analyse sÉmiotique d'une affiche publicitaire

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1 UNIVERSITE ALASSANE OUATTARA UFR Communication, Milieu et Société Département des Sciences du Langage et de la Communication Les journées de promotion des étudiants en Sciences du Langage et de la Communication La commission scientifique

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Page 1: ANALYSE SÉMIOTIQUE D'UNE AFFICHE PUBLICITAIRE

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UNIVERSITE ALASSANE OUATTARA

UFR Communication, Milieu et Société

Département des Sciences du Langage et de la Communication

Les journées de promotion des étudiants en Sciences du

Langage et de la Communication

La commission scientifique

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Sujet 2 :

ANALYSE SÉMIOTIQUE D'UNE AFFICHE

PUBLICITAIRE

Présenté par :

KOUAME Adou Joseph, Master 2 Communication des organisations

KOUASSI Kan Alphonse, Master 2 Sciences du Langage

YEBOUE Mélanie, Master 1 Communication

RESUME

Champ qui révèle l’entrelacement entre les sciences du langage et les sciences de

la communication, ce sujet montre la complémentarité de deux domaines. Ici, l’on

fait ressortir par le langage ce que peut faire ressentir une affiche publicitaire.

Cela se fera par l’exploitation des signe contenues dans une affiche publicitaire au

choix afin d’en déterminer ses limites. Ce, en vue de permettre à l’assistance de

cerner la conception publicitaire et mieux cerner le savoir et savoir faire des

Sciences du Langage et de la Communication de l’Université Alassane Ouattara.

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INTRODUCTION

Le foisonnement des travaux sur l’image en général et sur l’image publicitaire en

particulier est marqué par l’affirmation de trois disciplines aussi prometteuses les

unes que les autres : la sémiologie, la sémantique et la rhétorique. Ces trois types

d’approches sont, à la réalité, présentes de facto dans toute analyse de l’image et

cela tient à la nature de l’image elle-même et aux mécanismes qui la sous-tendent.

En effet, parce qu’elle se présente comme un ensemble de signes linguistiques,

l’image est prédisposée à une analyse sémiologique. Et, en tant qu’objet de la

sémiologie au sens restreint du terme, la face signifiée de l’image est

nécessairement prise en charge par la linguistique dont la sémantique est l’une des

disciplines. Etant donné qu’une image est la reproduction de réalités vécues ou

imaginaires, l’analyse du signifié doit s’affranchir des mécanismes d’expressivité

et de persuasion à l’œuvre dans sa tentative de s’imposer comme réalité ou

comme vérité et cela nous conduit à la rhétorique.

Par ailleurs, quel que soit l’angle sous lequel l’image est analysée, il faut admettre

que la question du sens reste entière.

Des expériences ont montré que l’image, une fois produite et laissée à la seule

lecture des récepteurs, peut basculer dans le non-sens face à un récepteur

incompétent ou dans un sémantisme pluriel face à des récepteurs aux compétences

diverses.

En Afrique Noire, la publicité est un domaine singulier et complexe où

s’interpénètrent des pratiques et des représentations sémiotiques diverses. De nos

jours, elle révèle des processus de sémiotisation allant de la stéréotypie iconique

de l’altérité à la prototypie des rhétoriques de l’oralité africaine pour persuader le

consommateur. Les médias publicitaires se transforment ainsi, sous la contrainte

du modernisme, en orateur, conteur, arbre à palabre, griot, etc. Dès lors, la

publicité semble mettre en évidence la pluri-vocalité comme un pont jeté entre

l’effet de la communication et l’effet de vente dans un contexte socioculturel miné

par les produits de la globalisation (téléphonie mobile, cartes bancaires, etc.).

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Or, dans le cas qui nous intéresse, c’est-à-dire l’image publicitaire, il est important

pour le publicitaire que les récepteurs convergent vers un seul sens : le sens qui a

donné naissance à l’image de l’affiche.

Dans ce présent exposé, il s’agit pour nous dans la première partie, de donner une

approche définitionnelle des mots et concepts, de situer l’image publicitaire dans

l’univers controversé de la science qui en fait son objet d’analyse privilégié, c’est-

à-dire la sémiologie, de montrer le processus de communication publicitaire, les

rhétoriques publicitaires, des situations sémiotiques et de contextualiser les

interprétants sémiotiques Africains. Ensuite, dans la deuxième partie, nous

analyserons une affiche publicitaire. Enfin, dans la troisième partie, nous nous

évertuerons à relever les faiblesses de l’affiche étudiée en vue d’en apporter notre

modeste contribution.

PREMIERE PARTIE : APPROCHE THEORIQUE

I-APPROCHE DEFINITIONNELLE DES MOTS ET CONCEPTS

I.1-Sémiotique

La définition de ce terme passe nécessairement par celle de la sémiologie.

Selon F. De SAUSSURE, la sémiologie se définit comme « la science générale de

tous les systèmes de signe grâce auxquels les hommes communiquent »1. Une telle

définition pose la linguistique comme discipline faisant partie de la sémiologie

puisque cette dernière étudie un signe en particulier, le signe issu de la langue.

Cependant, la suprématie et l’autonomie de la linguistique sont garanties par la

présentation de son objet, c’est-à-dire la langue, sous la forme d’un système

1 F. de Saussure, Cours de linguistique général, Paris, Payot, 1972, p.33

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complexe, complet, bien structuré et par l’utilisation de cette dernière comme

moyens d’interprétation de tous les systèmes de communication sémiologiques.

PEIRCE définit la sémiotique, conçue comme le fondement même de la logique,

comme « la science des lois générales nécessaires des signes »2. Il a proposé une

classification des signes en fonction de la nature des rapports existant entre

signifiant, signifié et référent (l'objet du réel auquel renvoie le signe).

La sémiotique ne se limite pas au signe linguistique ; elle décrit les systèmes de

signes au sein de la vie sociale en prenant en compte leur dimension

conventionnelle (car c'est en vertu d'une convention spécifique à une époque et à

un lieu qu'un signe signifie quelque chose) et le rôle joué par l'interprétant.

