limité. Il s’agissait soit

de journalistes spécialisés dans un secteur, soit de personnes très médiatisées (comme les sportifs qui

sont rémunérés pour porter une marque de vêtement pour influencer leurs fans). Avec l’évolution

rapide du nombre de blogs, les vrais passionnés d’un secteur comme les cosmétiques, peuvent

s’exprimer par écrit. Ce qu’ils disent est mis très facilement à la disposition de tous à l’aide des moteurs

de recherche et ils deviennent à leur tour des personnes influentes sur tel ou tel sujet.

Mais parmi tous les blogs beauté, très peu au final sont capables d’influencer, autrement dit de

modifier l’avis d’un très grand nombre d’autres, dans un sens ou dans un autre. L’objectif pour la

marque n’est donc pas de contacter le plus grand nombre de blogueurs pour une campagne, mais

plutôt de savoir repérer les vrais influenceurs.

Dit ainsi, cela semble presque évident. Pourtant, de

grandes marques de cosmétiques, continuent à faire

cette erreur et en paient le prix.

C’est notamment le cas de Garnier. Pour le lancement de

sa gamme de produits bio en octobre 2010, la marque a

décidé d’organiser une campagne de communication

massive auprès de toute la blogosphère beauté. Pour

maximiser sa visibilité, Garnier envoie sans aucun ciblage

préalable, à plusieurs centaines de blogueurs, un cahier

des charges qui indique les messages principaux à

transmettre et les mots clés à utiliser et leur propose une

rémunération en échange d’un article publié sur leur nouvelle gamme. C’est le principe des billets

sponsorisés. Le problème étant que la blogosphère beauté se partage un peu le même lectorat. Par

17

conséquent, une lectrice risque de lire plusieurs fois le même billet sponsorisé et de se lasser. En

l’occurrence, un blogueur beauté très influent a décidé de dénoncer les méthodes de la marque, à

travers un article sur son blog, dans lequel il ne recense pas moins de 93 billets sponsorisés présents

sur des blogs beauté mais également des blogs de cuisine10. Ainsi, à force de rechercher une exposition

maximale à tout prix et sans aucun ciblage, le risque est d’arriver au résultat inverse de celui voulu et

de se mettre le lectorat et la blogosphère à dos.

Aujourd’hui, pour générer du bouche-à-oreille positif autour de leurs produits, les marques doivent

alors mettre en place un marketing d’influence qui consiste à détecter, identifier et activer les leaders

d’opinion et utiliser les blogueurs non pas comme des cibles, mais comme des relais.

Ainsi, pour identifier un influenceur, il existe différents classements d’influence.

E-buzzing (ex Wikio) mesure l’influence des blogueurs à travers un classement général ou par

thématique. Mais le fonctionnement de l’algorithme d’E-buzzing a souvent été contesté par les

blogueurs. De façon simplifiée, l’algorithme calcule le nombre de liens entrants (backlinks) qui pointent

vers le blog. Si un site bien placé dans le classement pointe vers le blog, le blog gagnera davantage de

points. Si au contraire, le site qui pointe vers le blog, n’est pas référencé dans le classement (il peut

s’agir pourtant de sites connus comme Aufeminin.com, Glamour,…), le blog ne gagnera pas de points.

Ainsi, il y a rapidement eu des dérives, avec des blogs ayant compris le système et n’hésitant pas à

l’exploiter sans modération. Le classement n’est alors que peu représentatif des vrais influenceurs.

D’autant plus que ce classement ne rend pas compte de la fréquentation des sites.

En voici une démonstration simple :

D’après le classement Wikio d’Avril 2009, voici le top 5 des blogs mode :

1. www.fashion-gazette.fr

2. www.camilledessayage.com

3. www.garancedore.fr

4. www.punky-b.com

5. www.leblogdelamechante.fr

Si nous comparons ce classement avec les données de Google Ad Planner, outil permettant de

retrouver l'audience et la fréquentation des sites et des blogs, on constate que ce classement n’a que

peu à voir avec la fréquentation des blogs.

