dossier spécial les relations parents enseignantsdossier spécial les relations parents enseignants...

76
Dossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le priMaire, voluMe 22, nuMéro 4, autoMne 2009 poste publication contrat numéro 40010582

Upload: others

Post on 17-Jun-2020

13 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Dossier spécialles relations parents enseignants

Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveauen collaboration avec

aQep vivre le priMaire, voluMe 22, nuMéro 4, autoMne 2009

post

e pu

blic

atio

n co

ntra

t num

éro

400

1058

2

Page 2: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 3: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Sommaire

La neuroéducation : mieux comprendre le cerveau pour mieux enseigner Lorie-MarLène BrauLt Foisy et steve Masson

Que signifie « penser historiquement » chez des élèves de niveau primaire? Pour en savoir plus... stéphanie DeMers, DaviD LeFrançois et Marc-anDré éthier

rat de bibliothèque - Littérature jeunesse juLie st-pierre

LangueS52 Le MeLs accepte la nouvelle

orthographe au primaire chantaL contant

54 Découvrir claude ponti Marie BarguirDjian

56 élaborer une situation d’apprentissage à partir de la littérature de jeunesse juLie st-onge

isaBeLLe Montésinos-geLet

Marie Dupin De saint-anDré

mathématiQue, Science et technoLogie60 Mon cœur d’enfant

yannick Dupont

chroniQueS62 mots d’enfants

Le jardin secret ophéLie vincent

Je rêve d’une école63 La communication : une matière

scolaire transversale par excellence jacques saLoMé

Vivre la différence64 Lucien-guilbault :

une école qui fait la différence Louise groLeau

Passion : chansons66 au 27-100 rue des partances Martin Lépine

rat de bibliothèque68 Littérature jeunesse juLie st-pierre

auDrey cantin

caroLine tringaLi

Fouinons ensemble72 chroniques pédagogiques sanDra thériauLt

PréSentation05 contrer le décrochage scolaire

Martin lépine

07 Mot du président de l’aqep

stéphan Lenoir

DomaineS générauX De Formation08 parents et école :

un point de vue philosophique norManD BaiLLargeon

12 réduire la portée négative des sté-réotypes de genre en mathématiques et en français : des pistes d’interven-tion destinées aux enseignants

isaBeLLe pLante

15 Le jugement professionnel dans les décisions d’orientation : différencier les relations avec les familles pour une plus grande équité

WaLther tessaro

MicheL enright

eDith WegMuLLer

ariane Favre MarMet

pauLe BeLLehuMeur

Louise LaFortune

18 Le développement professionnel de l’enseignant : par la réflexion et pour la résilience?

MyLène Leroux

uniVerS SociaL20 Du casse-tête à la pâte à modeler

ou comment planifier l’univers social en classe multiprogramme

chantaL Déry

24 que signifie « penser historique-ment » chez des élèves du primaire?

stéphanie DeMers

DaviD LeFrançois

Marc-anDré éthier

nouVeLLeS27 au babillard

DoSSier SPéciaLLeS reLationS ParentS-enSeignantS28 Les relations parents-enseignants :

kaléïdoscope Marie-cLauDe BéLiveau

30 enseignante, parents et « psy » : regards croisés sur l’enfant héLène Diguer

Dr Martin st-anDré

32 référer en pédopsychiatrie : quand? pourquoi? comment?

johanne Boivin

geneviève teLLier

34 attitudes gagnantes pour favoriser de bonnes relations entre parents et enseignants

Marie-France ricarD

36 « tous pour un… » karine BusiLacchi

serge Marcotte

39 parents en tous genres Louis éMonD

42 Devoirs et leçons… un carrefour relationnel Marie-cLauDe BéLiveau

46 relations parent-enseignant… un rapport professionnel avant tout MicheL MarsoLais

48 L’élève en difficulté psychologique : quelle approche privilégier avec ses parents? céLine Boisvert

Page 4: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

On le signale partout ! Térawattus Énergivorus, ce vilain virus, provoque

la frénétique envie de surconsommer l’énergie sans penser à l’environnement.

Vous pouvez le repérer et le combattre !

Participez à l’enquête !Avec l’inspecteur OOWatt et

sa valise remplie d’enquêtes, de jeux et d’expériences scientifiques,

faites de vos élèves de véritables ambassadeurs de

l’économie d’énergie.

Économiser l’énergie, c’est facile !

Distribuée gratuitement par :

Pour en savoir plus :centredessciencesdemontreal.com/00watt

hydroquebec.com/professeurs

Valisepédagogique

OOWattSur la trace de Térawattus Énergivorus !

Une enquête amusante et éducative sur l’économie d’énergie pour les élèves du 3e cycle du primaire

HQ_VP_Ann_8X10,5 30/06/09 15:52 Page 1

Page 5: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

PréSentation

Martin Lépine

contrer Le Décrochage ScoLaire

enseignant à l’externat Mont-jésus-MarieDoctorant en éducation (didactique) à l’université de Montréal [email protected]

Revue trimestrielle publiée par l’Association québécoise des enseignantes et des enseignants du primaire. L’adresse de correspondance est C.P. 65 002, Place Longueuil, Longueuil (Québec) J4K 5J4. Le numéro de téléphone est le 1-866-940-AQEP. Les textes apparaissant dans la revue Vivre le primaire n’engagent que la responsabilité des auteurs et, à moins de mention contraire, ne constituent pas une prise de position de l’Association québécoise des enseignantes et des enseignants du primaire (AQEP). Afin de donner aux auteurs des articles toute la reconnaissance à laquelle ils ont droit, il importe de préciser que la reproduction d’articles issus de la présente revue n’est autorisée qu’à des fins éducatives, en mentionnant la source. En outre, un article publié depuis plus d’un an dans la revue Vivre le primaire peut être reproduit sur un site Web, mais à la condition d’avoir au préalable obtenu l’accord écrit de l’auteur et de l’AQEP. L’utilisation du masculin n’a d’autre but que d’alléger les textes.

Rédacteur en chef – Martin Lépine Directrice administrative – Sandra Thériault Équipe de rédaction et comité de lecture – Jacinthe Asselin, Sylvie Bisson, Geneviève Brassard, Anne Brault-Labbé, Carole Constantin, Louis Laroche, Martin Lépine, Sandra Thériault Coordonnatrice de la revue – Jacinthe Asselin Conception de la grille – orangetango Infographie – Paquin design graphique Correcteurs-réviseurs – Marcel Chabot, Claudette Jarry

Collaborateurs au volume 22, n° 4 – Normand Baillargeon, Marie Barguirdjian, Marie-Claude Béliveau, Paule Bellehumeur, Céline Boisvert, Johanne Boivin, Karine Busilacchi, Audrey Cantin, Chantal Contant, Stéphanie Demers, Chantal Déry, Hélène Diguer, Marie Dupin de Saint-André, Yannick Dupont, Louis Émond, Michel Enright, Marc-André Éthier, Ariane Favre Marmet, Louise Groleau, Louise Lafortune, David Lefrançois, Stéphan Lenoir, Martin Lépine, Mylène Leroux, Serge Marcotte, Michel Marsolais, Isabelle Montésinos-Gelet, Isabelle Plante, Marie-France Ricard, Dr Martin St-André, Julie St-Pierre, Julie St-Onge, Jacques Salomé, Geneviève Tellier, Walther Tessaro, Sandra Thériault, Caroline Tringali, Ophélie Vincent, Édith Wegmuller

Collaborateurs des articles en ligne – Lorie-Marlène Brault Foisy, Stéphanie Demers, Marc-André Éthier, David Lefrançois, Steve Masson, Julie St-Pierre

Impression – K2 Impressions Ce magazine est imprimé sur du Chorus Art Soie, papier recyclé à 50 %, contenant 15 % de fibres postconsommation et est 100 % recyclable.

Dépôt légal, Bibliothèque nationale du Québec ISSN 0835-5169

Abonnement individuel : [email protected] ou coordonnées du siège social

Adhésion à l’AQEP incluant l’abonnement à la revue Vivre le primaire

1 an (4 numéros) = 40 $ (taxes et livraison incluses) 2 ans (8 numéros) = 75 $ (taxes et livraison incluses) Prix à l’unité = 12 $ + frais d’envoi (taxes incluses)

Conseil d’administration Stéphan Lenoir, président Sandra Thériault, vice-présidente et directrice administrative de la revue Lise Courtemanche, trésorière Julie St-Pierre, secrétaire Martin Lépine, rédacteur en chef de la revue Josée Therrien, directrice du congrès Mélanie Paré, administratrice

Les personnes œuvrant au sein du conseil d’administration de l’AQEP, de la direction et du comité de lecture de la revue Vivre le primaire sont toutes bénévoles.

Siège social C.P. 65 002, Place Longueuil Longueuil (Québec) J4K 5J4 Tél. : 1-866-940-AQEP (2737) Télec. : 1-866-941-AQEP (2737) Courriel : [email protected]

Pour joindre l’équipe de la revue Vivre le primaire Vous pouvez écrire, en tout temps, à la coordonnatrice de la revue en utilisant l’adresse de courriel suivante : [email protected].

Pour tout ce qui concerne les abonnements et les changements d’adresse, vous pouvez écrire à l’adresse suivante : [email protected].

Rédacteur en chef Vivre le primaire

Plus d’un de nos collègues sur cinq quitte la profession avant d’atteindre cinq ans d’expérience dans l’enseignement (Mukamurera, 2006). Par ailleurs, environ 30 % des élèves, bon an, mal an, ne terminent pas leurs études secondaires dans les temps prescrits. Il apparaît évident que notre profession rencontre des difficultés qu’il se-rait important d’identifier d’abord pour permettre aux enseignants de retirer encore davantage de plaisir à accomplir leur travail et ensuite pour assurer la réussite du plus grand nombre de nos élèves. Une recherche de Pierre Potvin, professeur en psychopédagogie à l’Université du Québec à Trois-Rivières, et de ses collègues Da-nielle Leclerc et Line Massé, montre le génie des enseignants pour identifier les élèves à risque (Cauchy, 2009). En fait, le jugement des enseignants, dès le début du primaire, est un des meilleurs facteurs de prédiction des risques de décrochage ou de retard scolaire des élèves 12 ans plus tard, à la fin du secondaire. L’analyse réalisée par l’équipe du professeur Potvin ré-vèle que les enseignants voient juste dans 75 à 80 % des cas! Résultat nettement supérieur à tout ce que peuvent prédire les prévisionnistes de tout acabit : météorologues, économistes et autres astrologues! Permettez-moi donc, en ce début d’année scolaire 2009-2010, de lancer tout haut un de mes vœux les plus chers : que les qualités professionnelles des enseignants du primaire soient reconnues à leur juste valeur par toute la population québécoise. Ce n’est qu’ainsi qu’un sentiment de confian-ce pourra baliser les relations entre les enseignants, les directeurs d’école, les élèves et leurs parents, et ce, dans un but de réussite pour tous! En ce sens, je vous invite chaleureusement à parcourir le volumineux dossier spécial coordonnée par Mme Marie-Claude Béliveau et publié exceptionnellement en collaboration avec les Éditions du CHU Sainte-Justine. Bonne année scolaire à tous les professionnels de l’enseignement! Références Cauchy, C. (2009). Professeurs dépisteurs de décrocheurs.

Le Devoir, vendredi 27 mai. Mukamurera, J. (2006). Le décrochage des enseignants. Il faut sonner l’alarme. Entrevue récupérée le 27 mai 2009 du site Internet :

http://education.csq.qc.net/sites/1673/documents/secteurs/entrevue_j_moukamouderas.pdf

Page 6: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

06+

07

Page 7: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Je suis convaincu que nous comprenons tous l’importance de cette compétence et que nous nous efforçons tous d’agir de façon éthique et responsable. Cependant, l’éthique fait appel au sens moral de la personne et peut donc être interprétée de façon différente selon les situations et les personnes impliquées. Ce qui n’est pas nécessairement mauvais en soi. Par contre, afin d’assurer une certaine façon d’agir, il faudrait pouvoir s’appuyer sur un ensemble de règles que l’on appelle, dans le cadre d’une profession, un code de déontologie. Avons-nous, au Québec, un tel code? Ou quelque chose s’y rapprochant? Si oui, le connaissez-vous? Nous avons la Loi sur l’instruction publique dans laquelle nous retrouvons nos obligations et nos droits ainsi qu’un Régime pédagogique et une convention collective qui régissent nos actions. À l’intérieur de ces documents, nous pouvons certainement faire res-sortir des points se rapprochant d’un code de déontologie et guidant notre éthique, mais rien de clair et précis. Lorsqu’on prend connaissance de cette compétence, on nous parle du discernement des valeurs en jeu dans nos interventions, de mettre en place un fonctionnement démocratique dans nos classes, de fournir l’accompa-gnement et l’attention appropriés aux élèves, de justifier nos décisions relatives aux apprentissages et à l’éducation des élèves, de respecter les aspects confidentiels, d’éviter toute forme de discrimination, de situer à travers les grands courants de pensée les problèmes moraux qui se posent dans nos classes et d’utiliser de ma-nière judicieuse le cadre légal et réglementaire régissant notre profession. De plus, on fait régulièrement référence à des normes partagées, mais de quelles normes parle-t-on? Je veux bien développer ma compétence à agir de façon éthique et res-ponsable, mais j’aimerais bien pouvoir me reposer sur des normes et un code de déontologie écrits, diffusés et connus... C’est pour quand? MEQ. La formation à l’enseignement, Les orientations, Les compétences professionnelles, Gouvernement du Québec, 2004. guide annuel des 500 sites Web pour réussir à l’école Grâce à un partenariat entre l’AQEP et l’Infobourg/École branchée, vous recevez gratuitement, avec ce numéro de Vivre le primaire, le Guide annuel des 500 sites Web de l’École branchée. Nous espérons qu’il vous sera utile et que vous saurez en tirer pleinement profit. C’est un outil de référence de qualité que l’AQEP est fière de vous offrir.

—congrès 2009 – mes compétences, ma professionÊtes-vous inscrit?À la fin du mois d’août, vous avez reçu, dans vos milieux respectifs, le programme officiel du prochain congrès de l’AQEP qui aura lieu les 2, 3 et 4 décembre prochain à Montréal sous le thème Mes compétences, ma profession. Il est maintenant temps de vous y inscrire si ce n’est pas déjà fait. En plus d’une variété d’ateliers de qualité qui sauront répondre aux attentes diverses des enseignantes et des enseignants, il est prévu :

une journée pré-congrès, en partena-• riat avec Brault & Bouthillier, le MELS et le Récit en informatique, offrant des ateliers d’une demi-journée ou d’une journée complète : les arts plastiques, les jeux, la robotique, la lecture pour les 4 à 7 ans, la lecture à l’écran, la progres-sion des apprentissages en grammaire et les TIC;la conférence d’ouverture par • M. François Tarrab;un atelier-dîner littéraire avec les • éditions FouLire;un cocktail où plusieurs prix seront • remis dont le prix Jacinthe agrémenté par les belles voix des Petits chanteurs de Laval et des Voix Boréales;un panel sur la professionnalisation.•

—un rendez-vous pédagogique à ne pas manquer!

—Vous pouvez télécharger le programme et vous inscrire en ligne via notre site Web.

—une nouvelle année scolaireDe nouveaux élèves, de nouveaux défis… une nouvelle année scolaire débute. Je vous souhaite une année remplie de dé-couvertes, d’aventures et d’enrichisse-ment personnel et professionnel.

[email protected] / www.aqep.org

stéphan Lenoir président de l’aqep enseignant au 3e cycle à l’école ste-Lucie, csDM [email protected]

meS comPétenceS, ma ProFeSSionAgir de façon éthique et responsable

dans l’exercice de ses fonctions. (compétence 12)

PréSentation mot Du PréSiDent

Page 8: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

DomaineS générauX De Formation

ParentS et écoLe : un Point De Vue PhiLoSoPhiQue

À défaut de résoudre les problèmes sur lesquels elle se penche, la philosophie — pas toujours, mais souvent! — permet de les mieux comprendre en mettant en évi-dence certaines difficultés qu’on ne soupçonnait pas. C’est typiquement en proposant des distinctions conceptuelles que les philosophes parviennent à ce résultat. Et c’est encore le cas quand elle se penche sur l’éducation. Prenons justement les rapports entre les parents et l’école. Je ne connais aucune enseignante, aucun enseignant qui ne sente qu’il existe bien, sinon toujours en fait, du moins en droit, une manière de tension entre eux. Mais à quoi tient-elle, précisément? Certaines distinctions que propose la philosophie de l’éducation me semblent utiles pour la cerner — et je suis curieux de savoir si vous serez d’accord avec moi. À mon sens, un point de départ bien commode pour discuter de cette question nous est fourni par Hegel (1770-1831), qui suggère qu’il est crucial de bien saisir la spécificité éthique de la sphère singulière de la société qu’est l’école. Hegel est peut-être le plus difficile à lire des philosophes. Mais je pense pouvoir rendre compréhensible ce qu’il propose ici, et qui est très éclai-rant. une sphère éthique médiane Excluons ces relations que j’appellerais électives que nous avons avec d’autres adultes — comme nos parents, nos amours ou nos amis. Typiquement, dans la société civile où nous évoluons, nous entretenons avec les

autres adultes des rapports par lesquels nous nous considérons les uns les autres selon les rôles et fonctions que nous remplissons. Les sentiments, la subjectivité, et c’est tant mieux, n’y ont guère de place. Le boulanger, par exemple, est le pourvoyeur de pain et, même si on est poli avec lui, nous n’avons au fond, avec le boulanger, de relation que marchande. Ces relations abstraites, régulées par d’indispensables nor-mes qui sont indépendantes de nous (l’argent, le prix, les usages relatifs à une transac-tion marchande, par exemple) constituent la sphère publique de nos vies.

Mais nous avons aussi, bien entendu, une vie au sein de la sphère privée, et celle-ci est bien différente de la premiè-re. Ici, les relations sont électives et les sentiments et la subjectivité y occupent une place prépondérante. La famille est le lieu par excellence de cette sphère privée et des types de relations qui s’y nouent.

—Nous sommes à présent en mesure de comprendre ce vers quoi Hegel veut at-tirer notre attention. Selon lui, en effet, l’école est pour l’enfant une sphère in-termédiaire entre la sphère publique et la sphère privée. Par l’école, l’enfant sort d’un monde où il aura été entouré de sentiment, d’amour, de confiance na-turelle. Au sein de sa famille, l’enfant, écrit Hegel, « a une valeur propre parce qu’il est l’enfant; il fait l’expérience, sans le mériter, de l’amour de ses parents, de même qu’il a à supporter leur colère, sans avoir de droits à lui opposer ». En entrant à l’école, l’enfant sort donc de ce monde, mais sans encore tout à fait en-trer dans la sphère publique. L’école, en ce sens, est une sphère intermédiaire et il s’y noue des rapports singuliers qu’on ne retrouve que là.

—Hegel explique très bien ce que cela signifie. À l’école, dit-il, « l’activité de l’enfant commence à acquérir, de façon essentielle et radicale, une significa-tion sérieuse, à savoir qu’elle n’est plus abandonnée à l’arbitraire et au hasard, au plaisir et au penchant du moment; l’enfant apprend à déterminer son agir

norManD BaiLLargeon professeur université du québec à Montréal [email protected]

08+

09

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 9: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

d’après un but et d’après des règles, il cesse de valoir à cause de sa personne immédiate, et commence de valoir sui-vant ce qu’il fait et de s’acquérir du mé-rite. Dans la famille, l’enfant doit agir comme il faut dans le sens de l’obéis-sance personnelle et de l’amour; à l’éco-le, il doit se comporter dans le sens du devoir et d’une loi, et, pour réaliser un ordre universel, simplement formel, faire telle chose et s’abstenir de telle autre chose qui pourrait bien autrement être permise à l’individu. Instruit au sein de la communauté qu’il forme avec plu-sieurs, il apprend à tenir compte d’autrui, à faire confiance à d’autres hommes qui lui sont tout d’abord étrangers et à avoir confiance en lui-même vis-à-vis d’eux, et il s’engage ici dans la formation et la pratique de vertus sociales. »

—Ces remarques éclairent ces tensions qui caractérisent certaines des relations entre l’école et les parents. Ceux-ci sentent bien ce qu’elle implique pour leur enfant, ils savent qu’il leur échappe en partie en commençant de la sorte son entrée dans

la sphère publique et que de nouvelles normes se substituent aux leurs.

—Partant de là, une question devient vite incontournable : comment justifier l’autorité par laquelle agit l’école et le fait qu’elle s’empare de la sorte des en-fants et, en un sens, les soustrait partiel-lement à l’influence de leurs parents?

—L’autorité d’enseigner : la solution modernistePour soulever cette question, il nous a fallu sortir de la tradition religieuse, qui tendait à accorder aux parents une pleine autorité sur leurs enfants. C’est avec l’avènement du libéralisme politi-que que cette autorité ne va plus de soi et doit être justifiée.

Elle le sera en faisant des parents des in-terprètes des intérêts de leurs enfants, eux dont la rationalité n’est pas encore (suffisamment) développée pour qu’ils soient en mesure de prendre des déci-sions éclairées pour eux-mêmes. Cette autorité parentale dérive donc de droits qu’ont les enfants, elle implique des de-voirs pour les parents et elle est limitée et provisoire.

—Notez cependant que l’école, dans ce contexte — du moins l’école publique et à fréquentation obligatoire — n’est ab-solument pas indispensable et bien des auteurs libéraux vont juger qu’elle n’est même pas souhaitable, parce qu’elle n’est pas la meilleure manière de garan-tir aux enfants l’éducation à laquelle ils ont droit dans le respect des droits des parents à transmettre certaines de leurs valeurs à leurs enfants.

—Mais, peu à peu, une solution va appa-raître. Elle emprunte la forme d’un fra-gile équilibre entre le droit des enfants à un avenir ouvert, le droit des parents

à transmettre des valeurs qu’ils jugent fondamentales à leurs enfants et leur devoir de leur donner une éducation et le droit de la collectivité à des citoyens éclairés. Cette solution, qui est celle de la modernité, fait de l’école un lieu de transmission de savoirs. Ce qui n’est pas savoir, et notamment la croyance re-ligieuse, n’y a pas sa place et est renvoyé à la sphère privée.

—Dans ce contexte, l’autorité de l’école et des enseignants est justifiée parce qu’impersonnelle : c’est celle que confè-re le savoir, qui trace autour de l’enfant une frontière que l’école ne franchit pas, mais où les parents, eux, peuvent aller.

—C’est ainsi qu’en notant un travail de ma-thématique ou de français, l’enseignante ne porte pas un jugement subjectif dans

le cadre d’une relation personnelle : elle porte un jugement en appliquant les normes du savoir enseigné (qui seules décident que la réponse est bonne ou non) et elle le fait de manière imperson-nelle. Ce type de relations et d’autorité préfigure, pour l’enfant, ce qu’il vivra plus tard comme citoyen — et on re-trouve ici les analyses de Hegel.

—Telle est donc la justification moderniste de l’école, de son autorité et de ses fonc-tions. Elle permet de comprendre en partie une certaine harmonie mais aussi de possibles tensions qui caractérisent les relations entre école et parents.

—L’école, dans ce modèle, est d’abord un lieu d’éducation, c’est-à-dire de forma-tion de l’esprit par la transmission de savoir. Les parents, sur ce plan, sont d’indispensables collaborateurs de l’éco-le : ils la valorisent et respectent ceux qui accomplissent cette importante tâche. L’école, lieu d’éducation, devrait être sanctuarisée, le travail des enseignantes devrait être hautement valorisé et leur autonomie professionnelle jalousement préservée contre toute intrusion, y com-pris celle des parents.

—Mais l’école est aussi un lieu de sociali-sation : et c’est surtout sur ce plan que les parents y ont leur place, dans toutes ces activités autres qu’éducatives qui s’y déroulent.

Le travail des enseignantes devrait être hautement valorisé et leur autonomie professionnelle jalousement préservée

contre toute intrusion, y compris celle des parents.

Page 10: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Il me semble pourtant que ce type de justification est aujourd’hui contesté et que quelque chose d’iné-dit apparaît dans les nouveaux rapports des parents à l’école.

—Les parents et l’école : une donne postmoderne?De nombreux penseurs suggèrent en effet que nous ne vivons plus dans ce monde de la moderni-té qui était tourné vers l’avenir, croyait au progrès, à la raison et qui valorisait par-dessus tout l’autono-mie de la pensée et l’émancipation personnelle.

—Le monde où nous serions entrés, suggèrent ces penseurs, est postmoderne : il est centré sur le pré-sent, ne croit plus à ces vieilles catégories moder-nistes et n’est soucieux que d’efficacité pratique, de succès et de performance. L’économie et la rentabi-lité y occupent la place centrale.

—Dans un tel monde, si nous y sommes bien, les parents seraient des consommateurs d’école. Ils y verraient un investissement pour leur enfant, un instrument permettant leur ascension sociale et un garant de leur future performativité.

—Cet investissement devrait bien entendu être renta-ble et, en tant que clients, les parents estimeraient avoir des droits qu’ils seront déterminés à faire va-loir. Ils magasineraient ce produit et surveilleraient de près leur investissement. Les vieilles valeurs sur lesquelles reposait la légitimité de l’école ne sem-bleraient plus crédibles à de tels consommateurs et là où le savoir, par exemple, était une fin, il devien-drait un simple moyen — vers le succès économi-que. Gare à l’enseignante ou à l’enseignant qui y ferait obstacle.

—Les parents s’orienteraient alors vers des écoles jugées plus performantes; ou encore, récusant la prétention de la société à imposer quoi que ce soit à leurs enfants, ils refuseraient radicalement l’idée même d’école et choisiraient de les éduquer à la maison.

—Il me semble, mais je peux me tromper, qu’il y a quel-que chose de juste dans ce portrait qui caractérise certains aspects des actuelles relations école-parents.

—Et si j’ai raison, c’est profondément triste et ce doit être très difficile à vivre pour ceux qui font l’école!

10+1

1

Collection Alizé Maintenant offerte

chez

Consulteznotre siteWeb

8464

b

8464b_pub_vivreleprimaire_alize.qxd 02/02/09 14:33 Page

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 11: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

www.dominiqueetcompagnie.com

niveau

SOURIS ROUGE

niveau

SOURIS VERTE

À pas de souris verte : je lis de 100 à 150 mots.

À pas de souris rouge : je lis jusqu’à 100 mots.

Pour recevoir notre nouveau catalogue de lecture : [email protected]

À PAS DE SOURIS avec liens Internet

DC_Pub_VivrePrimaire.indd 1 07/07/09 12:11 PM

Page 12: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

DomaineS générauX De Formation

Jusqu’à tout récemment, les mathématiques étaient généralement conçues comme une discipline qui convient mieux aux garçons qu’aux filles (Chatard, Gui-mond et Selimbegovic, 2007; Guimond et Roussel, 2001). Or, les résultats d’une étude que nous avons menée auprès d’élèves du primaire et du secondaire québé-cois (voir Plante, Théorêt et Favreau, soumis), ont montré que ces stéréotypes sem-blent s’être modifiés au cours des dernières années. En effet, les stéréotypes traditionnels qui favorisent les garçons en mathématiques tendent à laisser place à des stéréotypes inverses, qui véhiculent que les mathématiques consistent en un domaine plus féminin que masculin. Par ailleurs, bien que peu d’études empiri-ques aient été menées à cet effet, un autre stéréotype largement répandu dans les milieux scolaires stipule que les langues conviennent davantage aux filles qu’aux garçons. Notre étude a d’ailleurs confirmé que les élèves québécois entretiennent fortement la croyance selon laquelle le français est une discipline à caractère plus féminin que masculin (voir Plante et al., soumis). L’interprétation de nos résultats En somme, les élèves québécois tendent à croire que les mathématiques et le

français, les deux matières de base du système scolaire, conviennent mieux aux filles qu’aux garçons. Bien que notre étude n’ait pas permis de vérifier cette hypo-thèse, il est possible de croire que ces résultats reflètent la tendance des élèves à concevoir que l’école, de manière générale, convient davantage aux filles qu’aux garçons. En outre, de récentes statistiques indiquent que les garçons sont beau-coup plus nombreux que les filles à abandonner l’école avant d’avoir obtenu leur diplôme d’études secondaires et qu’ils sont moins enclins que les filles à entre-prendre des études universitaires (Ministère de l’Éducation, du Loisir et des Sports (MELS), 2008). Les stéréotypes de genre en faveur des filles que les élèves entre-

tiennent viendraient donc perpétuer l’idée selon laquelle les filles sont plus aptes à réussir dans les différentes ma-tières scolaires, dont font partie les ma-thématiques et le français.

—comment les enseignants peuvent-ils in-tervenir sur les stéréotypes des élèves? À la lumière de nos résultats, l’interven-tion visant à réduire la portée négative des stéréotypes de genre sur la réussite des élèves, et plus particulièrement celle des garçons en français, où les stéréoty-pes favorisant les filles sont particuliè-rement saillants, apparaît primordiale. Pour ce faire, nous proposons trois sug-gestions destinées aux enseignants.

—1 Démystifier les stéréotypes de genre à l’égard des matières scolaires Les enseignants sont parmi les agents sociaux que les élèves côtoient le plus et, surtout au primaire, ils exercent une influence accrue sur eux (Aronson et Steele, 2005). Ainsi, le fait de mention-ner ouvertement aux élèves que les dif-férentes matières scolaires conviennent, à priori, tout aussi bien aux garçons qu’aux filles, peut contribuer à réduire les conceptions stéréotypées que les élèves entretiennent. Parallèlement, les enseignants peuvent intervenir sur les conceptions des élèves à propos de la réussite scolaire, en les incitant no-tamment à attribuer leurs succès à des sources internes sur lesquelles ils exer-cent du contrôle, telles l’effort ou des stratégies d’apprentissage efficaces, plu-

réDuire La Portée négatiVe DeS StéréotyPeS De genre en mathématiQueS et en FrançaiS : DeS PiSteS D’interVention DeStinéeS auX enSeignantS

isaBeLLe pLante Doctorante et chargée de cours université de Montréal [email protected]

12+1

3a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 13: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

tôt qu’à des sources externes incontrô-lables, telles le sexe ou la direction des stéréotypes répandus. En outre, l’attri-bution du succès à une source interne et contrôlable est reconnue lorsqu’il s’agit de favoriser l’engagement et la persé-vérance scolaires et mener au succès (Stipek, 2002).

—2 Valoriser le français aux yeux des garçonsConsidérant la nature transversale du français (MELS, 2006), d’une part, et la force des stéréotypes en faveur des filles en français que les élèves entretien-nent, d’autre part, il apparaît primordial d’amener les garçons à valoriser davan-tage le français. Pour ce faire, leur faire voir le sens et l’utilité des apprentissages réalisés en français constitue une avenue

pertinente. Ainsi, un enseignant pour-rait amener les élèves à identifier en quoi le français occupe une place importante dans une multitude de métiers, même lorsqu’ils sont en apparence peu liés au français. Par exemple, malgré le fait que les élèves puissent douter de l’utilité du français pour un mécanicien, les ame-ner à constater qu’un mécanicien sera amené à formuler par écrit des recom-mandations à ses clients ou à lire des documents en vue de mieux compren-dre le fonctionnement de certaines com-posantes mécaniques est susceptible de susciter leur engagement dans les tâches scolaires relatives au français.

—Une seconde piste d’intervention suscep-tible de solliciter l’engagement des gar-çons en français consiste à leur présenter différents modèles masculins œuvrant dans des disciplines liées au français. En outre, malgré la force des stéréotypes de genre favorisant les filles en français, la représentation masculine dans divers corps de métier qui sont directement en lien avec le français, tels le journalisme

ou les auteurs de bandes dessinées, est incontestablement opportune.