I.2-Image

Selon le Petit Robert, l’image est une :

- Représentation : « Le fait de rendre sensible un objet (au sens large) au moyen

de quelque chose ».

- Imitation : « Action de reproduire volontairement ou de chercher à reproduire

(une apparence, un geste, un acte d’autrui ».

- Portrait : « Représentation d’une personne réelle, spécialement de son visage,

par le dessin, la peinture, la gravure ou photographie d’une personne ».

Les trois définitions ci-dessus ont en commun l’idée de Représentation et de

Reproduction qui permettent de définir globalement l’image comme la

représentation plus ou moins fidèle d’un objet (chose, idée, personne).

2"Sémiotique." Microsoft® Encarta® 2009 [DVD]. Microsoft Corporation, 2008.

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I.3-Affiche publicitaire

Par définition « l'affiche est un avis officiel ou publicitaire imprimé sur papier ou

sur toile, destiné à être placardé dans les lieux publics »3. L'affiche remplit donc

comme principal objectif celui de « montrer » et pour cela d'attirer le regard,

d'être vue par le plus grand nombre. L'affiche donne à voir un produit, une

marque; il s'agit d'amener ceux qui verront cette affiche à se souvenir de ce

produit, de cette marque en particulier.

Selon F. TRISTAN-POTTEAUX, la publicité se définit comme « l’ensemble des

moyens destinés à faire connaitre un produit ou un service et inciter le public à

l’acquérir par un moyen de communication de masse »4. Elle permet donc de faire

la promotion d’un produit ou service à travers la séduction en vue de le faire

acheter.

Une affiche publicitaire est donc un support de communication placardé dans les

lieux publics pour faire connaitre un produit ou une entreprise, faire aimer et faire

acheter.

II-SEMIOTIQUE DE L’IMAGE

II.1-Types d’image publicitaire

Il existe deux catégories d’image : l’image abstraite et l’image figurative. L’une

des nombreuses définitions de l’image abstraite que donne le Petit Robert (qui

nous parait satisfaisant) est la suivante : « Représentation mentale d’une

perception ou impression antérieur, en l’absence de l’objet qui lui avait donné

naissance ».

3 RIBEROLLES Céline, « travailler à partir d’affiches publicitaires pour développer un regard

critique », N°dossier : 05STA00908, année 2006, p.7

4 F. Tristant-Potteaux, « Les métiers de la communication », in P.Cabin, La communication, état

des savoirs, Paris, Ed. Sciences Humaines, 1988, p.90

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Ce qu’il faut retenir de cette définition, c’est que contrairement à l’image

figurative qui permet une visualisation physique de l’objet, l’image abstraite est

du domaine de l’esprit. Il s’agit du sens figuré de l’image si l’on s’en tient au sens

de l’étymon.

Dans cet exposé, nous nous intéresserons uniquement à l’image visuelle fixe.

Nous excluons ainsi de notre champ d’analyse toutes les images mobiles et

virtuelles, dans la mesure où notre objectif est de montrer comment l’image, par

elle-même, en dehors des techniques qui lui ont donné naissance, organise sa

signifiance.

Par ailleurs, les types d’image généralement utilisés dans le domaine de la

publicité sont : le dessin, la photographie et la peinture.

Le dessin peut être définit comme la représentation d’un ou de plusieurs objets sur

une surface à l’aide de moyens graphiques. La photographie, elle, se traduit par la

reproduction fidèle d’un ou de plusieurs objets par l’action de la lumière sur une

surface sensible. Quant à la peinture, elle est généralement définie comme la

représentation d’un ou de plusieurs objets sur une surface plane au moyen de

couleurs.

Ainsi, ces trois types d’image se distinguent surtout par les moyens utilisés pour la

reproduction des objets : moyens graphique (dessin), lumineux (photographie),

chromatique (peinture). Ces moyens permettent de poser les images publicitaires

comme véritables œuvre d’art.

II.2-Image publicitaire comme œuvre d’Art

Fondé sur l’esthétique, l’art désigne « d’abord la science de la sensation, et par

dérivation la science du beau »5. Les images publicitaires s’inscrivent donc parmi

les œuvres d’art de par leur nature et le domaine qui l’intègre.

En effet, si le caractère créatif, sensationnel ou esthétique de la peinture et du

dessin n’est plus à démontrer, l’attribution de ce trait à la photo peut paraître

5 D.Bergez, l’explication de texte, Paris, Dunod, 2eme 2d, 1996, p.11

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erronée d’autant plus que cette dernière procède par reproduction fidèle des objets

moyennant l’action de la lumière.

Cependant, à l’heure actuelle, la photographie est devenue un art véritable : « le

choix du sujet, la distance de prise de vue, l’angle, la profondeur de champ, le

choix de l’objectif, du diagramme, du temps de pose, des filtres, celui du papier et

de la couleur du tirage sont autant d’éléments qui font de la photo un art

d’interpréter le réel »6. La publicité est art, car il s’agit d’amener le

consommateur à avoir l’illusion d’une certaine liberté par rapport à un choix qui

lui est en réalité imposé à travers l’image.

II.3-Image publicitaire comme instrument de communication

La publicité, selon F. TRISTAN-POTTEAUX, se définit comme « l’ensemble des

moyens destinés à faire connaitre un produit ou un service et inciter le public à

l’acquérir par un moyen de communication de masse »7. La publicité est donc un

moyen de communication. D’où la possibilité de répondre aux questions ci-

dessous qui traduisent la question-programme de Harold LASSWELL8 :

-Qui ? : Les annonceurs, les publicitaires.

-Dit quoi ? : Existence d’un produit et information sur les qualités de ce produit.

-Comment ? : Médias de masse.

-A qui ? : Public cible.

-Avec quels effets : Incitation à l’achat ou adhésion aux idées véhiculées.

Les annonceurs sont le plus souvent des entreprises. Ils exposent aux spécialistes

de la publicité leurs points de vue sur le produit à vendre et paient leurs services

pour la réalisation de l’image publicitaire et le choix des supports. L’image est

6 H.Bonnard, Procédé annexes d’expression, Paris, éd Magnard, 1983, p.31

7 F. Tristant-Potteaux, op.cit

8 P. Cabin, op.cit, p.9

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véhiculée moyennant plusieurs canaux, qui vont de l’affiche, vers son public cible

afin de provoquer au niveau de ce dernier une décision d’achat ou une adhésion.