1. www.fashion-gazette.fr : 6,000 visiteurs uniques

2. www.camilledessayage.com : 17,000 visiteurs uniques

10 Pour lire l’article : http://planete-beaute.blogspot.fr/2010/11/gave-par-garnier.html

18

3. www.garancedore.fr : 200,000 visiteurs uniques

4. www.punky-b.com : 69,000 visiteurs uniques

5. www.leblogdelamechante.fr : 47,000 visiteurs uniques

Et un blog comme The Cherry Blossom Girl, qui est classé 11ème chez Wikio, affiche 120 000 visiteurs

uniques au compteur, c’est-à-dire plus que quatre des cinq premiers blogs au classement.

On le voit donc ici, ce classement est surtout basé sur les backlinks sans aucun rapport avec la

fréquentation des blogs.

Il existe un autre classement d’influence, Klout, qui note de 1 à 100 l’influence des blogs sur le web en

prenant compte cette fois-ci des paramètres quantitatifs et qualitatifs. Les 3 paramètres pris en

compte sont :

- True reach : ce paramètre recense le nombre d’internautes qui suivent le blogueur sur ses

différents profils sociaux (Facebook, Instagram, Twitter, Linkedin,…)

- Amplification probability : ce paramètre prend en compte si le blog est à l’origine de

conversations ou non.

- Network influence : ce paramètre prend en compte l’influence des personnes qui interagissent

avec le blogueur.

Klout est ainsi capable de définir les sujets sur lesquels le blogueur est "influent", en considérant les

sujets dont il parle le plus souvent, sur lesquels il est retweeté,… La note varie ainsi au quotidien.

Toutefois, le score Klout est également critiqué car il reste trop quantitatif. En effet, l’algorithme ne

fait pas la différence entre des conversations positives ou négatives générées par le blog.

Tous ces classements sont des outils utiles pour les entreprises qui font leurs premiers pas dans le

social media. Mais il ne faut pas considérer le score uniquement, qui ne fait pas sens à lui tout seul

(certaines entreprises organisent des soirées/conférences réservées aux personnes avec un Klout de

plus de n).

Il n’existe pas de méthodologie toute faite permettant de repérer les influenceurs. L’idéal serait de

prendre le temps de suivre des blogs, regarder si le lectorat correspond à la cible de la marque, analyser

la nature des articles, prendre la mesure du ton, de la qualité de l’audience et des informations

diffusées, de l’implication du blogueur dans ses articles, tout en tenant compte de l’audience (via

Google Ad Planner ou Nielsen NetRatings), du nombre de commentaires générés par chaque article et

du nombre d’abonnés aux flux RSS, ce qui demande du temps et donc de l’investissement humain.

19

Mais finalement, il s’agit d’une étape cruciale et le temps passé sur ces blogs permet non seulement

de repérer les influenceurs mais également de faire de la veille sur les tendances du marché, les

nouvelles innovations et les attentes des consommateurs.

c) LA PRISE DE CONTACT

Une fois le ciblage effectué, nous arrivons à l’étape cruciale de la prise de contact. Il faut le savoir, les

blogueurs sont très courtisés. Ils sont approchés en moyenne 4 fois par semaine par des marques. Mais

1 blogueur sur 5 estime avoir rencontré des approches inappropriées de la part des marques11.

Le choix du moyen d’approche de la marque est donc très important. Elle peut soit gérer elle-même la

relation, soit la faire gérer par une agence de relation presse ou par une agence spécialisée dans les

relations blogueurs.

L’avantage d’une gestion par la marque elle-même, c’est que le discours est souvent plus clair et en

cohérence avec la stratégie social media globale de la marque. De plus, les échanges sont

personnalisés, la marque peut prendre le temps d’écouter et de mettre en place des partenariats à

long terme. D’ailleurs, parmi les blogueurs travaillant avec des marques, la majorité préfère être en

contact direct avec une marque plutôt qu’un intermédiaire.

Si elle ne dispose pas des ressources en interne, la marque peut également faire appel à une agence

spécialisée dans les relations blogueurs. L’agence a souvent une mission précise. Elle va alors contacter

les blogueurs dans le cadre d’un lancement ou dans le cadre d’opérations fil rouge tout au long de

l’année. Les échanges sont également personnalisés.

