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     L         E     X     P     É     R     I     E     N     C     E     C     L     I     E     N     T 36 BIENVENUE DANS L’ÉCONOMIE DE L’USAGE En ces temps de crise, l’économie de l’usage est au cœur de toutes les attentions : censée renouveler le business model des entreprises en quête de croissance, elle consacre le succès de marques emblématiques comme Google, Amazon, Facebook ou Apple (GAFA). Elle remet en cause le modèle classique de hiérarchie des eets (learn-feel-do) qui repose sur la comparaison avant l’achat, ringardise des décennies de pratiques fondées sur la rationalité supposée des comportements et le primat de la marque pour lui substituer celui, plus simple, d’apprentissa ge passif (learn-do-feel) , centré sur l’utilisation et la satisfaction ou non qui en découle. De fait, nous sommes à la veille d’une révolution, et il va falloir revoir nos théories à l’aune de ce changement de paradigme. Avec le passage d’une économie de la pro- priété, où le produit constituait le cœur de l’ore, à une économie de l’usage, le service devient le principal levier de diérenciation pour les entreprises engagées dans des démarches d’innovation. En clair, cela signie que nous ne comparons plus les produits sur la base de leurs caractéris- tiques et de leurs bénéces supposés, mais que nous recher- chons dans leur consommation les moyens de satisfaire nos besoins conscients et inconscients, exprimés ou non. La part du service dans les ores est devenue tellement important e que l’on parle de « servicisation » ou de produit-service- système-expérience : dans ce contexte, le produit n’est plus qu’un prétexte, le service étant le principal support pour délivrer de la valeur pour le client et pour l’entreprise. Dans cette économie, le collaboratif et le partage s’imposent comme de nouvelles façons de concevoir la transition de la propriété à l’usage, en proposant des modèles plus simples, séduisants, aspirants que des produits. Pour e n savoir plus, le livre de Rachel Bottsman et de Roo Rogers What’s Mine is Yours 4  est plein d’enseig nements. Mettre l’humain au cœur de la démarche Sentiment général de déance, de suspicion, collaborateurs démobilisés, perte de sens, etc. : la liste est longue des consé- quences désastreuses qu’a eu l’absence d’humanité dans les pratiques managériales de l’époque moderne. Ce que les entreprises n’ont pas vu en ayant les yeux rivés sur leurs concurrents et sur la ligne du bas, c’est qu’en même temps qu’ elles changeaient de siècle, leurs clients changeaient aussi : leurs aspirations ne sont plus les mêmes, ils ne veulent pas seulement être considérés comme des individus, mais comme des humains, des êtres d’esprit, de cœur et de tripes – head, heart, guts – qui méritent mieux que de répondre de manière automatique à des stimuli publicitaires par des actes d’achat. Alors que nos comportements ont radicalement changé, le 4. Rachel Botsman et Roo Rogers, What’s Mine is Yours, Harper Collins Business, 2011.

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    BIENVENUE DANS LCONOMIE DE LUSAGE

    En ces temps de crise, lconomie de lusage est au cur de

    toutes les attentions : cense renouveler le business model

    des entreprises en qute de croissance, elle consacre le

    succs de marques emblmatiques comme Google, Amazon,

    Facebook ou Apple (GAFA). Elle remet en cause le modle

    classique de hirarchie des effets (learn-feel-do) qui repose

    sur la comparaison avant lachat, ringardise des dcennies

    de pratiques fondes sur la rationalit suppose des

    comportements et le primat de la marque pour lui substituer

    celui, plus simple, dapprentissage passif (learn-do-feel),

    centr sur lutilisation et la satisfaction ou non qui en

    dcoule. De fait, nous sommes la veille dune rvolution,

    et il va falloir revoir nos thories laune de ce changement

    de paradigme. Avec le passage dune conomie de la pro-

    prit, o le produit constituait le cur de loffre, une

    conomie de lusage, le service devient le principal levier de

    diffrenciation pour les entreprises engages dans des

    dmarches dinnovation. En clair, cela signifie que nous ne

    comparons plus les produits sur la base de leurs caractris-

    tiques et de leurs bnfices supposs, mais que nous recher-

    chons dans leur consommation les moyens de satisfaire nos

    besoins conscients et inconscients, exprims ou non. La part

    du service dans les offres est devenue tellement importante

    que lon parle de servicisation ou de produit-service-

    systme-exprience : dans ce contexte, le produit nest plus

    quun prtexte, le service tant le principal support pour

    dlivrer de la valeur pour le client et pour lentreprise.