—3 Faire prendre conscience aux élèves de leurs intérêts scolaires personnelsChaque individu possède des forces et des limites, de même que des intérêts personnels. Afin de favoriser le déve-loppement du plein potentiel de chaque élève, les enseignants peuvent donc en-courager les élèves à prendre conscience des matières dans lesquelles ils ont plus de facilité et de leurs matières préfé-rées. Une telle prise de conscience est susceptible de réduire la portée poten-tiellement négative des stéréotypes de genre à l’égard des matières scolaires en amenant les élèves à se détacher des conceptions sociales stéréotypées. En effet, peu importe que des stéréotypes

de genre véhiculent que les filles ou les garçons sont favorisés en français et en mathématiques, l’impact de ces croyan-ces sur le comportement des élèves ris-que d’être considérablement réduit si les élèves ne s’en servent pas comme base pour effectuer leur choix de carrière ou pour évaluer leur potentiel à l’égard de ces matières scolaires.

—conclusionEn résumé, nos recherches nous ont permis de constater que les élèves du primaire et du secondaire entretiennent généralement des stéréotypes qui favori-sent les filles en français comme en ma-thématiques. Les suggestions proposées dans le cadre de cet article sont à même de procurer aux enseignants des pistes d’intervention en vue d’en modérer la portée négative sur la réussite scolaire. L’intervention afin de limiter l’impact négatif des stéréotypes de genre à l’école pourrait contribuer à réduire l’écart de réussite scolaire entre les garçons et les filles et ainsi favoriser la réussite de tous les élèves.

référencesAronson, J. & Steele, C. M. (2005). Stereoty-•

pes and the fragility of academic competence,

motivation and self-concept. In : Elliot, A. J. &

Dweck, C. S. (Eds.) Handbook of competence and

motivation (pp. 436-456). New York : Guilford.

Chatard, A., Guimond, S. & Selimbegovic, L. •

(2007). “How good are you in math?” The effect

of gender stereotypes on students’ recollection of

their school marks. Journal of Experimental Social

Psychology, 43, 1017-1024.

Guimond, S. & Roussell, L. (2001). Bragging •

about one’s school grades : gender stereotyp-

ing and student’s perception of their abilities

in science, mathematics, and language. Social

Psychology of Education, 4, 275-293.

Ministère de l’Éducation, du Loisir et des Sports •

(2008). Indicateurs de l’éducation – Édition 2008.

Québec : Gouvernement du Québec.

Ministère de l’Éducation du Québec (2006). •

Programme de formation à l’école québécoise.

Québec : Gouvernement du Québec.

Plante, I., Théorêt, M. et Favreau, E. O. (soumis). •

Students’ gender stereotypes : Contrasting the

perceived maleness and femaleness of mathemat-

ics and language. Educational Psychology.

Stipek, D. J. (2002). • Motivation to learn : integrating

theory and practice. Boston, MA : Allyn and Bacon.

Les stéréotypes traditionnels qui favorisent les garçons en mathématiques tendent à laisser place à des stéréotypes

inverses, qui véhiculent que les mathématiques consistent en un domaine plus féminin que masculin.

Page 14: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

14+1

5

Page 15: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

DomaineS générauX De Formation

Le Jugement ProFeSSionneL DanS LeS DéciSionS D’orientation : DiFFérencier LeS reLationS aVec LeS FamiLLeS Pour une PLuS granDe éQuitéLe 6e degré est une étape importante du cursus scolaire de l’élève à Genève, car il marque la fin de l’école primaire et du tronc commun. Les classes hétérogènes laissent ensuite la place à des filières pour les trois années du secondaire inférieur. Ce système de gestion des parcours scolaires à sélection précoce s’apparente au modèle de la « séparation » défini par Mons (2004), même si des passages sont possibles d’une filière à l’autre. Les résultats de notre recherche indiquent claire-ment que dans les pratiques d’évaluation des enseignants de ce degré, les fonctions sommative et pronostique ne se succèdent pas dans le temps, comme c’est le plus souvent le cas dans les degrés précédents, mais se confondent dès le second trimes-tre (Tessaro et Favre Marmet, 2008). Ainsi, le processus d’orientation, long et com-plexe, amène souvent à influencer la note certificative dans le livret scolaire en cours d’année. Le message que l’enseignant adresse alors à l’élève et à ses parents ne concerne pas que l’atteinte des objectifs, mais il met également en perspective l’avenir scolaire de celui-ci. L’orientation envisagée par l’enseignant influence ainsi, parfois, la décision de l’appréciation à inscrire dans le bulletin scolaire, car la consé-quence d’une note insuffisante peut être irrémédiable : confirmer un redouble-ment envisagé ou empêcher l’entrée dans une filière prégymnasiale. Assez rapidement dans l’année, l’enseignant tente donc de pronostiquer au plus juste dans quelle mesure l’enfant sera apte à suivre l’enseignement dans une filière don-née (Crahay, 2003). Afin que la décision d’orientation prenne en compte le mieux possible les caractéristiques et les besoins des élèves, les enseignants interrogés ont relevé l’importance de la colla-boration entre partenaires concer-nés. La négociation qui se met en place représente une singularité du processus d’orientation, mais c’est aussi ce qui rend celui-ci com-plexe. En effet, reconnaître les pa-rents et les élèves eux-mêmes comme interlocuteurs n’est pas chose aisée. Parmi les difficultés, nous mentionnerons l’asymétrie des relations et du pouvoir, la di-versité des attentes, des représentations et des attitudes des uns et des autres. Comme le souligne Dubet (1997), rares sont les familles qui se trouvent à bonne distance dans leurs relations avec l’école. Si l’école influence, de façon souvent envahissante, la vie quotidienne des familles, elle se doit de rendre compte de ce qui s’y fait. Cependant, les parents ne sont pas tous égaux face à l’institution

scolaire : ils n’en ont pas les mêmes connaissances, ils ne manifestent pas les mêmes attentes, ils n’ont pas la même capacité à influencer le cours des événements. Leurs manières d’établir des contacts avec les enseignants et de suivre le travail scolaire de leur enfant témoignent de leur degré d’implication; les expériences antérieures (en tant qu’élèves ou que parents) construisent leur image de l’école (Jaeggi & Osiek, 2003). Leurs ambitions sont parfois plus modestes que celles de l’enseignant et témoignent d’une part de résignation. Pour ceux qui ont connu eux-mêmes des difficultés scolaires, une orientation de leur enfant dans une filière non pré-gymnasiale semble inéluctable. À la suite des rencontres avec l’enseignant, ils peuvent être cependant amenés à en-visager un avenir plus valorisant.

WaLther tessaro - chargé d’enseignement, université de genève, [email protected] MicheL enright - conseiller pédagogique, commission scolaire des Draveurs, [email protected] eDith WegMuLLer - chargée d’enseignement, université de genève, [email protected] Favre MarMet - Formatrice, centre de formation de l’enseignement primaire, [email protected] BeLLehuMeur - conseillère pédagogique, cégep de l’outaouais, [email protected] Louise LaFortune - professeure, Département des sciences de l’éducation, uqtr, [email protected]

Face à la logique d’orientation de l’école, et donc des processus d’évaluation et de sélection, les enfants développent différentes

attitudes (Montandon et Osiek, 1997), qui peuvent se manifester par des

stratégies plus ou moins rationnelles, plus ou moins cohérentes ou

conscientes (Perrenoud, 1987).

Page 16: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Le souci d’équité qui préoccupe les po-litiques éducatives des pays développés devrait se manifester plus particulière-ment dans ces moments déterminants du curriculum scolaire.

—Lors de la première orientation dans une filière, une relation différenciée avec les familles semble ainsi nécessaire.Offrir, à ceux qui en ont besoin, plus de soutien, de conseils, d’informations pour un choix plus réfléchi peut être du ressort de l’enseignant. Mais il peut aussi s’agir d’une personne externe à la classe, concrétisant alors une discri-mination positive souvent réalisée sur d’autres plans. Une mesure de ce type s’inscrirait dans la lutte contre les inéga-lités face à l’école et contribuerait à une société plus solidaire.

—Car seule une partie des parents possède une bonne connaissance du système édu-catif, un atout pourtant indéniable pour le choix d’un cursus adapté aux caracté-ristiques de l’enfant (Van Zanten, 2001).

—Cet avantage va être utilisé par certains pour maintenir, voire améliorer leur position de classe (Berthelot, 1983). Les stratégies utilisées par les parents peuvent être diverses : convaincre leur enfant de choisir une option (le latin), clarifier leur projet très tôt auprès de l’enseignant et/ou du directeur d’éta-blissement, demander le cas échéant une dérogation lors de l’inscription. Uti-liser au mieux les possibilités offertes par le système scolaire peut aller jusqu’à placer l’enfant dans une école privée, ne serait-ce que temporairement.

De façon rassurante, les enseignants de notre échantillon ne semblent pas se si-tuer dans une position d’autorité face aux familles (Hadji, 1997) mais tentent d’as-socier les autres acteurs à leurs réflexions et à leurs doutes. Leur statut et leur ex-pertise concernant l’avenir des élèves, basée notamment sur les orientations des années précédentes et la connais-sance du contexte scolaire du secondaire inférieur, pourraient en effet aboutir à une position « haute » face aux parents. Ils tentent au contraire de proposer la structure la plus adéquate pour chaque élève. Les informations récoltées à ce pro-pos ne se limitent pas aux compétences cognitives : les personnes interrogées ont souligné l’importance du comportement de l’élève, de son âge et de son autono-mie dans la prise de décision.

—La communication entre les ensei-gnants et les familles reste cependant encore fragile et il est nécessaire de continuer à l’explorer. Face à la logique d’orientation de l’école, et donc des processus d’évaluation et de sélection, les enfants développent diffé-rentes attitudes (Montandon et Osiek, 1997), qui peuvent se manifester par des stratégies plus ou moins ration-nelles, plus ou moins cohérentes ou conscientes (Perrenoud, 1987).

—En fin de scolarité primaire, l’avis d’orientation des familles est parfois demandé par l’intermédiaire de l’élève. Cette communication indirecte peut pro-fiter à l’élève, puisqu’il a l’occasion non seulement d’exercer un contrôle sur la transmission de l’information, mais aussi d’en modifier le sens, notam-ment lorsque la demande est formulée

oralement (Tessaro, 2002). N’est-il pas l’unique facteur à transporter essentiel-lement une correspondance le concer-nant (Sieber, 1994)? L’implication de l’élève dans une démarche pronostique concernant son propre cursus scolaire peut sembler évidente aujourd’hui, mais elle est encore timide dans les pra-tiques. La réflexion à ce sujet doit être poursuivie, car l’enjeu est important.

—références

Berthelot, J.-M. (1983). • Le piège scolaire.

Paris : Presses universitaires de France.

Crahay, M. (2003). • Peut-on lutter contre l’échec

scolaire? Bruxelles, De Bœck.

Dubet, F. (1997). • École, familles : le malentendu.

Paris : Textuel.

Hadji, C. (1997). • L’évaluation démystifiée.

Paris : ESF.

Jaeggi, M. et Osiek, F. (2003). • Familles, école et

quartier. De la solitude au sens : échec ou réussite

scolaire d’enfants de milieu populaire.

Genève : SRED.

Mons, N. (2004). • De l’école unifiée aux écoles

plurielles. Évaluation internationale des politiques

de différenciation et de diversification de l’offre

éducative. Thèse de doctorat, Université de

Bourgogne.

Montandon, C. et Osiek, F. (1997)• . La socialisa-

tion à l’école du point de vue des enfants.

Revue française de pédagogie, 118, 43-51.

Perrenoud, P. (1987a)• . Le go-between : entre sa

famille et l’école, l’enfant messager et message.

In C. Montandon et P. Perrenoud (Éd.), Entre

parents et enseignants : un dialogue impossible?

(pp. 49-87). Berne : Peter Lang.

Sieber, M. (1994). La naissance de la zizanie. •

L’écolier et le petit facteur. L’éducateur, 1, 62-63.

Tessaro, W. (2004). L’élève acteur des relations •

famille-école : stratégies de transmission des

messages. Revue suisse des sciences de l’éducation,

2, 327-341.

Tessaro, W. et Favre Marmet, A. (2008). Envisa-•

ger l’avenir de l’élève : le jugement professionnel

dans les décisions d’orientation et de promotion.

In L. Allal et L. Lafortune (Éds.), Jugement pro-

fessionnel en évaluation : pratiques enseignantes au

Québec et à Genève (pp. 203-221). Québec : PUQ.

Van Zanten, A. (2001). • L’école de la périphérie.

Scolarité et ségrégation en banlieue. Paris : PUF.

16+1

7a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 17: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 18: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

DomaineS générauX De Formation

un vent de professionnalisation souffle actuellement sur l’enseignement. Ce phénomène n’est sans doute pas sans lien avec la reconnaissance de la complexité de la tâche enseignante et de l’amplification des attentes formulées envers l’école. Pour répondre aux exigences et relever les défis auxquels ils font face, les ensei-gnants doivent de plus en plus faire preuve de nombreuses compétences profes-sionnelles. Plus précisément, on attend de l’enseignant professionnel qu’il démontre une certaine expertise, s’exprimant par des compétences et des savoirs particuliers, qu’il soit apte à analyser des situations complexes et qu’il s’adapte à divers contextes, par un exercice responsable et autonome de la profession (Gohier, Bednarz, Gaudreau, Pallascio & Parent, 1999; Paquay, Altet, Charlier & Perrenoud, 1996). Pour le Conseil supérieur de l’éducation (2004, p. 62) et selon la Loi sur l’instruction publique, il revient également au personnel enseignant « de prendre des mesures appropriées qui lui permettent d’atteindre et de conserver un haut degré de compétence professionnelle ». « S’engager dans une démarche indivi-duelle et collective de développement professionnel » (Ministère de l’Éducation du Québec (MEQ), 2001), oui, mais comment et pourquoi? Par la réflexion sur la pratique? Les écrits sur le développement professionnel abondent, de même que les moyens privilégiés pour ce faire. Par ailleurs, certains éléments sont souvent mis en évidence. Par exemple, plusieurs auteurs, dont Perrenoud (1999), considè-

rent la réflexion comme un aspect essentiel au développement profes-sionnel. Altet (1994) va même jusqu’à l’associer à une métacompétence

favorisant le développement d’autres compétences professionnelles. Pour le MEQ (2001), la réflexion est une des composantes constitutives de la compétence de développement professionnel. Toutefois, cette réflexion dépasse l’activité mentale spontanée et les échanges d’idées généralement associés à toute activité dite pro-fessionnelle. Il s’agit plutôt de « réfléchir avec méthode, […] se donner un cadre, une démarche, des outils et des moyens pour cibler les objets de sa réflexion, choi-sir l’information pertinente et évaluer, selon des indicateurs repérables, les motifs et les effets de ses actions » (MEQ, 2001, p.127). Étant justement à la recherche d’un cadre pour la réflexion des enseignants, je me suis intéressée aux modèles de Korthagen (1985; 2004). Celui-ci décrit deux modèles de réflexion employés dans la formation à l’enseignement aux Pays-Bas. Il est tout d’abord question d’un mo-dèle de processus de réflexion, le modèle ALACT. Suivant ce modèle (figure 1), la réflexion de l’enseignant est structurée en cinq étapes : l’action, le retour sur l’ac-tion, l’identification du problème, la recherche de solutions et le jugement critique. Dans une perspective cyclique, la dernière phase permettrait le retour à l’action

(phase 1). Ainsi, la pratique réelle de l’enseignant constitue le point de départ de sa réflexion, mais ce dernier peut aussi se servir de la théorie pour éclairer les différentes étapes du processus, que ce soit pour mieux comprendre le pro-blème, pour trouver des pistes de solu-tions ou pour évaluer la pertinence et les conséquences de ces diverses op-tions. Puis, l’auteur décrit également un modèle de contenus de réflexion, soit le modèle des niveaux de changement.

—Ici, (voir figure 2) les préoccupations des enseignants peuvent toucher différents aspects de leur pratique, qu’il s’agisse d’éléments externes comme l’environ-nement, du contexte d’enseignement (les élèves, les ressources disponibles et autres), ou d’éléments internes comme leurs comportements, leurs compéten-ces, leurs croyances, etc.

Le DéVeLoPPement ProFeSSionneL De L’enSeignant : Par La réFLeXion et Pour La réSiLience?

MyLène Leroux étudiante au doctorat en psychopédagogie et chargée de cours université de Montréal [email protected]

18+1

9

Pour le MEQ (2001), la réflexion est une des composantes constitutives de la

compétence de développement professionnel.

Figure 1 : modèle aLact de réflexion sur la pratique Adapté de Korthagen (2004)

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 19: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

L’utilisation de tels modèles pourrait permettre aux enseignants de réfléchir à leur pratique de manière plus systé-matique. Bien que cette réflexion sur la pratique ne soit pas suffisante pour assurer à elle seule le développement des compétences professionnelles, elle peut, à tout le moins, servir de point de départ. Maintenant, même si nous savons que le développement profes-sionnel peut être favorisé par certains moyens, il convient de nous interroger également sur ses bénéfices potentiels.

—Pour développer sa résilience professionnelle?Qu’est-ce que la résilience? Générale-ment, on définit la résilience à partir de deux conditions essentielles: 1 une exposition à un contexte d’adversité re-présentant un stress significatif; 2 une adaptation positive s’exprimant par un certain développement, malgré les ris-ques encourus et les obstacles présents (Théorêt, 2005). Dans plusieurs études, l’enseignement est perçu comme une profession stressante (Kyriacou, 2001), particulièrement en milieux défavori-sés. Malgré cela, la plupart des ensei-gnants persévèrent dans la profession et certains trouvent même le moyen de se développer au plan professionnel; ce type d’adaptation positive s’apparente au concept de résilience.

—Quelques études portant sur la résilien-ce des enseignants établissent des liens avec les compétences professionnelles de ceux-ci. Par exemple, une recher-

che de Théorêt et de ses collaborateurs (2003) menée au Québec et une étude réalisée en Australie par Howard et Jo-hnson (2004) ont mis en évidence l’im-portance des habiletés et compétences professionnelles dans les propos d’en-seignants jugés résilients.

—Par conséquent, si les compétences pro-fessionnelles se révèlent importantes quant à la résilience et que la réflexion sur la pratique semble contribuer au dévelop-pement de celles-ci, nous nous sommes demandé si certaines relations pouvaient être établies entre résilience et réflexion.

—existe-t-il des liens entre la résilience et la réflexion des enseignants?Une recherche doctorale a été menée à la CSDM au cours de l’année scolaire 2006-2007, auprès d’une vingtaine d’enseignants du primaire œuvrant en milieux défavorisés. Cette étude avait justement pour but d’explorer les rela-tions potentielles entre la résilience et la réflexion sur la pratique, considérée comme fondamentale pour le dévelop-pement des compétences professionnel-les de l’enseignant.

—Des analyses préliminaires ont déjà per-mis de mettre à jour différents profils de résilience chez les enseignants et de dé-gager certaines distinctions au point de vue de leur réflexion. En effet, en com-parant deux enseignantes dont les pro-fils de résilience sont opposés (personne faisant preuve de beaucoup de résilien-ce et personne ne faisant pas preuve de résilience), il est possible d’observer des différences en ce qui concerne le processus et les contenus de réflexion (Figures 1 et 2). D’abord, l’enseignante non résiliente se concentre beaucoup plus sur les problèmes et obstacles que sur les solutions ou stratégies pour les résoudre. Aussi, comparativement à sa collègue plus résiliente, l’enseignante ne faisant pas preuve de résilience parle beaucoup plus d’éléments environne-mentaux (élèves, ressources, direction, collègues, etc.) que personnels (com-portements, compétences, croyances, etc.). Ces divergences pourraient-elles permettre d’établir des liens entre rési-lience et réflexion?

À ce jour, il est encore impossible de tirer des conclusions spécifiques, puisque l’analyse des résultats de notre recherche doit être complétée et que cette étude est exploratoire. Néanmoins, nous pourrons sans doute en dégager des pistes de ré-flexion pour favoriser le développement professionnel et le développement de la résilience des enseignants du primaire, particulièrement ceux qui œuvrent en milieux défavorisés. De même, des re-cherches ultérieures permettront certai-nement d’ouvrir une voie à des pratiques innovantes pour la formation initiale et continue des enseignants. Il s’agit donc d’un dossier à suivre.

—références

Altet, M. (1994). • La formation professionnelle des ensei-

gnants. Paris : Presses Universitaires de France.

Conseil supérieur de l’éducation (CSE). (2004). • Un

souffle nouveau pour la profession enseignante : avis au

ministre de l’Éducation. Québec : CSE.

Gohier, C., Bednarz, N., Gaudreau, L., Pallascio, R. •

et Parent, G. (1999). L’enseignant, un professionnel.

Québec : Presses de l’Université du Québec.

Howard, S. & Johnson, B. (2004). Resilient •

Teachers : Resisting to Stress and Burnout. Social

Psychology of Education, 7, 399-420.

Korthagen, F. A. J. (1985). Reflective Teaching and •

Preservice Teacher Education in the Netherlands.

Journal of Teacher Education, 36(5), 11-15.

Korthagen, F. A. J. (2004). In Search of the Es-•

sence of a Good Teacher : Towards a More Holistic

Approach in Teacher Education. Teaching and

Teacher Education, 20, 77-97.

Kyriacou, C. (2001). Teacher Stress : Directions for •

Future Research. Educational Review, 53(1), 27-35.

Ministère de l’Éducation du Québec (MEQ), •

(2001). Programme de formation à l’enseignement :

les orientations, les compétences professionnelles.

Québec : Bibliothèque nationale du Québec.

Paquay, L., Altet, M., Charlier, É. et Perrenoud, P. •

(1996). Former des enseignants professionnels : Quelles

stratégies? Quelles compétences? Paris, Bruxelles :

De Bœck et Larcier.

Perrenoud, P. (1999). • Dix nouvelles compétences

pour enseigner. Paris : Éditions ESF.

Théorêt, M. (2005). La résilience, de l’observation du •

phénomène vers l’appropriation du concept par l’édu-

cation. Revue des sciences de l’éducation, 31(3), 633-658.

Théorêt, M., Hrimech, M., Garon, R. et Carpen-•

tier, A. (2003). La résilience scolaire : Étude menée

par l’Université de Montréal pour le Conseil scolaire

de l’Île de Montréal (2002-2003). Montréal : Univer-

sité de Montréal.

Figure 2 : modèle des niveaux de changement Adapté de Korthagen (2004)

Page 20: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

uniVerS SociaL

Du caSSe-tÊte À La Pâte À moDeLer ou comment PLaniFier L’uniVerS SociaL en cLaSSe muLtiProgramme

chantaL Déry professeure de didactique université du québec en outaouais Département des sciences de l’éducation

Pour certains, enseigner à une classe multiprogramme est un plaisir qu’ils choisis-sent de renouveler chaque année. Pour d’autres, c’est une situation nouvelle, une sur-prise, qui arrive tardivement en août quand une classe leur est attribuée. Dans certaines écoles, les classes multiprogrammes font partie de la structure depuis longtemps alors que dans d’autres écoles, c’est une baisse de la population scolaire qui mène à leur création. S’il n’y a pas de profil unique pour la classe multiprogramme, une chose est sûre : dans chacune de ces classes, il faudra amener les élèves à développer leurs com-pétences du domaine de l’univers social et, idéalement, tirer avantage de la cohabita-tion d’élèves de différentes classes. Mais comment le faire sans que cela devienne un casse-tête? Comment, avec un programme de Géographie, histoire et éducation à la citoyenneté (GHEC) qui est structuré selon une approche chronologique, planifier une année en univers social pour une classe multiprogramme? Il y a deux ans, j’ai accompagné une enseignante qui avait une classe d’élèves de 3e et 4e années. J’ai alors commencé à m’intéresser à la planification de l’enseignement en univers social dans ce contexte particulier. En tant que didacticienne des sciences humaines, je voyais là un défi intéressant à relever. Je me suis donc mise à faire de la « pâte à modeler » et à manipuler le programme de GHEC de manière à lui donner une forme qui convien-ne bien à la réalité d’une classe de 3e et 4e années. Mon objectif, dans cet article, est donc de présenter quelques pistes pour aider ceux et celles qui ont à préparer une planification annuelle en univers social dans leur classe multiprogramme. Par où commencer? Il faut d’abord mentionner que les pistes que je propose partent du principe que l’élève ne restera peut-être qu’une seule année dans la classe multipro-gramme. Par conséquent, j’ai maintenu une distinction entre les activités proposées aux élèves de chaque groupe dans la classe. A priori, cette approche n’est pas souhai-table, mais dans une réalité où beaucoup de classes multiprogrammes sont crées de façon temporaire, cela me semblait nécessaire. Piste 1 – Envisager autrement la chro-nologie Enseigner le programme de GHEC à une classe multiprogramme, c’est d’abord accepter de se distancier de l’approche chronologique « traditionnelle ». En effet, cette approche peut vite devenir un casse-tête si on tient mordicus à ce que nos élèves de 5e année (dans une classe multiprogramme 5e et 6e années) abordent la société canadienne vers 1820 avant de parler de la société québécoise vers 1905.

De plus, il ne faut pas s’obliger à traiter une société en compétence 1 (C1-Lire l’organisation d’une société sur son terri-toire) avec les élèves avant de la traiter en compétence 2 (C2-Interpréter le change-ment d’une société sur son territoire). Je m’explique : afin d’amener les élèves à voir les changements de la société qué-bécoise entre 1905 et 1980 (C2), il est possible, et c’est souvent l’approche la plus utilisée, d’étudier d’abord la société québécoise de 1905 en C1, puis la société québécoise de 1980 en C1 aussi, pour fi-nalement découvrir celle de 1905-1980 en C2. Schématiquement, cette appro-che peut être représentée ainsi :

—Schéma 1

—Toutefois, il est possible d’aborder la chronologie et le changement autre-ment. Par exemple, les élèves pourraient s’intéresser au Québec de 1905 en C1, puis se questionner sur ce que va deve-nir le Québec 75 ans plus tard. Ils peu-vent alors émettre des hypothèses sur ce qui, selon eux, a pu changer et leur tra-vail consiste alors à se documenter pour valider ou invalider leurs hypothèses et, en bout de ligne, être en mesure d’éta-blir quels changements ont eu lieu entre 1905 et 1980. Cette approche pourrait se traduire par le schéma suivant :

20+2

1a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 21: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Schéma 2

—Une troisième option est de faire cette même démarche, mais à l’inverse. Le point de départ est 1980 et les élèves doi-vent se documenter afin de voir à quoi ressemblait la vie 75 ans plus tôt. C’est une démarche à rebours qui répond à la question : « C’était comment avant? » Il y a là une troisième manière de manipu-ler la C2 qui peut être illustrée ainsi :

—Schéma 3

—Toutes ces façons de traiter la C2 respec-tent la logique du changement et celle

de la continuité qui sont liées à la C2 du programme. J’ai simplement manipulé la C2 comme si c’était une belle boule de pâte à modeler de manière à lui don-ner des formes différentes.

—Piste 2 – Utiliser une approche thématiqueSi l’on décide de ne pas faire de l’appro-che chronologique « traditionnelle » le premier principe organisateur de notre enseignement en univers social, il reste à déterminer par quoi la remplacer? Une des possibilités repose sur l’appro-che thématique. En ciblant un thème sur lequel l’ensemble des élèves vont travailler, il est possible de proposer une situation-problème qui ait du sens pour tous les élèves et dont chaque groupe explore un aspect particulier.

—Ainsi, dans une classe de 3e et 4e années, il serait facile d’organiser des moments en plénière dont le thème principal se-rait : la Nouvelle-France. À partir de ce thème commun, on pourrait question-ner les élèves sur ce qu’était la Nouvelle-France à ses débuts et sur son évolution. Les élèves de 3e année devraient alors voir comment la Nouvelle-France s’or-

ganisait en 1645 (C1) tandis que ceux de 4e année devraient se documenter à propos de son évolution entre 1645 et 1745 (C2). Et tout cela ferait partie d’un projet de classe commun. En fonction-nant ainsi, la gestion de la classe est plus facile et il est envisageable de prévoir une présentation commune pour tous les élèves, ce qui ajouterait du sens au travail de tous.

—Piste 3 – Cibler la même compétence pour tous les élèvesUne troisième piste consiste à cibler une seule compétence, mais en la mettant en pratique dans des époques et des contex-tes différents. Dans une classe, cela signifierait que, pour tous les élèves tra-vaillant la même compétence, les outils de collecte et d’organisation des données seraient les mêmes. Il serait donc facile de prendre des moments en plénière pour expliquer la compétence aux élèves ou pour les guider dans leur recherche.

—Imaginons une classe de 4e et 5e années dans laquelle les élèves viennent d’ap-profondir un moment de l’histoire du Québec en C1. Il s’agit alors d’évaluer si ce qu’ils ont appris à propos du Québec

Page 22: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

leur mandat propre. Une fois ce travail en parallèle terminé, il serait possible d’établir le portrait de la Nouvelle-France de sa naissance à sa « mort ».

—La deuxième étape se poursuit dans la lignée de ce qui a été réalisé à l’étape 1. Il s’agit cette fois de dresser le portrait de la Nouvelle-France à l’âge adulte, soit en 1745 pour les élèves de 4e année, et celui de l’après Nouvelle-France pour ceux de 5e année, soit en 1820. Certes, tous les élèves ne travailleront pas sur les mêmes contenus, mais il y aura une uniformité quant à la compétence à l’étude (C1). Il sera donc possible de réserver des moments en plénière où il pourra être question de la façon d’apprendre à bien lire une société sur son territoire. Il se-rait aussi possible de jumeler les projets des étapes 1 et 2 pour en faire un seul, de plus grande envergure.

—Pour la troisième étape, le projet cible la thématique du milieu urbain et du mi-lieu rural que l’on retrouve à la fois aux 2e et 3e cycles. Pour amorcer ce projet, il

Pour le premier projet, l’idée est de par-tir d’un thème commun. Ici, j’ai ciblé la Nouvelle-France parce que tant les élè-ves de 4e que ceux de 5e années doivent aborder ce thème dans leur programme. À partir du questionnement initial, il serait possible d’estimer la quantité de connaissances que les élèves de 5e année ont retenues de ce qu’ils ont étudié l’an-née précédente, ce qui permettrait aussi aux élèves de 4e année de vérifier ce qu’ils connaissent déjà à propos de la Nouvel-le-France, et ce, avant même d’aborder officiellement ce thème. Lors de cette mise en situation, il y aurait aussi la pos-sibilité de travailler avec une ligne du temps au tableau et d’y inscrire les dates ou les événements qui sont connus des élèves. À partir de là, il serait intéressant de parler de la Nouvelle-France comme d’une personne qui naît, qui a une vie d’adulte et qui meurt. Cela permettrait de bien situer le travail de chaque grou-pe dans la thématique générale. Après la mise en situation commune, les élèves de 4e et de 5e années travailleraient in-dividuellement ou en équipes à réaliser

se retrouve ailleurs. Bien que les sociétés et les années soient différentes, le ques-tionnement demeure le même. Ainsi, pendant que les élèves de 4e année com-parent la Nouvelle-France et les 13 colo-nies vers 1745, par exemple (C3-S’ouvrir à la diversité des sociétés et de leur terri-toire), les élèves de 5e année comparent le Québec, la côte Ouest et les Prairies vers 1905 (C3). Lors du retour en grand groupe, il est facile de faire ressortir les caractéristiques historiques et géogra-phiques du Québec à la lumière de ce qui a été observé ailleurs.