L’instauration d’une communication par image est attestée par les signifiants

linguistiques, véritables textes qui accompagnent généralement l’image

publicitaire. C’est le cas par exemple de la publicité du Crédit du Nord analysée

par J.M. FLOCH dont le texte est le suivant : « soyons clairs. L’argent qui dort,

c’est l’argent qui meurt. Nous nous engageons à ce que votre argent ne subisse

pas le même sort »9. La publicité ayant donc à la base l’intention de communiquer

s’inscrit d’office dans la sémiologie de la communication.

III-LE PROCESSUS DE COMMUNICATION PUBLICITAIRE

La publicité, en tant que communication de masse, est une activité qui a pour

objet de faire connaitre un produit, un service ou une institution, d’inciter le

public à acheter un produit, à utiliser un service. Cette activité repose sur une

conception béhavioriste de l’acte de communication publicitaire.

III.1-L’acte de communication publicitaire

L’on peut circonscrire, dans le processus de communication publicitaire, deux

cadres à savoir le cadre de production publicitaire et le cadre de réception

publicitaire. Nous définissons par cadre de production publicitaire le cadre

comprenant le fabricant du produit et le publicitaire (agence de publicité,

annonceur et support), le lieu originel où s’effectue l’acte de communication

publicitaire. C’est le cadre où, selon GRIZE, l’on « doit aménager son discours en

tenant compte de celui auquel il s’adresse. Il doit ainsi se faire comprendre et, de

surcroit, faire accepter ce qu’il dit ». Le cadre de réception publicitaire est le

cadre dans lequel le consommateur (consommateur du message publicitaire et le

consommateur du produit) situe sa compréhension par rapport aux modes de

référenciassions de dicto et de ré. C’est un cadre postérieur au discours.

9 J.M.Floch, Sémiotique, marketing et communication, Paris, PUF, 1990, p.81

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Soit le schéma suivant :

Publicitaire Public

Effet de communication

Axe de linéarité

Effet de vente

Dans ce schéma, les cadres de reproduction et de réception sont localisés dans

l’espace et dans le temps. Car, ils ont, selon GRIZE, « un passé, un présent, un

avenir et les objets dont ils traitent un avant, un maintenant et un après. De là

découle que le discours ne se déroule pratiquement jamais tout entier au présent

et que la manipulation des temps peut même prendre valeur argumentative ».

L’effet de communication, dans le message publicitaire, suit un axe de linéarité

permettant de départager les univers d’expériences (produits, services,

institutions, etc.) qui sont des classes naturelles se définissant, selon

BROMBERGER (1990 : 247), comme « un ensemble d’objets qui se modèlent

réciproquement mais exactement par rapport à certaines questions. Deux objets

se modèlent exactement par rapport à certaines questions s’ils imposent

exactement les mêmes réponses à ces questions ». L’effet de vente, perçu par la

rétroaction ou feedback, concerne principalement la courbe de vente du produit ou

du service. Il permet de mesurer l’impact du message publicitaire sur les clients et

dans les circuits de commercialisation et de distribution. Le processus de

communication publicitaire suppose ainsi un double processus d’analyse

(publicitaire) et de synthèse (public) selon la mise en sens. Elle entre dans une

opération de schématisation qui est une reconstruction des situations, des

Cadre de

production

Cadre de

réception

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vêtements et des conceptions. Dans tout discours, il y a constitution d’image,

d’idées, production d’objets nouveaux et donc jeu d’expression sur l’écart entre

ces objets du discours et leur référence extérieure et par là, création de

significations nouvelles, d’arguments pour d’autres discours.

III.2-Stratégies publicitaires : types et prototypes

Dans un acte de communication publicitaire, l’effet de communication constituant

le message publicitaire peut être décliné en trois niveaux : le niveau cognitif, le

niveau affectif et le niveau conatif. Ces trois niveaux de communication sont des

réponses ou des stades d’apprentissage par lesquels le consommateur passe

lorsqu’il subit un stimulus publicitaire.

Le niveau cognitif est le niveau des connaissances où l’on donne tous les

renseignements sur le produit ou le service. Le consommateur est en situation

d’écoute, porte attention sur le produit et en prend connaissance. Ce niveau

correspond au verbe anglais "to learn" : « apprendre ».

Le niveau affectif est le niveau où le consommateur évalue le produit, se fait une

opinion sur le produit, accorde ou non sa préférence au produit. Il correspond au

verbe anglais "to like" : « aimer ».

Le niveau conatif, "to do" : « faire », consiste à déclencher le passage à l’achat ou

à l’utilisation d’un service. Le consommateur adhère au produit.

Tous ces niveaux de communication ont servi à la mise en place de stratégies

publicitaires diverses comme AIDA, DAGMAR/ACCA, ADOPTION, etc. Ainsi,

par recoupement, on peut distinguer trois types de stratégies : la stratégie LEARN,

la stratégie LIKE et la stratégie DO. La stratégie LEARN (désormais stratégie L)

est une stratégie de prise en charge des percepts. Elle met l’accent sur le cognitif.

Les informations partielles et partiales du produit ou du service sont fournies aux

consommateurs. Certaines informations relatives aux insuffisances et aux défauts

du produit sont passées sous silence. En général, on adopte une démarche

rationnelle et très discursive qui fait appel à la raison, aux motifs conscients, aux

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preuves voire au concept de USP (Unit Selling Proposition). La stratégie L est de

deux types :

(1) LEARN LIKE DO (apprentissage naturel)

(2) LEARN DO LIKE (implication minimale)

Dans cette stratégie, le premier terme LEARN commande tout le diapositif

discursif et sémiotique. Dans une affiche publicitaire, le slogan, le visuel, le

textuel, le logotype et la signature seront reliés au LEARN. Le LEARN prend en

charge le message publicitaire et garantit sa mise en scène. Ainsi, en (1), on voit le

produit, on l’aime à partir des informations contenues dans le textuel et on achète.