Enfin, la marque peut faire appel à une agence de relation presse. Celle-ci aura pour mission de faire

émerger la marque sur un maximum de médias en affinité avec sa cible sur une période donnée, en

fonction des moyens dont elle dispose. Une stratégie de communication est alors mise en place :

communiqués de presse, flash news, conférences de presse, shopping, portages (le fait d’envoyer des

produits à la presse pour tests)….Mais les agences RP n’ont pas forcément l’habitude de travailler avec

ce nouveau type de support. Elles les considèrent la plupart du temps comme un média traditionnel.

Certes, les blogs deviennent des médias, mais ils ne peuvent pas tout à fait être traités comme tels. En

11 http://technorati.com/business/article/technorati-medias-2013-digital-influence-report/

20

effet, la dimension personnelle et passionnée reste importante chez les blogueurs beauté et ils n’ont

pas non plus les mêmes attentes que des journalistes. Par exemple, dans le cadre de certains

événements organisés par les marques, il est fort délicat de mêler les deux mondes. Savoir composer

avec les journalistes relève parfois de l’art, et cet art se réinvente avec les blogueurs. Leurs motivations,

envies, réactions et retombées ne sont pas les mêmes. Alors que les journalistes ont l’habitude de

recevoir des dizaines de communiqués de presse et des mails de relance, cette approche ne sera pas

pertinente auprès des blogueurs, qui ont besoin de vivre une expérience avec la marque, sentir une

relation privilégiée.

Pour ce faire, il faut établir une vraie relation blogueur, un peu tous les jours, sur de longues périodes.

Cela passe notamment par des mails personnalisés, des commentaires de leurs articles, des discussions

avec eux sur Twitter. De plus, il est important d’éviter les interlocuteurs multiples, en définissant un

contact référent qui gardera ainsi un historique des discussions passées. Cela demande bien-sûr plus

de temps pour être mis en place mais sera plus efficace qu’un envoi massif de communiqués de presse

impersonnels.

Enfin, une vraie relation blogueur est basée sur la franchise et l’échange désintéressé, c’est-à-dire sans

attendre immédiatement quelque chose en retour. En effet, le blogueur ne doit pas se sentir obliger

de rédiger un article et cela ne sert à rien non plus d’essayer de l’induire en erreur sur les qualités du

produit. Mieux vaut être franc sur ses atouts et ses défauts.

Si le blogueur n’est pas réceptif, ce n’est pas non plus la peine d’insister. La marque aura l’occasion de

revenir vers lui lorsqu’elle aura une nouvelle actualité comme un lancement produit, mais toujours

sans rien lui réclamer.

d) DE LA RELATION VIRTUELLE AU PARTENARIAT IRL (IN REAL LIFE)

Une fois le contact établi, la marque peut proposer différents types de partenariats aux blogueurs :

jeux-concours, codes promos, tests de nouveaux produits, billets sponsorisés, interviews,

événements… Ces partenariats permettent aux blogueurs de découvrir de nouveaux produits et de les

faire partager avec leur lectorat, mais aussi de récompenser leurs fidèles lectrices grâce à des gains

mais également de générer plus de trafic sur leur blog.

Si le blogueur n’a pas apprécié un produit et qu’il publie un billet dessus, il ne faut pas pour autant

cesser tout contact avec celui-ci. Cela fait partie de la gestion de ce nouveau type de partenariat. C’est

alors l’opportunité d’engager un dialogue approfondi avec lui, source d’insight voire d’optimisation du

produit. Les marques qui savent écouter les critiques ont ainsi l’opportunité de s’améliorer.

21

Le succès des blogs beauté est tel que, depuis quelques années, les marques engagent des partenariats

de plus en plus impliquant avec les plus influentes. Bourjois en 2012 par exemple, a fait de cinq d’entre

elles les égéries de son e-shop. «Nous voulions que ce soit le site de nos clientes», explique Magali

Berrux, directrice internet chez Bourjois. « Alors la marque a mis en scène ces blogueuses-

consommatrices dans des looks qu'elles-mêmes ont choisis [avec les produits Bourjois de leur choix],

afin de sortir des visuels institutionnels que nous utilisons d'habitude » et de créer plus de proximité.

Les vidéos ont atteint les 65 000 vues en trois jours, et autant de visites sur le site de la marque.