—une planification annuelle en exempleEn prenant appui sur les quelques pis-tes que je viens d’évoquer, il est possible de planifier une année en univers social. Voici un exemple de planification an-nuelle pour une classe multiprogramme qui chevauche deux cycles différents, soit une classe de 4e et 5e années.

—tableau 1 - Planification annuelle, classe multiprogramme 4e et 5e années, univers social (ci-desous)

22+2

3

La nouvelle-France de sa naissance à sa « mort »4e année thématique/Questionnement 5e année

étap

e 1 La compétence 1 est ciblée nF 1645

Quelle furent les circonstances de sa naissance? À quoi ressemblait la NF en 1645 alors qu’elle était naissante?

La Nouvelle-France c’est quoi?

C’est quand? C’est où?

La compétence 2 est ciblée 1745-1820Pourquoi et comment la NF a-t-elle changé? Pourquoi la NF a-t-elle cessé d’exister? Que s’est-il passé après? Quelles sont les différences entre 1745 et 1820?

La nouvelle-France de sa naissance à sa mort, suite

étap

e 2

La compétence 1 est ciblée nF 1745 Pourquoi et comment la NF est-elle devenue ce qu’elle est en 1745? À quoi ressemble la NF alors qu’elle est à sa pleine maturité?

Que savez-vous sur la NF? Comment va-t-elle évoluer?

La compétence 1 est ciblée canada 1820Puisque la NF est « morte », qu’est-elle devenue? À quoi a-t-elle fait place? Comment pourrions-nous tracer le por-trait de ce qu’est le « Québec » vers 1820?

Le rat des villes et le rat des champs

étap

e 3 La compétence 2 est ciblée nF

1645-1745 À quoi ressemblait la vie à la ville et la vie à la campagne aux 17e et 18e siècles?

Où aimerais-tu mieux vivre, à la ville ou à la campagne?

La compétence 2 est ciblée 1820-1905À quoi ressemblait la vie à la ville et la vie à la campagne aux 19e et 20e siècles?

où s’établir?

étap

e 4

La compétence 3 est ciblée nF et 13 colonies en 1745 Quelles sont les ressemblances et les différences entre la NF et les 13 colonies? Si tu étais un immigrant qui arrive d’Europe vers 1745, où choisirais-tu de t’établir et pourquoi?

Où les immigrants allaient-ils s’établir

lorsqu’ils arrivaient en Amérique du Nord?

La compétence 3 est ciblée 1905 au Québec, dans les Prairies et sur la Côte Ouest. Quelles sont les ressemblances et les différences entre différentes régions du Canada vers 1905? Si tu étais un immi-grant qui arrive d’Europe au début du 20e siècle, où irais-tu t’installer?

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 23: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

fication de l’enseignement du domaine de l’univers social comme un casse-tête, mais plutôt comme une opportunité de faire de la pâte à modeler!

La mise en situation pourrait être une table ronde visant à apporter une ré-ponse aux deux questions suivantes : « Pourquoi immigrer? Quelles sont les caractéristiques du lieu qu’un immi-grant choisit pour s’établir (à supposer qu’il ait le choix)? ». Au moment de la mise en situation collective, il serait possible de construire avec les élèves une grille de collecte de données qui pourrait leur servir tout au long de la tâche. Finalement, la production pour-rait consister à rédiger une demande d’immigration dans laquelle l’élève ex-pliquerait clairement les raisons pour lesquelles il souhaiterait s’établir dans un nouveau pays.

—À vous de vous lancer…Il y a dans tout ce que je viens de propo-ser de bons et de moins bons éléments, je suis la première à le reconnaître. De même, il reste une foule de détails à pré-ciser quant aux productions que les élè-ves peuvent faire et aux moyens de les évaluer. Malgré tout, j’ai voulu aborder ce sujet afin d’aider ceux et celles d’en-tre vous qui enseignent dans une classe multiprogramme à ne plus voir la plani-

serait possible de faire un petit sondage dans lequel on demanderait aux élèves de la classe s’ils aimeraient mieux vivre en ville ou à la campagne. Cette mise en situation, qui pourrait par exemple se terminer par la création d’un diagramme circulaire présentant la répartition des élèves selon leur préférence, servirait de point de départ à un questionnement en univers social soit : « C’était quoi vivre en ville et à la campagne à différentes périodes de l’histoire québécoise? » À la fin du projet nous aurions un panorama assez complet de l’évolution des milieux rural et urbain à travers l’histoire québé-coise, soit du 16e siècle jusqu’au début du 20e siècle. Pour chaque moment ciblé (1645-1745 / 1820 et 1905), il serait aussi intéressant de demander aux élèves d’in-diquer quel milieu de vie était le plus représentatif de chaque époque. Je dois cependant émettre une petite réserve quant à ce projet : bien qu’il soit présenté comme ciblant la C2, il est vrai que dans la forme il ressemble davantage à la juxta-position de quatre projets ciblant la C1.

—Dans le dernier projet, tous les élèves auraient à développer la compétence 3.

Page 24: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

uniVerS SociaL

stéphanie DeMers Doctorante université du québec en outaouais [email protected] LeFrançois professeur université du québec en outaouais [email protected]é éthier professeur université de Montréal [email protected] SigniFie

« PenSer hiStoriQuement » chez DeS éLèVeS Du Primaire? une question importante pour l’enseignement de l’histoire au primaire mobilise les énergies d’un nombre croissant de didacticiens depuis plusieurs années. Il s’agit de la nature de la pensée historique et de la possibilité d’enseigner aux enfants les modes de collecte et de traitement de l’information qui lui sont propres : poser des problèmes sociaux actuels, en chercher les causes et en débattre rationnellement, aller à la source pour établir les faits, les/se situer dans le temps (Wineburg, 2001). Cepen-dant, les recherches expérimentales et les synthèses théoriques sur la mobilisation des compétences historiques se font relativement rares. Ce texte cherche à présenter les savoirs que les élèves, d’après la recherche, seraient capables d’utiliser, une fois termi-née leur formation en histoire au primaire. Qu’est-ce que la pensée historique? Si les didacticiens ne s’entendent pas sur une définition de la pensée historique, nous pouvons cependant ranger grosso modo leurs travaux selon trois courants. Certains dé-finissent la pensée historique comme l’ensemble des procédures méthodologiques relevant spécifiquement de l’histoire (Barton et Levstik, 1996). D’autres parlent plutôt d’une « culture historique », c’est-à-dire d’une combinaison d’attitudes et de procédu-res (Seixas, 1996; Rüsen, 2004). D’autres encore ajoutent à cela la dimension argu-mentative, sans laquelle le raisonnement historique critique ne peut être construit (Pontecorvo et Girardet, 1993). Tous ces auteurs distinguent cependant le passé de l’histoire du passé. Les historiens, en effet, écrivent l’histoire et en sont conscients. Ils se font auteurs d’une narration dans laquelle ils infèrent le probable ou le possible à partir des résultats de leur analyse des traces du passé et de ce que cela révèle des in-tentions, des motifs, des contextes sociaux et culturels de ceux qui ont laissé ces traces. Les historiens savent toutefois que ces preuves mentent parfois ou ne disent pas tout et qu’ils devront combler des « vides » dans la narration, en employant leur raisonne-ment et leur propre créativité pour répondre à des questions et construire le sens de phénomènes humains. L’effet des méthodes d’enseignement Le travail de Cooper (1995) démontre que les enfants de premier cycle (primaire) peuvent commencer à développer leur pensée historique si les problèmes à résoudre leur sont présentés à partir d’éléments familiers (comme les narrations dans les contes). Le besoin de proxi-mité entre l’objet d’étude et l’expérience de l’enfant fait écho à la conception du curri-culum en spirale selon laquelle le développement de la pensée requiert de revoir les concepts centraux de la discipline au fil des années, sous des angles différents et selon des approches variées, correspondant aux capacités des élèves. La recherche d’Audigier (2002) et de ses collègues, comme celle de Cooper et de Capita (2004) auprès d’élèves de 9 à 11 ans, démontre par ailleurs que les élèves peuvent comprendre les concepts abstraits, s’ils sont présentés explicitement et étudiés à partir d’exemples concrets ou d’images illustratives. Cooper et Capita (2004) ont observé comment des élèves de 10-11 ans s’approprient les outils de l’enquête historique dans le cadre d’activités axées sur l’étude de sources et les activités de manipulation directe. À l’instar d’autres chercheurs, elles ont noté que les élèves retenaient une plus grande quantité de savoirs, qu’ils étaient capables de s’approprier certains des outils de l’enquête histo-rique et de comprendre que l’histoire est construite à partir de preuves, tout en dis-tinguant les sources premières des sources secondes.

Les événements, les ruptures ou les continuitésLes élèves au primaire peuvent établir la signification de phénomènes histori-ques, parce qu’ils arrivent à l’école avec certaines informations historiques aux-quelles ils ont été exposés (Barton et Levstik, 1996). Toutefois, aucune recher-che recensée ne permet d’affirmer que les élèves au primaire peuvent identifier les ruptures et les continuités, bien qu’ils puissent, dès 9 ans, analyser des réalités sociales du point de vue de la synchronie (Lee, 1998).

—Les résultats des recherches de Bar-ton (2001), comme celle de Cooper et de Capita, démontrent que les élèves de deuxième cycle (primaire) peuvent identifier le changement et analyser les causes et les conséquences de façon plus ou moins complexe en lien avec une cer-taine médiation culturelle.

—Le passé, les procédures et les sourcesLes élèves peuvent appliquer les actions procédurales et cognitives propres à l’utilisation de sources premières pour résoudre des problèmes de nature histo-rique et construire leur propre narration. Toutefois, les plus jeunes se servent peu des preuves issues de ces sources et sai-sissent rarement leur nature construite et interprétative (VanSledright, 2002). La recherche d’Audigier (1995), comme celle de Lee (1998), révèle que les élèves au primaire peinent également à saisir la nature interprétative de l’histoire et à questionner les sources.

—Le tempsDiverses recherches témoignent de la dif-ficulté des élèves à distinguer les indices 24

+25

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 25: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

temporels dans des images, leur perspective tem-porelle étant dichotomique (aujourd’hui/jadis), sauf lorsqu’ils la présentent selon une narration chrono-logique. Ces élèves inclinent aussi à se représenter l’action humaine de façon linéaire et progressive (le présent moderne étant meilleur que le passé) (Audi-gier, 1995). Toutefois, d’autres études démontrent que les élèves de 9 à 11 ans comprennent les temps moyen et long et sont capables de perspective tempo-relle (VanSledright, 2002).

—conclusionLes recherches relatives aux idées des élèves du pri-maire concernant le passé et la façon de l’expliquer montrent que ceux-ci développent progressivement leur capacité de penser historiquement. Ces ré-sultats soulignent le besoin de recherches futures contribuant à comprendre comment se manifestent les compétences historiques des élèves et quelles étapes de développement de la pensée historique sont atteintes. Enfin, la reconstruction de ces étapes appelle à l’exploration des curriculums et des atten-tes qui y sont manifestes concernant les élèves et les pratiques pédagogiques.

—références

Audigier, F. (1995). Histoire et géographie : des savoirs scolaires • en question entre les définitions officielles et les constructions des élèves. SPIRALE - Revue de Recherches en Éducation, 15, p. 83.Audigier, F., Auckenthaler, Y., Fink, N., Haeberli, P. (2002). • Leçons d’histoire à l’école primaire. Cartable de Clio, 2, p. 194-217.Barton, K.C. et Levstik, L. (1996). Back when God was around • and everything Elementary children’s understanding of historical time. American Educational Research Journal, 33 (2), p. 419-454.Barton, K.C. (2001). You’d be wanting to know about the past. • Social context of children’s historical understanding in Northern Ireland and the United States. Comparative Education, 37, p. 89-106.Cooper, H. (1995). • History in the early years. Londres : Routledge.Cooper, H. et Capita, L. (2004). Leçons d’histoire à l’école pri-• maire : comparaisons. Le Cartable de Clio, (3), p. 155-168.Lee, P. (1998). Making sense of historical accounts. • Canadian Social Studies, 32 (2), p. 52-54.Pontecorvo, C. et Girardet, H. (1993). Arguing and Reasoning • in understanding historical topics. Cognition and Instruction, 11 (3 & 4), p. 365-395.Rüsen, J. (2004). Historical consciousness : narrative structure, • moral function, and ontogenetic development. Dans P. Seixas (Dir.) Theorizing historical consciousness, (pp.63-85). Toronto : University of Toronto Press.Seixas, P. (1996). Conceptualizing the growth of historical un-• derstanding, in Olson, D.R. et N. Torrance (Dir.), The Handbook of Education and Human Development. Cambridge, MA : Blackwell Publishers Ltd., p. 765-783.VanSledright, B. (2002). • In Search of America’s Past : Learning to Read History in Elementary School. New York : Teachers College Press.Wineburg, S. (2001). • Historical Thinking and Other Unnatural Acts. Philadelphia : Temple University Press.

Consulteznotre siteWeb

Chaque coffretcontient 24 livrets etdes fiches d’activités

8464

c

2e à 5e année

8464c_pub_vivreprimaire_globtrot.qxd 02/02/09 14:38 Pag

Page 26: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

26+2

7

La collection parfaite pour amener les enfants à leur « première lecture » de vrais romans !

Six séries et trois niveaux de difficulté :

SÉRIE IRÈNE DE JASMINE DUBÉILLUSTRATIONS DE SARAH DUFOURIrène vit avec son papa. C’est la reine du vélo. Beau temps, mauvais temps, Irène pédale, et elle adore ça !

SÉRIE MINA DE CLAUDIE STANKÉILLUSTRATIONS DE CÉLINE MALÉPARTMina est une petite fille gourmande, coquette et distraite. Sa plus grande qualité, c’est d’avoir un grand cœur. Son ami Touti est un petit hamster très curieux.

SÉRIE FÉLICIEN DE FANNY BRITTILLUSTRATIONS DE MARIANNE DUBUCFélicien est très curieux et ce qu’il aime par-dessus tout, c’est partir en voyage avec ses parents. Au cours de ses aventures, Félicien fait de belles découvertes.

SÉRIE AMÉ DE SYLVIE MASSICOTTEILLUSTRATIONS DE CHRISTINE BATTUZAmé vient d’un pays lointain. Il a déménagé avec sa famille dans un nouveau pays et il apprend à connaître le monde qui l’entoure.

SÉRIE BALTHAZAR DE LILI CHARTRANDILLUSTRATIONS DE JESSICA LINDSAYBalthazar est très gourmand. Il rêve d’un monde où il pourrait tout croquer. À Gouluville, royaume des enfants gourmands, il vit des aventures incroyables.

SÉRIE PIRATES DE JOHANNE GAGNÉILLUSTRATIONS DE RÉMY SIMARDCuisinier sur un bateau de pirates, Tagamel est un timide au cœur tendre. Son amie Isia sait comment lui donner confiance en lui.

Chaque roman contient des activités pour l’élève et des fiches pédagogiques sont offertes sur courteechelle.com !

www.courteechelle.comwww.carnetpedagogique.com

NIVEAU 1 – 40 PAGES

NIVEAU 2 – 48 PAGES

NIVEAU 3 – 56 PAGES

Page 27: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

nouVeLLeS au babiLLarD

w w w. a q e p. o rg • [email protected]

Congrès annuel

de l’AQEP : 2, 3 et 4 décembre 2009

Vous êtes cordialement invités au prochain congrès

annuel de l’AQEP qui a lieu pour la première fois au

Palais des congrès de Montréal les 2, 3 et 4 décem-

bre 2009. Au menu, ateliers de formation, spectacles,

exposants, rencontres, table ronde, prix Jacinthe…

Au plaisir de vous rencontrer!

Les membres de l’AQEP profitent d’un rabais de 100 $ sur les frais d’inscription au prochain congrès de l’Association! Profitez-en!

En lien avec ce numéro de Vivre le primaire, vous trouverez dans le site Internet de l’AQEP, dans la page réservée à la revue, les articles suivants :StéPhAnIE DEmErS, DAVID LEfrAnçoIS et mArc-AnDré éthIEr Que signifie « penser historiquement » chez des élèves de niveau primaire? Pour en savoir plus...LorIE-mArLènE BrAuLt foISy et StEVE mASSonLa neuroéducation : mieux comprendre le cerveau pour mieux enseignerJuLIE St-PIErrErat de bibliothèque Littérature jeunesse

LEs ProChAins

dossiErs

sPéCiAux dE

ViVre le primaire

hiver 2009-2010 : La lecture

rédactrice invitée : manon hébert

Printemps 2010 : L’insertion professionnelle

rédactrices invitées : Joséphine mukamurera et

Liliane Portelance

Date de tombée pour soumettre un article :

21 décembre 2009

été 2010 : La formation continue

rédacteur invité : clermont Gauthier

Date de tombée pour soumettre un article :

21 mars 2010

Automne 2010 : résoudre des situations

problèmes en mathématique

rédactrice invitée : Diane Biron

Date de tombée pour soumettre un article :

21 juin 2010

Page 28: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

Marie-cLauDe BéLiveau orthopédagogue et psychoéducatrice chu sainte-justine [email protected]

LeS reLationS ParentS- enSeignantS : kaLéïDoScoPe

Lorsqu’on m’a demandé d’assumer la responsabilité de ce dossier spécial sur les relations entre les enseignants et les parents, j’ai tout de suite vu l’intérêt de rassem-bler différents professionnels, enseignants et médecins pédopsychiatres. En effet, tous ces adultes qui se partagent l’éducation des enfants vivent au quotidien des relations parfois complexes, inhérentes aux liens de collaboration qui se tissent entre eux, chacun dans le cadre de sa propre pratique. D’où ma proposition d’abor-der ce sujet sous différents angles, un peu à la façon d’un kaléïdoscope. De tout temps, parents, enseignants et autres professionnels du milieu scolaire ou médical, ont dû se compléter dans cette tâche d’éducation. Ce terrain partagé peut

devenir source de tensions impor-tantes et de division des forces, ce qui ne sert évidemment pas l’en-fant, surtout lorsque celui-ci vit des difficultés scolaires (d’appren-tissage, d’adaptation, de compor-tement) liées à des problématiques familiales, cognitives, médicales,

de santé mentale ou psychiatriques. Comment devenir partenaires dans l’éducation de l’enfant et… le rester? Pour traiter de cet aspect déterminant, voire central pour la réussite scolaire des enfants, j’ai demandé à quelques médecins, enseignants et professionnels de livrer le fruit de leurs réflexions. Tout d’abord, Hélène Diguer, enseignante en musique au primaire, et Martin St-André, pédopsychiatre, témoi-gnent de ce jeu de regards croisés sur l’enfant : celui des parents, celui de l’ensei-gnante et celui du psy, tous engagés auprès d’un même enfant pour lequel le travail

en concertation est indispensable. Tra-vail encore plus délicat lorsque la sévé-rité de la problématique de l’enfant l’aura amené à consulter en pédopsychiatrie.

—Johanne Boivin et Geneviève Tellier, tou-tes deux pédopsychiatres, mettent ensui-te un bémol sur l’urgence de poser un diagnostic qui leur est parfois adressée pour que l’enfant ait accès aux services dont il a besoin. Alors qu’il est déjà très délicat pour des enseignants d’aborder avec les parents l’épineux sujet des diffi-cultés d’un élève à l’école, le manque de ressources en milieu scolaire les incite parfois à tendre rapidement la main au milieu hospitalier. Les auteurs mettent l’école en garde contre cette médicalisa-tion parfois trop rapide d’un problème auquel on aurait souvent pu répondre à l’école même, au moins en partie, avant de référer en pédopsychiatrie. On ne mesure pas toujours les conséquences possibles d’une telle orientation pour 28

+29

Ce dossier spécial se devait de dédramatiser un peu

cette question des relations parents-enseignants en l’envisageant aussi

avec un brin d’humour.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 29: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

un enfant qui, du fait qu’il est en déve-loppement, ne présente pas nécessaire-ment un trouble nettement identifiable et pour lequel, du côté de l’équipe-école, on souhaite obtenir une réponse tout aussi nette afin d’intervenir sans délai.

—Les enseignants sont les mieux placés pour dépister les enfants qui présen-tent des besoins particuliers. Ils sont souvent très ingénieux pour mettre en place des moyens qui les aident, même ceux qui présentent des difficultés dont la nature n’est pas encore clairement identifiée. Là où ils peuvent se retrouver en panne, c’est lorsqu’ils doivent établir un rapport de collaboration plus parti-culier avec les parents dont les enfants sont en difficulté. Comment en discuter sans froisser, sans trop inquiéter, sans juger? Marie-France Ricard, psychoédu-catrice et directrice d’école, propose des moyens permettant de favoriser l’échan-ge, notamment en passant par l’ouver-ture à l’autre, ingrédient essentiel dans une communication efficace.

J’aborde par la suite ce même sujet, mais cette fois, sous l’angle d’un terrain partagé au quotidien entre les ensei-gnants, les parents et… les enfants : les devoirs! Comment se rencontrer et se « regarder » les uns les autres, parents

et enseignants, lorsqu’on se retrouve en fin de journée au cœur de cette période de devoirs et de leçons, soit en plein car-refour relationnel et, parfois même, en plein champ de bataille?

—La question de la juste distance que l’on prône dans l’établissement des relations parents-enfants autour de la scolarité de l’enfant est reprise ici par Michel Mar-solais, psychoéducateur. Toutefois, il l’aborde dans le contexte de la relation parents-enseignants! Ce qui est vrai pour les uns l’est aussi pour les autres. Trop proches, c’est comme pas assez!

—Karine Busilacchi, orthopédagogue, et Serge Marcotte, enseignant, se pen-chent eux aussi sur ces relations pa-rents-enseignants, mais ils le font en se centrant sur les conditions qui peuvent aider lorsque ces relations se tissent entre ceux qui ont la charge d’enfants qui, cette fois, présentent de véritables difficultés ou troubles d’apprentissage.

—Ce dossier spécial se devait de dédrama-tiser un peu cette question des relations parents-enseignants en l’envisageant aussi avec un brin d’humour. Louis Émond, enseignant, dresse un tableau où la caricature et le réel se confondent. Les styles de parents! Difficiles de s’ajus-ter à tout un chacun? Et pour cause! Autant de diversité chez eux que chez les enfants qui se retrouvent en classe tous les jours. La pomme ne tombe ja-mais très loin de l’arbre…

Finalement, Céline Boisvert, psycholo-gue clinicienne, revient sur l’ensemble des points traités au cours de ce dossier en se concentrant sur les enfants qui pré-sentent des difficultés psychologiques, voire dans certains cas psychiatriques.

Elle explique avec finesse combien les parents que l’on côtoie portent encore, chacun à leur façon, leur propre enfance, leurs propres souffrances qu’on ravive parfois sans le vouloir en leur parlant de leurs enfants… rappelant ainsi combien toute relation humaine est complexe à saisir et que ce qui se trouve derrière le rideau n’est jamais très loin de la scène!

Les enseignants sont les mieux placés pour dépister les enfants qui présentent des besoins particuliers.

Page 30: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

héLène Diguer enseignante en musique / cseM [email protected] Dr Martin st-anDré pédopsychiatre chu sainte-justine

enSeignante, ParentS et « PSy » : regarDS croiSéS Sur L’enFantL’enseignante, les parents et le psy se construisent des représentations de l’enfant qui sont complémentaires, mais parfois très contrastées. Nous décrivons ici quel-ques-unes des représentations et perceptions retrouvées fréquemment, en insistant sur l’importance d’une communication réciproque entre ces différents partenaires. regard d’enseignante… La perception que se construit l’enseignante de son grou-

pe est d’abord celle d’un ensemble. Elle espère faire avancer ses élèves vers de nou-velles connaissances. Elle cherche à développer la curiosité des élèves, leur patience, leur volonté d’aller plus loin et leur persévérance. Ses exigences scolaires et compor-tementales sont relatives aux capacités du groupe à bien participer et à être attentif aux consignes. L’autonomie des élèves garantit une bonne dynamique dans la petite société d’élèves. Les attentes sont élevées! En classe, les objectifs sont les mêmes pour tous – théoriquement du moins –, même si la réalité quotidienne révèle la difficulté à réaliser cet idéal… L’art de l’enseignante consiste à s’ajuster constamment au rythme et aux capacités de son groupe. Cette tâche d’équilibriste vise à maintenir l’intérêt des élèves les plus curieux et les plus doués sur le plan scolaire, tout en imaginant constamment des stratégies afin de susciter l’intérêt et l’apprentissage des élèves en difficulté. Le défi se complique par l’hétérogénéité grandissante des grou-pes d’élèves ainsi que par les caractéristiques individuelles des élèves eux-mêmes, tant au plan culturel que familial. Des travaux récents ont heureusement démontré que les enseignantes démontraient un talent certain dans la prédiction du décro-chage scolaire. Les attentes de l’enseignante sont-elles parfois trop grandes envers certains enfants moins matures? Les enseignantes sont-elles trop absorbées par la pression et le stress des objectifs de fin de cycle? Manquent-elles de temps pour soutenir et aider les élèves qui présentent des besoins particuliers? Demandent-elles parfois aux enfants, sans s’en rendre compte, d’être « grands » avant leur temps? Perçoivent-elles la communication avec la famille de l’élève comme une tâche addi-tionnelle plutôt qu’une partie intégrante de leur travail? Enfin, la formation reçue par les enseignantes sur les aspects culturels et les troubles psychologiques courants leur suffit-elle pour bien communiquer avec la famille et les professionnels du monde psy? regard de parents… La relation d’attachement colore profondément la représentation que le parent se fait de son enfant. Sa tolérance envers son enfant est souvent égale à l’amour qu’il lui porte! Parfois, à l’occasion d’une rencontre de l’élève en compagnie de ses parents, l’enseignante observera à quel point l’attitude de l’élève se modifie : l’élève paraît soudainement « plus petit » devant maman et papa! La question de l’autonomie de l’élève se retrouve parmi les enjeux abordés le plus souvent lors des discussions entre l’enseignante et les parents. Si la majorité des parents cherche à développer la maturité de leur enfant, l’enseignante note parfois que certains parents ont du mal à valoriser son autonomie. Ces parents semblent craindre que l’enfant se retrouve dans des situations difficiles s’il en vient à « trop » prendre d’initiatives. Un dialogue délicat s’engage alors au sujet des attentes de l’école envers l’enfant. Le piège des disqualifications mutuelles entre les parents et l’école est toujours présent et doit faire l’objet d’une attention soutenue de la part de l’enseignante. Dans la mesure du possible, chaque partenaire doit apprendre à tenir compte de la perspective de l’autre afin de faciliter l’autonomie de l’enfant et de reconnaître l’importance, pour l’enfant, de grandir à son propre rythme.

Un autre enjeu lié aux perceptions, très fréquent, concerne les questions rela-tives à la discipline. Parfois, les parents manifestent des réactions de surprise, de colère ou d’incrédulité lorsque l’en-seignante leur rapporte des conduites perturbatrices de la part de l’enfant. Les parents protestent en disant que leur en-fant est calme, obéissant et attentif à la maison! Ils n’acceptent pas les remarques de l’enseignante et se sentent jugés par celle-ci, ce qui les amènera même, par-fois, à « boycotter » les rencontres avec l’enseignante. Le parent désire, bien en-tendu, protéger son enfant et accepte dif-ficilement que celui-ci se fasse critiquer! Pour le parent, accréditer le jugement du professeur exige une solide confiance en soi-même autant qu’en son enfant.

—Malheureusement, l’enfant qui perçoit une alliance défaillante entre ses parents et son enseignante aura davantage de difficultés à profiter pleinement du mi-lieu scolaire et à endosser les valeurs vé-hiculées par l’enseignante et par l’école. Ceci entravera la participation de l’élève

30+3

1a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 31: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

en classe et son acquisition des différen-tes compétences et habiletés interper-sonnelles essentielles à sa scolarisation : maturité, autonomie, autodiscipline, sens des responsabilités, empathie, gé-nérosité, sociabilité…

—regard de psy…La propre histoire scolaire du parent viendra colorer – et parfois assombrir – sa perception des commentaires de l’enseignante au sujet de son enfant. Des difficultés d’apprentissage mal re-pérées durant l’enfance, une histoire personnelle d’échec scolaire ou encore des fragilités émotionnelles influence-ront fortement la réaction du parent aux commentaires de l’enseignante. Des cir-constances familiales adverses comme un deuil ou une maladie dans la famille, une séparation, un déménagement ou une expérience migratoire complexe embrouilleront aussi les échanges avec l’équipe-école. Une écoute particulière de l’enseignante à ces différents enjeux pourra permettre de « redéfinir » ou de mieux comprendre les difficultés de l’enfant, facilitant ainsi le travail conjoint avec la famille et l’ajustement des atten-tes de chacun envers l’enfant.

—Alors que la majorité des parents parti-cipent assez facilement à la réflexion qui conduira à un encadrement adapté aux besoins de l’enfant, d’autres parents ont tendance à banaliser les rétroactions de l’enseignante. Il s’agira peut-être d’un mouvement d’autoprotection ou d’évite-ment de la part de la famille devant des informations trop complexes ou trop douloureuses à métaboliser. À l’autre ex-trême, des parents réagiront avec grande anxiété aux commentaires transmis par l’école et s’identifieront trop vivement aux défis et difficultés vécus par l’enfant. L’anxiété parentale pourra alors conduire à des difficultés de communication pa-rent-enfant : attentes irréalistes ou trop élevées envers l’enfant, transmission d’une vision défaitiste ou catastrophique des défis présentés par l’école, difficultés à présenter à l’enfant des défis gradués et réalisables.

—L’alliance entre les parents séparés ou di-vorcés est un autre phénomène qui peut poser des défis à l’enseignante. Bien que les situations de coparentalité n’entraî-

nent habituellement pas de difficultés majeures dans le travail avec l’école, on note parfois des situations de discorde entre les parents qui se rejouent dans le contexte scolaire, avec des conséquences négatives pour l’enfant. La non-résolu-tion d’une séparation pourra amener l’enseignante à se retrouver aspirée dans des jeux de coalition et de rivalité entre les parents. La cohérence et la continuité des attentes envers l’enfant deviennent alors des défis majeurs à relever.

—Enfin, une pression scolaire trop grande de la part des parents envers l’enfant se produira pour plusieurs raisons. Il s’agi-ra par exemple d’une nécessité absolue de réussite dans un contexte migratoire ou encore du mandat confié à l’enfant de « réparer » l’histoire parentale. Ainsi, l’histoire scolaire des parents et la dyna-mique sociofamiliale pourront-elles gui-der – mais parfois compliquer – le rapport entre les parents et les enseignants.

—comment travailler ensemble, avec créativité, au bon développement de l’enfant?Dans ce jeu de regards croisés, complé-mentaires et parfois divergents, l’écoute réciproque entre parents et enseignants exige, nécessairement, du temps et des efforts communs. Des valeurs d’authen-ticité, de sensibilité, de patience, de détermination, ainsi qu’une capacité à aborder clairement les perceptions et les attentes mutuelles seront des gages de succès autant pour l’enseignante que pour la famille.

—L’enseignante proposera parfois à la fa-mille, en accord avec l’équipe-école, que l’enfant soit vu en consultation par un tiers dans une démarche visant à éclairer la compréhension des difficultés de l’en-fant. Ces tiers pourront être des collègues enseignants, des membres de la direc-tion de l’école, le psychoéducateur, le psy-chologue scolaire, l’orthopédagogue ou même l’équipe pédopsychiatrique. Ces tiers seront interpellés afin d’aider les partenaires à bien réfléchir et à commu-niquer ensemble, ainsi qu’à bien valider leur perception de l’enfant. Ils pourront contribuer à dénouer des situations déli-cates où les représentations des différents partenaires demeurent polarisées.

