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SharonKena

MorsuresNocturnes

Tome1-Traquée

LESEDITIONSSHARONKENA

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Dumêmeauteur

Lasérie:Danslescoulissesd’IWA(2006à2008)Dedeuxmondesdifférents(2006)

Àl’ombredelavérité(2007)

Quandlepassérefaitsurface(2007)

Lasérie:Lesfilsdelamaisonabandonnée(2007)Letempledutemps(2007)

Jeuxdeséduction(2007)

Àladérive(2008)

Doublevie(2008)

Latrilogie:Au-delàdesapparences(2008)

L’île(2008)

Mortellerencontre(2008)

Lestourmentsd’unepassion(2008)

Fauxsemblants(2009)

Lasaga:Totaledévotion(2009)

Latrilogie:Lesenvoyés(2010)

Lesdéboiresd’unestar(2010)

Âmedeguerrière(2010)

Lasaga:Lesguerriersdel’ombre(2010à2011)Latrilogie:JaneHunter(2011)

EntreAmouretPlaisir(2011)

Béverly(2011)

©LesEditionsSharonKena.2011.

5

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Tabledesmatières

Pr

ologuep9

C

hapitre14p1

17

C

hapitre1p12

C

hapitre15p125

C

hapitre2p20

C

hapitre16p132

C

hapitre3p29

C

hapitre17p139

C

hapitre4p37

C

hapitre18p147

C

hapitre5p45

C

hapitre19p156

C

hapitre6p52

C

hapitre20p162

C

hapitre7p59

C

hapitre21p172

C

hapitre8p66

C

hapitre22p180

C

hapitre9p73

C

hapitre23p187

C

hapitre10p82

C

hapitre24p194

C

hapitre11p91

C

hapitre25p202

C

hapitre12p100

C

hapitre26p210

C

hapitre13p107

C

hapitre27p216

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8

Prologue

Lanuitestnoire,sanslune.Unenuitpropiceauxprédateurs.D’ailleurs,n’importequellepersonnesenséenes’ypromèneraitpastouteseule.

Apparemment,toutlemonden’apascetteprésenced’esprit.Àmoinsquecenesoitungoûtpourledanger,uneattirancepourlanuit,ouuneenviedemourir.

Ilssontlà,perchéssuruntoit,tapisdansl’ombre.Ilsl’observent.

Peggyvientdesedisputeravecsonfiancéetarompusuruncoupdetête.Elleenpleureencore.Ilsnesontpasd’accordsurlesortàréserveràAndy,lefrèremaladedeDrew,sonfuturmari.Iln’endémordpas,ilveutqu’ilviennevivreaveceux.MaisDrewestjournaliste,etelle,avocate.Ilsn’aurontjamaisletempsdes’occuperd’Andy.Pourtant,Drewneveutrienentendre.

Peggymarcheàl’aveuglette,nesachantpasoùelleva,etencoremoinsoùelleest.Ilsemblequ’ellesesoittropenfoncéedanslesruessombresdeMontréal.Elleessaiederetrouversonchemin,désiranttrouverunplandelaville,ouquelqu’unpourlarenseigner.Cequisembleêtreunemissionimpossible,l’endroitestdésert.

ElleserésigneàsortirsonportabledesonsacàmainencuirnoiretàappelerDrew.Ehbien,non.Ellen’apasderéseau.Lapoisse!

Unepetitebriseselève,lafaisantfrissonner.Elleneportequ’unerobecourteetéchancréedansledos.Elle,quiétaitaurestaurantquandelleadécidédefairefauxbondàsonfiancé,auraitpeut-êtredûyréfléchiràdeuxfois,ouprendreletaxiqu’elleahésitéàarrêter.Elleavaitbesoindemarcher,çasembleêtreuneerreur.Sespiedsdanslestalonshautsluifontmal.

Unbruitsourdretentit,lafaisantsursauter.Elleperçoitplusloinune9

canettevideglissersurlesol.

Idiote!Elles’esteffrayéesanslamoindreraison.

Ilfautqu’elleparted’ici.

Ellelèvelesyeuxdelabouteillepourapercevoirdessilhouettes.Quatre,pourêtreexacte.Sansdouteunebandedejeunesquipasseparlàetpourraitlarenseigner.Seulementsoninstinctluicriedes’enfuirencourant,delesfuircommelapeste.Pourtant,ellerestefigée,essayantdepercevoirleurvisage,detrouverunsigneamicaleneux,avantdes’alarmeridiotement.

Lessilhouettessonttotalementimmobilesetsemblentlafixer.Celaneprésageriendebon.

Elledéglutit.

Ilss’approchentd’elled’unmêmepasrapide,s’arrêtantàdeuxmètresdesoncorpstétanisé.Elledistinguetoutdesuitelesvisagesgrâceauseullampadairedelaruequifonctionne.Ils'agitd'unhomme,dedeuxfemmes,etletroisièmeparaîtunmélangedesdeux,untranssexuel,sansdoute.Ilssontvêtusennoirexclusivementetlemaquillagemarqueleurpeaud’unemanièreeffrayante.L'hommeestblond,lescheveuxcoiffésàlabrossedontlespointessontnoires.L'unedesfillesàdelongscheveuxfoncésalorsquel'autreestuneroussepulpeuse.Ledernierestapparemmentunhommedéguiséenfemme.Iladescheveuxsombresetunvisageméprisant.Ilsnesemblentpaslàpourfairelaconversation.Ilsn’ontvraisemblablementriend’amical.Prisedepanique,Peggysemetàcourirdanslesensinverse.Elleentendleurpaslasuivre,faitcequ’ellepeutpournepastomberetmaintenirunecertainedistance.Savieendépend.Lajeunefemmeseretournemalgréelle,aprèsplusieursmètres,pourvoiroùilssont.Figésaumilieudelarue.Est-ceunjeu?Unetraque?

Ellepivotepours’enfuirauplusvitequandelleseheurteàquelquechose…plutôtquelqu’un.Illuimaintientlepoignetpourqu’ellenes’échappepascommeellelèvelesyeuxsurlui.Unhommetoutennoir,descheveuxfoncéstombantssouslesoreilles,unebarbedeplusieursjours.Ilportedeslunettesdesoleil,maisilestdivinementbeau.Àtelpointqu’elleesthypnotiséeetn’esquisseaucunmouvement.

L’inconnulibèresonpoignetavantderetirerseslunettes,dévoilantainsisesyeuxd’unnoirprofond.Elleleconfirme,cemecestàsedamnertantil10

incarnelabeautéparfaite.Mais…ellenelepensequedeuxsecondes,parcequ’ensuiteilouvrelaboucheetellevoitsescaninesacérées.

Unvampire.

MonDieu,commentest-cepossible?Lesvampiresn’existentpas.Ilsfontseulementpartiedeshistoires.Etpourtant...

LeDieudelabeautéplantesescrocsdanssagorgesansqu’ellearriveàsedébattre,etpourcause,ill'ahypnotisée.Peggysentsonsangquittersoncorps,saviel'abandonner.Ellevamourirsansmêmepouvoirsedéfendre.

Levampires’abaisseavecsaproiedanslesbrascommeils’abreuved’elle.Quandilaterminé,illalaissetombersurlesoletessuieseslèvresdureversdesonpull.

Iladresseunseulregardauxautresetsansunmot,ilsdisparaissentdanslesténèbres.

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Chapitre1

–Oh,monDieu!Ilestcanon!s’exclameDélila.

Sacollègue,Anaïs,regardeaveceffarementlajeunefemmequisemblehypnotisée.

Délilaalesyeuxrivéssurunhommeencostumetroispiècesquivientdepénétrerdanslasallederéception.Ilestgrandetd’unebeautéàcouperlesouffle,d’ailleursellealesoufflecoupé.Sescheveuxnoirssontplaquéssursatêteavecdugel,ilestloin,maisilluisemblequ’iladesyeuxfoncés.

–Délila?l’appelleAnaïsenclaquantdesdoigts.C’estleDucLancaster.

–Celuiquivientd’arriverenville?

–Celui-làmême.

–IlaachetélechâteauàlalisièredeMontréal.

–Oui.

DélilaestincapablededétachersonregarddecetêtrequandelleparleavecAnaïs.Heureusementpourelle,leDucestengrandeconversationavecunhommeetnelaremarquepas.

IlseracontequeleDucLancastervientd’acquérirunchâteauàl’abandonauxabordsdelaville.Ilparaîtaussiquelebellâtreaimebeaucoupvoyageretqu’ilnerestejamaislongtempsaumêmeendroit.Sielleencroitlesrumeurs,cethommeestplusrichequeleprésidentdesÉtats-Unisetparticipeactivementauxœuvrescaritatives.D’ailleurs,Délilaenalapreuvecesoir.

Anaïsetellesontlesseulesjournalistesautoriséesàcouvrir12

l’événement.Uneexpositiond’œuvresd’artdontleprofitdesventesiraexclusivementàunorphelinatdeMontréal.

–Ilfautquejeluiparle!Jevaisl’interviewer,décideDélila.

–Évitedetepâmerdevantluicommetulefais!

–Jesaismecontrôler!

–Ahvraiment!ritAnaïs.

IlestvraiqueDélilan’apassalanguedanssapoche–indispensablepourunejournaliste–,maisàcôtédeça,elleesttrèsprofessionnelleetnelaisserapasceDucLancastercomprendrequ’elleapurementetsimplementcraquépourlui.Unhommedecetacabitneregarderajamaisunefillecommeelle.

Bond’accord,ellen’estpaslaide.Loindelà.Drew,l’undesescollèguesetamis,dittoujoursqu’elleressembleàunange.Elleestblondeetadebeauxyeuxbleuscommel'océan.Ellearriveàapaiserles

tensionsauseindesonéquipeetparvientquasimenttoujoursàfaireacceptercequ’elleveutàlarédactiondujournalpourlequelelletravaille.

Cequiluirappelled’ailleursqu’elleestlàpourletravailetqu’ilseraittempsdepartirenquêtedefaitsàmettredanssonarticle.

Hum…ellevacommencerparleDucLancaster.Ellesedirigeverslui,sondictaphonedanslesmains.

–Bonsoir,monsieurleDuc,accepteriez-vousdem’accorderuneentrevue?JesuisDélilaNagar,journalistepourleJournaldeMontréal.

–MademoiselleNagar,jemeferaiunplaisirdevousdonnercequevousmedemandez.

Savoixglissesurelletelleunecaresse.Ilestledescendantd’unangedeDieu,iln’yaaucuneautreoptionpossible.C’estunêtredivin.

–Asseyons-nous,sivouslevoulezbien.

Iltireunechaiseàsonattention.

Galant,enplus!

Elles’yassoitetlecharmanthommeprendplacejusteàsoncôté.Bonsang,cequ’ilestintimidant!Elleenclenchelatoucheenregistrementdesondictaphonequ’elleposesurlatable.

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–Pourriez-vousm’endireunpeuplussurlechâteauquevousvenezd’acquériràlasortiedelaville?

–Jecomptelefairerénover.J’aid’ailleurscontactéplusieursentreprisesàcesujet.

–Vousallezyvivre?

–Untempsseulement,carjevoyagebeaucoup.Jenerestejamaisenplacelongtemps.

Ilesquisseunsourire.Ilestmagnifique.Iladesdentsd’uneblancheuréclatante.Déliladoitprendresurellepournepassaliverdevantlui,nepouvantdécemmentpasagirainsi.

–Qu’enferez-vousunefoisrénovéetquevousdéciderezdevoguerversuneautreville?

Ilesquisseunnouveausourire.Heureusementqu’elleestbienenplacesursachaise!

–Jeviensd’arriver,chèredemoiselle,riennemedonneencorel’enviedepartir.

Oui.Quelleidiote!D’autantqu’ellen’aaucunementlesouhaitdelevoirs’enaller.Elleveutapprendreàleconnaître.Qu’est-cequ’elleraconte,là?Ellenelereverramalheureusementsansdouteplusaprèscettesoirée.

–Vousavezprévudefaireuneacquisition,cesoir?

–Jen’aipasencorefaitletour,maispeut-êtreavez-vousdesconseilsàmedonner.

Ellequin’estabsolumentpasamatriced’artseraitdebienpiètresrecommandations,etleregretteencetinstant.

–Cen’estpasmondomaine,voussavez.

–C’estbiendommage.Veuillezm’excuser,jedoisallerserrerunnombreincalculabledemains.

–Jevousenprie.

ElleéteintsonenregistreurcommeleDucselèveetquittelatable.

Délilanepeuts’empêcherderegardersesfessesquemouleparfaitementsonpantalonnoiràpinces.Lavestequ’ilporteencachelamoitié,maisiln’yaaucuneplaceàl’imagination,ilaunculd’enfer!

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Pourquoin’est-ellepasdestinéeàvivreunevied’amouretdesexeaveclui?Ilestsansdouteunamantparfait!Parmalheur,elleestlàpourglanerdesinformationsintéressantesàmettredanssachronique.Alors,auboulot!

Elleobservelestableauxexposésàlavente.Aucunstylepourlaplupart,riennel’attire,alorsqu’ilssemblenttousébahisparlesdessinsquines’apparententàrien.Ellelesavait,l’artn’estpasfaitpourelle.

Enentendantungrouped’hommesparlerduDucLancaster,elles’approche,feignantunintérêtautableauqu’elleasouslesyeux.Soncôtéespionnejournalisteluisuggèredemettresondictaphoneenfonctionnementpournepasmanquerunemiettedecequipourraitfinirenexclusivité.

–ApparemmentceLancasterestmarié,jel’aivuavecunerousseàsonbrasdanslaruehiersoir,apprendLéoBardeur,uncinéastedébutant.

Ohnon!Quelledéception!Ellehaitdéjàlarousseenquestion,maisl’envietoutautant.

–Jenesaispasdansquellesmagouillesiltrempepouravoirautantd’argentsansleverlepetitdoigt,maisj’affirmequ’iln’estpasnet!

Délilan’estpassurprised’entendreunetelleinsinuationdelabouchedeceGregMonders.IlestlePDGd’uneenseignedevêtementsquifaitfaillite.Unenvieux,voilàtout.

–D’oùvient-il?interrogeLaurentSistan,ledirecteurdel’orphelinatàquiserontreverséslesbénéficesdecettesoirée.

–DuMexique,àcequ’onm’adit.JepensequeceDucmériteraitqu’onfouilledanssonpassé.

Justeparcequ’ilgagneplusd’argentquelui!Pitoyable!

–Jen’iraipasjusque-là,ledéfendLaurent.Aprèstout,ilafaitundongénéreuxàmonorphelinat.

GregMonderspouffeavantdemettredecôtécettedernièreremarque,d’unreversdelamain.

–Queljolitableau!

Délilasursauteenentendantcecharmanttimbredevoixqu’ellereconnaîtraitentremille.LeDucLancaster.Elletournelatêtepour15

apprécierlabeautéangéliquedecethomme…marié.Pff!

–Jetrouveaussi.OndiraitduPicasso.

Ilesquisseunsourireavantd’ouvrirlabouche.

–C’estuneœuvreimpressionniste.Regardez,chèredemoiselle,c’estinscritjusteici.

Lahonte!Çafaitplusdecinqminutesqu’elleestplantéedevantcettetoile,prétextantytrouverunquelconqueintérêt,etellen’amêmepaspenséàregarderl’étiquetteavantdeparler.Idiote!

–Jenesuispasfaitepourl’art,sedéfend-elle.

Ilconsidèreletableauavecattentioncommes’ilpouvaitvoirau-delàdelapeinture.Ilsembleappréciercequ’ilvoitetseperdredanslepaysage.

Cequ’elleaimeraitqu’illacontempleainsi!C’estsansdoutecemêmeregardd’adorationqu’ilposesursafemme.Elleestterriblementjalouse,mêmes’iln’yapasdequoi.

Ellevientdefêtersestrenteansetellen’atoujourspastrouvél’hommedesavie.C’estluiqu’ellevoudrait.Dèsqu’ilapassélaporte,elleafonducommeneigeausoleil.Aucunhommeneluiafaitunteleffetdanstoutesavie.Etlepire,c’estqu’ellepourraitbienentomberamoureuse,elleleressentauplusprofonddesonêtre.

Ilfautqu’elleenapprenneplussurlui,qu’ellelerevoie…ellenepeutpaslelaisserpartirsansl’espoird’unenouvellerencontre.

–Vousaimeriezquejefasseunarticlesurvous?

–Jenesuispasintéressant.

–Vousrigolez?Personnenevousconnaît,vousêtesnouveauàMontréal.Aulieudelaisserlaplaceauxragots,offrezlavéritéauxgens.

ElleaencoreenmémoirelesallégationsdeGregMondersquiprétendqu’iltoucheàl’illicitepourgagnerautantd’argent.Untelarticlepourraitluifaireclouerlebec,etàbiend’autresaussi.

–Jen’aimepasattirerl’attention.

Ehbien,c’estraté!

–Acceptezaumoinsd’yréfléchir.Jevouslaissemacarteaucasoùvouschangeriezd’avis.

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Elleenextirpeunedesonsacàmainetlaluitend.

Illaprendpuisl’examinehâtivement.

–Jenevousprometsrien,mademoiselleNagar,articule-t-ilenlarangeantdanslapocheintérieuredesaveste.Maintenant,veuillezm’excuser,j’aiquelquesoptionsd’achatàplacer.

–Biensûr.

Elleleregardepartir.C’estladernièrefoisdelasoiréequ’ellelevoie.

Devantsonordinateur,àessayerd’écrirecedétestablepapiersurlavented’œuvresd’artdelaveille,Délilan’arrivepasàsesortirleDucLancasterdelatête.Ellenerêvequed’unechose:qu’ill’appelle.Maislefera-t-il,c’estuneautrehistoire.Elleaimeraitpianotersonnomsurleclavierquinedemandequecelaetendécouvrirdavantagesurl’hommequiatouchésoncœur,ilyaquelquesheuresàpeine.A-t-elleunemoindrechanceaveclui?

Bonsang,cequec’estagaçant!Ellen’ajamaisétéautantattiréeparunhomme.Ellen’estpourainsidirejamaistombéeamoureuse,biensûr,elleaeuquelquesflirts,maisquiluisontvitepassés.AvecleDuc,çasembletotalementdifférent.Ellesesentcharméecommejamais,séduiteparsonapparence,sonregard,sonsourire…Cethommel’atouchéeenpleincœuretelleleressentdanschaqueparticuledesoncorps,persuadéequerapidementelleserairrévocablementéprisedelui.Saufsiellenelerevoitjamais.Danscecas,ellesemorfondrapouruninconnuauvisageenchanteur.Quandelleserendcompteduridiculedelasituation,ellechassesesstupidespenséesd’adolescentespourseconcentrerplusenprofondeursurlesujet.

LANCASTER

Elleletapesursonclavieretattenddevoir.

Rien.Aucunarticlenefaitmentiondelui.Cequiestpourlemoinsétrange.Ilestricheetauntitredenoblesse;alorspourquoinetrouve-telleriensursoncompte?C’estabsolumentétonnant!Puisellerepenseàcequ’iladit:iln’aimepassefaireremarquer.Peut-êtrequ’iltientàsavieprivée.Cequiexpliqueraitladifficultérencontréeàdénicherlemoindredétailsurlui.

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Toutcelan’afaitqu'accroîtresacuriositésurcesuperbemilliardairefraîchementinstalléenville.Ellesedemandes’ilhabitedéjàdanslechâteauous’illogeàl’hôtel.

Elleestforcéedesortirdesespenséesquandsontéléphoneportablesonne.

LeDucLancaster?Arrêtederêver,idiote!

Non,c’estDrew,l’undesescollègues.

–Allo.

–Salut,Délila.Lepatronréclametonarticle.Jesaisquetun’espascenséebosseraujourd’hui,mais…

–Oui,jesuisentraindelefinir,jel’apporteraiàlarédactionavantlamisesouspresse.

–Parfait.

Aprèslesformalités,ilsraccrochent.

Drewsefonddansletravaildepuisdeuxsemainespouroublierlamortdesafiancée.PeggyrespiraitlajoiedevivreetDélilas’entendaitbienaveclajeuneavocateaveclaquelleelleatravailléplusieursfois.Elles’estfaitattaquer,unsoir,dansuneruedeMontréal.Lapoliceaannoncéqu’ils’agissaitd’unanimal.Quelgenredebêteauraitputuerunefemmedansunesigrandeville?Unchat?Unchien?Unrat?Peudemondeaacceptécetteversiondesfaits.Délilaabienobtenul’autorisationdesonpatronpourmenersonenquête,maispersonnen’arienvoululuidireetellen’étaitpasautoriséeàvoirlecorps.Drew,nonplus.Personne,enfait.Lapoliceprétendaitqueceneseraitpasbonpourlafamilledelavoirainsidéchiquetée,alorssonfiancén’apascherchéplusloin.Maisilestdumêmeavisqu’elleetnecomprendpaslathèsedel’attaqueanimale.À

moinsqu’unebêteférocerôdeetquelapolicepréfèrenepaseffrayerleshabitants.C’estlaseuleexplicationplausible.Délilaajouélapetitefureteuse,maisn’arientrouvénonplus.

Qu’importe.CelaneramènerapasPeggy.

LajeunefemmeseplongedanslarédactiondesonarticleavecbeaucoupdemaltantceLancasteroccupesespensées.Illuiestd’autantplusdifficiledenepascentrerl’articlesurlui.Malheureusementpourelle,elledoits’yprendreàplusieursreprisesavantd’avoirsouslesyeuxune18

chroniquedignedecenom.DignedeDélilaNagar,lagrandejournaliste.

19

Chapitre2

LamusiquebatsonpleinauStéréo-nightclub–l’undesclubslesplusprisésdeMontréal–etlesgensdansentàenperdrehaleine,maiscelan’empêchepersonnedeseretournersurlegroupedecinqindividusquipénètredanslagrandesalle.

Lesfemmesattirentlesregardsdésireuxdeshommes.Unerousseetunebrune,touteslesdeuxhabilléescourtementetdévoilantbeaucoupdeleurfortepoitrine.

Leshommesfontrêverlesdamesduclub.Leblondd’abord,lescheveuxcoiffésàlabrossedontlespointessontnoires,unregarddebraisequiferaits’enflammern’importequellefemme.D’ailleurs,ellessonttoutesàlittéralementsepâmerdevantlui.L’autreensuite,descheveuxd’unnoirluisanttombantsursesoreilles,unebarbedeplusieursjours,ilportedeslunettesdesoleilmalgrél’obscuritédel’endroit.Lesfemmesdelasalleretiennentleursouffleenlevoyantpasser.Ledernier,untranssexuelquiporteuneperruquedelongscheveuxnoirsetunerobeajustée,n’estquede

passagedanslegroupe,désirantexplorerd’autresfacettesdelavienocturne.

Touslescinqs’installentàunetable,maisaucunnevacommander.

Lesregardsbrûlantsdesgensfréquentantleclubsureuxpourraientêtreembarrassants,maisaucunn’yprêteattention.Ilssontlàpouruneraisonbienprécise:découvrirMontréal,etfairepartagercettevillequisemblemerveilleuseàNarcisse–letranssexuelavidedenouvellesexpériences.

–Excusez-moi,lesaccosteunejeuneetbellefemmequiattiredesuitel’attentiondelabandecomplète,avecmacopine,onsedemandecommentvousvousappelez.

Elleobserved’abordleténébreuxauxlunettesdesoleilavantdese20

tournerversleblond.

–Oùesttacopine?laquestionnecedernier.

Ellelaluidésigneàlatablevoisine.Cettedernièrefaitunsignedelamain.

–JesuisBastian,répondleblond,etmonami,Sulli.

–Enchantée,messieurs,jesuisAnnette.Accepteriez-vousunverre?

BastianregardeSulliquisecontentedefroncerlessourcils.Ilsviennentd’arriveretdéjàonleurmetlegrappindessus.Labienséanceauraitvouluquecettefilleneviennepas.Aprèstout,ilssontencompagniededamesquipourraienttrèsbienêtreleurspetitesamies,bienquecelanesoitpaslecas.L’impétueusen’estpascenséelesavoir.

–Peut-êtreplustard,demoiselle,répondBastiandevantlepeud’enthousiasmedeSulli.

Annette,déçue,retourneàsatable.

–Vousfaitesfureur!s’exclameJosephte,larousse.

–C’estlassantàlalongue!soupireSulli.

–Beaudiablequetues!Plains-toi!

Ilesquisseunsourireàsonamieavantdeluiprendrelamainetdelaporteràseslèvrespourydéposerunbaiser.

Sulliveutêtreunparfaitgentleman.Ilvientd’unetrèsbonnefamillericheetareçuuneéducationexemplaire,mêmesisesamisdelonguedatelaqualifientparfoisdepompeuse.Ah,Sullietsesprincipes!

Heureusementqu’iln’estpassipointilleuxsurtout,sansquoiilluiauraitétédifficiledesupporterlaviequiestlasienne.Maisheureusement,soncôtéhumainn’existeplus.

–Laviem’agâtée,chèreJose,répliqueSullienlaregardantdanslesyeux.Maisellenes’estpas

moquéedetoi,nonplus.

–Flatteur!

Illuioffreleplusbeaudessourires,dévoilantsesdentsd’uneblancheurexceptionnellequiseferaitsedamnern’importequellefemme.

D’ailleurs,Josephte–Jose,pourlesintimes–peutentendrelesmurmuresdejalousiequeprofèrentlesjeunesfillesdelatablevoisine.

21

Ellesouritàcesdélicieuxchuchotements.

SullilâchelamaindeJosepourportersonattentionsurRosalie,labrunette.

–Accepterais-tu,trèschère,demesuivresurlapistededanse?

Enmêmetempsqu’ilénoncesademande,illuitendsamain.

–J’entendslesfemellesenchaleurpiailler,ricaneJose.Tuvaslesrendrefollessitutetrémousses.

EllegloussecommeRosalieacceptevolontierslademandedeSulli.

Leséduisantténébreuxconduitsapartenairesurlapistededansealorsquetouslesregardsseretournentsurleurpassage.Ilsauraientpusesentirgênésourougirdelasituation,maispasdutout.L’uncommel’autreaimecaptiverlesattentions.Néanmoinsc’estauxrisquesetpérilsdeceluiquiadmire.

Labeautépeutfairemal,parfois.Trèsmal.

Etlesdeuxmagnifiquesspécimensquidansentsouslavisiondetousnefontpasexceptionsàlarègle.

Rosaliesedéhancheindécemmentcontresoncompagnonquiappréciecetteétreinteàlalimiteduvulgaireetdel’érotisme.Lelieun’estpasappropriépourunetelledébauche,d’autantquetouslesyeuxsontdirigéssureux.MaistantqueRosaliegardesesvêtements,etSullisesmainscontreseshanches,toutdevraittrèsbiensepasser.

Leséducteurn’estpasamoureuxdeRosalie,nid'aucuneautred’ailleurs.

Ill’apprécie,simplement.Etsitouteslesfemmesquileregardentavecenviesoupçonnaientcequ’ilfaitàcellequ’ilestimecommeàd’autres,ellesenbaveraientd’envie.Sulliestungentlemancertes,maisungentlemansanspudeur.

N’ytenantplusdevoirlapulpeusebrunes’affairercontreSulli,Bastianlesrejoint.Luiaussiauneenviededébaucheincontrôlable.D’ailleurs,ilseraitbonderentrerrapidementchezeux…IlsaisitRosalieparleshanches,laplaquantainsicontresontorse.

Priseentresesdeuxpartenaires,Rosaliedévoilesesbellesdentsblanchesensefrottantàl’unpuisà

l’autre.

–Jevaisretourneràlatable,murmureSulliensepenchantàson22

oreille.Lesagentsdesécuriténesemblentpasappréciertoutl’érotismequenousdégageons.

IldéposeunchastebaisersurlefrontdesonamieavantdelalaisserauxbonssoinsdeBastian.Alorsqu’ilretourneàsatable,ilsefaitaccoster–

sanssurprise–parAnnette.Apparemment,lapetiteesttêtue.

–C’estvotrecopine?questionne-t-elleendésignantRosalie.

–C’estunesimpleamie.

–Etlarousse?

–Aussi.

–Vousêtescélibataire?

Oui.Ettun’espasmonstyle.

Annetteestblonde,certeselleestagréableàregarder,maisSulliaunesaintehorreurdesblondes!C’estdûàunevieillehistoire.Ils’estfaitbriserlecœurparuneblonde,ilyabienlongtemps.Depuisletemps,ilauraitpuoublieretaccorderunechanceàcettedemoiselle,maisc’estimpossible.Lebeauténébreuxalarancunetenace.Mieuxvautnepasêtredanssalistenoire…oublonde.

–N’insistezpas,mademoiselle.

Annettesefigesurplace.Ouah!Vient-elledesefairerepousserparcetype?Elleatousleshommesqu’elleveutàsespiedsetnecomprendpassonattitude.Peut-êtrequ’elleneluiplaîtpas?Non.Cettepossibiliténeluieffleuremêmepasl’esprit.Laseulechoseplausible,c’estquelebeaugossesoitgay.

SullinefaitaucunementattentionàlastupeurdelablondeetrejointlatableoùNarcisseetJosegloussentenlevoyantarriver.

–Quelledémonstration!seréjouitNarcisseenfrappantdanslesmains.

Sullilèveunsourcil,sedemandantsil’amifaitréférenceàladanseouàsafaçondesedébarrasserdelafille.

–Quandrentre-t-on?interrogeSulli.

–Onnevientpasd’arriver?argueJose.

–J’aifaim.Jeterappellequejen’aipasencoredîné.

23

–Oh!Pauvreamour.As-turepérécequiteferaitenvie?

–Assurément.

Josephtevoitsesyeuxbrilleràtraversseslunettesdesoleil.Unsimplehumainn’yparviendraitpas.Maisàelle,riennerésiste.Toutdevientpossiblequandonaunesecondechancedevivrecommeelleenabénéficié.

–Qu’est-cequejevoussers?lesinterromptunserveurquelquepeutremblant.

–Netremblepascommeça,monmignon!s’amuseNarcisseavantdeluipincerlesfesses.

Lejeunegringaletsefige,plusoutréqu’étonnéparlecomportementincorrectdececlient.

–Onn’apassoif,répondSullid’unevoixtranchante.

LetonétantbienplusadresséàNarcissequis’octroiedesdroitsqu’aupauvreserveurquinefaitquesontravail.

–Euh…ilfautconsommer,monsieur,pourresterici.

–Çatombebien,jen’aipasenviederester.

IlchercheduregardBastianetRosalieetlesrappelle,persuadéquelecouplefacticepréféreraitcontinuerdesefrotterl’uncontrel’autre,toutelanuit.

–Qu’est-cequisepasse,Sulli?demandeBastian.

–Lejeunehommenousmetdehorsparcequ’onneconsommepas.

–Euh…non…

Leserveurgrelottantn’ajamaiseuaffaireàunetellebande.Ilssontpolistoutenétantmalélevésetterrifiants.Ilprendsesjambesàsoncouetdégageleplancheraussivitequ’illepeut.

–T’asfaitfuirlegamin,ricaneBastian.

–Çam’estégal.J’ailescrocs.

Sonregardcroiseceluid’Annette.Lablondealesyeuxrivéssurlui,lemangeantlittéralementduregard.Enquellelanguedoit-illuidirequ’elleperdsontemps?Oupas.

–Onseretrouveàlamaison,lesamis,décideSullienselevant.

24

Ilretireseslunettesdesoleil,lajeunefemmenebaissepaslesyeux.

Impétueuse!Toutengagnantlasortieavecunelenteurcalculée,ilplongesonregardprofonddanslesien,l’espacedequelquessecondes,avantdetournerlatête.

–Jerentre,l’entend-ildireàsesamis.

Ilesquisseunsourire.Tropfort!Ilesttropfort!

Àl’extérieurduStéréo-nightclub,ils’allumeunecigarette.Iln’aaucunedépendanceenversletabac,ilpeutarrêterquandilveut.Illusoire?Non.

Sullipeutaussibienfumercommeunpompierpendantdeuxansquenepastoucheruneseulecigarettependantdesmois.

–Vousenavezunepourmoi?

Iltournelatêtepourpercevoirlablonde.

–Vousdevezmetrouverenvahissante.

–Oupas.Allezsavoir!

Illuidonnesacigaretteets’enallumeuneautre.

Annetteoseàpeinerespirerquandellelaporteàseslèvres.Ill’atouchée.Bonsang,ellesesentcommeunegamineécervelée!

–Vousavezremisvoslunettes,constate-t-elleàhautevoixquandellereprendsesesprits.

–J’aimelegenrequeçamedonne.

Etcen’estpasellequivalecontredire.

–Jevousproposeunverre…chezmoi.

Ilesquisseunsourireàpeinevisiblepourelle.C’esttropsimple.Etiln’aimepaslafacilité.Ilveutdelapeur,deladifficulté,del’imprévu,deslarmes,dessupplications…maispar-dessustout,ilveutlatraque.

Qu'ya-t-ild’amusantpourunprédateur,devoirsaproiedocile?Ilritintérieurement.Cen’estmêmepassoumiseencequiconcernelablonde,c’estuncadeau.Elles’offrecarrémentàlui.Mais…iln’aimepaslesoffrandesdecegenre.

Sulliestunhomme–sionpeutlenommerainsi–trèscompliquéàcerner…maispire,ilestimpossibledelecontenter.

–Oùhabitez-vous?

25

Peut-êtrepeut-ilrendrelejeupluscaptivant?Àvoir.

Ilsegrattelementon,soucieux,commeelleluirépond:

–Àcinqminutesd’ici,àpied.

–Pasdevoiture?l’interroge-t-ileninclinantsatêtepourlaregarderpar-dessusseslunettes.

–Non.

Oh!Queçadevientintéressant!Peut-êtrequ’ellen’estpassiintrépidequ’elleyparaît.Peut-êtrequeçavautlecoupd’essayer.Detoutemanière,ilafaimetilveutrapidementretrouverlesautres.Ilnecomptepasassouvirunquelconqueappétitautrequelafaimaveclablonde.Elleneluiinspireaucundésir,maispire,ilestcertainquemêmesanslaregarderiln’arriverapasàavoiruneérection.

–Danscecas,jenepeuxvraimentpasrefuserd’aumoinsvousraccompagnerchezvous.

Annettesouritlargement,raviedelaréponse.Iln’apasacceptéclairementleverre,maisellepenseréussiràyparvenir.C’estimpossiblequ’elleéchoueencore!

Ilsmarchentdanslasombrenuitetdiscutentdetoutetderien.Sullinepensaitpasqu’ilétaitaussipossibledes’ennuyeravecsondîner!Iln’aqu’unehâte:passeràtablepourpouvoirrentrerauchâteauoùladépravationàl’étatpurl’attend.Ilignoreencores’ilparticiperaousecontenterad’observer,quoiqu'ilensoitilestpressédes’yrendre.

–C’estici,indique-t-elleunimmeubledequatreétagesens’immobilisant.

Sulliexaminecemauditquartierrésidentiel.Mêmes’ilfaitnuitetqu’ilesttard,c’estunendroittroppeuplépourqu’ilpuissetenterquoiquecesoit.Maisc’estaussiunpetitcoindeparadisqu’iladéjàvisité,etdoncilsaitqu’ilyaunparcjusteaprèsl’intersection.Etlà,c’estlecalme.Lelieuidéalpourserevigorer.

–Çameditquelquechose,cecoin…

Ilfaitminederegarderpartoutcommes’ilessayaitdeserepérer,tentantd’adopterl’attitudetypiqued’unhumain.

–…iln’yapasunparcunpeuplusloin?

26

–Effectivement.

Ilhausselessourcilspar-dessusseslunettesenlaregardant.

–Çavousdiraitd’alleryfaireuntour?

–Oui.

Parfait.Ellelesuitdesonpleingré.C’estsi…enivrant.

Aprèsquelquesmètresetuntournant,ilsseretrouventdanslejardindésert.Sullimarchejusqu’auxbuissonsdansunendroitombragé.Sanspeur,Annettelesuit.

Bon.Sulliestobligédesesatisfairedecequiluiestproposé.Pasdetraquecesoir.Lafairecourirpariciseraittrèsdangereuxpourlui.Ils’ensatisfera,pourunefois.

–Tun’aspasréponduàmaquestion,rappelle-t-elleensecollantunmaximumcontrelui.

Çayest,elleusedefamiliarités!Ehbienpuisqu’elleseveutsiproche,ilvarépondreàsesattentes.

–Quelleétait-elle?feint-ildeneplussesouvenir.

–As-tuunecopine?

Annettecoulesonregardsurlui,étalantclairementsonenvie.Elleleveutenelle…maintenant.

Sulliressentledésirsexuelquiémanedecetteblonde.Ilestcertainqu’encetteseconde,elledoitavoirsonsous-vêtementtrempé.

Tuvasm’avoirentoi,cocote!Maisd’uneautrefaçon.

D’ungesteassuré,ill’attirecontrelui,labloquantd’unbrasdansuneétreintedefer.

–Jen’aipasdecopine.

Ilpeutbienluiaccorderlaréponseàsaquestion.

–Alorstunetromperaspersonnesioncoucheensembleicietmaintenant.

Ilnerépondpasetabaissesonvisageverslesien.Annettepensequ’ilval’embrasseralorsquedesamainlibre,illuifaitpencherlatête.Elleobéitengémissant,s’attendantàsentirsabouchecontresapeau.Sullidégagelescheveuxblondsdesoncouavantd’yapposerseslèvres.

27

–C’esttoutàfaitvrai,acquiesce-t-il.Mais…vousn’êtespasmontype.

Lasecondesuivante,ilplantesescaninesacéréesdanssagorgefine,aspirantavidementsonélixirdeviealorsqu’ellesedébatinutilement.Ilauneforcequ’ellen’avaitjamaisconnuechezunhomme.Normal…elleestentrainderéaliser–maisbientroptard–qu’elles’estjetéetouteseuledanslagueuleduloup…

Annetteabienentenduparlerdelajeunefemmequiatrouvélamort,dansuneruellesombredeMontréal,ilyadeuxsemaines.Lesjournalistesparlaientd’unanimal.Ilsavaientraison…enquelquesorte.Elleestpersuadéequec’estl’œuvredel’êtreàlabeautésurnaturellequiestentraindelaviderdesonsang.Ellen’arrivemêmeplusàsedébattre…

Sullinelaissepasunegouttedeceliquideécarlate,sachantbienqu’ilestdangereuxpourlui–etlesautres–des’abreuversouventetd’abandonnerlescadavresdanslarue.Maisc’estsiexaltant.Ilinspireprofondémentenlevantsesyeuxversleciel,puisreplongedanslagorgedelademoisellepourterminersondîner.

Depuispeu,sescompèresetluisesontinstallésàMontréal.Ilssont,pourlemoment,discretspoursefondredanslamasseetqu’aucunsoupçonnepèseimmédiatementsureux.Maisunjour,lavéritéfiniraparsesavoiretlemotattenduseralâché.Lejeudébuteraalorsvraiment.Ilspourrontmettrelavilleàsangavantdedisparaîtreversunenouvellecontrée.C’esttoutceàquoiaspireSulli.

Ilvoyagedepuisdescentenaires…depuispresquecinqcentsans,enfait.Lesmentalitésetlesmœursontévolué,maisluiaimetoutautantsemerlamortsursonpassage.Oh,iladequitenir,puisqu’ilaététransforméetéduquéparVladTepesenpersonne.

28

Chapitre3

Délilaabiententéderésister,maisellen’apasréussi.ElleregardelemagnifiquechâteauqueleDucLancastercomptefairerénoverdederrièrelesgrandesgrillesnoires.Lapropriétéestenfriche,sansdoutepashabitée.L’herbe,autourdelademeure,atteintparfoisplusd’unmètre,lesstatuessontdansunpiteuxétatetlesfontainespleinesdefeuilles.Lechâteauaétélaisséàl’abandondepuisplusdevingtans.D’ailleurs,sonmanqued’entretienseperçoitàlapeinturequis’écaillegrandementetauxtuilesdel’ailegauchequinesont,pourlaplupart,plusenplace.

Délilanesaitpasàquoiellepensaitenvenantici.Cependantellesaitqu’ellenes’attendaitpasàcedésolantspectacle.Enfait,elleespéraitque,déjà,lesouvrierss’affaireraientautourduchâteau,quedeséchafaudagesseraientmontés…maissurtout,elles’imaginaitvoirleDucLancaster,uncasquesurlatête,participantactivementàlarénovation,sansaucundoute,trèssexydanssonvêtementdetravail.

C’estladéception.

Enmêmetemps,ilestencoretôt.Ellevientdepartirdechezelleets’estautoriséunpetitdétour–bond’accord,granddétour!–pourpeut-êtreavoirlachanced’apercevoirceluiquiaassouvitoussesfantasmeslanuitdernière.Illuiafaitl’amour–commeellelesoupçonnait–commeunDieu.Ilétaitàlafoistendreetbrutal,avidededonneretderecevoir…Ilneconnaîtaucuntabou,aucuninterdit,aucunelimite.Illuiafaitdécouvrirunplaisirqu’elleignoraitcomplètement.Secrètement,ellerêvedepouvoiressayerdeschosesdéfenduesoupeucommunesetilacomblélemoindredesesdésirs.

Hum…elleneseremettoujourspasdesonfantasme!C’étaittellementréel…maisseulementunsonge.Elles’estréveilléeensueurs,lecœur29

affolé,maisseuledanssonlit.Depuis,ellenepensequ’àvoirleDuc.Elleadéjàsonexcuse:uneinterview.EllebroderaunpeuenluiexprimantqueleJournaldeMontréalveutunarticlesurluidanssaprochaineparution.

Lapopulationveutconnaîtreceluiquiaacquisunchâteauàl’abandon.Illacroira,ellen’aaucundoutelà-dessus.Elleobtiendrapeut-êtremêmel’entretien.Maisavant,ilfautdéjàqu’elleletrouve.Illuialaisséentendrequ’ilvivraituntempsdanslechâteauavantdepartirversd’autrescontrées.Maisva-t-ilyvivredurantlestravaux?Apparemment,non.Iln’yapasuneâmequiviveici.Lecoinestofficiellementdésert.

Elleposesonregardunedernièrefoissurlademeurequand,audernierétage,elleperçoitunesilhouettederrièrelafenêtre.

Étrange.

Ellebaisseinstinctivementlesyeuxpourprendresontéléphonequisonnedanssapocheavantdelesreposersurledernierétage.Plusrien.

Elleauraitpourtantjuréque…elleadûrêver.

–Oui?

–Nagar!Aubureau,maintenant!

Délilaécartesontéléphonedesonoreillepournepasdevenirsourdeàcausedescrisintempestifsdesonpatron.

–Bonjour,chef!ironise-t-elle.

–Nejouezpasavecmesnerfs!Unefemmeaétéattaquéecettenuit,ramenez-vous.

–Oh!

Elleétouffeuncriavantderaccrochersontéléphone.Unautreregardendirectionduvieuxchâteauluiconfirmequ’iln’yapersonne.Ellesehâted’alleraubureau.Uneautreattaque?Bonsang.

Serait-cel’œuvredumêmeanimal?Aura-t-elleledroitdevoirlecorps,cettefois?Illefaudraitpourdéterminerlavérité,maisellesupposedéjàquel’accèsàlamajeurepartiedespiècesdudossierluiserainterdit.Ellerepensealorsàuneidéequ’elleavaitlancéeauhasard,unsoirdebeuverieavecdesamies,pouroublieruncrimeabominablequ’elleavaitcouvert.Illuifautunamidanslapolice.Unfliccorrompuferaittoutaussibienl’affaire,maisellen’apaslesmoyensdeluigraisserlapatteàtoutva,alorssetrouverunamidevienturgent.

30

LaréuniondébuteauJournaldèsqueDélilaentredanslagrandesalleprévueàceteffet.Elleapprendcequ’elleredoutait:uneautrefemmes’estfaitattaquerettuerparunanimal.

Maisencoreunefois,ellesedemandequelgenredebête?Siundangereuxprédateursepromèneenville,ilseraitpeut-êtrebond’enaviserlapopulation.Autant,lapremièreagressionestpassée,maislaseconde…

Délilaaimeraitqueleshabitantsexigentdesréponses.Ainsi,elleenauraitaussi.

–Àquoiavons-nousaccèscettefois?questionne-t-elle.

–Lapoliceditquec’estlemêmeanimalquiaattaquélajeunefemme…euh…AnnetteSinger,répondsonpatron.

–Etceseraitquoi?

–Unchien.

Ellelèvelesyeuxauciel.Unchienquisepromènelanuitenvilleettuedesfemmes?Ilenad’autrescommecelle-là!ElleposesesyeuxsurDrewquiestpâlecommeunlingeetsilencieuxcommebientropsouventdepuislamortdesafiancée.Ill’ad’abordbeaucouppleurée,ensuiteils’estjetécorpsetâmedansletravail.Cettehistoirenevapasl’aider,loindelà.EtDélilacompatit.

–J’aicarteblanche,chef?

–Non,Nagar.Tun’asriendutout.Voilàledossier.

Elleprendcequ’illuitendetouvrelachemisebrunecontenantlespapiersdel’affaire.Iloseappelerçaainsi?Iln’yaquedeuxpagesquisebattent!Aucunephoto.Quellesurprise!

–Iln’yaquedeuxrapports,peste-t-elle.

Lepremierestrédigéparlapolicequiatrouvélajeunefemmemortedanslesbuissonsetlesecondparlelégiste.Bizarrement,deslignesontétéeffacées.

–Ilsnesontmêmepascomplets!

Celalaconfortedanssonsentimentquelesautoritéscachentbiendeschosesàlapopulation.Sicettefille,commePeggy,avaitvraimentétéattaquéeparunchien,alorselleauraiteudroitauxphotos,auxrapports31

complets…etmêmedeparleraveclapolice.

–Bien,soupire-t-elleenreplaçantunemècheblondederrièresonoreille.Untoutoutueurdécimelesfemmes…oh,ellesetaitenlisantlerapportdelapolice.Lesblondes,précise-t-elle.

–Faisattentionàtoi,Nagar!s’amusesonpatron.

Trèsdrôle!

–Qu’est-cequetuenpenses,Anaïs?Onaaffaireàunchienquiaunedentcontrelesblondes?

Sacollègueetamieseretientdepoufferparrespectpoursonresponsable.

–J’imaginequesamaîtresseenestune.Elledoitêtreindigneàsesyeux.Sansdoutelacraint-ilpuisqu’iln’osepass’enprendredirectementàelle…

–Épargne-noustapsyàdeuxballes!rugitledirigeant.

–C’estridicule!objecte-t-elle.Laissez-moienquêtersurcemeurtre.

–Contente-toidefaireunarticleaveccequejet’aidonné.Jeneveuxpasêtreresponsabled’uneémeute!

–Danscecas,vousvouscontenterezd’uneanalysepsychologiquedel’animal.

Ellenelelaissepasrépliqueretsortdelasalledeconférenceenfaisantclaquerlaporte.

Non,maispourquiseprend-il!

Elleestcenséeluipondreunarticleattrayantsanspouvoiravoiraccèsauxinformationsessentielles.

Assisesursonfauteuil,lenezdanslesdeuxrapports,elleserendcomptequ’iln’estnullepartfaitmentiond’unchien.Desphrasesontétéeffacées,maisaucunen’aétéajoutéepourfairecorroborerlesdiresdelapolice.Donc,cen’estpasl’œuvred’unchien.C’estsansdouteunscoopénorme.Peut-êtreunebêtesauvagequis’approcheraitunpeutropdelavillepoursenourrir,ouuneéchappéed’unzoo.Ilyenaplusieursdanslecoin,elledevraitpeut-êtrelesappeler.Elleaffichelalistedesnumérossurl’écrandesonordinateuretdécidedesefairepasserpourlagendarmerie.

Aprèschaqueappel,elleraccrocheensoupirant.Aucunanimalnemanque32

àl’appel.Elletenteavecledernier:non,pasd’évasion.

Ellesoupiredenouveau.Aumoins,ellepeutendéduirequ’aucunebêtenes’estévadéed’unzoooud’uneanimalerie.Alorsquereste-t-il?Lathèsedel’animalsauvagequis’approchedelapopulationpoursenourrir.

Àmoinsqu’ellefassefausseroute.Ellen’aaucuneindicationsurlesblessuressubiesetnepeutdoncpasenconclures’ils’agitplutôtd’unloupoud’unours.Mêmesilesdeuxpossibilitéssontabsurdes.

Peut-êtredevrait-ellerédigerunarticlequisoulèvebeaucoupdequestions?Mais,leJournalrisquederefuserdelepublier.Enfait,ellen’apaslechoix,ellevasemoquerdesonchefquiseplieauxexigencesdesautoritésetécriresurleprofilpsychologiquedel’animal.

–Délila?

Anaïsentredanssonbureauaprèsavoirfrappédeuxcoupssurlaporte.

–Tuveuxqu’onéchange?

Elleagiteunpapierenmaintoutens’approchant.

–C’estquoi?questionneDélilaensefrottantlatempe.

–Lebossm’ademandédefaireunarticlesurlesrénovationsduchâteauduDucLancaster.

–Vraiment?

C’estcequ’ellevoulaitfaire,mêmesielleauraitbienplusparlédel’hommequedesrénovations.

–Jepeuxtrèsbienréaliserleprofilduchientueur,s’esclaffe-t-elle.

–D’accord.

Elleluiparlerapidementdesappelsqu’elleapassésauxzoosdelarégionensefaisantpasserpourunepolicièreetdesaconclusion,mêmesielleestpourlemoinsridicule.

–Lapolicenecouvriraitpasunanimalsauvage,objecteAnaïs.

–Jenepensepasqu’ilsoitquestiondeprotection.Jepenseplutôtquecelaviseàévitertoutepaniqueàlapopulation.

–Tupensesvraimentàunoursouunebêteénorme?

–Àmoinsqu’unearméederatsnesesoitjetéesurelle,oui.

–Jevaisvoircequejetrouve.Enattendant,jevaisrédigerl’article33

queClaudeattend.

Claude…beurk!Ellen’ajamaiscomprispourquoiAnaïsappelleleurpatronparsonprénom.Peut-êtreparcequ’illeleurademandé.Maisellen’yarrivepas.Ellen’aimepascetype.Ilestarrogantetdélaisseleboulotàseséquipes,secontentantd’enrécolterleslauriers.

–Nem’évincepasdel’enquête.

–Rassure-toi,Délila,jesuisrégloettulesais.CourstrouvertoncherDuc!

–Commentcomptais-tulecontacter?

–Partéléphone.Regardesurlanote,sonnumérodeportableestinscrit.

Effectivement.C’estfabuleux.

–Oùlogeleprincedemesnuits?

–Jenesaispas.J’aijustepuavoirsonnumérogrâceauregistredelasoiréecaritative.

Anaïsrécupèreledossieretsortdubureau.Délilaregardeuninstantlesprécieuxchiffresdansersoussesyeuxavantdelescomposersursontéléphone.

Çasonne.

Elleespèrenepasleréveiller,c’estpeut-êtreencoretôtpourlui.Enmêmetemps,ilestneufheures…

–Allo.

Oh!Ilestdisponible.Elleenperdsesmots.Savoix…monDieu!

–Àquiai-jel’honneur?

–Bonjour,monsieurleDuc,jesuisDélilaNagar.Jenesaispassivousvoussouvenez,ons’estrencontrés…

–Jemerappelletrèsbiendevous.Enquoipuis-jevousêtreutile?

–LeJournaldeMontréalaimeraitfaireunarticlesurlesrénovationsduchâteauquevousavezacquis.Est-cequ’onpourraitsevoirpourendiscuter?

–Jevousaidéjàfaitpartdemonavisàcesujet.

34

–Jesais,vousnevoulezpasd’articlesurvous,jelerespecte.Ceserauniquementsurlechâteau.

–Çanem’intéressepas.

Lapoisse!Ilfautpourtantqu’ellelerevoie.Elledoittrouverunprétexteetrapidement.

–Vousm’envoyeznavrée,monsieur.J’auraisvraimentaimédiscuteravecvousdevosprojetsderénovation.

–Pourquoiest-cequecelavousintéressetant?

–Lechâteauestàl’abandondepuissilongtempsquetoutlemondeahâtedelevoirdanssanouvellevie.

–Çaprendradutemps.

–Accepteriez-vousuneinvitationàdéjeuner?

Ellel’entendsoupirer.

–Jesuistrèsprisaujourd’hui.

Ellepressentquec’estpeut-êtrejusteunprétexte.Bonsangcequ’ellesesentnulle!Elleneluiplaîtpas,ilfaudraitpeut-êtrequ’ellel’accepteetqu’ellepasseàautrechose.Idiotequ’elleest!