    Dans cette conomie, le collaboratif et le partage simposent

    comme de nouvelles faons de concevoir la transition de la

    proprit lusage, en proposant des modles plus simples,

    sduisants, aspirants que des produits. Pour en savoir plus,

    le livre de Rachel Bottsman et de Roo Rogers Whats Mine is

    Yours 4 est plein denseignements.

    Mettre lhumain au cur de la dmarche

    Sentiment gnral de dfiance, de suspicion, collaborateurs

    dmobiliss, perte de sens, etc. : la liste est longue des cons-

    quences dsastreuses qua eu labsence dhumanit dans les

    pratiques managriales de lpoque moderne. Ce que les

    entreprises nont pas vu en ayant les yeux rivs sur leurs

    concurrents et sur la ligne du bas, cest quen mme temps

    quelles changeaient de sicle, leurs clients changeaient aussi :

    leurs aspirations ne sont plus les mmes, ils ne veulent pas

    seulement tre considrs comme des individus, mais comme

    des humains, des tres desprit, de cur et de tripes head,

    heart, guts qui mritent mieux que de rpondre de manire

    automatique des stimuli publicitaires par des actes dachat.

    Alors que nos comportements ont radicalement chang, le

    4. Rachel Botsman et Roo Rogers, Whats Mine is Yours, Harper Collins Business, 2011.

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    marketing considre toujours le client potentiel ou actuel

    comme la cible passive des campagnes qui lui sont adresses

    et continue de le bombarder de promotions et de prix bas en

    pensant quil aime a Il est grand temps de repenser lorien-

    tation client des entreprises et dintgrer une nouvelle dimen-

    sion : lhumain ! Nous pensons que faire de linnovation sans

    prendre en compte lhomme et ses motions na pas de sens.

    Lpoque o le marketing pouvait affecter un client un seg-

    ment, linformer grce des publicits sur des canaux dans

    lesquels il pensait quil avait confiance et lui

    dire quoi et o acheter est depuis long-

    temps rvolue. En passant par l, la crise a

    durablement entam la confiance des

    clients envers leurs marques prfres.

    Selon le baromtre ralis chaque anne

    par TNS Sofres, les consommateurs nont

    plus limpression que les marques

    sadressent eux de manire respectueuse

    et intelligente (seuls 46 % disent quelles leur parlent comme

    quelquun dimportant [-5], 45 % comme quelquun qui

    fait attention ce quon lui raconte [-11], 41 % comme un

    adulte [-15] et 30 % comme quelquun dintelligent [-14]) 5 .

    Devenus des acteurs, les consommateurs montrent enfin leurs

    muscles : ils sont plus inconstants dans leurs choix et cepen-

    dant plus enclins partager leurs informations et leurs opi-

    nions et aider concevoir des produits et des services.

    Pour rtablir la confiance, prrequis indispensable la

    construction dun lien solide et durable, les entreprises ont

    besoin dune approche qui prenne enfin le client au srieux,

    une approche qui intgre toute lexprience de consommation

    dans ce quelle a de riche et dunique. Lexprience client est

    cette approche. Plus holistique que le marketing, elle se dis-

    tingue de lorientation client en ce quelle sintresse davan-

    tage au processus de la

    s a t i s f a c t i o n q u l a

    satisfaction elle-mme, et

    quelle place lensemble des

    parties prenantes de la future

    exprience au cur de sa

    conception. Son originalit

    tient aussi sa forme colla-

    borative qui valorise les

    clients dans leur qute dexpression et daspiration. Elle est le

    remde contre la banalisation et la massification.

    Mais quil sagisse de clients ou de collaborateurs, lexp-

    rience client sintresse avant tout aux gens qui se cachent

    derrire. En rponse une demande croissante de rhuma-

    nisation des pratiques commerciales et managriales, elle

    rpond un besoin fondamental chez lhomme : celui dtre

    compris dans ce quil a dunique et de singulier, ce qui nest

    pas le moindre des dfis pour les entreprises aujourdhui.

    Le produit nest plus quun prtexte, le service tant le principal support pour dlivrer de la valeur pour le client et pour lentreprise. [ [

    5. Baromtre Australie TNS 2013 www.tns-sofres.com/etudes-et-points-de-vue/les-francais-et-la-publicite-je-taime-encore-un-peu.

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    La cl de la russite des entreprises aujourdhui rside dans

    leur capacit connatre et satisfaire leurs clients et

    transformer leurs oprations pour reflter leurs

    prfrences.

