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NÂș 744 Le portrait de phase des oscillateurs par H. GIÉ et J.P. SARMANT Le terme d’espace de phase Ă©voque en gĂ©nĂ©ral des concepts dĂ©licats de physique statistique dont on ne traite qu’au niveau universitaire. Nous prĂ©tendons montrer dans cet article que le concept associĂ© de portrait de phase est un outil trĂšs riche pour l’analyse de nombreux systĂšmes et en particulier des oscillateurs. Si l’on se limite (comme ce sera le cas ci-dessous) Ă  la description de systĂšmes Ă  un seul degrĂ© de libertĂ©, il s’agit de plus d’un outil trĂšs simple dont l’emploi est susceptible d’amĂ©liorer dĂšs la classe terminale l’exposĂ© de certaines questions. Restant volontairement Ă  un niveau Ă©lĂ©mentaire*, nous nous contenterons, aussitĂŽt aprĂšs avoir dĂ©fini le vocabulaire employĂ©, d’illustrer l’intĂ©rĂȘt du portrait de phase Ă  l’aide d’exemples simples, puis nous tirerons quelques conclusions d’ordre plus gĂ©nĂ©ral. 1. VOCABULAIRE Pour un systĂšme dont l’évolution au cours du temps t est dĂ©crit par la fonction Ă  valeurs rĂ©elles x(t), on appelle trajectoire de phase une reprĂ©sentation gĂ©omĂ©trique cartĂ©sienne dans laquelle on reporte les positions au cours du temps t d’un point reprĂ©sentatif M d’abscisse x et d’ordonnĂ©e x . = dx ∕ dt. Cette terminologie est en accord avec celle de la physique statistique : le plan (x,x . 29 ou plan de phase s’identifie (avec p x = m x . 29 Ă  l’espace de phase (x,p x ) du problĂšme, de telle sorte que la reprĂ©sentation au cours du temps du point M est bien la trajectoire du systĂšme dans son espace de phase. BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 719 Vol. 86 - Mai 1992 * En particulier, nous excluons toute Ă©tude des critĂšres de stabilitĂ©.

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Page 1: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

NÂș 744

Le portrait de phase des oscillateurs

par H. GIÉ et J.P. SARMANT

Le terme d’espace de phase Ă©voque en gĂ©nĂ©ral des concepts dĂ©licatsde physique statistique dont on ne traite qu’au niveau universitaire.

Nous prĂ©tendons montrer dans cet article que le concept associĂ© deportrait de phase est un outil trĂšs riche pour l’analyse de nombreuxsystĂšmes et en particulier des oscillateurs. Si l’on se limite (comme cesera le cas ci-dessous) Ă  la description de systĂšmes Ă  un seul degrĂ© delibertĂ©, il s’agit de plus d’un outil trĂšs simple dont l’emploi estsusceptible d’amĂ©liorer dĂšs la classe terminale l’exposĂ© de certainesquestions.

Restant volontairement Ă  un niveau Ă©lĂ©mentaire* , nous nouscontenterons, aussitĂŽt aprĂšs avoir dĂ©fini le vocabulaire employĂ©,d’illustrer l’intĂ©rĂȘt du portrait de phase Ă  l’aide d’exemples simples,puis nous tirerons quelques conclusions d’ordre plus gĂ©nĂ©ral.

1. VOCABULAIRE

Pour un systĂšme dont l’évolution au cours du temps t est dĂ©crit parla fonction Ă  valeurs rĂ©elles x(t), on appelle trajectoire de phase unereprĂ©sentation gĂ©omĂ©trique cartĂ©sienne dans laquelle on reporte lespositions au cours du temps t d’un point reprĂ©sentatif M d’abscisse xet d’ordonnĂ©e x

. = dx ⁄ dt.

Cette terminologie est en accord avec celle de la physiquestatistique : le plan (x,x

.) ou plan de phase s’identifie (avec px = m x

.) Ă 

l’espace de phase (x,px) du problĂšme, de telle sorte que la reprĂ©sentationau cours du temps du point M est bien la trajectoire du systĂšme dansson espace de phase.

BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 719

Vol. 86 - Mai 1992

* En particulier, nous excluons toute étude des critÚres de stabilité.

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Une trajectoire de phase donnĂ©e est dĂ©crite Ă  partir d’un point M0(x0,x

.0) reprĂ©sentatif des conditions initiales de l’évolution considĂ©rĂ©e.

L’ensemble des trajectoires de phase dĂ©crites par le systĂšme Ă  partir detoutes les conditions initiales rĂ©alisables est le portrait de phase decelui-ci.

2. OSCILLATEURS NON AMORTIS

a) L’oscillateur harmonique

Un pendule Ă©lastique (masse m Ă  l’extrĂ©mitĂ© d’un ressort de raideurk) a pour Ă©quation d’évolution :

mx.. = – kx (1)

d’oĂč, avec ω2 = k/m, l’équation diffĂ©rentielle du second ordre qui rĂ©gittout oscillateur harmonique (non amorti) :

x.. + ω2 x = 0 (2)

dont la solution gĂ©nĂ©rale peut s’écrire :

x = A cos (ωt + ϕ) , x. = – Aω sin (ωt + ϕ)

ce qui Ă©tablit que les trajectoires de phase d’un oscillateur harmoniquesont des ellipses centrĂ©es sur l’origine. Avec un choix convenable desunitĂ©s adoptĂ©es sur les axes des coordonnĂ©es (en reprĂ©sentant x

. ⁄ ω enfonction de x, ce qui a du reste l’avantage de faire figurer en abscisseet en ordonnĂ©e des grandeurs de mĂȘme dimension) , ces trajectoires sontdes cercles dont les rayons reprĂ©sentent l’amplitude A des oscillations :

– le portrait de phase d’un oscillateur harmonique est un ensemble decercles concentriques centrĂ©s sur l’origine des coordonnĂ©es.

Ce rĂ©sultat trĂšs simple met en Ă©vidence un premier intĂ©rĂȘt duportrait de phase : la reprĂ©sentation de celui-ci permet de tester avecprĂ©cision le caractĂšre sinusoĂŻdal de l’évolution d’un oscillateur.

b) Le pendule pesant

Soit un pendule de masse M, de moment d’inertie J par rapport Ă son axe de suspension O et dont le centre de masse G est Ă  la distancea = OG de cet axe. Avec ω2 = Mga/J et en notant x l’angle d’inclinaisonde OG sur la verticale, on Ă©tablit l’équation :

x.. + ω2 sin x = 0 (3)

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Intégrant (3) avec des conditions initiales quelconques, on a :

x. 2 – 2 ω2 cos x = constante = C (x0,x

.0) (4)

relation que l’on aurait Ă©galement pu Ă©crire directement en exprimantla conservation de l’énergie mĂ©canique du pendule et qui permet detracer le portrait de phase de celui-ci comme un rĂ©seau de courbesparamĂ©trĂ© par C (voir la figure 1, rĂ©alisĂ©e en fait de façon plus rapidepar un logiciel qui intĂšgre numĂ©riquement l’équation (3) pour diversjeux de conditions initiales).

Figure 1 : Portrait de phase d’un pendule pesant (non amorti).