–Danscecas,jen’insistepas.Mercid’avoirprisletempsdem’écouteretexcusez-moipourledérangement.

–Jevousaipromisdevousappelersijechangeaisd’avisquantàl’interview;pourquoinepasavoirattendu?

–Parcequecelle-ciportaitsurlechâteauetnonsurvouscommenousenavionsparlé.

–J’aimeraisquevousn’insistiezplus,àl’avenir.

Ellenesaitpaspourquoi,maisc’estàcetinstantqu’ellerepenseàcequ’elleaentendusurluiàlasoiréecaritative.Onl’avaitvulaveilleavecunerousseàsonbras.Ilestmariéetellevoulaitleséduire.Maisquelgenredefemmeest-elledonc?C’estpeut-êtrepourçaqu’ilneveutplusqu’ellel’appelle.Parcequ’elleletente.Non,absurde!Enlève-toitoutdesuitecetteidéesaugrenuedelatête!

–Jevousdemandedem’excuser.Aurevoir.

Elleneluilaissemêmepasletempsderépondreetraccroche.

35

Mince…ilestmarié.Elleavaitoublié.

36

Chapitre4

–Sulli?Sulli?

Bastianarpentetoutelademeurepourtrouversonami,unjournalenmain.Deuxnuitsquelafilleaététuée!Deuxnuits,etdéjàlesjournalistesarborentunethèseabracadabrante.

–Pourquoitucriescommeça?Iln’yapaslefeuquejesache!émetSulliquandBastianentredanssachambre.

Soncheramin’amêmepasbougéquandill’aappelé,nidaignéprévenirdesaprésenceici.Àsaplace,ilenauraitfaitautant.JosephteetRosaliesontnues,allongéessurlelit,entraindesecaresseretdes’embrasser.

NarcisseestassissurledivanàcôtédeSulli,lesyeuxsurlesdivinespécheresses.

–Attendez-moi,messalopes,jevaismejoindreàvous,décideBastianentendantlejournalàSulli.Lisça.

Ill’attrapeaprèsavoirmissoncigarecubaindanslabouche.L’articlefaitmentiond’unesecondeattaquenocturnesurunejeunefemme.Uneblonde,précise-t-il.D’abordlajournaliste–DélilaNagar,ilvientdeliresonnom–parledel’œuvred’unanimalsauvageavantdetournerendérisionl’hypothèsedelapolice,selonlaquellelesdeuxmeurtresseraientl’œuvred’unchien.Elleproclamequecetanimalauraitunemaîtresseblondeindignedontilauraitpeur,c’estpourquoiiln’oseraitpass’enprendreàelle,maisàsesrépliques.

Sulliritcommeilnel’avaitpasfaitdepuislongtemps.

–Elleadel’imagination,cettepetite!

–Ellen’asurtoutpasaccèsauxdocumentsofficielssinonelleauraitbienvitecomprisquelesautoritéssemoquentd’elle,argueBastian.

37

–Unchien!ricaneencoreSullienaspirantsursoncigare.Amusez-vous,lesfilles,réclame-t-ilenlaissanttomberlejournalsurlesol.

DélilaNagar.Apparemmentcettejournalisteaimetournerleschosesenridicule.Illasuppose

frustréedenepasavoiraccèsaudossiercompletsurlesdeuxmeurtres.Ilsedemandeaussipourquoilemotn’apasencoreétélâché.C’esttellementbonquandleshabitantspaniquent.Ilahâtedepouvoirtraquerentouteimpunité.

IlregardeJoseetRosaliesecaresserintimementetcetobsédédeBastianlesrejoindre.Aussiloinqu’ilsesouvienne,jamaisiln’alaissélesdeuxfillesentête-à-tête,ilatoujoursvoulus’ymêler,semélangeràelles.

Sulliestdifférent.Ilestdeceuxquipréfèrentregarder.Ilpratiquetrèspeu.

Ilprendplusdeplaisirenobservantqu’enpratiquant.Sonsexesetendsousletissudesonjean,détailquin’échappepasàNarcisse.

–Tudevraislesrejoindre.

–Jeprendsmonpiedenregardant.

–Çanefaitpaslongtempsquejetraîneavecvous,maisjenet’aijamaisvubaiser.

–Çam’arrive,rassure-toi.Maisaprèscinqcentsansdebaise,tusais,cen’estplusaussiexaltantqu’avant.

–C’estpourçaquejediversifie.D’abordj’aioptépourl’apparenced’untombeuretj’avaistouteslesfemmesàmespieds,ensuitej’aidécidéderevêtirl’accoutrementdutranssexueletd’essayeravecleshommes.

–Onenreparleradans…tuasquelâgedéjà?

–Deuxcentvingtans.

–Ouais…t’asdelamargeencore,c’estpourçaquetuneressensaucunennui.

LesexeétaitexaltantpourSulliquandilétaithumain,ilestdevenuincroyableaprèssatransformation…unevraiesourcedeplaisiràl’étatpur.Maisaprèsunebonnecentained’années,ilacommencéàneplusaimer.Illepratiquaittoujours,maisn’enretiraitquepeudesatisfaction.

Est-celiéautempsquipassecommeill’alaisséentendreàNarcisse?

Non,biensûr.C’estliéàlafemelleavecquiilpartagelemoment.Mêmesic’esttrèsagréablepourluideseretrouverdanslemêmelitqueJoseouRosalie–oumêmelesdeux–,çan’ariendecomparableaveccequ’il38

éprouvaitquandilyétaitavecLilith.Avecleshumaines…iln’enparlemêmepas.Ilaessayéunefois,c’étaitàmourird’ennui.Ilamiscemanqued’entrainsurlecomptedelafille,alorsilatentéencoreetencore.

Maiscen’étaitpaslafautedelafille,c’estluiquin’aimepasçaavecleshumaines.Ellessontincapablesd’atteindrelerythmeeffrénéquilefaitjouiretressortenttoujoursdecetteexpériencecouvertedebleus,bientropfragilespourpasserentrelesbrasd’unvampiretelquelui.

–Tun’asjamaispenséessayeravecunhomme?suggèreNarcisseenlesortantdesespensées.

–Jenemangepasdecepain.

–Pourquoi?

–Çanem’attirepas,c’esttout.

–Jemesensbienvide,émetRosalieenfaisantlamoueauxdeuxhommesassissurlecanapé.

JosesefaitpénétrerparBastianquineconnaîtpaslapudeur.Aucunn’enéprouvedanscettepièce,àpartpeut-êtreSulliquandilestavecunepersonnequ’ilsouhaitepréserveruniquement.Autantdirequecen’estpasarrivésouvent.Ladernièreendatec’était…Lilith.Encore!

–Jesuisdansmapériodemâle,chérie,répliqueNarcisseenfaisantceluiquin’estpasintéressé.

–Sulli?

Levampireesquisseunsourireavantd’écrasersoncigaredanslecendriersurleguéridon.

–Jeteveuxexclusivemententremescuisses,décide-t-ilenouvrantsonpantalon.

–NetelajouepasexclusifcommeBastian!

Ils’approcheduborddulit,puisretiresonpantalonetsonboxer.Ilposeunejambesurlatabledechevetetsamainsursonsexequ’ilcaressequelquessecondesavantqueRosalieleprennedanssabouche.Avecelle,cen’estpasennuyeux…oumoinsqu’avecunehumaine.Elleatteintrapidementlerythmequ’ilapprécie,etdesamainposéesursatête,ill’augmenteencore.

Narcisseassisteàlascènededépravationenéprouvantundésirabsolu.

39

Ildésireselogerenquelqu’un,maisSulliluiabienfaitcomprendrequ’ilneveutpasdeça.Peut-êtreBastian.LeblondadélaisséJosepourembrasserlesfessesdeRosalietoujoursactivesurlemembreengorgédeSulliquinemanquepasunemiettedecequ’elleluifait.

–Tutejoinsànous,Narcisse?proposeJose.

Rousse,parfaite.Ilestpeut-êtredanssapériodemâle,maisriennel’empêchedecommenceruneèrebisexuelle.Ilretirealorslalonguerobequ’ilporteavantderejoindrelajeunefemmeofferte.

Ilssontcinqdanscelit,maisçaneseterminepasenorgiepourautant.

Leshommesnesemélangentpasetlesfemmesnesemettentpasàdeuxsurlemême.Pourunepremièrefois,c’estplutôtbien,mêmesiSullin’aacceptélescaressesbuccalesquedeRosalie.Ilestpeut-êtrevieux,trèsvieux,maisrefuseratoujoursqu’unhommeposesesmainssurlui.

ContrairementàBastienquialaisséNarcissecaressersonentrejambeetsonentréesecrète.

–Qu’est-cequ’onfait,cesoir?demandeRosalieenramassantseshabitssurlesol.

–Onsort,évidemment,répondBastian.

–Où,trésor?

–Làmaintenant,jenesaispas,maisensecond,j’iraidanstoncul.

Ellehausselesyeuxaucielcommeilricaneens’approchantd’ellepourl’embrassersurl’épaule.

–Onvaallerdîner,décideSulli.

–Encore?s’exclameJosephte.Tupeuxtenirbienplusquedeuxnuits.

J’ensuisàpresquetroissemaines.

–Jen’aipasditquej’allaislefaireparnécessité,maisparenvie.

–Tropdecadavresd’uncoup,cen’estpasbonpournous.

–Jesais.Maisçanem’amusepasd’attendre.Jeveuxpouvoirterroriserlesfemmes.Tuterendscomptequeladernièrenes’estdébattuequequelquessecondes.C’estcommesijel’avaishypnotisée.J’aibesoindeplus.

IlsétaientétablisauMexique,touslesquatre–Narcissevientseulementdelesrejoindre–,etilsontdûfuirquandleschosesdevenaienttrop40

dangereusespoureux.Lemotvampireavaitétélâchéettouts’esttrèsviteenchaînéàcausedel’impatiencedeSulli.Ilselassaitbientropvitedel’attenteetaattaqué,deplusenplustôtetdeplusenplusrapproché,lesjeunesfemmes.Cequiaprovoquéleurdépartimminent.Lapopulationavaitfaitlerapprochementavecleurarrivéedanslaville.

SullirecommenceexactementcommeauMexique.Deuxfemmes,c’estlalimitequ’ilpouvaitsepermettre.Ilesttroppressédelancerlatraque,maisiln’arrivepasàassimilerquecelajouecontreluietcauseraleurperteàtous.

–Patience,ténébreux,fais-lepournous.

Rosaliepassedevantluiencaressantsontorsepar-dessussontee-shirtmoulant.

–Cesoir,jetesuggèredetetrouveruneproieetdet’amuseravecelle…pendantdessemaines!

–Tuveuxmamort,poussin,sourit-il.Unesemainetoutauplus.

–LapéripétieduMexiquenedoitpassereproduireici.Tuveuxtraquer?Alorsattendsunpeu,sinonondevrapartirànouveauettoutrecommencer.Autanttedirequetuneseraspasprèsd’avoircequetuveux.

–C’estbon,Rosalie.Jeferaimumusependantquelquessemainesavecuneblondinette!

–Merci,trésor.

Pimpante,labandedescinqquittelademeurepourfaireunesecondeapparitionnocturneauStéréo-nightclub.Iln’estpeut-êtrepastrèsbonpourSullidesemontrerànouveauici,maissiquelqu’unfaitlerapprochemententreAnnetteetlui,ill’hypnotisera.Danslepiredescas,ils’envoleraenchauve-souris.

Ilsprennentunetableetseperchentsurdehautstabouretscommeunserveurs’approche.

–Bonsoir,qu’est-cequejevoussers?

Instinctivement,Sulliseretournepourregarderlebaroùlegringaletdeladernièrefoissepissepresquedessus.Iln’apasoséveniralorsila41

envoyésoncollèguequisemblemoinspeureux.

–Jen’aipassoif,répondSullienlefixant.

Leserveurdéglutit.

–Neterrorisepascepauvrehomme,intimeRosalie.OnvaprendrecinqWhiskys,commande-t-elle.

Leserveurdisparaîtencoreplusvitequ’ilestarrivé.

–Netefaispasremarquer,Sulli.

Facileàdire!Ilal’impressiondes’ennuyeràmourir.Iln’aplusaucunattraitpourlavienocturne.Enfait,sonseulplaisir,c’estlatraque.Etonl’enprive.

–Tuveuxdanser?proposeJose.

–Plustard.Jevaisdevoiravalerunbreuvageécœurantetmetrouveruneputaindeblonde.

–Dis-toiqu’onesttousdanslemêmecasquetoi,saufquecettefois,onveutqueçamarchesionneveutpasdevenirdesanimaux.

–Oh,Jose!Tut’imaginescivilisée?

–Pastoi?

–Si,biensûr,trèschère.Pousse-toidoncunpeu,lemonsieurn’arrivepasàposersonplateau.

Josephtesedécalelégèrementpourqueleserveurtremblantréussisseàdéposerleursverressurlatable.

Sullienritintérieurement.Lepauvrehommeestterrifiéalorsqu’ilcroitavoiraffaireàunebandedecrétinsdécérébrésvenusfoutrelamerdedansleclub.S’ilsavait!

–Euh…jedoisencaissermaintenant.Jevaisavoirfinimonservice.

Sulliperçoitladifficultéqu’ilaàprononcercettephrase.Qu’est-cequ’ilcraint?Desefairebouffer?Ilestleseulàcraindreparcequelesautresmaîtrisentparfaitementleursoif,maispaslui.Néanmoins,ilaunenettepréférencepourlesblondesquandils’agitdedîner.Iln’ajamaisbulesangd’unhomme.Aprèssatransformation,ilsenourrissaitsurtoutessortesdefemmes,blondes,brunes,rousses…maisaprèssaruptureavecLilith,ilachoisidelefairesurdesblondesuniquement.Cegesteaune42

significationpourlui.Ilhaitlesblondesdepuisquelasienneluiabrisélecœur.C’estunemanièrepeuconventionnelledesevenger.

–Biensûr!

Rosalieluioffreunsourirediaboliquealorsqu’ellefouilledansl’undespochesdesavesteetluitendunbilletquicouvrelargementleprixdeleurconsommation.

–Gardezlamonnaieenguisedepourboire.

–Merci,madame.

–Jet’offremonverre,déclareSullienlepoussantversRosaliealorsqueleserveurs’envaprécipitamment,jen’aipassoif.

–Jesuisnavréequ’ilsneserventpasdel’O+ici.

–Vadanser,quejeteregarde.

–Jevaisattendreunpeuavantd’enflammerlasalle.

Sulliscrutel’environnement,iln’yamêmepasuneplantequ’ilpourraitarroser.IldevraboirecefoutuverrequeRosalievientdereplacerdevantlui.

C’estvrai,pourquoineproposent-ilspasdel’O+?

Encherchantautourdelui,sonregardseverrouillesurunepetiteblondenonloindelà.Elleestaccompagnéeparuneautrefilleàquiiln’octroieaucuneattention.Iladéjàvucepetitminoisetaprèsavoirlusonarticle,ils’estditqu’ellen’avraimentpasfroidauxyeux.Elleseraitparfaitepourundîner,maispaspourunetraque.Elleneluisemblepasidioteetpourraitviteconclurequelesattaquesmeurtrièressontl’œuvred’unvampire.ElleluifaitbeaucouppenseràLilith.Elleasondouxregard,ill’aperçutoutdesuitelorsdelasoiréecaritative.Ellesembleaussidéterminée,commel’estcettefichuegarcequiluiataillélecœurenmorceaux.Elleseraitparfaitepourunetraque,enfait.Ilauraitl’impressionderetrouverLilithenelleetlejeun’enseraitquemeilleur.Ilfermelesyeuxens’imaginantplantersescrocsenelle.Hum…ladouceodeurdesonsang.

Seulement,s’ilveutjoueravecellependantdessemainescommeleluiaconseilléRosalie,ildevralamarquerpours’assurerqu’aucundesescongénèresnes’amuseàlaluiprendre.Poursefaire,ildevraluirévélercequ’ilest.Impossible.Ill’hypnotiseraceseramoinsrisqué,etmoinsexaltantaussi.

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Ilpeuttoutaussibienfaireconfianceauxautres.Bastian,RosalieetJoseneluivoleraientpassonjouet,maisNarcissepeut-être.Ilneleconnaîtpasvraiment.Ilsviennentjustedeserencontrer.Ilnepeutpasnonplusprendrelerisquequ’unvampired’uneautrebandelaluidérobe.Ilignores’ilssontlesseulsenville.Ilarencontrétellementdesescongénèresdurantsesnombreuxvoyages.

Non.Ilneprendrapascerisque.

Ilvalaséduireetlamarquer.Ensuite,ils’amuseraunpeuavantdejouervraiment.

Ah,latraque!Doucepensée.

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Chapitre5

–Anaïs,tum’aspromisquecetteboîteétaitd’enfer!s’exclameDélila.

–Ellel’est.Maistoi,turefusesdet’amuser.ToutçaparcequeleDucn’apasvouludetonarticle.

Effectivement,ellen’apasréussiàluifaireaccepterqu’ellerédigeunechroniquesurlechâteau.Ducoup,elleahypocritementrécupéréceluisurlamortd’AnnetteSingerqu’elleavaitconfiéàAnaïs.Sonpatronn’apastropappréciélapointed’humoursurlechientueuretlesraisonsdesmeurtresqu’ilainfligés.Elles’endoutait.C’estpourcelaqu’elleluiaremisjusteavantlamisesouspresse.Ainsi,ellenepouvaitpaslerefaire.

Peut-êtrequelaprochainefois,illuifourniraundossiercomplet,mêmesiaufond,cen’estpasdesafauteàlui.

–Jevoulaisquetutechangeslesidées,c’estpourçaquejet’aiamenéeici.

–C’estsupergentil,jet’assure.

–Ohlavache!Délila!

–Quoi?J’aidelasaladecoincéeentrelesdents?

PourquoiAnaïslaregarde-t-elleainsi?

Ellessortentdurestaurant,alorspeut-êtrequec’esteffectivementdûàdelasalade.

–ÀlasoiréecaritativetuaseudroitauDucLancasterdansuncostumetroispièces,tiréàquatreépingles,etlescheveuxcolléssurlecrâne…maparole,quandiln’estpascommeçailestàtomber!

–Qu’est-cequeturacontes?

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–Regardesurtagauche.

DélilaobéitquandelleaperçoitleDuc…leDuc,vraiment?Ilesttotalementdifférentdelaseulefoisoùellel’avu.Sescheveuxnoirsnesontplusplaquéssursoncrâneavecunetonnedegel,maisébouriffé,cequiluidonneunairderebelle.Ilportedeslunettesdesoleilaccentuantsonairmystérieux,etestvêtudenoiruniquement.Lechangementeststupéfiant!Autantelleauraitacceptédesedamnerpourluidanssoncostumetroispièces,maislàelleseprosterneraenplus.

–Ilesttrop…tropbeau,murmure-t-elleavantdes’apercevoirqu’iln’estpasseul.

Ilestentouréparunebanded’amis.Quelâgea-t-ilpoursortiravecsespotes?Àmoinsque…ellerepèrelarousseàcôtédelui.Safemme.Elleesttellementbelle.Normalpourunhommetelqueluiquiincarnelaperfection,illuifautunecompagneàlahauteur.

Ellesesentrougirquandilposesesyeuxsurelle.Ellevoudraitdétournerleregard,maisçaluiestimpossible.C’estcommesisoncorpsneluirépondaitplus,hypnotiséparcethomme.Ellelevoitselever,puismarcherdanssadirectionsansqu’ellepuisseagiroumêmeamorcerlemoindremouvement.

–MademoiselleNagar,bonsoir.

–Bon…bon…bon…soir

Lahonte!Impossibledeprononcerunpetitmotcorrectement.

–Cen’estpastrèspolidefixerlesgenscommevouslefaitesavecmoi.

–Oh,pardon!

Elledétacheenfinsonregarddelui,baissantlesyeuxsurlatable,s’imaginantêtrerougecommeunepivoine.Heureusementqueleclubn’estquepeuéclairé.

–Non,enfait,c’esttrèsflatteur.

–Vraiment?

Ellerelèvelesyeuxsurlui.Quellemerveille!Sabarbenaissanteetsamoustacheluidonnentunairdevoyouqu’elleaimeoutrageusement.

–Accepteriez-vousunverre?

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Iln’amêmepastouchéàsonWhisky,cen’estpaspourajouterdavantageàl’horribleépreuvequil’attend.

Lesvampiresnepeuventniboirenimangerets’ilsessayent,ilssebrûlentl’œsophageetl’estomac,puisl’intestinetenfinl’anus–oulaverge–quandçaressort.Épreuvetrèsdouloureuse,qu’ilneveutpassubirplusquenécessaire.

–Non,merci.

Elleserembrunit.Qu’est-cequ’elleespérait?Ils’estsansdoutedéplacéuniquementpourluidirequesoninsistantregardsurluiestimpoli.Surtoutquesamerveilleuseetsublimeépousesetrouvaitàcôtédelui.

Ensefaisantcetteréflexion,ellebaisselesyeuxsursamaingauche.Ilneportepasd’alliance.Justeunegrosseet…laidechevalièreàsonannulairedroit.Ondiraitunetêtedemortnoire.Riendetrèsattrayant.

Donc,pasd’alliance.Pasd’alliance!Elleleregardedenouveau.

–Êtes-vousmarié?

Mince,laquestionluiaéchappé.

–Non,mademoiselleNagar,jesuisuncélibataireendurci.Trèsendurci,même.

Trèsendurcioutrèsdur?Hum…Elleledésirecommejamaisellen’aeuenvied'unhommejusqu'àprésent.Cependantellenepeutraisonnablementpasleluidire.C’estelleoulatempératuredelaboîtedenuitasensiblementaugmenté.Elleosefinalementreleverlesyeuxsurlui.

–Jevaisfaireuntour,informeAnaïsavantdedisparaîtredanslamassedegensentraindedanser,décidantqu’ilesttempsdeleslaisserentêteàtête.

–Vousdansez,monsieurleDuc?propose-t-elle.

ElleremercieintérieurementAnaïspourcettemerveilleidée.Hum…unrapprochementaveccebelhommenepeutqu’êtredélicieux.

–Pascesoir.

LadéceptionenvahitDélila.Quepensait-elle?Cen’estpasunhommepourelle.Ellesesouvientqu’ilestencoupleaveclarousse,mêmes’iln’estpasmariéetqu’ilestàsatablejustepourluidemanderd’arrêterdelefixersiimpoliment.

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–J’aiétéraviedevousvoir.Jenevousretienspaspluslongtemps.Etrassurez-vous,jenevousfixeraiplus!

Ellelevoitesquisserunsourire.Semoquerait-ild’elle?S’ilcontinue–

aussibeausoit-il–ellevasevexer.

–Vousai-jefâchéedequelquemanièrequecesoit,mademoiselleNagar?

–Non,seforce-t-elleàsourire.

–Jevoussouhaiteunebonnesoirée.

Ellen’amêmepasletempsdeluirépliquerlamêmechosequedéjàilregagnesatable.Elleapromisdenepasledévisager,maisellejettenéanmoinsuncoupd’œil.Labandequil’accompagneselanguitvisiblementdesdétailsquepourraitleurapporterleDucsurleurbrèvediscussion.Sielleneconnaissaitletitreprestigieuxdubelhommequis’assoitparmilessiens,ellepenseraitqu’iln’estqu’uninsignifianthabitantdeMontréal.Commelesautresd’ailleurs.Ilsonttouslescinql’airderebelles,affichantclairementleurdédaindelasociété.LeDucnefaitpasDuc…enfait,ilnefaitriendutout,mêmes’ilestsexydanslecuirnoir.Elledétournelesyeux,ellenevoudraitpasqu’ilpensequ’ellelefixeetqu’ilsesenteobligéderevenirverselle.

–Alors,raconte,s’empressededemanderJosephte.

Larousseposesamainsursonavant-brasensouriantàl’humaineblondequivientdedétournerlesyeux.

–Qu’est-cequetufaisaisaveccettepetiteblonde?

–Pitié,neparlepasdedîner!pestedéjàRosalie.

–Ehbien,si.Maispourbeaucoupplustard,répondSulli.Jesuistonconseiletjevaism’amuserunpeu.

–Avecelle?Maistuasunesaintehorreurdesblondes!Tusupporterasdelaregarder?s’étonne-t-elle.

Illepensaitquandiladécidédejouer,maismaintenant,ildoute.

Commentfera-t-ilpourlaséduire?Oh,ilconnaîttouteslesastucespourfairesepâmerunefemmeàsespieds,maisarrivera-t-ilàlesutilisersuruneblonde?

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–Ellereprésenteundéfi,accepte-t-ildereconnaître.

Ilsefrottelementoncommes’ilréfléchissaitenregardantlajeunefemmequialesyeuxàl’opposédelui.DélilaNagar.S’ilveutlaséduire,ilamalcommencé,ilenestconscient.Ilétaitallél’accosterpourentamerunediscussion,luidemanderofficiellementsonprénom,etpeut-êtreparlerdesonarticlequ’ilaludansleJournal.Maisenaucuncas,iln’avaitdécidédeluifaireuneremarqueimpoliesursafaçondeleregarder.

–Jevousdéclareofficiellementqu’elleestàmoi.Nevousavisezpasdelatoucher.

–Tupensesvraimentquenoussommeslesseulsenville,questionneBastian.

–Sansdoutequenon.Onlesauraquandlemotauraétéprononcé.

Ilestévidentquesidesvampiresviventenpaixavecleshumainsdanscettegrandeville,ilsnevontpasapprécierqueSullietsescomparsesviennenttroublercetteplénitude.

–Surveillebientaproie!s’amuseJoseenpointantsondoigtsurlablondeenpleinediscussionavec

unhomme.

Sulliréalisequ’ellearaison.Ilachoisicettepetitegourdepourjouer,maisignoretoutd’elle.Ildevraitserenseignerpourcommencer.Nonquelefaitqu’ellepuisseavoirunmarioudesenfantschangeraitquoiquecesoit.Ilveutjustesavoiravecquiils’amuse.Etlejeun’enseraquemeilleursilafemelleestprêteàsedamnerpourlui.

Bon.Àl’attaque!

IlselèveenpoussantleverredeWhiskyquiluiestdestinéaumilieudelatable.

–Jel’offreàquileveut.Moi,jevaism’assurerqu’onnemevolepasmonjouet.

Personnenesebatpourrécupérersonverre,leleurestdéjàsuffisammentplein.D’ailleurs,aucunnepenseleboire.

Sullisedirigedenouveauàlatabledesonamusement,seretenantderireenvoyantlajeunefemmeengrandeconversationavecundragueurinvétéré.

–Jenepeuxpastelaisserdeuxminutestouteseule!s’écrie-t-ilen49

frappantdupoingsurlatable.

Délilaleregardeavecahurissement,alorsquel’hommesefaittoutpetitetquittelatablesansdemandersonreste.

DanslesyeuxdeSullibrillelarage,ilenestconscient.Iladûfaireappelàl’undesesdouloureuxsouvenirspourréussiràjouercettepetitescènedejalousie.CeluioùcettesatanéeLilithsetenaitengalantecompagniedanslepatiodelavilladesonpère–VladTepes.Lilithn’estautrequelafilledesonsauveuretmentor.Vladestcommeunpèrepourlui,illuiatoutapprisaprèsl’avoirtransformé.

Ilchasseseslointainssouvenirs.Seulleprésentcompte.

–Dites-moiquecethommevousimportunait,supplieSullienrecouvrantunregardpresquenormal.

–Eneffet,confirme-t-elleenbafouillant.

–Jem’appelleSullivan.Nousn’avonspasdémarrédubonpied,jecrois.J’ailuvotrearticle,mademoiselleNagar…Délila.Acceptez-vousdem’accorderquelquesminutes?

Quandlastupeurestpassée,Délilaessayedecomprendrel’attitudedecethommesansjamaisyparvenir.Alorselleluidésignelachaisedélaisséeparledragueur.

Sullivans’yassitinstantanément.

–Jesuisterriblementmaladroitaveclesfemmes,jevouspriedebienvouloirm’enexcuser.

–Effectivement…vousnefaitespasdansladentelle.

Ellecroiselesbrassursapoitrinepourfeindrel’indignationoul’énervement,sansdoute,maisellenetrompepasSullivanquisaitqu’elleneressentriendetoutcela.Ilperçoitl’accélérationdesbattementsdesoncœur…iln’enétaitpassûravant,maismaintenantsi:iltroublecettedélicieusedemoiselle.

Exaltant!

–Commentpuis-jemefairepardonnercetteintrusion?

Ellenerépondrien,maissembleyréfléchir.

Luiaenviedesortird’ici,deseretrouverseuldanslenoiravecelle,deluidévoilersescaninesaiguisées,delapoursuivreensentantsapeur…

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finissantsatraqueparl’hypnosepourqu’elleoublie.Envoilàunprogrammeintéressant.Ilvapouvoirsedivertiravecellesanslamoindreconséquencepuisqu’ilseracapabled’effacersamémoirequandillesouhaitera.

–Vousaccepteriezdefaireunebaladeàmonbras?

Elleleregarde,décontenancée,décidément,cethommeestplusquesurprenant.

–Là?Enpleinenuit?

–Lanuitvouseffraie?

–Non.

Menteuse!

–Alorsacceptezdemesuivre,Délila.

Ilselèvecommeilluitendsamain.Ilperçoitsonhésitation,maisdécidedenepasrecouriràl’hypnosepourqu’ellelesuive.

Elleviendra,ilenestcertain.

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Chapitre6

Délilasedemandecequ’elledoitfairefaceàcettepropositiondepromenadeenpleinenuit…avecuninconnu.Bond’accord,iln’estpasvraimentunétranger,c’estleDucSullivanLancaster.Quellejoiedepouvoirenfinmettreunprénomsurce,diaboliquement,beauminois!Soncœurbatàtoutrompredepuisqu’ilestlà,auprèsd’elle,entrainde…dequoid’ailleurs?Deleurdonnerunesecondechance?Commeill’aremarqué,ilssontpartisd’unmauvaispiedtouslesdeux.Oului.C’estunhommegalant,certes,maisquin’apasappréciéqu’elleledévisage.Elledevraitarrêterdeseformalisersur

cepassage.Alorsquoi?Laphrasecriardesuivieducoupdepoingsurlatable?Quelsuperbenuméro,entoutcas!EllenesavaitpluscommentsedébarrasserdeceHarrycollant.EtoùestAnaïs?

Peuimporte.Ellen’arrivepasàdétournerlesyeuxdecettemaintendueetlasaisitenselevant.Ilalapeaufroide,elleavaitplutôtl’impressionqu’ilfaisaitchaudici.Ouest-cel’effetdeSullivansurseshormones?

–Jevoussuis,Sullivan.

Maintenantqu’elleleprononce,elletrouvequeceprénomluivaàravir.

Ilposesamainsoussonbrasetlaguideversl’extérieur,souslesregardspeudiscretsdesabanded’amis.SiDélilaperçoitquelquechose,ellen’enditrien.

L’airfraisestundélicepourlajeunefemmequiavaitl’impressiondesuffoqueràl’intérieur,maisilnesuffitpaspouréteindrelebrasieralluméparl’hommeàquielletientlebras.

–VotrearticledansleJournalm’abeaucoupamusé,dit-ilpourengagerlaconversation.

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Ill’entraînesurletrottoir.

–J’aitournél’affaireendérision,maisjen’avaispaslechoix.Monpatronouplutôtlapolicenenousdonnepasaccèsaudossiercomplet.

–Vousnecroyezpasàlathèsedel’attaqueanimale?

–J’auraispu,sij’avaiseuaccèsauxphotos.Lefaitquelapolicenousévinceclairementm’obligeàpenserqu’elleveutcacherlavéritéàlapopulation.

Oh!Qu’elleestintelligente!

Finalement,ilfaitbiend’écouterRosalie.Ilsviennentàpeined’arriver,ilneveutpasdéjàavoiràrepartir.Surtoutpasàcausedelui!

–Àquoipensez-vous?

–Àunanimalsauvagequis’approcheunpeutropdelavillepourdéjeuner.

Effectivement,ellen’estpasloin.Ellefaitunebonneproie.Ilnevapasfaireques’amuseravecelle,ilvaaussidévelopperuneamitié–quellehorreur!–pourainsitoutsavoirdesdécouvertesconcernantsonaffaire.

–Sicequevousditesestvrai,ilestassezcompréhensiblequelapoliceneveuillepascréerlapaniqueaumilieudeshabitants.

–Biensûr,maisellepourraitaussidemanderàcequepersonnenesepromèneseullanuit.

–Unpeucommenousencemoment,rit-il.

Elles’arrêtenetpourdeuxraisons.Lapremièrec’estsonrireincroyablementsexy,etlaseconde–retoursurterre–ilaraison.Ilsfontunecibleidéalepourl’animalsauvagequirôdelanuit.

–Jeplaisantais.Jenevoulaispasvouseffrayer.

–Vousêteschampiondekaraté?

Saquestiontrahitsonanxiété,illaressent.

–Non.Maisj’aidesnotionsdedéfense.

–Contreunoursaussi?

–Unours?Vousêtessérieuse?

Ellehochelatête.

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Bonsang,ilseretientdepouffer!Cettegonzesseavraimentbeaucoupd’imagination.Ilestpeut-êtretempsdes’amuserunpeu.Ellesembleapeuréeetl’endroitestdésert.Néanmoins,ildoitêtresûrd’unechose:ellenedoitpasluiéchapper.Sousaucunprétexte.

–Quediriez-vousplutôtd’unvampire?

Elleposeunregardtétanisésurluiquisouritendévoilantdesuperbesdentsblanches.Maispasseulement.Sescrocssontvisiblesaussi.

Délilapousseuncristridentavantdesemettreàcourir.

Sullivanl’observeenbadinant.Puisilsedéplacerapidement.

Délilaregardederrièreelle,l’homme–levampire–censélasuivre.Iln’yapersonne.Elles’arrête.Peut-êtrequ’ilestparti?Quesoncril’afaitfuir.Ellepivotepourreprendresacoursequandelleseheurteàquelquechose,nonquelqu’un.Lui.

–Cours,majolie.Fuisoujevaist’attraper.

Ellelepoussedetoutessesforces,yparvenantsansmalpuisqu’iln’émetaucuneopposition,etreprendsacourseeffrénéepoursasurvie.

Étrangement,ilnel’enempêchepas.Alorsellecourtaussivitequ’ellepeut,jusqu’àenperdrehaleineetressentirdesdifficultésàrespirer.Denouveau,ilseretrouvelà,devantelle,immobile.Cettefois,ellenes’yheurtepas,ellepivoteetrevientsursespasensehâtant.Saseuleenviec’estdeluiéchapper,elleydépensed’ailleurstoutesonénergie,sibienqu’ellenepensepasàappeleràl’aide.

Mêmesiellelefaisait,personneneviendrait.Ilfaitnoiretaucunemaisonalentourn’émetde

lumière.Alorsellecourtjusqu’àcequ’ilsedressedevantelle,l’empêchantd’allerplusloin,ellepivote,etpartdansl’autresens.Encoreetencore.

Jusqu’àcequeçan’amuseplusSullivan.Levampirecapturefacilementsaproieetregardesoncoudélicataprèsavoirpenchésatêtesurlecôté.Ilaenviedelaboire.Ilaimelesanghumain,iltrouvequec’estlebreuvageleplusdélicieuxdanscebasmonde.Maiss’ilplantesescrocsdanscetteartèrequ’ilvoitpulser,ilsignelafindesavieàMontréal.Alorsillâchesaproie.Ellefuitsansperdreuninstant,toutefoisillarattrapeàquelquesmètres.Delà,ilmaintientsatêteenplaceetlaforceàleregarderdanslesyeux.

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–Dors!

Pouf!Délilan’estplusqu’unepoupéedechiffonentresesmains.Illajettesursonépaulecommeunvulgairesacdepommesdeterreetregardeàl’intérieurdesonsacàmain.Ilcherchesonportefeuille,etplusprécisémentsacarted’identitépourconnaîtrel’adressedesarésidence.

Ensuite,ill’yconduit.

Ellehabiteunappartementautroisièmeétaged’unimmeubleimpersonnel.Devantsaporte,ilfouilledanssonsacàlarecherchedesesclefs.Illesintroduitdanslaserrureensachantqu’ilnepourrapasentrerpuisqu’iln’yapasétéinvité,ilchoisitdoncdel’hypnotisersurlepaillasson.

Ilclaquedesdoigtspourlaréveillerdèsqu’ilmaintientsatêtepourvoirauplusprofonddesesprunelles.

–Onestalléssepromener,puisnousavonsbuquelquesverresdansunbar.Vousêtessiivrequejevousairaccompagnée.Personnenevousapoursuivie.Lesvampiresn’existentpas.

Denouveau,ilclaquedesdoigtsetlamaintientpourqu’ellenecillepas.

–Oh!Jecroisquej’aiunpeutropabusédel’alcool.

Délilasetientàlaporte,maiselleaaussiunemainposéesurlebrasdececharmantjeunehommequil’agentimentraccompagnée.Sullivan.

–Unebonnenuitdesommeiletplusrienn’yparaîtra.

–Oùai-jemismesclefs?

Ellefouilledanssapoche,puiss’apprêteàouvrirsonsacquandillesluidésignesurlaporte.

–Là.

–Décidément!

Ellelestourneetquandlaportes’ouvre,ellemanquedetomber.

HeureusementqueSullivanestlàpourlaretenir.

–Allezvitevouscoucher,Délila.

–Mercipourcettesoirée.J’aiadoré…mêmesi…

Elleignorecequ’elleallaitdire.Mêmesielleatropbu?Peut-être.

–Leplaisirestpartagé,soyez-encertaine.

55

Ellesourit,désirantplusquetoutsejetersurluietl’embrassercommeelleenrêvechaquenuit,maiselleimaginequ’elledoitsentirl’alcoolàpleinnezetneveutsurtoutpasfairefuirceséduisanthomme.Ceserapourlaprochainefois.

–Àbientôt,secontente-t-ellededireàlaplacedubaisersulfureuxqu’elleveutréellement.

–Oui.

Illaregardeentrerchezelle,puisfermerlaporte.Ilpensaitqu’ellel’inviterait.Maislefaitdeluiavoirinsuffléqu’elleavaitbubeaucoupd’alcooladûl’enempêcher.Ceserapouruneautrefois.

Ils’estbienamusécesoir,maisildoutequ’unetelleoccupationpuisselecaptiverdurantdessemaines.Ilfaudraqu’ilinnoveaufuretàmesuredelatraque.

Sullirentredirectementchezluioùilretrouvesesacolytes.Rosalielefélicitedèsqu’ilpénètredanssachambre.Dansundéshabillénoir,lavampireestentraindebrosserseslongscheveuxfoncés.

–Es-tusûrequejen’aipascédéàlatentation?Jepourraistrèsbienavoirvidécettepauvrefilledesonsang.

–Cen’estpaslecas,trésor.Jevoislafrustrationdanstesyeux.

AhRosalie!Décidément,personneneleconnaîtmieuxqu’elle.Oupresque.IlpenseencoreàLilith.

–Tupeuxcontrôlertasoif,Sulli.Tul’asprouvécettenuit.

–J’aijouéavecelle,raconte-t-ilens’asseyantsurleborddulitdeRosalie.Jeluiaimontréquijesuisetcommentjem’amuse.Cen’étaitpasaussiexaltantquejel’avaispensé.Jemesuisennuyé.Jel’aihypnotiséeavantdelalaisserchezelle.

–Jesuisfièredetoi.

–Iln’yapasdequoi.Cen’étaitmêmepasdrôle!

–Sulli,tun’aspastuécettefille,rends-toicomptedecegrandpasenavant.

–Ouais.Bon,jen’aipasenviedem’étendresurlesujet.

Effectivement,ilpréfèregarderpourluisesémotions.Iln’aimepasavoiràsecontrôler.Ilaimefairecequ’ilveutetquandilleveut,comme56

quandilévoluaitauprèsdeVladTepes.Ah,c’étaitlebontemps!ÀcausedeLilith,iladûpartir.Vladétaitpeut-êtresoncréateuretami,maisavanttoutlepèredelatraîtresse.Ilachoisisafille,quoideplusnormal!

–Sulli?Tuveuxt’amuserunpeu?

LesparolesdeRosalielesortentdesespensées.S’amuserunpeu?Ilenauraitbienbesoin.Ilnepeutpasresterainsi,ilesttenduetrespirelafrustration.

–Qu’est-cequetuproposes?

–Cequetuaimes.Tuesledominateuretjeserailanonsoumise.

Attrape-moisiçatetente.

Ilesquisseunsourire,dévoilantainsisescaninespointues.QuandRosaliesemetàcourir,Sullilasuit.Riendetelquelatraque,mêmesic’estmoinsexcitantavecunefemellevampire.Ilnesentpassapeur.

Rosalies’amusecommeunefolle,alorsqu’ilabesoinderessentirdelaterreur.Ilenfaitabstractioncependant,parcequ’unefoisqu’ilaréussiàl’attraper,ellesedébat.Ilaimequ’unefemelleneselaissepasfaire.Ilveuttoutlecontrairedecequ’ilaconnuavecLilithdepuisqu’ilaquittélaTransylvanie.

IlpousseviolemmentRosaliesurlelitavantdes’allongersurellequisedébat,crie,ettentedelegriffer.Bonsang,cequ’iladorecetteattitude!

Touslesingrédients,oupresque–ilmanquel’odeurdelapeur–,sontréunispourlefairebander.

Elleestbienplusfortequ’unesimplehumaineetdonnedufilàretordreàSulliquiappréciedavantagelasituation.Ilréussitnéanmoinsàimmobiliserd’unemainsespoignetsau-dessusdesatête.Del’autre,ilouvresonpantalonetensortsonsexeengorgéqu’ilenfoncesansménagementdanslavampirequicrieetsedébatdavantage.Iloptepouruneattitudebruteetglaciale,lapénétrantavecvigueuralorsqueRosaliefaittoutsonpossiblepourluidonnercequ’ilveut.Maiscelasemblerapidementcompromis.

–Jevaisjouir,murmure-t-elle.

–Cequinedevraitpasêtrelecasdanstasituation.

Lasecondesuivante,ilenfoncesescrocsdanssagorgeetabsorbesonsang.

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Iln’enlaissehabituellementaucunegoutte,ilaimevidersesvictimesdeleuressencevitale.MaisavecRosalie,ilseforceàarrêter.Lebutn’estpasdelatuer.

Sonsangneluiapporterarien.Lesangdesvampiresn’estpasaussirichequeceluideshumains.

–J’appréciel’effort,articuleSullicommeilseretire.

–Toutleplaisirétaitpourmoi.

–Jel’aibiensenti,réplique-t-ilenhaussantunsourcil.

–Ai-jeréussiàtedonnerl’enviedevenirmevoirplussouvent?

–Non.Tusaisbienquejen’aimeplusautantlesexe.C’est…lassant.

IlserhabilleetsortdelachambredeRosaliesansrienajouterdeplus.

C’étaitbien,illereconnaît,maispasassez.Enfait,depuisqu’ilnepartagepluslesexeavecLilith,illetrouvefade.

58

Chapitre7

Délilaestsourianteenserendantàsontravaillelundisuivant.ElleapassésonsamedisoiravecSullivanLancaster.MonDieuquec’étaitdivin!

Ellesevoitencoreaveclui,sepromenantdanslesruessombresdeMontréalc’étaittellement…intime.Justeelleetlui.Ilfautabsolumentqu’ellelerevoie.

Elleestassisesursonfauteuilencuir,avectoujourscettepenséequiluitrottedanslatête.Peut-ellesimplementluipasseruncoupdefil?Queluidirait-elle?Qu’elleapasséunesuperbesoirée,mêmesielleétaittropivrepours’ensouvenirtotalement?Décidément,non.Peut-êtrequ’iln’apasappréciésacompagnie,puisqu’elleétaitéméchée.Quelleidiote!Pourquoia-t-ellebuautant?Ellenes’ensouvientpas.Maiss’yforcerdavantageluidonnemalàlatête.Cen’estqu’unepauvrecruche!

Elleregardelesdossiersposéssursonbureauensoupirant.Lesdeuxaffairesconcernantlamortdejeunesfemmessemblentclasséessanssuite.

Aucunpapiernelesconcerne.Commentlapolicepeut-ellelaisserfaireça?Sonpatron,çapeutsecomprendre,mêmes’ilpasseàcôtéduscoopdusiècle,elleenestconvaincue,maisceuxquisontcensésfairerégnerlaloi,ellenelescomprendpas.

–Délila?

L’intéresséelèvelatêtepourvoirqu’Anaïssetientdansl’embrasuredelaporte.

–Claudeaimeraitque…

Anaïssetaitenvoyantquesonamienel’écoutepas,semblantàmillelieuesd’ici.

59

–Délila?

–Excuse-moi.Tudisais?

–Qu’est-cequit’arrive?

Délilaluifaitsigned’entreretdefermerlaporte.Anaïss’exécute.Puisquandelleestassiseenfacedelarêveuse,elleapprendpourquoisonesprits’évade.

–TuaspassélasoiréeavecleDucLancaster!

Délilaconfirmed’unhochementdetêteavantdelaraconterdanslesmoindresdétails,enfin,ceuxdontellesesouvientouceuxquesonespritluisouffle.

Anaïssedoutaitbienquesonamieavaitdûfileraveclebelhommequandelleavuleurtablevideàsonretouraprèsdenombreusesdanses.

–Tucroisquejepeuxl’appeler?

–Pourquoinepourrais-tupas?Aupire,tuteprendrasunrâteau!

Délilaenestparfaitementconsciente,maiselleatendanceàagircommeuneobtusequandunhommeluiplaît.

–Essayejustedenepaspicolersituaslachancedesortirdenouveauaveclui.

Lablondesoupire.Cen’estpasdansseshabitudesdeboireainsi.Elleatellementpicoléqu’elleestincapabledesesouvenirdelasoiréedanslesdétailsetc’estfâcheux.Peut-êtrevoulait-ellesedonnerducourage…

quelleidéeabsurde!

–Tuvoulaisquoi,aufait?

Elleimaginequesonamien’estpasvenuelavoirpourbavarder.

–Oui.C’estClaude.Ilvoudraitquetufasses…

Inintéressant!

Délilaperdsaconcentrationsansmêmes’enrendrecompteetlaissesonespritvoguerducôtéd’uncertainSullivanLancaster.Cethommeestl’incarnationdelabeautéparfaite,enplusilestriche,célèbre…etils’intéresseàelle.Vraiment?Ilfautqu’elleenaitlecœurnet.Ellesursautequandlaporteseclaque.

Mince,Anaïs!

60

Ellen’arienécoutédecequ’elleluidisaitalorsellel’imaginefâchée.

Elleiralavoirplustard.Pourlemoment,ilfautqu’elleproposeunverreàl’hommedesesrêves.Sansréfléchirdavantage,elleprendsontéléphoneetcomposelenumérodeSullivan.Çasonneplusieursfois,Délilasedemandesoudains’ilneseraitpasunpeutroptôtpourcethomme.

–Allo,répondunevoixensommeillée.

–Jesuisdésoléedevousréveiller.

–Délila,c’estvous?

Soncœurs’accélèrequandellel’entendprononcersonnom.Iln’apasoublié,celal’encouragedanssadémarche.

–Oui,Sullivan.Jemedemandaisivousaccepteriezdeprendreunverreavecmoi.

–Quand?

–Jenesaispas.Dansl’après-midi?

Leplustôtseralemieux,pense-t-elle.

–Çanevapasêtrepossible.Jesuispristoutelajournée.

–Ah!

Elleestterriblementdéçueetespèrequesoninterlocuteurneleperçoitpas.Ellepourraitl’inviterdanslasoirée,ouunautrejour,maiselleenestincapablecommesielleavaitperdul’usagedelaparole.

–Est-cequevousêteslibrecesoir?

Soncœurs’emballedavantageàl’ententedecesmots.

–Oui.

–OnpourraitsevoirauStéréo-nightclub,qu’enpensez-vous?

–Euh…oui.

–J’yseraiversvingtheures.

Unequestionluitraversel’esprit:ysera-t-ilseul?Malheureusement,ellen’osepaslaformuleràhautevoix.

–Trèsbien.Jevousyretrouveraiàcetteheure.

–Àcesoir,Délila.

Enraccrochant,elleestbiencontented’avoirprisl’initiativedepasser61

l’appel.Ellepasseralasoiréeaveclui.Impossibledeseconcentrersursontravailaprèsça.Lavérité,c’estqueçal’étaitaussiavant!Ellenepenseplusqu’àlatenuequ’ellemettraetàcequ’ellevabienpouvoirluidire.

Ellesaitdéjàqu’elleneboirapasuneseulegoutted’alcooletqu’elleneferapasunesecondefoislabêtisedefermerlaportealorsqu’ilestsursonpalier.Non.Cesoir,ilentrera.Et…elleabeaucoupd’idéessurlafaçonagréabledontellepourraitpasserletempsaveclui.

Anaïs.Ilfautqu’elleaillelavoirets’excuser.

Ellequittealorssonbureauetsedirigeversceluidesonamie,maisenpassantdevantceluideClaude–sonimbéciledepatron–,ellereconnaîtlavoixd’Anaïsetdécided’entrer.

Oups!Ellen’auraitpeut-êtrepasdû.Ellesesenttoutebêtequandellelesvoits’écarteravecrapiditél’undel’autre.Ilss’embrassaient,ellen’apasrêvé!

–Euh…désolée.

Elletournelestalonspours’enalleravecledésirdedisparaître,maisAnaïslarappelle.Délilachoisitdoncdeleurfaireface.

–Garde-lepourtoi,d’accord,réclamesonamie.

Enyréfléchissantbien,Délilaréalisequ’elleavaitdesindicessouslesyeux.Anaïsquil’appelleparsonprénom,quiledéfendsouvent…

évidemment,çasemblesilogiquemaintenant.

–Jenedirairien.Jesuisjustevenuem’excuserpournepast’avoirécoutéeavant.

–Oh!C’estoublié,déclare-t-elleenfaisantungestedelamain.

–Bon…ehbien,jevouslaisse.

Aprèsavoirpasséuneheuredevantsonmiroir,Délilaserendaulieudurendez-vous,lecœurbattantlachamade.

Surplace,ellefaitrapidementletourdelasalle,maisn’aperçoitpasceluiquichamboulesessens.Elles’installealorsaubaretcommandeunelimonadepouravoirlesidéesclairesetsurtoutsesouvenirdesasoirée.

Elleavalesaboisson,regardeplusieursfoissamontre–mêmesil’heurechangepeu–avantdesentirunemainfroidesursonépauledénudée.Elle62

sursautecommeelleseretourne.

Sullivandanstoutesasplendeur,vêtudenoiruniquement.

Elleretientsonsouffle.

–Excusez-moidevousavoirfaitattendre.

Elleouvrelabouche,maisaucunsonnesort.Elleaimeraitarrêterdeparaîtrepouruneidioteensaprésence!

–Quediriez-vousd’unepromenadepourmefairepardonner?

Illuitendsamainqu’ellesaisitavecravissementenacquiesçantsademande.

Ellesuitlebelhommehorsduclub,puisprendlebrasqu’illuiproposeavantdefairequelquespasaveclui.Ilsontfaitlamêmechosehierausoir,elles’ensouvientparfaitement.Etelleaimemarcheràcôtédelui.

D’abord,ilsneparlentpas,puisDélilabriselesilenceenlequestionnantsurlesrénovationsduchâteau.Elleatoujourstrèsenviedefaireunarticlesurcesujet,néanmoinspassanssonaccord.

Elleapprendquelestravauxn’ontpasencorecommencé,Sullivann’amêmepasengagéd’entreprises,n’enétantqu’austadedesdevis.

ElleécouteleDucparlerdesmodificationsqu’ilcompteapporteràlademeure,ainsiquelavisiondestravauxachevés.Çaluidonneenviedelavoir.Elles’imagineraitbienvivredansuntelchâteaucommeuneprincesse…éleverlesenfantsdeSullivan…Elleestcomplètementperduedanssesrêveriesquandillafaitviolemmentpivoterverslui.

Sesyeuxs’écarquillentdestupeur.

Ilplongesonregarddanslesien.

–Onvajouer,moncœur.

Elledéglutit.Iln’aplusrienduséduisanthumain,maisbienleregardd’unaffreuxprédateur.

Ilsouritdiaboliquement,dévoilantainsisescaninespointues,engendrantuncrid’effroidelapartdelablondefaceàlui.Délicieux.

Unvampire?