En (2), on voit le produit, on l’achète et on l’aime à partir des résultats induits. En

(1) et (2), la connaissance exclusive du produit prime sur les autres termes LIKE

et DO.

La stratégie LIKE (désormais stratégie K) est une stratégie de prise en charge des

affects d’ordre motivationnel. Elle se fonde sur l’analyse des effets

psychologiques et sur la théorie des images. Il s’agit de plus-values

psychologiques qu’acquièrent les produits identifiés par une marque. La stratégie

K prend source dans le domaine de l’émotion, du symbolisme et de la passion.

D’une manière générale, ce sont les images de marque plutôt que les produits qui

sont encensées. Ainsi, on a :

(3) LIKE LEARN DO (apprentissage attribué)

(4) LIKE DO LEARN (impulsion infantine)

En (3), on est séduit par le produit, informé, on l’achète. En (4), on est interpellé

par le produit, on l’achète et on apprend à le connaitre. (3) et (4) s’expriment en

général en termes de motivation directe ou indirecte, de désirs, de sentiments,

d’émotions, etc. Il s’agit de faire déclencher la pulsion par la personnalité du

produit (le plus produit) et diriger le consommateur soit vers l’achat, soit vers une

imminence d’achat.

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La stratégie DO (désormais D) est une stratégie pragmatique qui consiste à

transformer le consommateur du message publicitaire en consommateur de

produit. Il s’agit essentiellement de pousser soit le consommateur vers le produit

(Pull strategy), soit le produit vers le consommateur (Push strategy). Ainsi, on a :

(5) DO LEARN LIKE (promotion ou vente)

(6) DO LIKE LEARN (adhesion confirmée)

En (5), on achète le produit à une occasion. On apprend à connaitre le produit. On

évalue le produit. Alors qu’en (6), on achète le produit, on l’apprécie et on

recherche les informations sur le produit. (5) a trait à une Pull strategy et (6), une

Push strategy ou la promotion (vente). La stratégie D revient à créer des réflexes

conditionnés par le dévoilement du produit (produit ou service en utilisation).

Les stratégies L, K et D épousent des discours publicitaires, de la connaissance

des consommateurs, des réalités socioculturelles (sélection, organisation et filtrage

des signifiés) et des contextes sociolinguistiques, etc.

IV-LES RHETORIQUES PUBLICITAIRES

En Afrique noire, le discours publicitaire, par la conjugaison des traits

sémiotiques, sociolinguistiques et socioculturels, s’appuie sur le développement

d’une culture locale (tradition orale, l’alternance codique, les proverbes, etc.).

Ainsi, la mise en scène obéit à des schémas plastiques, déclenche des passions,

reproduit les contextualités culturelles et linguistiques.

IV.1-Scénographie publicitaire : du logos au pathos

La scénographie publicitaire est la mise en scène du textuel et du visuel. En

Afrique, les annonces de presse obéissent à un besoin d’ordre mnémotechnique.

Le textuel et le visuel imposent aux lecteurs de nouveaux modes de lecture, de

nouvelles perspectives de l’image.

Dans une annonce de presse, la hot line ou le slogan constitue le point focal de la

mémorisation. En fonction des annonces, on peut signer, verbaliser, expliciter le

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produit, exprimer les bénéfices du produit ou faire vivre le produit. Le visuel

évoque le concept évocateur ou les éléments émiques par présentation directe,

indirecte ou affective de l’avantage du produit. Le textuel, empruntant des voies

linguistiques diverses (alternance codique, bilinguisme, formes populaires,

emprunts, adages, etc.), donne une argumentation sur les qualités du produit,

justifie la promesse, etc. Le logotype, en tant qu’identification visuelle du produit,

symbolise le produit. La signature synthétise le slogan. Tous ces éléments

permanents d’une annonce de presse semblent épouser trois modes de persuasion :

la rhétorique du logos, la rhétorique de l’éthos et la rhétorique du pathos.

D’abord, la rhétorique du logos met l’accent sur le raisonnement et la cohérence

des faits présentés au consommateur. Elle prend source dans la stratégie L. Le

consommateur du message publicitaire recherche une garantie de résultat.

Ensuite, la rhétorique de l’éthos, empruntant la stratégie K, met l’accent sur la

prise en charge du consommateur. A travers l’énonciation publicitaire, le plus-

produit est révélé et encensé. La notion d’éthos recouvre, selon MAINGUENEAU

(2002 : 212), « l’ensemble des déterminations physiques et psychiques attachées

par les représentations collectives ».

Enfin, la rhétorique du pathos relève de la stratégie D. Elle instaure des

« scénarios déclencheurs » ou selon EGGS (2000 : 25), « des mots qui ne

décrivent pas les émotions, mais qui sont comme des sortes de bons candidats à

leurs déclenchement ».

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2) DISCOURS PUBLICITAIRE : modèles et représentations

Le discours publicitaire est une activité représentative d’un modèle publicitaire

(annonceur, agence de publicité, support), de l’argumentation, de l’image de marque, de la

connaissance du public, de l’action et de l’adhésion a une certaine vision du monde. Dans la

relation entre le publicitaire et le consommateur, les stratégies L, K et D sont mise en signe

dans un micro-univers du verbal et du non verbal (Pottier, 1987) de manière à susciter une

adhésion ou une action. Le fabricant du produit s adresse au publicitaire pour la création et la

diffusion du message publicitaire. Le message publicitaire magnifie le produit et ses

avantages (promesses). Il devient un stimulus publicitaire ayant pour objectif de transformer

le consommateur du message publicitaire en consommateur du produit. Soit le schéma

suivant :

Situations et contextes

(Circuits de commercialisation)

Fabricant du produit

Consommateur du produit

Stratégies L, K et D

Publicitaire Consommateur Message

Micro-univers du verbal et du non verbal

Dans las situations et contextes, l effet de réalisme du discours publicitaire en Afrique

noire repose sur trois facteurs essentiels : la recevabilité, la vraisemblance et l acceptabilité.