En parallèle, Bourjois offrait également des codes promo aux lectrices de chaque blog.

La marque va aujourd’hui encore plus loin en faisant appel à l’expertise de Camille Elisa, blogueuse de

Pshiiit dans le domaine du nail art, qui a ainsi participé au développement d’un kit de nail art pour

Bourjois.

22

On le voit dans cette exemple-même, les blogs sont en train de devenir des marques. Quand une

marque propose un partenariat avec un blog, ce n’est pas le nom de l’auteur qui sera utilisé mais bien

le nom du blog, valorisé comme un label.

Ainsi, du petit fanzine en ligne incarné par la spontanéité, le blog avance progressivement vers un objet

de marketing.

L'Oréal Paris a également fait appel aux blogueurs pour du contenu rédactionnel. «Elles contribuent à

notre site, sans aucune obligation vis-à-vis de leur propre blog», explique Élise Ducret, CRM manager

chez L’Oréal. Elles gardent ainsi leur liberté.

De son côté, Yves Rocher considère les blogueuses comme de véritables ambassadrices de la marque.

Lors de lancements produits, elle les invite le temps d’un week-end dans son éco-hôtel spa La Grée des

Landes. Elles participent également à des vidéos tutoriels de maquillage.

Plus récemment, la marque a également lancé la

première chaine de télévision à la demande dédiée

à la beauté, en partenariat avec la blogueuse

Magalie Bertin de Beauté Blog qui co-anime ainsi les

émissions de Miss Beauté. Il s’agit de séries courtes

de 4 minutes pour aller à l’essentiel tout en donnant

un maximum de conseils beauté. Avec cette chaine, Yves Rocher cherche à atteindre bien plus loin que

le seul lectorat du blog. En effet, elle veut cibler 5,2 millions de femmes de 25 à 49 ans.

Si on regarde au-delà de nos frontières franco-françaises, la marque

M.A.C (Make-up Art Cosmetics basée à Toronto) s’est intéressée à

neuf blogueuses beauté nord-américaines et les a invitées à se

rendre dans leurs laboratoires au siège social pour la co-création de

nouveaux produits pour la marque. La marque avait tout de même

pris soin de contacter 60 à 80 bloggeuses beauté en amont pour

recueillir quelques idées avant la sélection finale de neuf d’entre

elles. Une fois finis, les produits furent intégrés à la «MAC Bloggers’

obsessions», collection limitée de MAC (6 semaines de vente) et

lancée le 21 Juin 2011.

Il s’agissait d’une opération bien ficelée de la part de la marque, qui touche de ce fait directement le

public riche et diversifié des neuf bloggeuses, directement intéressé par les produits ayant été

développés par celles-ci. De plus, ces dernières relataient en parallèle sur leur blog tout le processus

23

de création des produits, entretenant l’intérêt des internautes pour leur création.

Ainsi, lors du lancement, certains produits se sont retrouvés en rupture de stock en moins de 24h et

tous étaient épuisés au bout de deux semaines. L’opération de teasing mise en place par les bloggeuses

et la marque a donc porté ses fruits puisque les internautes attendaient impatiemment la sortie des

produits et se sont rués dessus dès leur mise sur le marché.

Ces nombreux exemples révèlent ainsi qu’une fois le fonctionnement de la blogosphère maitrisé, il est

plutôt positif et même lucratif pour les marques d’intégrer les blogs beauté dans leur stratégie digitale.

En effet, ces derniers disposent d’un public très ciblé et donc intéressant pour les marques, de lecteurs

qui leur accordent une certaine confiance et enfin, ils utilisent des médias dynamiques (photos et

vidéos) qui leur permettent de produire des contenus riches.

e) LA REMUNERATION

La rémunération des blogueurs est une question délicate que se posent beaucoup de marques.

Quasiment toutes pratiquent l’envoi de produits aux blogueurs dans l’espoir que celles-ci les testent

et en parlent sur leur blog. Mais parfois, pour garantir d’être signalé dans un article, les marques font

appel au sponsoring. C’était notamment le cas de Garnier comme nous l’avons vu précédemment. A

la différence de l’envoi de produit, le sponsoring est basé sur la monétisation. La marque achète un

article clairement publicitaire à un blogueur. Cette somme va dépendre du niveau d’influence et de la

fréquentation du blog. De plus, il est obligatoire de mentionner le sponsoring en tant que tel dans le

billet. Pourtant, seulement 86% blogueurs qui font des billets sponsorisés, l’indiquent clairement12.