Délilacroitrêver.C’estimpossible.Etpourtant…Serait-celuileresponsabledesattaquessurlesdeuxfemmes?OhmonDieu…tout63

s’éclairepourelle.Ellesemetàcouriraussivitequepossible,maudissantlestalonsqu’elleporte.Horsd’haleine,ellecavalecommesisavieendépendait…euh,minute…savieendépend.

Ilfaitnuitetelleal’impressiond’êtreisoléedumondeàallerunpeunullepart.Ellen’arriveplusàréfléchir,saseuleenvie:fuircetêtresurnaturel.Ohbiensûr,ellea,commetoutlemonde,ludeshistoiresdevampiresetvudesfilms.Maislà,cen’estpluslafiction,c’estlaréalité.Etelleestfaceàunvampire.N’est-ellepasentrainderêver?

Malheureusementnon.Pourtant,elleacettehorribleimpressiondedéjà-

vu.

Deuxmètresplusloin,elleseheurteàquelquechosededuretdefroid:lui.Elleveutpivoter,maisilsaisitsonbrasférocement.Elledéglutitdifficilement,sentantsadernièreheurearriver.

–Çan’ariend’amusant!pesteSulli.Jeveuxquetucries.Bonsang,montre-moiquetuesterrifiée!

–Maisjelesuis,bafouille-t-elle.

Illuisouritsadiquement,enrévélantsescrocsaiguisés.

–Oui,soupire-t-ilenrespirantsapeur.Jetesens.

Ilfaitminededesserrerlapriseetelleenprofitepourretirersonbrasetgaloperàtouteallureversnullepart.Lesruesqu’elleempreintesontfaiblementéclairées,etiln’yapaslamoindremaisonouunquelconquesignedevie.Ilssontdansunquartierprofessionnel,iln’yaquedesbureaux…c’estbiensaveine!

Sullis’amuseaveclablondecommesiellen’étaitpasunêtrevivant,commesiellen’avaitpasd’âme.Illafaitcourirsivitequ’elleenperdseschaussures.Ilestobligédelesramasserparcequ’ilnedoitlaisseraucunetracedecemoment.

Quec’estexaltant!Ilsentsapeur…douceodeurpourunvampire.Ilaimeraitpouvoirgoûtersonsang,ill’imaginedélicieux.Ilpeutentendresoncœuraffoléquandilestprèsd’elle.Ilsenourritdetoutcequ’elleressentlorsdecettetraque.C’estunecandidateidéale,enfait.D’ailleurs,ilpensedenouveauàlamarquer.Ilneveutpasqu’elleluiéchappe.

EnentrantdansleStéréo-nightclub,unpeuplustôt,pourrejoindreDélila,Sulliaperçulaprésencededeuxdesescongénèresmâles.Ils64

semblaientregardersaproie–ousonjouet,n’ayonspaspeurdesmots–,cequiestquelquechosed’inconcevablepourleténébreuxvampire.Ilaréaliséquecesdeuxmâlespourraientlaluidérober,cequ’ilrefusedelaisserfaire,alorsilvalamarquer.Elleestàlui.Etluiseulluiôteralavie.

Ilbonditjustedevantelle,l’obligeantainsiàseheurteràlui.D’unemain,illuimaintientlesbrasetdel’autre,ill’obligeàleregarder.

–N’aiepaspeur,Délila.Oublietoutcequivientdesepasser.Jet’airetrouvéeauStéréo-nightclubetnoussommesallésnouspromenerdansMontréal.Maintenant,ilesttempsderentrer.

DéliaportesamainàsoncrânequandSullivanlalâche.

–Vousallezbien?

Ilfaitminedes’intéresseràelle,allantmêmejusqu’àposersamainfroidesursonépaule.

–C’estjuste…

Ellenefinitpassaphraseparcequ’elleignorequoidire.Elleestincapabledesavoircequ’ellea,nipourquoielleaeucegeste.

–…çava.Vousavezfroid,Sullivan,constate-t-elle.Ondevraitsemettreauchaud.

–Nevousinquiétezpaspourmoi,onm’atoujoursditquej’ailesangfroid.Maisj’acceptevolontiersdevousconduireoùvouslevoulez.

Délilaréfléchituninstant.Ilsviennentdefaireunelonguebaladeenparlantdesrénovationsduchâteau,elleaimeraitbienluipayerunverre,maispasdansn’importequelclubducentre-ville.Non,elleveutl’inviterchezelle.Depuisqu’elleleconnaît,ellen’arrivepasàlesortirdesatête,ilseraittempsd’essayerd’allerplusloin.Aumoins,ellesauracequ’ilpense,ets’iln’apaslesmêmesenviesqu’ellealorsellearrêteradesetorturerenpensantàlui,l’hommeinaccessible.

65

Chapitre8

–Accepteriez-vousdevenirboireunverrechezmoi?

–Avecungrandplaisir.

Illuitendsonbrasqu’elleprendetilsmarchentjusqu’àsonappartement.Délilatentedecachersajoie,Sullivanavaitl’airemballéenluidonnantsaréponse.

Aprèsunevingtainedeminutesdemarche,lecouplepénètredansl’immeubleoùrésidelablondinette.Cettefois,Sullivann’estpaséconduitsurlepaillasson,ilestcordialementinvitéàentrer.

IlesquisseunsourirequeDélilaprendpourdelajoie,alorsqu’ils’agitplutôtdel’exaltation…celledemettresonplanàexécution.Ilvapouvoirlamarquer.Aprèsça,aucunvampiren’auraledroitdelaregarder,personnenepourraluidérobersondivertissement.

–Qu’est-cequejevoussers?

Absolumentrien.Ilaunesaintehorreurdeboire,celaluibrûlebientroplagorge.

–Onpourraitoublierleverre,qu’endites-vous?

Ils’approched’ellequinereculepas,cequiledéconcertelégèrementparcequ’iln’yapassilongtempsellehurlaitenlefuyantcommesisavieendépendait.Bond’accord,ellesavaitcequ’ilétaitàcemoment-là.Ahl’hypnose,c’esttellementagréablecommedon!

Ilportesamainfroideàsonvisage,Délilaaunmouvementderecul,cequifaitplisserlesyeuxduvampire.

–Pardonnez-moi,balbutie-t-elle,c’estque…vousavezlapeaufroide.

–Ilparaît,eneffet,sourit-ileneffleurantsonmenton.

66

Délilatentedecalmersarespirationetdegarderunsemblantdecontrôlesurelle,mêmesiçasemblecompliquéquandSullivanfaitglissersesdoigtsjusqu’àsoncoudélicat,s’arrêtantuninfimeinstantsursaveinepulsante.Cettefemelleestexcitante…trèsexcitante.Ilvabiens’amuseravecelle.Certeslesexen’estpascequ’ilpréfère,iln’aimed’ailleursplustrop,ils’ennuie.Maisavecelleceseradifférentparcequ’iljoue,ilvapouvoirlamordre,àconditiondesavoirsecontrôleretdenepaslaviderdesonsang.Engénéral,iln’yarrivepas.Combiendefemmesa-t-ilmarquées?Aucune.Pourquoi?Cen’estpasparcequ’iln’enajamaiseuenvie,non,aucontraire…iladéjàessayé,maisillesatoutestuées,n’ayantpasréussiàs’arrêteràtemps.

Pourquoiserait-cedifférentcettefois?Ill’ignore,maisill’espère,carilaenviedes’amusercommeleluiasuggéréRosalie.Ceserapréférableauxtueries…pourlemomententoutcas.

–Vousêtestrèsjolie,Délila.

Etillepense.Iln’aimepaslesblondes,maisc’estpouruneraisonpersonnelle.Elle,elleestbelle,siçan’avaitpasétélecas,ilnel’auraitpaschoisie.Ilnes’abreuvejamaissurunefemmequineluiplaîtpasphysiquement.Enfait,çafaitdessièclesqu’ilneboitquesurdesblondes,unemanièredétournéedesevengerdeLilith.Entuantdesfemmesàsonimage,c’estcommes’ils’enprenaitàelle.Maisilrepoussesespensées,ilneveutpasvoirLilithenDélilaouc’estsûr,iln’arriverapasàlamarquer.

–J’aimeraisbeaucoupvousavoirdansmavie.

Ellecroitrêverquandellel’entendprononcercesmots.Elleaussiaimeraitl’avoirdanssavie.Elleestentraindetomberamoureusedecebeauténébreux,maisellesegardebiendeleluidire.Ellenevoudraitsurtoutpaslefairefuir…ohça,non!

–Moiaussi.

Ilesquisseunsourire.C’estsifacileavecelle.Blondeetnaïve.Ilpourraitopterpourl’hypnoseoulecontrôlemental,maisc’esttellementplusagréablequandlavictimeestconsentante.

Ilfaitglissersamainjusqu’audécolletédelarobequ’elleporte,sedélectantaupassagedesfrissonsqu’ilprocureàDélilaetdel’odeurdesondésir.Elleleveutenelle,ilpeutlesentir.

–Jevousdésire,Délila.

67

Elleouvrelabouche,maisaucunsonn'ensort,elleavaitpourtantl’intentiondeluiretournerlecompliment.

Sullivanapprochesabouchedelasienneetsepenchedavantagepourl’embrasser.D’abordilnefaitqu’effleurerseslèvresaugoûtdefruitqu’elledoitàsonbrillantàlèvres,puisd’unemainfermeill’attireàluicommeilglissesalanguedanssabouche.C’estbiencommeçaquedeuxamoureuxsontcensésfaire.Iln’aimepascettefaçon,enfait,ilnel’aimeplusdepuisqueLilithadécidéderompreaveclui.Illapratiquerarement,uniquementquandc’estnécessaire,commemaintenant.Pourtant,contrairementàceàquoiils’attendait,ilserendcomptequec’estplutôtagréablequandlafemmes’y

prendbien.Peut-êtrequefinalementiln’aeuaffairequ’àdesincompétentesaprèssarupturedouloureuse.Quoiqu'ilensoit,ilsedélectedecettedoucefemelleaussilongtempsqu’elleleluipermet.Ilnerespirepas,çaluiestdoncbienégald’ymettreunterme,parcontrepourellec’estdifférent.

Quandellemetfinaubaiser,ilsedemandes’ildoitluidemanderoùestsachambreous’ildoitattendre.Iln’aimepasseretrouverdanscegenredesituationoùilnesaitpasquoifaire.D’ailleurs,heureusementpourlui,celaneluiarrivequepeucouramment.

–Onavaitparléd’unverresijemesouviensbien,articule-t-elle,complètementdésorientée.

–Vraiment?Ilmesemblepourtantquenousavonsenviedetouteautrechose.

Ellerougit.Commec’estmignon!

–J’aienviedevous,murmure-t-ilcontresapeau.

Ellepeutsentirsonsoufflelacaresseretsavoixdoucereusel’envahirpleinement.Elleaussiaenviedelui.Elledevraitpeut-êtresedemanderoùcelalaconduira,maisaudiablelaprudence.

–Jevousveuxaussi.

Sullivanimaginequ’ilesttempsdeposerlaquestionfatidique.

–Oùestvotrechambre?

–Parici.

Elleluiprendlamainetl’attirejusqu’àlaporteenpinàdeuxmètresd’eux:sachambre.Jolimentdécoréeetbienrangée,elleneplaîtpourtant68

pasàSullivanquidétestecegenredechambreaustylecontemporain.

Levampireavaitdansl’idéedeladéshabillerrapidementavantdel’allongerpourlaposséderuncourtinstantetlamarquer,maisilsemblequeDélilanevoitpasleschosesainsi.Ellesecollecontresoncorpsfroidetl’embrassedenouveauenenroulantsesbrasautourdesoncou.Lafaçonagréablequ’ilad’embrasserlalaissepenaudeetcertainequ’elleneselasserajamaisdesesbaisers.Quandelles’écartedeluipourretirersarobe,illacouved’unregardemplid’envie,uneétincellededésirbrilledanssesyeuxcommejamaiselleenavaitvuedansceuxd’unautrehomme.Ellesesentalorsspécialeauprèsdelui.Rapidement,elleluidévoilesonanatomie.

Sullivanlacontemple,elleestnuedevantluietincroyablementbienproportionnée,ildoitlereconnaître.Enmêmetemps,ilnel’apaschoisieauhasard.Labeautés’estgentimentprésentéeàlui.Quelquepart,illuidonnecequ’elleveut.

Elles’approchedeluietcommencepardéboutonnersachemisenoireavantd’enécarterlespanspoureffleurersontorsefroidetdur,maisôincroyablementsexy.Ellenepensepassetromperenaffirmantquel’hommequ’ellecaresseestunsportif,illefautpouravoiruncorpssisculpté!

–Vousêtesmagnifique,souffle-t-ellecommeelleposeseslèvressursontétondroit.

Illaisseéchapperungémissementrauquequandilsentsalanguetaquinecontresapointerosée.Bonsang,s’ilavaitsoupçonnéqu’elleestsidévergondée,ill’auraitmarquéeplustôt.Entoutcas,ilauraitessayé,ilnesaittoujourspass’ilyparviendra.

Ellelèchel’endroitsensibleencoreunmomentavantd’infligerlemêmetraitementautétongauche,arrachantdesgémissementsdeplaisiràSullivan.Elleseredresseensuiteetentreprenddeluiretirersachemiseavantdes’attaqueràlafermeturedesonpantalon.Commesielleavaitl’habitudededéshabillerunhomme,ellefaitglissersonvêtementjusqu’enbasdeseschevillesavantdeleluiôter,puisellerecommenceavecleboxerqu’ilportepourfinalementseretrouverdevantunmembregonfléapparemmenttrèsdur.L’espaced’uninstant,elleplongesonregarddansceluideSullivan,ensuiteellereportesonattentionsursonanatomiedevantlaquelleelles’agenouilleavantdelaprendredanssabouche.

69

Sullivanposel’unedesesmainssurlatêtedeDélila,ébouriffantsescheveuxàchaqueva-et-vientsursonsexe.Voilàquelquechosequ’ilconnaîtpourl’avoirpratiquéàdenombreusesreprises,maisjamaisavecunetelleintensité.Aucunefemmenel’aprisainsi,profondémentdanssagorge,nel’achéricommeellelefaitencemoment.S’ilavaituneconscience,ilsediraitqu’elledoitvraimentbeaucoupl’aimer,maisiln’enaaucunealorsriendetelneluitraversel’esprit.Illaregardefaireenprenantduplaisir,leresten’apasd’importance.

QuandDélilaseredresse,elleprendsamainetl’attirejusqu’aulitoùelles’allongeenleréclamantenelle.Ilobéit,s’approchantlentementavantd’embrasserl’intérieurdesescuissesdanslequelilrêvedemordre,s’allongeantsurellecommesonsexepalpitanttrouvel’antredesaféminité.Illapénètrefacilement,accueilliparunechaleurhumideintenseetdesgémissementsdebien-être.Ils’appuiesursesavant-braspouralleretvenirenelleavantdesaisirsonvisagedanssesmainspourl’embrasser.

Leurslanguesdansentl’unecontrel’autrealorsqueleurscorpsquinefontqu’unbougentaurythmedespénétrationslentesdeSullivan.Aprèslebaiser,ilseredressepouraccélérerlemouvementetfairecrierlajeunefemme.C’estbon.Certes,cenesontpasdescrisd’effroi,maisilarriveàaimerl’instantd’autantplusparcequ’ilsaitquelafinestproche.

Enfin,illepensait…

Délilasembletrèsgourmandeenmatièredesexe,àmoinsquecenesoitparcequec’estaveclui,elleneleluilaissepasuneminutederépit,etlui,quiaimemordrependantqu’iljouit,voitsonmomentd’exaltationsanscesserepousser.Néanmoins,aufinal,cen’estpassidésagréable…c’estunpeucommelatraque.

Aprèsplusd’uneheure,ilarriveenfinàserelâchersurelleenmêmetempsqu’ilserépandenelle.Ilauraitpupenseràenfilerunpréservatif,maisàquoibon?Ilestincapabledelamettreenceinteetnepeutpasattraperdemaladies,alorsinutiledes’encombrer,ilnel’ad’ailleursjamaisfait.Sonliquidechaudquittesoncorpsalorsqu’illèchelagorgedesavictimeavantd’yplanterférocementsescrocs.

Délila,horrifiée,criedetoutessesforcesententantdesedébattre,maisc’estenvain,illamaintientfermementdansuneétreinted’acier,ellen’estpasassezforte.

Sullivansedélectedunectarrougeetchaudquicouledanssagorge,70

c’estsibonqueçaempêchesonsexederamollir,ilestencoreenérectionetilsaitques’ilarriveàlamarquersanslatuer,ildevraassouvirsondésirsexuelavecelleensuite.

–Jet’enprie,murmure-t-elle,arrête.

Mêmesilasituationesturgente,ellen’apasprisletempsderéfléchirsielledoitcontinueràlevouvoyerousiellepeutuserdefamiliaritéaveclui.

SavoixrésonnecommeunappelausecourspourSulliquiarrêteinstantanémentdeboiresurelle.Ilseredresseetlèchelaplaiequisaignepourl’aideràcicatriser.Iln’aquasimentpassalilesdraps,ildevientfortàcepetitjeu.Enseredressantdavantage,ilcroiseleregardterrifiédeDélilaquimalgrésapeurnepeutpasbaisserlesyeux.Iladusangdanslabouche,ellecomprendqu’ilabulesien.Maisc’estsi…inimaginable.Entoutcasçal’étaitavantqu’ilouvrelabouchepourluidivulguersescrocs.

Ellepousseunnouveaucriettentedesedébattre,cequiresserrelapressionautourdusexeenérectionduvampireetluidonnedavantageenviedelaprendredenouveau.Ilpourraitlavioler,aprèstoutçanel’ajamaisdérangé,maisilpréfèresafaçonàelledefairel’amour,alorsilmaintientsonvisageenplaceetlafixedesesyeuxsombres.

–Ilnes’estrienpassé,onestjusteentraindecoucherensemble.

Ilapprocheensuiteprudemmentseslèvresdessiennespourl’embrasseretn’essuieaucunrefus.IlséchangentunbaiserprofondetintenseavantqueSullivanosedenouveaularegarder.

–J’aiencoreenviedetoi…

Iln’attendpasderéponsedesapartetrecommenceàbougerenelledurantdelonguesminutes.Ilveutquecettesecondefoissoitplusbrutaleetexcessivequelapremière,chosequ’apparemmentsapartenairesouhaiteaussi,n’émettantaucuneoppositionlorsqu’ildélaisseladouceurauprofitdel’agressivité.

Aprèscettesecondefois,Sullis’accordeunmomentderepos,allongéàcôtéd’ellequinetardepasàseblottircontrelui,désirantluiavouersessentimentsnaissants,maispréférantencoresetaire.

Ilsrestentainsidelonguesminutes,danslesilence,àsavourerl’instant.

Enfin,pourDélila…Sulliaussiestbien,ilnepensaitpasqu’unjourilarriveraitàs’allongeràcôtéd’unefemmesansressentirsalassitudehabituelle.Non,cettefois,ilaprisduplaisirausexeavecelle.Ilest71

d’ailleursbiencontentd’avoirréussiàlamarquerparcequemaintenantelleestàluietpersonnenelaluiprendra.Ilpourracoucheravecellequandilenauraenvie,latraquer…puislatuer.

–Jevaisyaller.

–Pasdéjà,proteste-t-elleenraffermissantsonétreinte.

–Délila…

Elleseredressepourleregarder,cebeaumecestàellemaintenant.Etellenecroitpassibiendire!

Ilcaressesonvisageavantdel’emprisonnerdanssesmains.

–NousavonspassélasoiréeensembleànouspromenerdansMontréaletjet’airaccompagnéecheztoi.Nousn’avonsrienfait.Dors,maintenant.

L’instantd’après,ilaunetêtepantelanteentrelesmains.Illadéposeprécautionneusementsurl’oreillerquandsonregards’attardesurlestracesdesangduesàlamorsure.Ilquitterapidementlelitets’habilleavantd’allerregarderdanslasalledebainssiunobjetpourraitblesserlajeunefemmeendormie.Sonregardestattiréparunelimeàonglesenmétal.

L’extrémitéestassezpointue,ilestpersuadéquecelaferal’affaire.Ilretournedanslachambreetblesselégèrementlajeunefemmeàl’épauleavantdelaissertomberlalimesurledrap.Délilasaignelégèrement,assezpourqu’ellecroieàlathéoriequisauteraauxyeuxquandelleseréveillera.

Ilregardelesmorsuresquiparaissentêtredespiqûresd’insectes,puiss’envaaprèsavoirvérifiéqu’iln’arienoublié.

72

Chapitre9

Délilapestequandsonréveilémetunbruitstridentapparentéàlèvetesfesses!Elleappuiesurleboutonquileferataireets’étire.Elleressentaussitôtunedouleuraucou,yposesesdoigtsetsegratte,constatantqu’effectivementilyaquelquechosedesuspect.Elles’extirpealorsdulitàcontrecœur,ayantmalpartoutcommesiunrouleaucompresseurluiétaitpassédessusunepartiedelanuit.Sansdoutea-t-ellemaldormi,ellen’yprêteguèreattentionetouvrelevoletavantdechercherdanssonarmoirelesvêtementsqu’ellevaporter.Soudain,sonregardestattirépardespetitestachesrougeâtressursonoreiller.Elles’avancepourregarder…dusang?Elleposesondoigtsurlatache,çasemblesec.Ellevadecepasàlasalledebainspourseregarderdanslemiroir,àcoupsûrc’estcequilagênedanslecouquienestlacause.Elleadeuxboutonsblancs,apparemmentdespiqûresd’araignées…super!Puissonregardseposesursonépaule,elleestgriffée,plusmême,ellesembleblesséeetdusangseccouvrelaplaie.

Qu’est-cequec’estqueça?

Ellesedésinfecteavantdemettreunpansementetretournedanssachambrepourregarderaumilieudesdrapscequipourraitêtrelacausedecetteplaie.Ellenetardepasàtrouversalimeàongles.Étrange,ellenes’ensertpourtantjamaisaulit.

Uneheureplustard,elleracontecepetitincidentinsoliteàAnaïssansvéritablements’yattarderparcequecequicomptevraimentc’estladélicieusesoiréequ’elleapasséavecSullivan.

–Vousvousvoyezsouvent,jetrouve,souligneAnaïsenjouantavecsescheveux.

–Etj’espèrequ’onseverraencoreplus.

73

–Vousfaitesquoidevossoirées?

Délilaluiparlealorsdeslonguesbaladesetdiscussionsquioccupentleurssoiréescommunes,cequifaitsourireAnaïs.LeDucsemblevieuxjeu,pluspersonnenes’amusecommeçadenosjours.

–Vousêtes-vousembrassésaumoins?

–Oui,répond-elleaussisec.

Puisellesereprendendisantquenon.

–Faudraitsavoir!Ouiounon?

Elleestpersuadéequec’estoui,maisn’arrivepasàs’ensouvenir,alorspeut-êtrequenon,finalement,maispourquoilepense-t-ellesifortdanscecas?

Ellecroitcomprendre…

–Peut-êtrelafoisoùj’avaisunpeutropbu,vasavoir.J’ailasensationdel’avoirembrassé,maisjenem’ensouvienspas.

–Ouais.

Anaïschassecettedernièreparoled’unsignedelamain,n’adhérantpasdutoutàl’explicationdesonamie.

–Laprochainefoisquetuleverras,essayedonclapositionallongée,semoque-t-elle.

–Nousn’ensommespaslà!

–Non,jel’avaiscompris,tonvieillotprincecharmantseconservepourlemariage.

–Arrêtedonc!sourit-elle.

Dèsqu’Anaïsaquittélebureau,Délilaessayedesemettreautravail,maisl’articlequ’elledoitrédigersurl’euthanasienel’intéressepasvraiment,elleauneenvied’unautregenre,commeentendrelavoixdel’hommequilafaitfrémir.Sansseperdreenquestionelles’emparedesontéléphonepourlecontacter,sachantpertinemmentquesielleyréfléchitellenesaisirasansdoutepluslecombiné.

Çasonneunefois,puisdeux…trois…Àsix,elleseditqu’ilesttempsderaccrocher,maisellen’yparvientpas,àdix,ildécrocheetprononced’unevoixendormie:

74

–Délila,jevousmanquedéjà?

EllesesentrougiretremercieleCielqu’ilnepuissepaslavoir.

–Çavousmettraitencolèrequejerépondeparl’affirmative?

–Aucontraire.

–Danscecas,oui…vous…

Non,ellenepeutpasluidirecesmots,lereconnaîtreestunechose,leprononcerenestuneautre.Elleseravise.

–Est-cequ’onpourraitsevoir?

–Biensûr.Je…Écoutez,laissez-moim’organiseretjevousappelleplustard.

–Vousaveztoujoursmacarte?

–J’aimieux,votrenuméroestenregistrédansmontéléphone.

–Danscecas,j’attendsvotreappel.

–Àbientôt,chèreDélila.

Ellesentsoncœurtambourinerdanssapoitrineàcesmots.Est-elleréellementchèreàsoncœur?Sansdoute,sinonilnelediraitpas.S’illavoulaitseulementenpositionallongée,çafaitbienlongtempsqu’ilauraitessayédel’ymettre.

–J’aihâte.

Ellel’entendsourire,puisilraccroche.

Elledoitpatientertoutelajournéeavantderecevoirl’appeltantattendu.

EllesaitbienqueSullivanLancasterestunhommetrèsoccupé,maiselleaimeraitpasserplusdetempsaveclui.Quoiqu'ilensoit,lerendez-vousestfixé.Elleleretrouveradevantlechâteauqu’ilarécemmentacquispourunevisiteguidéeprivée.Elleatellementhâted’yêtre,l’endroitlafascine.

–Délila?Claudeveuttonarticle,informeAnaïsenpassantlatêtedansl’embrasuredelaporte.

–Oui,ilestprêt.

Mêmesiçaaétélongetlaborieuxdeseconcentrer,elleaquandmêmeréussiàrédigercefichuéditorial.

Anaïss’approcheetprendlafeuillequesonamieluitend.

75

–JeretrouveSullivancesoir,rapporte-t-elle.

–Ehbien,essayedel’embrasserpourdevraicettefois,ricane-t-elle.

–Maistuvasarrêter!sourit-elle.

Anaïsrouledesyeuxenriant,puiselleposeundernierregardsurlablonderaviequ’elleaenfaced’elleavantdepivoter.Aprèsquelquespas,ellevirevolteetrevientverselle.

–Tuasquoidanslecou?

–Oh!

Délilaposesamainsursespiqûres.

–Ilparaîtraitqu’unehorriblearaignéesesoitglisséedansmonlitcettenuit.

–Araignéepluslimeàongles…faisgaffeavecquitudors!s’amuse-t-elle.

Elles’approcheencorepourregarderdeplusprèslesblessures,effectivementcettesatanéebestiolenel’apasloupée.

Commeconvenu,àlatombéedelanuit,Délilaseprésentedevantlagrilleduchâteau.Lesvampiressonttousagglutinésderrièrelafenêtredudernierétageàregardercettepoupéeblondeaveclaquellejouel’undesleurs.

–Pourquoitularamènesici?questionneRosalie.

–L’endroitoffredenombreusespossibilitésetellenepeutpasm’échapperpeuimportecequ’ellechoisiradefaire.

–Pourquoimaintenant?Tun’avaisjamaisfaitçaavecunehumaine,s’étonneBastian.

–Parceque,mesamis,cettehumaineestàmoi.Aucundevousnepourrameleprendre,jel’aimarquéelanuitdernière.

Lesyeuxs’écarquillentalors,Sulliafinalementréussi.

Ilnepouvaitpasprendrelerisquedelafaireveniriciavantdelafairesiennesinonsescongénèresauraientpulaluiprendre,mêmes’ilestconscientqu’aucunn’auraittentéunetellemanœuvre.Aucunàpartpeut-

êtreNarcissequinelesfréquentequedepuispeuetenquiSullinepeut76

pasavoiruneentièreconfiance.

–Ellepenselechâteauvideetj’aimeraisqueçacontinue.

–Tuneveuxpasqu’ons’amuseavectoi?s’intéresseJosephte.

–Non.Jeveuxquevouspartiez.

C’estlapremièrefoisqu’ilamènesaproiesurunsigrandterraindejeu,ilrefusedepartager.Uneautrefoispeut-être…cesoirc’estnon.

Quandlechâteauestréellementvide,SulliensortpourretrouverDélilaquivientdepasserlagrilleenferets’avanceverslaported’entrée.Sonvisages’illuminedèsqu’ellelevoitvenirau-devantd’elle.

–Bonsoir,murmure-t-elleàsahauteur.

–Jesuisravidevousrecevoirchezmoi.

Elleregardeseslèvresetnepeuts’empêcherdesourireenrepensantauxparolesdesonamie.

Ehbien,essayedel’embrasserpourdevraicettefois.

–L’endroitestmagnifique,complimente-t-ellepoursedonnerunecontenance.

Ilnemanqueraitplusqu’illavoits’attardersursabouchequisemblefaitepourlesbaisers.

Sansplusattendre,Sulliluifaitvisiterl’intérieurpoussiéreuxduchâteau.Lespiècessontvidesetimmenses,lesmurssontpourlaplupartdécrépits,alorsquecertainssontornésdesomptueuxtableaux.Leplafondblancàl’origineestloindel’êtreactuellement,ets’effriteaumoinsautantquelesmurs,sicen’estplus.L’endroitseraitparfaitpourenfaireunmusée,maispaspouryvivre.DélilaimaginequeSullivanvadépenserunefortesommed’argentpourrénovercetteruine.Lechâteausembleenplusmauvaisétatmaintenantqu’ellepeutvoirl’intérieur.

–Oùvivez-vousenattendantquelestravauxsoientfinis?

–J’aiunesuiteàl’hôtel.

Évidemment!Qu’imaginait-elle?Qu’ildormaitdansl’unedeschambresduhaut?

–Jepréfèrequenousterminionslavisiteici,déclare-t-ilquandelleposesamainsurlaramped’escalierqu’elles’apprêteàgravir.

77

–Pourquoi?demande-t-elleenregardantcequisetrouveau-dessusd’elle.

–L’escaliern’estpassûr,touslesentrepreneursquej’aivusm’ontfortementconseillédenepasm’yaventurer.

–Dommage.

–Lapropriétéestimmense,allonsnousypromener.

ElleesquisseunsourirepensantdenouveauàAnaïsquiseraitmortederiresiellelesvoyait.Ellesait

quesacopinepasselasoiréeavecClaude–

beurk!–etelleimagineaussiqu’ilsnevontpasmarcherendiscutant,çafaitvieuxcouple…oujustesortieentreamis.Enfait,elleestentraindeleréaliserensuivantSullivanàl’extérieur,ilsnesontriend’autrequedesamis,etencorec’estunbiengrandmot.Sivraimentellel’intéressaitd’uneautremanière,ilyauraiteudesgestesoudesindices,maislàc’estlecalmetotal.Elledoitserendreàl’évidence,elleneluiinspirepascequeluiinspireàsonêtre.Peut-êtremêmequ’elleluifaitperdresontempsetqu’ilamieuxàfairequedepassersessoiréesensacompagnie.

Ehbien,ellearéussi…ellesesentmalàl’aisemaintenantetvoudraits’enaller.

–Euh…écoutez,articule-t-elleens’arrêtantdevantunestatuedefemmenue,jecroisquejevaisrentrer.

–Siletourdelapropriéténevousintéressepasonpeutfaireautrechose.

–Non,cen’estpasça,c’estque…

Ellesoupire.Pourquoiest-cesidifficiledeluiconfiercequ’elleressentencetinstant?

–Vousdevezavoirmieuxàfairequebavasseravecmoi.

Voilà,c’estdit.

Illaregarded’unairsuspicieux,sedemandantpourquoiellepenseunechosepareille.S’ilavaitmieuxàfaireiln’accepteraitpasdelavoir,illeluiauraitdéjàditdepuislongtemps.Peut-êtrequelablondasseabesoind’unpeupluspournepasluifilerentrelesdoigts.Iladécidédes’amuseravecelle,ilaréussi,parilnesaitquelmiracle,àlamarquersanslatuer…

ilnevapasrenonceràsonplaisirmaintenant,etsurtoutpassanssebattre.

Alorssil’humaineabesoindepluspours’enconvaincre,ilestprêtàlelui78

donner.

–Iln’yanulautreendroitoùjevoudraisêtreprésentement,souffle-t-ilencaressantsajoueduboutdesdoigts.

Elleréalisequepeut-êtreelleafauxsurtoutelaligne,maisellepréfèreresterprudenteetnepaspenser.Dumoins,pasencore.

–Jenevoulaispasvouseffrayerenallanttropvite,maissivousprenezmapatiencepourdudésintérêtalorsjemedoisd’agir.

DesesdoigtsfroidsilcaresseleslèvresdeDélilaengendrantuneaccélérationdesonpoulsqu’ilperçoitinstantanément.

–Puis-jevousembrasser?

Ouiettoutdesuite!

Elledescelleseslèvrespourlesupplierdelefaire,maisaucunsonnesortdesagorge,elleestbientropcaptivéeparcellesdel’hommeenfaced’elle.L’instantsuivant,ilécrasesabouchecontrelasienne,sansl’embrassertoutefois,c’estcommes’illuttaitcontre–quelquechosed’invisiblepourelle–sasoifdesang.C’estaussipourçaqu’ilgardaitsesdistances,lesangdeshumainesestunvéritableproblèmepourluiquandilnes’estpasnourri.Certes,iln’apasbesoind’enboireaussisouventqu’unjeunevampire,maisc’estcommeunedrogueetilenveut,soncorpsenréclame.Ilestsoumisàunenouvelleépreuvedelaquelleildevrasortirvainqueur,maisçasemblesicompliquéd’autantquelaveilleilagoûtésonsangetqu’ilavaitunesaveurdélicieuse.

Ildéposeunprécautionneuxbaisersurseslèvres,puisunautreavantdereprendreunsouffledontiln’apasbesoin.Ilréessaieavecplusdedouceuretdelenteur,tentantdemaîtrisercetteenviegrandissantedeplantersescrocsdanssagorge.Çaluiatellementcoûtédel’apprivoiser,delamarquer,etdel’amenerjusqu’ici…ilpeutenfinjouervraiment,ilnevapasdéjàtoutgâcher.

IlposesesmainsdechaquecôtédelatêtedeDélilacommeillaisseseslèvreseffleurerlessiennes,puisilsentlesbrasdelajeunefemmesenouerautourdesataille.S’ilveutêtreconvaincant,ilvadevoirluidonnerunvraibaiser,commelaveille,mêmesiellen’enaaucunsouvenir.Maisc’étaitdifférentàcemomentparcequ’ilsavaitqu’aprèsilallaitpouvoirgoûtersonsang,cesoir,ilnepourrapas…ilsecontenteradelaterroriser,delafairehurleretcouriràtraverstoutelapropriété.Ilsenourriradesa79

peuràdéfautduliquidechaudquicouledanssesveines.

Ilprendlecontrôledelui,desoncorps,desesdésirs,etembrasseDélilacommeill’afaitlaveilleàunedifférenceprès,quandelleglisselalanguedanssabouche,illalaissefaire.Ellepeuttrèsbiensentirsescaninesquis’allongentsousleplaisir,ils’enmoque.Çafaitbienlongtempsqu’iln’avaitpasdonnéunbaiserd’unetelleprofondeuràunefemme,ladernièreendatec’étaitLilith.Maisavecellec’étaitréel,vrai…avecDélilatoutn’estquefacticité.Mêmes’ilacceptedereconnaîtrequec’estplutôtagréable.

Illaisserapidementglissersesmainslelongdesesbrasavantdel’enlacerd’ungestepossessif.LeurbaisersepoursuitplusieursminutesdurantlesquellesDélilaparvientàreprendresonsoufflesansmettrefinàleurétreinte.C’estSulliquidécidequ’ilenesttempsavantqu’ellenerendel’âme.Ilsentl’accélérationdesoncœuret,àterme,cen’estbonnipourluinipourelle.

–Ai-jeétéassezconvaincant?

Illagardecolléecontreluienluiposantcettequestion,cettehumaineàquiilfautplusieurssecondespourseremettredecebaiserdivin.

–Parfaitement,assure-t-elleensuite.

–Danscecas,nedisplusquejepréféreraisêtreailleursplutôtqu’avectoi.

Elleestsurprisequ’illatutoie,luiquimettaitunpointd’honneurànepaslefaire,maisc’estsiagréablequ’ellesourit.

–Pourquoitusouris?

Est-celemomentdeluiavouerqu’elleestentraindetomberamoureusedelui?Peut-êtrepas.C’estsansdouteencoretôt.

–Parcequejesuisbien.

–Tum’envoisravi.Maintenantquetuesconvaincuedemabonnefoi,veux-tuvisitermapropriété?

–Avecplaisir.

Ilbrisel’étreinteets’apprêteàmarcherpourcommencerquandilsentqu’elleliesamainàlasienne.Enmêmetempsilauraitdûs’yattendre.

Maintenantelledoitcroirequ’ilenpincepourelleetqu’ilsformentun80

couple.Ahceshumaines!Siàchaquefoisqu’ilavaitembrasséunefemmeoucouchéavecelleuncouples’étaitformé,alorsilposséderaitsonpropreharem!Maisiladéjàremarquéqueleshumainesdéveloppentdessentimentsplusrapidementquelesvampiresetqu’ellesselientavecplusdefacilité.Ils’yaccommodera.C’estunjolicompromis,iltrouve.Illuiprometmontsetmerveillesetelleoublieleshorreursqu’illuifaitsubir.

81

Chapitre10

–Ici,jepensefairecreuserunepiscine,informeSulliendésignantl’arrièreduchâteauàDélila.

Çafaitunedemi-heurequ’ilssepromènentetqu’ilinventen’importequoisurlesfuturesrénovationsduchâteauquin’aurontjamaislieu.

–Ceseraunvéritablecoindeparadisquandceserafini.

Finalement,Délilapensequ’ilpourraitsansdouteréussiràenfaireunegrandeetbelledemeurefamiliale.Iladesidéesincroyablespourembellirl’endroit…unendroitqu’elleaimeraitpartageraveclui.

–J’aimêmeuneforêtsurplace.

Illuidésignelesarbresdontlefeuillages’agiteaurythmedulégerventquisouffle.L’endroitestplutôtsombreetpeuaccueillant,cen’estpasl’heured’yfaireunepromenade,pourtantSullivanl’yentraîne.

–Jenecroispasque…articule-t-ellequandill’emmènesouslesarbres.

–Onnecraintrien,tusais.

–Oui,mais…

Illuiplaquebrutalementledoscontreuntronc,bloquantlarespirationdelajeunefemme.

–Nemecontredispas,pasaprèscequej’acceptedefairepourtoi.

Elledéglutit.Qu’est-cequ’ilraconte?Sonregardterriblementsombreetmenaçantsurellelaterrifie.C’estincroyablecechangementdecouleuretdesentimentdanssesyeux.Habituellement,ilssontd’unnoirluisant,dégageantquelquechosedesympathique,attrayant,terriblementexcitantmême…là,ilssontd’unnoirterrifiant,menaçant,àglacerlesangd’effroi.

82

–Jepeuxsentirtapeur.

Illarenifleenfermantlesyeuxcommes’ilinspiraitdesvapeursdedrogue.IlouvresespaupièresdévoilantdesyeuxrévulsésparunplaisirqueDélilanecomprendpasetquil’épouvanteauplushautpoint.Ilinclinesatêtecommeleferaitunmaladementalalorsqu’elleperçoitsansdifficultéqu’ilatoutesatête.Peut-êtreest-iltempsdehurler.

Malheureusement,aucunsonnesortdesagorge.

–Tusentaisledésirtoutelasoirée,c’estétonnantlavitesseàlaquelletesémotionschangent.

–Qu’est-cequevousmevoulez?

Ellel’atutoyéaprèsleurfameuxbaiser,maislà,ellen’enéprouveplusaucuneenvie.

–Justem’amuser.

Ilcaressesescheveuxblonds.

–Jen’aimepascettecouleur,c’estl’élémentdéclencheurdemafolie.

Ellen’osepasendemanderdavantagemêmesiellevoudraitsavoircequ’ilreprocheàsacouleurdecheveux,lefaitqu’illuiparled’unecertainefoliel’inquiètedavantage.

–Onvajouerunpeu,touslesdeux.

Elleestpersuadéequ’ilvalavioler,maiscequ’ellenecomprendpasc’estlepourquoi.Elleauraitvolontiersconsentiàunerelationcharnelleaveclui…cesalementeuretbeauparleur!

Elledéglutitquandilenserresoncoud’unemain.

–Tusenssibon…tapeurmefaitsaliver.

Unmalademental!Voilàsurquoielleesttombée.

Ilapprochesonvisaged’elleetlarespireencore,ellesentdélicieusementbon.Cetteodeurdeterreurquiémanedesonêtrelefaitpresqueatteindrel’extase.C’estalorsqu’ilsedemandecequ’ilressentiraitenlaforçantàavoirdesrapportssexuels.Illuidévoileraitsanatureavantdelavioler,

elleseraitsûrementaucombledel’horreuretalorsilpourraitenrécolterl’essenceetjouircommejamaisauparavant.

C’estuneidéeàcreuser.

83

D’abord,illâchelamainenserrantsoncouetsereculededeuxpas.

Délilatentedereprendreunerespirationnormale,envain.Alorsellepivoteetcourtaussivitequesesjambesleluipermettent.Ellenevoulaitpasentrerdanscettesombreforêt,maisils’avèrequefinalement,c’estpourellelemeilleurendroitpoursecacher.Cequ’elleignorec’estquel’hommequilatraquevoitaussibienqu’enpleinjour.

Elleseheurteauxarbresouauxbranchesetseprendsouventlestalonsdanslesroncessibienqu’elledécided’abandonnerseschaussures.Ellecavaleencoreavantdes’arrêterenconstatantqu’ellen’entendpaslemoindrebruit.CefoudeSullivannelasuitpas.Quevoulait-ilalors?

Qu’elles’engouffredanslesprofondeursdecetteforêt?Quelintérêt?

Elleregardeautourd’elle,maisnevoitquasimentrien,seulelafaiblelumièredelaluneéclairecettenuit.

Elleattrapesontéléphonedanslapochedesonjeanavecl’intentiond’appeleràl’aide,maisellenecapteaucunréseau.Cen’estpasunesurpriseétantdonnélelieuoùelleest.Ilfautqu’ellesorted’ici.Elleleremetdanssapocheetréfléchitàl’endroitoùellesetrouve.C’estassezdifficile,maisellepensequesiellecontinueparladroite,ellefinirapartombersurleportail.Iln’estpasverrouillé,ellepourradoncs’enallerfacilement.Mêmesicen’estpasletermequ’elleauraitemployé.

Elledécidedemarcherenfaisantlemoinsdebruitpossible,maislesfeuillesmortescraquentsoussespasetc’estpeut-êtreencoreplusstressantquedenepassavoiroùestSullivan.

Soudain,ellesentdesmainsenserrersesépaules,ellesursauteencriant.

–Tunecoursplus?

EllereconnaîtlavoixdeSullivan.Elletressaille.

Illaplaquecontrel’arbreaprèsl’avoirfaitpivoter.Ilpeutlirelaterreurdanssesyeux,elleestmerveilleuse.Quellebonneproieellefait!

Ilcaressesagorge,enpassantsesdoigts,ilsentlesdeuxmarquesqu’illuiafaites,cellesquinepartirontjamaisparcequ’ellesignifiequ’ill’amarquée,qu’elleluiappartientjusqu’àlamort.Maiselleleseraavantdes’inquiéterquecequ’elleprendpourdespiqûresd’araignéenedisparaîtpas.

Ilapprochesonvisagedesagorgeetlèchelesmarquesqu’illuia84

infligées,c’estàcetinstantqu’ilseprenduncoupdegenoumonumentalentrelesjambes.IlseplieendeuxsousladouleuralorsqueDélilaenprofitepourluiéchapper.

–Petitegarce!crache-t-il.

Maisçarendlapartiedechasseplusexcitante,elleestbienpluscourageusequ’ilnel’imaginait.Enmêmetemps,ellecroitavoiraffaireàunhomme,commeellesetrompe!

Sullilarattrapeunpeuplusloinetlaplaquedenouveaucontreunarbre.

–Onserebelle!s’amuse-t-il.

Ilouvrelabouchepourluidévoilersescaninesallongées,assoiffédedésiretdesang.

Délilaétouffeuncri.Unvampire?Commentest-cepossible?

Sulliritenentendantsespensées.Ellealamêmeréactionàchaquefois.

Çan’existepas,blabla…c’estdanslesfilmsetleslivres,blabla…

Commetutetrompes,humaine!

Ilabaissesonvisagejusqu’àsagorge,ressentantl’appeldusangdanstoutsoncorps.Illèchedenouveaulesrestesdemorsurescommeilmaintientbienenplacelesjambesetlesbrasdesaproiebeaucouptropmobileàsongoût.Ilfaitensuiteglissersescaninescontresapeau,c’estsibon.Ilperçoitledouxsondespulsationsrapidesdesoncœur,desonsangaffluentdanssesveines.Ilaenviedelagoûter,justeunpeu…ilestentraind’atteindreunplaisirqueseulslesvampiresconnaissent,ilestencommunionparfaiteavecleliquidedeviequicouleenelle.Quandsoudain,ellebrisetoutavecquelquesmots:

–Mords-moi.

Elleditçaavecunteldésirdanslavoixqueçan’aplusriend’excitantpourlevampire,alorsilseredresseetplongesonregardnoirdanslesien.

Elleadesyeuxbleusmagnifiques.Ilseréprimanded’avoirunetellepenséeetreprendsonairagressif.Cetteidioteabrisésontrip.Ilrêvedeluiinfligerunebonnecorrection,maiss’illafrappe,elleauradesmarquesetalorsellechercheraàserappelerpourquoi.Ellefiniraparcomprendrequ’ilsepassedeschosesanormalesparcequ’elleestloind’êtrebête.Enfait,elleestplutôtfutéeetfouineuse.Ilauraitdûs’endouterenlachoisissant,ellen’estpasjournalistepourleprestigedumétier.

85

–Tunem’amusesplus!

Illuiempoignelebrasetlacontraintàlesuivrehorsdecetteforêtprivée.Ellenes’enplaintpas,quelquepartilluifacilitelatâche,ellevoulaitensortirégalement.Parcontre,quandelleaperçoitleportail,ellesedébatpourqu’illalâche,cequ’ilnefaitbienévidemmentpas.Alorselleoptepouruneautresolution,elleluimordlebras.

–Ah!Putain!peste-t-ilenleretirantaussitôt.

Elleenprofitepourcourirendirectionduportailalorsqu’ilregardelaplaiecicatriser.

Délilaéprouveunsoulagementenatteignantlagrilleenfer,maisilestdebiencourtedurée,carelleserendrapidementcomptequedeschaînesl’enserrent,elleestprisonnière.

–Tuasfinidejoueràl’héroïne?demandeSulliensepostantàcôtéd’elle.

–Qu’est-cequetuveuxdemoi?

Ilsouritenvoyantqu’ellerecommenceàletutoyer.

Cequ’ilveut?Sapeur,sonsang…maiscen’estpasdrôlesielleestrésignée,cequ’ellesembleêtreencemoment.Ilveutqu’ellesebattepoursavie,cequ’elleaapparemmentdécidéd’arrêter.

–Regarde-moi,Délila.

Elleobéitsansseheurteràunregardnoirprofonddeprédateur,maisbienàceluideSulli,duvrai.

Ilapprochelentementsamaindesonvisage,ellead’abordunmouvementderecul,puisellelelaissefaire.Ilréitèrelemêmegesteavecsonautremain.

–Nousavonsdiscutépendantlavisiteduchâteau…

Illuilaissetoussessouvenirsdelasoiréejusqu’àleurbaiser,eteffacetoutcequisetrouveàpartirdumomentoùill’aplaquéecontreunarbre.

Ilneveutplusjoueravecunefemmeobéissante.

Ilfrôlesonvisagequandilafinidel’hypnotiser.

LecœurdeDélilabatlachamade,cequ’ellemetsurlecomptedutroublequ’elleéprouveaucontactdelamaindeSullisursafigurealorsquec’estdûàlapeurqu’elleressentaitiln’yamêmepasdeuxminutes86

enverscethommejustement.

–J’aipasséunetrèsbonnesoirée,confie-t-il.

Mêmesic’estvraiqu’elleauraitpuêtremeilleure.Ilvoulaitlaterroriserdavantage,maispaslarésigner,ilvoulaits’introduireenellealorsqu’ellesedébattraitdetoutessesforces,horrifiéeparsonacte,maisaussiparsanature.Ceserapourlaprochainefois.

–Moiaussi.

Ellesaisitsamainquandillalaisseretomberetenembrasseledosavectendresse.Safroideurneladérangeplus,d’ailleursellen’yajamaisvraimentfaitattention.

–Jeveuxterevoirdemain,susurre-t-ilenprenantsamaindanslasienne.

–Oui.

–Jeprépareraiunpique-niqueàl’arrièreduchâteau…quelquechosederomantique.

Elleesquisseunsourire.

Ilestconscientd’avoirgagnéunpoint.Leshumainesaimenttoutcequiestromantique.Etilnepensepassetromperenpensantquecelle-cipréfèreunpique-niquesurunecouvertureplutôtqu’undînerdansungrandrestaurant.Etc’esttantmieuxpourlui.

–Jevaisteraccompagneràtavoiture.

Ilouvrelagrille,qu’aucunechaînen’entrave,etl’accompagnejusqu’àsavoituregaréeàdeuxmètresdelà.

Délilaendéverrouillelesportièresavantd’ouvrirlasienne.

–Onseretrouvedemainiciàlamêmeheure?

–Avecplaisir.

Oui,duplaisirilespèreenavoir…etbienplusquecesoir.

Elleposetimidementsesmainssurseshanches,s’agrippantaupullqu’ilporte,levantunregardmaladroitsurlui.Elleledésire,maisn’osepasfairelepremierpas.

Sulliquilitfacilementdanslespensées–plusaisémentchezleshumainsquelesvampires,cependant–n’aaucunmalàdéchiffrerce87

qu’elleveutalorsill’enlaceàsontouretapprochedoucementseslèvresdessiennes.Luiquipensaitqu’unbaiserluisuffiraitàlaconvaincredesasincéritéenversellecomprendqueceneserapaslecas.Elleenvoudratoutletemps.Danslamesuredupossible,ilpourralesluidonner,maissousuncontrôleabsoludelui-mêmenéanmoins.SeslèvresentrentencontactaveccellesdeDélilaetsiçapouvaitresterainsi–chaste–çal’arrangeraitbeaucoup,maisilcomprendqueceneserapassisimplequandilsentsalanguecaresserlasienne.Ilseprêteaujeudelanguesqu’elleluiproposeenréfléchissantqu’ilsuffiraitd’effacerleursdeuxbaisersdesamémoirepourenêtredébarrasséàl’avenir,maiss’ilfaitça…

bonsang,c’esttellementbon.Illapressedavantagecontrelui,sedélectantd’ellecommesielleétaitleplusdélicieuxdesmets,sentantquelquechosesepasserdanssoncorps.Maisc’estimpossible,ildoitrêver,iln’estpassurlepointd’avoiruneérection.Ehbien,si.Impossible.Çaneluiarrivejamais,pasdecettefaçon.Ils’écarted’elleavantqu’ellesentequequelquechosededurseformedanssonpantalon.

–Onsevoitdemain,prononce-t-ilencaressantseslèvresavantdelaissertombersamain.

–Oui.

Illaregardemonterdanslavoitureetpartir,commeleferaitunhumainamoureux.Toutcequ’il

n’estpas.Maisc’estquoicedésirqu’ilasentienlui?Ellen’avaitpaspeur,non,illasentaitexcitée…trèsexcitéemême,maispasapeurée.Unetellesensationn’auraitjamaisdûéveillerunepareilleréactiondesoncorps.Ilmetçasurlecomptedelafrustration.

Maisfrustrationdequoi?D’ungestedelamain,ilenvoievolersesréflexions.

DélilaetSullivansevoientlejoursuivant,puisencoreetencore…etainsidurantpresqueunesemaine.Àchaquefoislescénarioestidentique:unebaladeauchâteauetunetraquequifinittoujoursdelamêmemanière:parlarésignationdeDélila,sibienqu’ellecommenceàneplusamuserSulli.

Ilad’ailleursprisunedécision:cesoirc’estlegrandsoir.Ilaprévudelaretrouverdanssapropriétéetilcomptes’amuseravecelle,maismoinslongtempsqu’habituellement,ilneveutpasqu’elleatteignel’instantdecapitulation.Illatraqueraplusrapidementetlavioleraquandelleseraau88

combledelapeuretluijouiracommejamaisensenourrissantdesapeur,sonsexeengorgéenelleetsescrocsaspirantsonsang.Ilbandedéjààl’idéedudéroulementdelasoiréeàvenir.