La recevabilité est relative aux formes légitimes du langage (Bourdieu, 1982). Les langues

véhiculaires, les formules parémiologiques, les emprunts linguistiques, les noms des marques

et des produits, les systèmes de référenciation, les supports, etc. participent de la recevabilité

du discours publicitaire (Mbianda, 2003 ; Tsofack, 2002).

La recevabilité instaure un va-et-vient entre l explicite (message préformé) et l implicite

(les savoirs culturels, les contextes, les situations) [Potier, 1987].

La vraisemblance consiste a identifier selon Meyer (1985 : 77) « [Un] monde représenté

par le discours [qui] doit etre pensable, ses objets identifiables et leurs relation plausibles,

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correspondant à l’idée que [le consommateur] se fait de ce qui est réel, à la limite

de ce qui est possible ou impossible». Or, selon SAWEGNON (2009), « Il y a un

décalage énorme entre ce que les gens sont et ce qu’on leur vend…Quand je

travaillais a Coca-Cola et Sprite,…on nous envoyait des films avec des pères noël

dans la neige. Et quand nous objections que les campagnes étaient extrêmement

éloignées du quotidien Africain, les clients nous répondaient qu’ils vendaient du

rêve… [Par contre], la publicité Orange a été bien perçue parce qu’elle parlait

aux Africains sans être caricaturale».

L’acceptabilité a trait aux fins et valeurs du discours publicitaire. Le discours

publicitaire véhicule une persuasion dissimulée par usage d’images prototypiques

qui ont pour fonction la programmation de l’action. En Afrique, les topos relatifs

à la quantité, au prix, au cumul, etc. sont des valeurs traditionnelles (cultures

locales) et modernes (crise économique aidant) renvoyant à l’héritage, à la

modalité sociale, etc. Selon PERRIN (1989 :6), le publicitaire «manipule le désir

du consommateur pour éveiller le fantasme et provoquer le passage à l’acte».

Tous ces discours publicitaires dévoilent des stratégies nouvelles de mise en

signe, de mise en scène par la typographie, la couleur, le corps, etc. Elles

favorisent un processus de restructuration mentale au travers des préconstruits

culturels, des besoins immenses, des formes de socialité, etc.

III) LES SITUATIONS SEMIOTIQUES : des stratégies publicitaires aux

modélisations.

Dans la relation entre le publicitaire et le consommateur, les stratégies

publicitaires sont sémiotisées dans un univers de croyances pour enclencher des

effets de réalisme (POTTIER, 1987). Les situations sémiotiques générées se

révèlent comme des stimuli sémiotiques où les signes publicitaires ou signes

sémiotiques transforment le consommateur du message publicitaire en

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consommateur du produit. FONTANILLE (2009) explicite en ces termes : « [Elle]

est une configuration hétérogène qui rassemble les éléments nécessaires à la

production et à l’interprétation de la signification d’une interaction sociale…

[Elle] est organisée autour de sa dimension stratégique (la situation-stratégie),

dans la mesure où elle est plus ou moins prévisible, programmable…». Les

stratégies correspondent à des scènes prédicatives, qui dans l’espace et dans le

temps, forment un paquet d’actions homogènes. FONTANILLE (2009) souscrit

ainsi : «La situation-stratégie rassemble des pratiques pour en faire de nouveaux

ensembles signifiants, plus ou moins prévisibles (des lisages sociaux, des rites,

des comportements complexes), que ce soit par programmation des parcours et de

leurs intersections, ou par ajustement en temps réel. »

D’une autre manière, les situations sémiotiques, magnifiant les stratégies,

sont selon GRIZE (1981 : 8), des situations où l’on « […] doit aménager son

discours […] en tenant compte […] de celui auquel il s’adresse. Il doit ainsi se

faire comprendre et, de surcroît faire accepter ce qu’il dit ». Le consommateur

situe sa compréhension par rapport aux indications sémiotiques qui déclenchent

les émotions et les passions (EGGS, 2000 ; FONTANILLE, 1998 ; KERBRAT,

2000).

Cette perspective met fin à la question de l’intention du publicitaire déployée

dans les stratégies publicitaires diverses (BROCHANT, 1983). Car le

consommateur du message n’établit pas une relation avec le publicitaire, mais une

relation sémiotique où les annonces et les spots sont interprétés différemment

selon les contextualités culturelles et sociolinguistiques. Dès lors, on distinguera

trois modèles sémiotiques : le modèle sémio-cognitif, le modèle sémio-affectif et

le modèle sémio-conatif.

1) le modèle sémio-cognitif

Le modèle sémio-cognitif est un modèle de prise en charge sémiotique des

signes indiciels du produit ou du service. En général, il recourt à une démarche

onomasiologique qui fait appel aux percepts, aux preuves voire au concept de

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USP (Unit Selling Proposition) (REEVES, 1963). Dans ce modèle, le cognitif

commande tout le dispositif sémiotique d’interprétation qui permet de rapporter le

signe-produit à l’objet-produit. Les systèmes sémio-cognitifs, s’organisant autour

des signes indiciels, sont des instruments de médiation entre l’univers sémiotique

et le monde noétique. Ils contribuent, dès cet instant, à déterminer le mode de

perception et d intellection des objets (BAUDRILLARD, 1968), à conformer les

systèmes sémio-cognitifs comme des formes d’objectivation du réel qui

structurent les connaissances et les actions (CASSIRER, 1972 ; GOODY, 1978 ;

LEROI-GOURHAN, 1964 ; NETCHINE, 1991). Ils construisent ainsi une réalité

objectale voir une « carte forcée culturelle ».

A la suite de ZILBERBERG et FONTANILLE (1998), deux (2) catégories

de sémio-cognitif se distinguent : les sémio-cognitifs d’intensité (plus proche de la

biosphère (PEIRCE, 2002 ,1978)) et les sémio-cognitifs d’extensité (plus proche

de la semiosphere). Intensité et extensité apparaissent ainsi comme des micro-

opérations sémiotiques fondamentales qui consistent à augmenter ou diminuer les

signes indiciels dans le décodage des messages publicitaire.