« Le pic des billets sponsorisés a été atteint entre 2007 et 2009, explique Olivier Billon, président et

co-fondateur d’Ykone. Certaines marques de beauté ont adapté le modèle "publi-reportage" de la

presse écrite au digital en payant les blogueurs pour qu'ils testent leurs produits. La rentabilité pour

les marques s'est révélée faible et les blogueurs se sont fait insulter par leur communauté. ».

Le préjudice est double : à la fois pour la marque et le blogueur.

On peut comprendre la tentation de certaines marques de recourir aux billets sponsorisés. Par ce biais,

elles souhaitent bénéficier de plusieurs avantages : la possibilité de prévoir le nombre de billets

publiés, mesurer les clics, valider le contenu des billets avant leur publication et améliorer le

référencement naturel. Mais en acceptant de payer les blogueurs, elles rentrent dans une logique

12 Légalement tous les billets sponsorisés ou partenariats doivent être clairement identifiés comme tels. En cas de manquement, les blogueurs sont passibles de sanctions assez élevées s’ils sont contrôlés par la DGCCRF.

24

contraire à l’essence même des blogs. Les blogs beauté sont une alternative aux magazines féminins,

qui ont perdu la confiance de leurs lectrices à cause justement de ce manque d’authenticité.

Pour les blogueurs, le risque avec ce type de pratique récurrente, c’est bien-sûr de perdre toute

légitimité et crédibilité. Pour conserver cette crédibilité, les blogueurs doivent garder leur

indépendance, leur liberté de parole, rester garants des produits qu’ils recommandent et être

transparents quant à leurs partenariats. Ils doivent aussi savoir entretenir le lien avec leur lectorat en

prenant le temps de répondre aux messages et commentaires.

En ce sens, 38% des lectrices de blog estiment qu’un partenariat avec une marque peut s’avérer

préjudiciable pour la crédibilité du blogueur, même si 37% estiment que cela ne porte pas préjudice à

la crédibilité du blogueur s’ils ont confiance en lui. Il existe en effet un contrat de lecture tacite entre

les blogueurs et leur communauté. Tant qu'il est respecté, les lecteurs sont indulgents car ils se doutent

que les blogueurs ont besoin de vivre de leur travail. La transparence reste primordiale : 76% pensent

qu’il est préférable que les partenariats soient signalés explicitement dans les articles13.

Tous ne se font pas payer mais bien souvent, les blogueurs participent à des événements appelés

« expérience blogueurs », auxquels ils n’auraient pas eu accès gratuitement : tests produits avant leur

sortie, soirées VIP, …

Plus subtile que le billet sponsorisé, une autre forme de monétisation existe également : le lien

d'affiliation. Contrairement à une publicité qui est payée à l’affichage – au nombre de pages vues avec

publicité en l’occurrence sur Internet – l’affiliation est rémunérée selon 3 types de contacts utiles :

- CPC : Cost Per Click

- CPL : Cost Per Lead

- CPA : Cost Per Action

Le coût par clic est tout simplement un montant que touche l’affilié (le blogueur) à chaque clic généré

vers le site commercial de l’annonceur. Le coût par lead correspond à une inscription (à un site, une

newsletter, un formulaire de demande d’information…). Et le coût par action à une transaction/vente

pour laquelle l’affilié reçoit un pourcentage.

"Il s'agit de commissionner les blogueurs sur les ventes de produits générées grâce à leurs articles",

explique Nardjisse Ben Mebarek, créatrice de l'agence de communication Red Stilettos. Des sites se

13 Pour lire les résultats complets de l’enquête : http://votreconcentredebeaute.com/2011/09/06/enquete-blogs-communication/

25

chargent d'installer ces liens pour des blogs et des magazines Web. Si ces perspectives de royalties sur

les ventes sont clairement stipulées sur des blogs américains à l'instar de The Man Repeller, en France,

cela manque clairement de transparence, ce qui peut heurter la confiance des lecteurs. Comment

s'assurer que les blogueurs ne se transforment pas en vendeurs ? "Ceux qui n'ont pas d'éthique sont

vite repérés, explique Olivier Billon, président et co-fondateur d’Ykone. Surtout qu'ils sont en

concurrence avec une nouvelle génération de blogueurs hyper créatifs comme Superbytimai ou Make

my lemonade qui hissent leur contenu à un niveau toujours plus élevé."