–Hum…chéri,tuveuxuncoupdemainpourfaireredescendretoutça?questionneJose.

–Laissetomber.

–Ahvraiment?Àquoitusongeaispouravoir…unetelleréaction?

Ellelorgnesursonentrejambealorsqu’ilestallongéetadossécontrelatêtedelit,unmagazineàlamain.Maisétantdonnéqu’iln’estenriensexuel,Josephtesaitparfaitementqu’iln’estpourriendanslaréactionducorpsdeSulli.

–Àmasoirée.J’arrêtedejouer.

–Sitôt?Nemedispasque…

–Si.

–Sulli!

–Cen’estpasdrôle!Elleestexcellentedanssonrôled’humaineterrifiée,ellesedébat,cequej’aimedavantage,maistropprécipitammentelleserésigne.

–Danscecas,stoppelejeuplustôt.

–Jerêvede…

Illuiracontecedontilaenvieaveccettehumaine:laterrifier,puislavioleravantqu’elleabdique,etlamordre.

–Jecomprendstaréactionmaintenant,etmoiquicroyaisbêtementquetuavaisuncœur.

–Uncœur,Jose?

Oui,uncœurquibatmêmesilesienestaureposdepuisdessiècles.

Durantunmoment,elles’estimaginéqu’uneoncedeviebrûlaitenSulli,quepeut-êtrel’humainedéclenchaitdeschosesnouvellesdanscecorpsdeglace.Elles’esttrompée.Enfait,depuisquelevampireaétémisenpièce

–psychologiquementparlant–parLilith,iln’ajamaisplusfaitconfianceàunefemme,àuneblondedesurcroît.AvecelleetRosalie,c’estdifférent,carilssontamis,etSullimetunpointd’honneurànepasavoird’histoired’amouravecuneamie,mêmesiparfoisilneseprivepaspourunepartie89

desexeavecl’uned’ellesvoirelesdeux.Cequiestdeplusenplusrarepuisqu’iln’appréciepluscettefaçondes’exprimer.

Sulliricanedel’idiotepenséedesonamiequiaimeraitlevoirheureux.

Aprèstoutcetemps…Enfin,ilalarancunetenace.Toutcequ’elleespèrec’estquejamaisiln’auraàseretrouverenfacedeLilith,pouruneraisonoupouruneautre.

–Soisgentilavecl’humaine,Sulli…pourlemomententoutcas.

Ilsoupireavantdeluiraconterqu’ilasentilaprésenced’autresvampiresdansleStéréo-nightclubladernièrefois,etquecen’estpasfatalquelesautoritésremontentàeuxs’ils’octroyaitcepetitplaisir.

–Etpourcejolirenflemententretescuisses?

Elleluijetteunregardtaquinalorsqueluin’éprouvepaslemêmegenred’enviequ’elle.

–Laissetomber,jet’aidit.

90

Chapitre11

Sullil’embrassecommejamaispersonnenel’aembrassée,Délilas’agrippeàcethommeplacéentresescuissesquivaetvientenelle,luifaisantdécouvrirdessensationsnouvelles.Ilestendurant,celasemblefairedesheuresqu’ilssontunisdecettemanièresiintime.Sesmainsfroidessursoncorpsbrûlantsontundouxcontrastequiluifaitatteindrel’extaseencoreplusrapidement.

–Ohoui,gémit-elle.Oui…

Elleleserrecontreellealorsqu’illapilonneencoreettoujoursdecoupsdereinsplusdévastateurslesunsquelesautres,jusqu’àcequ’elleaccèdeàunorgasmefulgurantcommejamais.Ellenesoupçonnaitmêmepasqu’onpuisseprendreautantdeplaisiravecunhomme.Puiselleroulesurlecôtéetselaisseenserrertendrement.Ellesesentsombrerdanslesommeiletvoitsonamantquitterlelitsansqu’ellenepuisserienyfaire,ilfautpourtantqu’elleleretienne.

–Sulli,murmure-t-elle,net’envapas.

Dansunultimeeffort,Délilaouvrelesyeuxpourconstaterque…lapièceestvide.Ellevient

simplementderêver.Maisçasemblaittellementréel.Elleauraitvouluquecesoitréel.Ellesoupireavantdeposersesyeuxsursonréveilquiaffiche3h50.Cen’estpasaprèsunsongepareilqu’elleréussiraàserendormir!

Chosequisevérifiequandsonréveilsonneetqu’ellevenaitàpeinedefermerlesyeux.Lapoisse!Elles’extirpedifficilementdulit,pensantàsasoiréeavecSulli,soiréedurantlaquelleelleserainévitablementfatiguéeàcausedumanquedesommeil.

UnelonguejournéeauJournaldébutedèsqu’elleymetlespieds.Elleaquelquesinterviewsàréalisersurleterrainets’yrendsansperdrede91

tempsavantdesecalerdanssonfauteuilpourrédigerlesarticles.

–Délila?

Anaïsentredanslebureauavecunepiledefeuillesdanslamain.

–Claudeveutqu’onrédigeunarticlesurlesboutiquesdeGregMonders.

Commesicethommepouvaitêtreintéressant!Toutesonentrepriseestenfaillite!

–Pourendirequoi?Dansdeuxmoisilauramislaclésouslaporte.

–Non,non…C’estlàquec’estintéressant.Lafailliten’estplusd’actualité.

–Pourquoi?

–C’estcequeClaudeveutqu’ondécouvre.IlsoupçonneMondersd’avoirobtenuunegrossesommed’argent.

Ouais!Unarticlepourrisansintérêtpourelle.

–Dis-moiplutôts’ilyaeuunnouveaumeurtre.

–Non,rien.Tuépluchesçaetonsevoitplustardpourenparler,décideAnaïsenposantlapiledefeuillessursonbureau.

Super!

–Disdonc,lespiqûressonttoujoursvisiblesdanstoncou.

Délilaposesamaindessus.

–Bientôt,ellesn’yparaîtrontplus.

–CommentsepassenttessoiréesavecleDuc?

–Undélice!Cettenuitj’aifaitunrêveérotique…carrémentpornoàvraidire.

–Aveclui?

–C’étaitsivrai,j’avaisl’impressiond’yêtrecommesijerevivaisunsouvenir.

–Ahouais!Ehbien,commencedéjàparcoucheraveclui.

Anaïsricane,aimanttorturersonamie.

–Bon,jesaisquetupréfèreslesaraignéesetleslimesàongles,mais92

jepariequetonSullivanestbienmieuxmontéquelesdeuxréunies!

–Veux-tu!

Lesfillespartentdansunéclatderire.Délilarougitrienqu’enentendantlesobscénitésdesonamie,mêmesic’estvraiqu’elleabienenvied’essayerlapositionallongéeavecsonpetitami.

Unenouvellefois,DélilaretrouveSulliderrièrelechâteau,surunecouvertureoùbrûlentquelquesbougies.Ellepassetoujoursdesmomentsmagiquesavecluiets’étonneàchaquefoisqu’iln’essaiepasd’allerplusloin.Ilsdiscutentpourlaplupartdutemps,toutletempsenfait,etmêmesic’esttrèsagréabledeledécouvrir,elleaimeraitl’embrasserdavantageetfairepasserleurrelationàlavitessesupérieure.D’ailleurs,elleabienunepetiteidéepourça.

–J’airêvédetoicettenuit.

–Vraiment?J’espèrequej’étaisungentleman.

–Toutdépenddequelpointdevuel'onseplace.

Ellesourcillecommeelleserapprochedelui.Ilssontassissurunecouverture,presquecollésl’unàl’autre,maisplusdel’initiativedeDélilaquecelledeSulli.Luipréfèreladistance.

–Jetesuggèredemeracontertonrêve.

Iltentedes’écarterd’elleens’appuyantsursescoudes,ilpeutsentirsondésiretcen’estpasl’odeuràlaquelleilaspirepourcetteultimesoirée.

–Çaneseracontepas,c’estplutôtquelquechosequisemontre…

quelquechosedugenretrès…trèsintime.

Ilesquisseunsouriremalgrélui.Ellearêvéd’euxentraindes’accoupler.Riendeplusbanalpourunehumaine.Néanmoinsdanssoncas,ilpréfères’enassurer.

–Raconte-moi,Délila.Jeveuxt’entendremesusurrertoutcequenousfaisions.

Elleposesamainsursacuisseavantdelaremonterjusqu’àsonentrejambe,lefaisantfrémirquandellecaressecequ’ellenevoitpasetquiest,pourlemoment,souscontrôle.Toutenpoursuivantseseffleurementsentresescuisses,elleluiracontetoutcequ’ilsfaisaientdanssonrêve.

93

D’abord,Sulliressentunetensiondanssonmembremisàl’épreuve,maistouts’éteintbrusquementquandilréalisequ’elleestentraindeluiraconterleursecondeétreintecharnelle,cettefoisoùill’aprisemoinstendrementaprèsl’avoirmarquée.

Impossible.Iltentedeseconvaincrequecen’estqu’unecoïncidence,maissansrésultat.Toutcelaleconfortedanssadécision,ildoitenfiniravecellecesoir.Ilnesaitparquelmiracleellepourraitserappeler,maisilrefusedeledécouvrir.

Quandelleaterminésonhistoire,elles’approchedavantagedeluipourfaireglissersalanguesursalèvreinférieure.Illalaissefaireetrépondàl’invitationlorsqu’elleluiproposeunbaiserprofond.Ilfinitmêmepars’allongersurlacouverturecommeelleselaissetombersurlui.Àcemoment,ill’enlace,unemaindanslebasdesondossousledébardeurrougequ’elleporteetl’autrederrièresatêtepourl’empêcherdefuir.Ilal’intentiondeluimordrelalanguepourcommencer,maisilvoitsonprojettomberàl’eauquandletéléphonedelablondesemetàsonner.Illalibèreàcontrecœur,feignantd’êtrehaletantetdésirantencoresasaveurdanssabouche.

Déliladécrochequandelleconstatequec’estClaude,sonpatron.Àuneheurepareilleçasembleimportantetellenes’estpastrompée.

Sullil’écouteetentendtoutaussibienl’interlocuteur.Ilignoresic’estdemauvaisaugurepourlui,maislejournalistearéussiàmettrelamainsurlesdossiersdelapoliceconcernantlamortrécentedesdeuxfemmes.

–Jesuisdésolée,Sullivan,maisjesuisobligéedepartir.

Oh,ill’avaittrèsbiencompris.Iln’enfinirapascesoiretc’estdangereuxpourluideremettrel’échéanceàplustard,maisilsemblequesonamusementsoitcapabledeluiparlerdecequisetrouvedanslesprécieuxdossiersdelapolice.Lemotserapeut-êtrerapidementlâché,alorsilpourraselaisseralleretelleseralapremièresursalongueliste.

Lesvampiresseronttraqués,maiscommentremonteràlui?Etmêmesiçaarrive,ilmigreraailleursaveclessiens,commeilslefontdepuislanuitdestempssemble-t-il.Finalement,ilcomprendmoinsledésirdeRosaliequ’ilrestediscretpourlemoment.Aprèstout,leurbutestbiendetraqueretdetuer,pasdes’intégrer.

–Disdonc,Délila…

94

Sullivanadopteuntontrèssuavecommeilcaresselajouedoucedelajeunefemme.

–…jen’aipasrêvé,tum’asalluméettuvoudraismelaisserdansuntelétat?

Ilneseraplustrèsconvaincantsielledécidedeposersamainentresesjambesoùrienneconfirmerasesdires.Çaavaitpourtantbiencommencé,maisquandilaréaliséqu’ellecommençaitàsesouvenirsousformed’unrêve,celaacoupécourtaumoindredésirnaissantenlui.

–Jemeferaipardonner.

Jesaisdéjàcomment,chèrepetite.Tuneterésigneraspasquandjejoueraiavectoi,quandjem’insinueraientoitutedébattrascommejamais,etquandjetemordraitutecrisperastellementquetumedonnerasunfabuleuxorgasme.

–Jel’espèrebien,articule-t-il,mettantdecôtésesvéritablesappétits.

Ellesehâtederassemblersesaffairesavantdegagnerleportailenfer,accompagnéeparSullivan.

–C’esttontravailquetulaissessemettreentrenous?

Elleestabasourdieparcesmotsets’arrête,neparvenantplusàtrouverlaforced’avancer.

Réalisantàquelpointsaréflexionétaitidiote,Sullis’excused’emblée.

–Pardonne-moi.Jesaisquec’estimportant.

Ill’attirecontrelui,l’enlaçantavectendresse,chosedontilnesesavaitpascapable.Ilsesurprendàrespirerl’odeurdesescheveuxblondsavantderéaliserqu’ilestentraindeperdrelecontrôle.Lefaitdenepaspouvoirjoueravecellecesoirvalerendrefou.Iln’aurapassadosedepeurenivranteàrespirer,sonmomentdetraqueindispensableàsonbien-être…

ilvadevoirsecontenterautrementetrapidement.

–Jeneteretienspasdavantage,émet-ilenlalâchant.

Délilaréclamenéanmoinsunbaiser,passageauqueliln’écopejamais,alorsilleluidonne,profondetintensecommeàchaquefois.Fortheureusement,riennemenaced’exploserdanssonpantalon.

Illaregardes’enaller,laroutinequandelledémarresoussesyeux,puis,rageur,ilgagneledernierétageduchâteau.

95

Ilestseuldanslademeure,mettantdehorstoutlemondeàchaquefoisqueDélilayvient.Ilfrappedansl’undesmurspourtenterd’exorcisercettepressionquil’habiteencetinstant,maissanssuccès.Ilvaavoirbesoindeplus…ohoui,bienplus.Ilsetransformeenchauve-sourisets’envoleparlafenêtre,agitantsespetitesailesdanslasombrenuit,àlarechercherd’uneproieparcequelasiennel’afrustré.

–Jenesaispascommentvousavezfait,maiscesoirvousêtesmonnouveaumeilleurami,articuleDélilaàl’attentiondeClaudeaprèsavoirpassélaportedesonbureau.

–Tropaimable,soupirel’homme.

Ilestdeboutdevantlalonguetableinstalléedanssonbureau,desdossiersouvertsdevantlui,etAnaïsàsoncôté.

Délilas’approchepourregarderavantd’étoufferuncrid’effroienreconnaissantPeggy.

–MonDieu!Quiluiafaitça?

Ellepeutvoirqueledossierestcomplet,touslesrapportsdepoliceyfigurent,maisleplustragiquecesontlesphotos.Peggyalagorgeensangcommesionlaluiavaittranchéesaufquecen’estpasexactementça,c’estplutôtquelquechosecommedestrous.Elleabienétémordue,déchiquetée,seraitplusconvenabledanscettesituation.

Délilarefoulelehaut-le-cœurqu’elleressentetleslarmesquimenacentdesortir.

–Drewnedoitpasvoirça,parvient-elleàarticuler.

–Noussommestousd’accordsurcepoint,confirmeClaude.

–Vouscroyezvraimentqu’unchienauraitpufaireça?

Claudesecouelatêtepourmontrersadésapprobationcommeilluitendlepaquetdephotos.

Délilalesregardel'uneaprèsl’autre,chaquefoisprisedansunangledifférent.Peggyestmortedessuitesdesesblessuresaucou,çanefaitaucundouteetc’estd’ailleurslaconclusionquiestnotéedanslerapportdulégiste,maisquiafaitça?Minute…Elleserepasselesphotosavantd’ouvrirlabouche.

96

–Oùestpassésonsang?

Ilyenasursagorgecertes,maispasunetracesurlesol.Àmoinsquelecorpsaitétédéplacé.

–Onl’adéplacée?

–Non.

–Alors?

Ellenecomprendpasetregardeànouveautouteslesphotos.

–Elleaétécomplètementvidéedesonsang,c’estdanslerapport,énonceAnaïs.

LesyeuxdeDélilas’écarquillent,c’estimpossible.Quipourraitfaireunetellechosesansenlaisserunegouttesurlebitume?

–Etl’autre?CetteAnnette?

Claudeluidonnelesphotos,Délilan’apasbesoindedemanderlesconclusions,ellecomprendquecesontlesmêmes.Lascènedecrimeestidentique,lemodeopératoireestinvariablementlemême.

–Lapoliceenpensequoi?

–Vampire.

Claudealâchélemot.

Unvampire?D’abordDélilarit,maisquandelleperçoitl’horreurdanslesyeuxdeClaudeetAnaïsellecomprendquec’estloind’êtreuneblague.

Sonpatronluitendd’ailleurslerapportoùsetrouvecetteconclusionabracadabrante.Délilaabesoindes’asseoirunmoment.

–Ilyaencoreautrechose,articulepéniblementAnaïsenprenantdeuxphotosjusque-làdissimuléessouslesdossiers.Regardeça,cesontlesphotosprisesaprèslenettoyagedesvictimes.

Ellelesprendetremarquetoutdesuitelapâleurdesdeuxfemmes,enmêmetemps,sanssangdansleurorganismec’estunpeunormal.Maisellenecomprendpascequ’Anaïsveutqu’ellevoie.Elles’apprêteàlesluirendrequandsonregards’arrêtesurlecoudesvictimes.Ellesontchacunedeuxmarquescomparablesà…despiqûresd’araignée.Merde!Çaveutdirequoi?Ellelaissetomberlesphotoscommeellebonditdesachaiseententantdechasserlesmarquesqu’elleadanslecou.Ellefrôlel’hystériedurantquelquessecondesavantqu’AnaïsetClaudeparviennentàla97

calmeretlafaireserassoir.

–Jemesuisfaitmordreparunvampire?questionneDélilaavantmêmedeserendrecomptequ’elleparle.

–Celapeutvraimentêtreunearaignée,larassureAnaïs,maisavouequelasimilitudeesttroublante.Enplus,ellesnesemblentpasdisparaître.

–Jem’enseraisrenducompte,tunepensespas?

ClaudesemblesceptiqueetAnaïsnerépondrien.

–Qu’est-cequ’ilya?s’inquièteDélila.

–Lesvampiresonténormémentdedons,parmieux:l’hypnose.

D’accord.Elleréalisequenonseulementelles’estfaitmordreparunvampire,maisqu’enplusill’ahypnotiséepourqu’ellen’enaitaucunsouvenir.

–Ilfaudraitquevousvoyiezunspécialistedesvampires,carmoi,jenevousseraid’aucuneutilité.Anaïsasansdouteraison,cesontdespiqûres…

Enmêmetempsqu’ilparle,ils’approchepourregardersoncou.

–…non,cesontbiendesmorsures.

Délilasoupire.Ellealasensationdevivreuncauchemar.

–Jevaisvousmettreenrelationavecquelqu’unquisaurarépondreàvosquestions.

–Super!

Lajournalistesoupire,mécontente.Unemorsuredevampire,unspécialistedecetterace…ellesecroiraitenpleinscénariohollywoodien.

MonDieu,réveillez-moi!

Malheureusement,elleestbienéveillée…toutcecin’estpasunefictionouunsonge,maisbienlaréalité.Laterribleréalité.L’affolanteréalité.Ellerespire,elledoitsemaîtriser.

Claudepasseunappelalorsqu’AnaïsprendamicalementDéliladanssesbras.

–Toutvas’arranger,tudevraisretourneravectonhomme,detoutefaçon,onneferariendepluscesoir.

98

Oui.Sullivan.Elleauraitbienbesoinqu’illaprennedanssesbras.

Êtreunechauve-sourisn’estpascequeSullipréfère,néanmoinsc’estplussimplepourrepéreruneproieouundîner.Cesoirenl’occurrence,ceseralesdeux.Levoldequelquesminutesn’apasréussiàl’apaiser,ilesttoujoursaussifrustrésicen’estplus.

Ilseposesurunmuretavantdereprendresonapparencehumaine,sautesurlesoletregardeautourdelui.Ilsentquelquechose,loind’êtredelapeurnéanmoins,c’estdudésir…uneodeurdesexe.Uncoupleestentraindeconclurenonloindelà.Sullis’yprécipite.Illuifautunedemi-secondepourarracherl’hommedelafemmeetluibriserlecou,engendrantuncridecettedernière.Illuidévoilesansplustardersescaninesallongéesnedésirantqu’unechose:seplanterenelle.

Lafemmecrieunesecondefois.

Sullipeutsentirsapeuretc’estenivrant,exaltant…illarespireuninstantavantdefondresurellepourlaviderentièrementdeceprécieuxliquidedeviequicouledanssesveines.

99

Chapitre12

DélilaestbienincapabledeconduireenquittantleJournalsibienqu’elleoptepourlebus,suiviparlamarcheàpied.ElledésiraitretrouverSullivan,maisilnerépondpasàsesappelsalorsellerentredirectementchezelleoùelles’enfermeàclé.Elleaimeraitnepenseràrienetsimplementdormir,cequiluiestirréalisablepuisquesonespritvoguesanscesseverscequ’elleaappriscesoir:elles’estfaitmordreparunvampire.

Lepire–leplusdéconcertantsurtout–c’estqu’ellen’enapaslemoindresouvenir…Elleappréhendederencontrerlespécialistedecetteracequecompteluiprésentersonpatron,maisparadoxalementelleahâte.Destasdequestionssebousculentdanssatêteauxquelselledoitabsolumenttrouverdesréponses.

LaterreurlamaintientéveilléeplusieursheuresalorsqueSullivannerépondtoujourspasàsesappels,puislesommeilfinitparlagagner…ilauraitpuêtresalvateur,ill'auraitdû.Maiscen’estpas

lecas.

Ilfaitnuit,elleestdansunerueinconnueoùapparemmentiln’yapasuneâmequiviveetellecourt,fuyant…elleignorequiouquoi,néanmoinsellecavalecommeunedératée,sentantquesavieendépend.Elleestterroriséeetsoncœurnecessedepalpiter,cognantdanssapoitrinecommepourluirappelerqu’ilfautgaloperplusvite…fuir,toujoursfuir!Puissoudain,elleseheurteàunmur…non,unbloc…unhomme.Elleretientsarespiration,sesentantpiégée.Elleveuts’enfuir,maisill’enempêche,lamaintenantd’unepoignedefer.Àcetinstant,ellesesentperdue,àlamercidecetindividu.Ellelèvelatêtepourapercevoirsonvisagequandsoudain,ellepousseuncrid’effroicommeelleouvrelesyeux.

Cen’étaitqu’unrêve…maisDélilatremblecommeunefeuille.Elleétaittraquée…elleabiendumalàs’enremettreetàsereplongerdanslesommeil.

100

–Onfaitnosvalisestoutdesuiteoutupensesquepersonneneremonteraànous?questionneRosalie,manifestementencolère.

Sullisoupire,sefichantéperdumentdecequ’elleraconte.Ilnecomptepasfairesesbagagesetencoremoinssefaireprendre.

–Sulli!Tuastuéuneautrehumaine!

–Etalors!crache-t-il.J’avaisfaim.

Ilestconscientdeluimentir,etelleaussi,mêmesiellen’arrivepasàtrouverlavérité.Luilaconnaît,ilavaitplanifiéunesoiréeapocalyptiquepourDélila,etjouissantepourlui,maisriennes’estpassécommeprévu.

Oupresque.C’estvraiquemaintenantquelesjournalistesontmislamainsurlesdossiersdesmeurtres,lemotseralâchéetill’attendavecimpatience,mêmesicelapourraitavoiruneffetdésastreuxsurluietsavieàMontréal.

–Dis-moilavérité!C’estàcausedecettehumaine?

–Oui.J’avaisprissoind’organisersadernièresoirée.Jeneveuxplusjouer.

Rosaliecroitrêver!Iln’aplusenviedesedistrairealorsildécidedetoutsimplementretirerlavieàl’humaine.Encore!Elleal’impressiondeserépéterenluifaisantunnouveausermon,toutcommeelleacellequ’ilnel’écoutepasréellement.

–Sulli,ilvafalloirquetuarrêtesavectesenviesdemeurtre.Trouve-toiuneoccupationaveccettehumaineethypnotise-laensuite,maissamortn’estpasuneissue.Pasencore.

Ilneluidonneaucuneréponse.Commentpourrait-ilencores’amuseravecelle?Elles’avouebientropvitevaincueetn’assumepasdelonguetraquecommeillevoudrait.Ilabiencedésirdelavioleraprèsunecourtechasse,maisillasoupçonnelàencoredenepasêtreàlahauteurdesesespérances.Cettehumaineestjuste…navrante.

MaisRosaliearaison,unefoisdeplus…iladérapéetçanedoitplussereproduire.Ildoitapprendreàmaîtrisersacolère,sonenvie,sesdésirs,sasoif…àsedominertoutcourt,d’ailleurs.

Ilnesoufflemotentoutcasetquittelapiècedansunsilenceéloquent.

101

Ildevraitpeut-êtrerappelerlafemellequiasaturésontéléphoned’appelsenabsencelasoiréedernière.Enfait,c’estcequ’ilauraitdûfairetoutdesuiteaprèssonpremierappel,maisàquoibon?Ilnevoulaitpluslavoir.S’ilsesouvientbien,ellen’apashésitéàledragueravantdeleplanter.Poursonboulotpeut-être,maisellel’aplantétoutdemême.Ilavaittellementdeprojetspoureux.Lasoiréedernièreauraitpuêtreexaltante,elleauraitdûl’être!Néanmoins,Rosaliearaison,ilvaaccorderunedernièrechanceàcetteinsignifianteDélila.

Elleadesréponsesàluidonnersurl’avancéedel’affairepourlaquelleellel’alaissélaveille,maisaussisursesrêvesquisemblentluiraconterlavérité.Cettevéritémêmequ’ilfaitdisparaîtreàlafindechaquerendez-vousavecelle,cetteputaindevéritédontellen’estmêmepascenséeavoirlemoindresouvenir–etsurtoutpasenrêve–parcequ’ilestunvieuxvampireetqu’ilmaîtrisel’hypnosemieuxquesescongénères.

Elleestentouréed’arbresetcourtcommeunedératée…uneimpressiondedéjà-vu.Certainequesonsubconscientessaiedeluifairepasserunmessageàtraverssessonges,Délilaseconcentresurlesdétails.Ellenereconnaîtpasl’endroitquis’apparenteàuneforêtsombre,sinistremême.

Ellecavaleparcequ’ellesesaitpoursuivie,làaussielleressentuneimpressiondedéjà-vu.Ellefaitsouventdesrêvesdecegenredernièrement.Tropàsongoût.Maisjamaisellen’arriveàsavoircequ’ellefuit…àmoinsque…ellesesouvient:c’estunhomme.Ellecourtencorejusqu’àcequesonépreuveprennefinquandellecognequelquechosededuretdepuissant:l’hommequ’ellefuit.Làencore,illamaintientfermement,l’empêchantdefiler.Délilasentqu’ilestimportantqu’ellelèvelesyeuxsursonagresseurpourapercevoirsonvisage.Ellen’ajamaisréussiàleregarder,maisillefaut,elleleressentauplusprofondd’elle,alorsellelèvelesyeuxsurcethomme–l’uniquechosedontellesoitcertaine.Ilestgrandetàunestatureimposante…

Soudain,unbruitsourdretentit,ellesursaute.Elleestdanssonsalon,recroquevilléesursoncanapé.Ellesesentessoufflée,presqueterrifiéequandcebruitretentitdenouveau.C’estsontéléphone.Elleregarderapidementl’horlogeaccrochéeaumur–neufheures–avantdedécrocherenvoyantquec’estSullivan.

–Bonjour,articule-t-elleencoreendormie.

102

–Bonjour.Jesuisdésolédenepast’avoirappeléeplustôt,maisfigue-toiquej’avaisoubliémontéléphoneauchâteau,jeviensseulementdelerécupérer.

–J’aibesoindetevoir.

–Biensûr.Alors…accorde-moideuxpetitessecondes,voilà.

Lajeunefemmeentenddesbruissementsdepapier,ellel’imagineregarderdanssonagenda.Cen’estpastrèsglorieuxl’impressionqu’elleressentencemoment,cellequ’elleneluiinspirepasgrand-chose.

–J’aidesobligationsaujourd’hui,jenepeuxrienrepousser…parcontre,onpeutpassernotresoiréeensemblesitutesenscapabled’attendrejusque-là.

Ellesourit.

–Jepensequejesurvivrai.

–Parfait.Onfaitcommed’habitudeetonseretrouveauchâteaupour…vingtetuneheure,çaira?

Àquoiçapourraitbienluiservirderépondreparlanégative?Ilnepeutpasselibéreralorsautantsecontenterdecequ’illuidonne,etpuiselleaurapeut-êtreletempsdediscuteravecunspécialisedesvampires.

–J’aihâted’yêtre,articule-t-elle.

–Moiaussi.

Maissansdoutepaspourlesmêmesraisons.

–Àcesoir,alors.

–Passeunebonnejournée,Délila.

Finalement,lajournéenes’annoncepassipourriequeçapuisqu’ellelafiniraavecSullivan,aveclafermeintentiondefinircequ’ilsontcommencéhiersoir,elleveutcoucheraveclui.D’ailleurs,siClauden’avaitpasjugébonladérangerlaveille,elleauraituneviemerveilleuseàl’heureactuelle.EllerayonneraitdesavoirsarelationavecleDucpousséeplusloin,elleneseraitpasentraindesemortifieràcausedesarencontreoubliéeavecunvampireetnefuiraitpas,elleignorequoi,dansuncauchemar.

Ellesursautequandsontéléphonesonnedenouveau.

103

Claude.Charmant!

–Oui,parton.

–Nagar,commentçava?

Ilprenddesesnouvelles,c’estunegrandepremière.

–Pasfort.

–Dépêchez-vousderamenervosmichesaubureau!MonsieurTringle,spécialistedescréatures

nocturnes,vousattend.

–Pardon?

A-t-ellebiencompris?Ellevaavoirdesréponsesàsesquestions.Elleespéraitqueçairaitvitebiensûr,maismaintenantquec’estsurlepointdeseréaliser,elleappréhende.Ets’ilneluiprésageaitquedeshorreurs?Etsisavieétaitgâchéepourtoujours?

–J’aidit…

–J’aicompris,l’interrompt-elleavantqu’ilrecommence.J’arrive.

Sansseposerlamoindrequestion,ellesedirigedanslasalledebainpourprendreunedoucheetsevêttelunautomateavantdesortirdechezelle.D’abord,ellecherchesavoiturepuisellesesouvientqu’elleétaitincapabledeconduirelasoiréedernièrealorselleserabatsurlebus.

Rapidement,Délilaseretrouvefaceàungrandblondplutôtjeuneetséduisant,cependantilfautbienlereconnaître,elles’attendaitàunvieilhommearrogantvenuluidispenseruncourssurlesvampires.

–MademoiselleNagar,bonjour,articule-t-il.JesuisAntoineTringle,jesuislàpourrépondreàvosinterrogations.

–Euh…oui,bonjour.

–MonsieurClaudeVestianm’afaitpartdesrécentesattaquessurvenuesàMontréal,troispourêtreexact,etilparaîtrait…

–Deux,lecoupe-t-elle.

AntoineposetoutdesuitesonregardsurClaudequirestaitsilencieuxjusque-là.

–Enfait,ilyenaeuuneautrecettenuit,informe-t-illajournaliste.

–Oh!J’imaginequec’estaussil’œuvred’un…vampire.

104

Sonpatronleluiconfirmed’unhochementdetêtealorsqu’ellereportesonattentionsurAntoineTringle.

–Effectivement,trois,confirme-t-elleavecdétachement.

C’estunpeucommesiellen’étaitpasréellementlà,quelquepartc’estunmoyendeseprotégerdelasuitedesévénementsqu’ellen’estpascertained’êtreprêteàentendre.

–Jevousdisaisqu’ilparaîtquevousavezdesmorsureséquivoquesdanslagorge.

Elledéglutit.Ilvaréclameràlesvoiretilluiconfirmeracequ’elleredouteavantqu’ellefasse,sans

lemoindredoute,unecrisedenerfs.

–Puis-jelesvoir?

Presqueàcontrecœur,elletournelatêtepourluilaisserapercevoirlesmarques,retenantàpeuprèssarespirationenattendantleverdict.Queva-t-illuitomberdessus?

–Ellessontdifférentes,articuleAntoinecommefascinéparlesplaies.

–Cesontbiendespiqûresd’araignées,comprendDélila,soulagée.

–Cen’estpascequej’aivouludire.

–Ahbon?

–Quandunvampires’abreuvesurunhumain,illevidedesonsangpresqueàchaquefois.Voyez-vous,lescréaturesneconsidèrentnotreracequecommeunmoyendesesustenter.

Super!

–Vousavezbienétémordueparunvampire,celaétant…commentvousdireça…

Ellevaluiarracherlesmotsdelabouches’ilneparlepastoutdesuite.

Elleaétémordueparunvampire,d’accord.Ilnel’apasvidéedesonsang,tantmieux,mêmesielleignorepourquoi.Maisquelquechoseluiditqueceneserapaslecaspourencoretrèslongtemps.

–…vousavezétémarquée.

Lajeunefemmeposeunregardinterrogateursurlui.Qu’est-cequ’ilestentraindeluidire?Néanmoins,elleestbienincapabled’articulerlaquestionquiluibrûleleslèvres.

105

–Ilvousafaitesienne.

–Jevousdemandepardon?s’ahurit-elleinstantanément.

–Vousluiappartenez.

–Jenesuislapropriétédepersonne!

–Lasienneenl’occurrence,jusqu’àsamortou…lavôtre.

Denouveau,elledéglutit.

Avantdevenir,elleaeulanaïvetédepenserquesajournéepouvaitêtrefinalementbonne,maisellerevoitsonjugement.Elleestdéfinitivementpourrie!

Nepouvantenentendredavantagepourlemoment,ellequittelebureaudeClaudeenclaquantla

porte.

106

Chapitre13

Délilapourraithurlerdanslaruepassanteoùellesetrouve,incapabledefairelemoindrepas,maiselleoptepourlaretenue.Touscesgensquineluiaccordentaucunregardpourraientlaprendrepourunefolle.Ellesaitcedontelleabesoinetcen’estpasd’uncrienpleinerue.

Unefoisdeplus,incapabledeconduire,elleprendlebuspourserendreàlapropriétéduDucLancaster.Ellesaitbienqu’ilesttôtpourrejoindresonrendez-vous,maisilluiabienditqu’ilvenaitderécupérersontéléphoneoubliéauchâteaualorselleespèredetoutsoncœurqu’ilestencoresurplace.

Rapidement,elleestdevantl’immenserésidenceetpousselagrilleenferquigrincelégèrement.Iln’yaaucunevoitureetc’estlapremièrefoisqueçaluisauteauxyeux.Ellenesesouvientpasd’enavoirdéjàvues,alorscommentsedéplaceleDuc?Enbus?Çalasurprendraitbeaucoup.

Peut-êtrequ’ilaunchauffeur.Entoutcas,ellenes’interrogepasdavantage.Ellemarchejusqu’àl’imposanteported’entréeoùellefrappedetoutessesforces.Elleimaginequedanslecasoùilestici,iln’estpascertainqu’ill’entende.L’intérieurestsispacieux.Ellefrappeunenouvellefois,maisaprèscinqbonnesminutesellen’aobtenuaucuneréponse.Ellenepeuttoutdemêmepasrepartir,elleatropbesoindelui.Etpuis,peut-

êtrequ’iln’entendsimplementpas.Ilpourraitêtreàl’étageàmesurerouàfaire…qu’ensait-elle?Elledécidedepousserlaporte,justepours’assurerdel’absencedesonhomme…ah,elles’ouvre.Elleenconclutqu’ilestlàetpénètreàl’intérieursansavoirlamoindreidéedecequ’ellefait…dansquoielles’engage.

–Sullivan?

Ellerefermelaportealorsqu’elleavancelégèrement,nevoulantpasnon107

plusinvestirl’espacedel’hommedésiré.

–Sullivan,tueslà?

Elleconnaîttoutlerez-de-chausséepourl’avoirdéjàvisitéaveclui,maisaprèsl’avoirparcouru,elleserendcomptequ’iln’estpasici,alorsellelèvesesyeuxversl’escalier.Lesétages.IlnefaitaucundoutepourDélilaqu’ilestenhaut,elleposeunpiedsurunemarcheetl’appelledenouveau,gardantàl’espritquelamontéedesmarchesabîméesestdéconseillée.

–Unejolievoixmeparvientauxoreilles,articuleNarcisseenpénétrantdanslachambredeSulli.

–Jenet’aipasparlé,grommellel’intéressé,enfouisouslescouvertures.

–Toi,non,jeteparled’unedélicieusehumaineausangfrais.

Àcesmots,levampirerepousselescouverturesetsorthâtivementdesonlit,oubliantd’ailleurslatenuequ’ilporte.

–Jolipetitcul,complimenteNarcisse.

Sullisoupireetattrapeunpantalonqu’ilenfilepar-dessussoncaleçon–

ilaimedormirléger.

Luiaussiaentendudesvoix,maisidiotementilsecroyaitendormietentrainderêver,visiblementcen’estpaslecasetilsaitexactementquienaaprèslui.

Foutuehumaine!

–Jetedéconseilledetepointerenbas,crache-t-ilàl’intentiondeNarcisse.

–Etmoijeterecommandedeterendreplusprésentable.Tuneveuxpasqu’elle…

Iln’apasletempsdefinirsaphrase,Sullin’estdéjàplusdanslapièce.

–…qu’elles’imaginequetupassestontempsici,articule-t-ilpluspourlui-mêmequelevampiredéjàloin.

Sullidescendàlahâtelesdeuxescaliers,nevoulantpasqueDélilamonte.D’ailleursquefiche-t-elleici?

108

–Sullivan?

Sadoucevoixluiparvientalorsqu’ilralentitlepaspourdescendrelesdernièresmarches…ouah!Iln’effectueplusunseulmouvement.Délilaparaîtbouleversée.Ils’inquiètedecequ’ellepourraitavoirdécouvert,iln’apasoubliéledrôlederêvequ’elleafaitlanuitdernière.

Délilan’articuleaucunmotbienqu’elleaitlabouchegrandeouverte.

Ellecontemplel’hommeimmobileenhautdupremierescalier,ilestd’unebeautéàcouperlesouffle–laparoleenl’occurrence.Ilporteunpantalondecuirnoirmoulantparfaitementsesjambesetsesfesses,ellel’imagine…

etriendeplus.Ilpassesesmainsdanssescheveuxnoirscommeilreprendladescentepours’arrêterdevantelle.

QueDieuluivienneenaide,ellen’arrivepasàdécrocherlemoindremot,désirantardemmentqu’illuifassel’amour.Elleréaliseàcettesecondemêmequ’ellen’estpasentraindetomberamoureusedelui,ellel’estdéjà.Elleposesesmainsàplatsursontorsealorsqu’ilfermelesyeuxdurantunecourteseconde.Ellelecaressecommejamaisellenel’afaitjusqu’àmaintenant,commejamaisellen’osaitpouvoirlefaireparcequ’ilestDucetellen’est…rien.Enaucuncas,ellenel’atrouvéaussibeauqu’encetinstant.

Lesrayonsdusoleilnepénètrentpasdanslapièce,entoutcaspasoùSullisetrouve,lesrideauxsont,pourlaplupart,tirésetlalumièrequiilluminelasallen’estpasnocivepourlui.Pourlemoment,riennemetenpérilsacouverture,maisilsentqueçavavenir,s’ilnefaitpasattention.Etsiellen’arrêtepasdecaressersontorsedecettefaçon.Ilconclutd’embléequ’ellen’estpasfâchéeavecluidoncc’estqu’ellen’ariendécouvertsurlui,maispourquoiest-ellelà?Ils’apprêteàleluidemanderquandilsentsalangueeffleurersontéton,lerendantsoudainbienincapabledelaquestionner.Pourquoifaut-ilqu’elleparcouresonbustedebaiserssitendres?Ilglisseunemaindanssescheveux,ayantdansl’idéedesaisirsachevelurepourtirersatêteenarrière,maisiln’enapaslaforcequandilsentqu’elleeffleuresonentrejambe.Ilveutsecontrôler,maismalgrésesefforts,lescaressesdeDélilal’excitentauplushautpoint.

–Délila,souffle-t-il,suppliant,désirantqu’ellearrêtecequ’ellefaitmêmesic’estagréable.

Maisellen’enaapparemmentpasl’intention,illedevinequandillasentouvrirsonpantalon.Ildoitlastopper,ilnepeutpaslalaisserfaire.

109

Alorsilretiresesdoigtsdesescheveuxetemprisonnesesmainsplutôtdévergondéespourl’heure.

–Onnepeutpasfaireçaici,articule-t-ild’unevoixplusrauquequ’ill’auraitvoulu.

Ellelèvelesyeuxsurluicommeelleretiresesmainsdessiennespourenlacerseshanches.

–Embrasse-moi.

Ilperçoitl’urgencedesaréclamation,apparemmentellenevapasbienetc’estauprèsdeluiqu’elleachoisidetrouverduréconfort.Sepourrait-ilquel’humainesesoitamourachéedelui?

Ilposesesmainssursesépaulesavantdelesfaireglisserdanssondosetdeluidonnercequ’elledemande:unbaiser.Ilauraitpréféréquelquechosedeprudeetcepouruntasderaisons,maisDélilaenadécidéautrementetdélaisserapidementseshanchespoursanuquequ’ellecaressecommeelleglissesalanguedanssabouche.

Sullirépondàlacaressedesalangue,arrivantcommeàchaquefoisàparfaitementmaîtrisersasoifetsescanines,maispassonsexequiestentraindedurcirmalgrélui.Denouveausoncorpsluiexprimesonenviedeprendrel’humaine,etdenouveau,ilseretrouveàluttercontrecedésir.Ildoitsecontrôler.Toutefois,ilnepeuttoutdemêmepaslarepousseretlamettredehors,ellenecomprendraitpas.Ilvafalloirqu’iltrouveautrechose.Malheureusement,ilabienuneidée,maisquineseraitpassansconséquence.

–Tuasditquejet’avaisalluméehier,murmure-t-ellecommeellequitteseslèvrespourembrassersoncou.

–Jemesouviens.

–Jesensquetuastrèsenviedemoi,souffle-t-elleencaressantsonérectionàtraverslecuirdupantalon.J’aibesoinqu’onlefasse…

maintenant.

Ilperçoitbienl’urgencedanssavoixmêmes’ilnel’expliquepas.Ilpourraittoutefoiss’insinuerdanssonespritetcomprendreenunefractiondesecondecequilatourmente,maisiln’usepasdesespouvoirs,sentantqu’elleluienparlera.

–Qu’est-cequisepasse,Délila?questionne-t-ilenemprisonnantson110

visagedanssesmains.

–C’estàtoiquejeveuxapparteniretpasàunautre.

Iladûsepasserquelquechosepourqu’elleprononcedesmotspareils.

Maisquoi?

–Quelqu’unt’afaitdumal?

C’estlaseuleexplicationqu’ilvoit.Unhumainquiseseraitpermisdeposersessalespattessurelle.Ilseretientderugir.

–Fais-moil’amour,Sullivan.

Elleécraseseslèvressurlessiennes,nedésirantqu’unechose:lui.

Maislevampireluttedetoutessesforcespournepascéder.Soncorpsnel’aidepasceladitparcequ’ilavraimentenvied’elle,etc’estplutôtrarechezluid’avoirenviedesexe,surtoutavecunehumaine.

–Pascommeça,Délila,pasici,articule-t-ildifficilement.

Maisellenes’avèrepasdécidéeàabandonnerlapartieetsansqu’ilcomprennecequiluiarrive,elleasonsexeérigéenmain.Habituellement,ilestcapabled’anticiperlesmouvements,maispascettefois.Ilétaittantperdudansleursjeuxdelanguequ’iln’apasremarquéqu’elleouvraitsonpantalon.Levoilàbien!Iln’apastrente-sixsolutions.Soitill’hypnotiseetlaficheàlaporte,soitillamontedanssachambreetluidonnecequ’elledemande.C’estpourcetteissuequ’ilopte,ilauratoujoursletempsdel’hypnotiserensuite.

Illasoulèvefacilementdusoletlaprenddanssesbrasavantdegravirlesescaliersquicraquentsoussonpassage.Délilan’abandonnepasseslèvresalorsqueSullilaconduitàsachambresanscroiserunseuldesoccupantsduchâteau.Toutlemondedortsansdoute,àpartNarcisse,ilenestcertain.

Deuxminutesplustard,levampirefermelaportedesachambred’uncoupdepiedavantd’allongersacompagnesursonlitdéfait.D’unseulmouvement,ilretiresonpantalonetsonboxeravantdeladéshabilleravecprécipitation,ressentantuneurgencedanssoncorpscommejamaisauparavant,iltentenéanmoinsd’enfaireabstraction,maisiln’yparvientplusquandilestallongéentrelesjambesdel’humaine.Ilemprisonneseslèvresaussitôt,sentantsoncœurbattrelachamadequandilsecollecontreelle.Ilredouteencetinstantqu’elleremarquequelesiennebatpas.

111

Néanmoins,iloublierapidementcettepossibilitéetluicaresselescheveuxmachinalement.

–Viensenmoi,murmure-t-elle.

Ilobéitlasecondesuivanteets’enfouitdanssoncorpshumide,satisfaitdelerecevoir.Ilgardeàl’espritqu’elleesthumainependanttouteladuréedel’actecharneletnelamaltraiteenaucunefaçon,ilsesurprendmêmeàlacaresserprécautionneusement,àl’embrasseravecprudence,às’assurerqu’ellejouisse.Ilatoujourspenséqu’àsonplaisir–saufquandilétaitavecLilith–alorsfaireattentionàceluidel’humainec’estpresquenouveaupourluibienquetotalementaberrant.Illuifaitl’amourcommeilnel’avaitpasfaitdepuisdesdécennies,c’estmêmetellementdifférentdelafoisoùill’amarquée,c’estbeaucouppluspassionnel–unmotqu’ildéteste–etenrienaxésurlesexe,justesurleplaisir…celuidel’autre.Ilfermelesyeuxquandill’entendgémirpourlui,ayantbeaucoupdemalàréaliserqu’unefemmepuisseaimerfairel’amouravecluiqu’onapparenteàunmonstresanguinaire.Illasentprêteàatteindrel’orgasmequandelleenfoncesesonglesdanssachairensoufflantsonnom,alorsildonneencoredeuxcoupsdereinspourl’yaideretserépandenellecommeellesavourel’instantorgasmique.

Ilroulesurlecôtéaprèss’êtreretiré,maispassansl’entraîneravecluipourlaprendredanssesbras.Illasentcaressersontorse,elleestsidoucedanssesgestesenverslui.

–Jet’aime,avoue-t-elledansunmurmure.

Ilfermelesyeux,ilenétaitpresquecertain.Ilresserrel’étreinteavantdel’embrassersurlefront,puislaissepasserquelquesminutesavantdel’interroger.

–Qu’est-cequisepasse,Délila?Jesensquequelquechosecloche.

Elleseredressepourleregardertoutens’appuyantsursoncoude,sanscesserdecaressersontorse.

Bonsangqu’ilestbeau!C’estàçaqu’ellepenseenpremierquandelleliesesyeuxauxsiens.

–Toutestdevenu…horrible,confie-t-elleensoupirant.

–Toutquoi?questionne-t-ilenlaissantcourirsesdoigtssursonvisage.

112

Elleestjoliefinalement.Pourlapremièrefois,ildiscernesesmagnifiquesyeuxbleu-océan,lafossettequisecreusedanssajouequandellesourit,sapeausansimperfectionlégèrementbronzée–rienàvoiravecleteintpâledeLilith–etseséclatantscheveuxblonds.Elleestplusquejolie,même.Maisbienquecetteprisedeconsciencel’inquièteuninstant,ilyaplusimportantàgérer.

–Raconte-moi,réclame-t-ilenlaissanttombersamain.

–Tusais…jesuisjournalisteettenueparlesecretprofessionnel…

–Jenedirairien,maistuasbesoindemeparler,jelevoisdanstesyeuxalorsfais-le.

–C’estunvampirequiaattaquélesfemmesrécemmentretrouvéesmortesàMontréal.

Sullipensaitbêtementqu’ilatteindraitl’extasequandlemotseraitlâché,maisilneressentriendecegenre.Enfaitilappréhendemêmelasuitedesesrévélations.

–Tunerispas?

–Non.C’estlaréactionquetupensaisquej’aurais?

–J’ensaisrien.Tucroisauxvampires?

–Jepensequeoui.

–J’enairencontréun.

Ilfroncelessourcils,qu’est-cequ’elleluiraconte?Est-cequedansuneminuteelleluidiraqu’elleconnaîtsanature?

–Maisjen’enaiaucunsouvenir.

–Alorsqu’ensais-tu?

–Ça.

Elletournesatêtepourluifairevoirlesmarquesqu’elleaaucou.Illesconnaît,bienévidemment,maisréagitleplusnaturellementpossible:illeseffleureduboutdesdoigtsensedemandantcequ’elleadécouvert.

–Tut’esfaitmordre?

Elleplongedenouveausesyeuxdanslessiens.

–Jemesuisfaitmarquer.

113

Alorsellesait.Ilnepeutcependantpascachersastupeur,mêmesielleseméprendsurl’originedecelle-ci.

–Tuveuxquejeparte?questionne-t-elle,tristement.

Elleavusaréactionetcraintqu’iln’aitplusjamaisenviedelarevoirmaintenantqu’elleaétéhonnête.

–Jeveuxqueturestes,assure-t-ilencaressantsonépaule,etquetumeracontescommenttusaistoutça.

Elleluiparlealorsd’AntoineTringlequ’ellearencontréavantdedébarquerchezluiquiétaitcenséêtreoccupétoutelajournée,etc’estseulementàcetinstantqu’elleréagitsurl’endroitoùellese

trouveetlatenuedanslaquelleelleadécouvertsonhomme.Cequirévèleclairementqu’illuiamenti.

–Pourquoitum’asmenti?

–Àquelpropos?

–Detajournéeoccupée,detoiquivisàl’hôtelalorsqu’ilparaîtclairquenon,reproche-t-elleenseredressantpourlaissercourirsesyeuxsurlapièce.

Effectivementsesdoutessontconfirmés,ellevoitdesvêtementstraînersurlesol,surledivan,etdansl’armoireencoreouverte.Ellereposeunregardpleindereprochessurlui.

–Enacceptantdetefairemonterici,j’aiaussiacceptédetefaireentrerdansmonuniversetderépondreàtesquestions…maispasmaintenant,vraiment.

–Pourquoi?

Ilpassesamaindanssescheveux,l’airépuisé.Ellelesoupçonnealorsd’êtresortisansellelaveilleetpeut-êtremêmepourséduireuneautrefemme,àpeineconscientequesessoupçonsfrisentlaparanoïa.

–J’auraisdûm’endouter!peste-t-elle.

–Douterdequoi?Hé!Maisqu’est-cequetufais?s’étonne-t-ilquandellequittelelitbrusquement.

Ellenepeutpasavoirdécouvertsanatured’unsimpleregardalorsilyaautrechose,maisquoi?

–Délila?

114

Lajeunefemmenerépondpasetsepressedesevêtiravantdeprendreseschaussuresdanslamain.Quandelleveutsortirdelachambre,Sullivansetrouvedevantlaporte,luibloquantl’accès.

–Comment…

…as-tufait?Elleestsouslechoc,incapabledepoursuivresaphrase.

–Jeneveuxpasquetupartes,pasmaintenant.Qu’est-cequej’aifaitpourmériterunetellecolère?

–Tuesfatigué!crache-t-ellecommesiçapouvaitrépondreàtouteslesquestionsqu’ilseposeencetinstant.

Ilnecomprendrien,c’estmêmepirequeça.Ilyaàpeinecinqminutesilsétaientbien,etenunclaquementdedoigtssansqu’iln’aitrienfait,elleveuts’enfuir.Ilveutbienconcéderqueleshumainessontdifficilesàinterpréter,maislàçadépassel’entendement.

–Enquoiest-ceunproblème?Jet’aidonnécequetuvoulaisetjenecroispasquetuaiesdequoite

plaindre,j’aiétéàlahauteur.

–Qu’est-cequetufaisaiscettenuitpourêtresifatiguémaintenant?

–J’aitrèsmaldormi.

Ellehausselesépaulessansarrêterdelefixerpourluidémontrerclairementqu’ellen’encroitpasunmot.

–J’étaisexcitéettum’aslaisséenplan,jeterappelle!

–Pardon?

Est-ilentraindeluidirequ’ilestallésesoulagerailleurs?Sic’estça,ilvaseprendrelaclaquedesavie.