2- Modèle sémio-affectif

Le modèle sémio-affectif est un modèle de prise en charge des affects qui

sont des plus-values psychologiques des signes iconiques. Selon EDYLINE

(1992 : 562), l’émission de signe iconique peut se définir comme : « …la

production sur le canal visuel de simulacres du référent, grâce à des

transformations appliquées de telle manière que leurs résultats soient conformes

au modèle proposé par le type correspondant au référent cotypie ».

Dans ce modèle, l’affect en tant que signe iconique, décline deux (2) codes

esthétiques : le code de reconnaissance (traits, formes, couleurs, sons, types et

niveaux de langues, etc.) et le code de représentation ( figurativité ). Ces deux (2)

codes construisent des systèmes sémio-affectifs qui selon ECO (1970 : 14) :«…ne

possèdent pas les propriétés de l’objet représenté, mais ils reproduisent certaines

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conditions de la perception commune sur la base des codes perceptifs normaux et

par la sélection des stimuli qui ayant éliminé d’autres stimuli peuvent permettre

la construction d’une structure perspective. Cette structure perspective possède

sur la base des codes de l’expérience acquise la même signification que

l’expérience réelle dénotée par le signe iconique ».

Les systèmes sémio-affectifs sont les premiers éléments de la signification

qui s’élaborent dans les structures dites sub-profondes. L’espace de l’affectif

serait un espace esthétique qui renvoie en réalité à la continuité et à la

discontinuité de la signification. Dans le contexte de la continuité, il est celui qui

existe antérieurement à son analyse en « unité discontinue » (GREIMAS, 1993 :

67). Dans le cadre de la continuité, il permet de découvrir les unités discrètes et

d’en faire l’analyse. Grace à cette existence des catégories continues et

discontinues, l’espace de l’affectif se présentant comme un continuum visuel

(figuratif) remplit toutes les conditions nécessaires à l’intelligibilité du modèle

analogique. ECO (1970 : 21) souscrit en ces termes : « ces modèles [analogiques]

pourraient être appelés “codes” dans la mesure où ils ne dissolvent pas le discret

dans le continu (et donc n’annule pas la codification) mais fractionne en degré ce

qui apparait comme continu. Le fractionnement en degré suppose, au lieu d’une

opposition entre le ‘oui’ et le ‘non’, le passage du plus ou moins ». Par exemple,

dans le code iconologique, étant donné deux (2) confessionnalisations X et Y de

l’attitude de ‘sourire’, on peut prévoir la forme Y comme plus accentuée que la

forme X, et ce suivant une direction qui, au degré suivant donne une forme Z très

proche d’une éventuelle forme XI qui représenterait déjà le degré inferieur de la

conventionalisation de ‘l’attitude éclat de rire’.

3- Le modèle sémio-conatif

Dans le modèle sémio-conatif, les systèmes sémio-conatifs s’établissent en

fonction des instances de l’énonciation et de la perception. La dynamique des

sémio-conatifs, impliquant la profondeur modale du faire, consiste à gérer le

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passage de l’acte ou à la noésis. L’univers sémiotique se verrait dès lors sous

l’étroite dépendance de la noésis ou de la biosphère. Pour DUVAL (1995), il n’y a

pas de noésis sans semiosis, c’est la semiosis qui détermine les conditions de

possibilité d’exercice de la noésis. Dès lors, les systèmes sémio-conatifs prennent

ancrage dans l’action énonçant voire l’ajustement intelligent entre l’effet de

consommation et l’effet de vente. Les modèles sémiotiques sous esquissés sont

synchronisés en Afrique Noire selon les réalités socio-culturelles (sélection,

organisation et filtrage des signifiés) et socio linguistique, donnant ainsi à

appréhender les interprétants sémiotiques contextualités.

IV- INTERPETANT SEMIOTIQUE AFRICAIN: contexte et

contextualisation

Bien des auteurs sémioticiens s’appesantissent sur la réintroduction dans la

pensée, le réel voire dans la semiosis, noésis. Car le monde expérientielle semble

discriminer trois catégories: la priméité (le signe), la secondéité (l’objet) et la

tiercéité (l’interprétant). Dans ces trois catégories, l’interprétant est la clef qui

permet de transformer la réalité en signe. Car, il fait appelle à la culture, à la

mémoire, à la connaissance partagée pour reconnaitre, comprendre et identifier

l’univers sémiotique. On rétablit donc la réalité dans le système. La médiation

culturelle permet de passer d’un objet à un signe ou de transformer un signe en un

objet qui donne du sens. Le premier effet de tout signe, c’est sa capacité à

déterminer un sentiment chez l’interprète.

1) Contextes interprétatifs

En Afrique Noire, la publicité s’appuie sur une culture locale (la tradition

orale, l’alternance codique, les proverbes). La scénographie publicitaire

(TSOFACK, 2006) obéit ainsi à un processus interprétatif propre à l’oralité

africaine. Les rhétoriques publicitaires africaines empruntent des modes de

persuasion par le symbolique (ABOLOU, 2009). Le symbolique, en tant que

dynamique de représentation de l’expérience est un domaine qui, selon

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LABURTHE-TOLRA (2003 : 160) comprend les mythes, les rites, la pensée, les

croyances. Les sociétés africaines se définissent ainsi comme un corpus de

phénomènes émiques (mise en sens ou structure profonde) et éthique (mise en mot

ou structure de surface). La compréhension des discours publicitaires passe par le

décryptage des phénomènes émiques comme paradigmes significatifs et des

phénomènes étiques comme syntagmes significatifs dans le parcours génératif ci-

dessous :

Syntagme

significatif

Paradigme

significatif

Phénomènes

Emiques

Plan de

l’expression

Phénomènes

Etiques

Plan du contenu

Discursivisation Figurativisation

La signification publicitaire, d’un point de vue phénoménologique, peut être

envisagée comme un processus de mise en sens des signes produits, sous-tendant

les reproductions culturelles des situations et contextes.