    Linnovation comme carburant de lenthousiasme collectif

    Nous vivons dans un monde de plus en plus complexe et

    difficile apprhender. Les grilles de lecture classiques repo-

    sant sur lapplication de modles bass sur la prdiction des

    comportements ne fonctionnent plus et napportent aucune

    [ [BON SAVOIRLES ENTREPRISES COMME LES GENS BIEN

    Dans LArt de lenchantement a, Guy Kawasaki recommande aux entreprises de se comporter comme des personnes et dadopter les valeurs des gens bien :

    1. agissez toujours honntement ;

    2. traitez poliment les gens qui vous ont caus du tort ;

    3. tenez les promesses que vous avez faites ;

    4. aidez quelquun qui ne pourra jamais vous tre daucune utilit ;

    5. excluez les blmes quand les choses vont mal et demandez-vous : Quelle leon pouvons-nous en tirer ? ;

    6. ne faites de tort personne dans ce que vous entreprenez ;

    7. ne soyez pas trop prompt dnigrer les ides des autres ;

    8. partagez votre savoir, votre expertise et vos bonnes pratiques ;

    9. faites preuve daltruisme ;

    10. accordez aux gens le bnfice du doute.

    a. Guy Kawasaki, LArt de lenchantement, ditions Diateino, 2011.

    aide pour comprendre notre environnement tant celui-ci ne

    cesse de changer, modifiant par la mme occasion les rgles

    et le champ de ce qui est possible et probable. Nous navons

    quune certitude : rien ne sera plus jamais comme avant. Est

    arriv le temps du business as unusual , o linnovateur est

    en premire ligne pour rvler les opportunits de dvelop-

    pement qui vont au-del des traditionnels produits me

    too ou services ou amliorations continues issues de lana-

    lyse du pass.

    Linnovation prend plusieurs dfinitions et est de forme et

    de nature diffrentes suivant les contextes convoqus. Au

    sens large, elle peut se dfinir comme tant le passage de

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    PENSE ANALYTIQUE VS INSTINCT CRATIF

    Roger Martin dans son livre The Design of Business a, suggre quaujourdhui, deux coles de pense sop-posent : lcole classique de la pense analytique, qui repose sur lutilisation rigoureuse de donnes quanti-tatives aide par des outils informatiques de modlisa-tion, et lcole de la crativit et de linnovation, pour qui la pense analytique a exclu la crativit et condamn les organisations se dvaloriser . Pour la premire, la pense analytique exploite deux formes de logique : le raisonnement dductif et le rai-sonnement inductif, pour dclarer des vrits et des certitudes sur le monde. Le but de cette approche est la matrise grce la rptition de process analytiques appliqus avec rigueur. Les ennemis en sont le jugement, les biais et les variations [...] Pour la seconde, qui sest largement structure par opposition la premire, linstinct cratif le flash de la comprhension non fil-tre est vnr comme source de la vritable innova-tion. Cest le monde de loriginalit et de linvention.

    Le choix de lune ou lautre influence la structure et les process des organisations : celles qui sont domines par la pense analytique sont conues pour fonctionner comme elles lont toujours fait, elles sont structurellement rsistantes lide de designer et de se redesigner elles et leurs activits de manire dynamique dans la dure. Elles sont conues pour maintenir le statu quo. Dans les organisations domines par la pense intuitive, linnovation peut intervenir rapidement et de manire sauvage, mais la croissance et la prennit sont dim-menses dfis. Mais ni lintuition ni lanalyse ne sont suffisants pris sparment. Les organisations les plus prometteuses dans les annes venir squilibreront entre la matrise analytique et loriginalit intuitive dans un change dynamique que jappelle la pense design.

    a. Roger Martin, The Design of Business, Harvard Business Review Press, 2009.

    situations existantes vers des situations prfrables. Quelle

    soit dusage, formelle, technologique, de processus, de ser-

    vices ou dexprience, linnovation

    est soit incrmentale dans une

    logique damlioration continue

    ou de rupture, dans une logique

    transformative et diffrenciante.

    Aujourdhui, les innovations sont

    souvent des combinatoires de

    linnovation dans ses diffrentes formes : un nouveau produit

    dont les innovations formelles, dusage et de services

    salignent pour crer une nouvelle exprience. Les entre-

    prises adoptent de vritables

    cultures dinnovation pour une

    diffrenciation prenne. Mais

    lavantage concurrentiel et la diff-

    renciation tout au long de la chane

    de valeur ont fait long feu.