–Jen’aipasarrêtédepenseràtoi,jen’arrivaispasàdormir.

Laflatterien’ajamaisfaitdemalàpersonnealorsSullisepermetdel’utiliser.

Aprèscetteréponse,Délilabaisselesyeux,conscientedes’êtreénervéepourrienetduridiculedelasituation.

Levampirepassesamaindanssescheveuxtoutens’introduisantenfindanslespenséesdeDélilaafindedécouvrircequ’elleluicache.Ellelesoupçonnaitd’êtreallévoirailleurs.Éprouvantdelajalousie,ellesesentsalie.Pireencore,ellesouffreréellement.Ill’attirecontreluiavec115

gentillessepourlaréconforter,tentantdesepersuaderqu’elleluiestutileetquec’estuniquementpourçaqu’illacalme.

–Jesuisdésolé,souffle-t-ilcommeilembrassesatête.

–C’estmoi.Jemesenstellementidiote.

Délilavoudraitnejamaisreleverlatêteetdisparaître.Jamaisplusellen’arriveraàsoutenirleregarddecethomme.Quedoit-ilpenserd’elle?

–Iln’yaquetoi,jetelejure.

Illafaitleverlevisageverslui,desonpoucesursonmenton,avantd’écraserseslèvressurlessiennes.Lentement,ilinsinuesalangueentrecelles-ci,puisdansunlégermouvement,ilfaitglissersarobelelongdesoncorpsfin.Quandelleestdenouveauallongéesursonlit,ilseplaceentresescuissesquil’enserrentaussitôt,etlapénètredoucement.Ilcommenceavecunrythmelégeravantdeselaissersubmergerparlafièvrequibrûleenluietdelaprendrepluspassionnément.Ilestbienincapablederalentirlacadence,toutcommeilneparvientpasàs’écarterd’elle.Illalaissemeurtrirsachairquandellecriesonnom,allantmêmejusqu’àréclamerqu’ellel’appelleSulli,ethurlersonplaisir,semoquantéperdumentqu’onl’entende,qu’elleréveillelesvampires.Àcetinstant,Sullioublietoutetseconcentreuniquementsurlafemmeàlaquelleilestuni.C’estcommesitoutdisparaissaitetqu’ilsétaientseulsaumonde,aveclamissiondejouirinfatigablement.

D’ailleurs,quandils’arrête,aprèsplusieursorgasmes,ilnepeutplusbougeretellenonplus.Maintenant,ellesaitcequec’estquedefairel’amouravecunvampire,mêmes’ilnecomptepasleluirévéler.Elleauradesséquelles,parcequ’ilnel’apasménagée,ilavaitbientropbesoindelaissersortirlabêtetapieenlui.

116

Chapitre14

Délilan’esquisseaucunmouvementetquandSullivanlalibèreelleselaisseglisserdanslesommeil.Ellesesentépuisée,ilestvraiqu’elleapeudormilanuitdernière,maisdoitsonétatàsonamantdivinquis’estsurpassé.Ilaréussiàeffacertoussesdoutes,ellenelepensepluscapabled’allervoirailleurs.

Sulliregardelajeunefemmeendormiepaisiblementdanssesbras,ellen’apasprispeuruneseulefoisquandilétaitférocementenelle.Ellel’alaisséladévastermêmesic’étaitpluspourleplaisirqu’autrechose–ilneluiapasfaitmal–,ellel’yamêmeaidé.Elleaétéincroyable,presqueàlahauteurd’unefemellevampire.Ilaaimésafaçond’enfoncersesonglesdanssachair…quasimentjusqu’ausang.Maisàquoisonge-t-il?

Pourquoipense-t-ildeschosespareilles?Ildevraitsedonnerdesclaquespourremettresatêteàl’endroit.

Elleestsaproieetill’amarquéepours’amuseralorsqu’ilsedivertisse!

Quelleétaitsadouceidéedéjà?Ahoui,lavioler.Ilapeut-êtrejouiàplusieursreprisesavecellecematin,maisiln’apasatteintleniveauqu’ilpourraitaccéders’illamordaitenlaviolant.Soncorpsseraitparcourudespasmesetalorssonsexeenelleseretrouveraitenserrésifortementqu’ilseraitdévastéparunorgasmeinégalable.C’esttoutcequ’ilrecherche.

Néanmoins,ilacceptedereconnaîtrequ’elleestplutôtdouéeenpositionallongée,ilnes’estpasennuyécommehabituellement.

Ils’extirpeavecdélicatessedesonemprise,sanslaréveiller,etquittelelittémoindeleursébatstorridespourenfilersonboxeretpantalonquitraînentsurlesolavantdesortirdelapièce.Ilaunurgentbesoind’airmêmes’ilnerespireplusdepuistrèslongtemps…troplongtemps.

Bonsang,queluiarrive-t-il?Ilpassesamainsursabarbenaissante117

commeuneportes’ouvresurNarcisse.

–Sulli!Tuasfaitpartagertesexploitssexuelsàtoutl’étage!

EtNarcissesembles’enréjouir.

–Jemesuisamuséavecmesmainsenvousécoutant.

Cevampireestécœurant!

–Tupartages?Onsechargeradel’hypnotiserensuite.Imagine-nous,toietmoiunisjusqu’àl’orgasmesousleregarddetadélicieusehumaine…

Non,décidément,non!

–Arrêteça!pesteSulli.Jevoistrèsbienoùtuveuxenvenir,tuperdstontemps.Jamaistun’aurasma…

–Vousfaitestropdeboucan!articuleBastianendormienapparaissantdansl’embrasuredesaporte.

–Nesortezpasdevoschambresaussilongtempsqu’elleestlà,jenevousendemandepasplus,rageSullivanavantderetourneràlasienne.

Impossibledeprendrel’airtranquillement,ilapourtantbienbesoindeseposeruninstant.Etpourquoid’ailleurs?Aucunintérêt.

Ilavaitprévuunebellesoiréepourluilaveille,maiscommesaproieadûpartir,ill’aremiseàcesoir.Néanmoins,ilpourraitl’avancerets’occuperd’ellemaintenant.

Ilsoupire.Çaattendra,ilestfatigué,ets’ilveutprofiterpleinementdel’acte,ildoitêtreenforme.Résigné,ilretourneauprèsdeDéliladanssongrandlitetsecachesousunepiledecouvertures,toutefoiscontreelle.

Délilasesentendanger,oppressée,elledoitfuir,d’ailleursellecourt.

Elleignoreoùellesetrouve,toutefoiselleestentouréed’arbres,uneforêtpeut-être,elledoitrejoindrelagrillepourêtrelibre,maisoùest-elle?Ellel’ignore,toutcommeellenesaitpascequ’estcettegrille.Maisellecourtinlassablement,trébuchanticietlà,seressaisissanttoujourspuisqu’ellealasensationquesavieendépend.Aprèsplusieursmètres,elleseheurteàquelquechosed’imposant,deduretdefroid.Enlevantlesyeuxelleréalisequec’estl’individuqu’ellefuit.L’hommemenaçantattrapesonpoignetetl’empêchedepoursuivresacourseeffrénéeverslaliberté.Elleestpriseaupiègeethurlequandilouvresabouche,dévoilantdescanines118

acérées.

–Délila,toutvabien.

Cesmotssefraientunchemindanssoncrânejusqu’àcequ’elleycroitetqu’elleouvrelesyeux.Ellen’estpasdansuneforêtsombreetmenaçante,maisdanslachambredeSullivan,lebelhommepenchésurelle.

–Calme-toi.Qu’est-cequisepasse?

–J’aifaituncauchemar.

Ilcaressesonvisagedesonpouceavantdel’attirercontreluicommeilembrassesonfront.

–Tuveuxmeleraconter?

–C’esttoujourslemême.Dèsquejefermelesyeuxilmesubmergeetmeterrifie.

Illeréaliseenpercevantsonagitation.

–C’estàcausedesmeurtres…

–Commentça?

Elleluiexpliquealorssonpointdevue,étantdonnéquesescauchemarsontcommencédèsqu’elleaappriscequiacausélamortdesespauvresfemmes–dontPeggy–,ellecauchemardedesefairepourchasserparunvampire.Jusqu’àprésentcen’étaitpasclairdanssonesprit,maismaintenantqu’elleavulescrocsdelacréature,elleenestconvaincue.

–Raconte-moitesrêves,réclame-t-ilententantdesepersuaderquetoutcequisepassedanssatêtenepeutenaucuncasêtreliéàcequ’elleavécuaveclui.

Etpourtant,quandellelesluirelate,ilcomprendquesi.Mêmes’ilnesel’expliquepas.Ils’écarted’ellepourattrapersonpaquetdecigarettessurlatabledechevet,ilestdanssapériodefumeuretlà,iladrôlementbesoindequelquechosepourlecalmer.Ilestauborddelarupturemêmes’ilsemaîtrise.Ilallumeunecigarettesansquitterlelitenessayantdecomprendrecommentc’estpossible.Pourquoidesébauchesdecequ’ilaenfouiprofondémentenellereviennentenforce?Ellefiniraparlevoirdansl’undesesmauditsrêvesetcomprendraalorsquiilestetcequ’illuiaréellementfaitsubir.Ilnepeutpasprendreuntelrisque.Ilréalisedonc119

qu’iln’yapasdesolutionmiracleàsonproblème,ildoitsimplementsedébarrasserd’elle.

C’estlaconclusionàlaquelleilarrivesouventencemoment!

Ceserapourcesoir…oumaintenant.Ilpourraitenfiniravecelletoutdesuite.

Douceperspective.D’autantplusques’illatueici,personneneretrouverasoncorpsdanslarue.Alléchanteidée.

Ilécrasesacigaretteàmoitiéconsuméedanslecendrieravantdes’allongersurlajeunefemme.Ilaimeraitbienlavoircourirdanslechâteau,tentantdeluiéchapper,néanmoinsilyaquelquesvampiresquipourraientjouerlestrouble-fêtesetluidérobersonplaisir.Ilsecontenteradesachambre.

–Jesuiscontented’êtreauprèsdetoi,murmure-t-elleenpassantsamainderrièresatêtepourl’attireràelle.

–Moiaussi,souffle-t-ilcontreseslèvresavantdel’embrasser.

Ilvoulaitquelquechosedechaste,maisilestrapidementrattrapéparsesémotionsetcemauditdésirquil’habite,etnepeutqueseprêteraujeudelanguesqu’elleluipropose.

–Jusqu’àquelpointt’es-tudéjàdonnéàunefemme?

Ilréfléchitmalgréluiàsaquestion,ilnepeutpasluiparlerdeLilithalorsilvaoccultersarelationavecelleetrépondrefranchement.

–Aucun.

–Pourquoi?

Ellesemblesurpriseparsaréponseetluin’aaucuneenviedeselancerdansuneexplication.Ilabienmieuxàfaire.

–Situtetaisaisquelquesminutes,réclame-t-ilenemprisonnantdenouveauseslèvres.

C’estlemeilleurmoyenpourfairetaireunefemellebavarde,etilenconnaîtunautrepourluifaireoubliersesinterrogations.Ilquittesabouchepourembrassersagorge,sentantlespulsationsdesonsangsousseslèvressanss’yattardervraiment.Ilestentraind’avoiruneérectionetressentunurgentbesoindedélivrance.Quelfoutueffetelleasurlui!

Quelqueparttantmieux,aumoinsilapprécielesexependantqu’ilest120

avecelle.Sulliseredresseets’assoitenattirantDélilasurlui.Lajeunefemmelechevauchecommeils’enfonceenelleenlaissantexprimersonsoulagementdelasentirl’envelopper.

Illalaisseprendrelescommandescommeilasesmainsposéessurseshanchesetleregardsursapoitrinequisembleréclamerdel’attention.S’ildoitpenserencoreunefoisquedepuisLilithiln’apastouchéunefemmeàcetendroit,ilsecogneralatêtecontrelemur.Àchaquefoisqu’ilestavecunehumaine,ouvampire,ilressentlebesoindesesouvenirdecequ’ilfaisaitavecLilith,maisqu’ilneferapasavecelle.Cettefois,c’estterminé,ilsature.Ilrefusedepenserdavantageàcetteblondedemalheur.

Délilasecollecontresontorsepourembrassersoncou,plaquantainsisapoitrinedélicieusecontrelasienne.

–Jet’aime,souffle-t-ellejusteavantd’emprisonnerseslèvrespourunbaiserpassionnédurantlequelillaplaquefermementcontrelui.

Quandillalâcheenfin,elleserecule,remuantdenouveausursonmembrequisecontracteàchaquecaressedesonintimité.Puis,sansréfléchirréellementàcequ’ilfait,ileffleuresapoitrinedesesdoigts,trouvantcelatrèsagréableetrecommencejusqu’àprendresesseinsàpleinemain.

Ellegémitàsoncontactetdavantagequandellesentseslèvress’amuseravecsontéton.C’estlapremièrefoisqu’ils’intéresseàsesseins,etçaluiprocureunimmenseplaisir.

Sulliretournerapidementlapositionpourseretrouverentresesjambessanslesdésunir,etlapénètreardemmentquandils’interrogesurcequ’ilestentraindefaire.Cen’estpasdecettefaçonqu’il

voulaitlatuer,ildésiraitlaviolerpouratteindreunplaisirintense.Peut-êtrequec’esttoujourspossible,aprèstout.Illapilonnedemonstrueuxcoupsdereinsquid’abordlafontgémir,maisrapidementluifontmal.Ilvatropviteettropfort.

–Arrête,articule-t-elledifficilementententantdelerepousser.

Sulliignoresicesontcesmotsrésonnantcommeunesuppliqueousonregardeffrayéquiletouche,quoiqu'ilensoitilreçoitcommeuncoupd’électrochocets’immobiliseaussitôtavantdeseretirerpours’asseoiràquelquescentimètresd’elle,sansplusbouger.

Ilsesenthonteuxpourlapremièrefoisdesavie.

121

Ilaenviedes’excuser,mêmesicelan’aaucunsens,maisn’arrivepasàarticulerlemoindremot.

Délilaignorecequilachoqueleplus,lesassautsabruptsdesonamantousaminedéconfitedecetinstant.Iladérapé,çapeutarriveràtoutlemonde.Unpeuplustôtaussiilaététrèspassionnédanssonétreinte,maispasautant.

–Approche,réclame-t-elledansunmurmure.

Illèvesesyeuxsurellequinesemblepastraumatisée,maisilestincapabled’esquisserlemoindremouvement.Ilnesaitpascequiluiapris.Iln’auraitpasdûs’arrêter,ilauraitdûlamartelerjusqu’àlafairecrieretsedébattre–c’étaitpourtantbienparti–,puislamordre.

Délilasaisitsamainqu’elleguideentresescuisses,quandellelefaiteffleurersonintimitéilaunmouvementderecul.

–Caresse-moi,Sulli,sollicite-t-elle.

–Jenel’aijamaisfait.

Etc’estvrai,iln’apprécieplusdetoucherlecorpsdesfemmesdepuis…

non,pasencore!

–Laisse-moiteguider.

Illuidonnesamainqu’ellerequiertetlalaisselaglissersursonintimité,elleesthumideetiln’estpascertaind’apprécierleplaisirféminin.Pourtant,ilestcommefascinélorsqu’elleprendsesdoigtspourlesglisserenelle.Ill’écoutegémirenlaregardantfairejusqu’àcequ’ellelibèresamainenluidemandantdepoursuivreseul.Ilobéittoutens’approchantetlacaresseintimementavecdouceurjusqu’àcequ’elleformulequelquechosedeplutôtinattendu.

–Embrasse-moi.

Ilretiresesdoigtset,muparsoninstinct,ilabaissesonvisageentrelescuissesdelajeunefemme,luiprodiguantunbaiserdesplusintimes.Ilnel’ajamaisfait.MêmepasavecLilith.C’estquelquechose

dontiln’avaitpasenvie,maislà,çasembledifférent.Ilaenviedelagoûter,d’insinuersalanguedanssapartielaplusintime,detournoyerenelle,delafairesecambreretserrerlesdrapsdanssesmains…commemaintenant.Quandilsesentplusàl’aiseavecleprocédé,ildonneplusd’ampleuràcebaiserinédit,faisantdéferlerenluiquelquechosedetotalementinconnu,quelque122

chosequ’iln’arrivepasànommer.

–C’estbon…ohoui…

Sansrelâcheilluidonnecequ’elleveutjusqu’àfinalementseredresserpourenfoncersonmembretenduenelle.Ilnelitqueledésiretleplaisirdanssesyeux,aucunecraintealorsqu’ellepourraitenressentirétantdonnécequis’estpasséavant.Ilemprisonneseslèvresetl’embrassecommesisavieendépendaitalorsqu’illapénètreenmaîtrisantsesardeurs.Cettefois,horsdequestiondel’effrayer.

Ilnequittepasseslèvresquandilserépandenelle,ettoujourspasavantunebonnedizainedeminutes.Quandilsedégagepours’allongeràcôtéd’elle,ilestàboutdeforceetcomplètementdansledoute.Délilaseblottitcontrelui;ill’enlaceavecplaisiretçaledérange.Cequ’iléprouveencetinstantledérange.

–Pourquoituhabitesici?

–J’aimebienl’endroit.

–Pourquoitum’asditquetuvivaisàl’hôtel?

Elleseredressepourleregarderalorsqu’ils’assoit,s’appuyantcontrelatêtedelit.

–J’imaginequej’aieupeurquetunecomprennespas.

Elleembrassesacuissetoutcommeelleplongesonregarddanslesien.

ElleestdangereusementprochedelapartiephysiquedeSulliquiletortureoutrageusementcesdernierstempsetquirépondraprésentsiellecontinue.

–Écoute,écarte-toi,réclame-t-ilensouriant.

Elleobéitbienquetétaniséeparlechocdecettevision.Ellenel’apasvusouriresouvent,maisalorslà,çadépassetout.Ilestincroyablementbeauetenplusilluifaitl’effetd’êtrebienavecelle.

–Qu’est-cequej’aidit?s’inquiète-t-ilenlavoyantainsifigéedevantlui.

–Rien…je…jecroisquec’estlapremièrefoisquejetevoissouriredeboncœur.

Ellearaison,etcetteconstatationlefaitserefermeraussitôtetrevêtirsonmasqueimpassible.

–Cen’étaitpasunreproche,assure-t-elle.

123

–J’aideschosesàfaire,jepensequetudevraisrentrer.Nousnousverronscesoirdetoutefaçon.

Toutenénonçantcettephrase,ilsedemandebienpourquoiillaverraitcesoir.Cependant,laréponseluiparaîtévidente.Elleestdevenuedangereusedanslamesureoùellesesouvient,etpourseprotéger,ildoitluiprendrelavie.

124

Chapitre15

–Honnêtement,jen’enaipasenvie.

Évidemment?Pourquoiest-cequ’elleluifaciliteraitleschoses?

–Jeveuxpasserlajournéeavectoi.

ElleseredressecommeellearticulesonsouhaitquidéplaîtàSulli.S’ilabienhorreurd’unechosec’estdesfemmescollantes.Entantquevampire,ilabesoind’espaceetdeliberté.Cequ’ellenesemblepasd’avisdeluiaccorder.

–Délila,j’aidesobligationscetaprès-midi.

–Vraiment?questionne-t-elleens’agenouillantsurlelit,complètementnue.Tum’asditçaautéléphoneetjen’aipasl’impressionquecesoitvrai.

Biensûrquec’estfaux,puisqu’ilnepeutpassortirenpleinjour.Ilvadevoirl’hypnotiserpourqu’ellepartedecechâteau.Ils’approched’elleetposesamainsursajouequ’ilcaressecommeilréclamequ’elleleregarde.

Délilapourraitseperdredanssesprunellessombres,divinementattrayantes.Ellealasensationqu’ilsedéroulequelquechosedemagiqueentreeuxàcetinstant,maistoutsebrisequandlaportes’ouvre.

SullibonditsurDélilapourlacouvrirdelacouettecommeilplongeunregardmenaçantdanslesyeuxdeNarcissequioseledéranger.

–Sorsd’ici!

DéliladéglutitenentendantSullidonnercetordreaustère,ilressorttellementdeméchancetédanssavoixqu’ellesecacheraitsouslelits’ils’adressaitainsiàelle.Ellen’osepastournerlatêtepourregarderl’importun,enfait,ellen’osemêmepasbouger,emprisonnéesouslecorps125

puissantdesonamant.

–Jecroyaisquetuavaisfinidet’amuseravectonhumaine!pouffeNarcisseenesquissantunsourire.Vraimentdésolé.Hum...quelculmagnifique!

Levampiren’arrivepasàcroirecequ’ilentend.Narcissea-t-ilperdulatête?PourquoinommerDélilaainsi?Elleval’interrogeretilnesaurapasquoiluirépondre.

–Fichelecampavantquejenemecontrôleplus.

DélilaentendlaporteclaqueretSulliseredresselégèrementjusqu’àlalibérercomplètementdesonemprise.

–Accorde-moiuninstant,réclame-t-ilenenfilantsonboxeretsonpantalonencuir.

–Quiétait-ce?

Ça,ils’enseraitdouté!Iltrouvequeleshumainesparlenttrop.

–Nesorspasdecettepièce,ordonne-t-ilavantdequitterlachambre,claquantlaporteaupassage.

Délilaeststupéfaiteparcequivientdesedéroulerici.Elleignorequiestvenulesdérangeretdouted’obteniruneréponsedeSulliquin’abandonneplussonmasqueimpassibledepuisplusieursminutesetboutderage,ellel’abiensenti.Elleramassesesvêtementséparpilléssurlesoletserhabille.

Narcisseseretrouveencastrédanslemurdesachambresansrienavoirvuvenir,lesyeuxnoirsdeSulliplantésdanslessiens,sesmainsmaintenantfermementlecolmontantdesarobe.

–J’avaisordonnédenepasquittervoschambres!Est-cevraimenttropduràcomprendrepourtoi?colère-t-ilenleplaquantplusfortcontrelacloison.

–Lâche-moi!

Narcissetentedesedébattre,maisSulliestbientropfort,sanscompterquelaragel’animantàcetinstantdécuplesesforces.

–J’aienviedetefairepasserparlafenêtre,lemenace-t-il.

126

Narcissedéglutit,l’enpensantbiencapable.

–Tul’hypnotiseras.

–Ahouais?Quies-tupouravoirlaprétentiondemedonnerdesordres?Tun’esrien!JesuisTOUT!

SullilâcheNarcisse,maisuniquementaprèsluiavoirmisunedroiteenpleinvisage.

–Contrôle-toi!Ondiraitunegonzesse!

LevampireénervébonditdenouveausurNarcissepourlecollercontrelemuretfairedangereusementtremblerlescloisonsduchâteau.

–Jetecrèverai,Narcisse.

IllelâcheenentendantDélilacriersonnom.Quelquessecondesaprès,ilestdanslachambreavecla

jeunefemmequ’ilenlace.

–Çaatremblé,articule-t-elle,encoreapeurée.

–Toutvabien.

IlsgardentlapositionencorequelquesminutesavantqueDélilaexigedesréponsesàsesquestionsaprèsl’avoirrepoussé.

Levampirenepeutpasraconterdemensongesparcequerienneseraitcrédibleetelleneluifaitpasvraimentconfianceaprèsavoircomprisqu’illuiamentisursajournéesoi-disantchargée,alorselledouteraitpeuimportesesrévélations.Ilnepeutpasnonplusl’hypnotiserpourluieffacercetinstantquiluirevendraitparbribesenrêve,alorsilenesttoujoursaumêmepoint:latuer.

Ilvatenterunetraqueimprovisée,puisilboiral’élixirquicouledanssesveines.

–Sulli!aboie-t-elledevantsonmutisme.

–Pourquoia-t-ilfalluquetuviennesici?peste-t-il.Tumemetsdansunepositiondélicate!

Ilfrappesonpoingdanslemurengendrantl’effritementdelaparoietlapeurdeDélila.Laragequ’ilexprimaitàl’encontredel’importunilyaquelquesminutesestmaintenantdirigéecontreelle.

Ilsetournepourluifaireface…etlà,c’estlastupeurpourlajeunefemmequin’aplusl’hommequ’elleconnaîtetaimedevantelle.C’estun127

inconnu.Sesyeuxbrillent,maisplusdedésiroudeplaisircommecefûtlecasunpeuplustôt,non,cettefois,c’estdel’envie…del’envied’infligerdumal.Elledéglutit.

–Qu’est-cequiteprend?articule-t-elleavecdifficultés.

–Ah!Vous,leshumaines,toujoursàtoutvouloirsavoiretexpliquer,sanscesseentraindebavasser!C’estépuisantàlalongue!Jen’enpeuxplus!Pourquoitunet’espascontentéedecequejetedonnais?Çam’apprendradenem’attaquerqu’auxblondes!

–Qu’est-cequeturacontes?

Ellenecomprendpasunseulmotdesatirade,c’estcommes’ilparlaitpourlui-mêmed’ailleurs.

–Ilfautquetut’enaillesavantquejenemaîtriseplusrien.

–Maîtriserquoi?

Iln’ycroitpas!Cettefemmeestsoitfolle,soitsuicidaire.Commentpeut-elleencorelequestionneraprèscequ’ilvientdeluidire.C’estpresqueunaveudecequ’ilestetellenedevinepas.Non,elleinsiste.

–Délila…Délila…

Ilfermelesyeuxpourlesrouvrirsurdespupillesnoiresdilatées,noyantsonregardfoudanslesyeuxbleusdelapetiteinconscientequinefuittoujourspas.Pourtantquandils’amuseavecelle,elleserésignerapidement,peut-êtreest-cedelarenonciation.Ilauraitquandmêmeaiméqu’ellesedéfendeunpeu,qu’ilaitdequoisedivertir.

Àquoipense-t-elled’ailleurs?Ils’insinuedanssonespritpourlirequ’elleestentraindes’interrogersurluietsescapacitésmentales.Ilricane.

L’instantsuivantilseplacedevantelleàunevitessesurprenante.

–Onvajouerunpeu,mabelle.

Ilcaressesoncoucommeilpenchelatêtesurlecôté,ilrespirel’odeurdesapeur,undélice.Enfin,ilaréussiàl’effrayer.

–Soisgentilleavecl’hommequetuaimes,chérie,etneterésignepastropvite.

–Merésigner…àquoi?

128

Ilesquisseunsourire,maistotalementdifférentdeceluiquiaégayésonvisageunpeuplustôt.Cettefois,illuifaitpeuret…ohmondieu,iladescaninespointues.C’estunvampire.Ellecroitêtredansunmauvaisrêve.

Ouic’estça,elleestdanssoncauchemar,c’estsaseulepossibilité.

–Cours,monamour,avantquejenetesucejusqu’àladernièregoutte!

Cettephrasen’ariendesexueletDélilaprendsesjambesàsoncoupourdécamperdelachambre.Ellecavaledanslelongcouloirduchâteausachantpertinemmentquesaseulechancedeluiéchapperc’estdesortirdelademeure.Iln’estpassupposétolérerlesoleil,doncsielleveutsurvivre,elledoitfiler.

Commeellecourtàtraverslarésidence,ellerevoitdesbribesdesesrécentsrêves,elle,entraindefuir.Ellen’osemêmepasfairelerapprochement,ellerefusedetireruneconclusion…non,ellerepoussel’évidencedetoutessesforces,laissantleslarmesperlerducoindesesyeux.Elles’estfaitavoiretparunvampireenplus.

Audétourd’uncouloir,elleseheurteàunbloc.Mondieu,non!C’estunhommequil’empoigne.Ellehurlecommeellelèvelesyeuxsurlui.

Sullivan.

–C’étaittoi,articule-t-elleenlarmes.

Ilestl’acteurdesescauchemars,mêmesiellenecomprendpasencorecequecelasignifie.Commentçapeutêtrepossible?Cependant,ellen’estpasdécidéeàyréfléchirmaintenant.Elleretiresamaindelapoigneduvampireavecfacilité,imaginantaisémentqu’ilsouhaitelavoirgaloper.

Elleluidonnealorscettesatisfactionetdescendlesdeuxétageshâtivement.Laported’entréen’estplusqu’àquelquesmètres,elleestpresquehorsdedanger.Presque,parcequ’ellesedoutaitbienqueceneseraitpassisimplequandellevoitSullisurgirdenullepartluibloquerlepassage.

–Jesenstapeur,communique-t-ilenmarchantverselle.

Ellerecule,cherchantdésespérémentuneissue.Ellen’aguèrelechoixetestobligéederetourneràl’étagealorsellepivoteetgravitquelquesmarchesavantqueSulliattrapesachevilleetlafasseainsitomber.Illatraînesurquelquesmètrespuiss’abaissecommeilouvresonpantalon.

Délilaconstate,horrifiée,qu’ilcomptelavioler.Elleauraitpule129

comprendresielles’étaitrefuséeàlui,maiscen’estpaslecas,ilsontdéjàcouchéensemble;alorsoùestl’intérêt?

Ilapprocheencoreets’allongesurelle,laforçantàsubirsesbaiserssursagorge.Çan’aplusrienderomantiqueetlajeunefemmeressentmêmeuneenviedevomirlagagner.

–Nefaispasça,bafouille-t-elleententantdelerepousser.

–Ohoui,continue.Tufaisçatrèsbienpourunefois.

Pourunefois?Queveut-ildireparlà?Néanmoins,ellenecomptepasleluidemander.

D’unemain,ilimmobiliselessiennesau-dessusdesatêteenlesmaintenantdesespoignetsalorsquedel’autreillibèresonmembreengorgéqu’iltentedepénétrerenelle.

–Nefaispasça,supplie-t-elle.

Deslarmesperlentducoindesesyeuxcommeils’immobilise,nesachantpluscommentagir,laforceroulalibérer?Ilestpourtantsiprèsdubut.

–Lâche-moi,s’écrie-t-elle.

–Obéit!résonneunevoixféminine.

Délilaaperçoitunesuperberousse–cellequ’elleadéjàvueauStéréo-nightclub–quiseplacederrièreSullipourletirerenarrière.Sullisedébatalorsuneautrefemmeluivientenaidepourlemaîtriser,puisunhomme–

tousceuxqu’elleaaperçusavecluiauclub.D’abordtétanisée,ellenebougepas,maisensuiteelleseremetsursesjambesetpartendirectiondelaporte,profitantdel’inadvertancedesessauveursqu’ellesoupçonneêtredesvampires.

–Bastian,l’humaine!s’écrieunefemme.

Délilaneseretournepas,maissentunpoidss’abattresurelle.Onl’empêchedes’enfuir.Ellesedébatcontresonadversaireetquandelleconstatequec’estunhomme,elleluienvoieuncoupdepiedmagistraldanslespartiesintimes.Illalâche,ellequittealorslademeureaussitôt.

Commeunedératée,Délilatraverselapropriétéquandsesyeuxseposentsurlaforêtalentour.MonDieu…elles’immobiliseenréalisantqu’ils’agitdecelledesescauchemars.Commentest-cepossible?Quelui130

afaitcevampire?Ellerefouleseslarmesetsehâtejusqu’auportail:lagrilledefer.Cellequireprésentaitladélivrancedanssonsonge.

Ellerefusedelaisserleschosess’emboîter,elleveutjustes’enallerettoutdesuite.

Quandelleafranchilaclôture,ellejetteunregardsurlechâteaudel’horreur.Cettefoisc’estsûr,l’endroitnelafascineraplus,etlemonstrel’habitantnonplus.

Elleignoreencorecommentgérerlasituation,maisellesefaitconfiance,elletrouvera.Doit-elleavertirlapoliceouopterpourunarticlescandaleuxdansleJournal?Pourlemoment,elleestvidée…elleneveutpasypenseretrentresimplementchezelle.

131

Chapitre16

–Ohputain,Sulli!cracheBastian.

–C’esttoiquiviensdelalaissers’enfuir,aboiel’intéressé.Ettoi,peste-t-ilenpointantJosephtedudoigt,dequeldroites-tuintervenue?

–Tucroisquejenet’aipasvuvenir?tonneJose.Tul’auraistuéeaprèstapetiteséancedetorture!

–Etalors?Merde!Maintenantelleestdanslanature!Etceputaindesoleilm’empêchedelatrouver.

–Jem’occuperaid’elleàlanuittombée,décideRosalie.Jel’hypnotiseraipourqu’elleoublietoutça.

–Tuquoi?s’ahuritSulli.Espèced’idiote!Banded’inconscients!

Ilfrappesonpoingdanslemuravantdejeterunregarddeglaceàsestroisamis–Narcisseayantdécidédenepassortirdesachambre.

–Toutesmestraquesresurgissentdanssesrêves,lesinforme-t-ilenadoptantuntonpluscalme.

–Ellesaitquet’esunvampire,comprendBastian.

–Elleavumescrocs.

–Commentsefait-ilquetonpouvoirsoitinsuffisantsurelle?

questionneJosequinecomprendpas.

Sulliestunvieuxvampirequigagneenpuissanceàchaquedécennie;alorspourquoil’hypnosesembles’ébranlercommesielleétaitpratiquéeparuncharlatan?

–J’ensaisrienetc’estpourçaquejedoislamassacrer.Ellenousnuira.

132

–Tusaisoùellehabite?s’intéresseBastian.

–Oui.

–Tupeuxyentrer?

–Oui.

–Jecroisquetusaiscequ’ilteresteàfairecettenuit.

–Non!objecteRosalie.Sulli,tuavaispromisd’attendre.

–Jen’aipaslechoix.

BastianetJosephteremontentàl’étagealorsqueRosalies’approchedeSulli.

–Sapeurt’aexcité?

–Oublieça.

–Jepourraistedétendre,murmure-t-elleencaressantsontorsedénudé.

Iléjectesamainavecrapidité,ilahorreurqu’onletouche,horreurqu’onluidonnedesordres,horreurdusexe,ila…ilsefaithorreur.

Ildétestecequ’ilvientdefaire.Jamaisiln’auraitdûs’amuseravecsaproieenpleinejournée.Ilauraitdûêtreplusprudent,maintenantilestcoincé.

Délilas’enfermeàdoubletourdanssonappartementetselaissetombersursoncanapéavantdes’envelopperdansunecouverture,tentantderespirercalmementetdemettresesidéesenordre.

Sulliestunvampire.C’estquelquechosedegérable.

Maisc’estbienlaseule.Parcequeleresteesttotalementingérable.Ill’aattaquée.Sansl’interventiondelarousseelleauraitsubiunviol,etsielleencroitsesrêves,cen’estpassapremièretentative.Iln’apeut-êtrejamaisessayédelavioler,maisillaterrifiaitetlafaisaitcourirenlapourchassant.Illatraquait.Elledéglutitenarrivantàcetteconclusion.

Autrechosel’interloque,pourquoin’a-t-elleaucunsouvenirdetouscesmomentsoùelletentaitdelefuir?Etqueluifaisait-ilquandill’attrapait?

Elledevraitpouvoirobtenirdesréponsesauprèsd’AntoineTringle.

Enpensantauspécialistedescréaturesnocturnes,ellesongeàleur133

conversationdelamatinée:elleaétémarquéeparunvampire.Unecréaturequil’achoisiepour

jouer,àquielleappartient.Sulli.

Ellefermelesyeux.Pourquoia-t-ilfaitça?

Quiacommislesmeurtres?Est-ceSullioulesautresvampires?

Décidément,elleatropdequestionssansréponses.

EllesaisitsontéléphoneetappelleauJournaloùelledemandeàsonpatronunnuméropourjoindreAntoineTringle.Aprèsquelquesnotesd’humourdouteuxsursondépartprécipitédecematin,illeluidonne.

Sansperdreuninstant,ellelecompose.

–AntoineTringle,j’écoute.

–DélilaNagar.J’aibesoindevousparler.

–Jesuisdésolédevousavoireffrayéecematin,mademoiselleNagar.

–Oh,cen’estrien.

Sielleabeletbienétaitapeuréecematin,cen’estrienencomparaisondecequ’ellevientdesubir.

–Vousvoulezquejevousretrouveàvotrebureau?

–Jesuischezmoi,siçanevousposepasdeproblèmedem’yrejoindre.

Elleréalisequeçafaitpeut-êtreunpeutôtpourl’inviterdanssonappartement,maisellesesentbienincapabled’affronterl’extérieurencetinstant.

–Donnez-moivotreadresse.

Elleobéitetilluiprometd’êtresurplacedansunquartd’heure.Cequiluilaisseàpeineletempsdesedoucherpoursedébarrasserdel’odeurdeSulli,etdesechanger.Elleoptepourunjeanetunpullàcolroulé,elleveutêtretotalementcouverte.

Àpeinedeuxminutesplustard,elleseretrouveassisedanssoncanapéenfaced’AntoineTringle.

–Vousavezditquejesuismarquée.Qu’est-cequecelasignifie?

–Vousêteslaproieduvampire.Iljoueraavecvousaussilongtempsqu’ilenéprouveraledésiravantdeboirevotresang.Aucunmâlen’aledroitdevousapprocher.Unvampirepeutsentirl’odeurdevotremaîtresur134

vous,maispasunhumain.

–Quesuis-jesupposéedégagercommeodeur?

–Celledeceluiquivousamarquée.

–Est-cequ’ilpeutmelibérer?

–Non.Lamortestvotreseuledélivrance.

Charmanteperspective.

–Généralement,ellesurvientrapidement,lesvampiresselassentvitedeleurproie,surtoutsiellesnesontpasàlahauteur.

Neterésignepastropvite.Tufaisçatrèsbienpourunefois.

LesparolesdeSullirésonnentdanssatête.Cequiluiprouvequenonseulementilestceluiquil’amarquée,maisaussiqu’ilselassed’elle.

–Pourquoiai-jetoutoublié?

–Ilvoushypnotiseaprèsvosséances.

–Qu’est-cequ’ilmefaitpendantces…séances?

–Ilvoustraque.Peut-êtremêmequ’ilabusesexuellementdevous.

Ellen’enapaslesouvenir.Latraqueparcontre,c’estunecertitude.Etcerêvequ’elleafaitd’elleetSullientraindefairel’amour,c’étaittoutsaufunviol.Avaient-ilscouchéensembleavantaujourd’hui?

–Est-cequ’ilboitmonsang?

–C’estpossible,maisquasimentsouventexclu,unvampirequiboitdusanghumainabeaucoupdedifficultéàs’arrêteravantdetuersaproie.

Ilcomptesansdoutelefairequandilauradécidédestopperlejeuavecvous.

Elleavraimentlasensationd’êtredansuncauchemar,toutcequiluitombesurlatêteestahurissant.

–Est-cequejepeuxmesouvenirdecequelevampireavoulueffacer.

–Toutdépendduvampire.Sic’estunjeune,ilsepeutquevousrecouvriezlamémoire,maissic’estunvieux,ilestpuissant,aucunechancequevossouvenirsreviennent.

Donc,elleendéduitqueSulliestunjeunevampire.

–Commentpuis-jeletuer?

135

–Ilfaudraitdéjàquevoussachiezquiilest.Unvampireintelligentnelaisseraaucunetracedeluienvous.Ilsepeutquevouspensieznepasleconnaître.

Sullin’estdoncpasunvampireintelligent.

–Vousn’avezpasréponduàmaquestion.

–Pourlesjeunes,unobjetcontondantdanslecœursuffira,pourlesvieux,celaneferaquel’immobiliseruncourtinstantpendantlequelvousdevrezsectionnersatête.

Unobjetdanslecœursuffit,parfait.Sullivitsesdernièresheures.Etdirequ’elleavaitpeurd’uninsignifiantvampire…elleenriraitpresque.

Cependant,leplusdurresteencoreàfaire.Ellevaluidonnerrendez-vousetletuer,purementetsimplement.Ilpensequ’elleserésignebientropviteàmourir,c’estmallaconnaître.Ellen’estpasjournalistepourrien,ellen’apaspeurdeplongertêtebaisséedansleshistoiresdangereuses,etmêmesilefaitd’avoirétémarquéeparunvampireluiafichulatrouillesurlecoup,maintenantc’estpassé.

A-t-ellebesoindesavoirautrechose?Ellenedoitrienlaisserauhasard.

–Commentfairepournepasêtrehypnotisée?

–Ilnefautpasregarderunvampiredanslesyeux,ilestcapabledeprendrelecontrôledevotrecorpsoudevousfaireoublier.Unvampirepuissantpeutliredansvospensées.

SaufqueSullin’estpaspuissant.

–Autrechosesurlesjeunesvampires?

–Non,jenevoispas.Ilsn’obtiennentleurspouvoirsqu’avecletemps.

Danscecas,ellepenseêtreparéepourl’affronter.

–Undernierdétailnéanmoins,nel’invitezjamaisàentrerchezvous.

Oui,lafameuseporteinvisiblequiempêchelesvampiresdepénétrerchezleshumainssansyavoirétéinvitéaupréalable.Donc,cen’estpaschezellequ’ellemettrafinauxjoursdesonagresseur.

–Jevousremercieinfinimentpourtoutessesprécisions.Mais…

euh…commentreconnaît-onunvampire?

–Leurpeauestfroide,leurcorpsestdur,leurcœurnebatpas,ilsn’ontpasderefletdansunmiroir,ilsviventlanuitetdormentlejour,136

possèdentuneforcesurnaturelle,etoh…ilssonttrèsrusés.

ElleabienremarquéqueSullialapeaufroide,maisn’apasfaitattentionauxbattementsdesoncœur.

–Ilsontdescrocs,précise-t-elleplusqu’ellenelequestionne.

–Effectivement.Ilssemanifestentetserétractentselonleurvolonté.

Trèsintéressanttoutça,maisilesttempsderemerciermonsieurTringleparcequ’elleadeschosesàfairemaintenant.

–Jenepeuxquevousconseillerdevousméfierdesgensquevouscôtoyez.

Inutile,jesaisdéjààquij’aiaffaire.

–Biensûr,jeprendrailepoulsdechaqueindividuquim’approchera.

Elleritdesonidiotie,etluiaussi,puisilluidemandedefaireattentionàelleets’enva.

D’ailleurs,unequestionluitrotteentête:pourquoiSullidit-ilqu’elleserésigne?Ellen’estpasdenatureàbaisserlesbrasets’avouervaincue.Cen’estpaselle,elleestplutôtdugenrefonceuseàtoutécrasersursonpassage.Iladûluifaireatrocementpeurpourqu’elleenvienneàserésigner.

Ilesttempsdeprendrecontactaveclevampireàexterminer.ElleattrapesontéléphoneetappellececherDucLancaster.

–Délila?Quellesurprise!

–J’imagine.Ilfautquejetevoie.

–Pourquoi?

–Hum…voyonsvoir,jesaisquituesetjepeuxdonnerl’alertesurtoi.

–Ilmesuffiraitdedisparaîtreetdem’établirailleurs.

Surtoutpas.Elleveutqu’ilpaie,pasqu’ilparte.

–J’aidesquestionsetj’estimeavoirdroitàdesréponses.

Ellel’entendrire,ilestentraindel’exaspéreretellenevapasgardersonsang-froidlongtemps.

–Aprèstum’hypnotiserasettunerisquerasplusrien.

137

Cetteseulephraselefaitreprendresonsérieux.

–Vraiment?

–Àvingt-deuxheuresàmonbureauauJournaldeMontréal.

–Oùestlepiège,Délila?

–Iln’yenapas.

–Jevaistefairecethonneur,aprèstout,jesuisleprédateurettoilaproie,jenerisquerien.

Vraiment?

–Tuviendrasseul,biensûr.

Denouveau,ellel’entendrire.

–Tumecroisvraimentcapabled’amenerdesrenfortsalorsqu’àmoiseuljesuisimbattable!

Quellesuffisance!Iln’apaslamoindreidéedecequil’attend.Illaprendpourunepetiteidiotetrouillarde,ilvaavoirunejoliesurprise.

–J’aihâtedet’avoirenfacedemoi.

Elledéglutit.Ellen’estpluscertaine…si,ellelevaincra.

Elleraccrocheaussitôt,laissanttombersontéléphoneensuite.A-t-elleprislabonnedécision?Cetête-à-têten’avaitpasl’airdel’effrayer.C’estsansdoutel’arrogancedejeunevampirequiparle.

138

Chapitre17

Iln’yapluspersonneauJournaldepuisunquartd’heure,Délilaacequ’ellevoulait,elleestseuledansl’établissement.Elleaglisséunpicàglace–l’armeducrime–danslapochearrièredesonjean.Ellel’utiliseradèsqu’elleauraeulesréponsesàsesquestions,etseraainsilibéréedesonemprise.

Ellesursautequandunelégèrebrisepénètredanssonbureau,cequiesttrèsétrangepuisquelafenêtreestfermée.Soudain,leventfaitclaquerlaporteetSullisematérialisejusteàcôté,laissantlajeunefemmestupéfaite.

Ilcroiselesbrassursonbuste,ilestentièrementvêtudenoiretilestbeauàtomber,c’estlapremièrepenséedeDélila.

–Bonsoir,monange.Commenttrouves-tumonentrée?

Ellecommenceparrespirercalmementpoursefaireàl’idéequ’ilpeut…

c’étaitquoi?

–Incompréhensible.

–Jem’amusaisaveclevent.Bon,queveux-tusavoir?

–Pourquoiest-cequetum’asmarquée?

–Pourmedistraireavectoisansqu’unautret’arracheàmoi.Vois-tu,siunvampireavaitsentimonodeursurtoisansquetusoismarquée,iln’auraitpashésitéàteviderdetonsang.

Charmant.

Quevoulait-elleencoresavoir?Sabeautémalsainelatroubleintensément,àmoinsqu’ilnesoitquestiond’autrechose.Pourquoiest-elleaussiattiréeparcemonstrequilarépugne?

–Parcequejet’aimarquée,voyons.

139

–Non…c’estimpossible,tunepeuxpasfaireça.

Commentfait-ilpourlireenelle?Iln’estqu’unjeunevampire.

Ellelevoitrire.

–Tuserasattiréeparmoipeuimportecequejeferai,etce,jusqu’àlafindetacourtevie.

–Tunedevraispaslireenmoi!peste-t-elle.

–Entoi?Tusaisquetesyeuxsuffisentàtetrahir.

Ellebaisseleregard,maisjustequelquessecondes,ellenedoitpaslequitterdesyeuxoùilpourraitl’attaquer,ilpourraitaussil’hypnotiser,maisencetinstantçaluisemblemoinsinsurmontablequ’uneattaque-surprise.

–Onadéjàcouchéensemble,n’est-cepas?Jeveuxdire,avantcematin.

–Oui.Tonrêveestlaréalité.C’étaitlasecondefoisdelanuit,aprèsquejet’aimarquée.

Pourquoin’a-t-elleaucunsouvenirdecettefoisoùill’afaitesienne?

–Commenttut’yespris?

–L’alliancedusexeetdusang.Jen’étaispascertainderéussir,enfait,jenesuisjamaisparvenuàmarquerunehumaine.

Lesmainsnouéesdanssondos,Délilaserrefermementlepicàglace,prêteàl’utilisers’ilbonditsurelle.

–Ellessontmortesàchaquefois,jebuvaistrop,maispastoi…tuesmapremièreréussite.

–Jesuisflattée,semoque-t-elle.

–Unlientrèsfortunitlevampireetsaproie,jesuissûrquetuleressens.

–Tunem’inspiresrienquedudégoût.

–Tumefendslecœur.

–C’esttoi,lesattaques?

–Cen’estpasdrôled’attendrebiensagementd’êtreintégré,d’autantquejen'arriveniàmepasserdesangfraisniàm’arrêteravantdetuerl’humaine.

140

Ilnebougepasd’unpoucetelleunestatuedepierreinexpressive.Maisenlui,beaucoupdechosesletourmentent.Déjà,commentmettrefinàcelienquil’unitàl’humaine?Doit-illatuerouseulementl’hypnotiseretpartirsansseretourner?Iln’estpascertainquesespouvoirsopèrentsurellepuisqu’ellearriveàsesouvenir,alorsceseraitsansdoutesuicidaired’opterpourcettetechnique.Ellesesouviendraitdansquelquesjoursetlanceraitunechasseauxvampires.Tropdangereux.Maislatuer…ilnepensepass’yrésigner.Elleforcel’admiration.Quelcourageelleadûrassemblerpourluidonnerrendez-vousiciafind’avoirlesréponsesàsesquestions!D’ailleurs,toutefillenormalementconstituéen’auraitpasagicommeelle.Elleseseraitcontentéedutéléphone,oumieux,dedisparaître,auplusloindelui.Alorspourquoiest-ellesiconfiante?

Ilfaitquelquespasjusqu’às’asseoirsurlesiègeàtroismètresd’elle.

–Combiendefoist’es-tufaitprendredanscebureau?

–Çaneteregardepas,etçan’aaucunrapportavecnotreaffaire.

–Jamais,jemetrompe?Tun’aspasenvied’essayer?

–Non!

–Onarriveauboutdenotreconversation,Délila,onvapasseràl’hypnose,alorsonpourrait…unedernièrefois,qu’endis-tu?

Qu’ilaraison!Non,qu’ilestfou!

–Neluttepas,quoiquetufasses,tuaurastoujoursenviedemoi.Jepourraisassouvircedésir,situt’approchais.

Ellelâchelepicàglaceetfaitquelquespasdanssadirection,s’efforçantdenepenseràrien.Ellen’estpascertainequ’ilaitvraimentvudanssesyeuxcequiluitraversaitl’espritetpréfèreopterpourlaprudence.

–Justeunefois,articule-t-elleens’asseyantàcalifourchonsurlui.

Ilplongesesyeuxsombresdanslessiensquelquessecondesavantqu’elledétourneleregard,préférantneprendreaucunrisque.

Ellesentlesmainsduvampireglissersoussonpulletc’esttrèsdangereuxpourelle,ilpourraitsentirl’armeblanche.

–Laisse-moifaire,réclame-t-elle.

Ilretiresesmains,elleavaitdansl’idéed’enleversonpull,dumoinsdelefeindrepours’emparerdel’arme,maisellenepeutplusluttercontrece141

mauditattraitqu’elleéprouvepourluietdécidedes’yadonner…justeuncourtinstant.Elleécraseseslèvressurlessiennesetl’embrassequelquessecondescommeellesepressecontresoncorpsdepierre,nepercevantaucunbattementducôtédesoncœur.Elleselaisseperdreparcebaiserdurantd’interminablesminutesalorsquelesmainsduvampirecourentlelongdesondos.Ensuite,toutbascule.

Elles’écartepresqueàcontrecœur,maisnedevantpasoublierl’objectifdecetterencontre.

–Jesuissincèrementamoureusedetoiouc’estparcequetum’asmarquée?

–Mamorsurenepeutqu’auplustefaireéprouverundésirirrépressiblepourmoi,ellenepeutpast’obligeràm’aimer.Là,c’esttoncœurquiparle.

Ehbien,lav’làbien!

Elleposeànouveauseslèvressurlessiennescommeelleattrapelepicàglace,etquandellerecule,elleleluiplantedanslecœur.Délilabonditenarrièreenconstatantquelevampirenebougeplus,latêtependantverslebas.Elles’attendaitàcequ’ilsedécompose.Alorsquedoit-ellefaire?

Est-cefini?

Elleseprécipitesurletéléphoneetappellelespécialistedelaracepourensavoirplus.

–Allo.

–DélilaNagar,dites-moi,unefoisquelevampireareçuuncoupenpleincœur,ilestsupposésepasserquoi?

–Vousm’appelezàcetteheure-cipourça?

–Répondez-moi,jevousenprie.

–Lejeunevampiresedécomposerajusqu’àfinirencadavre,cequ’ilauraitétésanssatransformation.

–Bien.C’estrapide?

–Instantané.

–Non,souffle-t-ellealorsqu’onluiempoignelescheveuxpourtirersatêteenarrière.

Sulliraccrocheletéléphoneavantdelatournerverslui,àsamerci,142

saisissantviolemmentsescheveux,tirantsatêteenarrièrepourpercevoirsagorge.

–Tuastentétachanceettuasperdu,àmoimaintenant,déclare-t-ilenbaissantsonvisagejusqu’àsagorge.

–Jet’ensupplie,non.

Ilseredressealorspourplongersonregardsombredanslabeautédusien.

–Tum’asprispourunjeune,tuaseutort,etçavatecoûterlavie.

–Alorspourquoijemesouviens?demande-t-elle,larmoyante.

–Jel’ignore,maisçanedevraitpasarriver.J’aiplusdecinqcentsans,jesuistrèspuissant.

Etrienneleluilaissaitprésager,elleafaituneregrettableerreurdejugement.Uneméprisequ’ellenes’expliqueaucunement.

–Jenedirairien,jet’enprie,jeneveuxpasmourir.