On voit apparaĂźtre le rĂŽle critique de la trajectoire de phase (1) quicorrespond Ă  la valeur C0 = 2 ω2 de C. Cette trajectoire est appelĂ©esĂ©paratrice car elle dĂ©limite deux domaines du portrait de phase :

– pour C > C0, x. ne s’annule jamais et x peut prendre des valeurs

quelconques. Une trajectoire telle que (2) de ce type caractérise unmouvement révolutif,

– pour C < C0, on peut poser C = – 2 ω2 cos A (A > 0), x Ă©volue entre–A et A, valeurs pour lesquelles x

. s’annule. Une trajectoire, telle que

(3) ou (4), de ce type caractĂ©rise un mouvement oscillatoire d’ampli-tude A.

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Ce portrait illustre tout d’abord trùs simplement un fait bien connu :les trajectoires quasi-circulaires telles que (4) correspondent à desoscillations de faible amplitude ; le caractùre non sinusoïdal desoscillations de forte amplitude apparaüt tout de suite en examinant unetrajectoire telle que (3).

On peut également vérifier un fait capital, le caractÚre périodiquedu mouvement oscillatoire :

Il est Ă©vident que si l’évolution de x(t) est pĂ©riodique et de pĂ©riode T,la trajectoire de phase correspondante dĂ©crit indĂ©finiment une mĂȘmecourbe appelĂ©e cycle. RĂ©ciproquement, l’observation d’un cycle nepermet pas en gĂ©nĂ©ral de conclure au caractĂšre pĂ©riodique de l’évolu-tion (les cycles successifs pouvant ĂȘtre a priori dĂ©crits dans des tempsdiffĂ©rents). En revanche, dans le cas d’un systĂšme dĂ©crit par uneĂ©quation diffĂ©rentielle du second ordre, le fait que le point reprĂ©sentatifM du systĂšme soit revenu au bout d’une durĂ©e finie T Ă  sa positioninitiale M0 assure le caractĂšre pĂ©riodique de l’évolution : le premiercycle est suivi d’une infinitĂ© de cycles identiques puisque les conditionsinitiales (x0,x

.0) suffisent Ă  dĂ©terminer l’évolution ultĂ©rieure. Ce fait

bien connu (déterminisme mécanique) correspond à une propriétémathématique générale des équations différentielles du second ordre,valable sous réserve de conditions dites de Cauchy-Lipshitz qui portentsur la continuité et la dérivabilité des fonctions qui figurent dans ceséquations.

Nous venons de mettre en Ă©vidence une propriĂ©tĂ© qui suffirait Ă  elleseule Ă  justifier l’intĂ©rĂȘt pratique du portrait de phase :

en vĂ©rifiant sur un document graphique le caractĂšre cyclique d’unetrajectoire de phase, on dispose d’un test du caractĂšre pĂ©riodique del’évolution beaucoup plus prĂ©cis que l’observation de l’allure de lareprĂ©sentation x(t).

3. OSCILLATEURS AMORTIS

a) Oscillateur harmonique amorti (par frottement fluide)

Ajoutant un terme de frottement fluide dans l’équation (1) dumouvement du pendule Ă©lastique, il vient :

m x.. = – k x – h x

. (5)

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d’oĂč, en posant ω2 = k/m et en introduisant la facteur de qualitĂ©Q = m ω/h, l’équation normalisĂ©e de tout oscillateur harmoniqueamorti :

x.. +

ωQ

x. + ω2 x = 0

(6)

Les propriĂ©tĂ©s de ce systĂšme sont bien connues, bornons nous Ă observer l’allure (figure 2) d’une trajectoire de phase dans le casd’oscillations pseudo-pĂ©riodiques (Q > 1/2).

Figure 2 : Oscillateur harmonique de facteur de qualité Q = 20.

Notons au passage qu’il est aisĂ© d’observer expĂ©rimentalement unetelle trajectoire en travaillant sur un dipĂŽle RLC sĂ©rie, la dĂ©viationhorizontale de l’oscilloscope Ă©tant engendrĂ©e par la tension aux bornesdu condensateur et la dĂ©viation verticale par la tension aux bornes dela rĂ©sistance, on observe sur l’écran la courbe x

.(x), x Ă©tant ici la charge

q du condensateur.

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L’allure spiralĂ©e des trajectoires de phase peut ĂȘtre mise en relationavec une propriĂ©tĂ© Ă©nergĂ©tique. L’énergie mĂ©canique de l’oscillateurest :

E = 12

k x2 + 12

m x. 2 =

k2

x2 + (x

. ⁄ ω)2 = k

r2

2(7)

en notant r la distance Ă  l’origine du point reprĂ©sentatif M decoordonnĂ©es (x, x

. ⁄ ω). On dĂ©duit par ailleurs de (5) la relation :

dEdt

= – h x. 2 (8)

qui exprime seulement la conservation de l’énergie (le taux dediminution de l’énergie mĂ©canique de l’oscillateur est Ă©gal Ă  lapuissance de la force de frottement –h x

.). En termes de trajectoire de

phase, (8) montre que la perte d’énergie mĂ©canique de l’oscillateuramorti se traduit par le fait que le point reprĂ©sentatif M de celui-ci serapproche de l’origine O qui apparaĂźt ainsi comme un «attracteur».Notons au passage une propriĂ©tĂ© qualitative intĂ©ressante (valable pourQ nettement supĂ©rieur Ă  1, comme c’est le cas pour la figure 2 quicorrespond Ă  Q = 20) : le facteur de qualitĂ© Q donne l’ordre de grandeurdu nombre d’oscillations pratiquement observables avant la relaxationvers l’état d’équilibre.

b) Oscillateur harmonique amplifié

Imaginons que, dans (6), on envisage la possibilitĂ© d’une valeurnĂ©gative de Q, ce qui revient dans (8) Ă  remplacer une dissipation parune alimentation en Ă©nergie, on obtient des «oscillations amplifiĂ©es»dont le portait de phase est analogue (pour plus de prĂ©cisions, V. le § 6),Ă  ceci prĂšs que O n’est plus un attracteur, mais une «rĂ©pulseur», positiond’équilibre instable. Cette propriĂ©tĂ© Ă©tait du reste prĂ©visible : l’équation(6) n’est pas modifiĂ©e si on change simultanĂ©ment les signes de Q etde x

..

On voit apparaĂźtre ici un lien entre la prĂ©sence dans l’équationd’évolution du systĂšme d’un terme du premier ordre (dans lequel letemps t intervient par une dĂ©rivĂ©e d’ordre impair) et la possibilitĂ©d’échanger les rĂŽle de t et de –t, c’est Ă  dire d’un lien fondamental entredissipation et irrĂ©versibilitĂ©.

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c) Pendule pesant amorti par frottement fluide

L’équation d’évolution se dĂ©duit immĂ©diatement de (6) :

x.. +

ωQ

x. + ω2 sin x = 0 (9)

Un logiciel de rĂ©solution d’équations diffĂ©rentielles permet detracer le portrait de phase (figure 3).

Figure 3 : Portrait de phase d’un pendule pesant amorti (Q = 5).