    Aujourdhui, linnovation sinscrit

    dans un contexte de disruption,

    laisse le droit lerreur, encourage la prise de risque collectif

    Aujourdhui, linnovation met lindividu client et collaborateur au cur de la rflexion stratgique. [ [

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    et, surtout, met lindividu client et collaborateur au cur

    de la rflexion stratgique.

    Linnovation collaborative devient essentielle au sein des entre-

    prises. Les talents et les expertises de chacun qui, au quotidien,

    vivent les services produits par

    lentreprise sont tous observa-

    teurs de la chane de valeur et

    autant dinnovateurs potentiels

    de situations, process, environne-

    ments au sein desquels ils intera-

    gissent. En mettant jour les

    connexions complexes qui

    existent entre les gens, les lieux,

    les produits-services-systmes, elle permet daller plus loin et

    de concevoir des solutions qui remettent en cause les modles

    existants.

    LPANOUISSEMENT DES COLLABORATEURS POUR ENCHANTER LES CLIENTS

    Aujourdhui, la prennit dune entreprise tient essentielle-

    ment deux facteurs :

    u lengagement de ses clients, qui doivent tre satisfaits de

    lexprience quils vivent avec elle au point den devenir

    les ambassadeurs ;

    u la mobilisation de ses collaborateurs, qui ne mnagent

    pas leurs efforts pour contribuer au succs de lentreprise

    et lenchantement quotidien des clients, appuys par

    des managers qui les responsabilisent et les

    considrent.

    Cette croissance durable

    sappuie sur une base de

    clients fidles qui donnent

    envie des prospects de deve-

    nir clients, et sur une base de

    collaborateurs positifs et

    mobiliss qui donnent envie

    leurs collgues de rester dans

    lentreprise, des candidats de se joindre elle et aux clients

    de rester fidles. Tel est le cercle vertueux de lexprience

    client, qui trouve sa raison dtre dans une attitude partage :

    donner envie, crer le dsir !

    Lenjeu principal des entreprises qui recrutent de nouveaux

    clients coups de promotions, ou qui sintressent la rten-

    tion des collaborateurs avec des avantages parfois difficiles

    abandonner, est de remettre au centre de leur stratgie

    un lment moteur qui est lenvie : lenvie de contribuer

    un projet collectif dans son entreprise, lenvie de faire le pas

    de plus qui fera la diffrence vis--vis des clients ou tout

    simplement lenvie, pour un client, dappeler plusieurs fois

    par semaine son oprateur tlphonique, pour le simple

    Il faut revenir lessence mme de ce quest une entreprise : un groupe de personnes qui ont le souhait de faire plaisir aux clients et den faire des fans. [ [

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    plaisir de converser agrablement avec quelquun daimable

    et de disponible !

    Enfin, la bonne nouvelle est que ce cercle vertueux de lexp-

    rience client ne fait pas que contribuer dvelopper un

    monde meilleur, de mobilisation et denchantement des

    clients : une tude, ralise en 2007 par Gallup 6 auprs de

    2 000 entreprises dans le secteur financier, le commerce de

    dtail et les services, dmontre que les entreprises pour

    lesquelles lengagement des clients et la mobilisation des

    collaborateurs sont trs levs ont une croissance du chiffre

    daffaires cinq fois suprieure aux autres entreprises.

    Il faut revenir lessence mme de ce quest une entreprise :

    un groupe de personnes qui ont envie de se retrouver pour

    travailler ensemble, avec un but commun, et le souhait de

    faire plaisir aux clients et den faire des fans.

    [ [BON SAVOIR

    ENCHANTS !

    Une cole de ski : Trs trs pro tant pour lencadrement que pour lapprentissage. Personnel trs sympathique, accueil au top, ponctualit irrprochable !!! (tant pour les cours de ski que pour le snowboard). Rien redire, tout simplement parfait !!!!

    Un htel : Superbe tablissement tester durgence. Esprit atypique et chaleureux ; bran-ch, mais pas select, prestigieux, mais pas prout-prout. Chambre trs confortable (literie au top), ambiance du bar et resto gniale ( la fois trs frquents et festifs, mais paradoxalement feutrs et cosy... Pensez rserver pour le resto qui est un endroit couru, surtout le week-end !), accueil irrprochable, jeune, dynamique et TRS professionnel.

    6. John Fleming et Jim Asplund, Human Sigma : Managing the Employee-Customer Encounter, Gallup Press, 2007.