F) MESURES D’EFFICACITE

A la fin de chaque opération avec les blogueurs, les marques recherchent à mesurer l’efficacité de la

campagne. Comme pour d’autres médias sociaux, il est difficile de mesurer un ROI.

Mais il est possible de suivre d’autres indicateurs, comme les conversations en ligne, avant, pendant

et après l’opération.

De plus, des outils (exemple : Synthesio, SAS, Spotter) permettent de mesurer le nombre d’occurrences

sur les blogs, au niveau mondial ou via Twitter.

En parallèle, la marque doit faire du monitoring, pour notamment anticiper les problèmes, découvrir

les avis divergents et identifier des consommateurs clés.

Enfin, la marque peut suivre certains métriques en analysant le nombre de nouveaux followers ou fans

sur la page de la marque, le trafic sur le site ou encore le nombre de partage des articles (Graphique

5).

Graphique 5

26

Conclusion

Finalement, le phénomène des blogs montre bien la tendance de l’évolution actuelle du web : chacun

peut participer et générer des échanges de plusieurs à plusieurs (many-to-many) par opposition au

modèle classique des médias depuis l’invention de l’imprimerie, c’est-à-dire la diffusion verticale

d’informations avec peu de contributeurs et de sources à une large audience (one-to-many). Dit

autrement, le web devient « social », il facilite les rencontres et les échanges.

Dans ce contexte, il est clair aujourd’hui qu’il devient impossible pour les marques de faire abstraction

de cette nouvelle vague de jeunes femmes passionnées et de leurs blogs beauté. Les grandes marques

y trouvent en effet, un autre moyen de communiquer sur leurs produits auprès d’un canal médiatique

très prescripteur.

Mais si les marques en général ont compris qu’il fallait travailler de concert avec ces nouveaux

influenceurs, il y a encore beaucoup à faire pour parvenir à un équilibre.

En effet, les marques doivent commencer par ajuster leur communication, en sélectionnant bien les

blogs et en sachant doser leurs actions. En effet, trop de marques continuent d’appréhender la relation

blogueurs comme de l’achat média. Or, l’enjeu est tout autre. Il est essentiel de transformer les

blogueurs en défenseurs ou promoteurs naturels de la marque et non pas de les acheter pour obtenir

un billet positif sur leur blog. Autrement dit, il s’agit de créer une communauté autour de la marque et

non de polluer les blogs avec du texte promotionnel.

Par ailleurs, les marques doivent apprendre à réagir rapidement. Certains blogueurs mettent à jour

leur site en direct ou via les réseaux sociaux. La communication d'informations doit donc être

immédiate. De plus, réagir aux éventuelles critiques rapidement permet de montrer que la marque est

attentive et éviter dans certains cas qu’un bruit négatif ne surgisse.

Ensuite, il est important de lier des partenariats avec les blogueurs influents, qui deviennent ainsi de

véritables partenaires de la marque pour la rédaction d'articles sur le site de la marque, la

représentation d'un look, d'un style de vie ou encore la co-conception d’un produit. Pour aller plus

loin, les événements doivent également être ouverts aux lecteurs, sans lesquels le blog ne serait pas

ce qu’il est. D’où l’importance de mettre en place des événements avec le blogueur, la marque, les

fans de la marque et du blog.

27

Enfin, lire les blogs donne une idée en temps réel de ce que les consommateurs disent des produits de

la marque. Surtout que la communauté de blogueurs est très au fait du marché. Les marques peuvent

donc les utiliser pour s'informer de l'évolution de ce dernier.

Tout ce travail demande de la part des marques, de l'implication au quotidien.