On constate l’existence d’une infinitĂ© d’attracteurs ponctuels depositions (2nπ,0). Ces attracteurs correspondent Ă  la position d’équili-bre stable du pendule : x = 0 Ă  2nπ prĂšs. A partir de tout point M0 situĂ©dans le bassin d’attraction d’un attracteur de rang n, la trajectoire dephase spirale vers le point (2nπ,0). Qualitativement, ceci correspond Ă la possibilitĂ© d’observer un mouvement oscillatoire amorti prĂ©cĂ©dĂ©d’une phase rĂ©volutive pendant n tours.

Notons au passage une propriĂ©tĂ© gĂ©nĂ©rale : les trajectoires de phasene se recoupent pas. Cette propriĂ©tĂ© est une consĂ©quence du dĂ©termi-nisme mĂ©canique : deux trajectoires issues d’un point d’intersection M0

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correspondraient Ă  deux Ă©volutions diffĂ©rentes possibles Ă  partir d’unmĂȘme jeu (x0,x

.0) de conditions initiales, ce qui est exclu.

d) Oscillateur amorti par frottement solide

Si la masse m du pendule Ă©lastique dĂ©crit par l’équation (1) reposeavec un coefficient de frottement f sur le plan horizontal, on Ă©tablit sansdifficultĂ© l’équation d’évolution :

x.. + ω2 x = Δ fg , Δ Ă©tant l’opposĂ© du signe de x

.(10)

d’oĂč l’on dĂ©duit que le mouvement est une suite d’oscillationssinusoĂŻdales de pulsation ω (figure 4) centrĂ©es alternativement sur lespositions x = fg/ω2 = p et x = – p, l’arrĂȘt dĂ©finitif se produisant quandx. s’annule Ă  l’intĂ©rieur de la plage d’équilibre (– p,p).

Figure 4 : Amortissement par frottement solide (p = 0,1 ; x0 = 1,25).

La figure 5 reprĂ©sente le portrait de phase de cet oscillateur,constituĂ© de demi-cercles centrĂ©s alternativement en x = p et x = – p.Le rĂŽle d’attracteur est cette fois jouĂ© par le segment (– p,p) de l’axedes abscisses.

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Figure 5 : Amortissement solide (p = 0,1).

4. OSCILLATEURS ENTRETENUS

Un systĂšme qui, tel une horloge, Ă©volue indĂ©finiment de façonpĂ©riodique doit recevoir de l’énergie pour compenser les phĂ©nomĂšnesdissipatifs inĂ©vitables qui accompagnent son fonctionnement. Un telsystĂšme est appelĂ© oscillateur entretenu.

a) Le modĂšle de Van der Pol

Tentons de proposer un modĂšle mathĂ©matique, le plus simplementpossible, dĂ©crivant un oscillateur entretenu. Il est tout d’abord Ă©videntque ce modĂšle ne saurait ĂȘtre linĂ©aire : la trajectoire de phase souhaitĂ©edoit ĂȘtre un cycle C bien dĂ©fini ; si le systĂšme Ă©tait dĂ©crit par uneĂ©quation diffĂ©rentielle linĂ©aire, tout cycle homothĂ©tique λ C seraitĂ©galement solution. Au cours de l’étude de l’oscillateur harmoniqueamorti, nous avons vu que, dans l’équation diffĂ©rentielle (6), c’est lesigne du coefficient de x

. qui régit le sens des échanges énergétiques de

l’oscillateur. Le modĂšle le plus simple (Ă©quation de Van der Pol)

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consiste Ă  remplacer ce coefficient constant par une expression parabo-lique :

x.. + (x2 – p) x

. + ω2 x= 0 (p > 0) (11)

Bien qu’il ne soit pas possible d’intĂ©grer cette Ă©quation autrementque par des mĂ©thodes numĂ©riques, on peut prĂ©voir qualitativement lecomportement des solutions : si la valeur initiale x0 de x est faible, lecoefficient de x

. est négatif ce qui correspond à une tendance à

l’amplification des oscillations ; inversement, quand x prend des valeursimportantes, ce coefficient devient positif ce qui doit tendre Ă  rĂ©duirel’amplitude des oscillations. La figure 6 (pour l’obtention de laquelleon a choisi ω = 2π de façon Ă  prendre pour unitĂ© de t la pĂ©riode proprede l’oscillateur) confirme ces prĂ©visions.

Figure 6 : Oscillateur de Van der Pol (p = 2).

L’effet de rĂ©gularisation des oscillations qui Ă©tait souhaitĂ© est bienobtenu : quelles que soient les conditions initiales, on tend vers unrĂ©gime permanent d’amplitude bien dĂ©finie. Un tel diagramme x(t) nepermet pas toutefois de constater avec prĂ©cision si ce rĂ©gime est ou nonpĂ©riodique (et encore moins s’il est sinusoĂŻdal : il est trĂšs difficile dedistinguer «à vue» une sinusoĂŻde d’une autre courbe oscillante). Pourconclure, il faut tracer le portrait de phase (figure 7).

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Figure 7 : Portrait de phase de l’oscillateur de Van der Pol (p = 2).

On vĂ©rifie cette fois avec une excellente prĂ©cision l’existence d’uncycle limite (nouveau cas particulier d’attracteur) ce qui atteste lecaractĂšre pĂ©riodique du rĂ©gime permanent. Ce cycle n’étant visiblementpas circulaire (sauf pour p trĂšs petit), on peut affirmer que le rĂ©gimepermanent de l’oscillateur de Van der Pol est non-sinusoĂŻdal (lesfigures 6 et 7 correspondent Ă  p = 2 ; en choisissant d’autres valeurs,on constate que le caractĂšre non-sinusoĂŻdal s’accuse quand on aug-mente p).

Insistons sur le fait que ce cycle est le mĂȘme pour toutes lestrajectoires de phase, il est indĂ©pendant des conditions initiales.L’attracteur est entiĂšrement dĂ©terminĂ© par la nature de l’oscillateur(c’est-Ă -dire ici par le choix de p).

b) L’oscillateur Ă  «rĂ©sistance nĂ©gative»

Ce systÚme est décrit en détail dans la référence [4], nous enjustifions rapidement ci-dessous les propriétés essentielles.

La figure 8 reprĂ©sente l’un des montages qui permettent de simulerune «rĂ©sistance nĂ©gative». En exprimant que, le courant d’entrĂ©e sur la

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borne + Ă©tant nul, une mĂȘme intensitĂ© traverse les deux rĂ©sistances X,on a :

s = 2 v+ = 2 (e + Δ) (12)

Figure 8 : Montage simulant une «résistance négative».

En exprimant pareillement que la mĂȘme intensitĂ© i traverse Rg etR, on a :

e = E – Rgi = s + Ri (13)

Dans le domaine de fonctionnement linĂ©aire de l’A.O. (|s| < U, Uet – U dĂ©signant les tensions de saturation haute et basse), on a Δ = 0dans la limite de l’idĂ©alitĂ©, d’oĂč s = 2e et, en reportant dans (13) :

e = – R |i| (rĂ©gime linĂ©aire, |i| < iS = U/2R) (14)

Le montage simule bien dans ce domaine une «rĂ©sistance nĂ©gative»et l’on conçoit dĂ©jĂ  qu’il soit possible de rĂ©aliser un rĂ©gime d’oscilla-tions amplifiĂ©es Ă  l’aide de ce dispositif, l’énergie fournie provenant del’alimentation de l’A.O.