Pourquoifaut-ilqu’ill’écoute?Ildevraitl’assécherdesonsang,icietmaintenant,sansétatd’âme.Pourtant,ilena.

–Onvapasserunaccordtouslesdeux.

Ellehochelatêteavecdifficulté,lesyeuxnoyésdelarmes,terrifiée…etrésignée.

–Tuesàmoi,etdecefaitjepeuxteretrouveroùquetusoisetquandjeledécide.Situparles,jelesauraietjetetuerai.

Elleacquiesced’uninfimehochementdetêtecommeildesserrelégèrementlapression.Lasecondesuivante,surunepulsion,ilécraseseslèvressurlessiennes,puislalibèrecomplètementavantdedisparaîtredansuncourantd’air.

Délilaposesamainsursoncrâne,illuiavraimentfaitmal.Elleprendunmomentpourréalisertoutcequivientdesepasser.Elleafaillimouriretsiellevitc’estuniquement…parcequelevampirel’adécidé.Ilpourralaretrouveroùqu’ellesoitetentermineravecellefacilement.Elleafaituneerreur,iln’estpasunjeuneimbécile,maisunvieuxpuissant.Pourtant,unequestionresteensuspensdetoutecettesoirée:commentsefait-ilqu’elleserappelle?Autrechoseaussi:ilaréussiàlamarquerorilaéchouéavectouteslesautres.Ilvafalloirqu’elletrouveuneréponseàça,143

etellesaitdéjàqu’àlapremièreheurelelendemain,elleinterrogeraAntoineTringle.

Sesyeuxseposentsurlepicàglaceausol;ellecroyaitnaïvementqueçalemettraithorsd’étatdenuire,labelleerreur!

Toutçaestbienassezpouruneseulejournée,toutefoiscen’estpasencorefini.Elleselaisseglisserlelongdesonbureaupours’asseoirsurleparquet.Elleestattiréeparluiparcequ’ill’amarquée…etelleestamoureusedelui.Cesentimentqu’ellenedoitqu’àelle,etàriendesapart.Commentlegérer?Ellel’ignore.Yparviendra-t-elleseulement?

ElleseremémorecettefameusesoiréeàlaquelleellearencontréleDucLancaster.Riennelaissaitprésagerdelasuitedesévénements.Sielleavaitneserait-cequ’imaginéqu’ilétaitunêtredelanuit,ellel’auraitfuicommelapesteaulieudebaverdevantluietd’entomberamoureuse.Elleestbienconscienteden’êtrerienenfacedecevampirequiauratoujoursraisond’elle.Elleauraitpuenfinircesoir,siellen’avaitpassous-estimésonadversaire.Maisaurait-ellesurvécuàladouleurquecette

perteauraitcausée?Sulliaétéclair,lessentimentsqu’elleéprouvepourluinesontenrienliésaufaitqu’ill’aitmarquée.

Ellen’apasvéritablementlechoix,elledevraseteniràdistancedelui,maispasoublierpourautant.Elleveutsavoirpourquoisessouvenirscensésdisparusrefontsurface.Quandellesaura,alorsellesejetteradanslagueuleduloupetserendraauchâteaupourpartagersesdécouvertesavecSulli.C’estsansdoutesoncôtéjournalistequil’ypoussera.Délilaaimetoutsavoirsurtout,surtoutquandçalatouchedeprès.Ilestpossiblequelajeuneintrépidepaiedesavielenon-respectdesapromesse.Maisellesaitdéjàquejamaiselleneréussiraàseteniràl’écartdeSullidèsqu’ellesauracequ’ilenest…pourquoitoutestsidifférentpoureux.

–Çayest?Elleestmorte?résonneunevoixfémininedanslehallduchâteauquandSullienpasselaporte.

IlabienreconnuRosalie,etsedemandeenquoicelapeutl’intéresser.

Enfait,ilimaginequ’elledésirequ’ildémente.

–Qu’est-cequeçapeutfaire?

–Pourquoisesouvient-elle?

144

Aucunreproche.L’attitudedelabrunettedéconcertelevampirequis’attendaitàautrechosedesapart.

–J’ensaisrien,soupire-t-il,àboutdeforce.

–Tul’astuée?

–Non.

Rosalielaisseéchapperunsourire,quelquepartelles’endoutait.

–Cachetajoie!

–Sulli!Çan’auraitétébonpourpersonnequ’ellemeure.

–Etqu’ellevive,alors?Çal’estpourqui?Ellepourraitnousbalancer!colère-t-il.

–Tuluiasbieneffacélamémoirecesoir?

–Àquoibon?Tupeuxmeledire?Elleseseraitsouvenue!

–Oui,maissousformederêve,Sulli!Merde,t’aspasétéassezstupidepourlalaisserenvieaveccequ’ellesait!tonne-t-elle.

Levampireencolèreseruesurelleetd’unemainenserrantsagorge,illaplaquecontrelemur,

d’uneforcecolossale.SiRosalieétaitunehumaine,elleseraitmortesouslarudesseducoup,maissanaturelarendplusrésistante,toutefoiselleenressentunedouleurfulgurantedansledos.

–Ellenenousnuirapas,articule-t-ilavecdistinction,insistantsurchaquemot.C’esttoutcequetuasàsavoir.

Rosalieluilanceunregardnoirsignifiantqu’ellen’estpasprêtedeluipardonnersonacte.Lesvampiresontuneviepluslonguequeleshumains,maisaussiunerancuneplusforte.Lahaineetlacolèrequ’éprouveSullienversLilithdepuisplusieurssièclesensontlameilleurepreuve.

–Sitoiouunautreluifaitesdumal,jevoustuerai.Faispasserlemessage.Cettehumaineestmienne,nel’oubliejamais.

Sullivanlibèrelavampirequitombesurlesolavantdegravirlesescaliers.

Rosalieposesamainsursagorge,ressentantencoreunedouleurlatente,ensejurantqu’illuipaieracegeste.Quicroit-iltromperaveccepetitnuméro?Paselle,déjà.Levampirepathétique–àsongoût–s’estentichédel’humaine.Elleenriraitpresquesil’attitudedeSullinelesavaitpas145

tousmisendanger.Pireencore,laseulesolutionpourlessortir,elleetsescongénères,decepiège,c’estentuantl’humainequiensaittrop.Maissil’und’euxarecoursàcetteextrémité,Sulliseraitcapabledetouslesexterminer.

Cependant,commentvivreaveccetteperpétuelleépéedeDamoclèsau-dessusdelatête?

146

Chapitre18

Bienqu’AntoineTringleaitétéétonnéparl’appeltardifdeDélilalaveille,ilaacceptédelarencontreràsonbureautôtdanslamatinée.Eneffet,n’ypouvantplusd’attendre,lajeunefemmeveutsesréponsesauplusvite.

Délilafaitlescentpasdanssonbureaudepuisuneéternité,illuiparaît–

cinqminutes,enfait.L’heurenesemblepasêtresonamieencejour,elledéfileavecunelenteurinhabituelle.Elleattendl’arrivéed’Antoineavecimpatience,maispeuraussi.Ellecraintlesmotsquisortirontdesabouche.

Queva-t-ilencoreluitomberdessus?

Est-cepossiblequecelasoitpirequ’actuellement?Çasemblecompliqué,néanmoinspasimprobable.

Commentva-t-ellepouvoirenapprendreplussurlesvampiressansendiretrop?Enmêmetemps,elleaétémarquéeetcen’estpasunsecretpourAntoineTringle,alorsilnes’étonnerapasdesonenvied’enapprendredavantage.Toutefois,illuisembleproblématiquedeluidévoilersacertitudequantàl’âgeduvampire.

–MademoiselleNagar?l’appelleAntoine,surleseuildelaporte.

–Bonjour.

Ellenel’apasentenduarriver,maisencoreunpeuetleparquetauraitétéplusqu’usé.Déjàquesonétatestlégèrementdouteux.

–Bonjour.

Elleluidésigneunfauteuiloùilprendplace.Ellel’acontactéaprèsledépartdeSulli,ilétaitinquietdelacoupuretéléphoniquemêmes’ilignoraitqu’ellesoitdueauvampirequil’amarquée.Elleainventéunproblèmechezlestélécoms,bienplussimplequelavérité.

147

–Jemesouviens,avoue-t-elle.

Elleprendplacedanssonfauteuil,derrièresonbureau,alorsquelesyeuxdujeunehommes’écarquillent.

–Dequoi?s’intéresse-t-il.

–Deplusieurssoiréesoùilmetraquait,de…delafoisoùilm’amarquée.

Ellen’aaucunsouvenirdesescrocsseplantantdanssagorge,maisellerevitclairementleursébatspassionnés.

–Nousavonsaffaireàunjeunevampire.Avez-vousaperçusonvisage?

–Non.Maisilestloind’êtrejeune,jemesouviensqu’ilm’amurmurésonâge.

–Quelest-il?

–Cinqcentsans.

Lecœurduspécialistemanqueunbattement,cequeluiraconteDélilaesttotalementimpossible.Aucundesvieuxvampiresneratesonhypnose…àmoinsque…non,ilrepoussecetteidéesaugrenuecommelapeste.Jamais,unetellevéritén’aétévérifiée,ilnes’agitqued’unethéorie.Sathéorie.

–Dites-moi,réclamelablondeenvoyantsonvisagechangerdutoutautout.

–Rien.

–Jevousenprie,jeveuxsavoir…j’enailedroit.

Enprincipe,ellearaison,ets’ils’avèrequ’ilavujuste,alorsçapourraitêtreunélémentderéponsepourDélila,enparticuliersurl’identitédeceluiquisejoued’elle.

–Avez-vousunadmirateur?

–Jevousdemandepardon?

–J’aiunethéorieselonlaquelleunvampireratesonhypnosepouruneseuleraison.

–Jevousécoute.

–Ilnedésiraitpasfermementqu’ellefonctionne.

148

Logique.Toutefoisaberrant.Sullivoulaitqu’elleoublie,elleenestconvaincue.D’ailleurs,pourquoinel’aurait-ilpasdésirépleinement?

–Çan’aaucunsens,réfute-t-elle.Cepouvoirsertàfaireoublierleshumainsalorspourquoi…

–Parcequ’àmonsens,ilsepourraitquecettecréatureaitdessentimentspourvous.

Délilaestprised’uneenviederireàgorgedéployée,maisseretientparpolitesse.Ellevoitencorelesagressionsrépétéesduvampire,sonregardsombrequandilestencolère,safaçondelatraiter,deluifairemal,lestraquesqu’illuiafaitsubir–mêmesitoutn’estpasclairdanssatête–,etsurtoutleviolqu’ilaessayédeluiinfliger.Définitivementnon,iln’éprouverienpourellesicen’estuneenviedejouer.

–Dansmessouvenirs,cen’estpaslecas.

–Jevousreposemaquestion:avez-vousunadmirateur?

–Non.

Etlaréponseestfranche.Ellen’enaaucun.

–Personnequivoustourneautourouquivousharcèle?

–Non.

Antoinesegrattelementon,pourtantcertaindesaspéculation.MaisilestpossiblequedanslecasdeDélilalaraisonsoitautre.Silevampirenes’estpasamourachédesaproiealorspourquoiratersonhypnose?

Fatalement,ellesesouviendraitetilenmourrait.

–Alorsilveutenfiniravecsonétat.

Lajournalistenecroitpasuneseulesecondeàcettepossibleraison.

Sulli,pleind’arrogance,nepeutpasvouloirlamort.

–Ilsepourraitqu’ilaitenviequevousvoussouveniezetquevousledénonciez.

–Enfait,vousnesavezrien,constate-t-elleamèrement.

Piremême,elleperdsontempsaveccesoi-disantspécialistedescréaturesnocturnes.Sait-ilaumoins

dequoiilparle?JamaisellenepourradébarquerauchâteaupourclameràSullivanqu’elleconnaîtlaraisondel’échecdesonhypnose.Sielleluiditqu’elleacomprisqu’ilsouhaiteenfiniraveclavie,ilriraàn’enplusfinir.Sielleoptepourles149

sentimentsqu’ilpourraitéprouverpourelle,ilauralamêmeréaction.

Danslesdeuxcas,ellepasserapouruneidioteetfiniraenen-caspourvampire.

–Jepourraisvoushypnotiserpourfairerevenirvossouvenirsetainsivouspermettredevoirlevisagedevotreagresseur.

–Àquoiçapourraitbienmeservir?

–Cen’estpascequevousvoulezsavoir?

Jelesaisdéjà!

–Vouspourriezfaireça?

–Oui.

–Oùetquand?

Siellerefuse,ilnelacomprendrapasetendéduiraqu’elleluicachedesinformations.

–Dansunlieuoùvousvoussentezbien,chezvouspeut-être.

–D’accord.

–Jevousyretrouveraiversvingtetuneheures,j’aiunejournéebienremplie.

–Àcesoir,danscecas.

Illuifaitunsignedelatêteavantdesortirdesonbureau,lalaissantsceptique.Sipourellel’identitédesonattaquantn’estpasunsecret,ellepourraitnéanmoinsrevivretouteslesheurespartagéesaveclui.

Comprendre.Savoircequ’illuiafaitendurer.L’a-t-ilviolée?Commentl’a-t-ilmarquée?Pourquoi?Mêmesielledouted’avoiruneréponseàcettequestion,saufs’illeluiaditavantdeleluifaireoublier.

Finalement,cettepetiteséanceaveclespécialisteserévélerasanslemoindredoutetrèsprometteuse.Lanuits’offriraàelleensuiteetellepourraenfiniravecsonpirecauchemar.Elleignorejusteencorecomment!

Elleestmarquéeàvieparunvampire,cequisignifiequ’elleluiappartientetqueseulelamortladélivre,samortàluiparcequelasiennen’estpasenvisageable.Ouvivreavec.C’estvraiquec’estl’unedesesoptions.Sielleoublieceluiquil’afaitesienne,iln’interviendrapasdanssavie,c’estpeut-êtrecettesolutionqu’elledevraitchoisir.MaisDélila,150

têtedemulequ’elleest,nesesatisferapasdelafacilité.Deplus,elleestcertainequ’ellenevapasaimerlesimagesquiserévèlerontàellecesoir,alorsquefera-t-elle?Elleiracriersonindignation.Où?Auchâteaudesvampiresbienévidemment.Elleabiencomprisqueceuxqu’elleavusavecSulliauclubsontsescongénèresetqu’ilsviventensemble.Lapropriéténeserajamaisrénovée.

LajournéeestatrocementlonguepourSulliquiestcoincédanscemauditchâteauqu’ilapayéunefortuneetdanslequeliln’estmêmepluscertaind’êtreensécurité.

Pourquoia-t-ilvoulumigrerici?Pourrecommencerunenouvellevie,loindesémeutesqu’ilalui-mêmecrééesauMexique,etailleurs.Partoutoùilpasse,ilsèmelechaos.Àchaquefois,ilvatroploin,cequientraînesonobligationdequitterl’endroit.Maispasseulementàlui,auxautresaussi–sesamis.ToutétaittellementplussimplequandilvivaitenTransylvanie.LapopulationredoutaitleComtequil’aengendré,etluiaussi,jamaispersonnen’atentédelerendreàlaterre.Ilétaitaduléetcraint.

Icitoutestdifférent…depuisdessièclestoutestdifférent–depuisqu’ilaétéchassédesonpays.Ilestnostalgiquedecettepériode.

Partoutoùilva,ildoits’adapter,cachersavéritablenature.IlatoujoursétésoutenuparBastian,JoseetRosalie,maiscettefois,ilsentquerienn’estsemblable.Ilsnesontpaslàpourtraquerettuer.Non,Sullivanlessoupçonnedevouloirs’intégreretvivreparmileshumainscommecertainsdeleurscongénères.Biensûr,aucunnel’avoueraetilscontinuenttousdeluiassurerqu’ilsattendentlemomentdemettrelavilleàsang.Mensonge!

Pourlapremièrefois,ilsesentcommeseulaumonde.Aucunnepensecommelui,aucunn’abesoindelamêmechosequelui.Ilestunincompris…ilestmalheureux.

Ilsesentidiotd’avoirfaitconfianceàRosaliequiluiconseillaitdejoueravecunehumaine.Ilauraitdûlatuerquandilenavaitl’occasion.Parcequemaintenant…ilestperdu.

Délila.

Ilserrelespoingsensongeantàelle.Cettefemmeestforte,ellearéussiàbousillersavie.Àcaused’elle,ilneseraplusjamaislemême.Ils’est151

embrouilléavecRosalieetçanes’arrangerajamaisparcequ’ilrefuserades’excuserpoursabrutalité.Iladéfinitivementperduuneamie.

Etpuis,iln’yapasseulementça…ilseposebeaucoupdequestions.À

commencerpar:pourquoiellesesouvientalorsquethéoriquementc’estimpossible?Deplus,ilaréussiàlamarquer.Etçaaussi,cedevraitêtreinfaisable.

Ilsoupire.Iln’auraaucunementlesréponses.

Personnen’estcapabledeluifourniruneexplication,personneàpartlevampire–soncréateur–quiluiagentimentdemandédedisparaîtreilyaquatrecentsans.L’idéedeseprésenterdevantluipourcomprendreneséduitpasSulli.JamaisilneremettralespiedsenTransylvanie.

DélilaaccueilleAntoineTringlechezellepouruneséanced’hypnosedesplussurprenantes.Eneffet,ellevoitlesimagesdufilmdesaviedéfilerdanssatête.Lespécialistedescréaturesnocturnesn’estpeut-êtrepascapablederépondreàsesquestions,toutefoisilmaîtrisel’artdel’hypnoseàlaperfection.

LajournalistesevoitcouriràtraverslesruessombresdeMontréaloudansuneforêt.Elleressentlapeurfoudroyantequil’habiteetsaluttepoursurvivre.Plusieursfois,ellediscernelescrocspointusdesonagresseur,maisaussisonvisage.Ellelesavaitbienentendu,maisc’estplusréelmaintenant.L’instantqu’elleredoutefinitpararriveretellesesouvientdesmomentsintimesqu’elleapassésavecSulli,deleurpremièrefois…ici…

chezelle.

OhmonDieu!

Elleréalisealorsqu’ilestentrédanssonappartement,qu’elleleluiaautorisé.Etquecelas’estterminédanssonlit.Ellerougitenressentantleplaisirlasubmergerausouvenirdesescaressesdélicieuses.Jamaisiln’aétébrut,aucontraireilétaittendre.Enfin,ellelevoitplantersescrocsdanssagorgeetétouffeuncriinconscientàcesouvenir.Ellecomprendmieuxcequefaisaitsalimeàonglesdanssonlitquandtoutluiestrevenuenmémoire.

–Commentvoussentez-vous?s’intéresseAntoineaprèsavoirclaquédesdoigts.

152

Délilarevientdoucementàelle,sessouvenirsencorevivacesetsesémotionstropprésentes.

–Ilnem’apasviolée,articule-t-elleenleréalisantsoudainement.

Antoineluiavaitsuggéréqu’ilavaitpeut-êtreabuséd’elle,maisaucunement.Sullineluiarienfaitsubird’autresquedestraquesangoissantesetexténuantes.

–Racontez-moitoutcequevousavezvu.

C’estimpossiblebiensûr.Ellesecontentedeluiparlerdesescourseseffrénéespoursurvivreàtraversdesruesqu’elleneconnaîtpas.Elleoublieintentionnellementdementionnerlaforêtàcôtédelapropriété,pouréviterqu’illalocalise.Cen’estpasSulliqu’elleprotègeparcesilence,maiselle.Délilanedoutepasquelevampiresoitcapabledelalocaliseràn’importequelinstant,etdel’anéantir.

–Avez-vousvusonvisage?

–Oui.

–J’appellelesautorités,cemonstreseramortavantleleverdujour.

Délilal’enempêcheavantdeluirévélerqu’elleneconnaîtpasl’auteurdesesagressions.

Antoinesoupire.Puis,ill’accusedemasquerlavérité.Illuiarendusessouvenirsgrâceàl’hypnose,

alorsilestimpensablequeDélilaignoreàquielleaaffaire,ilpensequ’elleleprotège.

–Vousavezperdulatête?s’offusque-t-elle.Pourquoiest-cequejeleprotégerais?

–Parcequ’ilvousamarquéeetquevouséprouvezquelquechosepourlui.

Décidément,ils’avèrequelespécialisteesttrèsperspicace.Elleabienuneidéepoursesortirdecettefâcheusesituation,maisignoresiellen’estpasplussuicidaireetpirequelaréalité.Toutefois,ellen’yréfléchitpasetagit.

–C’estcequevouspensez?

–Vousl’aimez,n’est-cepas?

Oui.

153

–N’importequoi!Écoutez,j’aibesoin…accordez-moiquelquesminutespourmeremettre.

–Àvotreguise,maisjenequitteraipasvotreappartementsansuneréponse.

–Etsijerefuse?

–Jesuiscapablededevenirvotrepirecauchemarpourlebiendel’humanité.

Sansménagement,illamenacedefaireintervenirlegouvernement,deluiimposerdesséancesdetorturespsychiquesdurantlesquellessoncerveauseraitfouilléjusqu’àcequelenomduvampiresoitdémasqué.

Elledéglutit.Jamaisellen’acruquecetypepouvaits’avérercruel.Cequilaconfortedanslanécessitédecequ’elles’apprêteàfaire.

–Jevaismerafraîchirunmoment.

Antoinenecillepasalorsquelajeunefemmeapeuréeseréfugiedanssachambre.Ellesaisitsontéléphoneetappelleleseulcapabledel’aider:sonagresseur.

–T’esincroyable!s’amuseSulliaprèsavoirdécroché.

JamaisilnepensaitqueDélilalerappelleraitunjour.Ilimaginaitmêmequ’elleavaitquittélavilleouétaitsurlepointdelefaire.N’importequellehumainesenséel’auraitfait.

–J’aibesoindetoi,Sulli.

–Moiaussi,madouce,jenefaisquepenseràtoi.

Puisiléclatederire,semoquantouvertementd’elle,persuadéqu’elleluicontesonmanquedelui.

–J’aivuunspécialistedescréaturesnocturnes,informe-t-ellepourlefairetaire.

Elleobtienteffectivementlesilenceettoutesonattention.

–Ilm’ahypnotiséeetjemesouviensdetout.

–Oùveux-tuenvenir?s’énerve-t-il.

–Ilnemecroitpasquandjeluidisquejeneconnaispasmonagresseur.

–Jemefichedeça,Délila!

154

–Doncjepeuxluidirequitues.

–Onaunaccord,n’oubliepas.

–Sijem’obstine,jevaismeretrouveravecdesélectrodesdanslecerveau.Ilveutcontacterlegouvernement.

–Alorsadieu.

–Sulli!

Ellen’entendquelatonalitépourréponse.Ilaraccroché,sefichantéperdumentdesonsort.

Ellelaissetombersontéléphone,sesentantperdue…impuissante.

Commenta-t-ellepucroirequ’ilviendraitàsonsecours?Décidément,lathéorieabsurded’AntoineTringlenesevérifieaucunement.

Quelschoixa-t-ellemaintenant?

Livrerlevampirequienréchapperasansaucundouteetviendralatuerensuite,ougarderlesilenceetsubirlespirestortures?

Quoiqu’elledécide,l’issueseralamême:lamort.Illuiresteplusqu’àdéterminerlafaçondontellesouhaitemourir.

155

Chapitre19

–Jemaintienscequejevousaidit,j’ignoredequiils’agit,déclareDélilaenpénétrantdanssonsalonoùlespécialisten’apasbougé.

–Vousfaiteslàunebelleerreur,machère.

Elleenestconsciente,maisellepréfèremourirauxmainsdugouvernementqu’àcellesdeSulli.

Antoineselèveetfaitquelquespasdansl’appartementpourseposterdevantlafenêtre.Ilregardeà

l’extérieur,ilfaitnuitetilestétonnédevoirquelesvoletsnesontpastirés.Unefemmeagresséeparunvampireseraitprudente,terrorisée,recroquevilléechezelle.MaispasDélila.Ilnepensepassetromperenaffirmantqu’elleestamoureusedesonagresseuretqu’elleleprotègemalgrélesrisquesauxquelselles'expose.Oualors,ill’amenacée.Ilaimeraitycroiresincèrement,maisquandilyréfléchitdavantageilcomprendquecen’estpascequimotivesonsilence.Sinon,ellesebarricaderait.

–Jevousposelaquestionunedernièrefois:quiest-il?

Ilpivotepourfixersesyeuxsurlajeunefemmeauxlongscheveuxblondsqu’ilatoutdesuitetrouvéebellequandilacroisésonchemin.

Dommagequeçadoivesefinirainsi.

Délilasemuredanslesilence.EllerefusededénoncerSulli,estimantquecettehistoireluiappartientetquecespécialisten’apasàs’enmêler.

Toutefois,ellenerépliquerienetsonsilenceestéloquentpourl’hommeenfaced’elle.

Ilsaisitsontéléphonequandunebrisefaitchuterlatempératuredelapièce.Ilfaitfroidsoudainementetleventsemetàtourbillonneràcôtéducanapéjusqu’àcequ’unêtredépourvud’âmesematérialise.

156

Antoineestabasourdi,laboucheouverte,sansqu’aucunsonn’ensorte.

Ilconclutsanslemoindredoutequel’individuqu’ilaenfacedeluiestl’agresseurdeladélicieuseDélila.

Cettedernièren’arrivepasàréaliserqueSullivanLancastersetientdanssonsalon.Ellesaitdéjàqu’elleluiapermisdepénétrerchezelle,maisétaitbienloind’imaginerqu’ilyreviendrait,surtoutaprèsleurdernieréchangetéléphonique.

Levampirenegardepassonairdestatuelongtemps,ilseruesurl’hommequ’ilneconnaîtpasbienqu’ilsachequec’estluiquiamenacéDélila.Illeforceàleregarderetluiordonnedes’asseoiraprèsavoirprislecontrôledesonesprit.Sanslequitterduregard,ildemandeàDélilacequ’ilaraté.

–Jen’airiendit.Ils’apprêtaitàcontacterlegouvernement.

Elleadumalàréaliserqu’ilestprèsd’elle…pourelle.Àmoinsqu’ellen’interprètefaussementsaprésenceici.C’estsansdoutelesecretdesonidentitéqu’ilpréserve.

–C’estdonctonfameuxspécialiste.

–Oui.

Ellehochelatêtecommeellerépond,mêmes’ilnepeutpaslavoir,fixanttoujoursl’humain.

–Pourquoiest-cequeDélilasesouvient?Jesuisunvieuxvampireetc’estinsensé.

IlquestionneAntoinequiouvrelaboucheinstantanémentpourluiénoncersathéorieselonlaquelleilnesouhaitaitpasréellementquel’hypnosefonctionneparcequ’iléprouvedessentimentspourelle.

–Putain!Qu’est-cequ’ilnefautpasentendre!cracheSulliaprèsunmomentdesilence.J’airéussiàmarquerDélilaalorsquej’avaistoujourséchouéjusqu’àprésent,commentt’expliquesça?

–Vouslavoulezpourvousetvossentimentsàsonencontrevousontaidéàparveniràlafairevôtre.

Sulliricane.

–Tucroistropenl’amour,imbécile!

Ilarticulecettephrasesuruntonnostalgiquequin’échappepasàla157

jeunefemme.Elleestentraindepenserquelacréaturequ’elleadevantelleadûdonnersoncœuretqu’ilaétébrisé.

–Tun’asjamaishypnotiséDélila,tunel’aspasnonplussuggéré,ettun’espasvenuicicesoir.Maintenantturentrescheztoi.

Antoinequittel’appartementsansdemandersonreste.

–Çafonctionnerasurlui?questionnelajournalisteaprèsunlongsilence.

Sullilèvesesyeuxsombressurelleetlacontemplesansqu’aucunmotnefranchisselabarrièredeseslèvres.Ilseperddanslebleu-océandesesyeuxcommes’ilvoulaitytrouverlapaix…lesréponsesàsesquestions.

–Oui,rétorque-t-ilfinalementenréponseàsoninterrogation.

–Pourquoienes-tusisûr?

Ellenel’estpasdutout.Siçaaéchouésursapersonne,çapourraittrèsbienêtrelecasavecleprofesseur.Aprèstout,ilestprobablequelevampireperdedesespouvoirs,desapuissance…qu’ils’amenuiseavecl’âge.

Ellelevoitesquisserunsourireradieux,illuminantsonvisage.

–Tuastoutfaux.

–Tuentendsmespensées?

–Jepeuxlireentoi.

–Réponds-moifranchement:est-cequelathéoriedecethommeestsistupidequeça?

Ilnesouritplusetrestefigécommeilverrouillesonregardausien.Ens’introduisantdanssespensées,ilacomprisqu’elledonneducréditauxineptiesdecefourbe,enfait,elleaimeraitquecesoitl’explication.

–Totalement.Je…

Ilréfléchitbienauxmotsqu’ilvaemployer,iln’oubliepasqu’ilaaffaireàunehumaineécervelée.

–…n’aipasd’âme.Jenepeuxpasaimer.

–Çat’estpourtantdéjàarrivé.

–Qu’ensais-tu?questionne-t-il,soupçonneux.

158

Elleluiexpliquealorscommentelleenestvenueàcetteconclusion–letonsurlequelilaréponduàTringleunpeuplustôt.

–Tuanalysesbientropcequejedis,soupire-t-il.

–Ellet’abrisélecœuretj’ensuisnavrée.

Sullirefusedeparlerdesaviepersonnelle,encoremoinsavecelle.Ilestvenupouruneseuleraison:ladébarrasserdecethumainencombrant.Ilsouhaitaits’assurerqueDélilanelelivrepas,etaccessoirementqu’ilneluiarriverien.Maintenantquec’estfait,ildoits’enaller.

Mais…

–Tuasditquetutesouviensdetoutcequ’ilyaeuentrenous…

–Oui.

–Commentréagis-tu?

–Tuescoupabled’unseulcrime:m’avoirmarquée.Tuesunvampireetjepeuxcomprendretonbesoin.

–Jetedemandepardon?s’ahurit-il.

A-t-ilbienentendu?Ellenepeutpascomprendre.Ellenedevraitmêmepasessayer.

–Écoute,jenedirairien,onaunaccord,etjecroisquejet’aiprouvécesoirquejetiendraiparole.

–Eneffet.

–Alors,va-t’en.

–Tucomprendsmonbesoin,maistumechasses?

Encetinstant,c’estluiquinesaisitpluscequ’elleraconteetoùelleveutenvenir.Alorsils’introduitdanssonesprit.Ilressentl’amourqu’elleéprouvepourlui,maisaussilacraintedecequ’ilestetdecedontilestcapable.Ellepréfèrevivresansluiplutôtquedesouffriretsefairetuer.

QuandDélilaouvrelabouchepourarticulersaréponse,Sullilafaittaireenlevantlamain.Iln’aquefairedecequ’ellepourraitdire,ilsaitexactementcequ’elleaentête.Desidiotiesd’humaine.

Lasecondesuivante,unebriseemportelevampireetlesilencerègnedanslapièce,troubléparlesbattementsdecœurirréguliersdeDélila.Cesoir,elleacruquesafinétaitproche.

159

Heureusement,elledoitsadélivranceàSullivan.

Deuxfemmestraversentlaroute,courtementvêtues,s’aguichantmutuellement,sousleregardnéfastedeSulli.Illessuitàdistance,ensilence,attendantlemomentopportunpouragir.

Cesoir,ilacomprisquelquechosedetotalementincroyablealorsilcomptetouteffacer…jusqu’àsadernièrepartd’humanité.

Personnen’aimeunmonstreetc’estcequ’ilest.

Ellenelecomprendpas,alorsilvaleluimontrer.

Ilsefichedesreprésailles,ilsemoquedesconséquences…toutcequ’ilveut:c’estoublier.

Ilsuitencoreunmomentlesdeuxfemmesquisemblentavoirquelquesdifficultésàtenirdeboutavantdeseruersurlapremière:unerousse.

Cettenuit,ilnefaitpasdedistinction,n’importelaquelledeshumainesferal’affaire.Ilplantesescrocsdanssagorgealorsquel’autres’époumone,tentantdesedéfairedel’empriseduvampiresursonpoignet.

Quandlapremières’affaisseentresesbras,ilsetourneverscellequinepeutselibérerdesapoignedefer.Elleadelongscheveuxnoirs–pasdeblondepourlecoup–etestincapabled’articulerlemoindremot,ayantmissavoixàrudeépreuvequelquessecondesauparavant.Elleestimpuissantequandlevampirelaissetombersacompagnetelleunepoupéedechiffonetseruesurellepourlaviderdesonessencevitale.

Levampirenefaitpasdansladentelleetlacèreprofondémentlagorgedesaproie.Quandilrelèvelatêtepourregarderlecielétoilé,sabouchesaliedusangdesdeuxhumaines,ilnesesentpasmieux.Ilressentdespicotementsdanssonorganismemort,lesangdecesfemellesestentraindelebrûlercommeçaneluiestpasarrivédepuisdessemaines.Ladernièrefoisqu’ilasouffert–bienplusqu’encetinstant–c’estquandilaétécontraintd’avalerunecoupedechampagne.Douloureuseépreuvequ’ilestplusoumoinsentrainderevivre.

Illaissetombersasecondevictimeetquittelaruesansprendrelesoindedissimulersesméfaits.Ilarpentelavilleàlarecherchedequelquechosedontilignoretout.Maisqu’ilnetrouvepas.

Ladernièrefoisqu’ils’estsentiaussividec’estquandLilithl’ajetéhors160

desavie.Ilaimaitcettefemmeplusquetout,jamaisilneluiauraitrefuséquoiquecesoit,maisellen’enétaitpasdigne.Ils’estfourvoyéaveclafilledeDracula,cetteblondedemalheur,sansâmeet

conscience.Sil’amournel’avaitpasaveugléàcepoint,iln’auraitpasconnuladéchéancequiasuivietquil’acomplètementbrisé.Cequ’ilressentaitàl’époquepourcettefemelledesaraceallaitau-delàdel’entendement,etmalheureusementpourlui,ilressentlamêmechosecesoir.

Ilseraperdu,illesait,s’illaissecefichucœurquinebatplusrégirsavieetprendrelesdécisions.Ilnepeutpasenêtreainsi,jamais!

Iln’apasunnombreincalculabledesolutionspours’ensortir,maisuneseule:s’éloignerd’elle.Etc’estbiencequ’ilcomptefairedèsàprésent.

Deretoursursapropriété,commeillesupposait,ilestseul.Lesvampiressontdesortieetc’esttantmieux.IlnesupportepluslasupérioritédeNarcisseetsontonhautain.IlressentlamêmechosepourRosalieetsessermons,detoutefaçon,ilestbrouilléavecellepourl’éternitépuisqu’ilneluiprésenteraaucuneexcuse.

Ilseposedanssagrandechambredélabréeetpeumeublée,sonseulvéritablerefugedanscetteimmensedemeure.Quandilyréfléchit,ilnes’estplusjamaissentichezluidepuissondépartdeTransylvanie.Etpourtant,ilaarpentélemondeethabitéd’innombrablesvilles.Ilsedemandesiunjourilarriveraàs’adapteràsacondition…àsavie.

Plusrienn’avraimentdesens…

Ilestdestinéàtuer,àsemerlechaospartoutoùilpasse,pourtantiln’enéprouveaucuneenvieencetinstant.Ilajustebesoindesereposer.Lasoiréeaétééprouvante.D’ailleurs,pourquoileressent-il?Ilcroyaitavoirréussiàforgerunecarapaced’acierautourdelui,apparemmentellen’estpassiinébranlablequeça.

Ildoitsereprendre,illefaut.

Ils’accordeunenuitderepos,s’allongeantsursacouchequandilsefaitcetteréflexion,etdemainenfindejournéequandils’éveillera,toutseraredevenunormal.

161

Chapitre20

Délilasursautequandonfrappeàsaporte,ilesttardetellen’attendpersonne.Àmoinsquelespécialistedesvampiressesouviennedeleurséanced’hypnose.Lavoilàquis’effraiemaintenant.Elledécidedefairecommesielleétaitabsente,maisonfrappedenouveau.Surlapointedespiedsetsanslemoindrebruit,elles’avancejusqu’àlaporteoùelleregardedanslejudas.

Anaïs.

Elleluiouvresansplusattendrebienquesurprisedesavenueàuneheureaussitardive.

–Jesais,j’auraisdûappeleravant,articulesonamieenpassantleseuildelaporte.Tunedormaispasaumoins?

–Non.

–C’estbiencequejemedisais.

DélilarefermelaporteetsuitAnaïsjusqu’ausalonoùellesprennentplacedanslecanapé.

–Qu’est-cequit’amène…euh…sitard?

Vingt-deuxheures.Cen’estpasvraimentuneheurepourlesvisitesdecourtoisie.

–Laséanced’hypnose,voyons.Jeveuxtoutsavoir!

LesyeuxdeDélilas’écarquillent.Commentsefait-ilqu’Anaïssoitaucourant,ellen’enavaitparléàpersonne!

–AntoineTringlel’aditàClaudequimel’arapportée,explique-t-elledevantl’étonnementflagrantdesonamie.

Délilaenrestesansvoix.MêmeClaudeestaucourant.Lavoilàdansde162

beauxdraps,etinterdictiond’appelerSullivanàlarescoussepourqu’ileffacelessouvenirsdesonamieetdesonpatron.Elledevratrouverautrechose.

–Je…personnenedoitsavoir.Personned’autren’estaucourant?

s’inquiète-t-ellesoudainement.

–Non.Tumeparaisbizarre.Qu’est-cequit’arrive?

Délilasoupire.Ilestpeut-êtretempsdeparler,çaluiferaitbeaucoupdebiendeseconfierparcequ’ellesesenttotalementperdue.Deplus,ilestaussitempsdemettredesmotssurcequisepasseenelle.Desmotsqu’ellepourraitpartager,confier.

Aprèsunebonneinspiration,ellecommencesonhistoire.

–AntoineTringlem’abienhypnotiséeetjemesouviensdetout.

–Tuasbienétémarquéeparunvampire!affirmeAnaïsplusqu’ellenelaquestionne.

–Oui.

–Ouah!Etalors…commenttugèresça?

–Jelesavaisavantcesoir…toutmerevenaitparbribeenrêve,laséancen’afaitquecomblerlesquelquestrousnoirsquipersistaient.

–Quiest-ce?

–Quandj’aiditàTringlequejeneleconnaissaispas,ilm’aaccuséedementiretmemenaçaitdecontacterlegouvernementpourqu’onm’implantedesélectrodesdanslecerveauafindes’emparerdesonidentité.

–Tudéconnes?

–Jel’aiappeléàl’aideetmêmes’ilarefusé,ilestvenu.Sansquoi,jeneseraispaslààteleraconterencemoment.

–Tul’asappelé…qui?Levampire?

Délilahochelatêteensigned’acquiescement.

–Donctuleconnais.

–IlaeffacélamémoireàTringle,poursuit-ellesansrépondreàsonaffirmation,ilnesesouvientderien,mêmepasqu’ilm’asuggérédem’hypnotiser.

163

–Claudeetmoionl’oublieraaussi,jetelepromets,maisjeveuxsavoirquiestcevampire.Jeleconnais?

Anaïssemblebienplusexcitéequ’apeurée.

–Jeteparled’unvampireettumequestionnescommes’ils’agissaitd’unpetitamipotentiel,s’exaspèreDélila.

–Iltefaitpeur?

–Disonsqu’ilesttrèseffrayantetquejenecomprendspastoujourssesréactions,maisàcôtédeça…

Elles’apprêteàluidirequ’ilesttendreetattentionnéquandilssonttouslesdeux,maiselleseravise,parcequetoutcelan’estqu’unrôlequ’iljouait.Iln’éprouverienpourelleets’ilestintervenucesoir,cen’estpaspourlasauver,elle,maispourseprotéger,lui.

Délilanepensaitpasqueçaluiferaitsimaldeleréaliser.

–Enfait…ilestterrifiant.

–C’étaitquoicemais,Délila?

–Jesuisamoureusedelui.

Anaïsn’émetaucunson,digérantl’information.

DélilasedemandesoudainsielleestvéritablementamoureusedeSulliouplutôtdel’imagequ’elleavaitdelui.Parcequ’ilestclairqu’ellenepourrajamaisrienéprouverpourunmonstrequituelesfemmessanspitié.

Cequ’ilestaufinal.Leresten’étaitquemensonge,destinéàlaséduire.Etelleesttombéelatêtelapremièredanslepiègefatalqu’illuitendait.Ill’amordue,ilafaitd’ellesa…saquoid’ailleurs?Sapropriété?Sonjouet?

Unautremotrésonneenelle,plusjustecelui-ci:saproie.

–…seulementdeceluipourquiilsefaisaitpasser,sereprend-elle.

–Quiest-il,Délila?Jenedirairien.

–C’estSulli.

Anaïsimaginequ’elleadûraterunépisodeparcequ’elleignoretoutdeceSulli.C’estvraiquedepuisqu’ellefréquenteClaudeplusactivement,ellevoitmoinsDélila,maisdelàànepassavoirleprénomdutypequ’ellefréquente,çadevientgrave!

–Oh,chérie,jeteprometsqu’onseverraplussouventpourparler,164

maintenant.

DélilanecomprendpasbienoùveutenvenirAnaïs,jusqu’àcequecettedernièreajouted’untoncoupable:

–JenesaispasquiestSulli.

–Maissi,voyons…SullivanLancaster.

–LeDuc?s’ahurit-elle,totalementméduséeparlarévélation.

–Enpersonne.

–LeDucLancasterestunvampire!

–Chut!C’estunsecretettum’aspromis.

Anaïsfaitlesignedelabouchecousuetoutenseremettantdesesémotions.

–Donc…vousvousvoyiezcesderniersjours…

–Oui.

–Tuas…vousavez?

–Oui.

–C’étaitcomment?questionne-t-elle,taquine.

–Anaïs!

Délilafeintd’êtrechoquéeavantdesourireetdeluirépondre:

–Lemeilleurcoupdetoutemavie.

–Bon.Dis-moi…vousenêtesoùtouslesdeuxpourquetuneveuillespasledénoncer?

–Nullepart.Sullietmoiavonsunaccord.Jenedisriensurluietilmelaissetranquille,énonce-t-elleenserendantcomptequ’ellevientdefailliràsapromesse.Ilvametuer!

–Arrête!Personnenesaura.Parle-moidecequevousfaisieztouslesdeux.

Lajeunefemmeobéitetseconfiesansretenueàsonamiesurlesnombreusessoiréesqu’elleapasséesencompagniedeSullivan,desbonsmomentsd’abord,puisdesplusaffreuxensuite.Pourelle,ilestdeplusenplusclairquelevampiren’éprouverienàsonencontre,ellen’estqu’undivertissement–n’était,parcequemaintenantilnejoueplusavecelle.

165

Quandelleaterminé,ellesesentnostalgique,réalisantqu’avecleprincedesesnuits,toutestfini.

C’estavecunpincementaucœurqu’elleassureàAnaïsdesonbien-êtreetdesacapacitéàreprendresavie.

–Mouais…Tum’asditêtreamoureusedeSulli.

–Pasdelui,Anaïs,decequ’ilmefaisaitcroireêtre.

Cettefois,toutestclairpourDélila,commepoursonamiequiprofiteencoreunpeudelajeunefemmeavantderentrerchezelle.

Seuleavecsessouvenirs,lajournalistesesentmoroseetdoutedesacapacitéàreprendreledessus,pasaprèscequ’elleavécu.Enfait,toutcequ’elleaassuréàsameilleureamien’estqu’untissudemensonges,jamaisellenepourraoublier.Elleaétémarquéeparunvampirequil’amanipuléepourqu’elleentombeamoureuseetprofiterdesanaïveté.Elleignoresiellepourras’enremettreunjour.

Toutefois,ilfautbienavancer.Demain,elleseprésenteraauJournal,feignantunbien-êtreinexistant,etsouriraàtoutlemonde.AnaïsluiapromisdefaireoublieràClaudecettesupposéeséanced’hypnoseetTringledisparaîtrasansdouterapidementdelacirculation,plusrienpourluifairepenserauvampire.

Dumoinsc’estcequ’elleespère…

Durantlanuit,ellefaitencoredescauchemars,soninconscientluidévoiledesimagesdesesterriblessoiréesavecSullivan,imagesqu’elleavaitvueslaveillelorsdel’hypnose.Encoredestraques,puiscettefameusefoisoùleprofiteuraplantésescrocsdanssagorgepourlafairesienne.Danssonrêve,quiseraitplutôtapparentéàuncauchemar,elleentendTringleluimurmurersathéorieselonlaquelleunvampireamoureuxéchouelorsdesestentativesd’hypnoseetréussitàmarquersacompagne.Elleseréveilleensursautetensueur,persuadéedenejamaisretrouverlesommeil.Maisenlaissantlalumièreéclairerlapièce,elleparvientàrecouvrerunrepospaisible.

EnpassantlesportesduJournal,Délilafeintunbonheursansfaille,souriantàtousetsaluanttoutlemonde.Maiscetétatn’estquedecourteduréepuisqu’unindividunonsouhaitablel’attendaitdanssonbureau.Son166

enviepremièreenapercevantAntoineTringle,nonchalammentassissurunfauteuil,estdel’envoyer

sefairevoir,toutefoiselleseravise,sessouvenirsontétéeffacés.Elleneferaitqu’envenimerleschosessiellefaisaitunesclandre.

PuisellesesentrapidementsubmergéeparsessouvenirsavecSullidanscettepièceoùelleafaillimourir–etluiaussisiellenes’étaitpasméprisesursonâge.

–Bonjour,monsieurTringle.

–MademoiselleNagar,jesuisraviedevousvoir.

Cequin’estpassoncasmaintenantqu’ellesaitexactementàquielleaaffaire.

–Quepuis-jepourvous?questionne-t-elleens’asseyantdevantsonordinateurencoreéteint.

–Jevenaisvoirsivousaviezdesquestionsàmeposer.

Lajeunefemmeactionneleboutonquilancel’allumagedel’appareilavantdecroisersesbrassursapoitrine.

–Aucune.

Ilignorequelevampirequil’aagresséen’apasréussisonhypnosepourqu’ellesesouviennedetout,etnesaitpasnonplusqueSullin’ajamaisréussiàmarquerunefemmeavantelle.Cequiesttantmieux.Deplus,ellen’apaslamoindreintentiondeluifairepartdecesinformations.

–Jesupposequevousallezretourner…d’oùvenez-vous?

–J’habiteunepetitevilledansl’Ontario.

–Ehbien,jevoussouhaiteunbonretour.

ElleouvresaboitemailquandelleentendAntoinerire,cesonluiglacelesang.Elleasoudainl’impressiond’avoiraffaireàplusfortqu’elle.

–Jenecomptepasrentrermaintenant.Jesuislàpourvousaider.

–Comment?

–Vousêteslejoujoud’unvampire,machère,jemedoisdevousprotégerdesaprochaineintrusiondansvotrevie.

Ehbien,ilnemanquaitplusqueça!

Commentva-t-ellesedébarrasserdecethomme?Ilvabienfalloirqu’il167

acceptedelalaissertranquille,ellenerisqueplusrien,maiscommentleluifairecomprendre?

–J’aidiscutéavecvotrepatronavantdevenirvousvoir…

Elleimaginequecelaneprésageriendebon.

–…ilpensequevousdevriezêtresousprotection.

–Ahoui?Etdequi?Delapolicepeut-être?

Ilricane.Ellen’aimevraimentpascerire,presquecarnassier,quiluidonnel’impressionqu’ilvalabouffertoutecrue!

–Biensûrquenon,mademoiselle…Délila,sereprend-il,jesuisunspécialistedescréaturesnocturnescertes,maisjenesuispasseuletj’aitouteuneéquipederrièremoi.Vousavezétémarquéeparunmonstresanguinaire,vousnedevezpasprendrecelaàlalégère.D’ailleurs…jeconstatequevousn’êtesplushystérique.

–Est-ceunreproche?

–Unesimpleobservation.

–Jevousremerciepourvotreinquiétude,maistoutçan’estpasnécessaire.Jen’aibesoinnidevousnidevotreéquipe.

–Jenevousfaisaispasuneproposition.C’estplutôtunordre.

Là,elleaunproblème.

Qu’est-cequ’ilcroit?Qu’ellevasefairedenouveauagresserparlevampire?Sansdoute,mêmesic’esttotalementinvraisemblablepuisqu’ilsontunaccorddepaix–bienquethéoriquementelleaviolélaprincipalerèglelanuitdernière.

–Parcequevouscroyezsincèrementpouvoirvousimmiscerdansmavieettoutcontrôler?demande-t-elle,indignée.

–Pourvotresécurité,comprenons-nousbien.Jesuisunspécialiste,maisaussiunchasseurdevampires.

Super!Ilneluimanquaitplusqueça!A-t-ild’autresmauvaisessurprisescommecelle-là?

EllequivoulaitabsolumentoublierSullietl’épisodetragiquedesvampiresvadevoirrevoirsonjugementparcequepoursedébarrasserdeceTringle,elleauraincontestablementbesoindeSulli.Oupas.Elle168

imaginequelorsquelechasseurverraquelevampirenetraqueplussaproie,ilpartira.Ilfaudrajustequ’elleprennesonmalenpatienceetmettesaviesocialeetamoureuseentreparenthèses.Enmêmetemps,ellen’apasdevieamoureuse.Pourlaviesociale,AnaïsestenpermanenceavecClaude,alorsonpeutdirequ’elleesttoutaussiinexistante.

–Nagar!rugitlavoixdesonpatron.

EllelanceunregardsuspicieuxàAntoineavantdesortirdesonbureaupourrejoindreClaudedanslasallederéunion.Elleestenretard,certes,maisn’enestpasresponsable.

–Vouslevoulezvraimentvotrearticlesurlesvampires?laquestionne-t-ildèsqu’ellepasselaporte.

Article?Ellen’estpascertainedesaisirdequoiilparle.

–Lesmeurtres,Nagar!Oùest-cequetues?

–Euh…oui.Biensûrquejeveuxrédigerunarticlesurlesattaquesdevampire.

ElleregardeAnaïsquinecillepas,merveilleusecomédienne,puisprendenmainledossierqu’elleluitend.

–Ilyaeudeuxautresmeurtres,lanuitdernière,rapporteClaudequandelletournelespagesdudossier.

–Vouscomprenezmaintenantlanécessitédelaprotectionquejevousimpose,résonnelavoixd’Antoinequ’ellen’apasentenduapprocher.

Évidemmentqu’ellelacomprend,làn’estpaslaquestion.Maisellenerisquerien.Alorsqu’apparemment,cen’estpaslecasdanslesruesdeMontréalencemoment.Unebruneetunerousseontétévidéesdeleursang.Lesphotossontaffreusesetluidonnentdesnausées.Lapremièrequestionquiluivientc’est:est-ceSulliquiafaitça?Ellenepeutpasl’accepter…etpourtant.

–Jedoisarrêtercevampireavantqu’ilnetuetouteslesfemmesdelaville,argueAntoine.Jesuiscertainquec’estceluiquivousamarquée.

Voulez-vousrisquerdefinirainsi?

–Non,articuleDélilaavecdifficultés.

–Alorsaidez-moiàl’arrêter.

–Comment?demande-t-ellepresquemalgréelle.

169

–Enmelaissantveillersurvous.S’ilcomptevousattaquerjeserailà.

Vousenavezdéduitquec’estunjeunevampiresijemesouviensbien.

Ellelefoudroieduregard,incapabledesesouvenirdecequ’ilsaitréellementetdecequeSulliaeffacé.

–Vousvoussouvenezparbribesdecequevousavezvécuaveclui,vousmel’avezconfié.

Ellesetraited’idiote.Elleauraitmieuxfaitdesetairecejour-là.

–Jepensequ’uneséanced’hypnosevousrendraitvossouvenirs…

Lavoilàexactementlàoùellen’auraitjamaisvouluretourner.

–…jesuisqualifiépourlameneràbien.

DélilaneregardepasAnaïsbienqu’ellesentesonregardperçantsurelle,etlesilencedeClaudeestautantinhabituelqu’éloquent.Anaïsl’aconvaincudesetaire,etmêmes’iln’apasdûcomprendre,ill’afait.

Maintenant,ilsesentsansdouteembarrassé.

–Je…

Commentsesortirdeceguêpier?

Délilas’assoitsurlachaiselaplusproche.Elleaunemauditeimpressionderetourenarrière.Enfait,hypnotiserTringlen’auraserviàriensicen’estretarderl’échéance.Ilfiniraparapprendrelavérité,ilestd’unetelleperspicacité,etelleseretrouveradanslamêmesituationquelaveille,àsamerci.Ellen’apaslechoixsielleveuts’ensortir,elledoitmanderl’aidedeSulli.Iln’accepterajamais,elleenestconvaincue.