2) Conceptualisations des interprétants

Au sens sémiotique, tout discours publicitaire est un signe culturel intégrant

des codes culturels qui exigent des interprétants. Ce discours est : « … capable

d’entrer en relations compliquées avec ses lecteurs et le contexte culturel, il cesse

d’être un message élémentaire (envoyé) par le destinataire au destinateur. Il

découvre sa capacité de condenser l’information et acquérir la mémoire comme

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une sorte de dispositif intellectuel : il ne transmet pas seulement l’information

dont on l’a investi, mais il transforme les messages tout en créant de nouveaux ».

On distinguera trois types d’interprétant : l’interprétant cognitif, l’interprétant

affectif et l’interprétant conatif.

2-1- l’interprétant cognitif

L’interprétant cognitif constitue le moment de détermination des habitudes

cognitives. Il va permettre au destinataire de passer à l’effet signifié. La

conceptualisation opère auprès du destinataire un effet logique visant à modifier

les comportements et à l’amener à une autre façon de percevoir le monde

expérientiel (JUILLET, 1992).

L’interprétant cognitif instaure un va-et-vient entre l’explicite (le message

préformé) et l’implicite (les savoirs culturels, les contextes, les situations).

2-2- l’interprétant affectif

L’interprétant affectif met l’accent sur la prise en charge émotionnelle du

consommateur. A travers l’énonciation publicitaire, la reconnaissance affective du

signe-produit est révélée. Cette description de l’interprétant affectif n’est pas

universelle : elle dépend de l’expérience sémiotique propre aux cultures

africaines. L’interprétant affectif est donc non seulement l’effet émotionnel

spontanée engendré par le signe mais aussi le reflet d’un ensemble de pratiques et

de représentations acquises au cours d’interactions antérieures et fonctionnant

comme un système de disposition sensibles.

Les valeurs discursives sont des contenus axiologiques qui permettent

d’identifier l’image du signe-produit et de reconnaitre les plus-produits mis en

relief dans la relation sémiotique entre l’objet et le signe. Si pour HETZEL

(2002 : 76-77), « le niveau narratif permet à la marque de mettre en scène les

valeurs du niveau axiologique en leur conférant un caractère “racontable” »et «

le niveau discursif (ou de surface), est celui qui autorise le plus de variantes : il

enrichit le narratif par les figures du monde telles que des acteurs, des objets »,

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alors « le niveau axiologique est le plus profond de l’identité de la marque. Cette

dernière va trouver la source de son identité dans ses valeurs qui lui permettront

d’assurer sa continuité dans le temps et près des publics ciblés ».

2-3- l’interprétant conatif

L’interprétant conatif, en tant qu’acte produit par le signe, a pour effet de

forcer l’interprète à instaurer des « scénarios déclencheurs » qui sont, selon

EGGS (2000 : 25), «…des mots qui ne décrivent pas les émotions, mais qui sont

comme des sortes de bons candidats à leur déclenchement ».

En Afrique Noire, les topoi relatifs à la quantité, au prix, au temps, au cumul,

sont des valeurs traditionnelles (cultures locales) et modernes (crise économique

aidant) renvoyant à l’héritage, à la mobilité sociale. Selon PERRIN (1989 : 6), le

publicitaire « manipule le désir du consommateur pour éveiller le fantasme et

provoquer le passage à l’acte ».

DEUXIEME PARTIE : CAS PRATIQUE

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GRILLE D’ANALYSE :

I-INTRODUCTION

Colgate-Palmolive est une entreprise américaine spécialisée dans la fabrication et

la commercialisation de produits d’entretien et de produits d’hygiène, tels que les

savons, les détergents, les dentifrices et les brosses à dents. C’est un acteur

international du marché, avec des marques bénéficiant d’une forte notoriété dans

de nombreux pays.

L’affiche publicitaire que nous avons choisi d’analyser est un dessin qui

représente une boîte de savon sur laquelle est inscrit : "PALMOLIVE" avec un

fond gris-claire marqué par une couleur blanche.

Elle est composée de deux femmes, de deux (2) pots de fleur, d’un hot line

« Gardez ce teint de jeune fille… », d’un base line « savon PALMOLIVE à

l’huile d’olive » et d’un slogan « Peau jeune…Peau fraiche ! »

Après cette présentation succincte, nous abordons l’analyse du visuel.

II-LE VISUEL

II.1-Enumération et description des signaux

Au niveau visuel de cette photographie, nous apercevons une jeune fille de teint

clair, vêtue d’une robe noire jusqu’à la poitrine avec un collier blanc au cou et une

onduleuse chevelure de couleur jaune et marron soigneusement coiffée. Elle tend

sa main droite à une autre femme placée sur son côté gauche, à qui elle détourne

le regard assorti d’un léger sourire aux commissures de ses lèvres teintes d’un

rouge à lèvre ainsi que ses ongles. Celle de gauche est de teint noire, vêtue en

couleur jaune, rouge et bleu, accompagnée d’un foulard de couleur rouge et gris

cachant son onduleuse chevelure noire. Elle est parée de trois colliers au cou

quasiment de mêmes couleurs que ses bracelets sur son poignet gauche (rouge,

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jaune et bleu) et d’une boucle d’oreille jaune. Elle est très proche de la jeune fille

claire. Elle saisit de sa main gauche celle de droite de cette dernière en la lorgnant

avec insistance. A l’extrémité de ces deux (2) femmes, se trouvent deux pots de

fleurs de mêmes couleurs (rouge, vert, bleu et jaune). La boîte du savon

PALMOLIVE de couleur jaune et noir, est endossée sur le pot de fleur à

l’extrémité de la femme de teint noire.

II.2-Dénotation et connotation des signaux décrits

La jeune fille de teint claire sur cette affiche publicitaire nous indique le cœur de

cible. Il s’agit d’une jeunesse assoiffée de la mode, c’est-à-dire d’une belle peau

claire.

Ce léger sourire est l’expression d’une émotion de joie et de bonheur d’avoir un

teint clair en compagnie du savon PALMOLIVE. De plus, la moitié de son corps

laissée à découvert, démontre sa fierté de paraître belle à l’aide du savon

PALMOLIVE. Le savon PALMOLIVE endossé sur le pot de fleur de couleur

rouge, bleu, jaune et vert, laisse entrevoir qu’il est naturel et procure la fraicheur,

l’énergie, la joie et la vitalité à la peau du consommateur. Ce qui ne peut qu’être

le bonheur traduit par le sourire féminin.