Quand l’A.O. fonctionne en rĂ©gime saturĂ©, on a :

e = – U + R i (saturation basse, i > iS) (14’)

e = U + R i (saturation haute, i < – iS) (14’’)

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Page 13: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Si l’on substitue un dipĂŽle LC Ă  la source de tension E placĂ©e Ă l’entrĂ©e du montage, il faut remplacer dans (13) E par – L di/dt + q/C,d’oĂč aprĂšs dĂ©rivation et avec i = – dq/dt :

–L d2i

dt2 –

iC

– Rg didt

= dedt (15)

La dĂ©rivĂ©e de/dt ne peut prendre que les deux valeurs –R di/dt(rĂ©gime linĂ©aire (14)), et R di/dt (rĂ©gimes saturĂ©s (14’) ou (14’’)), onen dĂ©duit que le systĂšme est rĂ©gi par la double Ă©quation d’évolution :

L d2i

dt2 + (Rg– R)

didt

+ iC

= 0 (régime linéaire) (16)

L d2i

dt2 +

Rg+ R

didt

+ iC

= 0 (rĂ©gime saturĂ©) (16’)

Posons ω2 = 1/LC, (Rg – R)/L = ω/Q, (Rg + R)/L = 1/τ. Introduisantla variable rĂ©duite x = i/iS on obtient les formes normalisĂ©es desĂ©quations prĂ©cĂ©dentes :

d2x

dt2 +

ωQ

dxdt

+ ω2 x = 0 ; |x| < 1(16)

d2x

dt2 +

1τ dxdt

+ ω2 x = 0 ; |x| > 1(16’)

Dans la pratique on choisit pour Rg une valeur proche de R et trĂšslĂ©gĂšrement infĂ©rieure. Dans ces conditions, on a Q < 0 et de moduleimportant : (16) est l’équation d’un oscillateur harmonique (lentement)amplifiĂ©. Dans ces mĂȘmes conditions, on a τ ≅ L/2R et les valeursexpĂ©rimentales correspondent Ă  τ << T0 = 2π/ω et (16’) dĂ©crit un rĂ©gimeamorti Ă  relaxation rapide.

Il est facile de prĂ©voir le comportement du systĂšme : x = 0 est uneposition d’équilibre instable ; partant d’une valeur x0 mĂȘme trĂšs faible,il effectue des oscillations amplifiĂ©es (16) jusqu’à ce que x dĂ©passe lavaleur 1. Pour x > 1, le systĂšme a un comportement d’oscillateur amorti(16’) qui fait redescendre rapidement au-dessous de la valeur desaturation... Le systĂšme passant ainsi, tel l’oscillateur de Van der Pol,alternativement par des phases d’amplification et d’amortissement, onconçoit que son comportement soit analogue (voir ci-aprĂšs c.).

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Page 14: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Figure 9 : Oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative (Q = – 20 ; τ = 0,2).

Figure 10 : Oscillateur Ă  «rĂ©sistance nĂ©gative» (Q = – 20 ; τ = 0,2).

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Page 15: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Cette analyse est confirmĂ©e par les figures 9 et 10, obtenues parsimulation numĂ©rique (avec Q = –20, τ = 0,2, x0 = 0,05). A la seule vuede la reprĂ©sentation x(t) de la figure 9, on serait tentĂ© d’affirmer lecaractĂšre sinusoĂŻdal des oscillations entretenues (rĂ©gime permanent). Leportrait de phase correspondant (10) montre que l’on obtient bien desoscillations pĂ©riodiques (existence d’un cycle limite) mais que celles-cine sont pas exactement sinusoĂŻdales (caractĂšre lĂ©gĂšrement non-circu-laire du cycle).

On vĂ©rifie toutefois que, s’il est lĂ©gitime, dans les conditionsexpĂ©rimentales usuelles (Q de module grand devant 1), de qualifier lesoscillations entretenues de quasi-sinusoĂŻdales, les figures 11 et 12(rĂ©alisĂ©es avec Q = – 4) montrent que le caractĂšre non-sinusoĂŻdal peutdevenir trĂšs net pour des valeurs de Q de module plus faible (cettepropriĂ©tĂ©, qualifiĂ©e de distorsion, avait Ă©tĂ© observĂ©e expĂ©rimentalementpar les auteurs de l’article du B.U.P. citĂ© sous la rĂ©fĂ©rence [4]).

Figure 11 : Oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative (Q = – 4 ; τ = 0,2).

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Page 16: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Figure 12 : Oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative (Q = – 4 ; τ = 0,2).

c) Propriétés communes des oscillateurs entretenus

Il est possible de donner aux Ă©quations (11), oscillateur de Van derPol, d’une part et (16)-(16’), oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative d’autrepart, la forme commune :

x.. + A(x)x

. + ω2 x = 0 (17)

‱ Pour l’oscillateur de Van der Pol : A(x) = x2 – p, expression quichange de signe pour x = ± xS = ± √p.

‱ Pour l’oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative : A(x) = ω/Q < 0 pourx < xs = 1 et A(x) = 1/τ > 0 pour x > 1.

Les figures 12 bis a et 12 bis b donnent l’allure de la fonction A(x).En fait, dans le cas de l’oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative, nous avonsutilisĂ© une caractĂ©ristique idĂ©alisĂ©e pour l’amplificateur opĂ©rationnel ;dans la pratique, la fonction A(x) ne prĂ©sente pas de discontinuitĂ©s depente (figure 12 bis c).

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Page 17: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Figure 12 bis a : Oscillateur de Van der Pol.

Figure 12 bis b : Oscillateur à résistance négative.

Figure 12 bis c

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Vol. 86 - Mai 1992

Page 18: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

L’analogie des profils est Ă©vidente : sur les cycles limites, ondistingue des phases alternĂ©es d’amplification dominante ( x < xS)et d’amortissement dominant (x > xS). Sur la figure 12, on peutrepĂ©rer aisĂ©ment ces phases successives grĂące aux discontinuitĂ©s depente (bosses) pour x = xS introduites par les discontinuitĂ©s dumodĂšle adoptĂ©.

En multipliant (17) par x. dt et en intégrant sur une période, il vient :

∫ dx

.2 ⁄ 2

+ ∫ A(x) x.2 dt + ∫ d

ω2 x2 ⁄ 2 = 0

le premier terme et le troisiĂšme sont nuls, de sorte que :

∫ A(x) x. 2 dt = 0

(18)

relation qui exprime la compensation sur un cycle des phases d’amortisse-ment et des phases d’amplification dominante. La relation (18) va nousservir à estimer la valeur de l’amplitude xM des oscillations de Van der Pol.Dans ce cas, pour p petit, les oscillations sont quasi-sinusoïdales :

x ≅ xM cos ωt

et, en reportant dans (18), on obtient facilement :

xM = 2 √p = 2 xS (19)

Figure 12 ter a

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Figure 12 ter b

On constate, en fait, sur les cycles limites obtenus pour diffĂ©rentesvaleurs de p que cette propriĂ©tĂ© demeure trĂšs bien vĂ©rifiĂ©e, mĂȘme pourp grand, c’est-Ă -dire pour des oscillateurs fortement non-linĂ©airesengendrant des oscillations nettement non-sinusoĂŻdales. On se reporteraaux figures 7 (p = 2) et 12 ter, a et b (p = 500). Pour quelquesconsidĂ©rations sur l’oscillateur de Van der Pol trĂšs fortement non-li-nĂ©aire, voir l’appendice en fin d’article.