–Çavousfaitpeurdevoussouvenir?chercheàcomprendreAntoine.

–Jenesuispasprêteàdécouvrircequ’ilafaitdemoi.

Délilaespèrequ’aveccemensongeellepourraretarderl’échéanceetaurasuffisammentdetempspourréfléchiràlaconduiteàtenir.

–Letempsjouecontrenous,Délila.Contrevousaussi,ettouteslesfemmesdeMontréal,insisteAntoine.

Lajeunefemmechoisitdenepasrépondreetquittelasallederéunionavecledossierdesdeuxnouveauxmeurtresenmain.ElleentendAntoineetClaudeéchangerquelquesmots,mêmesiellenelesdistinguepasnettement,tropperturbée.Toutcequ’elleafuilaveilleestentraindelarattraperdangereusement.Etellenepeutrienyfaire,rienempêcher…elle170

vadenouveauseretrouverdansunepositiondesplusinconfortables,sansmoyendes’enéchapper…sansvéritableissue.

171

Chapitre21

Délila,préoccupée,prendplacederrièresonbureauaprèsavoirposéledossiersurcelui-ci.Elleignorecommentsesortirdestourmentsquil’attendent,elledoityréfléchiràtêtereposée,maissurtout,elleabesoindetemps.AntoineTringlenesemblepasdisposéàluienlaisser.

D’ailleurs,sescraintesseconfirmentquandellelevoitpénétrerdanssonantre.

Ils’approched’ellesansunmotetouvreledossierposésursonmobilierpourqu’ellevoielesphotosdesfemmessauvagementassassinées.

–C’estainsiquevousvoulezfinir?

Lajournalisteréalisequejamaisellen’arriveraàsedébarrasserdecetype.Saseuleissuec’estd’acceptercequ’illuiproposeetdeprendresonmalenpatience.Ilfinirabienparlalaissertranquillequandilréaliseraquelevampirenelatraqueplus.EllepourraitaussifaireappelàSulli,elleyadéjàsongé,maisàquoibon?Ellepréfèrelelaisserendehorsdesesproblèmesetnepluslevoir.

–Voussavezquenon,réplique-t-elle.

–Vousm’envoyezrassuré.

Unlongmomentdesilences’installependantlequelDélilan’arrivepasàdétournersesyeuxdesphotostragiquessoussonnez.Aurait-ellevraimentfiniainsisi…siquoi?Siellen’avaitpasdécouvertavoirétémarquéeparunvampireousiTringlen’étaitpasdanssavie?Sullivanavaitcedesseinpourelle,elleenestconvaincue,mêmesic’estduràaccepter.Ill’aséduiteimpunémentetatoutfaitpourqu’elletombeamoureusedelui–dufauxlui.Lesmauvaismomentspassésensacompagnienefontqueconfirmersasupposition,maislesbonslalaissentdouter.Sanscompterlathéorieduspécialiste:ilseraitamoureuxd’elle.

172

N’importequoi!Elleseressaisit.ElledoitseprotégerdeSullietnonpasluidemanderdel’aide.

–Mafemmeetmafilleontététuéespardeuxvampiresquisévissaientdansl’Albertaavantd’ajouterl’Ontarioàleurtableaudechasse.

DélilalèvelesyeuxsurAntoine,éprouvantuneprofondecompassionpourlui.

–Jesuisdésolée.Jel’ignorais.

–Çafaitmaintenantdeuxans,etdepuiscejourjenevisquepourexterminercettevermine.Vousnevousrendezpascomptedudangerquevousencourezetçamerendfouderage.

–Quemeproposez-vous?

–J’aidéjàappelémonéquipe,ilssontenchemin.Nousveilleronssurvous.

–Enmesuivantcommemonombre?semoque-t-elle.

–Jem’installeraichezvous.

–Jevousdemandepardon?

Ellenes’yattendaitpasdutout,etplusquesurprise,elleesttotalementréfractaireàcetteidée.

–Lanuitvousdevenezvulnérable.

–Jecroyaisqu’unvampirenepouvaitpasentrerchezmoisansyavoirétéinvité,argue-t-elleenfermantledossiermacabrequ’elleasouslesyeux.

–Commentpouvez-vousêtrecertainedenepasl’avoirdéjàfait?

Ellel’afait,ellelesait.Ellel’avudanssessouvenirsetsansçailn’auraitpaspusefaufilerchezlaveilleausoir.Malgrétout,ellenelecroitpascapabledel’attaquer.

Sonregardseriveaudossierfermé.

Ousi.

Elledoitseprotégerdelui,cen’estpourtantpascompliqué.Alorspourquoia-t-elletantdemalàl’accepter?Touslessentimentsqu’elleéprouvepourSullisontcontradictoires.

–Jel’ignore,répond-ellesimplementàsaquestion.

173

–L’hypnoserépondraàvotrequestion.

Elleesquisseunsourireforcé,imaginanttrèsbienlasuitedesévénementsquandelletairasonnom.Àmoinsque…uneidéeprendformedanssonesprit.Ilsuffiraitqu’ellemente.Antoinen’ensauraitrien.

Elleinventeraitunnomauvampire:Chad,etledécriraitàsafaçon:ungrandblondauxyeuxnoirs…unpeucommeceluiquiaccompagnaitSulliauStéréo-nightclub.

–Trèsbien.J’accepte.

Lajeunefemmeespèredetoutsoncœurnepasavoiràregrettercettedécision.

–Jevousretrouvechezvousversdix-neufheures.

–Est-cequel’hypnosefonctionnesurvous?questionne-t-elle.

Uncourtsilences’installe.

–Oui.Pourquoicettequestion?

–Pourrien.

Elleluisourit,alorsqu’illafixe,leregardétrange.

Denouveau,Délilaressentunmal-êtreauprèsdelui,cethommeluicachedeschoses,elleenestcertaine.Peut-êtrequ’ilneditpastoutsursesmotivationsoul’étenduedesespouvoirs.

C’estofficiel,elleneluifaitpasconfiance.Dommagepourelle,carellevaseretrouverseuleavecluitouteunenuit,etplus,ellelecraint.

–Àcesoir,prononce-t-ilenmarchantverslaporte.

Quelquessecondesaprès,lajournalisteintriguéeseretrouveseule.Ellepeutsouffler,ceTringlene

luiditrienquivaille.

Encoreunefois,ellepenseàSulli.Unebandedechasseursdevampiresvadébarquerenville,ilseraitpeut-êtrebonqu’ellel’eninforme.

Unepetitevoixrésonnedanssatête,luidemandantpourquoiellecommettraitcettebêtise.

Délilaignorelaréponse.

–Çayest,ilestparti?questionneAnaïsenentrantdanslapièce.

Sonamiehochelatêteensignederéponsecommeellefermelaportepourunsoucidediscrétion.

174

–Jevoulaistesuivreavant,maisAntoinem’ademandédelelaisseryaller.

–Ilvam’hypnotisercesoir,confieDélila.

–Commenttuvast’ensortir?

–Jevaisluimentir.Monvampires’appelleraChadetserablond.

–Lavéritén’estpasuneoption?

–Non.SiSullivientàl’apprendre,ilmetuera.

–Réfléchisbien,Délila,Antoinepourraittelibérerdelui.

–Jeneluifaispasconfiance.Cetypeest…j’ensaisrien,maisiln’estpasclair.

–Pourquoitudisça?

–Sonregardchangeparmoment,ilm’arrivedepenserqu’ilsaitquejemens,qu’ilsaittoutd’ailleurs…

–Tout,quoi?

–ImagineunesecondequeSullin’aitpasréussiàl’hypnotiserhier.

–Oh,Délila…tutefaisdusoucipourrien!

–Çaabienéchouéavecmoi;pourquoipasavecTringle?

–C’estl’excusequetuastrouvéepourallerquestionnertonhommedelanuit?

–Ah!Ah!Trèsdrôle!pesteDélilaalorsqu’Anaïsritauxéclats.Jeneveuxplusjamaiscroisersaroute!

LajeunefemmereprendlesujetinitialetannonceàsonamiequecesatanéAntoineTringleadéjàfait

venirsonéquipeetqu’ilcomptes’installerchezelledèscesoir.

–Est-cequ’ilteplaît?

–Anaïs!rouspète-t-elle.

–Jesuissérieuse,Délila,est-cequ’Antoineteplaîtphysiquement?

Lespécialistedescréaturesnocturnesestplutôtgrandetbienbâti,presquecommeunsportif.Ilestjeune,ilsembleàpeineplusâgéqu’elleetellel’imaginecélibatairepuisqu’ilaperdusafamilleilyadeuxans.C’estunhommeblondauxyeuxverts,plutôtbeau,c’estvrai.Maisildégage175

quelquechosed’étrangequilaforceàseméfier.Ellen’imaginepasluifaire,unjour,uneconfiancesansretenue.

–Jelereconnais,ilestbeau.Maisilnem’intéressepas.

–Tontrucàtoi,c’estlessuceursdesang!

–Arrête!

–Jenet’aijamaisvueautantsurlesnerfsàcaused’unmec.

Biensûr,AnaïsfaitallusionàSullivanLancaster,etDélilanepeutqu’acquiescer,enmêmetempsellen’ajamaiséprouvéunsentimentaussifortpourunhommeetparadoxalementaucunnel’afaitautantsouffriraupointdesemoquerd’elle,delaréduireàl’étatd’unjeu,d’uneproie…denourriture.Unfrissonluiparcourtl’échineàcettepensée.

–J’aiunarticleàrédigerpourlamisesouspressedecesoir,énonceDélila.

Anaïscomprendalorsqueladiscussionestcloseetn’insistepas.Sonamieestsous-pression,ellelesaitbienetaimeraitl’aidermêmesiçasemblecompliqué.

–Situasbesoindemoi,tun’hésitespas.

–Promis.

AprèsunelonguejournéeauJournaloùDélilaaeubeaucoupdedifficultésàgardersaconcentration,ellepeutenfinserelaxerchezelle,dansunbonbain.IlluiresteuneheureavantqueTringleinvestissesonappartement.Elleignoreàquois’attendre,s’ilseraseulouaccompagné,ets’ilcompteamenerdumatériel.

Elleappuiesoncrânesurlerepose-têteetimaginelestraitsduvampireblondqu’ellevadécrirecesoir:Chad.Elles’inspiredel’amideSulli,maispastrop.ElleimaginequesiellemetTringlesurlapistedecevampire,elleverrarappliquerunSullienragéprêtàenfiniravecelle.

Lasonnettedesaportelafaitrevenirsurterreetellepestecetteintrusion.Ellevoulaitseulementsedétendre…elleenavaitmêmebesoin.

Elleattrapesonpeignoirblancets’enroulededansavantd’alleràlaporte.Loind’êtreinconsciente,elleregardedanslejudas:AntoineTringle.Aussitôtelleposesesyeuxsurl’horlogedesapetitecuisine:176

18h40.Ilestenavance,elleouvretoutefoislaporte.Satenueluivautunsouriredugrandblond,c’estd’ailleurslapremièrefoisqu’ellelevoitsanssonmasquesérieuximpassible.

–Jevousdérangeapparemment,s’amuse-t-ilenpassantleseuil.

–Nousavionsconvenudedix-neufheures.

–Jesuisdésolé,maiscommej’étaisprêtjesuisvenu.

Ellel’inviteàlasuivrejusquedanslesalonoùelleluidésignelecanapé.

–Jen’aiqu’unechambre,jevouslaisselecanapé.

–Vousn’avezpasdelitdouble?

–Vousplaisantez,j’espère!

–Évidemment.

Ellerouledesyeuxavantdel’informerqu’ellevapasserunetenueplusdécente.

Àl’abri,danslasalledebains,elleenfileunjeanetunpullléger.Ellenesupportedéjàpluslaprésenced’Antoinechezelle,commentva-t-ellelagérerdurantunnombreincalculabledejours?Pourvuqu’ilselasserapidementdesachasseauvampire!

Elleretrouvesoninviténondésirédanslesalon,raviedeconstaterqu’ilestseuletquesonéquipenesejoindrapasàlui.

–Vousêtesprête?

–Pour?

–L’hypnose.

–Quoi?Déjà?

–Assise,ordonne-t-il.

Elleobéitdevantladéterminationqu’ilaffiche,detoutefaçonellesaitcomments’ensortir.

Antoinehypnotiserapidementlajournalistepourdécouvrircequ’ellecache.Ildécidetoutefoisdeluiaccorderlebénéficedudoute–ellen’estpeut-êtrepassimauvaise,ilexistesansdouteunebonneraisonàsesagissements–,alorsilnelaquestionnepassursessouvenirs.Ilremarquetoutefoisqu’ellesembleàlafoiscraintiveetpassionnée,merveilleusecomédienne.Àmoinsqu’elleéprouveréellementquelquechoseà177

l’encontreduvampire.

QuandAntoineclaquedesdoigts,Délilasortdesonétatdetranse.Biensûrtouteslesimagesquiontdéfilédanssonespritdurantcelapsdetemps,ellelesconnaissaitdéjà.Elleestconscientequ’ilvamaintenantfalloirmentiravecconviction.

–Vousallezbien?

–Oui.

Ellehochelatêteenmêmetempsqu’elleformulesaréponse.

–Racontez-moi.

Lajournalisteal’impressiondeseretrouverunjourenarrièreetelles’entendluidévoilerlamêmechosequelaveille,tentantd’ymettreleton…deseretrouverdanslemêmeétat.

Toutaétéeffacédelamémoired’Antoinelanuitdernière,etcesoir,c’estunpeucommesielleluirendaitsessouvenirs,àunedifférenceprès:ellecomptebienluidirecequ’ilveutsavoir.

–Avez-vousvusonvisage?

–Oui.

–Leconnaissez-vous?

–C’est…c’estunhommequej’aivuplusieursfoisauStéréo-nightclub.

–Commentsenomme-t-il?

–Chad.

Antoineestsurprisqu’elleluidonnesifacilementleprénomduvampire.Finalement,peut-êtrequ’elleadécidédecoopérer.

–Oùtrouve-t-oncetindividu?

Lajeunefemmeréfléchituninstant,ellen’enapasbesoin,c’estjustepourdonnerlechange.Ils’interrogerasansdoutesiellerépondtropprécipitamment.

–Jelevoyaisauclubetaussidanslarue.

–Est-ilvenuchezvous?

Illafixeintensémentcommepourladéfierdeluimentir.

178

Déliladéglutit,ellen’aimepasquandilsemontresifroid,implacable.

S’iln’étaitpasicipourlaprotéger,illuificheraitlatrouille.

–Non,réplique-t-elleavecautantdeconvictionquepossible.

–Jevois,articule-t-il,apparemmentdéçu.

Elleimaginequ’ilauraitadoréuneconfrontationdansl’appartement,cependantlaraisonesttoutautre.Antoinevientderéaliserqu’ilnepeutpasavoirconfianceenDélila.

–J’auraisunequestionàvousposer,énoncelajournalisteaprèsunlongmomentdesilence.

Antoinesecontentedeposerlesyeuxsurelle,sansarticulerlemoindremot.

–Est-cequelevampireestcapablederessentircequemoijeressens?

Ilesquisseuninfimesourireavantdeluirépondreleplushonnêtementpossible.

–Effectivement,vousêtes,commequidirait,liésparlesang,etvotremaîtreestcapabledepercevoirlamoindredevosémotions.Toutefoisilsenourritexclusivementdevotrepeur.

Maître.C’estladeuxièmefoisqu’ilutilisecemotpourdésignerlerôleduvampiresurelle.Etelleledétestetoujoursautant.Parcontre,cequ’ellevientdedécouvriresttrèsintéressant,ainsiSullipourraitsentircequ’elleéprouve.

Mêmesiellesouhaitetairel’identitéduvampire,DélilaabesoinderéponseetdécidedeseconfieràAntoinesurl’hypnosedelacréaturequin’apasfonctionnéetlaréussitedesatentativedefaired’ellesaproieexclusive.Apparemment,ilsavaitdéjàtoutça,ellen’enétaitpascertaine,nesachantpasexactementquellesinformationsSulliaeffacéesdesamémoire.Aumoinsmaintenant,ellen’aurapluspeurdecommettreunemaladresse,puisqu’ilestaucourantdetout–oupresque.

Antoinen’interrogepasDéliladavantagecesoir,s’ilveutqu’elles’ouvreàlui,ildoitluiprouverqu’ellepeutsefieràlui.Alorsilprépareledîneretapprendàlaconnaîtresanspourautanttropsedévoileràelle.

179

Chapitre22

LejournaldumatinestencemomentmêmeentrelesmainsdeSulliquiexaminel’articledeDélilaNagarsurlesdeuxmeurtresrécentsayanteulieudanscetteville.Lajournalisten’apasfroidauxyeux,etleJournalnonplus,puisquelemotaétélâché:vampire.Maiscelaneprocureaucunesortedeplaisiràl’intéressé.

–Tuescouché?questionneBastianenentrantdanslachambreduvampire.

–Jelislejournal.

Sulliestconfortablementcalésurledivan,lesyeuxsurlepapier,mêmesisonespritn’yestpasréellementintéressé.Ilsaittoutcequ’ilaàsavoir.

–Tonjouetn’apasfroidauxyeux,commenteBastianquiadéjàprisconnaissancedesnouvellespuisquec’estluiquiarapportécetorchon.

–Rassemblelesautres,jevoudraisdiscuteravecvousdesconséquences.

–Samort,j’imagine.

–Jeparlaisplutôtpournous.

Sonacolytenerelèvepasetvatrouversescompèrespourunrassemblementdanscequiressembleàlasalleàmanger.

Sullinetardepasàs’ymontrer,levisageimpassible,etpaslamoindreattentionpourRosalie.Ilposel’éditiondumatinsurlatable,ouverteàlapagedel’articledeDélilaNagar.Celui-làmêmequidénoncelaprésenced’aumoinsunvampireàMontréal.Quandilyréfléchit,elleauraitpuaffirmerqu’ilssontenbandepuisqu’ellelesait,maiselleachoisidenepaslefaire.Àcausedeleuraccordsansdoute.Cependant,pourquoiavoirrédigécetarticle?Elledevaitbienpenserqu’iln’apprécieraitpas–même180

sic’estexactementcequ’ilattendait.Sansdoutea-t-elleobtenudenouvellesinformations,ayanteupourobligationdelesdivulgueraupublic.

–Jesupposequevousaveztousprisconnaissancedecepapier?

Lesvampiresmurmurententreeuxavantd’acquiescer.

BastianaachetélejournalàleurretourduStéréo-nightclub,justeavantleleverdusoleil,attiréparletitreaccrocheur«UnvampireàMontréal».

ChacunalulesmotsdelaproiemarquéedeSulli.

–Jevoulaisaborderavecvouslesconséquencesd’untelarticle.

–Lamortdetonhumaine?supposeJosephte.

–Jeparlaisdesconséquencespournous,paspourelle.

–Tunecomptespasluifairepayercetaffront?s’ahuritRosalie.

Sullilafusilleduregard,maisneluiadressepaslemoindremot.

C’estvraiqu’ilauraitétéaisédefaireprofilbasaveclavampireetdeluirépondrecourtoisement,neserait-cequepouressayerd’apaiserleschosesentreeux,maisSullin’estpasdeceuxquideviennentfaibles.

–Noussommesexactementlàoùnousvoulionsêtre,articuleSulli,empreintdesatisfaction.Lemotaétélâché…ànousdejouer.

–Tonhumaineestcapabledenouslivrer,ellesaitoùonréside!pesteBastian.

–Ellenepiperamot,j’aiunaccordavecelle.

–Alorstunoussuggèresdesortirdel’ombreetd’attaquer,poursuitBastian,malgréledangerquereprésentecettejournaliste?

–J’enfaismonaffaire.

Narcissen’objectepaspours’êtredéjàfrottéàlacolèredeSulli.Iln’aaucuneenviederéitérerl’expérience,unefoisasuffi.

Bastiannecontestepasnonpluslasuggestiondesonami.Ilestvraiqu’ils’ennuiedepuisqu’ilssontici,s’amuserproprementçavauntemps.

Maintenant,ilaenviedeplus…d’adrénaline,dechaos,demorts.Ilesttotalementd’accordavecl’avisdeSulli,mêmes’ilnepeuts’empêcherd’êtreraisonnableetdesongeraudangerquereprésenteDélilaNagarpoureux.

181

PenséequepartagentRosalieetJosephte,mêmesiseulecettedernièreoseenfairepartàSulli.

–Tudoist’assurerqu’elleneparlerapas.

L’intéressésaitpertinemmentqu’ellearaison,d’autantqu’unspécialistedesaracecapabledemeneràbienuneséanced’hypnoseestenville.Biensûr,touslesvampiresprésentsdanslapièceignorentcetteinformationcapitalequ’ilpréfèretairepouruneseuleraison:pouvoircommenceràsemerlechaosdanscettenation.

–L’hypnosen’aaucuneffetsurelle.

–Jeteparlaisd’unemesureplusextrémiste.Menacelaviedesesamis,desafamille,etabats-enunpourluiprouverquetuneplaisantespas.

–Affaireconclue.

Joseestravie,etellen’estpaslaseule.

–Cesoir,leDucLancasterdoitfaireuneapparitionàl’expositiond’unjeunephotographe,ons’amuseraaprès,décideSulli.

–Jet’accompagnerai,proposeJose.

–Soislabienvenue,machère.

Délilan’ycroittoujourspas,pourtant,elleestbeletbienencompagnied’AntoineTringleàl’expositionphotographiquedeJacquesMusson.

Lenouveautalentdanssondomainerencontreunnombreincalculabledepersonnesalorsquelajournalisteattenddepouvoirl’interrogerafinderéaliserunechroniquesurlui.

Anaïsdevaitcouvrirl’événement,maiselleapresquesuppliésonamied’yalleràsaplace.Biensûr,labrunettevoulaitpassersasoiréeavecClaude,maispasseulement,elleespéraitainsiqueDélilaverraitdifféremmentAntoineetqu’elleluitrouveraitducharme.Ellesaitquesacompagnieluipèse,cependantelleimaginequesiDélilasedétendaveclespécialistealorstoutpourraitsepasserpourlemieux.

–C’estlapremièrefoisquej’assisteàunetellesoirée,confieAntoine.

Lajeunefemmeneprendpaslapeinedeluirépondre,sonobjectifàlamain,ellecapturequelquesclichésdelasoiréepourleJournal.Elleespère182

quelejeuneMussonluiaccorderarapidementuneentrevuepourqu’ellepuisserentrerchezelle.

–Unecoupedechampagne?proposeAntoineenlaluimettantsouslenez.

–Euh…merci.

Délilalasaisitetenboitunegorgée.Lasalled’expositionn’estpastrèsspacieuseetlemondequ’elleabritelafaitsuffoquer.Elleachaudetqu’unehâte:s’enaller.

–Jevaisessayerd’obtenircinqminutesduprécieux…

Antoineestpenduàseslèvres,attendantlasuite,maisDélilasemblesubjuguée,happéeparunautremonde.Ilsuitsonregardpourdécouvrircequilafascineainsi.Unhommeavecunesuperbefemmeàsonbras.

–Quiest-ce?

Délilaentendlaquestiond’Antoine,maisnepeutpasluirépondre,pastoutdesuitenéanmoins.Elleestcommedansuneautredimension,fascinéeparlaprestancedelacréaturehantantsesnuits.Mêmesiladescentesurterreesttrèsdurequandl’hommeposeunregardnoirfoudroyantsurelle.Illuiglacelesangparceseulactealorsquelarousseàsescôtésnesemblepasprêterattentionàelle.

–Délila?

–C’estmonex,répond-ellesansréfléchir.

Aprèstout,c’estbiencequ’estSulli.DanssonrôleduDucLancasterilestd’unebeautérenversante,mêmes’ilnesemblepasappréciersaprésence.

–Ilestentrèsbonnecompagnie.

Ellejureintérieurement,nepasconnaîtrelanaturedeleurrelationlarendfollederage–oudejalousie,auchoix.

–Maisvousn’êtespasmalnonplus,ajouteAntoineendécrochantunsourire.

Lajeunefemmequinesouhaitenis’étendresurlesujetnis’extasierdavantagedevantlevampire,commeellelefaitencemoment,partenquêtedeJacquesMusson.

Lephotographeluiaccordevolontiersquelquesminutesqu’elle183

enregistre,puisluioffreplusieursposesavantd’allersaluersesinvités.

Ravie,Déliladécidequ’ilesttempsderentrer.

–Onyva,ordonne-t-elleàAntoinequandellepasseàproximitédelui.

–Vousavezdéjàeuvotreinterview?

–Oui.

–Cen’estquandmêmepaslaprésencedevotreexquivousfaitpartir?

Elleluilanceunregardlourddereproches,maisn’articuleaucunmot.

–C’estluiquivousaquitté?

Ellegardelesilence.

–Pourcetterousse?

Làencore,elleneditrien.

–Vousl’aimezencore?

–Vousnesavezpasdequoivousparlez,alorsfermez-la!rage-t-elle.

Ellenesupportepascesquestionsinquisitricessursavieprivée.Cequis’estpasséentreelleetSullivanneregardepersonne.Etsurtoutpaslui,lechasseurdevampires.

Elleluifaussecompagniepourseréfugierdanslestoilettespourdames.

Ellessontvidesetc’esttantmieux.Délilaposesesmainsdechaquecôtédelavasqueetseregardedanslemiroir.Lerefletqu’illuirenvoieestplutôtflatteur,maisellenes’ensatisfaitpas.

–Pourquoicetypeest-ilavectoi?

EllesursautequandelleentendlavoixtranchantedeSulli.Unrapidecoupd’œilsursadroiteluiconfirmesaprésence.

–Ilassuremaprotection.

–Contrequoi?demande-t-ilmoinsdurement.

–Levampirequim’afaitesienne.

Sulliesquisseunsourirecarnassiercommeilpenchesatêtesurlecôté,telunfou.

–Net’avisepasdeparlerdemoi!

184

Cetteremarques’apparenteplusàunemenaceaugoûtdeDélila.

–Tonamie,labrune,estlapremièresurmalistesitumedésobéis.

Elledéglutit.Aussiloinqu’ellesesouvienne,jamaisilneluiafaitsipeur.Elleleregarde,médusée,illuiarrivesouventdepenserquejamaisilneluiferademal,sonjugementestrevuenl’espaced’unedemi-seconde.

Pourêtrecertaindes’êtrebienfaitcomprendre,Sulliplaquelajeunefemmecontrelemur,d’unevitessesurnaturellequidonnemalàlatêteàDélila.Ilentouresoncougraciledesamaindeferetplongesesyeuxébènedanslessiens.

–Jen’existepas,articule-t-ildistinctement,tâchedet’ensouvenir!

Illalâcheavecrapiditéetdisparaîtcommeilestentré,danslesilenceleplustotal.

Délilatousseplusieursfois,mêmes’ilnel’apasserrée,illuiasemblémanquerd’air.Cettefois,c’estclairpourelle,cen’estpasdeSullidontelleestéprise,maisdel’imagequ’ilsecomplaisaitàluimontrer.Elleneleprotégeraplusparamour,maisbienparpeur.Cellequ’ilmettesamenaceàexécution.

Ellea,malgréelle,entraînéAnaïsdanssasombrehistoireetselereproche.Toutefois,toutdevraitbienallerpuisqu’elleferaexactementcequelemonstreluiaconseillé:iln’existepaspourelle.

Elleseredonneunecontenanceetquittel’endroit,encorechamboulée,pourretrouverAntoineenpleinecontemplationdeSulli,ouplutôtdelaroussequil’accompagne.Ellepensaitnaïvementqu’aprèssapetitedémonstration,levampireauraitquittéleslieux.Graveerreur.Commesisaprésencenesuffisaitpasàl’importuner,illuiimposedeterriblescoupsd’œil.

–Jeveuxvraimentrentrer,implore-t-elleAntoine.

–Saprésencevousmetmalàl’aise?

–Oui.

–Nevouslaissezpasdémonterparcethomme.D’ailleurs…quelestsonnom?

–Quelleimportance!Voussouhaitezrester,àvotreguise,moijepars.

Ellejointlegesteàlaparoleetsortdelasalled’expositionavec185

soulagement.

Commeellelepressentait,Antoinelatalonneetlaraccompagnechezellesansluiposeruneseulequestionsursonexpetitami.Heureusement,carellen’apaslamoindreenvied’évoquerlesujetavecluiouquiquecesoitd’autre.

Sulliestunmonstre…unmonstreàabattre,maisqu’elledevrapourtantprotéger.

186

Chapitre23

BienqueDélilalerendecomplètementfouavecsesmensongessurlevampirequil’amarquée,Antoinenelaisserienparaître.Sonéquipeestsurleslieuxdepuisdeuxjoursdéjàetrienneseproduit,ilpensaitbêtementquelacréatureviendraitàsaproie.QuelquechosenesemblepaslogiqueetilsoupçonneDélilad’avoirparlédeluiàsonmaître.Toutefois,iln’aaucunepreuve.Ilnecomprendpasladistancequemetl’immortelaveccellequiestsienne,sondésintéressementd’elle,même.Dansunpareilcas,unvampiretuesaproieetpasseàlasuivante.Antoinesupposeque,cettefois,lacréatureestpasséeàlaprochainesanstuerl’actuelle.

Durantlesdeuxdernièresnuits,d’autresmeurtresonteulieuàMontréaletpasl’ombred’undoutesurleursauteurs:desvampires.Oui,ilssontplusieurs,ilenalacertitude.Unseulvampiren’auraitpaspufaireautantdevictimesàluiseul.LasituationdevienturgenteetDélilaaffirmetoujoursqu’ellenesaitpasoùtrouverceluiqu’elleditsenommerChad.

Antoinevoulaitsemontrerpatientetgagnerlaconfiancedelajeunefemme,maisilpressentqu’ilperdsontemps…iln’arriveraàrienavecelle!

Maisquesepassera-t-ils’ilutiliselamanièreforte?Verra-t-illevampiresurgirpourlaprotéger?Ilaimeraitycroireetainsiiln’auraitqu’àluitendreunpiège,ensupposantquelacréaturesemontreseule.

Toutefois,ilrestelapossibilitéqu’ilfassefausseroute,quequelquechoseluiéchappe.Délilapourraitlecraindre,êtresouslejougd’unemenaceetleprotégercorpsetâme.Ilaimeraitquecesoitlavérité,ainsiilneverraitplusàtraverselleunemidinetteéprised’unsuceurdesang.

C’estimpossible!Lathéorien’estpasplausible,iln’apasoubliésafaçondecouvercethommeduregardlorsdel’expositiondel’autresoir.

187

Elleestamoureusedeluietenestpleinementconsciente.

Ilvadevoirrevoirsesméthodes.

–François,jecroisqu’ilesttempsdefaireparlerlajournaliste.

–Tuasuneidéesurlafaçondeprocéder?

–Ilmefautuneraisonpourl’hypnotiserànouveauetjeluidemanderaidemeracontercequ’ellevoit.

–C’esttropdangereux,tuaseurecoursàcettepratiqueàdeuxreprisessurelle,etDieuseulsaitcombiendefoislevampires’yestamusé!

FrançoisaraisonetAntoinelesaitparfaitement,maisc’estlaseulesolutiondontildispose,çaetl’envoyersefaireintroduiredesélectrodesdanslatêtepourtrouverl’informationqu’ilcherche.Ilneveutpasencorerecouriràcetteextrémité,carilignorelesraisonsquilapoussentàluimentirainsi.

–Detouteévidence,levampirenes’amuseplusavecelle.

–Tucroisqu’ellel’auraitmisengarde?

–Çanemesemblepasimpossible.

–Plutôtquel’hypnose,essaieleWhisky.

Antoineleregarde,dubitatif,alorsFrançoisluiexpliqueclairementlefonddesapensée.

–Soûle-laettires-encequetupeux!

Lejeunehommen’aimepastellementcettealternative.Iln’estpasdeceuxquiprofitentdesfemmesenivrées,maisc’estvraiquelasuggestiondesoncollègueestbienplusdoucequelaméthodequ’ilaentête–

électrodesetcompagnie.

–Qu’est-cequet’enpenses,Yvan?

Legrandbrunrestésilencieuxjusqu’icin’estpasdecetavis,siçanetenaitqu’àluiDélilaNagarseraitentrelesmainsdugouvernementactuellement.

–Cettegonzessedemalheurprotègeunvampire,alorspasd’étatsd’âme!

–Onignoresesraisons,argueAntoine.

–Ehbien,jetesuggèredeluiposerdirectementlaquestion,rétorque-188

t-ilquandilentendlaportedel’appartements’ouvrir.

Délilarentredesalonguejournéedetravail,éreintéeetagacéededécouvrirquelestroischasseursdevampiressonttoujoursàinvestirsonespacevital.

–Vousavezpasséunebonnejournée?s’enquiertAntoine.

–Oui.

–Àrédigerdesarticlessurlesfemmessaignéeslanuitdernière!pesteYvan.

Lajournalistenerelèvepas.Depuisqu’ellearencontrécetype,ellenel’aimepasetelletrouvequ’illeluirendbien.Cen’estqu’unantipathiqueperdudanssonmondedechassenocturne.

–Cephénomènesedérouledepuisdessiècles,voussavez,explique-t-ilsanssedépartirdesonairsupérieur.Ilportemêmeunnom.

Elleaimeraitluicracherauvisagequ’elles’enficheéperdumentdeseshistoiresàdormirdebout,maissoncôtéjournalisteréveillesacuriositéetelleveutsavoir.

–Celas’appelle:morsuresnocturnes.

–Vouspourriezpeut-êtredévelopper,suggère-t-elleens’imaginantdéjàyécrireunarticleaccrocheur.

–Antoines’enchargera,réplique-t-ilendésignantsonamidumenton,jevaisfaireunerondeavecFrançois.

Àpeinedeuxminutesplustard,Délilaseretrouveseuleaveclegrandblond,pendueàseslèvresenattentedelaréponse.

–Jevousracontetoutcequevousvoulezsavoircontreledébouchaged’unebouteilledevin.

Ildécided’essayerlaméthodedeFrançoisavantdesongeràquelquechosedeplusradical.

–D’accord.Sortezlesverres.

Ilsseretrouventdansledivan,unverredevinrougeenmain.Antoinecommenceàracontercequ’ilsaitsurlephénomènedesmorsuresnocturnes.

Apparemmentcelaremonteàlanuitdestemps…àDracula,lepremier189

vampire.

Lechasseurprendletempsderaconterl’histoiredeVladTepesàlajournalistequinel’interromptpasunesecondeetl’écouteavecattention.

Ilboitpeualorsqu’elle,pendueàsesmots,videunverreaprèsl’autre.

QuandilenaterminéaveclestueriesdeVladTepes,ilpoursuitaveccelledesafille:Lilith.Puisdesonprotégé:Sulli.

Délilaseraiditàl’évocationdecenom,elleignoraitquelevampireavaitfaitpartiedelaviedeLilithetdesonpère.Biensûr,lechasseurignoretoutdel’histoired’amourayantréunilesdeuxamantsetDélilan’ensauradoncpasdavantage.

Antoineluiparleensuitedesfemmesvidéesdeleursangdansd’innombrablesvillesàcausedebandedevampiresassoiffés,sanscœurnimœurs.

–Cephénomènedemorsuresnocturnesestcourantetnousvoulonsqu’ilcesse.

Morsuresnocturnes,voilàletermequidésignelesmacabresassassinatsdontlesvampiressontresponsables.

–CeuxquisévissentactuellementàMontréalneresterontpaséternellementici.Généralementlephénomènedureunmoisaumaximum,moinssilescréaturessententqu’ellesvontêtredémasquées.

–J’aipourtantétémarquéeparl’und’eux…

–Ilvoustueraavantdesedirigerversd’autrescontréesoù,avecsesacolytes,ilmassacreradenouvellesfemmes.

Horribleperspective!Elleapourtantunaccordaveclui.Sepourrait-ilqu’iln’entiennepascompte?Qu’iln’aitaucuneparole?C’estcequ’ellecraint.Etpuis,toutessesviesgâchées…nedevrait-ellepasparlerafindel’empêcher–luietlesautres–denuireànouveau.Ellepeutarrêtersesmassacres,elleenalesmoyens.Ellesaitoùtrouverlesvampires,ilsuffiraitdes’yaventurerenpleinejournéeetd’ouvrirlesrideaux.

Délilainspirelonguementavantdevidersonverredesdernièresgorgéescommeelleréfléchit.N’est-ilpastempsdedirelavérité?

–Commentexpliquez-vousqu’ilsedésintéressedemoi?Jecroyaisqu’uneproiemoinsamusantetrouvaitlamort.

190

–Àvousdemeledire.

Elleestsurpriseparcetteréponse.Quepourrait-ellebienluidire?Qu’ill’amenacée?Maisplussurprenant,pourquoipense-t-ilqu’ellesauraitrépondreàsaproprequestion?

–Commentlesaurais-je?

–Allons,Délila…noussavonstouslesdeuxquevousjouezundoublejeu.Lamortdetoutessesfemmesenvautvraimentlapeine?

–Jevousinterdis….peste-t-elleenselevantducanapé.

–Dites-moioùletrouver.

–Jel’ignore!crache-t-elleavecdédain.

Antoineluidévoileunrireamer,cerirequ’elledétesteetquiluidonnedesfrissonsd’effroi.

–Sil’alcoolnevousfaitpasparler,qu’est-cequilefera?

Elleestécœuréedecomprendrequ’ilaessayédelasoûlerpourluisoutirerdesinformations.Mêmesic’estvraiqu’elleaunlégercoupdanslenez,ellen’estpasassezéméchéepourmettrelavied’Anaïsendanger.

–Vousêtesignoble,méprise-t-elle.

–N’inversezpaslesrôles!Vousavezlesmoyensdemettrefinàtoutesleshorreurscommisesparvotremaître,maisvousl’aimez,n’est-cepas!C’estpourquoivousvousmurezdanslesilence.

Ellen’arrivepasàcroirecequ’elleentend.Ilnemanquepasdetoupetenl’accusantainsidetousles

malheursdelaville.D’ailleurs,commentsefait-ilqu’ilensacheautant?

–Votreex…c’estvotremaître,n’est-cepas?

Ellenerépondrien,bientropabasourdieparcequ’ilvientd’énoncer.

–J’ignoresonnom,maisilmesuffitd’interrogerdespersonnes.

–Vraiment?Sansphotopourvousaider?

Ilignoresisarépliqueestunaveuousiellecherchejusteàleprovoquer,maisiln’apasbesoinqu’elleconfirmecequ’ilsaitdéjà.Ilveutseulementsavoirpourquoielleleprotègemalgrélesconséquences.

L’amourluiparaîtêtreunebienmaigreraison,maissait-onjamais!

–JesuiscertainquejepeuxentrouverunedansleJournal.

191

–Àvotreplacejen’enseraispasaussisûr,c’estmoiquiaicouvertl’événementetcemonsieurnefiguresuraucundemesclichés.

–Etlarousse?Quiest-elle?Qu’est-elle?

Délilaneluidonneaucuneréponse,elleestbientropabasourdieparlatournurequ’apriselaconversation.

Commenta-t-ilpudéduirequeSulli,leDucLancaster,estlevampirequil’afaitesienne?Impossible.C’esttoutbonnementimpossible…saufsi…

–Vousn’avezpasétéhypnotisé,pasvrai?

–J’avoue.Jesuisimmunisécontrecettepratiquedeparmonespritfortemententraîné,mêmesijedoisbienavouerquevotremaîtreesttrèsfort.

Ellefermelesyeuxuncourtinstantavantdeselaissertombersurlecanapé.L’impactdecetterévélationestdévastateursurelle.Quedoit-ellefairemaintenant?

–Vousallezencorememenacerdemelivreraugouvernement?

–Croyezbienquecettealternativenem’enchanteguère,maissivousnemelaissezpaslechoix…

–Jenepeuxriendire.

–Pourquoi?

–Ilm’amenacée.

Antoineesquisseunsourire,maisiln’ariendemauvais,aucontraireilestradieux,commesoulagé.

–Vousm’envoyezravi.

–Jevousdemandepardon?

Délilanecomprendpascommentcethommepeutseréjouirdelamenacequipèsesurelleetsesproches.

–Celasignifiequevousavezuneconscience.Unmomentj’aicruqueseull’amourquevousluiportiezvousaveuglait.

–Jenesuispasamoureusedelui!réfute-t-elleardemment.

–J’aivucommentvousleregardiez.

192

–Iln’afaitquejouerunrôleavecmoi,méprise-t-elle,blessée.

Antoineperçoitsapeinequiestimmenseencetinstantetsilelienquiunitlevampireàsaproieestaussifortqu’illesupposealorsl’intéressédoitleressentiraussi.

–Dites-moisonnom.

–Çanevousavanceraàriendeleconnaître.

–Alorsdites-moioùjepeuxletrouver.

–Vousn’entendezpas?peste-t-elle.Ilm’amenacée!Iltueramesamisetmafamillesijeparledelui.

–Raisondepluspourmedireoùletrouver.Onpeutattendrequelejourselèvesivouslesouhaitez,ainsiilnepourrapass’échapperdulieuoùilsetrouvenis’enprendreàvous.

Délilagardelesilence,doutantencoredelabonneidéedecequ’illuisuggère.

–Quandilseramort,vousnerisquerezplusrien.Iln’yaqu’enviequ’ilpeutvousnuire,insiste-t-il.

Elleestpersuadéequ’ilaraison,alorselleacceptedeluidévoilercequ’ilveutsavoirdèsleleverdujour.

193

Chapitre24

Lanuitn’estpaspropiceaurepospourDélilaquinecessedetourneretseretournerdanssongrandlit,persuadéequecelaestdûàladécisionqu’elleaprisedetoutrévéleràAntoine.Ducoup,toutestremisenquestion…sielleneparvientpasàtrouverlesommeilalorsc’estqu’elleatortdevouloirlivrerSulli,c’estpeut-êtredangereuxpourelle.Ilpourraityavoirdesreprésailles.Antoineetsonéquipepourraientnepasparveniràéliminerlesvampires.Ellenedoitpasoublierqu’ilssontcinq,etsansdoutevieux,peut-êtrepasautantqueSullilui-même,maiscenesontpasdejeunesstupides.

Alorsquandelleimaginelascènedestroishumainsfaceauxcinqvampires,ellenedonnepascherdelapeaudespremiers.Ilestvraiqu’ilsontl’intentiond’agirenpleinjour,maislechâteauregorgedecoinssombresetlesfenêtresdel’étageoùlescréaturessontétabliessontpourlaplupartcouvertesdeplanches.Laclartéesttrèspeudiffusée,lesSangsFroidssontprotégésdansleurchâteau.Alorsqu’adviendrait-ildeschasseurs?Aussisûrsd’euxqu’ilspuissentêtre,ilsseferaienttueretensuiteceseraitletourdeceuxqu’elleaime…puislesien.

Ellenepeutpasprendreuntelrisque,remettresaviedanslesmainsd’hommesquinel’inspirentguère.

Maisellenepeutpasnonplusleurdirequefinalementellegarderalesilence.Aucunnecomprendrait.Etinvoquerlemanquedeconfianceeneuxpourcettemissionseraituneerreur.Toutefoissiellenedivulguepasl’informationqu’ilsattendent,elleseretrouveradansunlaboratoiredugouvernement.Ellen’apaslechoix,elledoits’enfuir.

Sansréfléchirdavantage,Délilaquittesonlitdouilletetsevêtdanslesilenceleplusabsolu.Deuxminutesaprès,sonsacàmainsouslebras,ellepasseparlafenêtredesachambreets’engagesurl’escalierdesecours.

194

Ilfaitencorenuitdehorsetmêmesielleignoreoùaller,Délilaestpersuadéequ’elleyseraplusensécuritéquechezelle.

Enerrantdanslesrues,ellesemetàcraindreuneattaquevampirique,maiselleserassure,elleestmarquée,etaucunn’aledroitdeposersescrocssurelle.C’estungenrederèglechezlessuceursdesang,alorsellenerisquerien.SaufdeSulli.Maispourquoil’attaquerait-il?Ellen’arienfaitderépréhensible,aucontraire,ellefuitpourjustementtenirsaparole.

Aprèslacrainte,ledésir.Elleéprouvel’enviedemarcherjusqu’auchâteauetdeleregarder,espérantainsiapercevoirleDuc.Ellesesermonneaussitôtpourcetteidéesaugrenue,nesait-elledoncpasàquielleaaffaire?Ilestresponsabledelamortdeplusieursjeunesfemmes,dontPeggy,sanslemoindredoute.

Depuisquelemotvampireaétéprononcé,Drewestenarrêtmaladie,incapabledefairefaceàlanouvelle.Commentlepourrait-il?Sanslaprésencedecescréaturesdel’ombre,ilfileraittoujoursleparfaitamouravecsafiancée.Ilabesoindetempsetderepospours’enremettre,c’estsonfrère,Andy,quiveillesurlui.

Déliladoits’abstenirdepenseràSulli.Uneinfimepartied’elleespèretoujoursqu’iln’arienfaitàtouteslesfemmesretrouvéesmortesrécemment,quelapartdeluiqu’illuiamontréeexistevraiment,mêmeenfouieauplusprofonddesonêtre.

Lajeunefemmedécouvrelavillesousuneautrefacette,lesténèbresl’enrobant.Lecalmeestreposant,mêmesipresqueangoissant.Délilaestintrépideetal’habitudedes’aventurerdansdeslieuxpeurecommandablesenpleinenuitpoursesreportages.Ellen’estpastrouillarde,c’estpourquoielleatoujoursdumalàaccepterqu’ellepuisseserésignerfaceàSulli,levampire.Enmêmetempsquandelleavudéfilerlesimagesdeleurssoiréesdanssatête,ellecomprendqu’elleaitpuêtreterrifiée,

maispasrésignéeàmourir.Elletientbientropàlavie!

–Antoine,tudevraisréveillerlabelleauboisdormant,suggèreFrançoisalorsqu’Yvanricane.

–Vousêtesprêts?s’enquiert-il,onvacreverdesvampires,aujourd’hui!

Yvanestmêmeplusqueprêt,luiaussiaperdulafemmedesavieà195

caused’unSangFroid.Ilafaitlesermentd’honorersaraceetdeladébarrasserdessangsuesquiladéciment.

–Réveilleladingued’uncadavre,nous,onattendcetinstantdepuisdeslustres!aboieYvan.

AntoineacquiescealorsqueFrançoisrestesilencieux.AntoineleuraparlédesmotivationsdeDélila,delaraisonpourlaquelleellecouvrelevampire,ilnepeutquecomprendrelapeurdelajeunefemmeetsaitaussiquelamortdesonmaîtreestsaseuledélivrance.

–Çamerépugnelesgonzessesquibaisentavecunvampire!pesteYvan.

–Tunesaismêmepascequis’estpasséentreeux,objecteFrançois.

–Elleaétémarquéedoncill’asautée!

–Ellen’étaitpeut-êtrepasconsciente,tuignores…

–Ellen’estpaslà!informeAntoine,affolé,coupantainsilarépliquedesonacolyte.

–Commentça:paslà?T’asregardédanslasalledebains?

questionneYvan.

–Oui.

Yvansoupire,réalisantquecellequ’ilqualifiedegarcen’avaitpasl’intentiondeleurlivrerlevampire,cequirenforcesaconclusion:elleestamoureusedelasangsue.

–Tupeuxpeut-êtreessayerdeluitéléphoner,suggèreFrançois.

L’hommelajugemoinssévèrement,sachantcequ’elleencourtsielleparleilimaginequ’elleapuavoirpeur,craindrequ’ilsnesoientpasàlahauteurpourvaincreunvampireâgé.

AntoineacquiesceetcomposelenumérodeDélilasursontéléphoneportable.

Plusquelesautres,ilaimeraitsavoircequiluiestpasséparlatête.

Pourquoielleafui?Parcequ’ilestcertainqu’ellen’estpassimplementalléeplustôtaujournal.Elleaprisl’escalierdesecours,c’estcequ’iladéduitquandilavusafenêtreouverte.

Aprèsplusieurssonneries,lerépondeursemetenmarche,Antoineraccrocheenjurant.

196

–Elleneveutpasrépondre,lagarce!constateYvan.

–Etsijamaisilluiétaitarrivémalheur,suggèreFrançois.

Antoinebraquesonregardsurlui,avidedeconnaîtrelasuitedesapensée.

–Sonmaîtreatrèsbienpupercevoirqu’ellemijotaitquelquechoseetvenirlachercher.Ill’auraithypnotiséepourqu’elleluiouvrelafenêtreetl’auraitattrapéeàcetinstant.

–Saufqu’ilal’autorisationdepénétrerchezelle,rétorqueAntoine,ilétaitlàl’autresoir,às’amuseràm’hypnotiser,tutesouviens?Jevousl’aidit.

Françoisacquiesce.

–N’empêchequ’ilatrèsbienpuvenirlachercher.

Prisdepanique,AntoineessaiedenouveaudejoindreDélilaetperdsoncalmequand,unenouvellefois,ilentendlerépondeur.

Souslescoupsdemidi,AnaïsrejointDéliladansunsnackpourdéjeuner.Sonamiel’aappeléedanslamatinée,ayantunbesoinurgentdediscuter.Labrunetten’enapasfaitpartàAntoineTringlebienquel’hommel’aitquestionnéeausujetdelablondedisparue.ElledemandeàDéliladeluiconfirmerqu’ellevabienpourqu’ilarrêted’élaborerdesthéorieslesplusabracadabranteslesunesquelesautres.

–Oh,Délila,chérie,jesuisheureusedevoirquetuvasbien.

Anaïsprendplaceenfacedesonamiequimanquevisiblementdesommeil.Sesyeuxsontcernésetsansmaquillagesonvisageperddesonéclat.

–Antoinem’aconvaincuedeparler,maisj’airéfléchietjeneveuxpluslefaire.Jesuisfichue!

Leserveurlesinterromptsansplusattendreetprendleurcommandeavantdeleslaisserseules.

–Sulliétaitàl’expositionetAntoineasuquec’étaitlui,iln’ajamaisétéhypnotisé.

Ilfallaitqueçasorte.

197

–Ilamenti.

DélilaestpaniquéeetAnaïstentedelaréconforterenluigarantissantqu’ellenecraintrienduchasseur,maislajournalisten’ycroitpas,etpourcauseill’amenacéeunefois.

Aprèsunedizainedeminutes,leursassiettessontdéposéesdevantelles,etAnaïsn’ignoreplusriendestourmentsdesonamie.

–Bon,tuneveuxpaslivrerSulliparcequetuaspeurqueleschasseurssefassenttuer,résumeAnaïs.

–C’estunecertitude,lesvampiressontcinq.

–Antoinelesait?

–Non.

–Laseulechosequ’iltedemandec’estunlieu,c’estbiença?

Délilaacquiesced’unhochementdetêteavantdemettreunebouchéedesaviandedanslabouche.

–Inventeunendroit,ouplusieurs.Lesbâtimentsdésaffectéscen’estpascequimanquedanslecoin!

–Tucrois?

–Onpeutallerfaireuntourensuitetouteslesdeux,etjeteferaidécouvrirquelquesemplacementsoùj’aiprisdesphotospourunechronique,tuverras,çapeutmarcher.

–Maisilsnetrouverontpersonne.

Délilan’osemêmepasimaginercequisepasserasileschasseursdécouvrentqu’elleamenti,quepersonnenevitdansleslieuxqu’ellepourraiténoncer.

–Jedoutequ’unvampires’établissegentimentdansunseulendroit.

Ilssontnomades.

–Sansdoute,maisSulliestauchâteau.

–Combiendetempscompte-t-ilyrester?

DélilasesouvientdesapremièreentrevueavecleDucLancasterquidisaitnepasresterlonguementaumêmeendroit.Ilprétendaitaimervoyager.

–Paslongtempsj’imagine.

198

–Écoute,j’aifaitdesrecherchespourtoi,etjesaisqu’unvampireestcapablederessentirlesémotionsdecellequ’ilamarquée.

Antoineleluiaditaussi.

–Peut-êtreques’ilsenttapeurilviendra,jeteparledanslecasoùleschasseurscomprendraientlasupercherie.

–Jenepeuxpasmiserlà-dessus,c’estbientropaléatoire.

–Ilyaautrechose,silafemmemarquéeingurgitelesangdesonmaîtrealorsilsétablirontunesorte

deconnexionmentale.

–Tudélires?

–Ilpourraittesauverdèsquetul’appelleras.

–Enpleinjouraussi?