La proposition faite aux parents de faire appel à un tiers sera souvent reçue positi-vement, comme une possibilité de sortir de l’impasse. Toutefois, cette proposition d’aide sera parfois vécue comme une dépréciation implicite de l’enfant ou des capacités éducatives des parents. Pour compliquer le tout, l’enseignante autant que les parents auront à naviguer à tra-vers la tendance actuelle à voir les diffi-cultés scolaires de l’enfant à travers une lorgnette beaucoup trop médicale : syn-drome de Tourette, trouble de l’attention, Asperger… et même maladie bipolaire! En contrepartie, on rappellera aussi le ré-flexe de certaines enseignantes de voir la famille comme la « cause » de toutes les difficultés comportementales de l’enfant à l’école. Or, l’on sait que ces difficultés sont souvent d’origine constitutionnelle chez l’enfant et ne sont causées qu’en partie par des difficultés relationnelles (on pensera, par exemple aux troubles de l’apprentissage ou au trouble de l’at-tention avec hyperactivité).

—L’écoute mutuelle des perceptions au sujet d’un enfant n’est pas toujours simple et requiert parfois une discus-sion honnête et énergique! Lorsque les perceptions se rencontrent et devien-nent plus cohérentes – sans toutefois être identiques –, le développement de l’enfant sera facilité, tout comme le plaisir pour la famille et l’enseignante de travailler ensemble au mieux-être de l’enfant. Pour l’enseignante, tenir véritablement compte des observations du parent peut l’aider à ajuster son ap-proche pédagogique envers l’élève. La confiance de l’élève et des parents en-vers l’enseignante s’améliorera, l’élève se sentira moins écartelé entre l’école et sa famille, et son bien-être et sa partici-pation en classe tendront à s’améliorer. De son côté, le parent se sentira plus efficace dans son partenariat avec l’école et pourra mieux transmettre les valeurs véhiculées par l’école. Les parents pour-ront se construire des représentations nouvelles – mais non contradictoires – de leur enfant. Ainsi, ce jeu de regards croisés entre les différents partenaires offrira la possibilité de faire évoluer les représentations mutuelles de l’enfant et contribuera à favoriser l’évolution har-monieuse de l’élève au sein de son mi-lieu scolaire.

Page 32: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

johanne Boivin pédopsychiatre chu sainte-justine geneviève teLLier pédopsychiatre chu sainte-justine

réFérer en PéDoPSychiatrie : QuanD? PourQuoi? comment?

La société, notre société québécoise, s’est transformée grandement au cours de la dernière décennie et ces transformations nous obligent à nous questionner. Avons-nous pris les bonnes décisions? Les résultats sont-ils à la hauteur de nos attentes? Ce questionnement peut être douloureux si l’on s’avoue certaines dérives aux lourdes conséquences. Nous sommes tous des acteurs dans une pièce de théâtre mais, depuis plusieurs années, nos rôles ont été modifiés. Insidieusement, les enseignants se sont sentis désavoués dans leur capacité à identifier les difficul-tés des élèves. Les parents stressés et parfois exigeants s’attendent à ce que l’école prenne une place de plus en plus importante dans l’éducation de leurs enfants. La délégation de leurs responsabilités est parfois déconcertante et souvent source de tensions avec l’enseignant. Les médecins généralistes se retrouvent souvent bien mal pris dans le rôle qu’on leur demande de jouer dans l’identification des difficul-tés scolaires des enfants alors qu’ils n’ont pas d’équipes multidisciplinaires pour les aider en ce sens. Nous croyons qu’il est important de questionner cette « ur-gence diagnostique » avant que la dérive actuelle ne produise une génération d’en-fants « étiquetés » de diagnostics souvent très vite posés. Ces enfants qui ont des difficultés à apprendre ou qui ont des « problèmes de comportement » sont main-

tenant référés pour obtenir un dia-gnostic précis. Serait-il un TDAH, un Tourette, un bipolaire? Alors qu’une première étape de compré-hension des besoins de l’enfant pourrait être approfondie à l’école, l’enfant est plutôt rapidement ré-féré en milieu médical, voire pé-

dopsychiatrique, parce qu’on a besoin d’une cote pour obtenir de l’aide supplémentaire dans la classe. Nous, les médecins, avons également changé notre façon de poser des diagnostics. Le DSM IV est presque devenu une bible, la référence pour les professeurs, les parents, les médias et le ministère de l’Éduca-tion. Le DSM IV est un système de classification qui a été conçu d’abord pour la recherche. Si l’on pose un diagnostic en se basant uniquement sur un nombre de symptômes sans tenir compte des circonstances et événements dans la vie de l’en-fant, le risque est grand de passer à côté des véritables raisons des difficultés de l’enfant. Prenons l’exemple du trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité, le TDAH. Tout d’abord, précisons que beaucoup d’enfants ayant ce syndrome ont été grandement aidés par la médication et les différentes approches éducatives développées en milieu scolaire. Mais les enfants qui bougent, qui se concentrent mal et qui sont impulsifs ne sont pas tous aux prises avec de véritables TDAH.

L’enfant qui a des troubles ou des diffi-cultés d’apprentissage non identifiés présente bien souvent des symptômes similaires. Le jeune qui vit une situation familiale compliquée avec de l’insécuri-té et des ruptures fréquentes ou encore celui qui ne recherche que le plaisir, qui accepte mal l’autorité et qui adopte une attitude de retrait devant l’effort, peu-vent eux aussi présenter ce même type de symptômes. Pour tous ces enfants, il est probable que la prescription de Rita-lin® aura des effets à court terme… sui-vie d’une demande de l’école ou des parents d’ajuster les doses à la hausse parce que « ça ne fait plus effet ». Le ris-que est grand de se retrouver avec une escalade pharmacologique et parfois de polypharmacie. Les effets secondaires comme la perte d’appétit induite par les psychostimulants (Ritalin®) ou le gain de poids important amené par les neu-roleptiques atypiques (Risperdal®) ne sont toutefois pas à négliger.

—On pourrait faire la même démonstra-tion avec d’autres diagnostics, comme le syndrome de Gilles de la Tourette ou les troubles envahissants du déve-loppement. Les différents problèmes scolaires des enfants ont été peu à peu de plus en plus médicalisés. Parents, enseignants, commissions scolaires et médecins, nous sommes tous engagés aujourd’hui dans la recherche d’un dia-gnostic à tout prix. Il y a plusieurs consé-quences lourdes à cet « étiquetage ». L’enfant peut acquérir une identité de 32

+33

Comme cela a été démontré dans plusieurs pays, l’identification très

précoce des enfants en difficulté est la meilleure façon d’éviter que se

surajoutent des difficultés de comportement.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 33: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

TDAH, de Tourette ou de TED qui comporte un risque de déresponsabilisation : ce n’est plus de sa faute, c’est sa maladie. Aussi, faute de diagnostic précis, l’enfant présentant un trouble d’apprentissage spécifique risque de ne pas recevoir toute l’aide à laquelle il a droit alors que ses besoins sont bien souvent clairement identifiés par l’enseignant.

—Il est urgent de revoir nos façons de travailler ensem-ble. Chacun a un rôle bien précis qu’il doit se réap-proprier. L’enseignant est le professionnel le mieux placé pour essayer de comprendre les difficultés d’un élève. Il a une relation privilégiée avec lui et il possède les compétences requises pour dépister les difficultés d’apprentissage. Lorsqu’il croit percevoir un trouble plus spécifique, il doit avoir recours aux professionnels œuvrant en milieu scolaire avant de référer d’emblée un enfant au milieu médical pour obtenir un diagnostic « à tout prix », ce que semble malheureusement exi-ger le système scolaire avant de pouvoir débloquer les ressources nécessaires pour cet enfant. Comme cela a été démontré dans plusieurs pays, l’identification très précoce des enfants en difficulté est la meilleure façon d’éviter que se surajoutent des difficultés de compor-tement. Les professionnels en milieu scolaire peuvent contribuer à une meilleure compréhension en faisant les évaluations nécessaires. Finalement, le médecin a un rôle bien précis. Il doit intervenir lorsque les pro-fessionnels en milieu scolaire auront fait leurs évalua-tions et dès qu’il y a un questionnement sur la présence d’une pathologie médicale ou psychiatrique, comme, par exemple, un trouble anxieux ou une dépression. Pour les enfants qui présentent de sérieux problèmes de comportement, le travail de collaboration entre le milieu scolaire et médical est essentiel afin de poser ou d’éliminer un diagnostic médical.

—L’école est le milieu de vie de nos enfants. Ils doivent apprendre bien sûr à lire et à écrire mais, pendant toute leur scolarité, ils apprendront bien plus. Ils doivent ap-prendre la tolérance, la valeur de l’effort et le sens des responsabilités.

—L’enseignant a un rôle central mais il n’y arrivera pas seul. Il faut remobiliser les parents et responsabiliser les enfants. Le médecin a un rôle certain : celui de collabo-rer avec les enseignants et les professionnels en milieu scolaire et, parfois, hospitalier afin d’aider à évaluer les différentes composantes qui pourraient expliquer le dys-fonctionnement d’un enfant.

Page 34: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

Marie-France ricarD psychoéducatrice directrice de l’école jean xxiii

attituDeS gagnanteS Pour FaVoriSer De bonneS reLationS entre ParentS et enSeignantS

L’école est d’abord et avant tout un milieu de vie où l’élève passe en moyenne huit heures par jour. Ayant pour mission d’instruire, de socialiser et de qualifier, elle a aussi le devoir de rendre possible la réussite scolaire de tous les élèves. Créer des conditions qui favorisent la participation de l’élève, son engagement et son investissement, autant sur le plan des apprentissages que sur celui de la socialisa-tion, s’avère un défi de taille particulièrement pour les enseignants. De plus, bien que la réussite scolaire soit impensable sans l’engagement de l’élève, elle nous apparaît aussi peu réalisable sans la participation des parents. Selon la littérature, le soutien parental est une des conditions les plus importantes pour favoriser la réussite scolaire. « Lorsque les parents participent au suivi scolaire, les enfants et les adoles-cents ont de meilleurs résultats scolaires, un faible taux d’absence, peu de difficul-tés comportementales, une perception plus positive de la classe et du climat scolaire…1 » À cet égard, comment l’enseignant peut-il influencer, par ses attitu-des, l’engagement parental? C’est de ces attitudes gagnantes de l’enseignant dont il est question ici. L’écoute Pour favoriser une relation de complicité et de colla-boration avec le parent, l’enseignant se doit de jeter un regard critique sur sa façon d’interagir avec lui. Dans ses relations avec le parent, l’enseignant gagne à mettre en pratique les principes d’une communication efficace. J’insisterai ici davantage sur l’écoute, qui est une attitude primordiale pour établir le lien avec le parent, mais qui est malheureusement souvent oubliée. Dans son livre sur la communication, Solange Cormier (2003) traite de l’écoute comme d’une attitude qui est « au cœur de la compétence interpersonnelle ». Être à l’écoute permet de se rapprocher d’autrui et d’apprivoiser sa différence. L’auteur identifie des attitudes sous-jacentes à une écoute de qualité : la présence à soi dans l’interaction, la tolérance à l’ambiguïté, la disponibilité et la valorisation des différences. La présence à soi nous permet de déceler rapidement les indices qui signifient que nous ne sommes plus à l’écoute. À titre d’exemple, le fait de préparer sa réplique pendant que l’autre parle. « L’écou-te exige la capacité de séparer son expérience propre de celle d’autrui2. » Être en situation d’écoute, cela exige une discipline personnelle afin de se concentrer sur le message de l’autre sans se laisser distraire par toutes sortes de pensées, d’images où d’émotions. L’enseignant qui écoute doit aussi démontrer une certaine tolérance à l’ambiguïté du message de la part du parent ou de certaines incompréhensions de sa part. D’où l’importance de faire préciser et clarifier au parent son message et de reformuler ses propos au besoin. Écouter nécessite à la fois une disponibilité psy-

chologique et physique. L’enseignant qui désire développer sa capacité d’écou-te doit être disposé à investir du temps et de l’énergie pour permettre aux pa-rents d’exprimer leurs besoins, leurs opinions et leurs sentiments. Si le pa-rent manque de temps ou s’il est préoc-cupé, il est préférable pour l’enseignant de le lui faire savoir et de convenir d’un autre rendez-vous.

—Enfin, il est impossible pour l’enseignant d’être à l’écoute tant et aussi longtemps qu’il est convaincu de détenir la vérité. L’enseignant doit manifester la capacité d’entendre un point de vue différent du sien et d’éviter d’adopter une attitude d’expert envers le parent. L’acceptation et la valorisation des différences requièrent de la part de l’enseignant une ouverture et une sécurité personnelle certaine.

—reconnaître la compétence du parentComme intervenants scolaires, nous tenons parfois un double discours concernant le soutien parental. D’un côté, nous demandons aux parents d’ac-compagner leur enfant dans différentes situations de la vie scolaire; de l’autre, nous leur faisons parfois sentir qu’ils ne s’y prennent pas de la bonne façon, qu’ils n’en font pas assez ou qu’ils en font trop. L’enseignant doit manifester de l’ouverture et reconnaître les compé-tences du parent afin de consolider des liens de réciprocité. En reconnaissant et en exprimant au parent ce qu’il fait de bien plutôt que de tenir des propos 34

+35

Il est important d’assurer une communication fréquente et régulière même quand cela va bien avec le parent; c’est là une condition gagnante.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 35: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

négatifs sur ses actions, on renforce ses compétences et on l’amène à s’engager davantage. L’enseignant a tout avantage à encourager l’attitude du parent-acteur et à mettre ainsi en valeur ses forces et ses bons coups. Cela aura pour effet d’augmenter chez le parent son senti-ment de compétence.

—De plus, il est important de signifier au parent que les rôles et les responsabilités doivent être partagés avec l’équipe-école dans l’objectif de favoriser la réussite de l’enfant. Il faut toutefois éviter que le pa-rent se positionne en « consommateur de services3 » et qu’il se soustraie à ses propres responsabilités parce qu’il per-çoit l’école comme ayant toute la respon-sabilité de l’éducation de son enfant.

—éviter le jugementL’école est parfois un lieu de souffrance pour l’enfant et le parent qui sont en si-tuation de pauvreté. L’enseignant doit être sensibilisé à la réalité, au combat de tous les jours et à la culture des moins favorisés. Cela nécessite de la part de l’enseignant une grande ouverture et beaucoup de souplesse dans ses exigen-ces face à l’enfant lui-même lorsqu’il s’agit de matériel manquant, de devoirs non faits, de lunchs peu soutenants ou inexistants, etc. Il est important de cher-cher à collaborer avec le parent et d’éviter de rejeter la faute sur lui. Nous savons que l’enfant ne peut apprendre s’il est tiraillé entre sa famille et l’école. Il faut donc éviter de porter un jugement et se

préoccuper de garder un bon contact avec le parent. L’ensemble du personnel scolaire doit avoir le souci de développer des pratiques d’accueil et de collabora-tion afin de favoriser un rapprochement avec les familles moins nanties.

—communiquer aussi quand ça va bienIl est important d’assurer une commu-nication fréquente et régulière même quand cela va bien avec le parent; c’est là une condition gagnante. Joindre les pa-rents de différentes façons (agenda, té-léphone, carnet de bord, courriel, notes aux devoirs, communication de mi-étape…) pour souligner les progrès de leur enfant et leur faire part de ses bons coups et de ses réalisations, voilà qui est généralement grandement apprécié.

—L’enseignant qui met en place des mé-canismes de communication efficaces en faisant ressortir les forces de l’en-fant s’assure d’une belle collaboration avec les parents de ses élèves. À titre d’exemple, lors de la première rencon-tre avec les parents en septembre, une enseignante m’informait qu’elle uti-lisait la notion de dépôt ou de compte relationnel de Brigitte Racine4. Pour ce faire, elle met en évidence les forces de chaque enfant de sa classe en informant les parents par un petit mot déposé sur le pupitre des élèves. Cela demande à l’enseignant d’observer et de reconnaî-tre dès les premiers jours d’école les habiletés, les capacités et les forces de chacun d’eux. Cette reconnaissance de

la part de l’enseignant est doublement positive aux yeux des parents et des en-fants, car elle permet d’établir la relation et elle favorise leur engagement. Elle permet d’installer un lien de confiance entre le parent, l’enseignant et l’élève.

—Ces quelques attitudes gagnantes de l’enseignant demandent du temps. Toutefois, elles sont les prémices à une véritable relation de collaboration et de complicité avec les parents, ce qui constitue sans aucun doute un facteur déterminant dans la réussite de l’élève.

—« Une relation parent-enseignant, c’est une affaire de foi. Il faut croire que l’on a besoin l’un de l’autre, que chacun peut apporter à l’autre quelque chose d’es-sentiel.5 »

—notes

Deslande, R. et Bertrand, R. 1. (2001). La création

d’une véritable communauté éducative autour de

l’élève : une intervention cohérente et des services

mieux harmonisés. CQRS/MEQ, p. 6.

Cormier, S. (2. 2003). La communication et la gestion.

Les presses de l’Université du Québec, p. 63.

Coté, D. (2005). 3. Participation des parents à la

réussite éducative des élèves du primaire : guide d’ac-

compagnement à l’intention du personnel scolaire.

Ministère de l’éducation, p. 7.

Racine, B. (204. 08). La discipline, un jeu d’enfant.

Éditions du CHU Sainte-Justine.

Goupil, G. (15. 997). Communications et relations

entre l’école et la famille. Montréal, Chenelière/

Mcgraw-Hill, p. 5.

Page 36: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

Dans la maison de la famille Suffit.– Écoute Sam, comment tu veux qu’on t’aide si tu oublies ton cahier de devoirs à l’école?– C’est pas de ma faute, mon prof me l’a pas dit de l’apporter…– Coudon, il n’a pas compris ton prof qu’avec ton déficit de l’attention, tu as besoin d’un coup de pouce de plus, qu’il faut qu’il vérifie ton sac d’école avant de partir… sinon, on n’a pas de prise à la maison...Le lendemain à l’école notre-Dame-du-bon-Vouloir : – Encore un devoir pas fait Sam? Il me semble qu’il y a un problème d’encadre-ment à la maison… il va falloir que je m’assois avec tes parents pour en parler… sinon on ne va pas y arriver…

À chaque année, les enseignants accueillent dans leur classe un certain nombre d’élèves qui présentent des difficultés d’apprentissage. En plus de devoir adapter leur enseignement, les devoirs ainsi que les façons d’évaluer l’élève selon ses besoins particuliers, ils sont aussi appelés à rencontrer les parents qui sont généralement inquiets. Les parents ont de grandes attentes envers l’école, mais les enseignants en ont aussi beaucoup par rapport à eux et à cet élève dont la nature des difficultés n’est pas toujours claire. Même lorsqu’elle l’est, comment faire avec cet élève qui apprend différemment? Le défi est de taille et souvent source de tensions entre des parents qui veulent beaucoup, un enseignant qui veut beaucoup et un élève qui aurait tant souhaité que tout soit différent. Comment aider des parents à aider leur enfant dans un contexte où l’enseignant lui-même se sent parfois dépassé? Prenons l’histoire de Sam pour illustrer la rencontre de diverses perceptions autour des besoins d’un enfant. Sam est un élève qui, contrairement à ce qu’on peut penser à première vue, ne présente pas de véritable trouble déficitaire de l’attention (TDAH). Il n’est pas « TDAH », pour reprendre une expression couramment utilisée (« c’est un TDAH ») et qui malheureusement confond l’enfant et son trouble, d’où un étiquetage abusif encore trop souvent toléré dans nos milieux respectifs. Sam ne présente donc pas de TDAH. C’est un petit garçon comme les autres avec ses particularités, son style d’apprentissage… et aussi avec ses difficultés à être attentif. Sam voudrait bien faire, mais il n’arrive pas toujours à se souvenir des consignes qu’on lui donne verbale-ment. En effet, les mots qu’il a entendus se bousculent et s’accrochent difficilement dans sa mémoire, surtout s’il n’a pas accès à des repères plus visuels qui lui permet-traient de « voir les consignes » et de s’organiser mieux dans le temps comme dans l’espace. Sam est présent à tout ce qui se passe autour de lui, notamment aux bruits et aux conversations qui l’entourent. Il a plein d’idées qui vont vite dans sa tête. De lien en lien, il se retrouve parfois, dans sa tête, loin de l’endroit où l’enseignante souhaiterait qu’il soit. Il est tout simplement rendu plus loin dans ses réflexions qui, au départ, avaient pourtant été éveillées par les propos de l’enseignante. De ce fait et parce qu’il a tendance à travailler aussi vite qu’il pense, Sam saute des étapes, des détails et des procédures lorsqu’il tente de répondre aux attentes. Toutes ces caracté-ristiques nous amènent à évoquer le TDAH. Toutefois, le style cognitif d’un enfant suffit parfois à engendrer beaucoup d’impulsivité et des comportements qui s’appa-rentent à ceux d’enfants aux prises avec un TDAH. Alors que l’enfant, comme Sam, n’a voulu qu’arriver droit au but, à la vitesse de sa pensée, c’est-à-dire rapidement!

Les parents de Sam, monsieur et ma-dame Suffit, ont quant à eux l’impres-sion que l’enseignante ne comprend pas bien leur fils parce qu’elle ne met pas en place les interventions nécessaires. À leurs yeux, elle n’arrive pas à encadrer leur garçon, brillant, si créatif, mais dans les faits fort peu structuré.

—Et finalement, il y a l’enseignante de l’école Notre-Dame-du-Bon-Vouloir, qui s’évertue tous les jours à répondre aux besoins individuels de chacun de ses élèves tout en assurant le fonction-nement du groupe; l’enseignante qui a parfois le sentiment d’être comme une âme en peine, privée du soutien des pa-rents pour l’accompagner dans la cour-se… au cœur de cette constellation, il y a Sam qui sent bien que les adultes de sa vie sont un peu déçus de lui…

—Le piège ou la solitude de chacun, c’est bien souvent le morcellement. Chacun dans son espace, son territoire d’action, sa case d’intervention, son petit vase clos. L’enfant passe d’une « île » à l’autre, avec les attentes et les consignes de l’un qui ne se rendent pas nécessairement à l’autre, comme un cahier de devoir oublié ou un message glissé dans une bouteille lancée à la mer et qui peut-être…

—Alors, comment éviter un tel morcelle-ment où chacun intervient à sa façon, l’un à la suite de l’autre, mais avec, mal-gré tout, les meilleures intentions du monde? Comment travailler davantage ensemble tout en gardant chacun son rôle spécifique auprès de l’enfant? Com-ment faire pour que l’enfant sente que les adultes autour de lui interviennent avec cohérence sur le plan des attentes, des façons de faire, de dire, d’accompa-

« touS Pour un… »

karine BusiLacchi orthopédagogue chu sainte-justine serge Marcotte enseignant et chargé de cours cégep andré-Laurendeau et université de Montréal

36+3

7a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 37: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

gner, mais aussi avec une connaissance et une reconnaissance des contextes et des besoins de chacun, un respect des rôles, des limites et des forces?

—Une collaboration efficace entre tous ces acteurs peut nous amener à imagi-ner l’enfant au cœur de l’action, sur un toboggan qui, dans sa descente, glisse tout en touchant les deux bandes à tour de rôle : la bande-école, la bande-parent. Son parcours bien balisé lui donne beau-coup de liberté à l’intérieur d’un cadre clair et, de ce fait, rassurant pour tous. Une fois les rôles bien établis, comment travailler ensemble, et mieux? Tout est bien souvent un jeu de perceptions qui peuvent alors être source d’opposition ou de diversité. Un regard jeté d’un seul œil nous donne une image en une di-mension et avec un seul angle, alors que deux yeux apportent relief et profondeur. Plusieurs regards sur une même situa-tion, c’est donc aussi une opportunité de « mieux voir » et de mieux comprendre.

—Pour entrer en relation avec un parent différent, en raison de ses résistances ou du fait qu’il a un enfant avec des besoins particuliers au sujet duquel on se comprend mal, il faut parfois opérer une rupture de ses propres perceptions, avoir suffisamment d’équilibre pour faire l’exercice de se décentrer momen-tanément de soi pour sentir la position de l’autre, chercher à comprendre où cet autre se situe et pourquoi il réagit ainsi. Comme enseignant, on a une vision scolaire de l’enfant, à travers ses pro-ductions, son fonctionnement dans la classe et avec les autres. C’est une photo très spécifique qui nous donne une vi-sion très parcellaire qui peut toutefois s’enrichir grâce au dialogue avec le pa-rent. Mettre en dialogue ses perceptions de l’enfant nécessite de s’inscrire dans trois angles d’échange (trois niveaux de concertation mésosystémique tels que dé-finis par Bronfenbrenner, 1992) :

—U• n angle « d’information » qui permet de savoir, d’être informé de ce qui se passe dans le microsystème de l’autre et de nommer ce qui se passe dans le nôtre (ex. : par l’échange de messages par l’agenda, le courriel). C’est la photo de ce qui se passe.

U• n angle de « communication » qui implique de trouver des façons d’avoir un continuum dans l’échange (une continuité de l’information qui dé-passe les trois rencontres de bulletin prévues). C’est suivre le mouvement de l’enfant.U• n angle de « coopération » qui per-met de reconnaître et de définir le champ d’action et l’expertise de cha-cun dans l’atteinte de buts certes com-muns, mais par des moyens propres à chacun. C’est l’ancrage et l’arrimage.

—Certains diront : « Rien ne garantit que ça marche ». En effet, car en éducation, il y a peu de « garantie », il n’y a que des voies plus ou moins fécondes à emprun-ter. Le conflit ou la tension avec des pa-rents est toujours une occasion de prise de conscience et de développement, selon la façon dont on négocie cette zone d’inconfort! Ainsi, comme enseignant, éviter d’entrer en lutte contre un parent « résistant » ou « différent », c’est choisir de ne pas gagner sur l’autre, mais de se donner le défi de gagner l’autre et de s’en faire un allié, un partenaire. C’est aussi prendre conscience que derrière chaque résistance, il y a une peur à compren-dre, à apaiser, et que la peur est souvent nourrie du fait de ne pas savoir ou de ne pas comprendre. Savoir, informer, pour comprendre et coopérer. Ainsi, par l’in-formation, la communication, la coopéra-tion, se révéler à l’autre. Révéler sa façon de faire dans la classe, ses stratégies pédagogiques, ses inquiétudes à propos de l’enfant, ses possibilités et ses limites comme enseignant pour permettre de générer chez les parents des idées créa-trices et « autocritiques » de leur propre fonctionnement auprès de leur enfant.

—Trouver des mécanismes de communi-cation efficaces en créant des lieux de concertation qui permettent de dire, tout en mettant en place des plans d’action intégrés au quotidien qui allient le pa-rent, l’élève et l’enseignant, quel défi fé-cond et porteur d’apprentissage! Quelle belle quête de cohérence au service des besoins des enfants, particulièrement de ceux qui apprennent différemment et qui questionnent, interpellent nos cadres d’action professionnels et personnels!

« Tous pour un et… tous pour tous »! N’est-ce pas là l’essentiel au cœur de la vie d’élève de Sam Suffit?

—références

Brofenbrenner, U. (1992). Évolution de la fa-•

mille dans un monde en mutation. Apprentissage

et socialisation, vol. 15, no 0, p. 181-193.

Meirieu, P. (1991, 1992). • Le choix d’éduquer :

éthique et pédagogie. Paris : ESF, 198 p.

Des stratégies pour informer : (la photo de ce qui se passe)

Laisser un message dans l’agenda (un mot • qui encourage, un mot qui souligne les bons coups, un mot qui attire l’attention et qui se veut un rappel de quelque chose à ne pas oublier…);Envoyer une photo de l’enfant en situation • d’apprentissage (une façon pour le parent de « voir » son enfant en action dans la classe);S’informer de changements vécus à la mai-• son lorsque des difficultés soudaines appa-raissent;…•

—Des stratégies pour communiquer : (suivre le mouvement de l’enfant)

Partager fréquemment des moyens effica-• ces expérimentés à l’école ou à la maison par l’entremise d’un cahier ou d’un duo-

tang qui se promène d’un milieu à l’autre comme par exemple :Des consignes visuelles avec pictogrammes • pour aider l’élève à faire son sac ou pour l’aider à se souvenir des étapes en résolu-tion de problèmes mathématiques;D’une feuille avec les étapes d’une tâche à • cocher pour structurer la période des de-voirs;D’idées pour favoriser l’autonomie (ex. : • utilisation de la minuterie, du petit drapeau blanc pour demander de l’aide, etc.);…•

—Des stratégies pour coopérer : (l’ancrage et l’arrimage)

Dans le cadre d’un plan d’intervention plus • personnalisé aux besoins spécifiques d’un élève, rencontrer les parents et clarifier avec eux les forces et les défis de l’élève, les objectifs, les stratégies, etc. Se donner des nouvelles du cheminement à travers un ca-hier ou un portfolio qui laisse des traces de la progression;En rencontre avec des parents, dessiner • sur une feuille des cercles avec des zones communes et des zones distinctes. Y ins-crire les rôles spécifiques de chacun et les mandats communs.

Page 38: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Dyslexie et autres maux d’école Quand et comment intervenirMarie-Claude BéliveauTirer profit des forces de l’enfant et le remettre en piste sur le plan scolaire.

…et beaucoup d’autres titres à découvrir au :www.editions-chu-sainte-justine.org

Au retour de l’école…La place des parents dans

l’apprentissage scolaireMarie-Claude Béliveau

Des stratégies efficaces pour éviter le cauchemar des devoirs à la maison.

L’estime de soi, un passeport pour la vie

Germain DuclosPour développer des attitudes éducatives positives

qui aideront l’enfant à acquérir une meilleure connaissance de sa valeur personnelle.

Parents d’adosDe la tolérance nécessaire à la nécessité d’intervenirCéline Boisvert

Pour aider à orienter les parents vers les meilleures stratégies relationnelles

à adopter à l’adolescence.

Le trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivitéSous la direction de Stacey BélangerOuvrage multidisciplinaire qui présente les notions les plus récentes sur le TDAH.

Guide Info-Famille

Centre d’information du CHU Sainte-JustineUn outil de travail pour toute personne travaillant

auprès des enfants et des familles

Disponibles en librairie et aux Éditions : 514 345-4671

Annonce_AQEP_2009.indd 1 09-07-15 11:20

Page 39: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

Véronique fait nerveusement tourner son globe terrestre. Il ne reste que trois jours avant la remise des premiers bulletins. Trois jours de sommeil difficile et d’attaques d’urticaires au terme desquels la jeune enseignante devra soutenir leurs regards, interpréter leurs silences, affronter leur attitude, diminuer leurs inquiétu-des, ignorer leur ton et combattre la tentation d’enfermer sa tête – ou la leur? – entre les deux moitiés dudit globe terrestre. Car dans trois petites journées, redoutés comme les agents de l’impôt ou la grande Inquisition, ils seront là, dans sa classe : les parents. L’enseignante se demande pourquoi elle n’a pas choisi une profession plus tranquille. Contorsionniste, tiens, ou démineuse dans l’armée canadienne… Qu’elle se rassure pourtant : la majorité des parents ne seront rien de moins que charmants et coopératifs. Toutefois, l’enseignant expérimenté qui rédige ces lignes

sait qu’il existe aussi quelques… cas! Qu’il a classés. Le connaiSSant Descrip-tion Le premier de ses trente-trois conseils jaillira sept à huit secondes après son arrivée et il vous demandera cinquante-six fois au cours de l’entrevue : « Sais-tu ce que je ferais, moi, à ta place? ». Eh bien, c’est précisément là où il faut le remettre : à sa place. Et vite. Que faire? Après avoir rappelé que vos quatre ans de forma-tion universitaire incluent des stages en classe, préciser que la dynamique de tren-te enfants dans un groupe n’est pas la même que celle de deux jeunes dans un sous-sol. Au besoin, démontrer que, malgré les apparences, le métier d’enseignant est différent de celui d’instructeur de hockey. Puis y aller de vos conseils.