Enfin, soulignons Ă  nouveau que les cycles limites, ou attracteurs,sont indĂ©pendants des conditions initiales. Ce comportement est propreĂ  tout systĂšme dissipatif non chaotique ([3], [6], [7]) dont on montrequ’il Ă©volue nĂ©cessairement vers un Ă©tat indĂ©pendant des conditionsinitiales. Si on considĂšre, par exemple, un ensemble de conditionsinitiales reprĂ©sentĂ©es sur le diagramme de phase par des points voisinsoccupant un domaine continu d’aire dA, on Ă©tablit qu’à des dates tsuccessives l’aire du domaine occupĂ© par les points reprĂ©sentatifscorrespondants va en dĂ©croissant jusqu’à s’annuler lorsqu’on atteintprĂ©cisĂ©ment le cycle limite (voir [3], [6]).

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Vol. 86 - Mai 1992

Page 20: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

5. OSCILLATEURS DU PREMIER ORDRE

On envisage maintenant la possibilitĂ© de systĂšmes dĂ©crits par uneĂ©quation diffĂ©rentielle d’ordre 1 pouvant ĂȘtre mise sous la forme :

x. = f(x) (20)

Si f possĂšde des propriĂ©tĂ©s suffisantes de continuitĂ© et de dĂ©rivabi-litĂ©, la solution x(t) de (20) est entiĂšrement dĂ©terminĂ©e par la seulecondition initiale x0. Il en rĂ©sulte que le systĂšme n’est pas dĂ©crit Ă proprement parler par un portrait de phase mais par une trajectoire dephase unique. Avant de passer Ă  d’autres considĂ©rations gĂ©nĂ©rales surles oscillateurs du premier ordre, nous traiterons deux exemples rĂ©digĂ©ssous forme d’exercices.

a) Oscillations de relaxation d’une lampe au nĂ©on

On considÚre le montage de la figure 13 (E = 200 V, C = 50 ”F,R = 20 000 Ω). La caractéristique de la lampe au néon représentée surla figure 14 résume les propriétés suivantes :

u croissant Ă  partir de 0, on a i = 0 jusqu’à la tension d’allumageua = 130 V au delĂ  de laquelle la caractĂ©ristique est reprĂ©sentĂ©e pari = α + ÎČ u (α = – 0,97 A ; ÎČ = 0,01 A/V). Cette expression reste valablequand u dĂ©croĂźt tant que u reste supĂ©rieur Ă  la tension d’extinctionue = 98 V au-dessous de laquelle on a Ă  nouveau i = 0.

Figure 13

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Page 21: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Figure 14 : CaractĂ©ristique d’une lampe nĂ©on.

I. A t = 0, on ferme le circuit, le condensateur Ă©tant initialementnon chargĂ©. Exprimer en fonction de E, ua et τ = RC la durĂ©e t0 de laphase (0) qui prĂ©cĂšde le premier allumage. Application numĂ©rique.

II. Étudier l’évolution ultĂ©rieure de u(t) et calculer littĂ©ralement etnumĂ©riquement les durĂ©es t1 de la premiĂšre phase (1) d’allumage et t2de la premiĂšre phase (2) d’extinction (on pourra poserU = (E – R α) ⁄ (1 + ÎČR) ; Ξ = τ ⁄ (1 + ÎČR),

III. Montrer que l’on obtient un rĂ©gime permanent pĂ©riodique donton calculera la pĂ©riode T. Tracer u (t) ainsi que la trajectoire de phaseu. (u).

SOLUTION

I. On a toujours u = q/C = E – R j. En exprimant la loi des nƓuds :j = i + dq/dt = i + C du/dt. Avec τ = RC, on en tire l’équation d’évolutionde u :

τ u. + u = E – R i (21)

Cette Ă©quation est indĂ©pendante de la phase considĂ©rĂ©e, il suffitensuite d’expliciter phase par phase la relation i(u). Dans la phaseinitiale (0), on a i = 0 d’oĂč une relaxation vers E de constante de tempsτ :

u = E 1 – exp (– t ⁄ τ)

(22)

(0) ue (2) ua

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Page 22: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

En explicitant la condition u < ua, on obtient :

t0 = τ ln ua

E – ua = 1,050 s

II. Dans la phase (1), la lampe est allumĂ©e et (21) s’écrit :

τ u. + u (1 + ÎČR) = E – R α

soit, aprĂšs division par (1 + ÎČ R) :

Ξ u. + u = U (23)

En exprimant la continuitĂ© de u en t = t0, on obtient l’expressiond’une relaxation vers U = 97,51 V avec la constante de tempsΞ = 0,005 s :

u = U + (ua – U) exp −( t – t0) ⁄ ξ (24)

Exprimant la condition u > ue, on obtient :

t1 = ξ ln ua – U

ue – U = 0.0209 s

La phase (2), lampe Ă©teinte, est rĂ©gie par la mĂȘme Ă©quationdiffĂ©rentielle que la phase (0), c’est une nouvelle relaxation deconstante de temps τ vers E :

u = E + (ue – E) exp −( t – t1) ⁄ τ

d’oĂč : t2 = τ ln E – ue

E – ua = 0,3765 s

III. L’évolution ultĂ©rieure est une suite de phases de type (1) et(2), d’oĂč un caractĂšre pĂ©riodique de pĂ©riode :

T = t1 + t2 = 0,397 s

La figure 15, obtenue Ă  l’aide d’un programme d’intĂ©grationnumĂ©rique, vĂ©rifie bien les rĂ©sultats des calculs prĂ©cĂ©dents : on obtientl’allure caractĂ©ristique d’oscillations de relaxation. La relation (21)permet de prĂ©voir que la trajectoire de phase est constituĂ©e de segmentsde droite (figure 16). L’existence d’un rĂ©gime permanent est attestĂ©epar la prĂ©sence d’un cycle qui est ici un trapĂšze.

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Page 23: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Figure 15 : Oscillations d’une lampe au nĂ©on.

Figure 16 : Trajectoire de phase d’une lampe au nĂ©on.

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Page 24: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

b) Multivibrateur astable

Le dipĂŽle I dont la caractĂ©ristique de transfert s(e) idĂ©alisĂ©e estreprĂ©sentĂ©e sur la figure 17, est appelĂ© inverseur logique, son intensitĂ©d’entrĂ©e est nulle.

Figure 17 : CaractĂ©ristique de transfert d’un inverseur logique.