Délilasecouelatête,Anaïsluiconseillevraimentn’importequoi.Quantàboirelesangduvampire…non.Illachasseraitrienqu’enentendantsarequête,peut-êtremêmequ’ilenriraitbien!

–L’idéeestabsurde.Jevaismecontenterdecroireauxmensongesquejeraconteraiauxchasseurs.Antoinemecroira…enfinj’espère.

–Quandlesmeurtrescesseront,ilstelaisseronttranquille.

–Oui,maisdanscombiendetemps?

Ellen’aaucuneenviedevivredanslapeurdurantdessemaines.Etencoremoinsledésirdedemanderdel’aideàSulli.C’estellequ’elleprotège,elleetceuxqu’elleaime,paslui.

Assisesurunbanc,plusd’uneheureaprèssavisiteguidéeavecAnaïs,DélilasedécideàappelerAntoine.Ellecraintsaréaction,maisnepeutpaslelaissers’alarmerdavantagepourellealorsqu’ellevabien.

–Délila?C’estvous?

Desuiteelleperçoitl’anxiétédanssavoix.

–Oui,c’estbienmoi.

–Bonsang!Onestmortd’inquiétude!

ElleentendYvanricaner,elleimaginequeluinel’étaitpas.

–Jesuisdésolée,j’aieupeur…j’avaisbesoinderéfléchir.

199

–Oùêtes-vous?

–Jenesaispastrop,dansuneruecommerçante.

–Onpeutsevoir?

–Jevaisrentrer.

–D’accord,jevousyretrouve.

Donc,iln’étaitpaschezelle.Elleimaginequ’illacherchaitdanstoutelaville,maisnesesentpas

coupablepourautant.

Lajeunefemmeregagnesonappartement,sachantdéjàqu’elleseraassailliedequestionsauxquellesellenerépondrapasimmédiatement,ellerêved’unedouche!

Quandellepousselaportedechezelle,elletombenezànezaveclestroischasseursquil’attendaient.

–Vousallezbien?questionneFrançois.

–Bonsang,Délila!articulesimultanémentAntoine.

Yvanneditrien,maislafusilleduregard.Elleavalelaboulequiseformedanslagorgeetannonceseulementsonbesoindesedoucheravantdeseréfugierdanssasalledebains.

Elleselaisseglisserlelongdelaportejusqu’àseretrouverassisesurlesolcarrelé,épuisée.Elleabesoindedormir,maismalheureusementleschasseursnelalaisserontpasenpaixtantqu’ilsn’aurontrienàsemettresousladent!

Aprèsquelquesminuteselleseredresseetfaitcoulerl’eauavantdesedéshabillerpourseglissersouslejetchaudapaisant.RepensantauxlieuxqueluiafaitvisiterAnaïs,Délilapensequeleschasseursserontsatisfaits.

Mêmesil’absencetotaledevampiredeviendrasuspecteauboutdequelquesjours.

Elleéteintlerobinetetattrapeuneserviettedanslaquelleelles’enrouleavantdesortirdeladouchepourtombernezànezavecYvanquilareluquesansscrupule.

–Jenemesouvienspasdevousavoirinvitédansmasalledebains!

–J’aijusteunequestion,mademoiselle.

Sonrespectestironiqueetelleleperçoitfacilement.

200

–Êtes-vousalléeretrouvervotremaître?

–Non.

–Vraiment?

–Quoi?Vousallezmedirequevoussentezsonodeursurmoipeut-

être?

Ilricane.

–Vousavezdéjàbaiséaveclui,jelesais.J’imaginequeçavousaplu.

–Sortez!

Ellehaussetellementlavoixqu’Antoineaccourtdanslapièce.

–Yvan!Laisse-la!

L’intéressépouffe,foudroyantduregardlapauvreDélilaquisentunfrissond’effroiluiparcourirl’échine,tournelestalonsetsortdelapièce.

–Jesuisdésolé,articuleAntoine,confus.

–Laissez-moi,s’ilvousplaît.

Ilacquiesced’unhochementdetêteetquittelapièce.

Délilasesècheetsevêtens’efforçantd’oublierlesyeuxremplisdehainequ’Yvanaposéssurelle.Mêmeaveclameilleurevolontédumonde,ellenepourraappréciercethomme.

Lajeunefemmeprendletempsdesecoifferetdesemaquillercommepourretarderaumaximuml’échéance,cetinstantoùelleseraharceléedequestions.Ellesoupire,elleaimeraitfaireunbonddansletempsetseretrouverunanplustard.Queferait-elle?SansdoutetoujoursdeschroniquespourleJournal,plusdereportagessurleterrain,maissurtoutellen’auraitplusAntoineetlesautressurledos.NiSulli.Elleseraitlibéréedelui.

Malheureusement,pourl’instantilesttempsd’affronterlaréalité,derépondreauxquestionsgênantesdesmessieurs,dementiravecconvictionetdenepasselaisserdémonterdevantlesaccusationsd’Yvan–parcequ’elleestcertainequ’ilyenaura.

Elleinspirelonguementavantd’ouvrirlaporte.

201

Chapitre25

–Onattendvotreexplication,s’amuseYvan.Sivousn’étiezpasavecvotresangsue,oùétiez-vous?

Lestroispairesd’yeuxmasculinssontrivéessurelle,ladéfiantdeleurmentirànouveau.

–Jen’aipasdormidelanuit,j’étaisbientropinquiète…

–Passezcepassageinintéressant,vousvoulezbien,lacoupefroidementYvan.

Délilaluioctroieunregardlourddereproches,maisquinefaitpascillerlechasseur.

–Jenesuispascertainequevousarriviezàtuerlevampire,enfaitj’endoutefortement,articule-t-ellesansbaisserlesyeux.

Ilesquisseunsouriremoqueur.

–Quiestvotremaîtrepourquevousdoutiezainsidenous?

–Jedisjustequesivouséchouezvousmecondamnez,ainsiquemesproches.

–Çan’arriverapas,luiassureAntoine.

–Jel’espère,parcequejevaisvousconduiredanslesendroitsoùjesuisalléeaveclui.

Leschasseurssontsatisfaitsetpensentdéjàenfiniravantlatombéedelanuit.

Commesiçapouvaitêtresisimple!

–Neperdonspasdetempsetfinissons-enpendantquenousavonsl’avantagedusoleil,décrèteFrançois.

202

Antoineestdumêmeavisets’emparedéjàdesonsaccontenantsesarmesdestructrices.Yvannesedépartitpasdesonsourirenarquoisenattrapantsesaffaires,mêmes’ilneregardepaslajournaliste.

–Vousvoussentezprête,Délila?s’assureAntoine.

–Non…maispuisqu’illefaut,allons-y!

C’estdansleHummerdeschasseursqu’ilsfontletourdelavillepourgagnerleslieuxqueDélilaleurdésigne.Elletentedeserappelerleplusdistinctementpossibledesroutesqu’elleaempruntéesavecAnaïs,maissetrompeplusd’unefois,cequiénerveYvan,bienqueceladonneplusdepoidsàsaparole.

–Ilfaisaitnuit!sedéfend-elleàchaquefoisqu’ilpousseungémissementd’exaspération.

D’abord,ilsvisitentuneancienneusineàl’abandon.Délilaprétendquec’estlepremierendroitqu’elleafréquenté.Elleestvenuesurleslieuxunpeuplustôtcequifacilitegrandementleschosesetappuiesesdires.Unpeuplusloin,ellesaitqu’ilyaunmatelaspuantornédequelquesaffairessalesetmalodorantes,elleyconduitleschasseurs.

Antoineestsursesgardes,ainsiqueFrançoisquifaitletourdecettepiècequidevaitêtreunbureauavantquel’usineneferme,alorsqu’Yvanposesesyeuxsurlajournalistequiressentunmalaise.

–C’esticiqu’ilt’amarquée?

Oh,quellehorreur!Jamaisdelavie,elleseseraitlaisséefairedansunendroitpareil,empestantl’urineetlasueur.D’ailleurs,elleestcertainequequelqu’undortici,Anaïspensequec’estlerepaired’unsans-abri,elleaussi.

–Non,répond-elle.

–Iln’yapersonne,informeAntoine.

–Pourtantc’estclairementhabité,argueFrançois.

–Onreviendraplustard,décideYvan.Unvampireçabouge!

LesecondlieuoùlesmèneDélilac’estunparc,celuioùaététuéeunefemmerécemment.Ellecréeunehistoireselonlaquelleillafaisaitcouririci…pourlatraquer.Ellen’apasàmentirsurcequ’elleressentaitencesinstantspuisquec’estencoretrèsvivacedanssonesprit,etleschasseurs203

acceptentvolontiersdecroirequ’elleavéculespireshorreurs.Toutefoisriennelesaideenpleinejournéeetlevampirenerisquepasdesemontrer.

–L’extérieurons’enfout!lasermonneYvan.Onveutdesbâtiments!

–Jemesouviensd’unimmeublequiétaitanciennementdestinéàlalocationd’appartements,maisiln’yavaitnimeublesniriendutout.Est-cequ’unvampirevitvraimentdansunemaisoncommenous?

–Tupensesàunegrotte?s’esclaffeYvan.

–Arrête,intervientgentimentAntoineenposantsamainsursonépaule.

–Non,àunecrypte,répliqueDélila.

–TuregardestropBuffycontrelesvampires!s’amuselechasseur.

Deuxrépliques!Etdeuxtutoiements!Pourquiseprend-il?Ilestsanscesseentraindelarabaisserousemoquerouvertementd’elle!Ill’exaspère.

Ellelefoudroieduregard,maisçanechangerien.

–Lesvampiresdenotretempssefondentparminous,expliqueAntoine,vousseriezsurprisedevoiroùcertainslogent.

–Maislesvieuxpréfèrentpeut-êtregarderleurshabitudes.

–Quelâgeàtonvampire?l’interrogeYvan.

–Plusdecinqcentsans,réplique-t-ellefièrement.

Elleledéfiedesemoquerencore.

–Peut-êtrequ’ondevraitfouillerlescimetières,opine-t-ilfinalement.

–Allonsdéjàvisiterl’immeuble,décideAntoine.

Durantletrajet,personnenepipemot,maisunefoissurplacelesconstatationssefontàhautevoix:

–C’estdésertici!

–Personnen’amislespiedslàdepuisdeslustres!

–Leplanchern’estmêmeplussûr.

–Aucunvampire.

C’estbredouillequ’ilsquittentl’endroitetDélilaespèrenepasavoircommisuneerreurenlesconduisantdanscelieuapparemmentdésert204

depuisbienlongtemps.

–T’essûrequet’esvenuelà?l’interrogeYvan.

Cetypenelalâcherapas,elleenestcertaine,mêmesielleignorepourquoietcequimotivelahainequ’iléprouvepourelle.Parcequ’elleestsûrequ’illadétesteetc’estréciproque.

–Ilm’amarquéeici,alorsoui,j’ensuissûre!

Pluspersonneneparle,Délilaestsatisfaited’avoirréussiàsauverlesapparences.

–Etmaintenant?Onécumelescimetières?proposeYvanaprèsqueleHummersoitdenouveausurlaroute,Françoisauvolant.

–Enpleinejournée,jenesuispascertainqu’ontrouvequelquechose,soupireAntoine.Vousn’avezvraimentaucunautresouvenir?questionne-t-illablonde,àcourtd’idées.

–Ilmepourchassaitdanslesrues(là,ellenementpas),jen’aiquasimentjamaisétéàl’intérieur.Àpartunefoisdansl’usineetuneautredansl’immeuble.

–Pourquoiest-cequ’ilt’auraitconduitedansuneusine?

CeYvanluidonnedesenviesdemeurtres!Ilfautqu’elleluifasseravalersonarrogance.

–Quandnousétionsdansl’usine,ilacommencéàm’embrasseretàvouloirallerplusloin,raconte-t-elleavecdégoût,puissontéléphoneasonnéetilm’aditqu’ildevaitpartir.Jesupposequ’ilavaitdansl’idéedemefairesiennelorsdecettepremièresoiréeàl’usine.

–Possible.

Malgréquelesoleilbrilleencoresurlaville,leschasseursdécidentdevisiterlescimetièresalentouretplusparticulièrementlescaveaux.

Délilaexècrel’ambiancemacabrequirègneenceslieuxetsetientàl’écartquandleschasseurspénètrentdanslescatacombes.

L’expéditiondurejusqu’aucoucherdusoleil,maissesoldeparunéchec,engendrantladéceptiondeshommes.Maispasl’abandon.IlsraccompagnentDélilaàsonappartementetdeuxd’entreeuxpartentenquêteduvampire.Habituellementlajournalisteestconfiéeauxbonssoinsd’AntoineoudeFrançois,cettenuitc’estYvanquiveillerasurelleetelle205

nepeutpass’enréjouir.

D’abord,toutsepassebien,lechasseurestsilencieux,sonarmeblancheàlamain,prêtàaccueillirle

maîtredelafemmeassisesurledivan,àluiretirerlavie,mêmesithéoriquementilestdéjàmort.Ensuite,ilouvrelabouche:

–Commentsenomme-t-il?

Délilan’apasbesoindelequestionner,ellesaitdéjàdequiilparle.Elleabiendonnéunnomàsonvampire,maisignoresiAntoineleurenafaitpart.Ycroit-ilseulement?

–Chad.

–EtceChadadoncplusdecinqcentsans.

–C’estcequ’ildit.

–Etpourquoivousaurait-ilditça?

–Parcequej’aiessayédeletuer.

Illaconsidèreavecétonnement,c’estvraisemblablementdifficileàconcevoirpourlui.

Elleluiparlealorsdesconseilsqu’elleademandésàAntoinesurlafaçond’éliminerunvampireetdeleurmiseenpratiquequis’estavéréeêtreunéchecfulgurant.

–Pourquoi?

–Parcequedansmathéorieilétaitunjeunevampire.C’estlàqu’ilm’aditquej’avaisfaituneerreur,qu’ilétaitvieux,etquej’allaismourirmaintenant.

–Pourquoin’a-t-ilpasétéjusqu’aubout?

–Jel’aisupplié.

Yvann’ycroitpas,unvampiren’aaucuneconsciencenilemoindreétatd’âme.Ilyauneautreraison,ilenmettraitsamainàcouper.

–Nousavonsensuitepasséunaccord.

–Dugenre?

–Ilmelaissevivreetjeneluinuispas.

Ilconnaîtcettepartiepuisquec’estlacausedusilencequeDélila206

s’évertuaitàgarder.

–Tusaisquecen’estpasunepratiquecourantechezlesvampiresquedelaisserlaviesauve.J’aicommencéàtetutoyeralorsjecontinue,sourit-il.

–Ilm’amenacée,jediraisplutôtquejesuisensursis,réplique-t-ellefermementsansreleversursadernièreremarque.

–Çaajoutéàl’hypnosequinefonctionnepasetàlaréussitedesatentativepourtefairesienne,jepensequel’hypothèsed’Antoineprendvraimentunsens.

Elleleregarde,médusée,ilnepeutpasluiaussisemettreàpenserqueSulliéprouvequelquechosepourelle.C’estsi…grotesque!

–Étantdonnélafaçondontcemonstrem’atraitée,j’endoutefortement!

–Ilssontdifférents,leurmentalitéaussi.Ilsn’ontaucunelimite,nesaventriendubienetdumal.

Lajeunefemmenerelèvepas,n’enéprouvantaucuneenvie.Toutcequ’elleasubiàcauseduvampireneressemblaitenrienàunepreuved’amour.Ill’aterroriséeàtelpointqu’elleacceptaitdemourirpourenfinir.C’estvraiqu’iln’yapaseuquedemauvaismoments,ilyenamêmeeudetrèsbons.Ilorganisaitdespique-niquesfabuleuxhorsduchâteau,ilsavaitprécisémentcequ’elleaimaitetlaséduisaitavecfacilité.Maistoutcelan’étaitpasréel,c’étaitunamourmensonge,factice…quelquechosequil’abeaucoupfaitsouffriretquiluifaitencoremal.

–Quandonl’auralocaliséetrenvoyéàlaterre,tuseraslibre.

Ellehochelatêteenrepliantsesjambescontreelle,elleaimeraitquetoutcelanesoitqu’unmauvaisrêve,allersecoucheretseréveillerdanssavie…saviesansvampires,sanschasseurs…uneviecommeelledevraitêtre.

Lesdeuxspécialistesdescréaturesnocturnesrentrentaumilieudelanuit,bredouilles.Paslamoindretraced’unvampire.Maislejoursuivantquand,auxinformations,lajournalisterelatelamortdequatrejeunesfemmes,ilssaventqu’ilssontpassésàcôtédumonstre.

Afind’essayerd’oublierlecauchemarqu’estdevenuesonexistence,la207

jeunefemmeainforméClaudequ’ellenesouhaiteplussechargerdeschroniquessurlesmeurtresdusauxvampires,seuleAnaïss’enoccuperapuisqueDrewestencoreplusmalenpointqueDélila.

Leshomicidesnecessentpas,maisnedépassentjamaisquatrefemmesparnuit,parfoismoins.

Délilaesttoujourssouslaprotectiondeschasseursetseterrechezelleaprèsdeuxsemainesd’ignominiesdanslesruessombresdeMontréal.Elleredoutelavenuedesonmaîtremêmesiquelquepartellepensequ’ill’aoubliée.

Antoineluiaditquelephénomènedemorsuresnocturnesn’excèdepasunmoisetilresteàpeineunedizainedejours.Elleapeurdemourir.

–Lavieavecvousestexaltante!seréjouitNarcisse.

–TuvasresteravecnousaprèsMontréal?s’intéresseBastian.

–Oùirez-vous?

–Jenesaispasencore.Sulli?Oniraoù?

L’intéressé,pâlecommeunmort,nerépondpas.Ilestphysiquementdanslasalleàmangeravecsesacolytes,maissonespritestloinetaucunnesaitoù.

–Oh,mec!

SullilèvedesyeuxvitreuxsurBastian.

–Tudevraispenseràtenourrir.

Ilricane.

–Faudraitsavoir!Uncoupvousmeditesdenepastropbouffer,etàunautre,depasseràtable!Mettez-vousd’accord!crache-t-il.

–Çafaitvingtjoursqu’onacommencé,énonceJosephte,c’esttontripettufaisquoi?Tujouesauzombie!

–OniraenÉcosse!décideSullienselevantdesachaisequ’ilfaittombersanss’ensoucier.

Lasecondesuivante,iln’estplusdanslagrandepiècepeumeublée.

Josesoupire.Ellen’enpeutplusducomportementdesonacolyteetellesaitexactementàquoiilestdû.

208

–Ilfautqu’ilsedébarrassedesonentravesansquoiilvasombrer.

Lesautressonttoutàfaitd’accord.Unvampireliécommeill’estàunehumainenepeutpaspasserautantdetempsloindesaproie.Ilacrééunlienavecellequandill’amarquéeets’ilneveutplusjouerensacompagniealorslesrèglesdisentqu’ildoitlasupprimer.Sansquoi,ilmourraàpetitfeu,incapabled’ingurgiterlesangd’uneautresanssouffrirlemartyrecommes’ilavalaitdesalimentshumains.IlascellésadestinéeenmarquantDélilaNagar,maintenantildoitl’assumerouselibérer.

Sulliseréfugiedanslapiècequ’ilnommesachambredepuisqu’ilestdanscechâteauqu’ilquitterabientôt.Ilestconscientdeladouleurquiluibouffelesentraillesàchaquesecondeetdelaseuledélivrancepossible:lesangdeDélila.

Ils’installesursacouche,appuyéàlatêtedelit,souffrantdumalquilerongedel’intérieur.Lemanquedesangdanssonorganismeestpresqueaussidouloureuxques’ilbuvaitàuneautreveinequecelledesaproie.Ill’afaitsurdeuxjeunesfemmesilyaplusieursnuits–humainesquiensontmortes–etilasouffertlemartyrecommejamaisauparavant,maisilavaitbesoindeça…besoindesouffrirpoursepunir.

Est-ilnormal?Ilpassesontempsàseposercettequestion.N’importequelvampirenormalementconstituénes’imposeraitpasuntelcalvaire.

Maispourmettrefinàl’insoutenableafflictionquileconsumeildoitviderdesonsanglaseulefemellequ’ilregardeautrementqu’undînerdepuissaséparationavecLilith.Ilnepeutpass’y

résoudre,mêmes’ildoitencrever.

Danssonétat,soncorpsnetiendrapluslongtemps.Encoreunmoisoudeuxdesouffrancesexcessives,etilseralibéré,desséché.

209

Chapitre26

Troisnuits…troisnuitsqu’iln’yapaseulemoindremeurtre.LeschasseursenontrapidementconcluàlafindesmorsuresnocturnesàMontréal,maispourquelleville?Ilsl’ignorent.

MalgrélesprécieusesinformationsdeDélila,ilsn’ontpasréussiàdébusquerledangereuxprédateurquisévissaitdanslesruesdelaville.

Maintenant,ilsn’ontpluslamoindrechanced’yparveniràmoinsd’êtreinformésdelaprochainedestinationdelacréature.

–Nouspartons,informeAntoineàDélila,postéedevantsafenêtre,perduedanslacontemplationdecettedésolantejournéepluvieuse.

–Jesuisnavréequevotrequêtesesoldeparunéchec.

Elleportesatassedecaféfumantàlabouchecommeelleposesonregardsurl’hommedevantelle.

–Moiaussi.

–Onestprêt,onattendquetoi!résonnelavoixd’Yvan,pressédequitterleslieux.

MêmesientreDélilaetluileschosessesontadouciesaucoursdesderniersjours,iln’enapasmoinsenviedepartird’icietdereprendrelachasseauxvampires,làoùilestcertaindeleurtomberdessus.Pascommecevampireinsaisissablequ’estleChaddeDélila.

–Jevoussouhaiteunebonnecontinuation,exprimeFrançoisgentimentàlajeunefemme.

–Merci.Àvousaussi.

Illuiserrelamain,puiscèdesaplaceàYvan.

Lechasseursecontented’unsignedetêteavantd’articuler:210

–Salut.

–Aurevoir.

Lesdeuxhommeslibèrentl’appartementdelajeunefemmedeleursaffairesalorsqu’Antoineplongesesyeuxvertsdanslebleuocéandessiens.

–Prenezsoindevous.

Elletournelatêtecommeelleluidévoilesoncouoùlesdeuxrenflementssonttoujoursvisibles.

–Etça?

–Ilsdisparaîtrontquandvousneserezplussienne.

–Àsamortdonc.

–Oui.

–Ilexisteuneconnexionentreluietmoi,pasvrai?Etilestpartisansfinirsontravail…qu’est-cequeçasignifie?

–Quej’aivujuste.

–Maisencore?

–Ilvousaime,sansquoiiln’auraitpasréussiàvousmarquer,ilseraitparvenuàvoushypnotiseretilvousauraittuéeavantdedisparaître.

Encoresastupidethéorie!Mêmesielleaunsensetqu’ellesembleplausible,Délilaneluiaccordeaucuncrédit.

–Vousnerisquezrien,conclut-ilavantdedéposerunebisesursajoue.

Prenezsoindevous,ajoute-t-ilencaressantdélicatementsonmenton.

Uneidéesaugrenuetraversel’espritdeDélila:Antoineressentquelquechosepourmoi.Totalementabsurde,ellelabalayeaussitôt.

–Vousaussi,réplique-t-elle.

Lechasseurattrapesesaffairesetquitteleslieuxàsontour,sansmêmeseretournerunedernièrefois.

Bienqueravie,Délilasesentseulemaintenantquelestroishommessontpartis.Maisellenedoitpasoublierunechose:elleestlibre.Sulliaussis’enestallé,etsabandedemorts-vivantsavec,sanslemoindredoute.

211

Saviereprenddoncsoncoursencejourpluvieuxd’octobreoùelledécidedenerienfaire.Aprèstout,ledimancheestfaitpourça!

AlorsqueDélilareprendsesmarquesdanssonspacieuxbureauqu’elledélaissaitsouventcesderniersjoursetoùellen’arrivaitplusàseconcentrer,Anaïs,plusjovialequed’habitude,entredanslapièce.

–Salut,mabelle!

–SalutAnaïs.Tumeparaisbiensouriante!

–Claudem’ademandédel’épouser.

Délilaretientlecridestupeurquis’apprêtaitàfranchirseslèvresetoptepouruneréactionplussaineetamicale.

–Ehbien,félicitations!Tuasaccepté,jesuppose.

–Oui!

Anaïss’approche,samainenévidence,pourmontrerlasuperbepierrebleueornantsonannulaire.ElleadorelessaphirsetapparemmentClaudelesaitetatenucomptedesesgoûts.

–Ilnes’estpasfichudetoi!

–Jesais,roucoulelajeunefemme.Ettoi?Testénébreuxchasseursontdébarrasséleplancher?

–Oui,hier.Jesuis…jemesensunpeuseule.

–Non!rit-elle,paspossible!Trouve-toiunmec,chérie!

SabonnehumeurestcontagieuseetDélilaritàsontour.

Ellenes’endépartitpasdetoutelasemaine,cependantlevendreditoutbascule.

Lajournéeétaitplutôtbienpartie,DrewvenaitdereprendreletravailetrédigeaitunarticleavecDélilaavantqueleurscollèguesorganisentunpotdebienvenueauquelilssesonttousrendusenfind’après-midi.

C’estàcemoment-làqu’Anaïs,lamineaffligée,approcheDélila.

–IlestarrivéquelquechoseàClaude?s’inquiètecettedernièreavantdeseréprimanderpuisquelefiancédesonamieestprésentdanslapièce.

Vousavezrompu?

212

–Regardeça,réclamelabrunetteenluitendantunjournalouvertsurunepageoùfigureunephotoduchâteauacquisparleDucLancaster.

Délilaregarded’abordsonamie,puisprendlemagazineetlitl’articlequiannoncelaperted’argentduDucLancasteretlarénovationdelapropriétéquin’aurajamaislieu.

Cen’estpasvraimentunesurprisepourlajournalistequisaitbienqueSulliaquittél’endroitdepuisplusieursjours,maisçal’atteintbienplusqu’ellenel’auraitvoulu…qu’ellenel’auraitcru.

–Ilvavendre?demande-t-elled’unevoixpresqueinaudible.

–Oui.Situlisenbasdel’article,tuverrasquelapropriétéaétémiseenvente.

Effectivement,lesmotssurlepapierconfirmentlesdiresd’Anaïs.Ellesentsoncœurseserreràcettenouvelle,mêmesic’estincompréhensibleétantdonnéleshorreursqu’elleasubiesàcauseduvampire,danscettepropriété.

–Çavaaller?s’assureAnaïs.

–Ilnepouvaitpasyavoirmeilleurenouvelle,promet-elleavecunsourireforcé.

Anaïsquilaconnaîtparcœurn’ycroitpasunesecondeetsaitparfaitementquesonamiesouffre.Elleéprouvaitdessentimentsvéritablespourlevampire,mêmes’iln’enétaitpasdigneetquecequ’elleaimaitenluin’existaitpas.

–Viens,jevaisteservirunecoupedechampagne.

Labrunetten’attendpaslaréponseetattiresonamieaubar.

DèsqueDélilaréussitàs’extirperdupotdebienvenuedeDrew,ellesesentsoulagéeetlibérée.Ellen’enpouvaitplusdefairesemblantd’allerbienalorsqu’aucontraireçanevaplus.

Lasemaineavaitpourtantsibiencommencé!

SespaslaguidentàlapropriétéduDucLancaster,elleveutlavoirunedernièrefois,avantqu’elleneluiappartienneplus.

Lapancarte«àvendre»luidéchirelecœur,toutefoiselleytrouveunsoulagement,elleaquandmêmevéculespireshorreursdanscelieu.

213

Ilvousaime,sansquoiiln’auraitpasréussiàvousmarquer,ilseraitparvenuàvoushypnotiseretilvousauraittuéeavantdepartir.

Lesmotsd’Antoinerésonnentdanssonespritalorsqu’ellecontemplelademeurederrièrelagrilledefer.Ellen’apasquedemauvaissouvenirsici,quelques-unssontbons,mêmetrèsbons.

Lajeunefemmesouritenrepensantauxpique-niquesqu’organisaitSulliquandellelerejoignaitàcetendroit,aprèsletravail.Quandelleyrepense,ilnemangeaitpasalorsqu’elle,si.Illuiprévoyaitdequoisenourrirparcequ’ilsupposaitqu’elleavaitfaimaprèssajournée.Ilsesouciaitd’elle,enquelquesorte.Ellerefusequ’ilensoitautrement.Elleaenvieetbesoindecroirequ’iltenaitàelle,qu’ellen’estpascomplètementnaïveaupointdesefairemanipuleravecfacilitéparunhommequelqu’ilsoit.

Sesmainsseposentmachinalementsurlagrandegrilleenferquiémetunbruitstridentàcecontactens’ouvrantlégèrement.Étonnée,Délilaconstatequeleportaild’entréen’estpasverrouillé.Lachaîneestbienlà,maispaslecadenas.

Encouragéeparlacuriosité,ellelepousse,lefaisantainsigrincer,etpénètresurledomaine.Elle

s’avanceàpasmenusendirectionduchâteau,persuadéequecelui-cin’estpasaccessible,maisquandsamainseposesurlaclenche,elleconstatequelaporteestouverte,alorselleentre.

L’entréeluirappelledemauvaissouvenirs,elle,entouréedevampires,tentantd’échapperàunemortcertaine.Sulliavaitdécidédelavioleretsansl’interventiondelafemme,ilseraitparvenuàsesfins,elleenestbienconsciente.Unfrissond’effroiparcourtsoncorps.Ellen’ajamaiscompriscethomme–cevampire.

Lerez-de-chausséequ’elleparcourtrapidementestvideetsinistre.

L’endroitauraitbienbesoind’uncoupdeménage.Ellesouhaited’ailleursbonnechanceàceluiquiacquerralapropriété.

Lesescaliersgrincentsoussespas,Sullidisaitqu’ilsétaientdangereux,maisDélilapenseplutôtquec’étaitunefaçondelateniràl’écartdesétages.Ellesaitquelepremiern’ajamaisétéhabité,maislesecondabritaitlesvampires.Ellepousselapremièreportesursaroutepourdévoilerunechambre.Lelitn’estpasfaitetseulementquelquesvêtementstrônentdanslapenderie,apparemmentl’occupantdecelieun’apassouhaitéemportertoutessesaffaires.Danslesautreschambresc’est214

identique,elleenconclutquelescréaturesdelanuitvoyagentléger,nes’encombrentpas.Sansattaches.

UnefoislesquatrechambresdescompagnonsdeSulliexplorées,ellesedirigeverscelledeceluiquil’amarquée.Elledoitrevenirsursespas,maisn’avaitpaslecœurd’affrontersessouvenirsdirectement.Ellepousselaportenonenclenchéepourseretrouverdevantlamêmevisionquedanslesautrespièces.Lacouettetraînepresquesurlesol,desvêtementssontéparpillésicietlà,l’armoireestbeaucoupplusrempliequecelledesescongénères,elleendéduitqu’iln’arien–oupresque–emporté.Elles’approchedulitoùelleaconnudesébatspassionnés,lesmeilleursdesavie,etysongeuninstantens’asseyantsurlematelasquiauraitbienbesoind’êtrechangé.Elleattrapeletee-shirtàproximitédesamainetleporteàsonvisagepourenhumerl’odeurmusquée.CelledeSulli.

Unelarmeperleducoindesonœilàlapenséequeplusjamaisellenelereverra.Ellerestedanscettedélicieusetorpeurunlongmoment,sespenséesconvergeanttoutesverslemêmehomme:Sulli.

Puis,quandellerelèvelatête,ellel’aperçoitdansl’embrasuredelaporte.Ilestlà,appuyésurlechambranle,sonvisageplusblêmequ’habituellement,sesyeuxcernésd’unnoird’ébèneterrifiant.

Sansréfléchir,ellelaissetomberlevêtementqu’elletientetseruedanslesbrasdesonaimé.

215

Chapitre27

Sulliavaitbiensentiuneprésencehumainedansleslieux,maissessensnesontplusassezaiguiséspourqu’ilidentifiecettepersonne.Enretournantdanssachambre,ilaétéstupéfaitdesurprendreDélila,ilnepensaitjamaislarevoir.Ill’estd'autantplusdelaserrercontrelui.

Ilsrestentainsi,l’uncontrel’autre,unlongmoment.

Sulliressentl’appeldusang,maispasseulement.Quelquechosed’intolérableestentraindesepasserdanssonorganisme.Unechosecontrelaquelleilluttedepuisqu’ilacompris,maisquil’entraînedanslesméandresdumal.Ilaacceptédesouffrirpourlapréserveretlavoilàquiseprésentedevantlui,neressentantaucunecrainte,justeunprofondsoulagement.

Délilafinitpars’écarterduvampirepourlecontempler.Ilsemblemalade,maiselleignoresic’estunepossibilitépourcetterace.Ellelescroyaitimmortels.

–Tuessouffrant?

–Enquelquesorte.

Incapabledesupportersonpoidspluslongtemps,dévoréparlafaimetladouleur,Sullis’assoitsurleborddesonlit.

–Depuisquandnet’es-tupasnourri?questionne-t-elle,certainequeleproblèmevientdelà.

–Unmois.

–Quoi?Unmois?

D’abord,ellelecroitfou,mêmeinconscient,puisellerepenseauxmeurtresdumoisdernier,s’ilnes’estpassustentéalorscelasignifiequ’il216

n’apasparticipéauxtueries.

–Ilsonttuédesfemmesetsontpartis,maispastoi.Pourquoi?

Ellesejointàluisurlelit,décidéeàobtenirdesréponsesàtoutessesinterrogations,c’estpeut-êtresaseulechancedecomprendreleschoses,d’obtenirdeluicequ’illuiatoujoursrefusé:lavérité.

–Parcequesijeboislesangd’unehumainec’estcommesijemenourrissaisd’aliments,çamebrûleàl’intérieur.

–Pourquoi?

Ilafficheunsouriremalàl’aisequilerenddivinementbeaumalgrésapeaublafardeetsestraitscreusés.

–Parcequejesuislié,rétorque-t-ilenlevantlesyeuxsurelle.

–Çanet’empêchaitpasdetenourriravant.

–C’estvrai.C’estcompliqué,Délila,maispourfairecourt…

Ils’arrêteunmoment,sedemandantsic’estvraimentunebonneidéedeluiconfierlavérité.Maisaprèstoutpourquoinepasêtrehonnêteavecelleaumoinsunefois?Dansplusieurssemainesilneserapluslàpourlefaireetpartiravecdesregretsn’estjamaisbon,dit-on.

–…lefaitdetemarquern’aeuaucuneincidencesurmoiaudébut.

Maintenantc’estdifférentparcequej’aicomprisetadmiscequisepasseenmoi,jenet’aipasseulementmarquée,maisjemesuisliéàtoi.

Présentementc’estunfait,etcontreça,jenepeuxpaslutter.

–Jenecomprendspas.

–Quoidonc?

–Ladifférenceentremarquéetlié.

Unnouveausouriretrahitsonmalaise.

–Marquéc’estpour…affirmersaproie,liéc’est…quandunvampires’éprenddesaproie.

Ilfuitleregarddelajeunefemmeaprèssonaveualorsqu’ellen’estpascertainedebienréalisercequ’ilestentraindeluidire.

–Leseulmoyendemenourrirsanssouffrirc’estdeboirelesangdemacompagne:toi.

Sacompagne?Etellealors,n’a-t-ellepassonmotàdire?Siellene217

ressentaitpasuneexplosiondepapillonsdanssonventreàcetinstant,ellefulmineraitdecolère.

Levampire,épuisé,s’allongepourreposersesmusclesatrophiés.

–Qu’est-cequetuattendsdemoi?questionne-t-elleensepenchantau-dessusdelui.

–Tonpardon.

Sarépliqueluicoupelesouffle,elles’attendaitàuneautreréponse,étaitcertainequ’ilréclameraitsonsangparcequ’ilestclairqu’ilenabesoin.

–Jetepardonne,assure-t-elleeneffleurantsonvisagedesesdoigts.

Sullifermelesyeuxdesoulagement,maintenantilpeuts’enallerenpaix.

–Queva-t-ilsepassermaintenant?

Engardantlesyeuxclos,ilrépond:

–Tuvasrentrercheztoietvivretavie.Dansquelquessemaineslamarquedanstoncouneseraplusvisible.

Délilasaitqu’ilmentparcequelaseulemanièredefairedisparaîtrecettetracec’estlamortduvampire,et…Oh,monDieu!Elleestentrainderéalisercequ’illuidit.Toutprendunsenssoudainement.Iladécidédeselaissermourir.

–Pourquoi?s’ahurit-elle.Tunepeuxpasfaireunetellechose.

Sulliouvrelaboucheenmêmetempsquesesyeux,maisaucunsonnesort,prisaudépourvuparl’oppositiondelajeunefemme.

–Ilyaunmoyenpourquetunemeurespasalorsaccepte-le!

–L’accepter,Délila,revientàtefairedumal.

–Tuasréussilapremièrefois,tuyparviendrascettefoisaussi.

–Non,jerefuse.Madécisionestprise.

Délilan’arrivepasàcroirecequ’elleentend.Iladécidéd’enfiniraveclavieparcequ’ilrefusedeprendrelerisquedeluifairedumal.Siçacen’estpasunepreuved’amour!Iladessentimentspourelle,Antoineavaitdoncraison,etelleenaaussi.Ilesttempsqu’elledécidedelesassumeretdeprendreleschosesenmainpourqu’ilnequittepascemonde.

–Tusaisquejesuiscapabledememontrertêtueetobstinéequand218

c’estnécessaire.

–Pasavecmoi.Jenecéderaipas.

–Trèsbien,soupire-t-elle.Combiendetempscelavaprendreavantque…

Ellenefinitpassaphrase,maisc’estinutile,ilatrèsbiencompriscequ’elleluidemande.

–Quelquessemaines,deuxàtroismoistoutauplus.

–J’imaginequeçatefaitsouffrir.

–Toutmoncorpsmetirailleettunem’aidespasavectonodeuralléchante.

–Jevaispartirpuisquec’estcequetuveux,maisj’aiunedernièrerequêteavant.

–Laquelle?

–C’estladernièrefoisqu’onestensemble,tusaisquej’aidessentimentspourtoi,je…j’aienviequ’onfassel’amourunedernièrefois.

IlsouritavantdeportersamainauvisagedélicieuxdeDélila.

–J’auraisaimétedireoui,maisjerefusepourdeuxraisons.Lapremière,énonce-t-ilenlaissanttombersamain,c’estquejeseraisoumisàunefortetentationdetemordreetjenesuispassûrderéussiràmecontrôler.Lasecondec’estquemonétatphysiquemerendraincapabledetesatisfaire.

Délilalecroitsansmal,iln’aplusriendufringuantvampirequ’elleavaitl’habituded’admireretdevantlequelellesalivaitpresque.

–Justeunbaiser,alors?

Iln’apasletempsderépondrequ’ilsentdéjàsesdouceslèvress’écrasersurlessiennes.Iln’auraitdetoutefaçonpasrefusé,maisilvoulaityémettreunecondition:pasd’invasion.Çasemblecompromisquandilsentlalanguedel’humaineseglisserentresesdents.Mettanttoutesavolontéàl’œuvrepournepasdéraper,ils’abandonnedanslejeudelanguesqu’elleluipropose.Toutefois,lecœurbattantlachamadedesacompagnen’apasunboneffetsurluietilestobligéderepoussercellequ’ilchéritavantdeluifairedumal.

–Jenepeuxpas!Tuneterendspascomptedudanger!peste-t-ilen219

reculantjusqu’àseretrouveradosséaumur,l’airdésemparé.Pars,maintenant.

–Non.Tuasbesoindemoietjesuistoutedisposéeàt’aider.

–Tunepensespascequetudis,crache-t-il.

–Vraiment?Entredansmonespritettucomprendras.

–Jen’yarrivepas,Délila.Jen’arriveplusàrien.Jen’aiplusmespouvoirs!Tunecomprendspasàquelpointjesouffrepourtoi!

–Paspourmoi,Sulli!Parcequetutel’infliges.Jeveuxt’aider,laisse-moifaire.

Elles’approchedeluiaveclenteurpournepaslefairefuiretglissesesmainsdanssescheveuxnoirspourattirersonfrontcontrelesien.

–Jet’aime,murmure-t-elle.Nemelaissepas.

–Tuméritesmieuxquemoi.Jesuisunmonstre,colère-t-ilenlarepoussant.

Levampire,incapabledesesoutenirdavantage,selaisseglissercontrelemurjusqu’àseretrouverassissurlesol.

Délilanesaitplusquoifaireouquoidirepourqu’ilacceptedesenourrirsurelle.Ellerefusedelelaisserenproieàsadouleur,deleregardermouriràpetitfeu.Soncorpsletirailleencetinstant,ellepeutlevoirsursonvisage,ilsouffrelemartyre.

–Jet’enprie,supplie-t-elled’unevoixàpeineaudiblecommeelles’accroupitdevantlui.

Elleposesamainsurlacuissedeceluiqu’elleaime,guettantuneréaction,maisiln’enaaucune,latêtecontrelemur,lesyeuxfermés,ilsembleattendreladélivrancedelamort.

Ilgardelapositionplusdedixminutesetellelecroitcapabledeneplusjamaisenbouger,alorselletentesadernièrechance:

–Pendantplusd’unmois,troischasseursdevampiresvivaientchezmoipourmeprotégerdemonmaître…

Sulliouvrelesyeuxetlaregarde.

–…j’aiétéhypnotiséepourmeremémorermessouvenirs.Jet’avaisappeléàl’aide,tutesouviens?

220

–Oui.

–Tuascruquetum’avaisdébarrasséedelui,etmoiaussi,maisiln’apasétéhypnotisé,ilajustejouélejeu.

–Commentça?

–L’hypnosen’aaucuneffetsurlui.Jemesuisrapidementretrouvéedanslamêmesituationquelesoiroùtuesintervenu.J’aiditqueceluiqu’ilcherchaits’appelaitChad.Lesoiràl’exposition,ilacomprisquec’étaittoi,normalpuisqu’ilt’avaitvuchezmoi.

Ellemarqueunepause.Sulligardelesilence.

–Pournepasmeretrouveravecdesélectrodesdanslatête,jeleuraimontrédesendroitsoùnousétionsallésensemble,toutétaitfauxbiensûr,maisc’étaitleseulmoyendesurvivre.

–Pourquoitunem’asriendit?

–Tuavaisététrèsclair:jedevaist’oublier.

–Jesuisdésolé.Sij’avaissoupçonné…

–Laissetomber.Cequejeveuxquetucomprennesc’estquejenet’aipaslivré.Jet’aiprotégé.

–Poursauverlaviedetesproches.

Ilfaitréférenceàsamenaceetçal’énervequ’ilrefusedecomprendre.

–Sulli,lapartdetoiquetumemontraisquandonétaittouslesdeuxetquetuétaischarmant,n’était-cequeduvent?

–Sijetedisoui,tupartirasettumelaisserasàmonsort,maisceseraitunmensonge.Jesuistrèsvitetombésoustoncharme,maisjerefusaisdemel’avoueretleprédateurtapienmoiétaitplusfortquelaminusculepartd'humanitéquejepeuxencoreavoir.

–J’aimecethomme-làetjesaisquetuescapabledeprendreledessussurleprédateur.

–Tufaiserreur.

Elleenragedevantsonobstination.Tousseseffortssesoldentparunéchec.Alorscommentfairecéderunvampire?Laréponsevientàellecommeuneévidence:lesang.Cependantilrefusedes’abreuversurelle,peuimporteladouleurquileconsumeencemomentmême.

221

Elleseredresseetjetteunrapidecoupd’œildanslapièceàlarecherched’unobjetcontondant.Évidemment,iln’yarien.

–Qu’est-cequ’ilya?questionne-t-ildevantsaminesoudainementsérieuse.

–Accorde-moiquelquesminutes.

Ilnecomprendpassarequêteetlaregardesortirdelapièceàlahâte.Ilpensetoutdesuiteàundangerimminent.Manquantcruellementdesang,ilestincapabled’entendrequoiquecesoitàplusdecinqousixmètres.Ilseredressedifficilementetsetraînejusqu’àlafenêtre.Ilvoudraitregarderderrièrelesrideaux,maislesoleiln’estpasencorecouchéetunebrûlureluiferaitunmaldechiendanssonétat.Ilsouffredéjàbienassezsansenplusenrajouter.

Soudain,ilsefigeettressaille.Ilperçoituneodeurdélicieuseluipiquerlesnarines,luifaireperdresesdernièresbribesderésolution.Laportederrièreluiclaqueetquandilpivoteilaperçoitcequ’ilavaitdéjàcompris.

Délilaaouvertlesveinesdesonpoignetgauche.

–Jetedonnelechoix,soittutenourrisetturefermesmablessure,soitjemevidedemonsangàtescôtés.

–Jepourraischoisirdesimplementrefermertablessure.

–Jesais.

Elles’approchedeluientendantsonpoignetdanssadirection.

D’abordilrefused’ytoucher,maisforcédeconstaterquel’entailleestprofondeetqu’elleperdbeaucoupdesang,iln’apaslechoix.Illuisaisitlebrasetl’approchedesabouche.Avectoutelavolontédontilestcapableillèchelaplaie,s’obligeantànepasplantersescrocsenelle,ildoitjustefairecicatriserlablessure.

–Tuvasboire,àlafin!tonneDélila,méduséedevoirqu’ilnes’abreuvepascommeellel’acru.

Iln’yfaitpasattentionetpoursuit,léchantlesangquicouledesaplaiejusqu’àlafaireserefermercomplètement.

–Tum’énerves!peste-t-elle,mêmesilecontactdesalanguesursonpoignetlarendtouteflageolante.

–Jeneteferaipasdemal,Délila.Peuimportecequecelam’en222

coûtera.

Levampireretournes’allongersurlelit,posantsonbrassursesyeuxclos,legoûtdusangdeDéliladanslabouche.Soncorpsenveutdavantage,réclamequ’ilsejettesursaproieetlavidejusqu’àla

dernièregoutte,maisilresteimmobile,décidéàtenirbon,ànepasflancherdevantcefauxêtreangéliquequiletentesansrelâche.

Délilan’aplusd’idée.Elleignorecommentlesauverdelui-même,ilestencoreplusbutéqu’elle!

Alorsellerenonce…

Elles’allongeàcôtédeluisurlegrandlit,seblottissantcontresoncorpsplusfroidqu’habituellement,neréclamantqu’uneseulechose:qu’illaprennedanssesbras.

Letempss’écoule,accentuantlapeuretlechagrindeDélila,ébranlantlarésignationdeSulli.

Levampireembrasselatêtedelajeunefemmequ’ilpenseendormiepuisquesarespirationestcalmeetlente.Ilbougelégèrementjusqu’àpouvoirlavoir,ellenedortpas.

–Tudoisavoirfaim,dit-il.

–Chut…

Elleposesondoigtsurseslèvres,puissabouchepourunbaiserpassionné.Samaindroiteglissesoussontee-shirtcommesalanguecaresselasienne,affaiblissantdavantageSulli.

QuandDélilametfinàtoutessescaresses,c’estpourôtersonpulletentraîneruneprotestationduvampirequ’ellefaittairedesondoigtsurseslèvrespâles.

–Tuveuxquejeparte,jeteveuxenmoiunedernièrefois.Accèdeàmademandeetj’enferaidemême.

–Tumelepromets?Sansteretourner?

–Sic’estcequetuveux,après.Oui.

Enarticulantcetteréponsequiluibriselecœur,elleespèredetoutessesforcesqu’ilnevoudrapassondépartaprèsluiavoirfaitl’amour.

–D’accord.

223

Elleretrouverapidementleslèvresfroidesduvampirecommeellecaressesapeauaustèreàl’effetterriblementaphrodisiaque.

Sulliquinesouhaitepasresterpassifmalgréledangers’allongerapidementsurcelledésirée,soncorpsnurecouvrantlesien.Illasoupçonned’avoirmanœuvréuneultimetentativepourlefairecéderparcequelorsqu’ils’enfonceenelle,elleluidévoilesoncougracile.Tentantdeseconcentreruniquementsurleplaisirqu’ilprocureàsapartenaire,iloubliesonsang,sespulsations,safaimetagitcommes’ilétaitunhumainamoureux.Ilyarrive,ilyarrivemêmetrèsbien…jusqu’àcequel’audacieusefemmelepiège.Ilatoujourscruqu’ilétaitundangerpourelle,enfaitc’estl’inverse.Elleestleplusgrandpérilquipeutexisterpourlui,ellecauserasaperte.

Malgrétoutesavolontéetsesbonnesrésolutions,ilnepeutpasrésisterquandelleattireseslèvrescontresagorgeoùellevientdefaireuneentaille.Lesangaffluetelunmincefiletcouleurgrenat,l’odeuralléchante.Ilfaitcorpsavecelleetlorsquesaboucheeffleurelaplaiesuperficielle,iladumalàgarderlatêtefroide.

–Boismonsang,Sulli.

Sesdernièresbribesdevolontévolentenéclatetilplantesescrocsdanssagorge.Sexeetsang,c’estlecocktailexplosifauquelaucunvampirenepeutrésister.

–Oui…gémit-elle,plusheureusequejamais.

Ellel’afaitcéder.Ilaspiresonliquidedeviesansqu’elleéprouvelamoindrepeur,elleluifaitconfiance,persuadéequ’ils’arrêteraquandillefaudra.

Sansquittersaveine,Sullirecommencesesva-et-vient,plusfortsqu’auparavant,entraînantdesgémissementsincessantsdeplaisirdesapartenairesatisfaite.Ilexploseenellecommeillibèresagorgedesescrocs,rassasiédetouteslesmanièrespossibles.

Ilseretireets’allongeàcôtéd’ellequin’osedireunmot,pétrifiéeàl’idéed’affronterlaragedel’hommequ’elleaime.

–Ilesttempsquetupartes,articule-t-il.

Délilareçoituncoupdepoignardenpleincœuretoseàpeineleregarder.Elleperçoitsonvisagequireprenddescouleursetlanoirceurde224

sesyeuxquidisparaîtpeuàpeu.

–Trèsbien.

Sessensdenouveauaffûtés,levampireesttouchéenpleincœurparlatristessedanslavoixdeDélila.

–J’auraisputetuer,peste-t-il.

–Maistunel’aspasfait.Tuassuquandt’arrêter.Tuasraison,Sulli,tunemeferasjamaisdemal…saufpeut-êtreenmejetanthorsdetavie.

Instantanémentilposesesyeuxsurelle.

–Jesuisliéetjesouffredumanquedetoi…maisjenepeuxpast’imposerça.

–Moiaussijesuisliéeàtoi.Quecrois-tuquejeressenteencemomentoùmalgrétouttumedemandesdepartir?

Illesaitparcequ’ildiscernesadouleurbienmieuxquecelleden’importequi.

–Danscecas…neparspas.Jeprendslerisquequetumedétruises.

–Çan’arriverapas,promet-elleenseblottissantcontreluiaprèsunbaiser.

Ilsrestentainsi,danslesbrasl’undel’autre,durantplusieursheures,lanuittombéedepuislongtempssurlaville,jusqu’àcequeSullibriselesilenceapaisant.

–J’aibesoinde…jenesuispasrassasiédetoi.

–Jesuisàtoi,Sulli.

Levampireprenddenouveaupossessiondesoncorps,desheuresdurant,jusqu’àcequelafaimdévorantequil’animesoitrepue.Illapossède,l’enlaceàlui,jusqu’àcequepasselafièvre.Nefaisantqu’unavecelle,detouteslesfaçonsphysiquespossibles,maispasseulement,enunissantsonâmeàlasiennepourfaired’ellesaseulecompagne,pourlaviedurant.

–Jet’aime,souffle-t-ilàsabelleendormie,épuisée.

Sonflair,ànouveauàsonparoxysme,luiindiquelaprésenced’unvampiredanslebâtiment.Ilseredresse,inquietpluspourDélilaquepourlui,mêmesiselonlesloisvampiriquesaucunn’aledroitdes’enprendreà225

cettefemme,protégéeauxyeuxderacepuisquesacompagne.

Unesuperbejeunefemmeblondeapparaîtdansl’embrasuredelaporte,vêtued’unelonguerobeblancheaussipurequeducoton.Fine,levisageagréable,lacréatureadesyeuxdefeu,unregardtransperçantquiatteintSullienpleincœur.

Touteslesémotionsqu’ilaenfouiesenluidepuisdessièclesrefontsurfaceencetinstant.Iln’arriveplusàréfléchirouàalignerdeuxpenséescohérentes,happéparcettefemmequ’ilachériesilongtemps.

–Lilith…

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