L’occuPéDescriptionÀ la tête d’une entreprise en plein essor ou à l’aube d’une carrière florissante, l’occupé n’aura que peu de temps à vous consacrer et on le reconnaîtra aisément à sa façon de garder obstinément une main sur la poignée de porte. Que faire? L’inviter à s’asseoir, le rassurer sur la durée de la rencontre, puis aller à l’es-sentiel en parlant lentement, conférant ainsi votre rythme à l’entretien. Et à la fin, un œil sur votre montre, vous excu-ser de l’avoir retenu si longtemps…

Le mouDescriptionIl entre avec un sourire résigné, s’assoit avec un sourire résigné et se résigne à garder son sourire même face à la pire nouvelle. Il hausse régulièrement les épaules et répète que son enfant est « comme ça », puis invoque la télé, les jeux vidéo ou ses nombreuses soirées d’amis pour expliquer ses insuccès.

ParentS en touS genreS

Louis éMonD enseignant en prêt de service au ministère de l’éducation, du Loisir et du sport [email protected]

Page 40: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Que faire?Tout mettre en œuvre pour convaincre ce parent qu’il est encore temps de se ressaisir, d’affirmer son autorité, d’im-poser des limites dont tout enfant a besoin puisqu’elles le sécurisent. Bref, l’exhorter à redevenir le parent. Lui pro-poser une aide professionnelle si néces-saire et, enfin, lui promettre de longues nuits d’insomnies à l’adolescence de son enfant si rien n’a changé.

Le ronchonneurDescriptionIl maugrée sur tout : l’école, les vacan-ces, la discipline, l’indiscipline, la réfor-me, les devoirs, les bulletins, l’oisiveté, les performances de son enfant, le prix de l’essence et les chats qui font leurs besoins sur son terrain…Que faire?Lui glisser le plus vite possible, exemples à l’appui, que si le monde va à sa perte, son enfant par contre s’en tire plutôt bien. L’amener à faire des constats po-sitifs sur ce dernier. Sans le transformer en président du club des optimistes, vous aurez eu son oreille pendant un moment.

—Le DéJÀ VuDescriptionIl n’a de cesse de vous donner des nou-velles de sa fille à qui vous avez ensei-gné il y a deux ans, comparant systé-matiquement ses deux enfants tout en vous répétant qu’il est important de ne pas les comparer.

Que faire?Consacrer une minute aux nouvelles de « l’ancienne ». Puis, d’un ton résolu, amorcer la rencontre en prononçant souvent le prénom de l’enfant dont il est question. À la moindre récidive, garder le silence en affichant une mine légère-ment ennuyée puis reprendre où vous avez laissé.

Le SurProtecteurDescription« Mon enfant n’est pas assis près de la fenêtre, j’espère, ou de la cage à hamster – ses allergies! – ou de Florent Fillion – mauvaise influence… » Une fois ses questions résolues, le surprotecteur ne s’enquerra pas du bulletin mais de la rougeur que le petit avait à l’œil ce midi : « Aviez-vous remarqué? ».Que faire?Le rassurer sur l’environnement où évo-lue son enfant. Lui rappeler que le corps n’apprendrait jamais à se guérir si on le gavait de médicaments au premier signe de malaise. Lui dire qu’il en va de même pour son enfant qui doit apprendre à se défendre seul, et à faire connaître et re-connaître par lui-même ses besoins.

L’inViSibLeDescriptionCe parent se reconnaît à sa façon de se désister à la dernière minute, prétex-tant un rendez-vous urgent, ou bien en s’entendant avec vous sur l’heure de la rencontre et en vous posant ensuite un lapin.Que faire?Lui donner un nouveau rendez-vous, insister pour qu’il vienne. Sans en faire une règle générale, l’expérience indique que ces parents-là sont parmi les plus importants à rencontrer, car leur atti-tude témoigne souvent d’une perte de confiance envers l’école. Il faut la lui faire retrouver. Pour lui et son enfant.

Le SoLo en guerreDescriptionParlant de son « ex » avec mépris, il lui impute la majorité des difficultés éprou-vées par leur enfant, trouve que depuis la séparation – et c’est sa décision! –, plus rien ne va et vous narre par le détail ses dernières frasques.Que faire?L’écouter quelques minutes, mais dès que l’occasion se présente, le ramener sur son enfant, ses besoins, ses succès, son attitude. Et surtout, ne jamais pren-dre son parti contre l’autre dans l’es-poir d’écourter la diatribe. Cela risque d’avoir autant d’effet que de souffler sur un feu de foyer pour l’éteindre…

—Le grouPieDescriptionEn entrant, il scrute les murs à la recher-che de son dessin, de sa production, de son projet. Puis rouge de fierté, il s’as-soit, vous fixe et attend. Un peu comme on attend que l’orchestre attaque les premières notes de… la neuvième de Beethoven, mettons : « Et puis? Com-ment il va mon bébé? ».

40+4

1a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 41: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Que faire?Attaquer avec les forces et les réussites de l’enfant, bien entendu, avant d’abor-der les aspects qui posent certains problèmes (peut-être sa difficulté à tra-vailler en équipe, son individualisme, son humeur changeante…). Terminer par cette maxime : si tous les enfants étaient comme leurs parents les voient, la terre ne serait peuplée que de dieux et de déesses.

—Le SoSieDescription« J’étais pareil… » Cette réponse revien-dra au moins soixante-quinze fois au cours de l’entretien et sera dite sur un ton qui voudra tout excuser.Que faire?Insister sur le fait que le monde et les temps changent et que si le parent a quand même réussi à faire sa vie malgré son attitude peu coopérative à l’école, il en va tout autrement un quart de siècle plus tard. Lui mentionner que « tel père tel fils » n’est pas une loi incontournable.

Le trèS aLLoPhoneDescriptionIl a du mal à dire bonjour, sourit en répé-tant son nom, se montre extrêmement gêné et n’ose pas s’asseoir puisqu’il cherche à expédier cette entrevue et re-partir avec le bulletin de son enfant que ce dernier tentera de lui expliquer.Que faire?Remettre le bulletin avec un mot sur le-quel vous invitez le parent à revenir avec son enfant ou avec une personne qui parle sa langue et le français. Il est im-portant que des personnes immigrantes

nous sentent tout autant concernés par l’éducation de leur enfant que par celle de n’importe quel autre jeune.

Le boute-en-trainDescriptionIl est exactement à l’image de son en-fant qui, assis au centre de la classe, fait rigoler tout le monde. Rien n’est sérieux avec ce champion du gag et même après la pire des nouvelles concernant son en-fant, il vous fera une blague : « Mon en-fant va doubler? Tant mieux! Je le trou-vais un peu maigre… ».Que faire?Surtout ne pas rire, même si c’est vrai-ment drôle. Difficile d’autant plus si on est porté à rire même des blagues moins bonnes, simplement pour être poli. Mais il convient d’aller au-delà de ce mécanis-me de protection en évitant de l’encou-rager. Comme son enfant quoi…

—L’imPreSarioDescriptionAussitôt entré dans le local de classe, il vous défile les honneurs et les prix remportés par son enfant en musique, en patinage artistique, en bowling ou en équitation : « Si on le laisse faire, il va aller loin celui-là… ».Que faire?Reconnaître que les activités artistiques ou sportives sont une excellente source de valorisation pour un enfant, mais qu’elles ne devraient pas prendre toute la place dans sa vie. Que tout est ques-tion d’équilibre. Lui recommander de visionner le film Les vrais perdants d’An-dré Melançon.

Le membre D’un grouPe De motarDS criminaLiSéSDescriptionIls se déplacent rarement seuls. Ce sont souvent de bons parents qui feront vo-lontiers un peu de bénévolat dans votre classe et avec qui tous les enfants, sans exception, seront toujours aimables. À Noël, leurs cadeaux sont coûteux, à un point presque gênant, mais il vaut mieux ne pas les refuser.Que faire?Dire que tout va bien. Répéter que tout va bien. Ne pas regarder le parent trop longtemps dans les yeux. Ne jamais uti-liser l’expression en d’dans même pour dire que les enfants y sont restés parce qu’il pleuvait. Si c’est un homme, ne pas lui demander pourquoi son enfant l’ap-pelle « Mom ». Dire que tout va bien. Remercier à l’avance pour le cadeau. Re-dire que tout va bien.

—Quelque soit la sorte de parent que l’on reçoit, au fond, l’important est de se rappeler que nous sommes là non pas pour l’éduquer lui, mais pour l’aider à aider son enfant. Au demeurant, acte d’humilité oblige, précisons que si cet article avait été écrit pour un magazine s’adressant aux parents, certains por-traits d’enseignants auraient pu ressem-bler à ceux que vous venez de lire. Parce que le ronchonneur ou le mou a aussi sa place dans une école…

Page 42: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

s’améliorer en écriture par exemple, et ce même une fois les devoirs terminés, ils proposeront le piège qu’avant long-temps, l’enfant reconnaîtra assez vite : « Viens, on va jouer un peu à l’école. »… moment dont les parents profitent évi-demment pour poursuivre leur nouveau rôle d’enseignant substitut.

—Sans savoir précisément pourquoi, les enseignants constatent alors bien sou-vent qu’un champ de bataille s’est ins-tallé à la maison autour des devoirs. À leur tour de penser que ce sont les pa-rents qui s’y prennent mal… Ainsi, les enseignants se font aussi une idée de la façon dont se passe cette période de tra-vaux scolaires à la maison. De multiples façons, les enfants leur en apprennent beaucoup sur les devoirs faits ou non, plus ou moins bien faits, oubliés, éga-rés, barbouillés, déchirés ou encore… impeccables. Les fait-il seul ou presque? Sinon, avec qui les fait-il? Combien de temps cela prend-il? Dans quel climat?

Les devoirs, véritable fenêtre sur l’école… et la maison! C’est en effet bien sou-vent par ce biais que parents et enseignants peuvent tenter de voir, de comprendre et d’expliquer ce qui se passe quand l’enfant présente des difficultés à l’école. En regardant ce qu’il doit faire comme devoirs le soir à la maison et comment il les fait, les parents se font une idée de ce qui est vu en classe mais aussi de l’intérêt que l’enfant porte à l’école et des moyens qu’il prend pour étudier, moyens qu’on lui a ou non enseignés. En prenant le temps d’en discuter un peu avec lui, les pa-rents peuvent aussi voir de quelle façon leur enfant perçoit son enseignant. Dès lors, ils se font une idée sur les moyens que ce dernier utilise pour gérer sa classe et aider leur enfant à apprendre. De part et d’autre, on porte des jugements C’est par la « fenêtre des devoirs » que les parents porteront nécessairement un premier jugement : « Cette enseignante a de bonnes idées! » ou « Celui-là donne beaucoup trop de devoirs! ». On assiste donc rapidement au jugement parfois sévère des parents à l’égard des enseignants : « Elle est sûrement bien mal organisée pour demander aux enfants de faire ce qu’ils n’ont pas eu le temps de faire durant la journée. » D’autres diront avec soulagement, suite à des années plus difficiles : « Enfin un prof qui sait les encourager par des mots bien personnalisés sur leurs copies d’examens… Mon fils ne se sent plus un parmi tant d’autres dans sa classe. » Certains parents sauraient com-ment faire mieux avec leur enfant… : « Viens, je vais t’expliquer, moi. » Ou encore : « C’est bien beau de lui donner tout ça à faire, mais le prof ne doit pas leur avoir expliqué ces notions parce que visiblement, mon fils ne comprend jamais rien! » Parce que bien souvent, un jugement est porté sur l’enseignant avant de l’être sur l’enfant. Les parents soucieux de la scolarité de leur enfant sont alors souvent portés à intervenir eux-mêmes pour qu’il réponde à leurs propres attentes. Ils le font en s’adressant d’emblée à l’enseignant ou en intervenant directement auprès de l’enfant : « Re-commence-moi tout ça, c’est trop malpropre. » Pire encore, pour aider leur enfant à

DeVoirS et LeçonS… un carreFour reLationneL

Marie-cLauDe BéLiveau orthopédagogue et psychoéducatrice chu sainte-justine [email protected]

42+4

3a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 43: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

De part et d’autre, certains jugements sont donc posés, parfois positifs, parfois moins. Tout cela colore nécessairement la relation qui s’établit entre les parents et les enseignants. Ces jugements réci-proques, teintés des expériences de vie de chacun et généralement très sponta-nés, peuvent appuyer ou exacerber les perceptions que chacun se fait de l’autre au sein de ce triangle relationnel ensei-gnant-enfant-parents.

—Il faut savoir que les parents envoient leur enfant à l’école avec plus ou moins d’ambivalence selon ce qu’ils ont vécu dans leur propre histoire scolaire et per-sonnelle. Ils agissent et réagissent avec ce qu’ils sont devenus. Ils confient leur enfant à une tierce personne qui désor-mais, et encore une fois pour toute une année, prendra beaucoup d’importance dans sa vie. Leur capacité à déléguer l’autorité parentale à cet enseignant n’a d’égal que la confiance qu’ils ont en cette personne. Et on sait combien les relations humaines se construisent sur des impressions subjectives qui n’ont rien à voir avec une compréhension in-tellectuelle de ce qui est et sera.

—Il est clair que l’enfant qui ne présente aucune difficulté scolaire, qui est auto-nome dans ses devoirs et ses leçons et qui a de l’intérêt pour l’école ne cause pas les mêmes soucis à ses parents et à ses enseignants. Par ailleurs, lorsqu’il présente certaines difficultés, ce terrain partagé où « se rencontrent » l’enfant, ses parents et son enseignant, peut deve-nir un lieu de confrontation. C’est bien souvent une certaine confusion entre les rôles de chacun qui est à la base des tensions ainsi générées. La complémen-tarité pourtant essentielle entre le rôle des parents et celui de l’enseignant est alors compromise.

—L’enseignant, seul maître à bordPour éviter une telle confusion des rôles, l’enseignant doit signifier et faire reconnaître SON autorité en matière d’enseignement, notamment quant à la question des devoirs à la maison. Il

doit préciser clairement ses attentes, no-tamment en ce qui concerne les devoirs, ce qu’il veut mais aussi ce qu’il ne veut pas comme, par exemple, la correction systématique de tous les devoirs par les parents avant le retour en classe. Ainsi, il doit signifier clairement aux parents, comme aux enfants, le temps qui devrait être alloué aux devoirs et aux leçons, la place qu’il souhaite que le parent pren-ne au cours de cette période, ce qu’il faut faire lorsque l’élève ne comprend pas ou les moyens à prendre lorsqu’il est en panne. Cela étant établi, les conditions sont réunies pour que la période des de-voirs et des leçons demeure l’affaire du jeune en lien avec son enseignant qui l’aura guidé avec ses directives.

—À notre avis, il faut éviter de demander aux parents de superviser de trop près cette période. Cette façon de faire place le parent en position d’enseignant subs-titut, ce qui envenime inévitablement, à court ou moyen terme, le rapport que l’enfant et ses parents établissent avec l’école. C’est pour cette raison que nous recommandons souvent aux parents dont l’enfant manifeste de l’opposition au moment des devoirs et des leçons de s’en remettre à l’autorité de l’enseignant

qui, le cas échéant, aura beaucoup plus de moyens et de pouvoir qu’ils en ont eux-mêmes, aussi compétents soient-ils, pour faire comprendre à l’enfant le bien-fondé des devoirs qu’il lui donne.

—Cela ne signifie pas qu’il faille évacuer les parents du terrain scolaire, au contraire! Il s’agit de les amener à faire autrement qu’en se substituant à l’enseignant, et ce, pour que l’enfant profite de la riches-se de la complémentarité des rôles pa-rents-enseignants. Le parent doit se voir comme un accompagnateur qui n’agit

qu’au besoin, pour soutenir l’enfant, l’encourager, lui rappeler les moyens et attentes de l’enseignant. Il est le mieux placé pour inciter l’enfant à utiliser ses nouvelles habiletés et connaissances dans un contexte de vie quotidienne, ce qui donne du sens à la scolarité. Il ne de-vrait jamais se substituer à l’enseignant, seul adulte en position d’autorité pour toute question relative aux apprentissa-ges scolaires… et qui doit être respecté comme tel. Si tel est le cas, le parent de-vrait chercher à comprendre pourquoi son enfant ne parvient pas à répondre aux exigences de son enseignant plutôt que tenter de s’y substituer. La meilleure personne avec qui discuter des difficul-tés d’un enfant est justement cet ensei-gnant. Ce dernier pourra alors tenter de comprendre ce qui se passe pour ensuite proposer à l’enfant et à ses pa-rents des moyens susceptibles de favo-riser chez lui le développement de plus d’autonomie.

—De plus, dans ce contexte, l’enseignant devra parfois aider le parent à prendre conscience que, plus il aide l’enfant à faire ses devoirs en restant assis à côté de lui prêt à répondre à la moindre ques-tion, moins il favorise l’acquisition de

cette autonomie puisqu’il renforce ainsi la dépendance de l’enfant à son égard. En effet, celui qui reçoit autant d’atten-tion parentale en « ayant besoin d’aide » ne renoncera pas facilement à ce mo-ment privilégié, surtout si c’est le seul moyen qu’il a trouvé (inconsciemment) pour vivre un moment privilégié avec sa mère ou son père dans sa journée.

L’enseignant devra parfois aider le parent à prendre conscience que, plus il aide l’enfant à faire ses devoirs en restant assis à côté de lui prêt à répondre à la moindre question, moins il favorise l’acquisition de cette autonomie puisqu’il renforce ainsi la dépendance de l’enfant à son égard.

Page 44: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Saviez-vous que?en mai 2009, le Conseil canadien sur l’apprentissage (CCA) publiait une étude sur l’impact des devoirs dans la réussite scolaire des élèves. Ce rapport statue d’abord sur le fait que les devoirs consti-tuent l’un des aspects de l’éducation qui concerne le plus de familles canadien-nes. S’ajoutant aux nombreux débats autour de la question de leur efficacité et de leur utilité, il confirme que les devoirs sont associés à une plus grande réussite scolaire chez les élèves si leur charge est raisonnable et s’ils requièrent une parti-cipation active de l’élève. Il semble aussi que ce soit aux élèves qui réussissent le moins bien que les devoirs seraient d’une plus grande utilité.

—Des conclusions de cette étude, on peut déduire que l’impact attendu des de-voirs sur la réussite scolaire est moindre si la participation de l’enfant n’est pas suffisamment active, ce qui se produit quand les parents s’impliquent trop. Ici comme ailleurs, trop c’est comme pas assez. Les enseignants sont bien placés pour aider les parents à trouver leur

juste place dans l’accompagnement de leur enfant autour d’une activité qui les préoccupe au plus haut point, sa scola-rité, et ce, surtout lorsque celle-ci ne se passe pas « normalement ».

—en dernier lieu…Le cauchemar qui se vit à la maison autour des devoirs et des leçons se pour-suit bien souvent à l’école pour l’enfant. Cette question devient bien souvent un

sujet de confrontation entre l’enseignant et les parents qui cherchent à se protéger de ce qu’ils perçoivent comme des juge-ments portés sur leur propre valeur.

—Pour toutes ces situations conflictuelles qui se vivent au quotidien autour des devoirs et des leçons, situations qui met-tent en jeu la relation parents-enfant-en-seignant, c’est certainement le dialogue qui reste le moyen le plus efficace pour sortir de l’impasse. Loin d’être banales,

ces situations de tension et de grince-ments de dents peuvent être détermi-nantes pour la réussite scolaire d’un élève. Dans ce cadre, la communication entre les enseignants et les parents est une piste de solution de premier plan. Elle devrait donc occuper une place de choix dans l’horaire déjà surchargé des enseignants. Mais où trouver le temps? Cette denrée rare qu’est le temps de-vrait être considérée comme un outil

pédagogique et être allouée aux ensei-gnants. Il s’agit, à notre avis, d’une res-source nécessaire pour l’établissement de relations parents-enfant-enseignant constructives et déterminantes pour la réussite scolaire des élèves.

44+4

5

Pour toutes ces situations conflictuelles qui se vivent au quotidien autour des devoirs et des leçons, le dialogue reste le moyen le plus efficace pour sortir de l’impasse.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 45: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 46: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

Le travail auprès des enfants, dans quelque domaine que ce soit, est fait de particu-larités, voire de subtilités relationnelles, qui échappent à beaucoup d’autres métiers ou professions. Ainsi, que nos visées soient pédagogiques ou thérapeutiques, il nous faut généralement parvenir à nous mettre un peu dans la peau du parent pour pou-voir déployer pleinement notre action professionnelle en présence des élèves dont nous avons la charge. Parmi les obligations qui nous incombent, qu’on soit théra-peute ou enseignant, il y a cette nécessité de créer des alliances et d’établir des ré-seaux de communication efficients avec les parents qui nous confient leurs enfants. Dès lors, nous sommes imputables des responsabilités inhérentes à notre action professionnelle à l’égard de leurs enfants, d’où l’importance d’une saine collabora-tion parents/enseignant. Dans un esprit de collaboration, nous cherchons souvent à interpeller les parents par le biais de contacts et d’échanges répétés qui ont néces-sairement des impacts sur le plan interpersonnel. Bien que notre action repose avant tout sur des assises purement professionnelles, le degré de familiarité qui peut résul-ter de ces échanges déborde parfois de notre cadre de travail et peut court-circuiter notre action au quotidien. C’est souvent autour des craintes et de l’inconfort que nous éprouvons en interpellant un parent au sujet des difficultés de son enfant que nous réalisons à quel point il est difficile de bien se positionner dans ce lien de colla-boration. C’est d’ailleurs autour du concept de « juste distance » qu’il nous paraît intéressant de réfléchir puisque notre façon de percevoir la collaboration avec les parents détermine souvent le type de lien que nous établirons avec eux. Depuis quelques années, le mouvement de réintroduction du vouvoiement en milieu sco-laire alimente la controverse et met en lumière le type de rapport que chaque ensei-gnant souhaite mettre de l’avant avec ses élèves. Un peu en amont de ce débat, on peut se demander si le tutoiement enseignant-parent ne constitue pas l’un des pre-

miers pièges dans lequel les rapports à construire autour de l’éducation et de la scolarisation de l’enfant peuvent s’enli-ser. En effet, nous sommes d’avis que le fait d’établir avec le parent une relation dans laquelle une trop grande familiarité se développe constitue un facteur de ris-que pour la réussite de ce travail de colla-boration qui doit se faire entre les parents et les enseignants.

—Ainsi, pour de nombreux parents, le début de l’année scolaire est un incitatif à se manifester auprès des intervenants qui travailleront auprès de leur enfant. C’est souvent dans un climat de camara-derie et d’échanges cordiaux qu’ils pren-nent contact et manifestent leur désir de collaborer. Leur empressement à créer des liens traduit généralement leur inves-tissement du milieu scolaire et sous-tend parfois un désir très légitime de bénéfi-cier de contacts plus privilégiés avec les intervenants. Pour asseoir efficacement des formes de collaboration, il peut aussi être tentant pour l’enseignant de s’ar-rimer à eux très rapidement et de sous-crire au climat de familiarité qu’induit le tutoiement. Or, sans le vouloir, cet em-pressement à créer des canaux de com-munication avec les parents provoque parfois un climat de confusion et amène ces derniers à percevoir un nivellement des rôles dans les liens qui les unissent à nous. Les parents ayant souvent des attentes et des exigences qui leur sont propres, leurs demandes peuvent par-fois devenir exponentielles et présenter un caractère abusif pour les intervenants scolaires qui se sentent à la fois liés et re-devables à l’endroit de ces derniers.

—Lorsque des parents sont confrontés à la présence de difficultés très impor-

MicheL MarsoLais psychoéducateur chu sainte-justine

reLationS Parent-enSeignant… un raPPort ProFeSSionneL aVant tout

46+4

7a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 47: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

tantes chez leur enfant, ils ont souvent un réflexe très naturel de projeter la responsabilité de son dysfonctionne-ment sur l’extérieur, et parfois sur les membres de l’équipe scolaire. À titre d’intervenants en santé mentale, nous sommes régulièrement témoins de ver-balisations de parents qui accusent avec véhémence l’équipe scolaire de ne pas les avoir informés suffisamment tôt de la nature ou de l’ampleur des difficultés de leur enfant. Plus encore, ils se sen-tent souvent trahis et vont mettre en contradiction la cordialité des rapports de l’enseignant ou de l’équipe-école avec la sévérité de la problématique à laquelle ils font face subitement.

—Ils vont fréquemment personnaliser le conflit et nous parler de l’enseignant fautif comme si ce dernier avait outra-geusement bafoué un lien d’amitié ou manqué de loyauté. Si le tutoiement n’explique pas à lui seul la réaction né-gative des parents en pareille circons-tance, il apparaît clair que des rapports qui tendent vers une plus grande fami-liarité suscitent des attentes qui inter-pellent davantage les qualités humaines de l’intervenant que ses compétences professionnelles. Or, lorsque les mem-bres de l’équipe scolaire transmettent des informations qui sont susceptibles de percuter ou d’inquiéter un parent, le type de lien qui a été mis en place devrait permettre de transmettre librement des observations ou des recommandations aux parents de l’enfant sans craindre que celui-ci se sente trahi par l’ensei-gnant. Souvent, la situation peut se complexifier et le parent se montre alors réticent à l’idée d’entendre d’un interve-nant, qu’il perçoit comme son égal, des propos qui mettent l’emphase sur les difficultés scolaires ou sur les comporte-ments problématiques de son enfant.

—Comme thérapeutes d’enfants, nous sommes souvent happés par des pa-rents qui, en proie à une certaine forme de désespoir, réclament un soutien in-conditionnel de notre part et cherchent à nous convaincre de la mauvaise foi du milieu scolaire. Le sentiment de détres-se des parents est souvent très grand, ce qui nous amène tout naturellement à les soutenir en objectivant des situa-

tions ou en les aiguillant sur des voies de solution. Toutefois, le seul fait de nous éloigner de façon trop marquée de la neutralité bienveillante requise pour travailler avec des enfants en dif-ficulté suffit à créer l’impression que nous cherchons à faire alliance avec eux contre le milieu scolaire. Si nous ne rec-tifions pas le tir rapidement, nous ali-mentons aussi sans le vouloir l’illusion d’un rapprochement avec les parents, ce qui biaise notre action et crée chez ces derniers des attentes auxquelles nous ne pourrons pas répondre.

—Toujours dans cette perspective de trou-ver la bonne distance relationnelle, nous faisons face souvent aux dynamiques personnelles de parents pour qui la prise de contact et les liens de collabora-tion passent par un partage très sponta-né de certains aspects de leur vie privée. Si l’intention de départ est souvent naïve et sans arrière-pensée, il est souvent dif-ficile d’y prêter oreille sans mettre en péril la latitude dont nous avons besoin pour exercer pleinement nos compéten-ces professionnelles. La difficulté est d’autant plus grande que nous sommes souvent appelés à côtoyer des parents avec qui nous pouvons éprouver certai-nes affinités ou avec lesquels il serait possible d’échanger autour d’expérien-ces communes. Si de brèves incursions dans la vie privée constituent souvent un passage obligé pour créer des assi-ses aux réseaux de communication pa-rents-intervenants, il peut être périlleux d’alimenter ce type d’échanges. En effet, la grande accessibilité ou les qua-lités humaines de l’enseignant peuvent devenir pour le parent une mesure des compétences professionnelles de celui-ci, compétences rapidement remises en question dès que la situation de l’enfant s’avère problématique.

—Il va de soi qu’une grande partie du tra-vail de l’enseignant tire sa valeur de ses façons d’être en lien avec les enfants et leurs parents. Si la découverte de l’autre se fait essentiellement à travers les échan-ges et les petits contacts du quotidien, il apparaît prudent de se donner un cadre à l’intérieur duquel l’apport de chacun reste pertinent et de nature à soutenir le fonctionnement scolaire et psychosocial

de l’enfant. Pour éviter que la nature du lien se transforme à notre insu, nous pensons que les préoccupations pédago-giques qui guident le travail quotidien de l’enseignant doivent toujours demeurer au cœur des échanges avec les parents. L’enseignant évitera ainsi l’inconfort de devoir signaler aux parents le fonctionne-ment problématique de leur enfant alors que des liens plus familiers, voire parfois amicaux, se sont développés entre eux. Une opinion professionnelle peut ainsi apparaître incongrue ou agresser le pa-rent si elle semble subitement opposée au ton qui prévalait tout au long du lien de collaboration.

—Il n’est pas toujours facile pour l’en-seignant de bien délimiter son champ d’action sur le plan professionnel puis-que les finalités poursuivies impliquent obligatoirement des aspects de coopéra-tion avec les parents; ce qui peut facile-ment donner lieu à des comportements d’intrusion de la part de ces derniers. La difficulté est d’autant plus grande que chaque intervenant scolaire doit, à cha-que année, s’adapter à un grand nombre d’enfants et de parents dont les traits de personnalité et les caractéristiques sont très diversifiés. Comme intervenant œu-vrant auprès des enfants, on présume que les relations avec les parents des en-fants dont nous avons la charge seront conviviales et harmonieuses; toutefois, force est de constater que cela est loin d’être toujours le cas. Mieux vaut pré-voir à l’avance un espace relationnel non contraignant pour faire face aux écueils qui sont inhérents à toute relation hu-maine. Vouloir aménager cet espace une fois la familiarité installée, c’est briser ou transformer un lien qui existe déjà… avec tout ce que cela implique comme émotions et résistances. Il est toutefois assez fréquent de constater en fin d’an-née scolaire toute la reconnaissance que vivent les parents à l’égard d’un ensei-gnant qui a su aider leur enfant malgré ses difficultés, reconnaissance qui se traduit alors par une grande complicité et la satisfaction du travail accompli! Fi-nalement, la collaboration idéale est un objectif vers lequel tendre et, en ce sens, elle est toujours en devenir. Elle requiert un travail d’équipe où chacun joue son rôle et respecte celui de l’autre.

Page 48: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LeS reLationS ParentS- enSeignantS

DomaineS générauX De Formation

çues dans son éducation à la maison, le non-respect de l’adulte dans le contexte familial dans lequel il a été « élevé », le manque d’hygiène, d’implication émo-tive ou de gros bon sens de ses parents. Ces réflexions dès lors enclenchées biai-sent la perception que l’on se fait de ces parents et affectent d’emblée les futurs échanges avec eux. Rigueur et effort d’objectivité sont donc les guides les plus précieux pour aborder dans un pre-mier temps les parents d’un élève en difficulté psychologique.