On considĂšre le montage de la figure 18 dans lequel deuxinverseurs logiques I1 et I2 sont reliĂ©s par l’intermĂ©diaire d’un circuitRC de temps de relaxation τ = RC, la sortie de I2 Ă©tant par ailleursreliĂ©e Ă  l’entrĂ©e de I1. On donnera des valeurs numĂ©riques calculĂ©espour la valeur k0 = 0,5 de k.

Figure 18 : Montage du multivibrateur astable.

I. Le condensateur Ă©tant initialement non chargĂ©, on suppose pourfixer les idĂ©es que I1 est Ă  t = 0 dans son Ă©tat «Bas» (B1). Étudier lapremiĂšre phase (0) d’évolution de la tension u (t) et calculer sa durĂ©et0 en fonction de τ et k.

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II. Étudier les phases suivantes (1) et (2), se terminant respective-ment aux instants t1 et t2 et exprimer de la mĂȘme façon leurs durĂ©esϑ1 = t1 – t0 et ϑ2 = t2 – t1. Montrer que l’évolution de u(t) est pĂ©riodiqueet exprimer sa pĂ©riode T en fonction de τ et k. Montrer que T passepar un minimum pour une valeur k0 de k que l’on calculera.

III. Représenter sur des graphiques alignés verticalement lesévolutions des tensions u, s1, s2, et e2 . Quelle est la nature de latrajectoire de phase u

. (u) de l’oscillateur ainsi constituĂ© ?

SOLUTION

Les relations générales, indépendantes de la phase de fonctionnement :

Le courant d’entrĂ©e de I2 Ă©tant nul, on a i = dq/dt. Compte tenu deq = C u et de s2 = s1 + u + R i, on obtient l’équation d’évolution de u :

τ u. + u = s2 – s1 (25)

On a Ă©galement toujours :

e1 = s2 (26)

e2 = s1 + u (27)

Relations dépendant de la phase de fonctionnement :

Ce sont ici les valeurs E (Ă©tat H) ou 0 (Ă©tat B) prises par les tensionsde sortie. Compte tenu de (26), on note que ces Ă©tats sont nĂ©cessaire-ment «en opposition», parmi les 2 × 2 = 4 Ă©tats a priori possibles dusystĂšme, on ne peut en retenir que deux (H1/B2 et B1/H2). Dans cesconditions, on note que le second membre de (25) ne peut prendre queles valeurs E et – E, d’oĂč les deux seuls types d’évolution possiblespour u(t) : relaxation vers E avec u

. > 0 (Ă©tat B1/H2) ou vers – E avec

u. < 0 (Ă©tat H1/B2 ).

I. Partant de t = 0, on démarre dans un état B1/H2 (s1 = 0, s2 = E).Dans la phase (0) correspondante, la solution de (25), compte tenu desconditions initiales, est :

u = E 1 – exp (– t ⁄ τ)

Compte tenu de (27), la condition de contrĂŽle de l’état H2 s’écrit :

e2 = s1 + u = u < k E

d’oĂč l’on tire t < t0 avec t0 = – τ ln (1 – k) = 0,693 τ

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Page 26: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

II. Pour t < t0, le systĂšme bascule dans l’état H1/B2. Dans la phase(1) correspondante (s1 = E, s2 = 0), l’équation (25) traduit une relaxationde u vers – E. Ayant exprimĂ© la continuitĂ© de u en t = t0, on a :

u = E (1 + k) exp

–(t – t0) ⁄ τ

– 1

En exprimant Ă  nouveau la condition de contrĂŽle de B 2 :

e2 = s1 + u = E + u > k E

d’oĂč t < t1 avec :

ϑ1 = t1 – t0 = τ ln 1 + k

k = 1,099 τ

Pour t > t1, le systĂšme rebascule dans l’état B1/H2, d’oĂč dans laphase (2) une nouvelle relaxation de u vers E. En exprimant lacontinuitĂ© de u en t = t1 = 1,792 τ, on a :

u = E ((k – 2) exp(–(t – t1)/ τ) + 1)

D’oĂč, en exprimant e2 = s1 + u < k E :

ϑ2 = t2 – t1 = τ ln 2 – k1 – k

= 1,099 τ

A l’instant t = t2 = 2,891 τ, le systĂšme est revenu entiĂšrement dansles conditions de l’instant t0, on observe donc ultĂ©rieurement uneĂ©volution pĂ©riodique de pĂ©riode :

T = τ ln (1 + k) (2 – k)

k (1 – k) = 2,197 τ (voir aussi § 6 a)

Par dĂ©rivation, on Ă©tablit que T passe par le minimumT0 = 2 τ ln(3) = 2,197 τ pour ko = 0,5.

III. L’équation (25) montre que la trajectoire de phase est consti-tuĂ©e de segments de droite. Le second membre de (25) ne pouvantprendre que les valeurs E et – E, le point reprĂ©sentatif dĂ©crit deuxdroites parallĂšles : dans le rĂ©gime pĂ©riodique atteint, la trajectoire dephase est un cycle qui a la forme d’un parallĂ©logramme (figure 20).

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Page 27: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

Figure 19 : Multivibrateur astable (k = 0,8).

Figure 20 : Trajectoire de phase du multivibrateur astable.

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c) Vase de Tantale

Le rĂ©cipient reprĂ©sentĂ© sur la figure 21 est muni d’un siphon desection s (trĂšs faible devant la surface libre S) dont l’ouverture estpratiquement confondue avec son fond et qui dĂ©bouche Ă  une cote hau-dessous de celui-ci aprĂšs avoir montĂ© jusqu’à la cote ζ h.

Figure 21 : Vase de Tantale.

I. A l’aide des donnĂ©es prĂ©cĂ©dentes, on peut former les quantitĂ©sv0

2 = 2 g h, Q0 = s v0, τ = s h/Q0. Quelles peuvent ĂȘtre a priori lessignifications de ces grandeurs ?

II. On considĂšre une situation oĂč, le siphon Ă©tant amorcĂ©, lasurface libre du rĂ©cipient a la cote zh. Compte tenu de s << S, on peutassimiler le rĂ©gime Ă©tabli Ă  un rĂ©gime permanent d’un fluide parfait. EndĂ©duire l’expression de la vitesse v de l’eau qui s’écoule dans le siphon.

III. On note Q = x Q0 le dĂ©bit volumique (indĂ©pendant du temps)de la source qui alimente le systĂšme. Établir l’équation diffĂ©rentiellevĂ©rifiĂ©e par z(t) dans un rĂ©gime oĂč le siphon est amorcĂ©. On note z0 lavaleur de z correspondant Ă  un Ă©ventuel Ă©tat du systĂšme dans lequel lasurface libre garde une cote constante. Exprimer z0 en fonction de x eten dĂ©duire qu’un tel Ă©tat ne peut exister que si x dĂ©passe une valeur x0que l’on prĂ©cisera. Calculer la valeur x1 de x qui correspondrait Ă  unesurface libre restant en permanence au niveau du sommet du siphon.