Il s’agit d’un défi certain puisque le phénomène des blogs ne cesse de prendre de l’ampleur et qu’il est

en évolution constante. En effet, depuis les débuts des blogs, l'essentiel des commentaires et des

discussions, s'est déplacé du blog en lui-même vers les réseaux sociaux et les plates-formes de micro

blogging comme Twitter. C'est finalement cette nouvelle donne qui fait que l'ensemble des médias

sociaux, dont les blogs, doit être compris et conçu par les marques comme un dispositif et non

isolément comme autant d'outils disparates.

Pour conclure, il semble nécessaire de rappeler que l’engouement croissant pour les blogs beauté et

leur rôle clef démontré dans l’influence d’achat, ne profitent malheureusement pas à tout le monde.

En effet, ce phénomène pose la question de la légitimité des journalistes beauté, qui doivent ainsi

repenser leur place auprès des marques et des consommateurs.

28

Bibliographie

OUVRAGES

Blog et podcasts, Loic Le Meur et Laurence Beauvais, Dunod

Objectifs blogs, exploration dynamiques de la blogosphère, Annabelle Klein, L’Harmattan

Blogs bless you, Pierre Méchentel, Edilivre, 2011

Créer, trouver et exploiter les blogs, Olivier ERTZSCHEID, Editions de l’ADBS, 2008.

Weblogs: A History and Perspective, Rebecca's Pocket. 07 September 2000. 25 October 2006

ARTICLES DE PRESSE

« Blogueurs professionnels », M le magazine du Monde, 14/12/2012

« Les blogueurs, nouveaux prescripteurs », Le Monde, 18/02/2012

« L’influence des blogs beauté », LSA, 14/06/2012

SITES INTERNET

http://www.nielsen.com/us/en/newswire/2012/buzz-in-the-blogosphere-millions-more-

bloggers-and-blog-readers.html

http://www.blogher.com/beauty-eye-blog-holder-0

http://technorati.com/business/article/technorati-medias-2013-digital-influence-report/

http://technorati.com/social-media/article/state-of-the-blogosphere-2011-part2/page-3/

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bloggers-and-blog-readers.html

http://blogging.org/blog/blogging-stats-2012-infographic/

http://www.journaldunet.com/ebusiness/le-net/nombre-internautes-france.shtml

http://www.commentcamarche.net/faq/14295-fake-blogs-buzz-marketing-pratiques-a-

manier-avec-precaution

http://www.strategies.fr/etudes-tendances/dossiers/161683/160765W/le-social-media-

marketing-impose-ses-marques.html

http://www.echodesmarques.com/2012/02/29/n%C2%B0-6-secteur-des-cosmetiques/

http://labs.ebuzzing.fr/top-blogs/beaute

http://votreconcentredebeaute.com/2011/09/06/enquete-blogs-communication/

http://www.beaute-test.com/

http://www.bourjois.fr/

29

BLOGS BEAUTE

http://beaute-blog.blogspot.fr/

http://planete-beaute.blogspot.fr/

http://www.superbytimai.com/

http://babillages.net/

http://www.lesconseilsdejulie.fr/

http://www.lisaeldridge.com/

http://pshiiit.com/

http://www.thecherryblossomgirl.com/

Blog Garnier http://www.maminuteamoi.fr/

Blog Yves Rocher http://blog.yves-rocher.fr/

Blog Lancôme http://www.blog-make-up.com/

30

Annexe

Interview d’Anne Gigleux, Chef de produit Sensibiafine, et en charge notamment des relations

blogueurs pour les Dermo-cosmétiques de Biafine (Soleilbiafine, Bébébiafine, Sensibiafine et

Cicabiafine)

Depuis combien de temps la marque travaille-t-elle avec des blogs ?

Anne Gigleux : Cela est très récent. C’est en fait la première année où nous commençons à travailler

avec les blogs.

Pourquoi ? Qu’est-ce que cela apporte de plus de travailler avec des blogs ?

Anne Gigleux : Selon moi, les blogueuses apportent quelque chose de différent par rapport aux

journalistes, qui sont des professionnels. Elles permettent de toucher un autre lectorat, une

communauté qui ne lit pas forcément les magazines de presse. De plus, nous vivons dans une

génération « transparence », où la parole de la blogueuse, en tant que consommatrice experte,

apparaitra comme moins vendu que celui de la journaliste et donc plus authentique. Il s’agirait d’un

manque que de ne pas travailler avec les blogs.