—banalisation ou alliance Malgré l’évolution des mentalités et les efforts médiatiques visant à vulgariser les problèmes de santé mentale, évo-quer la possibilité d’un problème de cet ordre demeure encore largement tabou, et peut-être même davantage lorsqu’il s’agit d’enfants. Il est encore courant d’entendre banaliser les difficultés que les enfants peuvent présenter : « Ça va lui passer en vieillissant. », « C’est nor-mal qu’à son âge il n’ait pas le goût de se concentrer sur ses matières scolai-res. », « Il a bien le temps d’apprendre, d’être sage, de devenir plus sérieux. », etc. Cette banalisation est une première barrière à contourner. Il est vrai que le développement de chaque être humain comporte une part d’écueils et de retards considérés comme étant tout à fait nor-maux. Mais il est aussi vrai que si le pro-blème est pris au sérieux au plus tôt, les conséquences sur la perception que l’en-fant a de lui-même et sur sa confiance en lui seront moindres. C’est là autant

Les écueils auxquels l’enseignant se voit confronté dans son dialogue avec les parents d’un élève en difficulté psychologique sont multiples mais non insurmon-tables. Y être sensibilisé permet de manœuvrer avec plus d’aisance afin d’atteindre l’objectif recherché : aider l’enfant à améliorer sa qualité de vie scolaire malgré sa vulnérabilité affective. école et santé mentale Une classe est une représentation en miniature de la société. On y retrouve un échantillon des tendances qui modèlent le profil psychosocial du monde dans lequel nous vivons. Ainsi, selon les statisti-ques communément admises, au moins 10 % de la population présente ou dévelop-pera un problème de santé mentale. Si l’on transpose ces données, c’est dire que deux à trois élèves par classe sont ou seront susceptibles de vivre une difficulté d’or-dre psychologique dans leur vie. Rien d’étonnant alors à ce qu’un enseignant ait à composer plusieurs fois durant sa carrière avec des élèves présentant diverses limi-tes et singularités affectives qui requièrent un soutien particulier. avoir un élève en difficulté psychologique dans sa classe : entre préjugés et objectivité Au-delà du surcroît d’énergie et de patience requis pour composer avec un élève en besoin particulier, des pièges supplémentaires se dressent sur le chemin de l’enseignant qui accompagne ces élèves au quotidien. Malgré toute la bonne volonté de ce der-nier, ces pièges peuvent modifier sa perception de l’enfant… et celle de ses parents. En effet, quel adulte en présence d’un enfant en difficulté n’ébauche pas une ou

deux hypothèses concernant ce que ses parents auraient dû ou ne devraient pas faire? Surgissent des réflexions sur la structure et les limites que l’élève n’a pas re-

L’éLèVe en DiFFicuLté PSychoLogiQue : QueLLe aPProche PriViLégier aVec SeS ParentS?

céLine Boisvert, M. ps psychologue clinicienne chu sainte-justine

48+4

9a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 49: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

de temps et d’énergie gagnés pour qu’il puisse retrouver le plus rapidement pos-sible son élan développemental.

—Pour contourner cette propension à ba-naliser les difficultés de l’enfant, il est bénéfique de tenter d’abord de sensi-biliser les parents à vos observations et questionnements. Nommer d’emblée le problème, coller tout de go une étiquette diagnostique à l’élève risque fort de heur-ter ses parents et de les placer sur la défen-sive. Quelques exemples : « Votre enfant

paraît très anxieux en classe, y a-t-il des problèmes à la maison? » ou « Votre fils semble triste et déprimé, que se passe-t-il? » ou encore « Votre fille ne parvient pas à suivre le rythme du groupe, vous a-t-on déjà dit qu’elle pouvait avoir un retard intellectuel? ». Des parents qui se verraient ainsi interpellés chercheront des justifications à ces observations, nie-ront ces affirmations. Ce sera le début d’une confrontation le plus souvent polie et contenue mais improductive puisque l’enseignant aura tendance à penser de son côté que ces parents sont incapables de reconnaître les difficultés de leur en-fant et qu’ils se montrent opposants et fermés à la discussion. Or, ces deniers sont plutôt surpris et déstabilisés par les propos de l’enseignant et ont tout sim-plement besoin de temps pour réfléchir à ces révélations et pour envisager quant à eux des solutions.

—Une approche positive, à petits pas, basée sur des observations et des faits, soulèvera l’intérêt puis la confiance des parents. Une véritable alliance de travail pourra alors s’installer.

—hérédité et santé mentaleNous connaissons peu la réalité et la complexité de l’arrière-plan familial de cet élève en besoin de soutien particu-lier. Sans le savoir, relater à un parent les

difficultés de son enfant en classe peut éveiller en lui de pénibles réflexions ou lui rappeler une foule de souvenirs. Peut-être a-t-il connu les mêmes diffi-cultés lorsque lui-même, étant enfant, n’a pas reçu le soutien nécessaire, ce qui limite sa capacité et sa confiance à pou-voir aider son rejeton? Peut-être se sait-il atteint d’un problème de santé mentale et, à vous écouter, découvre-t-il pour son plus grand malheur que son fils ou sa fille en souffrira aussi? Peut-être vous entend-il confirmer ce qu’il craint le

plus voir se produire pour son enfant? Devra-t-il malgré toute sa pudeur et par-fois sa honte à le faire vous confier de quelle maladie mentale il est atteint afin de pouvoir aider son enfant? Certains parents éprouveront méfiance et culpa-bilité et auront le réflexe de nier ou de se taire pour protéger leur enfant contre l’opinion de l’enseignant en particulier et de l’école en général. Ils craindront – et peut-être à juste titre – que leur enfant soit affublé d’une étiquette qui le suivra tout au long de sa scolarité, qu’il en fera les frais plus souvent que justifié et ce, même s’il progresse et se dégage de ses difficultés psychologiques initiales.

—Soulever une hypothèse de difficulté psychologique chez un enfant peut pro-voquer une onde de choc qui secoue une histoire familiale parfois déjà très lourde, complexe et tout à fait inconnue de l’enseignant. Comme si la fragilité psychologique que vous identifiez chez un élève n’est que la pointe de l’iceberg familial. La réaction des parents à vos propos et l’accueil qu’ils feront à vos re-commandations dépendront tout autant du cheminement qu’ils auront accom-pli en regard de leurs propres difficultés que de la délicatesse et de la manière non accablante dont vous aurez su faire preuve pour les sensibiliser à ce que tra-verse leur enfant.

Le processus de suridentificationCôtoyer des élèves souffrants psycholo-giquement mais qui sont tout de même relativement faciles de contact, comme le sont souvent les enfants inhibés, né-gligés ou anxieux, incite tout naturel-lement à se rapprocher d’eux. Que ce soit par empathie ou compassion, on a tendance à s’émouvoir du fait que de jeunes enfants traversent de telles diffi-cultés. Ils suscitent le goût de s’occuper d’eux et par un processus que d’aucuns qualifieront de contre-transférentiel, des adultes voudront prendre sur eux une part de leur souffrance. Ils se re-connaîtront en cet enfant, auront l’im-pression de pouvoir se mettre à sa place pour mieux s’imaginer ses difficultés et, partant de là, se convaincre qu’ils répondront mieux à ses besoins. Ainsi, ils s’identifieront à l’enfant en difficul-té, et parfois d’une manière excessive. Il y a alors suridentification à l’enfant. Ce processus involontaire a aussi pour conséquence de rendre plus ardus les échanges avec les parents, puisque gé-néralement, lorsque cette dynamique s’installe, ils sont perçus comme étant à l’origine des problèmes que vit leur enfant. Dans ces circonstances, c’est comme si l’arbre empêchait de voir la forêt. Ce piège nous guette tous parce qu’il est l’exacerbation d’une propension toute naturelle à vouloir aider et tenter de comprendre l’enfant souffrant. Dans le travail que l’on accomplit auprès de ces enfants, il est primordial de garder une distance relationnelle appropriée cliniquement. Ce n’est pas si simple à gérer et il est souvent utile, pour ce faire, de pouvoir compter sur l’intervention clairvoyante de collègues de confiance.

—D’autre part, le comportement de cer-tains élèves dérangeants, opposants ou hyperactifs peut entraîner le processus contraire, celui de suridentification aux parents. À subir les frasques comporte-mentales de ces gamins, le piège à re-douter est de devenir trop empathique à ce que l’on imagine que peuvent vivre leurs parents. C’est notre objectivité face à l’enfant qui peut être compromise. On

Une approche positive, à petits pas, basée sur des observations

et des faits, soulèvera l’intérêt puis la confiance des parents.

Page 50: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

perd de vue le fait que la dynamique familiale peut contribuer à maintenir le problème de comportement de l’en-fant. Il y a certes des enfants au tempé-rament moins facile ou plus exigeant que d’autres, mais chez certains, l’op-position ou l’hyperactivité signalent une dynamique familiale dysfonctionnelle. Conserver une distance raisonnable, professionnelle, tout autant avec l’enfant qu’avec ses parents, est indispensable pour maintenir notre crédibilité auprès d’eux et, ce faisant, pouvoir servir de le-vier pour les aider.

—Quand l’alliance s’effrite…Malgré toute la finesse dont vous ferez preuve, il y aura toujours quelques pa-rents avec qui l’alliance de travail sera plus difficile, imprévisible, voire impos-sible. Dans toute relation, il y a des varia-bles que l’on ne peut contrôler. Que cela dépende de leur propre fragilité psycho-logique, de leur refus de collaborer avec toute figure d’autorité, d’une histoire de vécu scolaire à couleur traumatique ou d’un trouble de personnalité, certains parents ne voudront ou ne pourront ja-mais créer une alliance de travail avec vous. Il reviendra à d’autres profession-nels de l’école ou de l’extérieur de tenter de travailler avec eux. Il faut se rappeler qu’il existe de ces barrières que même des cliniciens chevronnés ne peuvent franchir. De tout temps, dans toutes les cultures, il y a des gens, parents et en-fants, que l’on ne peut aider. Le savoir rend l’expérience plus tolérable et moins décourageante.

—conclusionIl n’est pas toujours facile de venir en aide à un élève en difficulté psycholo-gique. Sachez que la qualité d’accueil, d’écoute et de soutien que vous lui témoignez durant toutes ces heures passées dans votre classe, c’est déjà beaucoup. Même si rien n’y paraît.

—Il vous faut aussi vous souvenir que la caractéristique majeure des difficultés psychologiques de l’enfance est juste-ment leur mouvance et leur plasticité.

Chez l’élève qui vit une difficulté d’ordre psychologique, la totalité de son exis-tence et de son expérience ne se résume pas à la difficulté affective qu’il traverse. D’autres sphères de sa vie fonctionnent bien. Ces difficultés de l’enfance sont heureusement souvent transitoires, autorisant bien des espoirs.

50+5

1

Conserver une distance raisonnable, professionnelle, tout autant avec l’enfant qu’avec ses parents, est indispensable pour maintenir notre crédibilité auprès d’eux et, ce faisant, pouvoir servir de levier pour les aider.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 51: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 52: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LangueS

Le meLS accePte La nouVeLLe orthograPhe au PrimaireLe ministère de l’Éducation a confirmé par lettre en juin dernier que les élèves du pri-

maire ne sont plus pénalisés s’ils utilisent la nouvelle orthographe dans les épreuves

d’écriture (examens ministériels). Vous trouverez ci-dessous les détails de cette lettre.

Nous vous présentons également de nouveaux outils destinés aux enseignants (ensei-

gnement de l’orthographe et sa correction), dont certains sont même accessibles aux

parents et à tout le personnel de l’école.

Depuis que le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) a fait savoir qu’il acceptait la nouvelle orthographe au primaire, de nouveaux livres sur l’ortho-graphe destinés aux enseignants et aux parents sont arrivés en librairie : une liste de mots augmentée et commentée avec la présentation plus détaillée des nouvelles rè-gles; un livre d’exercices avec corrigés et questions-réponses; un guide pratique tout en couleurs, en langage simple et clair, qui présente les mots les plus fréquents et compare l’ancienne et la nouvelle orthographe dans des tableaux; etc. La lettre du meLS Voici d’abord les détails de cette lettre du 5 juin 2009, dont j’ai reçu copie. Signée par la directrice générale à la Direction générale des services à l’enseigne-ment du MELS, cette lettre au sujet des rectifications orthographiques « en situation d’examen au primaire et au secondaire » dit ceci : « Vous constaterez prochainement qu’une indication apparaîtra désormais dans les documents d’information relatifs aux épreuves d’écriture de 4e et de 6e année du primaire et à celles de 2e et de 5e année du secon-daire ainsi que dans les guides qui accompagnent les épreuves. Cette note précisera que, dans le contexte des corrections effectuées par le Ministère, les élèves ne sont pas pénalisés s’ils utilisent l’une ou l’autre graphie. » Voilà enfin une information claire de la part du ministère, qui aidera à dissiper la confusion qui régnait jusqu’à maintenant. Le MELS accepte bel et bien la nouvelle orthographe dans ses examens, tant dans ses épreuves du primaire que celles du secondaire. Passez le mot dans votre école! Si vous souhaitez obtenir une copie de cette lettre du MELS, contactez-moi par cour-riel, je vous la ferai parvenir. Dans le paragraphe suivant de cette même lettre, la directrice générale dit ceci : « Je souhaite que cette précision, quant aux balises que le Ministère utilise pour la correction de ses épreuves, indique aux milieux scolaires que la voie de la souplesse est à privilégier en cette matière. » Bravo! L’époque du statuquo dans la correction est révolue. La période déplorable des tergiversations et hésitations des années précédentes est maintenant terminée : le Ministère vient enfin de franchir le pas vers la « souplesse » au regard de la nouvelle orthographe. Il était temps, puisque les ministères de l’Éducation des autres pays francophones (Belgique, France, Suis-se) et d’autres provinces (Alberta, Saskatchewan) avaient déjà donné le feu vert à leurs enseignants et enseignantes. Le souhait exprimé dans cette lettre du MELS s’adresse aux milieux scolaires, donc à vous qui enseignez, aux conseillers et conseillères pédagogiques, aux commissions scolaires et directions d’école. Ce souhait du MELS indique que la voie de la souplesse est à privilégier dans vos

milieux : informez-en tout le personnel de votre école et de votre commission scolaire, mettez le sujet à l’ordre du jour de votre prochaine réunion d’équipe, mettez en place des documents d’infor-mation, adoptez et diffusez une politique claire concernant la correction de l’ortho-graphe et son enseignement. Le site www.nouvelleorthographe.info regorge d’informations gratuites pour votre per-sonnel : règles, exercices, etc., et tout le monde peut s’abonner sans frais à la liste de diffusion du GQMNF (Groupe québécois pour la modernisation de la

norme du français) pour recevoir gratui-tement des informations par courriel : il suffit d’écrire à [email protected]. L’organisation d’une formation dans votre école lors d’une demi-journée pé-dagogique est également offerte sur de-mande (contactez le GQMNF à ce sujet).

—De nouveaux outils pour vousVous connaissez probablement déjà la petite brochure Le millepatte sur un né-

chantaL contant chargée de cours en grammaire du français écrit à l’uqaM Linguiste responsable de la révision du Bescherelle – L’art de conjuguer [email protected]

52+5

3

Le MELS souhaite que ses nouvelles directives indiquent aux milieux scolaires que la voie de la souplesse est à privilégier en matière de nouvelle orthographe.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 53: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

nufar : vadémécum de l’orthographe recom-mandée. Elle est maintenant remplacée par son grand frère, le Grand vadémé-cum de l’orthographe moderne recomman-dée : cinq millepattes sur un nénufar. En librairie depuis la rentrée scolaire, ce livre au bas prix de 9,50 $ devient la référence en orthographe. La liste de mots est beaucoup plus complète (plus de 5000 mots au lieu de 2000), et cha-que mot est commenté afin d’expliquer le changement qui le touche. Ayez-le sous la main, il vous sera très utile en cas de doute lors de la correction et pour vous familiariser avec les différents phé-nomènes de la nouvelle orthographe. Les nouvelles règles y sont expliquées de façon plus détaillée. Voyez le site www.dechamplain.ca/livres.

—Pour les enseignants, les intervenants en adaptation scolaire, les secrétaires d’école, les bibliothécaires, le personnel de bureau, les étudiants et les parents, un livre accessible à tous et très coloré donne un aperçu complet mais simpli-fié de la nouvelle orthographe. Intitulé Les rectifications de l’orthographe du fran-çais et publié par ERPI (12,95 $), ce petit livre de 64 pages insiste sur les mots du

vocabulaire courant de tous les jours, et la présentation est dynamique : bulles de couleurs, encadrés, petits tableaux comparatifs, résumé au bas de chaque page de droite pour une lecture rapide ou ciblée. Pensez à en parler notamment aux parents de vos élèves et à toutes les personnes qui veulent une initiation à la nouvelle orthographe sans les aspects trop didactiques. Il plaira à tous ceux et celles qui ne sont pas spécialistes de la langue écrite (notamment à vos élèves).

—Pour les enseignants et les conseillers pé-dagogiques, deux outils plus didactiques sont offerts sur la nouvelle orthographe.

—D’abord, le guide complet Connaitre et maitriser la nouvelle orthographe : guide pratique et exercices, qui se caractérise par l’abondance d’exercices, de corri-

gés et d’explications complémentaires. Si vous n’avez pas encore mis la main sur cet outil pour les enseignants et enseignantes, si votre école n’en a pas d’exemplaire, procurez-vous la 2e édi-tion en librairie depuis juin dernier (23,95 $). Les règles et les exercices sont les mêmes que ceux de la 1re édition, mais la section des informations prati-ques a été mise à jour.

—Ensuite, l’ouvrage La nouvelle orthogra-phe en pratique, publié par De Bœck (31,95 $), présente une comparaison de l’ancienne et de la nouvelle orthographe. Le livre est divisé en cinq grandes par-ties : le trait d’union, le singulier et le pluriel, l’accentuation, la simplification des graphies étrangères, la simplifica-tion des consonnes doubles. Chaque partie est ensuite segmentée finement en de nombreuses sous-listes thémati-ques, allant même au-delà des graphies rectifiées, afin de bien montrer les phé-nomènes orthographiques qui les che-vauchent ou les côtoient en parallèle. Ce livre plaira aux mordus du français et de l’analyse linguistique de l’orthographe.

—Des ateliers-formationsIl appartient aux enseignantes et aux enseignants d’être bien informés de l’évolution de l’orthographe. Les livres présentés ci-dessus vous y aideront. Vous pouvez aussi assister à une formation sur la nouvelle orthographe. Lors du congrès de l’AQEP (3 et 4 décembre 2009 à Mon-tréal), je donnerai un atelier-conférence pratique. Il suffit de vous y inscrire. Voyez l’horaire sur le site de l’AQEP ou dans son programme. Je donnerai éga-lement un atelier-conférence ouvert au grand public le lundi soir 30 novem-bre 2009 pour ceux et celles qui ne peu-vent se libérer le jour (informations au 514-343-2020). D’autres spécialistes en orthographe offrent des formations dans toutes les régions du Québec. C’est le cas notamment de ma collègue Hélène Du-mais, linguiste. Contactez Mme Dumais (www.hdumais.com) pour planifier une formation dans votre région.

—La nouvelle orthographe est arrivée au primaire : parlez-en!

Le Grand vadémécum de l’orthographe moderne

recommandée remplace le petit Millepatte sur un nénufar.

Ce Grand vadémécum est la liste la plus complète à ce jour

en nouvelle orthographe (liste augmentée et commentée).

Page 54: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LangueS

Marie BarguirDjian Déléguée pédagogique gallimard/l’école des loisirs

DécouVrir cLauDe Ponti

il y a parmi les créateurs de livres pour enfants, certains personnages dont l’univers est unique, inimité et incomparable. Ils sont rares et bien souvent dérangent légère-ment les adultes que nous sommes parce que leur monde « nous échappe un peu » et que nous avons l’impression d’être pris au dépourvu pour expliquer aux enfants le sens de telle illustration ou de telle phrase. Mais c’est exactement là que se situe le défi à relever : ne pas chercher à tout expliquer; être capable de se laisser aller dans l’uni-vers proposé et attendre que ça nous « parle » comme on écouterait une œuvre musi-cale ou on regarderait un tableau. Et surtout, surtout : faire confiance aux enfants qui comprendront ce qu’ils voudront bien comprendre, qui se feront une place à travers les émotions ou les actions des personnages, en toute liberté. Cela ne fait-il pas aussi partie du processus de la lecture que de développer cette intuition à comprendre et à découvrir les symboles? Claude Ponti est l’un de ces artistes. Son œuvre (quelque 80 albums, pièces de théâtre et romans) offre aux enfants de tous les âges cette li-berté de « circuler » dans l’œuvre, jouant entre un texte et des illustrations qui se ré-pondent sans cesse. Mais attention! Liberté ne signifie pas qu’on erre au fil des pages au hasard et sans soutien. Le soutien, c’est souvent la trame d’une histoire qui ressem-ble à un conte : un personnage rejeté ou en fuite, vivra des aventures délirantes au cours desquelles les éléments qu’il rencontrera le transformeront et l’aideront à sur-monter ses difficultés (on aborde sans cesse chez Ponti le thème de la métamorpho-se). Le soutien c’est aussi l’idée de l’enfance : « On est tous des enfants qu’on soit bébé ou vieillard, car on ne peut dissocier notre existence de notre histoire ». Il faut se sentir libre penseur comme un enfant pour entrer dans les livres de ce créateur. Il y a peu de référence dans les livres de Claude Ponti même si l’on sent toute l’admiration qu’il porte à Hans Christian Andersen et à Lewis Carroll; peu de référence puisque, dit-il, les enfants n’en ont aucune au départ. Ils se créeront eux-mêmes leurs points de repères.« Oui et oui, j’aime les enfants. Nature. Sans sucre ni sel ajoutés, non bat-tus non lissés ». Comment entrer dans l’univers de Claude Ponti si l’on veut faire un travail en réseau dans la classe ou tout simplement le présenter aux enfants? Parmi les nombreux ouvrages, tâchez de vous procurer un échantillon représentatif de sa production (vous trouverez plus bas les titres de quelques incontournables) : il y a des très grands livres, d’autres au format à l’italienne (en largeur), des carrés, des tout-petits (la série des Tromboline et Foulbazar), des cartonnés. Laissez-les circuler en classe, vous verrez que les enfants seront fascinés par le style unique de Ponti, plein d’humour et d’éléments intrigants. Laissez-les prendre possession de son univers. Choisissez un livre à raconter en lecture partagée. (Un conseil, lisez-le vous-même

d’abord pour ne pas être surpris par les jeux de mots!) Proposez aux élèves de faire des repérages pour comparer des éléments importants : les personnages (l’univers de Ponti est très peuplé et l’on retrouve des personnages d’un livre à l’autre!); les éléments étranges (comme ce Tsr’Bolog de Georges Lebanc que l’on retrouve aussi ailleurs); les lieux des histoires parfois insolites (forêts, champignons, théière, maisons diverses); les thè-mes (famille, chagrin, découverte, rejet, entraide, métamorphose, etc.); les émotions (très diverses comme les enfants, on rit, on pleure); les mots inventés ou les mots valise (Le travail sur les mots valise (par exemple, Foulbazar venant de fout le bazar) permettra notamment aux enfants de mieux apprécier le texte dès qu’il en auront compris la composition.); les codes-barres (tous très inventifs au dos des livres).

Tirez des conclusions sur les éléments constants dans l’œuvre de Ponti. En abordant ces différents points, vous aurez déjà bien fait le tour de ce créa-teur qui ne cesse de surprendre le lec-teur. Reste un autre élément que vous pourrez faire découvrir aux enfants : la notion de PASSAGE. Dans les livres de Ponti, les personnages passent d’un état à un autre, d’un monde à un autre. Ils empruntent des branches, des cailloux, des pas imaginaires dans le ciel, des échelles. Ces éléments plutôt à l’horizontal contrastent souvent avec ceux qui sont à la verticale : Okilélé s’enracine pour faire l’arbre mais s’élargit de plus en plus quand poussent ses branches; la nouvelle maison de Schmélele s’élève tant dans le ciel que l’on doit alors tourner le livre pour mettre l’image à la verticale.

—J’ai appris que Claude Ponti viendrait au salon du livre de Montréal en novembre 2009. Ce sera un rendez-vous exception-nel avec cet artiste si engagé auprès des enfants. Preuve en est le MUZ, projet d’un musée virtuel de l’art des enfants, un musée rassemblant des œuvres de tous genres et de toutes provenances. Peut-être récoltera-t-il lors de son séjour des œuvres de nos petits québécois?

—Quelques incontournables

Pour les plus jeunes : la série des • Tromboline et

Foulbazar, L’Album d’Adèle

Pour les 6-10 ans :• Blaise et le château d’Anne

Hiversère, Okilélé, Pétronille et ses 120 petits, Ma

Vallée, L’écoute-aux-portes, L’arbre sans fin, Schmé-

lele et l’Eugénie des larmes, Le tournemire

Pour les 10-12 : Le catalogue de parents, Georges •

Lebanc, L’Almanach des Oroulboulouks

Pour en savoir pluswww.ecoledesloisirs.f• r. Procurez-vous aussi le

livret Ponti (gratuit) chez votre libraire.54+5

5a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 55: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 56: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

LangueS

Susciter la motivation pour la lecture, proposer des tâches signifiantes d’écritu-re, éveiller suffisamment l’intérêt sur un sujet pour donner le goût d’en connaître plus et de rechercher l’information nécessaire pour produire un texte rigoureux sont des aspects essentiels pour capter l’attention des élèves et leur donner le goût de s’investir dans une tâche, mais ce n’est pas toujours facile de trouver l’idée du siècle. Et si la littérature de jeunesse pouvait nous aider? Il existe une multitude d’œuvres de littérature de jeunesse dans lesquelles il est question d’événements sociaux, historiques ou culturels qui peuvent nous servir lorsque vient le temps de créer une situation d’apprentissage motivante pour les élèves. Ces œuvres, de très grande qualité, sont une mine d’or pour l’enseignant qui souhaite aborder un thème particulier. Description du projet Une situation d’écriture sur le thème de la guerre peut répondre à plusieurs objectifs du programme de français, tout en éveillant l’intérêt pour certains événements historiques et en offrant aux élèves une ouverture sur le monde. Le thème de la guerre favorise aussi la pratique du dialo-gue et peut alors très bien être exploité en éthique et culture religieuse. La situation d’apprentissage présentée ici est le compte rendu d’un projet qui a été vécu dans une classe de 6e année. L’amorce du projet visait à comprendre et à interpréter l’implicite dans l’album Koletaille, qui a comme caractéristique de mettre en scène un char d’assaut comme personnage principal. En cherchant à l’identifier, les élè-ves ont pris connaissance de l’œuvre qui a été lue en maintenant les images ca-chées. En équipe, ils ont eu à confronter leurs hypothèses avant d’en arriver à une réponse à présenter au reste du groupe. Il a été intéressant d’entendre le compte rendu de leur discussion. Sans les illustrations, il leur a fallu interpréter les indices du texte pour en arriver à démasquer le personnage. Seul l’indice qui mentionne les chenilles de Koletaille permet à coup sûr de dire de quoi il s’agit, mais il n’était pas évident que les élèves allaient le découvrir sans discussion et questionnement. Une seule équipe a réussi à relever cet indice. La relecture de l’album par l’ensei-gnante, à l’aide des images cette fois-ci, a permis de comprendre le sens du texte et d’identifier le personnage, un char d’assaut. Les élèves ayant réussi à identifier Koletaille étaient très contents de leur réussite. À la fin de l’album, on retrouve plusieurs informations qui permettent aux élèves de prendre conscience des coûts rattachés à l’équipement militaire et de tout ce que l’on aurait pu faire avec cet ar-gent pour construire la paix. Ces informations ont suscité une discussion très inté-ressante qui a aiguisé la curiosité des élèves pour le thème de la guerre. Plusieurs œuvres magnifiques ont été écrites sur les différentes guerres. Il y en a pour tous les goûts et pour tous les niveaux. Le choix des albums en a donc été facilité (voir tableau 2). Ces œuvres amènent les élèves à connaître des événements historiques, mais aussi à comprendre les émotions vécues par les gens qui ont connu la guerre et à réaliser les conséquences des différents conflits, aspects essentiels à l’étude de

l’histoire selon Forges (2004). À travers des albums tels que La grande peur sous les étoiles, ou Rose Blanche, les lecteurs comprennent que la guerre touche du-rement les enfants. Le tricycle de Shinichi et Hiroshima deux cerisiers en fleurs trai-tent de la bombe atomique. Dans Fidèles éléphants, c’est du triste destin des élé-phants du zoo d’Ueno au Japon lors de la Seconde Guerre mondiale dont il est question. Un brave soldat raconte l’his-toire de jeunes canadiens qui partent au front lors de la Grande Guerre et qui, confrontés à la dure réalité, s’aperçoi-vent qu’il n’y a rien d’amusant à vivre la guerre des tranchées. Parmi ces albums, on retrouve aussi l’incontournable his-toire d’Anne Franck ou encore le désor-mais célèbre récit de La trêve de Noël.

—une période d’exploration d’albums a été prévue pour connaître le plus possi-ble d’œuvres en lien avec la guerre. En équipe, les élèves se sont vu attribuer deux albums. Certains albums étant plutôt résistants1, la lecture s’est faite en équipe de 4 ou 5 élèves. Certaines équi-pes ont choisi de lire l’œuvre à haute voix, à tour de rôle. D’autres ont plutôt opté pour la lecture par un seul ou par certains élèves seulement. Comme cer-tains ne sont pas à l’aise avec la lecture à haute voix, ils n’étaient pas obligés de le faire. Par contre, le fait de le faire par petites équipes et non en grand groupe, a donné le goût à presque tous les élèves de se risquer. Cette lecture partagée leur a permis de se consulter pour en arriver à bien comprendre le texte et à discuter

éLaborer une Situation D’aPPrentiSSage À Partir De La Littérature De JeuneSSe

juLie st-onge enseignante en 6e année collège Bourget [email protected] Montésinos-geLet professeure agrégée université de Montréal [email protected] Dupin De saint-anDré chargée de cours et doctorante université de Montréal [email protected]

56+5

7a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 57: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

de leur façon de l’interpréter. Dans un ta-bleau, ils devaient noter les informations recueillies en ce qui concerne les faits historiques, les aspects de la guerre mis de l’avant, ses conséquences, le point de vue selon lequel elle était présentée et les émotions ressenties par les personnages. En préparation au travail d’écriture, cette partie avait comme objectif de leur faire découvrir différentes façons de décrire les événements et les émotions. Au préala-ble, une modélisation par l’enseignante, à partir de l’album Koletaille, a été présen-tée de façon à permettre une meilleure compréhension du travail d’analyse à effectuer. Il a aussi été proposé aux élè-ves de repérer le lexique spécifique à la guerre au cours de leurs lectures. Lors de la mise en commun des découvertes, une carte d’exploration a été créée où l’on a noté des mots tels que bombe, camp de concentration, réfugié, militaire, soldat, occupation…

L’exploration des albums a permis d’ana-lyser les illustrations. Une étude attentive de l’image permet de décrire comment les conséquences de la guerre y sont re-présentées. Le style des illustrateurs étant différents, les élèves ont pu comparer les diverses techniques utilisées dans les albums. Lors de la présentation au reste du groupe, les détails de l’image ont été mis en évidence. Les élèves se sont appli-qués à parler des dégradés de couleurs, de l’émotion dans l’image, de la dureté des événements représentés. Même si ce n’était pas facile, les orateurs ont fait la présentation de l’album en mention-nant les éléments essentiels seulement. À voir le sérieux avec lequel ils ont fait leurs présentations, il était évident qu’ils avaient pris plaisir à leurs lectures. L’in-térêt pour le sujet a été tel que les élèves ont eu envie de lire les œuvres présen-tées par les autres équipes. Comme les albums ont été à leur disposition assez longtemps, tous ont eu la chance de lire

ceux qui les intéressaient. Ce type de projet permet en même temps de déve-lopper l’habileté à apprécier des œuvres littéraires sans que, comme le mention-ne Devanne (2006), l’enseignement de la littérature devienne une nouvelle « dis-cipline scolaire ».