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IV. Pour x < x0, montrer que s’établit un rĂ©gime d’oscillations derelaxation dont on calculera la pĂ©riode T = t1 + t2 (t1 durĂ©e deremplissage, siphon amorcĂ© ; t2 durĂ©e de vidange par le siphon) enfonction de x, x1 et τ. Pour x = 0,8 et ζ = 0,5, reprĂ©senter graphiquementz(t) ainsi que la trajectoire de phase z

. (z).

SOLUTION

I. v0, Q0 et τ reprĂ©sentent a priori respectivement une vitesse, undĂ©bit de volume et une durĂ©e caractĂ©ristiques du systĂšme.

II. Dans les conditions précisées, on peut appliquer le théorÚmede Bernoulli :

v2/2 + P/” + g z = constante

le long d’une ligne de courant qui part de la surface libre (cote zh,pression P0 et vitesse assimilĂ©e Ă  0) et la sortie du siphon (cote – h,pression P0 dans le jet, vitesse v). On en dĂ©duit :

v = v0 √1 + z

III. En exprimant la conservation du volume d’eau, on a :ddt

(S z h) = Q – s v(28)

d’oĂč, aprĂšs introduction des paramĂštres recommandĂ©s :

z. = (x – √1 + z) ⁄ τ (29)

On en déduit aussitÎt :

z0 = x2 – 1 ; x0 = 1 ; x1 = √1 + ζ

IV. Pour calculer la durĂ©e de la phase (1), il suffit de faire v = 0dans (28), d’oĂč z

. = x ⁄ τ et la durĂ©e pour que le niveau atteigne la cote

ζ h : t1 = τ (ζ/x).

Pour la phase (2), l’équation (29) s’écrit :dz

x – √1 + z =

dtτ

En posant u = x – √1 + z, d’oĂč : 1 + z = (x – u)2, dz = – 2(x – u) du...on obtient la primitive :

u – x ln u = t/2τ + constante

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qui permet d’obtenir si c’est nĂ©cessaire une expression explicite t(z).Contentons nous de calculer t2, durĂ©e de l’évolution de z =

ζ u = x –√1 + ζ = x – x1

à z = 0 (u = x – 1) :

t2 ⁄ 2τ = x1 – 1 + x ln x1 – x1 – x

Les figures 22 et 23 reprĂ©sentent respectivement z (t) et le portraitde phase. Ce dernier est constituĂ© de segments de droite et, comme lemontre (29), d’arcs de parabole.

Figure 22 : Oscillations de relaxation du niveau du vase de Tantale.

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Figure 23 : Trajectoire de phase de l’oscillateur de Tantale.

6. QUELQUES OBSERVATIONS GÉNÉRALES

Tirons Ă  partir de cette galerie de portraits quelques remarquesd’ordre gĂ©nĂ©ral.

a) Périodicité

Cette question a Ă©tĂ© largement Ă©voquĂ©e. RĂ©sumons l’essentiel. Ilest Ă©vident que si un signal x(t) est pĂ©riodique (pĂ©riode T) sa trajectoirede phase est une courbe fermĂ©e, le point reprĂ©sentatif effectuant un tourcomplet sur cette courbe en un temps Ă©gal Ă  T. Inversement, si latrajectoire de phase est une courbe fermĂ©e, on peut conclure Ă  lapĂ©riodicitĂ© de x(t).

‱ ConsidĂ©rons d’abord le cas oĂč le systĂšme est rĂ©gi par uneĂ©quation diffĂ©rentielle du second ordre, par exemple de la forme :

x.. + A(x) x

. + ω2 B(x)= 0

RelĂšvent d’une telle description tous les oscillateurs dĂ©crits dansles § 2, 3 et 4. Moyennant des conditions de rĂ©gularitĂ© (dites deCauchy-Lipshitz), si on fixe les conditions initiales (x0, x

.0) correspon-

dant Ă  un point M0 du diagramme de phase, la trajectoire de phase est

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alors dĂ©terminĂ©e univoquement. Remarquons Ă©galement que le sens deparcours sur la trajectoire de phase fermĂ©e considĂ©rĂ©e est, par construc-tion mĂȘme, celui des aiguilles d’une montre. En effet, pour x

. > 0, x croĂźt

et pour x. < 0, x décroßt, les valeurs extrémales de x correspondent aux

points situĂ©s sur l’axe des abscisses. Des changements de sens deparcours sur la trajectoire sont impossibles. On note de maniĂšreĂ©quivalente que l’aire du cycle, soit :

∫ x. dx = ∫ x

.2 dt

est nécessairement positive.

Le point reprĂ©sentatif ayant ainsi effectuĂ© un tour complet et setrouvant en M0, le mouvement se reproduit identiquement avec unepĂ©riode T. Cette pĂ©riode est fixĂ©e par la trajectoire de phase. En effet,si l’équation de la trajectoire de phase est :

x. = f(x) (30)

on a : T = ∫ dxf(x) (31)

Selon les cas, T dĂ©pend ou non des conditions initiales. Dans le casdes oscillations entretenues, le cycle limite se comporte comme unattracteur et est indĂ©pendant des conditions initiales, la pĂ©riode est doncalors Ă©galement indĂ©pendante des conditions initiales. En revanche,dans le cas, par exemple, du pendule pesant, il est bien connu que lapĂ©riode dĂ©pend de l’amplitude des oscillations. On peut remarquer quedans chacun des domaines x

. > 0, la fonction f(x) est nécessairement à

dĂ©termination unique ce qui n’est Ă©videmment pas le cas si l’onconsidĂšre le cycle dans son entier.

‱ Si le systĂšme Ă©tudiĂ© est rĂ©gi directement par une Ă©quationdiffĂ©rentielle du premier ordre de la forme :

x. = g(x)

les consĂ©quences prĂ©cĂ©dentes dĂ©coulant de (30) restent valables. Lesens de parcours est celui des aiguilles d’une montre. Dans les systĂšmesĂ  relaxation Ă©tudiĂ©s au § 5, on peut d’écrire l’évolution de x(t) enintroduisant deux fonctions univoques g1(x) et g2(x) de sorte que :

x. = g1 (x) pour x

. > 0

x. = g2 (x) pour x

. < 0

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avec basculement (discontinuitĂ© de x.) de l’une Ă  l’autre pour deux

valeurs xm et xM de x, avec xm ≀ x ≀ xM. La pĂ©riode :

T = ∫ dx

g(x)

dĂ©pend uniquement des paramĂštres du systĂšme, en particulier desniveaux de basculement xm et xM. Ainsi, dans le cas du multivibrateurastable, par exemple, on calcule directement T avec g1 = – x + E,g2 = – x – E, xm = (k – 1) E, xM = kE (figure 20).

Il est aisé de comprendre que pour un systÚme donné régi par uneéquation du 1er ordre (g(x) donné), le choix des niveaux de basculementfixe univoquement la durée de montée et la durée de descente, donc lapériode.

b) Réversibilité

Examinons l’effet d’une remontĂ©e dans le temps (film dĂ©roulĂ© Ă l’envers) sur une trajectoire de phase. Une telle Ă©volution renversĂ©e estobtenue pour chaque valeur de x en changeant x

. en –x

., c’est-à-dire en

effectuant sur le diagramme de phase une symĂ©trie par rapport Ă  Ox.Chaque point M est ainsi transformĂ© en M’ ; l’ordre de succession desĂ©vĂ©nements est inversĂ© (figure 24). Si on considĂšre, par exemple,l’oscillateur amorti (§ 3 a), il lui correspond l’oscillateur amplifiĂ©(§ 3 b) (figures 25 a et 25 b).