Quels sont les différents types de partenariats que la marque propose aux blogs ?

Anne Gigleux : Pour cette première année, les Dermo-cosmétiques de Biafine propose des jeux-

concours et une soirée événementielle où seront invitées une quarantaine de blogueuses beauté. Il

s’agira un rendez-vous informel dans un lieu arty, permettant de présenter et de faire tester les

produits ainsi que d’échanger avec les porte-parole de la marque. Les blogueurs repartent avec les

produits de leur choix. L’objectif est de créer un lien de proximité avec eux.

Comment est gérée la relation blogueurs ?

Anne Gigleux : Nous passons par une agence de relation presse Ketchum Pleon, qui n’est pas

particulièrement spécialisée dans les blogs mais dans laquelle il y a une personne dédiée aux relations

blogueurs.

31

Comment s’effectue la sélection des blogs pour les partenariats ?

Anne Gigleux : Tout d’abord, l’agence effectue une classification des blogs (tiers 1, tiers 2, tiers 3) en

fonction du nombre de vues et de pages vues par mois. Le tiers 1 correspond aux blogs que l’on

souhaite toucher en priorité.

Ensuite nous croisons les données quantitatives avec des données qualitatives. Chaque blog est noté

de 1 à 10 en fonction de la régularité de parution, qualité d’expression, présence de visuels, mise en

avant du wording, positivité de l’avis et renvoi vers le site Biafine.

De plus, nous leur envoyons des quizz de 3,4 questions afin de tester leur affinité à l’univers de la

pharmacie et leur intérêt pour notre marque.

Nous ciblons alors une dizaine de blogs beauté répartis dans les différents tiers, ce qui nous permet

d’atteindre un lectorat diversifié.

Que se passe-t-il si une blogueuse écrit un article négatif sur la marque ?

Comment est gérée la crise ? Existe-t-il un process à suivre ?

Anne Gigleux : C’est le risque à prendre. Nous n’avons aucun droit sur leur publication. Si une

blogueuse publie un article négatif, l’agence rappelle la blogueuse pour comprendre la situation. Si la

blogueuse est trop virulente, nous la sortons du listing.

La marque a-t-elle recours aux billets sponsorisés/affiliation ?

Anne Gigleux : Actuellement non, mais nous pouvons envisager le recours aux billets sponsorisés dans

le cadre d’un partenariat, à horizon moyen terme. Notre budget pour l’instant ne nous le permet pas.

Comment se déroule le partenariat avec les blogueurs ? La marque souhaite-t-elle effectuer des

partenariats à long terme avec certains blogueurs ou effectuer une sélection différente pour chaque

nouvelle campagne ?

Anne Gigleux : Cela dépend de l’envie de chaque blogueur de continuer à travailler avec notre marque

ou non. Il doit s’agir d’un partenariat gagnant-gagnant. Mais à vrai dire, les partenariats à long terme

ne font pas encore partie de nos objectifs actuels. La marque débute tout juste dans la relation

blogueur mais cela sera plus envisageable à horizon 3 ans. Par contre, si un blogueur ne parle jamais

de notre marque, on ne va pas continuer avec lui.

Quel est le coût moyen d’une campagne blogs ? Comment se calcule ensuite le ROI ?

Anne Gigleux : Nous investissons entre 8 et 10% de notre budget Relation Presse pour les campagnes

blogs. Et nous ne cherchons pas à calculer un impact sur les ventes à travers ce type de campagne. Il

32

s’agit plutôt de mesurer les retombées qualitatives, de générer du bouche-à-oreille et d’augmenter le

nombre d’informations spontanées sur la marque. Le but est de donner envie d’acheter.

Les blogs sont-ils une simple tendance ou un phénomène qui va durer selon vous ?

Anne Gigleux : A titre personnel, je pense que les blogs sont un phénomène amené à durer dans le

temps. La forme changera peut-être mais le concept restera car nous sommes dans une ère où la

transparence est primordiale et les blogs permettent de donner notre avis et rentre une logique de

pédagogie. Par contre, le danger serait de se rapprocher trop du rôle de la journaliste et ainsi perdre

l’intérêt du blog.