—L’intention d’écriture de ce projet était de se placer dans la peau d’un personnage ayant vécu la guerre et d’en raconter, à la première personne du singulier, 2 ou 3 journées. Il s’agissait alors de l’écriture d’une partie d’un journal personnel. Le réseau littéraire sur le procédé d’écriture

anneze

Le 3 janvier Cher journal, J’ai peur. Papa m’a expliqué pourquoi il m’a fait revenir de l’école plus tôt. Il m’a dit que Tante Nadja a vécu la guerre dans son village pas plus tard qu’hier. Elle habite à quelques kilomètres seulement de chez nous. Je ne veux pas que la guerre vienne dans notre village. Papa m’a aussi dit que deux hommes lui ont dit que je devais partir pour la guerre. Pourquoi moi? Pourquoi pas papa? Je suis tellement triste de devoir partir, car il y a des tonnes de personnnes qui vont me manquer : maman, papa, frérot, mes amis, ma petite amie et toi, mon cher journal. Au revoir. extrait du journal de Dorian

Le 1er mars Cher Charlot, Aujourd’hui, c’est mon anniversaire et j’ai 11 ans, mais ce n’est pas pour ça que je t’écris. C’est parce que l’école est fermée. L’école est fermée à cause des bombarde-ments que l’on a entendus. Il y a madame Trandé qui a fait une crise cardiaque. Mon ami David a su que les Nazis allaient arrêter tous les Juifs. Quand je suis arrivé, maman m’a dit de ne pas faire de bruit et de lui donner tous mes vêtements pour qu’elle puisse mettre l’étoile jaune dessus. Simon extrait du journal de kyra

Le 3 mai Ce matin, nous avons reçu une lettre de mon père. Elle disait qu’il allait bien et qu’il pourrait revenir bientôt du front, car son contrat allait bientôt finir. Ma mère était si contente des bonnes nouvelles qu’elle sautait de joie. Mais le bonheur n’a pas duré longtemps, car quelques mi-nutes plus tard, nous avons entendu des coups de feux. Des hommes se battaient dans les rues. Je déteste la guerre! extrait du journal d’alexis

tableau 1 : résumé de la situation d’apprentissageQuelques critères d’évaluation travaillés au cours du projet

amorce

1 période de 75 minutes

Extraire des éléments d’information explicites et implicites pertinents

(Sélectionner, dégager, établir des liens)

exploration d’albums

2 périodes de 75 minutes

Expression de sa propre interprétation d’un texte (Reformuler, expliquer,

préciser, confronter, justifier sa compréhension)

exploration de romans de

type journal personnel

2 périodes de 75 minutes

Extraire des éléments d’information explicite et implicite dans le but de

répondre à l’intention de lecture soit : écrire une page de journal personnel

écriture du texte

3-4 périodes de 75 minutes

Organiser le texte de façon appropriée (Rédiger de façon claire et

cohérente un texte qui répond à l’intention de lecture)

tableau 2 : Liste des œuvres utiliséesQuelques œuvres utilisées pour le projet

album utilisé pour l’amorce : Koletaille, Sylvie Pinsonneault et Lino, Les 400 coups, 2002

Œuvres sur la Première guerre mondiale

Au temps de la Grande Guerre

Ginette Hoffmann et René Ponthus

Casterman Jeunesse, 1998

La trêve de Noël

Michael Morpurgo et Michael Foreman

Gallimard jeunesse, 2004

Pendant la Grande Guerre, Rose, France, 1914-1918

Thierry Aprile, Nicolas Thers et Nicolas Wintz

Gallimard jeunesse, 2004

Un brave soldat

Nicolas Debon

Les 400 coups, 2005

Œuvres sur la Seconde guerre mondiale

Hiroshima deux cerisiers et un poisson-lune

Alain Serres et Zaü

Rue du Monde, 2005

Fidèles éléphants

Yukio Tsuchiya et Bruce Roberts

Les 400 coups, 2000

Le journal d’Anne Frank, Anne Frank

Édition Définitive, Livre de poche

Première parution 1958

L’étoile d’Erika

Ruth Vander Zee et Roberto Innocenti

Milan Jeunesse, 2003

Le Tricycle de Shinichi

Tatsuharu Kodama et Judith Boivin-Robert

Les 400 coups, 2005

Rose Blanche

Christophe Gallaz et Roberto Innocenti

Les 400 coups, 1999

Œuvres sur d’autres conflits dans le monde

Alija et son chien, John Hefferman et Andrew McLean

Les 400 coups, 2006

Journal de Zlata, Zlata Filipovic

Robert Laffont, 1993

La clé, Angèle Delaunois et ChristineDelezenne

Édition de l’Isatis

On se retrouvera, Bunting Ève et Sylvada Peter

Éditions Syros, 2006

Page 58: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

était ici tout indiqué pour permettre aux élèves de se familiariser avec une écri-ture de ce type. Des romans tels que Le journal d’Anne Frank ou encore Journal de Zlata leur ont été présentés afin qu’ils puissent les observer, les analyser et en lire certains extraits. Ils ont eu envie d’écrire leur texte. L’intention d’écriture ayant été présentée au début du projet, ils ont eu suffisamment de temps pour s’imaginer dans la peau d’un soldat subissant les conditions humides des tranchées, d’un réfugié ayant perdu sa famille, d’une enfant juive obligée de se cacher, d’une mère prisonnière d’un camp de concentration ou encore d’une infirmière au front.

—Lors de l’écriture du texte, l’intérêt pour le sujet a amené les élèves à fouiller dans les encyclopédies, à chercher de l’infor-mation complémentaire dans les ouvra-ges documentaires, à observer la carte du monde, à relire certaines parties d’albums pour mieux comprendre un événement, à questionner les autres élèves, ou encore à faire des recherches dans Internet. Il s’agissait d’occasions supplémentaires de lire pour trouver de l’information et

de transposer par écrit leur interprétation des événements historiques. Les lectures faites au cours du projet leur ont permis de décrire les événements avec beaucoup de précision. Même si le côté historique n’a pas totalement été respecté, même si les événements n’ont pas été totalement compris, même si l’interprétation de l’histoire n’était pas toujours tout à fait juste, ils ont réussi à produire des textes vraiment intéressants (voir les 3 textes présentés en annexe). Dans leurs récits, la description des lieux, des émotions res-senties et des événements tragiques que le personnage principal a vécu dans leurs récits est la preuve que la découverte et l’analyse des albums portant sur les guer-res ont contribué à améliorer leur compé-tence à écrire.

—Écrire une page de journal personnel est tout un défi. Maîtriser l’art de transmet-tre au lecteur l’émotion du personnage, de raconter une journée sans donner précisément tous les détails de l’événe-ment, de se mettre dans la peau d’un personnage que l’on n’a pas connu, de parler d’une guerre que l’on n’a pas vécue et d’accepter de ne pas raconter

4 ou 5 années de guerre, mais bien quelques petites journées n’est sûre-ment pas simple. Toutefois, si le sujet est captivant, que l’élève considère que l’information recueillie en vaut la peine et s’il accepte le défi avec enthousiasme, les apprentissages visés par le projet se font sans mal. Chose certaine, au terme du projet les élèves étaient fiers de pré-senter leur texte et ils ont eu du plaisir à lire le recueil de tous les textes de leurs camarades de classe.

—note

Selon Tauveron (2002), une œuvre 1. résistante est

un texte qui « résiste à la lecture à cause de sa

complexité et qui nécessite donc un accompa-

gnement par l’enseignant » (p. 227).

—références

Devanne, B. (2006). Les apprentissages littérai-•

res. Québec français, 143, 68-70.

Forges, J.-F. (2004). • Éduquer contre Auschwitz -

Histoire et mémoire. ESF éditeur.

Tauveron, C. (2002). • Lire la littérature à l’école.

Hatier.

58+5

9

Technologies au servicede l'éducation

[email protected] 251-3730

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 59: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Des expériences concluantes ont été

vécues chez Monet par des équipes

d’enseignants et de conseillers

pédagogiques!

Surtout,ne pas oublier

d’appeler pour obtenir

plus de renseignements.

Dynamisez vos journées pédagogiques :

permettez à vos enseignants de découvrir la

littérature jeunesse et augmentez l’impact de

leurs projets pédagogiques pour le bénéfice

ultime des enfants, et leur plus grand bonheur !

Galeries Normandie, 2752, rue de SalaberryMontréal (Québec), H3M 1L3

Tout ça ici

ou au

Offrez à vos enseignants

une journée d’exploration incomparable

de paysages

littéraires insoupçonnés !

Librairie Monet

Section jeunesse de la Librairie Monet

Lors de ma visite

Vous visiterez la Librairie Monet en 2009..

Page 60: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

mathématiQue Science et technoLogie

yannick Dupont conseiller pédagogique en science et technologie à Laval commission scolaire de Laval co-fondateur de l’osBL Zone01 www.zone01.ca [email protected] [email protected]

mon cŒur D’enFant

il fut un jour où j’étais petit. Il fut un jour où vous aussi étiez jeunes garçons ou jeunes filles. À cette époque, je m’amusais avec des figurines, des jeux de construc-tion et une bonne dose d’imagination. Un de mes jeux préférés était mes LEGO, avec lesquels je pouvais faire ce que je voulais. Je nourrissais mon cœur d’enfant de fabu-leuses histoires : j’étais pilote d’avion, aventurier à la recherche de trésors, ou même le plus grand inventeur du monde. La limite de mon imagination dépassait, et de loin, les possibilités de mes jeux d’enfant. La robotique pédagogique, dont la trousse LEGO NXT, est l’un de ces jeux que j’aurais aimé connaître. Je me serais amusé à assembler les pièces, à suivre les plans et ajouter plein de morceaux par la suite. J’aurais voulu faire des machines qui bougent, des robots qui marchent et qui volent. Si j’avais connu ce qu’était un ordinateur, que j’aurais pu contrôler ma création en la programmant et ainsi concrétiser mes fabuleuses histoires, j’aurai été fou... comme un robot! De jeunes comme moi, heureusement, les écoles en regorgent. On les retrouve dans les salles de classe mais trop souvent aussi dans le corridor ou ailleurs! J’ai une certitude cependant : s’il y avait eu de la robotique le lundi matin ou en fin d’après-midi le vendredi, je me serais empressé de me rendre à mes cours. La moti-vation est reliée à la qualité des relations vécues à l’école et au type de projets qui y sont développés. Nul doute que la robotique touche à ces deux aspects de la motiva-tion scolaire. Nous avons entre les mains, vous et moi, enseignants et enseignantes, un outil pédagogique impressionnant et tellement motivant pour les jeunes d’aujourd’hui. Assurément, cet outil permet l’intégration de plusieurs matières qui stimulent les garçons et passionnent les filles tout autant. En tant que pédagogues, nous devrions peut-être nous y attarder davantage. nos apprenants sont friands de nouvelles technologies et la robotique répond à nos intentions pédagogiques ainsi qu’à leurs besoins kinesthésiques. tout le monde y trouve son compte! La roboti-que pédagogique exige un peu de gymnastique en classe. Il ne faut pas avoir peur de la gestion de matériel, d’aller au laboratoire d’informatique et de voir toute sa classe en action. Une fois cette étape surmontée, notre regard d’enseignant observe tout de suite que l’investissement de temps et d’efforts en vaut la peine. Les mathématiques, si nous planifions correctement nos projets, sont constamment sollicitées et mises en pratique. Il en est de même pour plusieurs notions de science et de technologie. L’élève est mis en action; il développe ses compétences de résolution de problèmes et de communication. Les défis posés par la robotique sont des prétextes pédagogiques pour intégrer d’autres matières à ce projet. En demandant aux élèves de concevoir un journal de bord, une page Web ou une présentation sur l’ordinateur, ils travaillent leur compétence de communication (ou tout simplement leur langue maternelle). La tâche est contextualisée, motivante et suffisamment complexe pour induire des ap-prentissages. Il arrive ensuite un temps où l’on souhaite que notre projet de roboti-que prenne réellement son envol. On peut alors se tourner vers les organisateurs d’une compétition de robotique. J’ai eu l’occasion de vivre cette expérience cette an-née lors de la compétition Zone01 (www.zone01.ca) qui s’est déroulée à Laval au mois d’avril 2009. Cet organisme à but non lucratif a pour but d’organiser les compéti-

tions de robotique dans la région de Montréal, Laval-Laurentides-Lanaudière. Les cofondateurs de l’organisme, mes-sieurs Frank De Luca et moi-même, avons adoré notre expérience et préparons déjà l’édition 2010.

—Cette année, cinq défis reliés à la thé-matique des Jeux Olympiques ont été proposés aux élèves du primaire et du secondaire. Les défis étaient variés et ac-cessibles à tous à condition d’y mettre des efforts et de bien s’y préparer en suivant les conseils des organisateurs. Les élèves pouvaient participer au combat de Sumo, à la course à relais, au slalom, à la navi-gation et, finalement, au très populaire lancer du poids.

—Chacun de ces défis comportaient des éléments didactiques appréciables, dont les détails sont énumérés dans le tableau apparaissant à la page 61.

—comment bien préparer sa classe à participer à une compétition de robotique? Facile!Il faut suivre et comprendre quelques étapes importantes : 1 Inscrire vos élèves à la compétition avant la date limite! (équipes de 2 à 4 élè-ves) Dans le cas de Zone01, tout est réa-lisé à partir du site Web. 2 Prendre connaissance des défis et des règlements qui s’y rattachent. Vous évite-rez alors disqualification, déception, dé-motivation et tous ces « tion » auxquels nous ne pensons pas lors de l’inscription.3 Pratiquer les défis en classe, préalable-ment à la compétition, avec vos équipes. Pourquoi ne pas organiser une compé-tition locale dans votre école? Si vous

60+6

1a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 61: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

éprouvez des difficultés avec les défis, sachez que vous pouvez recourir à nos différentes ressources. Finalement, n’hé-sitez pas à communiquer avec les organi-sateurs, ou même avec les conseillers pé-dagogiques de votre commission scolaire, ils seront en mesure de vous aider ou de vous référer aux bonnes ressources. 4 Préparer vos participants et tout le matériel nécessaire pour être fins prêts le matin de la compétition.

L’enfant qui est toujours en moi a ren-contré 50 autres de ces petits (et petites!) « patenteux » lors de cette fin de semaine euphorique de robotique le printemps dernier. J’étais plus qu’heureux d’avoir participé à cette rencontre, où parents, enseignants et élèves se sont rencontrés et où les élèves étaient à l’honneur. Au delà du jeu, ce sont les rencontres hu-maines qui rendent cette histoire si for-midable... et qui transforment les fabu-

leuses histoires d’enfance en réalité! —

Alors, serez-vous de la fête l’an prochain? Passez nous voir à : www.zone01.ca.

—Photographies

www.zone01.ca•

nom imageélément didactique

du 3e cycle du primaireélément didactique

du 1er cycle du secondaire

1 Sumo

Utilisation des machines simples (notamment les roues et les engrenages)

Expérimentation des forces et mouvements

Manipulation de fractions

Manipulation de fractions

Exploration du principe d’adaptation

Expérience aléatoire

2 course à relais

Utilisation des machines simples (notamment les roues et les engrenages)

Initiation à la variable

Manipulations mathémati-ques de base sur les variables

Initiation aux fonctions mathématiques

3 Slalom

Pratique de la mesure et du raisonnement proportionnel

Opérations sur des entiers

Utilisation de la circonférence

Pratique de la mesure et du raisonnement proportionnel

Périmètre et circonférence

4 naviga-

tion

Pratique de la mesure et du raisonnement proportionnel

Opérations sur des entiers

Utilisation de la circonférence

Utilisation du chronomètre

Pratique de la mesure et du raisonnement proportionnel

Opérations sur des entiers

Utilisation de la circonférence

Utilisation du chronomètre

5 Lancer

du poids

Utilisation des machines simples (notamment les leviers)

Exploration qualitative du principe de la gravité

Création de schémas de principes

Exploration du principe de la gravité

Page 62: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

ophéLie vincent élève de 4e année pensionnat des sacrés-cœurs st-Bruno

chroniQueS motS D’enFantS

Le jardin secretIl y a un an de cela, je suis allée au Maroc dans le désert du Sahara avec l’intention

d’en rapporter un secret, une trouvaille, ou même une découverte, peu importe.

Un jour, mes parents ont accepté que je reste seule pour quelques heures avec mon nouvel ami Babakar pendant qu’ils allaient chercher de la nourriture aux souks les plus près de notre village. Lui et moi sommes allés prendre une petite collation dans sa maisonnette. Puis, ensuite nous avons compté le nombre de chameaux qu’il y avait dans le troupeau de son père comme il le faisait à tous les jours. Nous les avons comptés au moins des dizaines de fois. Il y en avait 22. Puis, à la 11e fois, je me suis rendue compte qu’il n’y en avait maintenant que 21 et que le 22e s’en-fuyait! Il courait vers une direction qui n’avait pas l’air habitée. De toute manière, le sol était tellement aride que quoique ce soit ne pourrait y pousser. Il fallait le suivre! Nous savions bien que nos parents nous avaient interdit de quitter la mai-son mais nous avions le devoir de protéger les chameaux. Babakar et moi le suivî-mes pendant longtemps. Nous étions essoufflés, assoiffés. Car, malheur, nous avions oublié d’emporter de l’eau! Nous n’étions plus capables de le suivre ni même d’avancer tellement la chaleur qui envahissait notre corps était intense. Après une heure de marche, l’animal s’est enfin arrêté dans un jardin dont la beauté était presque irréelle. Une source d’eau chaude y coulait tranquillement, la végétation très diversifiée régnait sur les lieux, de plus, la température conservait sa douceur malgré l’insupportable chaleur qui nous avait fait tant souffrir pour arriver jusqu’ici. C’était un véritable paradis terrestre! Nous n’en croyions pas nos yeux! Nous nous sommes amusés comme des fous! Nous nous éclaboussions, nous avons même fait un petit roupillon! Puis, tout à coup, Babakar m’a rappelé qu’il fallait retourner à la maison avant que nos parents arrivent et qu’ils se rendent compte de notre disparition! Il m’a alors proposé de retourner à la maison à dos de chameau. C’est de cette façon que j’ai appris que se promener en chameau n’était pas aussi facile que ça en avait l’air (je n’irai pas dans les détails). Le chemin fut long et fatigant. Le sable nous fouettait le visage, le vent était déchainé, une tempête de sable s’annon-çait. Il fallait nous dépêcher pour ne pas en subir davantage. Quand j’ai retrouvé mes parents, je leur ai fait le plus gros câlin du monde. J’étais tellement heureuse de revoir ma famille! C’est ainsi que j’ai passé la plupart des vacances non pas avec ma famille qui m’avait tant marquée, mais dans mon fabuleux JARDIN SECRET.

P.-S. : Ne vous inquiétez pas aucune autre personne, à part vous, moi et Baba-kar n’est au courant qu’il existe, quelque part au Maroc, ce jardin miraculeux!

—SVP, si un jour vous vous retrouvez dans un endroit comme celui-ci, c’est peut-être parce que vous avez découvert mon secret. Alors, faites-moi plaisir, ne le dites jamais à personne!

62+6

3a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 63: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Apprendre très tôt dans tout le cursus scolaire quelques règles d’hygiène relation-nelle, donner quelques balises ou repères aux élèves sur la possibilité d’échanger, de partager, de mettre en commun et cela quelle que soit la matière principale en-seignée, quel que soit le groupe-classe visé, peut constituer un enjeu essentiel dans le déroulement des apprentissages, dans l’intégration des savoirs, dans l’apprivoi-sement si nécessaire, si vital aujourd’hui « au vivre ensemble ». Si nous considé-rons que l’école ne peut plus se contenter de transmettre des savoirs et des savoir-faire, mais qu’elle se doit d’initier aussi à un savoir-être, à un savoir-créer et à un savoir-devenir, nous percevons bien que cela passera par un apprentissage plus conscientisé, plus cohérent de cette démarche essentielle sur laquelle repose non seulement tout partage et tout échange mais aussi toute socialisation : appren-dre à mettre en commun! En effet, il est toujours possible à un enseignant, de français, de mathématiques, de biologie ou de musique, de réserver cinq à dix mi-nutes par semaine, dans l’un de ses cours, pour transmettre ce qu’il serait possible d’appeler les bases d’un apprentissage à une communication relationnelle fondée sur la tolérance, le respect mutuel, la réciprocité et d’où seraient exclus les rapports de force ou les relations dominant-dominé. En présentant quelques repères pour favoriser une communication sans disqualification, sans manifestations de rejet ou de violence, dans laquelle chacun des protagonistes pourra maintenir son intégrité et garder le respect de lui-même. Il n’est pas utopique de penser que les bases d’un tel apprentissage pourrait commencer dès le préscolaire en s’appuyant sur des jeux de socialisation, sur l’apprentissage d’une expression verbale qui valorise la congruence (accord entre ce qui est ressenti et ce qui est dit), la cohérence (entre ce qui est pensé et ce qui est fait), sur une alternance mieux conscientisée entre de-mander et donner, recevoir et refuser. Et, ce faisant, proposer des balises accessi-bles à chacun et surtout transmissibles, des outils simples qui donneraient la possibilité de témoigner de connaissances, d’exprimer des ressentis personnels, de partager des perceptions, des sentiments, des idées et des croyances différentes, en privilégiant l’apposition et non l’opposition, la confrontation plutôt que l’affronte-ment comme cela se fait hélas trop souvent! Il me fait plaisir d’imaginer que chaque élève pourrait réaliser, au cours de chaque année de son cursus scolaire, un ensemble de fiches, constituées par l’énoncé clair de quelques règles de communi-cation relationnelle, qui seraient illustrées par des exemples pris à partir de son vécu dans le monde de l’école, celui des loisirs ou de la famille.

Ainsi serai initié un enseignement de la communication relationnelle (celle qui nous relie et nous prolonge) dans une recherche de transversalité qui s’appuie-rait sur le fait qu’un ensemble de per-sonnes, sur un territoire donné, puisse adhérer à des modalités d’échanges et de partage reposant sur les mêmes repères. Des références communes qui permet-traient de relier et de lier ensemble des connaissances hétérogènes, donneraient plus de consistance, de cohérence aux apprentissages et surtout à l’intégration des savoirs. La transversalité, en ce sens, permettrait aux élèves d’acquérir plus de confiance en eux, renforcerait l’estime de soi, ouvrirait à plus de créativité.

—Nous savons qu’au delà d’une mise en commun, la communication permet la découverte de nos ressources et de nos limites, qu’elle stimule la rencontre avec le meilleur de soi et qu’elle nous confronte à la différence et donc à la tolé-rance nécessaire pour entrer dans la vie.

—Jacques Salomé est l’auteur de :

Minuscules aperçus sur la difficulté d’enseigner.•

Albin Michel.

Pour ne plus vivre sur la planète taire• .

Albin Michel.

jacques saLoMé psychosociologue conférencier de renommée internationale écrivain, auteur de 60 livres www.j-salome.com www.institut-espere.com

chroniQueS Je rÊVe D’une écoLe

La communication : une matière scolaire transversale par excellenceS’il y a une matière scolaire qui peut représenter la transversalité entre toutes les

disciplines, c’est bien l’apprentissage de la communication relationnelle.

Page 64: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

64+6

5

Louise groLeau enseignante au 2e cycle et étudiante au programme court de 2e cycle en orthodidactique des maths à l’uqaM pensionnat des sacrés-cœurs [email protected]

chroniQueS ViVre La DiFFérence

il s’agit du Centre pédagogique Lucien-Guilbault fondé il y a plus de 60 ans et situé sur la rue Tolhurst dans le quartier Ahuntsic de Montréal depuis 35 ans. Les premiers pas À l’origine de cette école, il y a eu un homme : l’abbé Lucien Guil-bault, père séculier, qui au départ aidait personnellement quelques élèves en les accueillant dans sa résidence. Aujourd’hui, il serait tout à fait impensable qu’un homme laïc en fasse autant. Lorsque les élèves se firent plus nombreux, il a déni-ché des enseignants tout aussi passionnés que lui et ensemble ils ouvrirent une école différente dans un sous-sol d’église. Puis, en 1947, le père Guilbault fonda son école et obtint qu’elle soit reconnue d’intérêt public. Cet abbé était un homme énergique, chaleureux, créatif et peut-être même surdoué. Vers l’âge de soixante-dix ans il acheta des ordinateurs et apprit à les programmer. Il croyait fermement qu’il y avait trois besoins essentiels à combler chez un enfant : l’intellect, le physi-que et le spirituel. Soixante ans plus tard, les éducateurs qui œuvrent dans cette école sont toujours soucieux de poursuivre la mission de ce fondateur. Lorsque je les ai rencontrés par un après-midi ensoleillé du mois de mai, j’ai pu constater combien la philosophie du père Guilbault continuait de les inspirer. Note : Dans ce texte, j’utiliserai le terme éducateur pour référer autant à l’enseignant titulaire, à l’orthopédagogue, à l’orthophoniste, à l’ergothérapeute, etc. L’école en bref Cette école accueille 140 enfants de 6 à 12 ans. Ceux-ci proviennent de plusieurs villes car ils sont généralement référés à cette école en « bout de ligne », c’est-à-dire une fois que les services offerts dans leur école ou leur commission scolaire respectives n’arrivent plus à les soutenir suffisamment. Généralement, ils ont un potentiel se situant dans la moyenne ou la basse moyenne. La majorité présente des troubles associés tels que déficience de l’attention, hyperactivité, dyslexie, dysorthographie,

syndrome autiste, troubles anxieux, dys-fonctions verbales, etc. Depuis septem-bre 2008, cet établissement reçoit des élèves avec une déficience motrice légè-re ou organique (ce qui correspond au code 33 selon la loi).

—Il y a 10 groupes de 13 ou 14 élèves qui sont classés par les éducateurs. Comme chaque élève possède un plan d’interven-tion, on le classe dans un groupe dans lequel il sera possible de le faire progres-ser (Par exemple, des garçons avec des troubles dyslexiques, ce qui permettra des interventions différenciées.).

—Mon enfant est transforméLes trois enseignants l’ont presque énoncé en chœur : leur priorité c’est l’estime de soi de ces enfants. Lorsqu’ils ouvrent la porte de leur nouvelle école, ces élèves ont habituellement une esti-me d’eux-mêmes pour le moins anémi-que. Ils ont essuyé tellement d’échecs

Lucien-Guilbault : une école qui fait la différencePour débuter cette nouvelle année scolaire, quoi de mieux que de présenter une école

où vivre la différence prend tout son sens. Je vous présenterai le point de vue de trois

éducateurs chevronnés qui y travaillent quotidiennement.

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 65: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

leur venir en aide? Pourquoi tolérer une souffrance aussi grande?

—Les trucs de Lucien-guilbault

Beaucoup de concertation entre les • éducateursDes renforcements positifs fréquents • dans la journée, la semaine ou le mois pour encourager les efforts et les réussitesUn désir partagé : faire briller les • yeux des enfantsUne pédagogie différenciée sur • mesure

—une équipe hors pairCet après-midi là, avant de quitter Lu-cien-Guilbault, j’ai croisé la directrice générale de l’établissement. Elle me disait que son équipe d’éducateurs était

constituée de professionnels passionnés et équilibrés qui avaient fait le choix de travailler dans cette école. Pour elle, cha-cun des membres de son personnel était là pour les bonnes raisons. En y repen-sant, je me suis dit : c’est certainement la clé de son succès et assurément celle qui fait la différence.

qu’ils ne croient plus en leur potentiel. Ils ont également des retards importants en lecture et en écriture. Il y a même des enfants de 9 ou 10 ans qui ne sa-vent pas lire à leur arrivée à Lucien-Guil-bault. Cela semble difficile à croire mais c’est pourtant le cas. Plusieurs d’entre eux manifestent des troubles anxieux et une panoplie de symptômes psychoso-matiques (maux de tête, de ventre, etc.). Au fur et à mesure qu’ils fréquentent ce nouveau milieu de vie, leur attitude change. Les parents le remarquent et af-firment régulièrement que leur enfant est transformé.

—Il y a certainement un lien avec le climat d’acceptation de la différence que cha-que enseignant place au sommet de ses préoccupations.

—un encadrement constantTous les éducateurs de cette école s’in-vestissent et travaillent en équipe. La concertation est quotidienne. Ils se parlent des élèves matin, midi et soir. Chaque élève possède un plan d’inter-vention qui est révisé trois fois dans l’an-née. Tous les intervenants se consultent afin de cibler des objectifs et des moyens pour le faire progresser. Tout ce qui est mis en place en classe ou à l’extérieur de la classe, a d’abord été discuté en équi-pe. Tous les intervenants, même les pro-fesseurs d’art, de musique, d’éducation physique, cherchent à mettre en valeur les talents de chacun. Chacun des élèves est reconnu et traité comme l’élève de tous les éducateurs.

—Toutefois et même si l’école respecte le régime pédagogique du MELS, le rythme est généralement moins rapide. Les éducateurs utilisent des manuels approuvés mais n’hésitent aucunement à se servir de méthodes « maison ». Ces initiatives singulières sont encouragées toujours dans le but d’aider ces élèves.

—On se trouve ici au cœur d’une pédago-gie différenciée. Par exemple, certains enseignants peuvent donner cinq ver-sions différentes d’une même dictée

ou des devoirs variés sur un même contenu. Certains intervenants du mi-lieu (orthophoniste, orthopédagogue, ergothérapeute, etc.) considèrent à cet égard leurs collègues enseignants comme de véritables magiciens. Force est d’admettre qu’il s’agit souvent d’un tour de force.

—Difficultés à l’horizonAu cours de mon entretien, j’ai deman-dé à chacun des éducateurs avec qui j’échangeais de partager leur avis sur la réalité qu’il considérait la plus difficile à vivre. Voici ce qu’ils ont répondu.Pour la direction de l’école : refuser des enfants faute de place.

—Pour une orthophoniste : établir une communication fréquente avec les pa-

rents. Plusieurs d’entre eux n’habitent pas le quartier et ne disposent pas tou-jours d’un horaire flexible pour venir la rencontrer.

—Pour un enseignant du 3e cycle : les laisser partir pour le secondaire avec la crainte qu’ils n’obtiennent pas tous les services nécessaires à leur progression.Pour une orthopédagogue : recevoir des enfants intelligents qui ne savent ni lire ou écrire et se demander : pourquoi avoir attendu si longtemps avant de

Les trois enseignants l’ont presque énoncé en chœur : leur priorité c’est l’estime de soi de ces enfants.

Page 66: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Martin Lépine

chroniQueS PaSSion: chanSonS

enseignant à l’externat Mont-jésus-MarieDoctorant en éducation (didactique) à l’université de Montréal [email protected]

66+6

7

Au 27-100 rue des PartancesPierre Lapointe, interprétant depuis ses débuts le rôle de son personnage imaginaire

de sympathique dandy du XXIe siècle, est sans contredit l’un des artistes québécois les

plus originaux.

poésie serait entièrement comblée! Cela dit, la pertinence de la chanson comme art mineur repose bien sûr dans les in-terrelations adéquates entre musique et mots, entre rythme et sons, entre poésie et orchestration, interrelations qui nous sont offertes à l’écoute de la chanson Au 27-100 rue des Partances.