Figure 24 : Transformation t → – t sur le diagramme de phase.

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Page 34: Le portrait de phase des oscillateurs - pagesperso-orange.fr

a) Oscillateur amorti. b) Oscillateur amplifié

Figure 25 : Transformation t → – t sur le diagramme de phase d’un oscillateur amorti.

La rĂ©versibilitĂ© d’un processus se traduit par l’invariance de latrajectoire de phase dans la transformation prĂ©cĂ©dente. Cette invarianceest satisfaite Ă  l’évidence dans le cas de l’oscillateur harmonique ou dupendule pesant (non amortis). Au contraire, pour une Ă©volutionirrĂ©versible cette invariance n’est plus vĂ©rifiĂ©e. L’exemple que nousvenons de rappeler de l’oscillateur amorti illustre ce comportement.Concernant les oscillateurs entretenus, on vĂ©rifie que la trajectoirefermĂ©e qui dĂ©crit l’oscillateur n’est plus symĂ©trique par rapport Ă  Ox,qu’il s’agisse d’un cycle limite (oscillateurs du second ordre) ou de latrajectoire de phase des oscillateurs de relaxation* . Ceci traduitl’existence d’une irrĂ©versibilitĂ© fondamentale. Cette irrĂ©versibilitĂ© estliĂ©e Ă  l’existence de phĂ©nomĂšnes dissipatifs qui nĂ©cessitent prĂ©cisĂ©mentun pompage d’énergie compensatoire pour entretenir les oscillations.

Dans le cas du cycle limite d’un oscillateur du second ordre, nousavons indiquĂ© qu’il y a alternance de phases Ă  amortissement dominantet de phases Ă  amplification dominante. Il est bien Ă©vident qu’unprocessus de cette nature n’est pas rĂ©versible car les phases ne sont pasinterchangeables, un processus apportant de l’énergie ne pouvant ĂȘtreassimilĂ© Ă  un processus dissipatif remontant le temps !

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* Dans le cas d’oscillations de relaxation obtenues simplement par charge etdĂ©charge d’un condensateur entre deux niveaux de tension, on peutmontrer trĂšs facilement par un simple calcul qu’il est impossible, comptetenu des conditions de basculement, que la trajectoire de phase soitsymĂ©trique par rapport Ă  Ox.

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On notera enfin que le degrĂ© d’irrĂ©versibilitĂ© est d’autant plus grandque la trajectoire est plus dissymĂ©trique par rapport Ă  Ox.

c) Non linéarité

Nous avons dĂ©jĂ  fait remarquer que les oscillateurs Ă  cycle limitesont fondamentalement non linĂ©aires puisque la linĂ©aritĂ© impliqueraitsur le diagramme de phase une propriĂ©tĂ© d’homothĂ©tie incompatibleavec l’existence mĂȘme d’un cycle limite indĂ©pendant des conditionsinitiales. Cette non-linĂ©aritĂ© est dans ce cas incluse dans la fonctionA(x) qui figure dans l’équation (17), traduisant, par exemple dans lecas de l’oscillateur Ă  rĂ©sistance nĂ©gative, la saturation de l’amplificateuropĂ©rationnel. Dans le cas des oscillateurs Ă  relaxation, la non-linĂ©aritĂ©fondamentale* est le fait du basculement.

En toute derniĂšre remarque, notons que dans tous les exempleschoisis la fonction A(x) est paire. Il en rĂ©sulte qu’en rĂ©gime pĂ©riodiqued’oscillations, c’est-Ă -dire pour le cycle limite, il y a symĂ©trie parrapport Ă  l’origine (changement de x en -x entraĂźnant celui de x

. en

– x.). Les cycles limites obtenus vĂ©rifient effectivement cette propriĂ©tĂ©.

La présence de termes impairs dans A(x) viendrait détruire la symétriedes oscillations sans contribuer en rien à leur établissement.

Actuellement, en classes prĂ©paratoires aux Grandes Écoles, l’étudedes oscillateurs se rĂ©duit Ă  celle de l’oscillateur harmonique avec ousans amortissement. Il serait bon, Ă  notre avis, dans une filiĂšre Ă vocation plus appliquĂ©e de dĂ©passer ce cadre trĂšs limitĂ© et d’esquisserune prĂ©sentation des oscillateurs rĂ©els, c’est-Ă -dire entretenus, sans quecelĂ  entraĂźne une Ă©tude approfondie. Ce serait aussi nous semble-t-il unbon exemple de l’utilisation de l’outil informatique tant au point de vuede l’exploitation directe de l’expĂ©rience que celui du traitementnumĂ©rique des modĂšles utilisĂ©s. Enfin, une prise de contact par ce biaisavec la non-linĂ©aritĂ© nous paraĂźt intĂ©ressante.

Appendice : Oscillateur de Van der Pol fortement non-linéaire

Les figures 12 ter a et b donnent le comportement d’un Van der Polpour p grand (p = 500, √p = 22,4). Van der Pol avait dĂ©jĂ  notĂ© que dansce cas les oscillations prennent l’allure d’oscillations de relaxation avec

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* C’est-Ă -dire le passage de g1(x) Ă  g2(x), les non-linĂ©aritĂ©s Ă©ventuelles deg1(x) et de g2(x) (comme dans le cas du vase de Tantale) n’étant pas icifondamentales.

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alternance de phases à variation trÚs rapide et de phases à variation trÚslente, le cycle limite étant par ailleurs atteint sans oscillation préalable.

Les deux phases lentes par cycles se situent dans leur totalitĂ© dansles zones pour lesquelles l’amortissement domine mais va en dĂ©crois-sant (soit x variant de xM Ă  xS et x variant de – xM Ă  – xS). Le calculde la pĂ©riode T se ramĂšne, dans ces conditions, Ă  celui de la durĂ©e deces deux phases pour lesquelles on peut tenter l’approximation x

..

nĂ©gligeable, l’équation de Van der Pol se rĂ©duisant alors Ă  :

(x2 – p) x. + ω2 x = 0 soit x

. = f(x) =

ω2 x

p – x2

d’oĂč : T2

= 1

ω2 ∫ xM

xS

dx

px

– x

soit : T = 1

ω2 – 2p ln

xM

xS + xM

2 – xS2

Si l’on admet (voir § 4 c) que l’on a xM ≅ 2xS = 2 √p et que l’onprend pour unitĂ© de temps la pĂ©riode propre des oscillations (ω = 2 π) :

T ≅ p

4π2 (3 – 2 ln 2)

Cette pĂ©riode augmente avec p et est notablement plus importanteque la pĂ©riode des oscillations propres (T = 1). Ainsi, pour p = 500 :T = 20,7. On notera, cependant que le cycle limite diffĂšre assezsensiblement, mĂȘme pour p trĂšs grand, de la trajectoire de phase d’unoscillateur de relaxation proprement dit.

BIBLIOGRAPHIE

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