Les lèvres rouges et le collier blanc de la jeune fille témoignent qu’elle a une vie

apaisée en utilisant PALMOLIVE. Ce qui suscite la convoitise de la femme noire

et son obsession d’avoir une peau jeune, fraiche et claire pareille à cette dernière.

Elle a le remord au cœur d’avoir ignoré la présence et l’efficacité du savon

PALMOLIVE. Ainsi, elle conseille à la jeune fille de garder son teint clair en

utilisant PALMOLIVE au risque de perdre l’éclat de son teint comme elle. Ce qui

traduit sa proximité avec le savon PALMOLIVE et son regard anxieux à l’égard

de la jeune fille.

La présence de la couleur gris clair dans la majeure partie du fond de cette affiche,

fait savoir aux consommatrices de ce message, qu’il s’agit d’une scène, d’une

soirée, d’une fête, à laquelle il faut avoir une peau fraiche et claire pour être

admirer par les hommes. La robe noire de la jeune fille claire et la bande noire de

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l’emballage dans laquelle est inscrit PALMOLIVE démontrent que, même avec

une peau noire, on peut devenir clair et illuminer en pleine nuit en utilisant ce

savon.

Pour être dans la logique de la scénographie publicitaire, il s’avère impérieux de

nous pencher à présent sur le textuel.

III-LE TEXTUEL

Le textuel de cette affiche publicitaire se perçoit à travers le slogan « Peau

jeune…Peau fraiche ! » et tous les autres signes linguistiques notamment,

« Gardez ce teint de jeune fille… », « savon PALMOLIVE à l’huile d’olive ».

Le textuel fait usage de la rhétorique de l’éthos empruntant ici, la stratégie K qui

met l’accent sur le plus-produit et qui l’encense : Peau jeune. En plus d’être un

savon à huile d’olive, elle rajeunit la peau. Mais en plus, ce savon rend la ‘‘Peau

fraiche’’. L’on fait ainsi allusion à la rhétorique du pathos empruntant la stratégie

D qui est un scénario déclencheur. Il pousse davantage le consommateur du

message publicitaire à devenir consommateur du produit. Car une fille qui a la

‘‘Peau fraiche », dans toute société, surtout la nôtre, est attirante, séduisante, et

même appétissante pour les hommes. Le textuel de cette affiche, fait également

usage de la rhétorique du logos empruntant la stratégie L, qui met l’accent sur le

raisonnement et la cohérence des faits présentés au consommateur « Gardez ce

teint de jeune fille… ». De plus, le consommateur du message publicitaire

recherche une garantie de résultat. Ce qui traduit ici le slogan « Peau jeune…Peau

fraiche ». Ce qui nous permet de déduire la stratégie suivante :

LIKE DO LEARN (impulsion infantine)

On est interpellé par le produit, on l’achète et on apprend à le connaître.

A travers les signes linguistiques, l’on se rend compte que cette affiche

publicitaire se sert du registre courant qui, lui, respecte les règles de conjugaison

et de la grammaire classique et est utilisé dans les médias, dans les

administrations, etc.

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IV-LES RAPORTS ENTRE LE VISUEL ET LE TEXTUE

A l’analyse de cette affiche publicitaire, nous constatons qu’il y a un rapport entre

le visuel et le textuel. En effet, les couleurs qui ont servi à l’écriture de

PALMOLIVE sont identiques à celles du visuel. De plus, le slogan «Peau jeune

…Peau fraiche ! » traduit effectivement le teint de la jeune fille claire. A cela,

ajoutons que « à huile d’olive » justifie l’usage de la couleur dominante, le jaune.

TROISIEME PARTIE

I-L’INVENTAIRE DES FAIBLESSES DE L’AFFICHE PUBLICITAIRE

ETUDIÉE

- Inadéquation sémantique entre le slogan « Peau jeune…Peau fraiche » et la

couleur de son écriture en ce sens que la couleur gris symbolise la tristesse, la

dépression, le désarroi, la solitude et la monotonie ;

- A l’huile d’olive en couleur gris alors que toute huile est de couleur jaune ;

- Elle suscite à la dépigmentation ;

- La présence de la femme noire rend confuse la détermination du cœur de cible ;

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- Aucune information quant à la composition du produit ;

- L’usage oiseux de la couleur gris.

II-CONTRIBUTIONS

II.1-LE VISUEL

-Présence d’une seule fille ;

- Des informations relatives à la composition de PALMOLIVE sur la boite ;

- Agrandir le sourire de la jeune pour mieux exprimer son émotion.

II.2-LE TEXTUEL

- Couleur bleu au lieu du gris pour exprimer la fraicheur de la peau.

Notre modeste contribution permettra probablement au visuel d’être en

adéquation avec le textuel afin que l’affiche du savon PALMOLIVE soit plus

expressive, attrayante et transforme le consommateur du message en

consommateur du produit.

CONCLUSION

La sémiotique décrit les systèmes de signes au sein de la vie sociale en prenant en

compte leur dimension conventionnelle (car c'est en vertu d'une convention

spécifique à une époque et à un lieu qu'un signe signifie quelque chose) et le rôle

joué par l'interprétant. Elle permet de décrypter les composantes d’une affiche

publicitaire, c’est-à-dire les images et les signes linguistiques, et de leur donner un

sens dénoté et connoté, mais également les stratégies qui la sous-tendent.

La publicité en Afrique Noire mobilise des postures sémiotiques qui défient les

contextualités socioculturelles, économiques, politiques et sociolinguistiques,

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lieux d’intelligibilité des chartes de création ou de copy stratégie. La

communication publicitaire en Afrique ne peut se dissocier de la culture locale.

Elle impose une démarche de compréhension des traces comme marquage des

idées, des valeurs, des sentiments, etc. et comme résurgence des sens enfouis dans

les mémoires gardées du quotidien africain.

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