—Des pistes didactiquesAvant l’écoute de la chanson. Pour pré-senter Pierre Lapointe, il pourrait être intéressant d’utiliser le site Internet du chanteur (pierrelapointe.com), site dans lequel on retrouve des extraits vidéo, des chansons, des photographies. Vous pou-vez aussi faire écouter quelques œuvres populaires du jeune auteur-composi-teur-interprète, par exemple Qu’en est-il de la chance? et Deux par deux rassemblés. Le vidéoclip de cette dernière chanson est aussi intéressant à analyser avec les élèves. Ce clip à l’allure volontairement kitsch détonne dans l’univers musical actuel. Annoncez ensuite aux élèves que vous allez écouter une chanson de La-pointe, chanson peu connue tirée de l’al-

Titre de l’album : La forêt des mal-aimésAuteur-compositeur-interprète : Pierre LapointeAnnée de publication : 2006© Les Disques Audiogramme Inc.

—Depuis l’obtention du prix d’auteur-compositeur-interprète du Festival in-ternational de la chanson de Granby en 2001, le jeune musicien réussit à créer l’événement à chacun de ses spectacles et de ses lancements de disque. Outre ses mélodies absolument accrocheuses, l’in-térêt de son œuvre réside dans la grande qualité de ses textes, alliant poésie an-cienne à des rythmes modernes. En fait, nous pourrions n’utiliser en classe que ses textes, sans musique, et l’heure de la

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 67: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

bum La forêt des mal-aimés, qui traite des rêves d’enfance. Avant l’écoute de cette pièce, intitulée Au 27-100 rue des Partan-ces, demandez aux élèves quel est le rêve de jeunesse exposé dans cette chanson.

—Après une première écoute. Faites un retour sur le rêve que l’auteur-composi-teur-interprète semble avoir brisé dans le grand cœur d’enfant de son ami. Quel était le rêve en question? Une autre chan-son de Lapointe, Tel un seul homme, hui-tième pièce de son premier album paru en 2004, propose comme refrain les pa-roles suivantes : « Et on pleure, oui on pleure la destinée de l’homme/Sachant combien, même géants/tout petits nous sommes. » Est-ce que ces paroles permet-tent de mieux comprendre le rêve brisé? Pour la deuxième écoute, donnez de nou-velles intentions en posant les deux ques-tions suivantes : Quel est l’intérêt du titre de la chanson? Quelle réponse pourrait-on donner à la question finale?

—Après une deuxième écoute. Dirigez une discussion sur le sens à donner au titre de la chanson de Pierre Lapointe. Ce titre est un des plus mystérieux de la chanson québécoise. Quelle est cette adresse? Est-ce un lieu qui existe? Qu’est-ce que la rue des Partances? Existe-t-il des sy-nonymes au mot « partance »? De plus, tentez avec les écoliers de répondre à la question répétée trois fois à la toute fin de la chanson : « Me pardonneras-tu mes maladresses d’enfant? » Quelles

pourraient être ces maladresses? Est-ce que l’auteur sera pardonné?

—En guise de prolongement. Cette chan-son sur les rêves d’enfance brisés peut servir de prétexte pour rédiger un court texte sur les rêves et les désirs des élè-ves. Vous pourriez aussi leur demander de composer un titre à leur rédaction qui reprendrait une formule de type « adresse de maison » en essayant de créer une telle adresse de façon origi-nale. Par ailleurs, l’article « J’ai souvenir encore » paru dans Vivre le primaire de l’été 2009 proposait un travail d’écritu-re sur le plus vieux souvenir des élèves. Il pourrait être bénéfique d’établir des liens entre ces deux activités d’écriture, dont l’une porte un regard sur le passé (vieux souvenir) et l’autre se projette dans l’avenir (rêve d’enfance).

—Dans le lecteurL’hiver prochain, nous saluerons Frédé-ric de Claude Léveillé par l’entremise du Plus beau voyage de Claude Gauthier, deux classiques de la chanson québécoi-se qui s’appellent et se répondent.

—Discographie de Pierre Lapointe

Sentiments humains• (2009)Les vertiges d’en haut • (2009)En concert dans la forêt des mal-aimés • avec l’Orchestre Métropolitain du Grand Montréal (2007)2x2• (2007)La forêt des mal-aimés• (2006)Pierre Lapointe• (2004)

Au 27-100 rue des PartancesParoles et musique : Pierre Lapointe© Les Disques Audiogramme Inc.

Au 27-100 rue des PartancesJ’ai revu mes tristesses d’avantBrisé mes bonheurs présentsToujours les mêmes gestesToujours le même enfantQui détruit tout, de peur d’être géant

Et je vais au lendemainEn sachant que rien n’iraAussi loin que mes amours d’à présentEt je sais bien que demainIra peut-être moins bienMais je n’aurai qu’à penser au passé

Tu sais celui qu’on s’est bâtiÀ coup de rires et de joiesCelui qu’on s’est donné le droit d’habiterTu sais celui qu’on a souvent touchéDu bout de nos doigtsCelui qui a grandi entre toi et moi

Au 27-100 rue des PartancesJ’ai brisé ton grand cœur d’enfantQui rêvait d’être géantToujours les mêmes gestesPlus jamais le même amantMe pardonneras-tu mes maladresses d’enfant?Me pardonneras-tu mes maladresses d’enfant?Me pardonneras-tu mes maladresses d’enfant?

Page 68: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

chroniQueS rat De bibLiothèQue

juLie st-pierre enseignante agente de développement pédagogique au MeLsauDrey cantin enseignante école st-joseph (Montréal)caroLine tringaLi enseignante école pie-xii (st-Léonard)

Habituellement, je profite de cette chronique pour présenter une maison d’édition québécoise qui offre des livres jeunesse. Mais il est de ces éditeurs incontournables et universels que l’on se doit de connaître si l’on veut mettre les enfants en contact avec la très grande variété de la littérature francophone. Je veux parler de Gallimard jeunesse et de l’école des loisirs. Ces deux grandes maisons d’édition ont publié de grands auteurs tels que Maurice Sendak, Antoine de St-Exupéry, Jacques Prévert, Tomi Ungerer, Claude Ponti et tant d’autres! C’est pourquoi, j’ai choisi de vous présenter, dans ce numéro, les multiples avantages pédagogiques qu’offrent les sites Web de Gallimard jeunesse (www.gallimard-jeunesse.fr) et de l’école des loisirs (www.ecoledesloisirs.fr). La force des éditions Gallimard et l’école des loisirs réside sans aucun doute dans leur capacité à organiser des activités littéraires telles des débats et des rencontres autour de livres, de thèmes et d’auteurs. Ces rencontres contribuent à enrichir nos connaissances en matière de littérature. Les auteurs et les illustrateurs ne sont pas seulement originaires de la France. Nous pouvons aussi lire des œuvres provenant d’artisans québécois et internationaux (Chine, Japon, Afrique, Scandinavie, Allemagne…) Si Gallimard jeunesse propose, dans son site, une section de fiches pédagogiques pour toutes les classes, l’école des loisirs quant à elle, propose, par le biais de l’école des max d’ « aller plus loin avec le livre ». Comment? En mettant à notre disposition des fiches pédagogiques, mais aussi des hyperliens touchant les sujets abordés dans les livres, des jeux et des vidéos tou-jours dans la perspective de promouvoir le livre et de prolonger le plaisir. Les li-vres sont divisés en collections selon la catégorie d’âge : bébémax jusqu’à 3 ans, titoumax de 2 à 4 ans, minimax de 3 à 5 ans, kilimax de 5 à 8 ans, animax de 8 à 10 ans et maximax de 10 à 13 ans. Avec les différents abonnements Max, vous avez la possibilité de recevoir 8 livres de belle qualité tout au long de l’année. Un avan-tage notoire est la présence de plus de 50 vidéos d’auteurs et d’illustrateurs qui ont bien voulu collaborer au site pour partager, avec les jeunes, leurs expériences et même leurs petits secrets. Ces vidéos sont facilement accessibles et peuvent être un enrichissement pour la préparation d’une leçon sur un livre en particulier ou servir à stimuler les élèves qui veulent en savoir plus sur la façon d’écrire un livre, la source des idées ou tout simplement voir en « vrai » les artisans du livre lu en classe. Dans l’espace enseignants, une fois membre, nous pouvons accéder à plus de 800 pistes pédagogiques pour agrémenter nos projets avec les livres choisis. Le site Web suggère plusieurs façons de trouver une fiche : en sélectionnant tous les livres archivés, en recherchant par thèmes ceux s’adressant aux 0 à 9 ans ou aux 9 à 16 ans. De plus, de nombreux thèmes sont suggérés dans le moteur de recher-che comme l’affirmation de soi, l’amitié, la culture/tradition, l’humour, le Moyen Âge, la protection de l’environnement, les rimes, la zoologie et j’en passe des dizai-nes! Une fois le titre d’un livre sélectionné, les suggestions pédagogiques sont

toujours nombreuses et variées. Que ce soit une entrevue écrite avec les artisans du livre, une vidéo de l’auteur, le mo-ment de l’histoire disponible en audio, des liens culturels avec les personnages ou les objets principaux du récit, chaque livre propose cinq pistes différentes pour enrichir la lecture d’un livre en classe.

—Il ne me reste qu’à vous souhaiter une rentrée stimulante en lectures inou-bliables et de nouvelles rencontres avec les auteurs francophones du monde! Bonne visite dans le site de l’école des loi-sirs (www.ecoledesmax.com).

—N’oubliez pas de visiter le Complément direct en ligne pour lire la chronique d’un album supplémentaire.

68+6

9

Gallimard ltée : pour aller plus loin avec leurs livres

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 69: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

chroniQue rat De bibLiothèQue auDrey cantin, 1er cycLe

Ce miniroman plaira autant aux garçons qu’aux filles. Pourquoi? Parce que les thèmes abordés sont palpitants : le Moyen Âge, un tournoi de princes charmants avec des épreuves très mas-culines et une princesse originale. La lecture est divisée en quatre chapitres et les péripéties sont épatantes! Même moi, j’ai été surprise par la fin de cette histoire! J’ai eu beaucoup de plaisir à lire et à regarder les petites illustrations glissées en coin ou au travers du texte. Ce miniroman est rempli d’humour et d’énergie. Dans le site www.chatoenfolie.ca, les élèves pourront voir les photos des créateurs et aussi lire les pages 5 à 11 en ligne. J’ai bien aimé cette fonction. J’imagine facilement un élève fouiner du côté des autres miniromans de la collection comme Le dragon du Royaume d’En-bas et L’âne magique du petit chevalier, avec ses parents pour choisir sa prochaine lecture.La section « jeux » permet d’apprendre les mots modernes des romans, mais aussi de simple-ment dessiner les personnages préférés des élèves et de jouer à Qui suis-je? J’espère que votre classe aura le temps de pro-fiter de l’invitation de Coquin le chat pour lui écrire un petit mot dans leur site Web. Appa-remment, il prend toujours le temps de nous ré-pondre, et même de nous relancer sur d’autres questions! Voilà un destinataire motivant pour les élèves désireux de correspondre. Je vous laisse sur quelques commentaires d’élè-ves d’une classe de 2e année de l’école Saint-Jo-seph à Montréal :«J’ai aimé ce livre parce la princesse était très drôle et qu’elle a gagné toutes les épreuves.» Nissy • « J’ai aimé ce livre parce que la princesse Altesse était très rusée. » Léa • « J’ai aimé ce livre parce que la fin était surprenante! » Jérémy • « J’ai aimé ce roman parce que je sais que l’on ne doit pas se fier aux apparences! » Audrey-Anne

Mon meilleur ami est une nouvelle série qui met en valeur les particularités de chaque élève, sans mettre de côté leurs faiblesses et, surtout, sans oublier leurs forces. Avec des titres accrocheurs comme Samuel la tornade, Kimmy la lune, La princesse Pop corn, les al-bums de cette série favorisent l’estime de soi des enfants qui peuvent sembler parfois sin-guliers par rapport aux autres. L’histoire de Frédéric est très touchante. Les élèves se sentiront concernés en début d’an-née par ses difficultés à apprendre les chiffres et les lettres. Ils comprendront rapidement aussi que Frédéric est vraiment trop mêlé pour apprendre comme les autres : il intervertit la gauche et la droite, il mélange les lettres b et d, les chiffres 6 et 9 et j’en passe. Les exem-ples de dyslexie ne prennent pas tout l’espace de l’histoire, au contraire. Vos élèves se sou-viendront davantage des qualités de Frédéric que de ses difficultés. Charlotte, sa meilleure amie, aime l’appeler Drôledegénie parce qu’il a beaucoup d’imagination, une manière uni-que de voir le monde et une façon originale pour solutionner les petits problèmes de la vie. Les illustrations sont loufoques et aident à la compréhension de l’histoire. Je vous conseille ce livre dans la section « au cas où » de votre bibliothèque de classe. Il vous sera bénéfique pour aborder cette facette d’un élève en classe. Pour aller plus loin, vous pouvez visiter le site (www.bayardlivres.ca) et cliquer sur « fiches d’activité » à la droite du livre choisi. Vous pourrez choisir entre des « activités projets » ou des « activités éclairs ». On vous y donne des idées comme distribuer aux élèves un texte où vous aurez inversé initialement les lettres b et d pour amener les élèves à réaliser la difficulté à trouver du sens dans un texte quand on vit ce genre de difficulté; les inviter à dessiner ce que représente, pour eux, être méli-mêlé pour ensuite comparer les différen-tes perceptions et y associer des émotions... Pour plus d’informations, je vous invite à visiter le Complément direct en ligne pour y lire les commentaires d’élèves de 2e année sur ce livre.

Dans cet album, vous aurez la chance de par-tir en voyage avec vos élèves. Vous rencontre-rez un jeune garçon très attachant nommé Juma. Son père est conducteur d’un camion-bus que tout le monde appelle dalla-dalla. Vous apprendrez qu’à l’époque, ça coûtait un dollar pour utiliser ce moyen de transport et que chaque passager pouvait aller où bon lui semblait. Le grand père de Juma prie avec lui afin qu’il obtienne un meilleur emploi quand il sera grand. Juma ne comprend pas pour-quoi, car il aime bien l’idée de pouvoir rou-ler en dalla-dalla en bonne compagnie! Une journée remplie d’aventures en compagnie de son père lui permet de découvrir d’autres moyens de transport comme le bateau et l’avion. C’est le sourire aux lèvres que nous terminons la lecture en rêvant de survoler les airs en dalla-dalla!Les illustrations sont simples, délicates et surtout, efficaces! Le format moyen de cet album permet facilement une lecture en grand groupe et tous les élèves pourront voir les images. Comme il y a beaucoup de dé-tails, je suis persuadée que certains voudront l’emprunter afin de prolonger le plaisir de la découverte de cet album. Ce livre peut devenir l’objet d’une exploita-tion littéraire plus poussée à l’aide de la vidéo de l’auteure, Satomi Ichikawa, disponible dans le site (http://www.ecoledesmax.com). Celle-ci nous fait partager sa passion pour les voyages, sa façon de composer une histoire (réalisant d’abord une panoplie de dessins pour ensuite réfléchir à une histoire à racon-ter), l’intérêt qu’elle accorde aux peuples dif-férents du sien et la richesse qu’elle en retire et plus encore! Les élèves seront à coup sûr impressionnés par les étapes de création de Juma, le petit garçon du récit, qu’elle décrit et présente. De plus, toujours dans le site Web, en cliquant sur l’hyperlien « pour aller plus loin avec ce livre », vous trouverez des exemples et des instructions pour fabriquer un dalla-dalla. Bonne lecture!

Le tournoi DeS PrinceS charmantS

FréDéric Le méLi-mÊLé

DaLLa-DaLLa

satoMi ichikaWa

dalla-dalla

L’école des loisirs, 2009

katia canciani

Frédéric le méli-mêlé

illustrations de christine Battuz

Le raton laveur, 2009aLain M. Bergeron

Le tournoi des princes charmants

illustrations de Fil et julie

éditions Fou Lire

collection Le chat-ô en Folie, 2009

Page 70: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

70+7

1

chroniQue rat De bibLiothèQue SanDra thériauLt, 3e cycLe

SoS, Fée en DétreSSe

DeS biScuitS Pour raDiSSon

inDie kiDD - ma granDe FamiLLe bizarre (et heureuSe)!

Voici un bijou de rire et d’inattendu qu’il faut absolument lire à vos élèves! Dans ce 4e ro-man de la série La fée Bidule, cette inventrice d’objets recyclés magiques perd la mémoire suite à une collision avec une sécheuse. Ses clients et son fidèle assistant perroquet ten-tent de l’aider à retrouver ses moyens! Marie-Hélène Vézina est une conteuse pé-tillante qui a le don de faire de la lecture une détente totale. Les personnages attachants et les termes rigolos abondent, de la brigade anti-foufoune à Johnny Gravolta, propriétaire d’un salon de disco quilles. L’auteure a même inséré ses commentaires afin de nous préve-nir, par exemple, à l’approche d’une scène éprouvante, d’un mot choquant pour les parents ou pour nous suggérer un rythme de lecture approprié pour les passages plus sportifs!On ne saurait passer à côté de la chance d’or-ganiser un concours scientifique en soumet-tant des problèmes (réels ou farfelus) à régler de façon créative par la fabrication de bidules recyclés. À titre d’exemples : empêcher un adolescent de parler au téléphone, retrouver une idée perdue, changer l’humeur du voi-sin… On écrira ensuite l’histoire dans lequel l’objet sera utilisé.En conclusion, pourquoi ne pas inviter la fée Bidule elle-même en classe? L’auteure incarne en effet son personnage lors d’ani-mations. On peut communiquer avec elle en visitant le site www.rireauxetoiles.ca, où l’on retrouve aussi quelques jeux et le 1er chapitre du livre. Nul besoin de lire d’abord à vos élèves les li-vres précédents de la série. Ils courront les trouver ensuite!

Félix Radisson-Des Groseilliers et son père partent pour une expédition de camping sau-vage. Fidèle descendant des explorateurs dont il porte le nom, le jeune garçon découvre les sensations intenses que l’on peut ressentir au contact de la forêt et de ses habitants. Il fera la rencontre de Marcus, gardien de parc expérimenté, qui lui en apprendra beaucoup sur ses ancêtres amérindiens, ainsi que de Radisson, un raton qui aime bien les biscuits gingembre-chocolat. Ce roman est un véritable appel des sens. En lisant, on peut pratiquement entendre le glissement des rames sur l’eau. Grâce au style descriptif de François Tardif, l’odeur des conifères, les pas des petits animaux et la lueur des flammes dans la noirceur de la forêt sont à portée des mots. Dans le cadre du cours d’univers social, voilà une belle prise de conscience du contexte de vie à l’époque amérindienne et au début de la Nouvelle-France. Il y a d’ailleurs un lien à faire avec les indices de la présence amérindienne relevés par Félix et son père au long du récit et avec les deux fameux explorateurs. En guise de pistes pédagogiques supplémen-taires, toute étude sur la flore ou la faune des forêts québécoises cadrerait avec cette lecture. En art dramatique, on peut créer un exercice d’interprétation basé sur les ono-matopées puisque beaucoup sont utilisées dans le livre. Et pourquoi ne pas inventer des recettes de biscuits originales pour séduire Radisson lors de la prochaine visite de Félix en forêt?

Des parents divorcés un peu « granos », une belle-mère qui fait les meilleurs desserts du monde, un demi-frère qui pose des tonnes de questions, une gardienne joueuse de did-jeridou, trois chiens, un chat, cinq poissons rouges et demi, un poisson-ange timide et deux escargots géants africains, voilà ce qui compose la famille bizarre et heureuse du 6e roman de la série Indie Kidd. Quel désar-roi lorsque son enseignante lui demande de fabriquer une carte de famille! Par des moyens loufoques, Indie tente alors de simplifier les relations entre ses parents qui sont heureux, sauf quand ils parlent l’un de l’autre. Mes élèves sont vite devenus « accros » au ton familier avec lequel Indie décrit son uni-vers. Les personnages colorés sont d’ailleurs l’occasion idéale de faire valoir vos talents d’interprète; Caitlin et son appareil dentaire qui l’empêche de fermer la bouche quand elle parle vous demandera un peu d’audace!Cette série gagne à être lue en grand groupe comme individuellement pour profiter du style de lettrage varié qui ponctue le texte. Le premier chapitre disponible dans le site de la maison d’édition (www.courteechelle.com) pourrait être projeté pour une lecture collective!En début d’année, suivez la suggestion du livre et faites réaliser à vos élèves des cartes de famille pour qu’ils vous présentent leur réalité et en discutent ensuite dans le cours d’éthique. Côté zoologique, présentez des animaux exotiques, ou mieux, faites appel à ÉducaZOO pour une visite en classe (escar-gots géants compris!).

chroniQue rat De bibLiothèQue caroLine tringaLi, 2e cycLe

Marie-héLène véZina

SOS, fée en détresse

illustrations de Bruno st-aubin

Foulire, collection rire aux étoiles

série La fée Bidule, 2009 François tarDiF

Des biscuits pour Radisson

illustrations de Marie Blanchard

éditions caractère, collection La récré, 2008

karen MccoMBie

Indie Kidd - Ma grande famille bizarre

(et heureuse)!

illustrations de Lydia Monks

La courte échelle, collection indie kidd, 2008

aq

ep V

IVR

E LE

PR

IMA

IRE,

vo

LuM

e 22

, nu

Mér

o 4

, au

toM

ne

200

9

Page 71: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Peut-être avez-vous eu le bonheur de lire Je suis fou de Vava? Si oui, vous retrouverez, avec plaisir, Vieux Os avant les événements racontés dans ce premier album. Ce dernier est le deuxième signé Dany Laferrière et Fré-déric Normandin. Dans le site de la maison d’édition, il n’est pas « coté » en fonction de l’âge. Ce livre pourrait aussi bien être utilisé au deuxième qu’au troisième cycle.Les lecteurs découvriront un pays qu’ils ne connaissent probablement pas, Haïti. Cet album leur permettra de s’ouvrir au monde. Une recherche d’informations sur Haïti pourrait être faite collectivement, chaque élève ayant une information à trouver. Les élèves pourraient chercher des informations sur la vie des enfants à Haïti et la comparer à la leur. Un nouvel élève arrive d’Haïti, pour-quoi ne pas présenter cet album à ses nou-veaux compagnons? La lecture de Je suis fou de Vava pourrait être faite avant celle de La fête des morts afin d’aider les élèves à situer les différents per-sonnages. Une discussion pourrait avoir lieu afin d’essayer de déterminer pourquoi l’auteur a écrit les livres dans l’ordre inverse de l’ordre chronologique.Les illustrations sont superbes. Les élèves pourraient être invités à illustrer un moment de l’histoire à la manière de Frédéric Nor-mandin.Sur le site de la maison d’édition, vous trou-verez une fiche pédagogique pour Je suis fou de Vava. Il y a fort à parier que nous y trouve-rons bientôt une fiche pour La fête des morts.

La FÊte DeS mortS

Seulement quelques exemplaires de ce livre pourraient permettre de vivre des cercles de lecture à faible coût puisque douze nouvelles de type polar le composent. Quatre exem-plaires permettraient à autant d’élèves de lire une nouvelle assez rapidement puisque la longueur de chacune varie de 14 à 26 pa-ges et de vivre un partage autour d’un même texte. Un autre cercle de lecture composé de quatre élèves pourrait démarrer par la suite. Ces élèves pourraient lire une autre nouvelle (ou la même) et ainsi de suite. La longueur variable des textes permet de s’adapter à l’ha-bileté à lire des élèves.Les nouvelles de type polar sauront assuré-ment piquer la curiosité de vos élèves. Que ce soit, par exemple, l’exploration d’une maison qui semble hantée, la disparition d’un chat sur un plateau de tournage, l’exploration d’une nouvelle planète où aller vivre, je suis certaine que chacun pourra y trouver un intérêt.Douze nouvelles écrites par douze auteurs différents, de belles découvertes en pers-pective. Avant chaque nouvelle, les auteurs adressent quelques mots aux jeunes lecteurs afin de situer l’histoire, d’expliquer leur sour-ce d’inspiration. Certains laissent même une adresse de courriel, voilà qui peut inspirer une réelle situation d’écriture.Les élèves pourraient être appelés à mener une enquête (comme dans les nouvelles) à propos des différents auteurs. Le résultat de ces en-quêtes pourrait être communiqué sous forme d’affiche (réaliser des œuvres médiatiques) ou encore à l’aide d’un logiciel (utiliser les TIC).

L’aFFaire eSt ketchuP

miSSion royaLe Pour rouge-babine

Ce roman plaira aux lecteurs moins expéri-mentés, les gros caractères et les illustrations rendant la lecture plus facile, plus agréable. Deuxième titre de la série, ce livre est intéres-sant. De plus, il permettra de faire découvrir le genre fantastique aux élèves.Rouge-Babine, une jeune vampire de plus de 100 ans qui ne tolère plus le sang humain, reçoit une lettre de la reine des vampires lui demandant de venir élucider des disparitions d’objets précieux qui ont lieu dans le château. C’est un privilège pour elle de s’y rendre.Une fois sur place, l’enquête commence. Par contre, Rouge-Babine doit se faire discrète afin que le bal de la reine ait lieu malgré tout et elle doit trouver le coupable afin qu’il n’y ait pas d’autres disparitions durant le bal.On retrouve, dans ce roman, quantité de jeux de mots intéressants : le bar Le Sangria, le chien Plakett, une amie qui se nomme Ma-rie-Blodie. Les élèves pourraient être invités à en inventer d’autres.À la suite de la lecture de ce roman, les élèves pourraient être invités à faire une recherche sur le sang et ses différents types comme A, O, etc. Ils pourraient trouver quel est leur type de sang. Par la suite, des statistiques sur les différents groupes représentés pourraient être dressées en classe.Je vous invite à découvrir un autre vampire particulier, Draculivre. La lecture de Un bu-

veur d’encre, aux éditions Nathan, vous ravira, j’en suis plus que certaine.

LiLi chartranD

Mission royale pour Rouge-Babine

illustrations de Marie-pierre oddoux

La courte échelle, collection Mon roman, 2009

Dany LaFerrière

La fête des morts

illustrations de Frédéric normandin

Les éditions de la Bagnole, 2009

coLLectiF De L’association Des

écrivains quéBécois pour La

jeunesse, sous La Direction De

Marie-anDré cLerMont

L’affaire est ketchup

éditions vents d’ouest, collection girouette

chroniQue rat De bibLiothèQue JuLie St-Pierre, 3e cycLe

Page 72: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

sanDra thériauLt enseignante école notre-Dame-des-victoires commission scolaire de Montréal [email protected]

chroniQueS FouinonS enSembLe

Après les vacances pendant lesquelles j’ai eu le temps de passer de bons moments,

l’automne me convie tout doucement à reprendre la routine quotidienne. Voici quel-

ques lectures faites pendant l’été. Deux d’entre elles sont d’abord destinées aux parents

mais je crois réellement qu’elles peuvent convenir, d’un point de vue pédagogique, à

un enseignant, car elles permettent de nous questionner et de modeler nos interven-

tions en fonction de l’aide et du soutien à apporter aux enfants. En premier lieu, je

vous présenterai Les devoirs et les leçons, ouvrage écrit par Mme Marie-Claude Béliveau,

orthopédagogue et psychoéducatrice, et produit par le CHU Sainte-Justine. Dans ce

livre, cette dernière apporte des réponses aux questions que beaucoup de parents se

posent sur les devoirs et les leçons. Ma seconde lecture, un livre intitulé Besoins et défis

des enfants, traite du développement et de l’éducation des enfants de 6 à 12 ans. Finale-

ment, MILMO La communication relationnelle au primaire est destiné aux enseignants

qui souhaitent conjuguer le savoir, le savoir-faire et le savoir-être pour instaurer les

meilleures conditions possibles pour permettre aux élèves de mieux apprendre.

Bonne lecture.

72+7

3a

qep

VIV

RE

LE P

RIM

AIR

E, v

oLu

Me

22, n

uM

éro

4, a

uto

Mn

e 20

09

Page 73: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

Marie-cLauDe BéLiveau

Les devoirs et les leçons, questions et réponses

pour les parents

éditions du chu sainte-justine, 2009

éLisaBeth guay et LinDa Lapointe

MILMO a communication relationnelle

au primaire

éditions impact!, 2009

gerMain DucLos, DanieLLe Laporte

et jacques ross

Vivre en harmonie avec les 6 à 12 ans

éditions enfants québec, 2009

Ce livre, comme son nom l’indique, porte sur les devoirs et les leçons mais il va plus loin, car il situe la place des pa-rents dans la vie scolaire de leur enfant. L’auteure se penche sur la pertinence et l’utilité des devoirs et des leçons, de même que sur les conditions à mettre en place pour aider les enfants à s’en-gager dans leurs travaux, etc. Le livre outille les parents pour qu’ils puissent être en mesure de mieux les aider et non de tout faire à leur place. Il répond aussi aux différentes questions que les enfants se posent. En réalité, l’élève a un grand rôle à jouer dans ses travaux scolaires mais il ne peut le faire que s’il est épaulé par ses parents et par l’ensei-gnant. Le travail de chacun est essentiel pour établir un lien école-enfant-famille harmonieux et propice à la réussite sco-laire et sociale de l’enfant et c’est ce qui ressort de ce livre très pertinent.

La communication relationnelle, si on veut la résumer, est une façon de com-muniquer pour mieux vivre avec soi et avec les autres, favorisant ainsi des rela-tions plus harmonieuses et plus authen-tiques. Cette méthode apprend à l’élève à faire des demandes claires, à écouter les autres. Comment pouvons-nous instau-rer les meilleures conditions possibles pour permettre aux élèves d’appren-dre? Les deux auteures ont trouvé une réponse à cette grande question. Pour elles, le fait d’enseigner les principes de la communication relationnelle permet de faire un pas vers la responsabilisation des élèves et la création d’un climat de classe favorable à l’apprentissage. L’ap-proche thématique MILMO fournit une série de règles et d’outils pour veiller sur nos besoins tout en développant de sai-nes habitudes de communication, axées sur le respect de soi-même et des autres. Ce guide fournit des outils visuels (45 fi-ches reproductibles) pour faciliter l’ap-propriation de la démarche proposée.

Voici la version classique de ce type de livre destiné aux parents, dans une édi-tion revue et augmentée. Avec son ap-proche interactive, ce dernier nous invite à redécouvrir (nous, les enseignants) les trois périodes clés du développement de l’enfant : l’âge de raison, de 6 à 8 ans, l’âge des règles, de 8 à 10 ans, et l’âge des héros, de 10 à 12 ans. C’est donc en passant par une meilleure connaissance des enjeux, des défis et des besoins que l’enseignant et le parent peuvent mieux soutenir les enfants. Comment stimuler le goût d’apprendre? Comment favoriser la créativité des enfants? À ces questions, comme à beaucoup d’autres, les auteurs s’appuient sur leur longue expérience pour apporter des réponses concrètes. Même s’il s’adresse aux parents, ce livre se veut un outil précieux pour tous ceux qui veulent favoriser l’épanouissement des enfants, et ce, quel que soit le type de famille d’où ils proviennent.

ViVre en harmonie aVec LeS 6 À 12 anS

LeS DeVoirS et LeS LeçonS, QueStionS et réPonSeS Pour

LeS ParentS

miLmo La communication reLationneLLe au Primaire

Page 74: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 75: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le
Page 76: Dossier spécial les relations parents enseignantsDossier spécial les relations parents enseignants Rédactrice invitée Marie-clauDe Béliveau en collaboration avec aQep vivre le

8464

a

Pour tous les niveaux du primaire

8464a_pub_vivreleprimaire_c4.qxd 02/02/09 14:30 Page 1